Délibérations du comité sénatorial permanent des
Langues officielles
Fascicule 2 - Témoignages du 2 décembre 2002
OTTAWA, le lundi 2 décembre 2002
Le Comité sénatorial permanent des langues officielles se réunit aujourd'hui à 16 h 07 pour recevoir la commissaire aux langues officielles étudier et les travaux futurs du comité.
L'honorable Rose-Marie Losier-Cool (présidente) occupe le fauteuil.
[Français]
La présidente: Je demanderais à nos témoins d'être patients pour quelques minutes, car nous avons un point à discuter avant de commencer avec leur présentation.
Comme je le disais à la réunion du 18 novembre, ce comité revêt une grande importance. Le Sénat a décidé d'avoir un comité sénatorial permanent sur les langues officielles, et donc, tous les membres ont un engagement quant aux langues officielles du pays. Je compte sur la collaboration de tous et de toutes.
Permettez-moi d'abord de vous présenter Marie-Ève Hudon, l'analyste de recherche pour le comité. Elle sera avec nous a plein temps à partir du 1er janvier. Elle est actuellement à l'emploi de Santé Canada. Marie-Ève a déjà des publications à son nom. Elle a fait une maîtrise en sciences politiques avec un mémoire sur les aspects linguistiques du Canada. Bienvenue Marie-Ève.
[Traduction]
J'aimerais que l'on discute tout d'abord brièvement de la révision de notre ordre de renvoi.
[Français]
Vous savez que le comité ne peut pas recevoir de témoins sans la permission du Sénat. Cette permission prend la forme d'un ordre de renvoi. Puisque nous n'avions pas d'ordre de renvoi, nous avons dû avoir une permission spéciale, jeudi dernier, pour rencontrer nos témoins aujourd'hui.
[Traduction]
Le comité peut avoir plus d'un ordre de renvoi à la fois. Je propose que nous nous entendions sur le libellé d'un ordre de renvoi général qui permettra au comité d'exister officiellement chaque année.
[Français]
En Chambre la semaine dernière, certains de mes collègues ont suggéré des amendements à l'ordre de renvoi général; ce comité avait demandé au Sénat de l'autoriser le 18 novembre.
On va regarder cet ordre de renvoi que je vous propose. Ces changements reflètent vraiment la discussion que nous avons eue en Chambre la semaine dernière ainsi que les commentaires soulevés par les sénateurs Corbin, Gauthier et Kinsella.
[Traduction]
Vous vous souviendrez que le sénateur Kinsella voulait que le comité étudie entre autres choses les initiatives du ministère du Patrimoine canadien. Il a dit, et je cite:
Le ministère du Patrimoine canadien est celui qui offre le plus de programmes responsables de la participation du public et de la promotion des langues officielles auprès des organisations de citoyens d'un bout à l'autre du pays.
[Français]
Le sénateur Gauthier a suggéré que le comité ne se limite pas à la fonction publique fédérale, mais qu'il étende son mandat aux institutions fédérales, c'est-à-dire aux quelque 160 institutions qui sont assujetties à la Loi sur les langues officielles.
[Traduction]
Un nouveau membre du comité est le sénateur Corbin; il a proposé un ordre de renvoi modifié reflétant les commentaires des sénateurs Kinsella et Gauthier. C'est donc l'ordre de renvoi dont vous êtes saisis. J'aimerais que nous en discutions pour que je puisse le déposer au Sénat demain après-midi.
[Français]
Que le Comité sénatorial permanent des langues officielles reçoive la permission d'étudier afin d'en faire rapport de façon ponctuelle l'application de la Loi sur les langues officielles au Canada en général, et au sein des institutions fédérales en particulier, avec une attention spéciale accordée au ministère du Patrimoine canadien. On ajoute aussi la permission d'étudier le rapport de façon ponctuelle. Il peut y avoir des rapports réguliers sur nos travaux à chaque mois, ou à chaque deux mois.
La dernière ligne contenue dans d'autres ordres de renvoi de comité, soit une date butoir, n'est pas nécessaire en remettant un rapport de façon ponctuelle.
Y a-t-il discussion sur cet ordre de renvoi?
Le sénateur Corbin: Il me semble qu'on devrait adopter, pour un ordre de renvoi, le libellé de l'article 88 de la codification qui a été faite par le commissaire aux langues officielles sur la Loi sur les langues officielles. Je voudrais vous lire ce libellé:
Le Parlement désigne ou constitue un comité, soit du Sénat, soit de la Chambre des communes — c'est réglé — chargé spécialement de suivre l'application de la présente loi, des règlements et instructions en découlant ainsi que la mise en œuvre des rapports du commissaire, du président du Conseil du Trésor et du ministre du Patrimoine canadien.
Je dois vous avouer que je trouve le libellé de l'article 88 plus inclusif, et cela nous permettrait de valser à droite et à gauche dans le dédale de la Loi sur les langues officielles.
Le libellé que vous nous proposez est déjà inclus dans le libellé de l'article 88, mais l'article 88 est plus large. Personnellement, je préférerais qu'on s'en tienne à l'article 88.
La présidente: C'est un très bon point. Y a-t-il d'autre discussion?
Le sénateur Maheu: Il s'agit d'une question pour le sénateur Corbin.
[Traduction]
Proposez-vous que nous enlevions le passage «de l'application de la Loi sur les langues officielles au Canada et au sein des institutions fédérales»?
[Français]
Le sénateur Corbin: Non, pas du tout. Je crois que c'est déjà compris dans le rapport annuel que fait le commissaire aux langues officielles. Le rapport annuel touche à tous les aspects de l'application de la loi au pays.
Le commissaire aura le droit de tout vérifier, d'enquêter, de recommander et de se présenter devant les tribunaux avec les suivis, y compris les suivis qui ne sont pas respectés. Cela nous donne un permis général pour examiner tout ce qui se passe sous le ciel canadien dans le domaine de la Loi sur les langues officielles. C'est mon interprétation.
Le sénateur Gauthier: Je n'ai pas de problème avec la suggestion du sénateur Corbin, sauf que c'est dans la loi actuelle. On parle de renvoi. Dans la loi, il est question des rapports du président du Conseil du Trésor.
J'ai mentionné jeudi dernier «les institutions fédérales»; je voulais dire que cela couvre toutes les institutions fédérales. La loi dit spécifiquement qu'on doit se charger de suivre l'application de renvoi par les rapports soumis régulièrement par les agences que vous avez nommées.
Je n'ai pas de problème avec cela. Si l'ordre de renvoi du Sénat n'est pas plus large que la loi, c'est correct. Mais la loi dit clairement qu'on doit regarder le rapport du commissaire aux langues officielles et celui du président du Conseil du Trésor. Je voulais élargir cela aux institutions fédérales pour inclure Air Canada et pour celles qui sont comprises dans la liste des 160 institutions fédérales. C'est tout ce que je voulais faire. Je voulais éviter aussi d'être trop spécifique dans un renvoi. Il est clair que les institutions fédérales vont rester là.
La présidente: C'est un très bon point.
Le sénateur Beaudoin: Je suis d'accord pour les institutions fédérales. Le but de la Loi sur les langues officielles s'applique à toutes les institutions fédérales. Je pense qu'il faut que cela soit mentionné quelque part. Maintenant, le libellé de 1988 est tellement considérable que, d'après moi, cela est inclus.
Vous avez fait une comparaison, sénateur Corbin, entre l'article 88 et un autre article, mais quel est cet article dont vous parliez? Je pense que vous aviez fait une comparaison entre l'article 88 et un autre article, non?
Le sénateur Corbin: Je citais le projet de motion que nous a présenté la présidente. Je disais qu'à mon avis, le contenu du projet soumis par la présidente est déjà inclus dans l'article 88.
Serait-il possible de poser une question au commissaire? Je pense qu'elle est là pour nous aider.
Mme Adam, commissaire, Commissariat aux langues officielles: J'ai un problème technique, je n'ai pas le libellé dont vous parlez.
Le sénateur Corbin: Donnons-lui une minute pour prendre le temps de lire le libellé. C'est évident qu'on veut tout couvrir et on ne veut pas d'échappatoire pour personne.
Le sénateur Beaudoin: Surtout que la cour dit que c'est une loi quasi constitutionnelle.
Mme Adam: On aurait deux commentaires. D'abord, au sein des institutions fédérales, si vous nous permettez de parler d'institutions assujetties à cette loi, il y a plusieurs institutions, dont Air Canada ou d'autres sociétés, qui ne sont pas considérées comme des institutions fédérales.
Il est fort probable que ce comité, en plus étudier l'application de la Loi sur les langues officielles, puisse aussi examiner d'autres lois qui touchent, par exemple, le transport aérien, le sport ou toute loi pouvant avoir un impact sur la dualité linguistique.
Le sénateur Corbin: Ne croyez-vous pas, madame la commissaire, qu'en incluant dans la motion l'étude de votre rapport annuel ainsi que les rapports spéciaux présentés au cours de l'année sur des questions particulières, on couvre d'emblée tous les points déjà soulevés?
La loi exige que votre rapport soit déféré aux deux comités, celui de la Chambre des communes et du Sénat, en l'occurrence. En ce faisant, cela englobe tous les problèmes pouvant ressortir de l'application de la Loi sur les langues officielles.
C'est ainsi que je l'entends. Peut-être les autres ne l'entendent-ils pas ainsi.
Mme Adam: Le fait de veiller à l'application de la Loi sur les langues officielles, la loi étant elle-même assez explicite, devrait tout englober.
La présidente: À la fin de la réunion, je demanderai votre indulgence afin d'adopter cet ordre de renvoi, suite à ce que nous avons entendu et compte tenu de ce qu'il y a dans l'article 88 de la Loi. J'entendrai votre commentaire, sénateur Beaudoin.
Le sénateur Beaudoin: Je préfère l'expression «assujetties à la loi». Il y a des institutions fédérales, et le sénateur Gauthier les a énumérées, mais il y a sans doute des domaines fédéraux qui ne sont pas des institutions en tant que telles et qui demeurent toutefois soumis à la Loi sur les langues officielles — par exemple, ce qui est privatisé dans une certaine mesure. Je ne voudrais pas que l'on ignore ce fait.
J'aime l'expression «assujetties à la Loi sur les langues officielles». On peut plaider que cela est inclus dans l'article 88. Toutefois, j'aime un texte clair et précis. On pourrait se pencher sur ce point et en arriver à une proposition la semaine prochaine.
La présidente: Ou peut-être même à 19 heures ce soir. Il est important pour moi d'avoir une motion de renvoi à présenter en Chambre demain. Êtes-vous d'accord à ce qu'on prenne les commentaires que vous avez entendus et qu'on vous propose un autre texte vers 18 h 45?
Le sénateur Gauthier: En autant qu'on verra le libellé.
La présidente: Nous aurons le temps d'écrire quelque chose et de vous le présenter. Procédons.
Il me fait plaisir aujourd'hui de débuter les travaux publics du comité en accueillant la représentante de l'organisme. Il s'agit probablement de la personne la plus importante en ce qui a trait à la défense des langues officielles au Canada.
Madame la commissaire, je vous remercie d'avoir accepté notre invitation.
Je ne crois pas qu'il y ait personne dans la salle qui ne connaisse Mme Dyane Adam. Mme Adam est accompagnée de Johanne Tremblay, avocate générale et directrice des Services juridiques. Michel Robichaud est directeur général des enquêtes. M. Guy Renaud est directeur général des Politiques et communications. M. Gérard Finn est conseiller spécial. Nous avons déjà eu le plaisir de rencontrer M. Finn la semaine dernière.
[Traduction]
Mme Adam présentera un exposé qui devrait durer de 40 à 45 minutes. Nous passerons ensuite aux questions. Pour procéder de façon équitable, je propose que chaque intervenant dispose de cinq à huit minutes pendant la première ronde de questions. Il y aura une deuxième ronde. Compte tenu du nombre de sénateurs, ça devrait nous amener pratiquement à 18 h 30.
[Français]
Mme Adam: Mesdames et messieurs les membres du comité, ma présentation devant vous revêt un caractère symbolique puisqu'il s'agit d'une première autant pour moi que pour vous, sénateurs. Je me sens donc privilégiée.
Le premier objet de ma présentation est de rappeler les principaux constats que l'on retrouve dans mon dernier rapport annuel et de vous donner des explications sur nos principales pistes d'action.
Le premier ministre, ayant accepté les deux premiers diagnostics, m'a invitée à lui proposer des actions concrètes.
Par mon rapport, j'ai répondu publiquement à sa demande en y insérant sept recommandations. J'ai également souligné des progrès et des bons points, notamment, l'octroi par le Commissariat d'un premier prix Léon du Leadership. Le rapport reflète aussi mon approche axée sur la recherche de solutions menant à des résultats durables. On y retrouve des descriptions de situations problématiques mais aussi de réussites.
Cette fois, contrairement aux deux rapports précédents, le ton est un peu plus optimiste, car nous avons constaté des signes concrets d'un leadership engagé et concerté. De plus, l'engagement formel du gouvernement renouvelé dans le dernier discours du Trône devrait nous inciter à garder cet optimisme si, bien sûr, l'action suit la parole.
Cet engagement à l'égard de la dualité linguistique rejoint globalement les recommandations formulées dans mon rapport annuel. Il se lit ainsi:
[Traduction]
La dualité linguistique est au coeur de notre identité collective. Le gouvernement verra à l'application d'un plan d'action sur les langues officielles mettant l'enseignement dans la langue de la minorité et l'enseignement de la langue seconde, avec pour objectif entre autres de doubler d'ici dix ans le nombre de diplômés des écoles secondaires ayant une connaissance fonctionnelle du français et de l'anglais. Il appuiera le développement des communautés minoritaires d'expression française et anglaise et rendra plus accessibles les services dans leur langue dans des domaines tels que la santé. Il renforcera l'utilisation de nos deux langues officielles dans la fonction publique fédérale, autant au travail que dans les communications avec les Canadiens.
Comme vous le voyez, honorables sénateurs, on retrouve dans cet engagement des objectifs très précis. Ce faisant, le gouvernement redonne espoir à nombre de Canadiens et de Canadiennes et crée des attentes somme toute bien légitimes. Mais saura-t-il y répondre?
À ce bel échafaudage, il manque toujours la pièce maîtresse, le plan d'action du ministre Dion attendu avec impatience. Nous nous attendons à un plan qui sera la pierre angulaire de la relance du programme. L'actualisation des droits linguistiques revêt un caractère d'urgence. Les pertes d'acquis, l'intégration des langues officielles aux opérations du gouvernement et la mise en oeuvre de nos recommandations requièrent des actions innovatrices ainsi qu'un engagement ferme et soutenu à tous les échelons de l'appareil gouvernemental.
[Français]
La répartition des ressources est une condition essentielle pour l'actualisation des droits linguistiques.
Vous en conviendrez sûrement avec moi, le gouvernement doit consacrer les sommes d'argent nécessaires au programme s'il veut traduire concrètement son engagement. Cette condition, je l'espère, fait l'objet d'un accord unanime au sein du Conseil des ministres. Je me dois de demander au gouvernement de ne pas se limiter à des réformettes sporadiques, sans cohésion ni finalité.
Une fois de plus, je l'exhorte à se doter d'une vision d'ensemble assortie d'objectifs. Cette vision à long terme doit comporter des échéances et des mécanismes d'évaluation de résultats qui assureront le succès de la mise en oeuvre de son plan d'action.
Les Canadiens et les Canadiennes sont en droit d'exiger une telle vision basée sur un véritable esprit de leadership et de respect en matière de droits linguistiques.
Il faut contrer la tendance des dernières années au cours desquelles le nombre de personnes responsables du bilinguisme dans l'administration fédéral a chuté de plus de la moitié. Les investissements en langues officielles ont stagné et diminué depuis 1990. Ce fait a été reconnu. Il faut maintenant redresser cette situation dans l'ensemble de l'appareil fédéral.
Il importe que toutes les institutions fédérales aient les ressources nécessaires, tant humaines que financières, afin de pouvoir s'acquitter de leurs obligations linguistiques. C'est dans ce contexte que j'ai recommandé au gouvernement d'allouer les ressources adéquates pour que le secrétariat du Conseil du Trésor puisse assumer pleinement son rôle de surveillance et d'évaluation des organismes assujettis à la Loi sur les langues officielles.
Il doit, en outre, pouvoir jouer les rôles de formateur, de sensibilisateur et de vérificateur linguistique. Je continue de déplorer une lenteur certaine, c'est pourquoi j'insiste sur la diligence.
[Traduction]
Nous le savons tous, la concrétisation de l'engagement exprimé dans le discours du Trône exige un effort concerté au quotidien. Le gouvernement a agi en ce sens l'an dernier en formant le Groupe de référence ministériel sur les langues officielles, présidé par le ministre Dion. Ce faisant, il s'est donné une capacité d'agir horizontale bien structurée. Une plus grande concertation au niveau politique est nécessaire pour assurer la réalisation des objectifs de la loi. Il faut encourager et soutenir ce genre d'actions intégrées et horizontales. C'est pourquoi, cette année, j'ai recommandé que ce groupe obtienne un statut de comité permanent afin de stimuler un leadership continu aux plus hauts niveaux de l'administration publique et d'appuyer la mise en oeuvre du plan d'action du gouvernement. Il faut assurer l'intégration et la continuité dans le domaine des droits linguistiques.
Sur le plan du leadership administratif, notre meneur en ce domaine est sans contredit M. Yvan Fellegi, le statisticien en chef du Canada, qui a mérité mon premier Prix Léon du Leadership. Son institution s'est distinguée par l'excellence des services bilingues offerts au public, par un milieu de travail propice à l'utilisation des deux langues officielles et, plus généralement, par la gestion de son programme linguistique. Il est donc possible d'exercer un leadership. Mais il faut beaucoup plus d'exemples de ce genre pour garantir l'égalité du français et de l'anglais et pour assurer l'épanouissement des collectivités francophones et anglophones à l'échelle du pays.
[Français]
Les dernières études sur l'utilisation des deux langues officielles au sein de la fonction publique fédérale démontrent clairement qu'il y a énormément à faire afin que les deux langues officielles soient utilisées équitablement dans ce milieu.
J'avais identifié la langue de travail comme un dossier prioritaire, car je crois que la fonction publique doit incarner une culture vivante de la dualité linguistique. L'étude du Conseil du trésor intitulée «Attitude face à l'utilisation des deux langues officielles dans la fonction publique du Canada», révèle que les fonctionnaires appuient les principes fondamentaux des politiques linguistiques.
L'appui est tout particulièrement élevé en matière de service au public: 92 p. 100 des fonctionnaires croient qu'il est important pour eux de servir le public dans les deux langues officielles, et 86 p. 100 d'entre eux seraient prêts à faire des efforts pour encourager le bilinguisme en milieu de travail.
Par ailleurs, 42 p. 100 se déclarent bilingues et 37 p. 100 des postes exigent une connaissance des deux langues officielles. En moyenne, les anglophones bilingues qui travaillent dans un milieu bilingue passent 14 p. 100 de leur temps à parler français.
Les francophones bilingues dans un milieu bilingue consacrent, pour leur part, 43 p. 100 de leur temps à parler anglais. J'ai été heureuse de constater que les employés de l'état appuient généralement les grands principes des politiques linguistiques du gouvernement. Cependant, il y a encore beaucoup de confusion ou d'ignorance quant à la façon dont ces principes peuvent être concrétisés dans le quotidien.
La présidente du Conseil du Trésor, Mme Robillard, qui a abondé dans le même sens a adopté une approche proactive à cet égard, je lui avais d'ailleurs proposé des pistes d'action pour redresser la situation actuelle.
[Traduction]
L'une de ces pistes découle du constat unanime voulant qu'un changement de culture s'impose et que l'exemple devrait venir d'en haut. J'ai donc recommandé que la réalisation des trois objectifs de la Loi sur les langues officielles demeure l'une des priorités du greffier du Conseil privé pour les trois prochaines années. Les administrateurs de la fonction publique devront consacrer le temps et les ressources nécessaires pour assurer la mise en oeuvre du programme des langues officielles dans leur milieu de travail.
Une autre piste tient compte de la modernisation de la gestion des ressources humaines entreprise au sein de l'appareil fédéral. J'ai suggéré qu'au cours de cet exercice, la fonction publique intègre pleinement les langues officielles à ses activités. Le changement de culture passera par la modernisation de la fonction publique. Durant ce processus, il faudrait donc accroître l'obligation de rendre compte de la haute gestion fédérale en redéfinissant le cadre de gouvernance des langues officielles; valoriser le bilinguisme comme compétence de base; nommer aux postes bilingues des personnes qui connaissent les deux langues officielles — on appelle cela la «dotation impérative» — réorienter la formation linguistique et mettre l'accent sur le bilinguisme réceptif.
[Français]
Par ailleurs, dans la dynamique des communications au travail, une multitude de facteurs sont en interaction constante. Afin de les identifier, j'ai commandé une étude à caractère sociolinguistique qui portera d'abord sur la situation des sièges sociaux de la région de la capitale et s'étendra aux régions désignées bilingues. Il faut trouver à tout prix des moyens de donner une plus grande place au français dans la fonction publique si l'on veut qu'elle reflète la dualité linguistique, l'une des valeurs fondamentales de l'identité canadienne.
Dans la même veine, lors du Colloque sur la langue de travail, qui s'est tenu au Nouveau-Brunswick au début novembre, la ministre Robillard a réitéré la volonté et l'engagement du gouvernement en lançant une message clair aux gestionnaires qui ne pourront satisfaire aux exigences linguistiques de leur poste à compter du 31 mars 2003. Elle a tenté de les responsabiliser en clarifiant les attentes et les mesures punitives qui pourraient être prises si nécessaire.
Je suis heureuse de constater que mes recommandations résultent en actions tant politiques qu'administratives.
Toutefois, je déplore que la mesure ne touche pas les sous-ministres, qui sont actuellement exemptés des mesures linguistiques. Il est paradoxal que le gouvernement exige le bilinguisme pour ses cadres, mais il ne le fait pas pour ceux et celles qui sont à la tête de l'administration fédérale.
Dès leur entrée en service, les nouveaux membres de la haute fonction publique devraient être informés des exigences de la loi et des valeurs qui la sous-tendent. Il est essentiel de les orienter et de les préparer à gérer le programme des langues officielles.
Il faut qu'ils soient conscients qu'ils sont les premiers responsables pour assurer l'intégration de ces valeurs à la culture organisationnelle de leur institution. Bref, ils doivent donner forme à l'engagement du gouvernement envers l'égalité du statut et de l'utilisation des deux langues officielles, et envers les droits des employés de travailler dans la langue de leur choix.
[Traduction]
J'exerce un rôle de vigie de façon structurée et constante et j'interviens auprès du législateur, au besoin. J'agis donc de façon préventive en intervenant dès l'étape de l'élaboration de lois, de règlements, de politiques et programmes afin de m'assurer que les droits linguistiques sont au centre des préoccupations de nos dirigeants et dirigeantes.
J'ai exercé ce rôle dans divers dossiers touchant un bon nombre de secteurs d'activité. Je suis intervenue, entre autres, auprès du ministre responsable et devant les comités parlementaires pour que la nouvelle politique et le projet de loi sur l'activité physique et le sport tiennent compte de la dualité linguistique. Vous vous souviendrez que j'ai publié une étude en 2000 qui démontrait que les francophones se butent à des obstacles majeurs les empêchant d'atteindre la pleine participation aux diverses activités sportives.
Je suis aussi de près d'autres grands dossiers tels ceux de la radiodiffusion, y compris le sous-titrage, d'Internet, de la presse minoritaire, de la transmission des débats parlementaires et du gouvernement en direct, pour n'en nommer que quelques-uns.
[Français]
En matière d'immigration, dès le début de mon mandat, j'ai voulu provoquer une prise de conscience sur le fait que la croissance de la population canadienne et la survie des communautés minoritaires de langues officielles reposait sur les nouveaux arrivants. Les deux études que j'ai commandées sur l'immigration ont confirmé cette réalité. En particulier, elles font ressortir l'absence de mesures efficaces qui auraient pu aider les communautés à recruter des immigrants francophones et à les intégrer.
Je n'ai pas ménagé mes efforts pour que la nouvelle Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, et son règlement favorise le développement des deux collectivités de langues officielles au pays, en particulier des communautés minoritaires francophones qui se voient nettement défavorisées par le déséquilibre démographique qui s'accentue depuis plusieurs années. Il reste encore beaucoup de travail à faire pour remédier à ce déséquilibre.
Selon les données de Statistique Canada, actuellement, parmi la population anglophone, une personne sur cinq est immigrante, alors que parmi la population francophone au Québec et ailleurs au pays, la proportion est d'une sur 20.
La dualité linguistique, tout comme la diversité ethnoculturelle de notre population, est au coeur de notre identité canadienne, et l'immigration doit contribuer à consolider ces valeurs de notre société.
J'ai recommandé au ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration d'élaborer des programmes d'appui en vue de mettre en oeuvre les dispositions linguistiques de la nouvelle législation. Il importe aussi de promouvoir la dualité linguistique à l'étranger en faisant connaître l'existence des communautés minoritaires de langue officielle et d'aider ces mêmes communautés à développer des structures d'accueil adéquates pour les nouveaux arrivants.
En mai dernier, constatant qu'en matière de santé nationale le volet dualité linguistique était absent des délibérations de la commission Romanow, j'ai également présenté un mémoire. J'ai examiné le rapport final qui vient d'être déposé le 28 novembre dernier. Je reconnais des efforts notables, car la dimension linguistique se retrouve dans l'une des recommandations de la commission.
Cependant, j'aurais souhaité que la commission aille plus loin. Le principe de l'accès au service de santé dans la langue officielle de son choix devrait être explicitement reconnu dans la Loi canadienne sur la santé. Je déplore cette absence de garantie juridique nationale. De plus, je constate que même s'il y a un échéancier ou plusieurs recommandations, on n'en retrouve aucune pour les soins de santé dans la langue officielle de la minorité. Ce n'est pas suffisant!
Ce constat confirme pour moi la nécessité de sensibiliser nos dirigeants. Je compte donc me faire entendre devant les comités parlementaires, notamment le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, afin que l'on tienne compte de la dimension linguistique de la santé pour les communautés minoritaires de langue officielle. En tant que psychologue-clinicienne, je peux témoigner de l'importance des communications lorsqu'on doit créer un climat de confiance entre le patient et le médecin ou tout autre professionnel de la santé. Il s'agit d'une condition très importante dans tout processus de guérison. Soigner, c'est avant tout être en mesure de comprendre le patient. Dans cette perspective, je ferai des recommandations aux membres du comité sénatorial en espérant que le Parlement saura adopter les dispositions législatives les plus aptes à garantir l'égalité pour les collectivités francophones et anglophones du Canada.
[Traduction]
Passons maintenant à la justice. L'accès à la justice dans les deux langues officielles constitue également un enjeu de taille. Le ministère de la Justice a rendu public en août dernier son étude sur l'état des lieux. Cette étude a permis d'identifier les obstacles à la disponibilité des services judiciaires en français et en anglais, partout au Canada, et surtout une variété de pistes de solutions issues du milieu minoritaire. Le ministère de la Justice, en concertation avec ses homologues provinciaux et territoriaux, doit maintenant s'employer à examiner les solutions suggérées dans l'étude et mettre en oeuvre celles qui sont susceptibles de mieux répondre aux besoins des communautés minoritaires. En ce sens, l'initiative du ministère de créer un groupe de travail fédéral-provincial-territorial, issue du Forum des sous- ministres de la Justice, constitue certainement un pas dans la bonne direction. Je m'attends donc à ce que cette démarche donne lieu à des actions concrètes de la part du ministère. Les mesures nécessaires doivent maintenant être prises afin d'aider les gouvernements provinciaux et territoriaux à mettre sur pied les structures institutionnelles appropriées permettant aux justiciables d'avoir accès au système de justice dans les deux langues officielles.
Lors de ses derniers travaux, le comité mixte a formulé une série de recommandations au ministère de la Justice, dont la première portait sur le renforcement de la mise en oeuvre de la partie VII de la Loi sur les langues officielles, et sur l'importance de travailler avec les communautés sur cette question. Dans mon rapport annuel cette année, j'ai recommandé au gouvernement de préciser la portée juridique de l'engagement prévu à l'article 41 de la loi et de prendre les mesures nécessaires pour s'acquitter efficacement des responsabilités prévues par cette disposition.
[Français]
Dans un autre ordre d'idée, je vous invite à vous pencher sur la pertinence des dispositions actuelles du Règlement sur les langues officielles et sur les communications avec le public élaborées par le secrétariat du Conseil du Trésor. Je crois que le temps est venu de le revoir. J'ai fait connaître ma position aux ministres Robillard et Dion.
Vous l'aurez noté, ma fonction d'ombudsman comprend plusieurs volets. L'un de ceux-ci touche les plaintes et les enquêtes. J'ai réexaminé le processus d'enquête du Commissariat, puisque la plainte demeure un outil puissant de changement lorsque nos recommandations sont, bien sûr, mises en oeuvre. Au-delà de la plainte, il nous faut demeurer proactifs. C'est pour cela qu'on va parler maintenant du rôle de la commissaire comme vérificatrice.
Un peu à l'instar du vérificateur général, nous devons exercer un rôle de surveillance auprès de l'ensemble des institutions assujetties à la Loi sur les langues officielles. Il nous faut être en mesure de rapporter fidèlement au Parlement la situation linguistique au sein de l'administration fédérale et au sein des sociétés d'État, des agences et des institutions privatisées qui ne relèvent pas du Conseil du Trésor ou qui ne l'ont pas comme employeur. Ces dernières totalisent plus d'une centaine d'organismes. C'est pourquoi j'entends renforcer la fonction de vérification qui doit être faite par le Commissariat en tant qu'organisme indépendant chargé de surveiller l'application de la loi.
Parmi les principales pistes d'action sur lesquelles je vous invite à vous pencher, il y a, bien sûr, le plan d'action du gouvernement, l'étude sur l'état des lieux, la modernisation de la fonction publique, la situation des langues officielles sur les sociétés d'État et autres institutions assujetties, la langue de travail et le cadre d'imputabilité. Bref, il y a beaucoup de travail sur la table. Si nous réussissons à créer la synergie nécessaire, nous devrions avancer vers ce but qui est d'amener le public canadien à reconnaître à juste titre la dualité linguistique comme une valeur fondamentale de notre pays.
Le gouvernement doit agir, mais il doit agir avec diligence. Il ne peut plus se permettre de pécher par omission. Il doit intervenir au bon moment, ne pas accepter les délais non justifiés ni les échappatoires. Je sais que je peux compter sur vous, individuellement et collectivement. En contrepartie, je veux vous assurer également de mon entière collaboration. Vos réunions sont au nombre de mes priorités et je tenterai d'y participer le plus souvent possible. Bien sûr, il y aura toujours des membres de mon personnel pour vous soutenir.
Je serai heureuse, ainsi que mon équipe, de répondre à vos questions.
La présidente: Merci beaucoup pour cette présentation. En passant, je vous félicite aussi pour le prix Léon. J'espère que d'autres organismes, comme, par exemple, Statistique Canada, vont tout faire pour convoiter ce prix.
Avant de passer aux questions, j'aimerais parler de votre rôle d'ombudsman. On sait que la Commissaire reçoit les plaintes, les regarde et les analyses, nous en avons parlé la semaine dernière avec vos responsables. C'est un processus qui semble être long. Pourriez-vous commenter brièvement sur ce processus?
Mme Adam: Je suis d'accord qu'en général, le processus est effectivement long. Il faut dire que la loi est très explicite par rapport à la démarche et aux procédures que nous devons suivre dans un souci d'équité administrative pour traiter et instruire nos plaintes. La directrice des services juridiques vous dirait que puisque les plaignants peuvent déposer un recours devant les tribunaux suite au dépôt d'une plainte et d'une instruction, il est absolument important que les dossiers et la preuve soient bien établis, ce qui nous force souvent à être d'une rigueur exemplaire.
Ceci étant dit, il y a quand même des contraintes qui sont imposées par la loi elle-même et qui nous condamnent à un processus parfois assez laborieux. Nous avons examiné notre processus de plaintes et nous sommes à examiner toutes les étapes afin de les simplifier. Il nous faut faire la distinction entre les plaintes qui devraient être traitées immédiatement et celles qui sont plus complexes, qui devraient être traitées selon ce processus beaucoup plus rigoureux et laborieux. Peut-être que M. Robichaud aurait quelque chose à ajouter.
M. Michel Robichaud, directeur général, Direction générale des enquêtes, Commissariat aux langues officielles: Certainement. En effet, la loi nous oblige à suivre certains processus assez bien établis. Cependant, comme le disait la commissaire, à l'intérieur de cela, on peut rendre les choses plus simples.
Je donne un exemple. Dans le passé, nous envoyions aux institutions fédérales un rapport d'enquête «préliminaire», c'est-à-dire un rapport écrit qui donnait des recommandations, et nous leur demandions de commenter et de nous renvoyer des réponses afin d'avoir un rapport final. Nous avons modifié cette procédure afin d'assurer une plus grande participation des gestionnaires dans les ministères et de trouver des solutions qui leur appartiennent et qui deviennent de plus en plus durables. Plutôt que d'envoyer un rapport sous forme préliminaire, nous allons rencontrer les gestionnaires directement et, à la suite de ces rencontres, nous consignons les engagements qu'ils ont pris pour mettre en oeuvre les recommandations sur lesquelles nous nous sommes entendus. Cela nous donne un rapport final avec des engagements très précis de la part des gestionnaires. Le rapport préliminaire est donc éliminé dans ce contexte. Nous maintenons toujours la recommandation et son suivi nous donnera l'évaluation de sa mise en oeuvre.
La présidente: A-t-on fixé un délai?
M. Robichaud: La loi nous demande de communiquer avec le plaignant dans un délai de six mois après la réception de la plainte pour lui dire à quelle étape la plainte est rendue. Nous visons vise ce délai pour nous assurer que la majorité de nos enquêtes soient terminées.
[Traduction]
Le sénateur Keon: Mme Adam, vous avez soulevé une question qui m'intéresse énormément à titre de citoyen, de professionnel de la santé et aussi de sénateur, à savoir l'incapacité qu'a le Canada de refléter la dualité linguistique dans les services de santé. À l'époque où je faisais de la médecine, nous avions au cours des dernières années fait des recrutements importants. En effet, pour bien refléter la dualité linguistique canadienne, nous avons jugé nécessaire de recruter un Français qui avait les connaissances scientifiques comparables à celles de nos grands concurrents d'ailleurs et les compétences linguistiques voulues. Cela ne veut pas dire, bien sûr, qu'il n'y a pas de superbes gens ici même au Canada, ce qui est le cas, mais personne n'est disponible.
Ce qui m'a beaucoup intéressé, c'est que vous avez abordé le problème de l'immigration en même temps que les questions de santé. Ce sont deux enjeux qu'il est difficile de concilier lorsque l'on cherche à préserver la dualité linguistique dans les services de santé. Le Canada est en train d'ouvrir ses portes à des professionnels étrangers de la santé à cause des pénuries qu'il constate sur son propre territoire. Voilà pourquoi certaines restrictions sont levées du point de vue professionnel. Si nous pouvions lancer une initiative ciblée, nous pourrions attirer des recrues dans nos services de santé provenant de pays francophones, ce qui permettrait de résoudre les problèmes que nous rencontrons dans bien des régions.
Pour avoir travaillé dans ce secteur pendant 30 ans, je sais que recruter des médecins qui connaissent les deux langues du Canada n'est pas si difficile que cela. Nous avons la chance, ici même à Ottawa, d'avoir une faculté de médecine bilingue. Toutefois, je sais que le recrutement devient très difficile, dans le cas des infirmières, psychologues et 38 autres professions de la santé.
Avez-vous une idée sur la façon de surmonter cet écueil?
Mme Adam: Moi aussi, j'avais une autre vie avant de devenir commissaire. J'ai travaillé dans des hôpitaux à Sudbury, Rouyn-Noranda et Baie-Comeau. J'étais mariée à un médecin qui travaillait dans ces régions. J'ai découvert que l'Association des médecins du Québec acceptait les licences octroyant de pratiquer la psychiatrie en France ou dans un pays francophone, alors que dans le nord de l'Ontario, là où habitent un grand nombre de francophones, le Collège des médecins de l'Ontario ne reconnaissait même pas — ou avec beaucoup de réticence — les diplômes de psychiatres ou de médecins formés en France. Cela illustre bien la différence entre les deux provinces.
Je répète: il faut que nos citoyens aient accès à des services dans les deux langues officielles. Sénateur Keon, vous dites que la situation va un peu mieux du côté des médecins, mais je n'en suis pas si sûre. Nos études effectuées en matière d'immigration et notre expérience démontrent que les associations professionnelles constituent l'obstacle principal puisqu'elles empêchent ceux qui ont été formés à l'étranger de venir pratiquer au Canada. Faute de reconnaître les accréditations des pays francophones de l'Afrique, nous ne pourrons pas améliorer le service aux collectivités des deux langues officielles.
Voilà un dossier qu'il nous faut étudier. Il en va de même pour les infirmières, comme vous le savez sans aucun doute. Le Québec recrute actuellement des infirmières en Belgique et en France. Je ne suis pas sûre qu'en Ontario ou dans d'autres provinces on accepte comme professionnels de la santé des gens provenant de ces pays.
Le ministre, M. Coderre, s'intéresse à la question du déploiement des professionnels immigrants de la santé dans les régions non urbaines. Toutefois, le plus grand obstacle, à l'heure qu'il est, c'est la reconnaissance des diplômes de ces professionnels. C'est ce qui pose problème pour nous.
Le sénateur Keon: Je conviens qu'il y a eu progrès. Toutefois, il y a un problème encore plus important que nous devons régler au Canada: étant donné que la Constitution reconnaît depuis les tout débuts, ou presque, que la santé est de compétence provinciale, il n'existe aucun cadre structurel nous permettant de résoudre le problème dont nous débattons actuellement. Cela fait longtemps que je suis convaincu qu'il nous faut un commissaire à la santé qui travaillerait de concert avec des gens comme vous, avec le ministère de l'Immigration, et même avec les provinces, pour surmonter les écueils. C'est ce que nous avons recommandé dans le rapport sénatorial, mais qui a été passé sous silence. Nous allons continuer à le recommander, et j'aimerais bien que nous en rediscutions vous et moi ultérieurement.
[Français]
La présidente: Nous pourrions peut-être vous demander de revenir pour discuter de la question des soins de santé, car nous allons certainement y revenir.
Le sénateur Gauthier: Madame Adam, vous avez parlé d'éducation dans votre rapport annuel, que j'ai lu. Je ne sais pas qui est votre relieur, mais ce document est difficile à feuilleter. Pourriez-vous faire le commentaire à votre relieur?
Mme Adam: Sénateur Gauthier, en le feuilletant, j'ai pensé à vous quand une des pages est tombée.
Le sénateur Gauthier: Si vous avez un prix Léon, vous devriez avoir un prix citron aussi!
Passons au domaine de l'éducation: dans votre commentaire, vous avez parlé de la nécessité de faire reconnaître le besoin de la formation linguistique dans nos écoles, et, comme le proposait le discours du Trône, il faut augmenter de quelque 50 p. 100 le nombre de diplômés fonctionnellement bilingues.
Cela fait quelques années que l'on parle de cette question. Je reconnais que c'est une question de juridiction provinciale. Il y a un intérêt national puisque l'article 23 de la Constitution le mentionne.
Nos communautés francophones hors Québec ont des «ayant droits», comme nous les appelons chez nous, qu'on ne retrouve pas dans les écoles homogènes françaises mais qu'on retrouve dans le système anglophone et dans le système de l'immersion. Cinquante pour cent des enfants y ayant droit sont acheminés dans des écoles anglaises ou vers des programmes d'immersion. Le comité va sûrement se pencher sur ce problème sérieux. Nous sommes en train de perdre notre relève, si je peux m'exprimer ainsi. Est-ce que je me trompe?
Le sénateur Gauthier: Si le Sénat faisait une étude sur l'article 23 et les droits qu'ont les Canadiens d'envoyer leurs enfants dans des écoles de langue française ou anglaise au Québec, vous serait-il possible d'établir des objectifs clairs et précis?
Mme Adam: Cette question est considérée au Commissariat comme l'une des priorités. Selon la nature de l'étude que vous aimeriez réaliser, nous pourrions probablement apporter un soutien quelconque.
La dernière étude à laquelle vous référez est l'étude publiée il y a à peine 18 mois par le Commissariat. Celle-ci fait un diagnostic sévère.
L'important est de trouver des solutions. Comment pouvons-nous assurer que les parents ayant le droit d'envoyer leurs enfants à une école de la minorité exercent effectivement ce droit? S'ils ne l'exercent pas, c'est un droit qui est perdu pour les générations futures.
Cette étude se voulait comme un cri d'alarme. Encore aujourd'hui, nous souhaitons que les conseils scolaires et partenaires en éducation — et vous en êtes un — travaillent véritablement à la sensibilisation auprès des parents et de tous les intervenants dans le domaine de l'éducation pour la minorité.
Le sénateur Gauthier: Le programme de langues officielles en éducation est en cours d'évaluation encore une fois. Il l'a également été en 1996. J'ignore qui en fait l'évaluation. Patrimoine canadien examine leur programme en matière de langues officielles. Le PACLO, Programme d'appui aux communautés de langue officielle, pour sa part, n'a jamais été évalué, à ce que je sache, depuis 1970. Dieu sait que j'ai tenté de faire évaluer ce programme. Pourquoi cette résistance à évaluer un programme fédéral à l'appui de l'éducation ou des communautés? Quelle est la faille dans le système?
Mme Adam: Votre étude consisterait à évaluer l'efficacité de ces deux programmes. Je ne sais pas s'il y a de la résistance dans le ministère ou ailleurs dans l'appareil fédéral. Une des choses que nous demandons et sur laquelle nous mettons l'accent est l'importance du cadre d'imputabilité. Lorsque le fédéral signe de telles ententes avec les provinces et qu'il y a transfert, il est important qu'on s'assure de vérifier et d'insérer des mesures qui permettent au gouvernement fédéral d'évaluer si, de fait, les fonds ont véritablement rejoint les activités en question. Deuxièmement, il est important de s'assurer que nous rencontrons les objectifs des programmes.
Le sénateur Gauthier: Il y a 25 ou 30 ans, je demandais à M. Trudeau exactement ce que je viens de vous demander. Il me répondait: si vous voulez une réponse à votre question, allez demander aux provinces, cela relève de la juridiction provinciale.
Nous avons un programme fédéral dans lequel nous avons dépensé des millions sans toutefois savoir si nous l'avons fait de façon efficace. Je demande quelle est l'évaluation depuis 1970. Avez-vous fait une évaluation?
Mme Adam: Pas de ce programme, non. Vous êtes en train de me dire que je devrais le faire?
Le sénateur Gauthier: J'y reviendrai tout à l'heure.
La présidente: Je vous remercie, sénateur Gauthier, pour ce point. Je vois chez la commissaire une volonté de créer des partenaires en éducation. Ce sont certes des questions que nous pourrons poser lorsque nous rencontrerons les responsables de ces programmes, et en particulier Patrimoine canadien. Lorsqu'on va dans les provinces, chez les personnes vivant en situation minoritaire, on reçoit plusieurs plaintes de ce genre. Il faudra donc revenir avec votre question. La commissaire nous suggérera alors d'autres points.
Le sénateur Comeau: Madame Adam, j'aurais une série de questions.
En tant que premier témoin à notre comité, vous a-t-on approché pour discuter de la possibilité que quelqu'un du Commissariat puisse assister à chacune de nos réunions? Je comprends que vous êtes très occupée. Quelqu'un de votre ministère pourrait peut-être s'assurer que nous avons à notre disposition quelqu'un qui s'y connaît dans les dossiers et à qui on pourrait demander d'agir en tant que conseiller pendant la réunion.
Si on nous présente de l'information sur laquelle on s'interroge, un représentant de votre Commissariat pourrait-il se trouver présent? Je ne sais pas si la présidente vous en a fait mention, mais c'est une possibilité que j'aimerais contempler. Quelqu'un vous a-t-il parlé de cela?
Mme Adam: En effet, et on s'est engagé. Bien sûr, plus on connaît le dossier que vous allez discuter, plus il sera facile pour mon bureau de désigner la bonne personne selon les dossiers. Il y aura toujours quelqu'un ici pour vous appuyer.
Le sénateur Comeau: J'aimerais que le Commissariat puisse travailler en étroite collaboration avec ce comité.
Ma première question est la suivante. Vous avez touché la question de l'immigration dans le but d'avoir des médecins, des infirmières et autres professionnels hospitaliers dans les régions éloignées, dans les régions où les communautés sont minoritaires. Je pense en particulier à ma communauté de Yarmouth. Lorsque je vais à l'hôpital, je connais assez bien les gens à cet endroit, et je sais que plusieurs de ces gens sont des francophones. Nous n'avons peut- être pas besoin de faire venir des gens de France ou d'ailleurs. Par contre, rien n'identifie ces personnes comme étant francophones.
Comment pourrait-on encourager l'hôpital en question à désigner ces personnes ou à les faire connaître? Cela pourrait peut-être se faire par le biais d'une étiquette apposée sur leur manteau: «Je suis médecin un tel et je parle français»?
Comment pourrait-on encourager l'hôpital à faire cela? Est-ce que le fédéral a considéré un programme de subvention directe, non pas à travers la province mais directement avec l'hôpital? On pourrait peut-être offrir un bénéfice à chacun de ces employés portant les étiquettes. L'employé encouragerait l'hôpital à verser les fonds, et le fédéral encouragerait ces gens à offrir des services en français à la population.
Mme Adam: Il est assez difficile de répondre à votre question. Bien sûr, on parle de compétence provinciale-fédérale. Le gouvernement fédéral a déjà pris certaines initiatives pour encourager et soutenir, par exemple, la formation des professionnels de la santé en français. Ils ont créé le Réseau national de formation professionnelle et toutes les universités de la francophonie canadiennes.
Le sénateur Comeau: Je parle d'un problème réel, qui existe aujourd'hui pendant que les communautés se font assimiler.
Mme Adam: Ce programme existe depuis cinq ans et réussit présentement à former des médecins, des infirmières, des ergothérapeutes, des physiothérapeutes et cetera. Cela est en cours et le gouvernement fédéral devrait renouveler ce programme. Le gouvernement des hôpitaux relève du gouvernement provincial. Il serait très difficile pour le gouvernement fédéral d'entrer dans ces détails importants, mais opérationnels.
Le sénateur Comeau: C'est opérationnel, oui, mais lorsqu'on fait affaire avec des provinces qui ont un site Web unilingue anglais, ne sommes-nous pas en train de manquer notre coup. Ces provinces ne montrent aucun d'intérêt. Je ne peux pas imaginer qu'une province serait en désaccord de voir des fonds fédéraux se rendre directement au niveau opérationnel. Qu'a-elle à perdre?
Mme Adam: Lorsqu'on pense à un principe de reconnaissance de la dualité linguistique dans la loi canadienne, on vient de mettre l'assise qui permet ce genre d'intervention ou d'entente entre une province et le gouvernement fédéral ou entre des provinces, des territoires et le gouvernement fédéral. Lorsqu'on ne reconnaît même pas que la dualité linguistique, ou la langue, est au coeur même de la santé, on part de loin!
Avant de parler d'ententes particulières, il faut d'abord admettre que les deux langues ont le même statut devant la loi dans notre Constitution, et que l'un des plus grands biens collectifs que nous avons, c'est la santé. Si vous n'avez pas la santé, il vous manque quelque chose d'important.
On a un cheminement à faire en tant que société et j'espère que tous les prochains comités, la commission Romanow et tout le travail des comités du Sénat, ameneront cette prise de conscience et l'action suivra. Il faut que cela se passe cette année.
Le sénateur Comeau: Vous avez indiqué dans votre présentation que vous vous impliquez sur le plan de la préparation des projets de loi. Faites-vous cela en collaboration avec le ministère qui prépare le document? En tant que parlementaires, nous ne pouvons pas nous impliquer dans la préparation du document. Nous avons le droit de nous impliquer dans le processus une fois que cela est présenté au Parlement.
Mme Adam: Nous sommes comme vous, mais certains ministères communiquent avec nous pour connaître notre opinion. Nous ne voyons pas les documents, mais ils nous disent ce sur quoi ils sont en train de travailler. À ce moment, cela nous permet d'intervenir. Je mentionne à tous les ministres que je rencontre que je préfère intervenir avant plutôt qu'après. Certains acceptent notre offre et d'autres non.
Le sénateur Corbin: Cela fait des années que je n'ai pas siégé au Comité des langues officielles. J'ai l'intention de m'y dévouer — si Dieu m'en donne la grâce — durant mes dernières années au Sénat. C'est là que j'avais commencé lorsque j'étais à la Chambre des communes, en tant qu'ancien coprésident de ce comité.
Madame Adam, lorsque vous avez été nommée, je vous avais qualifiée de grande «dérangeuse». Je vois que vous remplissez bien votre mission. J'ai l'impression qu'il y a des gens qui ne sont pas impressionnés par ce que vous faites parce que vous vous plaignez de la lenteur administrative gouvernementale — comme tous vos prédécesseurs — sur le plan du suivi de vos recommandations. C'est le refrain que j'entends depuis toujours. Que faut-il faire pour changer les choses?
J'ai examiné minutieusement votre rapport. Je vous ai bien écoutée aujourd'hui et je me suis concentré sur la description des différents rôles que vous donne la loi et que vous vous attribuez en tant que commissaire. Considérez- vous avoir suffisamment de rôles? Ne répondez pas tout de suite. Y aurait-il lieu de reformuler certaines de vos attributions ou d'élargir certains de vos pouvoirs? Vous avez déjà un bon deux ans d'expérience solide.
Quelles attributions ou pouvoirs additionnels aimeriez-vous recevoir pour que l'application de la Loi sur les langues officielles soit mieux respectée et que les correctifs que vous identifiez soient appliqués dans les meilleurs délais? En tant qu'ombudsman linguistique, il me semble que vous n'avez pas beaucoup de pouvoirs. Vous identifiez, vous faites enquête et vous déposez un rapport après l'autre. On constate le même genre de plaintes surtout sur le plan du suivi et de la réticence de certaines institutions fédérales à bouger dans le sens que vous voudriez, pour assurer le respect la loi. Que vous faudrait-il de plus pour qu'on change? Faudrait-il vous attribuer des responsabilités détenues par le secrétariat au Conseil du Trésor qui, dans une grande mesure, est chargé de réagir à vos recommandations. Vous vous plaignez que cela a pris sept ans avant qu'on arrive à seulement mettre en place des dispositifs. On n'a même pas les résultats encore.
Que vous faut-il de plus à vous ou aux ministres pour que tout bouge davantage plus rapidement?
Mme Adam: C'est une question de fond importante. On me la pose souvent. Cela va au coeur de la mission d'un commissaire et son pouvoir en est un qui s'inscrit parmi d'autres personnes dans le sens large.
La commissaire n'est pas responsable de la mise en oeuvre de la loi. À mon avis, tant et aussi longtemps que les personnes responsables de la mise en oeuvre de la loi ne prennent pas au sérieux cette loi, les pouvoirs importeront peu, sauf le pouvoir judiciaire, qui peut imposer une décision et forcer une action gouvernementale ou ministérielle qui a le pouvoir d'imposer.
On peut toujours renforcer la loi. Des règlements, par exemple, pourraient être mis sur pied pour clarifier les obligations du gouvernement dans la partie VII. Il y a des choses qui pourraient être renforcées dans la loi. Par exemple, je ne peux pas, telle que la loi est conçue, publier le rapport de mes enquêtes. Souvent le résultat est connu parce qu'un plaignant l'a dévoilé publiquement. Toutefois, je n'ai pas ce pouvoir.
On ne peut pas déposer un recours contre le gouvernement ou une institution s'il n'y a pas un plaignant. Il doit y avoir une plainte et le consentement du plaignant. On pourrait bonifier la loi. Avec tout le respect que j'ai pour cette loi, je crois fondamentalement qu'il devrait y avoir une responsabilisation beaucoup plus grande des acteurs de la mise en oeuvre de la loi. Cela appartient aux parlementaires, qui ont le rôle important de surveillance à jouer et de demander de rendre des comptes. L'exécutif et le gouvernement doivent assumer son leadership. La fonction publique est un appareil qui a sa propre culture. C'est pour cela que l'on met l'accent sur la nécessité de la changer.
Le sénateur Corbin: À mon avis, il y a une entrave majeure dans le domaine du développement des politiques de règlement et du suivi à vos recommandations. On change de ministre trop souvent. C'est une faille majeure dans le système. Je ne sais pas comment le circonvenir, toutefois, cela relève de l'humain — vous êtes psychologue — et de la politique aussi. C'est un des gros problèmes.
Le ministre change de portefeuille et le nouveau titulaire bien souvent recommence à zéro. Il ne connaît pas l'ABC de la Loi sur les langues officielles, ni son esprit, ni les obligations qui en relèvent.
J'arrive à ce comité plutôt découragé, parce que j'ai vu cette évolution depuis 1969. J'entends le même réquisitoire, année après année. Vous avez félicité le gouvernement de son discours du Trône précédent pour ses énoncés. Est-ce que vraiment cela va dans la bonne direction tout cela? Pensez-vous qu'il y a une renaissance, une nouvelle volonté de se mettre à la tâche une fois pour toutes?
Mme Adam: Vous avez mentionné que les ministres changent souvent. Je dirais que les sous-ministres changent très souvent. Pour moi, c'est une situation qui pourrait vraiment être améliorée. Le politique est une chose, mais du côté de l'administration, certains sous-ministres ne sont en poste qu'à peine deux ou trois ans. Changer un ministère ou amener un ministère à respecter une loi n'est pas suffisant pour vraiment faire une différence. Je pense que nos collègues sous- ministres le reconnaîtraient.
Est-ce que je crois ce que je raconte dans mon rapport? Je n'ai pas l'expérience que vous avez dans le domaine des langues officielles, je ne peux que constater que depuis trois ans, il y a quand même eu des engagements faits par ce gouvernement. Il y a un début de mobilisation. M. Dion a travaillé très fort avec ses collègues ministres et l'appareil administratif a emboîté le pas. Il semblerait qu'il y a un plan de relance — ce n'est peut-être pas la panacée — par rapport aux langues officielles que nous n'avons pas vu depuis un bon bout de temps. Cependant, on ne l'a pas encore vu et on ne sait pas si ce plan sera assorti des ressources suffisantes. On nous dit qu'il sera présenté après le budget, donc fin février, en mars peut-être. À ce moment-là, j'aimerais répondre à votre question. Je donne toujours, dans la vie, la chance au coureur. M. Dion suit les étapes. Certaines institutions ont pris les devants. Le ministère de la Justice avance lentement dans ses dossiers. Le ministère du Patrimoine canadien est en train de repenser à renégocier les ententes ou les programmes dont parlait le sénateur Gauthier. Il faudra examiner très sérieusement ce dossier.
Le Conseil du Trésor, je l'ai dit dans ma présentation, ne fait pas véritablement ce qu'il devrait faire au niveau de la surveillance et de la vérification. Il a besoin de ressources. Ce n'est pas de mauvaise foi. On a coupé de moitié les ressources dans les ministères en ce qui a trait aux langues officielles. C'est aussi un message puissant que l'on donne. Si vous coupez des ressources dans l'appareil bureaucratique, c'est comme si ce n'était pas important.
Le sénateur Corbin: Vous insistez et la loi aussi insiste sur la valeur des langues officielles. C'est dans la Constitution. C'est fondamental. De quel droit peut-on couper des instruments de développement de valeur, de société? Que leur dites-vous à ce sujet?
Mme Adam: Ce n'est pas moi qui décide des budgets.
Le sénateur Corbin: Mais vous avez le droit de tout commenter.
Mme Adam: Il faut qu'il y ait plus de personnes qui s'insurgent comme vous le faite en ce moment. La commissaire va commenter, mais si la commissaire n'a pas d'écho au Parlement, chez les politiciens, chez les administrateurs ou chez les citoyens, on va toujours entendre les mêmes litanies des commissaires qui suivront.
La présidente: Avez-vous déjà publié un rapport spécifique sur les changements proposés à la loi? Pourriez-vous le faire?
Mme Adam: C'est un des projets que nous sommes en train d'examiner. Je dis bien réfléchir avec l'équipe sur les priorités sur lesquelles on devrait se pencher au commissariat. L'une des questions que l'on examinera — pas cette année mais dans un avenir rapproché — sera la question de la loi. La question fondamentale est la suivante: est-ce qu'elle est due pour être révisée? Nous pensons que, oui.
Le sénateur Beaudoin: Je voulais aborder un autre ordre d'idée. Le bilinguisme, au plan fédéral, est fortement charpenté. Les deux langues sont officielles et surtout elles sont égales.
Mais sur le plan provincial, hélas, c'est l'asymétrie, comme on en a discuté à Moncton. Le Québec est obligé de faire ses devoirs en français et en anglais, le Manitoba aussi. Les Acadiens ont fait un travail incroyable et ils ont réussi à inclure cela dans la Constitution en 1982. C'est extraordinaire l'égalité des deux communautés au Nouveau-Brunswick.
Au Manitoba, on a dû attendre 100 ans avant que les lois soient dans les deux langues. Dans les autres provinces, ce n'est pas fort. Sur le plan du bilinguisme, le ministre Dion l'a dit, et je le dis aussi, qu'il va falloir, pour régler la situation, avoir des plans asymétriques. Il faut aider les provinces qui ne sont pas aussi fortes que les autres. Le Nouveau-Brunswick, je le répète, m'a beaucoup impressionné. Cependant, dans l'ouest, ce n'est pas formidable.
Il faut prendre le taureau par les cornes et dire qu'il faudra arriver avec un plan très fort. Cela sera d'autant plus difficile puisque les minorités ne sont pas très fortes. Depuis l'arrêt McKel, on s'est aperçu que le français n'était pas protégé dans les écoles. Seulement la religion était protégée. Mais aujourd'hui, partout au Canada, on parle plus de langue que de religion parce que la religion, quelle qu'elle soit, est reconnue comme égale selon notre Charte. Vous avez droit d'avoir une religion ou pas. Toutes les religions sont sur un pied d'égalité. Alors, c'est réglé.
Mais le bilinguisme n'est pas réglé et il varie d'une province à l'autre. Quand on demeure dans la scène fédérale, ça va parce qu'il y a égalité. Mais dans le domaine de la santé, qui est prioritairement provincial, — et tout le monde est d'accord là-dessus — cela varie d'une province à l'autre. J'aimerais bien que les médecins et les infirmières soient bilingues dans toutes les provinces, mais ce n'est pas le cas. C'est le cas au Nouveau-Brunswick, au Québec dans une bonne mesure, en Ontario, oui, dans l'ouest, non. Pourtant, il s'agit là d'une matière provinciale.
Quand on est dans les institutions fédérales, vous l'avez dit vous-même, on est fort et on peut intervenir parce qu'on est pour l'égalité. Dans le domaine provincial, c'est différent. On ne peut pas prendre la place des provinces.
Comme le disait le ministre Dion à Moncton, il faudra se faire un plan de bilinguisme qui n'est pas basé sur l'égalité mais sur l'asymétrie. La langue française est dans une situation plus difficile que la langue anglaise. Il faut donc aider la langue française davantage. Les gens pensent qu'ils n'ont pas le droit de faire cela, mais ils ont tort. Oui, on a le droit de faire cela. On a le droit d'avoir des plans qui seront asymétriques. Cela prendra du temps, mais il faut en arriver là pour notre pays, notre pays étant tout le Canada. Il faut aider toutes les régions du Canada, mais la difficulté se retrouve dans les matières provinciales, parce qu'il est plus difficile pour nous, à Ottawa, d'intervenir dans ces domaines, sauf qu'il nous est possible de se servir du pouvoir de dépenser.
On a des provinces moins riches et d'autres plus riches, mais on doit avoir un système qui est à peu près égal pour tous les Canadiens. Cela veut dire que le fédéral doit intervenir. Cela ne me gêne pas du tout qu'il intervienne avec son pouvoir de dépenser, tout en respectant les juridictions provinciales.
On ne peut pas faire plus que cela, mais on peut le faire. Et je ne suis pas sûr qu'on le fait. J'ai retenu les paroles du ministre Dion quand il a dit qu'il fallait arriver avec des plans asymétriques dans différentes parties du Canada. Il faudra protéger davantage la langue française là où elle est la plus faible. La langue française n'est pas en danger dans la ville de Québec, mais elle peut l'être ailleurs. Elle n'est pas en danger au Nouveau-Brunswick, parce qu'il y a égalité mais ailleurs, hélas, il n'y a pas cette égalité.
Il faudra commencer à comprendre que nous avons besoin de plans qui peuvent varier d'une province à l'autre. Si le gouvernement fédéral comprend bien son rôle, il finira par s'obliger à établir des plans. C'est une autre attitude, mais je l'essaierais. Qu'est-ce qu'on a à perdre? On a rien à perdre.
La présidente: Voulez-vous réagir madame Adam?
Mme Adam: Vous couvrez beaucoup de choses, sénateur Beaudoin. J'aimerais réagir à votre énoncé sur le pouvoir de dépenser. Le gouvernement fédéral a un pouvoir. Plusieurs d'entre nous, et moi-même comme commissaire, trouvons le gouvernement fédéral timide dans sa façon d'interagir avec les provinces et les territoires et dans les ententes qu'il signe pour l'union sociale et les clauses linguistiques. On a dû à plusieurs reprises le rappeler à l'ordre.
Votre observation démontre que dans plusieurs décisions et actions prises par le gouvernement fédéral, on ne met pas cela de l'avant. On veut conclure une entente assez rapide. On l'a vu pour la main-d'œuvre, par exemple. Pour conclure l'entente, on laisse tomber les exigences et les clauses linguistiques.
Le gouvernement fédéral pourrait faire des percées importantes dans l'avancement de la dualité linguistique canadienne, tout en respectant les compétences des provinces, s'il était un champion et un gardien de la constitution canadienne, qui a été signée par toutes les provinces sauf le Québec. Mais il n'exerce pas nécessairement son pouvoir.
Le sénateur Beaudoin: Le problème, c'est que certaines provinces n'ont pas l'égalité des droits linguistiques et certaines provinces ne sont pas obligées d'avoir des droits dans les deux langues. Certaines provinces n'ont que faire du bilinguisme. Alors, il faut trouver un moyen.
Le Nouveau-Brunswick, par exemple, est la province la plus bilingue; là, ça va bien. Mais il y a des provinces où il n'y a pas de bilinguisme ou bien il y en a très peu. Comme c'est une matière provinciale, c'est difficile pour nous d'intervenir et de forcer la note, mais le fédéral peut au moins donner un peu plus d'argent.
Mme Adam: On est d'accord que chaque province a un régime linguistique très différent. Les assises législatives ou les dispositions sont très différentes. Il demeure toutefois que le gouvernement fédéral signe, à peu près avec toutes les provinces et les territoires, des ententes sur à peu près tous les secteurs. Il lui appartient d'exiger cela puisque les provinces ont signé quand même que l'anglais et le français étaient sur un pied d'égalité au Canada.
Le sénateur Beaudoin: Je fais une distinction pour les territoires. N'oubliez jamais que les territoires ne sont pas des provinces. Ce sont des pouvoirs délégués du gouvernement fédéral et ce dernier peut intervenir n'importe quand, n'importe où, dans n'importe quel territoire.
Mme Adam: J'aimerais que vous disiez cela au gouvernement fédéral puisque c'est la position que nous défendons dans un des recours judiciaires en ce moment. Ce n'est pas nécessairement la position tenue par notre gouvernement.
Le sénateur Beaudoin: Je vais vous appuyer. C'est très simple, les provinces tiennent leurs pouvoirs de la Constitution. Les territoires tiennent leurs pouvoirs d'une loi fédérale. Ce n'est pas pareil. Ce sont seulement des pouvoirs délégués. Vous allez me dire qu'ils ont des pouvoirs délégués qui ressemblent à ceux des provinces, mais le gouvernement fédéral peut changer cela demain matin s'il le veut. C'est présentement en cour de justice?
Mme Adam: Oui.
Le sénateur Beaudoin: Bien je vais m'intéresser à cela demain matin!
Le sénateur Léger: Ce n'est pas une question. J'appuie vos efforts de mettre l'accent sur le gouvernement fédéral afin qu'il n'y ait absolument pas de confusion. On est égal et j'aime beaucoup l'entendre.
Je vais donner un exemple. On m'avait demandé d'être la marraine d'un navire lors de son inauguration. C'était le navire Moncton. Tout se déroulait à Halifax et c'était Irving qui avait fait les douze navires de la classe Kingston. J'ai tout appris cela. J'ai pensé automatiquement que cela se déroulerait dans les deux langues parce que c'était fédéral. Cependant, cela n'était pas forcément bilingue. J'ai appris par la suite que Mme Chrétien était la marraine du Shawinigan, et je crois que cette fois, cela a été fait en français. Pour tous les autres navires, ce n'était pas automatiquement bilingue. Vous travaillez sur ce genre de choses. On ne réussira pas tout de suite mais on peut y arriver. Personnellement, je commence à voir des différences entre la situation d'il y a 30 ans et celle d'aujourd'hui.
Je suis émerveillée, au Sénat, d'entendre les sénateurs anglophones s'exprimer dans un beau français. Ils deviennent même nos plus forts défenseurs présentement. Il y a une armée de personnes comme cela. Cela prend du temps à y arriver, mais je suis bien fière que vous frappiez sur le gouvernement fédéral.
[Traduction]
Le sénateur Keon: J'ai réfléchi à ce que vous avez dit au sujet de la commission Romanow. Vous estimiez, et j'espère que je ne vous paraphrase pas incorrectement, qu'il y était vaguement question de renforcer la dualité linguistique des services de santé. Vous estimiez qu'il faudrait vraiment un engagement à fournir des services de santé bilingues. Il est très intéressant de voir que Romanow préconise l'ouverture de la loi pour y ajouter un sixième principe, à savoir l'imputabilité. Pourquoi ne suggérez-vous pas qu'on en ajoute un septième, qui serait celui des services bilingues? Qu'on aille au-delà de la dualité linguistique. Le sénateur Gauthier en parle fréquemment et il utilise beaucoup l'expression «dualité linguistique», plutôt que de parler de «bilinguisme» — et il voudra peut-être ajouter quelque chose à ce sujet lorsqu'il vous posera des questions —, mais pourquoi ne pourrions-nous pas inclure maintenant un septième principe dans la Loi canadienne sur la santé?
Pour en revenir à ce que disait le sénateur Beaudoin, le gouvernement fédéral a énormément de pouvoirs pour faire en sorte que des services bilingues soient offerts au Canada. Je peux vous dire, à titre de directeur d'un établissement, que nous avons dû investir considérablement dans le recrutement d'un nombre suffisant de personnel pour refléter la dualité linguistique du Canada dans la prestation des services. Nous n'avons pas obtenu beaucoup d'aide de qui que ce soit — un peu du gouvernement de l'Ontario, mais rien du gouvernement fédéral. Pourquoi ne pas faire quelque chose à cet égard?
Mme Adam: Je trouve votre invitation attrayante. Nous agirons dans ce sens et nous essaierons de formuler des propositions au gouvernement fédéral à cet égard. Je suis tout à fait d'accord pour dire que le gouvernement fédéral a plus de pouvoirs qu'il n'en exerce. On pourrait même intégrer les services dans les deux langues officielles au sixième principe de l'imputabilité proposé par M. Romanow. On peut inclure de telles obligations à l'intérieur d'un autre principe. Il y a différentes façons d'envisager cette question. Je n'insisterai pas davantage sur ce point aujourd'hui, mais je reviendrai certainement témoigner à votre comité si l'on me demande de faire avancer davantage cette question et de discuter de diverses options pour le gouvernement fédéral.
[Français]
Le sénateur Gauthier: J'aimerais aborder plusieurs sujets, mais je vais vous laisser le choix.
J'aimerais revenir sur l'étude de l'accès aux lois telles que la Loi sur le divorce et la Loi sur les faillites faite par Justice Canada et déposée en août dernier. Nous devrions nous pencher là-dessus pour prendre conscience de la réalité dont le sénateur Comeau a fait clairement mention, c'est-à-dire la symétrie de l'accès aux lois canadiennes. La Charte des droits et libertés dit que les Canadiens ont droit à certains droits en éducation. La Charte parle des moyens à prendre.
Le sénateur Keon a parlé d'une Charte canadienne de la santé. Je n'ai pas de problème avec cela. En Ontario, l'accès à la Loi sur le divorce et à la Loi sur les faillites, ce n'est pas chose facile pour un francophone. Au Nouveau- Brunswick, il n'y a pas de problème. Au Manitoba, on dit qu'ils ont des problèmes. Il faudrait regarder cela de près. Il n'y a pas de problèmes au Québec. Voyez-vous la symétrie? Il n'y à pas facilement de juges qui entendent les causes en français dans les provinces comme la mienne. Je ne connais pas la situation en Nouvelle-Écosse, mais je suis certain que le sénateur Comeau pourra vous dire qu'il n'est pas facile d'avoir un divorce en français en Nouvelle-Écosse. C'est une loi fédérale, pourtant. Je demande votre commentaire à ce sujet.
Mme Adam: On s'entend. Toute la question de l'accès à la justice mérite vraiment d'être étudiée. Je vais réagir de cette façon. Le ministère de la Justice est de plus en plus conscient du problème et déterminé à examiner la situation. Suite à son étude «État de lieu», il a mis sur pied un comité fédéral-provincial-territorial dont la responsabilité sera d'examiner la question de l'accès à la justice dans chacune des provinces et territoires. Je crois qu'ils y sont tous.
Mme Tremblay: Non, pas tous.
Mme Adam: On a déjà des problèmes si certains ne sont pas au rendez-vous. Je suis d'accord avec vous. On l'a vu avec le dossier de la Loi sur les contraventions. Dès que la responsabilité est confiée à la province, sa mise en application peut être drôlement menacée.
Le gouvernement fédéral a été sensibilisé à cette problématique suite au dossier de la Loi sur les contraventions. Le ministère de la Justice nous a dit — je ne voudrais pas les citer — que le jugement concernant la Loi sur les contraventions les amenait à examiner d'autres lois qui pouvaient être sous juridiction provinciale pour ce qui est de la mise en application.
Le sénateur Gauthier: Les Canadiens et les Canadiennes ont accès, de par leurs droits constitutionnels, aux débats du Parlement. Lorsqu'on publie un débat, on le fait dans les deux langues officielles. Lorsqu'on diffuse un message, on devrait y avoir accès dans les deux langues officielles. C'est clair, c'est l'article 133. Lorsque j'ai de la difficulté à entendre, je n'ai pas accès aux messages télévisés, à moins qu'il y ait du sous-titrage en temps réel. En anglais, il n'y a pas de problème, CBC a annoncé que toute la programmation est sous-titrée en temps réel depuis le 1er novembre, mais pas en français. Il y a une inégalité d'accès.
Je suis allé visiter deux collèges postsecondaires à Edmonton et à Vancouver. Il n'y a aucune consigne de sécurité disponible ni dans les aéroports ni dans les avions. Je suis malentendant. Je suis obligé de quêter des renseignements aux voisins pour savoir ce qui se passe. Cela est injuste. Ils ont tous des télévisions, des écrans qui indiquent toutes sortes de choses. Je ne peux pas le comprendre. Toutefois, j'ai noté que les annonces publicitaires étaient sous-titrées, mais pas les consignes de sécurité. Je n'ai pas trouvé cela correct. Je l'ai mentionné à M. Milton qui m'a répondu qu'il faisait ce qu'il pouvait. Ce n'est pas acceptable. Je voudrais avoir vos commentaires sur ces deux sujets.
Mme Adam: Vous le savez mieux que moi que les débats parlementaires ainsi que toute publication de la Chambre des communes doivent être publiés dans les deux langues officielles. La loi va-t-elle aussi loin pour le sous-titrage en anglais et en français?
Les juristes et les constitutionalistes présents pourraient sûrement s'exprimer, mais il me semble que si une société d'État comme Radio-Canada fournit aux citoyens d'expression anglaise le sous-titrage en temps réel, on doit se poser sérieusement une question quant à l'égalité du français et de l'anglais lorsque Radio-Canada ne le fait pas pour les citoyens francophones. Pour moi, cela devient une question d'égalité du traitement des deux grandes communautés linguistiques.
Le sénateur Gauthier: Ce matin, j'ai rencontré les avocats et les conseillers de la Commission canadienne des droits de la personne. Je vais déposer une plainte à ce sujet. On m'a dit que je devais aller là. En tant que commissaire aux langues officielles, on me dit que vous n'auriez pas assurément juridiction, mais la Commission canadienne des droits de la personne peut avoir juridiction parce qu'elle a déjà eu des causes comme celle-là: la cause Vlug et la cause Quigley. Vous connaissez ces causes. Qu'est-ce qui déclenche votre implication dans une contestation judiciaire?
Mme Adam: Dans le cas de l'affaire Quigley, des plaintes ont été déposées au Commissariat qui, en fait, révélaient que les citoyens n'avaient pas accès aux débats parlementaires télédiffusés dans le langue de leur choix. Bien sûr, le débat est devant les tribunaux encore une fois parce que la Chambre des communes en a appelé de la décision en première instance qui a jugé en faveur de la position du plaignant et de la commissaire. On verra en deuxième instance.
Pour ce qui est de savoir ce qui déclenche cela, si on fait un parallèle entre la situation que vous apportez, sénateur Gauthier, y aurait-il des obligations pour les institutions fédérales — dont Radio-Canada — de servir les citoyens canadiens d'expression anglaise et française de façon équitable et équivalente? Et si le fait de communiquer avec le citoyen canadien, c'est au moyen du sous-titrage, il faudrait l'examiner sous cet angle. On ne peut pas le faire sous l'angle des droits de la personne.
M. Robichaud: On est en train d'examiner la question sous l'angle de la disponibilité des sous-titres dans les deux langues, à la fois auprès du CRTC et de Radio-Canada. Dans ce contexte, on a déjà des premiers contacts avec Radio- Canada. Mme Adam a écrit directement au président de Radio-Canada tout récemment à ce sujet.
Mme Adam: La raison pour laquelle on n'a pas de sous-titrage en français, semble-t-il, c'est qu'il n'y a pas de professionnels disponibles. Cela me fait penser qu'il n'y a pas tellement longtemps, on disait que les francophones ne pouvaient pas avoir de service en santé en français parce qu'il n'y avait pas de professionnels de la santé francophones. On devra examiner la responsabilité des institutions ou de l'État de veiller à ce qu'il y ait des professionnels compétents pour assurer l'égalité de services dans les deux langues officielles aux citoyens canadiens.
Le sénateur Maheu: Vous avez parlé des anglophones bilingues qui passent 14 p. 100 de leur temps à parler français et que les francophones passent 43 p. 100 de leur temps à parler anglais. Lorsqu'ils parlent au public, ça va, ils se servent de la langue de la personne qui parle. À l'intérieur de nos services, y a-t-il des possibilités offertes au niveau de la direction qui forcerait la note un peu plus? Je me rends compte que ce sont les francophones qui plient et parlent anglais plus souvent et il me semble que c'est depuis longtemps. D'après moi, personne ne s'occupe de ce dossier. Les anglophones qui ne parlent en français que pendant 14 p. 100 de leur temps parce qu'ils ne parlent pas assez bien le français. Ils le parlent à peine. Le bilinguisme au niveau des institutions fédérales est loin d'être un vrai bilinguisme.
Mme Adam: Plusieurs choses pourraient être faites pour améliorer la situation. Il faut reconnaître que les statistiques que j'ai présentées démontrent qu'on a réussi les aspects quantitatifs du bilinguisme, c'est-à-dire un bon équilibre anglophone-francophone dans les postes désignés bilingues.
C'est tout l'aspect interpersonnel dans le milieu de travail. C'est vraiment à ce niveau que nous devons apporter des améliorations.
Cependant, pour apporter des changements sur le plan des comportements linguistiques, ce n'est pas tellement compliqué. Si vous voulez qu'une personne parle davantage sa langue maternelle, vous devez d'abord encourager et renforcer au quotidien l'usage de cette langue. Cela peut se faire de différentes façons. Il faut donner à l'employé des outils de travail dans la langue de son choix. Il faut que le patron ou toute personne qui a l'autorité exerce et encourage explicitement l'usage de la langue choisie. Un superviseur ou un sous-ministre qui ne parle pas ou qui n'ose pas parler la langue seconde n'a pas nécessairement un bon comportement.
Les comportements, ce ne sont pas toujours les lois qui peuvent les changer. Il faut vraiment responsabiliser les gens qui peuvent faire une différence dans le milieu de travail et cela se joue au quotidien. Aucune loi, aucun règlement n'aura d'effet que dans la mesure où les comportements linguistiques du quotidien vont changer.
Le sénateur Comeau: Permettez-moi d'être cynique pour un moment. Nous attendons le plan Dion depuis très longtemps. Nos attentes augmentent de jour en jour et probablement que nous ne verrons rien avant le mois de mars 2003. Au mois de novembre, il y aura un changement de chef. Nous avons perdu tout ce temps et tout tombera à l'eau. Nous allons devoir tout recommencer à zéro. Il faut le prévoir. Je sais que les propos de M. Dion, pendant la dernière année, ne l'ont pas rendu aimable aux yeux du nouveau chef qui s'en vient.
Mme Adam: Ce n'est pas parce qu'il y a un nouveau chef que la loi disparaît. Les obligations du gouvernement demeurent.
Le sénateur Comeau: Je ne parle pas de la loi, je parle du plan Dion.
Mme Adam: Oui, mais ce n'est qu'une action prise par le gouvernement pour renouveler son engagement et redresser la situation concernant la mise en œuvre d'un plan linguistique. Mon rôle ne changera pas. Je vais talonner le futur chef pour qu'il mette en œuvre ce plan. S'il n'aime pas le plan Dion, il en fera un autre. Ce que je veux, c'est une action rapide parce que c'est urgent!
Le sénateur Comeau: C'est la raison pour laquelle je soulève le point. Nous attendons ce plan depuis longtemps déjà et cela va retarder sa mise en œuvre. Cela va peut-être prendre un an ou deux, ce qui est un délai assez important.
Mme Adam: Ce qui est important, c'est que ce fameux plan Dion soit connu et qu'il y ait les ressources suffisantes pour nous permettre de démarrer. Le nouveau chef embarquera dans le wagon où il sera rendu.
Le sénateur Comeau: J'aimerais que notre comité, de temps à autre, envoie des invitations surprises à des ministères et des agences afin qu'ils viennent nous dire ce qu'ils font pour faire avancer la cause du bilinguisme au Canada. Que pensez-vous de cette tactique?
Mme Adam: Une institution fédérale se doit de veiller à la mise en oeuvre des lois. Elle devrait avoir son propre programme et devrait vérifier elle-même où elle en est rendue. Elle devrait être prête à faire part de ses objectifs, de ses priorités et de ce qu'elle a réalisé jusqu'à maintenant. Une institution qui se gère bien serait en mesure de répondre à cela.
Le sénateur Comeau: Y compris les fondations créées par le gouvernement fédéral?
Mme Adam: Y compris même le Commissariat!
Le sénateur Comeau: Bonne idée! Vous avez envoyé des louanges à Statistique Canada. C'est eux qui s'occupent maintenant du recensement. Avez-vous eu l'occasion de discuter avec eux du questionnaire de recensement, plus spécifiquement de la question sur l'origine ethnique? Plusieurs groupes culturels sont proposés, mais il semble que les Acadiens aient été omis. L'Acadien ne se reconnaît pas comme un Français, mais plutôt comme un Acadien et beaucoup de nos Acadiens ne cochent pas la case «Français». On a inclus les Chiliens, les Somaliens, les Vietnamiens, tout un groupe de gens de partout dans le monde, autres que le premier groupe européen qui a créé une nation ici, au nom de l'Amérique. Les Acadiens ont été exclus de ce recensement.
Mme Adam: Le Commissariat est intervenu auprès de Statistique Canada il y a quelques années, après le recensement de 1996, pour proposer de nouvelles questions qui portent sur l'usage des langues officielles. Trois nouvelles questions ont été ajoutées. Je vais laisser répondre monsieru Gérard Finn, le conseiller spécial, qui est également Acadien et qui était là au moment où on a proposé de nouvelles questions pour le recensement de 2000.
M. Gérard Finn, conseiller spécial, Commissariat aux langues officielles: Il faut faire une distinction entre la question des langues et celle des ancêtres. Qu'on soit anglophone, francophone, Écossais ou Acadien, c'est la langue officielle parlée qui déclenche l'obligation ou non de servir le public dans les deux langues officielles si le nombre est suffisant. Dans ce sens, cela n'a pas d'influence sur la portée du service au public dans les institutions fédérales.
Le sénateur Comeau: Vous dites qu'il n'y a pas d'influence sur le plan du service. Je peux comprendre cela, mais si nous pouvions connaître le nombre d'Acadiens dans nos provinces, cela pourrait nous donner des munitions politiques et on pourrait ainsi dire qu'il y a X nombre d'Acadiens en train de se faire assimiler. À ce moment-ci, le recensement ne nous donne pas cette possibilité. On cherche toutes sortes de munitions et toutes sortes de moyens.
M. Finn: Il y a une longue liste de choix dont un qui est «Canadien». Une des nouvelles questions sur les langues, c'est: quelle autre langue parlez-vous à la maison? Cela va nous donner une bonne indication des Acadiens ou autres qui parlent principalement l'anglais à la maison. Jusqu'à présent, on ne savait pas s'ils parlaient une autre langue. Maintenant, avec la question supplémentaire, on va savoir quel pourcentage de ces gens parlent principalement l'anglais à la maison, mais aussi le français ou une autre langue. Cela sera intéressant au niveau des transferts linguistiques. On ne pourra plus dire, quand quelqu'un qui est francophone et qui parle principalement l'anglais à la maison, qu'il s'agit d'un transfert linguistique puisqu'il pourrait parler aussi le français à la maison. On précise les deux.
Le sénateur Comeau: On reviendra sur cette question, madame la présidente.
La présidente: Il avait été convenu qu'on essaierait de terminer cette partie de la rencontre à 18 h 30 pour ensuite passer à la partie affaires.
Nous voulons profiter à 100 p. 100 de nos témoins, mais à ce point-ci il faudra aller assez brièvement.
Le sénateur Beaudoin: Dans la Charte des droits et libertés, un des principes fondamentaux est le principe de l'égalité. Le Canada est un pays bilingue et bi-juridique. Ne pourrions-nous pas trouver une assise quelconque afin de conclure que notre système de justice se doit de respecter cette richesse du bilinguisme et du bi-juridisme?
Dans l'affaire concernant l'émission La soirée du hockey, on a gagné en disant que les deux langues officielles sont égales et que Radio-Canada et CBC doivent respecter ces valeurs. On devrait faire de même pour le principe de l'égalité. Notre pays possède deux systèmes. L'un est d'inspiration française et l'autre britannique. Cela nous conduit-il à une justice qui s'appuie sur l'égalité? Je ne l'affirme pas, mais c'est un point de réflexion.
Pour ce qui est du secteur de la santé, nous avons, à l'article 7, le droit à la vie, à la sécurité et à la liberté. Je ne veux pas entamer le débat sur le droit à la vie, car c'est une autre question. Dans un domaine aussi important que celui de la santé, la question du bilinguisme est réelle pour un pays comme le nôtre. C'est pourquoi j'accepte volontiers la proposition du sénateur Keon. On devrait incorporer dans la Loi canadienne sur la santé le principe du bilinguisme.
Le sénateur Corbin: J'aimerais demander à la commissaire s'il est possible de porter plainte contre son rapport.
Mme Adam: Tout est permis.
Le sénateur Corbin: Votre mascotte, le prix Léon, qu'en avez-vous fait?
Chemineau: Celui qui parcourt les chemins et qui vit de petites besognes, d'aumônes ou de larcins.
Vous n'avez pas écrit C-H-E-M-I-N-O-T mais C-H-E-M-I-N-E-A-U. Cette distinction fait toute la différence au monde — et je le sais, car je suis fils de cheminot. Vous avez donc fait une erreur dans votre entête, mais je vous le souligne pour rire.
Mme Adam: Je l'avais noté, mais trop tard.
La présidente: Je réitère l'invitation du sénateur Comeau que vous soyez présente à nos réunions de comité. Nous vous tiendrons au courant et nous vous enverrons un avis de convocation, madame Adam, afin que vous puissiez y être. S'il ne vous est possible de le faire, il y aura certainement de vos collègues qui pourront venir.
Le sénateur Gauthier: J'aimerais poser quelques questions sur la vérification linguistique. Je croyais en avoir l'occasion en deuxième partie, tel que convenu.
La question que j'aimerais poser est la suivante. J'ai une certaine expérience dans la vérification des comptes, ayant été président du comité des comptes publics pendant des années. Il y a un système qui existe du nom de VOR, la Vérification de l'Optimisation des Ressources.
Lorsqu'on effectue une vérification, il faut avoir des objectifs et des critères clairs et précis. On vous a accordé cette année un budget supplémentaire d'environ 1,3 millions $ ou 1,4 millions $, si ma mémoire est bonne. Vous m'avez convaincu que cela était nécessaire afin d'effectuer plus de vérification des ministères, à savoir s'ils rencontrent les exigences de la loi et pour s'assurer d'obtenir un compte rendu fidèle de la mise en place des langues officielles.
Avez-vous l'intention de poursuivre dans cette optique? Si c'est le cas, pourrait-on en discuter de façon plus large?
Mme Adam: M. Robichaud pourrait nous en dire davantage sur ce point, et je ne veut pas retarder les travaux de votre comité. Nous en sommes à l'étape de déterminer ces critères et objectifs, d'établir la méthodologie. Nous sommes en consultation et déjà une partie de l'équipe est en poste. Le processus est donc démarré.
D'ailleurs, il me fera plaisir de venir avec l'équipe recueillir vos opinions et, en se basant sur votre expérience, entendre ce qui, dans une vérification, vous aiderait comme parlementaire. Nous pourrions en tenir compte dans l'élaboration de notre méthodologie et de notre approche de vérification.
M. Robichaud: Je suis tout à fait d'accord.
Mme Adam: Alors nous reviendrons sûrement.
Le sénateur Gauthier: Dans votre présentation vous avez parlé de plusieurs ministères auxquels vous avez donné des conseils. Pouvons-nous avoir accès à ces documents? Par exemple, à la dernière page de votre exposé vous dites avoir donné au Conseil du trésor certaines directives. Pourrait-on obtenir copie de cela?
Mme Adam: J'ai des avis différents de chaque côté. Il faudra donc se concerter.
Je suis immobilisée lorsqu'on me donne deux avis différents. Je vais y penser.
La présidente: Nous vous remercions encore une fois. Je remercie les membres du comité de leur participation. Ce fut très intéressant. Ceci entame bien le travail de notre comité. C'est un petit exemple de ce qu'on fera en l'année 2002, 2003 et 2004 au Comité sénatorial permanent des langues officielles.
Nous avons deux points à discuter: d'abord, sur la motion de renvoi qui vient de vous être distribuée; deuxièmement, sur le rapport de Statistique Canada qui va être publié le 10 décembre. Et je vous ferai une suggestion à cet effet.
Le sénateur Maheu: Un point d'ordre.
La présidente: Nous le prendrons à la fin. Vous avez devant vous une motion de renvoi qui se présente comme suit:
Le Comité sénatorial permanent des langues officielles reçoit la permission d'étudier afin d'en faire rapport de façon ponctuelle l'application de la Loi sur les langues officielles, ainsi que des règlements et instructions en découlant au sein des institutions assujetties à la loi, ainsi que les rapports de la commissaire aux langues officielles, de la présidente du Conseil du trésor et de la ministre du Patrimoine canadien — article 88 de la Loi.
Le sénateur Comeau: Mes questions traitent des institutions assujetties à la Loi sur les langues officielles. J'assume que ces institutions se reportent à tous les ministères, toutes les fondations et tous les départements gouvernementaux. Quant aux nouvelles fondations, peuvent-elles comparaître devant le comité si elles ne sont pas assujetties à la Loi?
La présidente: Cette question est très intéressante. Je vais demander à ceux qui ont plus d'expérience d'y répondre. À mon avis, si la fondation est créée par un service gouvernemental fédéral, elle devient assujettie à la Loi sur les langues officielles.
Le sénateur Beaudoin: De toute façon, je suis d'accord avec ce texte et la raison en est très simple. La commissaire préférait l'expression «institutions assujetties» à l'expression «institutions fédérales» car «institutions assujetties à la loi» a un sens plus vague et plus considérable que «institutions fédérales». Je vote en faveur de l'expression «institutions assujetties» les yeux fermés.
Quant à la question relative aux fondations, je dirais que si on veut inclure les fondations, on est mieux d'adopter le texte amendé plutôt que le texte de l'article 88. Ce sont les institutions fédérales, alors que les institutions assujetties à la loi, c'est plus considérable. En somme, j'aime bien cet amendement.
Le sénateur Comeau: Y a-t-il des fondations en voie de création qui ne sont pas assujetties à la Loi sur les langues officielles? Si oui, peut-être devrait-on encourager ces institutions à reconnaître la valeur du bilinguisme.
La présidente: Madame Tremblay, savez-vous s'il y a des fondations qui ne sont pas assujetties à la Loi sur les langues officielles?
Mme Tremblay: Je ne sais pas s'il y en a, mais il pourrait y en avoir. Par exemple, le Centre sur la résolution des conflits sportifs est créé en vertu de la Loi sur les sports et l'activité physique et n'est pas assujetti à la Loi sur les langues officielles. Tel quel, le libellé ferait en sorte que vous ne pourriez pas convoquer ce Centre qui, pourtant, a des obligations linguistiques en vertu de la Loi sur les sports, mais qui n'est pas assujetti à la Loi sur les langues officielles.
Par exemple, si le comité a l'intention de convoquer le ministère de la Justice au sujet du rapport sur l'état des lieux, il pourrait y avoir ambiguïté puisque ce rapport n'a pas été commandé dans le contexte de l'application de la Loi sur les langues officielles. C'est mon point de vue.
Le sénateur Gauthier: C'est ce que j'allais dire également. Il y a un amendement au projet de loi C-12 actuellement au Sénat qui propose que le Centre sur la résolution des conflits sportifs soit appelé à exposer sa politique linguistique et à agir.
La loi est claire et stipule que le Bureau de direction doit adopter une politique de langues officielles. Si c'est dans le libellé de l'ordre de renvoi, je ne vois pas la difficulté de le convoquer, mais si ce n'est pas le cas on pourrait avoir des problèmes. Je vous recommande de m'écouter et de voter avec moi demain.
Lorsqu'on spécifie des ministères, on élimine bien d'autres choses et je n'aime pas l'idée d'inclure le libellé de l'article 88 de la Loi sur les langues officielles dans l'ordre de renvoi. La loi est là.
Le sénateur Beaudoin: J'aimerais demander à Mme Tremblay son avis quant à l'inclusion des fondations au rang des institutions assujetties à la loi. Comme le sénateur Comeau, je suis d'avis qu'on devrait assujettir les fondations à la Loi sur les langues officielles.
La présidente: Il ne faudrait pas commencer à nommer toutes les institutions parce qu'en fait, on ne peut pas tout faire.
Le sénateur Comeau: Il faudrait y inclure toutes les institutions fédérales.
Le sénateur Maheu: Si on a un doute à savoir si les fondations font partie des institutions assujetties à la loi, on peut demander un autre ordre de renvoi la semaine prochaine lorsqu'on aura reçu la réponse au sujet des fondations.
La présidente: Rien ne nous empêche de le faire.
Le sénateur Corbin: Je n'ai pas de problèmes avec l'idée et je pense qu'au départ, il n'y avait pas de problèmes. Ce que vous cherchez, c'est une référence du Sénat pour pouvoir commencer à opérer et l'article 69(2) vous fournit cette référence.
Après leur dépôt, les rapports du Commissaire aux langues officielles sont renvoyés devant le comité constitué par le Parlement pour l'application de l'article 88. Le rapport du commissaire est présenté par le président et est automatiquement envoyé à notre comité. Nous avons notre mandat mais si vous voulez ajouter des considérations, je suis bon joueur et j'abonde avec vous dans ce sens.
La présidente: Avec votre permission, puis-je proposer cet ordre de renvoi au Sénat demain?
Le sénateur Comeau: Avec mon objection.
Le sénateur Corbin: À la majorité.
Le sénateur Comeau: J'aimerais que le comité puisse inviter des institutions fédérales qui ne sont pas assujetties à la Loi sur les langues officielles. J'aimerais savoir ce que ces institutions sont prêtes à offrir à nos communautés francophones et anglophones au Canada.
Les institutions assujetties à la loi font l'objet de contrôles, et si vous voulez exclure les institutions qui ne sont pas assujetties à la loi, allez-y, mais je ne suis pas en faveur.
Le sénateur Gauthier: Je n'ai pas beaucoup d'expérience, mais je crois que les termes «nonobstant» et «entre autres» sont assez généreux. Au lieu de dire «ainsi que les règlements, on pourrait dire «entre autres, des règlements».
Le sénateur Beaudoin: Le problème ne se situe pas là. Ce texte améliore le premier et je suis prêt à voter dessus. Toutefois, le sénateur Gauthier a raison. Cela ne va pas assez loin et je crois qu'il faudrait une semaine de réflexion aux membres du comité. Mme Tremblay pourrait peut-être trouver un texte.
Mme Tremblay: Je pourrais noter, par exemple, l'article 58 de la Loi sur les langues officielles, qui donne à la commissaire un pouvoir d'enquête. Ce pouvoir d'enquête ne porte pas seulement sur l'application de la Loi sur les langues officielles. Je vais vous citer le texte en anglais:
...any provisions of any act of Parliament or regulations relating to the statute of use of the official languages...
Cette disposition viserait, par exemple, le Centre des différends, qui n'est pas assujetti à notre loi, mais à la loi qui crée le Centre, laquelle prévoit des obligations linguistiques. Cela n'irait pas aussi loin que vous le souhaiteriez, mais ce serait quand même une mesure possible.
Le sénateur Gauthier: Pourquoi ne prendrions-nous pas un recul à ce sujet, comme le suggère le sénateur Beaudoin? Nous pourrions reformuler le libellé pour qu'il comprenne tous les éléments que nous désirerions y voir inclus. Il n'y a pas urgence puisque le rapport annuel est envoyé à ce comité. La commissaire a parlé dans son rapport de Statistique Canada. Nous pourrions convoquer des représentants de Statistique Canada.
Le sénateur Beaudoin: Je suggère que nous remettions cette décision à la semaine prochaine.
Le sénateur Corbin: Nous travaillons en équipe. Si un sénateur a un problème, comme le sénateur Comeau, qui a une demande spéciale, il faut que nous fassions tout pour l'accommoder.
Le sénateur Comeau: Je peux proposer un compromis. J'aimerais qu'on poursuive avec le libellé actuel de l'ordre de renvoi. Je n'aimerais pas créer un délai à ce moment-ci du processus. Peut-être que notre comité pourrait réexaminer l'ordre de renvoi plus tard et nous pourrions alors demander au Sénat de modifier notre mandat. Cela pourrait être une solution à mon problème.
La présidente: D'autant plus que notre Règlement nous permet de faire un autre ordre de renvoi en janvier.
Le sénateur Corbin: Je propose l'adoption de la motion.
Le sénateur Beaudoin: J'appuie cette motion.
Des voix: D'accord.
La présidente: Je vous remercie. Je le proposerai demain en Chambre.
La présidente: Le deuxième point concerne le rapport que Statistique Canada va publier sur les questions linguistiques sur la mobilité au Canada au-delà de 2001. Ce rapport sera publié le 10 décembre. Un petit déjeuner- conférence est déjà prévu pour le vendredi 13 décembre afin de discuter des questions linguistiques au Canada.
Nous avons déjà contacté Statistique Canada à ce sujet et les représentants du ministère sont prêts à nous rencontrer si nous sommes disponibles à l'heure du lunch, le jeudi 12 décembre. Si un sénateur n'était pas disponible, il pourrait déléguer un membre de son personnel pour recueillir l'information que les représentants de Statistique Canada auront à partager. Êtes-vous d'accord pour que nous réservions une salle?
Le sénateur Beaudoin: Le Comité des affaires juridiques et constitutionnelles siège toujours à cette heure.
La présidente: Vous recevrez peut-être aussi l'invitation du petit déjeuner du vendredi 13 décembre. Si vous êtes intéressés, les frais d'inscription sont de 40 $.
Le sénateur Gauthier: Le Comité de la régie interne doit inviter tous les présidents de comités pour discuter des budgets.
La présidente: Le Comité de la régie interne doit tenir cette réunion le mardi 10 décembre.
Les lundis entre les comités, notre habitude sera de tenir une réunion préparatoire de travail d'une durée d'une heure dans cette même salle, de 16 heures à 17 heures. Lundi prochain, le 9 décembre, nous nous rencontrons afin de discuter de nos travaux futurs et d'approuver le budget.
Le sénateur Comeau: Puisque je voyage de la Nouvelle-Écosse, il m'arrive souvent d'arriver au comité à la dernière minute, soit parce que l'avion a eu un délai ou pour quelque autre raison. Je me demandais s'il était possible de tenir nos réunions à 16 h 30 plutôt qu'à 16 heures.
La présidente: Nous pourrons voir ce qu'il y a lieu de faire. Votre personnel est-il au courant de vos délais?
Le sénateur Comeau: Oui.
La présidente: Je vous remercie beaucoup.
La séance est levée.