Délibérations du comité sénatorial permanent des
Langues officielles
Fascicule 5 - Témoignages du 24 mars 2003
OTTAWA, le lundi 24 mars 2003
Le Comité sénatorial permanent des langues officielles se réunit aujourd'hui à 16 h 04 pour étudier, afin d'en faire rapport, l'application de la Loi sur les langues officielles, ainsi que des règlements et instructions en découlant, au sein des institutions assujetties à la Loi, ainsi que les rapports de la commissaire aux langues officielles, de la présidente du Conseil du Trésor et de la ministre du Patrimoine Canada.
L'honorable Rose-Marie Losier-Cool (présidente) occupe le fauteuil.
[Français]
La présidente: Avant de permettre au ministre de faire sa présentation, je voudrais tout d'abord remercier les membres du comité de leur bon travail ainsi que leurs messages d'encouragement.
[Traduction]
Je remercie particulièrement le sénateur Keon. J'ai lu les documents avec diligence. On m'a dit que vous étiez un bon professeur suppléant. Bien sûr, vous aviez de bons élèves.
[Français]
Monsieur le ministre, il nous fait plaisir que vous ayez accepté de rencontrer pour la première fois le Comité sénatorial permanent sur les langues officielles. Je vois que MM. Asselin et Montpetit vous accompagnent.
Les membres du comité avaient hâte d'assister à cette rencontre. Suite à présentation, il y aura un échange, j'en suis certaine, des plus intéressants.
[Traduction]
L'honorable Stéphane Dion, président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales: Je vous remercie de m'avoir invité à cette importante séance de ce comité sénatorial.
[Français]
Laissez-moi présenter mes collaborateurs: M. Robert Asselin, mon conseiller spécial aux langues officielles. La plupart d'entre vous le connaissez. M. Geoffroi Montpetit, mon chef de cabinet et Anne Scotton, directrice générale aux langues officielles au bureau du Conseil privé. Derrière moi, il y a Mme José Laverdière, analyste principal au bureau du Conseil privé et M. Michel Charette, mon adjoint législatif.
[Traduction]
Je suis ravi de discuter avec vous de la publication intitulée: «Le prochain acte: Un nouvel élan pour la dualité linguistique canadienne.» Je crois que vous possédez tous un exemplaire de ce document. Le titre reflète bien le contenu du document — un tableau du nouvel élan que nous voulons donner.
[Français]
La Loi sur les langues officielles de 1969 a été révisée en 1988. Entre-temps, il y a eu la Charte canadienne des droits et libertés en 1982. Il y a eu des jalons importants. Le gouvernement, à la suggestion de plusieurs personnes autour de la table tels des députés et des communautés, s'est demandé en ce début du siècle ce qu'il pouvait faire pour donner un nouvel élan donné à cette politique des langues officielles.
Comme la Commissaire aux langues officielles l'avait bien noté, depuis deux ans, c'est-à-dire depuis la nomination d'un ministre responsable de la coordination, on a accéléré le mouvement. Il y a eu plusieurs nouvelles initiatives aux langues officielles. Tout en accélérant le mouvement, il fallait préparer un nouveau cadre d'action.
À cet effet, on a reçu quantité de suggestion, de propositions. Je voudrais remercier tous mes collègues qui y ont contribué. Nous avons aussi reçu quantité de mémoires jusqu'à l'automne dernier. Il semble même qu'une association aurait voulu déposer son mémoire plus tôt pour qu'on puisse en tenir compte. Mais à un moment donné, il fallait sortir le plan d'action et c'est ce que nous avons fait.
[Traduction]
La plupart d'entre vous connaissez le contenu du document. La première partie porte sur un cadre d'imputabilité et de coordination pour le gouvernement — ce que les collectivités réclament depuis longtemps. Nous étions d'avis que nous devions renforcer la coordination entre les ministères. Tous les ministères effectuaient un bon travail, mais il y avait un manque de coordination entre eux. Le premier ministre m'a demandé de travailler avec mes collègues en tant qu'équipe, ce qui nous a permis d'améliorer grandement notre capacité à travailler ensemble. Le cadre d'imputabilité, qui est décrit au deuxième chapitre du plan d'action, est abordé à l'annexe A.
[Français]
Ce cadre d'imputabilité fait deux choses. Premièrement, il codifie les responsabilités actuelles. Pour la première fois, un document établit les grandes responsabilités de chacune des institutions en vertu de la Loi sur les langues officielles. Chacune des institutions est donc au courant d'un document public établi par le gouvernement qui leur rappelle leurs responsabilités. C'est ce qu'on pourrait appeler en bon français une «check list». C'est très important et cela nous avait été demandé depuis longtemps.
Mais en plus de cela, le cadre d'imputabilité ajoute cinq nouvelles responsabilités qui n'existaient pas avant. La première est indiquée à l'article VII du cadre d'imputabilité qui oblige maintenant chacune des institutions fédérales à analyser les conséquences de ses actes avant d'envoyer le moindre mémoire au Cabinet. Il n'y a donc plus rien qui vient au Cabinet sans que la dimension relative aux langues officielles n'ait été prise en compte et révisée.
Il y aura même un ministre responsable de la coordination des langues officielles qui s'assurera que ce soit fait. De la même façon, ce ministre, à titre de ministre des Affaires intergouvernementales, s'assure que chaque initiative soumise au Cabinet est en plein respect de l'entente sur l'union sociale conclue avec les provinces il y a quelques années.
Maintenant, en plus de cette première responsabilité ajoutée, il y a l'article 17. L'article 17, lorsqu'on l'examine, précise les étapes à suivre pour l'exécution du mandat des langues officielles au sein de chacune des institutions. Chacune des institutions doit avoir un cadre stratégique et une planification stratégique. Dans cette planification, on doit inclure un processus visant à s'assurer que les langues officielles soient prises en compte et que les communautés soient consultées. La consultation des communautés est au cœur de l'article 17.
En plus, vous avez, de l'article 31 à l'article 44, toute la codification de la coordination horizontale qui devra avoir lieu. Il y aura un ministre responsable des langues officielles. En relation avec trois ministères-clés, le Conseil du Trésor, Patrimoine canadien et le ministère de la Justice formeront une espèce de comité auquel pourront être inclus des ministres lorsque leurs responsabilités seront directement touchées, de façon à bien coordonner toute la politique des langues officielles.
Un comité de sous-ministres, qui existe déjà, verra son rôle renforcé et veillera à les aider. Le Secrétariat des affaires intergouvernementales, responsable des langues officielles, cesse automatiquement maintenant d'être financé ad hoc, et a un financement reconnu et établi pour les cinq prochaines années. Il s'agit donc d'un plan quinquennal. Cette coordination intergouvernementale va de pair avec un renforcement de la consultation avec les communautés.
L'article 44 ajoute un quatrième élément qui renforce le rôle du ministère de la Justice. Le ministère de la Justice ne doit plus simplement évaluer après coup si les lois sont conformes à nos obligations juridiques. Il doit le faire dès le départ et dégager les implications juridiques de toute initiative du gouvernement canadien, dans nos responsabilités touchant les langues officielles. Finalement, il y a une coordination de l'évaluation de la politique.
[Traduction]
Nous devons évaluer notre travail. Chaque ministère conservera sa responsabilité actuelle. Nous coordonnerons les activités des ministères afin de faire en sorte que le plan d'action soit évalué à mi-chemin ainsi qu'au bout des cinq années.
[Français]
M. Arès, le président de la Fédération des communautés francophones et acadienne dit toujours que:
[...] le cadre d'imputabilité était la pièce la plus importante du plan d'action.
Je dois vous dire que cela n'a pas été la plus difficile à négocier avec le ministère des Finances parce que ce n'est pas la plus coûteuse. C'est elle qui créerait par contre le plus de synergie par rapport au financement additionnel que nous y avons inclus.
Le financement repose sur trois grands axes. L'éducation, le développement des communautés et le bilinguisme dans la fonction publique.
Premièrement, dans le domaine de l'éducation...
[Traduction]
Au cours des cinq prochaines années, nous consacrerons 929 millions de dollars à l'éducation des personnes dont la langue est minoritaire dans la province où elles habitent, c'est-à-dire les anglophones au Québec et les francophones hors Québec. Le plan d'action prévoit l'ajout de 381,5 millions de dollars à cette somme. Cela représentera une augmentation de 48 p. 100 lors de la dernière année du plan. Cette hausse est substantielle.
[Français]
Ce financement additionnel est essentiellement réparti en deux fonds. Un fonds de 209 millions de dollars pour la langue de la minorité, anglophone au Québec, francophone dans les autres provinces et territoires et un fonds de 137 millions de dollars pour l'apprentissage de la langue seconde, anglaise pour les francophones canadiens et française pour les anglophones canadiens.
L'objectif est de négocier avec les provinces des objectifs précis sur la base de la valeur des différents projets afin de maximiser les résultats de ces fonds.
Il y aura une augmentation assez substantielle de deux programmes qui marchent bien mais qui étaient sous- financés, le programme des moniteurs et des bourses d'été. Il s'agit de faire passer le nombre de moniteurs qui aident à l'enseignement des langues de 889 personnes, annuellement, à plus d'un millier de personnes.
En ce qui touche les boursiers, ceux qui étudieront dans l'autre langue, dans un contexte d'immersion totale, ils passeront de 8 000 boursiers par année actuellement à 10 000 participants par année. C'est une belle amélioration. Il y a une grosse demande pour ce genre de choses. Il était temps qu'on donne aux jeunes Canadiens la capacité de le faire.
Un objectif-clé est de faire passer le nombre d'ayants droit qui vont à l'école française de 68 p. 100 dans les autres provinces et territoires que le Québec, de 66 à 80 p. 100 d'ici dix ans.
[Traduction]
Un autre objectif est de doubler le pourcentage des élèves entièrement bilingues qui sortent des écoles secondaires. Nous visons de le faire passer de 24 p. 100, qui est le taux actuel, à environ 50 p. 100 dans dix ans.
C'est le taux que nous espérons atteindre grâce à la coopération des collectivités, des provinces et des territoires ainsi que du secteur privé et d'autres entités.
[Français]
Je vous ai parlé d'objectifs ciblés. Pour y arriver, il y a différentes choses à faire, par exemple, améliorer la qualité de l'enseignement. Les parents nous l'ont souvent dit, notamment dans les provinces à majorité anglophone, veulent une qualité d'enseignement équivalente à celle de la majorité. Au Québec, c'est le cas. Les tests montrent que les jeunes anglophones réussissent comme les jeunes francophones. Dans les autres provinces et territoires, ce n'est pas suffisamment le cas, et très souvent, les écoles et collèges francophones ont plus de difficulté à offrir un enseignement de même qualité. Quand je parle d'enseignement, ce n'est pas seulement lecture, écriture et mathématiques, c'est aussi le parascolaire.
Un autre objectif est d'aider les parents à placer leurs enfants dans leur langue dès le départ, pas seulement au début du primaire, dès la garderie et la maternelle, voir ce qui peut se faire davantage pour aider les écoles à offrir ces services. Si vous envoyez directement les enfants à la garderie, après c'est plus difficile de les ramener au système français s'ils ont commencé en anglais.
Un autre objectif important, ce sont les centres scolaires communautaires et culturels. On sait que cela marche bien. Il ne faut pas concevoir l'éducation en dehors de l'animation culturelle. Cela a déjà été fait dans le passé, grâce à nos ententes avec les provinces en matière d'éducation et on veut mettre principalement l'accent là-dessus.
[Traduction]
Le plan d'action porte notamment sur la communauté anglophone du Québec. Nous pensons que l'inclusion des centres communautaires dans le système scolaire est une approche qui fonctionnera bien dans d'autres provinces. Nous voulons que cette approche soit adoptée au Québec à l'égard de la communauté anglophone de cette province. Nous abordons ce sujet dans le plan.
[Français]
Il faut s'occuper du personnel enseignant, du recrutement, de la formation et du perfectionnement. On veut développer davantage le postsecondaire. Il faut que cela soit une continuité, de la garderie jusqu'au postsecondaire. Le problème, c'est que très souvent, les jeunes qui sont rendus à la mi-secondaire, passent au système anglais parce qu'ils se disent qu'il n'y a pas grande possibilité de poursuivre en français à l'université.
Nous n'avons pas la possibilité d'implanter des universités francophones partout dans les autres provinces que le Québec, et même au Québec cela ne relève pas de notre compétence. On peut aider celles qui existent déjà, comme la faculté Saint-Jean, au collège Saint-Boniface et voir s'il est possible de développer plus de compétences dans ce domaine dans les institutions anglophones en partenariat avec les institutions francophones.
[Traduction]
Par exemple, les gens de l'Université Simon Fraser travaillent avec le gouvernement provincial et avec nous à un projet visant à offrir des services en français au sein de cette université aux francophones et aux francophiles de la Colombie-Britannique. Nous travaillons à des projets de la sorte.
[Français]
Je pourrais parler de d'autres projets que le ministère du Patrimoine va développer. Il y a l'enseignement à distance pour toutes les communautés qui ont peu d'élèves, et pas tellement de possibilités d'avoir une école parce que les élèves sont trop clairsemés. Donc, comment peut-on les aider à développer l'enseignement à distance? C'est un objectif constant.
[Traduction]
C'est de cette façon que nous voudrions aborder le domaine de l'éducation. C'est de cette façon que nous dépenserions cette somme supplémentaire.
Je tiens à mentionner que j'ai rencontré des représentants du Conseil de recherches en sciences humaines, qui ont exprimé un vif intérêt pour la recherche sur l'apprentissage des langues. Le Canada a été, et j'espère qu'il l'est encore, un champion de l'apprentissage des langues à l'échelle internationale.
Les politiques actuelles sur les langues officielles découlent de la commission royale Laurendeau-Dunton sur le bilinguisme et le biculturalisme. La recherche sera la clé. Nous devons veiller à détenir une nouvelle génération de chercheurs qui nous aideront à élaborer de bonnes politiques en matière d'apprentissage et d'enseignement de nos deux langues officielles.
[Français]
Beaucoup de choses se font pour le développement des communautés, on ne part pas de rien. Mais il fallait développer certains secteurs-clé, continuer ceux sur lesquels on est déjà assez fort et voir ce que l'on peut faire pour développer les autres. Non seulement les ministères nous ont nourri de leurs suggestions, mais les communautés. Cela a été noté par les représentants des communautés dont la FCFA. Ils nous ont dit que notre plan d'action correspondait à peu de choses près à ce qu'ils suggéraient. On a voulu développer la petite enfance. Non seulement à travers les ententes sur l'éducation, mais le ministère du Développement des ressources humaines aura la capacité de développer des choses pour la petite enfance. Notamment, on vient de négocier avec les provinces une entente pour les garderies. Mme Stewart a insisté sur le fait qu'une partie devrait aller aux garderies pour les communautés de langues officielles minoritaires.
Pour donner l'exemple, nous avons offert 22 millions de dollars pour l'alphabétisation, la formation de 150 à 180 spécialistes, des projets pilote de garderie et pour aider les organisations nationales qui oeuvrent en ce domaine pour les communautés de langue minoritaire.
[Traduction]
Il est important de commencer tôt.
[Français]
Un autre secteur que l'on a beaucoup développé et où le gouvernement fédéral était presque absent, c'est la santé. C'était une grande priorité des communautés.
La langue ne doit pas exister seulement en fonction de l'éducation et la culture. Elle doit être présente dans les services de tous les jours et, surtout, dans le domaine de la santé, puisque ce service est très important pour les populations vieillissantes.
Selon un plan qui a été élaboré avec les communautés, on offre 119 millions de dollars sur cinq ans pour la santé. M. Gauthier de Saint-Boniface a joué un rôle clé dans ce domaine. Les premiers projets qu'on nous a présentés effarouchaient les gouvernements plutôt que de les encourager. On a mis beaucoup d'efforts et, par la suite, nous sommes arrivés avec un plan que je considère très solide et avec lequel on pourra bâtir un bon partenariat avec les provinces.
Soixante-quinze de ce 119 millions de dollars sera consacré à la formation et au recrutement de la main-d'œuvre. Le consortium pancanadien pour la formation des professionnels francophones nous aidera dans ce domaine. Ce consortium est issu de l'actuel Centre national de formation en santé du Canada et sera beaucoup plus solide qu'auparavant. Il pourra regrouper une dizaine d'établissements universitaires et son objectif d'ici 2008 est de former 1 000 nouveaux professionnels de la santé. Imaginez à quel point cela aidera les communautés.
[Traduction]
En ce qui concerne la communauté anglophone du Québec, nous mettrons sur pied une série d'initiatives qui contribueront à garder dans les régions les plus éloignées les professionnels anglophones. Le problème n'existe pas à Montréal ni à l'Université McGill, mais il existe en Gaspésie, et même dans les cantons, alors, nous collaborons avec les collectivités pour le régler.
[Français]
On a quatorze millions de dollars pour le réseautage de neuf provinces et trois territoires du côté francophone. Il faut donc s'aider par la télé-information, la télé-médecine.
[Traduction]
Nous créerons également à l'intention de la communauté anglophone du Québec l'équivalent de la société santé en français. Cela n'existe pas au sein de la communauté anglophone du Québec, et je crois qu'on peut apprendre de l'expérience de la communauté francophone. Nous contribuerons à mettre en oeuvre un tel projet.
[Français]
Mme McLellan a bien travaillé et a trouvé à même ses fonds — ce ne sont pas de nouveaux fonds, ils existaient auparavant mais n'étaient pas consacrés aux langues officielles — 30 millions de dollars pour les soins primaires pour les communautés de langues officielles.
Passons maintenant à la justice. Quarante-cinq millions de dollars seront consacrés à la justice. Vingt-sept millions de dollars seront versés pour les obligations juridiques du gouvernement. Ces jugements nous ont obligés à nous conformer à certaines lois. Donc, on consacrera 27 millions à la justice et 19 millions de dollars à des mesures ciblées.
Nous aurons le financement avec des partenaires, que ce soit des provinces, des communautés ou des associations juridiques, de tous projets intéressants, par exemple, le financement stable des associations de juristes d'expression française qui en ont bien besoin et le financement pour consulter les communautés sur toutes les questions juridiques.
Le domaine de l'immigration n'a pas coûté un sous. La Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés accorde plus de poids à la connaissance de l'une ou l'autre des deux langues officielles. Si plus d'immigrants parlent l'une ou l'autre des deux langues officielles, il est important qu'ils connaissent l'existence des communautés de langues officielles. Les immigrants qui connaissent le français devront savoir qu'il existent des communautés francophones en dehors de la province de Québec. Neuf millions de dollars seront consacrés à cette information essentiellement pour aider les nouveaux immigrants à suivre des cours pour parfaire leur français, si nécessaire. Il existe aussi des projets de centre d'informations pour les immigrants francophones.
Il y a quatre nouvelles initiatives pour le développement économique. Treize nouveaux millions de dollars seront consacrés au programme franco-virtuel. Ce programme aide les communautés francophones à avoir accès à l'Internet. On pourra financer 200 nouveaux projets en ce domaine. Huit cents nouveaux stages en entreprise seront disponibles avec 7 millions de dollars; 10 millions de dollars seront consacrés à des projets pilotes pour l'infrastructure technologique, par exemple, l'accès à des bibliothèques. Huit millions de dollars seront versés à des conseillers pour aider les entreprises à avoir accès au programme de la majorité; ce n'est pas un gros montant, mais cela peut faire une grosse différence.
Trop souvent dans les provinces à majorité anglophone, les gens d'affaires francophones se font dire qu'ils ont leurs propres programmes. Il y a donc un risque de ghettoïsation, mais tout sera fait pour éviter cette situation. Des conseillers suivront à la trace les gens d'affaires dans le besoin et les aideront à avoir accès à ces programmes. Les conseillers pourront dire aux ministères fédéraux de changer leur attitude, s'il y a lieu.
Il faut aussi renforcer notre partenariat avec les provinces. On a un programme en ce sens et un financement accru de 14,5 millions de dollars servira à étudier des domaines prioritaires tels la petite enfance, la santé, la diffusion culturelle et autres. Patrimoine Canada garde 19 millions de dollars pour renforcer certains éléments de la vie communautaire qui pourraient échapper au plan d'action. Ce plan d'action renferme notamment les centres communautaires et culturels, l'animation, la division culturelle et les stations de radio communautaire. Ce plan d'action vise le développement des communautés et cela s'ajoute à tout ce qu'on fait actuellement. Il y a aussi tout ce que je mentionne dans le plan d'action.
Soixante-cinq millions de dollars d'ici cinq ans seront utilisés pour renforcer le bilinguisme dans la fonction publique. Mme Robillard a depuis longtemps beaucoup d'idées, mais elle disposait d'un financement moindre comparativement au financement dont dispose la Commissaire aux langues officielles. La Commissaire aux langues officielles avait donc plus de financement que l'organisme qu'elle surveille.
Le Conseil du Trésor aura donc plus de financement pour faire ce qu'il entend afin de renforcer le bilinguisme dans la fonction publique: 14 millions de dollars répartis en deux fonds pour l'innovation. Un fonds de 7 millions pour encourager les projets d'innovation quant à l'apprentissage, la formation, la poursuite du programme de bilinguisme dans la fonction publique. Donc, 7 millions seront dépensés dans les régions et 7 millions dans la capitale nationale.
Nous aurons un centre d'excellence de 12 millions au Conseil du Trésor afin d'aider les autres ministères à renforcer leur bilinguisme. La Commission de la fonction publique aura à sa disposition près de 40 millions de dollars additionnels pour mettre fin aux listes d'attente des programmes de formation, pour améliorer la formation, pour entretenir la compétence chez les fonctionnaires et pour améliorer notre capacité de recruter des fonctionnaires déjà bilingues lorsque c'est possible.
En ce qui concerne les industries de la langue, rien de tout ce dont on parle ne serait possible s'il n'y avait pas des interprètes, des traducteurs. Nous avons une des meilleures industries de la langue au monde, mais elle n'est pas assez connue. Si on n'entretient pas cette industrie, il n'y aura peut-être pas assez de relève. Cinq millions de dollars sont prévus pour aider cette industrie très éclatée à se donner une association représentative pour mieux se coordonner. Cinq millions de dollars sont disponibles pour accroître sa visibilité, c'est-à-dire pour que les cégeps et les universités puissent orienter les étudiants vers cette formation et pour nous faire connaître à l'étranger afin que le marché de la traduction à l'étranger s'ouvre à nous. Dix millions de dollars aideront à créer un centre de recherche sur les technologies langagières à l'Université de Hull, l'une des meilleures. Ces 10 millions de dollars aideront à faire quelque chose d'essentiel.
[Traduction]
Le plan d'action existe seulement sur papier pour l'instant, mais il doit être mis en oeuvre. À ce sujet, je suis certain que votre comité sera d'une grande aide. C'est pourquoi je suis très heureux d'avoir l'occasion de discuter avec vous aujourd'hui du plan d'action. Cet entretien est très important pour moi.
[Français]
La présidente: Vous connaissez la plupart des sénateurs autour de la table et connaissez aussi l'engagement de chacun dans leur région ou dans leur spécialité. Il est certain que nous aurons des échanges dans les domaines de la santé, de la culture, de la justice et de l'éducation, parce que chacun a une expérience dans ces domaines.
Le sénateur Beaudoin: J'aimerais tout d'abord offrir mes félicitations. Il s'agit d'un élan nouveau dans un domaine très important.
Un élément m'a frappé en ce qui concerne l'immigration. Vous avez indiqué que neuf millions de dollars seraient consacrés pour accorder une part plus importante au français. Ceci est impressionnant car, en effet, il est important que les nouveaux arrivants réalisent que notre pays est bilingue.
Ayant passé ma vie dans le partage des pouvoirs, j'ai été particulièrement impressionné par l'aspect du partenariat avec les provinces. Dans les états fédéraux modernes, nous sommes obligés d'avoir une grande collaboration entre les deux ordres de gouvernement. J'aime le mot «partenariat» dans les domaines provinciaux, en particulier en éducation et en santé.
Je n'ai qu'une seule question, mais elle est d'importance. L'article 41 de la Loi sur les langues officielles implique un engagement solennel du gouvernement à promouvoir le français et l'anglais dans la société canadienne ainsi que de promouvoir le développement des communautés en situation minoritaire. Bien qu'il s'agisse d'un engagement de nature politique, cette loi lie chacune des institutions fédérales. Je suis le premier à admettre que sur le plan politique cet article revêt une grande importance. J'irais jusqu'à dire qu'il s'agit d'une obligation juridique. Cette question a fait l'objet d'un débat à ce comité, entre autres, avec le sénateur Gauthier. On a dit qu'il s'agissait non seulement d'une bonne initiative mais aussi d'une obligation. Je n'ouvrirai pas le débat à nouveau. On dit déjà qu'il s'agit d'un nouvel élan et d'une question très importante — on parle même d'un engagement solennel. J'espère qu'un jour le mot «juridique» sera ajouté.
M. Dion: Que ferez-vous du partage des pouvoirs? Comment rendre exécutoire une responsabilité qui relève des provinces?
Le sénateur Beaudoin: Je respecte le partage des pouvoirs. Nous sommes dans les domaines fédéraux.
M. Dion: L'article 41 ne traite pas tellement de domaines fédéraux.
Le sénateur Beaudoin: Il traite tout de même de domaines où le fédéral a également juridiction. Les domaines de l'éducation, de la santé et de l'administration de la justice sont prioritairement provinciaux. Toutefois, l'article 41 ne se restreint pas à ces domaines.
M. Dion: Ceci est lié à la partie VII. Je ne vois pas dans la partie VII ce que le fédéral pourrait faire sans les provinces.
Le sénateur Beaudoin: Le fédéral pourrait s'engager en déclarant qu'il s'agit d'un objectif non seulement souhaitable mais obligatoire. Votre point de vue diffère sans doute du mien, mais l'ensemble de la Loi sur les langues officielles, notamment la partie VII, s'apparente à une obligation juridique. Il ne s'agit pas d'assumer le rôle des provinces mais d'agir avec celles-ci lorsque nécessaire. Lorsque la partie VII s'applique aux domaines fédéraux, ce sera une obligation fédérale.
M. Dion: Vous faites déjà une très grosse nuance. La partie VII entière ne peut plus être obligatoire. Il faudrait en dégager ce que le fédéral peut faire sans devoir négocier des ententes souvent compliquées avec les provinces. En ce faisant, on réduit la portée de votre premier énoncé.
Je ne crois pas que cela soit possible. Par contre, le gouvernement canadien a une obligation politique et doit agir. Notre cadre d'imputabilité nous met face à nos propres obligations et nous jugerons de s'y conformer ou pas. Nous avons désormais l'obligation plus claire de consulter les communautés, de s'assurer que chacune de nos initiatives tienne compte de cette réalité. Cela ne veut pas dire pour autant que l'on se pliera toujours aux souhaits des communautés, car nos obligations sont parfois plus compliquées. Toutefois, le processus respectera nos obligations envers les communautés.
Le sénateur Beaudoin: Je fais une distinction. Si la question est purement politique, il n'y a pas de problème. Mais à mon avis, cela va au-delà. J'ai toujours interprété la partie VII comme impérative. Le législateur ne légifère pas sans raison — et les termes employés sont de nature plutôt évidente. Le débat pourra certes se poursuivre. Il n'en demeure pas moins que cet article 41 comporte des éléments impératifs.
La présidente: Est-ce que vous prétendez que le cadre d'imputabilité rendrait la partie VII exécutoire?
M. Dion: Non. En bon fédéraliste, je ne rendrai pas exécutoire quelque chose qui ne relève pas de ma compétence. Le cadre d'imputabilité précise les obligations légales du gouvernement dans la Loi sur les langues officielles, ajoute des responsabilités qui relèvent de l'exécutif et que l'exécutif se donne pour s'assurer qu'il fonctionne de façon à répondre à ses obligations.
Le sénateur Beaudoin: J'ai terminé ma question, mais je poursuivrai le débat.
La présidente: Le sénateur Gauthier traitera maintenant de la question de l'exécutoire.
Le sénateur Gauthier: Je connais l'ampleur et la portée de votre plan. Je l'ai lu, relu, souligné, annoté. J'en ai même discuté avec des amis. Il s'agit d'un bon plan et il est ambitieux. Ce plan repose en bonne partie sur la bonne volonté des provinces — et vous y avez fait allusion en disant qu'on veut rester chez nous et ne pas se mêler de choses qui ne nous regardent pas.
Je pourrais vous parler longuement de batailles gagnées surtout, et perdues à l'occasion. Je ne me souviens pas qu'on ait utilisé notre droit de recours devant les tribunaux sans pour autant en subir les conséquences.
Les choses ne sont pas facile pour les groupes minoritaires. On se souviendra, en 1976, au Manitoba, Georges Forest avait versé 75 000 $ de sa poche pour défendre son droit d'être servi dans les deux langues officielles. L'effet de ce jugement a eu une conséquence sérieuse. On a établi un programme de contestation judiciaire — et ce, avant la Charte de 1982 — qui nous a aidé à faire valoir notre droit d'accès aux tribunaux.
En 1982, on m'a demandé de faire confiance au domaine juridique parce qu'en se dotant d'une Charte des droits et libertés, on transférait une grande partie de nos responsabilités politiques au domaine juridique. J'ai hésité longtemps parce que je n'étais pas convaincu. On a inclus dans la Charte des clauses qui garantissaient l'éducation et les services s'y rattachant. On accordait des droits linguistiques, on les ajoutait et on les clarifiait.
Dans le domaine de l'éducation, la cause Mahé a coûté très cher mais on a gagné. La cause de l'hôpital Montfort a aussi coûté cher mais on a gagné. Il y a aussi la cause Arsenault-Cameron à l'Île-du-Prince-Édouard, dans laquelle il était question du droit des enfants d'accéder à l'école française qu'on a gagnée. Toutes ces poursuites ont coûté très cher en ressources humaines. Parlons aussi de l'arrêt Beaulac qui porte sur le droit de se présenter devant les tribunaux. Cette décision importante de la Cour suprême donne la garantie au droit d'être entendu par un juge qui parle notre langue.
Je ne ferai pas un historique puisque le ministre connaît le dossier autant que moi. Le sénateur Beaudoin et moi- même, nous nous entendons sur l'article 41. Vous avez répété aujourd'hui ce que Lucien Bouchard disait lorsqu'il était secrétaire d'État en 1988. M. Bouchard disait que l'article 41 créait des obligations de la part du gouvernement et je l'ai cru. On a continué à vouloir obtenir un plan d'action, à vouloir quelque chose de tangible qui nous donnerait la chance de nous identifier et qui nous donnerait des jalons, des paramètres. Vous arrivez aujourd'hui avec un plan d'action et je vous félicite.
On attend un plan d'action depuis très longtemps et celui-là repose en grande partie sur la bonne volonté des provinces. Certains journalistes ont mentionné que les ministres de l'éducation n'ont pas été consultés, que vous n'avez pas obtenu leur aval au préalable. Vous avez dit en Chambre que vous aviez des lettres que vous pourriez nous montrer à cet effet. Je vous crois. Il y a une bataille à mener de ce côté qui ne sera pas facile. Si j'ai bien compris la teneur de votre plan, le fédéral apportera sa contribution et la province devra en faire autant.
Deuxièmement, la grande partie de votre argumentation repose sur l'imputabilité. Il n'est pas facile de savoir où on va lorsqu'on n'a pas de carte routière, mais on en aura une. Ce sera quelque chose sur lequel s'appuyer.
Monsieur le ministre, avez-vous bénéficié d'augmentations de crédits sur le plan des ressources humaines pour pouvoir coordonner cette activité? Parce qu'on a besoin de gens comme vous pour nous aider. Aujourd'hui, j'ai contacté le Conseil du Trésor pour savoir d'où provenaient les fonds et on m'a répondu que dorénavant chacun des ministères devra présenter une demande de fonds au ministre coordonnateur. Est-ce exact? Pouvez-vous brièvement me donner une idée du fonctionnement?
M. Dion: L'un des compliments les plus difficiles qu'on puisse obtenir — et il m'est d'autant plus précieux — est celui que vous venez de faire lorsque vous avez dit que j'ai présenté un bon plan. On sait à quel point vous êtes exigeant pour le législateur et pour le gouvernement en matière de langues officielles. J'ai passé le test et j'en suis ravi. Toutefois, aucun plan n'est parfait et je compte sur vous pour continuer à m'aiguillonner et je sais que vous le ferez.
Vous avez mentionné de belles victoires. Je n'étais pas là auparavant pour Mahé ou pour Arsenault-Cameron, mais j'étais là pour la cause de l'hôpital Montfort et je peux vous dire à quel point je suis fier de ce que le gouvernement fédéral a pu faire pour aider la communauté à gagner cette cause.
Concernant les provinces, je crois qu'un changement de culture commence à s'opérer, non seulement parce qu'elles sont fatiguées de se faire battre en cour ou parce qu'elles sont obligées de s'ajuster aux droits de leurs communautés mais aussi parce qu'il y a une nouvelle génération d'hommes et de femmes en politique dans les provinces à majorité anglophone. Ces hommes ou ces femmes ont suivi parfois des cours d'immersion, ont un conjoint qui y travaille ou ont des enfants qui les ont fréquentés.
Je les rencontre dans toutes les provinces et certains des membres de cette nouvelle génération occupent des postes clés comme celui de ministre des Finances, par exemple. Lorsque je rencontre les ministres responsables de la Francophonie, j'ai face à moi deux ministres des Finances.
Une évolution se fait petit à petit. Cette évolution est assez récente mais on doit s'appuyer dessus pour ne plus être obligés de mener des batailles éreintantes en cour. J'ai déjà tenu de tels propos mais ils avaient été mal interprétés. On m'avait accusé de recommander de ne plus aller en cour.
À mon avis, il faut aider à faire en sorte que ce soit de moins en moins nécessaire de faire appel aux tribunaux parce que c'est exigeant et stressant. Même lorsqu'on gagne, on se retrouve à bout de souffle et on a face à nous un législateur renfrogné qui se conforme à une décision de la cour mais qui n'y croit pas parce qu'il n'a pas vraiment été un partenaire dans l'affaire, il a plutôt été poussé dans le dos.
On ne veut plus être poussé dans le dos. On veut plutôt agir avec les communautés de façon intéressante et je crois qu'on peut y arriver avec les provinces mieux qu'avant. Dans ce plan d'action, lorsqu'on dit qu'on veut négocier avec les provinces des cibles plus efficaces en matière d'éducation, je dis à mes homologues provinciaux que cela sera d'autant plus facile d'y arriver que ce que vous nous proposerez.
Puisque nous sommes dans votre champ de compétence, il faut se conformer à ce que les communautés souhaitent. Si cela provient du milieu, il y a moins de chances que le fédéral soit interloqué par la proposition. Il va sans doute trouver qu'elle coule de source. Si les provinces proposent des plans non conformes à ce que les communautés et les conseils scolaires souhaitent, le gouvernement fédéral les étudiera de beaucoup plus près.
Avec le partenariat, on pourra construire quelque chose qui fonctionnera beaucoup mieux qu'avant et qui reflétera l'esprit du plan d'action. Mais tout cela devra être évalué selon le cadre d'imputabilité. Ce que le Conseil du Trésor vous a dit est vrai mais incomplet.
Il est vrai que chacun des ministères ayant reçu des fonds devra s'assurer de la bonne gestion et de l'évaluation de ces fonds. De plus, des fonds stratégiquement utiles seront consacrés au cadre d'imputabilité. À la page 79 du plan d'action, Justice Canada reçoit un fonds de 2,5 millions de dollars pour embaucher davantage de juristes pour conseiller le gouvernement. Quant à la mise en œuvre du plan d'action, y compris le cadre d'imputabilité et de coordination, le bureau du Conseil privé aux affaires intergouvernementales bénéficiera de 13,5 millions pendant cinq ans. C'est l'équipe de Mme Scotton qui bénéficie d'un financement pour s'assurer de la réalisation du plan d'action.
Ce cadre d'imputabilité n'est pas que du papier, c'est un engagement qui sera appuyé par des fonds qui existeront véritablement.
Le sénateur Gauthier: Avez-vous obtenu d'autres fonds ou des ressources humaines additionnelles? Aurez-vous le personnel nécessaire pour faire le travail?
M. Dion: Je n'avais pas ce fonds. Je n'avais pas ce montant de 13,5 millions de dollars. On avait un financement ad hoc, négocié année après année, durant les deux dernières années. Maintenant, il nous est assuré.
Le sénateur Gauthier: Le fonds ad hoc n'existe plus; vous l'avez aboli et c'est vous qui allez coordonner le tout?
M. Dion: Oui.
Le sénateur Gauthier: Autrefois, la loi disait que c'était le ministre du Patrimoine canadien qui devait coordonner. Lorsque je lui ai écrit, à maintes reprises, pour savoir ce qui arrivait avec les rapports annuels des 29 soi-disant institutions fédérales qui doivent les présenter à tous les ans — je pensais qu'il fallait mettre cela dans les mains d'une autorité plus centrale et plus équipée — elle n'avait pas le personnel pour faire l'évaluation des plans, la ministre m'a répondu ce qui suit:
Nous n'avons en ce moment aucune autorité pour forcer un ministère ou un organisme à mettre en vigueur les recommandations que nous faisons. Si l'on veut aller plus loin, il faudrait en effet que ce soit un organisme central, en autorité, qui produise ses analyses et en fasse part aux intéressés.
En d'autres mots, elle était d'accord avec moi.
M. Dion: Oui.
Le sénateur Gauthier: Vous êtes le ministre responsable de la coordination des langues officielles à travers tous les ministères. Je vous demande si vos crédits et vos ressources humaines ont été augmentés afin que vous puissiez le faire? Évidemment, le ministère du Patrimoine canadien ne pouvait pas le faire parce qu'on n'avait pas de suivi. Pour un politicien ou un parlementaire, c'est très difficile de travailler dans un contexte où il n'y a pas d'évaluation ou de suivi du programme.
M. Dion: Il y a trois éléments de réponse. Le premier, c'est que le cadre d'imputabilité n'enlève aucune responsabilité aux différents ministères. Le ministère du Patrimoine canadien a les mêmes responsabilités qu'avant. Vous devez, comme comité, les tenir responsables de leurs actes. Ne les déchargez pas de leurs responsabilités en pensant que tout revient au ministre coordonnateur. On a voulu éviter cela. Chaque ministère garde ses responsabilités et c'est très important.
Le deuxième élément est qu'il y a des responsabilités additionnelles qui me reviennent comme ministre coordonnateur. J'ai à m'assurer que tout cela soit possible. Rappelons-nous que le ministère du Patrimoine canadien n'a des responsabilités qu'en vertu de la partie VII de la Loi sur les langues officielles. Le Conseil du Trésor a des responsabilités qui sont les siennes, et cetera. Je m'assure que tout le monde travaille en équipe et cela fait une grande différence.
Concernant le troisième élément, je vais demander à Mme Scotton de vous décrire les ressources dont elle disposera pour s'assurer du suivi de la mise en œuvre du Plan d'action.
Mme Anne Scotton, directrice générale aux langues officielles, Bureau du Conseil privé: Tel que mentionné plus tôt par le ministre Dion, nous avons obtenu du financement de façon ad hoc, avec un projet spécial de notre ministère. Maintenant, avec l'adoption et le financement assurés de ce Plan d'action, on aura une petite équipe. Mais nous aurons le personnel requis pour travailler avec nos collègues des autres ministères au sein du gouvernement et avec nos collègues en région, par le biais des conseils régionaux et autres. Cela fera en sorte qu'il y ait une coordination et un appui entre nous ainsi qu'un soutien des efforts de chacun des ministères et institutions fédérales impliqués dans ce Plan d'action.
Le sénateur Gauthier: Vous avez eu un budget additionnel par rapport à ce que vous aviez autrefois?
M. Dion: Exact.
Le sénateur Gauthier: Ce sera clair dans les prévisions budgétaires de 2003-2004? Je n'ai pas pu identifier vos crédits.
M. Dion: Dans le budget de cette année, vous voulez dire? Le budget de cette année n'a pas détaillé tout cela, c'est vrai. Vous l'avez dans le Plan d'action.
Le sénateur Gauthier: C'est à venir?
M. Dion: Non, le Plan d'action indique le montant de 13,5 millions de dollars que l'on doit consacrer à la mise en œuvre du Plan d'action.
Le sénateur Gauthier: À ce que je sache, ce Plan d'action ne sera pas soumis à un vote?
M. Dion: Non.
Le sénateur Gauthier: Au niveau des crédits?
M. Dion: Oui, oui.
Le sénateur Gauthier: Quelqu'un va vous donner des fonds?
M. Dion: Je vous garantis qu'il n'y a pas un seul sou indiqué aux pages 77 à 79 qui aurait pu être inscrit là sans l'accord du ministre des Finances. Ils m'ont surveillé à la loupe, et avec raison. Sinon, j'aurais pu en mettre plus.
Le sénateur Gauthier: Vous dites qu'il faut surveiller. Je suis d'accord, mais un parlementaire actuellement, même s'il veut surveiller, s'il n'a pas l'information, cela ne donne pas grand-chose. Le PACLO, le programme d'aide aux communautés de langues officielles, n'a jamais été évalué depuis 1971. Le PICLO, le programme institutionnel d'échanges interministériels n'a pas été évalué non plus. On me dit que ce sera fait en juin cette année.
L'entente en santé avec l'Université d'Ottawa et l'hôpital Montfort n'a pas été évaluée non plus. J'ai demandé si on allait la reconduire, mais on ne le sait pas. Il faut presque être un magicien pour comprendre, parce que dès qu'on veut connaître une information, oups! Cela a changé de ministère. Est-ce qu'on a évalué les programmes de langues officielles des Territoires du Nord-Ouest? Non. Les parlementaires doivent se fier sur l'information disponible. On a pas d'adjoints spéciaux, nous autres. C'est pas mal difficile des fois.
M. Dion: Une de mes responsabilités sera de m'assurer de la coordination de tout cet effort d'évaluation. Il y a un ajout; cela ne se faisait pas avant, mais nous avons maintenant la responsabilité de coordonner les évaluations et de s'assurer que le plan d'action lui-même sera évalué.
Le sénateur Gauthier: Depuis l'an 2000, le Conseil du Trésor a fait adopter une modification. Toutes les institutions doivent maintenant faire une évaluation de leurs programmes. C'est un bon pas en avant.
Le sénateur Comeau: Je vous remercie de nous donner des explications sur le Plan d'action. Vous avez mis beaucoup de temps et d'efforts dans ce Plan d'action. Comme les autres, on espère que tout fonctionnera bien. Mon intérêt est généralement porté vers les communautés les plus éloignées et les plus marginalisées du Canada. Ce sont les communautés vraiment en situation minoritaire et non pas des communautés où il y a un grand nombre de francophones. Ce sont les communautés les plus éloignées, telles celles de l'Île-du-Prince-Édouard, de Terre-Neuve, de la Nouvelle-Écosse et de plusieurs provinces dans l'Ouest aussi. Ces communautés subissent l'anglicisation.
Très souvent dans ces communautés, il y a peu de présence fédérale autre que la GRC. Dans certains cas, les policiers parlent français ainsi que Poste Canada. Souvent ces communautés vivent des ressources naturelles de la place, telles la pêche, les forêts, et cetera. Elle ont également des problèmes avec ces ressources naturelles qui sont, pour certaines, en train de disparaître.
Je vais vous donner l'exemple de la communauté de Baie Sainte-Marie en Nouvelle-Écosse. Le câblodistributeur refuse d'offrir le signal RDI en français. Il refuse d'offrir la programmation de la Chambre des communes en français. Si vous êtes abonné, vous devez écouter la Chambre des communes en anglais dans une communauté francophone. Cela envoie dans ces communautés des messages selon lesquels le français n'est pas nécessaire, voire même découragé.
Oui, on a nos écoles maintenant. C'est une grande étape et on avance bien dans la question des écoles, mais il y a plus que d'avoir des écoles francophones et un conseil scolaire francophone. Il faut une vie en français que nous n'avons pas, très souvent. Nos communautés francophones en Nouvelle-Écosse n'ont toujours pas accès à l'Internet à grande vitesse. Cet accès existe dans la communauté anglophone avoisinante, mais pas dans les petites communautés francophones.
Dans votre Plan d'action, vous avez un programme qui vise ce genre de communautés. Je vous encourage à vous assurer que les communautés les plus éloignées font l'objet d'une certaine priorité, afin qu'elles ne soient pas oubliées, ni marginalisées.
Présentement ces communautés sont en train de se faire angliciser à très grande vitesse, presque à une aussi grande vitesse que les franco-communautés virtuelles. C'est le premier message dont je voulais vous faire part.
Il y a toute la question de la fiabilité des provinces. Vous devrez être très prudent. Il y a une bonne volonté de la part des provinces. Politiquement, c'était plus difficile pour les petites provinces d'offrir des services en français aux petites communautés. Cela va demander un peu d'indulgence de votre part pour ces petites communautés. Mais la volonté est là.
M. Dion: Vous avez raison de mentionner les difficultés de certaines communautés. Même les communautés majoritaires de ces régions ont de la difficulté à garder les jeunes, à créer des emplois intéressants et à maintenir des services publics de base parce que la masse de la population n'est plus la même et est vieillissante. Imaginez pour les communautés minoritaire de langue française dans certaines régions de la Nouvelle-Écosse, je suis tout à fait d'accord avec vous. On ne pourra pas faire de miracle, car les problèmes existent même du côté de la majorité mais on pourra donner des coups de pouce essentiels.
L'enseignement à distance va se développer, l'enseignement tout court sera mieux financé et peut-être que l'université Sainte-Anne va trouver un financement additionnel dans les programmes que nous développons. La santé, les services de santé, le réseautage, cela va aidera beaucoup de même que le développement économique pour les entrepreneurs qui autrement auraient beaucoup moins d'appui. On aidera même dans les régions les plus difficiles.
Le sénateur Comeau: Je suis fier que vous mentionniez l'université Sainte-Anne, c'est un trésor en Nouvelle-Écosse et même dans tout l'Altantique, surtout avec l'amalgamation de l'université Sainte-Anne et du collège de l'Acadie. Il s'ouvre un domaine très spécial pour toutes les communautés francophones en situation minoritaire dans l'Atlantique. Ils auront besoin de systèmes de communication à haute vitesse. Pourrions-nous examiner cela?
M. Dion: Le programme qu'on a pour accroître l'informatique pourra également aider.
[Traduction]
Le sénateur Keon: Je vous félicite, monsieur le ministre Dion, pour votre excellent rapport.
Je voudrais revenir sur la question de la prestation des services de soins de santé. Je comprends tout à fait qu'il s'agit d'une responsabilité provinciale, mais, étant donné que j'ai été administrateur dans le domaine de la santé toute ma vie, entre autres, je dois vous dire que notre établissement devait financer son centre d'éducation en français et son centre d'apprentissage interactif du français à même son budget global.
Bien que le personnel était toujours disposé — en effet, les infirmières et les médecins anglophones ainsi que d'autres membres du personnel trouvaient cela plaisant — de participer aux programmes éducatifs, ces activités s'avéraient onéreuses. Je comprends qu'il est étrange que le gouvernement fédéral fournisse des fonds directement pour l'éducation en français, alors qu'il s'agit d'un domaine qui relève de la compétence des provinces. Cependant, je crois qu'il s'agit d'une question qui n'a pas été examinée de façon appropriée.
Le gouvernement fédéral finance la majeure partie de la recherche en santé effectuée au Canada. La recherche pourrait grandement contribuer à déterminer comment accroître l'efficacité des programmes d'éducation et comment accroître la participation. En particulier, l'imputabilité à l'égard de la qualité des programmes pourrait s'avérer très utile. Cette connaissance pourrait être très utile pour le Canada.
Comme Santé Canada ne possède pas suffisamment de fonds pour effectuer toute cette recherche, ne devriez-vous pas collaborer avec les institutions de recherche en santé du Canada ainsi qu'avec Santé Canada et offrir un financement direct? Par exemple, les directeurs de l'enseignement en français à Ottawa et l'Institut de cardiologie de cette ville pourraient apporter une grande contribution.
M. Dion: Je vous remercie beaucoup pour cette excellente suggestion, monsieur le sénateur. Dans le domaine de l'éducation, nous ne sommes pas en train de dire aux provinces que les groupes minoritaires ne relèvent plus de leur responsabilité. Au contraire, en vertu de l'article 23 de la Charte des droits et libertés, les provinces doivent veiller à assurer l'accès à l'éducation en anglais ou en français lorsque le nombre le justifie.
Cependant, le gouvernement fédéral affirme qu'il aidera les provinces à payer les coûts supplémentaires. Il est toujours plus coûteux de fournir de l'enseignement aux minorités. Par exemple, fournir des manuels scolaires à des élèves dont la langue est minoritaire coûte plus cher, alors nous aiderons les provinces à payer le coût supplémentaire. À part cela, la responsabilité de l'éducation continue de relever des provinces. C'est leur responsabilité.
En ce qui concerne la prestation de services de soins de santé, le gouvernement fédéral n'a aucune obligation constitutionnelle de l'assurer. Les collectivités nous ont exprimé leurs besoins. La santé devient la priorité pour de nombreuses personnes. Les collectivités nous ont demandé de l'aide, et nous avons mis sur pied ce plan d'action en collaboration avec elles. Il s'agit d'un plan de 19 millions de dollars, qui s'échelonnera sur les cinq prochaines années.
Cependant, nous ne disons pas aux provinces que la santé est maintenant de notre ressort, pas du tout. Chaque fois que nous avons conclu une entente avec elles, nous leur avons rappelé qu'elles sont responsables de la prestation de services de soins de santé pour l'ensemble des Canadiens, à l'exception des Autochtones, qui constituent un dossier distinct.
Vous me dites que les chercheurs en santé devraient être mis davantage à contribution. Que signifie être une minorité qui demande des services? Des collectivités et Santé Canada ont travaillé ensemble pour déterminer ce que signifie être un patient qui reçoit des soins de santé dans une langue autre que la sienne. C'est un fait que la capacité d'une personne à parler l'autre langue peut diminuer lorsque cette personne est malade. Cette affirmation est amplement appuyée par des recherches, et c'est pourquoi le gouvernement fédéral a entrepris une nouvelle initiative importante dans le domaine de la recherche. Cela démontre que la recherche est la clé. Nous devons en effectuer davantage afin de faire en sorte que nous prenions les bonnes mesures.
Vous avez raison de dire que nous devons offrir dans le domaine de la santé les mêmes installations qui existent dans le secteur de l'éducation. Je vous remercie d'avoir souligné cet élément. Nous travaillerons très fort avec Santé Canada, et je sais que Mme McLellan est disposée à en faire davantage pour déterminer comment nous pouvons effectuer davantage de recherche en santé sur les services fournis aux minorités linguistiques.
[Français]
La présidente: Les enfants surtout.
M. Dion: Mais les personnes âgées aussi. Elles sont souvent bilingues, mais quand on est malade, on est moins bilingue.
La présidente: Quand on est malade, on n'est rien.
M. Dion: J'ai même un jour rencontré une dame anglophone de Montréal qui m'a dit, très franchement: j'ai le droit de mourir dans ma langue.
La présidente: M. Gauthier du Manitoba nous a dit la même chose au Comité des affaires sociales, des sciences et de la technologie: il voulait mourir dans sa langue.
Le sénateur Léger: J'aimerais vous remercier pour votre acte II, le plan de la dualité linguistique. J'aime mieux l'expression «acte II» que «prochain acte».
M. Dion: Il peut y avoir un acte III, on ne sait jamais.
Le sénateur Léger: Je voudrais parler des arts et de la culture. J'ai lu un document du FCCF qui proposait un quatrième axe. Vous avez déjà trois axes. Croyez-vous que votre plan est terminé ou voulez-vous ajouter quelque chose dans l'application de l'acte II?
M. Dion: Le plan est rédigé, on ne va pas le réécrire. Par contre, ce n'est pas la fin de l'histoire, mais bien le début. Un plan ne doit pas être un carcan et si dans le prochain exercice budgétaire, on s'aperçoit qu'il y a des choses à consolider ou qu'il y a des failles à combler, on ne dira pas qu'il est coulé dans le béton. Un plan indique une direction. On bâtit sur cette base et on construit de nouveaux étages si on en voit la possibilité.
Le sénateur Léger: Votre acte II mentionne que l'on parle la langue de l'air qu'on respire. Qu'arrive-t-il si l'air est totalement anglais dans les médias, la cour d'école et les lectures? Il faut deux lignes pour pouvoir saisir la vraie communication. Entre ces deux lignes se situent les arts et la culture. En d'autres mots, vous avez choisi trois domaines sur neuf. Les arts et la culture occupent le deuxième rang. Il faut absolument retrouver les arts et la culture dans l'éducation et dans le développement des communautés. Si dans votre plan, on ne retrouve jamais les mots «artiste» et «culture», c'est qu'il y a un gros manque. Vous avez mentionné les «centres culturels» qui sont certainement très bien, mais le terme réfère plutôt à la communauté.
Mais les artistes continuent et ils ont maintenant accès aux symphonies et aux opéras. Autrefois on était minoritaire mais maintenant, selon la Constitution, le français et l'anglais sont égaux au Canada. Cela devrait au moins être mentionné dans le plan dont il semble totalement absent. Le mot «culture» existe ici et là mais il est utilisé de façon assez générale.
Cela fera-t-il l'objet d'une prochaine rencontre beaucoup plus tard l'année prochaine? Les artistes ont vraiment proposé des projets et ils sont très déçus présentement de cette absence du volet culturel dans l'acte II. Or, c'est la respiration du succès de l'acte II. Pouvez-vous ajouter la culture en post-scriptum?
M. Dion: Je ne mettrais jamais la culture en post-scriptum, elle est là et je vais le démontrer. Vous admettrez avec moi que plusieurs communautés nous ont félicités: la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada, les conseils scolaires, la Commission nationale des parents francophones, la Fédération nationale des conseils scolaires.
De plus, vos collègues viennent de me féliciter. Croyez-vous qu'ils l'auraient fait si la culture n'avait pas été là? Prétendre qu'elle n'y est pas n'a aucun sens. Une langue sans culture, comme vous dites, ne respire pas. À ceux qui prétendent que la culture n'est pas là, je leur demanderais de m'expliquer pourquoi tout le monde est si content de ce plan. Est-ce que tout le monde se contrefiche de la culture? Je vais vous expliquer en quoi la culture est là. Le Plan d'action a été bien reçu et cela n'aurait pas été le cas si la culture avait été oubliée.
Des 381 millions de dollars qu'on injecte dans l'éducation, il y en aura beaucoup pour l'animation culturelle et pour les programmes de développement artistique. La majorité des choses qu'on a pu faire, c'est grâce aux ententes sur l'éducation pour la culture. Si on veut développer davantage de garderies, on n'y arrivera pas sans animation culturelle et c'est la même chose pour le post-secondaire.
Autour des établissements d'enseignement, on veut construire des établissements de rassemblement et on n'y arrivera pas sans la culture. Beaucoup de ce qui existe à Caraquet ou ailleurs s'est fait grâce aux ententes sur l'éducation, mais cette fois-ci, on ne laissera pas cela au hasard. Dans le Plan d'action, à la page 27 de la version française et à la page 28 de la version anglaise, on mentionne qu'il faut développer les centres communautaires et culturels.
À la page 29, on parle de la langue seconde et il est explicitement mentionné qu'on veut développer davantage les nouvelles techniques pédagogiques comme l'enseignement des arts en anglais pour les francophones et en français pour les anglophones.
Pour ce qui est de l'immigration, il faudra s'assurer qu'on repérera les artistes capables de s'exprimer en français ou en anglais parmi les nouveaux Canadiens. Il me semble que la Fédération culturelle canadienne-française dispose de beaucoup de choses avec lesquelles elle peut travailler. Il ne faut rien laisser s'échapper et il faut faire partie de tout.
Cette association ne m'a rencontré que le 17 janvier. Les gens de la santé travaillent avec nous depuis deux ans. Ils ont remis beaucoup de projets et je ne leur ai pas dit oui aux premiers. Je ne les ai pas découragés, je n'ai pas fermé la porte mais je leur ai fait sentir qu'on n'y était pas du tout. À la toute fin, nous y sommes arrivés.
Lors de la première présentation aux provinces, j'y étais, la réaction a été assez livide. La deuxième fois, à St. John's, elle a été très bien reçue. Les choses ne sont pas faciles et si on veut progresser, il faut s'y prendre et s'y reprendre. Il ne faut donc pas se laisser décourager. Ce n'est pas la fin de l'histoire, on peut revenir à la charge mais il ne faut pas s'attendre à ce que la première version soit la bonne. Je n'ai toujours pas reçu la première version de leur projet et voilà ce qu'ils m'ont écrit le 3 octobre dernier:
Nous travaillons à l'élaboration d'une stratégie visant la mise en place d'un programme national d'action culturelle.
Je n'ai toujours pas reçu la première version de ce programme national. Il y a des façons de travailler qui sont efficaces et on peut y arriver ensemble. Mais entre-temps, il ne faut pas croire que dans l'attente de cette version, on reste tous les bras croisés à ne rien faire. Il y a tellement de choses qui se font pour la culture — sans doute pas assez — mais beaucoup de choses se font.
J'aimerais féliciter Mme Copps de tout le travail qu'elle a fait et qu'elle continuera de faire grâce à sa conviction. Il y a non seulement le travail de Patrimoine canadien mais également celui du Conseil des arts. Le 20 janvier, nous avons rencontré les représentants de la Fédération culturelle canadienne-française et nous avons demandé s'il était possible de renforcer le partenariat avec les artistes francophones en situation minoritaire. Le Conseil des arts est saisi de la question. Le Conseil en fait déjà beaucoup et verra ce qu'il peut faire de plus. Téléfilm Canada et l'Office national du film contribuent également de façon importante. Ces institutions doivent comprendre qu'il est possible de faire de la culture en Acadie aussi bien qu'à Montréal, à condition de déployer de nouveaux efforts.
Il existe des programmes à Patrimoine canadien qui fonctionnent bien. Le Forum sur l'espace culturel francophone au Canada a connu beaucoup de succès auprès des communautés francophones et de leurs artistes. Le programme Présentation des arts Canada a connu également beaucoup de succès. Une entente de cinq ans entre le gouvernement du Canada et la Fédération culturelle canadienne-française a été conclue le 18 mars 2002 pour le développement des arts et de la culture de la francophonie canadienne.
Le sénateur Gauthier me dit alors qu'il faut évaluer nos programmes. L'entente a été renouvelée, le 18 mars 2002, car on a estimé qu'elle fonctionnait bien. On renouvelle sur la base de choses qui fonctionnent bien.
Il ne faut pas nier les choses qui sont réalisées ensemble. On travaille sur le Plan d'action tenant compte de projets et d'initiatives pour le théâtre, les arts médiatiques, les arts visuels, la chanson, la musique, et plusieurs retombées positives en résultent. On nous demande depuis longtemps la création d'un bureau de promotion à Montréal. Les Québécois ne savent pas toujours ce qui se fait dans la francophonie canadienne hors Québec — et parfois en dehors de Montréal. Ce bureau de promotion aide maintenant à ouvrir les esprits.
Les ententes Canada-communautés ont été renforcées dans le budget de 1999. Quarante millions de dollars supplémentaires ont été accordés au volet culturel de ce secteur. Ce montant sera renouvelé en 2004. Il faudra bien travailler en 2004 dans ce secteur pour assurer y une part équivalente ou supérieure car les efforts des autres secteurs sont également importants. Le renouvellement des ententes Canada-communautés se fera en 2004.
Enfin, Patrimoine canadien et la Fédération culturelle canadienne-française travaillent ensemble à la réalisation d'une collecte de données auprès d'organismes tels Téléfilm Canada, l'Office national du film et le Conseil des arts afin de bien identifier ce qui se fait et déterminer comment combler les lacunes.
La Fédération culturelle canadienne-française a déposé auprès de Patrimoine canadien un projet visant à faire l'inventaire des projets de partenariat en cours entre les écoles et le secteur culturel. Ce projet vise à trouver des façons de renforcer ce partenariat. Mme Copps annoncera si le projet sera adopté.
Voilà ce qui se fait en ce moment. En partenariat avec la Fédération nationale des conseils scolaires francophones, nous pouvons réaliser plusieurs choses. La Fédération nationale des conseils scolaires francophones a accueilli ce Plan d'action et la Fédération culturelle canadienne-française aurait intérêt à en faire autant pour travailler avec les gens du secteur de l'éducation. Ceux-ci ne demandent pas mieux que de renforcer les volets culturels de l'éducation. Ils sont bons pédagogues et savent que cet élément est essentiel. La possibilité de projets pilotes avec le Centre scolaire francophone de la Colombie-Britannique existe.
Il se fait donc plusieurs choses. Le Plan d'action apportera un élan additionnel à la culture.
Le sénateur Léger: En d'autres mot, il suffit de continuer à bâtir ensemble. Je suis consciente de tout le progrès qui s'est fait.
La culture et les arts, à une certaine époque, au Canada, appartenaient à l'église. Les prêtres, religieux et religieuses s'occupaient du théâtre — comme plusieurs d'entres nous peuvent en témoigner. Depuis presque 50 ans, ce domaine est passé à l'État. L'État maintenant comprend que la culture est vraiment la respiration d'une vie. Sur ce plan, nous sommes loin derrière les Européens qui nous devancent de plusieurs centaines d'années.
Parlons des artistes. Je vous remercie d'avoir employé le mot « artiste » tout à l'heure. Il est rare qu'on emploi ce terme. On dirait qu'il ne nous vient pas facilement à la bouche. Les artistes ont énormément à apprendre du côté des responsabilités actives. Ce n'est maintenant plus de l'essor religieux mais du laïc.
Les artistes de l'époque travaillaient pour presque rien. Lorsque je parle des artistes, je parle d'êtres humains. Lorsqu'il est question de bâtir des théâtres, il est question d'infrastructure. Les êtres humains ont besoin d'abord de pain et de beurre. Pour aller plus loin, en parlant de choses plus techniques, dominent le talent et l'art. Ce n'est pas tout le monde qui se dit artiste. Seul le public juge.
Le gouvernement devra aider les plus grands, même si cela semble moins tangible. Je ne veux pas faire abstraction de la cuisine. L'été, on vit du tourisme, bien sûr, mais il faut toute la ligne. Je crois qu'il faut examiner les deux côtés de la médaille.
M. Dion: Vous avez tout à fait raison. Il faut qu'on apprenne à mieux travailler ensemble et que l'on s'adapte aux différentes cultures. Lorsqu'on touche aux langues officielles, on touche aux gens qui travaillent dans différents domaines. Chaque domaine a sa culture. Tous devons apprendre à travailler ensemble. On travaille mieux ensemble lorsqu'on voit les premières versions des plans avant que ceux-ci ne paraissent dans les journaux, alors qu'on ne les a pas encore soumis.
La présidente: Le clergé et les communautés religieuses pourront donc être remplacés par le ministère de la Culture.
M. Dion: J'espère bien que non. Les artistes doivent rester libre. Il ne faut pas transformer un clergé par un autre.
Le sénateur Gauthier: À la lumière des commentaires du sénateur Léger, seriez-vous disposé à apporter un amendement à votre Plan d'action sur la culture? Vous avez indiqué qu'il n'est pas coulé dans le béton. Seriez-vous disposé à en discuter avec la Fédération culturelle canadienne-française?
M. Dion: Le document n'aura aucun amendement. Je ne vais pas le renégocier, au souci d'en perdre des morceaux. Il est acquis et promis à tout le monde. Toutefois, ce n'est pas la fin de l'histoire, mais le début. Plusieurs choses se font en marge du plan. J'ai mentionné toutes sortes de choses dans le domaine de la culture, des projets qui devront être évaluées, d'autres qui seront soumis et qui sans doute seront adoptés. À Winnipeg, on parle du Centre Molière. Je ne vous dirai pas qu'il n'est pas dans le plan. Le plan est un levier permettant de réaliser des choses, entre autres, dans le domaine culturel.
Le prochain exercice budgétaire nous mènera peut-être vers des choses nouvelles dans un domaine qui ne fait pas partie du plan. Si le projet est bien présenté, je pourrai appuyer le ministre du Patrimoine auprès du ministre des Finances. Pour ce faire, j'ai besoin de choses très solides. Le secteur de la santé n'aurait jamais obtenu 119 millions de dollars si cela avait été le premier projet présenté. Le projet a était fortement appuyé par tout le milieu médical canadien. Le ministre des Finances était au début très réticent. Toutefois, M. Manley a indiqué qu'il était prêt à financer ce projet.
Ce n'est jamais facile. Il faut s'entraider et on peut y arriver. On y est arrivé dans le domaine de la santé. On a prouvé par le passé qu'on pouvait le faire dans le domaine de la culture et on va le faire à nouveau.
Le sénateur Chaput: J'allais vous féliciter de votre bon plan et ajouter que j'aurais aimé y voir de façon plus concrète les arts et la culture.
Ayant écouté ce que vous avez répondu au sénateur Léger, je peux vous dire que vous avez un très bon plan. On peut regarder le secteur culturel en marge de ce plan qui devient un levier pour appuyer ce secteur. Je veux vous féliciter car c'est un très bon plan avec un bon contenu. Il peut être solide.
Toutefois, j'ai des inquiétudes par rapport à deux éléments. Le succès de notre plan parce que le plan Dion devient le nôtre reposera en grande partie sur la bonne volonté des provinces. Je suis une francophone de l'Ouest du Canada. Lorsque l'on me dit que le succès d'un plan doit reposer sur la bonne volonté de la province, j'ai de sérieuses inquiétudes. J'en ai aussi lorsque j'entend vos paroles. Vous dites que vous ne pouvez rendre exécutoire ce qui ne relève pas de votre compétence.
Lorsque les fonds pour les langues officielles viennent du gouvernement fédéral et sont remis aux provinces, est-ce qu'il n'y a pas lieu lorsque vous négociez avec les provinces d'obtenir un engagement, une obligation quelconque par écrit pour assurer que ces fonds soient dépensés en fonction de nos besoins.
Je pense au ministère de la Santé et à celui de l'Éducation. Dans le passé, nous avons reçu des fonds du gouvernement fédéral. Ces fonds n'ont pas été dépensés en fonction des objectifs que la communauté francophone s'était donnée mais en fonction des objectifs de la province qui n'étaient pas les mêmes que ceux que nous avions comme minorité de langue officielle. Cela m'inquiète et j'espère que, dans vos négociations avec les provinces, il y aura un levier quelconque qui les obligera à dépenser ces fonds en fonction de nos besoins et priorités.
Ma deuxième inquiétude porte sur le cadre d'imputabilité des institutions fédérales visées par ce cadre et elle est basée sur des expériences du passé. Comment obligerez-vous ces institutions à prendre en considération la dimension des langues officielles? Qu'est-ce qui peut être fait si ces institutions ne le font pas? Qu'est-ce qu'on peut faire pour les obliger à s'y conformer?
M. Dion: Je vais répondre à la deuxième question. Les ministres et les hauts-fonctionnaires sont engagés dans cela.
Le premier ministre a passé le message très clairement. Ce sont tous des libéraux et ils y croient. Monsieur Manley y croit. S'il accepte le financement que j'ai obtenu avec mes collègues, c'est parce qu'on a bien travaillé. Il y croit sinon il aurait investi ses fonds ailleurs.
Ce n'est pas mauvais d'avoir une coordination, un cadre d'imputabilité qui fait que l'on y croit, pas seulement de temps en temps, mais que l'on y croit tout le temps pour chaque initiative. C'est ce que vise le cadre d'imputabilité. Beaucoup de hauts-fonctionnaires y croient mais on va s'assurer que la culture du bilinguisme sera renforcée. Les moyens que l'on se donne sont là. Le Conseil des sous-ministres aux langues officielles a des responsabilités renforcées et il pourra exercer un plus grand leadership. L'équipe de madame Scotton viendra aider ces collègues et le ministère de la Justice aura aussi plus de moyens pour y parvenir. Le cadre d'imputabilité établit les règles à suivre.
Le greffier du Conseil privé, M. Himelfarb, soit dit en passant, comprend très bien le français. Il pourrait le parler s'il était moins gêné. Les traducteurs n'auraient pas de difficulté à le traduire parce qu'il parle très lentement. M. Himelfarb croit beaucoup à la cause du bilinguisme —
[Traduction]
— l'une des quatre priorités de gestion du gouvernement.
[Français]
Cela veut dire que les sous-ministres sont évalués pour savoir s'ils ont droit à leurs primes et à des promotions, en partie en raison de leur capacité à faire respecter le bilinguisme dans leurs institutions et à le faire progresser.
Maintenant, les provinces! J'allais les oublier. On vise un changement de culture. Historiquement, il y a mille et une raisons pour lesquelles les communautés peuvent être méfiantes face aux provinces. Sauf au Nouveau-Brunswick, il n'y a pas beaucoup d'avantages électoraux à s'occuper des minorités linguistiques. On peut penser qu'elles sont facilement oubliées.
Si la seule solution est de les traîner en cour, cela en fait un législateur réticent, renfrogné et il ne devient pas vraiment un partenaire. On doit bâtir un partenariat. Il faut se rappeler que la communauté anglophone a changé vis- à-vis la langue française. Pour les jeunes, le bilinguisme canadien fait partie de leur culture. De nombreux jeunes qui ne parlent pas notre langue nous disent: lorsque je reviens de l'étranger, je suis à l'aéroport et si je n'entends pas la suite en français, même si je ne comprends pas très bien ce que cela veut dire, j'ai le mal du pays. C'est vrai que cela fait beaucoup partie de notre culture et on bâtit là-dessus. Il ne faut pas oublier que deux enfants francophones sur trois en dehors du Québec, a un parent qui n'est pas francophone. Ce sont des couples exogames.
Nous devons bâtir cette nouvelle réalité ensemble avec les provinces. L'éducation relève des provinces. La santé, dans notre initiative de 119 millions de dollars, ira directement aux communautés. Un jour, on aura à bâtir quelque chose de plus avec les provinces.
En éducation, on a des buts plus ciblés. Si on les impose aux provinces, cela ne marchera pas. Les provinces et nous devons bâtir quelque chose avec les communautés, les parents, les conseils scolaires et identifier sur cette base ce qu'il faut faire, tant pour la langue de la minorité que pour la langue seconde.
Cela ne veut pas dire d'être naïf mais cela veut dire d'avoir l'esprit ouvert et de travailler avec nos partenaires.
Le sénateur Chaput: Dans ces partenariats, n'y a-t-il pas moyen d'inclure des objectifs communs?
M. Dion: C'est le but. C'est pourquoi il y a deux nouveaux fonds et dans chacun de ces fonds, cela fonctionnera selon la base de projets sur lesquels tout le monde devra s'entendre. Chacun y investira des fonds.
Le sénateur Chaput: Ce n'est pas une question d'être naïf ou pas mais une question de survie pour nous. Le plus longtemps on attend et le moins de fonds on obtient. Le plus loin on va reculer fera que l'on ne sera peut-être plus là. C'est très important pour les francophones de l'Ouest du Canada.
M. Dion: Je comprends très bien et votre comité sera très utile à cet effet. Parfois, il y a des accusations en l'air envers les provinces. On dit que les fonds s'envolent en fumée. Je demande des preuves qui n'arrivent jamais.
On doit être plus précis dans ce que l'on souhaite. Si une province vous apparaît ne pas bien utiliser les fonds du gouvernement fédéral ou l'utilise à d'autres escients, s'il vous plaît, informez-nous en.
Le sénateur Chaput: Je voudrais vous donner un exemple. Il y a plusieurs années, j'étais directrice du Centre culturel franco-manitobain, de 1984 à 1986. Nous avons appris que des fonds avaient été remis pour acheter des livres français aux bibliothèques de nos écoles françaises. Tout le monde était content mais en faisant une recherche, on a découvert que les fonds avaient bien été remis pour acheter des livres en français mais que la direction décidait en dernier recours.
Dans bien des bibliothèques de nos petites écoles du milieu rural, aucun livre en français n'a été acheté. Cette initiative avait été laissée à la discrétion de la personne et on n'avait pas ajouté de ressources en français à nos écoles. Cela fait longtemps, mais c'est un petit exemple. L'autre exemple concerne la santé.
M. Dion: Si vous me donniez cet exemple comme étant actuel, la première chose que l'on ferait serait de téléphoner à la province pour lui demander de rendre des comptes. Ce n'est pas l'entente. Si on a une entente, elle doit être respectée.
Le sénateur Chaput: Si ce n'est pas écrit dans l'entente, on ne peut pas se plaindre. S'il n'y a pas d'objectifs communs, on ne peut pas vous dire que les fonds ne sont pas bien dépensés.
M. Dion: On va s'arranger pour faire en sorte que ce genre de choses puisse être retracé.
La présidente: Vous avez parlé de la culture des jeunes Canadiens et du bilinguisme. Ce phénomène est très important. Il ne faut pas dire aux jeunes qu'ils doivent être bilingues parce qu'ils auront plus tard un bon travail. C'est pour qu'ils développent cette culture d'être «cool» et non pas «nerd» s'ils sont bilingues à 15 ans ou 16 ans.
C'est l'exemple qu'on a eu avec le tabac. Lorsqu'on leur disait de ne pas fumer pour ne pas avoir de cancer à 50 ans, ils s'en foutaient bien de ce qu'ils auraient à 50 ans. C'est maintenant qui compte, leur faire comprendre que s'ils fument, ils ne seront pas aussi bons dans les sports. Cette culture du bilinguisme est notre défi. J'ai enseigné les langues secondes pendant plus de 25 ans. Ils avaient peur à 14 ou 15 ans de ne pas être «cool» s'ils étaient bilingues. À ce stade, on les perd. J'espère que votre plan favorisera ce développement.
M. Dion: Ce n'est pas une question de fonds mais de culture.
Le sénateur Morin: Je ne reprendrai pas les commentaires de mes collègues concernant l'excellence du rapport, je les partage entièrement. Je voudrais poursuivre sur la lancée du sénateur Keon concernant la question de la santé qui représente la priorité des communautés en situation minoritaire.
Par exemple au Québec, 85 p. 100 des anglophones déclarent que leur première nécessité est d'obtenir des soins de santé dans leur langue. Vous avez élaboré trois objectifs précis: la question du réseautage de première ligne et la formation et de la société Santé en français. Il faudrait que la réalisation de ces objectifs se fasse après consultation et en accord avec les représentants des communautés linguistiques minoritaires.
Vous avez parlé des francophones hors Québec et de la société Santé en français, présidée par M. Hubert Gauthier. Avec raison, vous lui avez rendu hommage. En grande partie, ce qui est clairement identifié comme priorité dans le domaine de la santé est dû à ses efforts depuis plusieurs années. Je voudrais rendre hommage à cette personne extraordinaire qu'est M. Gauthier, directeur de l'Hôpital de Saint-Boniface.
Du côté anglophone, le «Community Health and Social Service Network» est l'interlocuteur anglophone au Québec et il espère remplir le même rôle. J'espère que, de façon statutaire et régulière, ces deux organisations seront rencontrées par les autorités du ministère de la Santé pour s'assurer que les objectifs identifiés soient rencontrés.
Le réseautage est important. Les soins de première ligne sont importants parce qu'ils représentent la pièce maîtresse de la réforme de la santé sur lequel notre rapport et le rapport Romanow se sont penchés. On parle d'imputabilité. Il serait facile de voir, par exemple, annuellement, le nombre d'équipes multidisciplinaires qui couvrent de façon complète et continue l'ensemble des soins de santé des populations en situation minoritaire dans leur région. Il faudrait pouvoir s'assurer qu'il y ait une croissance de ce nombre, parce que cela représente vraiment la réalisation des objectifs du Plan d'action.
Je voudrais parler de la formation des professionnels de la santé. Du côté francophone hors Québec, on a fait des progrès extraordinaires grâce à l'Université d'Ottawa. Plus récemment, l'Université de Moncton a réalisé de grands progrès grâce au consortium francophone qui existe et qui réunit non seulement les universités, mais aussi les communautés et les établissements.
Du côté anglophone, il y a un vide complet. L'Université McGill ne remplit pas son rôle au Québec vis-à-vis des communautés anglophones. L'Université McGill est renommée de façon internationale pour sa recherche. C'est une grande université au point de vue recherche. Comme l'Université d'Ottawa et l'Université de Moncton en particulier l'ont fait vis-à-vis leurs communautés minoritaires, l'Université McGill doit assumer cette responsabilité avec les collèges anglophones qui assurent la formation des professionnels.
On doit s'assurer que les professionnels qu'ils forment assument la responsabilité des communautés linguistiques minoritaires anglophones hors de Montréal. Je pense en particulier à la Gaspésie, aux Cantons de l'est et ainsi de suite. Voilà les commentaires que je voulais fournir.
M. Dion: Je les trouve très utiles, sénateur Morin. Les commentaires sur l'Université McGill sont les vôtres, mais la possibilité d'accroître nos relations avec l'Université McGill pour cette belle cause, je les fais miens aussi. Je pense que M. Carter, le coordonnateur de la Community Health and Social Services Network partagerait sans doute votre analyse aussi. Il m'a écrit que le Plan d'action serait une aide essentielle à son organisme.
[Traduction]
Il a dit que le réseau nous féliciterait pour notre plan d'action, qui porte sur la situation vulnérable de nombreuses collectivités. Il a aussi dit que le réseau appuierait les mesures qui y sont définies et qui représentent l'engagement du gouvernement envers la vitalité de nos collectivités.
[Français]
Là-dessus, on va bâtir quelque chose qui va répondre aux besoins pas seulement de ceux qui vivent à l'ombre de l'Université McGill, mais de ceux qui vivent en Gaspésie ou n'importe où dans une communauté anglophone qui a davantage besoin d'avoir accès aux services en anglais.
Le sénateur Maheu: J'aimerais d'abord vous féliciter de votre grande contribution au dossier des langues officielles. Je sais comment vous le tenez à coeur et, sans vous, le dossier n'aurait pas avancé. Il est grand temps que le gouvernement du Canada s'attaque de façon concrète aux problèmes des langues officielles et s'engage à investir de telles sommes. Il me fait également plaisir d'entendre le sénateur Morin parler un petit peu de la langue anglaise au Québec.
Dans votre Plan d'action, vous accordez une grande importance aux communautés linguistiques en situation minoritaire: santé, justice, la petite enfance. Dans les prochaines semaines, vous allez sûrement consulter à nouveau les différents groupes et représentants des communautés minoritaires de langues officielles.
Au Québec, par exemple, quels sont les groupes que vous comptez consulter afin de promouvoir les communautés anglophones en situation minoritaire? Le sénateur Morin a soulevé qu'il y avait encore du travail à faire. Cela choque quelquefois lorsque je soulève ce point, mais c'est la vérité.
M. Dion: On a déjà commencé. On a rencontré la FCFA, vendredi. On a eu une bonne discussion. Ils étaient tous réunis pour le conseil des présidents. Mais il ne serait pas mauvais que, très rapidement, je puisse faire la même chose avec le QCGM, afin que l'on voit comment on peut étudier cette question. Peut-être que les premiers contacts ont pu être faits avec mes fonctionnaires.
Mme Scotton: M. Asselin et moi-même avons déjà rencontré les fonctionnaires du QCGM. Nous prévoyons tenir des réunions plus formelles pour entamer de véritables consultations dans les prochains mois. Nous avons fixé des dates avec quelques-unes de ces associations.
M. Dion: Je vais m'entretenir avec mon équipe et on verra comment on peut s'organiser. On s'est battu pour ce Plan d'action et maintenant il faut battre le fer et rebondir assez rapidement. Par contre, les communautés ne doivent pas abandonner leur relations directes avec mes collègues. On n'a jamais voulu mettre personne dans un ghetto. Il n'y a pas qu'une seule entrée.
Il faut une bonne entrée à Patrimoine Canada et lorsqu'on a des craintes ou des solutions à apporter à la fonction publique, Mme Robillard est très présente. Mme McLellan s'occupe des questions de santé. C'est très important comme message.
Par exemple, je n'ai pas voulu que l'on crée un fonds spécial pour les gens d'affaires francophones en situation minoritaire, mais j'ai demandé que Industrie Canada — et M. Rock était d'accord — donne des conseils à ces gens pour les aider à avoir accès aux programmes auxquels ils ont droit et auxquels la majorité a droit aussi. Il ne faut jamais mettre dans un ghetto les communautés. Il faut plutôt leur donner accès à tout ce qui est possible.
[Traduction]
Le sénateur Maheu: Le plan d'action propose un certain nombre d'investissements qui nécessiteront des consultations avec les provinces et probablement des ententes, que nous aimions ce mot ou non. Je pense aux domaines de l'éducation et de la santé, à propos desquels vous devrez peut-être essayer de négocier à nouveau et attacher des conditions aux sommes que nous investissons. Jusqu'à maintenant, comment les provinces et les territoires ont-ils réagi à votre plan d'action? Les provinces sont-elles disposées à négocier à nouveau du financement ou ont-elles terminé de négocier?
M. Dion: La réaction a été positive. Paul Robichaud, le ministre responsable de la francophonie au Nouveau- Brunswick, a déclaré qu'il s'agissait d'une bonne nouvelle. Stan Frey, le directeur du programme d'éducation en français du Saskatchewan Education Official Minority Language Office, nous a affirmé que le plan constitue selon lui une mesure positive, une bonne initiative bien réfléchie. Mon homologue du Manitoba, M. Selinger, nous a écrit qu'il est disposé à travailler avec nous. Il en va de même pour mon homologue de la Colombie-Britannique, Richard Stewart, ministre responsable de la francophonie dans cette province. Ils sont disposés à collaborer avec nous. Je n'ai reçu aucune réaction négative.
Le ministre de l'Éducation de l'Alberta s'est plaint de ne pas avoir été mis au courant du plan d'action, mais, en même temps, il a déclaré qu'il voulait prendre part à sa mise en oeuvre. Il n'a pas dit qu'il ne voulait pas en entendre parler, mais plutôt qu'il voulait y participer. Je me suis entretenu avec mon homologue de l'Alberta, le député responsable de la francophonie dans cette province, qui entretient maintenant des rapports avec le ministre albertain de l'Éducation. Je ne négocie pas directement avec les ministres de l'Éducation — c'est Mme Copps qui s'en charge — mais j'entretiens des rapports étroits avec les ministres responsables de la francophonie dans chacune des ces provinces, avec les ministres des Affaires intergouvernementales ainsi qu'avec les premiers ministres. Les premiers ministres sont très disposés à travailler avec nous.
Le sénateur Maheu: Je pensais précisément au Québec, ma province d'origine.
[Français]
Le sénateur Maheu: Comme anglophone, j'ai souvent entendu dire que si les francophones étaient traités aussi bien que les anglophones du Québec lorsqu'ils sont à l'extérieur de la province de Québec, tous s'en porteraient mieux. Ce n'est pas tout à fait vrai et cela a été dit à plusieurs reprises.
Le sénateur Lapointe: Ce n'est pas tout à fait faux non plus.
Le sénateur Maheu: Non, ce n'est pas tout à fait faux. Regardez la situation des communautés minoritaires au Québec, en province et en dehors de Montréal, cela n'existe quasiment pas.
[Traduction]
Le plan d'action présente une bonne analyse de tout cela. Il est vrai que la capacité des anglophones du Québec de conserver leur langue est beaucoup plus grande que celle des francophones hors Québec, pour des raisons évidentes. L'anglais est la langue du continent, la langue d'Internet, la langue des affaires, et cetera. Cela dit, si vous vivez dans une communauté anglophone en Gaspésie, même si vous faites partie du groupe majoritaire du continent et du Canada, dans la vie quotidienne, vous habitez dans une région francophone et vous avez besoin d'aide, que vous méritez d'ailleurs. Je crois que tout le monde acceptera cela.
Je n'ai jamais été de ceux qui pensent qu'il faut donner exactement la même chose à chaque personne. Nous devrions répondre aux besoins de chaque région, et nous répondrons aux besoins de la communauté anglophone du Québec.
[Français]
M. Dion: M. Charbonneau, mon actuel vis-à-vis provincial, m'a écrit le 25 septembre 2002, avant que je fasse valoir le Plan d'action. Sa lettre disait qu'il se réjouissait de constater que mes initiatives bénéficieront à terme d'outils supplémentaires qui permettront de mieux soutenir la vitalité, le rayonnement de la langue et de la culture française au Canada. Il disait aussi dans sa lettre qu'il voulait travailler avec moi, dans la mesure où on respecte sa compétence. Le 15 ou le 16 avril, au prochain Cabinet formé par le prochain premier ministre du Québec, nous travaillerons avec eux pour aider la communauté francophone du Québec.
Le sénateur Lapointe: Bravo, c'est un document formidable.
Comme les sénateurs Beaudoin et Gauthier, je fais quelques fois référence au passé. En 1938 — la date précise m'échappe — mon père alors député fédéral libéral de Matapédia-Matane avait prononcé, dans un discours en Chambre, qu'un employé avait refusé de lui parler dans sa langue maternelle lorsqu'il était à bord d'un train.
Il en avait fait tout un plat dans son discours. Il a reçu des éloges et des bêtises, ce qui était normal pour l'époque et ce qui vient prouver que le pays a beaucoup évolué depuis dans le domaine des langues officielles.
J'ai une inquiétude en ce qui concerne les gens du Nord de l'Ontario. Je suis allé faire une tournée et j'avais accepté avec plaisir de me rendre à plusieurs endroits. J'avais été, entre autres, à Chapleau — pour ceux qui connaissent, c'est très loin — Hearst, Kapuskasing et j'y ai vécu une situation très émouvante parce que la jeune fille qui était responsable d'organiser des spectacles là-bas avait comme budget 1 500 $ par année. Lorsque je lui ai demandé combien de spectateurs en moyenne assistaient au spectacle, elle me disait que 40 personnes était l'assistance moyenne. Lorsque la 110e personne s'est présentée pour le spectacle, la jeune fille s'est mise à pleurer et m'a dit que ces fonds lui permettraient de faire venir un autre artiste connu.
Je n'ai pas la formation de mes collègues d'en face, mais je suis là pour servir mon pays. Je veux donner le crédit à tous ceux qui ont permis d'améliorer la situation au Québec.
À l'époque, j'avais une grosse voiture et comme on le disait, on utilisait souvent pour l'essence, du «jaune» ou du «rouge». Il m'avait mis du «jaune». J'avais dit au serveur: si t'avais compris le français, t'aurais compris que ce n'était pas du «jaune» qui va dans ma voiture. Ce jeune homme m'avait répondu: why should I? Je lui ai dit qu'il finirait par comprendre qu'avec la montée du nationalisme qui se faisait au Québec, avec le Parti québécois qui s'en venait au pouvoir, qu'il serait obligé d'apprendre à parler français.
Le Parti québécois a apporté beaucoup en ce sens. Il faut donner à César ce qui appartient à César. L'idée du bilinguisme de Trudeau est fabuleuse, mais cela n'allait pas vite au Québec. Cela s'est beaucoup amélioré. Beaucoup plus d'anglophones s'expriment en français et vice versa aujourd'hui.
La petite enfance représente l'avenir du pays dans les langues officielles et j'y attache beaucoup d'importance. J'aimerais que vous me confirmiez que les intervenants qui guideront les premiers pas de nos petits enfants, dans quelque langue que ce soit, soient compétents. Aujourd'hui, il y en a beaucoup qui enseignent le français aux petits enfants qui ne sont pas capables d'écrire la moitié d'une lettre sans faire 30 fautes. Je crois — sans être vraiment au courant — que la même chose doit s'appliquer en anglais.
M. Dion: Si cela peut vous rassurer, je ne suis pas avocat moi non plus.
Le sénateur Lapointe: Non, mais votre compétence est plus grande que la mienne et votre quotient intellectuel plus élevé.
M. Dion: Je suis d'accord avec vous sur le fait que si on investit des fonds, on doit s'assurer que les gens ont les compétences nécessaires. Beaucoup de compétences inexploitées auparavant seront mieux exploitées et nous devrons mieux rechercher la compétence.
Le sénateur Lapointe: Vous me faites bien plaisir.
Le sénateur Gauthier: Le sénateur Lapointe a parlé du nord de l'Ontario. Je n'ai rien vu dans votre plan pour l'est, l'ouest et le sud de l'Ontario. Vous faites allusion aux agences de l'Atlantique et de l'Ouest. À peine 25 p. 100 des Franco-Ontariens demeurent dans le nord; les autres habitent l'est, le sud et l'ouest. Pourquoi avez-vous exclus ces gens?
M. Dion: C'est un débat que nous avons non seulement pour la question des langues officielles, mais pour tout. Il y a quelque chose qui existe pour l'Atlantique, le Québec, le nord de l'Ontario, l'Ouest canadien et les territoires ont leurs ententes. Et alors, nous, entend-on dire pour les gens qui habitent le sud de l'Ontario? Il s'agit d'à peu près 35 p. 100 des Canadiens, le tiers du pays. C'est le centre industriel du pays et le Canada n'a pas senti le besoin d'y créer une agence. Pourquoi? Parce que le ministère de l'Industrie y est extrêmement présent. Il n'a pas besoin de faire un extra pour ce secteur de la population canadienne, parce que le ministère de l'Industrie y a ses châteaux forts. Le ministère de l'Industrie, directement, va gérer la partie du plan qui relève de cette partie du Canada.
Le sénateur Gauthier: J'ai noté qu'il n'y a aucun règlement d'application de l'article 41 de la partie VII dans votre Plan d'action. J'avais fondé des espoirs là-dessus. J'espérais un règlement après 15 ans d'attente: pas de règlements à une loi, pas de droits. Vous me comprenez. Actuellement, il n'y a pas de règlements d'application pour la partie VII et l'article 41. Pourquoi n'y en a-t-il pas?
M. Dion: On aurait «judiciarisé» ce que nous ne voulions pas «judiciariser». Si vous y allez par règlement, c'est l'équivalent d'y aller avec une loi. Cela devient du domaine juridique. Pour nous, c'est un engagement politique. M. Chrétien a prouvé qu'il tenait cet engagement politique à coeur, notamment par ce Plan d'action.
Le sénateur Gauthier: Les Territoires du Nord-Ouest ont des directives, pas des règlements. L'administratif ne découle pas d'une loi, tandis qu'un règlement d'application découle d'une loi. Il n'y a pas de règlements dans la loi. On n'a pas le droit d'aller devant les tribunaux. L'article 41 est exclu de la « judiciarisation », donc pas de règlements, pas de recours aux tribunaux. C'est difficile de comprendre cette résistance. Je vais vous donner quelques chiffres.
Vous m'avez parlé de la «judiciarisation». Vous m'avez fait le même commentaire sur les contraventions il y a quelques temps. Il y a eu 730 causes selon l'article 15, l'article de l'égalité dans la Constitution, 30 causes sur l'article 23, en éducation pour les minorités et cinq causes sur l'article 16 depuis l'adoption de la Charte en 1982.
J'ai de la misère à rationaliser ces faits. Vous créez la «judiciarisation». Il n'y en aura pas plus qu'il y en a eu. On enlève le droit de recourir aux tribunaux et on ne donne pas de règlements. C'est un peu amputer tous les pouvoirs que les minorités pourraient exercer sur les gouvernements.
M. Dion: Il y a des droits qui sont «judiciarisés». La Charte existe. Il ne faut pas croire que parce que la partie VII n'est pas rédigée pour être exécutoire qu'il n'y a pas de droits. La partie VII n'a pas été rédigés dans ce but, autrement, elle aurait été rédigée différemment. M. Hnatyshyn, à l'époque, disait que cette Partie ne serait pas exécutoire. Cela ne veut pas dire qu'elle ne signifie rien. La preuve c'est qu'elle relève d'un engagement politique qu'on a codifié mieux que jamais dans ce Plan d'action.
Le sénateur Gauthier: On pourrait enchaîner pendant des heures, mais je vais me restreindre. Je ne comprends pas votre attitude sur les cultures. À la Chambre des communes, vous avez dit la semaine dernière que vous aviez donné 500 millions de dollars de dollars à Mme Copps il y a deux ans pour la culture. Le programme de Mme Copps se termine au mois de mars 2004. J'ai de la difficulté à imaginer qu'un gouvernement donnerait 500 millions de dollars pour un programme sur la culture et n'annoncerait pas aussitôt le plan de mise en oeuvre qui s'occupera un peu de la culture. C'est important pour nous. Le programme sera-t-il reconduit?
M. Dion: Sur le 500 millions de dollars, je n'en sais rien. Cela dépasse la seule question des langues officielles. C'est un programme qui s'adresse à tous les Canadiens. On a senti le besoin de renforcer l'initiative culturelle avec 500 millions de dollars. Ce sera au gouvernement d'évaluer ce qui sera récurrent ou non. Ces fonds ont profité à tous les Canadiens, donc aux communautés de langues officielles et à leurs artistes. J'ai fait la liste tantôt d'un ensemble d'initiatives existantes ou à l'étude en plus du Plan d'action.
J'ai expliqué comment le Plan d'action pouvait servir de poignée pour renforcer cette dimension comme tout le reste. Bien sûr, vous-même ainsi que tous ceux qui ont dit que c'était un bon Plan d'action le faites parce que vous savez très bien qu'on n'aurait pas pu faire un bon Plan d'action en laissant de côté la culture.
Le sénateur Beaudoin: Je suis content d'avoir entendu la phrase précédente. Si l'article 41 n'est pas exécutoire ou impératif, il n'en reste pas moins qu'on a la Charte.
M. Dion: Oui.
Le sénateur Beaudoin: Et la Charte, c'est la Constitution.
M. Dion: Exact.
Le sénateur Beaudoin: Ce n'est pas une simple loi.
M. Dion: Non.
Le sénateur Beaudoin: C'est la Constitution. Nous avons tenu le débat sur la signification de l'article 16; les deux langues sont officielles.
Deuxièmement, c'est encore plus important, les deux langues ont un statut égal. C'est fantastique. Sur cette base, nous avons convaincu les représentants de Radio-Canada de télédiffuser la Soirée du hockey en français. J'ai dit que les deux réseaux devaient être égaux.
S'il est vrai que les deux langues sont officielles, qu'elles sont égales, et sur ce tout juriste digne de ce nom serait d'accord, nous sommes protégés. Cela me satisfait. La Constitution détermine la base de notre loi fondamentale. Nous sommes protégés et cela me suffit.
J'aimerais que l'article 41 soit exécutoire, mais je suis prêt à être bon joueur. Si jamais ils ont raison, la Constitution le dit au moins clairement.
Le sénateur Léger: En ce qui concerne l'immigration, ai-je bien compris qu'un nouvel immigrant peut privilégier l'une des deux langues officielles du pays?
M. Dion: Non. Le gouvernement ne commencera pas à hiérarchiser le choix des citoyens. Cependant, mais il va les informer de la richesse de la dualité linguistique canadienne. Un nouveau Canadien saura tout de suite qu'en Colombie-Britannique, il y a une communauté francophone très intéressante.
Le sénateur Léger: Il sera informé que les deux langues officielles sont égales? Il sera heureux de posséder jusqu'à trois langues.
M. Dion: Il n'y a aucune contradiction entre la dimension bilingue et multiculturelle de notre pays.
[Traduction]
Dans une école d'immersion en Colombie-Britannique, vous rencontrerez de nombreux élèves d'origine asiatique qui parlent très bien le français. Ce sont leurs parents qui les envoient à cette école. Ils estiment qu'il est bien pour leurs enfants d'apprendre deux langues internationales en plus de leur langue maternelle.
Le sénateur Léger: C'est ça le Canada.
[Français]
Le sénateur Léger: Avez-vous dit que c'était différent pour les Autochtones?
M. Dion: Non, sauf juridiquement. Le gouvernement du Canada, par Santé Canada, a des responsabilités constitutionnelles envers les Autochtones que nous n'avons pas envers les autres Canadiens parce qu'ils ont des droits propres à eux dans la Constitution canadienne.
Le sénateur Léger: Pourtant, ce sont des Canadiens.
M. Dion: Bien entendu. Ce sont des Autochtones canadiens. Nous n'avons pas de responsabilité constitutionnelle envers les Autochtones américains, par exemple. Tous les Autochtones canadiens ont certains droits reconnus dans la Constitution qui fait en sorte que le gouvernement canadien, dans le domaine de la santé, a des responsabilités envers eux qui sont différentes de celles des autres Canadiens.
Le sénateur Léger: Au Manitoba, par exemple, l'éducation des Autochtones relève quelle compétence?
M. Dion: En matière d'éducation, la compétence est provinciale, mais sur les réserves, le gouvernement canadien a des responsabilités.
La présidente: Monsieur le ministre, il me reste à vous remercier de votre disponibilité. Je vous souhaite beaucoup de succès et j'espère que vos collègues du Cabinet approuveront ce nouvel élan pour la dualité linguistique.
Je souhaite que tous les Canadiens et les Canadiennes qui adhéreront à ce plan trouveront qu'il fait bon vivre au Canada et qu'on y trouve une meilleure qualité de vie.
Merci de votre de votre disponibilité, de votre temps. Bonne chance.
La séance est levée.