Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie
Fascicule 29 - Témoignages
OTTAWA, le jeudi 4 octobre 2001
Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, de la science et de la technologie auquel a été transmis le projet de loi C-11, Loi concernant l'immigration au Canada et l'asile conféré aux personnes déplacées, persécutées ou en danger, se réunit ce jour à 9 heures pour en faire l'examen.
Le sénateur Michael Kirby (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président: Nous allons poursuivre les audiences sur le projet de loi C-11, Loi concernant l'immigration au Canada et l'asile conféré aux personnes déplacées, persécutées ou en danger.
Comme vous le savez, nous accueillons aujourd'hui l'honorable Elinor Caplan, ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration. Elle sera accompagnée du sous-ministre Michel Dorais et de la sous-ministre adjointe Joan Atkinson, chargée du développement des politiques et des programmes. Madame la ministre, vous avez la parole.
[Français]
Mme Elinor Caplan, c.p., députée, ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration: Je suis heureuse d'être ici aujourd'hui, et d'assister à vos délibérations sur le projet de loi C-11 concernant l'immigration au Canada et l'asile conféré aux personnes déplacées, persécutées ou en danger.
[Traduction]
Je suis heureuse de l'occasion qui m'est donnée de participer avec les membres du comité à l'examen du projet de loi C-11 concernant l'immigration au Canada et l'asile conféré aux personnes déplacées, persécutées ou en danger. Le texte législatif que vous étudiez a retenu beaucoup l'attention depuis les atrocités du 11 septembre. Nous avons tous été choqués et horrifiés par ces attentats terroristes épouvantables. Ils nous ont forcés à jeter un regard lucide sur nos lois et nos procédures les plus fondamentales.
Les Canadiens veulent être rassurés et être certains que nous pouvons veiller à leur santé et à leur sécurité et protéger notre société. Mais ils ne veulent pas que cette protection soit assurée au détriment de nos traditions et de nos valeurs essentielles, lesquelles se manifestent dès que nous accueillons des immigrants et des réfugiés de toutes les régions du monde.
Je suis fière de dire que cette législation contient des dispositions très sévères à l'égard des personnes qui constituent un danger pour la sécurité publique et de celles qui ne respectent pas nos lois. Mais le projet de loi réitère également à quel point l'immigration et la protection des réfugiés sont importantes pour assurer l'avenir de notre pays.
Avant de discuter avec vous de certaines des dispositions essentielles de la législation, je tiens à aborder un point important qui a été soulevé pendant le débat en seconde lecture, le 25 septembre. Je crois que c'est le sénateur Murray qui a demandé si le gouvernement avait les moyens d'agir contre les personnes qui cherchent à entrer au Canada et qui constituent un danger pour la sécurité. Ma réponse à cette question est «oui», la loi actuelle contient un éventail de dispositions relatives à la sécurité.
Le sénateur Di Nino aurait ensuite posé au comité la question suivante: «Si la loi actuelle contient des dispositions qui permettent d'assurer notre sécurité, pourquoi est-il si urgent d'adopter un nouveau projet de loi?» Ma réponse est que nous utilisons de la meilleure façon possible les outils qui sont à notre disposition pour protéger nos frontières et assurer la sécurité de la population canadienne. Et je suis extrêmement fière du dévouement et du professionnalisme dont font preuve les fonctionnaires de mon ministère qui, chaque jour, au Canada et à l'étranger, travaillent avec ces outils. Ce projet de loi contient toutefois de nouvelles mesures essentielles dont le besoin se fait cruellement sentir.
Je crois savoir également que certains ont justement remis en question l'urgence de cette mesure et ont demandé pourquoi le projet de loi devait être adopté maintenant alors qu'il ne sera mis en oeuvre que plus tard. Je suis certaine que la plupart d'entre vous savent que le projet de loi doit être adopté pour que nous puissions procéder à la publication préalable du règlement d'application qui doit accompagner le projet de loi. Tout retard dans l'adoption du projet de loi retardera d'autant l'adoption du Règlement et, par le fait même, l'entrée en vigueur de ces deux textes législatifs. Il va sans dire que la mise en oeuvre des nouvelles mesures essentielles que contient le projet de loi sera également retardée.
Mais je peux vous dire que la rédaction du Règlement est en cours depuis un bon moment, et que nous avons tenu des consultations ouvertes sur les dispositions réglementaires alors même que les travaux sur le projet de loi suivaient leur cours. Des consultations ont eu lieu après le dépôt du projet de loi à la Chambre des communes en février dernier. Le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration de la Chambre des communes a d'ailleurs tenu ses propres consultations et contribué ainsi à améliorer de façon importante certains aspects du projet de loi.
Je demeure d'ailleurs convaincue de l'importance de ce processus de consultation ouvert et transparent pour l'élaboration du Règlement. Il nous permettra d'entendre les points de vue des intervenants, tels ceux qui se sont adressés à vous au cours des derniers jours, et des comités des deux Chambres du Parlement. Je tiens à préciser toutefois que grâce à ce travail entrepris de longue date, nous serons en mesure de procéder à la publication préalable du Règlement très rapidement après que le projet de loi aura reçu la sanction royale.
Avant de parler du projet de loi lui-même, je tiens à préciser un dernier point absolument essentiel. À la suite des attentats terroristes qui ont frappé les États-Unis, certaines personnes ont demandé que nous adoptions une disposition de dérogation à la Charte canadienne des droits et libertés, afin de pouvoir passer outre à certaines décisions de la Cour suprême relatives à notre processus de détermination du statut de réfugié. Je tiens à vous dire aujourd'hui que nous n'avons aucunement l'intention de retenir cette option.
Le premier ministre l'a très bien dit dans son discours à la Chambre des communes après les attaques terroristes. Nous devons user de représailles à l'égard des terroristes, mais dans ce combat difficile, nous ne devons pas abandonner nos valeurs et renier ce que nous sommes. La Charte des droits et libertés constitue l'expression de nos valeurs. Elle affirme ce que nous sommes. Elle constitue notre engagement à l'égard des personnes qui se tournent vers nous parce qu'elles craignent d'être persécutées, et nous oblige à leur donner accès à l'application régulière de la loi, ce qui signifie tout simplement que nous devons les traiter avec équité. Je veux qu'il soit bien clair que nous respecterons cet engagement.
Naturellement, des témoins sont également venus vous dire que nous devrions aller bien au-delà de ce qui est prévu dans la Charte. Ces personnes voudraient que nous offrions, particulièrement aux grands criminels, des recours, des procédures ou des mesures de protection additionnelles qui vont plus loin que ce à quoi nous oblige la Charte en ce qui a trait à l'application régulière de la loi. Je tiens à dire encore une fois qu'il n'en est pas question.
Les grands criminels et les personnes qui constituent un danger pour la sécurité du Canada s'exposeront à des mesures au moins aussi sévères que celles qui ont cours ailleurs dans le monde, dans les limites imposées par la Charte des droits et libertés. Nous sanctionnerons sévèrement les criminels et les personnes qui représentent un danger pour la sécurité, ainsi que celles qui cherchent à contourner nos lois. Mais nous continuerons à accueillir les véritables réfugiés, à favoriser la réunification des familles et à attirer les travailleurs qualifiés dont le Canada a besoin. C'est cette approche équilibrée qui est à la base du projet de loi.
Quelles sont donc les principales dispositions que l'on retrouve dans le projet de loi C-11?
Personne n'ignore que les attaques qui ont eu lieu récemment aux États-Unis ont soulevé de graves questions concernant la sécurité, et ce, dans tous les pays. La protection des frontières est certainement une question importante à cet égard.
Nous savons depuis quelque temps déjà que le trafic de personnes constitue un problème qui prend de plus en plus d'ampleur à l'échelle internationale. Ce problème ainsi que d'autres menaces à la santé et à la sécurité publiques sont des phénomènes qui ne se manifestent pas au grand jour, mais qui sont présents partout dans le monde. Nous ne pourrons préserver l'intégrité de nos régimes d'immigration et de protection des réfugiés et conserver la confiance des Canadiens que si nous adoptons des instruments nous permettant d'appliquer efficacement la loi.
Vous avez entendu des représentants de la GRC et du SCRS vous dire que le projet de loi C-11 nous donnera des moyens accrus pour faire en sorte que les personnes qui constituent un danger pour la sécurité, les criminels de guerre et les personnes associées au crime organisé ne puissent entrer ou rester au Canada ou encore y transiter.
Le projet de loi introduit une nouvelle catégorie d'interdiction de territoire dans le cas des personnes qui font de fausses déclarations sur leur demande d'immigration. Le projet de loi simplifie le processus de détermination du statut de réfugié, et nous permet d'exclure de ce processus, en interrompant l'étude de leur demande, les grands criminels, les personnes qui constituent un danger pour la sécurité, celles qui ont porté atteinte aux droits de la personne et les membres du crime organisé.
J'aimerais aborder maintenant un point qui a été soulevé dans vos discussions sur l'accès. Certains ont dit que le projet de loi C-11 offre plus de dispositifs d'accès aux demandeurs d'asile qu'aux résidents permanents pour ce qui concerne les décisions et les décideurs. Laissez-moi corriger cette impression. En effet, l'accès au système n'a été diminué que pour les grands criminels et les personnes qui constituent une menace pour la sécurité, et effectivement, l'accès est réduit dans ces cas-là, même s'il s'agit de résidents permanents.
Le projet de loi C-11 préservera le pouvoir discrétionnaire des agents d'immigration de tenir compte des circonstances individuelles. Nous maintiendrons l'application régulière de la loi. Mais nous pourrons renvoyer plus rapidement les grands criminels qui ne sont pas citoyens canadiens, et c'est là une disposition très importante parce que je vous dirais très franchement qu'avec la loi actuelle, cela prend trop de temps.
Le projet de loi contient aussi de nouvelles infractions, par exemple aider à obtenir le statut d'immigrant par fraude ou par fausse déclaration et introduire des clandestins ou faire le trafic de migrants. Les personnes reconnues coupables de cette dernière infraction pourraient être condamnées à la prison à perpétuité, à une amende d'un million de dollars ou aux deux. Les peines pour le trafic d'êtres humains sont ainsi harmonisées à celles pour le trafic de stupéfiants et, comme des témoins l'ont déjà fait remarquer, cela nous autorise à envoyer un message non équivoque aux tribunaux.
Le projet de loi C-11 renforce et éclaircit les dispositions sur la détention. Il comporte un nouveau pouvoir de détenir des demandeurs d'asile quand nous avons de grands doutes au sujet de leur identité et qu'ils sont peu enclins à coopérer. Le Règlement d'application du projet de loi C-11 comprendra aussi d'importants facteurs à considérer dans les décisions sur la mise en liberté, ce qui aboutira à un processus plus transparent.
Je sais que les membres du comité ont entendu des réserves au sujet de l'exigence de transmettre les demandes d'asile à la CISR dans un délai de 70 heures. Laissez-moi expliquer cette disposition.
Quand quelqu'un arrive au Canada et qu'il revendique le statut de réfugié, l'agent d'immigration décide en premier lieu si sa demande est recevable. À l'heure actuelle, cette décision peut prendre jusqu'à six mois. Le projet de loi C-11 exige qu'elle soit prise en trois jours ouvrables. Je comprends qu'on vous a dit qu'il est impossible de procéder à un examen de sécurité complet en 72 heures. C'est bien vrai et, de fait, rien dans le projet de loi C-11 n'exige d'agir ainsi, puisque des dispositions prévoient l'interruption du processus dès que des risques pour la sécurité sont apparents.
Il est de notre intérêt que le contrôle sécuritaire et la détermination du statut de réfugié débutent sans tarder. Ceux qui constituent une menace pour la sécurité seront rejetés à la présélection, détenus ou renvoyés. Tous les autres, c'est-à-dire la majorité des demandeurs d'asile, ne seront pas assujettis à de longs retards dès le début du processus.
Monsieur le président, cette mesure du projet de loi C-11 ainsi que d'autres favoriseront des procédures équitables, efficaces et efficientes destinées à préserver l'intégrité du processus canadien de détermination du statut de réfugié.
Avant de répondre à vos questions, permettez-moi d'aborder les dispositions du projet de loi C-11 qui portent sur un autre genre de sécurité. Je veux parler bien sûr de nos perspectives de croissance économique et de prospérité.
Notre pays a été bâti par des immigrants et des réfugiés. Des gens de partout dans le monde sont venus au Canada à la recherche de vieux rêves et de nouvelles possibilités, fuyant souvent de terribles persécutions. Ce sont nos ancêtres, ce sont vous et moi. Ils ont construit nos collectivités et ont tissé une riche mosaïque sociale, culturelle et économique, l'une des grandes sources de notre force dans le monde.
Mais nous vieillissons et nous avons moins d'enfants. À l'heure actuelle, plus des trois quarts de la croissance de la main-d'oeuvre du Canada est attribuable à l'immigration. Dans une dizaine d'années tout au plus, l'immigration sera responsable de la croissance entière de la main-d'oeuvre. Et dans une vingtaine d'années, la croissance de la population canadienne dans son ensemble dépendra de l'immigration.
Le Canada n'est pas le seul pays aux prises avec ce problème démographique. La concurrence s'intensifie aux quatre coins du monde pour attirer les meilleurs candidats à l'immigration et les plus prometteurs.
Le projet de loi C-11 et son Règlement d'application nous permettront de conserver notre avantage concurrentiel. Il introduira une nouvelle grille de points pour sélectionner les candidats et, au lieu de donner un avantage particulier aux travailleurs qualifiés, possédant de l'expérience dans une profession particulière, on accordera plus de poids aux compétences polyvalentes et transférables. Le Règlement prévoira aussi des mesures afin d'attirer des travailleurs qualifiés.
En réponse à une question soulevée par le sénateur Poulin, de nouvelles dispositions réglementaires viendront renforcer notre Programme concernant les aides familiaux résidants, et l'on fera en sorte qu'ils soient pleinement informés de leurs droits et responsabilités avant d'arriver au Canada. En outre, en exigeant la signature d'un contrat entre les aides familiaux et leurs employeurs, nous nous assurons de disposer des moyens clairs de réagir en cas de problèmes.
Enfin, le projet de loi C-11 réaffirme l'importance d'un autre genre de sécurité à laquelle les Canadiens accordent beaucoup de valeur, la réunification des familles.
Le Règlement comportera des mesures précises pour accélérer la réunification des familles, notamment la création d'une catégorie de demandeurs au Canada et il simplifiera le processus des demandes pour les époux, les conjoints de fait et les enfants qui se trouvent déjà légalement au Canada.
Je voudrais prendre un moment pour répondre à une préoccupation du sénateur Kirby en confirmant qu'effectivement, les grands-parents seront certainement inclus dans la catégorie de la famille comme membres importants. Cette définition de la catégorie de la famille se trouvera dans le Règlement.
Je terminerai en abordant la question des dispositions de transition soulevée devant le comité plus tôt cette semaine. Plus précisément, j'aimerais vous assurer que les demandeurs qui ont eu une entrevue en vertu de la loi actuelle verront leur demande traitée selon les dispositions de la loi actuelle.
Je dois aussi signaler qu'avec le nouveau règlement proposé pour les travailleurs qualifiés et les membres de la famille, beaucoup de candidats qui n'auront pas passé d'entrevue à l'entrée en vigueur du projet de loi C-11 bénéficieront de règles plus ouvertes et plus généreuses. En outre, il importe de se rappeler que les agents des visas continueront d'avoir le pouvoir discrétionnaire d'approuver la demande des candidats qu'ils jugent aptes à s'établir avec succès au Canada en dépit d'une évaluation insatisfaisante selon le système des points. Les agents conserveront aussi leur pouvoir discrétionnaire d'approuver des cas pour des motifs humanitaires.
Je conclus, monsieur le président, en disant encore une fois que nous avons tous été profondément affectés par les attentats terroristes récents aux États-Unis. Il est clair que nous devons prendre des mesures pour protéger la sécurité publique. Mais il doit être tout aussi clair que nous ne transformerons pas le Canada en forteresse.
Le terrorisme est un problème international qui exige des solutions internationales. La stratégie la plus efficace, bien entendu, c'est d'utiliser le savoir et les renseignements de sécurité pour éviter que des menaces à la sécurité n'atteignent nos frontières. Si toutefois il en était ainsi, le projet de loi C-11 nous fournit des moyens efficaces de réagir rapidement et fermement.
Le projet de loi C-11 n'a pas été élaboré en vase clos, pas plus qu'il ne sera appliqué en vase clos. Il renforce les lois contre le crime organisé et le terrorisme. Il appuie les mécanismes existants de collecte de renseignements de sécurité et autres, notamment la capacité de protéger les renseignements délicats qui pourraient nuire aux enquêtes. Il appuie nos nombreuses initiatives et ententes de coopération sur l'échange d'information et la sécurité commune avec nos voisins et amis, les États-Unis. À l'évidence, le projet de loi sera un ajout essentiel et positif à nos efforts communs pour renforcer la sécurité publique.
Je serai heureuse de répondre à vos questions.
Le sénateur LeBreton: Aucun d'entre nous ne saurait contester l'horreur des événements qui sont survenus aux États-Unis à Washington, New York et en Pennsylvanie le 11 septembre, et nous savons tous que le terrorisme ne connaît pas de frontière. Nous ne pouvons certainement pas nous retrancher au Canada derrière une sorte de mur de neige invisible et penser que nous sommes à l'abri de ce genre d'attaque.
Le comité a siégé cette semaine pendant plus de 20 heures. Nous avons entendu un grand nombre de témoins très crédibles. Il n'y a pas eu un seul d'entre eux qui n'ait pas préconisé que l'on apporte de profondes modifications au projet de loi, et certains ont même suggéré que, puisqu'il s'agissait de la première refonte de la législation sur l'immigration depuis plus de 30 ans, nous devrions prendre notre temps, l'étudier attentivement et nous assurer que lorsque le projet de loi sera adopté, ce sera la meilleure loi possible pour répondre à toutes les préoccupations, anciennes, actuelles et à venir.
Au sujet du nouvel angle sous lequel on envisage le projet de loi, à savoir que d'une façon ou d'une autre, ce sera l'instrument qui tiendra les terroristes et ceux qui planifient des activités criminelles en dehors de nos frontières, j'aimerais citer Ben Trister de l'Association du Barreau canadien. En parlant des graves événements qui se sont produits le 11 septembre, il a déclaré qu'aucune lacune ne serait comblée par le projet de loi C-11 dans le domaine de la détention préventive ou anticipée de personnes qui menacent la sécurité. Il nous a fait remarquer qu'il existe déjà des dispositions dans la loi actuelle, et s'il a dit cela, c'est uniquement pour souligner qu'en tant que sénateurs et membres du Parlement, nous devrions examiner ce texte législatif et tenter de l'améliorer. Après tout, c'est notre travail au Sénat.
J'ai demandé à David Matas, un avocat réputé dans ce domaine, ce qu'il ferait s'il était à notre place au Sénat. Nous sommes pris dans un dilemme. D'un côté, la ministre et le gouvernement nous disent que nous devons adopter le projet de loi immédiatement pour répondre à cette nouvelle menace. De l'autre, selon David Matas, nous devrions procéder lentement et prendre le temps d'examiner attentivement le projet de loi. Il a ajouté que le texte est complexe, détaillé, présente de multiples facettes, pêche par un manque d'équité à certains égards, va à l'encontre des normes internationales sous certains aspects et fait traîner les procédures inutilement.
Compte tenu des témoignages que nous avons entendus pendant 20 heures, comment pouvez-vous, dans votre déclaration, mettre en avant les événements qui se sont déroulés le 11 septembre pour réussir à faire adopter ce projet de loi par le Parlement?
Mme Caplan: J'ai dit que le projet de loi C-11 était un premier pas très important. C'est un texte qui est à l'étude depuis quelque temps et qui offre à mon ministère d'importants nouveaux outils, aussi bien en rationalisant les processus qu'en traitant de plusieurs choses qui prennent tout simplement trop de temps.
Citoyenneté et Immigration Canada agit en collaboration avec d'autres organismes, mais nous savons combien les Canadiens sont frustrés quand ils voient, en lisant les journaux, combien de temps il faut pour déporter des gens qui ont manifestement abusé de notre accueil ou qui ne devraient pas être autorisés à séjourner plus longtemps au Canada. Je sais que les avocats n'aiment pas ce projet de loi, car il rationalise ou supprime les droits d'appel qui font s'éterniser ces dossiers au-delà de la période que nous nous sommes fixée. Donc, pour faire en sorte que les Canadiens soient convaincus que nous procédons aussi rapidement que possible, le projet de loi doit être mis en oeuvre. J'ai dit également que nous ne vivons pas dans un monde parfait et qu'au fur et à mesure que la situation évoluera, si des gens ont des suggestions à faire, je serai tout à fait disposée à les examiner.
L'adoption du projet de loi ne devrait pas être retardée car il nous donne d'importants nouveaux outils. Brièvement, deux ou trois exemples: nous pourrons refuser plus rapidement l'accès au processus de reconnaissance du statut de réfugié, autrement dit empêcher une personne dont la demande n'est pas recevable de bénéficier d'une audience d'admissibilité et protéger ainsi des renseignements de nature délicate. Il s'agit d'un important nouvel instrument.
La rationalisation du processus utilisé pour déterminer la recevabilité des demandes d'asile est un autre aspect très important du projet de loi, car on sait que faire attendre les gens six mois avant qu'ils puissent avoir accès à la CISR est tout simplement trop long. Il est important que le contrôle sécuritaire soit effectué parallèlement à l'évaluation de la demande par la CISR. Plus longtemps les gens restent ici avant que l'on s'en occupe, moins nous pouvons être convaincus que nous faisons les choses efficacement.
Un dernier exemple: le projet de loi nous donne le pouvoir d'arrêter et de détenir les criminels et ceux qui posent des risques de sécurité. On trouve déjà ce pouvoir dans la législation actuelle. Mais il est précisé dans le projet de loi que quiconque se présente sans papiers et se montre récalcitrant peut être détenu. Toutefois, nous détenons déjà les gens quand nous possédons des preuves.
On trouve plusieurs autres dispositions dans le projet de loi qui, pensons-nous, amélioreront notre capacité d'action et nous fourniront des outils qui ne se trouvent pas dans la législation actuelle, nous permettront de rationaliser les choses et de procéder d'une manière qui rassure les Canadiens.
Le sénateur LeBreton: Vous reconnaissez que la loi actuelle vous autorise déjà à faire cela. Les témoins que nous avons entendus ne l'ont pas contesté. Ils ont souligné que tout cela peut déjà être fait à l'heure actuelle, mais que le problème vient d'un manque de ressources en première ligne.
Mme Caplan: Permettez-moi de vous interrompre un instant car cela crée un malentendu. La loi en vigueur est très complexe, par exemple, pour ce qui est de notre capacité à émettre un avis de danger, et le projet de loi introduit d'autres étapes dans la procédure qui s'applique à l'émission d'un avis de danger.
Permettez-moi de demander à la sous-ministre adjointe d'expliquer comment cela fonctionne et en quoi cela sera différent dans la nouvelle loi. À l'heure actuelle, il nous est difficile de refuser à quiconque l'accès au processus de reconnaissance du statut de réfugié. La barre, en ce qui concerne les preuves qui permettraient de les déporter ou de leur refuser cet accès, est placée très haut. Ce projet de loi rationalise la procédure.
Mme Joan Atkinson, sous-ministre adjointe, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration: En ce qui a trait à la détermination de la recevabilité d'une demande, au départ, le projet de loi établit des critères pour déterminer si le transfert d'une demande devant la Commission se justifie. En vertu de la loi actuelle, la procédure est d'obtenir un avis de danger du ministre, ou de son délégué, et de soumettre cet avis à un arbitre avant de pouvoir déclarer une demande irrecevable.
En vertu du projet de loi C-11, il existe des critères. Si quelqu'un tombe dans une catégorie de personnes non admissibles pour cause de criminalité grave ou de menace à la sécurité ou parce qu'il s'agit de criminels de guerre ou d'individus ayant commis des crimes contre l'humanité, nous transférons le dossier à un arbitre qui décide de l'irrecevabilité du cas et exclut la personne du processus de reconnaissance du statut de réfugié.
Comme y a fait allusion la ministre, nous pouvons également suspendre une demande en cours lorsque nous avons établi qu'une personne présente une menace pour la sécurité, est un criminel de guerre, et cetera, et que la chose a été confirmée par un arbitre. En vertu de la loi actuelle, nous ne pouvons suspendre les procédures que lorsque nous avons affaire à de grands criminels. Il s'agit de nouveaux et importants instruments qui nous permettent de rationaliser le processus et de refuser une demande lorsque nous avons affaire à quelqu'un que nous considérons comme un risque.
Le sénateur LeBreton: Il faut donc, je le répète, disposer des ressources voulues en première ligne, toute la question est là, n'est-ce pas?
Mme Caplan: Quand le projet de loi a été adopté par le Cabinet, le ministère a obtenu des ressources substantielles pour sa mise en oeuvre.
Le sénateur LeBreton: S'agit-il de ressources technologiques et de ressources humaines?
Mme Caplan: Oui. Nous avons obtenu les ressources pour mettre en oeuvre le nouveau Système mondial de gestion des cas. Nous avons attendu que les craintes suscitées par le bogue de l'an 2000 soient derrière nous avant de procéder à la mise en place du nouveau système d'information. Nous l'avons baptisé «Système mondial de gestion des cas», car il reliera tous les postes du ministère à travers le monde afin de permettre le partage de l'information sur les dossiers, ce qui est une partie très importante du projet de loi qui est devant vous. Ce texte constitue une réforme très importante du processus de reconnaissance du statut de réfugié et du système d'immigration.
L'autre élément technologique important, actuellement en cours d'élaboration, est mentionné dans le projet de loi. Toutefois, nous n'avons pas besoin d'autorité législative pour aller de l'avant. Je parle de la nouvelle carte de résident permanent pour les nouveaux immigrants. Il s'agit d'un document de voyage pour tous les nouveaux résidents permanents et les nouveaux immigrants. Ce document d'information technologique occupe une place importante dans notre plan.
Le sénateur LeBreton: Lundi, le président de la CISR, M. Peter Showler, a déclaré en réponse à ma question concernant les arriérés qu'il n'aimait pas le mot «arriéré». Il a parlé je crois du «volume de demandes». Il nous a dit qu'il y avait en fait 34 000 demandes en attente, ce qui constitue en fait l'arriéré. Je lui ai demandé quel pourcentage des 34 000 revendications sont abandonnées, et il a répondu 15 p. 100.
Le projet de loi que nous étudions renferme-t-il des mesures spécifiques concernant l'attribution de ressources pour éliminer cet arriéré? Si l'on se fie aux médias, ces gens-là traînent à travers le pays et personne ne semble savoir où ils sont.
Mme Caplan: Il est important de comprendre comment fonctionne le processus. J'ai mentionné qu'il fallait parfois six mois pour transmettre un dossier à la CISR. La Commission a sa propre procédure pour fixer les dates des audiences. Souvent, les gens demandent la remise de l'audience à une date ultérieure pour avoir le temps de se préparer.
Dans le cadre de cette énorme réforme de nos procédures, dont l'objet est de consolider le processus de prise de décisions pour qu'il y en ait une seule, au niveau de la CISR, nous espérons trouver le moyen de passer du système actuel à un nouveau système qui supprimera les multiples paliers de décision.
Il est important que le comité le comprenne aujourd'hui. Premièrement, il y a la décision de la CISR relative à la reconnaissance du statut de réfugié, qui est soumise à un contrôle judiciaire; deuxièmement, il y a l'évaluation du risque relatif aux revendications refusées, qui est soumise à un contrôle judiciaire; troisièmement, il y a la possibilité de faire appel pour des motifs d'ordre humanitaire fondés sur le risque, qui est soumise à un contrôle judiciaire; quatrièmement, il y a l'examen des risques avant renvoi, qui est soumise à un contrôle judiciaire.
Nous nous rendons compte que c'est une procédure lourde et qui prend trop de temps. Le projet de loi C-11 regroupe le tout en une seule décision de protection, rendue par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Il s'agit d'une réforme de fond. Nous allons ajouter une nouvelle section appelée Section d'appel des réfugiés. On aura donc une décision, un appel auprès de la Section d'appel des réfugiés, puis un contrôle judiciaire de cette décision-là. Cela devrait simplifier nos procédures. Il est évident que nous allons rencontrer des problèmes lors de la transition, mais nous pensons que globalement, le résultat sera que nous pourrons traiter les demandes plus rapidement parce que c'est aussi un tribunal d'un seul commissaire qui prendra la plupart des décisions.
Le sénateur LeBreton: Il a été dit que certains cas avaient été abandonnés après 30 jours, et je ne sais donc pas si le projet de loi permettrait effectivement de retrouver tous ces gens qui ne se sont pas représentés.
On peut facilement comprendre pourquoi les avocats n'aiment pas ce projet de loi. Toutefois, je vous assure qu'au cours des 20 heures pendant lesquelles nous avons siégé, tous les intervenants n'étaient pas des avocats. Nous avons entendu d'anciens diplomates, d'anciens sous-ministres et hauts fonctionnaires, qui avaient tous des réserves à propos du texte proposé.
Le sénateur Beaudoin: Mon commentaire concerne la disposition dérogative, qu'on ne trouve pas dans le projet de loi. Un témoin a suggéré que le recours à cette clause était inutile, et tous les autres, autant que je puisse me souvenir, étaient contre. À mon avis, nous n'en avons pas besoin. Je crois comprendre que c'est également votre opinion et je vous en félicite.
Ma question porte sur les articles 5 et 53. Depuis quelques années, la tendance a été aux lois cadres. Cela n'est pas spécifique à ce projet de loi, mais cette méthode a été utilisée pour de nombreux projets de loi difficiles. C'est une forme de législation par règlement. C'est toujours difficile. L'article 53 est plutôt vague. En vertu de l'article 5, le gouverneur en conseil peut faire beaucoup de choses par voie de règlements.
Le paragraphe 5(2) stipule:
(2) Le ministre fait déposer tout projet de règlement pris en vertu des articles 17, 32, 53, 61, 102, 116 et 150 devant chaque Chambre du Parlement et la Chambre renvoie ce projet de règlement à son comité compétent.
Je suis à 100 p. 100 d'accord avec cela. Toutefois, le paragraphe suivant me soucie quelque peu:
(3) Il n'est pas nécessaire de déposer de nouveau le projet de règlement devant le Parlement même s'il a subi des modifications.
S'il a subi des modifications, il devrait être déposé. Je ne peux pas comprendre cela. Si vous modifiez un règlement et que vous avez le droit de le faire - le Gouverneur en conseil a le droit de le faire, à condition que ce soit dans le cadre du mandat conféré par l'article 43 - et s'il n'y a rien d'abusif, c'est parfaitement légal. Pourquoi ce paragraphe est-il inclus dans ce projet de loi?
Si un règlement n'est pas modifié, il n'y a pas de raison de le déposer à nouveau, mais si un règlement est modifié, cela signifie que la loi a été changée. Nous devons savoir quelle est la loi car, après tout, nous sommes une assemblée législative.
Auriez-vous l'obligeance de m'expliquer pourquoi ce paragraphe est là?
Mme Caplan: Avec plaisir, sénateur. Premièrement, j'aimerais préciser que la loi actuelle sur l'immigration est une loi cadre, accompagnée de nombreux pouvoirs de réglementation, et le présent projet de loi n'est pas différent. Le projet de loi C-11 traduit l'engagement que nous avons pris, et nous pensons que tous les droits et toutes les politiques devraient être inclus dans la législation. Ce sont les règlements qui, si vous voulez, donnent du corps à la législation. Votre première question concernait la loi cadre. C'est ce qui existe aujourd'hui, pas seulement en ce qui concerne le texte qui nous intéresse, mais aussi en ce qui concerne la loi actuelle.
La deuxième partie de votre question portait sur la façon dont nous gérons la procédure réglementaire. Je sais que des craintes ont été exprimées devant ce comité au sujet de temps qu'il nous faudra pour compléter le Règlement. La procédure d'établissement du Règlement est ainsi faite que nous ne pouvons rien entreprendre avant d'obtenir la sanction royale. Une fois obtenue cette sanction royale, nous pré-publierons et enverrons officiellement une ébauche du Règlement aux comités du Sénat et de la Chambre des communes. Nous vous l'avons déjà transmise officieusement et nous vous avons informés de la perspective dans laquelle s'inscrit pour nous ce document. Nous sollicitons votre avis. Nous publierons ensuite le Règlement dans la gazette. Il y a ensuite une période additionnelle allant jusqu'à 90 jours, si je ne me trompe, pour permettre les commentaires avant la promulgation.
Ainsi, il y a de nombreuses possibilités de vérifier si nous avons écouté et si nous avons pris en compte ce qui est venu des comités. Toutefois, si cet article n'était pas inclus, il faudrait que nous revenions sans arrêt, même si un seul mot était changé. Nous ne pourrions jamais avancer, vu le volume des demandes à traiter, et il nous serait impossible de faire quoi que ce soit d'autre que de nous plier aux exigences réglementaires.
Nous nous proposons, selon une méthode qui s'est avérée satisfaisante par le passé, de commencer par une pré-publication. Ensuite, vous pourriez nous communiquer votre avis, nous procéderions à la publication dans la gazette, vous pourriez nous donner à nouveau votre avis, puis nous passerions à la mise en oeuvre du projet de loi et du Règlement, en même temps.
Le sénateur Beaudoin: C'est la loi qui est importante. La législation subordonnée est soumise à la loi et par la loi, c'est le Parlement qui s'exprime. Tel est mon raisonnement. Je reconnais que nous avons besoin de l'article 43 et je suis d'accord, nous devons énoncer des règlements, et bien sûr, cela devrait se faire dans le cadre de l'article 53. En présumant que c'est toujours le cas, tout est pour le mieux, mais le paragraphe 5(3) me préoccupe.
Copie de chaque règlement envisagé devrait être soumise à chaque Chambre. Je reconnais que vous pouvez changer d'avis, c'est humain. Des changements peuvent s'avérer nécessaires au vu des circonstances. Mais pourquoi cette disposition? Vous pouvez modifier le règlement proposé et ne pas déposer les changements devant les deux Chambres du Parlement. Pour moi, c'est tout à fait incompréhensible.
Mme Caplan: Sénateur Beaudoin, le paragraphe 5(3) ne concerne que le Règlement. Toute modification de la loi doit être renvoyée devant la Chambre des communes et bien sûr, être présentée à nouveau au Sénat. Il s'agit du cadre réglementaire, d'une procédure qui existe depuis longtemps. Ce paragraphe ne fait que confirmer cette procédure, qui est en place depuis longtemps au Canada et qui fonctionne bien.
Le sénateur Beaudoin: Effectivement, mais ce n'est pas parce qu'elle a bien fonctionné pendant de nombreuses années qu'elle doit rester dans la loi. À mon avis, le moment est venu de supprimer ces alinéas, si cela fait tant d'années qu'ils existent.
Mme Caplan: Tout ce que je peux vous dire, c'est que, selon nos avocats, tout ce que contient ce projet de loi est légal et s'avérera conforme à nos lois et à la Charte du Canada.
Le président: Bref, la question n'est pas de savoir si c'est légal. Ce qui est en question, c'est le problème que soulève un processus qui prévoit que le gouvernement dépose devant les deux Chambres du Parlement les règlements qu'il propose et que, s'il décide de les changer, il n'a pas besoin de soumettre les nouveaux. C'est ce que stipule le paragraphe 5(3). C'est ce qui est déconcertant, vu que le gouvernement pourrait énoncer une série de règlements un jour, les soumettre, les reprendre le jour suivant et les changer de fond en comble, et nous ne les verrions jamais.
Le sénateur Grafstein: Ce n'est pas exact. Il y a une loi, la Loi sur les textes réglementaires, qui traite de la question. Le sénateur Beaudoin le sait. Je ne suis pas ici pour défendre la ministre, car le projet de loi me pose d'autres problèmes, mais nous disposons d'un processus qui s'applique précisément à cette question. Autrement, la ministre se retrouverait confrontée à des questions de réglementation à n'en plus finir.
Le sénateur Fairbairn: Comme d'autres l'ont déjà fait remarquer, nous avons entendu de nombreuses opinions cette semaine ainsi que beaucoup de réserves.
J'aimerais revenir sur un point important que vous avez soulevé dans vos remarques liminaires et qui a également été abordé par le sénateur Beaudoin. J'ai trouvé étonnant d'entendre un groupe d'anciens hauts fonctionnaires évoquer la possibilité d'invoquer la disposition dérogative, comme certains l'ont recommandé. Je pose la question, car il a de plus été suggéré que, si l'on n'en avait pas l'intention, le gouvernement devrait aller jusqu'à envisager une modification de la constitution, afin de faire un sort à la notion des droits humains fondamentaux des réfugiés qui viennent dans notre pays.
J'aimerais que vous développiez un peu plus la question, car il s'agit sans doute de l'une des choses les plus fondamentales que nous ayons entendues. Je serais heureuse d'entendre votre point de vue.
Mme Caplan: Sénateur, je pense que les terroristes gagnent s'ils parviennent à nous forcer à renoncer aux valeurs que nous chérissons; la primauté du droit et la notion d'application régulière de la loi. Je ne pense pas que nous devrions les laisser gagner. Plus encore, je ne crois pas que les Canadiens souhaitent que nous réagissions de façon telle qu'on pourrait en déduire que nous ne pensons pas pouvoir préserver l'équilibre dont le Canada se montre si fier et qui repose bien entendu sur la sûreté, la protection, la santé et la sécurité. Ce sont des priorités absolues. En même temps, en tant que fiers signataires de la Convention de Genève, nous accueillons les gens qui fuient les persécutions et nous voulons leur donner la possibilité de nous décrire leur situation dans les meilleures conditions. À ceux qui ne sont pas d'accord avec moi, je réponds simplement qu'il faudra que nous acceptions de ne pas être d'accord. Je crois que les Canadiens s'attendent à ce que nous défendions ces valeurs, qui nous sont les plus chères, et que nous parvenions à maintenir cet équilibre.
Nous pouvons le faire, pas uniquement grâce à ce projet de loi, mais à travers l'approche que le gouvernement a choisi d'adopter. Nous allons collaborer à l'échelle internationale avec nos partenaires, partager les renseignements et faire ce qui est possible pour prévenir ce genre d'attaque terroriste et empêcher que les choses épouvantables dont nous avons été témoins se reproduisent.
Le sénateur Fairbairn: Il y a un autre point qui a fait l'objet de remarques répétées par un grand nombre d'intervenants: ces 27 000 personnes qui sont censées être là, dans l'ombre; ces gens qui ne satisfont pas aux critères et qui devraient être renvoyés du Canada. On ne sait pas qui ils sont vraiment ni où ils se trouvent. Une des difficultés auxquelles nous confronte l'examen du projet de loi, c'est le contexte dans lequel il s'inscrit et qu'il n'était pas prévu à l'origine de prendre spécifiquement en compte dans ce texte. Cela fait que certaines de ces questions en sont arrivées à prendre une importance qu'elles n'auraient pas eue autrement.
La population canadienne a l'impression qu'il y a des milliers de gens, ici et là au Canada, qui devraient être identifiés et renvoyés, mais que l'on ne peut pas trouver ni reconnaître. Cette impression demeure. Pouvez-vous faire face à cette situation sans trop d'inquiétude, particulièrement compte tenu du contexte actuel?
Mme Caplan: Je suis heureuse d'avoir l'occasion de clarifier les choses. Je voudrais répéter à nouveau que lorsque nous avons des preuves qu'un individu représente une menace, un risque pour le Canada, nous prenons des mesures pour le faire arrêter. Nous transmettons l'information à la GRC ou aux autorités policières. Nous collaborons étroitement avec eux pour arrêter ceux qui posent un risque ou représentent un danger quand nous avons des indices.
Nous avons un centre d'appel «24-7». Il fonctionne sept jours par semaine, 24 heures par jour. Toutes les forces policières appellent si elles détiennent quelqu'un qui pourrait faire l'objet d'un mandat non exécuté. Nous collaborons étroitement pour retrouver ces gens-là, qui sont ensuite détenus jusqu'à leur renvoi si nous les avons identifiés. Chaque fois qu'il y a un risque, la détention est la solution.
Qui sont certains de ces gens-là? Nous savons que dans d'autres pays le nombre des gens qui y vivent clandestinement est très élevé. On a estimé qu'ils se comptaient par millions, aussi bien en Europe qu'aux États-Unis.
Vous avez parlé de 27 000 personnes. Nous pensons que plusieurs de ces gens-là sont partis. Nous n'empêchons personne de partir du Canada. Ceux qui ne sont pas bienvenus et qui sont sous le coup d'un mandat d'arrestation suite à une mesure d'expulsion partent, je crois. Ils partent parce qu'ils ont des papiers pour entrer dans un autre pays et qu'ils ne veulent pas faire l'objet d'une expulsion formelle. Nous savons également que certains d'entre eux sont en prison. Des mandats sont émis lorsqu'ils sont en prison et dès qu'ils sont libérés, ils sont renvoyés.
Nous savons aussi que certains d'entre eux sont des titulaires de visas de touriste qui ont indûment prolongé leur séjour. Il y a des gens qui arrivent avec un visa de visiteur valide six mois et qui décident de prolonger indûment leur séjour. Un mandat est émis si quelqu'un prolonge sans autorisation le séjour accordé par son visa de visiteur ou d'étudiant.
Malheureusement, on a prétendu que parmi ces gens-là, il y avait beaucoup de demandeurs du statut de réfugié qui avaient été déboutés. Il est important que les Canadiens sachent que lorsque quelqu'un revendique le statut de réfugié au Canada, on lui prend ses empreintes digitales, on le photographie et on procède à un contrôle sécuritaire préliminaire à travers toutes les bases de données afin de tenter d'identifier ceux qui représentent un risque. S'ils représentent un risque, ils sont arrêtés, si ce n'est pas le cas, ils sont dirigés sur la CIRS.
En ce qui concerne la question des revendications abandonnées, des gens qui ne se présentent pas, quand nous pressentons qu'ils ne se présenteront pas à une audience, c'est un motif qui autorise leur détention. Toutefois, nous devons posséder des preuves montrant pourquoi nous pensons qu'ils ne vont pas comparaître.
D'autres utilisent parfois des revendications abandonnées pour retarder le processus. Certains retirent et abandonnent leur revendication, puis reviennent et soumettent une autre demande. Le projet de loi C-11 mettra fin à ce stratagème. Nous considérons qu'il s'agit d'un recours abusif.
Si vous avez retiré ou abandonné votre revendication, on ne vous donnera pas accès une deuxième fois à la CISR. Au lieu de cela, vous ferez l'objet d'un examen des risques avant renvoi. Si les circonstances montrent que vous avez besoin de protection, on vous accordera cette protection. Dans le cas contraire, vous serez renvoyé.
Il y a un arrangement semblable pour les revendications qui se répètent constamment. Le projet C-11 ne permet pas les revendications répétées. Nous savons que c'est un autre domaine porteur de frustration. Vous aurez une chance de vous adresser à la CISR. Si vous revenez en disant que les circonstances ont changé et que vous souhaitez expliquer en quoi, cela se fera dans le cadre de l'examen des risques avant renvoi, qui fait partie de notre obligation internationale, mais pas du processus global de reconnaissance du statut de réfugié. Voilà une autre façon dont nous rationalisons les choses.
Tout cela devrait nous permettre d'améliorer le processus de renvoi, qui fait problème dans tous les pays. Au cours des cinq dernières années, le Canada a renvoyé 45 000 personnes. Rien que l'année dernière, nous en avons renvoyé plus de 8 600, dont 5 700 demandeurs déboutés et 1 700 interdits de territoire canadien pour cause de criminalité.
Nous pensons aussi que la prévention est une solution. Depuis 12 ans, nous disposons d'un réseau international d'agents de contrôle de l'immigration qui collaborent avec des pays du monde entier. Les documents sont contrôlés avant que les gens montent dans des trains ou des avions à destination du Canada ou de l'Amérique du Nord. Plusieurs pays s'inspirent de notre système et mettent en place des réseaux qui collaboreront pour qu'il ne soit pas nécessaire d'avoir cinq personnes dans cinq pays différents qui font la même chose. Nous coopérons et partageons les renseignements avec d'autres pays. Rien que l'an dernier, nous avons intercepté 6 000 personnes qui arrivaient d'outre-mer. À la frontière canado-américaine, nous avons intercepté 21 000 voyageurs considérés comme interdits de territoire canadien.
Je pourrais vous donner beaucoup d'autres statistiques. Nous cherchons toujours à voir comment nous pourrions améliorer tout ce que nous faisons. Prétendre que parce qu'il y a 27 000 personnes qui font l'objet de mesures d'expulsion, c'est un problème qui est plus grave que celui auquel font face d'autres pays n'est tout simplement pas exact.
Le sénateur Di Nino: Madame la ministre, j'applaudis vos efforts pour améliorer la législation d'une manière qui, j'espère, indiquera à beaucoup de gens à travers le monde que le Canada se montre ouvert et accueille volontiers de nouveaux citoyens.
Vous et moi venons d'une région du pays qui a sans doute bénéficié plus que d'autres de l'immigration. Je ne suis pas sûr qu'on pourrait l'évaluer quantitativement. Je peux vous assurer qu'en cours de route, vous me trouverez à vos côtés et devant vous, si nécessaire, pour vous aider à faire en sorte que nous continuons d'avoir une politique d'accueil à bras ouverts pour attirer les meilleurs candidats.
Je dois admettre que je suis très troublé par ce qui est en train de se passer, comme je l'ai dit au Sénat, et je suis sûr que vos fonctionnaires vous ont fait part de l'essentiel de mon discours. Je ne vais pas me mettre à citer tous les commentaires que vous avez faits aux médias au cours des dernières semaines mais, en fait, vous avez dit: «Il s'agit d'un bon projet de loi, adoptez-le, j'en ai besoin rapidement».
Nous avons entendu de la bouche de pratiquement tous les témoins qui sont venus ici que la loi actuelle offre suffisamment de pouvoirs et d'autorité. Je sais que vous en avez déjà parlé. Toutefois, les témoins, les uns après les autres, ont déclaré que la seule chose qui manque au ministère, ce sont les crédits qui ont été supprimés - ce qui a supprimé la possibilité de faire le travail nécessaire.
Vous êtes venue nous dire que vous aviez besoin de ce projet de loi immédiatement. On nous dit, notamment vos propres fonctionnaires, qu'il est impossible que ce projet de loi soit adopté avant, peut-être, le printemps. J'aimerais citer un échange qui a eu lieu avec un témoin concernant le moment choisi pour la mise en oeuvre du projet de loi.
Madame Atkinson: On parle de 2002. Au plus tôt, au printemps.
Le président: Le 1er mars serait optimiste.
Mme Atkinson: Ce sera tout un défi.
Le président: À Ottawa, ce n'est pas le printemps au mois de mars.
Nous avons perçu au Sénat un certain manque de respect à l'égard de l'institution. Nous avons entendu de nombreux témoins faire des commentaires du genre «écran de fumée» et «façade». Ils soutiennent que le ministère cherche à donner aux Canadiens une fausse impression de sécurité. L'un d'entre eux a déclaré que, selon lui, le but de la manoeuvre est de donner aux Canadiens le sentiment que l'on fait quelque chose.
Madame la ministre, vous avez déclaré il y a quelques instants, en réponse à ma critique, que la mise en oeuvre du projet de loi et du Règlement se fera très bientôt. Qu'entendez-vous par très bientôt?
Mme Caplan: C'est une très bonne question sur un point que je souhaite clarifier, et Mme Atkinson est ici. J'ai entendu ce qu'elle a dit, et ses propos ont été quelque peu mal interprétés.
Laisser entendre que le Règlement ne sera pas terminé avant le printemps est erroné. On a commencé à l'élaborer quand le projet de loi était examiné par le comité permanent. Nous avons déposé le premier document de travail. Le comité permanent vous a transmis une version actualisée. Prétendre que les rédacteurs du ministère de la Justice diffèrent d'une manière quelconque la rédaction du Règlement est tout simplement faux.
Vous êtes des sénateurs expérimentés et vous savez que légiférer et mettre en oeuvre une importante réforme se fait par étapes. En droit, nous ne faisons preuve d'aucun manque de respect, sénateurs, au contraire, nous respectons totalement la primauté du droit et le processus parlementaire.
En premier lieu, nous devons avoir un projet de loi. Celui-ci reçoit ensuite la sanction royale. Nous procédons alors à la pré-publication du Règlement lequel, comme je vous l'ai dit, est presque terminé. Par respect du processus, on n'y mettra pas la dernière main avant l'approbation du projet de loi.
Ensuite, ce Règlement est publié dans la gazette une fois que les comités de la Chambre ont eu la possibilité de nous faire part de leur avis. Là encore, nous respectons la procédure. Nous souhaitons avoir votre avis. Dès que nous aurons ce Règlement, le ministère pourra dire: «Voici les nouvelles règles». Il faudra former le personnel et commencer à les appliquer aussi rapidement que possible.
En nous fondant sur les avis que nous avons reçus - les débats à la Chambre, les discussions ici même, au comité - nous prévoyons que nous serons en mesure de procéder plus rapidement en ce qui concerne certaines dispositions, et nous avons déjà, en vertu de la loi actuelle, pris des mesures pour intensifier la sécurité. La formation est déjà en route. Après la publication du Règlement dans la gazette, nous pourrons accélérer cette formation car nous espérons qu'à ce moment-là, il y aura consensus sur la teneur des règlements.
Le projet de loi et le Règlement forment un tout, et il s'agit d'une réforme majeure. J'ai, à de nombreuses occasions, discuté avec le sous-ministre du fait que chaque décision qui est prise par notre ministère est soumise à un contrôle judiciaire. C'est quelque chose dont nous sommes fiers au Canada. Les tribunaux examinent ce que nous faisons. Cela signifie que nous devons agir dans les règles.
Ce que je vous dis, c'est que nous avons besoin du projet de loi pour finaliser le Règlement et mettre en oeuvre la législation. Nous souhaitons que cela se fasse aussi vite que possible, car ce projet de loi nous donne d'importants nouveaux instruments. Je vous demande votre aide.
Le sénateur Di Nino: Puis-je me permettre de vous demander de nous donner une idée de la date à laquelle vous pensez que ce projet de loi pourra être mis en oeuvre, en présumant que le processus que vous avez suggéré soit suivi?
Mme Caplan: Nous espérons que le Règlement sera adopté pendant l'hiver et que le projet de loi, avec tous les points sur les i, sera mis en oeuvre au printemps.
Une fois que nous aurons l'autorité législative, nous appliquerons les mesures qui peuvent l'être par le biais de politiques, ce que nous avons déjà commencé à faire, comme je l'ai dit. Mais nous sommes en état d'alerte maximum aux frontières. Nous avons détaché des ressources additionnelles. Nous avons commencé à faire des contrôles sécuritaires approfondis mais, je vous le dis franchement, sénateurs, le projet de loi nous permet de refuser l'accès à la procédure de reconnaissance du statut de réfugié plus facilement qu'en vertu de la loi en vigueur. Si nous obtenons une information, à l'heure actuelle, nous sommes tenus de respecter la très lourde procédure prévue par la loi en vigueur. Avec le nouveau projet de loi, nous serons en mesure, dans les meilleurs délais, de passer à des procédures simplifiées qui seront dans l'intérêt de tous les Canadiens.
Le sénateur Di Nino: Tout cela ne commencera quand même qu'au printemps, au plus tôt.
Mme Caplan: En ce qui concerne la mise en oeuvre. Il est important de faire la différence. J'ai eu l'impression que le comité suggérait que nous n'allions pas avoir le Règlement avant le printemps. Ce n'est pas vrai.
Le sénateur Keon: Madame la ministre, ma question porte sur le projet de loi et sa relation avec le Règlement, et sur la relation entre le projet de loi et l'urgence de la situation.
Plusieurs témoins ont fortement suggéré que le projet de loi repose sur un cadre dysfonctionnel, dans une certaine mesure. Rien dans le projet de loi ne stipule la coopération interministérielle ou les liens entre les services de police, le SCRS, la GRC, et Douanes et Immigration qui donneraient le mordant nécessaire au système et vous permettraient de faire face aux problèmes urgents du moment.
Il est évident que si le projet de loi est adopté prochainement, cela devra être pris en compte dans le Règlement - ou plutôt, il semble évident que cela devra être pris en compte dans le Règlement - pour que tous ces gens-là collaborent mieux qu'ils ne l'ont fait dans le passé.
Est-ce pour le moment votre intention de traiter de cette question dans le Règlement?
Mme Caplan: En fait, sénateur, nous considérons qu'il s'agit de questions opérationnelles. À l'heure actuelle, les Douanes, le SCRS et la GRC sont d'importants partenaires de notre ministère et nous collaborons étroitement. Il est important que les changements introduits par le projet de loi soient compris en temps voulu, et une formation devra donc être donnée non seulement aux agents d'immigration, mais à d'autres personnels.
Vous avez tout à fait raison, l'Agence des douanes et du revenu du Canada, l'ADRC, est chargée du premier interrogatoire au point d'entrée. Les services d'immigration mènent le second. Nous collaborons étroitement avec les Douanes, car leurs agents doivent être informés des procédures introduites par la nouvelle loi pour savoir quoi rechercher, quelles questions poser au nom des services d'immigration et qui diriger vers un second interrogatoire.
Il y a, je crois, 2 400 agents de douane qui travaillent d'un bout à l'autre du pays. Et Citoyenneté et Immigration compte 5 000 employés dans le monde entier. La formation est donc un élément important.
Le SCRS assure tout le travail relatif à la sécurité pour notre ministère. Nous comptons sur la collaboration de la GRC pour procéder à l'arrestation de certains individus. Nous entretenons également des relations très étroites avec les autorités policières provinciales et régionales, et notre centre d'appel «24-7» apporte son concours à toutes les forces de police du pays.
Je ne veux pas minimiser le défi que cela pose, mais tous ces services collaborent très bien, et je suis très fière de la réaction des forces de l'ordre canadiennes au cours du mois qui vient de s'écouler, car elles ont non seulement collaboré pour aider le Canada, mais aussi pour apporter leur soutien à nos amis et voisins aux États-Unis.
Le sénateur Di Nino: Madame la ministre, la question des ressources est un problème qui a été continuellement soulevé. Pratiquement tous les intervenants ont fait des déclarations vigoureuses sur le risque de voir le système tout entier s'écrouler faute de ressources suffisantes.
Il y a deux mécanismes - et je pense que vous avez brièvement parlé de l'un d'entre eux - qui, selon moi, pourraient contribuer à atténuer les problèmes que pose le système. Le premier est le concept de tiers pays sûr, et l'autre, que vous avez mentionné il y a quelques instants, est la carte de résident permanent, qui est envisagée, si je comprends bien, pour 2003. Ces deux projets sont dans l'air depuis au moins une dizaine d'années, sinon plus. Votre gouvernement a eu huit ans pour les mener à bien, et on nous dit qu'on ne s'y est pas attaqué faute de ressources pour le faire. Il se peut fort bien que cela ait été à l'origine de bien des problèmes qui auraient pu être évités si ces deux questions avaient été traitées en temps voulu. Pourriez-vous nous en dire davantage à ce propos?
Mme Caplan: Permettez-moi d'aborder en premier lieu la question des ressources. Quand nous avons obtenu l'approbation par le Cabinet de la politique du projet de loi C-11, nous avons également reçu d'importantes nouvelles ressources afin de pouvoir procéder à la mise en oeuvre de la législation.
Avez-vous jamais vu un ministre se présenter devant vous et dire ne pas souhaiter disposer de plus de ressources? Je ne serais pas la première.
La disposition sur le tiers pays sûr est intéressante. La Convention de Genève permet aux pays de conclure des ententes bilatérales - de négocier des ententes - stipulant qu'un demandeur du statut de réfugié doit présenter sa revendication au premier pays sûr dans lequel il arrive après avoir fui la persécution dont il prétend être victime. Pour cela, les pays doivent s'entendre; cela ne peut pas être fait unilatéralement.
Il a fallu beaucoup de temps à l'Union européenne pour aboutir à l'Accord de Dublin et, franchement, si je me fie à mes discussions avec mes collègues en Europe, ils ne sont pas satisfaits de la façon dont cela fonctionne.
En Amérique du Nord, il y a eu des discussions par le passé entre les représentants du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration et leurs homologues américains. Nous aurions besoin de leur accord. Pour le Canada, il s'agit d'un problème important. Vous avez entendu le premier ministre affirmer que plus de 40 p. 100 des gens qui présentent une demande au Canada arrivent par les États-Unis.
Même si nous sommes toujours intéressés par de telles discussions pour des raisons évidentes, nous ne pensons pas que ce soit une question brûlante. Peut-être est-ce lié aux événements du mois passé et au fait qu'à l'heure actuelle, il y a d'autres priorités. En tout cas, des discussions se poursuivent sur la façon dont nous pourrions collaborer avec nos collègues américains pour assurer la sécurité des frontières et harmoniser nos procédures dans le but de faciliter le passage des camions et des voyageurs d'affaires légitimes dans les deux directions, d'un côté comme de l'autre de nos frontières. Nous avons actuellement à l'étude des projets pilotes sur la façon dont nous pouvons collaborer avec les Américains pour faire en sorte que les choses fonctionnent plus efficacement à la frontière.
Votre dernière remarque portait sur la carte de résident permanent. Quand j'en ai parlé, j'ai mentionné que nous avions attendu le passage à l'an 2000. Il y a de nombreuses innovations, comme vous le savez, dans le domaine de la haute technologie. Nous pouvons maintenant faire des choses avec les cartes que nous ne pouvions pas faire il n'y a pas plus qu'un an ou deux. Nous souhaitons que cette carte soit inviolable, à l'épreuve des fraudes, dernier cri, et disponible dès que possible. Le sous-ministre vous confirmera qu'on lui accorde priorité et qu'elle sera donc en circulation avant la date butoir que vous avez mentionnée. À dire vrai, nous faisons en ce moment l'impossible pour accélérer sa mise en oeuvre.
Je voudrais vous donner une brève description de cette carte. En ce moment, les nouveaux immigrants qui arrivent au Canada reçoivent un document appelé le IMM 1000, sur lequel figurent des renseignements tapés à la machine et aucune photographie. Certains sont préoccupés par le fait que ce document n'est pas inviolable ou à l'épreuve des fraudes. C'est ce que nous voulons changer. Le IMM 1000 est principalement utilisé par les gens qui veulent rentrer au Canada et qui doivent prouver qu'ils y sont en situation régulière. C'est un document qui indique le statut. Les citoyens canadiens ont des passeports. Les nouveaux immigrants auront la nouvelle carte de résident permanent, qui leur servira de titre de voyage pour rentrer au Canada.
Le sous-ministre a confirmé qu'elle fait l'objet d'une procédure accélérée et que nous faisons aussi vite que possible.
Le sénateur Di Nino: Pouvez-vous chiffrer les crédits que vous avez reçus dans le dernier budget? Quel pourcentage d'augmentation cela représente-t-il?
Mme Caplan: Nous avons reçu 139 millions de dollars de crédits additionnels. Je vais demander au sous-ministre de répondre en ce qui concerne notre budget global.
M. Michel Dorais, sous-ministre, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration: Cela représente environ un huitième du budget.
Le président: Un huitième, c'est-à-dire 12,5 p. 100.
Mme Caplan: C'est une augmentation de douze et demi pour cent.
Le sénateur Grafstein: Madame la ministre, je ne suis pas membre du comité, mais je m'intéresse depuis longtemps à ces questions, car je viens de Toronto.
Le Parlement - et vous-même - avez la tâche très ardue de préserver dans ce projet de loi un équilibre subtil entre la liberté et la sécurité. La question importante est de savoir où tracer la ligne et comment la tracer. Même si ce projet de loi m'inspire certaines craintes, j'espère que notre attention peut être centrée sur les problèmes, car je ne voudrais pas que la recherche d'une insaisissable perfection nous fasse perdre de vue ce qui est salutaire.
J'essaie d'analyser, de mon mieux, à partir de nombreux rapports et de l'information que l'on trouve sur l'Internet, la nature du danger qui menace actuellement le Canada, lequel provoque dans la population un sentiment élevé d'insécurité, tout comme c'est le cas aux États-Unis. Je ne suis pas sûr, madame la ministre, que le projet de loi parvienne à l'apaiser. Ce n'est pas une critique, madame la ministre, car le projet de loi a été adopté en juin, avant la menace actuelle. Nous devons analyser, d'une certaine façon, s'il y a focalisation sur les craintes précises et actuelles ressenties par les Canadiens.
Il s'agit d'une préoccupation précise, et les médias n'ont pas fait ce qu'il fallait pour que l'on puisse dissocier le vaste flux d'immigrants et de réfugiés, qui sont la force vitale et l'avenir de la croissance économique du pays, de cette menace.
Quand je pense au poseur de bombe du millénaire, le problème, vu sous un angle bien précis, c'est qu'il était porteur d'un passeport canadien. Cela n'avait rien à voir avec une carte intelligente pour les immigrants ou les réfugiés. Le problème, c'était un passeport falsifié. Cet individu est entré au Canada sous de faux prétextes et a obtenu, frauduleusement, un passeport canadien sous un faux nom. Par un heureux coup du sort, il a été attrapé à la frontière et les autorités américaines l'ont traduit en justice. Le compte rendu de l'affaire aux États-Unis a été très révélateur. Je le répète, ce n'est pas une critique. Mais c'est un fait.
Si c'est ce qui nous occupe prioritairement, ne devrait-on pas accorder la priorité des priorités à un passeport intelligent, plutôt que d'essayer de consacrer énormément de temps à créer une carte intelligente prouvant le statut d'immigrant?
Je sais que nous possédons les moyens technologiques de le faire. Quelle priorité le ministère accorde-t-il à la production, dans les meilleurs délais, d'un passeport intelligent et infalsifiable? Je ne suis pas certain que le projet de loi C-11 répond à cette préoccupation.
Mme Caplan: Non, effectivement. C'est parce que le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international délivre les passeports aux citoyens canadiens. Nous, nous délivrons des papiers aux résidents permanents - en ce moment la IMM 1000 et bientôt la nouvelle carte d'immigrant, qui est un document de voyage pour les résidents permanents qui ne sont pas encore citoyens canadiens. Une fois devenus citoyens canadiens, ils s'adressent au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Je sais - et M. Manley le confirmera - que ce ministère examine la question de la sécurité des passeports à la lumière des événements.
Vous avez raison de soulever la question, sénateur. J'aimerais faire quelques remarques. S'il y a une chose que nous avons apprise, c'est que les terroristes, ceux qui représentent une menace pour la sécurité, font l'impossible pour éviter d'être détectés. Ce sont des caméléons et leurs activités sont clandestines. C'est pourquoi la collecte de renseignements et de données est tellement importante, et c'est la raison pour laquelle les pays collaborent entre eux. Les pays doivent partager ces renseignements, collecter les données et faire tout ce qui est possible pour empêcher ceux qui échapperaient à la détection de parvenir à leurs fins. Il y a beaucoup de choses que nous faisons maintenant et que nous devrons faire encore mieux.
Je suis la première à le dire. Ce projet de loi nous donne de nouveaux instruments dont nous ne disposions pas auparavant, et c'est important.
Toutefois, les renseignements et l'information recueillis actuellement par notre réseau d'agents de contrôle de l'immigration sont extrêmement importants et ne doivent pas être sous-estimés. Les contrôles sécuritaires intensifiés qui sont effectués à nos frontières ne devraient pas être sous-estimés. Le fait que la SCRS et la GRC collaborent avec la CIA, Interpol, Europol et de nombreux organismes de collecte du renseignement qui sont en état d'alerte nationale ne devrait pas être sous-estimé.
Ce qu'il faut savoir à propos du projet de loi C-11, c'est qu'il nous permet de protéger une partie de ces renseignements sensibles. C'est là un des instruments importants que prévoit ce projet de loi et qui nous permet de procéder à des arrestations et des détentions sans avoir à identifier nos sources ni à divulguer des renseignements sensibles, qui empêcheraient ces organismes de collecte de renseignements de faire leur travail.
Tout cela s'inscrit dans le cadre de la campagne contre le terrorisme. Ce n'en est pas le seul élément, mais on trouve ici de nouveaux instruments qui faciliteront la tâche. La réforme de l'immigration fait l'objet de discussions depuis plusieurs années. Nous étions conscients des menaces grandissantes.
Au comité de la Chambre des communes, l'examen du projet de loi s'est focalisé sur la criminalité. Nous avons défendu notre volonté de ne pas introduire de nouvelles étapes ni quoi que ce soit qui irait à l'encontre d'une réorganisation aussi stricte que possible, car le projet de loi porte à la fois sur la criminalité et les menaces à la sécurité.
S'il s'avère à l'avenir nécessaire d'aller plus loin, nous devrons nous montrer ouverts à cette possibilité. Toutefois, vous l'avez très bien dit. J'ai employé le mot «équilibre». Vous avez parlé «d'équilibre subtil». Tel est certainement le but de ce projet de loi. Le but, pour le Canada, est de préserver cet équilibre de manière à ce que nous puissions à la fois nous protéger et maintenir une politique de libre admission.
Nous voulons fermer la porte dérobée qu'utilisent ceux qui menacent notre société, pour pouvoir garder notre porte principale ouverte aux gens dont nous avons besoin pour nous aider à mieux nous développer et à prospérer. Le Canada est un pays d'immigration. Il a été construit par des immigrants et des réfugiés. Nous ne pourrons garder la confiance des Canadiens dans la politique que nous poursuivons, qui est d'attirer les immigrants, que s'ils sont convaincus que nous procédons à des contrôles sécuritaires et à des contrôles sanitaires avant que ces nouveaux immigrants entrent dans notre pays.
Si des gens demandent notre protection, nous voulons être en mesure d'identifier aussi rapidement que possible, pour leur bien et pour le nôtre, ceux qui en ont véritablement besoin. Et nous voulons identifier ceux qui n'en ont pas besoin, pour pouvoir les renvoyer aussi rapidement que possible. C'est là le but de ce projet de loi.
Le sénateur Andreychuk: Madame la ministre, votre intervention a été très utile. Vous avez souligné plusieurs choses avec lesquelles je suis d'accord.
Pour vaincre le terrorisme et la criminalité, nous avons besoin de renseignements et de données. Nous devons pouvoir les exploiter rapidement. Je suis très largement d'accord avec cela.
Vous avez également fait remarquer que lorsque nous accueillons des réfugiés, si l'enquête de trois jours nous permettait de savoir lesquels représentent des risques pour la sécurité, nous pourrions les éliminer. Nous devons les éliminer très rapidement.
Et c'est bien là le dilemme que pose ce projet de loi. Il n'a pas été conçu pour faire face au terrorisme et à la criminalité. Le texte législatif que l'on nous propose concerne l'immigration et les réfugiés. On répète continuellement que nous avons besoin d'autres outils pour faire quelque chose au sujet des réfugiés.
Ne s'agit-il pas d'une intervention à la petite semaine? Pratiquement tous les ministères jouent un rôle dans ces secteurs.
On nous dit de nous attendre à une législation anti-terrorisme. Il devrait s'agir d'un texte législatif global, l'immigration et les réfugiés n'en étant qu'une partie. Nous ne devrions pas donner la fausse impression à la population que notre sûreté et notre sécurité sont liées à la question des immigrants et des réfugiés.
Nous savons que les terroristes et les criminels peuvent venir de l'intérieur. Ils pourraient avoir immigré au Canada. Il pourrait s'agir de réfugiés. Ils pourraient continuer de se tapir quelque part dans le monde.
Accélérer la procédure d'adoption du projet de loi C-11, c'est tenter de donner l'illusion d'une tranquillité qui n'existe pas. Il faut arrêter cela. Les événements du 11 septembre nous ont dit d'arrêter.
Le comité de M. Manley est une première étape. La législation sur le terrorisme doit avoir un impact sur tous ces textes législatifs. Adopter ce projet de loi trop rapidement empêcherait de faire le travail correctement, pour une fois.
Mme Caplan: Je ne suis pas d'accord avec votre conclusion, mais je le suis avec votre préambule. D'habitude, je dis le contraire à la Chambre quand je réponds à une question. Vous avez, à juste titre, fait remarquer que ce n'est pas la seule mesure qui doit être prise.
Je suis prête à maintenir toutefois qu'il y a d'importants nouveaux instruments dont nous avons besoin dans ce projet de texte législatif. Je demande qu'il soit adopté aussi rapidement que possible, car c'est important pour le Canada.
Le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration est partenaire du Procureur général, du Solliciteur général, du SCRS, de la GRC, du ministère des Affaires étrangères et du ministère des Transports. Tous ces partenaires collaborent étroitement.
Plusieurs initiatives ont déjà été prises. Si vous écoutez la Période des questions, vous savez que le Procureur général a énuméré des mesures législatives qui ont été adoptées et des initiatives qui ont été prises par le Canada pour lutter contre le terrorisme. Il y a, entre autres, de nouveaux et de meilleurs textes législatifs concernant l'extradition, ainsi que la ratification de plusieurs accords de l'ONU. Beaucoup de choses ont déjà été modifiées dans d'autres textes législatifs.
Nous avons reconnu qu'il y a encore des choses à faire. Certaines sont en cours sous la tutelle du Solliciteur général et d'autres sous la tutelle des Douanes. À la Chambre, il y a un texte législatif sur les organismes de bienfaisance qui a été déposé, le projet de loi C-23. Il y a également des changements concernant les douanes, le projet de loi S-23.
Vous souhaitez que tout soit fait en une seule fois, dans un seul et même texte, mais cela ne tient pas compte de la façon dont les ministères fonctionnent et collaborent. Chacun d'entre eux fait sa part et son bout.
Il s'agit ici de réformer la politique canadienne sur l'immigration et les réfugiés. Si nous retardons le passage de ce projet de loi, nous retardons du même coup notre capacité à faire ce qui doit être fait jusqu'à ce que tout le monde se soit entendu sur un échéancier qui ne s'applique qu'à une petite partie de ce qui est contenu dans ce projet de loi, mais à une partie importante.
Je tiens à vous assurer que nous collaborons avec nos partenaires et que nous continuerons de collaborer, aussi bien au niveau du comité présidé par M. Manley qu'au plan opérationnel. Toutefois, il est extrêmement important de reconnaître que c'est la première fois en plus de 25 ans que nous tentons de mettre à jour la politique sur l'immigration et la protection des réfugiés, et que beaucoup d'eau a coulé sous les ponts durant tout ce temps-là. Certains aspects importants de ce projet de loi ne peuvent tout simplement pas attendre.
Le sénateur Andreychuk: Le témoin s'est exprimé éloquemment.
D'après les gens qui sont en première ligne et mon expérience dans le domaine de la sécurité et de l'exploitation des renseignements, il ne s'agit pas d'avoir de nouveaux instruments. Le problème, c'est de combiner les divers instruments pour qu'ils deviennent efficaces au plan opérationnel.
Ainsi, assurer la sécurité pendant la période de contrôle de 72 heures sous-entend une collaboration avec la GRC. Pour résoudre ce type de problème opérationnel, il faut que la GRC fasse le travail qu'exige l'accueil d'immigrants venant d'outre-mer, et dispose d'un personnel suffisant et d'un encadrement adéquat.
On insiste beaucoup sur les instruments, car il est facile de changer la loi. Il est plus difficile de faire fonctionner des machines très bureaucratisées, par exemple, la Commission du statut de réfugié, et cetera.
Ne vaudrait-il pas mieux que vous vous concentriez sur les problèmes opérationnels pour améliorer le fonctionnement de la bureaucratie plutôt que de vous occuper de nouveaux instruments? Vous n'avez pas complètement exploité les instruments dont vous disposez déjà.
Mme Caplan: Je ne suis pas d'accord. C'est important parce qu'il y a eu un malentendu à propos de ce que recouvre le contrôle en 72 heures. C'est un changement important qui est introduit dans ce projet de loi par rapport à la loi en vigueur, et j'aimerais vous l'expliquer.
Quand les gens arrivent au Canada et revendiquent le statut de réfugié, en vertu de la loi actuelle, on prend leurs empreintes digitales et on les photographie, et cette information est transmise au CIPC, la banque de données de la police, ainsi qu'à d'autres pour déterminer s'il s'agit de personnes interdites de territoire au Canada par suite d'activités criminelles. Les agents d'immigration évaluent ensuite les cas individuels en fonction de leur recevabilité, ce qui peut prendre jusqu'à six mois. C'est la raison pour laquelle nous rencontrons énormément de difficultés, dans le cadre de la loi actuelle, pour empêcher l'accès à la CISR. C'est possible, mais c'est une procédure lourde, difficile, et il faut disposer d'un grand nombre de preuves.
Une fois qu'on a accordé à quelqu'un le statut de réfugié, une deuxième vérification complète et intensive est faite avant que cette personne ait le droit de revendiquer le statut de résident permanent. Et il y a encore une autre mise à jour sécuritaire avant que la citoyenneté soit conférée.
La politique et l'esprit de la législation qui vous est soumise et des nouveaux instruments qu'elle contient reposent sur l'idée qu'un contrôle sécuritaire intensif, effectué avant l'établissement, sera fait avant que quiconque obtienne le statut de résident permanent. Par conséquent, il y a deux filières. En éliminant l'évaluation de l'admissibilité par un agent d'immigration et en réduisant le délai à trois jours, nous ne voulons pas dire que la décision sera prise en trois jours. En fait, l'agent d'immigration aura jusqu'au moment où les intéressés deviennent des immigrants reçus pour déterminer s'ils sont ou non admissibles au Canada. Nous espérons qu'en instituant une vérification intensive à l'arrivée, nous serons en mesure d'identifier ceux dont ne veut pas le Canada. S'il s'agit de gens qui ne sont pas admissibles à cause d'antécédents criminels ou de risques en matière de sécurité, de personnes qui ont commis des crimes de guerre ou des crimes contre l'humanité, nous pourrons, comme le permet la Convention de Genève, leur refuser l'accès au processus de reconnaissance du statut de réfugié, organiser une audience sur l'admissibilité, procéder à une évaluation des risques avant leur renvoi, puis les expulser du pays.
Nous ferons deux choses. Nous déférerons l'intéressé à la CISR dans les trois jours ouvrables, et parallèlement, nous entreprendrons non seulement une vérification sécuritaire préliminaire, mais un contrôle sécuritaire intensif, lequel n'est actuellement entrepris qu'une fois le statut de réfugié accordé. Nous avons actuellement une procédure en trois étapes, que nous ramènerons à deux étapes par souci de simplification, nous utiliserons mieux nos ressources pour fonctionner plus intelligemment et nous serons en mesure d'identifier plus rapidement ceux qui ont besoin de notre protection et ceux qui ne sont pas les bienvenus au Canada.
Le sénateur Cordy: Il a beaucoup été question du fait que les choses avancent un peu trop rapidement et que des gens qui auraient souhaité faire un exposé ou faire part à votre ministère de leurs préoccupations n'ont pas été en mesure de le faire.
Dans votre déclaration liminaire ce matin, vous avez parlé d'un processus de consultation publique mis en oeuvre par le ministère pour la préparation du projet de loi C-11. Pourriez-vous développer?
Mme Caplan: Nous consultons depuis cinq ans. Mon prédécesseur avait organisé des consultations d'un bout à l'autre du pays et des tribunes dans les grands centres. Le projet de loi C-31, le prédécesseur du projet de loi C-11, a été longuement examiné à la Chambre des communes. Quand le projet de loi C-31 a été abandonné, nous en avons profité pour prendre connaissance de toutes ces discussions, des conseils et des mémoires transmis au ministère. Nous avons répondu sous la forme du projet de loi C-11, en incorporant d'importants changements, compte tenu de tous les conseils que nous avions reçus dans le cadre de cette très large consultation. Je le répète, il y a eu de larges consultations qui ont duré cinq ans, ensuite le projet de loi C-31, puis la nouvelle Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés - le projet de loi C-11 - et des audiences publiques à la Chambre des communes. J'ai rencontré des représentants de divers organismes et des intervenants individuels depuis que je suis au ministère, il y a maintenant plus de deux ans. Ce texte a été la priorité législative numéro un pour moi et pour le ministère.
Le sénateur Cordy: Naturellement, comme cela est et a toujours été le cas, le Canada souhaite que les meilleurs candidats à l'immigration puissent se joindre à sa population active. L'un des témoins qui a comparu hier a déclaré que le projet de loi C-11 dissuaderait les plus brillants de venir dans notre pays. Quel est votre sentiment?
Mme Caplan: En fait, le nouveau Règlement qui accompagnera le projet de loi C-11 fera exactement le contraire. Il nous permettra de rivaliser avec les autres pays, qui se rendent compte qu'ils ont les mêmes problèmes démographiques que nous, pour attirer la crème de la crème. Notre population vieillit, le taux de natalité est en baisse et la croissance de notre main-d'oeuvre dépend énormément de l'immigration. Nous constatons déjà une pénurie de main-d'oeuvre qualifiée et nous savons en outre que les immigrants sont synonymes de pouvoir d'achat et de prospérité. Nous en voyons les signes un peu partout. J'en reviens aux propos du sénateur Di Nino. Il n'est pas nécessaire de faire autre chose que de se promener un peu en voiture dans un de nos grands centres urbains pour constater la prospérité engendrée par les communautés d'immigrants. Notre but, avec le projet de loi C-11, est de faire venir des gens qui possèdent des compétences polyvalentes et de supprimer l'ancienne exigence, qui est dépassée, voulant qu'il soit nécessaire de répondre à des critères précis définissant une profession donnée. Il faut parfois plus de temps pour faire venir les gens à cause de toutes les vérifications que nous devons faire, et la catégorie professionnelle à laquelle ils appartiennent peut très bien ne plus avoir les mêmes besoins. Les gens arrivent avec des attentes irréalistes, croyant que c'est dans ce secteur qu'ils doivent chercher du travail.
Je vais demander à Mme Atkinson de vous parler de la nouvelle grille de sélection, laquelle nous permettra de rivaliser efficacement avec les autres pays qui font face au même problème démographique et qui veulent ouvrir leurs portes aux travailleurs qualifiés.
Mme Atkinson: Notre nouvelle grille de sélection, qui figurera de façon détaillée dans le Règlement que nous avons proposé, est basée sur des recherches et des consultations approfondies au cours des dernières années.
Elle s'éloigne de l'étroit système de sélection axé sur la profession dans lequel, pour être admissibles, les intéressés devaient avoir des qualifications correspondant à celles de professions dont on donnait la liste et qui pouvaient très bien ne plus être en demande ni correspondre à un marché du travail où les gens passent d'une profession à l'autre. Nos recherches et nos consultations nous disent que l'économie canadienne a maintenant besoin de travailleurs du savoir possédant un ensemble de qualifications flexibles, susceptibles d'être utilisées dans différentes professions ou environnements professionnels. Notre système de sélection repose sur ces ensembles de qualifications flexibles et sur des niveaux satisfaisants d'instruction et de connaissances linguistiques. Ainsi, les gens peuvent venir, s'adapter et passer d'une profession à l'autre au sein de l'économie du savoir.
Le sénateur Roche: Madame la ministre, je reconnais que les besoins que vous avez décrits ont un certain mérite. Toutefois, comme les autres sénateurs que vous avez entendus ici aujourd'hui, j'ai de très sérieuses réserves à propos de ce qui a été qualifié, à juste titre, je pense, de «précipitation inconvenante» concernant ce projet de loi et la pression exercée sur le comité pour qu'il l'adopte. Nous n'avons, par exemple, même pas eu la possibilité d'entendre les provinces et les administrations de Toronto, Montréal et Vancouver, où la plupart des immigrants et des réfugiés aboutissent. Je pense qu'il est nécessaire de les entendre.
J'ai fait part de mon opinion hier au Sénat, où j'ai eu un échange utile à ce sujet avec le sénateur Carstairs, le leader du gouvernement au Sénat. Le sénateur a déclaré que, tout en souhaitant que le Sénat examine le projet de loi aussi rapidement que possible, en fait, «la façon dont le comité travaille doit être décidée par le comité».
Ainsi, si par prudence le comité décide qu'il a besoin de trois ou quatre semaines supplémentaires pour faire du projet de loi une étude qu'il juge appropriée, cela vous ennuierait-il?
Deuxièmement, si l'adoption du projet de loi se trouvait retardée, accorderiez-vous votre soutien aux recommandations ou aux observations que le comité pourrait formuler dans son infinie sagesse? Il pourrait être question, autrement dit, d'une étude officielle du Sénat de tous les aspects de l'immigration et du droit d'asile. Je ne m'attarderai pas là-dessus pour l'instant, mais un grand nombre des questions qui ont été soulevées devant nous justifient le genre d'étude approfondie qui ont fait la réputation du Sénat et qui ont porté sur un grand nombre de dossiers importants. Seriez-vous en faveur d'une telle étude?
Mme Caplan: Je voudrais vous remercier de vos remarques, sénateur Roche, et vous dire combien je respecte l'importance du travail du Sénat. Je ne cherche aucunement à vous dire ce que vous devriez ou ne devriez pas faire. Je considère depuis longtemps le Sénat comme l'endroit où les problèmes importants du moment ou de l'avenir peuvent bénéficier d'une analyse et d'une étude approfondies et réfléchies. Si vous décidiez de procéder ainsi en ce qui concerne l'immigration, je sais que vous feriez un excellent travail.
En ce qui concerne votre premier point, je tiens à vous assurer que nous considérons que les provinces sont des partenaires importants. Nous avons des accords avec plusieurs provinces et l'obligation de les consulter; et nous les consultons sur une base régulière. Les provinces ont participé aux discussions qui ont abouti à l'élaboration du texte législatif à l'étude. Je puis vous assurer qu'elles ont été consultées, et personne n'a laissé entendre, je peux le dire à ce comité, qu'elles ne l'ont pas été. Elles ont été consultées par le ministère, par les fonctionnaires. Je peux vous dire que les provinces sont très intéressées par le nouveau Règlement, notamment par les mesures touchant les travailleurs qualifiés et la catégorie de la famille.
Étant donné que nous ne pouvons pas, avant que le Sénat adopte ce projet de loi, divulguer le Règlement qui sera éventuellement publié dans la gazette, nous ne pouvons pas lancer un programme de formation ou préparer la transition et le passage à une nouvelle législation. Je ne pense pas qu'un retard irait dans le sens de l'intérêt public.
En cas de retard, ce projet de loi et ces réformes ne pourront pas être mis en oeuvre d'ici au printemps, ce que beaucoup considèrent déjà comme une date butoir à la limite de l'acceptable pour mettre la dernière main au texte. Plus tôt le projet de loi sera adopté, plus tôt nous serons en mesure de mettre en oeuvre un grand nombre de ses importantes dispositions. En outre, nos missions à l'étranger, qui sont chargées du traitement des demandes, ont besoin d'avoir des directives précises aussi rapidement que possible. Nous devons indiquer aux gens qui soumettent des demandes quelles vont être les règles.
Je sollicite votre appui et votre aide, afin que ce projet de loi soit examiné aussi rapidement que possible, en tenant compte de son caractère d'urgence, comme je l'ai souligné.
J'ai aussi déclaré que s'il devait y avoir des discussions à l'avenir et si des suggestions intéressantes devaient venir du Sénat ou de quiconque, je serai tout naturellement prête à les considérer, car c'est évidemment dans l'intérêt du Canada.
Le sénateur Robertson: Madame la ministre, ma première question porte sur le trafic de personnes. Il y a trois dispositions, l'article 117, le paragraphe 118(1) et l'article 119. Vous savez de quoi il est question: aide ou encouragement par tromperie, déception, débarquement de groupes de personnes en mer en vue d'inciter, et cetera.
Il doit y avoir une raison pour laquelle le gouvernement a choisi de faire du trafic de personnes une infraction à la Loi sur l'immigration plutôt qu'une infraction au Code criminel.
Mme Caplan: Je vais me tourner vers les spécialistes du droit, vu que vous avez posé une question juridique, mais du point de vue de la politique gouvernementale, la Convention des Nation Unies contre la criminalité transnationale organisée comprend deux sous-protocoles. L'un d'entre eux porte sur le trafic des êtres humains, notamment des femmes et des enfants, et le Canada est très impliqué dans son développement. Nous y sommes tout à fait favorables, et il traite des problèmes d'immigration; par conséquent, la Loi sur l'immigration est un endroit approprié, selon nous, pour y faire figurer cette disposition. Je vais demander à notre avocat de développer mon explication.
M. David Dunbar, avocat principal, ministère de la Justice: Il aurait été possible de l'inclure dans le Code criminel. L'application est semblable, que ce soit ici ou dans le Code criminel. On a décidé d'inclure ces dispositions dans ce projet de loi simplement à cause du travail qui est fait avec les Nations unies et parce qu'elles s'inscrivent logiquement dans la suite des autres dispositions du texte.
Le sénateur Robertson: J'ai deux questions à poser: j'en reviens au trafic de personnes, madame la ministre.
L'administration de tous les ministères doit refléter directement l'esprit de la législation, sous la responsabilité des ministres. Dans le domaine du trafic de personnes, on nous a informés que l'ancienne amende maximale n'a jamais été imposée. Je me permets de vous suggérer, madame la ministre, que si tel est le cas vous avez laissé passer une occasion de collecter de l'argent.
Mme Caplan: Je pense, sénateur Robertson, que vous soulevez une autre question. Le trafic de personnes et l'entrée illégale sont traités de façon très différente. L'entrée illégale s'explique parfois, pour des raisons humanitaires. Le trafic repose, lui, sur l'exploitation. La Convention des Nations unies est limpide à cet égard.
Il s'agit d'un problème dont les tribunaux ont récemment pris conscience. Les événements survenus il y a quelques années au Canada ont été une alerte. Plus important, les événements à travers le monde ont attiré l'attention des Nations unies sur la traite des êtres humains.
Il ne s'agit pas d'un problème auquel seul le Canada est confronté, il se pose à tous les pays. Nous avons réussi plusieurs fois récemment à obtenir des condamnations devant nos tribunaux. Ce projet de loi leur signifiera sans détours que les Canadiens sont extrêmement préoccupés par le problème du trafic et de l'entrée illégale non justifiée par des raisons humanitaires.
Le sénateur Robertson: Avez-vous imposé des amendes? Les tribunaux ont-ils imposé des amendes?
Mme Caplan: Les tribunaux ont imposé des peines de prison et des amendes. Le fait que nous en parlions aujourd'hui officiellement devant un important comité du Sénat montre que c'est un problème important. En évoquant les travaux des Nations unies et les protocoles, nous attirerons l'attention de nos tribunaux sur le problème, parce que les magistrats lisent les comptes rendus des délibérations.
Le trafic des femmes et des enfants à des fins mercantiles est une activité déplorable et épouvantable. Nous voulons que les tribunaux se montrent aussi durs que possible envers les coupables et leur signifient aussi fermement que possible que la population du Canada ne tolérera pas ce genre de chose.
Le sénateur Robertson: Quelle est l'amende maximale en vertu de la loi actuelle?
Mme Caplan: Dans la loi actuelle, le maximum est de 500 000 $.
M. Dunbar: Le trafic de personnes n'est pas une infraction. C'est l'organisation de l'entrée illégale qui est passible de 500 000 $ d'amende.
Mme Caplan: Dans ce projet de loi, les pénalités pour trafic de personnes comprennent une amende pouvant s'élever jusqu'à 1 million de dollars et la condamnation à la prison à vie.
Il est important que vous vous rendiez compte que le trafic de personnes est un important aspect de ce projet de loi. Nous avons fait la distinction, dans ce texte, entre l'organisation de l'entrée illégale et le trafic, car nous avons reconnu que l'entrée illégale est parfois motivée par des raisons humanitaires. Par ailleurs, le Procureur général a le pouvoir de décider de ne pas entamer de poursuites dans ces cas précis.
Le sénateur Robertson: Nous surveillerons cela de près.
Certains d'entre nous sont quelque peu préoccupés. Les témoins que nous avons entendus, à une ou deux exceptions près, se sont montrés remarquablement défavorables à l'égard de ce projet de loi, sans proposer de modification. La plupart des gens soutiennent que vous pouvez atteindre vos objectifs avec la loi actuelle.
Et certains d'entre eux sont des témoins importants. Je m'occupe d'affaires législatives depuis 35 ans. Il y a eu une condamnation universelle du projet de loi de la part des témoins que nous avons entendus hier, à une exception près. Il ne m'avait jamais été donné, pendant toutes ces années, d'entendre des gens qui possédaient la somme de connaissances des témoins réunis hier autour de cette table. Ces gens-là savaient de quoi ils parlaient.
Avez-vous parlé à ces gens-là? Avez-vous écouté ces témoins? Si vous ne savez pas de qui je parle, je vous donnerai leur nom. Si vous leur avez parlé, et qu'ils sont revenus devant nous et ont tenu des propos différents, je serai rassurée.
Mme Caplan: J'ai effectivement parlé à beaucoup d'entre eux, y compris les représentants du Barreau qui, je sais, sont venus ici. J'ai lu les mémoires des autres témoins que vous avez entendus et qui ont également comparu devant le Comité permanent de la Chambre.
Dans l'ensemble, les critiques formulées par tous les partis de l'opposition et au Comité permanent de la Chambre des communes revenaient à dire que ce projet de loi est trop dur, qu'il ne reconnaît pas suffisamment de droits aux criminels et qu'il faudrait aller au-delà des obligations de notre Charte.
À ces critiques, je réponds que les Canadiens ne toléreront pas des étapes ou des processus additionnels qui aboutiront à des retards inutiles.
Je veux, et je crois que la grande majorité des Canadiens le veulent aussi, que nous ayons la capacité de renvoyer les gens du Canada plus rapidement. Nous voulons également pouvoir refuser à ceux qui représentent une menace, qui sont des criminels ou qui ont des antécédents condamnables, tels que des crimes de guerre ou des crimes contre l'humanité, la possibilité d'entrer au Canada. Et nous allons signifier clairement à ces gens-là que nous ne leur fournirons pas un abri sûr. Plus encore, nous ne les laisserons pas engorger nos tribunaux pendant des années, pas au-delà du temps qu'exige une procédure établie et raisonnable. À ces gens-là, je dis: Ce projet de loi représente un juste équilibre. Aux autres, les rares critiques qui veulent que nous jetions la Charte, que nous déchirions la Convention de Genève, que nous n'accordions pas le bénéfice d'une procédure régulière à quiconque, je dis: Le Canada a pour tradition d'accueillir et d'offrir un espoir aux gens qui ont véritablement besoin de sa protection, et il en est fier. À ceux qui arrivent et qui ne nous disent pas la vérité, nous donnons une chance de bénéficier d'une audience équitable et de voies de droit régulières avant de les renvoyer.
Ce projet de loi réalise un juste équilibre; il nous permettra de simplifier nos procédures, de préserver et de protéger les valeurs que nous chérissons, c'est-à-dire la primauté du droit et des voies de droit régulières, et de rester des Canadiens fiers de leur pays.
Le sénateur LeBreton: Madame la ministre, il faudrait que je relise le compte rendu, mais je crois que vous avez déclaré que lorsque le projet de loi a été examiné par la Chambre, la plupart des partis d'opposition et des témoins trouvaient qu'il était trop dur, et je pense que vous avez dit, trop dur pour les criminels.
Après avoir lu les comptes rendus, j'ai conclu que le problème auquel nous faisons face est celui-ci: comment réagir au danger qui menace depuis le 11 septembre et, parallèlement, ne pas créer de difficultés pour les véritables réfugiés qui viennent au Canada. Vous avez parlé de consultations avec les provinces, ce qui serait intéressant. Mon intention n'est pas de retarder inutilement ce texte législatif, mais nous devrions peut-être entendre le point de vue des provinces.
Un ancien sous-ministre de l'Immigration, un monsieur reconnu dans cette ville réputée pour son service public, nous a dit dans le cadre de son témoignage qu'il avait non seulement écrit à votre prédécesseur, mais également à vous et au premier ministre. Il a lu cette correspondance aux fins du compte rendu et nous a informés qu'il n'avait reçu aucune réponse. Qu'avez-vous à dire à ce sujet? Que se passe-t-il quand un homme de son calibre écrit au premier ministre ainsi qu'à vous et ne reçoit même pas une réponse de courtoisie? Sa lettre portait précisément sur ces questions d'immigration, et il parle en connaissance de cause car il a été sous-ministre dans votre ministère.
Mme Caplan: Permettez-moi de répéter que ce projet de loi devrait être mis en oeuvre avant notre saison d'été. La demande de visas de visiteur est la plus forte pendant cette saison. Nous ne pouvons pas interrompre le travail du ministère avant de mettre en oeuvre une nouvelle législation. Cela pose un grand problème au ministère. J'ai dit clairement que si vous retardiez l'adoption de ce projet de loi, je ne pense pas que vous serviriez les intérêts des Canadiens. Si d'autres choses doivent être faites à l'avenir, elles pourront et seront examinées à la lumière de ce que vous avez décrit comme un danger clair et réel.
En revanche, ce projet de loi a fait l'objet de consultations approfondies. Nous avons écouté, et je suis au courant des points de vue de tous ceux qui pensent qu'il est soit trop, soit pas suffisamment dur. C'est la raison pour laquelle je pense qu'il réalise un juste équilibre. Toutefois, l'attention du comité de la Chambre des communes se portait principalement sur la criminalité. Dans les articles sur la criminalité, nous traitons également des menaces à la sécurité. À la lumière des événements du 11 septembre, ce comité s'intéresse naturellement aux aspects du projet de loi qui concernent les menaces à la sécurité.
Quoi qu'il en soit, à la fois au comité et à la Chambre des communes, quand il a été renvoyé au stade du rapport, des propositions d'amendements ont été faites, qui auraient ajouté de nouvelles étapes et reconnu des droits supplémentaires aux criminels. Le gouvernement actuel s'est opposé à toutes les mesures supplémentaires qui supprimeraient ou limiteraient notre capacité à rationaliser les processus et à renvoyer les gens qui sont irrecevables du fait de leur passé criminel. Je parle de ceux qui menacent la sécurité de ce pays. Nous voulons qu'ils décampent aussi rapidement que possible.
Le sénateur LeBreton: À cet égard je ne pense pas qu'il y ait quelqu'un autour de cette table qui souhaiterait retarder indûment quoi que ce soit. Si nous disposions d'à peu près une autre semaine pour entendre plus de témoins, je ne pense pas que l'on pourrait dire que nous retardons les choses. Je crois fermement que beaucoup trop souvent, en tout cas depuis que je suis au Sénat, on nous a dit: «Adoptez le texte maintenant et on l'arrangera plus tard.» Deux semaines de plus pour étudier ce texte, ce ne serait certainement pas retarder les choses indûment.
Mme Caplan: Avec tout le respect que je vous dois, je ne suis pas d'accord avec vous.
[Français]
Le sénateur Pépin: Un des témoins nous a demandé ce qui adviendrait des femmes arrêtées dans des réseaux de prostitutions On nous a dit que ces jeunes femmes étaient détenues et retournées dans leur pays par la suite. Lorsqu'on connaît la façon dont elles ont été amenées ici, pourquoi n'y a-t-il rien dans le projet de loi pour les protéger, les réhabiliter et les garder au pays? Si on les renvoie dans leur pays, elles retourneront dans le même système. L'article 148 ne s'adresse définitivement pas à la protection de ces jeunes femmes. Pouvez-vous m'éclairer sur ce point?
[Traduction]
Mme Caplan: J'ai déclaré publiquement et clairement que s'il y a quelqu'un, notamment une jeune femme, au Canada qui est exploitée ou qui est en difficulté et qui a peur d'appeler la police, il ou elle peut appeler l'immigration, n'importe quel député ou n'importe quel sénateur pour demander de l'aide. Nous ferons en sorte que l'intéressé bénéficie des meilleurs conseils des services de police et soit informé de ses droits en vertu de la législation canadienne.
Avant de renvoyer quelqu'un nous sommes tenus de faire une évaluation des risques pour nous assurer que nous ne renvoyons pas des gens qui courent de graves dangers. Toutefois, madame le sénateur, nous savons qu'il y a des gens ici en situation irrégulière et qui ne courent aucun risque dans leur propre pays. Ils courent plus de risques en restant ici, car ils sont exploités. Par conséquent, j'incite ces gens-là à se faire connaître. Ils peuvent bénéficier de l'aide de la police, de l'immigration, des députés, des sénateurs, qui feront leur possible pour qu'ils soient protégés et renvoyés dans leur propre pays où ils seront plus en sécurité qu'ils ne le sont ici. S'ils courent un risque quelconque dans leur pays, cela sera convenablement évalué dans le cadre de la loi canadienne.
[Français]
Le sénateur Pépin: J'aimerais soulever un point au sujet des commissaires. Une des modifications du projet de loi se retrouve à l'article 163 relatif à la compétition des tribunaux de l'immigration et des réfugiés. D'après cet article, l'évaluation d'un dossier, au départ, sera faite par un seul commissaire alors qu'auparavant elle était faite par deux commissaires. Plusieurs témoins ont manifesté leur inquiétude en ce qui a trait à cet article du projet de loi. Dans un article de presse, la directrice du Conseil canadien des réfugiés, Mme Janet Merch, disait:
Notre système de sélection des réfugiés pourrait être assimilé à une loterie dépendant du commissaire sur lequel on tombe. Pour deux cas semblables, un pourrait être accepté et l'autre refusé.
Comment êtes-vous arrivée à ce que le quorum soit réduit à un seul commissaire? L'article 163 indique qu'il peut y avoir des exceptions et qu'un tribunal composé de trois commissaires pourrait être nécessaire. Pourquoi une telle précaution? Dans quelles conditions peut-on passer de un à trois commissaires?
[Traduction]
Mme Caplan: C'est une question très importante. Ce texte législatif modifie substantiellement la structure de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.
À l'heure actuelle, la Commission de l'immigration et du statut de réfugié comporte trois sections. Il y a la Section du statut de réfugié, ou la SSR. Il y a la Section d'appel de l'immigration, ou la SAI; il y a la Section d'arbitrage. Nous procédons à une modification importante et substantielle. Je parle de rationalisation. Nous avons transformé la SSR en Section de la protection, car nous regroupons ainsi tous les motifs de protection. Toutes les étapes dont je vous ai parlé auparavant nécessiteront une seule décision, qui sera prise par un arbitre de la nouvelle Section de la protection au sein de la CISR.
Nous créons une très importante Section d'appel des réfugiés, appelée la SAR. C'est nouveau. La SAR s'occupera des appels au sein de la CISR. Nous pensons que la plupart des cas seront examinés par la SAR, ce qui garantira une certaine cohérence. Les appels pourront être soumis à la SAR aussi bien par les individus concernés que par moi-même. Je n'assisterai pas personnellement à toutes les audiences, mais j'y enverrai des représentants.
Le but est d'assurer que la bonne décision est prise et que les gens ont la possibilité de faire appel. Nous voudrions que, grâce à la procédure plus rapide et plus cohérente suivie par la Section d'appel des réfugiés, lorsqu'il sera nécessaire de faire examiner des cas par la Cour fédérale, le fait que la SAR est en mesure de réparer les erreurs éventuelles rassurera la Cour fédérale quant au processus de prise de décisions de la SSR. De cette manière, nous devrions voir moins de dossiers soumis à la Cour fédérale.
Je répète que les choses seront simplifiées et que les échéances seront plus courtes avant que l'on décide d'expulser les gens du Canada. L'objectif global est de faire un travail équitable, mais plus rapidement, d'assurer que nos décisions sont correctes et cohérentes et de procéder à la restructuration de la Commission en fonction des dix années d'expérience d'un organisme très respecté sur le plan international.
Vous seriez surpris de savoir combien de pays demandent qu'on les informe sur la façon dont fonctionne notre CISR, un organe quasi judiciaire et indépendant. Ils sont extrêmement intéressés par la réforme car la plupart des pays démocratiques, ceux qui ont signé la Convention de Genève, sont confrontés à beaucoup des mêmes problèmes que nous connaissons au niveau des appels, des lacunes dans les contrôles aux points d'entrée et des retards. Nous sommes en train d'examiner attentivement un système qui sera plus rapide mais plus équitable, puisqu'il reconnaîtra aux gens le droit de soumettre ce qui, je pense, est une revendication importante et qui ne devrait pas être entachée d'un jugement prématuré. Je parle des revendications qui sont faites par des gens qui sont persécutés et qui ont besoin de la protection du Canada.
Le sénateur Prud'homme: Un projet de loi comme celui-ci soulève bien d'autres problèmes. Je ne suis pas membre du comité, mais j'ai lu le projet de loi et j'aimerais poser une question. Ce qu'a dit le sénateur Pépin est très préoccupant, car il y a la possibilité d'un quatrième tribunal ou division, contre un seul à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Je ne sais pas si M. Warren Allmand a été consulté à propos des articles 256 et 257 qui se rapportent à la Loi sur le Centre international des droits de la personne et du développement démocratique. C'est un aspect mineur, mais j'aimerais savoir.
La question de la cour me préoccupe. Dans votre résumé, au début quand vous parlez de la Section d'appel des réfugiés de la Commission de l'immigration, vous dites que vous souhaitez l'impartialité et la cohérence des prises de décisions.
J'ai connu des cas où apparaissaient des contradictions. Les gens de Montréal se montraient plus généreux dans leur interprétation de la cohérence, alors que ceux de Toronto étaient plus sévères, dans certains cas. On a réuni les deux groupes pour qu'ils s'entendent et parviennent à ce qu'on appelle une plus grande cohérence et, soit dit en passant, cette cohérence a penché davantage vers l'interprétation de Toronto que vers celle de Montréal.
Madame la ministre, vous avez déclaré que vous ne vouliez pas plus d'argent. Je suis d'accord.
Mme Caplan: Pourriez-vous retrouver cela dans le compte rendu, sénateur?
Le sénateur Prud'homme: Je vous rendrais populaire en déclarant que vous n'avez pas besoin de plus d'argent. Ce dont nous avons besoin dans ce pays, c'est d'une meilleure coordination des ressources disponibles. J'ai siégé avec le sénateur Kenny au Comité de sécurité, et nous avons constaté qu'il n'y avait pas de coordination. J'ai le regret de dire qu'il n'y a pas beaucoup de coopération entre le SCRS et la GRC.
Nous avons été témoins de la faillite du FBI, de la CIA, d'Interpol et d'autres que je préfère ne pas mentionner ce matin. Comme il semble que les Canadiens souhaitent que quelqu'un, quelque part, fasse preuve de fermeté, on nous demande de nous d'examiner en toute hâte ce que nous considérons comme un important texte législatif. Au Sénat, nous avions l'habitude de dire que l'ordre exclut la hâte et la précipitation. Si vous voulez faire quelque chose de bien, vous prenez votre temps, c'est le secret de la réussite.
Nous sommes préoccupés. Nous savons que les Canadiens souhaitent que le gouvernement se montre ferme, mais il est de notre devoir, en tant que sénateurs, de réfléchir et d'élaborer un bon projet de loi. Par exemple, je ne suis pas d'avis que ce sera une question explosive au Québec.
Certains ont trop insisté sur le fait que les gens devraient parler soit français soit anglais. Ce pays a été bâti par des gens qui ne parlaient ni l'un ni l'autre, mais qui étaient animés par la ferme volonté de construire ce pays. J'espère qu'en temps utile, vous en tiendrez compte.
Si ces audiences s'étaient déroulées au mois de mars dernier, nous consacrerions aujourd'hui 1 milliard de dollars au système de défense antimissile. Qui en parle maintenant? Les milliards de dollars dont l'investissement est sur le point d'être débattu au Sénat étaient pour le grand système de défense antimissile. Comment se fait-il que dans ce projet de loi il n'y a pas de définition du terrorisme? C'est une question difficile. Tout le monde a posé la question. Celui qui est, pour certains, un combattant de la liberté est pour d'autres un terroriste.
Mme Caplan: De l'avis général, s'il devait y avoir une définition du terrorisme, elle devrait figurer dans le Code criminel du Canada et non dans un projet de loi sur l'immigration. Nous nous fondons sur des preuves et nous plaidons devant le tribunal approprié le droit d'arrêter un individu quand nous pensons qu'il présente un danger ou un risque pour le Canada. Telle était la façon de voir les choses par le passé, et cela reste la façon dont on voit les choses dans mon ministère et au ministère de la Justice aussi, je pense.
Il y a quelques points que le sénateur a soulevés et auxquels je voudrais répondre. Premièrement, je voudrais expliquer ce qui va arriver à la CISR, car il est important que les sénateurs le sachent clairement. Il y aura une Section de la protection des réfugiés, à laquelle seront renvoyées en première instance les personnes qui auront droit à une audience avec un seul commissaire. L'étape suivante est la Section d'appel des réfugiés, chargée d'examiner les documents pour s'assurer de l'impartialité et de la cohérence du processus suivi. Nous prévoyons que le contrôle judiciaire aura lieu à la fin de la deuxième étape.
Traditionnellement, les tribunaux n'ont été saisis qu'à la fin du processus. Cela nous aidera à effectivement simplifier la procédure, car nous n'aurons plus les multiples étapes et multiples contrôles judiciaires qui existent actuellement. Le système sera plus rapide, mais plus équitable, car la Section d'appel des réfugiés, qui traite uniquement des dossiers sur papier, s'assurera de la cohérence et de l'impartialité du processus qui a été appliqué.
À propos du problème de langue que vous avez soulevé, ce n'est pas obstacle dans le nouveau système de sélection, mais un nombre de points substantiel est accordé pour la connaissance de l'anglais et du français.
Toutes les études qui ont été faites sur la capacité d'une personne à s'intégrer rapidement et à devenir productive dans la société canadienne démontrent que la langue est un indicateur significatif de réussite. Mieux une personne connaît la langue, plus rapidement cette personne peut trouver un emploi et plus rapidement elle réussira à s'intégrer et à contribuer à la société canadienne. Le nouveau système de points en prévoit un nombre significatif pour la connaissance d'une des deux langues car l'expérience nous montre qu'il devrait en être ainsi.
Je pense avoir couvert les points importants que vous avez soulevés, sénateur, mais si j'ai oublié quelque chose, dites-le moi et je me ferai un plaisir de vous répondre.
Le sénateur Prud'homme: J'aimerais faire remarquer que nous accordons beaucoup de nouveaux pouvoirs aux agents d'immigration. Ils auront une liste de gens connus comme des terroristes. Ils auront le pouvoir de trancher dans bien des cas.
Avons-nous les connaissances nécessaires pour gérer cette situation? Il y a des milliers de gens qu'il faut former pour qu'ils puissent faire la différence entre un véritable combattant de la liberté qui s'enfuie et un terroriste. Il est certain que nous ne voulons pas des terroristes.
Mme Caplan: La formation de tous les agents d'immigration est déjà en route pour ce qui concerne ce qui touche à la sécurité dans le projet de loi. Nous considérons que la formation est une nécessité, afin d'assurer que les bonnes décisions seront prises.
Je ne veux pas dire que toutes les décisions prises par tous les agents seront toujours parfaites. C'est pour cette raison que nous avons mis en place des mécanismes pour remédier aux décisions erronées. C'est ce que nous appelons les voies de droit régulières et la primauté du droit. Tous les Canadiens en sont fiers.
Je n'ai pas de crainte en ce qui concerne l'octroi de pouvoirs aux agents d'immigration. Ils doivent avoir l'autorité voulue pour prendre les décisions que les Canadiens souhaitent qu'ils prennent. C'était une préoccupation qui a été exprimée au comité de la Chambre des communes par des témoins venus défendre un point de vue et faire un exposé. Je ne suis pas du tout d'accord avec eux.
La loi accorde aux agents d'immigration les pouvoirs dont ils ont besoin pour agir dans l'intérêt public. Je voudrais que l'on comprenne et que l'on apprécie le travail important qu'ils effectuent en première ligne partout dans le monde, dans nos bureaux des visas, et en deuxième instance, lorsqu'on leur envoie des gens après leur entrée au Canada.
Nous sommes reconnaissants aux agents de douane qui agissent en notre nom dans le cadre de la Loi sur l'immigration. Nous veillons à ce qu'ils soient aussi bien formés que possible. Nous savons qu'ils ont souvent affaire à des gens qui les regardent droit dans les yeux tout en faisant tout leur possible pour éviter de donner une réponse honnête. Parfois, ils envoient à nos inspecteurs quelqu'un qui est agacé et contrarié parce qu'il ne pense pas qu'il aurait dû être traité de cette façon.
Le but est d'empêcher l'entrée au Canada de ceux qui constituent une menace ou qui sont irrecevables à cause de leurs antécédents criminels ou à cause d'une autre des dispositions relatives à l'interdiction de territoire. Mais nous voulons en même temps nous montrer courtois et accueillants envers ceux qui ont une raison légitime de se trouver au Canada. Tel est l'équilibre vers lequel tend le travail de mon ministère. Je suis très fière des agents. Même s'ils ne sont pas parfaits, ils font un excellent travail au bénéfice de tous les Canadiens.
Le président: Madame la ministre, je tiens à vous remercier du temps que vous nous avez généreusement consacré ce matin. Nous apprécions le fait que vous vous soyez déplacée, que vous ayez écouté nos questions et que vous y ayez répondu en détail. Les questions qui vous seront sans doute posées de l'autre côté du hall, lors de votre point de presse, ne seront peut-être pas aussi intéressantes que les nôtres, mais elles pourraient s'avérer un peu plus difficiles.
Mme Caplan: Je remercie les honorables membres du Sénat dont j'apprécie le travail.
Le président: Mesdames et messieurs du Sénat, nous allons poursuivre les délibérations du comité. Le sénateur LeBreton et moi-même avons discuté de l'étape suivante. Suite à notre discussion, les leaders de nos partis au Sénat ont discuté des étapes suivantes.
Plusieurs personnes, dont le sénateur LeBreton, le sénateur Roche, le sénateur Di Nino et d'autres ont demandé que nous entendions des témoins sur deux points en particulier. Le premier touche la constitutionnalité du projet de loi et le problème de la Charte soulevé par les membres du Barreau. Le deuxième est la question du rôle des provinces et des déclarations faites récemment par plusieurs provinces, dont l'Ontario, la Colombie-Britannique et le Nouveau-Brunswick.
Nous ne nous engagerons pas aujourd'hui dans une étude article par article du projet de loi. Nous entendrons ces témoins soit la semaine prochaine, soit dans la semaine du 22 octobre. Le comité s'est engagé à organiser des audiences publiques dans quatre capitales provinciales de l'Ouest pendant la semaine du 15 octobre.
En ce qui concerne l'examen du projet de loi C-11, la séance sera levée une fois que le sénateur LeBreton et moi-même aurons fixé une date pour la comparution des témoins. Ce sera soit la semaine prochaine, soit dans le courant de la semaine du 22 octobre.
Je suggère que nous poursuivions maintenant à huis clos afin que le comité puisse revenir sur les questions relatives aux soins de santé.
Le comité poursuit ses travaux à huis clos.