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TRCM - Comité permanent

Transports et communications

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Transports et des communications

Fascicule 30 - Témoignages (séance du 28 mai)


OTTAWA, le mardi 28 mai 2002

Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications se réunit aujourd'hui, à 9 h 32, afin d'étudier le transport interurbain par autocar.

Le sénateur Lise Bacon (présidente) occupe le fauteuil.

[Français]

La présidente: Je voudrais d'abord, en votre nom, remercier M. Michel Patrice, le greffier du comité, qui nous quittera au mois de septembre. Nous aurons l'occasion de le remercier plus formellement une autre fois. Je veux également vous présenter ce matin M. Richard Maurel qui remplacera M. Patrice. On vous souhaite la bienvenue. Michel, on aura l'occasion de vous dire au revoir un peu plus tard.

[Traduction]

J'aimerais vous souhaiter la bienvenue au comité. Nous faisons une étude spéciale du transport interurbain par autocar. Comme vous le savez, le ministre des Transports, l'honorable David Collenette, nous a demandé de réaliser cette étude, que nous avons entreprise à la fin de l'année dernière. Nos audiences publiques ont débuté en février dernier, et nous devons présenter notre rapport avant la fin de 2002. Je crois que nous aurons suffisamment de temps pour étudier ces questions de manière adéquate et pour préparer des recommandations à l'intention du ministre.

Nous avons entendu un certain nombre de témoins ici à Ottawa, ainsi qu'à Montréal, à Halifax, à Vancouver, à Calgary et à Toronto. Aujourd'hui, nous recevons M. Ross Ferguson, président de la Airport Ground Transportation Association of Ontario. Nous avons hâte d'en savoir davantage sur le fonctionnement des entreprises qui offrent ce service et sur la manière dont il est réglementé et coordonné.

Je voudrais maintenant préciser le but de cette étude à l'intention de M. Ferguson. Essentiellement, le problème auquel nous faisons face est la baisse continue, depuis des décennies, du nombre de passagers qui utilisent le transport interurbain par autocar. Cette baisse est troublante puisque le transport par autocar constitue un élément important du système de transport de passagers. Dans l'ensemble, le transport par autocar n'est pas coûteux, il peut pratiquement desservir toutes les régions, il est peu polluant et il est relativement bon marché pour les usagers.

La baisse constatée peut être attribuable à plusieurs raisons, dont l'amélioration de la situation financière des gens, qui utilisent maintenant leur automobile plus fréquemment. C'est peut-être aussi que le nombre de gens vivant dans les grandes villes a augmenté ou que les règlements gouvernementaux sont trop nombreux ou trop différents d'une province à l'autre.

Je suis certaine que l'information que M. Ferguson nous fournira aujourd'hui nous aidera à mieux comprendre ces questions. Monsieur Ferguson, si vous voulez bien commencer votre exposé, vous avez la parole.

M. Ross Ferguson, président, Airport Ground Transportation Association of Ontario: J'aimerais vous parler un peu de la Airport Ground Transportation Association of Ontario, qui est une association unique. Une autre association, la North American Airport Ground Transportation Association, dont le bureau principal est situé à St. Louis, au Missouri, représente principalement l'industrie aux États-Unis et au Canada. C'est une association nord-américaine dont les membres se réunissent deux fois par année.

En Ontario, notre association dispose d'un budget environ dix fois plus élevé que celui de l'association nord- américaine. Nous comptons 17 employés à temps plein et nous offrons des services à trois terminaux de l'aéroport international Pearson de Toronto. Nous représentons toutes les sociétés qui assurent l'aller-retour par voie terrestre entre l'aéroport Pearson et l'extérieur de Toronto. Ces services sont offerts à plus de 170 villes, localités et villages en Ontario.

Le personnel répartit les véhicules, accueille les passagers et veille à ce que le service soit fourni sans accroc en établissant les horaires des conducteurs en fonction des besoins des passagers. Habituellement, les services sont réservés au préalable. Si un passager fait une réservation auprès d'une de nos sociétés, nous serons sur place même si l'avion arrive à 3 heures du matin puisque nous vérifions l'heure d'arrivée de tous les vols. Nous fournissons un service unique, et l'aéroport Pearson est le seul en Amérique du Nord à l'offrir.

Nos membres utilisent tous les genres de véhicules, des autocars aux mini-fourgonnettes de 12 passagers et moins. La majorité de nos membres fournissent un service «de transport partagé sur demande et porte à porte» à l'aide de mini-fourgonnettes de huit passagers. Ce service unique offre les mêmes avantages que les services d'une voiture taxi puisque le passager est pris et déposé où il veut — du bureau à la maison par exemple — et puisque le service est fourni sur demande. On examine la liste des heures de départ des vols et on détermine ainsi l'heure à laquelle le véhicule doit passer prendre les passagers. Ensuite, lorsque les passagers reviennent de voyage à l'aéroport, ils sont pris en charge dès qu'ils quittent le terminal. Je le répète, c'est un service qui est fourni sur demande et porte à porte et qui est semblable à celui d'une voiture taxi. Toutefois, c'est aussi un service semblable à celui d'un autocar puisque le transport est partagé et que plusieurs arrêts sont effectués. Nous offrons donc les mêmes avantages qu'une voiture taxi et qu'un autocar, et c'est ce qui lui donne son caractère unique.

Il est important de comprendre pourquoi ce service connaît tant de succès. C'est en partie parce qu'il répond aux attentes du consommateur. Voici ce que nous constatons.

Le principal concurrent du transport en commun dans notre industrie est l'automobile. De plus, les hôtels offrent souvent le stationnement gratuit ou à tarif réduit de sorte que le client qui passe une nuit dans un hôtel peut parfois bénéficier d'un stationnement gratuit et du service de la navette pendant près d'une semaine lorsque des forfaits hebdomadaires sont offerts. C'est un milieu où la concurrence est forte, et la plupart des voyageurs continuent à utiliser leur automobile. Nous nous sommes attaqués à ce problème et nous gagnons du terrain face à la concurrence.

Ceux qui prennent leur automobile pour se rendre à l'aéroport nous disent qu'ils préfèrent quitter leur résidence ou leur bureau et y revenir directement. Ils veulent pouvoir quitter selon l'heure de leur vol, modifier leurs plans au besoin, surtout à la dernière minute, et avoir leur automobile à l'aéroport.

Ceux qui se prévalent de nos services veulent profiter des mêmes avantages sans avoir à conduire leur automobile jusqu'à l'aéroport. J'aimerais vous donner un exemple de l'impact des tarifs par rapport aux services. À Hamilton, en Ontario, une grande société de transport par autocar offre des services depuis de nombreuses années. Les autocars quittent la gare d'autobus et se dirigent vers trois hôtels, puis vers l'aéroport. Un de nos membres a offert un service de transport partagé par mini-fourgonnette. Il fournissait le même service aux mêmes hôtels, sauf qu'il s'agissait d'un service porte à porte et sur demande. Puisqu'il s'agissait d'un service de transport partagé, d'autres passagers pouvaient monter à bord de la mini-fourgonnette tout au long du trajet.

À une certaine période, le tarif du transport par autocar était de 50 p. 100 inférieur au tarif du transport partagé. Toutefois, puisque le nombre de passagers continuait de diminuer, un tarif de 70 p. 100 inférieur au tarif du transport partagé a été offert. Le nombre de passagers a tout de même continué à diminuer jusqu'à ce qu'il ne représente plus qu'un ou deux passagers en moyenne par autocar de 46 passagers.

L'essentiel à retenir, c'est que le prix n'est pas nécessairement le facteur le plus important. C'est le niveau de service que recherche le passager. Les gens sont prêts à payer pour obtenir du service pourvu que l'argent qu'ils dépensent leur permette d'obtenir un service de qualité.

La baisse constatée dans le transport par autocar est attribuable à de nombreuses raisons. Au fil des ans, avec l'évolution et l'augmentation des liaisons aériennes, les gens veulent utiliser leur temps à bon escient puisque pour eux, le temps, c'est de l'argent. Le transport par autocar a subi les contrecoups de changement radicaux survenus dans le secteur des transports.

Ceux qui veulent réussir dans cette industrie doivent s'adapter aux attentes du consommateur. Les autocars ne peuvent pas circuler dans les quartiers résidentiels pour faire du porte-à-porte. Toutefois, à avantages et à même niveau de service égaux, le prix devient un facteur important. L'industrie du transport aérien offre des tarifs réduits, et la raison pour laquelle les voyageurs choisissent WestJet ou Southwest, c'est que ces deux sociétés fournissent les mêmes services que les autres, mais à un prix inférieur.

Nous sommes régis par la Loi sur les véhicules de transport en commun de l'Ontario.

Notre marché ne connaît aucune croissance parce que nous ne réussissons pas à convaincre les gens de renoncer à leur véhicule et d'utiliser nos services. Notre marché n'est pas stagnant, mais il n'est pas en croissance.

Bon nombre de nos membres desservent de vastes territoires dont la densité de population est faible. Il leur est extrêmement difficile de continuer à offrir les services actuels. Si vous permettez que de nouveaux concurrents aient accès à ce marché, vous signerez probablement l'arrêt de mort de nos membres. Depuis des années, la Commission des transports routiers de l'Ontario reconnaît cette situation. Par conséquent, si une nouvelle demande lui est présentée, elle en évaluera les incidences sur le public et le transporteur existant. Si la commission détermine que la délivrance d'un permis nuira au transporteur existant, elle doit se demander en quoi elle pourrait avantager le public. Je sais d'expérience que le public n'en retire aucun avantage, et c'est aussi la conclusion à laquelle en est venue la commission.

La plupart des dépenses de ces sociétés sont reliées à la prestation de services de transport aux aéroports. Il est très coûteux de faire des affaires avec les aéroports. Divers frais doivent être acquittés, et il faut tenir compte des coûts d'assurance qui, malheureusement, depuis le 11 septembre, ont monté en flèche. Une grande partie de ces coûts est inévitable, et si le transporteur doit réduire ses tarifs, la réduction doit être absorbée ailleurs, par exemple par le budget réservé à la sécurité, à l'entretien et à la main-d'oeuvre.

Dans notre industrie, les conducteurs touchent en moyenne 10,50 $ l'heure, à l'exclusion des pourboires. En ce qui concerne les services de transport régulier offerts au public, particulièrement en région éloignée, soit les principaux services que nous offrons, il est important de se conformer aux règlements applicables. Au minimum, nous croyons qu'il est important de revoir les exigences auxquels doivent satisfaire les nouveaux venus afin de ne pas causer de préjudice au public ou aux transporteurs existants. Il faut aussi veiller à ce que ces sociétés respectent un certain niveau de rendement et de sécurité.

Si la commission reçoit des plaintes à propos de notre service, notre permis peut être révoqué. C'est un outil de persuasion très efficace qui nous tient constamment sur le qui-vive. Nos clients sont notre principale préoccupation.

Plusieurs des questions affichées sur le site Web nous touchent. Je suis incapable de concevoir un moyen évident de contrer la baisse du nombre d'usagers du transport par autocar, certainement pas à tarifs réduits. Les passagers qui décident d'opter pour l'avion ou le train sont prêts à payer des tarifs plus élevés pour d'autres raisons, par exemple parce que ces services sont pratiques et pour les horaires de voyage. D'après ce que nous avons constaté, la destination, la nature pratique, y compris la fréquence et les horaires de voyage, sont les principales préoccupations des clients. Ensuite, vient le prix.

Ceux qui présentent des demandes de permis à la Commission des transports routiers de l'Ontario ne savent pas dans quelle industrie ils veulent se lancer. Ils ne veulent offrir que les services les plus avantageux pour eux. Ils veulent offrir des services pendant les heures les plus achalandées et non pendant les périodes plus creuses. Ils ont comme principe que, s'ils ne peuvent pas assurer le service à certains passagers, d'autres transporteurs le feront. Cela ne devrait pas être permis. Lorsqu'on s'engage à servir le public, on doit respecter cet engagement. C'est l'un des plus grands dangers de la déréglementation, surtout pour les services de transport régulier.

Je vous ai fourni la liste de nos membres et des régions qu'ils desservent, ainsi que la lettre que j'ai écrite au président de l'OMCA en réponse à la définition d'un autocar proposé par cette association, laquelle n'inclut pas nos activités. Il semble que l'association ne s'en est pas rendu compte lorsqu'elle a proposé cette définition, et nous travaillons avec elle à résoudre cette question.

Je serai maintenant heureux de répondre à vos questions.

La présidente: Merci, monsieur Ferguson. Votre segment de l'industrie des transports, soit le transport terrestre dans les aéroports, semble être un nouveau phénomène. En moyenne, depuis combien de temps les membres de votre association offrent-ils de tels services et quelles étaient leurs activités avant de se lancer sur ce marché?

M. Ferguson: Le transport terrestre dans les aéroports en est à sa 25e année. Ma société, Airways Transit, en est à sa 26e. Je sais qu'une autre société existe depuis 32 ans. Même nos membres les plus récents oeuvrent dans ce secteur depuis six ou sept ans.

Quant à ce qu'ils faisaient auparavant, c'est plutôt diversifié. Certains offraient des services de transport par autocar et ont décidé de commencer à offrir des services de transport dans les aéroports. Airways Transit n'existait pas avant que nous commencions à offrir des services de transport dans les aéroports, et il en est de même pour Red Car, Brantford et quelques autres. Ce sont les seuls services que nous offrons; c'est le seul marché que nous exploitons.

La présidente: Pouvez-vous nous donner des précisions sur la réglementation à laquelle sont soumis les services de transport terrestre dans les aéroports de l'Ontario? Ceux qui envisagent de se lancer sur ce marché doivent-ils satisfaire au critère de ce qu'on appelle la commodité et la nécessité publiques et est-ce que les demandes sont habituellement acceptées sans opposition?

M. Ferguson: Il existe deux niveaux de réglementation. La Loi sur les véhicules de transport en commun de l'Ontario est certainement la plus importante. En vertu de cette loi, tout nouveau demandeur doit démontrer la nécessité publique du service et prouver qu'aucun préjudice ne sera causé à un transporteur existant ni au public servi.

Nous devons aussi nous conformer aux dispositions contractuelles définies avec les autorités aéroportuaires, qui nous autorisent à prendre des passagers à l'aéroport.

La présidente: Est-ce que certains fournisseurs de services de transport terrestre dans les aéroports aimeraient offrir plus de services de transport interurbain de passagers s'ils y étaient autorisés par l'organisme de réglementation et croyez-vous qu'il existe une demande pour ce genre de service?

M. Ferguson: Je ne crois pas qu'une telle demande existe. Manifestement, nous offrons tous également des services de transport nolisé à l'aide de petits véhicules puisque nous disposons de tels véhicules. Principalement, ces services sont offerts en Ontario même.

Je possède la plus grande société de notre association. S'il existait une demande de services interurbains additionnels, je la saurais.

La présidente: De quelle manière les clients contactent-ils une société de transport terrestre dans les aéroports? Doivent-ils faire des réservations? Est-ce que certaines de ces sociétés vont prendre les passagers chez eux et offrent un service porte à porte?

M. Ferguson: Oui. La majorité de nos membres offrent un service porte à porte sur demande, et des réservations sont faites dans 90 p. 100 des cas probablement. Toutefois, les gens qui sont à l'aéroport et qui n'ont pas fait de réservation peuvent se présenter à notre kiosque, et nous nous occuperons d'eux. La plupart de nos clients font des réservations, soit par téléphone, soit sur Internet ou encore par l'entremise d'une agence de voyage.

La présidente: Est-ce que les fournisseurs de services de transport interurbain par autocar s'opposent aux demandes présentées par les sociétés de transport terrestre dans les aéroports? Est-ce qu'ils vous posent des problèmes?

M. Ferguson: Non, mais en réalité, nous sommes aussi des fournisseurs de services de transport interurbain. Il y a contestation seulement lorsque les demandes portent atteinte ou causent des préjudices à nos membres. Nous ne recevons que rarement des plaintes de membres de notre industrie. La plupart du temps, les avis d'opposition viennent de gens de l'extérieur.

La présidente: Notre plus grande préoccupation a trait aux nombreuses collectivités du Canada qui n'ont pas accès à un service de transport interurbain par autocar. En vertu de la réglementation existante, que peut-on faire pour améliorer cette situation? Quels changements doivent-être apportés à la réglementation pour accroître la probabilité qu'un tel service sera offert à ces collectivités?

M. Ferguson: Je ne sais pas si c'est vraiment une question de réglementation; je crois qu'il s'agit plutôt du jeu de l'offre et de la demande. On ne peut pas obliger une entreprise à fonctionner à perte. Si l'on veut offrir un service là où la demande semble insuffisante, une forme quelconque de subvention doit alors être fournie.

Le sénateur Spivak: Est-ce que ces autocars transportent aussi de l'équipement ou des colis? Outre des passagers, transportent-ils autre chose jusqu'à l'aéroport?

M. Ferguson: Oui. Nous effectuons presque tous le transport express de colis jusqu'à l'aéroport.

Le sénateur Spivak: Sans passager?

M. Ferguson: Nous n'allons jamais prendre de colis lorsque nous avons un passager à bord.

Le sénateur Spivak: Vous ne faites pas le transport des marchandises.

M. Ferguson: Oui, nous le faisons. Nous plaçons les marchandises à bord de la fourgonnette avant de prendre des passagers et nous les livrons une fois que les passagers sont descendus pour que ceux-ci n'aient pas à attendre.

Le sénateur Spivak: La société de transport par autocar Greyhound offre des services plus concurrentiels que toute autre entreprise pour le transport interurbain de colis ou de toute autre marchandise. Vous n'offrez pas ce genre de service. Vous ne pouvez pas prendre des colis et les laisser à l'aéroport pour qu'ils soient expédiés ailleurs.

M. Ferguson: Oui, nous pouvons le faire.

Le sénateur Spivak: Je suppose que vous le faites seulement lorsqu'un passager accompagne le colis.

M. Ferguson: Je n'ai peut-être pas bien compris le sens de votre question.

Le sénateur Spivak: Si je veux expédier un colis, est-ce que vous pouvez le ramasser et le livrer au service des transports de l'aéroport pour qu'il soit expédié ailleurs?

M. Ferguson: Je ne voulais pas dire qu'il fallait que le colis appartienne au passager. Nous ramassons des colis, mais sans incommoder les passagers.

Le sénateur Spivak: Est-ce que cela fait partie des services que vous fournissez?

M. Ferguson: Ce n'est pas une partie importante de nos services, mais elle cadre bien avec nos activités.

Le sénateur Spivak: Comment le Canada se compare-t-il dans ce domaine à l'Europe, où les modes de transport sont si diversifiés? Selon vous, quel est l'avenir du transport par autocar par rapport à celui du transport par rail? Le mode de transport de l'avenir sera-t-il le train léger ou l'autocar alimenté par une pile à combustible moins polluante? Selon vous, que nous réserve l'avenir?

M. Ferguson: Voilà toute une question. Je ne suis pas un expert de la question européenne.

La plupart de nos véhicules fonctionnent au propane, combustible respectueux de l'environnement.

Quant à l'avenir, le train léger est une solution formidable. Une fois de plus, c'est une question d'offre et de demande au sein d'un marché rentable. Ce mode de transport nuira sans aucun doute aux services existants dans les collectivités. C'est ce qui s'est produit en Amérique du Nord.

Selon moi, l'avenir est dans les combustibles de remplacement, les piles à combustible et une réglementation beaucoup plus stricte des émissions de gaz.

Le sénateur Spivak: Il me semble que le potentiel de croissance de votre industrie repose sur les clients des hôtels, et non nécessairement sur la population locale. Si un service de transport par autocar est pratique, il est concurrentiel. Les clients des hôtels représentent-ils une partie importante de votre chiffre d'affaires?

M. Ferguson: Nous offrons un service porte à porte, y compris à celles des hôtels. Les clients des hôtels représentent probablement 5 p. 100 de notre marché. Vous devez tenir compte du marché que nous desservons; ce n'est pas un marché de congrès. Nous ne desservons pas un marché comme celui de Miami, où l'on retrouve des attractions comme Disneyland. Dans ces villes, les hôtels sont probablement la source de 90 p. 100 de la clientèle des transporteurs. À Hamilton, à Kitchener et dans le sud de l'Ontario, nos clients sont principalement des gens d'affaires et des vacanciers.

Le sénateur Jaffer: En moyenne, combien d'arrêts faites-vous avant d'arriver à l'aéroport? Je sais que cela varie d'un endroit à l'autre, mais quelle est la moyenne?

M. Ferguson: Nous aimons promettre au client qu'il n'y aura pas plus de deux arrêts après qu'il soit monté à bord. Le nombre maximum d'arrêts est de trois. Évidemment, par mauvais temps, lorsque la circulation est dense ou que le vol arrive tard en soirée, il faut parfois ajouter un quatrième arrêt. Idéalement, nous essayons de ne pas excéder trois arrêts.

Le sénateur Jaffer: Veuillez m'excuser si vous avez déjà répondu à cette question, mais j'aimerais savoir si vous utilisez des fourgonnettes pour le transport porte à porte?

M. Ferguson: Oui.

Le sénateur Jaffer: Combien de passagers peuvent y prendre place?

M. Ferguson: La plupart de nos véhicules sont des fourgonnettes de huit passagers.

Le sénateur Jaffer: Habituellement, transportez-vous de six à huit passagers lorsque vous faites le transport porte à porte?

M. Ferguson: C'est ce qui est intéressant. Pour la plupart des modes de transport, le facteur le plus important est de transporter une pleine charge. Notre facteur de charge est probablement de quatre ou cinq passagers en moyenne par voyage aller-retour, donc de 2,5 personnes pour un aller simple.

Le facteur de charge est si peu élevé parce que nous offrons un service sur demande et parce que nous offrons aussi un service hors pointe. Nous faisons donc un assez grand nombre de voyages presque sans passager puisque les gens quittent le matin et reviennent le soir. Notre facteur de charge est donc très bas.

Toutefois, si notre moyenne augmentait à six passagers, je m'inquiéterais. Nous ne pourrions pas fournir un bon service, car nous devrions faire trop d'arrêts. Bien entendu, si cette moyenne augmentait en raison d'un congrès, ce serait alors merveilleux.

Le sénateur Adams: Je crois que vous avez dit que vous desserviez 170 villes, localités et villages en Ontario. Est-ce bien exact?

M. Ferguson: Je crois que c'est tout juste un peu plus de 170 villes, localités et villages.

Le sénateur Adams: Avez-vous dit que vous aviez 17 employés?

M. Ferguson: Oui. Les 15 membres qui forment notre association desservent 170 villes, localités et villages et notre association représente ces 15 sociétés.

Le sénateur Adams: Ces 15 sociétés ne comptent certainement pas que 17 employés? Au total, combien de personnes sont employées par les membres de votre association?

M. Ferguson: Non. Nous employons probablement 800 personnes environ.

Le sénateur Adams: Mon fils a utilisé votre service quelques fois à partir de Toronto. Il a été très satisfait.

Vos petites fourgonnettes peuvent accueillir jusqu'à huit passagers, mais cela ne laisse pas beaucoup d'espace pour les bagages. Comment faites-vous?

M. Ferguson: Nous commandons habituellement un véhicule qui n'est qu'une coquille vide et nous construisons la fourgonnette. Nous commençons par une fourgonnette allongée à laquelle nous ajoutons huit sièges, ce qui laisse beaucoup d'espace à l'arrière pour les bagages.

Le sénateur Adams: D'autres exploitants d'autocar nous ont dit qu'ils n'offraient pas de service de réservation pour le transport terrestre des passagers des lignes aériennes. Comment votre système fonctionne-t-il?

M. Ferguson: Toutes nos réservations ou presque sont faites auprès des sociétés individuelles. Nous prenons des gens d'affaires et des vacanciers dans chacune des villes et chacun des villages que nous desservons. Ceux-ci font probablement leurs réservations pour le retour directement. Nous avons tous des agents de réservation au sein de notre personnel.

Certains passagers se présentent à l'aéroport sans avoir fait de réservation. Nous avons des comptoirs de services de transport terrestre dans chacun des terminaux. Ces gens peuvent s'y rendre, donner leur nom et l'adresse de leur destination, et on leur réserve un siège.

Le sénateur Adams: Avez-vous des autocars qui peuvent accueillir plus de huit passagers?

M. Ferguson: Certains de nos membres, notamment Coach Canada, qui est Trentway-Wager, n'ont que de gros autocars. D'autres utilisent aussi des minibus, mais la plupart de nos véhicules sont des mini-fourgonnettes de huit passagers.

Le sénateur Adams: Le tarif est-il calculé en fonction de la distance parcourue?

M. Ferguson: Essentiellement, nos tarifs sont fondés sur la destination. Le tarif du transport jusqu'à Hamilton est fixé à un certain montant, et il en va de même pour Burlington, Kitchener, Waterloo et les autres villes. Le tarif dépend de la destination.

Le sénateur Adams: Certains témoins de l'Ouest et de la Saskatchewan nous ont dit que le transport par fourgonnette n'est pas rentable. Est-ce vrai? La situation est peut-être différente en Ontario.

M. Ferguson: C'est probablement vrai. C'est probablement le même genre de situation que celle que nous connaissons à l'extérieur de Toronto. Je crois qu'à une certaine période, la population de Toronto était supérieure à celle de trois des provinces de l'Ouest. Toronto est une grande ville où la population est dense, comme à Montréal et à Vancouver, mais entre ces villes, il y a de vastes étendues peu habitées. Même en Ontario, nous desservons des régions où la population est assez dispersée.

Le sénateur Adams: Vous avez mentionné que la Commission des transports routiers de l'Ontario recevait des plaintes. Dès qu'elle en reçoit une, cette commission peut-elle mettre fin aux activités d'une entreprise? Exige-t-on plus d'une plainte pour le faire?

M. Ferguson: La Commission des transports routiers de l'Ontario tient une audience lorsqu'une demande est présentée. Nous détenons tous un permis pour un territoire en particulier. C'est ce qui nous rend uniques en Amérique du Nord. Dans les aéroports américains — et je connais la plupart d'entre eux — la concurrence est plutôt libre, et c'est le chaos total. Nous avons tous un territoire attitré. Puisque nous ne sommes pas en concurrence, nous pouvons travailler ensemble et en collaboration avec les autorités aéroportuaires du Grand Toronto. Nous exploitons ce marché en toute harmonie.

Le sénateur Adams: Certains exploitent leurs propres autocars dans le nord de l'Ontario. Ils font la livraison du courrier et de colis à des postes éloignés du nord de l'Ontario. Comment cela fonctionne-t-il dans une collectivité du Nord où une société de transport par autocar doit peut-être bénéficier d'une subvention pour poursuivre ses activités puisque moins de gens voyagent?

M. Ferguson: Comme je vous le disais, c'est très difficile, surtout en région éloignée plus au nord.

Ontario Northland, un service de transport par autocar financé par l'État qui assure une liaison du Nord jusqu'à Toronto, a déjà présenté une demande à la Commission des transports routiers de l'Ontario. Cette société avait aussi présenté une demande de service pour l'aéroport Pearson. Un de nos membres, Northern Airport Services, qui est aussi une petite entreprise, n'aurait pas pu concurrencer avec cette société. Lorsque l'audience de la Commission s'est tenue, il est entre autres devenu évident qu'un préjudice serait causé au service existant. Ontario Northland ne pouvait pas fournir le niveau de service offert par l'autre société. Ontario Northland a aussi indiqué qu'elle serait peut-être obligée d'annuler des voyages, ce qui n'est pas acceptable. Lorsqu'une entreprise s'engage à fournir un service, elle doit le faire pleinement, et il est très difficile de prendre un tel engagement pour une petite collectivité du Nord.

Le sénateur Adams: Est-ce qu'une subvention de la province permettrait à une entreprise privée d'offrir des services à une petite collectivité du Nord?

M. Ferguson: Cette subvention permettrait au moins à l'entreprise de faire ses frais ou de réaliser un petit profit.

Le sénateur Adams: Pourquoi le gouvernement de l'Ontario voudrait-il faire concurrence au secteur privé? C'est ce qui m'inquiète.

M. Ferguson: Je ne crois pas que des subventions aient été accordées dans notre industrie.

Le sénateur Phalen: Tout d'abord, j'aimerais vous dire que j'appuie le concept des navettes. Je les ai utilisées en Floride, et je trouve que c'est beaucoup plus pratique que de louer une automobile à l'aéroport.

Est-ce que des règlements provinciaux s'appliquent aux fourgonnettes? Est-ce que le transport par fourgonnette est régi par une loi provinciale prévoyant des exigences en matière d'inspection de sécurité et d'assurance, entre autres?

M. Ferguson: Les véhicules de dix passagers et plus, qui peuvent être des fourgonnettes, sont régis par le Certificat d'enregistrement du conducteur du véhicule utilitaire. Les normes d'entretien des véhicules de huit passagers sont régies par d'autres lois, et nous devons nous conformer notamment aux normes de rendement et d'immatriculation de la Loi sur les véhicules de transport en commun de l'Ontario.

Le sénateur Phalen: Existe-t-il des restrictions en ce qui concerne les inspections de sécurité et les assurances?

M. Ferguson: Non. Seulement celles que prévoit la Loi sur les véhicules de transport.

Le sénateur Phalen: Pouvez-vous nous donner la définition d'un autocar?

M. Ferguson: Je suis en accord avec la définition existante d'un autocar, c'est-à-dire d'un véhicule de dix passagers ou plus à l'exclusion du conducteur qui fournit des services tarifés de transport interurbain.

Le sénateur Phalen: Vous avez mentionné que vous garantissiez un certain nombre d'arrêts. Que voulez-vous dire? Lorsque je prends une navette et qu'il y a six personnes à bord, c'est qu'il y a six arrêts.

M. Ferguson: Nous offrons un service très différent de celui qui est habituellement offert aux États-Unis, un service qui se rapproche encore plus de celui d'une voiture taxi puisque les passagers sont principalement transportés des aéroports jusqu'aux hôtels du centre-ville et jusqu'à d'autres destinations, comme le font Super Shuttle et d'autres entreprises de ce genre. Ce que nous tentons de faire — et je n'utiliserai pas le mot «garantir» —, c'est de ne pas faire plus de trois arrêts, mais n'oubliez pas que nous prenons des réservations. Nous ne faisons pas des circuits pour prendre au coin de la rue des gens qui n'ont pas fait de réservation et qui veulent se rendre à l'aéroport. Nous ne faisons pas d'arrêt pour ceux qui n'ont pas fait de réservation.

Le sénateur Phalen: À l'aéroport de Tampa, quand vous sortez de l'aérogare, vous n'avez qu'à vous présenter au kiosque et à vous inscrire. Par exemple, si un certain nombre de personnes désirent se rendre à un endroit précis, la navette peut faire cinq arrêts. Pouvez-vous empêcher cela?

M. Ferguson: Voici comment notre service fonctionne. À la sortie de l'avion, nos clients ont déjà leur réservation. Nous pouvons donc planifier le transport d'avance puisque nous savons combien d'arrêts nous devrons effectuer.

Aux États-Unis, particulièrement à Tampa où le nombre de vacanciers est très grand, il n'existe pas de système de réservation. Les voyageurs arrivent, ils paient pour le service de transport qu'ils désirent obtenir, et une fourgonnette les conduit à destination. Si la fourgonnette est pleine, elle peut faire sept ou huit arrêts.

Le sénateur Phalen: Est-ce que du transport illégal par fourgonnette est effectué dans votre région?

M. Ferguson: Il y a du transport illégal par fourgonnette et par autocar partout. C'est pourquoi la loi doit être mise en application, mais cela requiert des fonds. Depuis quelques années, il est plus difficile de faire respecter la loi, par manque d'argent, je suppose. On peut adopter des lois, mais si on ne les applique pas, elles n'ont aucune efficacité.

La présidente: Comment vos tarifs se comparent-ils à ceux des voitures taxi?

M. Ferguson: Cela dépend de la localité. Par exemple, à Hamilton, pour le transport d'une seule personne, nos tarifs sont probablement de 50 à 60 p. 100 inférieurs à ceux des voitures taxi.

La présidente: Comment réalisez-vous des profits avec des tarifs aussi bas?

M. Ferguson: Je vais parler au nom de Airways Transit puisque c'est cette entreprise que je connais le mieux. Nous effectuons entre 50 000 et 60 000 transports aller-retour par année, ce qui représente près de 40 millions de passagers- kilomètres. Si nous pouvons maintenir un facteur de charge de quatre ou cinq passagers par transport aller-retour, nous pouvons faire des profits.

La présidente: En raison du volume?

M. Ferguson: Oui.

Le sénateur Callbeck: De nombreuses sociétés signent un accord avec les autorités aéroportuaires du Grand Toronto. Par exemple, je crois qu'il existe une société de transport par autocar qui offre des services à Durham et qui est autorisée à se rendre à l'aéroport de Toronto. Cette société détient-elle un permis?

M. Ferguson: Elle détient un permis pour desservir un territoire en vertu de la Loi sur les véhicules de transport en commun de l'Ontario. Elle est probablement la seule société à détenir un permis pour ce service particulier. Ce n'est qu'un service parmi tant d'autres.

Le sénateur Callbeck: Vous avez dit que cette société était assujettie au règlement d'application de la Loi sur les véhicules de transport en commun de l'Ontario.

M. Ferguson: Oui.

Le sénateur Callbeck: Les autorités aéroportuaires de Toronto imposent-elles d'autres restrictions à cette société, par exemple quant au genre de véhicule qui doit être utilisé?

M. Ferguson: Pas les autorités aéroportuaires du Grand Toronto. Essentiellement, le modèle de véhicule ne peut dater de plus de dix ans, et il doit répondre aux normes d'inspection. Il doit aussi être en bon état et propre.

Le sénateur Callbeck: D'autres normes que celles du règlement d'application de la Loi sur les véhicules de transport en commun sont imposées par les autorités aéroportuaires de Toronto, n'est-ce pas?

M. Ferguson: Elles ont des normes quant au genre de véhicule utilisé. Elles ne font aucune vérification mécanique. Cela relève du ministère des Transports.

Le sénateur Callbeck: Qu'en est-il du prix? Supposons qu'une société a obtenu un contrat en vertu duquel elle prend des passagers à Durham pour les conduire à l'aéroport de Toronto. Peut-elle exiger le tarif qu'elle veut? Les autorités aéroportuaires de Toronto ont-elles leur mot à dire à ce sujet?

M. Ferguson: Non. Il suffit de soumettre les tarifs aux autorités aéroportuaires du Grand Toronto. Ce qui permet le mieux d'égaliser les prix sur le marché, ce sont les passagers qui font clairement savoir à une entreprise que ses prix sont trop élevés.

Depuis quelques années, surtout depuis la guerre du Golfe, les gens sont de plus en plus exigeants, et nous devons constamment hausser le niveau de service que nous fournissons sans augmenter nos tarifs.

Il n'est pas nécessaire que quelqu'un nous dise de le faire; l'opinion du client suffit.

Le sénateur Phalen: Quel est le tarif moyen de transport de l'aéroport international Pearson jusqu'au centre-ville de Toronto?

M. Ferguson: Ce n'est pas dans notre secteur. Les tarifs sont répartis en 16 secteurs environ. Jusqu'au centre-ville, disons jusqu'à l'intersection Bay et Booth, le tarif est d'environ 38 $ pour le service de limousine de l'aéroport.

Le sénateur Phalen: Le service de navette que j'ai utilisé était beaucoup moins coûteux que celui d'une voiture taxi. Pour me rendre à destination, la course en taxi m'aurait coûté 40 $US, contre 15 $ en navette. Pourtant, la navette était tout aussi confortable et tout aussi pratique.

M. Ferguson: Bien entendu, la navette peut prendre quatre ou cinq passagers payants, ce qui fait 75 $ en tout.

La présidente: Merci, monsieur Ferguson.

La séance est levée.


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