Délibérations du comité sénatorial permanent des
Transports et des communications
Fascicule 11 - Témoignages
OTTAWA, le mardi 12 juin 2001
Le Comité sénatorial permanent des transports et descommunications, auquel a été renvoyé le projet de loi C-14, Loi concernant la marine marchande et la navigation et modifiant la Loi dérogatoire de 1987 sur les conférences maritimes et d'autres lois, se réunit aujourd'hui, à 9 h 35, pour en faire l'examen.
Le sénateur Lise Bacon (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente: Bonjour. Ce matin, nous examinons le projet de loi C-14, Loi concernant la marine marchande et la navigation et modifiant la Loi dérogatoire de 1987 sur les conférences maritimes et d'autres lois.
[Français]
Ce matin, nous accueillons M. Gilles Bélanger, président et chef de la direction de la Fédération maritime du Canada etMme Anne Legars, également de la Fédération maritime du Canada.
Nous vous souhaitons la bienvenue. Nous avons reçu vos documents dans les deux langues officielles et nous vous remercions de les avoir fait parvenir. Nous vousaccordons 15 minutes pour votre présentation parce que nous aimerions consacrer 45 minutes à la période de questions.
M. Gilles Bélanger, président-directeur général, Fédération maritime du Canada: Mon exposé durera moins de 15 minutes alors nous aurons amplement le temps pour des questions.
Je suis président de la Fédération maritime du Canada et je suis accompagné de Mme Anne Legars, directrice, Politiques et affaires gouvernementales.
[Traduction]
La fédération représente plus de 95 p. 100 des bâtiments maritimes, y compris des bateaux de croisière internationale mouillant dans les ports de la région atlantique du Canada, du fleuve Saint-Laurent et des Grands Lacs. Vous trouverezune liste de nos membres et des entreprises qu'ils représentent à l'annexe 1 de notre mémoire.
La fédération accueille avec plaisir les efforts déployés par Transports Canada en vue de moderniser et de simplifier la Loi sur la marine marchande du Canada, une loi d'importance vitale pour notre industrie. Dans l'ensemble, la fédération appuie le projet de loi C-14, bien qu'elle souhaite y proposer quelques changements. Nous profitons aussi de l'occasion pour faire remarquer que le processus de consultation lancé par Transports Canada s'est avéré extrêmement utile pour simplifier les enjeux et corriger dès le début divers problèmes de forme. C'est ainsi qu'aujourd'hui, nous sommes libres de nous concentreressentiellement sur les questions de principe.
Le projet de loi C-14 confère au gouvernement des pouvoirs très étendus en matière d'établissement des règles, d'exécution, d'enquête et d'arbitrage. Bien que nous soyons pleinement conscients de la nécessité pour Transports Canada de conserver sa marge de manoeuvre et d'avoir de grands pouvoirs en vue de bien remplir son mandat, trois aspects du nouveau régime proposé nous préoccupent tout de même, soit le nouveau régime de sanctions administratives, l'encadrement des pouvoirs discrétionnaires du ministre et, enfin, le traitement équitable des différents modes de transport.
Je vais d'abord m'arrêter à la première question de principe qui, selon nous, devrait être examinée par le comité permanent. Le besoin de souplesse et d'efficacité a mené le gouvernement à proposer un nouveau régime de sanctions administratives pour ceux qui enfreignent le règlement. Sous le nouveau régime, le ministre a le pouvoir de nommer des arbitres qui passent en revue ses décisions.
De plus, le ministre n'aura plus à assumer qu'un fardeau de la preuve au civil, ce qui signifie que la preuve s'appuie sur la prépondérance des probabilités plutôt que sur le fardeau classique de la preuve d'ordre pénal, soit de faire la preuve hors de tout doute raisonnable. De plus, le ministre serait habilité à décider, à sa seule discrétion et pour son seul avantage, s'il vaut mieux appliquer le nouveau régime de sanctions administratives ou recourir au processus judiciaire classique.
Je tiens à souligner que l'industrie n'est pas opposée au concept général des sanctions administratives quand il est appliqué à des infractions de moindre importance.
Les conséquences de la constatation d'une infraction, sous le régime proposé de sanctions administratives, peuvent être très lourdes. Par exemple, l'amende pourrait parfoisatteindre 50 000 $. L'infraction figurerait dans les documents publics pendant au moins cinq ans et pourrait empêcher la délivrance des documents maritimes canadiens.
Nous craignons donc que le nouveau régime ne décriminalise la plupart des infractions à la loi en abolissant les garanties procédurales existant en droit pénal, comme le fardeau de la preuve et les règles de la preuve, tout en maintenant à l'égard du contrevenant des conséquences pénales.
La fédération s'oppose au régime proposé de sanctions administratives parce qu'elle ne croit pas qu'il représente un bon équilibre des garanties procédurales prévues dans le projet de loi et des conséquences de la constatation d'une infraction. Elle soutient également que plusieurs garanties procédurales du common law devraient être énoncées explicitement dans la loi puisque les infractions seront jugées par des arbitres qui n'ont pas de formation en droit. Bon nombre des recommandations présentées dans notre mémoire proposent ce que l'industrie perçoit comme un meilleur équilibre entre le régime procédural et les sanctions prévues.
La deuxième question de principe concerne le besoin d'assortir les pouvoirs accrus du gouvernement sur le plan de l'application de la loi de lignes directrices et de garanties. À nouveau, le besoin de souplesse et d'efficacité a mené le gouvernement à proposer que la loi confère des pouvoirs sans précédent aux personnes qui sont chargées de faire respecter la loi. Selon nous, plus les pouvoirs du gouvernement sont grands, plus le besoin est grand d'avoir des lignes directrices pour les encadrer.Nous recommandons donc que certaines normes de rendement soient introduites ou réintroduites dans la loi. Il estparticulièrement important de le faire si certaines décisions de l'administration font l'objet d'un examen par des arbitres qui n'ont pas la même expertise judiciaire que les tribunaux.
[Français]
J'en arrive au troisième sujet qui nous préoccupe: l'équité de traitement entre les modes. Rien n'indique que le transport maritime se conforme moins que les autres modes de transport aux lois et règlements applicables.
Malgré tout, le régime proposé par le projet de loi C-14 est plus sévère que le régime applicable aux autres modes de juridiction fédérale, et ce qu'il s'agisse des peines maximales encourues sous le régime pénal ou des mesures prévues pour le nouveau régime de pénalités administratives.
De nombreuses recommandations de notre mémoire visent à aligner le traitement du mode maritime sur celui des autres modes. Plusieurs de ces recommandations visent même à copier textuellement, dans la Loi sur la marine marchande, la rédaction des dispositions correspondantes de la Loi sur l'aéronautique.
Le ministère des Transports nous a fait valoir que le mode aérien était fort satisfait de leur nouveau régime de pénalités administratives et que le mode maritime devrait donc être aussi satisfait du sien. Soit, alignons donc le régime proposé pour le mode maritime sur le régime existant pour le mode aérien.
À part ces trois principales préoccupations ayant trait aux politiques, notre mémoire contient également certainesrecommandations spécifiques visant à clarifier certains termes et définitions.
Enfin, la fédération appuie fortement la partie 15 du projet de loi qui amende la Loi dérogatoire sur les conférences maritimes. Ces amendements modernisent la loi, mettent le droit canadien en phase avec le droit américain et protègent le maintien du commerce maritime international à destination et en provenance du Canada.
Je vous remercie de votre attention et il nous fera plaisir d'élaborer davantage sur la position de la fédération lors de la période de questions.
La présidente: Je sais que beaucoup de consultations ont été menées pour ce projet de loi. Êtes-vous raisonnablement satisfaits du degré de consultation sur ce projet de loi? A-t-on donné suite, puisque vous avez dû être consultés, à vos préoccupations ou, du moins, vous a-t-on donné des explications satisfaisantes?
M. Bélanger: Nous avons été consultés, passablement, au cours du processus. Nous sommes satisfaits de la façon dont les consultations ont été menées.
Quant au régime de pénalités administratives introduit, il nous a été répété qu'il s'agissait d'une politique gouvernementale globale et qu'il fallait alléger la demande aux tribunaux judiciaires. Notre réponse a été que nous n'avions pas vraiment de problèmes avec le régime lui-même, mais plutôt avec le niveau des pénalités sous ce régime. Il faut bien comprendre que plus la pénalité et les conséquences sont importantes, plus les gens voudront se défendre.
Comme je l'ai répété souvent au ministère des Transports du Canada, pour l'avoir déjà vécu, je trouve difficile de plaider des points de droit comme la Charte des droits ou des points de droit très pointus devant des gens qui n'ont pas de formation en droit. C'est toujours un peu pénible. Ce qui me fait peur de ce projet de loi, c'est qu'on perpétue cette situation.
Que nous établissions le régime à des types de pénalités de moindre importance, cela va très bien et nous n'y avons pas d'objection. Dans les cas plus importants, nous devrions quand même nous référer au processus judiciaire parce que lorsque des conséquences comme le non-renouvellement des documents ou des conséquences importantes sur le plan de l'inscription dans les dossiers surviennent, cela rend la vie plus difficile à l'entreprise. Alors dans ce cas, devoir plaider sur la balance des probabilités dans des situations pénales nous fait peur.
Le processus judiciaire pénal qui force à faire une preuve au-delà du doute raisonnable, ce n'est évidemment pas là pour rien dans notre régime judiciaire canadien et cela s'applique également ici. Cet aspect est celui qui nous crée le plus de problèmes.
La présidente: Je vous réfère à la page 10 de votre document. Vous voulez que soient introduits des standards de performance pour encadrer le pouvoir discrétionnaire des personnes en charge de l'application de la loi, tout cela pour éviter des abus de pouvoir. Vous visez l'article 211. Quelles dispositions vous laissent croire que les inspecteurs pourront agir selon un pouvoir arbitraire et pourquoi vous vous exprimez de cette façon?
Mme Anne Legars, directrice, Politiques et affairesgouvernementales, Fédération maritime du Canada: Disons que l'industrie en général est très sensible à l'arbitraire de certaines décisions d'inspecteurs, qui peuvent avoir une incidence directe sur les délais parce que le navire sera immobilisé. On questionne parfois la façon dont leur discrétion a pu être exercée. C'est une préoccupation constante de l'industrie et c'est pourquoi elle voudrait avoir cette discrétion raisonnablement encadrée par des critères particuliers.
La présidente: C'est l'expérience qui vous fait agir ainsi?
Mme Legars: Oui, l'expérience de certains membres.
M. Bélanger: On nous a souvent mentionné au cours des consultations qu'on ne devrait pas s'inquiéter parce que les gens seront formés. Cependant, l'expérience passée nous permet de croire que même avec la formation, cela crée des problèmes de temps à autre. C'est sur cette base qu'on aimerait que des critères de performance soient inclus.
La présidente: À la page 13, vous parlez de modes de traitement comparables aux autres types de régime. Vous faites référence à la Loi sur l'aéronautique. Pourquoi cette loi en particulier?
M. Bélanger: Le régime que l'on veut imposer au mode maritime par ce projet de loi existe déjà dans l'aéronautique. Transports Canada nous a souvent répété que cela fonctionne bien et que les gens du milieu de l'aéronautique sont satisfaits du régime. À ce moment, on importe le régime de l'aéronautique dans celui du maritime. Les niveaux d'infraction et lesconséquences des pénalités ne sont pas les mêmes. Si on avait un régime semblable à celui de l'aéronautique, l'industrie aurait moins de problèmes.
La présidente: Vous trouvez qu'ils en ont moins que vous?
M. Bélanger: Les pénalités sont moins élevées.
Mme Legars: Je vous réfère à l'annexe IV où un petit tableau présente les comparaisons en termes de délai de prescription, de charge de la preuve, et cetera.
La présidente: À la page cinq de votre document, au premier paragraphe, vous dites, et je cite:
[Traduction]
La loi est plus sévère à l'égard de notre mode de transport qu'à l'égard des autres.
[Français]
Pourriez-vous clarifier cette affirmation? Vous trouvez que nous sommes plus sévères?
Mme Legars: Je vous réfère à l'annexe II où sont présentés les niveaux comparatifs d'emprisonnement et de peines monétaires pour les modes ferroviaire, aéronautique et maritime. Vous voyez la différence et l'évolution entre la Loi sur la marine marchande actuelle, le projet de loi et, entre les deux, l'avant-projet qui avait circulé auprès des intéressés.
La présidente: Quand on fait la comparaison, vous trouvez que votre Fédération a raison d'être plus inquiète?
Mme Legars: On trouve que notre mode a les pénalités maximales les plus élevées. Transports Canada nous répond de ne pas nous en faire, que de toute façon, ce sont des pénalités maximales, que les tribunaux ne sont pas obligés d'imposer des peines maximales et que dans les faits, cela ne veut pas dire grand-chose.
Selon nous, une peine maximale est une indication donnée aux tribunaux selon laquelle ils doivent éventuellement être plus sévères pour le mode maritime que pour les autres modes.
La présidente: Vous parlez d'indication, mais dans la réalité, est-ce qu'on va jusqu'à des peines maximales?
Mme Legars: Non, pas nécessairement jusque-là, mais disons que la voie est ouverte. Dans la réalité, jusqu'à présent, les peines en vertu de la Loi sur la marine marchande étaient très basses. On est d'accord - on le dit très clairement dans notre mémoire - que les peines sont trop basses. Cela a besoin d'être mis à jour. Cela n'a aucun sens d'avoir des peines de 25, 50 ou 100 dollars. Cependant, il y a une marge entre 25 dollars et un million de dollars.
La présidente: Vous pensez que le maximum va devenir la norme?
Mme Legars: Normalement, le maximum est réservé aux pires cas. On espère que dans la majorité des infractions, ce ne sont pas les pires cas. Cela ne doit pas devenir la norme parce qu'on ne veut pas que le pire des comportements soit considéré comme un comportement normal.
M. Bélanger: Dans l'ensemble, ce qui nous inquiète, c'est de distinguer un mode par rapport aux autres. Pourquoi tel type d'infraction doit être puni plus sévèrement quand il s'agit du mode maritime que quand il s'agit du mode aérien?
La présidente: Nous sommes plus tendres pour le mode aérien?
M. Bélanger: Semble-t-il.
La présidente: C'est discutable.
[Traduction]
Le sénateur Forrestall: Sérieusement, j'aimerais vousdemander combien de temps il vous a fallu pour rédiger ce mémoire? Combien de temps avez-vous travaillé à cettemerveille? Une semaine, un mois, un an?
Mme Legars: En réalité, il est constamment en gestation parce que nous rédigeons des mémoires depuis peut-être 18 mois, dans le cadre des consultations. Il s'agit d'un processus permanent puisque, lorsque certaines questions sont réglées, elles sont retranchées du mémoire. D'autres ont été reformulées, de sorte que nous avons fait un changement en conséquence. Si vous comparez ce document à celui qui a été présenté au comité de la Chambre des communes, il est probablement semblable, sauf pour des changements de présentation et des mises à jour. La version précédente qui a été remise à Transports Canada n'est pas exactement la même, mais il s'agit d'un processus permanent.
La présidente: Le document a été adapté pour nous.
Le sénateur Forrestall: Combien de temps vous faudrait-il pour former quelqu'un de manière à ce qu'il maîtrise ce qu'il vous a fallu des années à produire? Je ne blague pas. Je deviens simplement un peu plus cynique à mesure que je prends de l'âge. Il y a trois ou quatre semaines, quand j'ai examiné la loi, j'ai eu l'impression qu'il pourrait peut-être y avoir quelques divergences ici et là, dont certaines que je partagerais peut-être. Quand on nous présente de la documentation la veille du témoignage, on ne peut pas s'attendre à beaucoup. Nos conseillers, assis ici à la table, sont excellents et ont beaucoup d'expérience, mais même eux ne peuvent pas assimiler aussi vite une documentation aussi volumineuse.
Cela étant dit, vous faites plusieurs recommandations. Ainsi, vous proposez que l'article 233 du projet de loi encadre et limite le pouvoir discrétionnaire apparemment sans limite du ministre et le choix des moyens à prendre - c'est-à-dire de quelle manière il poursuivrait le contrevenant.
S'il faut restreindre le pouvoir du ministre, à qui en confieriez-vous le pouvoir ou l'autorité? Je suppose que cela fait partie de la question de savoir qui conseille le ministre en ce qui concerne la procédure et la sélection du processus. Il en va de même pour l'arbitrage. Où iriez-vous chercher les arbitres? Vous avez laissé entendre qu'ils devraient être nommés, non pas par le ministre des Transports, mais par une autre autorité. À quelle autorité songez-vous?
Voilà trois petites questions qui me viennent à l'esprit quand j'examine le projet de loi.
Soit dit en passant, je suis heureux de voir que l'article 15 vous convient, parce qu'il pourrait bien être en vigueur pour deux ans.
M. Bélanger: Pour ce qui est du choix des arbitres, par exemple, le problème que nous voyons, c'est que l'arbitre se prononcera sur une décision du ministre. S'il est nommé par le ministre et que celui-ci peut lui retirer son mandat selon son bon gré, cela semble poser problème. Le conseil des ministres, le ministère de la Justice ou toute autre autorité que leministre - dont la décision serait examinée par le même arbitre - pourrait faire la nomination. C'est donc un point qui nous préoccupe.
Quant au choix des moyens à prendre, nous sommes préoccupés par le fait que, lorsque le régime de sanctions administratives est appliqué, la loi dit que le fardeau de la preuve est allégé et que les règles de la preuve ne s'appliquent plus, et ainsi de suite. Dans le cadre du processus judiciaire, il faut faire la preuve hors de tout doute raisonnable, et les règles de la preuve sont celles qui s'appliquent dans le cadre du processus judiciaire. Selon la qualité de la preuve qu'a en main le ministre, il peut décider d'aller dans un sens ou dans l'autre. S'il n'a pas suffisamment de preuves pour aller devant les tribunaux, il s'en remettra donc aux sanctions administratives. À ce moment-là, il n'aura qu'à prouver la prépondérance des probabilités.
La preuve serait plus facile à faire sous le régime des sanctions administratives que devant les tribunaux. En raison de cela, il faudrait qu'il y ait quelque part des lignes directrices qui disent quand adopter une voie ou l'autre et qui ne laissent pas la décision à la discrétion d'une personne qui sait déjà quelle preuve est exigée dans un cas comme dans l'autre.
Le sénateur Forrestall: Pourriez-vous nous en donner un exemple? Cela pourrait être un problème, et même un problème grave, quand la situation se présente.
Quand j'ai feuilleté les documents, je n'ai pas pensé qu'il pourrait s'agir d'une situation quotidienne. Les probabilités sont assez faibles. Il existe beaucoup de freins et de contrepoids pour l'éviter.
Je ne crois pas avoir sauté des éléments. Pourriez-vous m'indiquer à quel point vous percevez ceci comme un problème dans la marine marchande? Est-ce un problème de taille ou de faible envergure? Est-ce seulement un problème grave quand l'occasion se présente?
M. Bélanger: La question est quelque peu théorique à ce stade-ci parce que le régime n'est pas encore en place. Pour l'instant, nous ignorons ce qui pourrait se produire.
Le sénateur Forrestall: Je comprends qu'à ce stade-ci, ce soit théorique. Par contre, cela ne change rien au processus ou à la procédure, que la loi soit en vigueur ou non. Je me demande à quel point le processus pose problème au départ.
M. Bélanger: Nous ignorons à ce stade-ci ce que prévoira le règlement. Il n'a pas encore été rédigé. Il contribuera peut-être à résoudre une partie du problème. Nous n'en savons rien encore. C'est la grande inconnue.
Le sénateur Forrestall: Y a-t-il d'autres parties du projet de loi qui relèvent de la même catégorie? Est-il difficile d'aller de l'avant tant qu'on ne connaîtra pas le règlement d'application?
Certaines de vos objections semblent très sérieuses, mais vous semblez aussi pinailler un peu, si vous me passez l'expression. Il me semble que vous essayez de vous protéger contre toutes les éventualités qui pourraient se produire, en l'absence de garanties. À quel point vous et la fédération jugez-vous important de voir le règlement ou aurez-vous le droit de participer à l'élaboration du règlement durant la consultation? J'ai l'impression que ce fut tout un processus de consultation. Comme vous le savez, certains d'entre nous s'occupent de ce dossier depuis 20 ans, si ce n'est plus. Je n'en sais pas beaucoup plus maintenant que je croyais en savoir à ce moment-là.
Est-ce un problème en gestation ou est-ce une réalité? Vous seriez plus en mesure de comprendre le projet de loi et de vous en accommoder si vous connaissiez le règlement. Comme vous ne savez pas ce que comportera le règlement, êtes-vous en train d'essayer d'influencer son élaboration?
Mme Legars: En réalité, nous participerons à des consultations à l'étape de la rédaction du nouveau règlement. Nous pourrons faire une contribution et nous serons consultés. Transports Canada nous dit de ne pas nous inquiéter parce qu'on tiendra compte dans le règlement de toutes les préoccupations que nous avons fait valoir.
Nous estimons que le meilleur endroit pour régler les questions est dans la loi parce qu'elle encadre l'activité de l'administration. Nous estimons que la plupart des questions que nous soulevons devraient être réglées dans la loi comme telle plutôt que dans le règlement.
Le sénateur Forrestall: Votre 18e recommandation dit que, dans l'article d'interprétation, il faudrait ajouter une définition générale de «propriétaire» et qu'elle devrait désigner lespropriétaires enregistrés.
Qu'est-ce qui cloche dans la définition actuelle?
Mme Legars: Vous trouverez en réalité ces explications dans notre mémoire. Le mot «propriétaire» revient plusieurs fois dans la loi. Il est l'un des concepts centraux, mais il n'est pas défini. La propriété de bâtiments peut susciter beaucoup decontroverse parfois parce que des bâtiments sont affrétés par des chartes-parties ou encore loués par exemple. Il existe diverses façons d'utiliser un bâtiment ou d'en être propriétaire. L'industrie estime qu'il importe de définir le mot «propriétaire» au sens de la loi, parce que cette notion revient de nombreuses fois dans le texte.
Par exemple, le ministre peut saisir les navires du propriétaire dans un certain nombre de cas. En fait, c'est expliqué en détail dans notre mémoire. Nous devons savoir quelle est la définition de «propriétaire» pour pouvoir déterminer quels sont les autres navires qui appartiennent à ce propriétaire et quels sont ceux que le gouvernement pourrait saisir un jour. Nous aimerions que ce terme soit défini dans le projet de loi pour bien en comprendre la portée exacte.
M. Bélanger: La propriété de bateaux est différente de la propriété de biens. Comme ma collègue vient de le dire, quand on dit dans la loi que le ministre peut saisir le ou un bateau du propriétaire, cette mesure peut avoir une portée très grande ou très restreinte selon la définition du mot «propriétaire». S'il désigne le propriétaire enregistré, c'est une chose. S'il désigne un affréteur ou encore un affréteur à long terme ou à temps, des bateaux n'ayant aucun lien avec cette personne pourraient être saisis. C'est pourquoi nous aimerions que ce terme soit défini dans le projet de loi, ce qui n'est pas le cas actuellement.
Le sénateur Forrestall: Il me semble qu'il est entendu que la propriété est, en fait, liée à celle de la cargaison.
C'est une imposante somme de travail que vous avez réalisée. J'aimerais en parler pendant quelques heures pour voir ce que nous pourrions y découvrir. Pour conclure, cependant, je ne vois rien ici qui laisse entendre que vous vous opposezcatégoriquement à l'ensemble du projet de loi. Le projet de loi est-il un pas en avant et répond-il en général aux besoins de votre industrie du mieux possible dans les circonstances?
M. Bélanger: Tout à fait. C'est un important pas en avant. Le processus de consultation entourant le projet de loi a été exceptionnel. L'industrie est très heureuse de la façon qu'il se présente. Il y a certains aspects que nous aimerions encore faire modifier avant son adoption mais, dans l'ensemble, l'industrie est très heureuse de la façon dont le projet de loi a évolué depuis le début.
Le sénateur Forrestall: Nous espérons tous que le ministre Tobin présentera une politique pour la construction navale, la réparation de bâtiments et l'industrie en général. Le processus de consultation s'est bien déroulé. Je suis très surpris de son ampleur.
Y a-t-il quelque chose dans le projet de loi qui pourrait nuire aux propositions que le ministre Tobin pourrait vouloir formuler d'ici quelques jours - du moins d'ici les prochaines élections peut-être? Quoi qu'il en soit, il est prêt à agir. Je me demande si nous ne devrions peut-être pas savoir ce qu'il va proposer parce qu'il pourrait y avoir certains aspects de la Loi sur la marine marchande qui ont une forte incidence sur ses propositions. Je ne voudrais ni nuire à la loi ni nuire à ses propositions. J'aimerais avoir votre avis là-dessus, si vous voulez bien nous le donner.
[Français]
La présidente: Un rapport a été donné au ministre concernant la construction navale. Le ministre doit étudier le rapport d'abord puis élaborer une politique par la suite. Auriez-vous des commentaires à faire à ce sujet, M. Bélanger?
M. Bélanger: Je ne crois que ce rapport ait une incidence sur la construction navale.
Le sénateur Gill: Vous avez soulevé deux points, le processus des lignes directrices et l'équité des normes. Il me semble que l'industrie maritime soit très différente de l'industrie aéronauti que. Les entrées de fonds ne sont pas les mêmes, les dépenses non plus. Un bateau est toujours à l'eau alors qu'un avion est parfois aussi souvent au sol que dans les airs. La réglementation n'est sûrement pas pareille. Sur quels points ces deux industries se rejoignent-elles?
Mme Legars: Ces deux modes de transport demandent des investissements en capitaux très importants, un personnel très spécialisé, des appareils d'aide technologique à la navigation et autres du même ordre, de parcourir de grandes distances - ce qui comporte des exigences sécuritaires importantes -, etd'importantes infrastructures sur le plan terrestre pour respecter les exigences environnementales. Voilà le parallèle que nous pouvons tracer entre ces deux modes de transport.
Le sénateur Gill: Avez-vous évalué les impacts financiers de la mise en oeuvre? Je sais que la législation est en voie de préparation, cependant, si vous avez établi des comparaisons avec l'aviation, vous devez avoir certaines données statistiques quant à l'impact financier suite à l'application, étant donné que la réglementation aérienne existe déjà. Cela va entraîner une augmentation des effectifs tant gouvernementaux que corporatifs, donc une augmentation des frais de gestion également. Êtes-vous parvenus à évaluer ces conséquences pour vos compagnies?
M. Bélanger: Comme nous ne connaissons pas laréglementation, il est extrêmement difficile d'en évaluer les impacts. Nous ne pouvons spéculer que sur des niveaux maximums.
Pour revenir à votre question antérieure, je vois à l'annexe II qu'une amende s'adresse à une personne physique. Cela voudrait dire quelqu'un qui n'a peut-être pas rempli un ordre d'un agent de sécurité ou quelque chose comme cela. Dans le contexte maritime, l'amende maximum est de 10 000 $ alors que dans le contexte aérien, elle est de 5 000$.
Pourquoi cette différence entre la personne qui n'a pas fait réparer quelque chose sur un avion ou sur un navire? Je serais peut-être porté à croire que cela peut être plus dramatique sur un avion que sur un navire.
Je prends une situation au hasard, mais cela se retrouve partout, dans toutes les infractions. Dans toutes les parties de la loi, les infractions maritimes sont toujours traitées plus sévèrement.
L'infraction de ne pas avoir fait les changements ou les modifications que demande l'inspecteur ne devrait pas être traitée différemment dans les deux cas parce que c'est une infraction concernant le non respect, par exemple, d'un ordre de l'inspecteur sur la sécurité.
Le secteur maritime est un mode de transport très sécuritaire, mais tout à coup, dans une loi, on vient montrer qu'il doit y avoir quelque chose de pas correct avec ce mode puisque toutes les infractions à la loi comportent des pénalités beaucoup plus considérables que les autres modes. On projette donc une image négative de l'industrie en agissant de la sorte. On se demande pourquoi et on s'interroge aussi sur les conséquences des pénalités plus élevées que nos membres devront payer. Par la même occasion, on se demande pourquoi singulariser ce mode qui n'a aucune expérience négative plus considérable que d'autres modes. Il est probablement meilleur, en fait, que l'ensemble des autres modes, alors pourquoi singulariser une industrie de cette façon dans une loi? C'est surtout cet aspect qui dérange l'industrie.
Le sénateur Gill: C'est relatif. Je crois l'ampleur et l'impact de l'industrie maritime, dans son ensemble, plus considérable que l'industrie de l'aviation. En fait, c'est difficilement comparable, il me semble, à cause entre autres de ce que j'ai mentionné tantôt. L'impact n'est pas le même. Vous avez peut-être raison de faire la comparaison, mais je trouve que c'est très différent.
[Traduction]
Le sénateur Finestone: Si j'avais le huitième de l'expérience de l'honorable sénateur Forrestall, je pourrais peut-être poser une question intelligente.
Le sénateur Spivak: C'est un vieux loup de mer.
Le sénateur Finestone: Je suis peut-être vieille, mais pas loup de mer; je ne m'y connais donc pas beaucoup en la matière.
Je me rends compte quand je lis un mémoire comme le vôtre, qui est complexe et détaillé - et j'ai eu exactement une heure pour en prendre connaissance - qu'il n'est pas facile de poser des questions intelligentes. Je peux en poser sur des sujets qui me semblent être préoccupants.
Vous représentez 320 entreprises de toute nature, des paquebots de croisière aux navires qui transportent des marchandises, en Afrique, en Méditerranée, en Europe et en Asie. Vous êtes partout dans le monde et vous dites que la définition de propriété pose un problème. Si j'étais un propriétaire, même à l'extérieur du Canada, je voudrais savoir ce qu'on entend par propriété. Comme Canadien, je voudrais savoir clairement ce qu'il en est si je transportais des marchandises sur le bateau de quelqu'un d'autre. Ce n'est pas clair.
D'abord, je voudrais savoir comment la définition pourrait être clarifiée et, ensuite, quelle personne le ministre devrait-il nommer pour se faire conseiller sur les lignes directrices, les règles, les lois et les règlements?
Quelles lignes directrices sur la sécurité devrions-nous prendre pour préserver la réputation du Canada, des expéditeurs, des employés et des passagers canadiens?
M. Bélanger: Au sujet de la définition de propriétaire, nous aimerions que le projet de loi précise comment Transports Canada définit ou définirait ce terme conformément aux transactions financières et aux contrats de location. Les responsabilités de chaque partie sont définies dans les contrats, et d'autres documents. Le problème ne réside pas là.
Pour vous donner un exemple, qu'est-ce que Transports Canada veut dire quand il indique que le ministre peut saisir un bateau appartenant au même propriétaire que le bateau qui a commis l'infraction? Qu'est-ce que cela veut dire? Est-ce un bateau que le propriétaire a immatriculé à son nom dans un registre quelque part dans le monde?
Le sénateur Finestone: Parle-t-on d'un bateau qui pourrait être enregistré en Libye?
M. Bélanger: Est-ce un bateau libyen, panaméen, canadien ou bahamien, est-ce un bateau affrété à long terme ou à court terme?
Supposons qu'un des bateaux dont je suis propriétaire a commis une infraction lors d'un précédent voyage au Canada et que le premier bateau à venir au Canada par la suite est un bateau qui ne m'appartient pas mais dont je suis responsable. Le ministre saisit le bateau croyant qu'il m'appartient parce que je l'ai affrété. Comme le projet de loi ne définit pas le terme propriétaire, il faudra faire appel aux tribunaux pour savoir si la définition de propriété s'applique dans le cas de ce bateau, mais cette définition n'existe pas. Dans certains cas, je peux être considéré comme le propriétaire du bateau parce que je l'ai affrété pour faire un voyage mais, dans d'autres cas, je ne le serais pas.
Au lieu de discuter de l'infraction ou du problème, nous allons discuter de la définition de propriété. Pourquoi ne pas définir cette notion dans le projet de loi? Voulons-nous que la propriété ou le propriétaire enregistré soit un propriétaire tel que défini dans le projet de loi? Si c'est le cas, indiquons-le clairement.
Le sénateur Finestone: Quel est le rôle du capitaine sous l'autorité duquel l'infraction a été commise?
M. Bélanger: Tout dépend de la situation. Certaines infractions sont attribuables au capitaine et d'autres sont attribuables au propriétaire en raison de situations qui peuvent échapper au capitaine.
Le capitaine gère le navire. Certaines responsabilités relèvent de lui mais d'autres incombent au propriétaire. Il y a des responsabilités assumées par l'affréteur à long terme, l'affréteur à court terme et le capitaine. Il y a plusieurs parties en cause. Je suis dans le domaine depuis deux ans et je ne connais pas toutes les règles. La propriété est une question complexe.
Le sénateur Finestone: Cette définition ne devrait-elle pas figurer dans le règlement, plutôt que dans la loi?
Mme Legars: Nous pensons qu'il est important qu'elle figure dans la loi parce que c'est la loi qui est invoquée par les tribunaux dans le domaine maritime. Par exemple, la Cour fédérale du Canada a déjà fait référence à la Loi sur la marine marchande du Canada pour déterminer qui était propriétaire. D'après cette loi, le propriétaire est le propriétaire enregistré. La Cour fédérale du Canada s'est fondée sur cette définition et l'a invoquée dans une cause.
Le sénateur Finestone: Il n'est pas nécessaire de comprendre toute la complexité de la question, parce que je ne suis pas une initiée, pour vous poser la question suivante: si la propriété est un domaine aussi compliqué que vous le dites, monsieur Bélanger, et si elle n'est pas définie dans la loi, madame, l'avez-vous signalé aux responsables pendant les consultations qui, d'après vous, se sont très bien déroulées et vous ont tous satisfaits? Pourquoi venez-vous nous dire aujourd'hui que cela va causer de graves problèmes et entraîner des pénalités bien différentes par rapport aux autres modes de transport au Canada? Que vous a-t-on répondu quand vous avez signalé la chose? A-t-on jugé que ce n'était pas assez important pour s'en préoccuper ou a-t-on proposé de régler la question dans le règlement? Vous a-t-on ignoré?
Mme Legars: Pour ce qui est des différentes pénalités, on a dit que nous parlions seulement des pénalités maximales, ce qui ne s'appliquait pas dans tous les cas, et que le tribunal imposerait la plus élevée prévue par la loi.
Nous avons parlé de la propriété à quelques reprises. Je ne sais pas si nous nous sommes mal expliqués, mais on n'a pas jugé nécessaire de reprendre la définition actuelle, ce que nous demandons.
Le sénateur Finestone: Il y a une définition dans la loi actuelle?
M. Bélanger: Dans la loi actuelle, on définit le «propriétaire enregistré». C'est clair, tout le monde sait ce qu'on entend par propriétaire en vertu de la loi.
Le sénateur Finestone: N'avez-vous pas demandé pourquoi on avait changé la définition?
M. Bélanger: Nous l'avons demandé bien des fois, mais cela n'a pas attiré attention.
La présidente: Vous n'avez pas obtenu de réponse.
M. Bélanger: Non.
Le sénateur Finestone: Quand ils ont étudié le projet de loi, les membres du comité permanent de la Chambre des communes ne vous ont pas posé des questions sur la propriété?
M. Bélanger: On ne nous en a pas posé. Nous en parlions dans notre mémoire, mais on ne nous a pas posé de questions là-dessus.
Le sénateur Finestone: Si vous n'en parliez pas dans votre mémoire, est-ce maintenant très important à ce stade avancé du processus?
M. Bélanger: Non, madame le sénateur, nous en parlions dans notre mémoire.
Le sénateur Finestone: Franchement, je trouve que c'est très déroutant. Je n'ai pas l'expérience nécessaire pour approfondir la question mais votre témoignage et votre mémoire, avec ses annexes, me préoccupent. On parle d'un million de dollars plutôt que 200 000 $ comme cela est prévu dans la Loi sur les chemins de fer, alors qu'un déversement de pétrole dans la région de Mississauga en Ontario qu'il survienne sur la voie ferrée ou en mer me semble causer autant de dommages à l'environnement, à la santé et à la propriété. Pourquoi l'amende est-elle si différente? Je ne sais pas. Avez-vous soulevé la question d'argent?
M. Bélanger: Oui.
Le sénateur Finestone: C'est la décision éclairée du ministère et du ministre qui a présenté le projet de loi. Le projet de loi vous satisfait-il toujours?
M. Bélanger: Bien...
La présidente: M. Bélanger a dit que c'était un pas en avant, pas qu'il était satisfait du projet de loi.
Le sénateur Finestone: S'il se fait imposer une amende d'un million de dollars plutôt que de 200 000 $ comme c'est le cas dans l'industrie ferroviaire, je ne pense pas qu'il sera très heureux.
En droit maritime international, on dit qu'une fois qu'unnavire est sorti des eaux territoriales - c'est-à-dire qu'il se trouve à 40 milles du littoral - il n'est plus assujetti à la loi du pays. Cependant, le tribunal international a rendu une décision dans un dossier chaud, peut-être présenté par Brian Tobin au sujet du poisson, je n'en suis pas certaine. Le tribunal a statué que le droit du pays s'appliquait même à l'extérieur des eaux territoriales.
Ces modifications et règles s'appliquent-elles aux navires conformément aux décisions du tribunal international?
Mme Legars: Je dois examiner la question.
Le sénateur Finestone: Vous pourriez peut-être nous envoyer vos observations. Cela vous donnera le temps d'examiner la question.
Le sénateur Spivak: Il me semble que c'est du ressort du droit administratif. Je me demande comment on peut rapprocher cela du droit administratif dans le sens où peut-être pas toutes mais certaines de vos demandes pourraient, d'après moi, être réglées par voie de règlement. Je me demande si vous ne pensez pas que la consultation pour le règlement peut être très importante pour vous.
M. Bélanger: Je suis sûr que vous avez raison. Il reste que nous ne savons pas actuellement quel sera le règlement. Chaque fois que nous réagissons à un projet de loi, nous ne savons jamais quel sera le règlement. Nous ne savons pas si nous serons en mesure de corriger certains des problèmes perçus une fois que le règlement sera rédigé et adopté. Il y a sûrement un élément d'incertitude qui influence certaines de nos revendications.
Le sénateur Spivak: Nous avons très souvent affaire à des règlements tenant lieu de loi. J'estime que les parlementaires devraient pouvoir modifier les règlements, mais ce n'est pas encore le cas. Il y a tant de choses qui se font après l'adoption de la loi.
Il serait utile, selon moi à tout le moins, que vous nous fassiez part par écrit des recommandations que vous estimez être d'une part à caractère réglementaire et d'autre part à caractère législatif. Ce serait très utile.
Je suis toujours surprise de voir combien souvent, dans les mesures législatives, revient la perquisition et saisie. Elle revient dans bon nombre de mesures législatives. Je croyais, à tort je suppose, que la perquisition et saisie avait été enterrée, avec ou sans mandat. Pouvez-vous me dire si, dans cette mesure législative, les dispositions relatives à la perquisition et à la saisie se démarquent grandement de celles d'autres mesures législatives? Ces dispositions reviennent très souvent. C'est une question qui relève de la Charte des droits et libertés.
Mme Legars: Nos membres ont exprimé des réserves au sujet de la perquisition sans mandat. Nous avions un peu peur «des interrogatoires à l'aveuglette», si je peux utiliser cette expression. C'est la raison pour laquelle ils voulaient le genre d'amendement que nous avons proposé. On y a recourt uniquement en cas de danger imminent ou d'urgence, afin de s'assurer qu'elle se limiterait à ces cas. De mémoire je ne peux dire ce qu'il en est dans d'autres régimes. Si vous voulez, je peux vous fournir une réponse.
Le sénateur Spivak: Ce serait intéressant de nous renseigner là-dessus parce que la perquisition et saisie revient très souvent.
Cela s'applique bien sûr aux navires de pêche. Jusqu'à maintenant un mandat a-t-il été nécessaire pour monter à bord des navires à la recherche de prises illégales ou que sais-je encore?
Mme Legars: Nous ne représentons pas les navires de pêche. Nous représentons les bateaux océaniques et les navires de croisière internationaux.
Le sénateur Spivak: Les navires de pêche ne relèvent-ils pas de la Loi sur la marine marchande du Canada?
Mme Legars: Oui, mais nous ne les représentons pas.
Le sénateur Spivak: Il s'agit de mes questions portant sur des questions administratives.
Pour ce qui est de l'annexe, je remarque qu'elle comporte un dossier comparatif de la prévention de la pollution. Ces comparaisons à l'annexe III se fondent-elles uniquement sur les notes en bas de page? Sont-elles aussi généralement reconnues par l'entremise d'organismes gouvernementaux? Sur quels documents vous êtes-vous fondés pour préparer ce tableau à part les sources mentionnées dans les notes en bas de page?
Mme Legars: Ce sont des faits qui sont bien reconnus parmi les intervenants de l'industrie des transports. C'est un fait reconnu que le transport maritime a moins d'émissions et de polluants et possède le meilleur dossier en matière de sécurité. J'ai essayé de préparer un tableau. Ma tâche n'a pas été facile parce qu'il s'agit d'un fait reconnu. Il en est fait mention dans toutes sortes de rapports publics et autres documents du même genre.
Le sénateur Spivak: N'y a-t-il pas beaucoup d'écritslà-dessus?
Mme Legars: Les derniers renseignements que j'avais et qui pouvaient être utilisés provenaient de statistiques sur le transport en Amérique du Nord. Il existe des dossiers comparatifs de sécurité. Les États-Unis, le Canada et le Mexique rassemblent également des statistiques intergouvernementales. Ils n'avaient pas les mêmes chiffres en ce qui a trait à la pollution. J'ai dû les sortir. Le dernier rapport sur le sujet remonte à novembre 2000. Il a été préparé par la SODES.
Le sénateur Spivak: Il n'est pas question des eaux de ballast ici. J'aimerais savoir ce que vous pensez des eaux de ballast et du contrôle d'application prévu dans cette mesure législative.
Mme Legars: Dans le mémoire que nous avons présenté au comité de la Chambre des communes, nous traitions de l'eau de ballast qui fait l'objet d'une disposition dans la mesure législative. Nous avons dit que nous souscrivions à l'approche prise dans la mesure législative. J'ai essayé de simplifier le très volumineux mémoire que nous avons présenté au comité de la Chambre des communes afin de vous faciliter la tâche. J'en ai retiré les parties qui appuyaient l'approche législative.
Le sénateur Spivak: Nous aimerions le voir.
M. Bélanger: L'industrie, et notre groupe et les transporteurs intérieurs, de même que l'Association des armateurs canadiens ont demandé à Transports Canada de prendre un règlement pour régir la gestion de l'eau de ballast. Nous sommes allés plus loin. Nous avons demandé d'ajouter dans le projet de loi C-14 une disposition précise à cet égard. On nous a répondu que la mesure législative proposée conférait suffisamment de pouvoirs au ministre à cet égard. Nous leur avons alors dit qu'ils devraient prendre la chose au sérieux et prendre un règlement sur le sujet. Nous sommes d'avis que le Canada devrait probablement donner l'exemple en publiant peut-être un règlement sur la gestion et le contrôle de l'eau de ballast afin d'empêcher l'introduction et la prolifération des espèces allogènes, plus particulièrement.
Nous croyons que des règlements seront pris à cet égard.
Le sénateur Spivak: C'était louable. Comme vous le savez, l'introduction d'espèces exotiques est une des plus grandes menaces à l'environnement. Ce n'est pas toujours reconnu, mais c'est une grave menace. Ce serait le règlement que vous proposeriez.
Cette mesure législative s'applique-t-elle aux pétroliers? Les représentez-vous? Que pouvez-vous me dire au sujet des doubles coques? Quelle est la situation? Nous avons à l'heure actuelle des pétroliers à double coque, n'est-ce pas? Ne croyez-vous pas que la garantie de millions de dollars s'impose tout à fait dans le cas de déversements de pétrole et que c'est le minimum?
M. Bélanger: Il y a une différence entre la garantie et les coûts de nettoyage. C'est l'amende qui en résulte. Le coût du nettoyage est une autre question.
Le sénateur Spivak: La garantie est une mesure préventive. Nous préférerions la prévention aux coûts de nettoyage.
Qu'en est-il des doubles coques?
Mme Legars: Les navires et pétroliers internationaux qui viennent au Canada ont déjà des doubles coques. Cela est prévu dans les conventions internationales. Quant aux simples coques qui restent, il s'agirait de petits pétroliers canadiens qui font du transport côtier de pétrole provenant des raffineries. Les pétroliers internationaux ont tous une double coque.
Le sénateur Spivak: Avec un peu de chance nous ne vivrons pas de nouveau la catastrophe de l'Exxon Valdez.
Mme Legars: Avec un peu de chance, non.
Le sénateur Adams: Vous avez dit que les amendes allaient augmenter. Je viens du Nord. Tout ce que je possède et que j'envoie par bateau, je l'assure. Dans quelle mesure les compagnies d'assurance seront-elles touchées? Les tarifsd'assurance vont-ils augmenter pour les propriétaires de navires? Si les amendes augmentent, est-ce qu'il en ira de même pour les tarifs d'assurance? Est-ce que cela a quelque chose à voir avec les polices d'assurance?
Mme Legars: Je ne croirais pas. Tous les naviresinternationaux sont déjà assurés avec une couverture protection et indemnisation. Ils ont déjà une protection énorme, une protection générale dans la plupart des cas. Je ne dirais pas que cela aurait un impact.
[Français]
La présidente: Je vous remercie, pour vos informations. Nous aimerions que vous nous fassiez parvenir les réponses aux questions du sénateur Finestone, tel que convenu.
Mme Legars: J'en ai noté quelques-unes dont lesrecommandations que l'on mettrait dans le volet législatif versus le volet réglementaire et les comparaisons avec les autres régimes.
La présidente: Il ne faut pas hésiter à les faire parvenir au greffier. Je les ferai distribuer à l'ensemble des membres du comité pour qu'ils en prennent connaissance. Merci de l'effort que vous avez fait de nous expliquer davantage votre présentation.
[Traduction]
Notre prochain témoin représente l'Association canadienne des manufacturiers de produits nautiques. Nous vous souhaitons la bienvenue, monsieur Currie. Nous allons vous écouter et je suis convaincu que mes collègues vous poseront ensuite des questions.
M. J.A. (Sandy) Currie, directeur général, Association canadienne des manufacturiers de produits nautiques:Bonjour. Je vous remercie au nom de notre association et des utilisateurs de services nautiques de l'occasion que vous nous offrez de nous entretenir avec vous ce matin. Nous vous avons déjà fait parvenir une trousse d'information. Plutôt que de passer au travers page par page, j'aimerais en faire ressortir les points saillants et m'y attarder. Vous pourrez ensuite nous mitrailler de questions.
Premièrement, un bref historique. Notre association a été créée en 1993 et regroupe 75 membres. Même si nous sommes loin de compter autant de membres que le groupe précédent, nous représentons les entreprises qui fabriquent et distribuent la presque totalité de tous les produits qui sont utilisés par les plaisanciers dans ce pays. Cela inclut les embarcations, les moteurs, les remorques pour bateaux et une gamme d'accessoires et de produits électroniques, y compris l'équipement de sécurité et le matériel de navigation. Même si ne comptons pas nécessairement beaucoup de membres, nous représentons un certain nombre d'entreprises qui fabriquent un large éventail de produits.
J'aimerais que nous récapitulions ce qu'on entend parnavigation de plaisance au Canada. Decima Research a procédé récemment à un sondage pour le compte de notre association. Les résultats confirment ce que nous savions déjà à savoir que presque 20 p. 100 des ménages au Canada possèdent un bateau et que de ce nombre, plus de la moitié possèdent plus d'un. Nous n'avons pas nécessairement déterminé de quel genre d'embarcations il s'agissait, mais nous savons maintenant qu'il y e a beaucoup.
Nous avons aussi découvert que 19 autres pour cent de ménages canadiens envisageraient de s'adonner à la navigation de plaisance si les circonstances ou les produits leur étaient bien présentés. Nous en venons donc à la conclusion que l'industrie a une occasion incroyable d'accroître le nombre d'embarcations utilisées par les plaisanciers au cours des prochaines années. À l'heure actuelle, il y a environ 2,7 millions de bateaux de plaisance en tous genres au Canada. Nous avons récemment pris des mesures pour lancer un programme de commercialisation qui, nous l'espérons, doublera en fait ce nombre au cours des dix prochaines années. Notre exposé d'aujourd'hui s'attache à l'avenir, à la sécurité et ainsi de suite.
J'aimerais vous entretenir ce matin de deux points importants, à savoir la sécurité et l'application logique de la réglementation en ce qui a trait aux secteurs de la fabrication, de la distribution et des services.
Ce qui nous inquiète pour l'instant en ce qui a trait au contrôle d'application, c'est la possibilité de nous retrouver avec deux régimes de réglementation différents pour les embarcations au Canada. Nous pourrions en fait comparer cette situation à celle qui prévaudrait sur nos routes s'il existait un code de la route distinct pour les voitures et pour les camions de même que les autobus. Nous roulons tous sur la même route en suivant des codes différents. Les plaisanciers y voient un problème d'envergure. Nous ne voyons pas d'un très bon oeil l'adoption d'un régime distinct. Nous vous exhortons à prendre des mesuresimmédiatement pour empêcher que cela se produise.
Nous craignons également que cela nuise au contrôled'application. Cela pourrait également compromettre gravement la sécurité sur nos voies navigables. Certains des règlements, surtout ceux applicables aux abordages, à l'heure actuelle, s'appliquent aussi à la flotte canadienne d'embarcations de plaisance, mais ceux qui seront chargés de l'application des nouveaux règlements seront aux prises avec une nouvelle situation et la confusion régnera en ce qui a trait à la perception des amendes.
Pour ce qui est de l'application des lois et règlements, selon Transports Canada il existe à l'heure actuelle dans le registre d'immatriculation près de 1 700 gros navires au Canadadont 536 appartiennent à l'État. Cela signifie qu'il y aenviron 1 200 autres navires commerciaux comparativementà 2,7 millions de bateaux de plaisance. En outre, 44 000 autres embarcations sont immatriculées au Canada, ce qui inclut un certain nombre de bateaux de plaisance. Il faut ajouter à cet inventaire quelque 24 000 bateaux de pêche commerciale. Nous en venons à la conclusion que les flottes tant de navires commerciaux que de bateaux de pêche n'équivalent probablement qu'environ 5 p. 100 de la flotte d'embarcations de plaisance.
Il est possible que Transports Canada réussisse à gérer la partie II du projet de loi en ce qui concerne à peuprès 1 200 transporteurs de même que les bateaux de pêche et plus petites embarcations commerciales, mais nous estimons que d'un point de vue pratique il serait impossible à Transports Canada de le faire pour les embarcations de plaisance. Cela peut paraître étrange mais quels sont les motifs de notre position? Le fait est que Transports Canada n'a qu'environ 400 employés à temps plein qui s'occupent du secteur nautique. Ils éprouvent des difficultés à l'heure qu'il est à s'occuper de la flotte commerciale. Je ne veux pas dire par là qu'ils ne font pas du bon travail, mais ils éprouvent des difficultés. Imaginez ce qui va se passe si l'on ajoute 2,7 millions d'embarcations de plaisance. Voilà qui peut créer un grave problème qui mènera à des compromis en matière de sécurité.
L'adoption de cette proposition, qui a pour but de permettre à Transports Canada d'appliquer les règlements en vigueur, se traduira par la création de normes d'application et de sanctions différentes et ce, au détriment de la sécurité. À notre avis, il serait préférable que les agents de police qui sont actuellement chargés d'appliquer la Loi sur les contraventions et les règlements régissant la flotte d'embarcations de plaisance reçoivent aussi le mandat d'appliquer les règlements s'appliquant aux navires commerciaux. On devrait par ailleurs reconnaître plus clairement dans la loi proposée l'aptitude des autorités policières à appliquer les règlements en vigueur à tous les navires. C'est ce qu'on recommande.
Ces autorités sont présentes sur les voies navigables et sont capables de traiter les délits sur-le-champ. En outre, elles peuvent appliquer tous les règlements, quel que soit le type de navire. Transports Canada n'a, dans les faits, aucune présence visible sur les eaux, le ministère ne possédant aucun navire. Il procède à des inspections sur rendez-vous, alors que les policiers, eux, sont en mesure d'intervenir sur appel ou quand une infraction est commise.
À ces préoccupations vient s'ajouter le fait qu'il y a eu peu de consultations publiques au sujet du concept du tribunal d'appel. Ce n'est que récemment que Transports Canada a reconnu que cette proposition aura une incidence sur les navigateurs de plaisance. Nous sommes donc d'avis que cette approche, aussi bien intentionnée soit telle, ne convient pas, dans sa forme actuelle, aux navigateurs de plaisance. Nous préférons de loin le régime de contravention que prévoit la Loi sur les contraventions.
Nous nous préoccupons aussi sérieusement du transfert proposé à la catégorie commerciale d'un nombre important de navires tombant sous la désignation d'embarcations de plaisance. Ce changement nous paraît non seulement inutile, mais il se traduira par une grande confusion quant à la désignation de ces navires qu'il est impossible de distinguer des millions d'embarcations de plaisance avec lesquelles ils naviguent.
Un tel changement provoquera le chaos. Nous nous demandons comment un agent de police pourra faire la distinction entre un bateau commercial et une embarcation de plaisance. Ils seront identiques en apparence, seront utilisés de la même façon, vont sans doute faire la même chose, mais il sera impossible pour un agent de police de les distinguer les uns des autres. Précisons aussi que de nombreux navires classés dans cette catégorie changent souvent de vocation, passant successivement de l'usage récréatif à l'usage commercial. La question est complexe.
Transports Canada a indiqué à plusieurs reprises que tout usage commercial, même s'il est de courte durée, nécessitera que le navire et son équipage se conforment aux normes commerciales.
Nous sommes d'avis que les utilisateurs d'embarcations de plaisance sont présentement plus réglementés, par le biais de la carte d'utilisateur d'embarcations de plaisance, que les exploitants de bateaux commerciaux pour lesquels il n'existe aucune exigence en matière de formation de l'utilisateur.
On m'a demandé d'aborder un aspect du projet de loi qui ne relève pas vraiment de ma compétence, soit la disposition qui exige que les marinas et les points de vente de carburant soient considérés comme des installations de manutentiond'hydrocarbures. La plupart des plaisanciers vont s'arrêter ou faire escale à une marina s'ils ne naviguent pas sur un plan d'eau qui est relié à un autre plan d'eau plus important, afin de se ravitailler en carburant et d'acheter d'autres produits pour leur bateau ou chalet.
Les entreprises pétrochimiques ont considérablement réduit la quantité de carburant qu'elles vendent aux exploitants de marinas. De nombreux grossistes refusent maintenant de vendre de l'essence et du diesel aux exploitants dont la marina est située au bord de l'eau. Ce n'est pas parce que les exploitants de marinas ne font pas du bon travail, mais plutôt parce que les entreprises pétrochimiques n'aiment pas emprunter des routes poussiéreuses pour livrer leur produit. L'essence se fait donc plus rare.
Si vous assimilez les marinas ou les yacht-clubs qui vendent actuellement de l'essence aux plaisanciers à des installations de manutention d'hydrocarbures, le yacht-club ou la marina qui vend littéralement quelques milliers de gallons d'essence par année se trouvera assujetti aux mêmes dépenses et règlements qu'une raffinerie ou une importante installation de manutentiond'hydrocarbures.
Les marinas, dans bien des cas, vont cesser de vendre de l'essence. Les plaisanciers vont alors commencer à transporter de l'essence dans le coffre de leur voiture ou dans une fourgonnette et ce, jusqu'au quai ou à la plage, pour ensuite le verser dans un bidon ou un autre contenant. Cette façon de faire augmentera sans doute le nombre d'accidents, accidents qui, nous l'espérons, se limiteront au déversement de carburant dans l'eau. Nous n'encourageons pas les plaisanciers à transporter de l'essence dans des bidons jusqu'au quai. Toutefois, c'est ce qui va se produire s'ils ne peuvent pas se ravitailler aux marinas en raison des nouveaux règlements.
Dans le pire des scénarios, il y a aura un incendie et quelqu'un sera blessé ou tué, ce que personne ne souhaite. Comme les marinas sont régies par les règlements provinciaux en matière de manutention du carburant, nous demandons que cette définition soit révisée pour en exclure les marinas et les yacht-clubs privés. Autrement, les choses risquent de se compliquer.
Par ailleurs, les plaisanciers se servent du registre sur les petits bâtiments pour y inscrire leur embarcation de plaisance et enregistrer les bateaux qui sont hypothéqués. Or, le projet deloi C-14 semble vouloir empêcher les plaisanciers de se servir du registre, ce qui risque, encore une fois, de créer des problèmes. Les consommateurs seront obligés d'avoir recours à d'autres moyens pour vérifier le titre de propriété s'ils veulent acheter un bateau usagé. En outre, cela ne fera que compliquer inutilement le travail des personnes qui essaient d'immatriculer leur bateau en vue de prendre le large.
Comme l'a dit plus tôt le représentant des propriétaires de bateaux commerciaux, le fait d'inscrire un bâtiment dans un registre national vous permet d'identifier clairement le propriétaire du bateau. Le propriétaire d'une embarcation de plaisance qui habite Ottawa et qui désire se rendre aux Bahamas risque d'avoir des problèmes s'il quitte les eaux canadiennes. Nous risquons nous aussi d'avoir des problèmes si ce service est supprimé. Cette mesure n'aura pas nécessairement d'impact sur les membres de notre association qui souhaitent vendre leur bateau, sauf qu'elle risque à la longue de compliquer les choses pour les consommateurs.
La partie 10 du projet de loi C-14 traite des embarcations de plaisance, des vendeurs et de divers règlements. Nous aimerions vous parler des plaques de capacité et des plaques dites de constructeur. Mes observations à ce sujet figurent à la page 10 du mémoire.
En résumé, cette question soulève deux problèmes. D'abord, il y a des dizaines de milliers de bateaux au Canada qui sont tout à fait sécuritaires, mais qui ne sont pas munis de plaques. Ils ont été construits au Canada, par des fabricants légitimes, ou encore à l'étranger, sauf qu'ils n'ont pas de plaques.
L'Association recommande que l'on applique aux navires existants une clause de droits acquis les excluant ainsi de l'obligation d'obtenir des plaques de façon rétroactive. Pour l'instant, les fabricants peuvent présenter une demande en vue d'obtenir des plaques. Les consommateurs aussi peuvent le faire. Le processus est en train d'être simplifié, sauf qu'il doit l'être davantage. Le fait d'obliger les propriétaires de bateaux plus âgés d'obtenir des plaques risque soit de mobiliser toutes les ressources de la Garde côtière, soit de provoquer le chaos du côté des fabricants de bateaux. Je m'explique.
Le propriétaire d'une petite embarcation peut obtenir une plaque auprès de la Garde côtière. Le processus est assez simple, mais imaginez ce qui arriverait si la Garde côtière recevait 400 000 demandes pour des bateaux plus âgés, sachant le manque de ressources financières du Bureau de la sécurité nautique. Il arrive pour l'instant à répondre à la demande, délivrant entre 65 000 et 75 000 plaques par année.Je n'ose penser à ce qui arriverait s'il était obligé d'absorber 400 000 demandes de plus.
Les modalités dans le cas des fabricants sont différentes et assez compliquées en ce sens qu'elles exigent le dépôt d'un document signé par une personne qui réside au Canada et qui occupe un poste de direction au sein de l'entreprise. Les fabricants canadiens peuvent satisfaire à cette exigence, ce qui n'est pas le cas des fabricants étrangers, en raison surtout du critère de résidence. Voilà pourquoi il y a tellement de bateaux au Canada qui ne sont pas munis de plaques. On peut construire des bateaux sécuritaires en fonction de diverses normes internationales qui peuvent être approuvées par la Garde côtière américaine ou par un organisme national dans un pays autre que les États-Unis. Toutefois, les fabricants de ces bateaux ne peuvent obtenir des plaques de la Garde côtière canadienne parce qu'ils n'ont pas d'employé qui réside au Canada ou de directeur qui vit ici.
Nous demandons que cette disposition soit clarifiée. Il y a de nombreux fabricants, américains et autres, qui souhaitent se conformer à ce règlement, mais qui ne peuvent le faire. Ils remplissent les formulaires, soumettent les renseignements requis et reçoivent le feu vert de la Garde côtière, mais ils ne peuvent afficher de plaques sur ces bateaux en raison de cet obstacle administratif, obstacle qui doit être éliminé. Il sera ainsi plus facile pour les fabricants d'obtenir des plaques, et pour le consommateur de s'assurer qu'il achète un bateau sécuritaire. Au bout du compte, la plaque émise par la Garde côtière m'indique, en tant que consommateur, que le bateau a fait l'objet d'une vérification et qu'il est sécuritaire. Nous devons trouver un moyen d'éliminer cet obstacle.
Voilà qui termine mon exposé. J'ai, en fait, résumé l'exposé que nous avons présenté au Comité des transports de la Chambre des communes. Nous sommes plutôt déçus de sa réponse. Nous espérons que comité-ci examinera la situation de façon objective, qu'il formulera des recommandations à la Chambre descommunes, recommandations qui permettront peut-être de modifier le projet de loi.
Au nom des membres de l'Association, je tiens à vous remercier de nous avoir donné l'occasion de présenter cet exposé.
Le président: Vous dites à la page 7 de votre mémoire que:
Transports Canada n'a aucune présence visible sur les eaux canadiennes qui lui permette d'appliquer les règlements en vigueur. L'adoption de cette proposition se traduira par la création de normes d'application et de sanctions différentes et ce, au détriment de la sécurité de la navigation sur nos voies navigables partagées.
Pouvez-vous me dire ce que vous entendez par cela?
M. Currie: Oui. Je ne veux pas être négatif, mais si vous me le permettez, je vais utiliser, comme moyen de comparaison, l'exemple d'un désastre pour vous expliquer ce que j'entends par cela. Une enquête de coroner a été ouverte à Tobermory, en Ontario, suite au décès l'an dernier de deux enfants d'école qui se trouvaient à bord d'un bateau d'excursion. D'après plusieurs articles de journaux, le bateau présentait des défaillances, ce qui veut dire qu'il y avait des lacunes dans le système d'inspection.
Voici le problème auquel nous sommes confrontés. Si la Police provinciale de l'Ontario, par exemple, avait le pouvoir d'inspecter ce bateau sur la rampe de mise à l'eau, elle aurait ainsi une certaine visibilité. Si elle en avait eu le pouvoir dans ce cas-ci, elle serait montée à bord du bateau afin de l'inspecter.Transports Canada dispose d'un système d'inspection sur terre ou, si vous voulez, d'un système d'inspection sur rendez-vous. Il communique par téléphone avec le propriétaire du bateau et lui dit: «Nous aimerions fixer un rendez-vous pour inspecter le bateau.» Je ne cherche pas à laisser entendre qu'un propriétaire pourrait «s'arranger» pour faire en sorte que le bateau réponde aux normes. Toutefois, les services d'inspection sur l'eau qu'assure la police maritime sont nettement supérieurs à ceux qu'offre Transports Canada, et plus complets.
Par ailleurs, Transports Canada ne possède pas,malheureusement, de bateaux. Il concentre ses activités sur les côtes de l'Atlantique et du Pacifique et dans les Grands Lacs. À mon avis, il aurait sans doute beaucoup de mal à effectuer une inspection sur le lac des Bois. Il ne serait pas capable d'effectuer une inspection sur le lac Sylvan, près de Red Deer, en Alberta. Il n'a pas les ressources voulues pour le faire.
La GRC, la SQ au Québec, la police maritime de Halifax et de Vancouver sont, de manière générale, présentes sur l'eau tous les jours. Voilà pourquoi nous souhaitons que l'application des règlements soit assurée par ces organismes et par Transports Canada, et non pas exclusivement par ce ministère.
Le président: Est-ce que les hauts fonctionnaires du ministère vous ont consulté au sujet du projet de loi?
M. Currie: Nous les avons rencontrés à plusieurs reprises, tout comme l'ont fait d'autres associations. Est-ce que la consultation a été aussi fructueuse que nous l'aurions souhaité? Honnêtement, non. On peut parfois convoquer une réunion, exposer clairement notre position et sortir de là avec l'impression, dans bien des cas, que nos préoccupations ont été prises en compte, ou que nous nous sommes entendus sur un point particulier. Malheureusement, ce qui semble se produire, c'est que, une fois la réunion terminée, ou une fois le projet de loi déposé, on constate que nos préoccupations n'ont pas été prises en considération. Voilà pourquoi nous avons de la difficulté à accepter le transfert à la catégorie commerciale d'un certain nombre d'embarcations de plaisance. Nous avions convenu que ce transfert ne se ferait pas. Or, nous avons constaté le contraire quand le projet de loi a été déposé. Voilà le genre de problèmes auxquels nous sommes confrontés.
Le président: A-t-on tenu compte de certaines de vos préoccupations dans le projet de loi?
M. Currie: En toute honnêteté, pas vraiment.
Le président: Vous a-t-on expliqué pourquoi?
M. Currie: Non. À la fin de notre exposé au comité permanent de la Chambre des communes, un des membres du comité a dit, «merci beaucoup d'être venu, mais je ne sais pourquoi vous vous êtes dérangé», ce qui était fort étonnant. Je suis Canadien. J'ai confiance en notre système. J'ai toutefois été très déçu de voir que, même si on nous donnait l'occasion d'exposer vos vues sur la question, personne ne nous écoutait.
Le président: Avez-vous eu l'occasion de rencontrer certains fonctionnaires du ministère?
M. Currie: Nous entretenons de bons rapports avec le directeur général responsable de la sécurité maritime et autres membres de son personnel. Je ne sais pas qui prend les décisions. Je ne veux pas donner à entendre que le ministre ou son personnel sont nécessairement responsables de la situation. Nous avons discuté ensemble de la définition d'embarcation de plaisance. Or, la définition sur laquelle nous nous sommes entendus est totalement différente de celle qui figure dans le projet de loi.
Le sénateur Spivak: Monsieur Currie, vous savez sans doute que les règlements, dans de nombreux cas, ne sont pas appliqués, même pas au niveau local. C'est l'impression que j'ai eue en visitant les diverses régions du pays. Que devrait proposer le projet de loi à cet égard? Vous dites que Transports Canada ne devrait avoir aucun rôle à jouer à ce chapitre, mais qu'en est-il des autres? L'application des règlements pose de sérieux problèmes au Canada.
M. Currie: Je ne vois pas pourquoi un agent de la paix ne peut recevoir la formation voulue pour appliquer les règlements. Prenons, par exemple, la ville de Toronto. Vous allez trouver cela un peu bizarre, mais c'est ainsi que les choses se passent. À Vancouver aussi, juste à côté du poste de garde-côte. Si la Loi sur les contraventions était appliquée de façon appropriée, il serait possible pour un agent de la paix ou un policier à bicyclette de se rendre, le samedi matin, à la rampe de mise à l'eau, où une dizaine ou une vingtaine de personnes s'affairent à mettre leurs embarcations à l'eau, de procéder à des inspections et d'appliquer les règlements. On peut appliquer les règlements sur terre. Sur l'eau, c'est différent. Il faut non seulement une certaine formation, mais il faut également que les divers paliers de gouvernement s'engagent à fournir les fonds nécessaires pour que les agents de police et les agents de protection de la faune, entre autres, puissent obtenir cette formation afin d'être en mesure d'effectuer des inspections sur l'eau. Nous ne disons pas que cette tâche devrait être confiée à un policier. Si un agent de protection de la faune, un agent de conservation ou même un agent chargé de faire appliquer le règlement a reçu la formation voulue, il sera possible de faire respecter la loi.
Est-ce que cela veut dire qu'on ne serait pas obligé d'acheter plus de bateaux? Non. Il faudrait certainement en acheter plus, et accroître aussi les effectifs. Toutefois, des bateaux, nous en avons déjà. Si les mesures nécessaires étaient prises, on noterait tout de suite une amélioration dans l'application des règlements.
Le sénateur Spivak: D'après ce que j'ai compris, le ministre possède déjà le pouvoir de désigner des personnes à titre d'agents de l'autorité.
M. Currie: Mais il ne le fait pas.
Le sénateur Spivak: Vous ne proposez aucun changement à ce chapitre. Vous dites tout simplement que le ministre devrait, conformément au pouvoir qui lui est conféré, désigner des agents de l'autorité.
M. Currie: Oui. Il convient également de souligner que les plaisanciers versent environ 200 millions de dollars par année en taxes sur le carburant. Je ne veux pas discuter de la façon dont le gouvernement établit son budget, mais seule une petite partie de cet argent est réinvestie dans les services qu'utilisent les plaisanciers.
Le sénateur Spivak: Merci de ce commentaire. Vous avez parlé de la manutention d'hydrocarbures. Vous avez conclu un protocole d'entente, que j'ai examiné, avec le ministère de l'Environnement. Les déversements, dans les marinas, n'ont rien à voir avec les déversements d'hydrocarbures occasionnés par les moteurs à deux temps, qui sont responsables de 40 p. 100 des rejets. C'est ce qu'a conclu le Centre de technologieenvironnementale d'Environnement Canada. Le ministre de l'Environnement considère ce protocole d'entente comme une première étape. Comme des règlements seront établis en vertu de la LCPE, vous devrez obligatoirement traiter avec Environnement Canada. Vous n'aurez pas, de toute façon, à traiter uniquement avec un seul ministre. Que pensez-vous de cette situation?
Ensuite, pouvez-vous nous dire quand le protocole d'entente entrera en vigueur, et comment il permettra de régler le problème des déversements d'hydrocarbures occasionnés par les moteurs à deux temps? Certains prétendent qu'il n'entrera en vigueur qu'en 2021 en raison du grand nombre de moteurs à deux temps, du faible taux de rotation.
Pensez-vous que le ministre de l'Environnement va intervenir en vertu de la LCPE? Que dit le protocole d'entente au sujet des déversements d'hydrocarbures occasionnés par les moteurs à deux temps? Quand comptez-vous corriger la situation et comment?
M. Currie: D'abord, je pense que vous confondez les termes. Un déversement d'hydrocarbure survient quand une personne déverse accidentellement du carburant ou de l'huile dans l'eau ou le long de son bateau.
Le sénateur Spivak: Je ne confonds pas les termes, parce que les hydrocarbures que laissent échapper les moteurs à deux temps ne sont pas déversés accidentellement. Ne proviennent-ils pas du moteur?
M. Currie: Ce n'est pas un déversement. Ce sont des émissions d'échappement, ce qui n'est pas la même chose.
Le sénateur Spivak: Quelle est la différence entre les deux? Les hydrocarbures sont déversés dans l'eau, n'est-ce pas?
M. Currie: L'entente que les entreprises ont conclue avec Environnement Canada, le protocole d'entente sur les émissions d'échappement provenant des moteurs à bougie, est déjà en vigueur. Il s'applique aux moteurs à deux et à quatre temps. Il est entré en vigueur l'an dernier, au mois d'août. Qu'est-ce que cela signifie, dans la pratique? Pour le profane, cela signifie que les motomarines et les moteurs amovibles vendus au Canada respectent ou excèdent les normes relatives aux émissions d'échappement fixées par l'EPA, aux États-Unis.
Le sénateur Forrestall: Ils répondent aux normes fixées par les États-Unis?
M. Currie: Oui.
Le sénateur Spivak: Cela s'applique aux moteurs qui sont vendus à l'heure actuelle. Les moteurs existants ne répondent pas à ces normes.
M. Currie: Vous avez raison, en partie. Il est vrai qu'il existe déjà une flotte de moteurs, et malheureusement, nous ne pouvons rien faire à ce sujet, comme nous ne pouvons rien faire au sujet des voitures vieilles de 25 ans qui circulent toujours sur nos routes. Elles vont disparaître petit à petit, au fur et à mesure que les propriétaires décident de les remplacer ou de les mettre à la ferraille. Nous ne pouvons rien faire à ce sujet.
Toutes les motomarines, tous les moteurs amovibles, qu'il s'agisse de moteurs à deux temps ou à quatre temps, sont maintenant visés par le protocole d'entente. Ces produits ont tous été certifiés par l'EPA, aux États-Unis, bien avant que n'entre en vigueur le protocole d'entente.
Il est question ici du marché nord-américain. Il n'y a pas de produits qui sont conçus spécifiquement pour le Canada. Si les règlements en vigueur au Canada étaient très différents de ceux qui existent aux États-Unis, il n'y aurait pas de moteurs amovibles, de motomarines et, si j'ose dire, peu de bateaux à essence, sinon aucun, qui seraient vendus dans notre pays. Ce serait, en fait, la fin de la navigation de plaisance.
Le sénateur Spivak: Je crois comprendre que le protocole d'entente est une mesure volontaire. Néanmoins, il est en vigueur. Qu'est-ce que cela signifie, dans la pratique? Je sais que les émissions doivent être réduites de 75 p. 100. Je ne sais pas s'il s'agit des émissions dans l'atmosphère ou dans l'eau. Qu'est-ce que cela signifie sur le plan de la réduction des déversements d'hydrocarbures? Combien de temps faudra-t-il pour réduire ces émissions? Allez-vous modifier les moteurs à deux temps ou allez-vous utiliser des moteurs à injection directe? Que comptez-vous faire? Je sais que c'est un problème sérieux.
M. Currie: Comme je ne suis pas un ingénieur, je peux uniquement vous donner le point de vue d'un profane. Dans le cas des moteurs à deux temps, le carburant est injecté dans la chambre de combustion du moteur. On a recours pour cela à l'injection directe ou électronique. Diverses autres applications techniques ont été élaborées à cette fin. L'effet cumulatif définitif de cette mesure sera le suivant: les émissions d'oxydes d'azote et d'hydrocarbures provenant de ces moteurs seront réduitesde 75 p. 100 au fil des ans. Cela comprend les émissions occasionnées par les motomarines.
En outre, on s'oriente de plus en plus vers la technologie à quatre temps. Nos voitures sont munies de moteurs à quatre temps. Vous mettez de l'essence dans votre voiture, sauf que celle-ci ne se mélange pas à l'huile. L'huile qui lubrifie le moteur se trouve dans la partie inférieure de celui-ci. Les moteurs à quatre temps sont beaucoup plus propres que les moteurs à deux temps. Les plaisanciers adoptent de plus en plus, mais pas totalement, la technologie à quatre temps.
Certaines entreprises progressent plus rapidement que d'autres, mais tous ces changements auront pour effet, cumulativement, de réduire les émissions d'oxydes d'azote et d'hydrocarbures de 75 p. 100. Les États-Unis s'attendent à ce que cet objectif soit atteint d'ici 2006. Ces règles sont en vigueur depuis déjà un certain temps, de sorte que nous avons commencé à vendre des produits non polluants au Canada bien avant que le protocole d'entente ne voie le jour.
C'est un peu compliqué. Je ne peux pas vous dire quand nous avons commencé à vendre des produits non polluants au Canada. Je pense que cela remonte à l'époque où les fabricants ont commencé à vendre le nouveau moteur sur le marché américain, parce qu'ils ont cessé, au fil des ans, de produire des moteurs en utilisant les vieilles technologies.
Le sénateur Spivak: Ce que je veux savoir, et vous pouvez peut-être répondre par écrit, c'est ceci: quel délai vise-t-on? Selon certaines études, les émissions seront réduites de 75 p. 100 d'ici 2021. Les moteurs à deux temps existent depuis les années 40; ils n'ont subi aucune modification. J'ai vu la différence qui existe entre les moteurs à quatre temps et les moteurs à deux temps, qui produisent huit fois plus de pollution que les moteurs à quatre temps. Quand les véhicules de plaisance, les embarcations de plaisance, peu importe le nom que vous voulez leur donner, seront-ils munis de moteurs à quatre temps ou de moteurs à deux temps à injection directe?
M. Currie: On a déjà commencé à en produire.
Le sénateur Spivak: Est-ce que les motomarines sont munies de moteurs à quatre temps?
M. Currie: Non, elles sont munies de moteurs à deux temps qui ont été approuvés par l'EPA, aux États-Unis. Les technologies nouvelles utilisées dans les moteurs à deux temps ont été appliquées aux motomarines à deux temps. Elles doivent répondre aux mêmes normes d'émission que les moteurs à quatre temps.
Le sénateur Spivak: Je comprends. Pourriez-vous nous fournir un rapport technique sur ce que cela signifie en termes d'émissions de benzène, de toluène, de tous les BTX et d'hydrocarbones, précisément le monoxyde et le dioxyde de carbone? Un tel rapport serait très utile. Aux États-Unis, la Californie est beaucoup plus avancée que l'EPA. Ces normes peuvent aussi changer.
M. Currie: Ce changement ne poserait pas de problème à notre secteur puisque ce que nous vendons dans une région des États-Unis doit être conforme à ce que nous vendons dans une autre région. Ainsi, les règles en matière d'émissions de carbone, dont nous parlons, finiront par être appliquées à l'ensemble des produits. Lorsque le produit a passé une étape de la chaîne de fabrication, on ne sait pas où il va ensuite.
Le sénateur Spivak: J'ai hâte d'obtenir le rapport.
M. Currie: Cela peut prendre un certain temps. Pourrais-je obtenir une demande écrite, si c'est possible? Je ne veux pas faire le bureaucrate, mais vous me demandez beaucoup derenseignements.
Le sénateur Forrestall: Bien que le processus de consultation ait été satisfaisant - quoiqu'il y ait certaines lacunes aux chapitres de la manutention et de la vente de carburants et de la pollution - y a-t-il eu suffisamment de consultation, selon vous, entre les divers ministères fédéraux responsables del'environnement, des pêches, du transport et de l'arméecanadienne? Ils participent tous à la détermination des polluants. Il me semble que le problème de ravitailler un bateau en carburant n'est pas terriblement complexe. Je crois qu'il s'agissait d'un problème plus complexe lorsqu'on permettait aux avions de faire le plein au même quai de ravitaillement. Y a-t-il eu suffisamment de consultation? Le problème ne paraît pas insurmontable. Est-ce un problème qu'il vaudrait mieux traiter dans un règlement que dans une loi.
M. Currie: Voyons voir si je peux vous répondre. Vous avez combiné deux questions.
Je ne fais partie des exploitants de marinas. Je suis ici seulement en tant que leur porte-parole, si vous voulez. J'ai tendance à croire qu'il n'y a pas eu suffisamment de consultation auprès des gens d'affaires qui seront touchés. Un grand nombre d'installations éloignées ne sont probablement même pas au courant, à ce stade-ci, de ce qui s'en vient. De nombreuses personnes seront stupéfaites par l'incidence que cela risque d'avoir.
Nous proposons, en tant que profanes, d'exclure les exploitants de ports de plaisance commerciaux et les vendeurs de produits aux petits bateaux. S'il en était ainsi, tout serait bien, mais le problème, c'est que le texte est rédigé de façon à n'exclure personne. La barge pétrolière de False Creek à Vancouver devrait probablement être considérée comme une installation demanutention d'hydrocarbures. Cependant, le petit port deplaisance aux abords d'un petit lac en plein coeur de l'Alberta ne devrait pas être considéré comme une telle installation. C'est là la différence.
Le sénateur Finestone: Cela relève de la compétence des provinces. Je ne sais pas pourquoi la question est traitée dans une loi fédérale.
Le sénateur Forrestall: La main gauche devrait savoir ce que fait la main droite.
Le sénateur Finestone: Si la question concerne legouvernement fédéral, peut-être qu'elle doit faire l'objet d'un régime réglementaire distinct. Autrement, je ne vois pas comment nous pouvons en traiter dans le projet de loi.
Le sénateur Forrestall: Mon but était d'obtenir une meilleure idée de ce que nous pourrions recommander à cet égard, c'est-à-dire que quelqu'un fasse réexaminer la question. Il nous est difficile de faire autre chose qu'une recommandation générale.
Le témoin a exprimé sa préoccupation à l'égard de l'ampleur de la consultation et de la question de savoir si le secteur privé ou les associations de navigation de plaisance y participent. Peut-être pourrions-nous cet automne rédiger une recommandation, à laquelle nous pouvons réfléchir cet été. Il s'agit d'un sujet important.
Le sénateur Finestone: J'ai trouvé la présentation intéressante puisque j'ai déjà été propriétaire d'un petit bateau. À propos de la disposition sur les avis de conformité, dont vous avez parlé, à la Partie 10 intitulée Embarcations de plaisance, ai-je bien compris que tous les nouveaux bateaux comporteront ces avis de conformité?
M. Currie: La réponse est oui, mais la responsabilité incombe au fabricant, qu'il soit Canadien ou étranger. Il appartient au fabricant de présenter une demande au Bureau de la sécurité nautique de la Garde côtière canadienne pour obtenir les avis. Il doit remettre un mémoire technique pour chacun des bateaux au sein d'une ligne de produits pour lesquels il veut obtenir des avis. Le Bureau de la sécurité nautique analysera les renseignements. S'il s'agit d'une petite embarcation à moteur intérieur, des calculs sont effectués afin de déterminer le nombre maximal de personnes qu'elle peut contenir, le poids maximal en kilos qu'elle peut supporter et sa puissance en chevaux. Si ce processus pouvait être accéléré...
Le sénateur Finestone: La loi l'accélère.
M. Currie: Telle qu'elle est, la loi n'accélérera pas le processus.
Le sénateur Finestone: J'allais vous demander si ce serait une bonne idée d'appliquer une clause de droits acquis et de rendre les avis obligatoires pour les fabricants de bateaux qui souhaitent vendre leurs produits au Canada. Mais vous venez de me donner une autre question à laquelle réfléchir, que nous allons transmettre à notre agent de recherche.
M. Currie: Je vous ai peut-être embrouillée. Les avis sont déjà obligatoires à l'heure actuelle. Cela ne changera pas. Le problème, c'est que des centaines de milliers de bateaux n'ont pas d'avis et que le règlement stipule que tous les bateaux doivent en avoir un, ce qui signifie que, outre les bateaux que l'on construit maintenant ou que l'on construira dans l'avenir, tous les vieux bateaux qui ne comportent pas d'avis...
Le sénateur Finestone: Ils sont illégaux au départ.
M. Currie: C'est sans doute exact. Ils sont illégaux, car ils n'ont pas d'avis. Ce qui ne signifie pas qu'ils ne sont pas sécuritaires ou qu'ils ne l'étaient pas quand ils ont été construits. Ils ont pu être construits conformément à une norme plus élevée que celle exigée au Canada, mais ils ne comportent pas d'avis. Il est impossible, en pratique, d'obliger toutes les personnes concernées à obtenir un avis sans empêcher que la Garde côtière ne soit inondée de demandes.
Le sénateur Finestone: Que se passe-t-il si ces bateaux ont un accident.
M. Currie: Je ne connais personne qui ait été poursuivi ou qui ait écopé d'une sanction parce qu'il ne possédait pas d'avis, bien qu'une disposition de la Loi sur les contraventions prévoit une amende de 100 ou 150 dollars si un bateau est inspecté et qu'il s'avère qu'il ne comporte pas d'avis. Je ne suis au courant d'aucune accusation.
Ce qui est intéressant, c'est que, pour obtenir un permis pour un petit bateau, il faut détenir un avis. Les dizaines de milliers ou centaines de milliers de bateaux qui ne possèdent pas d'avis n'ont pas de permis.
Le sénateur Finestone: Vous avez dit qu'il est important de conserver le registre pour petites embarcations. Vous avez déclaré que le projet de loi C-14 n'était pas clair. Je me demande si ce registre et le registre d'immatriculation s'excluent l'un l'autre. Il ne semble pas que ce soit le cas.
M. Currie: Il nous semble que ce soit le cas. Il faudrait peut-être clarifier la question.
Le sénateur Finestone: Pensez-vous que nous pourrions proposer un article spécial et que le comité devrait étudier le règlement?
M. Currie: Ce pourrait être une bonne solution.
La présidente: Le greffier communiquera avec vous pour obtenir davantage d'information, que nous transmettrons à tous les membres du comité.
Sénateurs, le temps file. Le rapport du sous-comité sur les communications devrait être préparé par les sénateurs Finestone et Spivak. Je crois que nous devrons nous y pencher à l'automne. Nous disposons donc de suffisamment de temps pour y travailler.
Le sénateur Finestone: Puis-je faire une observation? Je dois dire en mon nom, et au nom du sénateur Spivak je pense, que le rapport est incomplet. Les deuxième et troisième étapes n'ont pas été accomplies. Il s'agissait d'un projet très ambitieux qui était sur la bonne voie, mais il n'a pas atteint son but. Soit que nous effectuons une étude convenable, en nous appuyant sur ce qui a été fait jusqu'à maintenant, soit que nous oublions le tout pour l'instant. Je ne voudrais pas déposer le rapport comme tel.
La présidente: Devrions-nous y réfléchir pendant l'été?
Le sénateur Forrestall: À mon avis, nous devrions. Je suis au courant de certains des problèmes qui sont survenus.
La présidente: Nous y réfléchirons pendant l'été et nous en discuterons lors de notre première réunion à l'automne. Nous pouvons demander la permission au Sénat.
L'autre problème, c'est que nous recevons beaucoup de lettres de pilotes de Canadien et d'Air Canada. Nous vous en avons envoyé des copies. Nous venons tout juste d'accuser réception de ces lettres. Nous ne pouvons pas intervenir dans les relations de travail. Nous vous tiendrons au courant si nous recevons d'autre information. Au fur et à mesure que nous recevrons des lettres, nous vous en ferons parvenir des copies. Nous pouvons nous occuper de ce problème à l'automne, si nous pouvons faire quelque chose.
Le sénateur Forrestall: À propos de ces lettres, puis-je dire que le problème est très grave. L'atmosphère qui règne, non seulement dans la cabine de pilotage, mais aussi au sein des employés de soutien, est de mauvais augure pour les voyageurs canadiens cet été. Il est important que chacun de nous examine les lettres et soit au courant du système d'ancienneté qui touche, autant que je sache, seulement les pilotes. Lorsqu'il y a discorde à 37 000 pieds d'altitude, cela risque d'être dangereux. Comme vous le savez, il n'y a pas de seconde chance.
La présidente: Je serai préoccupée si le problème ne se règle pas d'ici l'automne.
Le sénateur Finestone: Y a-t-il des lectures que nous pourrions faire. Avons-nous la décision de l'arbitre ou du tribunal indiquant la position qui a été prise?
La présidente: Nous pouvons vous la faire parvenir.
Le sénateur Finestone: Les juges n'avaient sûrement pas aussi tort. Peut-être que oui. J'aimerais savoir ce qui s'est passé pour qu'ils prennent cette décision.
Le sénateur Forrestall: Les juges n'ont pas tort. C'est ça le problème. Je n'en dirai pas plus.
La présidente: Nous ferons parvenir davantage d'information sur la question. Nous allons les laisser régler la situation pendant l'été. À l'automne, nous nous y pencherons de nouveau.
La séance est levée.