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OLLO - Comité permanent

Langues officielles


Délibérations du comité sénatorial permanent des
Langues officielles

Fascicule 8 - Témoignages


OTTAWA, le lundi 29 septembre, 2003

Le Comité sénatorial permanent des langues officielles se réunit aujourd'hui à 16 h 08 pour étudier le projet de loi S- 11, Loi modifiant la Loi sur les langues officielles (promotion du français et de l'anglais), et pour étudier, afin d'en faire rapport, l'application de la Loi sur les langues officielles, ainsi que des règlements et instructions en découlant, au sein des institutions assujetties à la Loi, ainsi que les rapports de la commissaire aux langues officielles, de la présidente du Conseil du Trésor et de la ministre du Patrimoine Canadien.

L'honorable Rose-Marie Losier-Cool (présidente) occupe le fauteuil.

[Français]

La présidente: Vous avez reçu l'avis de convocation pour la réunion d'aujourd'hui. Vous constaterez, à l'ordre du jour, que nous devons passer à deux études: la première partie de notre séance sera consacrée à la présentation du sénateur Gauthier ayant trait au projet de loi S-11, la Loi modifiant la Loi sur les langues officielles; la deuxième partie de notre séance sera consacrée aux représentants du Secrétariat du Conseil du Trésor. Mme Diana Monnet, secrétaire adjointe, direction des langues officielles, nous parlera de l'application de la Loi sur les langues officielles, des règlements et de toutes les associations assujetties.

Sans plus tarder, nous allons demander au sénateur Gauthier de nous présenter son rapport. Tout d'abord, je voudrais rappeler aux membres que, lorsqu'ils ont de la correspondance à faire parvenir, il est important qu'ils en envoient une copie à notre nouveau greffier, Adam Thompson, le greffier étant souvent la mémoire du comité.

Le Comité sénatorial des langues officielles est heureux d'entendre le témoignage du sénateur Gauthier dans le cadre de l'étude du projet de loi S-11. Lorsqu'il est question de la défense des droits des francophones vivant en situation minoritaire, le sénateur Gauthier n'a pas besoin de présentation car il a fait ses preuves et y a consacré toute sa carrière. Nous sommes donc privilégiés de profiter de son expertise et de tout le travail qu'il a pu effectuer.

L'honorable Jean-Robert Gauthier: Honorables sénateurs, je suis très heureux de comparaître aujourd'hui. Je crois fermement que la création d'un Comité sénatorial sur les langues officielles est importante. Il y a plus de sept ans que je propose la mise en place d'un comité autonome et habilité à étudier, et à faire rapport sur des questions touchant les langues officielles. Un comité mixte ne peut malheureusement pas étudier un projet de loi puisque les deux Chambres ont un Règlement différent qu'elles doivent respecter.

Connaissant les problèmes d'application et de mise en oeuvre de la loi, un parlementaire intéressé peut devenir impatient et quelque peu frustré devant son impuissance à proposer des changements législatifs aux lois du pays traitant de la question des langues officielles. J'ai appris il y a longtemps que le gouvernement propose et le Parlement dispose. J'ai aussi appris qu'un parlementaire doit pouvoir proposer des mesures positives de changement à certaines lois. C'est pourquoi j'ai toujours rêvé d'un comité sénatorial autonome. Nous l'avons et j'en suis très fier.

Le projet de loi S-11 s'inscrit dans la même foulée que le projet de loi S-32 que j'ai présenté en 2001. Il a été étudié par le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. J'ai assisté à toutes les réunions et j'ai fait un résumé de toutes les témoignages faits devant le comité. Il en résulte un livre assez volumineux contenant des recommandations visant à bonifier le projet de loi original, qui était le projet de loi S-32.

Les membres du comité ont été très attentifs aux délibérations et ont apporté des suggestions améliorées. J'aimerais remercier tout particulièrement la présidente, le sénateur Lorna Milne, qui a fait un travail sérieux et qui a dirigé nos délibérations.

Le comité a entendu quelque 27 témoins et a tenu huit réunions qui duraient parfois trois heures. J'ai donc profité de l'expertise d'un grand nombre de spécialistes dans le domaine des droits linguistiques, académiques, professionnels et politiques.

Les droits linguistiques, c'est à la fois compliqué et complexe. C'est compliqué parce que le Canada est une fédération très décentralisée, avec des particularités constitutionnelles à étourdir le commun des mortels. C'est également complexe parce que certaines juridictions sont réservées au gouvernement fédéral, d'autres exclusivement aux provinces.

Le Canada a deux langues officielles: le français et l'anglais. Nos deux langues ont un statut égal, des droits et privilèges égaux quand à leur usage dans les institutions du Parlement et le gouvernement du Canada. Vous comprendrez que je parlais de l'article 16 de la Loi constitutionnelle de 1982.

Le projet de loi S-11 diffère du projet de loi S-32 dans son libellé et dans sa portée. L'article 1 rappelle les obligations des institutions fédérales de veiller à ce que soient prises les mesures positives nécessaires pour assurer la mise en oeuvre de cet engagement. Le mot «positif» a été recommandé par le sénateur Bryden, qui disait qu'au Nouveau-Brunswick c'était un mot clé à la compréhension de la loi. C'est la raison pour laquelle j'ai incorporé le mot «positif» dans le libellé du projet de loi S-11.

Le sénateur Beaudoin demandait s'il ne serait pas utile de demander un renvoi à la Cour suprême pour éclaircir le statut de l'article 41. Le sénateur Fraser a suggéré un avis juridique sur le projet de loi S-32. Le comité pourrait toujours demander un avis juridique sur le projet de loi S-11, car j'aimerais savoir ce que les avocats en pensent. Le sénateur Bryden a, de plus, demandé s'il y avait lieu de présenter un recours collectif devant les tribunaux.

Aujourd'hui, cette suggestion présente certains problèmes car la Loi sur les langues officielles exclut la partie VII des recours judiciaires. En fait, l'article 77 de la loi dit que la partie VII n'est pas justiciable. Il n'est pas possible de demander ni à la commissaire aux langues officielles ni au Programme de contestation judiciaire, de déposer un recours devant les tribunaux sous la partie VII actuelle.

Par contre, il est toujours possible, selon l'article 18(1) de la Cour fédérale, de former un recours et d'inviter la commissaire aux langues officielles à participer. Il faut des goussets profonds, une patience d'ange pour réussir un tel exploit. Cela a été fait récemment au Nouveau-Brunswick lorsque les membres du Forum des maires de la péninsule acadienne se sont regroupés et sont allés en appel de la décision de l'Agence d'inspection des aliments de transférer certains postes du nord de la péninsule au sud de la péninsule.

Quatre ans plus tard, nous apprenons que le Forum des maires de la péninsule acadienne a obtenu gain de cause devant la Cour fédérale de première instance, le juge Pierre Blais ayant rendu sa décision le 8 septembre dernier.

J'avoue avoir été agréablement surpris par la décision du juge Blais. On a déjà qualifié cette agence, devant le Parlement, comme étant un «hérétique structurel». On entendait par ce terme que cette agence se compose de gens qui ont été détachés de la fonction publique conventionnelle et qui agissent indépendamment ou à distance du pouvoir politique. L'agence prétendait qu'elle n'était pas soumise à la Loi sur les langues officielles. Les maires de la péninsule ont prouvé le contraire.

Il a été établi clairement dans la décision du juge Blais de la Cour fédérale, que l'Agence canadienne d'inspection des aliments n'avait pas consulté la population lorsqu'elle a effectué le transfert des postes du nord au sud de la péninsule sans tenir compte de la vocation du bureau et des services devant être offerts au public. Ce transfert a été aboli et les employés demeureront en poste.

Un des arguments-clés de la présentation au Forum des maires est que ces gens ne pouvaient pas, non plus, dans la nouvelle position qu'ils occupaient au sud, travailler dans leur langue. On a alors prétendu que cette directive allait à l'encontre de la Loi sur les langues officielles.

J'ai soumis la question au Sénat. Dans ma déclaration du 16 septembre dernier, sur laquelle a commenté madame la ministre, je cherchais à savoir si le Parlement compte interjeter appel de cette décision de la Cour fédérale en première instance. Ma question demeure à ce jour sans réponse. Il faut bien sûr demeurer patient.

Le gouvernement a pris deux ou trois ans avant de se pencher sur la question des contraventions. Lorsque la Cour fédérale a rendu sa décision, on a demandé une extension du jugement pour une autre année.

On a tendance à prendre la question des langues officielles à la légère. Cette pratique doit cesser.

Quoi qu'il en soit, la décision a fait jurisprudence et nous ne sommes pas près de l'oublier. Cette décision se rattache à la partie VII, à l'engagement du gouvernement aux obligations des institutions fédérales de servir les Canadiens et de s'assurer que l'on rencontre l'esprit de la loi. Cette décision prouve qu'il est possible d'imposer des sanctions aux contrevenants à la Loi sur les langues officielles, même si cet article 41 peut sembler déclaratoire et non avenu aux yeux du gouvernement. Il est possible de recourir à l'article 18.1. Toutefois, ce type de recours est long et dispendieux.

Tant que le gouvernement prétendra que la partie VII est déclaratoire, les gestionnaires — ou fonctionnaires, si vous préférez — dans les institutions fédérales, continueront de penser et d'agir comme si la Loi sur les langues officielles n'était qu'une déclaration de bonnes intentions sans conséquence.

Quoi qu'il en soit, le débat est engagé. Si le projet de loi S-11 est adopté, nous disposerons d'un nouvel outil en matière des langues officielles, qui nous permettra de faire valoir nos droits.

Un des principaux arguments utilisés par certains ministres sur ma proposition est que celle-ci aura pour effet d'augmenter la judiciarisation. J'ai alors suggéré que l'on fasse une étude afin d'examiner la situation depuis l'adoption de la Charte en 1982.

Il y a 20 ans, le ministre Lucien Bouchard était Secrétaire d'État. En réponse à une question qui lui fut posée lors de son témoignage devant un comité du Sénat, il a indiqué que l'article 41 créé des obligations pour le gouvernement. Cette réponse m'a convaincu. Toutefois, peu de temps après, je me suis aperçu qu'on ne manifestait aucune volonté politique. Dès lors, depuis 1982, je n'ai cessé d'écrire aux intervenants du ministre de la Justice afin de connaître leur interprétation de l'article 41.

Lorsqu'il est fait mention que le gouvernement s'engage à faire la promotion, à développer et à promouvoir les deux langues officielles du pays, s'agit-il uniquement de bonnes intentions ou d'un engagement ferme?

La loi actuelle date de 1988. La loi précédente datait de 1969. On a décidé, dans cet intervalle, d'effectuer une revue en profondeur de la loi. À mon avis, cet exercice fut bénéfique et a permis d'éclaircir plusieurs aspects. Le projet de loi C-72 fut adopté en 1988, il y a maintenant 15 ans. Ne serait-il pas approprié d'examiner à nouveau cette loi?

Il n'est pas juste envers les communautés que l'on persiste à dire que nous avons certaines obligations envers celles- ci, alors que nous ne disposons pas des moyens de mettre ces obligations en pratique.

Au fil des ans, il m'a été permis de constater que l'exécutif, ou le Cabinet, interprétait cet engagement solennel comme étant de nature déclaratoire ou sans portée juridique. Tous les ministres de la justice ont répété le même message. Suite à de nombreuses consultations auprès de hauts fonctionnaires, de juristes, de personnes du domaine académique et universitaire, on m'a confirmé que l'article 41 était exécutoire et obligatoire.

Le libellé est clair. Nous pouvons examiner le projet de loi C-25. Ce projet de loi précise, encore une fois, «le gouvernement s'engage». On utilise toujours ce libellé.

Alors pour quelle raison, lorsqu'il s'agit des langues officielles, le gouvernement s'engage-t-il et ne tient pas parole? Je compte bien soulever cette question lors du débat sur le projet de loi C-25. S'agit-il simplement de bonnes intentions ou d'un engagement ferme? Le langage est pourtant clair: un engagement est un engagement. On retrouve cette expression également en anglais.

[Traduction]

«A commitment is a commitment»: lorsque le gouvernement s'engage à faire quelque chose, je crois que c'est très important.

Lorsque cette nouvelle loi a été adoptée en 1987-1988, Alliance Québec était le principal porte-parole de la communauté anglophone du Québec. Vous vous souviendrez que les contestations visant le gouvernement provincial étaient très nombreuses à cette époque. En outre, le commissaire aux langues officielles indiquait dans son rapport de 1988-1989 que «dans au moins 80 p. 100 des institutions fédérales, la Loi sur les langues officielles de 1988 n'a eu que peu d'effet». Il ajoutait qu'aucun projet de règlement n'avait été déposé au Parlement en 1989, année visée par son rapport, et que les lois linguistiques en Alberta et en Saskatchewan ainsi que la Loi sur l'affichage au Québec avaient suscité des réactions virulentes quoique légitimes.

Il n'existe toujours pas de règlement pour l'application de la partie VII de la Loi sur les langues officielles. Vous conviendrez avec moi qu'une loi sans règlement, c'est un non-sens. Il n'y a jamais eu de règlement pour l'application de la partie VII, et plus précisément de l'article 41. Des citoyens des Territoires du Nord-Ouest ont témoigné devant notre comité. Ils se plaignaient de l'inaction de leur gouvernement en raison de l'absence d'un règlement d'application pour la Loi territoriale sur les langues officielles. Il existe bien des directives, mais elles n'ont pas valeur de règlement. Une directive est une règle administrative interne, alors qu'un règlement tire sa force de la loi qui a été adoptée.

Avant que le gouvernement rende public son plan d'action en mars dernier, il n'existait ni directive ni règlement. Je dois dire, et c'est tout à leur honneur, que le premier ministre Chrétien et son cabinet, sous la direction du ministre Dion, ont pris envers les Canadiens un important engagement — et j'insiste sur le terme «engagement». Le nouveau modus operandi dans le contexte de la dualité linguistique canadienne passe par l'établissement d'objectifs — et ce dossier n'a plus de secret pour moi. Ces objectifs nous permettent d'évaluer les progrès réalisés par le gouvernement.

D'ici 10 ans, la moitié des diplômés du secondaire maîtriseront les deux langues officielles. C'est un objectif, mais je ne sais pas si nous l'atteindrons. Tout dépend de notre efficacité dans la mise en oeuvre du plan d'action. D'où l'importance du rôle de notre comité qui rappelle le gouvernement à l'ordre de temps à autre en lui disant que nous voulons des mesures concrètes, pas seulement des voeux pieux. Un nouveau gouvernement entrera sous peu en fonction et nul ne peut prédire ce qui s'ensuivra. Le plan d'action présenté faisait valoir certains éléments très favorables.

[Français]

J'en reviens à mon sujet. Le projet de loi S-32 s'appuyait sur l'article 16, qui parle d'égalité du français et de l'anglais. Depuis l'adoption de la Charte, en 1982, il y a eu 730 causes déposées en vertu de l'article 15, portant sur les droits à l'égalité; 30 causes en vertu de l'article 23, sur les droits en matière d'éducation; cinq causes en vertu de l'article 16, que je viens de mentionner.

On me dit que nous allons abuser du système, que cela va augmenter la judiciarisation; l'histoire ne le démontre pas, bien au contraire. Cinq causes en 20 ans. Chacune des causes a été initiée par les communautés minoritaires de langue officielle et elles ont été gagnées. Il doit y avoir là une leçon, il me semble. On ne peut pas parler d'une trop grande judiciarisation. Je n'aime pas ce terme, c'est un néologisme.

Le sénateur Beaudoin: C'est un très beau mot en droit.

Le sénateur Gauthier: C'est le mot que l'on utilisait comme un coup de massue.

J'ai fait mes recherches sur la question et je l'ai rendu public, le 3 avril dernier, lors d'un débat au Sénat à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi S-11. Dans l'article 1, les paragraphes 2 et 3 sont des propositions faites par la commissaire aux langues officielles lors du débat sur le projet de loi S-32.

J'écoute lorsqu'un haut fonctionnaire du Parlement, — ce que les anglophones appellent «officer of Parlement», il y en a cinq et vous les connaissez — fait des recommandations au Parlement. Je suis attentif parce qu'ils sont des spécialistes. Des ces cinq hauts fonctionnaires, un s'occupe des droits de la personne, l'autre d'Élection Canada, l'autre des livres.

Lorsque Mme Fraser vient au Parlement et qu'elle dépose des rapports comptables, elle parle fort et on l'écoute. Pourquoi n'écoute-t-on pas Mme Adams, la commissaire aux langues officielles, lorsqu'elle vient nous parler? Moi, je l'écoute.

J'ai inclus les paragraphes 2 et 3 à l'article 1. J'ai tout simplement repris son libellé. Il faut savoir que cette question est importante. Dans le libellé de mon projet de loi S-11, j'ai exclu le Sénat, la Chambre des communes et la Bibliothèque du Parlement. Le paragraphe 3 nous dit que:

Le gouverneur en conseil peut, par règlement visant les institutions fédérales autres que le Sénat, la Chambre des communes et la bibliothèque du Parlement, fixer les modalités d'exécution [...]

Je me suis dis: «On va me faire ramer là-dessus.» Vous vous souvenez, en 1988, j'étais un de ceux qui poussaient le plus fort possible pour obtenir justement que l'on inclue dans la définition des institutions fédérales, le Sénat, la Chambre des communes et la Bibliothèque du Parlement.

Le gouvernement conservateur du temps a accepté de donner une définition à l'article 3 de la Loi sur les langues officielles, qui inclut le Parlement. C'est correct. Vous vous demandez sûrement comment je fais pour exclure le Parlement. Je crois dans la division des pouvoirs. Je crois que l'exécutif ne peut pas donner d'ordre au Parlement. Si vous lisez le libellé:

[...] fixer les modalités d'exécution des obligations que la présente partie leur impose.

Je ne voudrais pas que le gouvernement commence à dire au Parlement comment faire son travail. Je les exclus à la question des obligations et nous les rencontrons tous aujourd'hui soit au Sénat, à la Chambre des communes ou à la Bibliothèque du Parlement. On s'assure de respecter les deux langues officielles.

Cela force les privilèges parlementaires, un concept assez bien développé, dans la cause de M. Vaid, le chauffeur du Président de la Chambre des communes, qui poursuit son Président pour avoir été congédié, d'après lui, sans raison. Il y a aussi l'arrêt Quigley. On utilise le privilège parlementaire pour dire que le Parlement n'est pas tenu d'écouter ses propres lois. Je parle des règlements. D'après moi, les arrêts Vaid et Quigley, sont une autre histoire. Mais le privilège parlementaire est utilisé pour justifier une position. Il y a aussi une distinction qu'il faut faire.

Le Sénat, la Chambre nommée, doit représenter les régions et les minorités de ce pays. La Chambre des communes est la Chambre élue pour représenter démocratiquement les intérêts de la majorité, pas de la minorité, mais de la majorité. C'est toujours la majorité qui mène à la Chambre des communes mais pas nécessairement au Sénat. Je suis content de voir qu'enfin le Sénat s'occupe des minorités.

Nous avons un comité sur les langues officielles et sur les droits de la personne. Nous devons être capables d'encourager ces comités à développer une expertise dans le domaine des droits de la personne et celui des langues officielles.

À l'article 2, qui est plus spécifique et qui remplace le paragraphe 43. (1) j'ajoute trois mots: «nécessaires pour assurer.. » Vous voyez, ils sont soulignés dans le texte. Il cite:

43. (1) Le ministre du Patrimoine canadien prend les mesures nécessaires pour assurer la progression vers l'égalité[...]

C'est une recommandation des avocats parce que c'était plus simple à comprendre, alors je l'ai insérée. La présentation des juristes et des conseillers juridiques du ministère de la Justice était intéressante. Ils ont été clairs, constants et d'une grande fidélité. Me Warren Norman et Me Marc Tremblay ne sont pas des inconnus. Ils ont une grande expertise dans le domaine linguistique. Ils ont affirmé devant le comité des Affaires législatives et constitutionnelles, que la partie VII renfermait des engagements de la part du gouvernement.

Selon eux, le libellé de la partie VII ne serait pas de nature réglementaire, mais plutôt programmatoire. Je n'ai pas compris ce que voulait dire «programmatoire». C'est un néologisme, d'après moi. Cela veut dire que dans les questions de programmes, on s'assure de répondre aux besoins.

La partie VII est une manifestation du principe de progression vers l'égalité du statut des deux langues officielles par voie législative. C'est clair. Le principe, au paragraphe 16 (1) de la Charte, offre une interprétation très importante qui crée des seuils et des minimums aux droits linguistiques et non des plafonds. Je vais m'expliquer.

D'abord, mon commentaire sur les déclarations ou les témoignages des avocats de Justice Canada se résume ainsi: leur présentation était fondée, correcte, technique et défendable. Mais — et je souligne le mot «mais» — ils ne tenaient pas compte des jugements récents de la Cour suprême et d'autres tribunaux en matière de droit des minorités. Tous s'entendent pour dire que la Loi sur les langues officielles est quasi constitutionnelle. Mais les juristes n'ont jamais parlé de la décision de la Cour suprême dans le Renvoi sur la sécession du Québec, soit les quatre principes non écrits. Ils n'en parlent jamais. Pourtant, ces principes existent.

La question de l'hôpital Montfort est une réalité. Là aussi, on avait un droit minimum à des services en santé dans un hôpital. On a voulu les enlever en Ontario. Les tribunaux ont dit, non: il y a un plancher auquel vous ne pouvez pas soutirer d'autres droits. Cela me paraît assez clair.

La Cour suprême du Canada a énoncé les quatre principes, que vous connaissez, pour l'interprétation des droits linguistiques. L'interprétation de la partie VII doit s'insérer, d'après moi, dans une dynamique évolutive qui trouve son aboutissement dans les principes reconnus dans le Renvoi relatif à la sécession du Québec, et dans le jugement de la Cour divisionnaire, de la Cour d'appel de l'Ontario, reconnus dans Montfort.

Bref, il n'existe pas de modèle statistique pour évaluer l'engagement du gouvernement. Il semble exister un minimum en deça duquel il ne peut aller. La fermeture de l'hôpital Montfort et la décision de la Cour fédérale en sont des exemples. Le juge Blais, récemment, dans l'affaire du Forum des maires de la péninsule acadienne, a dit que, non, on ne pouvait pas faire cela. On devait laisser les postes en place pour servir la population afin qu'elle puisse travailler dans leur langue et recevoir les services dans leur langue: on ne pouvait pas tous les déménager dans le sud, ou il n'y aura plus de service en français dans le nord.

Ces communautés sont importantes. Je crois que cela va créer une jurisprudence. Mon instinct me dit qu'ils vont certainement continuer dans d'autres régions du pays à faire valoir ces droits. Il faudrait peut-être que nos conseillers juridiques, au ministère de la Justice, se mettent à la page et tiennent compte de l'évolution des droits linguistiques. Il faut arrêter ces interprétations minimalistes. C'est toujours au plus bas qu'on va. On dit toujours que ce ne sont pas des obligations justiciables. S'il faut le faire, on le fera. Cela devient épuisant!

Finalement, l'article 3 de mon projet de loi S-11, donne suite à une recommandation du sénateur Joyal, appuyé par plusieurs de mes collègues sénateurs et par plusieurs témoins. Cette question traite du recours en justice et l'importance d'assurer un recours judiciaire à la partie VII ainsi que d'assurer surtout un appui et un encouragement aux communautés en leur offrant l'aide du programme de contestation judiciaire, administré de Winnipeg. Actuellement, ce programme ne peut pas servir pour défendre nos droits sur la partie VII de la loi.

On ne peux pas s'adresser au tribunal pour une interprétation de l'article 41. L'article 41 n'a jamais été interprété par la cour. Ce n'est pas prévu dans la loi, à l'article 77. Si on met des dents dans la loi, si on adopte le projet de loi S-11, on mettra en place un système qui permettra une plus grande démocratisation des droits, une capacité pour l'individu de s'appuyer sur la majorité, avec ces fonds, pour défendre ses droits devant un tribunal. C'est fondamental en toute démocratie.

J'ai choisi la voie législative en présentant le projet de loi S-11. Je connais bien les difficultés. Je connais surtout la lenteur du processus. Ce projet de loi a été déposé en Chambre en décembre 2002. On est rendu le 29 septembre et on commence à étudier le projet de loi en comité. Ce n'est pas vite! Les gens se demandent ce qui arrive. Il y a beaucoup de travail à faire.

La destinée de ce projet de loi, je ne la connais pas, elle est inconnue. Qu'est-ce qui va arriver? Je ne le sais pas. Tout ce que je sais, c'est que les dossiers sont compliqués. Les langues officielles, ce n'est pas des niaiseries. Ce n'est pas quelque chose qui peut être mis de côté facilement. C'est compliqué et très complexe.

Une question compliquée et complexe, c'est quoi? C'est un tas de roches. C'est compliqué. Si vous prenez les mêmes roches et que vous faites une église ou un édifice, les roches deviennent complexes parce qu'elles font partie d'un ensemble organisé. Les langues officielles, c'est cela. Quand elles seront encadrées, cela fonctionnera. On aura un meilleur Canada.

La présidente: Je vous remercie, sénateur Gauthier. Lorsque je vous écoutais parler de la Loi sur les langues officielles, je me disais que vous connaissiez mieux ce dossier, ou du moins aussi bien que l'on connaissait les réponses dans le petit catéchisme quand on allait à l'école. Vous connaissez très bien le dossier sur les langues officielles.

Le sénateur Beaudoin: Vous savez que je partage l'opinion de mon collègue, le sénateur Gauthier. Cependant, il y a deux ou trois points qui, pour les fins du dossier, méritent quelques corrections.

J'ignore qui a dit que l'on ne pouvait pas s'adresser à la cour pour savoir si l'article 41 et les autres sont exécutoires ou déclaratoires. Qui a dit qu'on ne pouvait pas soulever cela en cour? Cela n'a aucun sens. On peut toujours soulever devant une cour de justice, la question de savoir si un article est exécutoire ou déclaratoire. On peut toujours, dans notre système constitutionnel, soulever l'inconstitutionnalité d'une loi. La Cour suprême va nous dire si nous avons raison ou tort.

Mais personne, pas un parlement, pas une législature, pas une loi ne peut empêcher quelqu'un de soulever l'inconstitutionnalité d'une loi. Et je me rappelle très bien, il y a quelques années, il y avait un projet de loi qui bloquait l'accès aux tribunaux et il a été défait, évidemment, au Sénat. Je ne sais pas qui a dit cela.

Je préfère ne pas connaître cette personne, mais cela n'a pas de bon sens. On peut toujours soulever une question. On peut toujours contester une loi. Et quand bien même on dirait dans une loi que vous n'avez pas le droit de contester la partie VII, cela ne vaudrait rien. Je le mentionne aux fins du dossier et je veux absolument qu'on l'inscrive au dossier.

Deuxièmement, qui a dit qu'il fallait des règlements à la partie VII pour avoir à recourir aux tribunaux à cet effet? La réponse est très facile. La partie VII est-elle exécutoire ou non? Qu'il y ait des règlements ou non, cela ne change rien. Cela peut aider d'avoir des règlements. Je pense que la partie VII est exécutoire.

On peut toujours demander aux tribunaux si cette partie est impérative ou déclaratoire. On peut toujours soulever devant les tribunaux la constitutionnalité d'une loi. Aucun parlement, aucune législature ne peut dire dans une loi que vous n'avez pas le droit de vous adresser aux tribunaux parce que cela fait partie de notre système constitutionnel. Nous avons le contrôle, au Canada, de la constitutionnalité des lois. Il faut que ce soit très clair. N'importe qui peut dire n'importe quoi, cela arrive, hélas! mais ce point est établi avec certitude.

Concernant les règlements de la partie VII, cela fait plusieurs fois que mon cher collègue l'évoque. Si on a des règlements, on peut dire qu'ils sont exécutoires ou non, mais si on n'a pas de règlement, on ne peut pas recourir aux tribunaux. Cela n'a pas de bon sens, on peut toujours plaider devant tribunaux. Il y a des lois qui n'ont pas de règlement et il y a des lois qui ont des règlements. C'est très clair.

En ce qui concerne la jurisprudence ou la judiciarisation, pourquoi est-ce que les gens disent que cela coûte de l'argent? C'est bien étrange car ce n'est pas vrai. Les honoraires d'avocats peuvent être élevés dans certains cas, les honoraires d'opération des plus grands médecins du Canada peuvent être importants aussi, mais si vous sauvez une vie, si une loi est validée ou non, cela vaut bien quelques honoraires.

Mais de plus, on a eu 120 arrêts au Conseil privé sur le partage des pouvoirs. On a eu 450 arrêts de la Cour suprême du Canada sur la Charte canadienne des droits et libertés. Est-ce que cela a coûté de l'argent? Oui. Mais la jurisprudence constitutionnelle de la Fédération canadienne se fait et nous avons ainsi au Canada une grande démocratie. Cela vaut bien quelques factures d'avocats.

Je n'arrive pas à comprendre pourquoi on soulève de tels arguments. Ce n'est pas le sénateur Gauthier qui les soulève, au contraire. Les quatre ou cinq principes du renvoi sur la sécession du Québec sont là. Vous avez parfaitement raison. C'est le fédéralisme, c'est le constitutionalisme, ce sont les droits des minorités et c'est la règle de droit; c'est notre pays et nous sommes un des plus grand pays démocratiques au monde.

Enfin, le juge Blais vient de dire, dans l'affaire du Forum des maires de la péninsule acadienne que les articles 41 et suivants sont impératifs, à moins que la Cour suprême ne dise le contraire; une excellente décision, à mon avis!

Alors, vous allez me dire: pourquoi est-ce qu'on a tant de misère à adopter le bilinguisme au pays? C'est malheureux, que voulez-vous? Des gens ne sont pas intéressés au bilinguisme et trouvent des arguments. Des gens sont intéressés au bilinguisme et le défendent.

Deux choses sont bien importantes dans notre pays. Nous sommes au Parlement pour légiférer, pour décider si les lois relèvent du gouvernement fédéral ou provincial. Si nous ne sommes pas d'accord, la Cour suprême décidera si c'est fédéral ou provincial.

Deuxièmement, nous légiférons et les lois doivent respecter la Charte canadienne des droits et libertés. La Cour suprême décide de ce respect ou non de la Charte.

C'est un des plus beau système au monde. Je n'en connais pas de plus beau. Ce que dit X, Y ou Z vaut ce que cela vaut, mais si la Cour suprême se prononce, c'est le tribunal suprême. En médecine, si je souffre de quelque chose, je ne demanderai pas à mon voisin ce qu'il en pense. J'irai voir des médecins, comme le sénateur Keon, des experts. Il n'y a pas d'autre système. C'est l'un ou c'est l'autre.

Je voulais inscrire ces remarques au dossier. On a toujours des débats qui reviennent sans arrêt, des arguments qui nous sont apportés mais qui sont faux. Quand c'est discutable, j'écoute les deux parties; quand ce n'est pas le cas et que la cour s'est prononcée... C'est notre système juridique. Il n'y en a pas d'autres. Si vous en trouvez un meilleur, apportez-le, vous allez devenir millionnaire en deux jours, mais il n'y en a pas d'autres.

Le sénateur Gauthier: L'expertise en droit du sénateur Beaudoin est plus grande que la mienne. Vous dites que toutes les lois sont susceptibles d'être portées devant les tribunaux par voie de recours ou d'interprétation. Je suis entièrement d'accord. Le problème n'est pas là mais dans la Loi sur les langues officielles à l'article 77. Si vous n'êtes pas riche et que vous ne pouvez pas vous payer les services d'une firme d'avocats, vous devez aller au commissariat des langues officielles et faire valoir votre cause. Si votre argument est couvert par la partie IV, V ou VI de la Loi sur les langues officielles, vous aurez l'appui du commissariat aux langues officielles. Toutefois, s'il est question de la partie VII de la loi, la commissaire ne peut recourir aux tribunaux. Elle ne peut pas utiliser les fonds publics pour vous aider.

Le sénateur Beaudoin: Si la commissaire ne peut pas, l'aide juridique peut et l'aide juridique existe dans toutes les provinces.

Le sénateur Gauthier: Ce n'est pas qu'elle ne veut pas, elle ne peut pas. Vous ne pouvez même pas recourir au programme de contestation judiciaire.

Le sénateur Beaudoin: Cela ne m'empêche pas de cogner à la porte de l'aide juridique si je suis pauvre et de contester.

Le sénateur Gauthier: Vous êtes un Acadien sur la péninsule et vous perdez votre emploi; où irez-vous faire valoir vos droits?

Le sénateur Beaudoin: Il y a des bureaux d'aide juridique dans toutes les provinces.

Le sénateur Chaput: Les fonds ont été réduits depuis plusieurs années et c'est presque impossible de recourir à l'aide juridique.

Le sénateur Beaudoin: Il faut investir des fonds dans l'aide juridique. On ne peut pas interdire l'accès aux tribunaux aux gens. Cela coûte de l'argent, oui, allons à l'aide juridique. S'il n'y en a pas, que les législateurs changent les lois, investissent dans l'aide juridique pour aider les gens qui n'ont pas les moyens. Personne n'a le droit de dire: «Vous ne pourrez pas aller en cour.»

Le sénateur Gauthier: Il faut avoir des goussets profonds et être patient comme un ange pour convaincre un tribunal d'un droit existant. Comment s'applique les règlements d'application de la partie VII de la Loi sur les langues officielles? On ne le sait pas. On sait seulement qu'un rapport important a été déposé par le ministre Dion, en mars dernier. Selon vous, le ministre Dion sera-t-il sujet à un recours judiciaire s'il manque à sa parole ou aux objectifs indiqués dans son rapport?

Le sénateur Beaudoin: Non, c'est un rapport politique.

Le sénateur Corbin: Je suis un peu mystifié par la position du sénateur Gauthier. Il est parrain du projet de loi, mais est-il membre du jury ou avocat de sa cause? Il pose des questions au sénateur Beaudoin. Va-t-on faire la part des choses? Demeurera-t-il témoin ou pourra-t-il jouir de ses prérogatives de membre du comité? J'aimerais que vous clarifiez la situation.

Le projet de loi, tel que libellé à l'article 2, modifiant l'alinéa 43. (1) se lit actuellement:

43. (1) Le ministre du Patrimoine canadien prend les mesures nécessaires pour assurer la progression vers l'égalité du statut et d'usage du français [...]

Je mets l'emphase sur la «progression». Est-ce ce que vous voulez? La progression est encore une mesure de temporisation, alors que vous nous avez dit que vous cherchiez à assurer immédiatement l'égalité. N'est-il pas un peu contradictoire que de retenir ce mot «progression» dans votre projet de loi? Si ce n'est pas le cas, pourquoi l'avoir retenu? Depuis 34 ans, nous progressons et nous n'avançons pas toujours rapidement.

La présidente: Vous pouvez répondre à la question en tant que témoin et parrain du projet de loi pour clarification.

Le sénateur Gauthier: En tant que parrain de ce projet de loi, je joue mon rôle de sénateur qui s'occupe des régions et des minorités.

Le sénateur Corbin: Ce n'est pas la question.

Le sénateur Gauthier: Je suis membre d'autres comités également où on s'occupe de finance, de gestion, de règlements, et cetera. Je n'ai aucun conflit et aucune difficulté à présenter un projet de loi qui bonifie une loi existante. C'est mon travail et mon rôle en tant que législateur. Je viens simplement demander l'appui de mes pairs afin d'amender un projet de loi important pour moi.

En ce qui concerne le libellé de l'article 2, modifiant 43. (1), assurer la progression vers l'égalité est un objectif que nous avons depuis plusieurs années. Nous voulons convaincre les autorités gouvernementales que nous avons des besoins et que nous avons des problèmes dans nos communautés. On nous dit: «Patience, on va y aller tranquillement».

Au début de mon intervention, j'ai dit que nous étions une fédération décentralisée. En éducation, on a eu de sérieux problèmes qui ont graduellement progressé. Récemment dans une cause en Nouvelle-Écosse sur la question des écoles, un juge a rendu une décision disant: «Oui, ils ont le nombre et leur demande est justifiée.» Le juge a demandé un compte-rendu sur la façon de mettre en oeuvre l'ordonnance en question. On a répondu que cela était progressif. Le juge a dit qu'il se réservait le droit d'examiner ces progrès. Cette cause est en appel. Le gouvernement dit que ce n'est pas au juge de surveiller le progrès que fait ou fera la minorité francophone en Nouvelle-Écosse. Je n'ai pas la réponse, je ne suis pas avocat.

Je sais que la santé et l'éducation ne sont pas de juridiction fédérale, je le reconnais. Mais je suis un citoyen du Canada. J'ai le droit, je me suis impliqué depuis 40 ans, de faire valoir mes idées et de défendre mes opinions. Quand je dis que Patrimoine canadien prendra les mesures nécessaires pour assurer la progression, cela veut dire qu'il mettra les mesures nécessaires, financières ou autres, la volonté politique et cela améliorera le sort des minorités.

Le sénateur Corbin: Je suis d'accord.

Le sénateur Beaudoin: C'est l'article 16 de la Constitution.

La Constitution est encore plus importante que la Loi sur les langues officielles. Elle est plus importante qu'un rapport de ministre. C'est la base. Lisez-moi le paragraphe 2 ou 3 de l'article 16.

Le sénateur Corbin: Je vais y revenir parce que le texte anglais de l'article 1 parle aussi de «of the effect of advancement and implementation».

On ne retrouve pas cette idée dans le texte. Il s'agit de termes délibératifs. Je crois qu'il faudrait se pencher davantage là-dessus.

Je ne parle pas du rôle personnel du sénateur Gauthier dans ce comité. Il est parrain et témoin de ce projet de loi. Sur le plan procédural, il y a des choses à éclaircir. On ne peut pas être à la fois juge, membre du jury et avocat. Il faut distinguer le rôle du comité et le rôle de son parrain. Autrement, on va se retrouver dans un imbroglio. Ce n'est pas une attaque personnelle du sénateur Gauthier.

Le sénateur Gauthier n'est pas le seul à défendre le droit des minoritaires au Canada. Il ne faut pas se faire d'illusion. La mise sur pied d'un comité sur les langues officielles a été prévu par le Sénat bien avant l'arrivée du sénateur Gauthier. Il ne faut quand même pas charrier.

Le sénateur Comeau: Je voudrais retourner à la question posée par le sénateur Corbin sur l'article 43. Je suis insatisfait et inconfortable de la réponse que vous avez donnée, sénateur Gauthier, quant aux mesures nécessaires pour assurer la progression vers l'égalité.

Je crois qu'il serait préférable de dire «prendre les mesures nécessaires pour assurer l'égalité plutôt que la progression» Il me semble que nous soyons en train de dire qu'on va y aller un pas à la fois.

Le sénateur Gauthier: C'est étapiste. Des témoins sont venus témoigner au Comité des affaires juridiques et constitutionnelles et ont suggéré ce libellé. Je l'ai accepté parce qu'il est plus complet.

Le sénateur Comeau: D'autres témoins pourront nous faire comprendre le bien-fondé de cet argument.

Y a-t-il eu des essais ou des tentatives pour voir si l'article 41 de la partie VII serait obligatoire ou déclaratoire?

Le sénateur Gauthier: Il n'y a jamais eu de décision d'aucun tribunal là-dessus, excepté récemment, au Nouveau- Brunswick; le juge Blais de la Cour fédérale a dit que l'Agence canadienne d'inspection des aliments ne peut pas abolir ou transférer des postes. Par le fait même, ils ont réduit le service au public et empêché les gens de travailler dans leur langue.

Je ne questionne pas la décision du tribunal. Je ne sais pas non plus si le gouvernement porter cette décision en appel. J'ai posé la question en Chambre et la ministre ne m'a pas répondu.

J'aimerais aussi répondre au sénateur Corbin.

La présidente: Avez-vous terminé, sénateur Comeau?

Le sénateur Comeau: Oui, j'avais une ou deux questions seulement.

Le sénateur Gauthier: Le sénateur Corbin dit que je charrie, mais je ne charrie pas. Il n'y avait pas de Comité sénatorial permanent des langues officielles au Sénat à l'époque. Il y en a un maintenant. Le Sénat était membre d'un comité mixte, mais seulement depuis 1985 ou 1986. Le sénateur Corbin a été président de ce comité au début.

Le Sénat s'occupe des langues officielles actuellement parce qu'il a un comité autonome. C'est correct. Je n'ai jamais dit que c'était moi qui avais pris cette décision. C'est le Sénat qui a pris la décision. Mes collègues ont approuvé mon initiative comme ils approuvent celles de bien d'autres sénateurs. Ce n'est pas charrier de promouvoir ce que l'on croit. Le Sénat a l'obligation de s'occuper des minorités linguistiques impliquées.

Le sénateur Chaput: J'ai un commentaire à l'égard de l'article 43.1, soit la nouvelle version du projet de loi avec l'amendement du sénateur Gauthier versus celle d'auparavant. La loi utilise les termes «pour favoriser la progression». Selon moi, ce terme est faible. Maintenant on utilise le terme «pour assurer». Le verbe «assurer» est plus fort que le verbe «favoriser».

[Traduction]

Le sénateur Keon: À mon sens, le nouveau paragraphe 77(1) proposé ne fait que donner suite à votre troisième objectif: offrir un recours devant les tribunaux en cas de manquement à la partie VII de la Loi sur les langues officielles. Je ne vois pas comment ce changement pourrait poser problème.

Peut-être que quelque chose m'échappe, mais je ne vois quelles difficultés cela pourrait causer. Cela permet simplement de clarifier la situation, n'est-ce pas?

Le sénateur Gauthier: Merci de votre appui; c'est exactement ce dont j'ai besoin. Le libellé actuel du paragraphe 77(1) exclut le commissaire aux langues officielles et ne permet pas de profiter de l'aide financière prévue pour le programme de contestation judiciaire. Nous ne pouvons pas utiliser les fonds publics prévus dans le cadre de ce programme pour former un recours judiciaire conformément au paragraphe 74(1) notamment.

Ma proposition fait suite aux délibérations tenues par le comité au sujet du projet de loi S-32 et aux argumentations du sénateur Joyal, plus particulièrement, auxquelles adhéraient plusieurs professeurs de l'Université d'Ottawa. Quelques universitaires de Toronto ont également soutenu que nous devrions apporter ce changement au paragraphe 77(1) pour permettre au commissaire aux langues officielles d'intenter des poursuites judiciaires lorsque la loi n'est pas respectée et pour accorder aux Canadiens souhaitant défendre leur cause devant les tribunaux le droit d'utiliser des fonds publics dans le cadre du programme de contestation judiciaire.

Le sénateur Keon: Je ne vois vraiment pas comment un tel changement pourrait mener à des abus. Il ne vise qu'à clarifier la loi et à faciliter l'accès aux tribunaux, n'est-ce pas?

Le sénateur Gauthier: C'est exact. Je crois également que les résultats passés ne justifient pas un recours accru aux procédures judiciaires. Il y a eu plus de 700 causes visant les droits à l'égalité prévus à l'article 15 — discrimination fondée sur le sexe ou autres. On a dénombré, je crois, 730 affaires du genre au cours des 20 dernières années. Une trentaine de causes concernaient l'application de l'article 23 sur la langue d'instruction dans plusieurs provinces. Malheureusement, nous avons dû poursuivre ces provinces pour qu'un régime bilingue y soit établi et mis en application. L'Alberta a été la première province visée par ces poursuites.

Dans le domaine de la santé, le cas de l'hôpital Montfort est l'exemple typique d'une minorité qui se voit retirer ses droits. Les défenseurs de la cause ont dit: «Non, vous ne pouvez pas faire ça. Il y a une limite que vous ne pouvez pas franchir.» C'est légitime. La majorité s'occupe de ses affaires. La minorité doit parfois s'en remettre aux tribunaux pour parvenir à obtenir justice.

[Français]

Le sénateur Léger: Comment se fait-il que ce soit le Comité sénatorial permanent des langues officielles qui étudie ces questions? À la lumière des discussions ce soir, il s'agit d'un vocabulaire juridique. Le comité des Affaires juridiques et constitutionnelles ne devrait-il pas se pencher sur ce projet de loi?

La présidente: Le sénateur Gauthier a déjà présenté le projet de loi S-32 au comité des Affaires juridiques et constitutionnelles qui l'a étudié. Ils ont entendu des témoins, il y a eu dissolution de la Chambre. Le projet de loi est mort au Feuilleton. Le sénateur Gauthier a recommencé en Chambre avec le projet de loi S-11. C'est ce même projet de loi qui a été renvoyé au comité sur les Langues officielles.

Le sénateur Gauthier: En 2001, le comité sénatorial permanent des Langues officielles n'existait pas. Il y avait un comité mixte et je ne pouvais pas y présenter un projet de loi. Ce comité n'avait pas les pouvoirs requis. Pour ce faire, les deux Chambres doivent coordonner leurs actions pour que ce projet de loi soit adopté en deuxième lecture simultanément pour que l'on puisse le renvoyer à un comité mixte. On ne peut pas arriver avec un projet de loi qui a été adopté en deuxième lecture au Sénat quand la Chambre des communes n'a pas posé le même geste sur la question.

Le sénateur Léger: J'entends aujourd'hui une question de vocabulaire.

La présidente: Plus que cela.

Le sénateur Beaudoin: J'ai la réponse. L'article 16(3) est la Constitution du Canada. Ce n'est pas une loi, c'est plus qu'une loi. La présente Charte ne limite pas le pouvoir du Parlement et des dix législatures de favoriser la progression vers l'égalité de statut ou d'usage du français et de l'anglais. Selon moi, cela règle le problème. Quand il dit qu'il veut aller dans le sens de la progression de l'égalité des deux langues, l'article 16(3) le dit. Cela me suffit.

Vous avez raison, sénateur Corbin, cela prend du temps. En droit constitutionnel parfois cela prend du temps. L'égalité des femmes et des hommes est survenu 100 ans après la Confédération. C'est épouvantable! Donner le droit de vote aux Amérindiens a pris presque 100 ans et abolir l'esclavage, 1 900 ans.

La présidente: Le sénateur Léger se posait la question pourquoi on en débattait à notre comité.

Le sénateur Beaudoin: Cela ne peut pas toujours être au comité des Affaires juridiques et constitutionnelles.

La présidente: Lorsque nous avons formé le comité sénatorial permanent des Langues officielles en 2001, notre mandat était d'étudier des projets de loi.

Le sénateur Gauthier: Le comité des Affaires juridiques et constitutionnelles a tenu huit réunions et a rencontré plus de 27 témoins. Il a fait son travail sérieusement. On a ajourné la session parlementaire et on a repris à l'automne suivant. Alors le travail du comité a été effacé comme s'il n'avait jamais existé. Je suis revenu avec le projet de loi S-11 bonifié.

Le sénateur Beaudoin: On a parlé de l'article 16.(3). Je ne l'ai pas inventé.

La présidente: Ceci termine la première partie de notre étude du projet de loi. Demain, le sous-comité du programme et de la procédure va se rencontrer pour écouter les différents témoins des ministères ou autres organismes. Nous demanderons au parrain du projet de loi de nous suggérer des témoins.

Le sénateur Corbin: En même temps, pourriez-vous clarifier la situation en ce qui concerne le statut de parrain et de témoin?

La présidente: Oui, je l'ai mis dans mes notes. Il est certain que c'est plus facile lorsqu'un projet de loi nous vient de la Chambre des communes et que le ministre est parrain du projet de loi. Je crois que certains sénateurs ont présenté des projets de loi et ont été témoins lors de l'étude de ce projet de loi.

La séance est suspendue.

La séance reprend.

La présidente: Il nous fait maintenant plaisir d'accueillir Mme Diana Monnet, secrétaire adjointe à la Direction des langues officielles. Madame Monnet est accompagnée de M. Gérald Groulx, agent de programme à la Direction des langues officielles et de Mme Andrée Perrier, avocate conseil.

Madame Monnet a une présentation. Elle nous parlera des règlements et de la façon dont ces règlements doivent s'appliquer. Par la suite, nous passerons à la période de questions.

Mme Diana Monnet, Secrétaire adjointe, Direction des langues officielles, Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada: Madame la présidente, il me fait plaisir de vous parler du projet de révision de l'application du règlement sur les langues officielles en ce qui a trait à la communication avec le public et à la prestation des services.

[Traduction]

Ce que nous visons aujourd'hui, c'est de vous expliquer le processus de l'exercice de révision de l'application du règlement, en fonction des données du recensement de 2001; de recevoir vos commentaires et de mieux comprendre vos préoccupations. Comme le désire Mme Robillard, cet exercice se déroule en toute transparence, et les communautés de langue officielle en situation minoritaire sont consultées tout au long de l'exercice. Je reviendrai d'ailleurs sur ce sujet au cours de ma présentation.

[Français]

D'ores et déjà, il convient de préciser que les bureaux ayant des obligations automatiques ne verront aucun changement à ces obligations en matière de service au public. Ces obligations ne sont pas tributaires des règles démographiques. Les données du recensement n'affecteront pas non plus les bureaux fédéraux.

[Traduction]

Avant de vous expliquer plus en détail l'exercice en cours, j'aimerais vous donner plus de renseignements sur la raison d'être du règlement sur les langues officielles et sur son application.

[Français]

Comme vous le savez, la Loi sur les langues officielles adoptée en 1988 reflète l'article 20 de la Charte canadienne des droits et libertés. Cet article définit la prestation des services dans les deux langues officielles selon trois concepts clés, à savoir: le siège ou l'administration centrale, la demande importante et la vocation du bureau.

De façon plus précise, l'article 22 de la Loi sur les langues officielles dit qu'il incombe aux institutions fédérales de veiller à ce que le public puisse communiquer avec l'administration centrale et en recevoir les services dans l'une ou l'autre des langues officielles. Cette obligation vaut également pour les bureaux fédéraux situés dans la région de la capitale nationale et pour ceux situés là où, au Canada comme à l'étranger, l'emploi de cette langue fait l'objet d'une demande importante.

La Loi sur les langues officielles précise que pour établir les circonstances où il y a demande importante, le gouvernement peut tenir compte des éléments suivants: l'importance de la population de la minorité de la région desservie, la spécificité de cette minorité et sa proportion par rapport à la population totale, le volume des communications et des services assurés par un bureau dans l'une ou l'autre langue et tout autre critère jugé approprié.

[Traduction]

La loi précise aussi que pour définir la vocation d'un bureau, le gouverneur en conseil tiendra compte de critères comme la santé et la sécurité du public, l'emplacement du bureau et le caractère national ou international de sa mission.

[Français]

Le règlement d'application parachève certaines dispositions clés de la Loi sur les langues officielles de 1988 en ce sens qu'il apporte des précisions sur certaines dispositions de la loi, notamment celles qui touchent les bureaux fédéraux faisant l'objet d'une demande importante dans les deux langues et les bureaux dont la vocation justifie les services dans les deux langues.

Le règlement vient donc préciser les circonstances dans lesquelles les personnes ont des droits et les institutions fédérales ont des obligations. Il permet de protéger le droit des membres des communautés de langues officielles en situation minoritaire, de recevoir des services fédéraux dans la langue officielle de leur choix.

En fait, l'approche adoptée dans le cadre du règlement permet de veiller à ce qu'une très forte majorité des Canadiens et des Canadiennes puisse recevoir des services dans les institutions fédérales dans la langue officielle de leur choix. C'est donc dire que le Règlement est un important complément de la Loi sur les langues officielles et qu'il constitue une expression concrète de l'engagement du gouvernement à appuyer le développement des communautés de langues officielles en situation minoritaire conformément à la partie VII de la loi.

[Traduction]

Pour ce qui est de l'application du règlement, j'aimerais insister sur le fait qu'il s'applique uniformément à toutes les institutions fédérales assujetties à la Loi sur les langues officielles. Bien sûr, comme cette loi impose déjà aux bureaux fédéraux situés dans la région de la capitale nationale et aux administrations centrales des institutions fédérales l'obligation de servir le public dans les deux langues officielles, le règlement ne s'applique pas à ceux-ci. Ces entités ont des obligations qui découlent directement de la loi. On vous a remis un CD-ROM qui explique les principes et les conditions ayant trait à l'application du règlement.

[Français]

On vous a aussi donné deux tableaux. Un premier constituant un tableau synoptique des obligations des services au public en matière de langues officielles et un deuxième qui propose une série de questions auxquelles doivent répondre les administrateurs généraux afin de déterminer leurs obligations en matière de services au public.

Nous avons fait ces tableaux dans le but de simplifier et de clarifier un Règlement qui, en soi, est très compliqué, complexe. Ce guide aidera les institutions à mieux comprendre leurs obligations.

Dans ces tableaux, la couleur orange correspond aux obligations découlant directement de la Loi sur les langues officielles; le vert, aux obligations liées à la vocation du bureau; le rouge et le bleu aux obligations relatives à la demande importante. C'est le même code de couleurs sur les deux tableaux.

Il est à noter que l'ordre dans lequel je viens de vous présenter les différentes couleurs correspond à l'ordre dans lequel les administrateurs généraux doivent examiner chacune des questions en vue de déterminer si leur organisme a des obligations en matière de services au public. Le processus s'arrête dès qu'il y a obligation.

Par exemple, pour déterminer si un bureau a une obligation en matière de services au public, l'administrateur général doit se demander si le bureau en question rend des comptes directement au Parlement, s'il est situé dans la région de la capitale nationale, s'il constitue une administration centrale. S'il répond par l'affirmative à une de ces questions, le bureau a systématiquement l'obligation d'offrir des services dans les deux langues officielles. Sinon, il doit passer à la prochaine question.

Il doit alors se demander si le bureau a une vocation spéciale, c'est-à-dire si ses services sont, par exemple, liés à la signalisation en matière de santé et de sécurité ou s'ils ont un caractère national ou international, s'il s'agit d'un parc national. Dans l'affirmative, le bureau a systématiquement l'obligation d'offrir les services dans les deux langues officielles. Si la réponse à la question sur la vocation du bureau est négative, l'administrateur doit passer aux questions liées aux règles particulières de la demande importante.

Il doit alors se demander si le bureau offre des services particuliers, par exemple des services destinés aux voyageurs. Dans l'affirmative, l'obligation peut être systématique ou conditionnelle à la demande des services, selon le cas.

En dernier lieu, l'administrateur doit examiner les questions liées aux règles démographiques. Ces règles permettent de prendre en considération le nombre de personnes que compte une population de langues officielles en situation minoritaire, le pourcentage que cette population représente dans une région métropolitaine de recensement, c'est-à-dire dans les grands centres urbains ou dans une subdivision de recensement, c'est-à-dire dans les petites villes et les régions rurales, des services considérés comme clés pour les communautés de langues officielles en situation minoritaire, le nombre de bureaux offrant les mêmes services, la règle de la proportionnalité, et, la région desservie par le bureau de l'institution fédérale — ce que l'on appelle l'aire de service des différentes institutions.

[Traduction]

Comme ces règles comportent des dispositions fondées sur les données du plus récent recensement décennal, les institutions fédérales devront appliquer à nouveau ces règles, en fonction des données du recensement de 2001. C'est à cette étape qu'intervient l'exercice de révision de l'application du Règlement sur les langues officielles.

Pour mieux comprendre cet exercice, je vous prie de vous référer maintenant au document d'exposé qui vous a été remis. Nous avons essayé de bien définir les différentes étapes de l'exercice. Si madame la présidente me le permet, je vais maintenant passer à cette partie de ma présentation.

[Français]

Le règlement sur les langues officielles est l'instrument d'application de certaines dispositions de la partie VII de la Loi sur les langues officielles. Il précise que ce sont les données du recensement décennal le plus récent qui doit être utilisé pour définir la notion de demande importante.

[Traduction]

Le 10 décembre 2002, Statistique Canada publiait les données du recensement de 2001 sur la composition linguistique du Canada et sur la première langue officielle parlée. Depuis février 2003, les institutions assujetties à la Loi sur les langues officielles se servent de ces données pour déterminer si leurs bureaux ou points de service doivent servir le public dans les deux langues officielles en vertu du règlement. Une fois l'examen terminé, les obligations linguistiques de certains bureaux et points de service pourraient changer.

Aujourd'hui, nous nous intéressons à la nature de l'exercice et du règlement, plutôt qu'aux résultats.

[Français]

Je parlerai très brièvement, à la page 2, de la Loi sur les langues officielles et du règlement, communication avec le public. Ensuite je décrirai le rôle de la Direction des langues officielles du secrétariat du Conseil du Trésor dans cet exercice et brièvement, du processus de consultation mis sur pied. J'indiquerai également quelques dates charnières concernant le déroulement de l'exercice.

À la page 3, il y a un total de 181 institutions qui regroupent 12 379 bureaux et points de service. C'est vous dire que c'est un exercice compliqué que l'on mène en ce moment. La partie IV de la loi donne au public un droit individuel aux services fédéraux en lui permettant de communiquer dans la langue officielle de son choix avec l'administration centrale des institutions et tout autre bureau de ces institutions faisant l'objet d'une demande importante ou lorsque la vocation du bureau le justifie.

Par conséquent, il y a 1433 bureaux et points de service qui ne sont pas visés par l'exercice de révision de l'application du règlement car l'obligation de fournir le service leur provient directement de la loi elle-même. C'est le cas pour le siège ou l'administration centrale, les bureaux situés dans la région de la capitale nationale et les bureaux qui rendent directement service au Parlement.

Pour les 10 946 autres bureaux et points de service, l'obligation de fournir ou non le service dans les deux langues officielles découle des dispositions du règlement. Ils sont donc visés par l'exercice en cours. Ainsi, d'une façon générale, toutes les institutions ayant des obligations régionales sont visées par l'exercice.

[Traduction]

C'est le gouverneur en conseil qui a préféré que soit adopté ce règlement. De cette façon, c'est le gouvernement, plutôt que les tribunaux, qui se trouve à définir l'étendue des droits du public en matière de services et à établir la portée des obligations des institutions fédérales. Le règlement renferme un certain nombre de règles que je présenterai par ordre de préséance.

Tout d'abord, les règles applicables à la vocation du bureau visent des services dont l'importance est telle qu'ils doivent être offerts dans les deux langues officielles peu importe la demande. Ces règles sont définies en fonction des quatre éléments suivants: la santé et la sécurité du public — par exemple, les premiers soins dans une clinique située dans un aéroport; l'emplacement du bureau — par exemple, dans un parc national; caractère national ou international du mandat — par exemple, une ambassade; et d'autres circonstances — par exemple, les services d'appels interurbains sans frais).

Les règles relatives à la demande importante comprennent des règles particulières et des règles générales communément appelées «règles démographiques». Autrement dit, les règles applicables à la vocation du bureau ont préséance sur les règles touchant la demande importante. Ce qui nous amène à la conclusion suivante: dans cette notion de demande importante, les règles particulières l'emportent sur les règles générales.

[Français]

La demande importante à la page 5 comprend deux ensembles de règles particulières et démographiques. Les règles particulières reposent sur les critères non démographiques et autres facteurs et peuvent être regroupées selon quatre circonstances: le public voyageur, les installations même; le public voyageur sur les trajets, par exemple, les services de transport; les services de communication et services aériens et maritimes; les services fournis sur des lieux d'entrée au Canada.

Les règles particulières s'appliquent dans les circonstances où une approche sur la seule présence d'une population minoritaire locale n'est pas appropriée, par exemple, un public voyageur qui se déplace.

Ces règles tiennent compte de certaines notions ou facteurs tels que le volume de passagers, la taille ou le pourcentage de la population minoritaire et les notions de recensement, à savoir les régions métropolitaines de recensement et les subdivisions de recensement. Dans certaines circonstances, il faut procéder à une mesure de la demande.

Aux fins du recensement, Statistique Canada découpe le territoire canadien, entre autres, en termes de régions métropolitaines de recensement (RMR) et subdivisions de recensement (SDR). Les RMR comprennent des grands centres urbains de plus de 100 000 habitants.

[Traduction]

L'un des facteurs dont on devait tenir compte au moment de rédiger le règlement était qu'il fallait en faire bénéficier le plus grand nombre possible de personnes en situation minoritaire — soit près d'un million de Canadiens d'expression française et d'expression anglaise appartenant à des groupes linguistiques minoritaires. Pour ce faire, il a fallu tenir compte des caractéristiques des deux groupes et de leur répartition: la taille de la population minoritaire de la région desservie par un bureau ou un point de service, les caractéristiques de cette population et le pourcentage de la population totale de cette région que représente la population minoritaire. Il a fallu également considérer la quantité de communications ou de services entre un bureau ou un point de service et le public, ainsi que tout autre facteur jugé pertinent.

Lors de la rédaction du règlement, une étude de la répartition des minorités linguistiques du Canada a révélé que 86 p. 100 des anglophones du Québec habitaient de grands centres urbains, contre 42 p. 100 pour les francophones hors Québec. On a donc tenu compte de cette différence au moment d'établir les règles; c'est ce qui explique d'ailleurs leur grand nombre et leur complexité.

Aujourd'hui, ces règles visent les services gouvernementaux offerts à 90 p. 100 des membres des minorités francophones (comparativement à 86 p. 100 en 1991) et à 94,8 p. 100 des membres des minorités anglophones (comparativement à 94,1 p. 100 en 1991). Les règles profitent donc à une très grande partie des communautés linguistiques en situation minoritaire.

[Français]

Les règles démographiques sont basées sur les données du recensement de Statistique Canada sur la première langue officielle parlée. Les règles permettent de mettre en jeu certaines notions, soit le nombre et le pourcentage de la minorité, les services clé — par exemple, services clé de Patrimoine canadien, Commission de la fonction publique, certains services comme Postes Canada, les centres d'emploi, les centres de sécurité du revenu, le service d'impôt et certains détachements de la GRC — le calcul de la proportionnalité lorsque plusieurs bureaux offrent les mêmes services et l'aire de service, autrement dit le territoire couvert par un bureau, qui s'étend nécessairement au-delà de la RMR ou de la SDR en question. On obtient le nombre et le pourcentage de la population minoritaire comprise dans l'aire de service en additionnant les populations minoritaire de tout territoire desservi par le bureau.

Lorsque le calcul de l'aire de service n'implique pas l'obligation, le règlement prévoit dans certaines circonstances la mesure de la demande.

Je suis une personne très visuelle et la meilleure façon pour moi d'expliquer l'exercice très compliqué en cours, c'est qu'on a une carte avec les données démographiques et, pour chacun des ministères, on a une carte du Canada avec la démarcation des aires de service. On met cela ensemble, on fait une comparaison entre les données démographiques et les aires de service et on calcule, à l'intérieur de chacun des aires de service, les obligations du ministère en question.

À la page 8, vous avez l'exercice de révision qui comprend trois étapes échelonnées sur une période de trois ans: l'application des données démographiques du recensement de 2001, l'application des directives pertinentes du Conseil du Trésor et la mesure de la demande.

La première étape s'étend jusqu'à l'automne 2003, donc on travaille encore à l'exercice et on termine ce travail cet automne. Elle touche environ 87 p. 100 des bureaux et points de service visés par l'exercice. La deuxième étape se terminera à l'hiver 2003, et la mesure de la demande aura lieu en 2004 et 2005, selon les dispositions précises du règlement.

Vous avez un calendrier dans vos documents qui indique les différentes étapes de notre exercice et les échéanciers visés. Le calendrier n'est qu'un instrument de travail et les échéanciers sont appelés à changer.

D'autre part, le règlement prévoit une mesure de la demande de service dans le cas où les données démographiques ne sont pas soumises à une obligation de fournir le service dans les deux langues officielles, ou lorsque ces données ne sont pas pertinentes.

Selon les directives du Conseil du Trésor sur la mesure de la demande, les résultats de cette mesure sont valides pour dix ans. La période de validité expire en 2003 ou en 2004, selon les directives.

Le calendrier que vous avez devant vous illustre les dates charnières de l'exercice. Les activités sont regroupées en trois volets: l'application des règles aux données démographiques; l'application des directives (A), (B) ou (C) du Conseil du Trésor; et l'exécution de la mesure de la demande. Pour de plus amples informations, vous pouvez consulter le site web ou le CD-ROM que nous vous avons distribué.

Les résultats de l'exercice concernant les règles démographiques seront connus cet automne. Les résultats de l'exercice concernant la mesure de la demande seront disponibles au plus tard à la fin du mois de mars 2005.

Tournons à la page 9.

[Traduction]

Au cours de cet exercice de révision, la Direction des langues officielles a apporté son soutien. Comme vous pouvez l'imaginer, les ministères avaient besoin d'aide. Vous voyez certes à quel point cette tâche peut être compliquée; je puis vous assurer que les ministères ont eu la même réaction. En janvier 2003, à partir des fichiers de données de Statistique Canada sur la première langue officielle parlée, nous avons conçu des outils électroniques qui nous ont permis, en février, d'envoyer à toutes les institutions concernées un profil provisoire pour les fins de la révision de l'application du règlement.

D'autres rapports et outils — par exemple, des cartes des points de service ou des différents bureaux — leur ont aussi été remis pour les aider à mener à bien la révision. Bien conscients de la complexité de l'exercice, nous avons aussi tenu des séances de formation. Nous avons visité plus de 80 institutions pour leur indiquer notamment la façon d'appliquer les règles démographiques.

Depuis avril, les institutions nous renvoient les résultats de leur analyse des répercussions et nous leur fournissons l'aide et les conseils dont elles ont besoin. Nous avons d'ailleurs presque terminé notre examen des résultats de la première étape de cet exercice.

Nous présenterons les résultats de cet examen à la présidente et au secrétaire du Conseil du Trésor, puis aux représentants des minorités francophone et anglophone. Il y a également un comité spécial que nous tenons informé.

[Français]

À la demande de la présidente du Conseil du Trésor, nous avons, en 2002, mis sur pied un groupe de discussions pour réviser le règlement sur les langues officielles. Ce groupe est constitué de représentants de la Fédération des communautés francophones et acadienne, du Quebec Community Groups Network, du Commissariat aux langues officielles, du bureau de la présidente du Conseil du Trésor, du bureau du Conseil privé et de Patrimoine canadien.

[Traduction]

Ce groupe est chargé principalement d'analyser les répercussions des données du recensement de 2001 sur les bureaux et les points de service fédéraux et d'examiner des façons d'actualiser l'application du règlement. Le groupe se penche également sur la nature du règlement comme tel, mais nous concentrons actuellement nos efforts sur l'application des données démographiques.

Le groupe s'est déjà réuni à cinq reprises et le fera de nouveau dès que nous serons prêts à présenter les résultats de l'analyse finale. La prochaine réunion est prévue pour la fin octobre.

Conformément à mon engagement envers les membres de ce groupe, je vais leur communiquer les résultats de l'exercice avant qu'ils ne soient rendus publics. Nous pourrons ainsi poursuivre l'exercice en prenant en considération les préoccupations de la communauté.

Aucune obligation de service ne sera modifiée tant que le Conseil du Trésor n'aura pas confirmé l'exactitude des résultats de l'analyse effectuée. Les institutions doivent s'adresser à nous pour vérifier les résultats ou exprimer leur désaccord quant à l'analyse initiale. Une fois qu'elles auront été confirmées, les nouvelles obligations devront être remplies avec une diligence raisonnable.

Nous allons tenir les communautés au courant par l'entremise du comité dont je vous ai parlé et leurs préoccupations seront prises en compte tout au long de l'exercice.

[Français]

La présidente: Passons maintenant à la période de questions.

Le sénateur Comeau: J'ai été très attentif à votre présentation. Toutefois dans vos documents, vous avez touché des questions fort complexes.

Jadis, à l'Île-du-Prince-Édouard, à Terre-Neuve et en Nouvelle-Écosse se trouvait une population acadienne fort importante. Avec l'accroissement de la population anglophone et la venue d'immigrants dans ces régions, les gens ont peu à peu adopté la langue anglaise, et l'assimilation de ces communautés francophones s'est produite à très grande allure.

À titre d'exemple, je connais une petite communauté qui, jadis, dans ma jeunesse, était complètement francophone. Il y a deux ans, je suis allé dans cette région et me suis adressé à une jeune femme. Cette femme m'a adressé la parole en anglais. Je lui ai demandé si elle parlait français. Elle m'a répondu non. J'ai présumé qu'un de ses parents était anglophone. Elle a indiqué que ses parents étaient tous deux francophones. Je lui ai alors demandé pourquoi elle ne parlait pas le français. Elle a précisé que toute sa génération ne parle pas le français.

Cet exemple révèle une nette assimilation dans cette région. Le recensement de 2001 d'ailleurs ne reflète pas la population acadienne. On retrouve des Chiliens, des Somaliens, des Chinois, des communautés ethniques de tout genre, sauf acadienne. Les premières communautés européennes venues au Canada ne sont même pas identifiées au recensement.

Existe-t-il dans vos règlements des mesures que vous pourriez prendre au Secrétariat du Conseil du Trésor afin de reconnaître la contribution historique des Acadiens des Maritimes? Par exemple, à l'Île-du-Prince-Édouard, ces Acadiens seront, lors du prochain recensement, au nombre de 5 000, et ils ne sont même pas identifiés. Existe-t-il des règlements au Secrétariat du Conseil du Trésor qui reconnaissent le phénomène de l'anglicisation des Acadiens au fil des années? Dans les régions de Terre-Neuve et de l'Île-du-Prince-Édouard, nous devrons bientôt cesser d'offrir les services en français car la demande ne le justifiera pas. Que répondez-vous à ces populations?

Mme Monnet: À l'examen des données du recensement de 1991 et de celui de 2001, nous constatons une diminution de la population francophone. À l'Île-du-Prince-Édouard, cette diminution est infime, et le nombre de francophones n'est pas passé sous la limite admissible.

Le sénateur Comeau: Lors d'un prochain recensement, nous constaterons que le nombre de francophones est passé sous la limite admissible, et voilà que l'Île-du-Prince-Édouard aura le statut de province unilingue anglophone où les services en français cesseront d'exister. Est-ce la perspective qui guette l'Île-du-Prince-Édouard?

Mme Monnet: Il faudra attendre pour voir le découpage et l'analyse des services. En fait il n'y a pas eu autant de glissements. Il ne faut pas s'attendre, cette fois du moins, à de grandes pertes de service à l'Île-du-Prince-Édouard. On craignait des pertes, mais les données ont été plus positives.

Vous posez une question sur ce que l'on peut faire pour aider davantage les communautés. On va regarder d'abord où on peut offrir des services et, s'il y a perte, on va étudier cette situation de très près. On va voir s'il n'y a pas d'autres façons d'aider la communauté. Mais il ne faut pas en tirer des conclusions trop rapides non plus. L'obligation du gouvernement, son devoir, en fait, c'est surtout sur la partie VII; il s'agit surtout de faire son possible.

Le sénateur Comeau: Ce n'est même pas obligatoire, ce sont des expressions de bonne volonté. On est en train d'examiner en ce moment un projet de loi qui pourrait régler ce problème, mais selon le gouvernement, c'est selon son bon vouloir; ce n'est pas obligatoire, c'est déclaratoire. Même là il n'y a rien.

Mme Monnet: Il y a quand même des efforts parrainés par Patrimoine canadien, qui coordonne les activités des ministères et des agences en ville. Je ne vous dis pas qu'on ne pourrait pas faire davantage, mais des efforts sont faits pour aider les communautés.

Le sénateur Comeau: Étant donné que les Acadien ont été exclus lors du dernier recensement, avez-vous des moyens pour identifier les groupes d'Acadiens qui ne parlent plus le français, ou est-ce que l'outil du recensement aura nui?

M. Gérald Groulx, agent de programme, Direction des langues officielles, Programme et liaison, Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada: À ma connaissance, on n'aurait pas les moyens d'identifier ces groupes. Il faudrait que cela revienne à Statistique Canada qui aurait probablement la capacité de le faire.

Le sénateur Comeau: Le premier groupe d'Européens établi au Canada, les francophones de la France, sont devenus des Acadiens. Ils ne sont même pas identifiés dans le recensement pour examiner le taux d'assimilation qui se produit actuellement dans les Maritimes. Peut-être qu'on pourra demander au Secrétariat du Conseil du Trésor d'exercer des pressions auprès du recenseur en chef lors du prochain recensement, pour lui demander de prendre son travail au sérieux et d'identifier les groupes tels que les Acadiens.

La présidente: J'aurais une question supplémentaire sur le visage démographique du Canada. On se sert du critère de la première langue officielle parlée; est-ce que ce critère est encore adéquat pour mesurer? Je pense que Statistique Canada s'en sert.

Mme Monnet: En fait il y a un algorithme — nous en avons apporté des copies au cas où vous poseriez des questions. Il y a une série de questions pour lesquelles on établit quelle est la première langue parlée. Pour revenir sur ce point, on me dit que les ethnies citées sont comptées. Nous avons quelqu'un qui peut nous aider à ce sujet.

Le sénateur Comeau: Les Acadiens ne sont pas là. Il y a une vingtaine de groupes — dont je me rappelle pas les noms.

Mme Monnet: Madame la présidente, avec votre permission, je voudrais vous présenter M. Michael O'Keefe, du bureau du Conseil privé, qui connaît les données de Statistique Canada et qui a accepté de nous aider au besoin.

M. Michael O'Keefe, Analyste principal en politiques, Langues officielles, Affaires intergouvernementales Bureau du Conseil privé,: Le recensement pose une question sur l'ethnicité. Dix réponses sont citées automatiquement, ce sont les dix réponses les plus fréquemment citées dans le dernier recensement. À la fin de cette liste, on laisse un espace où les gens peuvent indiquer d'autres choix. Effectivement, les Acadiens l'indiquent et on sait combien de personnes ont choisi de le faire.

Le sénateur Comeau: Attendez une minute; tous les autres groupes sont identifiés, sauf les Acadiens qui doivent s'identifier.

M. O'Keefe: Il y a exactement dix groupes identifiés, ce sont les dix groupes les plus identifiés dans le dernier recensement. Par exemple, on n'inclut pas ``Québécois'' comme réponse, malgré le fait que beaucoup de Québécois répondent ``Québécois.'' On n'inclut pas ``Acadien'' parce qu'ils ne sont pas parmi les dix premiers. Cela étant, on compte effectivement toutes les réponses et on reçoit au-delà d'une centaine de réponses, dans le recensement sur l'ethnicité. Il est tout à fait possible de sortir ces données; bien sûr, les gens ont plutôt tendance à choisir les réponses qui sont devant eux et, souvent, les gens d'origine acadienne vont répondre ``Français'' parce que c'est une des réponses les plus utilisées, mais les gens peuvent inclure d'autres réponses. On sait combien de personnes ont écrit ``Acadien'' dans le recensement et on est capable de sortir ces données.

Le sénateur Comeau: C'est donc votre façon de procéder, d'accord. Nous y reviendrons.

Mme Monnet: Cela n'a pas d'impact sur l'interprétation du règlement. C'est une question de recensement et de démographie. Pour répondre à votre question sur le règlement, cela n'influence pas la décision du règlement. On vous a donné pour vous aider la façon décrite dans le règlement pour déterminer la première langue parlée. Concernant ce que l'on peut faire pour les Acadiens ou les autres communautés minoritaires, lorsque vous avez posé la question, j'aurais dû parler du plan d'action sur les langues officielles, qui comprend un effort énorme pour aider les communautés.

Le sénateur Gauthier: Le règlement est-il prêt? Vous avez consulté les communautés.

Mme Monnet: Sur l'application du règlement, oui.

Le sénateur Gauthier: Il y a une situation de fait, aujourd'hui, dans laquelle on est en train de privatiser beaucoup de nos services publics qui tombent sous votre contrôle et sous le coup de la réglementation en question. Combien de fonctionnaires a-t-on perdu dans les cinq dernières années, qui ont été soit privatisés ou dont le service a été dévolu à d'autres organismes? Combien de fonctionnaires ne tombent plus sous votre coupe?

Mme Monnet: La grande majorité est considérée encore comme institution fédérale, donc la partie IV de la loi et le règlement s'appliquent. À l'avenir, s'il y en a d'autres, il y a une politique sur la diversification des modes de prestation de services.

Le sénateur Gauthier: Vous avez absolument raison, madame Monnet, mais ils ne le savent pas ou refusent de le reconnaître. À Windsor, lorsque les statistiques sont sorties, j'ai été contacté par des gens de la place, parce que quelqu'un a dit que si la population francophone de Windsor baissait en dessous de 5 p. 100, on enlèverait les services bilingues à Postes Canada. J'ai appelé Postes Canada et j'ai été satisfait d'entendre qu'il n'était pas question de supprimer les services bilingues. Mais Radio-Canada et d'autres services de média répandaient la rumeur qu'on allait restreindre les services si la population diminuait. J'ai reçu une lettre satisfaisante de M. Ouellet, disant qu'on n'allait pas supprimer les services.

L'Agence d'inspection des aliments dans la péninsule acadienne disait qu'elle n'était pas soumise à la Loi sur les langues officielles ni au règlement du Conseil du Trésor, parce qu'elle était une agence indépendante. Il y a beaucoup de ces agences maintenant. Ces gens pensent qu'ils ne tombent plus sous votre coupe, mais vous me confirmez que si, n'est-ce pas?

Mme Monnet: Oui.

Le sénateur Gauthier: Les tribunaux aussi le disent.

Mme Monnet: Ils tombent encore sous le coup du règlement et de la Loi sur les langues officielles. En ce qui concerne les politiques, c'est un autre sujet. Ils doivent quand même respecter l'esprit des politiques du Conseil du Trésor. Étant donné que nous ne sommes pas l'employeur, le ``comment'' peut varier d'une agence à l'autre mais ils sont assujettis très clairement à la loi et au règlement.

Le sénateur Gauthier: Stipulerez-vous que dans toute décentralisation ou privatisation, vous vous assurerez que les services publics fédéraux continueront à respecter les deux langues officielles?

Mme Monnet: Une politique sur la diversification des modes de prestation de services donne une annexe avec toutes les étapes à suivre et les questions à poser sur les langues officielles. On réfère à cette politique des langues officielles à plusieurs endroits dans le texte où on décrit les étapes. Je peux vous assurer que les langues officielles et les obligations des institutions sont très présentes avec obligation de consulter les communautés.

Le sénateur Chaput: Ma première question touche la mesure utilisée pour la demande des services. Une de ces mesures est une question qui est posée à l'égard de la première langue officielle parlée au foyer.

Je suis très préoccupée par certaines des questions posées par Statistique Canada. Au Manitoba, d'où je viens, au moins 60 p. 100 des jeunes sont parties d'unions exogames, où l'un des deux conjoints ne parle pas français. Des statistiques démontrent que lorsque la mère ne parle pas le français, cette langue est très peu utilisée au foyer. À l'inverse, lorsque la mère parle français, l'utilisation du français est plus courante. À la question concernant la première langue officielle parlée au foyer, ces jeunes cocheront l'anglais, ce qui diminue le nombre de francophones manitobains. Ces résultats peuvent être trompeurs, car ces jeunes sont des utilisateurs de services en français, se servent du français dans les écoles ou dans les hôpitaux, par exemple, puisque la langue française est toujours parlée et vivante au Manitoba, mais ce n'est pas nécessairement la première langue parlée au foyer parce qu'un des deux parents ne la parle pas.

Qui, à Statistique Canada, a la responsabilité de réviser ces questions posées depuis fort longtemps et qui ne sont peut-être plus pertinentes ou pire encore, nuisibles ou discriminatoires à l'égard de la minorité francophone?

Mme Monnet: Cette question a été soulevée à plusieurs reprises au comité dont je vous ai parlé et où étaient présents des représentants du Commissariat aux langues officielles et des communautés minoritaires. Nous essayons de terminer l'exercice pour voir son impact sur les communautés. S'il y a un impact, nous étudierons les différentes façons d'aider la communauté ou nous trouverons des mesures d'atténuation.

Nous réservons cette question pour l'avenir. On va regarder, dans les cas de pertes potentielles, si dans d'autres circonstances, un autre calcul aurait pu aider. C'est une question hypothétique pour laquelle nous attendons des résultats concrets avant de poser la question, à savoir si le calcul avait été différent, quel aurait été le résultat. Vos préoccupations rejoignent les préoccupations qui nous ont déjà été présentées.

Le sénateur Chaput: Ma deuxième question concerne la démarcation des aires de service. Cela fait sept ou huit ans que le gouvernement fédéral a changé la démarcation des aires de services au Manitoba.

M. Groulx: Ce sont les institutions fédérales assujetties à la loi qui décideront quelles seront les aires de service des bureaux en question.

Le sénateur Chaput: Il y a dix ans, certaines aires de service ont été modifiées. Accidentellement ou autrement, je ne sais pas, des communautés francophones assez nombreuses ont été scindées par le recoupement des nouvelles aires de service, là où les bureaux offraient des services bilingues. Du coup, la majorité s'effondrait, car une partie des francophones allait d'un côté, où on retrouvait beaucoup de Mennonites, par exemple, et l'autre partie, 50 p. 100, allait du côté où il y avait une majorité anglophone. Cela nous a encore une fois affaibli en termes de pourcentage, de nombre suffisant pour avoir les services en français.

Je pense au sénateur Beaudoin qui dit que ce n'est pas une question de nombre mais d'égalité. Nous avons deux langues officielles et elles sont égales, mais j'ai souvent l'impression que c'est plutôt une question de nombre dans ce cas.

Mme Monnet: C'est justement le genre de choses qui nous préoccupent. On voit si le découpage, dans certains cas, peut nuire à la communauté. Si tel est le cas, on entend réviser la situation avec l'agence ou le ministère en question. On y travaille, et c'est en partie la raison pour laquelle cela prend du temps à analyser le tout. Avant d'arriver à une conclusion de perte, il faut faire ses devoirs sérieusement. L'exemple que vous soulevez, on essaie de l'analyser.

Le sénateur Beaudoin: Je suis content que vous souleviez la question de l'égalité des deux langues officielles, j'insiste toujours là-dessus. Toute ma vie, j'ai entendu parler de: là où le nombre le justifie. Cela existe encore dans certains endroits, mais les deux langues officielles sont égales. Il ne faut jamais l'oublier. Ce n'est pas une question de nombre mais une question d'égalité. Il y a quand même l'article 23 qui stipule que, sur le plan scolaire, là où le nombre le justifie joue encore.

Madame Perrier, vous êtes avocate. Quelle est votre réaction au jugement du juge Blais qui dit clairement que la partie VII, ou du moins l'article 41, est obligatoire? En tant que juriste, en tenez-vous compte ou si cela a une importance passagère uniquement? J'ai déjà travaillé au ministère de la Justice il y a de cela beaucoup d'années. J'étais un des conseillers juridiques, je l'ai été aussi à la Chambre des communes, et chaque fois qu'une grande décision était prise, cela nous intéressait et nous en parlions. Est-ce toujours ainsi?

Mme Andrée Perrier, avocate-conseil, Services juridiques, Secrétariat du Conseil du Trésor: C'est toujours ainsi. Vous savez qu'il y a énormément de consultations tenues lorsqu'une décision de ce genre est prise. C'est justement le cas. Le procureur général est à examiner cette décision et on est encore dans les délais d'appel.

Tout ce que je peux dire, c'est que la décision est à l'étude. Ce n'est pas quelque chose sans importance, qui passe sans être étudiée.

Le sénateur Beaudoin: Cela vous impressionne. Cela répond à quelque chose, parce que j'ai entendu dire que pour plusieurs, les articles 41, 42 et autres n'étaient pas obligatoires, qu'ils n'étaient que déclaratoires. Si c'est déclaratoire, on s'en occupe quand on a le temps. Alors que si c'est exécutoire, il faut en tenir compte. J'espère que cette décision ne sera pas isolée.

Et si jamais le gouvernement fédéral en vient à en appeler à la Cour d'appel et à la Cour suprême, on verra ce qui arrivera. J'ai toujours suivi le principe, dans ma vie, que la décision d'une cour, c'est bien important, mais tant que la Cour suprême ne s'est pas prononcée, c'est un peu moins important.

Mais c'est quand même important. Regardez dans l'affaire Montfort, il n'y a pas eu d'appel. Au Manitoba, une cour inférieure avait dit, au début des années 1900, quand elle a aboli le français, que la décision était inconstitutionnelle. Deux cours ont dit la même chose. Mais on ne s'en est pas occupé. Et ce n'est que 100 ans après qu'un homme extraordinaire, M. Forest, a plaidé partout au Manitoba. Il a perdu partout. Il était venu me voir à Ottawa, on se connaissait un peu, par hasard, un très beau hasard. Cet homme remarquable a changé l'histoire. J'ai dit: Allez en Cour suprême. Il a dit: Oui, mais cela coûte très cher. J'ai dit: C'est bien vrai, cela coûte très cher. Mais il a gagné 9 à 0. C'est quelque chose.

C'est pour cela que je dis que je suis pour la judiciarisation. Si nous, les francophones, n'avions pas gagné devant les cours de justice, on ne serait pas avancé comme on l'est aujourd'hui. Ou on convainc les politiciens d'agir, ou on fait intervenir la justice. Et c'est encore la justice qui est la plus forte. Parce que c'est difficile d'oublier l'arrêt d'un tribunal.

C'est pour cela que je vous pose la question. Vous me dites — et je m'en réjouis — que vous en tenez compte. Vous allez décider si vous allez en appel ou non. C'est important l'appel. Regardez la question des mariages en appel, c'est une grosse décision qui a été prise.

J'évoque ce sujet parce que c'est très important si on décide d'aller en appel ou non.

Comme on a gagné, cela ne m'empêche pas de dormir, je me dis: On a gagné avec le juge Blais. Mais pour l'avancement de l'égalité des deux langues officielles, il est très important de tenir compte de l'article 16.

Lorsque vous nous dites: Oui, on en tient compte, cela nous intéresse, vous mettez cela en banque et vous y pensez. Tant mieux, au moins on a une décision en notre faveur.

Mme Perrier: Elle n'est pas passée inaperçue.

Le sénateur Léger: Je vais commencer par ma troisième question au cas où je n'aurais pas le temps de poser la première et la deuxième.

Je crois que nous disposons de statistiques qui nous permettront de déterminer si des services seront offerts. Ces statistiques ont été créées au début afin d'atteindre une équité linguistique au pays. J'ai peine à croire qu'une communauté ayant joui de services en français ne soit privée de ceux-ci à cause des statistiques. On a choisi le chiffre 5 000 comme critère de base pour offrir les services en français. Cela devrait être une personne. Tout le Canada est égal, Anglais et Français, sûrement. Va-t-il falloir une loi pour empêcher de retirer des droits acquis? Jamais.

La présidente: C'était votre première question. Madame Monnet, vous voulez répondre?

Mme Monnet: Je vais essayer. Le règlement cherche à définir ce qu'on veut dire par le concept de «demande importante». Vous n'êtes pas la seule personne à être d'avis qu'on devrait peut-être être plus généreux. Madame Robillard s'est dite ouverte à étudier la possibilité de changement, mais il faut terminer l'exercice en cours d'abord.

Je vous ai dit qu'on fera doublement attention avant d'arriver à la décision qu'il y a une perte, dans les cas où il y a possibilité de perte. On revoit l'aire de service, on consulte la communauté, on évalue s'il y a d'autres façons de faire. Mais il ne faut pas non plus dire que là où il y avait des services, il y aura toujours des services. Il y a des circonstances qui changent. S'il y a toute une communauté qui déménage — je prends l'exemple d'une base militaire — il est normal que le service doit changer ou être intégré.

On essaiera de procéder avec autant de rigueur possible, en tenant compte des besoins de la communauté.

Le sénateur Léger: Il n'y a pas de différence au Canada par rapport à l'endroit où on est. Toutes ces subdivisions, le nombre, les pourcentages, j'espère que cela aidera à ce que le français et l'anglais soient égaux. C'est une leçon que j'ai apprise, je ne l'oublierai pas. Si je vais au Nunavut, est-ce que je suis encore au Canada, même si je suis seule? Il me semble que la loi devait nous amener à ce que ce soit normal partout.

Tout ce beau travail doit coûter de l'argent. C'est correct, comme vous dites, il faut payer. Mais est-ce qu'on avance? Est-ce que cela rend le Canada encore plus bilingue, égal partout?

Mme Monnet: Pouvoir donner le service partout, on travaille avec le règlement tel que défini et tel que décrété. On essaie de l'appliquer avec autant d'équité et de générosité que possible, en consultant la communauté. Partout, non, mais quand même, 90 p. 100 des francophones ont accès à un service dans leur langue, quand on utilise le règlement, quand on l'applique avec les données de 2001, et 94,8 p. 100 des anglophones. Ce n'est pas partout, non.

Le sénateur Léger: C'est le règlement d'aujourd'hui. Avec l'arrivée énorme — elle ira en augmentant — des Autochtones et de tous les immigrants, il est compris que la base ne sera plus le français ni l'anglais, ce sera une autre langue.

Il me semble que si tout était anglais ou français au pays, cela ne leur ferait rien de venir au Canada. Anglais ou français, c'est le dernier de leur souci. Ils veulent entrer dans notre pays.

Que fait-on aujourd'hui ou demain avec cette mosaïque — comme Mme Sheila Copps le dit — qui est la définition même du Canada?

Mme Monnet: Vous avez une partie de la réponse dans le plan d'action qui a été annoncé par le premier ministre, le 12 mars, avec des efforts du ministère de l'immigration pour l'accueil des immigrants, pour les attirer et les encourager à demeurer dans les communautés minoritaires.

Un effort est fait selon notre plan d'action dans les écoles, avec la petite enfance pour que davantage de jeunes Canadiens aient l'occasion d'apprendre les deux langues. Ce sont deux approches différentes et nous essayons de tenir compte de vos préoccupations pour les jeunes immigrants allophones.

Le sénateur Corbin: Je ne m'y connais pas tellement en informatique et j'avoue une certaine ignorance. Je regardais le verso de votre CD-ROM d'une durée de 16 minutes. Parlons-en de règlements en matière de services au public dans les deux langues officielles. Pourquoi avez-vous publié une version anglaise et une version française? Pourquoi ne pas les avoir mises sur un seul CD-ROM? Je regardais ce matin un CD-ROM de Yo-Yo Ma qui dure 72 minutes. Vous faites deux CD-ROM distincts dans un pays bilingue. Ce qui m'intéresse, c'est le résultat. Est-ce que le bureau rend compte directement au Parlement? Oui, vous allez à droite. Non, vous descendez. Cela me fait penser à un jeu de Monopoly. Vous comprendre est plus compliqué que ce jeu. Ce n'est pas clair même si nous sommes tous visuels.

Mme Monnet: C'est assez compliqué. On a essayé de simplifier avec un concept visuel mais cela demeure un règlement complexe.

Le sénateur Corbin: Il faut se concentrer. Quels sont les résultats à l'heure actuelle? Y a-t-il un plus grand nombre de Canadiens qui sont servis dans la langue de leur choix qu'il y a 10, 20 ou 30 ans? Cela fait 34 ans que la Loi sur les langues officielles existe. Je ne dis pas que tous les règlements existent depuis 35 ans. Il y a eu des efforts d'amélioration au cours des ans. La même question demande aussi qu'on pose l'envers de la médaille.

Y a-t-il un plus grand nombre de fonctionnaires qui parlent les deux langues? En d'autres mots, enregistrons-nous un progrès réel? Il faut tenir compte du fait qu'il y a beaucoup plus de fonctionnaires bilingues qu'il n'en faut dans certains ministères et pas assez dans d'autres.

Mme Monnet: En ce qui concerne le droit d'accès, je vous ai donné les chiffres tout à l'heure. En appliquant le règlement, on voit les chiffres augmenter. Il y progrès sur le plan théorique de la demande à l'accès aux services. En ce qui concerne le service même, je crois qu'il y a eu progrès. Je n'ai pas les chiffres qui remontent à la première loi. Je pourrais chercher et vous transmettre ces informations.

Je peux vous dire que 84 p. 100 des fonctionnaires occupent des postes de responsabilité de services au public et qui sont capables de donner ce service. Est-ce adéquat? Non, cela devrait être 100 p. 100. On fait des efforts dans la formation linguistique. Nous sommes en train de réviser nos politiques au Conseil du Trésor pour améliorer la performance à cet égard.

Le sénateur Corbin: Un dernier mot pour soutenir les arguments de mes collègues, les sénateur Comeau et Léger. La semaine dernière, au Comité des transports qui entreprend une étude sur les médias canadiens, nous avions des représentants du Bureau de la concurrence comme témoins. Le Bureau de la concurrence et le Tribunal de la concurrence, quand ils examinent une nouvelle acquisition qui pourrait mener à une situation de monopole ne tiennent jamais compte des acquis. Ce qui est fait est fait. Le passé est le passé.

Cette pensée devrait s'appliquer à la situation des Acadiens. Ils étaient là. Qu'ils soient anglicisés partiellement ou totalement, il me semble que selon la Loi sur les langues officielles, la dispense et l'accessibilité aux services devraient être offertes activement. Ils ont un droit de priorité. Ils étaient là.

Il ne revient peut-être pas aux fonctionnaires de mettre en place des mesures qui respectent les fondements de la société canadienne. Il appartient certainement aux fonctionnaires, qui l'entendent de notre bouche, de transmettre nos dires à leur ministre pour que les politiques prennent ces décisions.

La présidente: C'est très vrai. Ils étaient là. Si à un moment donné, malheureusement, il y a eu l'anglicisation, c'est une question de survie parce que les services n'étaient pas offerts.

Le sénateur Corbin: Les gouvernements n'ont pas fait leur travail.

Le sénateur Chaput: Ce n'est pas une critique, mais je tiens à partager une observation avec vous. Lorsqu'on parle de l'application du Règlement, on utilise un certain vocabulaire et on parle d'évaluer les nombres et ensuite d'appliquer. À chacune des fois où il est question de générosité, les cheveux me dressent sur la tête. Je me dis que c'est une question de droit, d'équité. Je ne veux pas me voir comme une minorité pour qui on est généreux quand c'est un droit qui me revient.

Le sénateur Comeau: Je voudrais revenir sur les groupes identifiés dans le recensement. Le commentaire a été fait que les Québécois ne sont pas sur la liste alors pourquoi mettre les Acadiens. J'espère que vous examinerez ce constat de très proche. Les Québécois n'ont pas les mêmes difficultés de sauvegarder leur langue et leur culture que les Acadiens. C'est plus souvent facile d'être un francophone dans la ville de Québec que de l'être à la Pointe-de-l'Église ou au Cap-Breton en Nouvelle-Écosse. Je veux que vous vous en rappeliez. Si quelqu'un vous fait un commentaire et si on doit additionner les Acadiens sur la liste, il faut l'ouvrir à tous les autres groupes. Les Acadiens sont un groupe très particulier qui ont subi un taux d'anglicisation inacceptable. Mes commentaires sont très sérieux et étudiez-les.

Mme Monnet: On fera un suivi.

La présidente: Je remercie tous les témoins. Nous suivrons de près les différentes étapes dans cet exercice de révision des règlements. À l'étape finale, nous vous demanderons de comparaître. Vous aurez certainement à identifier la hausse de services qui a été faite suite à cet exercice.

La séance est levée.


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