37-1
37e législature,
1re session
(29 janvier 2001 - 16 septembre 2002)
Choisissez une session différente
Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie
Fascicule 11 - Témoignages
OTTAWA, le mercredi 9 mai 2001 Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie s'est réuni à 15 h 52 pour examiner l'état du système de soins de santé au Canada. Le sénateur Michael Kirby (président) occupe le fauteuil. [Traduction] Le président: Nous allons entendre M. Murray Elston, président des Compagnies de recherches pharmaceutiques du Canada. M. Elston a déjà été ministre de la Santé dans la province de l'Ontario. La Coalition pour la recherche biomédicale et en santé est représentée par Barry McLennan, son président, et Charles Pitts, son directeur exécutif. Merci d'être venus. Puis-je vous suggérer de nous présenter une brève déclaration liminaire pour que nous ayons ensuite du temps pour vous poser des questions. Dr Barry McLennan, président, Coalition pour la recherche biomédicale et en santé: Merci de nous avoir fourni la possibilité de comparaître devant le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie pour la deuxième étape de votre étude sur le système de soins de santé au Canada. La recherche ne connaît pas de frontières; c'est une activité universelle. C'est mon premier commentaire. En fait, que ce soit au Canada ou ailleurs, la recherche médicale connaît en ce moment une profonde révolution. Cette révolution va peut-être nous permettre de comprendre la structure moléculaire de la biologie et des maladies humaines. Tôt ou tard, nos connaissances sur les gènes humains vont déboucher sur des stratégies en matière de santé qui vont non seulement nous permettre de guérir les maladies, mais aussi de les éviter. De nombreux pays savent que la principale force économique de notre siècle sera l'innovation. Comme l'honorable Gilbert Normand, secrétaire d'État pour les sciences, la recherche et le développement, l'a déclaré récemment, Une économie fondée sur la créativité et l'innovation de tous ses acteurs, et par conséquent, ses partenaires, profitera aux Canadiens de toutes les régions de notre grand pays. À l'avenir, nous devons nous donner comme principal objectif d'instaurer une véritable «culture de l'innovation» dans notre vie quotidienne, dans notre conception générale du monde et dans la façon dont nous faisons des affaires. Nous examinons dans notre mémoire plusieurs initiatives récentes qui ont été lancées dans le domaine de la recherche médicale au Canada et l'impact qu'elles ont eu. La création des Instituts de recherche en santé du Canada est une de ces initiatives. Les directeurs de l'institut sont en fonction et le comité consultatif de l'institut a été constitué. Chacun des 13 instituts est en train d'élaborer des initiatives stratégiques visant à répondre aux grandes questions qui se posent dans le domaine de la recherche médicale au Canada. Cette initiative a suscité de grandes attentes chez les chercheurs du domaine de la santé pour ce qui est de la possibilité de faire de la recherche novatrice et de qualité au Canada. Le nombre des projets de recherche présentés à IRSC a augmenté de façon dramatique. On peut dire que, d'une certaine façon, IRSC a été victime de son propre succès. Cela a soulevé quelques problèmes. Cela m'amène à notre première recommandation qui figure à la page 3 du mémoire. La Coalition pour la recherche biomédicale et en santé presse le gouvernement fédéral de donner suite à sa promesse d'investir d'ici la fin de son mandat actuel 1 pour cent du budget de la santé dans la recherche médicale, ce qui profitera à tous les Canadiens. IRSC a un problème de trésorerie. Le besoin est tellement grand que les demandes de subventions de recherche sont très nombreuses et que le budget actuel ne suffit pas. Si l'on tient compte du fait que la cible était de 1 pour cent et qu'on devait l'atteindre progressivement en quatre ou cinq ans, on constate que pour la troisième année, le projet a pris du retard. Je vous invite à faire tout ce que vous pouvez pour convaincre le gouvernement de ne pas dévier de sa route. La génétique et la génomique vont jouer un rôle central dans la prestation des soins de santé. La possibilité de relier certains gènes à des maladies précises va avoir des répercussions considérables pour ce qui est de la prévention, du diagnostic et du traitement des maladies. Vous êtes certainement tous d'accord pour dire que la prévention et, en fait, l'éradication des maladies, sont des objectifs éminemment souhaitables. Le fardeau financier que représente les maladies au Canada est lourd et il faut le réduire. La biotechnologie est une technologie que l'on a définie comme étant «l'utilisation d'organismes vivants ou de leurs parties en vue de fabriquer des produits ou de fournir des services». La biotechnologie moderne est basée sur nos connaissances et sur notre capacité toute récente de manipuler la vie au niveau des gènes et des protéines, d'où l'apparition de mots nouveaux, comme «la génomique», «la protéonique», et cetera. Comme l'a déclaré Paul Martin, notre ministre des finances: Les nouvelles technologies créent de nouvelles industries. Les nouvelles industries ont besoin de nouveaux marchés, de marchés mondiaux, et les marchés mondiaux fonction nent selon des règles nouvelles, dont la première est qu'il ne faut pas être le deuxième. Le premier occupant a automatiquement une situation privilégiée, il est déjà en mouvement et c'est lui qui fixe la norme que ses futurs rivaux devront atteindre. Voilà qui devrait être l'objectif du Canada. Les Canadiens vont également profiter de la création d'emplois axés sur la connaissance et bien rémunérés. Il sera plus facile pour les Canadiens très spécialisés, qui se sont expatriés, de reprendre contact avec la recherche qui se fait au Canada, grâce aux nouvelles possibilités très stimulantes qu'elle offre aujourd'hui. La biotechnologie fait partie des industries en croissance rapide et c'est un secteur qui attire les investissements et l'attention des acteurs économiques. Ces investissements dans la recherche en santé vont améliorer la santé de tous les Canadiens et c'est là le point essentiel. La Coalition pour la recherche biomédicale et en santé recommande que soit mise en oeuvre une politique nationale globale favorisant le développement d'une industrie biotechnologique dynamique au Canada. La coalition est convaincue que le Canada a les moyens d'être un des leaders mondiaux dans le domaine de la biotechnologie et de répondre aux défis qui se posent dans ce nouveau domaine sur le plan de l'éthique et des valeurs sociales. Nous recommandons que le gouvernement du Canada définisse les priorités, cerne les grandes questions et élabore des plans d'action visant à appuyer la biotechnologie, et qu'il le fasse sans délai. Monsieur le président, c'est là un point également très important; nous recommandons de lancer une campagne visant à sensibiliser les Canadiens aux possibilités qu'offre la biotechnologie et à leur expliquer les avantages qu'ils peuvent en retirer. La plupart des secteurs de l'industrie privée du Canada investissent très peu dans la R-D, ce qui est inacceptable. C'est là une question très urgente, en particulier, parce qu'elle touche le secteur de la biotechnologie médicale, qui est en train de se développer au Canada. On constate un manque chronique de capitaux destinés à financer le long processus de R-D, qui est une caractéristique essentielle de ce secteur. Il existe peu de véhicules financiers permettant de combler l'écart qui sépare les découvertes de la commercialisation des produits. Résultat, les découvertes sont stérilisées et les jeunes pousses doivent avoir recours à des investisseurs providentiels très exigeants. C'est un problème structurel auquel une intervention du secteur public pourrait remédier. Il y a quelques questions que je vais mentionner rapidement. Premièrement, il faut harmoniser les règles du marché. Les centres universitaires de santé jouent un rôle essentiel dans les études de deuxième et de troisième cycles au Canada. Malheureusement, la plupart de ces centres ont des budgets insuffisants et ne sont pas en mesure d'apporter une contribution utile aux efforts que déploie le Canada pour mettre sur pied une recherche de classe internationale. Les provinces qui ont des budgets solides et qui peuvent offrir des centres de recherche clinique bien équipés et pourvus d'un personnel stimulant et ce, dans de nombreuses disciplines, sont en mesure d'offrir aux chercheurs des salaires et de ressources qui les incitent à abandonner les centres sous financés. La concurrence que se font les centres de recherche canadiens pour attirer les scientifiques de talent est très nuisible. C'est une question urgente à laquelle les gouvernements fédéral et provinciaux doivent s'intéresser rapidement, avant que plusieurs facultés de médecine du Canada ne deviennent incapables de respecter les normes nationales, voire même leurs propres normes d'agrément. J'aurais un commentaire sur les animaux. La CRBS souscrit au principal objectif recherché par le projet de loi C-15. Ce projet risque toutefois de nuire aux activités de recherche et d'enseignement qui répondent par ailleurs à tous les critères exigés, en matière d'éthique notamment. Dans notre recommandation, à la page 9 de notre mémoire, nous demandons au gouvernement fédéral d'adopter les normes élaborées par le Conseil canadien de protection des animaux en matière d'utilisation des animaux d'expérimentation et de veiller à ce que les mesures législatives visant à protéger des animaux s'inspirent de ces normes. La Coalition est favorable à l'objectif fondamental de la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques. Cependant, sous sa forme actuelle, cette loi suscite de nombreuses inquiétudes au sein de la communauté de recherche en biomédecine. Nous craignons que cette loi anéantisse toutes les mesures que le gouvernement a prises récemment pour encourager la recherche en santé dans ce pays. Nous recommandons que l'on crée un groupe de travail chargé d'examiner l'effet de cette loi sur la recherche en santé et que ces activités de recherche soient expressément exclues de l'application de cette loi, comme elles le sont à l'heure actuelle. Nous recommandons que cette exclusion soit maintenue jusqu'à ce que le groupe de travail ait achevé ses travaux et jusqu'à ce qu'on ait pris les mesures correctives nécessaires pour veiller à ce que ce projet de loi ne porte pas atteinte aux activités de recherche en santé. En conclusion, j'aimerais vous présenter trois observations. La CRBS presse le gouvernement fédéral de respecter son engagement d'investir dans la recherche 1 pour cent du budget de la santé, ce qui profitera à tous les Canadiens. La CRBS recommande que l'on lance une campagne de sensibilisation visant à expliquer aux Canadiens tous les avantages qu'offre la biotechnologie. La CRBS invite le gouvernement du Canada à définir les priorités, à cerner les grands problèmes et à élaborer des plans d'action visant à appuyer la biotechnologie, et à le faire sans délai. Le climat de la recherche en santé au Canada est en train de s'améliorer. La création de IRSC, de la FIC, de Génome Canada, et le Programme des chaires de recherche au Canada y ont beaucoup contribué. Il demeure encore beaucoup à faire avant que le Canada puisse jouer un rôle de leader à l'échelle mondiale dans le domaine de la recherche en santé. Merci. M. Murray Elston, président des Compagnies de recherches pharmaceutiques du Canada: Merci. Je représente le secteur pharmaceutique canadien, un secteur particulièrement novateur. Le document qui vous a été distribué comprend pour l'essentiel deux parties. Dans la première, nous examinons certaines des façons dont la recherche génétique va nous permettre de progresser. Dans la seconde, j'ai précisé cinq grands domaines qui comportent des aspects qui intéressent les politiques gouvernementales. Je vais vous les décrire rapidement, plutôt que vous lire le texte. Ceux d'entre nous qui oeuvraient dans le domaine de la santé et des politiques gouvernementales dans ce domaine au milieu des années 80 ont vu s'opérer devant eux une transformation magnifique pour ce qui est des connaissances et de notre capacité à lutter contre les maladies. À l'époque où j'étais ministre de la santé en Ontario, il était utopique de penser que l'on pourrait vraiment guérir certaines maladies. Cela dit, la recherche s'est engagée dans trois voies. La première est basée sur la chimie, la deuxième sur la biologie et la troisième sur la génétique. Le Dr McLennan vous a présenté quelques-uns des avantages de cette dernière orientation. Permettez-moi d'aborder quatre aspects de la recherche génétique qui sont, d'après moi, intéressants. Le premier est que la génétique nous permet de comprendre avec précision les causes sous-jacentes des maladies. Deuxièmement, la génétique nous aide à trouver de nouvelles cibles pour lutter contre la maladie, voire même pour les éviter, supprimer est peut-être le meilleur mot que je pourrais trouver pour décrire cela. Troisièmement, la génétique nous aide à mettre au point de nouveaux médicaments, de façon plus efficace et plus efficiente. C'est un progrès énorme pour notre secteur. À l'heure actuelle, il s'écoule beaucoup de temps entre la découverte d'une molécule qui offre des possibilités et le moment où nous sommes finalement en mesure d'établir qu'elle est efficace et non dangereuse pour la population. Nous sommes satisfaits lorsqu'une molécule sur les 10 000 que nous découvrons permet de traiter avec succès une catégorie de maladies. Il faut investir environ 700 millions de dollars pour y parvenir, et nous espérons que l'efficacité de ce processus sera renforcée et qu'il faudra beaucoup moins de temps pour découvrir de nouveaux médicaments efficaces. L'étape de ce processus de mise au point des médicaments à laquelle il faut consacrer le plus de ressources est, bien évidemment, celle des essais cliniques. Des milliers de gens participent à des essais cliniques pour démontrer l'innocuité et l'efficacité des nouveaux médicaments. Au lieu de demander à un large échantillon de la population de participer à ces essais cliniques, on pourrait envisager maintenant, grâce à la recherche génétique, de cibler des groupes de personnes sur lesquelles on pourrait tester un médicament préparé pour cette catégorie de personnes. De cette façon, il serait beaucoup plus facile qu'aujourd'hui d'identifier les molécules positives. Quatrièmement, la génétique va nous aider à mieux adapter le médicament au patient. À l'heure actuelle, comme vous le savez sans doute, les principaux traitements médicaux donnent de bons résultats dans 75 à 80 p. 100 des cas. Cinq à dix pour cent des personnes traitées souffrent souvent d'effets secondaires, ce qui soulève des difficultés. Vous pouvez comprendre que la génétique, en tant que composante supplémentaire de la recherche médicale, va transformer complètement la façon dont celle-ci s'effectue. Nous allons créer de nouvelles façons plus efficaces de faire de la recherche, qui vont beaucoup apporter aux Canadiens. Cela ne veut pas dire que les autres pays n'en profiteront pas, bien évidemment, mais cela va avoir de grandes répercussions sur nos politiques gouvernementales. Je vais vous mentionner cinq secteurs qui, je pense, vont vous intéresser. Le premier est celui du respect de la vie privée des malades et le Dr McLennan a mentionné la loi qui touchait cette question. J'ai choisi un exemple qui a eu une certaine notoriété internationale - Decode Genetics, une petite entreprise de biotech islandaise au départ démarrée par le professeur Kerry Stephenson, de l'université Harvard. Les questions qu'a soulevées l'identification des données provenant de l'étude qui portait sur cette population restreinte doivent encore être précisées et n'ont pas encore été résolues. Elles ont suscité une controverse que le gouvernement islandais connaît bien ainsi que d'autres pays. Cette controverse n'a pas encore été réglée. Plus près de chez nous, il y a plusieurs initiatives législatives aux États-Unis qui visent à protéger la population contre l'utilisation des données génétiques. Je vous invite à communiquer avec moi si vous souhaitez que je vous transmette une liste de ces initiatives. Dans notre industrie, nous avons adopté des principes généraux pour la recherche génétique. Les comités d'éthique doivent approuver tous les essais; la participation des malades se fait sur une base volontaire; on utilise uniquement des chiffres codés pour protéger la vie privée; les résultats ne sont transmis ni aux familles, ni aux employeurs ni aux assureurs; les données sont communiquées aux membres de la communauté scientifique par l'intermédiaire de revues spécialisées, en préservant l'anonymat des personnes concernées. Pour ce qui est de la sensibilisation du public, il est très important de lancer un débat public sur les grandes orientations, de façon à bien faire comprendre les questions que soulève la recherche génétique afin d'éviter les vives réactions que suscitent les descriptions très partielles des perspectives qu'offre la recherche génétique. De nos jours, le public fait mal la différence entre ce qui relève de la recherche génétique et les problèmes qui se posent dans le domaine de la médecine, du clonage des animaux, de la recherche sur les embryons et des aliments modifiés génétiquement. Il est essentiel d'éduquer le public pour qu'il soit en mesure de faire la différence entre le rôle que joue la génétique dans la recherche médicale et les nouvelles sensationnelles que l'on retrouve souvent dans les journaux. Le deuxième secteur est celui de la mise au point des médicaments et la réglementation. Comme tout le monde le sait, les contrôles en place actuellement sont lourds et le processus d'agrément est très long. Les contrôles devraient assurer l'innocuité des médicaments et garantir que nos produits sont efficaces et efficients. Cependant, en fin de compte, la performance canadienne est très mauvaise si on la compare à celle de nos concurrents internationaux. La révolution génétique va s'accompagner d'une accélération du nombre des découvertes et il va falloir offrir rapidement ces produits aux malades; le système de réglementation canadien va devoir répondre aux besoins des malades, tout comme à ceux de cette nouvelle science. En fin de compte, nous suggérons dans notre mémoire que le gouvernement reconnaisse qu'il faut attribuer à Santé Canada des crédits supplémentaires pour que ce ministère puisse introduire les changements qui lui permettront de suivre l'évolution de cette science et de faire les acquisitions nécessaires; c'est en effet un ministère qui souffre déjà des restreintes budgétaires antérieures. J'en viens maintenant à la protection de la propriété intellectuelle. C'est une question qui est devenue très litigieuse dans le contexte canadien et l'on pourrait en parler toute la journée, toute la journée de demain et peut-être le reste de l'année. Entre l'introduction en 1969 de la licence obligatoire, et la présentation du projet de loi C-22 en 1987, et finalement, du projet de loi C-91 qui l'a suivi, le Canada s'est rapproché d'un niveau minimal de protection internationale des brevets. C'est un aspect qui est tout à fait essentiel non seulement pour notre industrie, qui est d'envergure mondiale, mais pour les nouvelles pousses de la recherche, en particulier la recherche génétique, de pouvoir être sûr que les travaux des chercheurs seront protégés. C'est là un point essentiel si l'on veut que le Canada puisse tirer profit des marchés décrits par le Dr McLennan. Il faut encore aller plus loin; il est important que les gens comprennent que notre industrie ne préconise pas le brevetage des gènes. Nous ne défendons pas l'appropriation des gènes individuels mais nous voulons que soient protégées les découvertes de la recherche génétique et la mise en oeuvre des changements qui vont permettre de guérir les malades et même d'empêcher l'apparition de certaines maladies. Il y a un autre aspect dont l'importance est évidente, et c'est sans doute là, je présume, une des raisons pour lesquelles les honorables sénateurs sont réunis, c'est celui des répercussions sur les coûts des soins de santé. J'ai travaillé dans le domaine de la gestion des soins de santé mais je devrais plutôt, comme tous les anciens ministres de la santé, mettre le mot «gestion» entre guillemets. Pendant les années au cours desquelles j'étais en rapport avec le trésorier de l'époque, Bob Nixon, en Ontario, son ministère était très inquiet de voir que le budget de la santé en Ontario s'approchait des deux chiffres, c'est-à-dire, de 10 milliards de dollars. Aujourd'hui, en Ontario, nous sommes à 22,2 milliards de dollars. Ce sont là des questions qui font les manchettes dans presque toutes les provinces. Je présume que la plupart des initiatives lancées dans le domaine de la recherche en santé avec des fonds publics mentionnent toujours la durabilité de notre système. Permettez-moi de faire un commentaire qui ne se trouve pas dans le mémoire, c'est un commentaire personnel et non un commentaire présenté à titre de président. J'ai parfois du mal à accepter que les gens critiquent tellement notre système actuel qu'ils en sont arrivés à penser que celui-ci est aujourd'hui un échec. En fait, le système de santé actuel a été conçu il y a bien longtemps et il a donné en fait des résultats bien supérieurs à ceux qui avaient été prévus. Nous faisons un nombre de choses considérable qui n'avaient jamais été même imaginées au moment où le système a été mis sur pied dans les années 60. Il est peut-être difficile de voir comment ce système pourrait évoluer de façon à pouvoir assumer de nouvelles responsabilités, à fournir de nouveaux traitements, mais il est bien établi que ce système, même s'il est parfois très lent dans certaines situations, a très bien réagi aux énormes changements qui sont intervenus, depuis une quinzaine d'années, dans la façon de fournir les soins de santé. Il a dû modifier non seulement la manière de fournir les soins de santé mais également celle de choisir les produits qui pouvaient être administrés aux malades au Canada. Autrement dit, le système offre beaucoup plus qu'il ne devait le faire à l'origine, parce que nous savons aujourd'hui beaucoup plus de choses qu'il y a 40 ou 50 ans. Je ne suis pas aussi pessimiste que certains. Je veux que les malades soient traités comme ils le devraient. Nous devons travailler tous ensemble pour que les grands débats sur la santé soient axés sur les résultats et ne deviennent pas un simple examen financier qui favoriserait ce que certains appelleraient la version bon marché des soins de santé. Je voulais vous faire cette remarque personnelle. Je reviens à la recherche génétique et aux possibilités intéressantes qu'elle offre. La façon de faire la recherche devient de plus en plus sophistiquée, les applications des nouvelles technologies sont de plus en plus sophistiquées et il est possible qu'en fin de compte, la sophistication des moyens dont nous disposons pour identifier les populations cibles va se traduire par de nouveaux médicaments qui seront utilisés par des populations moins nombreuses. Si la situation actuelle perdure, ces produits risquent de coûter plus cher que ceux que nous utilisons actuellement. Si notre mécanisme de réglementation prolonge de façon démesurée le délai nécessaire à l'obtention du permis exigé pour offrir ces produits au public, cela va automatiquement augmenter le coût des soins de santé. Permettez-moi d'aborder maintenant la question du financement public de la recherche médicale. Notre mémoire fournit certains éléments de comparaison entre le Canada, la France et les États-Unis. Je tiens à dire que le Canada a pris certaines mesures, et là, je suis d'accord avec le Dr McLennan sur ce point, qui vont nous permettre de conserver un niveau satisfaisant pour ce qui est de la recherche médicale. Je tiens toutefois à signaler que la recherche médicale et les fonds publics qui lui sont consacrés obligent le Canada à faire du rattrapage. Les mesures qui ont été prises sont excellentes et les déclarations qui ont été faites le sont également. Si vous me permettez, je dirais que nous avons suivi avec beaucoup d'intérêt la dernière élection fédérale parce que les principaux partis étaient tous en faveur d'axer l'économie canadienne sur la connaissance. On a remarqué une volonté sincère de placer notre pays au premier rang de l'économie fondée sur les connaissances. On reconnaissait que c'était là la nouvelle voie dans laquelle les Canadiens devaient s'engager. Il y a lieu de souligner que le Canada fait face à une concurrence mondiale et qu'il y a plusieurs autres pays bien organisés et très déterminés qui ont déjà décidé de mettre en place la masse critique dont la recherche a besoin dans divers secteurs pour attirer les investisseurs. C'est pourquoi il faut non seulement poursuivre dans la direction que nous avons choisie mais, étant donné que le Canada vise la première place dans ce domaine, nous devons être prêts à adopter des politiques énergiques pour que les investissements atteignent un niveau qui nous permette de conserver nos scientifiques. Je vais m'arrêter ici, monsieur le président, et je serai heureux de répondre à vos questions. Le président: Merci. Avant de demander à la vice-présidente, le sénateur LeBreton, de commencer à vous poser des questions, j'aimerais que vous me donniez d'autres renseignements. Si vous ne les avez pas avec vous, vous pouvez nous les envoyer. Docteur McLennan, vous avez recommandé que l'on lance une campagne de sensibilisation de la population pour expliquer aux Canadiens les avantages qu'offre la biotechnologie. J'ai cherché en vain une brochure qui expliquerait aux non-spécialistes ce que sont la biotechnologie et la génomique. J'ai une formation scientifique et j'ai lu un certain nombre de choses. Il est impossible de lancer une campagne de sensibilisation du public sans avoir des documents qui, du moins au début, peuvent être compris par le non-spécialiste instruit. Si ce genre de document existe, pourriez-vous nous l'envoyer? Cela serait très utile pour les membres du comité. Vous pourriez peut-être me dire ce que vous en pensez. J'ai cherché à me procurer ce genre d'information, mais je n'ai pas réussi à le faire. J'ai fait cette demande à plusieurs personnes, mais elles n'ont pas pu me fournir de réponse. Dr McLennan: Je crois que vous avez raison, sénateur Kirby. Il n'existe pas de document tout fait. Cela constitue une partie du problème. Comme M. Elston l'a déclaré, la presse fait des manchettes dramatiques qui ne respectent guère les faits et les déclarations individuelles, et elle nous critique beaucoup; il n'est pas surprenant que le public ne sache pas à quoi s'en tenir. Je propose que nous communiquions avec le service des communications de IRSC. Je ne sais pas si ce service a déjà préparé ce genre de document. Si cela n'a pas été fait, je crois que la communauté des chercheurs en santé devrait le faire. Le président: Je dois vous dire que vous n'allez pas nous attendrir beaucoup lorsque vous dites que l'on vous démolit dans les journaux. Cela vient avec nos fonctions. Je vous dirais que vous êtes bienvenus dans ce club. Le sénateur Morin: Il y a quelques mois, j'ai lu un numéro spécial de Scientific American qui portait sur la génomique et qui était excellent. Le président: Il ne suffit pas de dire aux gens que c'est un domaine de pointe prometteur; ce n'est pas comme pour le bras canadien, parce que lui au moins, on peut le voir. Monsieur Elston, j'approuve tout à fait votre quatrième remarque au sujet de l'effet qu'aura sur le système de santé l'individualisation du traitement des malades. Quelles sont les données et les études dont nous disposons sur l'impact de l'utilisation de la génétique pour cibler le traitement? Vous dites que cela risque d'avoir de graves conséquences sur les coûts, ce qui paraît probable. Existe-t-il quelque chose qui, même approximativement, donne plus de détails sur les points que vous abordez dans ces deux paragraphes? M. Elston: Nous disposons de certaines données qui touchent plus particulièrement certains nouveaux produits en cours d'élaboration. Par exemple, on utilise à l'heure actuelle certains acquis de la recherche génétique pour établir des diagnostics. Il est maintenant possible de poser rapidement un diagnostic qui aurait auparavant pris plusieurs semaines. Cela représente, dans un certain sens, une économie. Je ne sais si je pourrais trouver quelque chose là-dessus mais je pourrais peut-être essayer d'étoffer ces deux paragraphes, si vous me le permettez. Le président: Cela serait utile. Certains d'entre nous connaissent quelques exemples de l'utilisation des médicaments biotechnologiques. Par exemple, alors que la chimiothérapie tue aussi bien les cellules saines avec les cellules malades, les nouveaux produits biotech ne tuent que les cellules malades. Il est certain que cela coûte plus cher. Je connais personnellement un cas, parce que c'était dans ma famille, où la dose de médicament coûtait 3 500 $. Il en fallait une par semaine, pendant quatre à six semaines. C'est pourquoi je n'ai pas de mal à vous croire lorsque vous dites que les coûts vont augmenter. Nous aimerions avoir le plus d'informations possible pour notre rapport. Le sénateur LeBreton: Ma question portait précisément sur la remarque qu'a fait le sénateur Kirby au sujet de la campagne de sensibilisation du public que recommandait le Dr McLennan. Comment procéder? Et surtout, si nous lançons effectivement une telle campagne, est-ce que cela ne risque pas de susciter dans la population des attentes prématurées que les nouvelles technologies ne réussiront pas à combler, ou pire encore, d'inciter les chercheurs à raccourcir la période séparant la découverte de sa commercialisation? Dimanche soir, il y avait une partie de l'émission 60 Minutes qui concernait les essais cliniques. Si l'on informe la population des possibilités qu'offrent ces nouvelles sciences, les personnes qui se trouvent dans des situations désespérées vont exiger qu'on les soigne et cela va créer des pressions non souhaitables sur l'étape des essais cliniques. En fait, ne risque-t-on pas de nuire à la science si l'on sensibilise la population à ces questions? Dr McLennan: La fin de semaine dernière, l'Association des facultés de médecine du Canada, l'AFMC, a tenu son assemblée annuelle à Toronto. Une des conférences portait sur la génomique. Un des conférenciers a parlé du fait qu'il fallait commencer à former les étudiants en médecine dans le nouveau domaine de la génomique et de la génétique. La sensibilisation de la population doit aussi se faire dans nos universités. Nous devons commencer maintenant parce qu'il faut que les étudiants connaissent les termes spécialisés pour pouvoir en parler intelligemment avec leurs patients. En tant que biochimiste, j'enseigne le génie génétique à mes étudiants. Je sais que dans une classe de 500 étudiants, il y en aura peut-être 10 p. 100 qui deviendront des biochimistes, mais ce n'est pas là que je voulais en venir. Tous les citoyens canadiens devraient comprendre les notions fondamentales du génie génétique, et connaître les avantages que l'on peut en retirer, par exemple. Que cela nous fasse plaisir ou non, nous avons tous des défauts dans nos gènes. La plupart de ces défauts ne sont pas gênants, parce que nous avons tellement d'ADN en trop que cela ne paraît pas. En fait, c'est parce que nous avons tous des petits défauts dans notre ADN que nous sommes uniques. C'est ce qui explique que l'empreinte génétique soit une excellente façon d'identifier quelqu'un. Tout le monde devrait comprendre la science expliquée en termes simples et savoir ce qu'elle peut offrir. Je ne pense pas que nous devrions hésiter à dire la vérité à la population au sujet des possibilités qu'offrent les nouvelles découvertes et les nouveaux traitements. Je comprends votre préoccupation dans le sens que, si je vais voir mon médecin et qu'il me dise: «Vous avez des gènes qui vous prédisposent à avoir le cancer du côlon ou de la prostate» et que je lui demande «Très bien, que peut-on faire?», il me répondra: «Eh bien, pour le moment rien». C'est sans doute la vérité. Cependant, personne ne peut prévoir avec quelle rapidité la profession va réussir à améliorer les traitements, les régimes de vie et le reste. Je suis convaincu qu'il faut informer la population. Les gens ont le droit de savoir. Il n'y a rien à craindre ici. Ce qui me dérange, ce sont les articles à sensation qui font peur aux gens. Cela me ramène à la première question du sénateur Kirby: comment instruire les gens? C'est une question que nous nous posons tous. Les scientifiques et les chercheurs font des progrès dans ce domaine, ils consacrent davantage de leur temps à parler des avantages que l'on retire de la recherche, et cela est bon. Cependant, il y a encore beaucoup à faire. Les contraintes de temps et d'argent expliquent en partie le problème mais pour moi, ce ne sont pas là des excuses acceptables. Commençons par les manuels scolaires ou par des émissions sur le canal Découverte ou le Learning Channel, peu importe, il faut le faire. Le sénateur LeBreton: L'autre aspect, c'est la situation des chercheurs; si la population est informée, elle va s'attendre à avoir rapidement accès au traitement attendu et cela va exercer des pressions sur les chercheurs. Je me demande comment cela affecte les personnes qui sont chargées de mettre au point un médicament donné. Dr McLennan: Cela n'est pas différent de ce que connaissent les médecins; lorsqu'un malade va les voir, il s'attend à être guéri sur-le-champ. Tout le monde s'attend à quitter le bureau du médecin avec une ordonnance. On peut penser à la surutilisation des antibiotiques. Comment expliquer cela? C'est en partie la pression. Le malade vient dans le bureau du médecin et s'attend à ce que celui-ci fasse quelque chose. Bien souvent, il ne peut rien faire et la meilleure chose serait de dire au patient de rentrer chez lui, de boire un verre de jus et de dormir. Il y a des pressions et on ne devrait pas promettre plus que l'on ne peut donner, mais il y a un effet cumulatif. M. Elston: Je vois un aspect positif dans cette pression; ce genre de pression fait ressortir la nécessité d'accorder des fonds, en particulier à tous les niveaux de nos universités publiques, parce que cela est essentiel. Nous n'avons pas réussi à maintenir le niveau d'activités qui devrait exister dans ces domaines. Je ne suis pas un scientifique, et c'est à la fois regrettable et peut-être positif, parce que je n'ai aucun intérêt personnel à défendre, si ce n'est à titre de citoyen canadien. Nous devons être conscients du fait que la pression exercée pour trouver des nouveaux traitements plus efficaces pour nos malades, et qui motive nos chercheurs, doit déboucher sur des mesures publiques qui donneront à ces personnes la possibilité de mieux faire leur travail. Le fait que la population attende la commercialisation de ces découvertes va amener le gouvernement à constater, en tant que financier des soins de santé mais aussi en tant que responsable de la qualité de vie de la population, qu'il doit participer de façon beaucoup plus directe et positive sur le plan financier. Le sénateur LeBreton: Ma question suivante concerne le fait que notre monde et les nouvelles technologies évoluent rapidement. J'ai posé cette question aux radiologues lorsqu'ils étaient ici. Les gens qui étudient à l'université aujourd'hui reçoivent de l'information à jour sur la biotechnologie et la recherche génétique. Quelle est la situation des médecins praticiens? Quel genre de formation reçoivent-ils? M. Elston: Il est important de renouveler les connaissances de nos professionnels et d'aider les autres à améliorer leur accès à ces connaissances. Je m'en remets à l'honorable sénateur qui en sait beaucoup plus que moi dans ce domaine, mais les jeunes diplômés des facultés de médecine s'occupent activement d'informatique et de technologie de l'information. Il y a des praticiens qui ont recours massivement aux technologies de l'information. Ce sont des outils essentiels pour mettre à jour les connaissances. Puis-je faire une remarque? Cela soulève la question suivante: comment faire pour que nos professionnels se recyclent à un moment où cette profession a connu des changements considérables depuis 35 ou 40 ans? Ils ont démontré qu'ils étaient capables de suivre le rythme du changement, mais cela n'a pas été sans mal. Nous leur avons fourni les moyens de suivre l'évolution de la science et nous avons confié à certaines personnes, comme le Dr McLennan, le soin d'enseigner aux générations suivantes la façon d'utiliser les outils dont ils auront besoin. Pour revenir à ma remarque sur les lacunes apparentes de notre système de santé, il faut dire que l'introduction de nouvelles technologies a toujours causé des inquiétudes et des tensions. Cela ne nous a toutefois pas empêchés d'adopter ces nouvelles technologies, les nouvelles thérapies, les nouveaux médicaments, les tomodensimètres et les IRM et le reste. Il est évident que nous devons continuer à rechercher la meilleure façon d'utiliser ces nouveaux outils mais je souhaiterais que les gens n'aient pas peur de la nouvelle technologie. Ces nouvelles technologies nous ont permis de faire des progrès inimaginables dans le traitement des maladies; nous avons fait des découvertes que les pionniers canadiens n'auraient jamais pu prévoir, de sorte que de nos jours il y a des maladies qui ne tuent plus. N'ayez pas peur de la nouvelle technologie. Ne craignez pas que les médecins n'arrivent pas à suivre le rythme, malgré les difficultés. Nous avons fait la preuve ces dernières années que nous étions capables de nous adapter. Nous allons lentement au début et nous avons parfois besoin de soutien mais la situation est, d'après moi, excellente. Dr McLennan: Le souci de veiller à ce que les professionnels se tiennent au courant, quelle que soit leur discipline, n'est pas nouveau. En médecine, nous avons des programmes d'études médicales permanentes, des séminaires, des conférences, des cours de recyclage et des programmes individualisés pour les médecins. Nous élaborons aussi des lignes directrices concernant les pratiques cliniques. Les programmes d'agrément permettent d'établir certaines normes pour les cours destinés aux étudiants en médecine et aux autres professionnels. Néanmoins, c'est aux professionnels de prendre l'initiative de se tenir au courant de ce qui se fait. La plupart des gens sont suffisamment responsables pour le faire. Je suis d'accord avec M. Elston lorsqu'il dit qu'il ne faut pas avoir peur du changement. L'histoire a montré que nous sommes effectivement capables de nous adapter aux nouvelles technologies et que notre système de santé peut en profiter. Malgré toutes les plaintes qui sont formulées au sujet du système de santé canadien, il demeure que notre système est excellent. Il est vrai qu'il faut l'ajuster un peu, mais nous pouvons le faire. M. Elston: J'ai entendu parler d'une expérience sur Internet qu'a lancée un médecin de Strathroy, en Ontario, et qui a pour but de regrouper des médecins de campagne. Selon le temps dont ils disposent, ils se consultent mutuellement par Internet sur leurs dossiers et se communiquent leurs observations. Ce genre d'interaction n'aurait pas été possible il y a seulement quelques années. Ces techniques aident maintenant les professionnels à se tenir à jour et à participer à des activités éducatives avec leurs pairs; les praticiens ont ainsi la possibilité de se communiquer leurs problèmes et de trouver ensemble des solutions, ce qui est précieux pour eux. Je trouve que cette initiative est vraiment étonnante. Elle ne vient pas d'un document gouvernemental qui obligerait les médecins à le faire mais elle a découlé d'un besoin et maintenant, cette technologie rompt l'isolement de certains médecins de campagne. Le sénateur Fairbairn: J'aimerais mentionner un autre aspect de la question de la sensibilisation du public et de son information. Je veux parler de votre avertissement selon lequel il ne faut pas avoir peur de ces choses. Nous avons vu un exemple réel de l'effet que peut avoir ce genre de peur dans un autre comité sénatorial il y a quelques années. Nous avions commencé à tenir quelques séances qui devaient être tout à fait anodines au sujet de l'hormone de croissance pour les bovins. Tout à coup, nous avons été dépassés par les événements. Nous avons été confrontés à une peur qui était fondée sur le sentiment de ne pas comprendre les enjeux et également sur l'existence d'un lien vital entre la chose en question et la vie quotidienne de la plupart des Canadiens. Cette chose était le lait. Nous avons assisté à un déferlement de peur, de colère, à des manifestations d'angoisse, tout cela parce que les gens ne comprenaient pas le problème. Et même à la fin, je ne suis pas sûre que ce problème ait été compris mais sur le plan national, nous avons décidé de ne pas approuver l'utilisation de cette hormone. C'est pourquoi j'ai conservé une certaine inquiétude à l'égard de ce domaine scientifique en constante évolution. Ce domaine est si technique, si complexe, et si loin de notre vie quotidienne. Pour le système de santé et les médecins qui y travaillent, la technologie est un des plus grands défis qui se posent à eux, même avec tous les avantages qu'elle offre. Je suis d'accord avec vous, monsieur Elston, lorsque vous dites que nous avons un bon régime de santé. Une bonne partie de l'inquiétude qui alimente ce débat vient de notre incapacité à comprendre ces questions et c'est pourquoi il vous semble parfois que l'on critique en fait le système. J'aimerais soulever un autre élément, qui me touche beaucoup personnellement; c'est le grand nombre de Canadiens qui ont du mal à écrire, à lire, à comprendre sur le plan fonctionnel, des choses qui sont faciles pour nous et qui font partie de notre vie quotidienne. Plus de 40 p. 100 des Canadiens éprouvent des difficultés, plus ou moins graves, à exercer ce genre d'activités courantes. Lorsque vous parlez de sensibiliser et d'informer le public dans vos groupes de professionnels, vous devez tenir compte des 8 millions de Canadiens qui ne savent pas lire et ne comprennent pas bien les messages qui paraissent à la télévision, en particulier lorsqu'ils sont imprimés, au sujet de nos découvertes et de ces nouvelles activités. La plupart des Canadiens ne comprennent pas ce qui est en train de se produire. Ce manque de compréhension est particulièrement inquiétant dans le domaine de la médecine, qu'il s'agisse de biotechnologie ou de lire le mode d'emploi d'un médicament. Il ne s'agit pas d'une campagne de sensibilisation du public comme les autres auxquelles nous avons tous déjà participé d'une façon ou d'une autre. Informer la population semble être une excellente chose. On produit des brochures et l'on pense: «Très bien, voilà qui est fait. Passons à autre chose». Il faut savoir au départ que, si l'on utilise les moyens de communication habituels, nous n'allons pas rejoindre ces personnes. M. Elston: C'est le défi qui se pose à nous. En particulier pour notre industrie, il est absolument essentiel d'expliquer correctement les choses. En fait, nous avons mis au point des programmes pour lesquels nous avons rédigé du matériel didactique qui viennent appuyer les conférences données par des médecins ou des pharmaciens ou d'autres personnes qui visitent des groupes, par exemple, des personnes âgées ou des groupes d'employés. Ces programmes comprennent un exposé oral ainsi que la distribution de matériel écrit et il y a également un dispositif qui les aide à ne pas se tromper dans le choix de leurs médicaments. Il est intéressant de noter qu'il y a des émissions qui abordent ces sujets, en particulier les chaînes télévisées. Je pense que le canal Découverte est un excellent moyen de découvrir ces questions. Je sais que tout le monde n'y a pas accès mais il s'efforce de vulgariser certains domaines scientifiques intéressants. De temps en temps, j'ai regardé ces émissions. L'émission qu'a diffusée la chaîne Historia au sujet de la découverte de l'insuline au Canada était excellente. Ce genre d'émission utilise la communication orale et nous aide beaucoup. Cela ne résout pas tout mais dans notre monde, il faut veiller à ne pas oublier ces outils-là. Le sénateur Morin: Je vous félicite pour le travail remarquable que vous avez accompli. Vous recommandez que l'on investisse 1 pour cent du budget total de la santé au Canada, qui représente 86 milliards de dollars, pour la recherche médicale. Quel serait l'effet d'une telle dépense sur la qualité et le coût de notre système de santé? J'aimerais faire un commentaire, monsieur le président. M. Elston est, comme vous le savez, le président des Compagnies de recherches pharmaceutiques du Canada, qui défendent avec beaucoup de vigueur, ce qui me paraît important à l'heure actuelle, les droits de propriété intellectuelle. Il y existe un rapport très étroit, je sais que ce n'est pas le sujet dont nous parlons aujourd'hui, entre ces droits et la recherche médicale dans ce pays. On m'a dit que cette question serait réexaminée à l'automne. J'espère que cette question sera confiée à notre comité et non pas à un comité qui s'intéresse uniquement aux finances et aux banques, comme cela s'est produit dans le passé. Le président: Je suis tout à fait d'accord avec vous sur ces points. Je serais heureux de soulever cette question avec la direction du Sénat. Le sénateur Morin: D'après les déclarations publiques qu'ont fait certains ministres, et M. Elston est sans doute au courant de cela, il est possible que ce système soit complètement révisé. Monsieur Elston, j'aurais deux questions. Il faut dépenser 750 millions de dollars canadiens pour mettre au point un médicament. Pouvez-vous me dire, approximativement, comment cette somme se répartit entre les aspects cliniques et non cliniques? Quelle proportion du milliard de dollars que votre organisation dépense au Canada est consacrée à la recherche fondamentale? Si vous n'avez pas la réponse, vous pourriez peut-être l'envoyer au comité. Cela me paraît important. Quelle est la répartition entre la recherche fondamentale et la recherche clinique? Vous avez mentionné, je crois que vous avez tout à fait raison de le faire, les problèmes de réglementation qui existent à Santé Canada. Quelles sont les répercussions qu'ont à l'heure actuelle ces problèmes sur notre système de santé? Dr McLennan: Pour ce qui est de votre question au sujet du 1 pour cent, je dois signaler, si vous me le permettez, monsieur le président, que l'idée de consacrer une proportion raisonnable, soit 1 pour cent , de nos dépenses en matière de santé à la recherche médicale n'est pas nouvelle. De nombreux pays ont défendu cette idée. Je pourrais ajouter que la commission Fyke, qui vient de présenter récemment en Saskatchewan un rapport sur la santé, recommande ce pourcentage de 1 pour cent; j'ai d'ailleurs été heureux de constater cela. Pourquoi avoir choisi 1 pour cent? Le premier point est que les investissements dans la recherche médicale profitent à tout le monde. Tout d'abord, la plus grosse partie des fonds de recherche sont versés en salaires; cela crée des emplois et remplit les coffres de l'État. Deuxièmement, cela permet de contrer l'hémorragie des cerveaux et de conserver nos meilleurs éléments au Canada. Mais le plus gros avantage pour tous les Canadiens est que cet investissement permet d'améliorer les soins de santé. Autrement dit, la qualité des soins de santé dépend de celle des traitements et des techniques utilisés. C'est là ce qu'offre la recherche. Nous utilisons l'expression «fonder sur l'expérience clinique». Qu'est-ce que cela veut dire? Cela veut dire que l'on pratique une médecine fondée sur les résultats cliniques, c'est-à-dire sur la recherche. Là encore, tout le monde en sort gagnant. 1 pour cent des dépenses du Canada en matière de santé représente 1 milliard de dollars environ. Même avec l'augmentation du budget de IRSC, et je félicite le gouvernement du Canada de l'avoir fait, nous n'atteignons pas encore 500 millions de dollars. Nous sommes encore loin d'avoir investi 1 pour cent, même à l'heure actuelle. Le projet, comme je l'ai dit dans mes commentaires, était d'en arriver à 1 pour cent. Il y a beaucoup de gens qui disent que, lorsque nous arriverons à ce niveau, il faudra peut-être plutôt parler de deux pour cent, mais cela n'est pas important. L'idée essentielle est que ce genre d'investissement rapporte immédiatement et c'est pourquoi l'on peut dire qu'il est rentable. Il est rentable pour le système de santé d'investir 1 pour cent dans la recherche. M. Elston: Je vous fournirai plus tard la répartition des dépenses cliniques et autres ainsi que les chiffres correspondant à cet investissement de 1 milliard de dollars. Je peux dire qu'avant la présentation du projet de loi C-22, notre budget de recherche était de 100 millions de dollars, maintenant il représente plus de 1 milliard de dollars. Il a grossi. Nous travaillons en collaboration avec d'autres maintenant. Cela fait un peu de publicité pour un autre groupe auquel je suis associé dans un partenariat pour ce qui est de représenter la Rx&D, et il s'agit de ISRC, l'entité qui a remplacé le Conseil de recherches médicales. Nous collaborons pour étendre les partenariats entre le secteur public et le secteur privé en vue de créer un fonds de recherche qui accordera des subventions approuvées par d'autres scientifiques. Les retards dus à la réglementation ont deux effets sur nous. Ils empêchent nos patients d'avoir accès à ces produits aussi rapidement qu'ils devraient pouvoir le faire au Canada. Je crois qu'un bon exemple est celui du médicament pour l'asthme qui a été découvert à Montréal. La demande d'approbation a été présentée en même temps au Canada et aux États-Unis. Les États-Unis ont été les premiers à approuver l'utilisation de ce médicament et le Canada le 29e pays à le faire. Ce retard a eu pour effet d'empêcher des personnes qui en avaient besoin d'avoir accès à ce médicament. Le deuxième aspect est plus intéressant de notre point de vue. Lorsque les gens examinent le régime de réglementation canadien, ils étudient en premier lieu les entreprises de biotechnologie, qui réussissent presque à lancer leurs produits de cette façon. Il y a au Canada un certain nombre de grands succès qui attendent d'être reconnus. Ces entreprises font maintenant approuver leurs produits aux États-Unis, parce qu'ils ont non seulement accès à un système plus efficace qui est celui de la FDA, mais aussi à un système qui les aide à comprendre le processus de réglementation. Au Canada, il y a un manque d'intérêt apparent de la part des fonctionnaires et les petites entreprises qui n'ont pas toujours les moyens de savoir exactement ce qu'exige notre système de réglementation ne reçoivent aucun appui. Cela nous nuit de deux façons. Il y a d'abord le retard. Deuxièmement, cela nous empêche de conserver ces entreprises ici, au Canada. Il est très regrettable de perdre tous les chercheurs qui sont venus si près de commercialiser un produit et de voir un autre pays en profiter à cause d'un certain nombre d'obstacles qui pourraient être aplanis très facilement. Le président: Je remercie les témoins d'être venus aujourd'hui. Permettez-moi de faire un commentaire. Je ne veux pas lancer un autre débat. Docteur McLennan, pour ce qui est de votre recommandation au sujet de la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques, je ne pense pas qu'il soit réaliste de penser que le gouvernement fédéral va accepter de constituer un groupe de travail. Je vais vous dire exactement pourquoi. Notre comité a pris un gros risque il y a un an et demi, risque qui lui a d'ailleurs valu de vives critiques de la part du ministre et du reste de son ministère, lorsqu'il a modifié la loi pour accorder une période de grâce de deux ans. Pour les membres du comité qui ont reconnu qu'il serait difficile d'appliquer l'ancien projet de loi C-6, il est très difficile d'entendre aujourd'hui, c'est-à-dire 15 mois après avoir accordé un délai de 24 mois, des gens dire qu'il faut maintenant constituer un groupe de travail. Ce délai ne sera sans doute pas prolongé. Nous voulions, au moment où nous avons accordé cette période de grâce de deux ans, que tout le monde sache qu'il y avait une date butoir. Les personnes concernées n'ont pas réagi, et nous n'y pouvons rien. Nous sommes sensibles à ces difficultés et c'est pourquoi nous avons accordé un délai de 24 mois. Il faudrait que les chercheurs agissent rapidement et trouvent le moyen de régler ce problème, sinon ils vont être obligés de vivre avec le projet de loi C-6, une mesure législative que personne ne souhaite voir adopter. Cependant, après vous avoir donné un délai de 24 mois, il n'est pas déraisonnable de s'attendre à ce que quelqu'un propose une solution. Je ne veux pas débattre de cette question, mais je voulais simplement vous donner quelques conseils politiques gratuits. Dr McLennan: Vos observations sont tout à fait justes. Nous n'avons pas le temps de parler de cela ici et cela ne fait rien. Il faut parler des questions qui sont à l'ordre du jour. Nous avons rencontré des représentants d'Industrie Canada il n'y a pas longtemps. Le problème est le suivant: personne ne sait comment définir l'expression «activité commerciale», ni comment définir «personne désignée», l'interprétation de ces expressions sera confiée au Commissaire à la protection de la vie privée et aux tribunaux. Il n'y a pas un chercheur canadien qui serait prêt à démarrer un projet de recherche avec autant d'incertitude. Le président: Plusieurs membres de notre comité ont déclaré que, tant que le comité de la recherche ne nous aura pas fourni les définitions qu'ils souhaitent avoir sur ces deux points, nous ne pourrons rien faire. Si quelqu'un peut rédiger, sous une forme juridique, des solutions permettant de régler ces deux questions, nous pourrons procéder par voie de règlement ou, si cela est nécessaire, nous pourrions essayer de modifier la loi, même si cela n'est pas facile. Je pense que l'on pourrait le faire en adoptant un règlement. Cependant, jusqu'ici, tout le monde discute et se plaint mais personne ne prend la plume pour présenter une façon juridique de régler ce problème. Vous ne pouvez pas nous demander de faire cette opération parce que c'est vous qui connaissez le problème. Je m'arrête ici en vous invitant vivement à revenir nous présenter une réponse que nous puissions utiliser. Nos témoins suivants sont le Dr Pat Armstrong, Groupe de coordination nationale sur la réforme des soins de santé et les femmes, et le Dr Ronald Worton, directeur adjoint du Réseau canadien sur les maladies génétiques. Le Dr Worton est également le PDG et le directeur scientifique de l'Institut de recherche de l'Hôpital d'Ottawa. Dr Pat Armstrong, Groupe de coordination nationale sur la réforme des soins de santé et les femmes: Merci. Je trouve un peu étrange que vous ayez décidé d'entendre ces deux groupes aujourd'hui. J'espère que cela ne nous nuira pas. Je représente ici le Groupe de coordination nationale de la réforme des soins de santé et des femmes. C'est un groupe qui assure la collaboration entre les cinq Centres d'excellence pour la santé des femmes, qui sont financés par le gouvernement fédéral, le Réseau canadien pour la santé des femmes et le Bureau des femmes de Santé Canada. Nous sommes ici pour parler de la recherche dans le domaine de la santé, non pas en ce qui concerne les traitements et la pharmacothérapie, mais plutôt l'avenir du régime de santé et les répercussions que ces changements vont avoir sur les femmes, les hommes et les enfants quel que soit le milieu physique, économique, social et culturel dans lequel ils vivent. Nous avons pour mandat de coordonner la recherche, de découvrir les lacunes et de relier les résultats des recherches aux politiques ainsi que de remédier aux lacunes. Nous sommes parties du principe que les soins de santé sont une question qui concerne les femmes. Les femmes fournissent 80 p. 100 des soins rémunérés et une proportion comparable des soins personnels non rémunérés. Elles représentent la majorité des bénéficiaires des soins de santé, en particulier si l'on pense aux personnes âgées, mais elles sont minoritaires dans les hautes directions où se prennent les décisions au sujet des soins de santé. Nous nous intéressons aux conséquences des réformes sur les femmes en tant que fournisseurs de soins, de malades et de décideurs, mais nous sommes également très sensibles aux répercussions particulières qu'elles ont sur les femmes en fonction du milieu physique, social, économique, culturel et racial dans lequel elles vivent, ainsi que de leur âge et de leur orientation sexuelle. Nous voulions savoir quelles étaient les réformes qui touchaient les femmes, quelles femmes étaient touchées par elles et comment elles l'étaient. Lorsque nous avons commencé à examiner ces questions, nous avons constaté, tout comme vous, que la situation était très complexe et que nous avions du mal à nous comprendre. Nous nous sommes donnés pour tâche d'étudier les types de réforme de soins de santé qui étaient mis en place dans les différentes régions du pays, et de recenser ce que l'on savait au sujet de leur effet sur les femmes. J'aimerais vous communiquer rapidement les principales conclusions de ces enquêtes, et nous aurons peut-être ensuite du temps pour en discuter ensemble. La première conclusion est que la privatisation du régime de santé est une des principales stratégies adoptées pour réformer la santé. La définition de la privatisation que nous avons retenue couvre toute une gamme d'activités que l'on n'associe pas habituellement avec cette expression. Nous parlons de la privatisation du coût des soins de santé lorsqu'on transfère le fardeau financier aux individus et aux organismes privés. Nous parlons de la privatisation de la prestation des soins de santé lorsque l'on confie cette tâche à des fournisseurs de soins de santé à but lucratif. Nous avons également parlé du fait que les institutions publiques se déchargent de la prestation de ces soins sur les organismes communautaires et les ménages privés. Nous avons parlé de la privatisation des soins lorsque la prestation n'est plus assurée par les travailleurs de la santé du secteur public mais par des fournisseurs de soins non rémunérés. Nous avons également parlé de l'adoption de stratégies de gestion copiées sur celles du secteur de santé à but lucratif que l'on applique au système public de santé. Nous avons constaté que toutes ces stratégies étaient utilisées, à divers degrés, dans les différentes régions du pays. Deuxièmement, nous avons constaté que, s'il existait des ressemblances très réelles sur le plan des stratégies, il existait également des différences importantes, comme la décision d'inverser le processus de privatisation. Par exemple, le Manitoba a fait marche-arrière à propos d'une expérience de soins à domicile commerciaux et en Ontario, les services publics ont été élargis aux services offerts par les sages-femmes. Troisièmement, nous avons constaté que les réformes sont lancées tellement rapidement, sans que la population soit véritablement informée des changements prévus, qu'il est difficile de brosser une image complète de la réforme des soins de santé. Nous pensons qu'il faut étudier davantage la privatisation. Il faut également en savoir plus sur les formes qu'elle peut prendre, les conséquences qu'elle peut avoir sur les individus, les groupes et l'ensemble du système. Quatrièmement, nous avons constaté qu'à part la recherche effectuée par les Centres d'excellence pour la santé des femmes, l'effet des réformes sur les femmes est rarement un sujet d'étude. Il existe encore moins de recherche qui examine les différences qui peuvent exister entre les femmes au sujet des répercussions des réformes. La question des femmes est rarement posée et il est encore plus rare qu'on lui apporte une réponse. Cinquièmement, nous avons constaté que les études qui tiennent compte des femmes indiquent que, bien souvent, les réformes des soins de santé ont un effet négatif sur les femmes. Celles qui fournissent des soins de santé et qui sont rémunérées pour le faire font face à des charges de travail de plus en plus lourdes et à de grandes tensions. Je dirais que la principale catégorie professionnelle où il y a un exode des cerveaux est celle des infirmières. On recrute de plus en plus de femmes pour qu'elles fournissent des soins de santé sans être rémunérées, comme cela a été signalé au cours du Forum national sur la santé, et elles le font sans formation et sans grand appui. Les malades que l'on renvoie chez eux plus rapidement et incomplètement guéris sont davantage sensibles à la qualité des soins qu'on leur fournit. Il faut se poser de sérieuses questions sur la qualité des soins, non seulement à domicile, mais également dans les institutions. La décision d'offrir des soins complexes à domicile est à l'origine de grandes tensions chez les femmes et vous trouverez une longue citation dans notre mémoire qui vous donnera une idée du genre de soins que l'on offre aujourd'hui à domicile. Les résultats des études effectuées sur les différences qui existent entre les femmes, même s'ils sont encore plus difficiles à trouver, indiquent que la qualité des soins auxquels ont accès les femmes qui sont traditionnellement les plus vulnérables se détériore. Les femmes autochtones, par exemple, auxquelles s'intéressent particulièrement les Centres d'excellence, font face à toute une série de difficultés à cause de ces réformes. Les femmes qui habitent dans les régions rurales ont beaucoup de mal à fournir les soins nécessaires à cause de la situation actuelle. L'obligation d'assumer certains frais soulève de graves problèmes pour les femmes pauvres, qui constituent la majorité des pauvres. Sixièmement, ces rapports démontrent clairement qu'il y a lieu d'effectuer des études qui tiennent compte des besoins particuliers des femmes pour ce qui est de l'effet des réformes de la santé; des études qui tiennent compte du fait que les hommes et les femmes ont des rapports différents avec le régime de santé et du fait qu'il existe également des différences entre les femmes. Il faut aussi remettre en question ce que l'on qualifie de recherche. Tenir compte des besoins particuliers des femmes ne se résume pas à exploiter des données classées selon le sexe. Enfin, la recherche a démontré qu'il est véritablement possible de faire des choix lorsqu'il s'agit de réformer la santé. Les femmes ont besoin de démontrer qu'elles ont des besoins particuliers et il faut qu'elles participent pleinement à ces choix. Il est également évident que le contexte joue un rôle important en matière de recherche, de politique et de mesures concrètes. Les ententes commerciales dont on nous parle tant depuis quelque temps jouent un rôle essentiel pour ce qui est de fixer les balises que doit respecter un régime de santé, tout comme le font d'autres conventions internationales. Il ne faudrait pas procéder à ces réformes sans avoir évalué l'influence que peuvent avoir les aspects nationaux et internationaux et sans évaluer l'effet qu'elles auront sur les femmes non seulement en tant que fournisseurs de soins et en tant que malades mais également en tant que décideurs. Que veulent les femmes? Elles veulent des services qui répondent à leurs besoins; ces besoins varient énormément en fonction de l'endroit où elles vivent. Elles veulent des soins de qualité, fournis selon des normes fixées par elles. Elles veulent que l'on reconnaisse que ces réformes ont des répercussions sur les soins qu'elles fournissent sur une base quotidienne. Cela veut dire qu'il est très important de réfléchir aux coûts à long terme de ces réformes, tant sur le plan des relations humaines et des valeurs que sur le plan économique. Nous estimons que la recherche que nous avons effectuée devrait constituer un avertissement pour les responsables qui devraient mettre fin à la privatisation de notre régime de santé et faire connaître l'importance d'envisager les répercussions de ces réformes sur les femmes. Merci. Le président: Merci, docteur Armstrong, de nous avoir présenté un mémoire particulièrement stimulant. Dr Ronald Worton, directeur adjoint, Réseau canadien sur les maladies génétiques: Le Dr Armstrong a raison; voici un regroupement quelque peu inhabituel. Je vais certainement donner un point de vue légèrement différent. On m'a demandé de venir ici à la suite d'une invitation qui a été lancée au Réseau canadien des maladies génétiques, dont je suis le directeur adjoint depuis des années. C'est la raison pour laquelle j'ai accepté l'invitation. Je m'occupe également depuis peu d'un nouveau réseau, le Réseau des Centres d'excellence. Ces deux réseaux figurent à la première page du document qui vous a été distribué. Le premier, le Réseau canadien de maladies génétiques, existe depuis 1989. C'était l'un des premiers à faire partie du réseau de centres d'excellence. Il a survécu à deux changements majeurs, c'est un des rares à l'avoir fait et il étudie toujours les gènes pathogènes. Ce réseau reçoit annuellement des subventions d'environ 4,5 millions de dollars. Au cours des ans, il a entraîné la création de sept entreprises dérivées. Notre recherche est orientée dans quatre directions: la découverte de gènes, la pathologie des maladies provenant d'anomalies génétiques, les thérapies génétiques et la génétique démographique. Je représente aujourd'hui un autre réseau, le réseau des utilisateurs de cellules souches. La plupart d'entre vous n'ont pas encore entendu parler de ce réseau parce qu'il est tout nouveau. Il n'a été annoncé qu'en mars de cette année. J'en suis le directeur scientifique. Il a été créé à la suite d'une demande que nous avons présentée l'automne dernier. L'idée de ce réseau est qu'à l'avenir, la recherche et les traitements vont très certainement dépendre de l'utilisation des cellules souches. C'est un sujet controversé, comme vous le comprendrez. Je vais revenir là-dessus dans un moment. Ce réseau regroupe près de 50 scientifiques des différentes régions du Canada. Nous recevrons des subventions de près de 5 millions de dollars lorsque nous aurons conclu toutes nos ententes. Nous allons nous attaquer à quatre domaines de recherche. Le premier portera sur les aspects sociaux, éthiques et juridiques de l'utilisation des cellules souches dans la recherche et les soins de santé. Les trois autres concernent la biologie des cellules souches, la manipulation génétique des cellules souches pour qu'elles puissent être utilisées à des fins thérapeutiques. Le dernier sujet concerne les thérapies basées sur les cellules souches. Comme cela figure sur la première page, le troisième institut que je représente, mon travail de jour, mon travail rémunéré, est l'Institut de recherche de la santé d'Ottawa dont je suis le directeur. C'est également un institut tout nouveau. Il a été créé le 1er avril par la fusion de deux instituts: l'Institut de recherche Loeb, qui se trouve sur le campus civique de l'Hôpital d'Ottawa et l'Institut de recherche de l'Hôpital d'Ottawa, que je dirigeais auparavant sur le campus général. Vous voyez les sept programmes de recherche qui sont énumérés ici. Je ne vais pas les passer en revue. Vous trouverez une brève biographie à la page deux. Vous pouvez la lire vous-même. Je voudrais faire deux observations. Elles sont numérotées 1 et 3 sur la troisième page, ce qui vous montre tout simplement que je ne sais pas compter. La première concerne l'effet que peuvent avoir la génétique et les cellules souches sur les soins de santé. Je ne vous ai pas apporté un mémoire très volumineux. Je pourrai vous en transmettre un si vous le souhaitez. J'en ai écrit beaucoup à une certaine époque. Le Réseau des maladies génétiques peut vous en fournir une vingtaine, à la saveur que vous voulez. Je vous demande de m'indiquer le genre d'information que vous aimeriez que nous vous fournissions. Le seul commentaire que je voulais faire est que les gènes jouent un rôle très important dans les maladies, un rôle beaucoup plus grand que nous le pensions il y a 15 ou 20 ans. Nous pensions auparavant que les gènes ne jouaient un rôle que pour les maladies héréditaires. Nous savons cela depuis longtemps - la fibrose kystique et la drépanocytose en sont des exemples. Nous avons toutefois découvert, depuis une quinzaine d'années, que les gènes jouent un rôle dans pratiquement toutes les maladies. Le diabète, par exemple, n'est pas à strictement parler héréditaire, mais la susceptibilité au diabète dépend d'une douzaine de gènes et les modifications qu'ont subies ces gènes par rapport aux autres déterminent, dans une grande mesure, votre susceptibilité à cette maladie. Cela peut se conjuguer à d'autres facteurs environnementaux comme le régime et d'autres aspects, mais il demeure que les gènes jouent un rôle dans cette maladie. C'est pratiquement la même chose pour toutes les autres maladies. Les affections du coeur, pratiquement toutes les formes de cancer, les affections pulmonaires comme l'emphysème et l'asthme comportent toutes des composantes génétiques importantes. La grande différence qui existe ce que l'on fait aujourd'hui et ce qui se faisait il y dix ans est que nous commençons à comprendre ce que sont ces gènes, quel rôle ils jouent dans les cellules, quelles sont les protéines qu'ils fabriquent, et quelle est la fonction de ces protéines. J'ai mentionné ces questions sous le titre «les déterminants génétiques de la susceptibilité» qui se trouve dans le document distribué. Lorsque ces déterminants sont connus, nous commençons à comprendre quels sont les déterminants qui sont à l'origine de nos maladies ou qui nous y prédisposent. Nous commençons à comprendre comment ces déterminants nous prédisposent à certaines maladies. Cette connaissance nous permet d'expliquer en grande partie les mécanismes des maladies. Nous comprenons déjà les mécanismes relatifs à plusieurs centaines de maladies, et il y en a plusieurs milliers encore à comprendre. Cette compréhension débouche déjà sur l'élaboration de nouveaux tests de diagnostic et, dans une mesure moindre, sur de nouvelles thérapies. Dans 15 ans, je prédis que nous aurons renouvelé les tests de diagnostic et que nous examinerons une très large gamme de nouvelles thérapies fondées sur ces découvertes. L'autre remarque que j'ai mentionnée ici est l'importance des cellules souches pour la régénération et la réparation des tissus. Nous avons des cellules que nous appelons les cellules souches dans tous nos tissus. Si vous vous déchirez un muscle en faisant un effort trop violent, comme cela m'arrive de temps en temps parce que je ne fais pas suffisamment d'exercice, vous sentez que vos muscles sont douloureux et raides. Une partie de vos fibres musculaires sont déchirées et endommagées. Ce sont les cellules souches de votre muscle qui entrent en jeu. Ces cellules fusionnent avec le muscle existant et elles renouvellent le muscle. De la même façon, votre sang est constamment renouvelé grâce aux cellules souches qui se trouvent dans votre moelle osseuse. Ces cellules se renouvellent constamment et passent par un processus appelé la différenciation, qui leur permet de devenir des globules rouges ou des globules blancs. Les cellules souches jouent un rôle très très important dans ces tissus. Il existe une cellule plus primitive, que l'on appelle «cellule embryonnaire», qui est capable de se transformer en n'importe quel autre type de cellules. Nous savons cela parce que l'on peut prendre une seule cellule embryonnaire d'une souris noire, la placer dans un embryon de souris blanche et l'on peut régénérer une souris noire complète à partir de cette cellule embryonnaire unique. Nous savons qu'une cellule embryonnaire est capable de régénérer un organisme entier et de le faire correctement. Il existe des épreuves récentes, ce qui m'a vivement intéressé il y a deux ans, indiquant que les cellules souches adultes pourraient peut-être faire la même chose. Nous n'avons pas encore tous les détails. Nous ne savons pas comment cela fonctionne. Nous ne savons pas si ce processus peut être appliqué uniformément mais chez la souris, on a pris des cellules souches de la moelle osseuse, où elles doivent normalement fabriquer du sang, pour les mettre dans un muscle et elles ont fabriqué du muscle. Lorsqu'on a pris ces cellules de la masse musculaire pour les placer dans la moelle osseuse, elles ont fabriqué du sang. Autrement dit, elles sont interchangeables. Les cellules souches de la moelle osseuse peuvent également régénérer le cerveau. Comme vous pouvez vous imaginer, cette découverte a un potentiel énorme. Si nous pouvions comprendre comment les cellules arrivent à faire cela, si nous réussissions à manipuler ces processus pour que ces cellules génèrent des tissus à volonté, nous aurions alors un mécanisme qui permettrait de réparer les dommages causés par les maladies dégénératives. Parmi ces maladies, il y a les maladies d'Alzheimer, de Parkinson, les maladies neuromusculaires, la dystrophie musculaire, les lésions de la moelle épinière et toutes sortes de choses. C'est sur ces données et sur cet espoir que s'appuyait la demande de financement pour un projet de réseau sur les cellules osseuses qui a récemment été accordée. Je cherche simplement à vous faire connaître certaines choses. Ce sont là deux grands domaines, qui vont avoir un effet très important non seulement sur la recherche mais également sur la santé. Nous sommes à votre disposition pour vous aider à comprendre ces questions, pourvu que nous sachions exactement ce que vous voulez. Le montant des crédits affectés à la recherche médicale au Canada a augmenté de façon considérable depuis cinq ans. Le sénateur Morin, avec qui j'ai travaillé en étroite collaboration au conseil de direction provisoire qui a créé IRSC, sait mieux que moi ce dont je parle. Je vais mentionner trois initiatives du gouvernement fédéral. La Fondation canadienne pour l'innovation contribue énormément aux infrastructures. Toutes les universités et tous les hôpitaux universitaires du Canada ont pu bénéficier de ce financement; ils ont obtenu plusieurs millions de dollars pour construire de nouveaux locaux et créer de nouvelles infrastructures. Un certain nombre de provinces ont accordé un montant correspondant à celui du gouvernement fédéral. Lorsque la FCI fournit 40 p. 100 et la province 40 p. 100, je n'ai besoin de demander au public que 20 p. 100, ce qui est beaucoup plus facile. Les Instituts de recherche en santé du Canada, IRSC, ont eu un effet énorme. Tout d'abord, c'est une nouvelle notion. Le conseil des recherches médicales était un organisme très passif; il attendait que les demandes arrivent et subventionnait les meilleurs projets. IRSC est un organisme actif; il élabore un cadre de recherche et détermine quel est le genre de recherche qui convient le mieux à notre pays et ensuite, il prend des mesures pour que s'effectuent les recherches prévues. Cela ne veut pas dire qu'il ne subventionne pas encore les demandes de subventions de recherche présentées spontanément mais la planification fait maintenant partie de l'action de IRSC. IRSC intègre les quatre piliers de la recherche. Le CRM s'occupait de recherche fondamentale et clinique. Les nouveaux instituts font maintenant de la recherche fondamentale, clinique, de la recherche dans le domaine de la santé des populations et sur les services de santé. Cette intégration a donné naissance à des projets particulièrement novateurs. Le financement de IRSC a presque doublé. D'ici à l'année prochaine, il va doubler pour atteindre près de 500 millions de dollars. Les chaires de recherche du Canada qui ont été créées l'année dernière ont eu un effet considérable parce que l'on a pu recruter des chercheurs et les retenir au Canada. Les meilleurs scientifiques cherchent à obtenir des chaires de recherche du Canada et lorsqu'ils l'obtiennent, ils ne quittent plus le pays, ils restent au Canada. Que faut-il faire maintenant? J'ai mentionné deux ou trois points en bas de la page. Je voulais souligner l'importance de IRSC. IRSC représente une initiative audacieuse qui a été conçue il y a trois ans. L'intention derrière IRSC était de faire passer à 1 million de dollars par an les crédits affectés à la recherche médicale. C'est le montant qui a été demandé dans le projet initial. Il a été calculé en se fondant sur une comparaison avec d'autres pays, sur une définition des besoins canadiens et sur une évaluation de notre capacité en matière de recherche. Le gouvernement fédéral a donné suite à cette demande en doublant ce budget pour qu'il passe à 500 millions de dollars, ce qui a été accepté par tout le monde et représentait un changement très agréable par rapport aux coupures antérieures. Toutefois, je soutiens toujours que nous avons besoin d'atteindre le montant de 1 milliard de dollars. Ce serait un budget qui nous permettrait d'être très concurrentiels par rapport aux États-Unis, par rapport aux pays européens qui font de la recherche intensive en santé, notamment. Le budget actuel représente environ un quart des crédits affectés à la recherche médicale par des organismes de ce type aux États-Unis, si l'on fait un calcul par habitant. Nous avons encore beaucoup à faire. Il faut, d'après moi, poursuivre le travail de la FCI et des chaires de recherche canadiennes. Ce sont là d'excellentes initiatives. Elles ont beaucoup apporté à la recherche et il faut qu'elles continuent à oeuvrer dans ce sens. L'on pourrait dire beaucoup d'autres choses. J'ai décidé de vous parler uniquement de génétique, des cellules souches et de la question du financement. Je serais heureux de répondre à vos questions. Le sénateur Pépin: Docteur Armstrong, je ne pense pas que vous ayez à convaincre beaucoup d'entre nous de l'intérêt de votre point de vue, parce que nous sommes pour la plupart des femmes et que votre exposé était très bon. J'aimerais que vous puissiez vous adresser à un comité composé uniquement d'hommes, parce que cela aurait, je crois, un effet important. Je fais partie d'un groupe de parlementaires qui s'occupe d'examiner tous les projets de loi, du point de vue de la problématique homme-femme. Nous voulons voir quel est l'effet de ces mesures sur les femmes. Nous connaissons toute l'importance des soins de santé. Le sénateur Cohen: Docteur Armstrong, compte tenu du fait que vous dites qu'il faut faire davantage de recherche sur les conséquences de la privatisation sur les femmes, et que pratiquement toute cette recherche a été effectuée par les cinq Centres d'excellence, que vos subventions sont presque épuisées, et que le Dr Worton sait que le montant des subventions a beaucoup augmenté, il a fourni les chiffres, que va-t-il arriver aux cinq Centres d'excellence pour les femmes? Vous avez démontré qu'ils jouaient un rôle essentiel pour 50 p. 100 de la population. Dr Armstrong: Je ne sais pas ce qui va leur arriver. J'espère qu'ils vont obtenir d'autres subventions, parce qu'ils ont joué un rôle très important dans la création d'une capacité de recherche dans ce pays, et que nous commençons seulement à nous en apercevoir. Nous venons tout juste de commencer à créer des équipes qui peuvent effectuer le genre de recherche dont nous avons besoin, pas simplement de la recherche sur les femmes, mais une recherche qui tienne compte des différences importantes qui existent d'une région à l'autre et d'un groupe de femmes à un autre. Il est très important de poursuivre ces subventions. On ne peut s'en remettre uniquement à IRSC pour ce genre d'étude. IRSC a pour mission de faire de la recherche pour les hommes et pour les femmes. Cela est très important et nous avons démontré, grâce aux Centres d'excellence, qu'il faut également une recherche qui soit orientée sur les femmes. Le sénateur Cordy: Comme les sénateurs Pépin et Cohen l'ont déclaré, les femmes qui sont membres de ce comité sont ravies de lire les documents que vous avez fournis, docteur Armstrong. J'aimerais avoir davantage d'informations sur le rôle des femmes en tant que fournisseurs de soins. Nous savons tous que les soins, qu'ils soient destinés à un parent, à un enfant ou à une autre personne, sont bien souvent donnés par les femmes. Vos documents indiquent que les femmes veulent que soit reconnu l'effet de ces réformes sur les soins de santé et que l'on adopte des stratégies qui tiennent compte de leurs préoccupations. Est-ce que l'on fait actuellement de la recherche sur l'effet qu'a sur les femmes la prestation de soins, pour ce qui est du stress et des questions de ce genre? Est-ce qu'il y a des choses intéressantes qui se produisent au Canada et y a-t-il des collectivités qui sont sensibilisées aux effets de la prestation de soins sur les femmes et qui fournissent des services de relève? Dr Armstrong: Vous avez soulevé plusieurs questions. L'on fait effectivement de la recherche sur les femmes en tant que fournisseurs de soins dans les Centres d'excellence pour la santé des femmes. Le Centre d'excellence des Maritimes vient d'obtenir une subvention pour examiner la prestation de soins par les femmes, qu'elles soient rémunérées ou non rémunérées. Je crois que nous allons beaucoup apprendre avec ce projet. J'en fais d'ailleurs partie. Elles ont l'intention d'examiner non seulement les problèmes mais également les stratégies susceptibles de répondre aux difficultés constatées. Nous avons effectué suffisamment de recherches qui démontrent que l'effet est négatif mais je pense qu'il est maintenant important de s'attaquer aux stratégies. On a privilégié l'idée de fournir un appui aux femmes pour qu'elles puissent continuer à fournir des soins. On s'est beaucoup moins préoccupé de donner un choix aux femmes dans ce domaine. Je viens de finir un recensement des études portant sur la prestation de soins chez les adultes. Il existe très peu de recherche, voire aucune, sur l'effet de la décision de fournir des soins à domicile, sur les relations personnelles en particulier chez les femmes. Si nous voulons vraiment appuyer les ménages et les relations personnelles, il me paraît très important d'examiner les conséquences de la prestation de soins sur ces relations. J'ai supervisé une thèse il n'y a pas très longtemps qui portait sur la fourniture de soins chez les adultes schizophrènes. Presque toutes ces personnes étaient des femmes. En fait, toutes les personnes étudiées étaient des femmes. Dans tous les cas, leur mariage avait échoué. Il est important de tenir compte de ces conséquences à long terme. Si nous voulons réfléchir aux coûts, il s'agit là d'un coût à long terme très important. Une recherche effectuée au Québec, reliée au Centre d'excellence qui existe dans cette province, démontre que les femmes sont souvent obligées de quitter leur travail. Quelle est la conséquence à long terme de cette décision pour ces femmes, et quels sont les coûts à long terme pour la société d'obliger ces femmes à quitter la population active pour fournir ce genre de soins de santé? Quel genre de stratégie pouvons-nous adopter pour qu'il s'agisse là d'un véritable choix? Nous savons que la prestation de soins peut être une expérience très enrichissante mais nous savons également qu'elle risque davantage de l'être si la personne choisit véritablement de le faire et si elle a accès au soutien dont elle a besoin. Il est important de ne pas oublier qu'il existe une grande diversité parmi les soins fournis à domicile. Certains soins non rémunérés sont donnés sur une base temporaire; ils sont parfois fournis à très long terme mais ne sont pas très complexes. Il y a également des soins qui sont très complexes et qui sont offerts à long terme. Toutes ces catégories de soins ont besoin de mécanismes de soutien et de solutions de rechange différents. Il faut également tenir compte du fait, pour ce qui est des soins à domicile, que, bien souvent, les gens vivent dans des foyers où il y a de la violence. Il existe de nombreuses études sur la violence familiale mais il n'y a pas grand-chose qui s'est fait pour relier cet aspect à la décision de fournir des soins à domicile. Il y a beaucoup de travail à faire. Je ne pense pas que nous puissions nous inspirer de modèles existants. Nous pouvons faire quelques suggestions mais nous avons en fait besoin de recherche. J'espère que cela répond à votre question. Le sénateur Cordy: Cela me rappelle qu'il y a un travail considérable à faire dans ce domaine. Le sénateur Morin: Les hommes qui font partie de ce comité appuient également les Centres d'excellence. Dr Armstrong: J'ai même des amis parmi les hommes. Le sénateur Morin: Je pourrais dire la même chose. J'aimerais adresser ma question au Dr Worton. Le Dr Worton est très modeste. C'est un chercheur de renommée internationale. Une de ses découvertes les plus importantes a été celle du gène de la dystrophie musculaire. Docteur, pourriez-vous brièvement décrire cette maladie et votre découverte et nous indiquer où cela pourrait-il nous mener à l'avenir sur le plan du diagnostic et du traitement? Je crois que ce serait utile pour le comité. Le président: Je vais vous dire quelle était la question que j'allais vous poser. Elle découle naturellement de la précédente. Possède-t-on des chiffres même très approximatifs sur les répercussions que pourraient avoir sur les coûts du régime de santé les nouvelles techniques comme celles dont a parlé le sénateur Morin? Nous avons découvert de nouveaux traitements merveilleux mais leur coût va-t-il sonner le glas de notre système? Je sais qu'on ne peut pas avoir encore de chiffres précis mais si vous pouviez nous en dire davantage sur les répercussions financières, cela nous serait utile. Dr Worton: J'allais dire que si je vous avais demandé de poser une question, j'aurais choisi la question que vous venez de poser. L'expression dystrophie musculaire regroupe toute une gamme de maladies neuromusculaires. Quatorze d'entre elles portent le nom de dystrophie musculaire. Il y a 15 ans, nous ne connaissions même pas la cause de ces maladies. Nous savions qu'elles étaient de nature génétique, que bon nombre d'entre elles étaient héréditaires mais que les caractéristiques de cette transmission variaient selon la maladie considérée. C'est tout ce que nous savions. On étudiait depuis des dizaines d'années la fibre musculaire à l'aide de techniques pathologiques, notamment. Nous avions toutes sortes d'indications mais personne ne connaissait l'origine de ces dystrophies musculaires. Dans l'ensemble, les dystrophies musculaires les plus graves commencent dès la petite enfance, habituellement à l'âge de trois ou quatre ans; les enfants ont du mal à marcher, à monter les escaliers, à faire du tricycle, à faire ce que font les autres dans la rue. Lorsqu'ils ont six ans, ces enfants sont en général incapables de se lever lorsqu'ils sont assis par terre. Ils portent habituellement des jambières. Lorsqu'ils ont neuf ans, ils sont dans une chaise roulante. À 15 ou 16 ans, ils ont du mal à respirer parce que les muscles des poumons sont atrophiés. À 18 ans, ils ont habituellement besoin d'un respirateur. S'ils n'utilisent pas un respirateur, ils meurent avant l'âge de 20 ans. Ceux qui utilisent un respirateur demeurent en vie, ils sont dans une chaise roulante avec une machine qui respire pour eux et il y a quelqu'un qui les nourrit et qui les sort de leur chaise et les y replace. Je connais personnellement plusieurs d'entre eux qui sont dans la vingtaine et c'est ainsi qu'ils vivent. Il existe des formes moins aiguës qui se déclenchent plus tard dans la vie et qui évoluent plus lentement; les personnes qui en sont atteintes sont beaucoup plus âgées lorsqu'elles doivent utiliser une chaise roulante. Nous nous sommes attaqués à la plus grave de ces maladies, celle qu'on appelle la dystrophie musculaire de Duchenne parce que nous avions un patient tout à fait unique qui nous a donné une indication sur l'emplacement possible du gène dans les chromosomes. Nous avons effectivement réussi à isoler cette partie du chromosome. Nous avons cherché et trouvé un gène qui était là. Cela nous a pris cinq ans; il a fallu encore deux ans pour prouver que c'était bien le gène responsable de la dystrophie musculaire. Nous avons ensuite découvert la protéine que fabriquait ce gène et démontré que les enfants qui étaient atteints de dystrophie musculaire n'avait pas cette protéine. Cela a été une grande découverte. J'aime faire remarquer que cette découverte a changé la recherche qui se faisait sur ce genre de maladies dans le monde entier, parce que toute cette recherche était engagée dans la mauvaise direction et elle s'est réalignée. Tout le monde a dit que c'était la voie à suivre. Après cette découverte, les crédits affectés à la recherche ont donné beaucoup plus de résultats parce que celle-ci allait dans la bonne direction. Cette découverte a suscité pas mal de recherche au Japon et aux États-Unis et la personne qui a effectué cette recherche aux États-Unis a été Kevin Campbell, qui a en fait été formé au Canada même s'il est américain. Kevin a démontré que la protéine défectueuse chez ces enfants faisait partie d'un complexe protéinique composé de sept protéines différentes. Il a isolé chacune de ces protéines, une à la fois, avec beaucoup de soins, et il a identifié les gènes qui étaient responsables de la fabrication de chacune des protéines. Il en a déduit que ces protéines, puisqu'elles font partie de ce complexe, étaient peut-être celles qui manquaient dans les autres formes de dystrophies musculaires, parce que ce complexe est un élément nécessaire. Grâce à une collaboration internationale, il a démontré que six formes différentes de dystrophies musculaires étaient dues à des mutations de six gènes différents qui fabriquaient six protéines différentes faisant partie de ce complexe. Nous connaissons aujourd'hui les causes de six formes de dystrophies musculaires sur 14. Nous progressons rapidement. On a essayé d'appliquer une thérapie génétique à ces maladies, la plupart du temps sur des souris. Toutes ces maladies ont été reproduites sur les animaux. C'est facile; il ne faut que trois mois au lieu de trois ans pour créer une souris qui a un défaut génétique identique à celui que l'on retrouve chez l'humain; on peut ensuite utiliser un système de test pour mettre à l'épreuve nos thérapies. La thérapie génétique a donné de bons résultats sur les souris atteintes de dystrophie musculaire, qui reproduit de façon très réelle la maladie humaine. La thérapie génétique n'a pas encore été essayée sur des humains. Je ne pense pas que l'on soit tout à fait prêt à essayer cette thérapie sur les humains qui souffrent de ces maladies, parce que les expériences effectuées sur les animaux sont prometteuses, mais elles n'entraînent pas une guérison totale. Nous craignons certaines conséquences de cette thérapie. Chez les animaux, il n'est pas grave d'utiliser les cellules d'un animal pour les mettre dans un autre animal. On peut utiliser des souches pures de souris de façon à ce qu'elles soient toutes identiques et qu'il n'y ait pas de problème de rejet. Chez les humains, il faut utiliser les cellules d'une autre personne, du père habituellement. L'autre aspect de la dystrophie musculaire est qu'on ne peut peut-être pas remplacer tous les gènes parce qu'il faudrait en introduire un très grand nombre dans chaque partie de chaque muscle, mais l'on pourrait peut-être reconstruire les muscles en utilisant des cellules souches. Nous avons fait une expérience de thérapie cellulaire en 1990. Ce n'est pas moi qui l'ai dirigée. C'était George Karpati de l'Institut de neurologie de Montréal. J'ai effectué une partie des examens des tissus provenant des enfants qui avaient reçu ces cellules. Nous avons injecté ce que nous pensions être à l'époque des cellules souches à six jeunes garçons, qui avaient tous six ou sept ans. Dans tous les cas, les cellules provenaient de leur père mais les tissus ne correspondaient pas vraiment. C'était une très petite expérience. Nous avons effectué 100 injections dans un biceps. Les résultats ont été très décevants. Le muscle n'a pas repris de force, le tissu musculaire ne s'est pas reconstruit et la protéine qui était absente n'est pas apparue. Nous pensons que nous pourrions faire mieux aujourd'hui. J'ai un rêve: nous pouvons commencer avec un enfant de six ou quatre ans qui souffre de cette maladie. Nous ne pouvons pas prendre des cellules souches provenant de ses propres muscles parce qu'elles sont épuisées d'avoir régénéré ses muscles depuis cinq ans. Nous pourrions peut-être prendre une cellule souche de sa moelle osseuse, parce que ces cellules ne seraient pas fatiguées, la maladie ne touchant aucunement le sang, ni la moelle osseuse. On pourrait donc prélever par biopsie cette moelle osseuse et cultiver ces cellules dans une culture. Nous ferions alors une manipulation génétique pour corriger le gène dystrophine défectueux et nous leur ferions subir un traitement pour que les cellules souches de la moelle osseuse deviennent des cellules souches du muscle. Enfin, si nous arrivions à le faire et à implanter ces cellules souches dans les muscles, on aurait peut-être un moyen de guérir cette maladie parce que les cellules proviendraient de l'enfant. Il n'y aurait donc aucun problème de rejet. C'est notre objectif. Le FCI nous a fourni des fonds pour construire un centre de thérapie génétique, basée sur les cellules souches, une somme de 4,4 millions de dollars. La province a fourni un montant équivalent et nous avons reçu 2 millions de dollars de l'hôpital. Nous allons construire un centre de 11 millions de dollars. Nous avons appris cet hiver que nous allions recevoir une subvention de 21 millions de dollars, dont un tiers viendrait du gouvernement provincial, pour embaucher dix scientifiques. Cette nouvelle, combinée au réseau des utilisateurs de cellules souches que nous venons de créer, me fait espérer que je pourrais revenir dans quelques années vous dire que le Canada est un leader en matière de thérapie sur cellules souches, non seulement pour ce qui est de la dystrophie musculaire mais pour toute une gamme de maladies. J'ai peut-être répondu à votre question sur les coûts? Le président: Il est très difficile de parler une chose aussi terre à terre que l'argent après avoir parlé de tout cela. Il serait toutefois utile de nous transmettre des chiffres concernant les répercussions financières que tout cela pourrait avoir. Docteur Armstrong, je veux être absolument sûr de bien vous avoir compris et c'est avec une certaine hésitation que je soulève cet aspect. Dans votre liste des conséquences de la privatisation, vous dites que la «privatisation» veut dire «transférer le coût du secteur public à l'individu.» Est-ce bien exact? Est-ce bien ce que vous appelez la privatisation? Dr Armstrong: La «privatisation» recouvre diverses choses. C'est là une de ses formes. Nous disons que la privatisation prend diverses formes. Nous qualifions de privatisation un transfert du secteur public au secteur privé ou à l'individu. Il peut s'agir d'un transfert du coût ou du travail, ce qui est une question différente de celle du coût. Le transfert du coût peut vouloir dire avoir à acheter ses propres médicaments ou à payer les soins à domicile dont on a besoin. Le transfert du travail consiste à envoyer chez lui un malade qui se trouvait dans un hôpital ou une institution et qui a encore besoin de soins. Il pourrait également s'agir du transfert de la fourniture des soins d'une institution publique à une institution commerciale. Le président: Pourquoi vous intéressez-vous à cet aspect si cela n'a aucune conséquence pour l'individu? Dr Armstrong: Parce que cela fait une grande différence pour les femmes qui fournissent ce travail dans ces institutions. Le président: Jusque-là, je comprenais. Je comprends que le patient doit assumer des coûts supplémentaires. Lorsque l'on passe à la différence qui existe entre une institution publique et une institution privée, mon instinct me dit que nous sommes maintenant dans un domaine qui relève de l'idéologie politique. Il est possible de faire une telle affirmation, mais cela n'appartient pas à la même catégorie que vos autres déclarations. Dr Armstrong: Je ne pense pas qu'il s'agisse d'idéologie politique. Il y a des études sur les soins à long terme qui démontrent qu'il existe une différence entre les institutions publiques et les institutions commerciales. Le président: Cela fait une différence pour qui? Dr Armstrong: Pour les personnes qui fournissent les soins, dont 80 p. 100 sont des femmes. Le président: En quoi cela fait-il une différence? Dr Armstrong: Le travail est organisé différemment. Cela entraîne des différences sur les charges de travail, sur les accidents de travail, sur les conditions de travail, sur le genre de soutien offert sur les lieux de travail et sur la rémunération. Le président: C'est pour cette raison que j'aimerais voir ces données. Vous utilisez le mot «privatisation» pour décrire plusieurs choses différentes. Il est important que les membres du comité comprennent la façon dont vous utilisez ce mot. Lorsque nous examinons des situations qui ne causent aucun préjudice aux particuliers; c'est-à-dire lorsqu'ils n'ont pas à assumer des coûts supplémentaires, nous devons alors comprendre la différence qui existe entre le secteur public et le secteur privé sur ce point. D'un autre côté, le secteur privé est parfois nettement plus efficace. Je pensais en termes de coût du système. On peut conclure que l'amélioration de la productivité n'est pas nécessairement une mauvaise chose. Les données que vous possédez concernant la différence entre les personnes qui fournissent ces soins, en tenant pour acquis que le patient n'en absorbe pas davantage, nous seraient très utiles. Le sénateur Morin: Lorsque l'on parle d'organismes privés, s'agit-il d'organismes privés à but lucratif ou non lucratif? Le président: J'ai pensé que vous vouliez parler des organismes à but lucratif. Le sénateur Morin: Cela est tout à fait différent. Dr Armstrong: Nous parlons de privatisation dans divers contextes, dont l'un est le transfert des soins à des institutions commerciales. L'un est le transfert des soins à des organismes communautaires, sans but lucratif, qui utilisent des bénévoles, ce qui peut faire une grande différence pour les femmes, pour ce qui est du travail qui doit être accompli par les bénévoles, dont la plus grande partie est également fait par des femmes. Nous disons, et notre recherche commence à le prouver, que cela entraîne des conséquences pour les femmes. Il faut tenir compte du fait que sur cinq fournisseurs de soins rémunérés, quatre sont des femmes. La totalité des coûts qu'entraînent les soins à long terme représente la main-d'oeuvre. L'«efficacité» dont vous parlez consiste-t-elle à faire travailler les gens davantage au point où cela compromet leur santé? Nous savons que c'est dans le secteur des soins de santé que le taux des accidents de travail est le plus élevé, toutes catégories professionnelles confondues. Le nombre des accidents de travail est plus élevé dans les organismes à but lucratif que dans les organismes sans but lucratif. C'est un problème. C'est une question qui mérite d'être examinée. Le sénateur Morin: Il ne s'agit pas d'institutions privées, mais d'institutions à but lucratif. C'est une grande différence. Dr Armstrong: Bien sûr, et nous faisons cette différence. Nous avons neuf rapports. Il y a une étude de la situation à Terre-Neuve, une autre qui est presque achevée qui concerne les Maritimes, une du Québec, une de l'Ontario, une du Manitoba et de la Saskatchewan, une de l'Alberta et une de la Colombie- Britannique. Chacune de ces études recense la recherche effectuée dans ces régions sur toutes les formes de privatisation. Elles comprennent non seulement celles dont vous dites qu'elles sont pour la plupart reconnues comme étant de la privatisation mais elles portent également sur la recherche qui compare les services offerts dans les grandes institutions publiques et les petites organisations communautaires. Que savons-nous de ces choses? C'est une question qu'il faut au moins se poser. Le sénateur Morin: Cette recherche a-t-elle été publiée? Peut-on avoir accès aux résultats? Dr Armstrong: Nous avons des copies de tous ces rapports, sauf le rapport des Maritimes, et nous pouvons facilement vous les envoyer. Le président: Cela serait utile, merci beaucoup. Je crois que nous reprendrons ce débat à un moment donné. Dr Worton: Un dernier point. Il existe une analyse économique des tests génétiques par un chercheur de Toronto. Je peux lui demander de m'envoyer des copies et vous les transmettre ou l'appeler et elle serait ici dans une heure si elle prend l'avion. Le président: Ces documents sont-ils très techniques ou sont-ils compréhensibles pour des non-spécialistes comme nous? Dr Worton: Je pense qu'ils sont compréhensibles. Le président: Merci pour votre exposé. La séance est levée.