Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires juridiques et constitutionnelles
Fascicule 15 - Témoignages du 7 novembre 2001
OTTAWA, le mercredi 7 novembre 2001
Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, auquel est renvoyé le projet de loi C-7, Loi concernant le système de justice pénale pour les adolescents, et modifiant et abrogeant certaines lois en conséquence, se réunit aujourd'hui à 15 h 45 pour étudier le projet de loi.
Le sénateur Lorna Milne (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente: Honorables sénateurs, je constate qu'il y a quorum. Cette séance du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles nous permettra de procéder à l'étude article par article du projet de loi C-7 concernant le système de justice pénale pour les adolescents et modifiant et abrogeant certaines lois en conséquence.
Honorables sénateurs, avant que nous n'entamions la séance, je souhaite remercier tout le monde. Cette séance s'est révélée être un marathon. Nous avons entendu près de 60 témoins. Nous nous réunissons trois fois par semaine depuis un mois. Le projet de loi s'est révélé difficile et troublant.
Avant que nous ne commencions, je souhaite communiquer aux honorables sénateurs sur certains faits nouveaux. Ensuite, nous allons discuter de la façon dont nous souhaitons procéder, car je m'en remets à vous.
Depuis quelques jours, nous recevons un flot ininterrompu de cartes postales du Québec dont les auteurs demandent au comité de ne pas adopter le projet de loi C-7. Les cartes postales en question portent le nom de diverses organisations, notamment des associations d'étudiants de divers établissements universitaires et collégiaux, du Bloc québécois et d'autres encore. Aucun de ces groupes n'a demandé de venir témoigner devant nous au sujet du projet de loi en question.
Ce matin, comme peuvent le voir les honorables sénateurs, notre greffière a reçu 135 résolutions adoptées par des municipa lités au Québec, par l'entremise du bureau de M. Michel Bellehumeur, député, où elles demandent que le Québec soit exclu de l'application du projet de loi C-7. Si les honorables sénateurs souhaitent les consulter, elles sont ici.
Le sénateur Andreychuk: Les résolutions demandant que le Québec échappe au projet de loi C-7 sont-elles toutes les mêmes?
La présidente: Oui.
Le sénateur Rivest: Il y en a encore de nombreuses à venir.
Le sénateur Fraser: Peut-on savoir si Montréal, Québec et Sherbrooke figurent parmi ces municipalités?
Le sénateur Rivest: Pas encore, mais c'est en route.
Le sénateur Joyal: J'invoque le règlement. Je ne souhaite pas retarder la séance, mais j'ai remis à la greffière une lettre que m'a adressée le directeur de la Commission des droits de la personne du Québec. Tous les sénateurs peuvent en obtenir copie.
Cette lettre a trait à une déclaration qu'a faite la ministre quand elle est venue témoigner, jeudi dernier. Elle y citait un rapport de la Commission des droits de la personne du Québec sur la mise en oeuvre du projet de loi. Il importe que la lettre en question soit annexée au procès-verbal des délibérations d'aujourd'hui, car il conviendrait que les honorables sénateurs aient bien à l'esprit l'objectif de ce rapport au moment de discuter du projet de loi.
Avec l'autorisation des honorables sénateurs, je ferai la lecture de la lettre d'une page, pour le compte rendu.
La présidente: Je vous prie de le faire, mais je dois vous dire qu'il ne s'agit pas d'un rappel au Règlement.
Le sénateur Beaudoin: C'est une annonce.
Le sénateur Joyal: Je m'en remets respectueusement à votre décision.
[Français]
La lettre qui m'est adressée, datée du 6 novembre, provient du directeur du contentieux de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse du Québec.
Monsieur le sénateur,À la suite de votre demande d'information de vendredi dernier, vous trouverez ci-joint la position de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse relativement à l'application de régimes dits d'encadrement intensif aux enfants placés en vertu de la Loi sur la protection de la jeunesse (L.P.J.).
Comme vous le constaterez, cette position de la Commission ne concerne que les placements en vertu de la L.P.J. et non pas les placements en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants (L.J.C.). En effet, la L.J.C. comporte des dispositions qui prévoient et encadrent le placement dans des unités fermées de sorte que son application ne soulève pas les mêmes problèmes juridiques à cet égard.
Par ailleurs, quant à l'affaire Bois-Joly, à laquelle votre adjoint a référé lors de la conversation que j'ai eue avec lui le 2 novembre, elle soulève des procédures de deux ordres. Le premier, et le plus important, porte sur les conditions de vie restrictives de liberté dans le cas d'enfants placés en vertu de la L.P.J. Cet aspect réfère directement à la position de la Commission, que je vous envoie avec la présente, et constitue un point litigieux entre la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse et les Centres jeunesse.
Les autres problèmes soulevés par le dossier Bois-Joly sont des problèmes particuliers visant ce centre de réadaptation pendant une certaine période. On ne peut surtout pas en conclure qu'ils sont représentatifs de la philosophie d'intervention de l'ensemble des centres de réadaptation du Québec ni par ailleurs qu'ils permettent de remettre en question l'important travail qui s'effectue au Québec en matière de services de rééducations des jeunes contrevenants.
J'espère que ces renseignements vous seront utiles.
Je vous prie d'agréer, Monsieur le sénateur, l'assurance de ma considération distinguée.
Hélène Tessier, avocate
Directrice du contentieux.[Traduction]
Cette lettre établit clairement la distinction entre la mise en oeuvre par la commission de la Loi sur les jeunes contrevenants et ce qui a été mis en oeuvre dans le contexte d'un centre jeunesse en particulier, au Québec.
Le sénateur Cools: Le sénateur Joyal a lu la lettre pour le compte rendu. Elle y figure donc en français. Je suppose que la traduction y figurera tout à côté, dans le rapport.
La présidente: Je propose que nous dressions une «liste d'épicerie», une liste des articles que les honorables sénateurs souhaitent aborder dans le cadre d'une étude détaillée. Normalement, nous regroupons les articles non controversés et consacrons notre temps aux dispositions controversées.
Je ne vais interrompre personne durant cette discussion. Nous sommes prêts à rester ici jusqu'à minuit, s'il le faut, pour finir aujourd'hui.
Le sénateur Moore: L'article 38, et également l'article 50.
Le sénateur Beaudoin: J'ai quatre articles: 76, 110, 125 et 146.
Le sénateur Andreychuk: J'ai les articles 2, 19, 50 et 125. Indirectement, il y en a peut-être d'autres, mais ce sont là les principaux.
Le sénateur Grafstein: Il y a l'article 2 - pages 3 et 4 - et l'article 61, page 68.
Le sénateur Beaudoin: Vous avez parlé des articles 2 et 61, mais quels sont les deux autres?
Le sénateur Grafstein: Tout cela va ensemble. C'est l'article 2 à la page 3, certaines lignes qui se trouvent à la page 3 et à la page 4, et l'article 61.
La présidente: Et aussi l'article 2.
Le sénateur Grafstein: C'est une seule question. Tout cela est lié. J'espère que nous allons pouvoir avoir une discussion thématique.
La présidente: Il sera difficile d'avoir une discussion thématique s'il faut étudier le projet de loi article par article; nous allons donc commencer au début et regrouper ceux qui se trouvent entre deux cas particuliers. Tout de même, quand vous aurez à parler du premier, mentionnez en même temps les autres, pour que nous puissions les prendre en considération aussi. Cela permettra de réduire considérablement notre débat, du fait que nous n'aurons pas à nous répéter.
Le sénateur Cools: Je voudrais ajouter l'article 25.
Le sénateur Joyal: J'aurai deux articles moi aussi. Il y a l'article 2, qui figure déjà sur la liste - et j'ajouterais un nouvel article à la fin du projet de loi - et l'article 158 à la page 150.
La présidente: Le sénateur Joyal a mentionné l'article 158, mais ce n'est pas le dernier article. De fait, vous parlez de trois articles, n'est-ce pas, sénateur Joyal?
Le sénateur Joyal: Oui.
La présidente: Tout le monde s'est prononcé; je constate, en commençant par le début, qu'il est maintenant question des articles 2, 19, 25, 38, 50, 61, 76, 110, 125, 146, 158, et d'un nouvel article qui est proposé.
Le sénateur Beaudoin: Avez-vous noté l'article 129?
La présidente: Non, je ne l'ai pas fait.
Le sénateur Andreychuk: Certains articles sont touchés en conséquence. C'est le renvoi qui le dit.
Le sénateur Beaudoin: Pas de problème. C'est l'article 125, qui est déjà là.
La présidente: Je vais essayer de mettre cela entre les numéros.
Est-il convenu, honorables sénateurs, que le comité procède à une étude article par article du projet de loi C-7 concernant le système de justice pénale pour les adolescents et modifiant et abrogeant certaines lois en conséquence?
Des voix: D'accord.
La présidente: Adopté.
Le comité désire-t-il surseoir à l'adoption du titre?
Des voix: D'accord.
La présidente: Adopté.
Le comité désire-t-il surseoir à l'adoption du préambule?
Des voix: D'accord.
La présidente: Adopté.
Le comité souhaite-t-il surseoir à l'adoption de l'article 1?
Des voix: D'accord.
La présidente: Adopté.
L'article 2 est-il adopté?
Des voix: Oui.
Des voix: Non
La présidente: Quelqu'un a-t-il des modifications à proposer?
Le sénateur Grafstein: J'ai des modifications. Je suis prêt à en faire circuler le texte en anglais et en français. Pour accélérer les choses, je vais vous donner les modifications de l'article 2 et les modifications de l'article 61, car cela fait partie de la même question. Tout cela est centré sur la même chose; nous n'aurons donc pas à nous répéter plus tard.
J'aimerais attirer l'attention de tous sur la définition d'«infraction désignée» qui se trouve à la page 3. Pour le compte rendu, voici en quoi consiste la motion que je propose:
Que le projet de loi C-7 soit modifié, à l'article 2:
a) à la page 3, par substitution, aux lignes 32 à 36, de ce qui suit:Vous le verrez dans le document écrit. Je ne vais pas passer en revue ce qui est écrit, mais je vous l'expliquerai dans un moment. Par ailleurs, je propose également:
Que le projet de loi C-7 soit modifié, à la page 4, par substitution, aux lignes 8 à 12, de ce qui suit:
Il s'agit de remplacer certaines lignes.
La présidente: Certaines lignes des alinéas 2a) et 2b)?
Le sénateur Grafstein: Tout à fait. Vous allez voir là le texte. Pour que nous puissions faire économie de temps, je ne le répéterai pas ici. Si vous regardez la deuxième page, la motion vise également à modifier l'article 61, à la page 68, par la suppression des lignes 24 à 29, et par le changement de la désignation numérique des articles. J'expliquerai ensuite la raison de tout cela.
La présidente: Nous discuterons du deuxième article maintenant, mais nous ne mettrons pas cela aux voix. Essayons de ne pas nous perdre.
Le sénateur Grafstein: Oui, tout cela fait partie de la même question.
La présidente: Pendant que nous attendons, le moment est peut-être bien choisi pour signaler aux honorables sénateurs le fait que la greffière est impartiale. Elle est greffière du comité en entier. Les choses se dérouleraient nettement mieux si, avant de proposer des modifications comme celle-là, nous en remettions d'abord un copie à la greffière. Cela nous permettrait d'éviter, pour une bonne part de nous passer des papiers comme on le fait en ce moment.
Le sénateur Grafstein: Il y a deux modifications, mais elles portent toutes deux sur le même principe. Madame la présidente, je vais essayer d'être le plus bref possible. Je suis sûr que le comité a déjà entendu mes observations au sujet de ces dispositions.
Essentiellement, les dispositions dont il est question habilitent le lieutenant-gouverneur en conseil d'une province à réduire de 16 à 14 ans l'âge applicable en pareil cas. Ce que j'ai fait, en réalité, c'est que j'ai modifié la définition de l'infraction désignée, puis, à l'article 61, j'ai supprimé l'option. Essentiellement, cela a pour effet d'établir que l'âge applicable demeure 16 ans; et la province n'a plus le choix de réduire l'âge en question.
Sans me lancer dans un plaidoyer en bonne et due forme, je noterai brièvement les principes qui motivent ma proposition. Comme, il me semble, de nombreux témoins nous l'ont dit, l'ensemble des témoins, certes - et la meilleure formulation est celle de M. Doob - cette disposition ne se justifie aucunement ni ne s'impose. Nous avons entendu tout ce qu'ont pu nous en dire les représentants de la société John Howard et de la société Elizabeth Fry. Nous avons également entendu dire que c'est anticonstitutionnel. C'est probablement anticonstitutionnel, car ce serait une délégation des pouvoirs en matière pénale. Cela n'est probablement pas conforme à la Charte. De même, des témoignages convaincants donnent à penser que cela n'est pas conforme non plus à la Convention de l'ONU relative aux droits de l'enfant.
À la lumière de ces faits, il en va donc non seulement de la politique gouvernementale, mais aussi de la constitutionnalité du projet de loi. Je propose donc que ces dispositions soient modifiées de manière que nous n'accordions pas au lieutenant-gouverneur en conseil d'une province la possibilité de réduire de 16 à 14 ans l'âge applicable.
La présidente: Sénateur Grafstein, je crois qu'il vaudrait probablement mieux que vous fassiez la lecture de la modifica tion, pour le compte rendu.
Le sénateur Grafstein: Je propose:
Que le projet de loi C-7 soit modifié, à l'article 2:
a) à la page 3, par substitution, aux lignes 32 à 36, de ce qui suit:
«atteint l'âge de 16 ans:»;
b) à la page 4, par substitution, aux lignes 8 à 12, de ce qui suit:
«atteint l'âge de 16 ans, dans le cas où il a déjà».Essentiellement, cela invaliderait l'article 61, qui accorde au lieutenant-gouverneur la possibilité de réduire l'âge applicable de 16 à 14 ans.
La présidente: Y a-t-il des objections?
Honorables sénateurs, avant de commencer, si nous procédons par appel nominal, je signale que je vais voter.
Si vous ne souhaitez plus débattre de cette modification, l'adoptez-vous?
Le sénateur Andreychuk: D'accord.
Le sénateur Beaudoin: D'accord.
Le sénateur Buchanan: D'accord.
Le sénateur Cools: D'accord.
Le sénateur Di Nino: D'accord.
Le sénateur Fraser: D'accord.
Le sénateur Grafstein: D'accord.
Le sénateur Joyal: D'accord.
La présidente: Pas d'accord.
Le sénateur Moore: D'accord.
Le sénateur Pearson: Pas d'accord.
Le sénateur Rivest: D'accord.
La présidente: Je déclare la motion et la modification adoptées.
Y a-t-il d'autres modifications à proposer pour ce qui touche l'article 2?
Le sénateur Andreychuk: Comme vous le savez, je m'inquiète grandement de ce projet de loi et du fait qu'il ne respecte peut-être pas la Convention relative aux droits de l'enfant. La ministre, même si elle a été très prudente durant son exposé, a signalé que nous sommes partie à cette convention. Elle a précisé que nous avons signé et ratifié la Convention relative aux droits de l'enfant. La dispute, la divergence d'opinions tourne autour de l'idée pour nous d'avoir une loi habilitante qui garantit que nous respectons pleinement la convention.
En droit canadien, et je ne m'étendrai pas sur la longue tradition historique d'où cela vient, la ratification d'un traité ne signifie pas que celui-ci fait partie de notre droit national. Cela veut simplement dire que nous avons, d'une certaine façon, l'obligation morale de nous conformer aux traités internationaux que nous signons. La meilleure façon de procéder serait d'adopter une loi habilitante au sujet des conventions internationales pour garantir que notre droit national est conforme au droit internatio nal et, il est à espérer, que l'inverse est vrai.
La ministre a signalé que, à son avis, le projet de loi respecte pleinement la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant en ce qui concerne l'application des parties de la convention qui touchent la justice et les jeunes. Elle n'est toutefois pas allée jusqu'à dire qu'il s'agit d'une mesure habilitante. De la façon dont le texte de loi est actuellement formulé, il ne constitue pas une garantie parfaite à cet égard ni n'accorde à la convention toute l'importance juridique qui devrait lui revenir.
À l'ONU, nous avons mené les discussions et les négociations entourant la Convention relative aux droits de l'enfant. De fait, par le passé, nous avons insisté pour que des droits plus importants soient accordés aux enfants. Nous nous sommes souciés grandement de ce que les enfants aient droit entièrement au bénéfice de la loi quand ils se retrouvent devant un tribunal. Nous nous sommes souciés de ce que rien ne vienne altérer les droits des enfants, même pour de bonnes raisons comme l'idée d'agir dans leur intérêt.
Durant les années 80 et 90, il a été beaucoup question de la nécessité de respecter les enfants. Le sénateur Pearson en particulier s'est fait le défenseur de l'idée selon laquelle les enfants, à titre d'individus, ont des droits qui leur sont propres.
Le projet de loi renferme même un préambule où il est dit que nous adhérons à la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant. Ce n'est pas une loi habilitante. Cela ne nous lie pas à la convention ni n'indique aux tribunaux que nous avons adopté une loi habilitante.
Au mieux, comme nous le laissent voir l'arrêt Baker et d'autres décisions, les tribunaux peuvent se tourner vers le droit international pour éclairer une question et prendre en considération les obligations morales du Canada, mais cela n'établit pas, sur le plan juridique, la certitude dont a besoin, selon moi, un pays aussi évolué que le Canada et qui tient autant à ses jeunes.
Par conséquent, pour que nos tentatives d'agir soient sincères, pour être absolument certains, nous devons introduire dans le corps du texte du projet de loi un énoncé qui signale que nous avons l'intention d'être liés pleinement par la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant, hormis, bien sûr, les cas qui nous inspirent une réserve, et je ne vais pas aborder cette question pour l'instant.
Les tribunaux, comme c'est le cas dans l'arrêt Baker, se penchent de plus en plus sur nos obligations internationales, mais, à mon avis, ils ne sont pas parfaitement à l'aise dans le dossier ni ne disposent des instruments nécessaires pour trancher. Comme vous le savez, nous avons adopté une loi habilitante particulière en rapport avec le Tribunal pénal international. Notre position à l'égard de la convention en question ne fait aucun doute. Dans le cas qui nous occupe ici, je crois qu'elle demeure assez incertaine.
Je me préoccupe de savoir si nous respectons pleinement l'esprit et l'intention de la Convention relative aux droits de l'enfant, alors je veux être certain que le préambule indique qu'une loi particulière a été adoptée pour concrétiser l'adhésion à un traité particulier, mais même cela serait un peu tiré par les cheveux. Je crois que nous devons nous avancer plus et affirmer que ce projet de loi est notre loi habilitante aux fins des questions relatives à la justice chez les jeunes en application de la Convention relative aux droits de l'enfant.
Je propose:
Que le projet de loi C-7 soit modifié, à l'article 2:
a) à la page 2, par adjonction, avant la ligne 8, de ce qui suit:«2(1) la présente loi a notamment pour objet d'harmoniser le droit canadien avec la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant et doit être interprétée de la manière la plus équitable et la plus large qui soit compatible avec la réalisation de cet objet»;
b) par le changement de la désignation numérique des paragraphes 2(1) à (4) à celle de paragraphes (2) à (4) et par le changement de tous les renvois qui en découlent.À mon avis, cela signalerait clairement aux tribunaux que le législateur entend, avec ce projet de loi, se conformer à la convention en question. Les tribunaux pourraient alors étudier la convention afin de déterminer si nous nous y conformons sous tous ses aspects. Je crois que c'est le genre de choses que le Canada devait signaler.
Je ne crois pas qu'il suffise de dire: «C'est bien, nous adhérons à l'entente.» Il s'agit de donner à notre obligation l'expression juridique qui lui revient, d'en faire plus dans le contexte de notre droit, particulièrement si nous nous intéressons aux enfants. J'ai bien à l'esprit ce que le sénateur Pearson a signalé à maintes reprises au comité, quand je posais certaines questions sur les articles du projet de loi: «Nous faisons cela pour garantir les droits des enfants et pour garantir que nous respectons la convention.» En termes simples, la modification que je propose établira hors de tout doute que nous nous conformons à la convention et que les tribunaux peuvent recourir à la disposition pour s'assurer que nous respectons entièrement nos obligations à cet égard.
Le sénateur Pearson: Le sénateur Andreychuk propose une modification des plus intéressantes. J'ai tendance à être une personne très pragmatique; je ne suis pas un légaliste, un théoricien. Dans une grande mesure, je suis d'accord avec ce qu'elle fait valoir, mais cela me pose certaines difficultés. Comme je suis d'avis que, de manière générale, le projet de loi représente pour les enfants quelque chose de mieux que ce qui existe à l'heure actuelle, je suis déchiré.
Je suis sûre que le sénateur Beaudoin serait intéressé d'apprendre que je suis en train de lire Modern Treaty Law and Practice, d'Anthony Aust, aux éditions Cambridge University Press, en 2000. Cet ouvrage renferme un chapitre extrêmement intéressant sur les traités et le droit interne qui m'a aidé à mieux comprendre la différence entre le dualisme et le monisme en ce qui concerne les traités internationaux. Il explique pourquoi presque tous les pays - 53 des 57 - qui faisaient partie de l'empire à l'origine et qui font maintenant partie du Common wealth, en sont arrivés à des approches dualistes de la question des traités internationaux et internes.
Dans la conception dualiste, la constitution de l'État n'accorde aucun statut particulier aux traités. Les droits et obligations découlant des traités n'ont aucun effet dans le contexte du droit interne à moins qu'une loi vienne leur donner effet, ce qui est ce que vous essayez de dire. Toutefois, lorsqu'une loi est adoptée à cette fin, les droits et obligations en question sont intégrés au droit interne du pays.
Je jugeais le préambule adéquat, tout comme je jugeais adéquat le préambule du projet de loi C-27, qui portait sur le tourisme sexuel et qui était le premier projet de loi qui renvoyait à la Convention relative aux droits de l'enfant. Je conçois que cela puisse renforcer la chose.
Nous n'avons pas la même façon d'aborder ces questions. Le point que je souhaite vraiment faire valoir a trait à la convention elle-même et aussi à l'opinion publique canadienne.
Je me sens parfois mal à l'aise de le dire, mais je suis un sénateur originaire de l'Ontario et, à certains égards, je dois représenter les Ontariens.
Le sénateur Di Nino: Dites-vous que c'est là une mauvaise chose?
Le sénateur Pearson: Non, ce n'est pas une mauvaise chose, sauf que je ne suis pas toujours d'accord avec les politiques du gouvernement en place, en ce moment, en Ontario. Par ailleurs, je crois tout de même avoir l'obligation de refléter, dans une certaine mesure, l'opinion publique dans la province que je représente.
Comme j'ai déjà eu avec plusieurs personnes des affrontements extrêmement déplaisants au sujet de la question de la Convention relative aux droits de l'enfant, j'hésite beaucoup à aller trop vite et trop loin, mais ce n'est pas parce que je ne suis pas prêt à aller jusqu'au bout, à un moment donné. Bien sûr, je m'éteindrai peut-être avant que cela ne se fasse.
Le sénateur Cools: Quelles sont les conséquences? Nous devrions tous en être conscients.
Le sénateur Pearson: Si nous modifions le projet de loi et le renvoyons à la Chambre des communes, toute cette question va surgir de nouveau. Nous reviendrons alors à la question de l'opinion publique. Au Sénat, nous sommes des gens admirables, mais nous ne sommes pas élus. De ce fait, même si nous sommes responsables de toutes sortes de groupes, ce qui nous favorise et nous défavorise à la fois, cela limite bel et bien la capacité que je crois posséder d'agir sur tous les fronts.
Je ne sais pas si je me suis bien fait comprendre, mais voilà la tâche qui se présente à moi. J'ai l'impression qu'il y a des limites, dans ce que nous faisons, à devancer les intentions du public. Nous ne pouvons oublier cela, malgré que je comprenne très bien ce qu'essaie de faire le sénateur Andreychuk.
Le sénateur Andreychuk: Je comprends la difficulté dont il est question, mais j'ai bien pondéré les facteurs. Les gens qui souhaitent l'adoption de ce projet de loi ne sont pas nombreux. Par contre, si le projet de loi est conforme à la convention et si on peut me rassurer sur le fait que ce sera là le critère qu'appliqueront les tribunaux, alors je suis prête à inclure cet article et à l'appuyer. Dans un régime fédéral, l'exécutif a le droit de conclure des ententes de cette nature. Une fois qu'il a fait cela et que les provinces se rallient à la cause, nous devons faire notre devoir. Nous avons un devoir envers les enfants. La situation dure depuis assez longtemps déjà.
Le préambule est admirable. Il ne confère tout simplement pas le degré d'importance nécessaire à la convention en droit canadien. Si le projet de loi respecte la convention, je suis prête à composer avec nombre d'aspects que je juge difficiles d'un point de vue administratif et pratique.
Le sénateur Pearson: Selon ce qui s'est dit récemment en Colombie-Britannique, nous ne respectons pas parfaitement les dispositions du traité - nous savons que c'est loin d'être parfait -, mais on ne disait pas que le projet de loi n'était pas conforme au traité.
Le sénateur Beaudoin: C'est la première fois que nous nous conformons à la décision de 1937 du Privy Council, selon laquelle il faut légiférer pour donner effet à un traité. Cela fait partie de la Constitution. Que l'on soit d'accord ou non, c'est prévu. Nous devons légiférer, et je suis d'accord à 100 p. 100. Au moins il y aura quelque chose dans la loi qui donne effet aux traités que nous signons et auxquels nous sommes obligés de nous conformer. C'est tout ce que j'ai à dire. Je ne pourrais être plus d'accord.
Le sénateur Fraser: Sénateur Pearson, ce projet de loi me pose des difficultés. Je crains une sorte d'effet de ricochet: ayant affirmé expressément que nous mettons en oeuvre une partie donnée de la convention, le reste de celle-ci n'aurait plus le poids bien modeste qui y était et qui y aurait peut-être été accordé.
Je peux envisager les actions qui seront intentées en rapport avec plusieurs rubriques. La convention dont il est question décrit un grand nombre de droits pour l'enfant. Si nous devions produire un rapport à ce sujet, je serais heureuse de savoir que la première recommandation serait que le procureur général s'occupe sans délai d'une loi de mise en oeuvre en bonne et due forme. Une demi-mesure m'inquiéterait.
Le sénateur Grafstein: Certaines questions fondamentales ont été soulevées ici. Permettez-moi d'en parler. Nous avons cherché à savoir s'il y avait conformité de droit étant donné la formulation du texte au début du projet de loi, où il est dit que le Canada est partie à la convention et qu'il reconnaît que les enfants ont des droits, notamment ceux prévus dans la Charte, ainsi que des garanties particulières. Ensuite, nous avons entendu le témoignage de la ministre, qui vient confirmer encore que le projet de loi respecte tout à fait la convention.
J'aimerais traiter de la question de l'opinion publique en Ontario. Les honorables sénateurs se rappelleront les questions que j'ai posées au procureur général de l'Ontario quand celui-ci nous a révélé le point de vue du gouvernement de l'Ontario. J'ai dit que son point de vue ne représentait pas celui des Ontariens eux-mêmes, et il n'a pas exprimé de désaccord. Il a dit qu'il existait d'autres points de vue. L'opinion qu'a le public de l'approche du gouvernement provincial est visiblement divisée.
Nous avons entendu le témoignage des gens de la société John Howard, de la société Elizabeth Fry et celui d'autres personnes qui nous ont dit qu'il y a là de grandes difficultés.
Nous nous retrouvons devant une opinion divisée. Ce qui me rassure, c'est que nous avons également entendu dire clairement et sans équivoque que la réaction aux actes criminels commis par des jeunes de moins de 16 ans est disproportionnée, tout comme l'est la perception générale qu'ont les gens des crimes avec violence. Nous avons en main des statistiques qui démontrent que le phénomène est à la baisse. Tout le monde dit qu'il existe une différence entre la perception et la réalité à cet égard. J'aime mieux m'attacher à la réalité, plutôt qu'à la perception, et les chiffres me disent: «Ce n'est pas un problème grave. C'est un problème isolé que les médias montent en épingle.» Si c'est la question que nous devons affronter de l'autre côté, je crois que nos chances sont bonnes dans ce débat.
Je crois qu'il s'agit ici d'une modification brillante. Elle ne va pas aussi loin que le sénateur Pearson le proposerait, mais il s'agit d'une disposition interprétative. J'essaie de m'en faire une idée claire et intelligible. La modification ne dit pas que nous nous assujettissons totalement et entièrement à la convention. C'est une modification qui dit que c'est une question d'interprétation et, de ce fait, que les droits de l'enfant doivent être interprétés de la manière la plus large qui soit.
Cela me semble être un moyen terme sûr. Cela justifie la position de la ministre, car si nous nous conformons à la convention - tout ce que dit le sénateur Andreychuk, c'est qu'il faut donner à la notion de conformité une interprétation large. Tout de même, elle ne propose pas que nous mettions en oeuvre la convention sous tous ses aspects. Voilà qui devrait rassurer le sénateur Pearson.
Le sénateur Di Nino: Comme tout le monde le sait, je ne suis pas membre du comité. Je remplace mon collègue, le sénateur Nolin, qui est en voyage en compagnie du Comité spécial sur les drogues illicites.
J'ai écouté la discussion, et le sénateur Graftstein a soulevé la question que je voulais soulever moi-même, mais avec beaucoup plus d'éloquence que j'aurais pu le faire. Par ailleurs, j'aimerais parler aussi de quelque chose que le sénateur Pearson a dit.
Si, chaque fois que nous nous retrouvons devant une question controversée ou épineuse, nous nous réfugions derrière cette excuse pour ne pas agir - nous ne sommes pas élus - alors nous ne faisons pas notre travail. Il y a un pouvoir extraordinaire au Sénat. Or, nous l'exerçons rarement. Et il est encore plus rare que nous l'exercions pleinement. C'est notre devoir et notre responsabilité, si nous croyons pouvoir améliorer un projet de loi, de le faire. Nous ne rejetons pas le projet de loi. Nous soulignons au gouvernement qu'il serait possible de l'améliorer sous certains aspects; les lois du pays nous accordent le droit, le pouvoir et la responsabilité de le faire. C'est un raisonnement qui, à mes yeux, ne tient pas. Au contraire, c'est l'inverse qui me paraît vrai et, en ce sens, j'appuie la modification.
[Français]
Le sénateur Rivest: Je vais poursuivre sur la lancée du sénateur Di Nino. Jusqu'à la preuve du contraire, dans la mesure où l'institution sénatoriale fait partie des institutions canadiennes, il ne faut pas hésiter, même si nous pouvons courir plus de risques que les élus. La nature de nos institutions fait que nous devons, pour des questions importantes - et cela en est une - prendre nos responsabilités, et ce surtout à l'égard des enfants. Le sénateur Pearson connaît bien ce domaine dans lequel elle a 9uvré pendant longtemps et elle le connaît beaucoup mieux que moi. C'est un très beau domaine.
Le gouvernement canadien a signé des traités internationaux qui engagent la responsabilité internationale du pays à l'égard de ses interlocuteurs et, bien sûr, à l'égard des enfants et des adolescents. Que ce soit l'appareil législatif de la Chambre des communes ou celui du Sénat, ils hésitent à suivre l'exécutif canadien pour toutes sortes de raisons.
Le sénateur Pearson a mentionné que, dans la province de l'Ontario, il y a un certain nombre de réticences, et c'est son devoir d'en faire écho ici. Mais si nous suivions au Québec la même voie, nous irions même plus loin, puisque l'état de l'opinion québécoise sur cette question des jeunes contrevenants s'inscrit d'emblée dans la lettre et l'esprit de la convention internationale.
J'ajouterais que la proposition du sénateur Andreychuk est modérée, dans la mesure où elle ne fait que donner un signal à la cour. Il s'agit essentiellement d'une clause d'interprétation qui n'est pas génératrice de droits ou d'obligations sur le plan juridique, mais qui donne aux tribunaux un signal très net que les législateurs canadiens, tout autant que l'exécutif, sont conscients de la vive importance de respecter les valeurs sous-jacentes à la convention internationale. C'est dans ce sens que j'appuie la proposition du sénateur Andreychuk.
[Traduction]
Le sénateur Joyal: J'aimerais signaler à tous les honorables sénateurs, et particulièrement au sénateur Pearson, que le gouvernement de l'Ontario, à l'instar de celui des neuf autres provinces, a confirmé le fait qu'il acceptait la convention. C'est là un fait: on nous l'a dit. Bien sûr, le gouvernement provincial - comme c'est le cas pour le gouvernement fédéral - changera peut-être à la suite d'une élection, auquel cas il pourra accorder une attention différente à certains des principes ou à certaines des obligations liées à la convention. Tout de même, nous ne faisons rien ici que le gouvernement de l'Ontario aurait refusé de reconnaître. Le gouvernement de l'Ontario, à l'instar de celui des neuf autres provinces du Canada - y compris la Nouvelle-Écosse et le Québec - ont, par décret, accepté la convention. Nous n'imposons pas à l'Ontario des principes qu'elle aurait refusé officiellement d'accepter.
Le sénateur Pearson: Les provinces ont envoyé des lettres. L'Alberta a envoyé sa lettre il y a deux ans. On y souligne plusieurs réserves. Il s'agit de lettres et non pas de décrets. Nous avons bel et bien ratifié la convention sans la lettre de consentement de l'Alberta, ce que, du point de vue de la forme, nous n'aurions pas dû faire. Tout de même, nous l'avons fait parce que nous voulions ratifier la convention.
Avant même que nous allions signer la convention, en mai 1990, les provinces ont dû s'engager à étudier leurs propres lois pour voir si elles respectaient la convention. Elles ont alors envoyé une deuxième lettre, qui portait la signature du premier ministre.
Le sénateur Andreychuk: Il y avait en place un processus fédéral-provincial pour l'étude des traités et pour conduire à leur signature. C'est le mieux que nous puissions faire.
Le sénateur Pearson: Les provinces sont obligées. Ayant étudié le projet de loi soigneusement, je crois qu'il respecte mieux la convention que la loi qui existe actuellement. La loi actuelle comporte plusieurs limites que nous avons relevées, le sénateur Andreychuk et moi-même, la dernière fois. C'est pourquoi je me préoccupe de ce que le Québec souhaite se retirer, car il sera moins conforme s'il applique la loi actuelle.
Je n'affirmais pas que, du fait de ne pas être élus, nous n'avons aucun pouvoir. Ce n'est pas cela du tout. Je disais simplement que les défis que nous devons tous relever consistent à produire un projet de loi qui sera accepté par l'ensemble du pays et non pas seulement la majeure partie. C'est tout ce que je voulais dire à ce sujet.
Le sénateur Joyal: Madame la présidente, j'aimerais souligner que le gouvernement du Québec s'est lié au moyen de deux décrets. Ces décrets sont le numéro 61676-91, du 9 décembre 1991, et le 1438-76, du 21 avril 1976, qui renvoie à l'autre convention.
Voilà un élément qui importe pour ce qui est des principes qui entrent en jeu. Certaines provinces ont simplement rédigé des lettres, mais il ne fait aucun doute que chaque province a bel et bien la volonté de reconnaître la convention et d'essayer, autant que possible, de s'y conformer. Il n'est pas du tout exagéré de le dire.
Le sénateur Buchanan: J'aimerais traiter de ce que le sénateur Pearson a dit. Je suis sûr que le sénateur Beaudoin serait d'accord pour dire qu'un décret a pour effet, bien entendu, de lier un gouvernement, mais une lettre portant la signature du premier ministre peut également lier la province, probablement de façon systématique. Les contrats signés par un premier ministre ou un ministre peuvent lier une province. Le décret est l'expression ultime de la chose, mais il y a une affaire devant la Cour suprême de la Nouvelle-Écosse où le tribunal a déterminé que même les affirmations ou les déclarations verbales d'un premier ministre pouvaient lier un gouvernement. Une lettre portant la signature du premier ministre aurait pour effet de lier le gouvernement. Je l'ai déjà fait moi-même.
Le sénateur Pearson: Alors on peut se demander pourquoi certains premiers ministres n'en font pas plus.
Le sénateur Cools: Pour réagir à ce qu'a dit le sénateur Pearson, je dirais que, dans une grande mesure, cela ne s'applique pas ou ne se tient pas dans le cas particulier qui nous occupe parce que, d'abord et avant tout, l'article en question est une disposition interprétative.
Voilà le premier point, mais le point important que je souhaitais souligner est en rapport avec la question qu'a soulevée le sénateur Pearson en ce qui concerne le pouvoir de modifier les lois au Sénat.
Le sénateur Pearson: Je n'ai pas du tout soulevé cette question. Ce n'est pas le point que j'ai fait valoir.
La présidente: Elle a bien précisé sa pensée à ce sujet.
Le sénateur Cools: Madame, je n'avais pas terminé.
La présidente: Sénateur Cools, si vous avez une autre observation à formuler à propos d'un autre sujet...
Le sénateur Cools: C'est à propos du même sujet. J'ai accepté une correction tout à fait justifiée. Ces grandes initiatives internationales ne sont pas mon truc; pour bon nombre de cas, j'y vois l'influence d'un «nouvel empire». Tout de même, quand les gouvernements vont à l'étranger et adhèrent à ces traités, ils agissent en vertu de leur prérogative. Or, il n'y a jamais eu une époque de l'histoire où la prérogative devait faire l'objet d'un examen plus scrupuleux de la part du Parlement qu'à l'heure actuelle.
Dans le cas particulier qui nous occupe, la proposition ne consiste pas à limiter la prérogative. C'est très intéressant. Elle vise à appuyer notre prérogative telle que celle-ci a été exercée; de ce fait, le problème soulevé par le sénateur Pearson est très bien réglé. C'est une prérogative, et c'est ce que les gens proposent d'approuver.
La présidente: Merci, sénateur Cools. Avant de mettre cela aux voix, j'aimerais soulever une question à l'intention des sénateurs et des juristes. J'apprends que cette modification, à l'article 2, se rapportera peut-être au paragraphe 3(2) qui se trouve à la page 8, en haut:
La présente loi doit faire l'objet d'une interprétation large garantissant aux adolescents un traitement conforme aux principes énoncés au paragraphe (1).
Cela pourrait donner lieu à des difficultés.
Le sénateur Grafstein: Non, non.
Le sénateur Beaudoin: Si vous me permettez d'intervenir, je vous dirai que cet article est souvent employé. Il n'y a absolument aucune contradiction, car les deux mesures vont dans le même sens. En outre, la modification de l'article 2 ajoute quelque chose qui faisait défaut à la loi jusque-là et qui devrait s'y retrouver.
Le sénateur Andreychuk: J'ajouterais une sous-modification à ma modification de l'article 2. Le sénateur Moore, qui possède meilleures aptitudes pour la rédaction que moi, propose de remplacer «le droit canadien» par «le droit du Canada». De même, dans la version anglaise, «the act» deviendrait «this act», à la deuxième ligne, modification qui ne s'applique pas en français.
Le sénateur Beaudoin: Ce serait tout à fait acceptable.
Le sénateur Grafstein: C'est mieux.
Le sénateur Joyal: C'est mieux.
Le sénateur Andreychuk: Nous avons entendu, à maintes et maintes reprises, que le projet de loi ne fait rien d'autre que de permettre au gouvernement fédéral d'exercer les pouvoirs qui lui reviennent en droit pénal, qu'il ne représente pas une immixtion dans les affaires provinciales. Cet article vise à établir qu'il y aura une interprétation large de la loi fédérale. Cela n'empiète pas sur la loi provinciale. Certaines des discussions que nous avons eues n'étaient pas vraiment nécessaires, puisqu'il était question de droits fédéraux.
Le sénateur Beaudoin: Je ne changerais rien dans le texte français. C'est «le droit canadien» ou «le droit au Canada».
Le sénateur Grafstein: C'est la même chose.
Le sénateur Beaudoin: Cela devrait se lire «le droit du Canada». Les autres provinces ont des lois et la common law. Au Québec, nous avons le code civil et d'autres lois.
La présidente: Le sous-amendement des versions anglaise et française est-il bien clair?
Honorables sénateurs, êtes-vous d'accord pour dire que cette sous-modification de la modification soit adoptée?
Des voix: D'accord.
La présidente: Comme nous sommes d'accord, honorables sénateurs, je vous demande: la modification est-elle adoptée? Je prie la greffière de procéder à l'appel nominal.
Le sénateur Andreychuk: Pour la modification.
Le sénateur Beaudoin: Oui.
Le sénateur Buchanan: Oui.
Le sénateur Cools: Oui.
Le sénateur Di Nino: Oui.
Le sénateur Fraser: Non.
Le sénateur Grafstein: Oui.
Le sénateur Joyal: Oui.
Le sénateur Milne: Non.
Le sénateur Moore: Oui.
Le sénateur Pearson: Je m'abstiens.
Le sénateur Rivest: Oui.
La présidente: La modification est adoptée.
Y a-t-il d'autres modifications proposées de l'article 2?
Le sénateur Joyal: Madame la présidente, j'ai moi aussi une modification de l'article 2.
Honorables sénateurs, la plupart d'entre nous ont eu le privilège d'entendre divers experts à ce sujet: nous nous rappelons la loi de la troisième faute. Ce projet de loi renferme ce que les spécialistes qualifient d'«automatisme», c'est-à-dire une mesure qui s'applique automatiquement une fois que l'adolescent a commis trois infractions. Parfois, il s'agit seulement d'avoir violé le couvre-feu imposé par le tribunal. Si l'adolescent revient à cinq minutes après minuit plutôt qu'à minuit pile, cela peut être compté comme une faute.
Parmi les témoins qui ont traité de la question, il y a les représentants de la commission des droits de la personne du Québec, le barreau du Québec, l'Association des centres jeunesse du Québec et d'autres encore.
La plus grande critique à cet égard, c'est que, dans le contexte de la réinsertion sociale, une part de jugement devrait parfois venir faire contrepoids à la loi de la troisième faute. Je propose des modifications formulées par ces témoins, mais non pas pour reconnaître les récidivistes. Il est possible de faire réintégrer le système aux adolescents qui ont commis une autre infraction. Je souhaite m'assurer qu'il y a un élément de discernement qui permettrait ici d'éviter l'imposition d'une peine sévère qui, de fait, nuit au processus de réinsertion sociale. Nous avons accueilli ici des témoins, surtout du...
[Français]
Des témoins de l'Association des centres jeunesse du Québec nous ont sémontré quelles étaient les implications de cet automatisme au niveau du récidivisme. L'amendement que je propose vise à permettre au procureur général lui-même de déterminer s'il veut que la personne soit soumise à nouveau à une sentence plus importante à la place de l'automatisme qui devrait normalement s'appliquer.
Il y a donc un élément de discrétion réintroduit dans le projet de loi quant à l'application de l'appréciation, qui correspond aux suggestions de toutes les personnes que nous avons entendues sur cette question. Nous ne changeons pas l'objectif, nous incluons un élément de discrétion à l'intérieur du pouvoir du procureur général.
[Traduction]
C'est pourquoi je propose:
Que le projet de loi C-7 soit modifié, à l'article 2, à la page 4, par substitution, à la ligne 16, de ce qui suit:
«mis une infraction grave avec violence, et où, au début de la poursuite, le procureur général choisit de ne pas refuser par écrit de traiter l'infraction comme une infraction désignée.»[Français]
En français, il est proposé que le projet de loi soit modifié à l'article 2, à la page 4, en substituant à la ligne 16 ce qui suit:
«[...] mis une infraction grave avec violence, et où, au début de la poursuite, le procureur général choisit de ne pas refuser par écrit de traiter l'infraction comme une infraction désignée.»[Traduction]
Le sénateur Beaudoin: Le procureur général permet-il cette marge de manoeuvre au profit du jeune contrevenant?
Le sénateur Joyal: Oui, c'est ce que nos témoins ont proposé. Ils n'ont pas proposé d'éliminer complètement l'automatisme. Ils ont affirmé qu'un jeune contrevenant qui commet une autre infraction ou qui viole l'ordonnance d'un tribunal ne respecte certes pas la peine initiale. Tout de même, avant de mettre plus de pression sur le contrevenant, nous devrions disposer d'une certaine marge discrétionnaire pour déterminer si la nouvelle infraction est suffisamment grave pour que s'enclenche sans entraves le mécanisme d'application d'une peine pour infraction désignée.
Le jeune contrevenant n'a pas respecté certains éléments de la peine initiale. Cette modification permettrait une certaine marge de manoeuvre qui permettrait de rajuster le tir suivant les conseils de l'agent de libération conditionnelle.
Le sénateur Grafstein: Je crois que nous comprenons.
Le sénateur Beaudoin: Je crois qu'on a bien répondu à ma question.
Le sénateur Fraser: Avec le respect que je vous dois, madame la présidente, je ne crois pas que le manquement à une ordonnance de probation soit suffisant. Nous parlons ici de deux décisions judiciaires précédentes dans le cas de deux procédures différentes. Cela ne couvre pas la personne qui est appréhendée pour plusieurs infractions commises le même jour. À des procès différents, la personne va avoir été condamnée pour avoir commis une «infraction grave avec violence».
Le non-respect d'une ordonnance de probation ne constitue pas une infraction grave avec violence. Cet article ne s'applique pas à la personne qui a commis une infraction mineure. Je ne crois pas qu'un tribunal accepte cette interprétation.
Le sénateur Andreychuk: Il faut connaître les faits se rapportant à la situation.
Le sénateur Fraser: Le terme «violence» est employé. Deux conditions doivent s'appliquer avant que la règle de la troisième faute n'entre en jeu. Le contrevenant doit avoir commis déjà deux fois une infraction grave avec violence, puis l'avoir commise de nouveau.
Le sénateur Andreychuk: Il me semble que nous ne limitons pas la marge de manoeuvre du procureur général. Je n'avais pas pensé à cela. À mes yeux, cela a beaucoup de sens. Nous laissons le pouvoir discrétionnaire à la bonne personne, le procureur général, qui doit songer à la sécurité du public et de l'adolescent. Nous envisageons des cas où, pour certains contrevenants, nous ne voulons pas que s'applique la disposition de la troisième faute.
Le sénateur Fraser: Je comprends le raisonnement, mais je veux que nous soyons sûrs de ne pas nous méprendre sur la largeur du filet qui est ainsi employé.
La présidente: Les membres du comité souhaitent-ils discuter plus à fond de cette modification?
Sommes-nous d'accord avec la modification proposée par le sénateur Joyal?
Le sénateur Fraser: Je m'abstiens.
Des voix: D'accord.
La présidente: Y a-t-il d'autres modifications touchantl'article 2?
Êtes-vous d'accord pour adopter l'article 2 sans autre modification?
Des voix: D'accord.
La présidente: Êtes-vous d'accord pour adopter les articles 3 à 18?
Des voix: D'accord.
La présidente: L'article 19 est-il adopté?
Le sénateur Andreychuk: Je propose:
Que le projet de loi C-7 soit modifié, à l'article 19, à la page 17, par adjonction, après la ligne 21, de ce qui suit:
«(5) Les règles applicables aux groupes consultatifs, établies au titre du paragraphe (3):
a) accordent à l'adolescent le droit d'assister aux séances d'un tel groupe, accompagné de son avocat;
b) respectent les principes d'équité procédurale et de justice naturelle.»
Historiquement, en application de la Loi sur les jeunes délinquants, ce sont des gens animés des meilleures intentions qui se réunissaient en vue de discuter de l'intérêt de l'enfant. Nous avons alors constaté que notre intérêt paternel à l'égard de l'enfant violait certains des droits fondamentaux de cet enfant. Par conséquent, nous avons adopté la Loi sur les jeunes contreve nants.
Ce projet de loi - que je sois en faveur ou non - donne aux adolescents le droit de bénéficier de l'application régulière de la loi et des droits précis, sauf dans le cas des groupes consultatifs. Or, certaines décisions fondamentales, aptes à changer une vie, sont prises durant les séances en question. Nous ne savons pas qui sera présent à la séance du groupe consultatif, comment celle-ci se déroulera ou ce qu'en retirera le système judiciaire. La séance peut être décidée par l'initiative d'un juge ou d'autres personnes encore. Je crois que l'article 19 repose sur les meilleures intentions, mais ce n'est pas une mesure de rechange; c'est intégré au processus même du projet de loi.
À coup sûr, si un groupe consultatif doit se réunir pour déterminer la peine à imposer à un adolescent, l'adolescent devrait être présent, accompagné d'un avocat. Les principes de justice naturelle et d'équité devraient s'appliquer. La loi s'appli que régulièrement à toutes les étapes des procédures prévues dans le projet de loi, du début à la fin, exception faite de la séance très importante du groupe consultatif. Pour être uniforme et pour être équitables envers l'adolescent, les séances du groupe consultatif doivent respecter la notion d'application régulière de la loi.
Le sénateur Beaudoin: Le droit aux services d'un avocat est bien ancré dans notre Charte. Dans de nombreux cas, les précédents établis reposent sur une interprétation très large de la notion. Si cela vaut pour les adultes, a fortiori, cela doit valoir également pour les jeunes contrevenants, car ceux-ci ont besoin d'un peu plus de protection. Je suis d'accord pour dire qu'en adoptant cette modification, nous donnons au jeune contrevenant le droit d'assister aux séances du groupe consultatif accompagné de son avocat.
[Français]
Le sénateur Rivest: Y aurait-il des cas où ce serait dans l'intérêt de l'enfant que les membres du conseil consultatif discutent en dehors de sa présence, quitte à ce que l'avocat de l'enfant soit là? Que l'avocat soit toujours présent, cela va de soi car c'est un professionnel. Je pose la question parce que je ne suis pas un spécialiste. J'ignore comment cela se passe.
[Traduction]
Le sénateur Andreychuk: À la lecture de la partie sur les groupes consultatifs, aux paragraphes 19(3) et (4), on constate que le procureur général peut établir des règles. Dans mes modifications, je dis simplement: je souhaite que certains principes inhérents à l'équité et à la justice naturelle s'appliquent à toute procédure. Je crois qu'il pourrait y avoir des cas où il ne serait pas dans l'intérêt de l'adolescent, ce qui concorderait avec notre loi. Même devant un tribunal pour adultes, on peut procéder, dans certains cas, sans recourir à un avocat. Nous voulons nous assurer que les séances des groupes consultatifs ne se transforment pas en genre de situations où les gens prennent une décision qui change complètement la vie de l'adolescent, là où nous avons tendance à faire ce que nous voyons comme étant dans l'intérêt de l'enfant. Il s'agit simplement d'établir des règles qui reposent sur le principe de la justice naturelle, mais je ne vois pas en quoi cela exclurait le genre de situations dont vous parlez.
Le sénateur Fraser: Le sénateur Rivest a soulevé un point très important. Je serais nettement plus heureuse - et j'ai l'impression que cette modification pourrait subsister - si nous adoptions simplement l'alinéa b). Par exemple, si les membres du groupe consultatif étudient certains renseignements médicaux sur l'adolescent, il peut arriver que, selon les spécialistes médicaux, l'enfant - étant donné une prédisposition génétique à un état particulier qui peut être aggravé facilement - ne devrait pas assister à la séance... je ne sais pas. Je ne fais que donner un exemple. Cela peut être très effrayant. L'adolescent évolue tout en ayant un problème de santé qui a fait l'objet de toutes sortes d'arrangements autour de lui, sans qu'il en soit conscient. Subitement, il doit assister à la séance d'un groupe consultatif où il se fait dire pourquoi telle ou telle mesure qui, autrement, aurait été merveilleuse, ne peut être adoptée. Il pourrait y avoir toute une série de facteurs. Cela pourrait être quelque chose de très simple: «Ce garçon est absolument détesté par ses camarades de classe.» Et en plus, il doit assister à une formalité quasi judiciaire où il est désigné officiellement comme étant la personne la moins populaire de la planète.
Le sénateur Andreychuk: Le contre-argument, c'est que soit on a une application régulière de la loi, comme c'est prévu dans ce projet de loi en 170 pages, soit on accepte ce que préconisaient les partisans de l'ancien système de justice pour les adolescents, c'est-à-dire que ceux-ci ne devraient pas avoir accès à l'application régulière de la loi ou aux services d'un avocat parce qu'ils sont incapables de l'assumer et parce que certains renseignements leur nuiraient à eux, qui sont jeunes.
Si c'est la voie à choisir, alors le reste du projet de loi n'a pas de sens, car il leur accorde la pleine capacité sur le plan des droits. C'est trop discrétionnaire.
Le paragraphe (1) se lit en partie comme suit:
Le juge du tribunal pour adolescents, le directeur provincial, l'agent de la paix, le juge de paix, le poursuivant ou le délégué à la jeunesse peut, en vue de la prise d'une décision dans le cadre de la présente loi, constituer ou faire constituer un groupe consultatif.
Tout de même, tous les adultes se réunissent alors, quelque part, pour discuter des besoins de l'adolescent. Ils sont déjà décidés avant même d'arriver au tribunal. Ils disent alors: «Voici ce que nous proposons.» Comment l'adolescent peut-il réfuter cela et contre-attaquer, en compagnie de son avocat, défendre son point de vue devant le tribunal, alors que l'idée des gens appelés à décider est déjà faite? Où est la justice là-dedans? Soit que nous avons un modèle qui a du sens et qui accorde des droits - c'est-à-dire qui accorde le droit de refuser de leur révéler des renseignements quand c'est nécessaire -, mais pas de manière habituelle et certainement pas sans justification.
Le sénateur Grafstein: Cette disposition me tracasse parce que l'adolescent doit assister à la séance accompagné de son avocat. Entre autres, le paragraphe (2) établit le but de la séance du groupe consultatif, c'est-à-dire de faire des recommandations relativement aux mesures extrajudiciaires et aux conditions de mise en liberté provisoire par voie judiciaire ou à la peine, y compris son examen, et à toute réinsertion. C'est une meilleure façon de procéder, car si le groupe consultatif se réunit en bonne et due forme, il doit prendre des notes. Si l'avocat ou l'adolescent croit que c'est injuste - injuste parce qu'ils n'ont pu participer au processus -, alors il y aura une contestation fondée sur la Charte.
Ce dont je me soucie, c'est que nous essayons, autant que possible, de faire la transition d'un modèle judiciaire à un modèle thérapeutique. Je croyais que c'était l'une des dispositions de transition qui donnent la latitude nécessaire pour mettre en place un modèle thérapeutique, par opposition à un modèle pénal. S'il y a une atteinte déraisonnable des droits des enfants, alors il y a sans nul doute la possibilité d'une contestation en application de la Charte.
Le sénateur Andreychuk: Tout de même, vous forcez l'adolescent à prendre cette décision.
Le sénateur Grafstein: L'avocat de l'adolescent prend cette décision. J'ai été impressionné par ce qu'ont dit les policiers et d'autres intervenants à ce sujet. Ils ont dit: «Dès que la démarche devient judiciaire, les avocats sont des avocats, comme ils se doivent de l'être. Ils sont là pour une seule raison. Ils ne sont pas nécessairement là «dans l'intérêt» de l'enfant; c'est plutôt dans l'intérêt de leur client.» Les avocats se retrouvent constamment dans ce genre de conflit. Ils essaient bien de concilier les deux, mais il est très difficile d'y arriver.
Je suis conscient de ce que dit le sénateur Andreychuk, mais le législateur, dans la majeure partie du projet de loi, essaie de s'aligner, autant que possible, sur des mesures extrajudiciaires et officieuses qui privilégient l'intérêt de l'adolescent, plutôt que d'être restreint par le processus de justice pénale. J'hésiterais à appuyer cette modification particulière.
Le sénateur Di Nino: Je suis confus. Nous parlons de deux choses, si je comprends bien. D'une part, il y a le droit fondamental qu'ont les jeunes d'être représentés par un avocat. Voilà une bonne chose. D'autre part, et c'est la question qu'a soulevée le sénateur Rivest, il s'agit de savoir si l'adolescent devrait assister à la séance.
Le sénateur Grafstein: La modification dit que l'adolescent doit assister à la séance.
Le sénateur Di Nino: Voilà le problème. Ce sont deux choses distinctes. D'abord, l'adolescent doit assister à la séance. Le sénateur Rivest a souligné le fait que, parfois, il vaut mieux que l'adolescent n'y assiste pas. Je soulève l'autre question: qu'en est-il du droit fondamental d'être représenté par un avocat? En règle générale, l'adolescent, selon l'âge qu'il a, ne sera probablement pas en mesure de jauger une telle situation. Je suis d'accord avec le sénateur Andreychuk. L'adolescent doit être représenté d'une manière ou d'une autre. Y a-t-il une autre façon de le voir? Une autre modification sera-t-elle proposée? Peut-être qu'elle réglerait le problème.
Je ne propose pas de modification à ce sujet, mais il faudrait prévoir pour l'adolescent le droit aux services d'un avocat. Nous pourrons alors déterminer s'il doit assister ou non à la séance. Est-ce cela que vous essayez de proposer?
Le sénateur Pearson: L'idée me paraît bonne, étant donné qu'en application de l'article 12 de la convention, l'enfant a le droit de participer à toute procédure, administrative ou autre, qui le concerne. Tout de même, je ne saisis pas suffisamment le mécanisme pour savoir s'il faut voter d'un côté ou de l'autre. Je suis conscient de l'importance de ce que dit le sénateur Fraser, c'est-à-dire que cela pourrait limiter les questions qui font l'objet de la discussion si l'adolescent est présent.
Le sénateur Di Nino: Ce serait le cas.
Le sénateur Pearson: Il faudrait que je détermine jusqu'à quel point c'est important. Je crois que le législateur a déjà pris en considération les principes de l'équité procédurale et de la justice naturelle. Ce n'est pas de cela que je me soucie. Je comprends ce que vous dites. Je crois que cela s'applique à bien des choses entourant la situation des enfants et du régime d'aide à l'enfance, par exemple ceux qui n'ont pas de chance. Dans certains cas, les responsables des services à l'enfance les enferment pendant des semaines. Je parle non pas de justice, mais de protection de la jeunesse, là où les droits sont moindres en ce qui concerne l'application régulière de la loi.
Le sénateur Andreychuk: C'est un tort.
La présidente: C'est à côté de la question.
Le sénateur Pearson: Je ne comprends pas suffisamment bien la question pour décider de voter pour ou voter contre; je vais donc m'abstenir.
Le sénateur Moore: Au cas où aucune autre modification ne serait présentée, je ne suis pas convaincu, à l'instar du sénateur Pearson, que l'alinéa b) soit nécessaire. Je ne vois pas pourquoi l'alinéa a) ne pourrait pas se lire comme suit: «accordent à l'adolescent le droit d'être représenté par son avocat à l'occasion des séances d'un tel groupe». C'est, me semble-t-il, ce à quoi le sénateur Di Nino faisait allusion. Si l'avocat est présent pour veiller sur les intérêts de l'enfant, il n'y a plus à s'inquiéter.
Le sénateur Andreychuk: Si vous souhaitez proposer la modification, je suis prête à faire un compromis.
La présidente: Sénateur Moore, vous proposez le remplacement des mots «accompagné de son avocat».
Le sénateur Moore: Par l'expression «le droit d'être représenté».
La présidente: «Être représenté par»?
Le sénateur Grafstein: Non, il s'agit non pas d'imposer la représentation, mais de donner à l'intéressé le droit de se faire représenter. On en accorde le droit, et l'avocat n'est pas tenu d'accompagner l'adolescent. Cependant, ce dernier peut être présent si c'est ce que choisit l'adolescent. C'est ce que disait le sénateur Rivest.
Le sénateur Beaudoin: Je suis d'accord.
La présidente: J'attends un libellé, s'il vous plaît.
Le sénateur Grafstein: Je propose les mots «accordent à l'adolescent le droit d'être représenté par son avocat à l'occasion des séances d'un tel groupe».
La présidente: C'est ce que j'ai dit.
Le sénateur Beaudoin: S'ils sont représentés, les enfants ne seront pas là, n'est-ce pas?
Le sénateur Di Nino: On tient pour acquis qu'ils seront là.
Le sénateur Beaudoin: Il y a ici quelque chose qui cloche. Il s'agit du droit d'un adolescent de se faire accompagner par son avocat.
Le sénateur Fraser: Cela fait partie du débat. Dans certains cas, il est véritablement dans l'intérêt de l'enfant d'entendre certaines des choses qui doivent être dites dans le cadre d'un tel groupe consultatif. Il pourrait s'agir d'un adolescent de 12 ans.
Le sénateur Beaudoin: Il y a deux choses: le droit d'être présent et le droit de se faire accompagner par un avocat. C'est tout ou rien. Voilà pourquoi je recommande qu'on laisse la disposition telle qu'elle est.
La présidente: Avons-nous un sous-amendement?
Le sénateur Andreychuk: On dirait bien que non.
La présidente: Il n'y a pas de sous-amendement. La modification a été proposée.
La modification telle que libellée à l'origine par le sénateur Andreychuk, est-elle adoptée?
Le sénateur Di Nino: Pour plus de clarté, il était question du droit de l'adolescent d'être représenté par son avocat; la modification porte maintenant sur «assister».
La présidente: «Accompagné de son avocat»; c'est la modification proposée par le sénateur Andreychuk.
Le sénateur Cools: Cela signifie-t-il que l'avocat peut assister à la séance sans l'adolescent? Cela signifie-t-il que l'adolescent peut envoyer l'avocat? L'avocat peut s'y rendre sans l'enfant. Il s'agit d'un droit, et non d'une obligation. On dit: «accordent à l'adolescent le droit d'assister aux séances d'un tel groupe, accompagné de son avocat». La question est la suivante: l'avocat peut-il y assister sans l'adolescent?
Le sénateur Rivest: Le droit d'assister ou d'être représenté est un principe de justice naturelle.
La présidente: Un à la fois, s'il vous plaît.
Le sénateur Beaudoin: Le droit d'être représenté signifie que l'adolescent ne sera peut-être pas présent. Je ne crois pas que c'est ce que nous voulons. Nous voulons que l'adolescent soit présent, accompagné de son avocat, et non simplement représenté par son avocat.
Le sénateur Rivest: Dans certains cas, il serait préférable que l'adolescent ne soit pas présent.
Le sénateur Joyal: La modification telle que libellée porte que nous ajoutions, après la ligne 21, un nouveau paragraphe précisant ce qui suit:
«(5) Les règles applicables aux groupes consultatifs, établies au titre du paragraphe (3):
a) accordent à l'adolescent le droit d'assister aux séances d'un tel groupe, accompagné de son avocat;
b) respectent les principes d'équité procédurale et de justice naturelle.»C'est ce que garantit la loi. C'est l'interprétation que j'en fais. Les dispositions n'ont pas d'effets limitatifs. Dans ce cas, on précise simplement que les règles prévoient un certain nombre de choses. Les règles peuvent aussi s'appliquer à d'autres choses.
Le sénateur Cools: Pourquoi l'alinéa b) est-il nécessaire? Je tiens pour acquis que la plupart des règles sont conformes aux principes de l'équité procédurale.
Le sénateur Andreychuk: Pas nécessairement. Nous avons ici affaire à des groupes consultatifs officieux. Ce que j'essaie de dire, c'est que, au cas où des décisions vitales devraient être prises en raison du comportement criminel d'un adolescent, on devra à tout le moins respecter ces normes minimales. Les exceptions à ces normes devraient être conformes à la pratique habituelle du droit.
Ce que je crains, c'est que les groupes consultatifs ne commencent à soustraire aux enfants certaines des décisions les concernant que nous nous sommes efforcés de récupérer au moyen de la Convention relative aux droits de l'enfant, de la Loi sur les jeunes contrevenants et du présent projet de loi. Il s'agit d'un modèle qui vise à inculquer aux enfants le sens des responsabilités. Nous leur conférons des droits et des responsabilités. Nous mettons leurs responsabilités en relation avec leurs droits. Il s'agit d'une avenue qui permet d'éviter un tel processus, qui invite à le faire. Je veux m'assurer que le processus ne va pas dégénérer au point où des adultes commenceront à parler d'enfants et à agir dans leur intérêt sans que les enfants soient présents.
Lorsque des enfants commettent des actes criminels, il y a des possibilités et des facteurs dont on ne devrait pas tenir compte dans l'analyse et les décisions subséquentes, comme cela était le cas à l'époque de la Loi sur les jeunes délinquants.
Nous nous efforcions de faire de Jean un bon garçon, avec les meilleures intentions du monde - j'étais moi-même partie à la démarche -, mais nous perdions de vue le fait qu'il était là parce qu'il avait commis un acte criminel.
La présidente: La modification est-elle adoptée?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Des voix: Abstention.
La présidente: Passons à l'appel des noms, je vous prie.
Mme Jill Anne Joseph, la greffière du comité: Nous commençons avec la présidente.
La présidente: Non.
Le sénateur Andreychuk: Oui.
Le sénateur Beaudoin: Oui.
Le sénateur Buchanan: Oui.
Le sénateur Cools: Oui.
Le sénateur Di Nino: Oui.
Le sénateur Fraser: Non.
Le sénateur Grafstein: Abstention
Le sénateur Joyal: Oui.
Le sénateur Moore: Oui.
Le sénateur Pearson: Abstention
Le sénateur Rivest: Abstention
La présidente: La modification est adoptée.
L'article 19 modifié est-il adopté?
Des voix: D'accord.
La présidente: Les articles 20 à 24 sont-ils adoptés?
Des voix: D'accord
La présidente: Honorables sénateurs, nous allons maintenant passer à l'étude de l'article 25. Y a-t-il des modifications à l'article 25?
Le sénateur Cools: Oui, je propose une modification du paragraphe 25(10). La disposition est relativement étrange. Elle a l'effet juridique plutôt inusité de ne pas empêcher le lieutenant-gouverneur en conseil d'une province d'établir un programme autorisant à recouvrer auprès de l'adolescent ou de ses père et mère le montant des honoraires versés à l'avocat qu'il représente.
Je propose donc:
Que le projet de loi C-7 soit modifié, à l'article 25, à la page 21:
a) par suppression des lignes 19 à 28;
b) par le changement de la désignation numérique du paragraphe 25(11) à celle du paragraphe 25(10) et par le changement de tous les renvois qui en découlent.Dans ce cas particulier, la modification proposée va presque de soi, se justifie presque d'elle-même. Sur le fond, je crains que les gouvernements n'élaborent d'énormes bureaucraties pour aller chercher de très petites sommes dans la poche de personnes dont les moyens sont souvent limités.
Si je suis d'avis que la disposition pourrait facilement être supprimée, c'est vraiment en raison du libellé lui-même. La disposition porte que rien dans le projet de loi n'empêche les provinces d'agir. On n'a pas besoin d'une loi pour dire que rien n'empêche la prise de mesures. S'il n'y a pas d'empêchements, il n'y en a pas. Si on supprime la disposition, rien dans le projet de loi n'empêchera la prise de mesures. C'est une disposition fort étrange.
À mon avis, il s'agit de l'une des dispositions - il y en a beaucoup dans le projet de loi - qui, à première vue, semblent inoffensives, mais il ne fait aucun doute à mes yeux qu'on trouvera quelques applications funestes. J'affirme que rien n'empêche la prise de telles mesures. Par conséquent, la disposition est redondante.
Cela dit, je propose qu'on la supprime.
Le sénateur Fraser: Je suppose qu'elle est redondante, même si j'ai vu cette formulation dans d'autres textes de loi. Je pense qu'il est totalement et profondément immoral d'établir une politique visant à récupérer les coûts de l'aide juridique auprès des parents de l'enfant. Nous avons entendu le témoignage de quelques témoins selon qui une telle politique risque d'entraîner de véritables dénis de justice en contraignant un enfant à plaider coupable.
Cela dit, certaines provinces le font déjà. Nous avons entendu des témoignages en ce sens: en effet, la loi les autorise à le faire. À mon avis, elles pourraient raisonnablement soutenir devant un tribunal qu'elles ont compétence sur l'administration de leurs programmes d'aide juridique.
Je tiens à souligner aux membres du comité que nous nous lançons ici dans une aventure à risque élevé. Nous proposons d'apporter des modifications à un texte de loi extrêmement controversé, dont l'enfantement a été extrêmement difficile. Si les membres du Comité jugent certaines modifications non souhaitables, je suis d'avis que nous aurons plus de crédibilité en limitant nos actions aux aspects qui nous paraissent vraiment nécessaires. Je ne pense pas que celui-ci soit nécessaire. L'importance que le sénateur Cools attache à la rigueur et à la clarté des textes juridiques m'est sympathique, mais je ne pense pas que la modification soit nécessaire.
Le sénateur Cools: Je dis qu'il n'y a pas d'empêchements. Même la suppression de la disposition n'empêcherait rien du tout. Zéro égale zéro.
Le sénateur Joyal: Je suis d'accord pour dire que la pratique est en vigueur dans certaines provinces. Si la disposition n'est pas incluse, certaines provinces envisageront peut-être un tel recours. Si la disposition me déplaît, c'est parce qu'elle risque d'encoura ger des personnes à songer au recouvrement des frais de l'aide juridique. De nombreux témoins - le sénateur nous l'a rappelé avec plus d'éloquence que je n'en suis capable - nous ont parlé des effets de cette procédure relative au recouvrement des frais. Certaines personnes seront peut-être contraintes de renoncer aux services d'un avocat et de faire leur possible dans les circonstan ces. Je ne vais pas répéter les arguments qui ont été invoqués. Nous les avons déjà entendus ici.
Même si je comprends l'intention, le projet de loi est si complexe qu'on doit comprendre les effets de la modification d'une partie du projet de loi sur l'ensemble. C'est facile à comprendre, et je suis d'accord avec l'objectif.
Le sénateur Beaudoin: Je pense que la disposition devrait être supprimée. Tôt ou tard, sa simple présence incitera quelqu'un, quelque part, à y songer. Si on le fait aujourd'hui, on le fera demain. Je suis contre la disposition.
Le sénateur Cools: Il y a aussi des enjeux moraux. On nous a répété à l'envi qu'il s'agit d'un projet de loi énorme, alambiqué, maladroit et difficile à comprendre. Il n'est pas particulièrement utile ni efficace d'imposer au public un mécanisme aussi gauche et de risquer la mise en place d'une bureaucratie colossale - ce qui, une fois de plus, est coûteux - dans laquelle les gouvernements seront confrontés à leurs propres citoyens. Telle est la nature de la relation. Je pense qu'il y a quelque chose de tout à fait malsain dans la relation entre les gouvernements et les citoyens que laisse entrevoir la disposition.
J'aurais pu aborder la question sous l'angle du fond, mais j'ai choisi de m'en tenir à la procédure.
La présidente: D'autres commentaires?
Le sénateur Andreychuk: Je suis d'accord avec la modification pour une raison: le projet de loi a une orientation tout à fait différente. Si les provinces agissent de la sorte, comme on l'a laissé entendre, c'est l'affaire de la province et des citoyens. Je préférerais qu'on organise dans les provinces un débat sur l'exercice d'un tel pouvoir et sa nécessité. On se demande pourquoi le gouvernement fédéral porte la question à l'attention de tous. Cela n'est pas conforme aux principes ni à l'esprit du projet de loi. Dans ce cas, je suis certaine que la disposition résulte de l'équilibrage entre intérêts divergents auxquels j'ai fait allusion, certaines personnes souhaitant un certain type de processus et d'autres préconisant une orientation différente. Je pense qu'il s'est agi d'un des «compromis», si je puis m'exprimer ainsi. On remet les pouvoirs là où ils ont leur place, nommément dans les mains des provinces, de façon qu'elles y réfléchissent. Je supprimerais donc la disposition.
La présidente: S'il n'y a pas d'autres intervenants, sommes-nous prêts à voter? La modification est-elle adoptée?
Des voix: Oui.
La présidente: Y a-t-il des sénateurs qui s'y opposent?
Le sénateur Fraser: Je ne veux pas forcer un vote par appel nominal, mais je ne veux pas non plus que le compte rendu fasse état d'une unanimité.
La présidente: Avec dissidence, dans ce cas.
Le sénateur Cools: Je demande un vote par appel nominal.
La présidente: Avec dissidence?
Le sénateur Fraser: Avec dissidence.
La présidente: Non, nous allons procéder à un vote par appel nominal. La demande en a été faite.
La présidente: Contre.
Le sénateur Andreychuk: Oui.
Le sénateur Beaudoin: Oui.
Le sénateur Buchanan: Oui.
Le sénateur Cools: Oui.
Le sénateur Di Nino: Oui.
Le sénateur Fraser: Non.
Le sénateur Joyal: D'accord.
Le sénateur Moore: Oui.
Le sénateur Pearson: Abstention.
Le sénateur Rivest: Oui.
La présidente: La modification est adoptée.
L'article 25 modifié est-il adopté?
Des voix: D'accord.
La présidente: Adopté.
Les articles 26 à 37 sont-ils adoptés?
Des voix: D'accord.
La présidente: Adopté.
Y a-t-il des modifications à l'article 38? Nous en avons tous un sous les yeux. Quelqu'un propose-il la modification?
Le sénateur Moore: Oui. Elle a été distribuée dans les deux langues officielles. Je ne pense pas que le projet de loi aille assez loin dans la prestation de soins aux jeunes contrevenants autochtones. Nous avons entendu certaines statistiques très tristes à propos des jeunes autochtones placés sous garde au Manitoba et en Saskatchewan. Un juge nous a parlé du comportement ou de l'inconduite des jeunes autochtones face au système de justice de l'homme blanc. C'était le sens de ses propos.
Nous devons donc tenter de nous occuper de ces jeunes. Je propose donc:
Que le projet de loi C-7 soit modifié, à l'article 38, à la page 38:
a) par adjonction, après la ligne 26, de ce qui suit:
«d) toutes les sanctions applicables, à l'exception du placement sous garde, qui sont justifiées dans les circonstances doivent faire l'objet d'un examen, plus particulièrement en ce qui concerne les adolescents autochtones;
e) sous réserve de l'alinéa c), la peine doit:»;
b) par le changement de tous les renvois qui découlent du changement de la désignation littérale de l'alinéa 38(2)d) à celle de 38(2)e).La même formulation figure à l'alinéa 718.2e) du Code criminel.
Le sénateur Andreychuk: Je suis fermement en faveur de la modification. Je ne pense pas que le Sénat, où il y a un comité d'autochtones et où nous avons étudié les dilemmes auxquels sont confrontés les jeunes autochtones et les autochtones en général, puisse accepter aujourd'hui un projet de loi qui n'établisse pas, au moins au sens de la modification, que des mesures différentes sont nécessaires pour les autochtones.
J'espère que la modification montrera, comme l'a indiqué la ministre, que nous tentons de faire davantage. Le Sénat indiquerait ainsi clairement qu'on doit examiner la justice autochtone, en particulier pour les jeunes. On ne mettra un terme au problème de la surreprésentation des jeunes autochtones dans le système de justice pénale de ma province que lorsque la collectivité s'attaquera au problème. Je veux dire par là l'ensemble d'entre nous. Notre Constitution nous confère une responsabilité particulière à l'égard des autochtones dans la société. Nous ne pouvons continuer de faire fi du problème.
Je suis fermement convaincue que rien dans le projet de loi ne modifiera la situation des jeunes autochtones. Le signal que nous enverrons incitera peut-être quelques-uns à faire davantage. Par conséquent, je suis très favorable à la modification.
Le sénateur Grafstein: Je suis en faveur de la modification. La preuve en ce sens est accablante. Les témoins qui ont soulevé la question des autochtones ont aussi déclaré qu'il s'agit d'un programme particulier au sein du système de justice pénale. Je félicite le sénateur Moore parce que la modification rend compte des témoignages entendus. Il s'agit du reflet fidèle de la preuve accablante que nous avons entendue et que le sénateur Moore a formulée de façon très succincte.
Le sénateur Fraser: Je me sens obligée de prôner le statu quo et ce n'est habituellement pas la position que je préfère.
Le sénateur Cools: Dans ce cas, changez-en.
Le sénateur Fraser: Non. S'il y a un vote, dans ce cas-ci, je m'abstiendrai. Je me contenterai de souligner que nous avons tous été horrifiés par les témoignages au sujet du traitement des jeunes autochtones par notre système de justice. Il s'agit d'un scandale national aux proportions colossales. Cependant, l'un des aspects du projet de loi qui me plaît - il y en a de nombreux qui me déplaisent - vient du fait qu'il a pour but d'inciter les provinces à tenir compte de la situation particulière de tous les enfants, y compris leur situation communautaire. Je ne peux pas m'empêcher de penser que c'est ce dont les autochtones ont besoin. Je ne crois donc pas que la disposition change quoi que ce soit à l'application du projet de loi. J'ai du mal à accepter l'idée d'utiliser des lois pour envoyer des messages.
Le sénateur Cools: Le projet de loi en est truffé.
Le sénateur Fraser: Je ne vais pas voter contre le projet de loi. Je vais m'abstenir. Je pense qu'il s'agit simplement d'une modification qui s'inscrit dans une longue série de modifications.
Le sénateur Beaudoin: Je suis en faveur de la modification pour deux raisons. La ministre de la Justice a indiqué clairement et souvent que nous devons nous occuper des autochtones. Deuxièmement, nous avons le pouvoir d'apporter des modifications. À cet égard, le paragraphe 91(24) de la Constitution est clair. Les autochtones relèvent de notre compétence. Troisièmement, la jurisprudence a clairement montré que le Parlement a une responsabilité de fiduciaire face aux autochtones.
Le sénateur Pearson: Je ne suis pas en désaccord avec l'esprit de la modification. Nous sommes tous d'accord sur ce point. Je n'oublie pas non plus les adolescents qui ont comparu devant nous pour nous dire qu'un trop-plein de sensibilité à l'égard des autochtones avait eu pour effet de les faire traiter par des centres autochtones non appropriés et qu'ils auraient préféré se trouver ailleurs.
J'en viens à la conclusion que je devrai m'abstenir. Dans la déclaration de principes, on fait déjà référence aux différences sexuelles, ethniques, culturelles et linguistiques dont il faut tenir compte pour répondre aux besoins des jeunes autochtones, mais nous devons toujours nous méfier d'impacts inattendus.
Je sais que certaines questions ont été soulevées au sujet de l'imposition des peines. Les mesures en ce sens n'ont pas toujours été prises dans l'intérêt des autochtones. Je vais donc m'abstenir à ce sujet.
Le sénateur Joyal: À mon avis, il s'agit d'un minimum. Compte tenu des souffrances de jeunes autochtones dans le système de justice pour adolescents, je puis vous dire que nous ne pouvons pas nous vanter de notre audace au moment de l'introduction, aux fins de l'établissement de la peine pour les jeunes délinquants autochtones, du principe établi dans le Code criminel pour les adultes autochtones. Je ne crois pas que nous fassions preuve d'innovation. Nous n'accordons pas aux jeunes délinquants plus que ce que les délinquants adultes ont reçu à la suite de l'affaire Gladue. Les représentants de la communauté autochtone nous l'ont expliqué. J'aurais aimé que nous définissions mieux que nous l'avons fait le statut et la situation des autochtones à l'article 2, en particulier dans la déclaration, mais je suis d'avis qu'il s'agit du minimum. Je suis donc favorable à la modification.
La présidente: D'autres commentaires? Sommes-nous tous en faveur de la modification?
Des voix: D'accord.
La présidente: La modification est adoptée.
Le sénateur Pearson: Avec dissidence.
La présidente: Oui, avec dissidence. L'article 38 modifié est-il adopté?
Des voix: D'accord.
La présidente: Adopté. Les articles 39 à 49 sont-ils adoptés?
Des voix: D'accord.
La présidente: Adopté. L'article 50 est-il adopté? Nous avons devant nous une modification de l'article 50.
Le sénateur Moore: La modification est liée à celle que nous venons tout juste d'apporter. Je propose:
Que le projet de loi C-7 soit modifié, à l'article 50, à la page 57, par substitution, à la ligne 23, de ce qui suit:
«présente loi; toutefois, l'alinéa 718.2e) (principe de détermination de la peine des délinquants autochtones), les articles 722 (décla-».Le sénateur Di Nino: Il s'agit simplement d'une conséquence de la modification précédente.
Le sénateur Moore Oui.
La présidente: D'autres commentaires au sujet de la modification? Les honorables sénateurs sont-ils d'accord avec la modification?
Des voix: D'accord.
La présidente: Adopté. L'article 50 modifié est-il adopté?
Des voix: D'accord.
La présidente: Adopté. Les articles 51 à 60 sont-ils adoptés?
Des voix: D'accord.
La présidente: L'article 61 est-il adopté?
Le sénateur Grafstein: A t-on fait circuler une modification de l'article 61, madame la présidente?
Peut-être devrais-je en faire lecture aux fins du compte rendu. Je propose:
Que le projet de loi C-7 soit modifié:
a) à l'article 61, à la page 68, par la suppression des lignes 24 à 29;
b) aux pages 68 à 169, par le changement de la désignation numérique des articles 62 à 200 à celle d'articles 61 à 199 et par le changement de tous les renvois qui en découlent.Essentiellement, la modification va dans le sens de la proposition antérieure visant à supprimer le pouvoir discrétionnaire du lieutenant-gouverneur en conseil de réduire l'âge.
La présidente: Des commentaires sur la modification?
Le sénateur Beaudoin: La modification me pose un problème. Nous en avons discuté. La question est devant la Cour d'appel. Vous avez soulevé certains doutes, et je le comprends, mais il n'en reste pas moins que la jurisprudence s'oriente dans une autre direction. Je me trouve dans une situation difficile.
Le sénateur Grafstein: Je comprends. Je m'appuie sur deux motifs pour demander la modification. Le premier a trait à la politique, et c'est, je crois, M. Doob qui a le mieux résumé la situation en déclarant que la disposition était sans justification et inutile et qu'une preuve abondante laisse entendre qu'il ne s'agit pas d'une politique positive. De même, on a soulevé de sérieuses réserves au sujet des questions constitutionnelles, de questions liées à la Charte et au respect de la Charte des Nations Unies. Essentiellement, la politique constitue un empiétement, tandis que, à mon avis, la Constitution se montrera protective.
La présidente: Comme nous avons adopté les modifications de l'article 2, je suis d'avis, honorables sénateurs, que nous devrions adopter celles-ci par souci d'uniformité.
La modification est-elle adoptée?
Des voix: Adopté.
La présidente: Adopté, avec dissidence. L'article 61 modifié est-il adopté?
Des voix: D'accord.
La présidente: Adopté, avec dissidence. Les articles 62 à 75 sont-ils adaptés?
Des voix: D'accord.
La présidente: Adopté. Nous allons maintenant passer à l'article 76. Y a-t-il des modifications à l'article 76?
Le sénateur Beaudoin: Oui, je propose:
Que le projet de loi C-7 soit modifié, à l'article 76, à la page 79, par substitution, aux lignes 14 à 17, de ce qui suit:
«b) soit dans une aire réservée d'un établissement correctionnel provincial pour adultes, à l'écart de tout adulte qui y est détenu ou sous garde;
c) soit, dans le cas d'une peine de deux ans ou plus, dans une aire réservée d'un pénitencier, à l'écart de tout adulte qui y est détenu ou sous garde.»Si je propose cette modification, c'est parce que la Cour suprême a affirmé de façon très nette, dans au moins un ou deux arrêts, que le système de justice pour les adolescents devrait être différent du système de justice pour les adultes. Que la justice soit non seulement rendue mais qu'il soit évident qu'elle est rendue. Il ne devrait pas être évident qu'elle est rendue dans les pénitenciers et les établissements correctionnels.
Je propose également une modification des alinéas 6b) et c) à la page suivante. Il est important que les adolescents ne soient pas mêlés aux adultes.
La présidente: Sénateur Beaudoin, je n'ai pas la deuxième modification.
Le sénateur Beaudoin: C'est à la page 80.
La présidente: J'ai sous les yeux une modification de l'article 76 à la page 79.
Le sénateur Di Nino: Est-ce exactement la même chose?
Le sénateur Beaudoin: C'est exactement la même chose. Nous venons tout juste de nous en rendre compte.
La présidente: Peut-être devrions-nous proposer l'adoption de celle-ci et nous occuper ensuite des autres dispositions.
Le sénateur Beaudoin: Nous devons d'abord en faire la rédaction.
Le sénateur Fraser: Modifiez-vous votre proposition, sénateur Beaudoin, de manière à apporter la modification de la disposition que vous venez tout juste d'évoquer?
La présidente: Vous proposez maintenant un sous-amende ment visant à modifier la formulation des alinéas (6)b) et c) exactement de la même façon.
Le sénateur Beaudoin: De la même façon, avec les mêmes mots.
La présidente: Nous allons aborder toutes ces questions simultanément.
Le sénateur Moore: Cependant, ce ne sont pas les mêmes lignes qui sont visées.
La présidente: Nous allons aussi établir correctement les renvois aux lignes. Il s'agit des lignes 17 à 21 de l'article 76, à la page 80.
Des commentaires?
Le sénateur Beaudoin: Puisque la cour a déjà affirmé clairement que les systèmes doivent être différents, je ne vois pas, comme je l'ai indiqué, pourquoi le même raisonnement ne s'appliquerait pas à un établissement correctionnel ou à un pénitencier. Un prisonnier peut en influencer un autre. Comme il existe un système de justice spécial pour les adolescents, je pense que l'organisation matérielle des établissements correctionnels et des pénitenciers devrait en rendre compte. C'est nouveau.
La présidente: Sénateur Beaudoin, je suis d'accord avec vous pour dire que des aires distinctes devraient être prévues, mais la mesure risque d'avoir des conséquences graves pour les centres plus petits. Je pense au Nunavut, où on ne sera peut-être même pas en mesure d'aménager un établissement correctionnel ou un pénitencier distinct.
Le sénateur Beaudoin: Ils ont de l'argent.
La présidente: On est peut-être en train d'aménager un établissement correctionnel pour une seule personne.
Le sénateur Cools: On peut assigner une cellule.
Le sénateur Fraser: Une pièce.
Le sénateur Joyal: On ne dit pas qu'il faut prévoir un immeuble séparé.
La présidente: On dit: «à l'écart».
Le sénateur Beaudoin: Naturellement, il peut s'agir du même immeuble.
La présidente: D'autres commentaires?
Le sénateur Di Nino: L'expression «à l'écart» figure déjà dans les deux dispositions. On ne fait que reprendre le même libellé.
Le sénateur Pearson: Il ne fait aucun doute que je suis d'accord pour qu'on fasse le nécessaire pour que les adolescents soient tenus à l'écart des autres détenus. Je n'avais pas la même interprétation des dispositions. Je vais donc m'abstenir jusqu'à ce que vous m'ayez convaincue que la proposition que vous m'avez faite est nécessaire.
Le sénateur Joyal: J'ai soulevé la question dans le discours que j'ai prononcé au stade de la deuxième lecture. S'il existe un principe établi clairement dans la convention internationale, c'est qu'on ne peut mêler des jeunes délinquants à des délinquants adultes. Arranger les choses comme il vous plaira, c'est la réalité. Je ne pense pas que la modification aille trop loin. On ne dit pas qu'il faut aménager ailleurs un lieu autonome. La version française de la modification est claire.
[Français]
«À l'écart de tout adulte»En principe, cela signifie que les jeunes doivent se trouver dans un endroit où ils ne peuvent pas communiquer avec des adultes. Évidemment, si des fonds énormes sont disponibles, on peut construire ces endroits pour les jeunes, mais ce n'est pas ce qui est précisé dans l'amendement.
[Traduction]
La modification montre qu'on doit tenir compte de l'intérêt des enfants lorsqu'on les place dans un centre de détention pour adultes.
La présidente: Nous allons voter sur le sous-amendement et la modification en même temps. Les sénateurs sont-ils d'accord avec le sous-amendement et la modification?
Des voix: D'accord.
Le sénateur Pearson: Avec dissidence.
La présidente: Adopté, avec dissidence. L'article 76 modifié est-il adopté?
Des voix: D'accord.
Une voix: Avec dissidence.
La présidente: Adopté, avec dissidence. Les articles 77 à 109 sont-ils adoptés?
Des voix: D'accord.
La présidente: Adopté. Nous allons maintenant passer à l'article 110.
Le sénateur Beaudoin: La modification se lit comme suit:
Que le projet de loi C-7 soit modifié, à l'article 110, à la page 113, par substitution, aux lignes 25 et 26, de ce qui suit:
«(2) Lorsque, sur demande du poursuivant, le tribunal pour adolescents juge que l'intérêt public sera ainsi mieux servi, le paragraphe (1) ne s'applique pas si les renseigne ments:»La disposition, qui figure à la page 113, a trait à la publication des noms. Le sénateur Fraser a souvent abordé la question.
Le sénateur Fraser: Pouvez-vous expliquer le sens de la modification?
Le sénateur Beaudoin: Elle a trait à la marge de manoeuvre dont bénéficie le poursuivant. Le sénateur Joyal a accordé une certaine marge de manoeuvre au procureur général, et ici, nous accordons une certaine marge de manoeuvre au poursuivant en précisant qu'un paragraphe ne s'applique pas.
Le sénateur Fraser: Permettriez-vous malgré tout la publication du nom de ces adolescents?
Le sénateur Beaudoin: Oui, si la mesure est dans l'intérêt du public.
Le sénateur Di Nino: C'est ce que fait la disposition.
Le sénateur Beaudoin: La question est de savoir si nous accordons ou non cette marge de manoeuvre.
Le sénateur Grafstein: Il s'agit une fois de plus d'un compromis entre le droit tous azimuts de rendre publics des noms et l'imposition au système d'une obligation plus lourde de justifier la publication dans des circonstances exceptionnelles, lorsque l'intérêt du public l'exige. Voilà le bien-fondé. La modification n'a pas pour effet d'interdire la publication. En introduisant la notion d'«intérêt public», on assujettit la publication à un critère plus rigoureux.
Le sénateur Beaudoin: Exactement. Dans ce cas-ci, ce sont les mots «intérêt public» qui font foi de tout.
Le sénateur Fraser: Nous avons fait passer l'âge de 14à 16 ans dans tous les cas, n'est-ce pas?
Le sénateur Beaudoin: Oui.
Le sénateur Fraser: L'avons-nous fait également pour les peines pour adultes?
Le sénateur Di Nino: Avec les deux modifications, vous avez relevé la barre pour les deux.
Le sénateur Beaudoin: On doit interpréter les deux modifications, la vôtre et celle-ci, de concert. C'est possible.
Le sénateur Fraser: On a conservé l'alinéa 62b), qui contient une référence aux jeunes de 14 ans.
Le sénateur Beaudoin: Il s'agit d'un pouvoir discrétionnaire conféré au poursuivant.
La présidente: Non, ce pouvoir discrétionnaire est conféré au tribunal pour adolescents, à la demande du poursuivant.
Le sénateur Fraser: Si vous avez pour but de venir en aide aux adolescents, sénateur Beaudoin, vous devriez savoir qu'il y a un grand nombre de provinces dans lesquelles les poursuivants ne feront jamais un telle demande.
Le sénateur Beaudoin: Êtes-vous en train de dire qu'ils ne se prévaudront jamais de la marge de manoeuvre qui leur est accordée?
Le sénateur Fraser: Ils ne demanderont jamais à ce que soit préservée la confidentialité des adolescents.
Le sénateur Di Nino: Une telle marge de manoeuvre est offerte dans d'autres secteurs.
Le sénateur Fraser: Je veux que cela soit clair. Je ne suis pas certaine que la modification fera quoi que ce soit pour empêcher qu'arrive ce qui va arriver de toute façon.
Le sénateur Beaudoin: Le point qu'on a pris en considération est le suivant, et je vais en faire lecture en français:
[Français]
[...] enlever la publication automatique du jeune délinquant, imposer un fardeau à la Couronne pour justifier la publication du nom du jeune contrevenant.[Traduction]
La modification vise à annuler la publication automatique du nom du délinquant et à imposer à la Couronne l'obligation de justifier la mesure. Elle a pour but de venir en aide aux adolescents.
Le sénateur Fraser: Dans ce cas, je retire ce que j'ai dit. Pardonnez-moi.
Le sénateur Di Nino: Je pense que vous aviez mal compris.
Le sénateur Fraser: En fait, j'avais compris le contraire.
Le sénateur Andreychuk: Le sénateur Nolin était très favorable à la modification. Malheureusement, il est en déplacement avec un autre comité. Ce qu'il craint, c'est que, dans une province comme le Québec - et c'était également le point que vous souleviez, sénateur Fraser - le procureur général ou le poursuivant voit la question différemment. C'est leur privilège. Ils bénéficient là d'une marge de manoeuvre suffisante. Cependant, une province comme le Québec, qui ne semble pas tenir à la publication autant que d'autres, pourrait invoquer la disposition pour faire ce qu'elle croit être dans l'intérêt public et dans celui des adolescents. On confère aux provinces des pouvoirs discrétionnaires qui ne sont pas dans le projet de loi. Sans la modification, la publication est obligatoire. Le sénateur Tkachuk avait une position plutôt ferme à ce sujet. J'espère avoir bien résumé sa position.
La présidente: D'autres commentaires au sujet de la proposition?
Le sénateur Cools: J'ai du mal à voir où l'alinéa a) se greffe. On dit qu'il remplace les lignes 25 et 26. On lit donc: «l'alinéa a) continue donc après les mots «ne s'applique pas si les renseignements».
La présidente: Toutes les autres dispositions suivent. Il s'agit de l'ajout d'une disposition.
Le sénateur Beaudoin: On supprime les lignes 25 et 27. La disposition débute par les mots «Lorsque, sur demande du poursuivant»?
Le sénateur Moore: Il faut supprimer le point qui figure dans la version anglaise.
Le sénateur Beaudoin: Le paragraphe (2) débute alors par: «Lorsque, sur demande du poursuivant»?
Le sénateur Cools: Le point de la version anglaise ne s'applique pas. Il est faux.
Le sénateur Moore: Supprimez le point à la fin de votre modification et tout ira bien.
Le sénateur Cools: Oui. Il faut supprimer le point après le mot «apply» dans la version anglaise.
La présidente: Si je puis me permettre une autre observation, je vous rappellerai que le paragraphe (3) de l'article 75 à la page 78, se lit comme suit: «Le juge du tribunal pour adolescents peut par ordonnance, à la demande du procureur général ou de l'adolescent, interdire la publication de tout renseignement permettant de constater que celui-ci a fait l'objet de mesures prises sous le régime de la présente loi». N'est-ce pas redondant?
Le sénateur Fraser: Non. On inverse le fardeau de la preuve. La mesure fait référence, me semble-t-il, à d'autres types d'information susceptibles de filtrer.
Le sénateur Cools: Celle-ci a trait aux ordonnances de non-publication.
Le sénateur Beaudoin: Nous obligeons la Couronne à justifier la publication.
Le sénateur Andreychuk: Il s'agit dans ce cas-ci de l'identité. L'autre disposition porte sur l'information.
Le sénateur Fraser: Les dispositions sont proches, mais l'obligation est différente.
Le sénateur Joyal: La disposition s'applique à la demande de l'adolescent. C'est relativement différent.
Le sénateur Cools: Celle-ci, à la page 78, donne à l'adolescent la possibilité de présenter une telle demande.
La présidente: À ce stade-là, il y aura des demandes contraires.
Le sénateur Moore: La version anglaise de la modification du sénateur Beaudoin prend fin par les mots «does not apply», point. Le point devrait être supprimé.
La présidente: Le point est à l'extérieur des guillemets.
Le sénateur Moore: D'accord.
La présidente: Le point ne s'applique pas parce qu'il est à l'extérieur des guillemets.
La modification est-elle adoptée?
Des voix: D'accord.
La présidente: Adopté, avec dissidence. L'article 110 modifié est-il adopté?
Des voix: D'accord.
La présidente: Adopté, avec dissidence. Les articles 111 à 112 sont-ils adoptés?
Des voix: D'accord.
La présidente: Adopté. Honorables sénateurs, nous avons encore trois modifications et une toute nouvelle disposition à étudier.
Le sénateur Beaudoin: Sénateurs, je souhaite modifierl'article 125. Je propose:
Que le projet de loi C-7 soit modifié, à l'article 125:
a) à la page 129, par suppression des lignes 1 à 9;
b) aux pages 129 et 130, par le changement de la désignation numérique des paragraphes 125(5) à (8) à celle de paragraphes 125(4) à (7) et par le changement de tous les renvois qui en découlent.Il s'agit d'une modification purement accessoire.
La présidente: Souhaitez-vous, sénateur Beaudoin, défendre votre proposition?
Le sénateur Di Nino: J'aimerais bien qu'on me fournisse des explications.
La présidente: C'est ce que je demande au sénateur Beaudoin de faire.
Le sénateur Beaudoin: Nous ne voulons pas que le dossier du jeune délinquant soit remis à une compagnie d'assurances, à moins que la communication ne serve directement aux fins du règlement d'une demande d'indemnité. C'est la raison de la modification.
La présidente: Si un adolescent cause toutes sortes de dommages, la compagnie d'assurances ne peut obtenir de renseignements au moment de l'étude de la demande d'indemnité menée en relation avec l'infraction commise par l'adolescent.
Le sénateur Beaudoin: Je sais que vous allez conclure qu'il s'agit d'une protection très spéciale accordée à l'adolescent. Cependant, l'un des objets du projet de loi consiste à assurer la réhabilitation de l'adolescent. Par conséquent, on doit toujours avoir l'intérêt public présent à l'esprit. Le fait est que le projet de loi vise plus d'un objectif.
La présidente: Une telle mesure aurait pour effet d'éliminer toute forme de demande d'indemnité.
Le sénateur Grafstein: Non.
Le sénateur Beaudoin: Nous ne voulons pas que la compagnie d'assurances intervienne, sauf, bien entendu, aux fins del'assurance. Le dossier du jeune délinquant demeurera secret, si je puis m'exprimer ainsi. La compagnie d'assurances n'en tiendra pas compte.
La présidente: Ce n'est pas ce que je comprends. À mes yeux, votre explication va dans le sens contraire de ce que fait la modification.
Le sénateur Beaudoin: Nous pouvons y revenir plus tard.
Le sénateur Joyal: La modification a pour effet de supprimer ou d'effacer le paragraphe (4). Elle n'empêche pas une compagnie d'assurances de traiter une demande d'indemnité. La disposition l'empêche essentiellement d'utiliser le dossier.
Le sénateur Fraser: La disposition porte que l'agent de la paix ne peut rien dire à la compagnie d'assurances.
Le sénateur Beaudoin: Selon le paragraphe existant, un agent de la paix peut communiquer des renseignements à une compagnie d'assurances aux fins de l'investigation d'une réclamation. Nous voulons éliminer cette possibilité.
Le sénateur Fraser: Je sais que vous voulez l'effacer, sénateur. Toutefois, une telle suppression occasionnerait un changement beaucoup plus global que ce à quoi je m'attendais. Vous m'avez tous entendue tempêter contre la divulgation du nom de jeunes contrevenants aux compagnies d'assurances, et contre le fait que ces noms et les dossiers qui s'y rattachent disparaissent dans les dossiers des compagnies. On ne m'a jamais expliqué clairement en quoi cette pratique est utile, même si on m'a dit que cette pratique est actuellement en vigueur. Je crois qu'on m'a dit ça. Tout ça est très étrange.
Cependant, je me dois de convenir qu'une compagnie d'assurances devrait avoir la possibilité, après le vol d'une voiture, par exemple, de communiquer avec la police et demander: «Est-ce que cette automobile a été déclarée volée? L'avez-vous retrouvée?» Une telle démarche serait interdite par votre modification.
La présidente: Cela peut signifier que ma compagnie d'assurances ne serait pas en mesure d'obtenir de rapport d'accident si un jeune de 17 ans entre en collision avec mon véhicule à un feu de circulation.
Le sénateur Di Nino: Cela peut être plus grave encore. Cette jeune personne peut avoir incendié une église, par exemple, et causé la mort d'une personne. Je ne peux appuyer cette modification.
Je suis d'accord avec le sénateur Beaudoin. Cela dit qu'un agent de la paix peut divulguer de l'information sur une infraction commise ou présumée avoir été commise par la jeune personne visée par le dossier.
C'est directement lié au crime commis par cette jeune personne, si j'ai bien compris. On ne dit pas de divulguer toute l'information. On dit seulement que, si la police arrête une jeune personne pour avoir volé une automobile, pour être entrée en collision avec l'arrière d'un autre véhicule, pour avoir incendié une église, ou pour avoir commis tout crime qui concernerait de quelque façon que ce soit une compagnie d'assurances, il faut permettre à cette dernière d'obtenir l'information relative à l'infraction.
Le sénateur Fraser: Retirez-la. Si vous la remaniez, vous pourriez la présenter de nouveau au moment de la troisième lecture.
Le sénateur Beaudoin: Ce n'est pas ma modification.
Le sénateur Fraser: J'avais l'impression qu'elle n'était pas de vous. Vous auriez fait mieux.
Le sénateur Beaudoin: Je n'ai pas d'objection à ce que la modification soit retirée.
Le sénateur Andreychuk: Je propose:
Que le projet de loi C-7 soit modifié, à l'article 125:
a) à la page 129, par adjonction, après la ligne 36, de ce qui suit:«(7) Le juge du tribunal pour adolescents doit communiquer les renseignements contenus dans un dossier tenu en application de l'article 114 au représentant d'un conseil scolaire, d'une école ou de tout autre établissement d'enseignement ou de formation, en vue, selon le cas:
a) de faire en sorte que l'adolescent se conforme à toute autorisation visée à l'article 91 ou à toute décision rendue par le tribunal pour adolescents;
b) d'assurer la sécurité du personnel, des étudiants ou d'autres personnes;
c) de favoriser la réadaptation de l'adolescent.»;
c) aux pages 129 et 130, par le changement de la désignation numérique des paragraphes 125(7) et (8) à celle des paragraphes 125(8) et (9) et par le changement de tous les renvois qui en découlent.Mon argument est le suivant: la disposition actuelle concernant un directeur provincial ou un délégué à la jeunesse, un procureur général, un agent de la paix ou toute autre personne qui fournit des services aux jeunes, y compris les écoles et les établissements de formation, est étendue et permissive. Je crois qu'elle est valable sous sa forme actuelle. Toutefois, les enseignants nous ont soumis des arguments convaincants. Vous vous rappellerez la déclaration de Priscilla de Villiers selon laquelle de nombreuses victimes sont des jeunes, et lorsque le contrevenant est une jeune personne, elle est susceptible de se retrouver dans la même salle de classe. Il faut se préoccuper de la sécurité des enseignants et des autres étudiants, et c'est aussi une préoccupation légitime en ce qui concerne la réadaptation des jeunes contrevenants.
J'ai l'impression que leur demande initiale de remplacer le mot «peut» par «doit» était trop englobante et visait tous ces autres dossiers, car il faut revenir aux articles 114, 115 et 116. Elle pourrait même inciter le Commissaire à la protection de la vie privée, entre autres, à contester l'article. Il serait trop coûteux de divulguer ces dossiers à l'école et, bien que ce serait utile, ce n'est pas absolument nécessaire. Je crois qu'il est indiqué d'envisager l'attribution au juge du tribunal pour adolescents d'un pouvoir discrétionnaire de rendre une décision, compte tenu des précautions énoncées en a), b) et c). Je crois que les enseignants sont une ressource sous-estimée pour les jeunes contrevenants, et les juges et les délégués à la jeunesse diraient que nous devons faire entrer les enseignants, en particulier, dans le système de justice pour les jeunes, afin qu'ils deviennent une ressource non pas concurrente, mais bien positive pour l'enfant.
Par conséquent, il est important pour nous de faire savoir que nous croyons que les enseignants sont une bonne ressource pour les jeunes; cette modification ne fournit d'aucune façon ce qu'ils ont demandé, mais elle limite tout simplement la divulgation à ce que je crois être le besoin réel de savoir.
Le sénateur Grafstein: N'est-ce pas ce que prévoit le paragraphe (6)?
Le sénateur Andreychuk: Non, il est permissif. Je parle d'une disposition obligatoire.
Le sénateur Fraser: Le sénateur Andreychuk ne sera pas étonnée d'apprendre que je ne voterai pas pour cette modification. Nous avons déjà tenu de chauds débats sur cette question. Techniquement, j'ai l'impression qu'au lieu de remplacer la ligne 36, vous remplacez le paragraphe (6)
Le sénateur Andreychuk: Oui, d'accord.
Le sénateur Grafstein: Les deux dispositions sont en conflit.
Le sénateur Fraser: Alors, la ligne 36 reprendrait avec le paragraphe (7).
Le sénateur Andreychuk: La modification cherche à maintenir le paragraphe (6), à créer un nouveau paragraphe (7) et à déplacer les autres.
La présidente: Je suis confuse.
Le sénateur Fraser: Il faudrait l'intégrer avant la ligne 36, ou après la ligne 35.
Le sénateur Di Nino: Par conséquent, dans la deuxième partie, il faudra renuméroter à partir de 125(7).
Le sénateur Fraser: Si nous remplaçons la ligne 36, il faudra la rétablir, car le sénateur conserve le paragraphe (7) original.
Le sénateur Andreychuk: Je sais ce que je voulais faire, et j'ai consulté les rédacteurs. On m'a dit que l'article devait être rédigé de cette façon.
Le sénateur Grafstein: C'est une manoeuvre technique compliquée, en raison des paragraphes (6), (5) et (7). Encore une fois, à moins que nous comprenions tout cela très clairement, nous devrions peut-être suggérer au sénateur de retirer sa proposition. Lorsqu'elle aura tout clarifié, nous pourrons proposer une modification à l'occasion de la troisième lecture.
Le sénateur Andreychuk: Je préfère qu'on le fasse ici et maintenant. Je demande votre appui.
La présidente: Alors, sénateur Andreychuk, vous devriez peut-être nous fournir des explications précises, parce que si, à la page 129, on remplace la ligne 36, qui se lit comme suit: (7) toute personne à qui sont communiqués des renseignements...
Le sénateur Fraser: Vous ne voulez pas retirer cette disposition.
Le sénateur Di Nino: On peut résoudre le problème en renumérotant. C'est ce qui est prévu. Que la formulation soit bonne ou pas, vous placez cette nouvelle disposition entre les paragraphes (6) et (7).
La présidente: Puis-je suggérer, alors, sénateur Andreychuk, que vous reformuliez votre proposition en disant: «En intégrant après la ligne 35»?
Le sénateur Andreychuk: D'accord.
Le sénateur Di Nino: Et en modifiant toute la numérotation par la suite.
Le sénateur Andreychuk: La proposition consiste donc à conserver le paragraphe (6), à créer un nouveau paragraphe (7) et à renuméroter les paragraphes subséquents.
La présidente: Est-ce que tout le monde est d'accord?
Le sénateur Pearson: Même si je suis solidaire avec le sénateur Andreychuk concernant de nombreux aspects qu'elle a soulevés aujourd'hui, je ne suis pas d'accord avec celui-ci, surtout après avoir parlé avec certains jeunes contrevenants. Ce n'est pas la permission ou la possibilité de divulguer l'information qui favorisera l'exécution de la loi. En Ontario, la situation actuelle fait en sorte qu'un jeune garçon a été accusé en raison de quelque chose qu'il a écrit, ce qui témoigne de la réticence des commissions scolaires à confronter ces problèmes. Bien souvent, lorsqu'elles obtiennent l'information, elles veillent à ce que l'enfant ne se présente pas du tout à l'école. Je ne me sens pas à l'aise avec l'idée de rendre la divulgation obligatoire. Je n'ai pas la même confiance que le sénateur Andreychuk. J'ai beaucoup de respect pour les enseignants, mais, comme c'est le cas partout ailleurs, certains sont fantastiques, et d'autres ne le sont pas.
Le sénateur Andreychuk: Je suis heureuse que vous ayez formulé ce dernier commentaire, car j'ai l'impression que des milliers d'enseignants de partout au pays sont probablement la meilleure ressource, voire même, dans certains cas, meilleures que les parents.
Le sénateur Di Nino: Dans certains cas, ils constituent la seule ressource.
Le sénateur Andreychuk: Il n'est pas productif de signaler qu'il y a des enseignants négatifs. Il y a des gens négatifs dans toutes les professions. Nous devons miser sur la compétence des gens qui font bien leur travail.
L'autre facteur qui m'a convaincue, c'est que plus de 50 p. 100 des jeunes qui comparaissent devant le tribunal sont sous garde. La capacité existe, de plein droit, de divulguer aux enseignants ce qu'ils veulent savoir au sujet des enfants sous garde. Je tiens beaucoup à cet aspect. C'est un moyen de mettre tous les enfants sur un pied d'égalité, et de ne pas placer dans une catégorie différente les enfants désavantagés en raison de difficultés parentales.
Je crois fermement que nous devrions, à titre de collectivité, appuyer ces enseignants, au moins offrir ce que propose cette modification. La modification ne leur donne pas ce qu'ils ont demandé, ce n'en est qu'une petite partie. On exerce un contrôle sur les connaissances judiciaires, et ce contrôle ne leur permet pas d'obtenir tous les dossiers qu'ils demandent. C'est un signal clair que nous devrions soutenir les enseignants. Ils sont sous-payés et sous-évalués, mais ils sont, dans de nombreux cas, notre plus importante ressource.
J'accorde beaucoup d'importance au soutien des enseignants. Si je n'obtiens pas l'appui du comité aujourd'hui, je soulèverai la question de nouveau à l'occasion de la troisième lecture.
Le sénateur Fraser: J'aimerais apporter une clarification. J'aimerais signaler que les enseignants, comme tous les autres groupes, comptent dans leurs rangs un certain nombre de personnes sadiques ou d'autres personnes peut-être moins répréhensibles, mais néanmoins dangereux. Le principal élément qui les distingue de nous, c'est que nous leur attribuons déjà un pouvoir énorme sur nos enfants. Je suis tout à fait d'accord avec le sénateur Pearson sur la question. Je voudrais que l'on conserve le pouvoir discrétionnaire de divulguer ou non à un enseignant donné, voire même à une école donnée, de l'information qui pourrait ruiner la vie d'un enfant.
Le sénateur Di Nino: J'appuie la proposition parce que je crois qu'elle pourrait sauver la vie d'un enfant. Elle n'est pas fondée sur des motifs frivoles. Les enjeux sont énoncés clairement et fermement. Je ne comprends pas comment on peut s'opposer à ce genre d'initiatives ou de modifications suggérées.
Nous parlons de fournir aux écoles la capacité de contribuer à la réadaptation de l'enfant et de veiller à ce que d'autres enfants ne souffrent pas. Je suis d'accord avec l'affirmation de ma collègue selon laquelle les enseignants sont, trop souvent, la seule ressource disponible. Je crois que c'est une bonne proposition.
Le sénateur Cools: Dans le cas d'un jeune contrevenant dont, par exemple, la probation s'assortit de certaines conditions, comment un enseignant peut-il l'aider si on ne peut l'informer des conditions de probation? Quelle est l'intention de cettemodification?
Le sénateur Andreychuk: Elle est obligatoire.
Le sénateur Cools: Elle n'est pas obligatoire.
Le sénateur Andreychuk: Elle dit: «doit communiquer».
Le sénateur Di Nino: Sous réserve de conditions strictes.
La présidente: La disposition est discrétionnaire, en vertu du paragraphe 6.
Le sénateur Cools: Je ne suis pas certaine si l'ensemble de la modification proposée est imparfaite, ou s'il s'agit de remplacer un ou deux mots. Si j'ai bien compris, la formulation suggérée prévoit que le juge doit divulguer l'information, sous réserve de certaines conditions. La première condition, c'est que la divulgation soit nécessaire. Ensuite, les alinéas a), b) et c) énoncent un autre ensemble de conditions sur la nécessité. Vous pouvez dire qu'elle est obligatoire, mais elle est très conditionnelle. Est-ce votre intention?
Le sénateur Andreychuk: Oui. Je veux que la divulgation n'ait lieu que lorsqu'elle est nécessaire, et l'alinéa a) vous dit d'en assurer l'exécution. Ensuite, vous passez aux alinéas b) ou c). Le juge franchit toutes ces étapes avant de divulguer l'information à l'école. C'est ce que je disais.
Le paragraphe (6) est facultatif en ce qui concerne une foule d'éléments d'information, visés par les articles 114 à 116. Je croyais que cela était excessif. L'article 114 explique ce qui sera divulgué. C'est tout. C'est un pas dans la bonne direction. Une part importante des autres renseignements qui pourraient être utiles à une école devraient aussi avoir un contrepoids. Certains de ces dossiers sont très subjectifs et pourraient porter préjudice à une jeune personne. C'est le minimum d'information qui ressort d'un tribunal.
Le sénateur Cools: Je suis disposée à appuyer la proposition.
Le sénateur Grafstein: Je ne crois pas qu'un juge confronté à une demande juste et équitable n'exercerait pas son pouvoir discrétionnaire de façon appropriée. Cependant, d'autres raisons peuvent inciter un juge à émettre une telle ordonnance; il est possible que le demandeur de renseignements ou le contexte scolaire soit pertinent. Il existe une foule de motifs susceptibles d'échapper aux alinéas a), b) ou c).
Le système de justice pour les jeunes est fondé sur le recours à des juges expérimentés et compétents, des spécialistes qui, dans l'ensemble, ont un bon jugement, et sur l'attribution à ces juges d'un pouvoir discrétionnaire.
Au bout du compte, ce n'est pas un pouvoir discrétionnaire. Je peux imaginer des demandes douteuses devant les tribunaux, où le juge n'est pas d'accord avec la commission scolaire, en particulier lorsque l'infraction crée une ambiance de danger accru. Nous avons vu des écoles exploser.
Je comprends le motif de cette proposition, mais elle déforme l'essence même du projet de loi, c'est-à-dire d'attribuer le pouvoir décisionnel à des personnes responsables et d'établir des freins et des contrepoids convenables.
Je n'ai d'autre choix que d'appuyer le sénateur Pearson et les autres sur cette question. Soit on fait confiance au système de justice pour les jeunes, soit on attribue un pouvoir exagéré à des personnes qu'on ne peut nécessairement maîtriser.
Je prévois beaucoup de demandes qui feraient l'objet d'une contestation énorme. Les tribunaux s'embourberaient dans des situations très émotives. Si le sénateur remplace le mot «doit» par «peut», je n'ai aucune objection mais je ne peux accepter le mot «doit».
La présidente: S'il n'y a pas d'autres commentaires sur la proposition, j'inviterais la greffière à procéder à l'appel nominal.
Le sénateur Andreychuk: D'accord.
La présidente: Non.
Le sénateur Beaudoin: D'accord.
Le sénateur Buchanan: Oui.
Le sénateur Cools: Oui.
Le sénateur Di Nino: Oui.
Le sénateur Fraser: Non.
Le sénateur Grafstein: Non.
Le sénateur Joyal: Je m'abstiens
Le sénateur Moore. Non.
Le sénateur Pearson: Non.
Le sénateur Rivest: Oui.
La présidente: Adopté. Est-ce que l'article 125 ainsi modifié est adopté?
Des voix: Oui.
Des voix: Avec dissidence.
La présidente: Adopté avec dissidence. Est-ce que lesarticles 126 à 145 sont adoptés?
Des voix: Oui.
La présidente: Adopté. Est-ce que l'article 146 est adopté?
Le sénateur Beaudoin: Honorables sénateurs, je propose:
Que le projet de loi C-7 soit modifié, à l'article 146:
a) à la page 145, par suppression des lignes 32 à 42;
b) à la page 146, par le changement de la désignation numérique des paragraphes 146(7) à (9) à celle des paragraphes 146(6) à (8) et par le changement de tous les renvois qui en découlent.Le Barreau canadien a proposé cette modification. Il a suggéré que soient automatiquement exclues les déclarations et les preuves provenant du jeune contrevenant s'il y a irrégularité technique. C'est une question de preuve. C'est une question de droits et de procédure.
Je suis d'accord avec le Barreau canadien. Il n'y a pas de raison valide de conserver le paragraphe (6). Le juge du tribunal pour adolescents ne devrait pas admettre en preuve la déclaration visée aux alinéas 2b) à d) si elle est entachée d'irrégularités techniques. Il s'agit, encore, d'une protection spéciale pour le jeune contrevenant, mais la Charte fait toujours l'objet d'une interprétation large. Dans notre système judiciaire, la procédure est fondamentale. S'il y a une telle irrégularité, je ne vois pas pourquoi nous devrions accorder cette latitude à un juge du tribunal pour adolescents. Je crois qu'il serait préférable, comme l'a suggéré le Barreau canadien, d'exclure automatiquement la preuve ou les déclarations.
Je ne vois pas pourquoi nous devrions conserver des éléments de preuve qui n'ont pas été obtenus par les voies de droit régulières.
Le sénateur Grafstein: Encore une fois, lorsque j'envisage cet article, j'ai deux points de vue. Nous tentons, le plus possible, de tendre vers un modèle non judiciaire, non juridique - un non-paradigme. Je croyais que les protections prévues ici étaient adéquates. J'ai entendu l'Association du Barreau canadien, et je comprends pourquoi on a soulevé cette question, mais envisageons l'article que vous cherchez à supprimer:
(6) Le juge du tribunal pour adolescents peut admettre en preuve une déclaration faite pour l'adolescent poursuivi - même dans le cas où l'observation des conditions visées aux alinéas (2) b) à d) est entachée d'irrégularités techniques -, s'il est convaincu que cela n'aura pas pour effet de déconsidérer le principe selon lequel les adolescents ont droit à la prise de mesures procédurales supplémentaires pour leur assurer un traitement équitable et la protection de leurs droits.
De fait, ce paragraphe leur accorde plus de droits que la Charte. On leur accorde presque les droits prévus dans la charte des Nations Unies, qui prévoit une protection accrue pour les enfants. On prévoit une protection convenable en ce qui concerne les irrégularités techniques. Nous avons entendu un autre son de cloche des services de police, selon lequel ils obtiennent, au chapitre de la médiation et des mesures de rechange, des preuves qui, bien qu'entachées d'irrégularités techniques, sont très significatives et appropriées.
Les tribunaux sont déjà soumis à des normes rigoureuses en ce qui concerne l'admission de preuves entachées d'irrégularités techniques. Par exemple, comme vous le savez, une confession peut être admise en preuve, même lorsqu'il y a des irrégularités techniques. Cela renvoie à la question de la vérité. Notre système est différent du système américain à cet égard. Le critère, sous sa forme actuelle, est bon et sensé, et il fournit au tribunal toute la souplesse dont il a besoin pour aller au coeur du problème, pour se pencher non seulement sur l'infraction, mais aussi sur sa nature. Je suis à l'aise avec cette notion.
Le sénateur Beaudoin: Le barreau n'était pas à l'aise avec cette notion, tout comme le Conseil canadien des organismes provinciaux et de nombreux autres témoins qui ont comparu devant notre comité. Ils se sont tous rangés de notre côté.
La Cour suprême a statué que des preuves irrégulières peuvent être acceptées dans certaines situations. Cependant, dans le cas de jeunes contrevenants, s'il y a possibilité que les preuves ou les déclarations recueillies soient rejetées en raison d'irrégularités techniques, il est certain que le bénéfice du doute doit aller aux jeunes contrevenants. Ils ont besoin d'une plus grande protection que les adultes. Je suis d'accord avec vous.
Le sénateur Grafstein: Mais il y a un critère supérieur. Regardez au bas du paragraphe.
[...] s'il est convaincu que cela n'aura pas pour effet de déconsidérer le principe selon lequel les adolescents ont droit à la prise de mesures procédurales supplémentaires [...]C'est un critère supérieur, une protection supérieure à celle qu'on prévoit pour les adultes, afin de veiller à ce que les jeunes contrevenants soient traités équitablement et à ce que leurs droits soient protégés.
Les policiers ont soulevé l'exemple d'un jeune qui, au moment de son arrestation, passe aux aveux avant qu'on lui fasse part de ses droits. Pour utiliser cet aveu, le tribunal doit être convaincu que l'admission de la preuve, nonobstant le fait qu'elle soit entachée d'une irrégularité technique, satisfait à un critère supérieur touchant la protection de l'enfant.
Le sénateur Beaudoin: Je ne vois pas pourquoi nous devrions modifier la disposition, même si je comprends la position adoptée par le Barreau canadien.
Le sénateur Pearson: Ce n'est pas de cette façon que j'avais interprété le témoignage.
Le sénateur Beaudoin: Ils ont demandé qu'on supprime le paragraphe 146(6), mais je me contenterais du paragraphe (6).
Le sénateur Pearson: J'ai cru comprendre que l'Association du Barreau canadien demandait au comité de la Chambre des communes d'apporter ces modifications, et qu'à l'occasion de leur témoignage, les représentants de l'association se disaient satisfaits des modifications.
Le sénateur Beaudoin: La Chambre des communes, c'est la Chambre des communes. Je m'intéresse davantage au Sénat.
Le sénateur Pearson: C'est ce dont je me souviens. J'ai peut-être tort. Je devrai consulter la transcription.
Le sénateur Beaudoin: Ils n'étaient pas seuls.
Le sénateur Pearson: J'ai soulevé mon point. La consultation de la transcription prouvera peut-être que j'ai tort, mais il me semble que l'Association du Barreau était heureuse des modifications apportées, car c'était ce qu'elle reprochait au projet de loi auparavant.
Le sénateur Beaudoin: Dites-vous que l'Association était d'accord avec le paragraphe 146(6)?
Le sénateur Pearson: C'est ce dont je me souviens. J'ai peut-être tort.
La présidente: Nous sommes en train de chercher.
Le sénateur Fraser: Je suis tout à fait d'accord avec la prise de position très claire et éloquente du sénateur Grafstein. J'aimerais fournir un autre exemple d'éléments susceptibles d'être considérés comme une irrégularité technique aux termes de ce projet de loi, en vertu des alinéas 2b) à d). Selon l'alinéa 2b), avant de recueillir la déclaration d'un enfant, il faut lui fournir des explications claires, en des termes adaptés à son âge et à sa condition. Je peux imaginer un avocat rusé qui avancerait ce qui suit: «Mon client est âgé de 13 ans et 11 mois, et, dans votre avertissement, vous avez utilisé un langage qui, d'après mes échelles de lecture internationale, convient à un jeune de 14 ans.» Si votre modification était adaptée, la déclaration ne serait pas admise en preuve. Avec le respect que je vous dois, je crois que cette déclaration devrait être admise, à condition que la règle relative à la prise de mesures procédurales supplémentaires s'applique, et elle s'applique.
La présidente: Concernant cette question, je lirai un extrait de la transcription qui pourrait clarifier les choses. Le sénateur Pearson a raison. Voici donc ce qu'on y trouve:
Concernant nos commentaires relatifs à la dernière version [...]
Il s'agissait du projet de loi C-3 présenté à la Chambre des communes, que nous n'avons pas vu.
[...] le gouvernement a modifié les dispositions portant sur l'admissibilité des déclarations de jeunes personnes. Nous sommes heureux de constater que ces changements ont été apportés. Nous n'étions pas satisfaits de la version antérieu re. La version modifiée accorde désormais au juge le pouvoir discrétionnaire de rendre inadmissibles les déclarations de jeunes personnes lorsqu'il y a un vice de forme. La disposition n'est pas aussi englobante que la loi actuelle, et la loi actuelle était équitable. Nous croyons que, dans le contexte actuel, elle n'est peut-être pas nécessaire.Le sénateur Joyal: C'est ce dont je me souvenais.
Le sénateur Beaudoin: Ont-ils dit ça devant le Sénat?
La présidente: Ils l'ont dit devant notre comité. Lorsqu'ils ont parlé de la «dernière version», ils faisaient référence au projet de loi C-3.
Vous pouvez retirer votre proposition, revoir votre position et peut-être proposer une modification à l'occasion de la troisième lecture.
Le sénateur Grafstein: Si ce court extrait de la transcription n'est pas exact et qu'il y a d'autres preuves, rien ne vous empêche de proposer une modification à l'occasion de la troisième lecture. J'examinerai la question plus en détail. Je croyais que cela établissait une norme beaucoup plus élevée que la normale. Voilà pourquoi j'ai supposé que cela a peut-être été modifié depuis la version initiale.
Le sénateur Andreychuk: D'après mon souvenir, cela ne constitue pas une norme supérieure. On était préoccupé par l'interprétation des irrégularités techniques par la police et par leur présentation devant le tribunal. Vous faites référence aux moyens que pourraient prendre les avocats de la défense. Nous venons tout juste de parler des enseignants. Je tente d'atteindre le plus gros dénominateur commun, au lieu du plus petit, afin de veiller à ce que les professionnels agissent de façon appropriée. En toute franchise, j'aimerais examiner cette question plus en profondeur. À mon souvenir, la déclaration était plus nuancée que ce que vous nous avez lu. Bien sûr, nous avons toujours le droit de présenter une proposition à l'occasion de la troisième lecture.
Je me souviens d'avoir entendu dire, à titre d'exemple d'abus, qu'on avait interrompu les enregistrements. On a fait référence à des trous de 18 minutes. J'interprète cela de deux façons. Est-ce que cela avantage la police ou l'accusé? Je ne sais pas. Nous devrions nous pencher sur cette question.
Le sénateur Joyal: Dans son mémoire, le Conseil canadien des avocats de la défense déclare qu'ils n'appuient pas l'érosion de droits de renonciation clairs dans les paragraphes (5) et (6) de l'article 146 relatifs aux «irrégularités techniques». Le conseil affirme aussi qu'une renonciation, surtout lorsqu'elle provient d'une jeune personne, doit être claire et sans équivoque, et ne doit pas prêter le flanc aux irrégularités techniques, qu'elles soient accidentelles ou délibérées. Il signale la possibilité d'abus en ce qui concerne les irrégularités techniques non définies.
Le sénateur Fraser: Au bout du compte, nous avons l'exigence relative aux mesures procédurales supplémentaires. Cela me satisfait.
Le sénateur Joyal: Nous avons eu la même recommandation de la Société John Howard. Ses membres ont déclaré que le paragraphe 145(6) disposition qui permet au tribunal d'admettre des preuves entachées d'irrégularités techniques, devrait être retiré. Les représentants de la société ont expliqué pourquoi.
Le sénateur Beaudoin: Je crois que nous devrions voter sur cette question. Je suis convaincu.
La présidente: Les honorables sénateurs sont-ils prêts à voter? Sommes-nous en faveur de la modification de l'article 146? Je ne le suis pas.
Le sénateur Andreychuk: Oui.
Le sénateur Beaudoin: Oui.
Le sénateur Buchanan: Oui.
Le sénateur Cools: Oui.
Le sénateur Di Nino: Oui.
Le sénateur Fraser: No.
Le sénateur Grafstein: Je m'abstiens.
Le sénateur Joyal: Oui.
Le sénateur Moore: Non.
Le sénateur Pearson: Non.
Le sénateur Rivest: Oui.
La présidente: La modification est adoptée. Est-ce quel'article 146, ainsi modifié, est adopté?
Des voix: Avec dissidence.
La présidente: Est-ce que les articles 147 à 157 sont adoptés?
Des voix: Oui.
La présidente: Adopté. Est-ce que l'article 158 est adopté?
Le sénateur Joyal: Cette proposition a pour but de veiller à ce que, trois ans après l'entrée en vigueur de la loi, et tous lescinq ans, le ministre de la Justice entreprenne un examen complet de l'exécution de cette loi et fasse préparer un rapport sur la question, à l'intention des deux chambres du Parlement, qui s'assortirait de recommandations relatives à des modifications de la loi que le ministre considère comme nécessaires ou souhaitables; le ministre est tenu de consulter, aux fins du rapport, le procureur général de chaque province, les personnes, les groupes ou catégories de personnes ou les organismes nommés ou désignés sous le régime de la présente loi ou d'une loi provinciale, ainsi que les représentants des peuples autochtones du Canada.
La modification prévoirait que dès le dépôt du rapport du ministre de la Justice devant les deux chambres du Parlement, l'examen complet du rapport et des dispositions et de l'applica tion de la présente loi serait entrepris par les comités du Sénat et de la Chambre des communes, ou par un comité mixte que le Parlement désignerait ou constituerait pour déterminer si les objectifs de la présente loi sont réalisés dans les diverses provinces du Canada.
Dans les six mois suivant la fin de l'examen visé par ce paragraphe ou dans le délai supérieur que le Parlement autorise, le comité présentera à celui-ci un rapport de l'examen assorti, s'il y a lieu, des modifications qu'il recommande d'apporter. Bien sûr, il faudra renuméroter les dispositions subséquentes.
Le raisonnement est facile à comprendre. Il s'agit d'un nouveau système, et sa mise en oeuvre sera complexe. On prévoit que les provinces joueront un rôle important au chapitre de la réalisation des objectifs de ce projet de loi. Le projet de loi suppose l'octroi de sommes d'argent supplémentaires qui, nous l'espérons, arriveront bientôt et seront affectées aux aspects du système où le besoin est le plus criant. Il s'agit non pas d'un remaniement du système, mais bien de la création d'une nouvelle base. Je crois qu'il serait tout à fait équitable d'offrir au Parlement la possibilité d'évaluer la réalisation des objectifs, de cerner les problèmes, de déterminer quelles modifications s'imposent, et de présenter un rapport en temps opportun. Ensuite, nous pourrons déterminer si les objectifs du projet de loi, qui nous ont été expliqués et que la majorité d'entre nous avons acceptés, ont été réalisés. C'est le but de la présente proposition.
La présidente: Des commentaires?
Le sénateur Fraser: J'ai deux choses à reprocher à cette proposition. La première, selon moi, ne tient qu'à la formulation. Dans votre paragraphe 159(1) proposé, sénateur Joyal, vous dites que l'examen devrait être entrepris par un comité du Sénat, de la Chambre des communes ou des deux chambres, de sorte qu'il existe une possibilité que le Sénat soit exclu de cet examen. Si vous voulez que le Sénat en fasse partie, il faut dire «un comité du Sénat et un comité de la Chambre des communes, ou un comité mixte». Je vois certaines personnes rire, car elles m'ont entendu commenter un autre projet de loi très récemment. Faites-moi confiance, cette fois-ci, j'ai raison. Je passe donc à mon deuxième point, lié au fond.
J'ai entendu des experts commenter cette question, y compris le sénateur Andreychuk. L'une des choses que j'ai apprises au cours de notre longue étude, c'est qu'on met des années pour découvrir à quel point un projet de loi relatif au système de justice pour les jeunes fonctionne, comment il faudrait le modifier, comment les tribunaux l'interprètent et, enfin, pour établir un consensus sur les modifications. Je crois qu'après ce soir, nous constaterons peut-être que la Loi sur les jeunes contrevenants sera en vigueur pendant une autre décennie. Même si je suis partisane des examens parlementaires, je crois que, dans le cas qui nous occupe, un examen régulier ne va que brouiller davantage les enjeux.
Le sénateur Rivest: Dans quel sens?
Le sénateur Fraser: On lancerait le processus d'examen après trois ans. De fait, le système ferait encore l'objet d'une contestation devant les tribunaux dans toutes les provinces. Nous espérons que diverses provinces travaillent encore afin d'établir leurs nouvelles institutions. Je ne suis pas convaincue qu'il soit réaliste de procéder, en trois ans, à l'examen d'un processus aussi long que l'établissement d'un nouveau système de justice pour les jeunes. Les examens quinquennaux perpétuels connaîtront les mêmes types de problèmes.
La présidente: Avant de passer aux deux prochains témoins, je tiens à clarifier ce que vous avez dit, sénateur Fraser. Vous laissez entendre, et je crois que le sénateur Joyal est d'accord avec vous, que le paragraphe 159(1) devrait prévoir qu'un comité du Sénat examinera le fonctionnement de cette loi.
Le sénateur Fraser: Les comités du Sénat et de la Chambre des communes, ou un comité mixte que le Parlement désigne.
La présidente: Le sénateur Joyal est d'accord. Est-ce que le sénateur Joyal convient de modifier la première phrase de cette partie afin qu'on y lise: «Le rapport du ministre de la Justice»?
Le sénateur Joyal: Oui, bien sûr.
La présidente: Est-ce que la version française est correcte?
[Français]
Le sénateur Joyal: En français, c'est:
Les comités du Sénat et de la Chambre des communes.
[Traduction]
Le sénateur Andreychuk: Je répondrai à la question du sénateur Fraser. Si le législateur avait prévu un examen quelconque de la Loi sur les jeunes contrevenants, celle-ci ne serait peut-être pas tombée dans le discrédit aussi rapidement. Si des gens autres que ceux dont il est question, les ministres de la Justice et les responsables du système, avaient examiné la loi, ils auraient peut-être signalé que l'hésitation constante à la mettre en oeuvre est ce qui a sonné le glas. Si ceux qui étaient chargés de mettre en oeuvre la loi avaient eu droit à des renforts, au ministère de la Justice et dans tous les ministères au Canada, ainsi qu'aux services, les chances de succès de la loi auraient été meilleures. Ils auraient peut-être aussi souligné que les mesures de rechange représentaient l'élément clé de la loi, et des ressources auraient été prévues à cet égard. Personne en dehors du système n'en a parlé. Le Parlement s'est détourné de la question, heureux de croire que la loi fonctionnait.
Nous entendons les politiciens - et nous sommes des politiciens - dire que les enfants, c'est notre avenir. À coup sûr, s'il y a une chose qu'il faut étudier, c'est celle-ci. Vous avez entendu le sénateur Carstairs hier. Il faut établir un ordre de priorité de nos travaux. Or, il y a une question que je situerais au-dessus de bien d'autres dont nous sommes chargés. Je ne l'ai pas recommandé à l'examen, mais comme d'autres ont la volonté de le proposer, je dirai que je l'appuierais.
En deuxième lieu, le sénateur Pearson, le sénateur Beaudoin et moi y étions. Nous nourrissions de graves réserves quant à certaines parties des modifications - la disposition en matière de changements de ressort. Est-ce conforme à la convention? La ministre nous a dit l'autre jour que cela était conforme, que la disposition ne violait pas la convention et que c'était là un mécanisme approprié. Peut-être devrions-nous repenser la mesure. En même temps, nous avons accepté les modifications et donné à la ministre le bénéfice du doute, du fait qu'il y aurait un examen de la part d'un comité mixte. Qu'est-ce qui s'est passé? Nous n'avons pas eu accès à ce groupe.
On peut voir maintenant ce qui s'est passé. Tous ceux parmi nous qui nourrissent de graves préoccupations à ce sujet et qui ont suivi l'application de la loi signalent que si nous avions fait partie du groupe, si les autochtones avaient fait partie du groupe, nous en serions peut-être arrivés à un meilleur consensus. Je ne crois pas que nous serions parvenus à l'unanimité, mais nous aurions eu un meilleur taux de succès. Je le dis maintenant: à mes yeux, ce n'est pas de cette question que dépend le succès ou l'échec du projet de loi, mais s'il y a la volonté d'aller dans cette direction, je suis prête à travailler très dur pour m'assurer que cela fonctionne.
Le sénateur Di Nino: Je suis tout à fait d'accord avec les propos du sénateur Andreychuk. J'ai défendu le projet de loi, la Loi sur les jeunes contrevenants, au début des années 90. J'ai été très actif dans le dossier et j'ai visité quantité de tribunaux pour adolescents. J'ai essayé de comprendre vraiment les questions en jeu.
Même à l'époque, il y avait des recommandations et des propositions qui étaient formulées discrètement à l'intention du ministre, puisque nous étions au pouvoir à ce moment-là. La réponse donnée: «Oui, certainement, nous allons faire cela.» Jamais rien n'a été fait. Cependant, plusieurs groupes différents s'opposaient vivement au projet de loi. Il s'agit de l'un des champs d'action où un examen obligatoire se révélerait utile et servirait bien les jeunes de notre pays. J'appuie vivement la modification du sénateur Joyal.
Le sénateur Grafstein: Je suis d'accord avec cette modification parce qu'il sera facile, aux premiers stades, de voir si le projet de loi fonctionne ou non. Nous devons nous rappeler ce que la ministre nous a dit à propos du projet de loi, et c'est la raison pour laquelle je l'appuie, avec certaines de ces modifications. Elle nous a dit que le projet de loi permettrait de s'attaquer aux problèmes majeurs qui affligent le système de justice pour les adolescents. Premièrement, le taux élevé d'incarcérations sera réduit; deuxièmement, le taux d'incarcération chez les autochtones, qui est plus élevé que la normale, sera réduit; troisièmement, le cas des excès en ce qui concerne les peines d'adulte imposées aux adolescents sera réglé; et quatrièmement, le financement nécessaire à ce nouveau système sera suffisant et adéquat. Ce sont là quatre grands objectifs. Je ne sais pas pourquoi on ne peut pas étudier cela rapidement.
Mon expérience se rapproche assez de celle du sénateurDi Nino. En dernière analyse, le combat mené pour faire adopter un projet de loi au Parlement est toujours intense. Nous le savons aujourd'hui, madame la présidente. Je suis d'accord avec le sénateur Andreychuk: pour ce qui touche notre système de justice pénale, il ne saurait y avoir de question plus importante que celle-ci. Regardez le temps que nous avons consacré à ce projet de loi, en dehors de toute allégeance politique, pour essayer d'en venir à bout, et tout cela parce que nous nous entendons pour dire, comme le sénateur Pearson, que l'intérêt de l'adolescent est capital.
Je ne vois pas comment la ministre pouvait s'opposer à cette modification qui l'inciterait à faire ce qu'elle a dit qu'elle ferait de toute manière, c'est-à-dire de garder le système sous surveillance et de nous indiquer si une amélioration ou un modification s'impose. Je félicite ma collègue d'avoir soulevé la question.
La présidente: Nous en sommes aux nouveaux articles 158 et 159, que propose le sénateur Joyal, avec deux modifications mineures dans le cas de l'article 159. Êtes-vous d'accord avec ces modifications?
Des voix: D'accord.
Des voix: Avec dissidence.
La présidente: Adopté, avec dissidence. Sénateurs, procédons à l'appel nominal.
La présidente: Non.
Le sénateur Andreychuk: Oui.
Le sénateur Beaudoin: Oui.
Le sénateur Buchanan: Oui.
Le sénateur Cools: Oui.
Le sénateur Di Nino: Oui.
Le sénateur Fraser: Non.
Le sénateur Grafstein: Oui.
Le sénateur Joyal: Oui.
Le sénateur Moore: Oui.
Le sénateur Pearson: Non.
Le sénateur Rivest: Oui.
La présidente: La proposition est adoptée.
Nous allons maintenant nous attacher à l'ancien article 158 et à l'ancien article 200. Est-ce clair? Êtes-vous d'accord avec ces modifications?
Des voix: D'accord.
La présidente: Adoptée. Êtes-vous d'accord pour adopter l'annexe?
Des voix: D'accord.
La présidente: Adopté. Êtes-vous d'accord pour adopter le titre?
Des voix: D'accord.
La présidente: Adopté. Êtes-vous d'accord pour adopter le préambule?
Des voix: D'accord.
La présidente: Adopté. Êtes-vous d'accord pour adopter l'article 1?
Des voix: D'accord.
La présidente: Adopté. Êtes-vous d'accord pour adopter ce projet de loi avec les modifications notées?
Des voix: D'accord.
La présidente: Adopté. Êtes-vous d'accord pour que je rende compte de ce projet de loi, avec les modifications, à la prochaine séance du Sénat?
Des voix: D'accord.
La présidente: Adopté.
Merci, sénateurs. C'est une véritable séance-marathon que nous avons eue pour étudier ce projet de loi. Je vais rendre compte du projet de loi tel que modifié demain. Avant que la séance ne soit levée, je rappelle à tous les honorables sénateurs que nous allons nous réunir à nouveau demain matin, à 10 h 45, à la salle 705 de l'édifice Victoria pour accueillir le directeur général des élections.
La séance est levée.