Délibérations du comité sénatorial permanent des
Peuples autochtones
Fascicule 12 - Témoignages du 1er avril 2003
OTTAWA, le mardi 1er avril 2003
Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujourd'hui à 9 h 05 pour examiner diverses questions touchant les jeunes Autochtones vivant en milieu urbain au Canada et, notamment, l'accessibilité, l'éventail et la prestation des services, les problèmes liés aux politiques et compétences, l'emploi et l'éducation, l'accès aux débouchés économiques, la participation et l'autonomisation des jeunes et d'autres questions connexes.
[Traduction]
M. Adam Thompson, greffier du comité: Honorables sénateurs, il est de mon devoir de vous informer de l'absence inévitable de la présidente. Ceci dit, je vais maintenant présider à l'élection d'un président suppléant et je suis prêt à accueillir les motions à cet effet.
Le sénateur Chaput: Je propose la candidature du sénateur Christensen.
M. Thompson: Y a-t-il d'autres candidatures?
Des voix: Non.
M. Thompson: Êtes-vous d'accord?
Des voix: D'accord.
M. Thompson: Adopté.
Je demande au sénateur Christensen d'occuper le fauteuil.
Le sénateur Ione Christensen (présidente suppléante) occupe le fauteuil.
La présidente suppléante: Honorables sénateurs, nous accueillons aujourd'hui des représentantes du Thunder Bay Indian Friendship Centre et de l'Oshki-Pimache-O-Win Education and Training Institute.
Veuillez commencer, s'il vous plaît.
Mme Anne Lesage, directrice générale, Thunder Bay Indian Friendship Centre: Je ne désire pas critiquer, mais de nombreuses études ont été réalisées sur les peuples autochtones. Si nous pouvions empiler tous les rapports publiés sur les questions touchant les peuples autochtones jusqu'à aujourd'hui, nous pourrions probablement en remplir une pièce complète. Je me demande bien combien d'autres enquêtes et études nous aurons besoin pour comprendre les questions qui touchent les peuples autochtones. Ceci dit, je suis prête, encore une fois, à parler de ces mêmes questions. Une commission royale sur les peuples autochtones a eu lieu il y a un certain nombre d'années. Une partie assez substantielle du rapport est consacrée à la jeunesse autochtone vivant en milieu urbain. Nous allons sans doute répéter les mêmes choses sur certains des problèmes auxquels sont confrontés aujourd'hui les peuples autochtones et, plus particulièrement, la jeunesse autochtone, et sur les solutions possibles.
Je veux commencer par parler de certaines des problèmes clés auxquels doivent faire face les jeunes Autochtones de notre collectivité qui vivent en milieu urbain. Je parle à partir de l'expérience que j'ai moi-même vécue en tant que jeune Autochtone provenant d'une petite collectivité qui a dû s'installer dans un centre urbain. Je suis engagée dans le système des centres d'accueil depuis très longtemps. Pour ceux d'entre vous qui ne connaissez pas les centres d'accueil, disons qu'on en retrouve partout au pays et qu'ils ont vu le jour à la fin des années 50. Je viens d'une longue lignée de jeunes qui ont oeuvré dans les centres d'accueil; alors, je parle d'expérience et je parle également à partir de mon expérience comme directrice générale et à partir de ce que je vois aujourd'hui dans nos collectivités.
Vous n'entendrez rien de nouveau ici aujourd'hui sur les problèmes clés qui touchent la jeunesse autochtone qui vit en milieu urbain. Il y a les problèmes qui tournent autour de la question de l'éducation. Nous devons examiner cette question sous l'angle des besoins de la jeunesse autochtone qui vit en milieu urbain, mais aussi, sous l'angle de la jeunesse provenant des communautés des Premières nations.
L'éducation constitue toujours un obstacle pour les jeunes. Nos jeunes gens ne parviennent toujours pas à réussir dans les établissements d'enseignement régulier. Nous savons également qu'ils doivent recevoir une aide aux études dès leur enfance, alors qu'ils vivent encore dans les collectivités des Premières nations. Il faut trouver un moyen de combler ce besoin. Nous savons que lorsque les jeunes Autochtones arrivent dans nos systèmes scolaires, en milieu urbain, certains accusent un retard parfois de deux ou trois ans dans leurs capacités scolaires et, par conséquent, se trouvent désavantagés dès leur arrivée dans nos systèmes scolaires catholique et public.
De plus, lorsqu'ils terminent leur huitième année, la même question se pose lorsqu'ils arrivent dans les écoles secondaires autochtones en milieu urbain. Leur travail scolaire doit être appuyé et ils ont besoin d'aide orthopédagogique pour réussir leurs études.
Les écoles parallèles permettent de résoudre ces problèmes. Ma collègue donnera plus de détails sur l'école secondaire propre aux Autochtones que nous avons dans notre collectivité. Les écoles parallèles sont une façon de résoudre un certain nombre de ces problèmes.
Le gouvernement fédéral a un rôle à jouer, par l'intermédiaire du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, pour trouver une solution aux besoins de la jeunesse autochtone vivant en milieu urbain, et de la jeunesse autochtone en général, en matière d'éducation. Les réductions appliquées il y a des années dans le budget de l'éducation ont eu des répercussions sur l'éducation de notre jeunesse. Incidemment, ce sont nos jeunes qui ont mené la lutte contre les 12 lignes directrices, ou contre leur application, alors, on ne peut certes pas remettre en question ici notre leadership. Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien a un rôle à jouer dans l'examen des programmes et des services en éducation. Le financement est insuffisant. Nous savons que la population autochtone connaît une croissance importante et que près de 70 p. 100 des Autochtones vivent maintenant dans des collectivités urbaines. Le financement accordé aux peuples autochtones n'a pas suivi cette croissance et les effets de cette situation se font particulièrement sentir dans le domaine de l'éducation.
L'accès aux services de santé est un autre problème. En réalité, bon nombre de ces problèmes viennent du fait que les ministères responsables des peuples autochtones et des Premières nations ne prennent pas leurs responsabilités. Et je fais allusion en grande partie aux droits des Autochtones issus de traités. Ces droits initiaux ne sont pas respectés, non plus que les droits relatifs à l'accès à la santé et à l'éducation. Je ne pense pas que nous serions aujourd'hui en train de parler des problèmes de la jeunesse autochtone en milieu urbain, ou de quelque problème que ce soit concernant la jeunesse autochtone, si nous avions été en mesure de régler le problème plus général des droits des Premières nations. Les problèmes dont nous parlons aujourd'hui concernant les jeunes Autochtones et les jeunes Autochtones vivant en milieu urbain n'existeraient pas si nous avions d'abord réglé ce problème plus large.
Je sais, par mon expérience de vie dans cette collectivité, que l'éducation joue un rôle très important pour la jeunesse autochtone lorsqu'il s'agit de réussir dans les initiatives d'emploi et de formation. À titre d'exemple, nous avons récemment effectué une consultation auprès de la jeunesse sur la question des obstacles à l'emploi. Il ressort que le racisme qui sévit dans nos collectivités est l'un de ces obstacles. Notre collectivité est intéressante du fait que nous nous inquiétons de l'émigration de nos jeunes gens vers les États-Unis. On parle du vieillissement de la population, mais on ne parle pas de l'arrivée de jeunes Autochtones dans cette collectivité et de la croissance de la population autochtone. La discussion s'arrête là.
Cette collectivité, par exemple, n'est pas prête à faire face aux pénuries dans les divers secteurs d'emploi. Les gens ne comprennent pas que les jeunes Autochtones qui arrivent constitueront la main-d'oeuvre. Il faut combler le fossé et il faut que les deux parties de notre communauté puissent régler ce problème.
Un des grands obstacles à l'emploi, c'est cette fameuse douzième année, chiffre magique qui ouvre toutes les portes du marché du travail, tant dans le secteur des services que dans celui des corps de métier. Il est connu que les Autochtones doivent surmonter des obstacles pour terminer leur cours secondaire et on en ajoute d'autres lorsque vient le temps d'entrer sur le marché du travail. C'est pourquoi je parle des écoles parallèles et des autres besoins parce que le système d'éducation régulier continue de faire faux bond aux peuples autochtones.
Je vais vous donner un petit exemple. Lorsque nous parlons du racisme en milieu scolaire, oui, nous avons des politiques en matière de relations raciales qui visent à lutter contre ce problème. Ce qui arrive, dans les faits, c'est que les mesures punitives liées à certaines de ces politiques s'adressent injustement aux Autochtones. Nous devons parler de ces choses en termes de politique. Le racisme existe toujours et constitue un obstacle important pour les jeunes. Lorsqu'ils viennent dans nos collectivités, ils font l'objet de nombreuses formes de discrimination raciale et nous devons continuer de chercher à trouver une solution au niveau de la collectivité, de la province et du pays.
Parmi les autres problèmes qui touchent nos jeunes gens figurent le taux de grossesse élevé chez les adolescentes, la pauvreté et la façon de surmonter les nombreux problèmes qui accompagnent la jeunesse. Plus de services doivent être accessibles aux jeunes gens. Je parle de cette question en termes généraux. Nos collectivités et nos nations sont en train de se relever de plusieurs siècles de colonisation et d'assimilation — et je sais que cela peut vous paraître une éternelle rengaine. Nous ne pouvons parler uniquement des jeunes ou de l'application d'un remède temporaire à ce segment de nos collectivités sans prêter attention au tableau global.
Quant à l'accès aux services dans notre collectivité, la façon dont les fonds sont distribués ou accordés fait en sorte qu'il est parfois difficile pour les jeunes d'avoir accès à ces services, selon la catégorie ou la classe à laquelle ils appartiennent. Je sais que ma collègue parlera de la distribution des fonds et de la façon dont cette activité influe sur l'accès aux services.
Lorsque je parle des effets de la colonisation et de l'assimilation, il faut savoir que ce sont des générations successives de membres des Premières nations qui ont été touchés par ces politiques, et que cette situation se poursuit encore, même aujourd'hui. Nos jeunes gens, les membres des Premières nations et tous les Autochtones sont en train de vivre un processus de guérison. Les politiques et les lois initiales élaborées par des gouvernements canadiens successifs n'ont pas fonctionné pour les peuples autochtones. Il faut rebâtir l'estime de soi chez les Autochtones et, en particulier, chez les jeunes Autochtones.
Pour ce qui est de la formation et de l'emploi, comme je l'ai dit plus tôt, nous avons procédé à des consultations auprès de la jeunesse autochtone qui n'entrevoit pas un avenir meilleur; ces jeunes arrivent dans des collectivités autochtones en milieu urbain en croyant qu'ils n'arriveront pas à trouver du travail simplement parce qu'ils sont Indiens ou ils s'attendent à ne trouver que des emplois non pas dévalorisants — je n'irais pas jusque là —, mais peu rémunérateurs, ou qu'ils ne trouveront du travail qu'au sein d'organismes autochtones comme le nôtre. Il faut améliorer l'image qu'ils ont d'eux-mêmes. Il faut relever leur estime de soi et pour le faire, nous avons des programmes comme l'Urban Multi-Purpose Aboriginal Youth Center. Historiquement, les centres d'accueil ont une longue expérience du travail avec les jeunes et dans la formation d'un leadership chez les jeunes. Beaucoup de ceux qui sont passés par les programmes des centres d'accueil ont tiré profit de ces programmes. Nous avions, entre autres, un programme appelé «Petits castors» qui s'adressait aux enfants de six à 12 ans. Il s'agissait de l'un des programmes les plus solides de notre province parce qu'il était centré sur la culture, sur l'estime de soi, sur la fierté et sur les qualités nécessaires pour être un meneur. Ces jeunes ont grandi et sont devenus des meneurs dans nos collectivités autochtones. Ces programmes ont été abolis par le gouvernement provincial vers 1995.
Nous avons reconnu la valeur et l'efficacité de ce genre de travail communautaire auprès des jeunes avant qu'ils atteignent l'adolescence — la capacité de promouvoir chez eux un sentiment d'identité très fort et une grande fierté face à leur héritage culturel. Lorsqu'ils arrivent dans nos centres urbains et dans nos systèmes d'éducation, ils constatent que le programme ne reflète pas le rôle des Premières nations dans ce pays. En effet, un changement doit se produire parce qu'en plus de faire face au racisme, ils doivent faire face à cette idée que l'on semble vouloir perpétuer que les peuples autochtones ne contribuent pas à la société.
Lorsque nous examinons le problème de la grossesse chez les adolescentes, nous savons maintenant que les jeunes Autochtones veulent des familles pour différentes raisons. Lorsqu'ils arrivent dans un centre urbain, c'est une façon de renforcer le sentiment d'appartenance dont ils ont tant besoin. Ils cherchent à récréer leurs propres familles. Ils ont besoin d'appui, il leur faut un sens de la famille et un sens de l'appartenance. Il s'agit souvent d'une triste raison pour commencer une famille, mais nous savons que les raisons qui expliquent la grossesse chez les adolescentes, par exemple, changent.
L'accès aux services de santé est un problème pour de nombreux jeunes gens. Je veux revenir à la question de la pauvreté en termes d'accès aux services pour la jeunesse autochtone. La pauvreté joue un rôle important. Bien qu'il existe des programmes et des services qui s'adressent à la jeunesse autochtone, nous vivons dans un centre urbain et les questions de la pauvreté et du transport, même si elles touchent de nombreuses personnes dans nos collectivités, touchent tout particulièrement les jeunes Autochtones. Le seul fait de trouver du transport dans toute la ville pour avoir accès aux programmes et aux services constitue un problème en soi. La programmation adoptée dans notre centre d'accueil aide à surmonter ce problème et permet aux jeunes de participer à nos activités et de profiter de nos services.
J'aimerais terminer ici cette partie de mon exposé sur les problèmes clés. Je vais revenir sur d'autres bonnes pratiques. Je veux maintenant demander à ma collègue de parler de certaines des questions qu'elle connaît.
Mme Ruth Baxter, directrice générale, Oshki-Pimache-O-Win Education and Training Institute: Je vous remercie de me donner l'occasion de prendre la parole devant le Comité sénatorial permanent sur les peuples autochtones, et tout particulièrement sur la question de la jeunesse autochtone vivant en milieu urbain. Mon exposé comprendra un survol de notre organisme, cernera certains problèmes clés, mettra en relief certains succès et certains défis auxquels doit faire face la jeunesse autochtone, surtout dans le domaine de la formation et de l'éducation postsecondaire, et se terminera par certaines recommandations sur des mesures à prendre.
Je suis membre de la Nation Nishnawbe-Aski que j'appellerai NNA pendant le reste de mon exposé. La NNA est un organisme politique régional qui représente 49 Premières nations qui vivent dans le nord de l'Ontario. Le principal objectif de la NNA est de représenter les aspirations politiques, sociales et économiques des Premières nations faisant partie de la NNA devant tous les paliers de gouvernement.
Le territoire traditionnel de la NNA comprend les deux tiers de la province de l'Ontario. La plupart des collectivités des Premières nations faisant partie de la NNA ne sont accessibles que par la voie des airs ou par des chemins d'hiver. La majorité des Premières nations membres de la NNA ont signé le traité no 9 et plusieurs d'entre elles, établies près de la frontière manitobaine, ont signé le traité no 5.
Les deux langues traditionnelles du peuple de la NNA sont l'ojibway et le cri. En 1996, les chefs de la nation Nishnawbe-Aski ont demandé la création de l'Oshki-Pimache-O-Win Education and Training Institute pour répondre aux besoins actuels et futurs des membres de la NNA en matière de formation et d'éducation postsecondaires, ainsi qu'aux besoins d'autres personnes désireuses d'apprendre. L'Institut est un organisme caritatif, sans but lucratif, doté d'un conseil d'administration dont les membres représentent la grande diversité linguistique, culturelle et géographique des collectivités de la NNA. Sont membres de cette entité les autorités en matière d'éducation de toutes les Premières nations faisant partie de la NNA.
L'Oshki-Pimache-O-Win s'est vu confier un triple mandat par les membres fondateurs de son conseil d'administration. Premièrement, il doit élaborer, concevoir et offrir des programmes et services éducatifs pour répondre aux besoins éducatifs et culturels des membres et des collectivités de la nation Nishnawbe-Aski et d'autres personnes désireuses d'apprendre.
Deuxièmement, il doit renforcer, organiser et coordonner la prestation de programmes et de services en matière de formation et d'éducation postsecondaires qui valorisent et appuient la culture, les traditions, les enseignements, les croyances, la langue, les valeurs et les modes de vie de la nation Nishnawbe-Aski.
Troisièmement, il doit établir des protocoles d'entente et des partenariats avec des établissements d'enseignement postsecondaire existants et les collectivités de la nation Nishnawbe-Aski aux niveaux local, régional, national et international.
Depuis l'an 2000, l'Institut a élaboré et administré des cours et des programmes en très grande partie en partenariat avec d'autres organismes. En plus de l'élaboration et de l'administration des programmes, l'Institut a réalisé de la recherche financée. Un projet réalisé en partenariat avec l'Ontario Native Women's Association et le Centre for Rural and Northern Health Research de l'Université Lakehead vise à examiner les besoins en information sanitaire des femmes autochtones en Ontario. De plus, l'Institut a effectué une recherche sur les valeurs éducatives et les croyances de la nation Nishnawbe-Aski.
Certains des problèmes clés auxquels nous sommes confrontés, que nous avons reconnus nous-mêmes et qui ont été fait l'objet d'une publication dans la documentation scientifique, comprennent les problèmes suivants, que j'introduirai par une préface. Je vous ai donné l'emplacement géographique de nos collectivités; ainsi, vous pouvez considérer tout le nord de l'Ontario comme le lieu de résidence des membres de la nation Nishnawbe-Aski. À cause de l'absence d'infrastructures communautaires et de l'isolement géographique de nos communautés, la plupart des jeunes doivent quitter leur famille et leur foyer pour fréquenter les établissements d'éducation secondaire et postsecondaire dans un milieu urbain. Cette nécessité entraîne de nombreux problèmes qui ont été documentés et étudiés en détail. Pour le compte rendu, je vais en passer quelques-uns en revue.
D'abord, il y a le problème des autorités compétentes. Le peuple autochtone est souvent négligé dans le jeu des compétences gouvernementales. Lorsque l'étudiant autochtone de plein droit quitte les limites de la réserve, il quitte la compétence fédérale pour relever de la compétence provinciale et municipale. Les étudiants finissent toujours par fréquenter des écoles secondaires administrées par des conseils scolaires ou des collèges ou universités relevant des provinces. Il s'agit d'établissements étrangers insensibles à l'héritage culturel de ces étudiants.
L'autre problème découle des systèmes d'éducation et des dichotomies culturelles. Les cultures autochtones et les cultures canadiennes d'origine européenne sont multiples et distinctes. Tant et aussi longtemps que les lois fédérales et provinciales ne reconnaîtront pas cette réalité, la population autochtone continuera d'être marginalisée au sein des programmes existant dans les systèmes d'éducation actuels.
Lorsqu'ils fréquentent les établissements d'enseignement urbains, les étudiants autochtones font face à un système rigide. Les modes d'apprentissage sont différents du fait que nous avons des cultures différentes. Il existe de très nombreuses études universitaires attestant de cette situation. Je vous cite un passage du rapport de l'Assemblée des premières nations intitulé «Tradition and Education: Towards a Vision of Our Future,» publié en 1988, page 79:
[...] reconnaît que les constatations préliminaires de certaines écoles des Premières nations indiquent qu'une approche holistique à l'éducation se révèle un facteur de succès dans l'apprentissage de l'élève. Cette approche à l'enseignement met l'accent sur le traitement simultané de l'information dans son ensemble. Les données indiquent que l'influence culturelle des enfants des Premières nations favorise une stratégie d'apprentissage qui tend à refléter une capacité à synthétiser des éléments d'information séparés en un tout de manière à obtenir une bonne compréhension de la question. Au contraire, les enfants non autochtones ont tendance à synthétiser l'information en la morcelant en éléments très spécifiques pour parvenir à leur compréhension selon leur influence culturelle.
Un autre problème clé dont ma collègue a parlé est le racisme. Pour ne pas répéter ce qu'elle a dit, j'aimerais attirer votre attention sur une étude effectuée récemment à Thunder Bay et intitulée «A Community of Acceptance: Respect for Thunder Bay's Diversity.»
Il s'agit d'un document très complet accessible sur l'Internet. Je n'ai pas le nom de l'auteur, car je n'ai copié que les éléments principaux du document. Si vous voulez cette information, vous pourrez probablement me contacter plus tard. Cette étude vous donne une bonne perspective historique de la situation qui existe actuellement à Thunder Bay et il s'agit certainement d'un bon document à lire dans le cadre du travail qu'entend réaliser le présent comité. Je n'ai pas l'intention de creuser dans les détails, mais cette étude reconnaît qu'il y a du racisme à Thunder Bay, particulièrement à l'égard des Autochtones. Ces derniers font l'objet de racisme dans toutes sortes de situations dans cette ville, que ce soit dans le secteur des services, comme les hôtels et les restaurants, ou dans les écoles.
L'autre problème dont nous n'avons pas parlé, ce sont les forces policières. Il ne fait aucun doute que les forces policières de Thunder Bay font preuve de racisme à l'endroit des Autochtones, et on retrouve probablement la même situation dans d'autres centres urbains. L'étude le démontre clairement.
Nous sommes brimés par les lois, les politiques et les règlements qui sont en place. Plus particulièrement, dans les écoles de Thunder Bay, où sont les modèles de comportement auxquels les jeunes Autochtones peuvent s'identifier? Où que vous alliez dans les écoles de la ville, où la population autochtone est estimée à 12 p. 100, vous ne trouverez pas 12 p. 100 d'enseignantes ou d'enseignants autochtones. En fait, vous pouvez probablement compter sur les doigts de la main le nombre d'enseignantes et d'enseignants autochtones dans les conseils scolaires de Lakehead, aussi bien public que séparé.
D'autres problèmes clés sont liés aux ressources, surtout financières. Mon collègue a signalé que lorsque nos étudiants fréquentent l'école secondaire ou les établissements d'enseignement postsecondaire en milieu urbain, ils ne reçoivent pas de fonds suffisants pour assurer leur subsistance, et pour subvenir aux autres besoins qu'implique le fait de fréquenter un établissement d'enseignement postsecondaire dans un milieu urbain. Un financement insuffisant constitue très certainement un problème clé.
En ce qui concerne la technologie, ce fut un grand événement dans nos collectivités isolées lorsque nous avons reçu notre premier appareil de téléphone. Grâce à l'avènement de la télévision, du cinéma et, maintenant, de l'Internet, nous sommes exposés au monde extérieur. Je ne pense pas que le monde extérieur sache qui nous sommes, bien que nous utilisions, je pense, cette technologie pour tenter de communiquer notre message au reste de la population.
La raison pour laquelle j'en parle, c'est que nous avons besoin des ressources pour pouvoir instruire et former nos gens, et surtout nos jeunes, pour qu'ils puissent vivre en harmonie dans ce monde de haute technologie. J'aime le mot innovation. Le gouvernement fédéral se plaît à associer les mots technologie et innovation. C'est un mot très à la mode dans les cercles gouvernementaux à l'heure actuelle. Encore une fois, si votre profil ne correspond pas aux paramètres et aux lignes directrices conçues pour cette catégorie particulière, alors, vous n'avez pas accès à cette technologie et à l'innovation. Les Autochtones sont probablement parmi les gens les plus innovateurs que nous ayons dans ce pays. Le fait qu'ils aient survécu aussi longtemps le démontre. Il est assez ironique que dans les programmes gouvernementaux, on applique des paramètres à la signification du mot «innovation».
Je veux maintenant dire un mot sur certains de nos succès et sur certains défis que nous allons devoir relever. Deux écoles secondaires ont été créées pour les élèves autochtones sur notre territoire. Une à Sioux Lookout, l'école secondaire de Pelican Falls, et l'autre, l'école secondaire Dennis-Franklin-Cromarty, à Thunder Bay. Ces deux écoles secondaires ont été créées pour répondre aux besoins particuliers des élèves autochtones qui fréquentaient l'école secondaire dans le district de Sioux Lookout sur le territoire Nishnawbe-Aski. Vous pouvez vous demander pourquoi on a créé ces écoles. Elles ont été créées pour répondre à des besoins particuliers, surtout en ce qui concerne l'administration du programme scolaire, l'enseignement de la culture et l'environnement même de l'école.
Dans combien d'écoles secondaires ou élémentaires avez-vous vu de l'art autochtone sur les murs? Il n'y en a pas beaucoup, surtout dans nos villes. On voulait que les élèves se sentent chez eux, qu'ils fassent partie de ces établissements particuliers et qu'ils deviennent des membres qui apportent une contribution à la vie de l'école.
Il y a également un projet de création d'une école primaire autochtone à Thunder Bay. En fait, les chefs de la nation Nishnawbe-Aski ont adopté une résolution en ce sens à leur dernière réunion. Encore une fois, vous devriez vous demander pourquoi.
Le troisième succès que nous avons enregistré a été la création d'établissements de formation postsecondaire qui répondent plus particulièrement aux besoins des Autochtones. Oshki-Pimache-O-Win a été créé pour répondre à ces besoins précis, surtout aux besoins de formation et d'enseignement postsecondaires, et pour offrir des services et des programmes qui n'existent pas dans les établissements réguliers.
Même avec tout le travail que nous avons fait, obtenir la création de ces établissements s'est révélé une bataille de tous les instants, et continue de l'être. Nous sommes empêtrés dans les mêmes vieilles questions de champ de compétence. Les organismes de financement nous disent que nous ne sommes pas un établissement reconnu parce que nous ne sommes pas mandatés ou régis par les lois provinciales ou fédérales.
L'argument que je veux faire valoir, c'est que nous avons notre propre compétence. Par conséquent, nous devrions être capables de créer nos propres établissements. C'est un domaine très vaste. Le gouvernement devrait nous appuyer dans nos initiatives visant à créer nos propres communautés, nos propres établissements. C'est comme cela que nous étions avant le contact avec les Européens; nous avons survécu. Nous continuons de survivre et de nous épanouir malgré la réalité à laquelle nous devons faire face.
Je pourrais continuer comme cela encore longtemps, mais j'ai décidé de limiter mon intervention à la question de l'éducation et de la formation parce qu'il s'agit de mon domaine d'activité. J'ai maintenant quelques recommandations à vous présenter.
Nous avons des études scientifiques; j'en ai apporté quelques-unes. Nous avons des faits documentés, des chiffres et des constatations. Nous avons eu du succès malgré les obstacles que nous avons dû surmonter.
Je recommande que les gouvernements agissent. Il est intéressant que le nom de notre étude soit «Un plan d'action pour le changement.» Je recommande la mise en oeuvre des recommandations qui ont été formulées dans toutes les études précédentes. Nous en avons une bibliothèque pleine. La population autochtone est en pleine croissance et continuera d'augmenter, ce qui modifiera considérablement les données démographiques des villes. J'ai donné l'exemple de Thunder Bay. Le gouvernement doit prendre des mesures d'action pour relever ce défi.
Des initiatives heureuses, comme l'Oshki-Pimache-O-Win Education and Training Institute et d'autres établissements autochtones au Canada, doivent être reconnues dans les lois, les politiques et les règlements des gouvernements.
En terminant, il est étonnant que nous soyons parvenus à accomplir tout ce que nous avons accompli malgré un financement aussi maigre. Imaginez ce que nous pourrions faire si nous pouvions compter sur une véritable volonté politique d'appui à nos objectifs.
Ma recommandation, c'est que le présent comité prenne ce plan d'action pour le changement et qu'il le fasse fonctionner. Honorez les engagements, les promesses et les traités des gouvernements antérieurs. Meegwetch.
La présidente suppléante: Comme vous l'avez souligné, votre ouvrage — nous hésitons à employer le mot étude parce que, comme vous, nous sommes inquiets du sort qui leur est souvent réservé — s'appelle «Un plan d'action pour le changement». C'est exactement ce que nous essayons de faire. Nous avons examiné des études et des rapports antérieurs pour voir quelles recommandations ont été appliquées et lesquelles auraient dû l'avoir été.
Des responsables des ministères sont venus nous expliquer quelles lois étaient en place et quels programmes fonctionnaient et lesquels ne fonctionnaient pas. Nous avons également entendu d'autres témoins, comme nous vous écoutons aujourd'hui, pour savoir quels sont, à vos yeux, les principaux problèmes. Nous vous demandons de nous dire ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas.
S'il vous plaît, assurez-vous que nous avons des copies de vos exposés ainsi qu'un exemplaire de l'étude sur le racisme dont a fait état Mme Baxter.
Le sénateur St. Germain: Beaucoup de témoins ont comparu devant le comité. Ce fut très intéressant. Il y a de nombreuses similitudes dans les problèmes qui existent d'un bout à l'autre du pays. Vous avez toutes deux soulevé la question des modèles de comportement et des enseignantes et enseignants. Cette situation est bien réelle, mais nous revenons au problème fondamental qui est de savoir comment nous pouvons amener nos Autochtones à un niveau d'éducation concurrentiel qui leur permettrait d'accéder aux programmes d'éducation postsecondaire et ensuite, d'accéder à la profession d'enseignant.
Vous avez parlé des écoles parallèles. En tant que Métis du Manitoba, j'ai aussi du sang autochtone. Je pense comprendre assez bien les enjeux, mais je ne suis évidemment pas expert en la matière.
Nous savons ce que sont les écoles parallèles. Lorsque les enfants métis et autochtones arrivent à Vancouver, on les envoie dans ces écoles, mais les normes en matière d'exigences laissent beaucoup à désirer. Si nous mettons nos enfants autochtones dans ces écoles, nous devons être certains qu'elles offrent des programmes concurrentiels. Il n'y a aucune raison pour qu'il en soit autrement. J'ai grandi avec des Autochtones, des Métis et des gens de différents milieux, mais nous étions tous logés à la même enseigne.
Pourquoi faisons-nous face à un tel problème, particulièrement à l'extérieur des réserves? Je ne sais pas si les enfants nés dans les centres urbains vivent les mêmes difficultés. Pourriez-vous nous décrire brièvement la situation, s'il vous plaît?
Mme Baxter: J'ai grandi à une époque où il n'y avait pas d'écoles dans les collectivités autochtones d'où je viens, dans le nord de l'Ontario. Moi, j'étais pensionnaire. La réussite scolaire dépend aussi des aptitudes de chacun. En ce qui me concerne, j'ai excellé dans toutes les matières.
À l'époque, il n'y avait aucun programme spécial pour les Autochtones, j'ai donc suivi le système scolaire ordinaire de l'Ontario et j'ai réussi. Je n'ai jamais perdu ma langue ni ma culture. Je parle et j'enseigne toujours ma langue dans notre institut. Les normes et les exigences auxquelles j'ai dû me conformer étaient celles du système dans lequel j'ai évolué.
J'ai également reçu de l'aide pour vivre au quotidien loin de ma famille. J'ai vécu une expérience enrichissante. Lorsque mes enfants ont fréquenté des écoles en ville, ils ont réussi probablement parce que j'étais un modèle de comportement pour eux. Nul besoin de dire qu'ils n'avaient pas ces modèles dans les écoles de Thunder Bay.
L'une de mes quatre filles a choisi l'enseignement. Elle n'a jamais participé à quelque programme particulier que ce soit destiné aux Autochtones. Elle possède un diplôme en beaux-arts et un baccalauréat en éducation de l'Université Lakehead. Elle a posé sa candidature au conseil scolaire de Lakehead pour obtenir un poste d'enseignante. On ne l'a jamais appelée, pas même pour une entrevue. D'ailleurs, elle n'a jamais reçu d'accusé de réception de sa demande d'emploi. Je crois qu'elle avait mentionné le fait qu'elle est Autochtone. Comme vous l'avez dit, on l'a automatiquement mise dans une catégorie à part en pensant qu'elle n'avait pas le niveau requis puisqu'elle est Autochtone. Une fois de plus, le racisme a refait surface. Cela arrive à tous les niveaux. Si vous êtes Autochtone, vous êtes catalogué.
Le sénateur St. Germain: Vous avez toutes les deux exprimé vos préoccupations au sujet du financement. Le dilemme que je vois se profiler dans ce pays, c'est qu'un très grand nombre de jeunes Autochtones migrent vers les centres urbains. Ils quittent les réserves. Le financement du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien est destiné essentiellement aux Autochtones vivant dans les réserves. Le gouvernement fédéral a une responsabilité fiduciaire à l'égard de ces gens. Force est de constater que l'Ontario a tenté de créer des institutions. Deux écoles secondaires et une école élémentaire ont ouvert leurs portes. Je ne sais pas si elles dépendent de la province. Le plus grand dilemme auquel nous faisons face dans ce pays est que le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien reçoit des milliards de dollars, mais qu'au moment où les Autochtones quittent leur réserve, sa responsabilité semble s'éteindre. Nous ne savons alors que faire pour combler les besoins en formation et en éducation de toutes ces personnes puisque ces fonds ne leur sont pas destinés.
Notre comité tentera de régler ce problème. Certains d'entre nous déplorent le fait que le Canada traite les immigrants qui ne parlent même pas une de nos langues officielles mieux que ses propres Autochtones.
Avez-vous parlé à l'Assemblée des premières nations et à vos dirigeants de cette grande migration et du fait que les fonds du ministère ne suivaient pas? Vous dites que ces Autochtones se perdent dans les failles du système. Cela tient peut-être à la façon dont la structure est établie.
Mme Lesage: Nous parlons ici de questions de compétence. Ma collègue a dit que les Premières nations échappaient au système. Une fois que les Autochtones ont quitté leur communauté, leur réserve ou leur collectivité d'origine, les responsabilités du gouvernement fédéral s'éteignent. C'est un grave problème.
La Commission royale sur les peuples autochtones a conclu que la transférabilité des droits et l'accès aux services sont de la responsabilité du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien ainsi que du gouvernement fédéral. Plus tôt, j'ai évoqué la satisfaction des besoins de toutes les couches de la population autochtone. Quel que soit le groupe visé, il faut tenir compte des ententes d'origine. Le gouvernement fédéral doit respecter les droits issus de traités et les droits ancestraux de tous les Autochtones.
Dans les différentes consultations auxquelles j'ai participé, on a souvent abordé cette question et on a même envisagé la possibilité de créer les moyens de respecter sans condition les droits des Autochtones quittant les réserves pour aller s'installer dans des centres urbains. De la sorte, on respecterait le droit des Autochtones de recevoir des prestations de maladie et du financement pour l'éducation, quel que soit l'endroit où ils vivent.
J'aimerais revenir sur ce que vous avez dit un peu plus tôt au sujet des écoles parallèles et des normes d'apprentissage. Permettez-moi de vous raconter une anecdote. L'Université Lakehead de Thunder Bay offre un programme de formation pour les enseignants autochtones. Il y a plusieurs années, j'avais les mêmes craintes à l'égard des normes appliquées dans ces écoles. Vous y avez fait allusion et expliqué comment les gens étaient expédiés dans ces établissements dès leur arrivée dans un centre urbain.
Même si je reconnais qu'il faut s'attaquer à ce problème, je dois rappeler que les établissements d'enseignement autochtone et les écoles parallèles sont là pour aider les gens et répondre à des besoins culturels. À cet égard, ce type d'institution offre un grand potentiel. Il faut aussi s'occuper de la question des normes. Les jeunes Autochtones sont aux prises avec toutes sortes de problèmes et certaines de ces écoles réussissent à combler leurs besoins. Je ne parle pas des normes appliquées dans toutes les écoles du Canada ni de la façon dont elles sont élaborées ou mises en oeuvre. Je ne fais référence qu'au succès réel qu'ont obtenu les écoles parallèles en Ontario. D'ailleurs, certains programmes scolaires sont dispensés par la Ontario federation of Indian friendship centres.
Je ne peux pas me prononcer sur ces problèmes. Toutefois, il n'est pas question d'imposer aux Autochtones des normes de formation ou d'enseignement inférieures. Les Autochtones doivent être soutenus et reconnus pour ce qu'ils sont, et il ne faut pas oublier qu'ils font partie intégrante d'une société qui doit les traiter de manière équitable. Pour l'instant, ce n'est pas le cas. Cela fait des générations que les gens perçoivent ce type de sentiment et d'attitude. Pour rétablir l'estime de soi et la fierté chez les jeunes, il faut faire un retour en arrière et voir la situation dans une perspective historique. Si nous voulons que nos jeunes aient une vision, des rêves et des aspirations, nous ne pouvons pas les traiter isolément; nous devons nous occuper des Premières nations dans leur ensemble.
Il faut régler les grands problèmes des jeunes autochtones, qu'ils vivent à l'intérieur ou à l'extérieur des réserves, dans des collectivités urbaines. Je vous rappelle que le gouvernement fédéral doit respecter ses obligations fiduciaires à l'égard des Premières nations, quel que soit l'endroit où elles sont établies. Il faut aussi régler la question des compétences car lorsque les Autochtones quittent leur communauté, il y a un grand vide à ce chapitre.
Voilà donc les problèmes à corriger. Il faut respecter les Autochtones et leurs dirigeants tout en aidant les jeunes à développer leur estime de soi. Si la même estime n'est pas accordée aux Premières nations et à leurs leaders, ce problème doit être corrigé.
Le sénateur Carney: J'ai deux questions. La première ne s'adresse à aucun témoin en particulier, mais je la poserai à Mme Lesage. J'ai enseigné à des Autochtones et à des non-Autochtones à l'université. Je me suis aperçue que même si chacun d'eux voyait les tâches assignées différemment selon la façon dont il captait ou présentait l'information, il devait néanmoins répondre à des normes spécifiques pour décrocher son diplôme car il était appelé à entrer sur un marché de l'emploi où règne une concurrence féroce. C'est donc quelque chose qui m'intéresse.
Dans quelle mesure estimez-vous que la transmission de la culture relève des Autochtones, des aînés et des familles par rapport au système scolaire normal? Si le système scolaire vise à produire des gens hautement qualifiés et performants, le défi est de taille. Où fixez-vous la limite entre les institutions, les aînés, les familles autochtones ou encore les modèles de référence comme vous-même à l'égard de la responsabilité première de la transmission de l'héritage culturel? Je ne suis pas sûre que ce soit au gouvernement ou aux institutions d'assurer la diffusion de la culture.
Mme Lesage: Je ne suis pas d'accord avec vous. En tant qu'Autochtones, nous avons tous la responsabilité de conserver notre culture, nos enseignements et notre mode de vie traditionnel. Dans les établissements courants, ces valeurs ne sont pas respectées et on ne comprend même pas pourquoi la culture joue un rôle si important. Je ne crois pas nécessairement que ce soit aux établissements normaux de s'en occuper, mais je considère impératif de donner aux Autochtones la possibilité de le faire au sein de ces établissements.
Le sénateur Carney: Vous faites une distinction claire que j'apprécie.
Ma deuxième question s'adresse aussi à vous. Des témoins ont évoqué la fragmentation des services. Vous avez parlé de la division des compétences et du fait que beaucoup d'agences offraient de nombreux services. On n'a cessé d'insister, devant ce comité, sur la nécessité de créer des centres pour que les jeunes puissent s'y réunir en toute sécurité. Il y a déjà les centres d'amitié. Quelle distinction faites-vous entre les centres d'amitié, que l'on tient d'ailleurs en très haute estime, et les centres pour la jeunesse; pensez-vous qu'il faille les séparer ou les intégrer? Pourquoi un centre d'amitié ne serait-il pas un lieu sûr pour les jeunes? Cela permettrait d'éviter la fragmentation du financement.
Mme Lesage: Dans notre centre, nous avons mis en place l'Initiative des centres urbains polyvalents pour les jeunes Autochtones. Les centres d'amitié ont aussi changé. Lorsque j'étais jeune, ces centres étaient au coeur de la collectivité et ils étaient axés sur des activités de développement communautaire. Il y avait un magasin de souvenirs. Le centre offrait peu de programmes, mais il était tourné vers la communauté. C'était un endroit où les Autochtones pouvaient se retrouver à Thunder Bay. Cependant, l'expansion, le développement et l'offre de services ont donné lieu à un nouveau type de centre d'amitié, qui a fait place à la bureaucratie et à la paperasserie; les choses ont vraiment changé. Nous avions l'habitude d'un centre d'amitié fondé sur un concept ouvert et créé par et pour la communauté.
Le sénateur Carney: Et aussi des directeurs administratifs.
Mme Lesage: Autant que je sache, nous avons toujours eu un directeur administratif et le membre fondateur de notre centre d'amitié est bien connu dans le mouvement partout en Ontario. Il faut savoir que les centres d'amitié se sont particulièrement illustrés en Ontario pour le développement de la prestation de services. Notre centre offre 11 programmes différents et nous avons mis au point une grande gamme de services pour l'ensemble de la communauté, alors que notre centre avait été bâti à l'origine par des jeunes et quelques dirigeants influents de la collectivité. Lorsque vous envisagez de remplacer une organisation communautaire peu politisée qui défend les intérêts des citoyens, s'occupe de leurs problèmes, reste au contact des gens et s'assure qu'ils obtiennent les services voulus, pour passer à un organisme de prestation de services, tout change. J'ai vécu cette expérience en tant que directrice administrative de notre centre lorsque nos programmes ont commencé à prendre de l'expansion. La prestation de services n'a rien à voir avec la mission qu'avait notre centre dans les années 60 ou n'importe quel autre centre au Canada. Il a fallu respecter des règles, et les centres d'amitié ont dû offrir toute une série de programmes sans prendre en compte les nécessités propres à la collectivité ou les différentes approches à l'égard d'un programme, d'un problème ou d'un service particulier. Nous avions des programmes et des politiques passe-partout qui ne répondaient pas aux besoins de chaque communauté. La voix des jeunes Autochtones vivant en milieu urbain s'est moins fait entendre, dans une certaine mesure, à cause de la nouvelle orientation axée sur les services. Notre programme favorise le renforcement de l'autonomie et la participation des jeunes et nous continuons de l'appliquer. Toutefois, les besoins des jeunes Autochtones vivant en milieu urbain ont évolué. Même si les centres d'amitié ont eu un statut à part et ont toujours offert des services à chaque Autochtone venu s'établir dans une zone urbaine, la nature du travail a changé.
Thunder Bay compte une forte population autochtone. Celle-ci tourne autour de 18 000 à 20 000 personnes. Nous aspirons à offrir des services à tous ces gens. La plupart de ceux qui vivent à Thunder Bay sont des jeunes. Lorsque nous examinons les tendances démographiques, nous voyons bien que les collectivités urbaines doivent offrir des centres pour les jeunes, un peu sur le modèle des centres d'amitié. Nous avons joué un grand rôle dans la promotion du leadership chez les jeunes. Moi-même, je suis passée par les centres d'amitié. Les besoins ont changé en milieu urbain et les jeunes Autochtones veulent un endroit où se retrouver et se sentir chez eux.
Le sénateur Pearson: Madame Lesage, j'aimerais revenir sur vos commentaires au sujet du renforcement des capacités des jeunes car c'est une question qui m'intéresse. Pour que les jeunes développent leur estime de soi, il faut leur donner très tôt la chance de s'engager activement dans leur milieu, que ce soit dans un cadre éducatif ou sportif ou encore au sein d'un club. Au cours de nos visites, nous avons beaucoup entendu parler de l'importance des sports ainsi que de l'incidence positive d'un soutien additionnel dans ce sens et des infrastructures sportives.
Pouvez-vous nous préciser toutes les deux comment vous travaillez au sein de votre centre d'amitié pour renforcer l'autonomie des jeunes? Je pense plus particulièrement à ceux âgés de moins de 18 ans. Avez-vous un programme quelconque? Quelle influence peuvent avoir les enfants sur leur environnement dans le cadre scolaire, je ne fais pas référence au niveau postsecondaire, mais aux écoles autochtones, aux écoles secondaires, et cetera?
Mme Lesage: Je commencerai par vous parler des programmes offerts aux parents en général et aux jeunes parents en particulier. Il y a d'abord le programme PACE, destiné aux enfants de 0 à 6 ans, qui a pris de l'ampleur au sein de nos collectivités au fil des ans. Nous travaillons avec les bébés et les jeunes enfants, tout en incorporant la culture aux programmes de formation au rôle de parent et en travaillant avec les petits et les nourrissons. Nous avons des programmes d'autonomisation des jeunes, dans le cadre de l'Initiative des centres urbains polyvalents pour les jeunes Autochtones. Cependant, actuellement, nous n'avons rien pour les 6 à 12 ans. Ce manque était comblé par un programme provincial appelé «Little Beavers», mais, comme je l'ai dit, ce programme a été supprimé. Nous tentons de combler le vide au moyen des ressources à notre disposition. Il convient toutefois d'assurer la continuité des programmes depuis le plus jeune âge jusqu'à l'adolescence afin d'inculquer à ces jeunes une idée de leur héritage culturel et de les rendre fiers de leur identité. Pour réussir dans la vie, ces jeunes doivent se sentir forts et comprendre qui ils sont et d'où ils viennent.
Nous commençons avec les enfants de 0 à 6 ans, mais nous essayons de combler le vide pour les 6 à 12 ans. Pour ce faire, nous avons recours à l'Initiative des centres urbains polyvalents pour les jeunes Autochtones.
Le sénateur Pearson: Madame Baxter, voulez-vous ajouter quelque chose au sujet du cadre scolaire? J'ai passé la journée d'hier avec des écoliers, dont des Autochtones, qui se plaignaient de leur manque de participation à tout ce qui se fait dans leur école.
Mme Baxter: J'aimerais citer deux ou trois exemples. Dans les écoles secondaires autochtones dont j'ai parlé, les élèves ont la possibilité de jouer des rôles de premier plan, particulièrement au sein des conseils étudiants. Ils s'engagent pleinement dans les activités ainsi que dans les sports qu'ils pratiquent et d'autres programmes spéciaux. Ils sont en concurrence avec d'autres écoles secondaires pour des programmes de volley-ball et de hockey, par exemple.
Au sein de nos communautés, l'organisation politique de la nation Nishnawbe-Aski prévoit la participation de représentants des jeunes aux conférences des chefs. Ces jeunes jouent pleinement leur rôle de délégués dans les réunions de chefs. Le Conseil des jeunes de la nation Nishnawbe-Aski représente tous les jeunes de notre territoire.
J'aimerais revenir à la première question concernant les écoles parallèles. Quand on prononce le mot «Montessori», on pense immédiatement à des écoles ayant des normes élevées. Les écoles parallèles autochtones doivent avoir le même niveau que les écoles Montessori. C'est notre objectif. C'est la philosophie que nous pratiquons lorsque nous créons ces écoles. Selon moi, les normes auxquelles doivent se conformer les écoles parallèles autochtones ne doivent pas être plus faibles qu'ailleurs. Je compte sur ce comité pour faire passer le message.
Nous ouvrons ces écoles parce que les établissements d'enseignement normaux ne comblent pas nos besoins. Il faut bien que quelqu'un s'occupe de transmettre notre culture, notre langue, notre histoire et notre vision du monde. On n'a pas ce souci dans les établissements ordinaires. J'ai oublié le terme employé par le sénateur Carney, mais nous vivons dans un monde de concurrence. Nous le savons. Nos écoles devront aussi être concurrentielles. Les écoles élémentaires et secondaires qui ouvriront leurs portes serviront à former nos jeunes. Nous leur apprendrons à diriger, à avoir l'estime de soi et à être compétitifs — si c'est bien le mot à employer. C'est presque un mot étranger. L'école n'est pas censée être un lieu d'apprentissage de la concurrence dans notre vision du monde, pourtant c'est ce que nous entendons sans cesse. Dehors, c'est le règne du plus fort. Nous essayons de nous adapter à cet environnement, mais il nous paraît très étrange.
Mme Lesage: J'ajouterai que nous savons pertinemment qu'il faut ouvrir des écoles parallèles. Les instituts de technologie des Premières nations, comme celui dont fait partie Ruth, constituent une part importante du système. Mais il y a aussi d'autres moyens. Permettez-moi de vous présenter une autre approche innovatrice en matière d'autonomisation des gens grâce à l'éducation.
L'exemple que je vais vous citer est tiré de notre expérience au sein de la communauté. Je siège à un conseil appelé Negahneewin, qui fait partie du Confederation Community College de Thunder Bay. Il s'agit «d'un collège à l'intérieur d'un collège». Nous savions que nous n'avions pas les moyens de créer notre propre établissement d'enseignement postsecondaire pour les Autochtones. Toutefois, grâce au travail des membres de la communauté et aux relations de partenariat avec les Nishnawbe-Aski, nous avons fondé le Negahneewin College of Indigenous Studies. Je dois rendre hommage à ce collège pour avoir si bien intégré la volonté des Autochtones de contrôler leur programme d'enseignement. Nous avons beaucoup travaillé avec le collège local pour obtenir cette reconnaissance.
Depuis peu, le Negahneewin College of Indigenous Studies offre un programme d'études appliquées. Il est l'un des seuls en Ontario à le faire. Ce programme, très rigoureux, est axé sur le leadership des Autochtones et sur le développement communautaire. C'est un programme de quatre ans. Voici donc un autre exemple innovateur illustrant la façon de combler les besoins des Autochtones en tenant compte de leurs valeurs, de leur vision du monde ainsi que de leur droit à contrôler leur propre éducation et à choisir les programmes et les services qui conviennent le mieux à la communauté.
Le conseil compte également des membres de la collectivité. Les étudiants, qui participent activement aux travaux du conseil, contribuent à la prise de décisions relatives aux programmes du collège destinés aux Autochtones. Une autre façon de rendre les jeunes autonomes est de les faire participer activement aux travaux des conseils et des comités des centres d'amitié. Les jeunes prennent part à la conception et à la mise en oeuvre de l'Initiative des centres urbains polyvalents pour les jeunes Autochtones. Il existe donc différentes manières de renforcer l'autonomie des jeunes pour en faire les leaders de demain.
Le sénateur Comeau: J'aimerais vous poser une question. Je viens d'une communauté rurale où un groupe de Canadiens a dépendu pendant des siècles des ressources terrestres et marines, ce qui a grandement influencé sa culture, son identité et son héritage culturel. De même, votre attachement à la terre et à la mer a influencé la culture, l'identité et l'héritage de votre peuple. Ma question est simple. Est-il possible de conserver cette identité après avoir quitté le milieu auquel on est attaché pour aller s'établir dans une zone urbaine?
Mme Lesage: Tout ce que je peux dire, c'est que la terre et la mer ne quittent jamais les Autochtones, où qu'ils aillent. Nous sommes unis spirituellement et culturellement à la terre. Lorsque j'étais jeune, j'avais un mode de vie beaucoup plus axé sur la chasse, le piégeage, la pêche et la vie dans la nature. Nous nous nourrissions du produit de nos prises. Lorsque je suis arrivée dans un centre urbain, on m'a fait sentir pour la première fois que j'étais différente parce que je suis Autochtone. Parfois, on ne comprend pas vraiment qui on est tant qu'on n'y est pas forcé, comme c'est peut- être le cas quand on vient vivre en ville. À bien des égards, des programmes comme ceux des centres d'amitié nous ont aidés à retrouver notre spiritualité et notre culture. Nous en avions besoin.
Mme Baxter: J'aimerais aussi faire quelques observations à ce sujet.
Il faut se rappeler que les Ojibwa, les Cris, les Mohawk et tous les Autochtones vivant sur cette terre appelée le Canada sont les premiers habitants de ce pays. La culture autochtone est très diversifiée. En tant qu'Ojibwa, je serai toujours attachée à ma culture, que je vive à Thunder Bay ou quelque part en Europe. Elle fait partie de moi. Lorsque je suis née, sur une île du nord de l'Ontario, il n'y avait ni hôpital ni service de santé. C'est ma grand-mère qui m'a mise au monde. Je sais que nous avons de la chance, comme peuple vivant au nord de l'Ontario, de ne pas avoir trop été touchés ou influencés par la civilisation moderne. Notre culture est unique. Elle est différente et riche par rapport au courant culturel canadien. Comme je l'ai dit dans mon exposé, tant que les gouvernements et les autres peuples n'auront pas reconnu et accepté cela, la préservation de cette culture sera un combat perpétuel, d'autant plus que nous ne recevons pas d'aide financière des gouvernements pour mettre en oeuvre nos institutions, nos programmes et les services requis au niveau de la communauté. Si nous disposions des infrastructures et des fonds nécessaires pour construire des écoles secondaires et postsecondaires au sein de nos collectivités, nous n'aurions pas besoin de les abandonner. Actuellement, la situation nous force à le faire. Nous n'avons d'autre choix que de partir si nous voulons suivre des études secondaires ou postsecondaires, trouver un emploi, bénéficier de soins de santé ou de tout autre service que le reste de la société prend pour acquis.
Nous ne perdrons jamais notre culture. Notre peuple sera toujours là car nous sommes la terre, la mer, l'air et le monde qui nous entoure.
Le sénateur Chaput: Le gouvernement fédéral envisage la création de nouveaux conseils ou commissions scolaires autochtones. Ces commissions, établies dans toutes les régions du pays, seraient de compétence provinciale.
À votre avis, en quoi ce type de réforme permettrait-il d'améliorer les résultats scolaires des gens de votre communauté? Qu'en pensez-vous?
Mme Baxter: J'ai l'article de journal intitulé: «Ottawa Pushes School Shake Up for Natives».
Le sénateur Chaput: Oui, c'est de celui-là dont je parle.
Mme Baxter: Certaines personnes se réjouiront peut-être de cette réforme. Ce n'est pas mon cas car il s'agit encore d'une initiative gouvernementale. Combien de consultations a-t-on effectuées, même si c'est un terme déjà galvaudé, pour aboutir à cette proposition? Nous faisons les frais des initiatives gouvernementales, d'où qu'elles viennent. Elles peuvent émaner d'une idée très louable, mais qui ne prend pas en compte les données d'ensemble ni les conséquences.
Je tiens à le rappeler, nous parlons ici de compétences. Nous n'avons pas de compétence provinciale. Lorsque le ministère des Affaires indiennes a lancé les programmes scolaires dans les collectivités, comme dans les réserves, il n'avait même pas prévu de programme d'enseignement. Je pense que c'est à cause de cela que les normes n'étaient pas conformes. Nous nous efforçons toujours de combler les lacunes.
Pour commencer, le système éducatif proposé dans le cadre du programme de l'AINC n'était pas convenable. Les écoles de nos collectivités recommandent maintenant de suivre les normes provinciales. Je pense qu'il convient de faire davantage d'études et de recherches avant d'implanter quelque chose du genre dans l'ensemble des commissions ou conseils scolaires. Déjà, par le passé, les gouvernements ont mis tous les peuples autochtones dans le même sac, pas nous. Peut-être que l'Alberta considère que c'est une bonne idée. Je ne pense pas qu'il en soit de même sur notre territoire. Vous devez accepter les différences entre les peuples. Nous ne partageons pas tous la même culture. Nous représentons de nombreux groupes différents dans ce pays.
Mme Lesage: J'aimerais ajouter quelque chose, pour conclure. Nous parlons des initiatives émanant des gouvernements provinciaux ou fédéral. Ce qui me fait me sentir très forte c'est ceci: Ni le gouvernement fédéral, ni les gouvernements provinciaux ou les administrations municipales ne seront jamais capables de régler ce qui ne va pas sur cette terre indienne. Ceux qui pourront rattraper et corriger les erreurs du passé, c'est nous. Je ne pense pas que qui que ce soit d'entre vous puisse le faire à notre place. C'est la raison pour laquelle j'ai parlé des traités, du respect des peuples autochtones en tant que nations souveraines et de la nécessité de reconnaître notre droit à faire ce qui nous paraît nécessaire pour guider nos jeunes, pour nous retrouver nous-mêmes et pour panser nos blessures. Les politiques et les programmes doivent être souples et conformes aux aspirations des Autochtones. C'est la seule façon d'y arriver. Ce n'est pas en imposant une nouvelle loi, la Loi sur la gouvernance des Premières nations, que nous réglerons quoi que ce soit dans nos collectivités. Nous vivons avec les conséquences de la Loi sur les Indiens et je pense que le temps est venu de retourner aux racines des difficultés auxquelles se heurtent les Premières nations. Il faut remonter jusqu'en 1492 et reconnaître que les Premières nations doivent être maîtres de leur destinée. C'est tout ce que j'avais à dire.
La présidente suppléante: Deux sénateurs souhaitent encore poser des questions, mais un autre comité doit siéger dans cette salle.
Je suis désolée. Nous manquons de temps, mais nous avons appris beaucoup de choses très intéressantes. Je tiens à remercier les témoins d'avoir comparu devant nous aujourd'hui; je leur suis reconnaissante de s'être exprimés avec autant de franchise. Je leur demanderais de bien vouloir transmettre à notre comité leurs exposés ainsi que les études dont ils ont fait mention.
Chers sénateurs, notre présidente et notre vice-président sont souffrants. Nous avons proposé une motion ce matin que j'aimerais que nous adoptions. Étant donné qu'aucun des deux ne sera présent mercredi prochain, j'aimerais savoir si j'ai votre accord pour présider la séance de cette journée-là.
Des voix: D'accord.
La présidente suppléante: La motion est adoptée.
La séance est levée.