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SECD - Comité permanent

Sécurité nationale, défense et anciens combattants

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent de la
Sécurité nationale et de la défense

Fascicule 3 - Témoignages du 26 avril 2004


OTTAWA, le lundi 26 avril 2004

Le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense se réunit aujourd'hui, à 18 h 13, dans le but d'examiner, pour ensuite en faire rapport, la nécessité d'une politique nationale sur la sécurité pour le Canada.

Le sénateur Colin Kenny (président) occupe le fauteuil.

Le président: Honorables sénateurs, je suis ravi de vous accueillir au Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense. Je suis Colin Kenny, sénateur de l'Ontario et président du comité. J'aimerais vous présenter les autres sénateurs.

Le sénateur Norm Atkins vient de l'Ontario. Il est arrivé au Sénat en 1986, fort d'une solide connaissance du domaine des communications. Le sénateur Atkins a également été conseiller de l'ancien premier ministre de l'Ontario, M. Davis. Depuis qu'il est sénateur, il s'intéresse à diverses questions ayant trait à l'éducation et à la pauvreté. Il s'est également fait le champion des anciens combattants de la Marine marchande du Canada. Il est très actif au sein de la collectivité et auprès de plusieurs organismes de bienfaisance, dont l'Association canadienne du diabète. Le sénateur Atkins est aussi membre du Comité sénatorial permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration et de notre Sous-comité des anciens combattants.

Le sénateur Joseph Day est du Nouveau-Brunswick. Il a un baccalauréat en génie électrique du Collège militaire royal de Kingston, un baccalauréat en droit de l'Université Queen's et une maîtrise en droit de Osgoode Hall. Avant d'être nommé au Sénat en 2001, il poursuivait une brillante carrière comme avocat de pratique privée. Sur le plan juridique, ses intérêts touchent les brevets, les marques de commerce et les questions relatives à la propriété intellectuelle. Lundi dernier, il a terminé le marathon de Boston en 4 heures, 45 minutes et 16 secondes. Il est également vice-président du Comité sénatorial permanent des finances nationales et de notre Sous-comité des affaires des anciens combattants, et membre actif de l'Assemblée parlementaire de l'OTAN.

Le sénateur Tommy Banks vient de l'Alberta. Il est connu au Canada comme étant l'un de nos artistes les plus accomplis et les plus polyvalents, et comme ambassadeur de la culture canadienne. Musicien lauréat d'un prix Juno, le sénateur Banks s'est fait connaître à l'échelle nationale et internationale comme chef d'orchestre ou directeur musical de nombreuses manifestations prestigieuses, comme par exemple les cérémonies d'ouverture des Jeux olympiques d'hiver de 1988. En 2003, il a été coprésident du groupe de travail du premier ministre sur les questions urbaines. En plus d'être membre de notre comité, le sénateur Banks préside le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles et le groupe parlementaire libéral de l'Alberta.

Le sénateur Meighen est également de l'Ontario. Il a bien réussi comme avocat et homme d'affaires, et a travaillé pour une vaste gamme d'organismes de bienfaisance et d'établissements d'enseignement. Il est chancelier du King's College de l'Université de Halifax, et il siège au Sénat depuis 1990. Son expérience en matière de défense est considérable, et il préside notre Sous-comité des anciens combattants. Il est également membre du Comité sénatorial des banques et du commerce ainsi que du Comité sénatorial permanent des pêches et des océans.

Notre comité est le premier comité permanent du Sénat ayant pour mandat de se pencher sur les questions de sécurité et de défense. Depuis sa création au milieu de l'année 2001, notre comité a publié une série de rapports, dont le premier s'intitulait «L'état de préparation du Canada sur les plans de la sécurité et de la défense». Cette étude a été déposée en février 2002 et aborde les grandes questions relatives à la défense et à la sécurité pour le Canada.

Le Sénat a ensuite demandé à notre comité de se pencher sur la nécessité d'une politique nationale en matière de sécurité. Jusqu'à maintenant, nous avons publié cinq rapports sur les divers aspects de la sécurité nationale: «La défense de l'Amérique du Nord: Une responsabilité canadienne», en septembre 2002; «Mise à jour sur la crise financière des Forces canadiennes: une vue de bas en haut», en novembre 2002; «Le mythe de la sécurité dans les aéroports canadiens», en janvier 2003; «Les côtes du Canada: les plus longues frontières mal défendues au monde», en octobre 2003; et «Les urgences nationales: le Canada, fragile en première ligne», en mars 2004.

Le comité poursuit son évaluation à long terme des politiques de défense et de sécurité canadiennes. Il est en train de préparer une analyse des réponses du gouvernement aux recommandations présentées jusqu'ici, avant de passer aux étapes suivantes.

Nous accueillons ce soir M. Kenneth Calder, sous-ministre adjoint des politiques au ministère de la Défense nationale. Ancien membre du Corps-école d'officiers canadiens, il a passé plus de 30 ans au ministère de la Défense nationale, où il s'est intéressé à la stratégie, au contrôle des armements et aux questions nucléaires. Il a également été le rédacteur en chef du livre blanc sur la défense, déposé en 1987.

En août 1991, il est nommé sous-ministre adjoint. Il est le principal conseiller du sous-ministre de la Défense nationale et du chef d'état-major de la défense en matière de politiques de défense.

Bienvenue au comité.

M. Kenneth J. Calder, sous-ministre adjoint (Politiques), ministère de la Défense nationale: Monsieur le président, sénateurs, c'est un plaisir de vous revoir. Je me suis rendu compte, en préparant mon exposé, que cela fait plus de deux ans que je n'ai pas rencontré le comité. Cette visite s'impose donc depuis longtemps.

Pour vous situer dans le contexte, trois grandes initiatives concernant la politique de sécurité et de défense et la politique internationale ont cours présentement au sein du gouvernement du Canada. Je vais vous en exposer les grandes lignes, dans l'ordre dans lequel elles vont être, selon moi, annoncées publiquement — la politique de sécurité nationale, l'examen de la politique internationale et l'examen de la politique de défense.

Le gouvernement a annoncé, le 12 décembre, qu'il allait élaborer sa toute première politique de sécurité nationale. Il s'agit d'une action intégrée visant l'ensemble du gouvernement qui a pour objectif de contrer les menaces à la sécurité nationale. La vice-première ministre, qui dirige le processus avec l'aide du nouveau conseiller sur la sécurité nationale auprès du BCP, a tracé les grandes lignes de la politique de sécurité nationale dans un discours prononcé le 23 mars.

Elle a déclaré que trois éléments doivent être considérés comme essentiels: assurer la protection physique des Canadiens au pays et à l'étranger; veiller à ce que le Canada ne serve pas de base pour des activités terroristes visant d'autres pays; contribuer à la paix et à la sécurité à l'échelle internationale.

La politique mettra l'accent, notamment, sur le renseignement, les mesures d'urgence et la gestion des opérations, et la sécurité des transports. Ce dernier thème englobe, bien entendu, la sécurité maritime, sujet sur lequel le comité a des idées bien arrêtées.

La politique de sécurité nationale comportera également une dimension internationale, sauf que ce volet ne sera abordé en détail que dans le cadre de l'examen de la politique internationale. L'élaboration de la politique de sécurité nationale progresse bien. Le ministère de la Défense nationale participe au processus, de concert avec d'autres ministères, dont celui des Affaires étrangères.

Nous devons veiller à ce que la politique de sécurité nationale, la politique internationale et la politique de défense se recoupent et se complètent. Je pense que nous sommes en voie d'atteindre cet objectif. La nouvelle politique de sécurité nationale devrait être annoncée sous peu.

Pour ce qui est de la révision de la politique internationale, elle a débuté le 12 décembre, le gouvernement ayant annoncé la tenue d'un examen en profondeur du rôle joué par le Canada à l'échelle internationale. Cette révision devrait mener à l'élaboration d'un cadre politique international intégré et cohérent qui englobe la défense, les relations diplomatiques, le commerce et le développement. L'initiative est dirigée par le ministre des Affaires étrangères, Bill Graham, en étroite collaboration avec les ministres de la Défense nationale, du Commerce international et de la Coopération internationale.

Je tiens à préciser qu'il n'est pas question ici d'un examen de la politique étrangère. Les observateurs font souvent allusion à la révision de la politique étrangère et de la politique de défense qui a eu lieu en 1994. Or, cet examen porte non pas sur la politique étrangère, mais sur l'ensemble des initiatives internationales du gouvernement, et plus précisément les relations diplomatiques, le développement, la défense et le commerce. C'est la première fois que le gouvernement entreprend un examen de ce genre. Il repose sur une démarche beaucoup plus intégrée que celui de 1994 qui, lui, portait sur la politique étrangère et la politique de défense.

Plusieurs organismes sont chargés de coordonner les travaux et de veiller à ce que les ministères concernés participent à l'examen. Divers groupes de travail s'occupent des dossiers. Un comité de SMA, dont je fais partie, se réunit toutes les semaines pour administrer le processus. Les SM se rencontrent également toutes les semaines, quand ils sont disponibles, pour discuter, entre autres, de l'examen de la politique internationale.

Les ministres responsables, quant à eux, se réunissent une fois par semaine, quand ils le peuvent. Enfin, ces questions, bien entendu, font parfois l'objet de discussions au cours des réunions des comités du cabinet qui s'occupent des affaires internationales et des relations canado-américaines. Ces mécanismes ont pour but de faire en sorte que tous les intervenants participent au processus, et qu'une politique bénéficiant d'un vaste appui au sein du gouvernement voit le jour.

L'examen progresse bien. Les ministères s'entendent, de manière générale, sur la nature du contexte international dans lequel nous évoluons, sur les défis auxquels nous sommes confrontés, et sur la nécessité, pour le gouvernement, d'adopter une démarche intégrée dans bon nombre de ces domaines. Comme il l'a mentionné dans son discours du Trône, le gouvernement entend soumettre le cadre politique international à un comité parlementaire à l'automne. Les Canadiens auront l'occasion d'exprimer leurs vues sur celui-ci.

Bien entendu, le processus en est encore à ses débuts et, dans une certaine mesure, je préjuge peut-être des mesures qui seront prises, je m'attends à ce que le cadre politique international repose sur une évaluation réaliste de la situation en ce qui concerne la sécurité internationale, en mettant l'accent sur sa complexité et son imprévisibilité, et qu'il cerne bien les menaces qui pèsent sur le Canada.

Le cadre devrait énoncer les grandes lignes, les principes et les priorités de la politique internationale du Canada, et identifier clairement les principaux instruments dont dispose le Canada, et la Défense nationale en est un, pour jouer un rôle de premier plan à l'échelle internationale. Le cadre exposera les objectifs prioritaires sur lesquels les ministères devront appuyer leurs efforts. Bon nombre des détails de la politique seront définis par chacun des ministères participant au processus. Cela nous amène au troisième point, soit l'examen de la politique de défense.

En effet, pendant que cette autre étude suit son cours, la Défense nationale mène son propre examen, examen, et j'insiste là-dessus, qui s'inscrit dans le cadre politique international et qui doit s'aligner sur les objectifs de la politique de sécurité nationale, laquelle sera annoncée avant que la Défense nationale n'ait terminé ses travaux. Nous voulons nous doter d'une politique de défense qui met l'accent sur les moyens importants dont disposent les Forces canadiennes pour contrer les futures menaces à la sécurité.

Dans le discours qu'il a prononcé la semaine dernière à Gagetown, le premier ministre a donné un aperçu des mesures qu'il entendait prendre, tout comme l'ont fait les ministres qui ont rencontré le CPDNAC et le CAD, de sorte que nous savons dans quelle voie nous nous dirigeons. Au sein du ministère, mon groupe politique travaille en étroite collaboration avec les militaires, notamment le vice-chef de l'état major de la défense, qui est responsable du volet programme de défense.

Nous avons déjà bon nombre des données dont nous avons besoin pour mener à bien l'examen de la politique. Chaque année, la Défense nationale procède à une évaluation stratégique de la situation à l'échelle internationale et des défis de sécurité qui existent, de sorte que nous avons une bonne idée des enjeux planétaires avec lesquels nous devons composer. L'expérience acquise au cours des 10 à 15 dernières années grâce à notre participation à des opérations militaires à l'étranger nous permet également de déterminer ce qui est bon, et ce qui l'est moins, pour les Forces canadiennes. Nous avons donc beaucoup de renseignements sur lesquels fonder notre politique.

Toutefois, nos données comportent des lacunes que nous nous attachons à combler. Nous devrons par ailleurs, à un moment donné, cerner les problèmes qui existent de même que les options qui s'offrent à nous, et solliciter l'avis des ministres sur le sujet.

Franchement, il est encore trop tôt pour dire ce que va renfermer la politique et, de toute façon, il serait inopportun de ma part de vous le dire, puisque ce rôle revient aux ministres. Toutefois, j'ai une petite idée de ce qu'elle va contenir et j'accepterai volontiers de partager cette information avec vous, sauf qu'il se peut que les ministres ne soient pas d'accord avec moi et que la politique propose quelque chose d'entièrement différent.

Par exemple, je ne m'attends pas à ce que les principes qui sous-tendent depuis toujours la politique de défense du Canada changent en profondeur. Par exemple, les trois rôles fondamentaux des Forces canadiennes ne risquent pas, à mon avis, d'être modifiés. Ces rôles, comme vous le savez, sont la défense du Canada, la défense de l'Amérique du Nord et la contribution à la paix et à la sécurité internationales. Je m'attends à ce qu'ils restent tels quels. Quant aux nombreuses activités auxquelles participent les Forces canadiennes au Canada et à l'étranger, elles vont probablement se poursuivre. Il pourrait même y en avoir de nouvelles qui viennent s'ajouter à la liste. Par exemple, au Canada, l'aide au pouvoir civil, l'aide aux autorités civiles en cas d'urgence, la surveillance et la sécurité du territoire canadien, la surveillance des pêches, l'aide humanitaire et l'aide aux sinistrés sont tous des secteurs qui vont être intégrés à la nouvelle politique. Il en va de même pour les opérations à l'étranger, comme les opérations de maintien de la paix et d'imposition de la paix — comme c'est le cas à Kaboul — l'aide humanitaire internationale, le soutien aux Nations unies, à l'OTAN, au NORAD, ainsi de suite.

Je m'attends à ce que la nouvelle politique mette l'accent sur la nécessité d'avoir des forces armées polyvalentes et aptes au combat et polyvalentes. Nous voulons des forces souples et mobiles qui sont capables d'intervenir rapidement et de participer à toute une gamme d'opérations.

Cela dit, il y aura, bien sûr, des changements. C'est inévitable, après une décennie marquée par l'absence d'orientations nouvelles. Ces changements tiendront compte des événements dont nous sommes déjà tristement conscients, soit ceux du 11 septembre et les nouvelles menaces terroristes. La politique subira des modifications, des rajustements, ainsi de suite. Personnellement, je m'attends à ce que l'on mette davantage l'accent sur la protection du Canada et des Canadiens, surtout contre le terrorisme et les menaces asymétriques, et aussi sur la sécurité maritime dans l'ensemble des secteurs relevant de la responsabilité canadienne. Je m'attends à ce que l'on assiste à une plus grande concentration de la sécurité nord-américaine, en collaboration avec les États-Unis, en soulignant l'importance du NORAD, mais sans s'arrêter-là.

Nous allons probablement accentuer nos efforts dans l'Arctique, compte tenu de la fonte de la calotte glaciaire et des conséquences stratégiques que cela implique dans le Nord. Je m'attends aussi à ce que l'on accorde davantage d'importance aux réservistes, c'est-à-dire aux outils dont ils disposent pour faire le travail et le rôle qu'ils sont appelés à jouer. Tous ces éléments feront partie, d'une façon ou d'une autre, de la politique. Le contenu de celle-ci, les orientations proposées, les priorités restent à déterminer.

Par ailleurs, s'il est un sujet sur lequel les ministres devront surtout s'attarder, ce sont les capacités des forces armées. Quels sont les moyens dont disposent les forces armées pour réagir aux menaces futures? Comme je l'ai mentionné, nous avons tiré des enseignements des opérations auxquelles les Forces canadiennes ont participé au cours des 10 à 15 dernières années. Nous pouvons nous fonder là-dessus pour prendre des décisions réalistes.

Il y a toutefois une autre question, peut-être la plus importante de toutes, que nous devons nous poser: jusqu'où pouvons-nous aller? C'est une question à laquelle devra répondre le gouvernement. Nous allons être en mesure d'expliquer au gouvernement que les Forces canadiennes, compte tenu de leurs ressources actuelles et de leur budget, ne peuvent en faire plus à l'étranger. L'armée ne peut participer qu'à un certain nombre d'opérations ou encore ne peut piloter qu'un certain nombre de navires en même temps. Les forces aériennes ne peuvent déployer qu'un certain nombre de F-18, et elles ne peuvent les envoyer à l'étranger que pendant un certain temps. Nous pouvons expliquer toutes ces choses au gouvernement. La question est de savoir s'il va juger cela suffisant. Est-ce que nous en faisons assez? Est-ce que cela correspond aux objectifs de politique générale du gouvernement, aux objectifs de la politique étrangère?

Nous devons également présenter des options au gouvernement en lui indiquant ce qu'il est possible de réaliser s'il souhaite en faire davantage dans un secteur ou dans un autre.

Il nous faut indiquer comment nous allons y parvenir. Nous devons présenter des propositions réalistes. Ils nous faut préciser les coûts de nos propositions de telle sorte que le gouvernement puisse examiner la situation et décider s'il veut effectivement se donner telle ou telle capacité. À partir de ce moment, il est bien évident que l'on présume que le gouvernement sera disposé à nous octroyer des ressources en conséquence.

En dernière analyse, il faut surtout se demander si les capacités dont nous disposons actuellement sont suffisantes ou si le gouvernement souhaite que nous en ayons davantage.

Je voudrais vous parler en terminant des consultations qui constituent un aspect essentiel de ce processus. Comme je l'ai déjà mentionné, le gouvernement a déclaré dans le discours du Trône son intention de soumettre les résultats de l'examen à un comité parlementaire cet automne, après quoi il sera possible de tenir des consultations. Les ministres n'ont pas encore décidé du mode de consultation qui sera utilisé, mais je suis persuadé qu'il y aura effectivement des consultations publiques, comme cela a toujours été le cas dans le passé.

Je suis prêt à répondre à vos questions.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Calder. Vous nous avez présenté un aperçu très intéressant de la situation.

Le sénateur Day: Nous vous remercions pour vos commentaires. Au cours de la dernière semaine, des journalistes ont reproché au ministre de la Défense nationale de ne pas mettre de l'avant une stratégie établie pour le renouvellement du matériel. Si tel est effectivement le cas, est-ce attribuable à l'examen en cours et prévoit-on certaines mesures de renouvellement ou d'acquisition de matériel dont la concrétisation sera fonction de la politique établie?

M. Calder: Je me dois de vous répondre que c'est au ministre lui-même qu'il revient de vous indiquer les raisons pour lesquelles il ne met pas en oeuvre cette stratégie actuellement. Je ne suis pas en mesure de lire dans ses pensées.

Vous parlez en fait du programme d'investissement du ministère. Nous avons toujours eu un programme d'investissement. Cela a toujours fait partie de notre planification; il nous faut regarder 15 ans à l'avance pour déterminer quels projets de défense nous voulons mettre en oeuvre. Il n'y a rien de nouveau sous le soleil. Ce qui change, c'est la façon dont le tout est structuré cette fois-ci et le nouveau nom qu'on a donné à l'exercice. On y établit pour une longue période le financement nécessaire, les projets à réaliser et l'ordre d'enchaînement de ces projets.

Comme je peux le constater d'après les mêmes rapports que vous avez consultés, le ministre se penche actuellement sur la question. Il est tout à fait normal qu'un ministre devant engager des milliards de dollars dans des projets sur une période de 15 ans y pense à deux fois et prenne tout le temps nécessaire pour donner son approbation. Cela ne met d'aucune façon un frein à nos activités. Certains laissent entendre que tout est arrêté tant que le ministre n'aura pas donné son aval. C'est faux. Comme vous le savez, nous avons fait récemment des annonces au sujet d'un aéronef de recherches et de sauvetage à voilure fixe, de navires de soutien et du système de canon mobile. Le processus de renouvellement du matériel militaire se poursuit bel et bien.

À ce moment-ci, le ministre veut bien réfléchir avant d'apposer sa signature sur ce document.

Le sénateur Day: J'aimerais vous parler un peu du processus suivi. Il me semble qu'au cours des deux dernières années, soit depuis votre dernière présence ici, nous avons entendu des déclarations de l'Armée de terre, de la Marine et de la Force aérienne qui traitaient de l'évolution de leur rôle au sein des forces armées au cours des prochaines années. Je me demandais si ces déclarations font partie de la base de renseignements dont vous disiez disposer et qui contribuera à guider l'élaboration du plan général.

Il m'a semblé qu'un certain nombre des enjeux soulevés dans ces différentes déclarations ne se retrouvaient pas dans la politique de 1994. On semblait proposer une orientation pour les Forces canadiennes, mais sans direction politique, seulement en fonction des besoins déterminés à l'interne et des fonds disponibles.

M. Calder: Le ministère et le ministre encouragent les Forces canadiennes à réfléchir à leur situation actuelle et à leurs orientations futures ainsi qu'aux moyens à prendre pour se donner de nouvelles capacités pour l'avenir. Lorsque nous élaborons une politique de défense, il est bien évident que nous nous appuyons dans une très large mesure sur les conseils des militaires quant aux genres de capacités dont ils estiment avoir besoin et qui conviennent à la situation. Ainsi, c'est le personnel militaire qui examine l'état actuel des choses et propose certaines suggestions quant aux mesures à prendre et aux capacités que l'on doit se donner. Inévitablement, ces suggestions vont plus loin que ce qui est prévu dans le livre blanc qui remonte à 1994 parce que la technologie militaire a beaucoup évolué, de même que le type d'opérations auxquelles nous participons. Les différentes sections des Forces canadiennes ont tiré de nombreux enseignements des expériences qu'elles ont vécues récemment à l'étranger: l'expérience de la Force aérienne dans la campagne au Kosovo; l'expérience que l'Armée de terre vit actuellement à Kaboul ou à Kandahar; et toute l'expérience que notre Marine a accumulée dans l'océan Indien. Nous avons ainsi pu cerner de nombreuses capacités qui pourraient nous être utiles. En un sens, ce processus de réflexion des trois forces armées qui aboutit sur l'élaboration de plans cohérents constitue un élément essentiel de tout le processus d'examen des politiques. Pour que moi et mon personnel puissions présenter un document stratégique, nous avons besoin de l'apport de véritables experts du secteur militaire qui connaissent bien toutes ces capacités de défense. Cela fait partie intégrante du processus. Nous ne sommes pas toujours entièrement d'accord, mais il nous faut, dans le cadre de ce processus stratégique, dégager un consensus quant aux orientations que le gouvernement devrait prendre.

Le sénateur Day: Qu'est-ce que vous attendez de l'examen en cours? Je crois que vous avez répondu, du moins partiellement, à une question vous demandant s'il était guidé par la disponibilité des fonds. S'agit-il d'indiquer ce qu'il conviendrait idéalement de faire pour répondre aux besoins du Canada pour ce qui est de ses forces armées, de notre participation à l'échelle du pays et de l'Amérique du Nord et de nos obligations internationales, en laissant aux instances politiques le soin de décider si les fonds nécessaires sont disponibles? Ou dites-vous plutôt: «Voilà ce que coûterait la situation optimale; une information essentielle avant d'annoncer ce que nous allons faire, le processus étant donc guidé par les fonds disponibles»?

M. Calder: Si je puis me permettre, les choses se passent en fait autrement. Il n'est certes pas question d'effectuer un examen assujetti à un budget préétabli, sans possibilité de changement. Ce n'est sûrement pas comme ça que je vois les choses. En fait, je crois que le gouvernement a déclaré, après les dernières augmentations, que toute hausse future des dépenses militaires serait fonction des résultats de l'examen. De toute évidence, nous n'avons pas les mains liées par un plafond budgétaire quelconque.

Par ailleurs, ce n'est pas nous qui irons dire au gouvernement: «Voici la structure militaire idéale que nous vous recommandons et il vous en coûtera tant», parce que ce n'est bien évidemment pas à nous qu'il incombe de déterminer ce qui convient idéalement pour répondre aux besoins militaires du gouvernement. C'est une décision qui revient au gouvernement lui-même.

Comme je l'ai indiqué, nous n'avons pas à nous en tenir à un budget préétabli. Nous allons plutôt nous présenter en ces termes devant le gouvernement: «Voici les options qui s'offrent à vous. Vous avez certains choix à faire. Certains niveaux de capacités sont possibles, tant du point de vue de la quantité que de la qualité, et voilà ce qui en coûterait. C'est à vous de choisir.»

Il n'existe pas de structure idéale. Tout dépend en grande partie des priorités du gouvernement, de ses objectifs, du rôle qu'il compte jouer dans le monde, et cetera. On ne peut pas répondre à cette question. Malheureusement, ce n'est pas un processus empirique.

Le sénateur Day: Quel résultat devons-nous attendre de cet exercice? Aurons-nous droit à un plan directeur traçant les orientations que nous comptons prendre au cours des prochaines années, ou sommes-nous à la merci des négligences passées? Il serait par exemple excessivement coûteux de maintenir en fonction le CF-18, notre avion de chasse, et de conserver cette capacité. Est-ce que la politique proposera d'abandonner les chars et les avions de chasse parce que nous pouvons nous en passer et que nous n'avons pas les moyens de maintenir cette capacité?

M. Calder: Il faudrait s'attendre, espérons-le, à une politique réaliste, qui établirait, comme vous l'avez dit, l'orientation pour la prochaine décennie et qui se verrait octroyer tous les fonds nécessaires et profiterait d'un vaste soutien public. Je crois que c'est l'objectif visé.

Pour ce qui est des différentes capacités, il nous faudra examiner les actifs actuels des Forces canadiennes et nous demander s'il y a des choses dont nous n'avons pas besoin, de manière à pouvoir nous en départir et réaffecter les fonds ainsi libérés. C'est un exercice qui se fait actuellement dans tout le gouvernement. On demande aux ministères d'examiner les possibilités de réaffectation des fonds parce que les budgets ne sont pas illimités. Nous nous devons d'examiner nous aussi ces possibilités. Ce sont en grande partie ces considérations qui ont guidé la décision de laisser tomber le char de combat principal au profit du système de canon mobile. Nous nous sommes simplement dit que nous pouvions réaffecter ces fonds pour nous donner une capacité qui convient beaucoup mieux aux missions qui nous sont confiées.

Le sénateur Day: À mon avis, c'est là un bon exemple d'une décision stratégique qui a été prise en fonction des fonds disponibles. N'est-ce pas le cas?

M. Calder: Non, mais il faut quand même tenir compte du budget à notre disposition. Cette décision résulte en grande partie d'une recommandation formulée par l'Armée de terre qui a indiqué ne pas avoir utilisé le char de combat principal, à une ou deux exceptions près, depuis notre départ de l'Europe. Heureusement, nous n'avons pas eu à les utiliser là-bas non plus. Dans toutes les opérations auxquelles nous avons participé au cours des 15 dernières années, nous n'avons déployé aucun de ces chars de combat, à l'exception d'un seul et unique d'entre eux dans les Balkans. C'est un équipement que nous n'utilisons pas et que nous ne prévoyons pas utiliser. Nous ne croyons pas qu'il nous sera d'une grande utilité.

Par ailleurs, le système de canon mobile est plus petit, peut se déplacer plus rapidement et a beaucoup de puissance. Si vous demandez à n'importe lequel de nos commandants, par exemple en Bosnie, et même à Kaboul ou ailleurs, s'il voudrait avoir quelques-uns de ces systèmes à sa disposition, il vous répondra: «Absolument!» C'est un équipement qui peut être très utile dans le genre de situations où les Forces canadiennes sont déployées.

Cette décision a été prise en fonction de la stricte utilité militaire. Elle comporte toutefois un aspect financier. Des fonds ont été réaffectés, mais la décision n'est pas attribuable au fait que le système de canon mobile est moins coûteux que le char de combat principal. C'est une simple question d'utilité. Il nous faut examiner nos inventaires et nous demander ce qui servira dans l'avenir et ce qui ne sera plus utilisé. Nous devons aussi nous demander ce qui nous manque, ces équipements dont nous ne disposons pas et que nous souhaiterions acquérir parce qu'ils pourraient nous être utiles. C'est à cette fin que nous nous tournons vers les militaires, dans bien des cas, pour qu'ils nous indiquent, selon leur expérience concrète des opérations, les outils dont ils pourraient avoir besoin.

Je suppose que la prochaine politique traitera des points que vous avez soulevés, du CF-18 notamment. Nous avons eu droit à une mise à jour concernant le F-18. De toute évidence, ces avions demeureront utiles pendant un certain temps. Il faut toutefois s'interroger sur ce que l'avenir leur réserve. Cette question devra être traitée lors du présent examen ou du suivant. On ne peut pas tout régler en même temps.

Le président: Concernant le point soulevé par le sénateur Day, docteur Calder, on note un certain scepticisme chez les membres du comité et les parlementaires qui suivent ces questions. Vous avez fait un très bon travail avec le dernier livre blanc, mais le ministère et vous-même avez été floués parce qu'il était établi en fonction d'un certain niveau de financement. Les fonds prévus n'ont pas été dégagés et nous nous retrouvons avec des Forces canadiennes en état de délabrement depuis une dizaine d'années en raison de la l'absence d'un financement stable et d'un environnement de planification sur lequel on pourrait compter.

Si on considère le prochain livre blanc, comment pouvez-vous vous attendre à ce que les parlementaires et, par extension, les Canadiens prennent au sérieux un tel projet ou exercice de planification alors que nous nous rappelons tous de ce qui est arrivé avec le précédent, qui s'est révélé en grande partie une perte de temps?

M. Calder: Étant moi-même responsable du processus qui lui a donné naissance, vous ne me ferez jamais dire qu'un livre blanc qui a survécu pendant 10 ans et qui demeure en vigueur jusqu'à ce qu'une nouvelle politique gouvernementale le remplace a été une perte de temps. J'estime qu'il a été plutôt efficace.

Le président: C'est précisément ce que j'ai dit: c'est un livre blanc qui aurait dû être efficace. Le seul problème, c'est que le gouvernement lui a retiré son soutien au bout de six mois.

M. Calder: Je crois que vous exagérez un peu. Certaines des réductions qui ont été effectuées, même après la parution du livre blanc étaient prévues dans le processus. Par exemple, le livre blanc a été rendu public en décembre 1994. Il y a eu des réductions budgétaires au début de 1995. Ces réductions étaient anticipées lorsque nous rédigions le livre blanc. Nous savions qu'il y en aurait; nous n'avons donc pas été surpris.

Il est vrai qu'après cela, nous avons connu une période difficile du point de vue financier, ce qui arrive inévitablement de temps à autre au gouvernement. Les décisions que le gouvernement prend quant à l'utilisation de ses fonds n'enlèvent rien à la valeur des efforts déployés pour déterminer ce qu'on souhaite faire et s'assurer ensuite du financement nécessaire. C'est un défi sans cesse renouvelé. Un défi auquel tous les gouvernements sont confrontés selon moi. Un défi que nous devrons relever de nouveau avec le prochain livre blanc.

Le président: Croyez-vous que le délai trop long entre la parution des Livres blancs soit responsable de cette situation?

M. Calder: Non, je ne crois pas que ce soit un facteur. Au bout du compte, le montant qui nous est octroyé dépend des choix faits par le gouvernement et des priorités qu'il a établies ainsi que des fonds et des ressources à sa disposition. Pendant la plus grande partie de la période ayant suivi la parution du livre blanc de 1994, l'accent était mis sur le déficit et la réduction des dépenses gouvernementales. Il y a eu l'examen des programmes. C'était la grande priorité du gouvernement. En dernière analyse, l'argent que nous obtenons est fonction des choix et des priorités du gouvernement. Comme il se doit, nous nous efforçons de mettre en oeuvre notre politique de défense au meilleur de nos capacités avec les ressources qui nous sont octroyées.

Le président: Je comprends. Ne voyez pas une critique dans mes commentaires. Ce serait plutôt le contraire. Je voulais vous complimenter. Je voulais dire que la plupart des gens considèrent votre livre blanc comme le fruit d'un excellent travail. Ils croient seulement que le gouvernement ne s'est vraiment pas montré à la hauteur en ne vous attribuant pas les fonds nécessaires. Si le gouvernement avait choisi d'injecter les fonds suffisants dans cet exercice, ce livre blanc serait un document valable encore aujourd'hui.

Ce que je voulais faire ressortir, c'est que nous nous retrouvons avec des Forces canadiennes en profond désarroi. Nous ne pouvons nous servir d'aucune des armes à notre disposition. La Marine a indiqué que ses navires ne peuvent plus prendre la mer. La Force aérienne est aux prises avec d'énormes problèmes d'entretien et des avions qui ne peuvent plus décoller. L'Armée de terre est utilisée bien au-delà de ses capacités. Vous êtes conscient de toutes ces choses. Vous faites de votre mieux pour établir une politique qui rectifiera la situation, mais lorsque vous présentez finalement vos propositions, vous devez être aussi sceptique que nous, car vos stratégies ne seront efficaces que dans la mesure où elles disposeront des fonds suffisants. Peu importe l'ardeur que vous mettez au travail et les efforts consentis par les membres des Forces canadiennes pour établir un plan, si la volonté politique ne suit pas, rien ne changera.

M. Calder: Monsieur le président, je ne suis pas d'accord avec votre évaluation pessimiste de la situation actuelle. Des difficultés et des défis se dressent devant nous, je vous l'accorde. Je n'irais toutefois pas jusqu'à dire que les Forces canadiennes sont en plein désarroi comme vous l'avez prétendu. Si vous examinez les activités récentes de nos différents secteurs, vous constatez que lors de la campagne aérienne au Kosovo, nous avons déployé des CF-18. Nous étions l'un des quatre seuls pays de l'OTAN capables de larguer les armes guidées de précision qu'exigeait ce conflit. Je le répète: l'un des quatre seuls pays de l'OTAN à avoir cette capacité.

Ce n'est pas ce que j'appelle une Force aérienne en désarroi; d'autant plus que nous travaillons à améliorer le F-18.

Dans le même ordre d'idées, nous avons déployé nos Forces en Bosnie. Alors que bon nombre de nos critiques soutenaient que l'armée canadienne n'était plus apte au combat, nous avons aussi déployé des hommes à Kandahar, où ils ont fait aussi bien que toutes les autres forces présentes en Afghanistan, et même mieux que certaines d'entre elles. L'armée canadienne a démontré qu'elle était apte au combat dans cet environnement. Aujourd'hui, par exemple, nous constituons le plus gros des forces de l'ISAF à Kaboul. Ce sont les Forces canadiennes et leur commandant qui assurent en fait la bonne marche de l'opération de l'OTAN là-bas. Rien à voir avec une armée en plein désarroi. C'est certes une armée soumise à rude épreuve, mais c'est aussi une armée faisant montre d'une compétence extraordinaire pour le travail qui lui est confié.

Pour ce qui est de la Marine, nous avons déployé des navires dans l'océan Indien pour lutter contre le terrorisme en nombre supérieur à la capacité que nous avions indiquée dans le livre blanc. Nous en avons fait plus que ce que le document de 1994 prévoyait pour ce qui est des activités maritimes et on nous a considérés suffisamment efficaces pour nous confier cette tâche. Les Américains nous ont également mandaté pour diriger des groupes d'intervention, en plus d'avoir nos propres navires sur place, et nos gens ont fait un travail extraordinaire comme force maritime d'interdiction. Les Forces canadiennes sont soumises à des pressions, je vous l'accorde. Il y a des exigences à remplir. Comme nous le savons tous je crois, il y aura du financement à trouver pour l'avenir, mais je ne pense pas que l'on fasse avancer le débat en exagérant au point de dire que nos Forces sont en proie au désarroi. Il y a des pressions qui s'exercent et nous devrons en tenir compte dans le livre blanc. Il faut préciser que, parallèlement à ce processus, beaucoup de choses se sont produites. De nombreux équipements ont été changés depuis 1994, y compris les sous- marins, les Coyotes et les LAV-3. Un grand nombre de mesures ont été prises pour améliorer les capacités des Forces canadiennes.

Je crois qu'aucun d'entre nous ne voudrait se retrouver dans la situation où nous étions en 1994.

Le président: Pourriez-vous nous citer un seul groupe indépendant qui aurait indiqué que les Forces canadiennes ne sont pas mal en point?

M. Calder: Je suis certain que je pourrais, mais il n'y a aucun exemple qui vienne à l'esprit.

Le sénateur Day: Si M. Calder trouve un tel exemple, il pourrait le porter à notre connaissance ultérieurement.

M. Calder: D'autre part, si vous examiniez les études réalisées par des universitaires sur les questions militaires, je ne suis pas convaincu qu'ils seraient tous en désaccord avec moi. Certains seulement.

Le sénateur Meighen: Vous en avez peut-être déjà parlé, monsieur Calder, et je l'ai peut-être manqué, mais je veux être sûr de bien comprendre le processus qui a été suivi. Dois-je comprendre que l'on s'en tient aux principes fondamentaux du livre blanc de 1994 avec certaines distinctions quant à la concentration des efforts, comme vous l'avez mentionné, notamment avec un accent accru sur la sécurité maritime, une collaboration plus étroite avec les États-Unis, une présence plus soutenue dans l'Arctique, davantage de rôles pour la réserve — et, je ne peux pas m'empêcher de le dire, tout cela sans plus d'argent, mais c'est une autre histoire? Si tel est le cas, je présume que vous ne travaillez pas en vase clos. Sans doute recevez-vous certains encouragements politiques pour apporter ces changements d'orientation, ou alors vous travaillez totalement en vase clos? Je m'inquiète de ne constater aucun effort pour inscrire votre travail dans le cadre de la volonté politique du gouvernement pour l'instant.

M. Calder: J'ose espérer que ce n'est pas le cas, sénateur.

Dans cette partie de mon exposé, je vous faisais part de mes impressions quant à la suite des événements. Il se peut fort bien que je me trompe, mais ces impressions sont fondées, en toute honnêteté, sur les grands débats qui ont cours, les déclarations que le premier ministre et les ministres ont faites et les opinions formulées par votre comité. Certains des éléments qui, comme je l'ai indiqué, devraient faire partie de la nouvelle politique découlent d'ailleurs de recommandations formulées, si je ne m'abuse, par votre comité. Je vous indiquais simplement l'orientation que les choses semblaient prendre. Ce sont bien sûr les ministres qui ont le dernier mot; ils peuvent bien dire: «Calder, vous êtes totalement dans l'erreur, ce n'est pas du tout vers là que nous nous dirigeons.» Tout cela dépend...

Le sénateur Meighen: Est-ce que vous recommencez tout à zéro?

M. Calder: Non.

Le sénateur Meighen: Je ne voudrais pas vous provoquer mais, par exemple, en quoi êtes-vous habilité à soutenir — si c'est bien ce que vous dites; je ne voudrais pas vous mettre des mots dans la bouche — que les principes fondamentaux du livre blanc de 1994 sont toujours valables et que nous allons travailler à partir de cette base, y ajouter des éléments, en changer certains et faire ceci et cela? Peut-être dites-vous cela seulement pour vous rassurer vous- même.

M. Calder: Peut-être bien, mais c'est exactement la raison pour laquelle je vous ai averti au départ qu'il est possible que, dans les faits, mes supérieurs soient d'un tout autre avis.

Sénateur, l'un des principes fondamentaux qui guide les Forces canadiennes, leur mission première en fait, est la défense du Canada. Le comité n'est-il pas de cet avis également?

La seconde mission des Forces canadiennes est la défense de l'Amérique du Nord en coopération avec les États- Unis. Je n'ai jamais entendu personne prétendre le contraire aux séances de ce comité ou du Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants, pas plus qu'au sein des cercles universitaires et sur les différentes tribunes publiques.

Leur troisième rôle consiste à travailler à la paix dans le monde et à la sécurité internationale.

Mais nous ne sommes pas obligés de le faire. Il n'est pas obligatoire que le gouvernement du Canada contribue aux efforts de paix et de sécurité internationale, mais à la lumière de tout ce que j'ai entendu de la part du premier ministre, du ministre des Affaires étrangères et du ministre de la Défense nationale, il est bien évident que c'est également un rôle que nous avons à jouer.

J'ose espérer que je ne travaille pas en vase clos, mais bel et bien en fonction des déclarations qui sont faites et des éléments qui font l'objet de discussions sur les tribunes publiques. Je vous ai présenté ma meilleure appréciation possible de la situation, mais il se peut que je sois dans l'erreur.

Le sénateur Meighen: Vous faites partie de l'équipe, n'est-ce pas?

M. Calder: Oui.

Le sénateur Meighen: Je suppose donc que votre évaluation de la situation devrait être plutôt bonne.

Je m'inquiète tout de même de vous voir travailler davantage en vase clos que je le jugerais approprié.

Si aucune orientation politique n'est imprimée au processus, nous faisons du surplace. Ne serait-ce que pour vous dire: «Monsieur Calder, vous pouvez établir des politiques, mais il nous sera impossible d'augmenter considérablement le financement», si telle est la situation, ou encore: «Préparez une politique, nous comprenons qu'il y aura des augmentations, peut-être ne pourrons-nous pas tout faire, mais nous sommes conscients qu'il faudra accroître l'enveloppe de la Défense». D'après ce que vous m'avez dit, on ne vous pas fourni d'indications de ce genre.

M. Calder: Nous recevons pourtant de telles indications, sénateur. Par exemple, le discours du premier ministre à Gagetown donnait un bon aperçu de ce à quoi il fallait s'attendre au chapitre des politiques. Mon ministre a également pris position sur certaines questions lorsqu'il a pris la parole devant l'ACD et le CPDNAC. Je tiens compte de ce que disent ces gens. Il est bien certain que je vois là une certaine forme d'orientation. Nous ne travaillons pas en vase clos.

Le sénateur Meighen: Différents ministres de la défense, et il y en a eu un certain nombre, ont adopté différentes positions, alors je suppose que vous devez vous fier au point de vue adopté par le plus récent ministre?

M. Calder: Non. Je tiens compte de la position adoptée par le ministre de la Défense nationale qui est en poste.

Le sénateur Meighen: C'est effectivement une meilleure façon de dire les choses pour vous.

Le sénateur Banks: Je vais tenter de diriger la discussion vers une avenue un peu différente parce que j'aimerais connaître votre point de vue en ce qui a trait aux examens des politiques qui s'annoncent. Cependant, je ne voudrais pas clore le sujet sur lequel mes prédécesseurs vous ont questionné sans bien préciser, dans le contexte de votre réponse au président concernant les bonnes choses que les Forces canadiennes ont faites au cours des dernières années, que nous n'avons jamais mis en doute, et que nous ne le faisons pas actuellement — en fait, vous avez toute notre admiration — la compétence des membres des Forces canadiennes et le fait qu'ils ont offert un rendement supérieur à celui auquel on était raisonnablement en droit de s'attendre dans un contexte particulièrement difficile.

C'est la vérité: la première fois que nous avons déployé des soldats au sol en Afghanistan, le commandant américain alors responsable de l'opération a indiqué qu'ils étaient les meilleurs soldats à sa disposition.

Cependant, nous n'avons pas pu les remplacer. Nous n'avons pas pu remplacer 800 soldats. Le Canada n'a pas pu remplacer 800 soldats, ce qui a amené bon nombre d'entre nous à développer une opinion bien particulière au sujet du livre blanc.

Le livre blanc de 1994, qui était très bien fait, mais relevait d'un «système à la Rube Goldberg», indiquait, si ma mémoire est fidèle, que nous ne pouvions pas installer et maintenir en poste un corps de brigade sur les côtes étrangères pendant quelques mois.

M. Calder: On parlait de six mois.

Le sénateur Banks: Nous n'avons jamais été capables de le faire depuis 1994. Je crois que c'est l'élément qui nous est tous resté en travers de la gorge. Il est toujours bon d'avoir un plan quel qu'il soit, mais pour qu'il soit efficace et puisse être mis en oeuvre, il faut disposer des fonds nécessaires. Nous croyons qu'il est temps de rectifier le tir et c'est ce que les Canadiens souhaitent également.

J'en arrive maintenant aux questions posées par le sénateur Day. Dans quelle situation devrions-nous nous retrouver? «Nous disposons d'une certaine quantité de fonds; voilà ce que nous pouvons faire.» Ou encore: «Voici ce que nous devrions pouvoir faire, alors nous avons besoin de tant d'argent.» Je suis conscient que la vérité se situe, comme vous l'avez dit, quelque part entre ces deux énoncés, mais pouvez-vous nous expliquer la différence? Nous avons déjà fait valoir le point de vue qu'une politique de défense devait s'appuyer sur une politique étrangère. Une fois que vous avez établi votre politique étrangère, elle permet de justifier, voir presque de déterminer, votre politique de défense.

Monsieur Calder, vous nous avez dit, si j'ai bien compris, qu'il n'y aurait pas d'examen de notre politique étrangère, mais bien un examen de notre politique internationale. Je sais que ce n'est pas la même chose, mais pourriez-vous expliquer la différence à notre comité?

M. Calder: Tout d'abord, je conviens avec le comité que la politique de défense devrait idéalement s'appuyer sur la politique étrangère. Dans la situation actuelle, nous allons prendre appui sur le cadre de politique internationale. Il est bien évident que l'élaboration de la politique de la défense sera guidée par la teneur de la politique de sécurité nationale qui traitera d'un large éventail de sujets.

Nous pourrons également nous inspirer du cadre de politique internationale, qui est élaboré par les Affaires étrangères avec notre coopération, et qui, espérons-le, établira les grandes priorités du gouvernement canadien et les secteurs dans lesquels nous devrons jouer un rôle à l'échelle internationale. Il fera pour nous office de politique étrangère. Si nous parvenons à établir une politique de défense s'harmonisant assez bien avec ces deux cadres stratégiques, nous nous retrouverons en bien meilleure posture.

Votre question concernant les 800 soldats me ramène à un point que j'ai fait valoir dans mon exposé. En bout de ligne, une seule question se pose: Combien? À combien de missions le gouvernement du Canada veut-il participer? À l'heure actuelle, nous participons à une mission assez importante à Kaboul et nous sommes toujours présents en Bosnie et à Haïti. Est-ce que notre armée fonctionne à pleine capacité? Est-ce suffisant ou devrions-nous pouvoir en faire davantage? Devrions-nous être capables de participer à ces missions pendant de plus longues périodes? Ces options doivent être présentées au gouvernement qui aura des choix à faire quant au financement.

Le sénateur Banks: Ces questions ne relèvent-elles pas davantage de la politique internationale que de la politique de défense? La question de la magnitude de nos interventions relève de la politique étrangère, n'est-ce pas?

M. Calder: Oui, tout à fait. Il faut aussi déterminer ce que nous avons à faire par rapport aux Nations Unies et à l'OTAN. Dans quelle région du monde devrions-nous participer à des opérations pour la paix et la sécurité internationale? À quel genre d'opérations devrions-nous prendre part? Ces questions revêtent une importance capitale pour mon organisation, mais elles sont également liées à la politique étrangère. Notre politique étrangère peut nous indiquer que le Canada ne veut pas participer à des opérations dans certaines régions du globe ou prendre part à certains types d'opérations. En pareil cas, le gouvernement adapte sa politique de défense en conséquence.

J'espère que lorsque nous en arriverons là notre cadre de politique internationale nous guidera quant à la marche à suivre.

Le sénateur Banks: J'aurais une autre question pour que vous me rassuriez un peu. Nous avons fait référence dans certains de nos rapports à ce que nous avons assez justement appelé un fouillis d'études, de bureaux pour ceci et de politiques pour cela; d'aperçus de ceci et de cela; le tout étant source de confusion à un point tel qu'il devient difficile de déterminer qui est vraiment aux commandes et à qui il faut s'adresser pour poser les questions suivantes: Quelle est la politique? Qui décide entre A, B et C?

Monsieur Calder, vous venez à peine de décrire trois examens qui sont en cours et qui sont censés se rejoindre éventuellement. Avez-vous bon espoir qu'une telle fusion se produise dans un avenir prévisible, ce qui ne semble pas vouloir être le cas actuellement, de manière à ce que nous puissions savoir avec plus de précision qui est responsable de quoi?

M. Calder: J'ose espérer qu'une fois ces trois examens terminés, tout le tableau sera beaucoup plus clair. Il sera alors très facile de savoir à qui s'adresser pour obtenir réponse à ces questions dans un secteur particulier. Bien évidemment, le vice-premier ministre et le conseiller national pour la sécurité sont les deux personnes responsables de la politique de sécurité nationale. Le ministre de la Défense nationale est la personne-ressource pour la politique de défense alors que les autres ministres, M. Graham et Mme Carroll, s'occupent de leurs sphères de compétence respectives. En définitive, vous devez vous adresser au ministre responsable du portefeuille concerné.

Le sénateur Banks: Je sais bien, mais pour poser ma question autrement, estimez-vous que la protection du territoire et les déconnexions entre communication et information, des questions pouvant être réglées à d'autres niveaux, ne relèvent pas de votre sphère d'influence, de contrôle et d'intérêt?

M. Calder: Je crois que oui, si j'ai bien compris la question. Je suis agréablement surpris par le niveau de consensus atteint, surtout relativement au cadre de politique internationale, entre mon ministère, celui des Affaires étrangères et du Commerce international et l'ACDI. Nous nous réunissons chaque semaine et j'ai pu constater avec grand plaisir que nous partageons une vision commune. Il n'y aura pas de déconnexion dans ce secteur, et j'espère que cela reflétera à la fin du processus, tout comme au début.

Le sénateur Banks: Le premier ministre a annoncé les nouveaux navires de grande dimension que nous allons concevoir et construire; une nouvelle qui a beaucoup réjoui certains d'entre nous. Nous demandons depuis longtemps que des actions soient entreprises pour améliorer la capacité d'intervention des Forces canadiennes parce que nous n'avons rien fait en ce sens depuis si longtemps. Je sais que vous avez entendu des milliers de propositions provenant de différentes personnes qui vous disaient comment mieux gérer les fonds disponibles pour les Forces canadiennes, y compris en ciblant des types particuliers d'intervention. Concentrons-nous sur la marine, mais laissons tomber l'armée et la force aérienne — et les innombrables variations sur le même thème.

Le fait d'investir autant d'argent dans trois gros navires qui présentent des capacités très précises n'est-il pas un indice que nous envisageons sérieusement des rôles spécialisés au lieu d'un rôle interopérable plus vaste pour nos forces armées?

M. Calder: Je ne le crois pas. Ces navires comportent une capacité dont la marine a besoin pour s'acquitter de presque toutes ses fonctions. Je ne vois aucun lien entre cet investissement et d'éventuels rôles spécialisés pour les Forces canadiennes. Je ne recommanderais certainement pas d'opter pour les rôles spécialisés.

Le sénateur Banks: Le transport de charges lourdes n'est pas un rôle que la marine canadienne joue présentement, et ne l'a d'ailleurs jamais été.

M. Calder: C'est exact.

Le sénateur Banks: La marine canadienne n'a jamais eu de navire qui pouvait transporter 100 camions, mais nous parlons maintenant de pareil rôle; c'est nouveau.

M. Calder: Je crois que nous profitons du fait qu'il faut remplacer les navires de ravitaillement et que nous réalisons que nous pouvons faire autres choses. C'est l'occasion non seulement de remplacer les navires, mais aussi d'en améliorer la capacité. Nous avons commencé à en parler il y a plusieurs années et nous avions déterminé que si nous devions acquérir un nouveau navire, il serait possible d'y ajouter certaines caractéristiques qui le rendraient polyvalent. Par exemple, nous avons utilisé l'un des AOR comme quartier général au large de la Somalie durant cette opération, et nous avons alors décidé qu'il serait utile de pouvoir établir un quartier général sur ce navire.

Ce navire pourrait évidemment servir de centre médical au large d'un théâtre d'opération. Il y a aussi la question du transport. Voilà un exemple de situation où les gens nous ont dit de profiter de l'occasion pour améliorer notre capacité de transport, qui fait présentement défaut. Or, cet opportunisme nous permet d'augmenter nos capacités et ne nous confine pas à un rôle spécialisé.

Le sénateur Banks: Je crois que tous mes collègues en seraient très heureux. Les navires seront-ils construits ici?

M. Calder: Vous savez certainement, monsieur le sénateur, que la politique précise qu'ils seront construits au Canada si les entreprises canadiennes sont concurrentielles.

Le président: À ce sujet, nous avons l'impression que l'amiral Buck rêve de ces navires depuis des années, sinon des décennies. Pourquoi faudra-t-il attendre si longtemps avant qu'un contrat ne soit attribué? Pourquoi consacrer deux ans à la conception? Le comité a tendance à ne plus croire aux promesses. Pourquoi ce délai?

M. Calder: Vous me demandez, sénateur, de m'éloigner de mon domaine de compétence, puisque que je ne me suis jamais occupé d'achat.

Je crois comprendre que les projets de cette envergure prennent beaucoup de temps, entre autres parce que nous parlons ici de capacité. Selon ce que je comprends — et je ne suis pas un expert — aucun plan n'existe actuellement, si bien qu'il faudra concevoir quelque chose qui est nouveau et unique. Le processus en sera retardé.

Je sais que certains ont laissé entendre devant le comité que nous devrions acheter un navire qui est déjà disponible sur le marché. Toutefois, on me dit que ce que cherche la marine ne se trouve pas présentement dans le commerce. Je ne fais que répéter ce qu'on m'a dit.

Le sénateur Meighen: M. Calder pourrait peut-être nous aider. Beaucoup de personnes prétendent, à tort ou à raison, que notre processus d'achat prend trop de temps. Certaines propositions ont été avancées — acheter davantage dans le commerce, notamment des plans — et vous venez de dire pourquoi, dans ce cas-ci, il serait impossible d'acheter les plans d'un navire. Selon votre expérience, qui le comité pourrait-il convoquer, s'il avait le temps et l'intérêt, pour lui expliquer le processus d'achat et les raisons pour lesquelles ce processus paraît si long?

M. Calder: Sénateur, je dois dire que les délais que comporte le processus d'acquisition constituent un problème qui existe au moins depuis le moment que je suis entré en fonction. Je me souviens que le ministère a mené des études sur ce sujet il y a plus de 10 ans. Cette question est très difficile et très complexe.

La personne à qui vous devriez vous adresser est mon collègue, Alan Williams, sous-ministre adjoint (Matériels). C'est lui qui est responsable de tout le processus d'acquisition au sein du ministère; c'est lui l'expert.

Vous pourriez également communiquer avec les gens de Travaux publics qui s'occupent du processus d'achat et d'attribution des contrats pour la Défense nationale, parce qu'ils font partie du casse-tête. Comme je l'ai mentionné, je vous recommanderais Alan Williams, qui connaît le sujet beaucoup mieux que moi.

Dans ce cas particulier, on me dit qu'il n'existe aucun plan. Toutefois, nous disons depuis au moins 10 ans — et nous le faisons valoir dans notre politique — que nous devrions, autant que possible, acheter des plans qui ont fait leurs preuves et qui se trouvent dans le commerce. Nous devrions acheter les choses que d'autres utilisent et qui sont interopérables, en partie parce que cette façon de faire est moins coûteuse et accélère le processus. Toutefois, ce n'est pas possible pour toutes les pièces d'équipement.

Le sénateur Atkins: Tout d'abord, je tiens à souligner que le comité est très fier de ce que les forces armées ont réalisé et l'a démontré de nombreuses façons.

Lorsque vous avez conçu le livre blanc en 1994, vous n'aviez pas une boule de cristal. Plusieurs des événements qui ont eu lieu au cours des 10 dernières années, notamment depuis 2001, ne pouvaient être prévus. Je suis surpris de vous entendre dire, à l'intérieur de ce cadre, que le livre blanc est encore pertinent, sans même qu'on y apporte d'importantes modifications.

En effet, je pense que vous n'avez pas pu prévoir les engagements que le gouvernement a pris sur la scène internationale. Le comité a l'impression que nos ressources sont trop dispersées et sous-financées. On ne sent pas l'urgence de s'acquitter de certains de nos engagements, par exemple l'engagement en Afghanistan, d'où l'on devait retirer nos troupes en août pour ensuite décider d'y poster 900 soldats pendant encore un an.

C'est pour cette raison qu'il est difficile de faire accepter un financement supplémentaire pour la Défense nationale, quand on constate que le gouvernement a pris 10 ans pour décider de remplacer les Sea King, par exemple. Comment s'attendre à ce que les Canadiens appuient un budget de défense lorsqu'ils ne sentent pas l'urgence de la part du gouvernement et de la Défense nationale? Pouvez-vous faire des commentaires à ce propos?

M. Calder: Lorsque j'ai dit que les principes du livre blanc de 1994 restaient valables, j'espère ne pas avoir laissé entendre qu'aucun changement important ne serait effectué.

Par exemple — et vous avez parfaitement raison — nous avions prévu des engagements à l'étranger et divers types d'exercice, mais nous n'avions pas prévu pareille demande, surtout pour des opérations multiples à divers endroits, ce qui a créé des pressions certaines sur les Forces canadiennes, et c'est une des lacunes de 1994. Bref, nous n'avions pas prévu que les Forces canadiennes allaient devoir être déployées à l'étranger de façon continue.

Ce problème ne touche pas au principe de notre politique, mais nous force plutôt à examiner le programme — quelle somme doit être injectée dans le budget, et cetera. Toutefois, vous avez absolument raison: nous avons sous-estimé la demande.

Mon rôle est de conseiller le gouvernement sur la politique de défense. Je crois que les annonces faites par le premier ministre à Gagetown, par exemple, et le fait que ces examens ont été entrepris montrent que le gouvernement est sérieux. Notre budget a été augmenté cette année, ainsi que l'an dernier, ce qui montre que le gouvernement prend ces choses au sérieux et qu'il y a un certain degré d'urgence.

Vous pouvez bien dire qu'on devrait faire davantage et c'est le rôle que doit jouer un sénateur — d'ailleurs le CPDNAC a soutenu la même thèse. En fait, le gouvernement s'occupe de ces choses de la manière qui lui semble la plus appropriée.

Le sénateur Atkins: Je dirais que c'est le leadership qui est en cause ici. Si vous demandez quels sont les enjeux les plus importants pour les Canadiens aujourd'hui — et je sais que le gouvernement mène des sondages en tout temps —, la politique de défense arrive au bas de l'échelle.

M. Calder: Je l'ai remarqué.

Le sénateur Day: La sécurité se trouve en haut de l'échelle.

Le sénateur Atkins: Force est de constater que cet enjeu sera toujours au bas de l'échelle. Comme je l'ai dit à une autre occasion, il n'y a pas eu beaucoup de protestations lorsqu'on a annoncé la construction des frégates ou l'achat des CF-18. Nous nous retrouvons aujourd'hui avec une force de défense nationale qui est sous-financée et éparpillée.

Si vous examiniez la situation telle qu'elle se présente aujourd'hui, quel plan d'action recommanderiez-vous au gouvernement pour qu'il sensibilise les Canadiens et les convainque qu'on ne peut continuer de prendre pareils engagements à moins d'y mettre l'argent nécessaire?

M. Calder: Monsieur le sénateur, c'est là un domaine qui ne relève pas de ma compétence, c'est-à-dire le domaine politique sur lequel je ne peux me prononcer. Il revient aux dirigeants politiques de faire connaître leurs priorités et leurs préoccupations à la population canadienne; ce n'est pas à moi de le faire.

Le président: Si je peux me permettre, vous demandez une réponse politique et je ne crois pas qu'il soit juste de poser cette question à M. Calder.

Le sénateur Atkins: Je ne chercherai pas à obtenir une réponse politique.

Le président: La question se pose encore en ce qui a trait au processus de planification. Compte tenu des incertitudes entourant la volonté politique ou la volonté de financement, comment s'y prend-on pour planifier?

Le sénateur Atkins: Tout à fait, lorsque nous réalisons que nous sommes, sinon dans une situation critique, du moins dans une situation grave si nous poursuivons dans cette voie.

M. Calder: Notre responsabilité, non seulement la mienne, mais aussi celle de mes collègues militaires, consiste à présenter les faits à nos maîtres politiques et à proposer des solutions, en indiquant les retombées et les coûts que comporte une mesure ou l'absence de mesure, parce que ça fonctionne dans les deux sens. Nous avons cette obligation au sein du gouvernement.

Le sénateur Atkins: Passons à un autre sujet. Comme vous l'avez remarqué, le sénateur Wiebe n'est pas ici; il a pris sa retraite. Il nous revient donc de poser la question: concernant l'élaboration d'une politique, avez-vous des suggestions ou des recommandations au sujet de la réserve?

M. Calder: Comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, les réserves seront un important élément de la prochaine politique. C'est d'ailleurs ce qu'a laissé entendre le premier ministre à Gagetown. Il ne s'agit pas de s'interroger simplement sur la taille des réserves ou les outils dont elles disposent, mais aussi sur le rôle qu'elles doivent jouer.

Je prévois que ce sera un élément important. Il est trop tôt pour dire ce qu'il en ressortira, mais cet aspect est certainement d'une grande importance.

Le sénateur Atkins: La réserve peut-elle jouer un plus grand rôle?

M. Calder: Je le croirais.

Le sénateur Atkins: Jouera-t-elle un plus grand rôle, sinon dans la sécurité internationale, du moins dans la sécurité nationale?

M. Calder: Je crois que les réserves ont un rôle à jouer sur les deux fronts. Elles jouent déjà un rôle important au sein des Forces que nous déployons à l'étranger. Ce rôle serait maintenu, selon moi. Il faut aussi s'interroger sur les rôles qu'elles peuvent jouer dans la défense du Canada, qui sont passablement importants.

Le sénateur Atkins: Dans notre deuxième rapport, nous avions recommandé de porter les effectifs des forces armées à 75 000 membres et d'augmenter considérablement le financement. Si, demain, je vous donnais 4 milliards de dollars pour l'élaboration d'une politique, pourriez-vous dire au ministère de la Défense nationale comment cet argent pourrait être dépensé?

M. Calder: Vous ne pouvez dépenser cet argent rapidement. Il faudrait le faire de manière responsable et étaler cette dépense sur une certaine période de temps.

Le sénateur Atkins: Y a-t-il des priorités?

M. Calder: Des priorités ont été établies dans le programme d'immobilisations. Dans une certaine mesure, les ministres doivent faire des choix. Si on obtenait plus d'argent, il faudrait présenter au ministre un menu en indiquant les choses que nous pourrions faire. On demanderait au ministre «Quelle est votre priorité, quelle capacité souhaitez- vous avoir?» On peut faire n'importe quoi avec une somme d'argent infinie, mais cette situation ne se produira pas.

Je ne crois pas qu'on pourrait se contenter de dire que les Forces devraient compter 75 000 membres ou que le budget devrait être augmenté de «X» nombre de dollars. Nous mettrions davantage l'accent sur les capacités. Si nous voulons faire ceci, il faudra ajouter un certain nombre de personnes à nos effectifs. Il faudra accroître le budget.

Par exemple, si nous disons que nous pouvons mener un certain nombre d'opérations terrestres à l'étranger, ce qui semble très raisonnable, comme nous le faisons en ce moment à Kaboul, il peut être souhaitable d'avoir la capacité d'entreprendre d'autres opérations de ce type, au-delà de ce que nous pouvons faire maintenant. Pour cela, il nous faudrait alors «X» milliers de personnes et «X» nombre de dollars, et c'est ce qu'il faudrait présenter au gouvernement.

En d'autres termes, si nous demandons une augmentation et un budget importants, c'est à nous de dire comment ces ressources seront utilisées pour que le gouvernement puisse savoir ce que nous faisons avec son argent.

Le sénateur Atkins: D'après ce que vous dites au sujet de l'élaboration de la politique, je comprends que vous favorisez la polyvalence des forces militaires?

M. Calder: Je dirais que c'est une option judicieuse.

Le sénateur Atkins: En avons-nous les moyens?

M. Calder: À l'heure actuelle, le Canada se classe au sixième rang pour ce qui est des dépenses de défense au sein de l'OTAN, et au seizième rang à l'échelle mondiale. De nombreux pays disposent de forces polyvalentes et aptes au combat malgré des budgets plus restreints que le nôtre. C'est donc possible. Pouvons-nous avoir tout ce que nous souhaitons? Pouvons-nous avoir tout ce que les critiques réclament de nous? C'est là une autre question.

Le sénateur Atkins: Ces pays ont-ils les mêmes obligations et les mêmes engagements?

M. Calder: Les alliés de l'OTAN ont les mêmes obligations et engagements que nous, mais certains ont un territoire plus petit. Les alliés de l'OTAN ont les mêmes obligations envers l'ONU et l'OTAN. Ils peuvent s'acquitter de ces obligations différemment, mais, au bout du compte, nous nous classons au seizième rang en ce qui a trait aux dépenses de défense, selon les dernières données que j'ai vues.

Le sénateur Day: Ces dépenses sont-elles exprimées en dollars absolus, par habitant ou selon un pourcentage du PIB?

M. Calder: Elles sont exprimées en dollars absolus.

Le sénateur Day: Nous serions un peu plus loin derrière si c'était un pourcentage du PIB, n'est-ce pas?

M. Calder: C'est exact.

Le sénateur Meighen: Monsieur Calder, vous avez fait allusion à un plan PSIC pour le nouvel équipement. La presse affirme que le ministre de la Défense étudie actuellement ce plan. Ces achats sont-ils prévus dans une enveloppe de financement existante? D'autres sommes d'argent seront-elles nécessaires?

M. Calder: Une partie du budget de la défense est consacrée aux dépenses en immobilisation. Je ne me souviens pas exactement des derniers chiffres, mais c'est environ 20 p. 100. Il y a une certaine somme mise de côté. Le PSIC repose sur la politique existante, sur le niveau de financement existant, et il prévoit un échéancier. Il précise les biens en immobilisation que nous devrions acquérir ainsi que l'échéancier de ces acquisitions.

Si le niveau de financement ou la politique change, il faudra réviser le PSIC. C'est peut-être l'une des raisons pour lesquelles le ministre examine le plan et n'a encore rien décidé, parce que le plan pourrait bien changer, mais je ne m'avancerais pas sur ce terrain.

Le sénateur Meighen: C'est peut-être certes l'une des raisons. Je vous remercie infiniment, monsieur Calder.

Le président: Compte tenu de l'objectif du gouvernement de mettre à contribution la population dans l'élaboration du livre blanc, serait-il illogique que le ministère présente trois scénarios, celui de 12 milliards de dollars, celui de 20 milliards de dollars et celui de 30 milliards de dollars? Voici ce que vous pouvez obtenir si vous souhaitez dépenser 12 milliards par année, ou 20 milliards ou encore 30 milliards.

Avez-vous déjà envisagé ce genre de solution pour un livre blanc?

M. Calder: Certainement pas publiquement. Pourriez-vous répéter les chiffres?

Le président: Les voici: 12 milliards, 20 milliards et 30 milliards de dollars par année. En outre, il s'agirait de préciser à la population canadienne les capacités dont les Forces canadiennes pourraient se doter grâce à de tels niveaux de dépenses constants, compte tenu de l'inflation. Il serait possible par la suite de débattre des modalités.

Vous pourriez également indiquer quel serait le coût par habitant. Actuellement, nous dépensons 430 dollars par habitant, et les Américains, 1 100 $. Si les Canadiens souhaitaient porter ce montant à 600 $, voici le genre de forces armées qu'ils pourraient envisager.

M. Calder: Monsieur le président, cette solution comporte une difficulté: elle présuppose que nous sommes tous d'accord sur le genre de forces que nous souhaitons. À mon avis, il faudrait d'abord débattre de l'utilisation des Forces et de leurs tâches. Par la suite, vous détermineriez quel en serait le coût. Par après, il existe plusieurs étapes différentes vous permettant d'atteindre cet objectif. En théorie, cette solution est sensée.

Cependant, je ne pense pas que le gouvernement dirait que le scénario est précisé uniquement sous l'angle des montants dépensés. Il s'agit réellement de déterminer les tâches que vous souhaitez confier aux Forces canadiennes et leur ampleur. Ainsi, le coût est davantage en aval qu'en amont des scénarios.

Le président: J'ai suivi votre logique. Vous avez fait part au comité de vos impressions et vous avez précisé les prémisses sur lesquelles devrait reposer, selon vous, le livre blanc. Dans votre conclusion, vous avez indiqué que la véritable question était selon vous celle-ci: Combien d'argent faut-il dépenser? J'ai suivi simplement la logique de cette question en me disant qu'il conviendrait de donner à la population canadienne le choix de trancher.

Il faut sans aucun doute répondre d'abord aux premières questions, mais par la suite, comment déterminez-vous le montant qu'il faut dépenser si vous ne donnez pas ce choix aux Canadiens et comment composez-vous avec les conséquences de ce montant?

M. Calder: J'ai probablement eu recours à la sténo linguistique lorsque j'ai dit: «Combien d'argent faut-il dépenser?» Bien sûr, ce montant est fonction du fait qu'il faut préalablement déterminer si les nouvelles capacités seront affectées notamment à l'Armée de terre et aux opérations comme celles menées à Kaboul ou si elles seront affectées aux activités en Amérique du Nord et ailleurs. Avant de s'attaquer à l'aspect financier, il faut aborder la question des rôles et, partant, la question de l'ampleur des tâches, soit la quantité.

Le président: Je le comprends, mais il n'a jamais été question de quantité, selon moi. Le dernier livre blanc a donné certaines assurances. Des membres du comité se rappellent avoir entendu les témoignages des représentants du ministère des Finances, qui avaient donné des garanties, avant la publication du livre blanc, sur les niveaux de financement auxquels on pouvait s'attendre ultérieurement.

Si le comité s'était servi des niveaux de financement qui ont été accordés par la suite, son rapport aurait été différent tout comme l'aurait été, je présume, le livre blanc.

M. Calder: Effectivement, je pense que les gens s'attendent à ce que le prochain livre blanc précise les détails du financement et voudront être convaincus que celui-ci est suffisant pour permettre d'accomplir ce qui est proposé. C'est normal.

Le président: Estimez-vous qu'il est justifié de donner aux Canadiens des choix par rapport au niveau de financement, une fois les questions initiales réglées?

M. Calder: C'est une solution. Je présume que la consultation portera vraisemblablement sur les tâches des Forces canadiennes et les montants qu'il faudrait y affecter, notamment.

Le président: En toute justice, je ne pense pas que le débat ait porté sur ces aspects la dernière fois. De plus, les Canadiens n'ont pas accordé une grande importance au coût et n'ont pas tenu compte des scénarios selon lesquels la moitié du montant ou le double de celui-ci auraient donné des forces armées assez différentes. Il me semble que nous aurions dû en tirer une leçon. Je n'ai pas l'impression, du moins ce soir, que vous êtes enclin à envisager ce concept. Cela étant dit, il est très difficile de tenir un débat public logique si vous n'associez pas des coûts aux différentes solutions.

M. Calder: Oui.

Le sénateur Day: Le programme pour la Réserve 2000, qui a été élaboré à partir du rapport Fraser, s'est penché sur la question de la Réserve, élaborant un agréable scénario sur son orientation. Dois-je présumer que le programme ne sera plus qu'une partie de la base de connaissance et pourrait ne plus être mis en oeuvre?

M. Calder: Naturellement, ce programme et d'autres initiatives ministérielles permanents se poursuivront jusqu'à l'entrée en vigueur de la nouvelle politique. Il est très dangereux de mettre fin à des activités en prévision de ce que pourrait énoncer ou laisser en plan cette nouvelle politique.

Le sénateur Day: Dans la même veine, plus rien n'est sacro-saint aujourd'hui. Tous les aspects de la politique militaire sont envisagés dans l'examen qui débouchera sur le prochain livre blanc, n'est-ce pas?

M. Calder: Effectivement, tout est sur la table lors d'un examen exhaustif de la politique de défense.

Le sénateur Day: Tout est sur la table. C'est ce que je voulais.

Pourriez-vous me dire qui prendrait les décisions de planification si le Canada décidait de participer à la force militaire permanente de l'OTAN ou des Nations Unies? Il s'agirait vraisemblablement d'une décision stratégique dans un sens général. Qui décide des modalités de notre contribution à une telle force militaire permanente? Cette décision émane-elle d'une instance internationale ou des forces armées? Disons-nous, à un moment donné, le genre d'aide militaire que nous pouvons nous permettre d'accorder à cette force militaire permanente, ou planifions-nous le tout pour ensuite commencer à y affecter les montants nécessaires?

M. Calder: Je ne comprends pas très bien l'expression «force militaire permanente».

Le sénateur Day: Il s'agit des forces armées permanentes de l'OTAN. C'est un plan qui figure dans les livres.

M. Calder: C'est la force d'intervention rapide de l'OTAN.

Le sénateur Day: Oui. Il y eut également des discussions au sujet des Nations Unies, même si aucune décision n'a encore été prise.

Dans quelle mesure planifions-nous ces choses ou dans quelle mesure ne faisons-nous que réagir à la décision déjà prise d'y participer?

M. Calder: Naturellement, la décision de participer à une force d'intervention rapide de l'OTAN est prise généralement par le ministre des Affaires étrangères, de concert avec le ministre de la Défense nationale. Cependant l'opportunité de notre participation est une question qui relève essentiellement de la politique étrangère.

L'ampleur et la nature de la contribution sont généralement déterminées par la Défense nationale, parce qu'elle possède les compétences lui permettant de déterminer ce qui peut être fait, et cetera. La décision se prend à plusieurs niveaux en fonction de la question envisagée.

Le sénateur Day: Enfin, plusieurs d'entre nous ont été mis à contribution à l'époque du premier déploiement en Afghanistan.

Les militaires canadiens ont reçu les instructions nécessaires avant d'être déployés en Afghanistan pour continuer à accomplir ce qui nous a valu notre remarquable réputation internationale. Nous sommes réputés pour les efforts que nous déployons afin d'apprendre à connaître, à aider et à rassurer la communauté dans laquelle nous intervenons, ce qui nous permet d'assurer le maintien de l'ordre.

Les Forces ont même reçu un budget restreint. Les militaires se sont rendus dans les localités pour offrir leur aide afin de construire des écoles et des systèmes d'alimentation en eau. Par la suite, l'Agence canadienne de développement international a annoncé qu'elle ne financerait nullement ces travaux, et ce après que les militaires se furent engagés à les faire. Certains militaires ont puisé dans leurs poches. Plusieurs ont fait la collecte du matériel et de l'équipement pour l'envoyer outre-mer en vue d'aider à la construction d'écoles et à d'autres projets.

Ce manque de collaboration entre l'Agence canadienne de développement international et les Forces canadiennes sera-t-il abordé au cours de cet examen afin qu'une telle situation embarrassante ne se reproduise plus?

M. Calder: Il y a deux points. Je ne me souviens pas de tous les aspects du «contretemps» dont vous parlez, mais je crois comprendre que tout fonctionne bien actuellement à Kaboul entre nos militaires et la Force internationale d'assistance à la sécurité, l'ISAF. On se sert de l'argent accordé par l'ACDI à cette fin. Je pense que, sur le terrain, nous avons résolu ce problème.

Ce genre de situation a amené le gouvernement à adopter ce que nous appelons l'approche «des trois D et du C», c'est-à-dire le développement, la diplomatie et la défense ainsi que le commerce. C'est une approche concertée et intégrée. Notre politique internationale vise précisément à assurer notamment une collaboration étroite entre la Défense nationale et l'ACDI lorsque les deux interviennent dans une même partie du monde. Les deux se trouvent en Afghanistan. Ce pays constitue notre priorité absolue sur le plan militaire à l'étranger et vient au premier ou au deuxième rang dans l'ordre des priorités de l'ACDI. Les deux travaillent en étroite collaboration. Notre cadre stratégique en politique internationale est conçu pour garantir l'institutionnalisation de cette coopération.

Le président: Monsieur Calder, je vous remercie d'avoir comparu. Vos réponses nous ont été très utiles. Nous espérons vous revoir. Nous n'attendrons pas deux ans avant de vous inviter de nouveau.

M. Calder: Je vous en prie. J'espère réellement pouvoir comparaître de nouveau d'ici deux ans pour aborder la politique en question.

Le président: Je suis certain que vous le ferez. Nous attendrons avec impatience cette occasion.

Pour formuler des questions ou des commentaires, vous êtes priés de consulter notre site Web à l'adresse www.sen- sec.ca. Nous y affichons les témoignages et les horaires confirmés de nos séances. Vous pouvez également téléphoner à la greffière du comité au 1-800-267-7362 pour obtenir de plus amples renseignements ou de l'aide afin de pouvoir contacter les membres du comité.

La séance est suspendue et se poursuivra à huis clos dans la pièce attenante.

La séance se poursuit à huis clos.


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