Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Transports et des communications
Fascicule 4 - Témoignages du 25 mars 2004
OTTAWA, le jeudi 25 mars 2004
Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications s'est réuni aujourd'hui, à 10 h 47, pour étudier le projet de loi C-7, qui modifie certaines lois fédérales et édicte des mesures de mise en oeuvre de la Convention sur les armes biologiques ou à toxines, en vue de renforcer la sécurité publique.
Le sénateur Joan Fraser (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente: Bienvenue à nos témoins et aux gens qui sont venus assister à cette réunion du Comité sénatorial permanent des transports et des communications.
Nous continuons aujourd'hui notre étude du projet de loi C-7, qui modifie certaines lois fédérales et édicte des mesures de mise en oeuvre de la Convention sur les armes biologiques ou à toxines, en vue de renforcer la sécurité publique.
Comme vous pouvez le constater, nous recevons un éventail de témoins représentant certains des grands intervenants dans le domaine des transports aériens. Je vous les présente.
Nous accueillons M. Brian Racine, Mme Renée Smith-Valade et M. Yves Duguay d'Air Canada. Pour sa part, l'Association des transports aériens du Canada est représentée par M. Warren Everson. Nous recevons aussi M. George Petsikas d'Air Transat et M. Gérard Chouest de Paterson, MacDougall. Bienvenue à tous.
[Français]
Merci beaucoup d'être présents malgré le mauvais temps. Nous sommes très heureux de vous recevoir. Vous avez quelques minutes pour faire votre présentation et ensuite on passe à la période de questions.
[Traduction]
M. Warren Everson, vice-président, Politiques et planification stratégique, Association des transports aériens du Canada: Merci, madame la présidente et honorables sénateurs, de bien vouloir entendre notre point de vue sur cette question ce matin. Comme le projet de loi a suscité certaines préoccupations parmi nos membres, il était important que nous ayons l'occasion d'en discuter avec vous.
À la suite des attaques terroristes du 11 septembre, il est bien évident que toute l'industrie a dû conjuguer ses efforts pour accroître la sécurité dans les transports aériens. Tous les membres de notre association ont dû mettre l'épaule à la roue, des transporteurs internationaux jusqu'aux écoles de pilotage, en passant par les transporteurs de marchandises, les aéroports et même les pilotes privés. Nous poursuivons notre coopération de tous les instants avec les autorités canadiennes et internationales.
La sécurité est au coeur même de nos activités. La survie de notre industrie en dépend. Si nous nous présentons ici aujourd'hui pour critiquer certains éléments du projet de loi, ce n'est certes pas parce que nous sommes indifférents à la sécurité de nos vols et de nos passagers.
Nous nous interrogeons surtout au sujet des articles 4.81 et 4.82 proposés qui, comme vous le savez, permettent au ministre des Transports, au directeur du SCRS et au commissaire de la GRC d'exiger d'un exploitant de systèmes de réservation de services aériens ou d'un transporteur aérien qu'il lui fournisse, dans les délais et la forme demandés, des renseignements sur les personnes se trouvant ou devant se retrouver à bord d'un aéronef.
Le projet de loi précise que seuls les renseignements dont le transporteur aérien ou l'exploitant disposent peuvent être demandés, mais il ressort clairement des témoignages des fonctionnaires que vous avez entendus qu'on veut en fait obliger les compagnies aériennes à recueillir beaucoup plus de renseignements qu'elles ne le font actuellement. C'est autour de ce point particulier que s'articule toute notre argumentation.
Les services de sécurité veulent aller à la pêche aux criminels dans l'océan de notre clientèle de passagers. C'est très bien. Nous appuyons cette démarche. Ils ne font que leur travail.
Cependant, le filet que l'on compte utiliser pour cette expédition de pêche n'existe pas actuellement. Selon le libellé du projet de loi à l'étude, les compagnies aériennes seront obligées de tisser ce filet et d'aller elles-mêmes à la pêche, à leurs propres frais, pour le compte des services de sécurité. Nous demandons au Sénat de nous épargner une telle tâche.
Les données recueillies pour les vols intérieurs sont différentes de celles obtenues pour les vols internationaux, que nous connaissons tous très bien. Elles ne sont pas actuellement disponibles dans une forme pouvant permettre leur utilisation facile par les services de sécurité.
Les passagers nous fournissent les données nécessaires pour une réservation. Ces données ne sont pas vérifiées. Elles sont parfois très limitées. Elles sont conservées sous diverses formes, sur support papier ou électronique.
Qu'est-ce que les transporteurs aériens connaissent des passagers effectuant un vol intérieur? Nous savons de quelle façon ils ont payé leur billet, s'ils ont enregistré des bagages, nous connaissons le nom qu'ils ont choisi de nous donner, et maintenant, grâce aux nouvelles règles entrées en vigueur il y a quelques années, nous savons aussi qu'ils possèdent une pièce d'identité avec photo à ce nom.
Les fonctionnaires qui ont témoigné devant vous au cours des deux dernières semaines vous ont parlé de compagnies aériennes qui fournissent des données au moyen de systèmes électroniques. Je tiens à vous préciser que bon nombre de compagnies aériennes canadiennes n'utilisent pas de système électronique pour leurs réservations. La plupart se servent de systèmes manuels et ne sont pas en mesure de transmettre des données sur les passagers à la GRC ou à n'importe qui d'autre.
Nous avons déjà signalé cette situation aux services de sécurité. Dans son témoignage, John Read, de Transports Canada, s'est plaint du fait que les gens peuvent acheter des billets via Internet, s'enregistrer à un kiosque électronique, passer un simple contrôle de sécurité avec les articles en leur possession et produire, au moment de l'embarquement, n'importe quel document avec une photo et le nom utilisé pour acheter le billet.
C'est la nouvelle tendance dans le traitement des passagers de l'industrie aérienne. C'est toute l'information dont les compagnies aériennes ont besoin pour mener leurs activités. Si nous devions recueillir davantage de renseignements, ce ne serait pas aux fins des services aériens; ce serait pour nous acquitter d'un devoir public.
Transports Canada considère que nos passagers sont en sécurité actuellement. Le comité ne doit pas oublier que depuis le 11 septembre, nous avons mis en place d'importantes mesures pour renforcer la sécurité. Nous avons augmenté d'environ 400 p. 100 les sommes consacrées au contrôle des passagers. Nous comptons sur un équipement plus perfectionné, des agents mieux formés et un meilleur contrôle des bagages. Une porte pare-balles sépare maintenant la cabine de pilotage des passagers. Il y a des agents de police armés sur certains vols, mais personne ne sait lesquels.
Quoi qu'il en soit, si les services de sécurité ont besoin de renseignements au sujet des passagers pour faire leur travail, nous n'y voyons aucun problème. On devrait leur fournir les moyens d'obtenir ces renseignements, mais ils ne devraient pas pouvoir obliger les entreprises privées à dépenser des millions de dollars pour les recueillir à leur place.
Nos inquiétudes à cet égard n'ont rien d'hypothétique. Depuis le 11 septembre, différents gouvernements demandent des données sur les passagers des vols internationaux. J'ai été grandement impliqué dans ce processus. Lorsque les gouvernements étrangers se sont rendu compte que nos données ne répondaient pas à leurs besoins, les autorités, aux États-Unis, puis en Europe, et maintenant dans d'autres pays, ont simplement exigé des compagnies aériennes qu'elles recueillent de nouveaux renseignements, qu'elles les traitent de façon différente et les transmettent sous de nouveaux formats. Pour l'industrie, cela s'est traduit par des dépenses de dizaines de millions de dollars. Pour le Canada seulement, ces sommes se chiffraient en millions de dollars. À la lumière de cette expérience, nous sommes persuadés qu'au lendemain de l'adoption de ce projet de loi, des règlements seront pris afin de forcer les compagnies aériennes à réviser complètement leurs systèmes de traitement des données de manière à mieux pouvoir répondre aux besoins des services de sécurité.
La disposition touchant le commissaire de la GRC ou le directeur du SCRS n'est pas assujettie aux mêmes restrictions que celle concernant le ministre des Transports. Ils jouissent d'un grand pouvoir discrétionnaire leur permettant d'exiger des données à des fins générales qui ne sont pas nécessairement reliées à l'aviation. Lors de sa comparution, le commissaire a insisté sur la sécurité des vols et du transport aérien en général, mais le projet de loi prévoit que ces renseignements pourront être utilisés simplement pour exécuter un mandat d'arrestation.
Il convient de souligner que les transporteurs aériens peuvent recueillir, et peuvent être obligés de le faire, une quantité considérable de renseignements au sujet de leurs passagers. Nous le faisons déjà pour les vols internationaux. Les passagers peuvent être tenus de nous fournir une somme assez importante de renseignements.
Le comité s'est déjà penché sur les répercussions de ce projet de loi quant à la protection de la vie privée. Nous avons pris connaissance de vos délibérations à cet égard. Nous vous demandons aujourd'hui d'examiner la question plus terre à terre des coûts, et de modifier le projet de loi de sorte que ces coûts soient assumés, comme il se doit, par les services de sécurité et les contribuables. Un mécanisme de cueillette exhaustive de renseignements sur les passagers des vols intérieurs au Canada coûterait des millions, voire des dizaines de millions de dollars. C'est au gouvernement qu'il revient d'en payer la facture.
Plus précisément, le comité devrait amender le projet de loi pour y intégrer le principe suivant. Les transporteurs aériens et les exploitants des systèmes de réservation de services aériens doivent permettre aux services de sécurité d'avoir accès aux données dont ils ont besoin, mais les coûts engendrés par l'accès à ces données et leur analyse doivent être assumés par les services de sécurité, qui doivent accepter les données dans le format utilisé par les transporteurs aériens et les exploitants de systèmes de réservation aux fins de leurs propres activités.
Nous proposons un amendement à cet effet dans notre mémoire. On y précise simplement que les données visées sont celles dont disposent les transporteurs aériens et sont du type qu'ils recueillent habituellement aux fins de l'exploitation d'un service aérien. En apportant cette précision, le comité ferait en sorte que les transporteurs aériens et les exploitants de systèmes de réservation de services aériens ne seraient pas tenus de s'acquitter de devoirs publics considérables qui n'ont pas nécessairement grand chose à voir avec la sécurité de leurs aéronefs et de leurs passagers.
C'était là le point principal de notre argumentation. Nous voulons également faire valoir deux autres éléments.
Premièrement, le projet de loi n'oblige ni la GRC ni le SCRS à signaler les risques possibles pour la sécurité des transports aériens au ministre des Transports. On leur permet de le faire s'ils le jugent nécessaire, mais ils n'y sont pas obligés. S'il existe un risque véritable, le public et les compagnies aériennes devraient en être avertis.
Pendant que l'étude de ce projet de loi se poursuit ici au Parlement, nous avons un cas sur la côte Ouest concernant Air India, où le manque de coopération des services de sécurité a été flagrant. Nous estimons que le projet de loi devrait leur imposer une obligation à cet égard.
Deuxièmement, l'article 4.85 du projet de loi nous pose un problème particulier. On y interdit aux compagnies aériennes de transporter des personnes ou des biens sans qu'ils aient subi les contrôles exigés par les règlements. Depuis l'entrée en vigueur du projet de loi créant l'ACSTA qui a été adopté il y a deux ans, nous n'avons plus de responsabilité à l'égard du contrôle des passagers. Il nous est donc impossible de savoir si un passager a bel et bien subi les contrôles exigés par les règlements. Nous ne participons plus du tout au contrôle des passagers.
Le projet de loi aurait donc pour effet de redonner aux transporteurs aériens un rôle dans le contrôle des passagers, ce qui va à l'encontre des intentions du gouvernement. Nous pourrions devenir à nouveau responsables dans les cas où le contrôle a été inadéquat.
Je vais maintenant passer la parole à ma collègue, Mme Smith-Valade.
Mme Renée Smith-Valade, directrice, Affaires de l'entreprise et relations gouvernementales, Air Canada: Air Canada est heureuse d'avoir la possibilité de s'adresser au comité ce matin à propos de l'important projet de loi C-7.
D'entrée de jeu, je tiens à reprendre un point qu'un de mes anciens collègues avait soulevé il y a plus d'un an. Air Canada appuie pleinement l'esprit et l'intention de ce projet de loi.
[Français]
Nous voulons proposer au comité de se pencher sur quelques observations et suggestions importantes étayées par notre expérience en matière de sûreté dans l'exploitation des services aériens qui, à notre avis, serviront à améliorer l'efficacité et l'équité de plusieurs des dispositions du projet de loi.
[Traduction]
Nous estimons que les dispositions de la partie 1 du projet de loi prévoyant l'entrée en vigueur de directives d'urgence pendant 72 heures sont raisonnables en cas de menaces immédiates. Cependant, nous demandons au comité de prendre en considération les répercussions financières que de telles mesures peuvent avoir pour les transporteurs aériens. À quelle fréquence, par qui et dans quelle mesure ces pouvoirs seront-ils exercés? Ces questions sont de la plus grande importance pour les transporteurs aériens dont la marge de manoeuvre est très mince, comme c'est le cas pour nous à Air Canada. Pour préciser davantage cette disposition, nous suggérons de modifier le projet de loi de façon, premièrement, à conférer aux transporteurs aériens un rôle plus important dans la phase d'évaluation des menaces et, deuxièmement, à prévoir l'octroi d'un dédommagement financier aux transporteurs aériens qui subissent des pertes d'exploitation en raison de ces mesures.
Comme l'a signalé mon collègue de l'ACTA, l'article 4.81, qui exige de tous les transporteurs aériens qu'ils fournissent à Transport Canada des renseignements à l'égard des personnes dont la présence est prévue à bord d'un vol s'il est estimé qu'un danger immédiat menace ce vol devrait être étoffé de sorte que les transporteurs soient informés de la nature de cette menace. Si une personne représente une telle menace pour la sécurité d'un vol particulier, le transporteur aérien visé doit disposer des renseignements appropriés qui lui permettront de prendre des décisions éclairées à propos du vol, incluant son annulation possible.
Les articles 4.82 et 4.83 exigent tous deux des transporteurs aériens qu'ils fournissent des renseignements à la GRC et au SCRS, au moment et de la manière prescrits par ces derniers, à propos de personnes sur lesquelles pèse un mandat d'arrestation. Rappelons que le but principal de ce projet de loi est de protéger les voyageurs contre les menaces terroristes. Nous estimons que l'examen de notre base de données pour rechercher les criminels de droit commun s'écarte de cet objectif et impose aux transporteurs aériens le rôle difficile d'agents de la Couronne, sans aucun égard aux fardeaux financier et opérationnel qui découlent d'une telle charge, et sans que les transports aériens ne bénéficient du droit réciproque d'obtenir des renseignements sur ces personnes.
En outre, le projet de loi ne reconnaît aucunement les difficultés que représente l'identification de telles personnes. Finalement, le projet de loi prévoit des peines, mais aucun processus de recours qui permettrait aux transporteurs aériens de contester ces demandes des autorités ou d'en appeler.
À ce sujet, le paragraphe 4.82(15) exige que la GRC et le SCRS vérifient la durée de conservation des renseignements recueillis auprès des transporteurs aériens, mais aucune exigence ne porte sur la qualité et la quantité de ces demandes de renseignements. Cela élimine virtuellement toute possibilité de recours par les transporteurs aériens.
Nous avons des préoccupations semblables au sujet des paragraphes 4.81(1) et 4.82(4) et(5) qui exigent que les transporteurs aériens identifient toute personne désignée par Transports Canada, la GRC ou le SCRS et fournissent tous les renseignements demandés de la manière et dans les délais prescrits. Encore une fois, qui va payer la facture? Et quelles seront les limites quant à la nature des renseignements demandés et aux personnes autorisées à le faire?
Est-ce que Transports Canada, la GRC et le SCRS seront habilités à exiger une foule de renseignements sur une multitude de passagers, notamment des renseignements dont nous ne disposerons peut-être pas? En fait, vous noterez que plus du tiers des éléments exigés en vertu de l'annexe du projet de loi ne figurent pas dans nos dossiers de passagers, les PNR comme nous les appelons.
L'article 25 du projet de loi prévoit que l'État peut conclure des ententes avec les exploitants des aérodromes pour leur participation aux frais liés à la fourniture des services de police. Quoi qu'il en soit, la responsabilité financière principale de ces services incombe toujours aux exploitants des aérodromes et, en bout de ligne, aux transporteurs aériens et à leurs passagers.
Air Canada estime que les services de police, et bien sûr les questions de sécurité aérienne en général, font partie des enjeux fondamentaux de la sécurité publique et devraient par conséquent être du ressort du Trésor public. Nous ne comprenons pas pour quelle raison la protection par la police du trottoir attenant à l'aéroport constitue un droit du citoyen, mais qu'il s'agit d'un privilège qu'il doit payer une fois rendu sur le terrain de l'aéroport.
[Français]
Les dispositions de la partie 2 concernant l'ACSTA peuvent et doivent être étoffées pour que les transporteurs aériens aient la possibilité de participer à un processus de consultation fructueux visant à assurer l'efficacité et l'efficience de toutes les mesures de sûreté.
De plus, le gouvernement a tout intérêt à ce que le transporteur aérien participe au processus d'évaluation de la sûreté. En effet, la sécurité et la sûreté de nos vols nous tiennent à cœur plus que quiconque.
Il va sans dire que le gouvernement du Canada peut bénéficier de l'expérience unique de notre service de sûreté spécialisé en sécurité aérienne.
[Traduction]
En outre, plusieurs éléments nous préoccupent dans l'annexe du projet de loi dressant la liste des renseignements que les transporteurs aériens peuvent être appelés à produire. Les demandes concernant certains renseignements laissent supposer que les transporteurs aériens recueillent de telles données. En particulier, la date de naissance, la citoyenneté et même le sexe ne sont pas toujours demandés si la nature du vol ne le justifie pas. Il est également bon de mentionner que nous ne sommes pas responsables de toutes les réservations; c'est notamment le cas de celles qui nous parviennent des agences de voyages. De plus, il arrive que certains tronçons d'itinéraires soient assurés par d'autres transporteurs aériens. Nous n'avons aucun contrôle sur ces réservations ni sur les renseignements qui s'y rattachent.
Notre système de réservation ne nous permet pas de répondre à l'exigence de signaler le fait qu'un passager se présente à la porte d'embarquement avec des billets, mais sans réservation. En effet, ce système ne répertorie que les passagers qui ont fait des réservations.
[Français]
L'accès à notre système de réservation ne permet pas de connaître le numéro de place d'un passager ni la quantité de bagages qu'il transporte. Ces données sont enregistrées dans un système de contrôle des départs qui assure le suivi des activités se déroulant le jour du vol. Ainsi, il est juste de supposer que le gouvernement souhaite accéder à ce système également.
Ces exigences auxquelles s'ajoutent celles du paragraphe 4.81 représentent un fardeau financier de taille pour les transporteurs aériens.
Nous devrons affecter des employés et des ressources supplémentaires pour satisfaire à ces demandes du gouvernement et, surtout, nous exposerons deux de nos systèmes commerciaux de base à des risques informatiques graves pouvant aller jusqu'à l'altération ou la perte des données.
[Traduction]
Finalement, le projet de loi propose d'ajouter le pouvoir d'appliquer une réglementation obligeant les transporteurs aériens à mettre en oeuvre un système de gestion de la sécurité. Des demandes semblables ont été formulées par divers gouvernements, non seulement pour la mise en place de systèmes de gestion de la sécurité, mais aussi pour celle de programmes de sécurité. Nous demandons au gouvernement du Canada d'adopter les normes internationales proposées par l'OACI et l'IATA.
Madame la présidente, la position d'Air Canada peut se résumer comme suit. Air Canada appuie l'intention et le but du projet de loi C-7, mais vous demande de bien vouloir prendre en considération le fait qu'il pourrait et devrait être sensiblement amélioré de façon à traiter les transporteurs aériens comme de véritables partenaires en matière de sécurité en leur fournissant les renseignements complets au sujet des menaces possibles qui visent leurs activités et en en faisant des partenaires consultatifs dans le processus d'évaluation des menaces à la sécurité prévu dans ce projet de loi.
Bien que nous n'ayons aucune raison de craindre l'abus des vastes pouvoirs conférés par ce projet de loi, aucune mesure de protection, aucun processus de vérification et aucun mécanisme d'appel n'est prévu pour protéger les transporteurs aériens contre tout abus ou toute altération de données causée par inadvertance.
[Français]
D'autre part, les transporteurs aériens devraient être dédommagés pour les coûts engagés en raison de ce projet de loi.
Nous ne pouvons tout simplement pas nous permettre ces coûts supplémentaires. Le difficile processus de la restructuration que nous vivons actuellement à Air Canada vise justement à réduire nos coûts d'exploitation.
[Traduction]
Je me permets de terminer en soulignant les mérites du gouvernement fédéral en matière de sécurité. Air Canada a effectivement d'excellentes relations de travail avec les diverses agences de sécurité du gouvernement fédéral. En fait, le gouvernement a récemment répondu à une demande des transporteurs aériens en instituant une nouvelle infraction au Code criminel dans le cas des passagers indisciplinés qui entravent le travail des membres d'équipage. Nous vous remercions de ces efforts et nous espérons que le climat de coopération qui a régné lors de ces discussions se manifestera également lors des travaux sur le présent projet de loi.
Nous sommes à sa disposition pour répondre à toute question.
La présidente: Merci beaucoup. Je porte à l'attention des sénateurs un document qui vous a été distribué. Il s'agit de la comparaison que nous avions demandée entre les dispositions du présent projet de loi et celles du système CAPPS II proposé aux États-Unis.
Peut-être ce document pourra-t-il vous être utile pour les questions que vous allez poser.
Le sénateur Andreychuk: S'agit-il des deux seuls exposés ou les autres témoins vont-il prendre également la parole?
La présidente: J'ai cru comprendre que ces deux témoins allaient faire les exposés alors que les autres étaient là pour les appuyer.
Le sénateur Andreychuk: Merci pour le renseignement. Les fonctionnaires que nous avons reçus n'ont cessé de nous répéter que vous seriez en mesure de répondre à certaines de nos préoccupations. Vous nous en avez plutôt créé de nouvelles quant au coût et à la fragilité du système de transport aérien au Canada, surtout pour les vols intérieurs.
Je vais débuter avec une question d'ordre général. Dans quelle mesure avez-vous été consultés, avez-vous discuté avec les fonctionnaires pour vous assurer que ces questions de coût étaient prises en compte et le gouvernement comprend-t-il bien toutes les répercussions des dispositions proposées au chapitre du fardeau financier et des responsabilités?
M. Everson: J'ai participé l'an dernier à une réunion avec les représentants de tous les services de sécurité. Je ne me souviens pas de la date exacte. Ce fut la seule réunion, sauf que l'ACTA a également eu l'occasion d'exprimer son point de vue sur les incidences de ces règles pour les vols intérieurs. Nous avons examiner en profondeur avec les représentants des douanes et de CIC la question de l'information préalable sur les voyageurs pour les vols frontaliers et les liaisons internationales. Lors de la réunion à laquelle nous avons assisté, nous avons eu une discussion animée autour des mêmes points qui ont été soulevés aujourd'hui, et notamment du manque de données adéquates et des coûts possibles pour rectifier la situation.
Le sénateur Andreychuk: J'ai quelques questions plus précises. La première porte sur les transporteurs internationaux. Je ne sais pas qui pourra me répondre à ce sujet. Des renseignements sont fournis au sujet des passagers; on a fait valoir que ces données devraient se limiter aux seules informations nécessaires aux fins de la sécurité. Nous devrions également avoir une assurance raisonnable que les renseignements fournis ne serviront pas à d'autres usages.
Pour les vols internationaux, les renseignements recueillis peuvent être fournis à d'autres gouvernements. Dans quelle mesure cela se fait-il actuellement? Est-ce que tous les gouvernements des pays de destination de nos compagnies aériennes demandent ces renseignements du Canada?
M. Everson: Pas tous les pays. Nous transmettons beaucoup d'information aux États-Unis. Des négociations sont en cours avec la Grande-Bretagne qui s'emploie à élaborer un programme d'information préalable sur les voyageurs. Plusieurs autres pays ont enclenché le processus et ont indiqué qu'ils allaient se donner les lois nécessaires. Les Espagnols, les Mexicains, les Haïtiens et les Coréens sont très actifs sur ce tableau. Le mieux, c'est encore le Canada, parce qu'on accepte les renseignements dans la forme où ils sont. Le processus est en cours et les exigences sont de plus en plus poussées. Les différents pays demandent des informations différentes.
Le sénateur Andreychuk: Si vous désirez voler à destination d'un pays qui applique une telle exigence, vous devez vous y conformer.
M. Everson: Nous nous exposerions à d'importantes sanctions pécuniaires si nous ne le faisions pas.
Le sénateur Andreychuk: Dans quelle mesure les voyageurs sont-ils informés de la situation? Si je prends, par exemple, un avion de China Air à destination de Beijing, en Chine, est-ce que je suis avisé que ce pays veut obtenir les renseignements me concernant? Comment en informez-vous vos clients et quelle garantie vous offrent les pays d'accueil quant à l'utilisation de ces données uniquement à des fins de sécurité?
M. Everson: N'hésitez pas à me contredire si je suis dans l'erreur, mais nous n'informons absolument pas les passagers à ce sujet. Nous ne leur disons pas officiellement que leurs données sont transmises. Nous avons eu des discussions à cet effet lors de l'adoption du projet de loi C-44, le projet de loi des Communes qui nous a permis de fournir ces renseignements. Nous sommes en fait exemptés de l'application de la Loi sur la protection des renseignements personnels pour ce qui est de la transmission de données aux pays pour lesquels le gouvernement du Canada nous autorise à le faire.
Je ne suis au courant d'aucune contrainte qui s'appliquerait à ces pays quant à l'utilisation des données fournies.
M. Georges Petsikas, directeur, Affaires gouvernementales et de l'industrie, Air Transat: Je crois qu'une mesure de protection à cet égard a été négociée avec les États-Unis en raison des dispositions relatives aux voyages vers Cuba. Bien entendu, ces dispositions ne s'appliquent pas aux citoyens canadiens. Les renseignements recueillis par les transporteurs pour les vols à destination du Canada sont filtrés en fonction des voyages précédents, comme ceux vers Cuba. On pourrait, par exemple, avoir le cas d'un citoyen américain qui voyage de l'aéroport Heathrow, à Londres, vers Toronto et qui, pour une raison ou une autre, s'est rendu de la Havane à Londres. Nous avons certaines mesures de protection à ce chapitre. Ainsi, ces renseignements ne pourraient pas servir à l'application de la loi Helms-Burton que le Canada n'appuie pas. Cela mis à part, les gouvernements ne nous offrent aucune garantie quant à l'utilisation qu'ils font des renseignements fournis. Dans les pays où cette exigence s'applique, c'est une condition sine qua non pour l'exploitation de services aériens. Il y a beaucoup de discussions à cet égard, mais encore très peu de pays imposent actuellement cette exigence. Cela se limite en fait au Canada et aux États-Unis. L'Australie est sur le point de le faire. L'Europe en discute. Le Royaume-Uni ouvrira probablement la marche là-bas. Comme vous le savez sans doute, la diffusion d'informations aux États-Unis par les transporteurs européens soulève d'importants problèmes quant à la protection des renseignements personnels. Ce sera un dossier difficile à régler.
M. Brian Racine, chef de service, Facilitation et affaires réglementaires intra-Canada, Air Canada: Tous les pays qui ont besoin de ces renseignements adoptent leurs propres lois à cet égard. Je suis d'accord avec mes collègues: les trois pays auxquels nous transmettons ces données sont le Canada, les États-Unis et l'Australie. Il est également important de faire la distinction entre les renseignements que nous leur fournissons et ceux auxquels ils ont accès via le système de réservation, comme ce qui figure sur le passeport, parce qu'un passager qui se rend dans un autre pays devra fournir tôt ou tard cette information pour y avoir accès. Vous devez produire volontairement votre passeport si vous voulez franchir une frontière.
Il s'agit de deux questions distinctes. Tous les pays qui imposent cette exigence disposent également d'une loi, prévoyant un certain nombre de mesures de protection, qui a été adoptée par leur propre gouvernement. On y indique pendant combien de temps les renseignements peuvent être conservés, à quel endroit ils sont emmagasinés et de quelle façon, et qui peut y avoir accès. Nous sommes informés de ces conditions particulières lorsque nous transmettons les renseignements.
Le sénateur Andreychuk: Ainsi, vous savez ce que le gouvernement vous a dit qu'il allait faire de ces renseignements, mais vous n'avez aucun moyen de le vérifier dans les pays en question. Autrement dit, vous ne disposez pas de mécanismes vous permettant déterminer s'ils donnent vraiment suite à leurs engagements.
M. Racine: C'est exact, jusqu'à un certain point. À Air Canada, nous utilisons un mécanisme de contrôle pour déterminer si ces pays n'ont pas accès à des renseignements dont ils n'ont pas besoin pour l'application de leurs lois. Pour ce qui est des États-Unis, tout va bien. Au Canada, on peut procéder à la même vérification pour voir si l'on ne consulte pas de données qui sortent du cadre législatif établi. Dans les deux pays, nous n'avons eu aucun cas d'accès à des renseignements qui n'étaient pas nécessaires à l'application des lois.
Le sénateur Andreychuk: Ma question ne portait pas tant sur l'accès à l'information que sur son utilisation. Une fois qu'un pays à déterminer les renseignements dont il a besoin, comment vous assurez-vous qu'il ne les utilise qu'aux fins de la sécurité et non à d'autres usages pour lesquels il lui faut en savoir davantage au sujet d'une personne?
M. Racine: Pour ce qui est d'Air Canada, nous n'avons aucun moyen de le confirmer.
Le sénateur Andreychuk: Vous nous avez présenté des arguments probants en faveur des amendements que vous jugez nécessaires.
Je m'inquiète notamment d'une de vos révélations qui n'avait jamais été portée à l'attention de notre comité. Vous serez désormais tenu de fournir des renseignements aux services de sécurité lorsqu'il existera un risque, mais ces services n'auront pas à vous aviser lorsqu'il y aura menace immédiate. C'est une situation très préoccupante. Comme vous l'avez dit, des gens peuvent monter dans un avion, pendant que quelqu'un sait quelque chose au sujet d'un des passagers ou de l'avion lui-même, mais vous n'êtes pas au courant. Il est possible que vous le découvriez après coup.
Si vous n'obtenez pas les informations voulues du SCRS, de la GRC ou du ministère des Transports, sauf de façon strictement volontaire, quels systèmes avez-vous mis en place pour protéger la sécurité de vos passagers?
M. Everson: Permettez-moi de commencer. La sécurité des transports aériens passe d'abord et avant tout par la sécurité physique. Le gouvernement est d'avis que, quels que soient les projets que nourrit une personne, si elle n'est pas en possession d'une arme, ne peut pas avoir accès au poste de pilotage et n'a pas d'explosif dans ses bagages, elle n'est guère en mesure d'empêcher le cours normal du vol. Je suppose que n'importe qui peut constituer une menace pour la personne assise à ses côtés, mais cela est vrai également dans un cinéma, par exemple, et partout ailleurs.
Je le répète, on a dépensé énormément d'argent au cours des deux dernières années pour moderniser les mesures de contrôle et placer des policiers armés sur certains vols.
Nous ne nions pas qu'il peut être très utile de disposer d'informations sur les passagers, tant pour la sécurité de l'entreprise que pour celle du pays. Cependant, le projet de loi ne précise pas de quelle façon l'État compte procéder à ce chapitre.
Peut-être souhaite-t-on quelque chose de semblable à CAPPS II, le système prévu par le gouvernement américain pour le contrôle continu et permanent de toutes les réservations aériennes qui permettra de vérifier le nom de chaque passager en fonction des listes et des sources de données disponibles. Il s'agit d'un système électronique très complexe qui sera utilisé pour la sécurité de l'aviation, mais qui servira principalement aux fins de l'application des lois et des services de sécurité en général. Si le Canada n'envisage pas une telle option, mais voudrait plutôt puiser des noms à même différentes sources et nous demander de l'information, cela nécessitera une méthodologie totalement différente. Il est bien évident que nous avons grand hâte de connaître les préférences du gouvernement à cet égard.
Mme Smith-Valade: Nous aimerions vraiment considérer le processus comme un partenariat entre le transporteur aérien et l'organisation qui a accès aux renseignements de façon à ce que tous conjuguent leurs efforts.
M. Yves Duguay, premier directeur, Sûreté de l'entreprise et gestion des risques, Air Canada: Il y a actuellement des échanges non structurés d'information dans le cas des menaces d'ordre général. Nous sommes reconnaissants à nos collègues de Transports Canada de bien vouloir nous fournir ces renseignements. Cependant, le projet de loi ne renferme aucune disposition assurant une telle réciprocité dans les échanges officiels qui auront lieu entre les transporteurs et les services de sécurité.
À l'heure actuelle, la meilleure façon pour nous d'assurer la sécurité de nos passagers consiste à appliquer de façon stricte et entière les mesures qui ont été adoptées par Transports Canada et les autres agences responsables. Vous avez tout à fait raison d'affirmer que la sécurité devrait être une question de normes et de cohérence. Il existe actuellement deux pôles de réglementation: les Américains, leur TSA et le Département de la sécurité intérieure; et l'Union européenne. Nous craignons un grand manque de dialogue et de collaboration dans l'élaboration des mesures de sécurité.
Pour vous donner une petite idée des problèmes liés à la divulgation des renseignements, il nous faut fournir les données du SIPV, du PVE, une variante du SIPV, en plus de nos dossiers passagers et RDC, lesquels sont visés par l'application du projet de loi C-7, de la liste des membres d'équipage et du manifeste de cargaison. Nous devons fournir ce genre de données au moyen d'un système commercial qui a été conçu pour recueillir de l'information, et non pour la divulguer. Et nous devons transmettre ces renseignements dans les délais exigés et de la manière prescrite par les différents gouvernements qui en font la demande.
L'absence de normes suffisantes est l'une de nos principales craintes en tant que transporteurs internationaux, une crainte partagée par nos collègues de l'IATA. Nous espérons que le gouvernement canadien agira comme chef de file dans l'établissement de telles normes de manière à éviter les répercussions sur notre système de réservation et, plus important encore, les risques pour nos passagers.
La présidente: Vous souhaitez que le gouvernement canadien agisse comme chef de file pour l'établissement de ces normes. J'en déduis que les normes existantes ne sont pas suffisantes à vos yeux.
M. Duguay: Comme ma collègue l'a mentionné au départ, l'OACI et l'IATA ont élaboré certaines normes. Celles-ci constitueraient un point de départ idéal pour l'établissement de normes internationales, ou du moins régionales, qui minimiseraient les répercussions pour les transporteurs.
La présidente: Nous ne pouvons pas nous servir des lois canadiennes pour imposer des normes internationales au reste du monde. Nous allons recevoir le ministre et nous lui demanderons si le Canada compte assurer un certain leadership ou a d'autres plans à cet égard, mais je tenais à m'assurer que je vous avais bien compris.
M. Everson: Nous voulons que le gouvernement canadien adhère aux normes de l'OACI, dont il fait partie, et qu'il en tienne compte lorsqu'il rédige de nouvelles lois applicables au Canada.
Le sénateur Phalen: Lors de son témoignage devant notre comité, Jennifer Stoddart, la commissaire à la protection de la vie privée du Canada, a indiqué que l'une des raisons pour lesquelles son bureau s'opposait vivement à ce projet de loi est le fait qu'il mettait des organisations du secteur privé à contribution en les obligeant à participer à des activités d'exécution de la loi. Êtes-vous d'accord avec cette affirmation?
M. Everson: C'est en effet le cas. Quant à savoir si nous sommes d'accord, c'est une autre histoire. Les compagnies aériennes ont l'habitude de se voir servir des mandats et des exigences du genre lorsque les autorités policières souhaitent obtenir des renseignements de nous; nous avons toujours coopéré à ce chapitre comme le font les compagnies de télécommunications.
Le sénateur Phalen: J'aimerais savoir si ce projet de loi ferait en sorte que vos employés auraient accès à des renseignements sur les passagers dont ils ne disposaient pas auparavant. Le projet de loi comporte-t-il des éléments nouveaux qui suscitent chez vous des préoccupations plus profondes?
M. Everson: Ce n'est pas indiqué dans le projet de loi comme tel, mais il est bien évident que nous devrons fournir davantage de renseignements qu'actuellement. Par exemple, la police effectue une vérification du casier judiciaire en fonction de la date de naissance. Sommes-nous intéressés à connaître la date de naissance de tous nos passagers? Il nous faudrait recueillir cette information au moyen d'un système qui pourrait l'inscrire en format électronique; nous ne disposons pas actuellement d'un tel système.
Le sénateur Phalen: Si je me fie à l'annexe constituant les deux dernières pages du projet de loi, les informations sur les passagers que vous devrez fournir aux autorités policières peuvent renfermer jusqu'à 34 éléments.
Comment allez-vous recueillir ces renseignements? Allez-vous poser 34 questions?
M. Everson: D'autres témoins voudront peut-être vous répondre là-dessus. Le gouvernement du Canada a élaboré ce projet de loi en se fondant, en toute équité, sur l'hypothèse suivant laquelle nous disposons au sujet de nos passagers des vols intérieurs de renseignements similaires à ceux concernant nos passagers internationaux. Il est bien évident que ce n'est pas le cas. Les passagers des vols internationaux, et tous les voyageurs internationaux en fait, doivent depuis toujours fournir une certaine quantité de renseignements personnels sur leur passeport et leurs demandes de visa. Par conséquent, il a toujours été relativement facile pour nous de fournir des informations préalables sur ces voyageurs, ou de permettre aux autorités des différents pays d'avoir accès à nos systèmes de réservation pour en consulter le contenu. Il y a tout simplement plus d'informations enregistrées pour les voyages internationaux.
L'information que nous avons sur les passagers effectuant un vol intérieur peut être très minime. Ce qui nous inquiète, c'est que les pouvoirs publics nous obligent à accumuler encore plus d'information sur chaque passager afin que leur système fonctionne efficacement.
Le sénateur Phalen: Lorsque je vais prendre l'avion, on me pose une ou deux questions — ai-je moi-même fait mes bagages, les ai-je laissés sans surveillance pendant un certain temps — mais on ne me pose pas les genres de questions figurant dans ce projet de loi. Je me demande à quel moment et par qui ces questions seront posées et si l'on demandera le même genre d'information aux agences de voyage?
Mme Smith-Valade: Madame la présidente, permettez-moi de répondre au nom d'Air Canada, en général, avant d'inviter Yves Duguay à intervenir sur ce point également.
Pour des raisons purement commerciales, Air Canada doit faire en sorte que les formalités à l'aéroport s'accomplissent le plus rapidement possible. Nous faisons tout ce que nous pouvons pour accélérer le processus, qu'il s'agisse des guichets d'enregistrement express, que je suis sûre vous avez tous utilisés, ou du débarquement express des bagages.
Bien sûr, nous allons au bout du compte réunir toute l'information exigée par ce projet de loi, mais il nous faudra trouver un moyen rapide de le faire sans retarder de manière significative les formalités à l'aéroport.
M. Duguay: Nous avons omis de souligner un autre point important aujourd'hui, à savoir que l'information que nous réunissons n'est pas valide. Elle provient des centres d'appels, des centres d'aéroports et, très souvent, du Web. Nous n'exigeons pas ces 34 éléments. Le projet de loi est un peu vague, comme nous l'avons déjà dit, puisqu'il y est indiqué: «le propriétaire ou le responsable du lieu». Nous espérons que cela ne signifie pas que nous serons tenus de réunir tous ces éléments. Mon collègue, M. Racine, dirige le projet d'Air Canada relatif à la collecte de données et je vais lui demander de faire quelques observations à ce sujet.
M. Racine: Je devrais commencer par dire que j'ai examiné tous les éléments et que dans le cadre de rencontres avec les divers organismes, j'ai souligné ce que nous pouvons fournir pour chacun des éléments. De façon très générale, permettez-moi de parler des données.
Les données tombent dans quatre catégories. Tout d'abord les données que nous ne réunissons pas habituellement, pour les voyages intérieurs. Par exemple, nous ne recueillons pas de données sur les passeports, comme chacun sait, car vous n'avez pas besoin de passeport pour vous déplacer à l'intérieur du pays.
Parmi les autres genres de données que nous réunirions, si nous nous occupions de la vente, citons la fiche de carte de crédit, le lieu où le billet a été acheté, ainsi que l'itinéraire complet du passager. Cela ne s'appliquerait qu'à 25 p. 100 des passagers seulement. Dans le cas des 75 p. 100 restants de voyageurs dont nous assurons le transport, les billets sont vendus par une agence de voyages ou par un autre transporteur. Nous ne recevons dans notre système informatique que l'information dont nous avons besoin pour assurer le transport des passagers — quelle est leur identité, quand vont-ils monter à bord, où vont-ils débarquer et où vont-ils par la suite; c'est tout ce que nous savons. Comme nous ne recevons pas de paiement du passager, nous ne disposons pas d'information à ce sujet, ni non plus au sujet de tout ce qui est indiqué ici.
La réalité, par conséquent, c'est que nous n'avons pas cette information dans notre système. Seuls les divers organismes disposent de l'information et on ne peut y avoir accès qu'en consultant tous les systèmes d'information au monde. Il faut revenir aux données de la vente initiale. Je sais que cette solution a été envisagée, mais je ne sais pas comment on procède et ce n'est pas un domaine dont je puisse parler en connaissance de cause.
Le dernier élément des données serait l'information que nous avons parfois, mais pas toujours, car nous ne la recueillons pas nécessairement dans le cadre d'une vente commerciale ou du transport des passagers. Par exemple, les passagers pourraient avoir deux dossiers complètement différents de leurs vols. Ils pourraient réserver un vol sur Air Canada et un vol subséquent sur Lufthansa. Si nous ne participons pas à l'un des déplacements, nous ne savons pas où ils vont, ni non plus si le transport est intermodal — par exemple s'ils ont réservé un vol sur Air Canada et qu'ils prennent ensuite le bateau, le train ou une voiture. Nous ne connaissons pas leur véritable destination ni non plus leur point de départ. Nous savons simplement où ils vont monter à bord de notre avion et où ils vont en débarquer. J'espère que ces renseignements vous permettent de mieux comprendre la situation.
Le sénateur Phalen: Si vous réunissiez l'information relative à ces 34 points et que j'achète un billet auprès d'une agence de voyages, en disposeriez-vous à ce moment-là?
M. Racine: Oui. Madame la présidente, j'aimerais souligner que nous ne recevrions que l'information dont nous avons besoin pour effectuer nos opérations. Le reste de l'information serait conservé par l'agent de voyages.
Le sénateur Phalen: J'essaie de comprendre. Si un pays étranger vous demandait l'information, vous ne disposeriez pas de toute l'information voulue?
M. Racine: C'est exact et c'est ce qui se passe aujourd'hui, qu'il s'agisse, par exemple, des États-Unis, de l'Australie ou du Canada.
Le sénateur Phalen: Que prévoyez-vous pour que vos employés soient bien formés afin d'assurer la protection des renseignements personnels des Canadiens? Une formation est-elle prévue à ce sujet?
M. Petsikas: Peut-être puis-je répondre à cette question. Comme vous le savez, nous avons adopté une politique de protection des données personnelles au sein de notre société conformément aux exigences de la loi. Nous formons activement nos employés à l'heure actuelle en ce qui concerne le traitement, l'utilisation et la divulgation de cette information à des tiers, et cetera. Nous prenons activement de nouvelles mesures pour assurer la sécurité des données réelles, qu'il s'agisse de données sur papier et, bien sûr, de données électroniques, soit l'accès à nos systèmes informatiques.
C'est ce que nous faisons activement pour nous conformer à la loi. Des mesures sont donc prévues à cet égard.
Mme Smith-Valade: Puis-je répondre au nom d'Air Canada? Nous avons à Air Canada un gestionnaire des renseignements personnels à plein temps qui est chargé de s'assurer que le personnel qui traite l'information de nos passagers le fait dans le respect de la Loi sur la protection des renseignements personnels. Nous vérifions également régulièrement la façon dont est traitée cette information pour s'assurer qu'elle n'est pas utilisée à l'encontre de la loi.
Le sénateur Phalen: Lorsque Air Canada a comparu devant le comité de la Chambre des communes à propos de ce projet de loi au cours de la dernière session du Parlement, elle a exprimé des préoccupations, notamment le fait que le manque de coopération entre le gouvernement canadien et d'autres gouvernements et organismes puisse entraîner un double emploi inutile et des difficultés pour ses systèmes de réservation. Ce point vous préoccupe-t-il toujours? Des changements à ce projet de loi pourraient-ils permettre d'apaiser vos inquiétudes?
Mme Smith-Valade: Je vais répondre de manière générale avant de demander à M. Racine de traiter de ce point également.
Nous ne nous trouvons certainement pas dans une situation financière — et je suis sûre que je n'ai pas besoin d'aller dans les détails à ce sujet — qui nous permette de prévoir l'achat de nouveaux systèmes technologiques coûteux. Nos systèmes répondent aux besoins pour lesquels ils ont été conçus et pour l'instant, si on nous demandait d'ajouter de l'information ou de créer des synergies avec les systèmes de données du gouvernement, les coûts afférents seraient non négligeables.
Je vais demander à M. Racine de parler directement de la question des redondances en matière d'information et j'insisterais sur le fait que nous préférerions bâtir une forme de partenariat avec le gouvernement au sujet de ce projet de loi pour éviter ce genre de redondances.
M. Racine: Vous reprenez sans doute ce que j'ai déjà dit lors de mon témoignage devant la Chambre au sujet de ce projet de loi, l'été dernier.
Nous avons toujours des inquiétudes. Pour ne parler que de l'exemple États-Unis-Canada, nous harmonisons de plus en plus la façon et le moment dont nous rassemblons l'information. À l'échelle internationale, je crois que le Canada, comme nous l'avons dit plus tôt, doit être très vigilant et essayer d'influer sur la façon dont on procède à ce niveau. Par exemple, des pays veulent maintenant non seulement de l'information sur les passagers qui arrivent chez eux, mais aussi sur ceux qui en partent. Les États-Unis en sont un bon exemple. C'est ce que l'on appelle l'information sur le départ. Nous envoyons l'information sur un vol au départ de Philadelphie à destination de Toronto, par exemple, aux États-Unis et au Canada. Au fur et à mesure que d'autres pays commenceront à exiger de l'information sur le départ, nous la transmettrons à deux sources différentes. Nous aimerions que cette information soit de même format informatique pour ne pas être obligés d'avoir des systèmes différents. Nous aimerions aussi que cette information soit transmise en même temps. Certains pays veulent l'information après le départ de l'avion, d'autres avant le départ. Certains veulent une partie de l'information qui se trouve dans le système de réservation, tandis que d'autres veulent toute l'information. Nous aimerions une harmonisation à cet égard. Aujourd'hui même, une réunion a lieu au Caire, comme vous le savez sans doute, et les représentants du Canada discutent de cette question dans une tribune de l'Organisation de l'aviation civile internationale, l'OACI. Nous savons que le Canada a adopté une position à cet égard et nous espérons que c'est elle qui l'emportera.
Une norme commune s'impose à l'échelle mondiale faute de quoi nos coûts seront élevés et l'application de nos règles de procédure deviendra de plus en plus difficile. N'oubliez pas que nos vols sont pris en charge ailleurs dans le monde par d'autres transporteurs — au Japon, au Royaume-Uni, en Allemagne et à Singapour — partout où nous sommes présents. La même chose s'appliquerait à tout transporteur international, y compris ceux de mes collègues ici présents.
Il faut informer ces gens-là des procédures ainsi que de la façon dont l'information doit être transmise, où et sous quelle forme. Nous avons absolument besoin d'harmonisation pour maîtriser les coûts, sécuriser les données qui sont envoyées et s'assurer qu'elles seront correctement encodées pour en empêcher la réception en clair au cours de la transmission.
La présidente: Est-ce parce que vous ne savez pas encore exactement quelles seront vos obligations que vous restez vagues quant aux coûts supplémentaires auxquels vous craignez devoir faire face? Il y a une grande différence entre deux millions et plusieurs dizaines de millions de dollars. À votre connaissance, ces coûts d'investissement en amont visent-ils la nouvelle technologie essentiellement, les coûts opérationnels étant comparativement peu importants lorsque circule l'information?
M. Everson: Votre question est judicieuse et bien sûr, nous n'en connaissons pas la réponse; d'après le projet de loi, c'est établi en la forme fixée par règlement. Les responsables de Transport Canada et de la GRC ne sont pas stupides et ne vont pas faire de demandes déraisonnables dès le premier jour. Au cours des dernières années, sur la scène internationale, les pouvoirs publics n'ont pas eu beaucoup de scrupules à ordonner aux transporteurs d'arranger le flux de données à grands frais. Ça a marché. Tout de suite après le 11 septembre, j'ai rencontré à Washington des agents des douanes à qui j'ai demandé: «Pensez-vous vraiment que nos données, sous leur forme actuelle, vont vous être utiles?» Ils ont souri en me répondant par l'affirmative. Au bout de deux ans, elles l'ont été. Par conséquent, s'agirait-il de dépenses d'investissement ou de fonctionnement? Ce pourrait être les deux, ce qui est un grave sujet de préoccupation. Je ne sais pas quel genre de dépenses nous préoccupe le plus. Les coûts d'investissement seraient équivalents à ceux que nous avons supportés à l'échelle internationale. Il pourrait arriver que vous deviez rassembler de nouvelles données dont vous ne disposez pas actuellement et élaborer un logiciel informatique pour avoir ces zones de données supplémentaires; cela peut se faire au fil du temps. Ce qui nous préoccupe tous, mais surtout les petits transporteurs, c'est la collecte de données au point d'enregistrement. Nous craignons que cela ne nous arrive. Comme l'a dit le sénateur, nous pourrions être obligés de rassembler un certain nombre de données que nous n'obtenons pas d'ailleurs. Par exemple, les relations entre agences de voyages et transporteurs aériens ne sont pas toujours sereines. Si les données ne nous sont pas transmises, nous devrons les obtenir auprès du passager à l'aéroport. C'est une source d'inquiétude, compte tenu de tous les problèmes connexes de langue, de clarté et de réservations collectives.
Mme Smith-Valade: Puis-je inviter M. Duguay à parler directement du coût?
M. Duguay: En tant qu'ancien agent de la GRC, je suis sûr que mes anciens collègues feront des demandes raisonnables.
Ceci étant dit, je vais vous donner un aperçu du coût général des mesures de sécurité accrues pour les compagnies aériennes. L'année dernière, l'Association internationale du transport aérien a estimé que le coût de la sécurité mondiale pour les transporteurs aériens pourrait être de cinq milliards de dollars. Dans la foulée des observations de mon collègue, M. Everson, je dirais que nous ne savons pas vraiment comment nous allons procéder. Pour ce qui est de la divulgation de l'information et avant de prévoir des protocoles avec divers organismes, il faut prendre en compte le coût composé des demandes multiples et des voies multiples d'acheminement dans notre système. C'est ce qui va entraîner une répétition des coûts ainsi qu'un risque accru pour notre système informatique. Il est difficile d'estimer le coût tant que nous ne savons pas exactement ce qui nous attend. Il pourrait y avoir une voie d'acheminement de l'information vers le gouvernement canadien, ou cinq.
Le sénateur Eyton: J'aimerais revenir à la question des coûts. Je suis abasourdi par certains des points que vous soulevez aujourd'hui.
Vous avez des systèmes de collecte de l'information. Air Canada, par exemple, a précisé qu'elle ne peut pas se permettre de fournir une partie de cette information supplémentaire à titre gracieux. Toutefois, il me semble que vous ne pouvez pas le dire, à moins que vous ne précisiez quels systèmes existants devront être mis à jour ou que du personnel supplémentaire devra être prévu. Vous nous avez donné une idée de ce dont vous parlez. S'agit-il d'un problème de 200 millions de dollars au départ, puis de 5 millions de dollars de plus pour que tout marche bien ou s'agit- il de quelque chose de différent? Nous avons besoin d'un point de référence. Il n'est pas vraiment utile de nous parler d'un coût global de 5 milliards de dollars. Quelqu'un a sûrement pris le temps de le calculer et d'essayer de quantifier ce qu'il représente en termes généraux. Vous n'avez pas besoin d'être précis. De manière générale, de quel montant en dollars s'agit-il initialement, et de quel montant parle-t-on pour le fonctionnement du système?
M. Racine: Je vais reprendre les chiffres que j'ai donnés l'année dernière. Après le 11 septembre et jusqu'en 2003, pour avoir des systèmes de sécurité de niveau accru, Air Canada a fait des dépenses d'investissement de 60 millions de dollars et connu une hausse annualisée de ses dépenses de fonctionnement de 40 millions de dollars.
Nous avons reçu certains remboursements par la suite pour, par exemple, le renforcement des portes de cabines.
Pour fournir de l'information sur les passeports dans le contexte du SIPV à l'échelle internationale, nous avons eu des dépenses de trois ordres. Les lecteurs représentent le coût le moins élevé. Il s'agit d'un système électronique permettant de lire le passeport et d'obtenir l'information qu'il renferme. Nous avons dû adopter ce système, car réunir l'information manuellement prend environ une minute. On a souvent une heure entre les correspondances et on doit traiter de 300 à 400 passagers, sans toutefois disposer de 300 à 400 minutes supplémentaires pour les faire passer du point A au point B à l'aéroport. Il nous a fallu automatiser le processus. Nous nous sommes aperçus que les systèmes que nous avions en Europe — la plate-forme informatique — ne pouvaient recevoir de lecteur. La plate-forme était dépassée et nous avons dû en acheter une nouvelle, du nouveau matériel, pour pouvoir installer le lecteur. Vous pouvez comprendre que nous avons donc rapidement dépensé des millions de dollars pour la mise à niveau du matériel et du logiciel pour essentiellement aucune raison commerciale. S'il avait fallu le faire pour répondre à un impératif commercial et obtenir un rendement normal du capital, la compagnie l'aurait fait il y a déjà des années, avant même de connaître les difficultés actuelles. Elle aurait dépensé les fonds s'il s'était agit de mises à niveau commercialement viables. Il faut aussi prendre en compte les coûts d'investissement supplémentaires que représentent les systèmes et le matériel, ainsi que les coûts de la main-d'oeuvre, puisque nous avons besoin de plus de personnes. Peu importe si l'automatisation est prévue ou non, car les passeports ne peuvent pas être tous lus par des lecteurs. Cela ralentit le processus si bien que les passagers ratent leurs correspondances. Cela nous coûte de l'argent et cause des problèmes aux voyageurs. Retarder un vol nous coûte très cher. Tous ceux parmi vous qui avez eu le malheur de voir leur vol retardé savent bien qu'ils devront attendre longtemps avant de pouvoir débarquer, puisque souvent, l'aéroport d'arrivée n'est pas prêt et les pilotes doivent attendre qu'une porte de débarquement leur soit désignée. Par ailleurs, l'avion n'est pas disponible non plus pour sa mission suivante, si bien que tout le système accuse du retard.
Ce sont des coûts évidents de logiciel, de matériel et de main-d'oeuvre. Il y en a d'autres qui ne le sont pas autant et qui ralentissent le rendement de notre système. Nous avons donc dépensé 60 millions de dollars en coûts d'investissement après le 11 septembre et jusqu'en 2003, et nous avons dépensé quelque 40 millions de dollars annualisés pour le personnel supplémentaire, la mise en oeuvre, la formation et la construction de nouvelles installations et de nouveaux guichets, et cetera, pour rassembler ce genre d'information.
Le sénateur Eyton: Êtes-vous en train de dire que ce projet de loi peut entraîner des coûts du même ordre, des coûts de 60 et de 40 millions de dollars; est-ce réaliste pour répondre aux exigences de ce projet de loi de manière générale?
M. Racine: Honnêtement, madame la présidente, nous ne le savons pas. J'ai amené les demandes initiales de données à nos spécialistes de l'informatique. Nous savons très bien que si les organismes voulaient balayer quotidiennement notre base de données, il nous faudrait acheter une nouvelle unité centrale à cet effet seulement. Je n'en connais pas la taille ni le coût. Je ne parle pas de quelques ordinateurs et de quelques serveurs de plus, mais plutôt d'une unité centrale dont les gens de ma génération se souviennent. Ce serait beaucoup d'argent.
Pour situer les choses en contexte, nous activons quotidiennement de 25 000 à 40 000 dossiers de voyageurs. Multipliez ce nombre par la plage de dates de nos réservations, soit 360 jours, et cela vous donne une idée du nombre de dossiers qu'il faudrait vérifier au cas où l'on chercherait un passager ayant une réservation sur Air Canada.
Nous ne pouvons pas le faire nous-mêmes aujourd'hui avec le système actuel dont nous disposons. Il nous faudrait acheter un ordinateur supplémentaire uniquement pour répondre aux obligations de ce genre de recherche de données.
M. Petsikas: Peut-être pourrais-je ajouter rapidement que même si vous avez posé la question à Air Canada et renvoyé aux systèmes actuels, beaucoup de transporteurs auraient à repartir de zéro, franchement, puisque le système n'existe pas. Pour la grande majorité de nos passagers, nous ne disposons pas d'un système de réservation traditionnel, interne, contenant bon nombre des informations apparaissant dans ces 34 éléments. Nous dépendons entièrement de tiers, comme les organisateurs de voyages à forfait qui préparent nos forfaits et vendent nos sièges. Franchement — nous en avons été témoins lors de l'exercice SIPV — il aurait fallu littéralement repartir de zéro et bâtir tout le système uniquement pour répondre aux exigences qui nous étaient imposées.
Le gain commercial était nul, car cela n'avait rien à voir avec la façon dont nous faisons affaire et ne renfermait aucune valeur ajoutée dans ce sens. Deuxièmement, on ne peut pas saisir beaucoup d'information, même si on est automatisé. Nous avons un système manuel; nous n'avons pas de système DCS automatisé dans beaucoup de nos aéroports, si bien que nous ne pouvons même pas savoir quel siège occupait le passager à moins d'intégrer cette capacité dans tous nos aéroports et toutes nos plates-formes.
Par conséquent, il est très difficile de quantifier le montant de ces coûts. Nous n'essayons pas d'éluder la question; je pense que nous ne disposons d'aucune donnée de référence à cet égard.
Mme Smith-Valade: Permettez-moi d'ajouter que mon collègue et moi-même avons fait mention de l'impératif commercial. Nous reconnaissons certainement à Air Canada — et je le soulignerais ici — que la sécurité est et a toujours été la priorité numéro un. Nous savons que les passagers qui achètent des billets Air Canada se les procurent essentiellement pour avoir la garantie d'un voyage sûr et sécuritaire. Il ne s'agit pas tant du fait que cela ne correspond pas à notre impératif commercial, mais du fait que nous voulons véritablement travailler en partenariat avec le gouvernement fédéral au niveau de l'information afin d'assurer cette sécurité comme l'exige le projet de loi.
Le sénateur Spivak: Après vous avoir écouté, je me demande si nous adoptons l'approche voulue. Il se peut que vous receviez trop d'information ce qui, peut-être, est aussi inutile que pas d'information du tout. Peut-être faudrait-il repartir de zéro, examiner tous ces organismes différents pour voir ce qui est véritablement exigé. Ce n'est pas une question que je vous pose, mais simplement une réponse à ce que vous avez dit. C'est ridicule.
Ce que j'aimerais dire ensuite, c'est qu'il en coûte maintenant 3 000 $ pour voyager par avion en classe économique au Canada, comme mon collègue l'a fait remarquer. Ces coûts vont devenir exorbitants.
À la page 2 de votre mémoire, vous dites que tous les transporteurs aériens devront fournir à Transports Canada des renseignements à l'égard des personnes dont la présence est prévue à bord d'un vol si le ministère estime qu'un danger immédiat menace ce vol; vous dites que ce devrait être étoffé pour informer les transporteurs de la nature de cette menace. Comment est-ce possible? Comment est-ce possible que lorsqu'ils estiment qu'un danger menace le vol, ils ne vous transmettent pas cette information? Vous devriez pouvoir annuler le vol si la menace est suffisamment importante.
Comment cela marche-t-il? D'où obtiennent-ils l'information? C'est extrêmement curieux. Peut-être que je ne comprends pas, mais c'est vraiment curieux. Ils vous demandent de l'information au sujet d'une menace immédiate. D'où provient cette information et pourquoi n'en savez-vous rien? Que se passe-t-il exactement?
Mme Smith-Valade: C'est une excellente question et je vais demander à M. Duguay, notre directeur de sûreté de l'entreprise, d'y répondre.
M. Duguay: Heureusement, il n'y a pas eu trop d'incidents documentés jusqu'ici. Toutefois, il suffit de se reporter aux vacances de Noël pour s'apercevoir que des vols ont été annulés entre l'Europe et les États-Unis pour des raisons de sécurité qui n'ont jamais été divulguées. Le transporteur a choisi à ce moment-là d'annuler le vol en question.
Le sénateur Spivak: Savait-il ce dont il s'agissait?
M. Duguay: Nous supposons qu'il savait qu'il existait une menace précise si bien qu'il a décidé d'annuler le vol, ce qui correspond exactement à notre point de vue. Nous comprenons que nous ne pouvons pas être mis dans la confidence des autorités compétentes en ce qui concerne certaines informations dont elles disposent, et nous ne demandons pas ces informations. Nous demandons la réciprocité. Nous faisons confiance aux autorités en ce qui concerne l'évaluation qu'elles vont faire, dans la mesure où nous faisons partie de l'évaluation et où on nous dit qu'il existe une menace précise. À ce moment-là, nous prenons une décision en matière de sécurité.
Le sénateur Spivak: N'est-ce pas là l'essentiel? Bien sûr, vous n'aurez pas beaucoup d'incidents de cette nature, mais n'est-ce pas là toute la question de sécurité? Nous ne voulons pas qu'un avion explose en plein ciel. Normalement, cela ne se produit pas, toutefois, si c'est une possibilité, n'est-ce pas là ce qui compte? D'où obtiennent-ils leurs informations?
De toute évidence, Transports Canada obtient l'information des agences de sécurité, n'est-ce pas? Par conséquent, c'est à mon avis un ensemble d'informations qui seraient très utiles aux lignes aériennes, car elles pourraient alors automatiquement cocher le nom de tel ou tel passager. Ce serait équivalent à ce qui se passe dans le cas des douanes et de l'immigration qui disposent d'une liste de personnes dont l'entrée n'est pas autorisée dans notre pays. Je ne comprends pas ce qui se passe ici. C'est tout, madame la présidente, je n'ai pas d'autres questions.
M. Duguay: Je ne suis pas sûr de la source de l'information. Si je comprends bien, il s'agit d'un partage mondial de l'information. Certaines autorités gouvernementales ont pris des mesures agressives pour interdire à certains passagers de prendre un vol. Les Américains émettent des avis d'interdiction de départ, et cetera. Nous ne sommes pas trop sûrs, après la lecture du projet de loi, dans quelle direction nous allons à ce sujet au Canada. Essentiellement, je le répète...
Le sénateur Spivak: Toutefois, vous n'avez pas cette information. Votre personnel, aux points d'entrée ou de sortie n'a pas cette information si bien qu'il serait facile à certaines personnes de s'introduire et de court-circuiter ce projet de loi.
M. Duguay: Je dois dire que la sécurité se compose de multiples éléments; c'est un élément parmi tant d'autres. Il faut également s'assurer que toutes les autres mesures sont strictement appliquées.
Le sénateur Day: Vous connaissez bien la partie IV de ce projet de loi qui fait d'une infraction tout canular relatif à une activité terroriste? Est-ce que vous vous objectez à cette modification du Code criminel qui vise les gens qui affirment, par exemple, qu'il y a une bombe sur un avion alors qu'il n'y en a pas, et ce genre de canulars?
M. Duguay: Non, nous ne nous y opposons pas. Ce sera un peu plus facile pour les autorités, les services policiers de l'aéroport, d'intervenir, parce que maintenant ce sera clair.
Le sénateur Day: Ce qui sera clair, c'est l'accusation qui pourra être portée, c'est bien cela?
M. Duguay: Oui.
Le sénateur Day: Si ce projet de loi était libellé de telle façon que les lignes aériennes et les agences de réservation seraient obligées de divulguer des renseignements qu'elles détiennent, je soupçonne que ce comité en serait très mécontent. Ce serait trop vague.
Une autre solution aurait pu être d'exiger des compagnies aériennes et agences de voyage qu'elles recueillent tous les renseignements décrits à l'annexe de la fin, mais ça aurait été onéreux et difficile pour vous. Par conséquent, le compromis, c'est que le projet de loi définisse le type général d'information, les paramètres des renseignements, sous forme de l'annexe. Il ne dit pas que vous êtes tenus de recueillir tous ces renseignements; il dit que vous pourriez être obligés de communiquer les renseignements que vous détenez. Cela me semble clair — «demander à tout transporteur aérien ou à tout exploitant de systèmes de réservation de services aériens qu'ils lui fournissent... les renseignements dont ils disposent...».
Le sénateur Andreychuk: C'est à quel article?
Le sénateur Day: C'est dans plusieurs articles. À la page 9 et à la page 12, c'est aux articles 4.81 et 4.82.
Alors je ne comprends pas ce qui vous inquiète. Il me semble que ce devrait être un compromis raisonnable.
M. Gérard Chouest, avocat, Paterson, MacDougall, LLP: Je pense qu'il y a un enjeu juridique assez intéressant, ici. Le terme «control» en anglais, rendu par «détiennent» en français, tel que les avocats le comprennent, est un concept assez vaste. C'est nettement plus vaste que si on parlait de «possession», par exemple.
Les renseignements que je détiens englobent tout renseignement que peuvent avoir, par exemple, mes agents, et que j'ai légitiment le droit d'exiger. Généralement, dans la loi, que je détienne ou non un élément d'information, si j'ai un droit quelconque de l'exiger, que ce soit en allant voir mon agent et en lui demandant: «vous l'avez, donnez-le-moi» ou en disant à mon passager: «vous voulez voyager sur mon avion, et pour pouvoir le faire, vous devez me donner cette information», c'est un renseignement que je détiens. C'est pourquoi M. Everson a suggéré, dans ses déclarations préliminaires, que certaines précisions additionnelles, comme les renseignements que détient le transporteur et qu'il obtient généralement aux fins d'exploitation d'un service aérien commercial, quelque chose du genre, seraient nécessaires pour circonscrire de façon raisonnable ce concept assez vaste.
Le sénateur Day: Merci, je comprends, maintenant.
Je ne sais plus qui c'était, mais l'un de vous, dans ses déclarations préliminaires, a dit que le Canada est le meilleur, actuellement, en matière de cueillette de renseignements. Ai-je bien entendu? Pourriez-vous expliquer cela un peu plus?
M. Everson: Nous avons constaté que parmi les pays auxquels nous avons dû nous entretenir d'information préalable sur les voyageurs, le Canada était le plus raisonnable et le plus pragmatique. L'Australie a un système différent, qui est extrêmement agressif. Les États-Unis sont ceux qui ont mené la charge, en disant: «vos données ne suffisent pas, arrangez cela», et ont été les plus lents à nous offrir, ou à offrir à quiconque d'autre, le moindre mécanisme de protection des renseignements. Le Canada a été pragmatique, en partie parce que nous avons Air Canada, qui est une ligne aérienne très informatisée. Nous avons certains transporteurs bon marché, qui ont très peu de systèmes électroniques. Puis, il y a des dizaines et des dizaines de transporteurs aériens qui sont beaucoup plus modestes et qui n'en ont aucun, et qui s'appuient encore sur des systèmes manuels, et ils traversent les frontières. Le Canada voulait les données à l'avance, les États-Unis les voulaient à l'avance, de tous les exploitants, alors il fallait être pragmatique. C'est pourquoi nous avons fait des compliments au Canada, parce que nous avons trouvé que c'était le plus raisonnable, et nous avons un bon système maintenant, qui fonctionne bien.
Le sénateur Day: Pourriez-vous me dire ce que vous faites maintenant, pour ce qui est de fournir des renseignements, et à qui vous les fournissez? On a cité l'exemple d'un vol de Philadelphie vers le Canada. Certains renseignements sont envoyés au Canada. À qui sont-ils envoyés maintenant?
M. Everson: Les vols transfrontaliers sont assurés par Air Canada, alors je les laisserai y répondre et si j'ai quelque chose à ajouter, je n'y manquerai pas.
M. Racine: Certainement. Si vous permettez, je vais garder le même exemple, madame la présidente. Nous prendrions les renseignements que contient le passeport des passagers au poste de contrôle de Philadelphie. Ces renseignements — à moins que vous le vouliez, je n'entrerai pas dans les détails — sont ceux que contient votre passeport. Ils seraient envoyés à deux endroits. Les renseignements, encodés et avec les mesures de protection normales, seraient envoyés presque simultanément, au moyen d'un système sécuritaire de transmission électronique, quelque part en Virginie. Je ne me souviens pas exactement où se trouvent les ordinateurs américains qui reçoivent l'information. Ce serait pour les voyageurs qui quittent les États-Unis.
Les renseignements sont envoyés au Canada, à un système informatique que tient ce qui était auparavant l'Agence des douanes et du revenu du Canada, l'ADRC. Je vais employer son ancien titre, parce que c'est celui que cite la loi. Comme vous le savez, avec l'ancien système, l'Agence, à son tour, agissait pour le compte de Douanes et Immigration Canada, donc il y avait une relation symbiotique entre les deux. En vertu des lois des deux pays, ces renseignements seraient envoyés une fois que l'avion aurait décollé.
Les deux pays auraient aussi accès aux fichiers des noms des passagers et à la liste des personnes qui seraient à bord de l'avion. Ils pourraient aussi avoir accès à ces renseignements tandis que l'avion est en vol, et avant qu'il décolle, tant qu'à y être, puisque dans une certaine mesure, nous savons d'avance qui sera à bord de l'avion. De toute évidence, il y a des gens qui n'embarquent pas et d'autres qui arrivent à la dernière minute, et ceux-là déborderont de la portée de notre système de réservation.
Le sénateur Day: On peut supposer que ces renseignements sont maintenant transmis à l'Agence des services frontaliers du Canada, qui a pris en charge certaines des fonctions de l'ADRC et d'autres de l'Immigration. Est-ce qu'une part de ces renseignements était envoyée, ou est envoyée maintenant, à la GRC, au SCRS ou à Transports Canada?
M. Racine: Je ne peux pas vraiment le dire. Ce serait une question à poser au groupe de protection des frontières du Canada. La loi originale, si je ne me trompe, ne l'envisageait pas.
Le sénateur Day: Est-ce qu'Air Canada envoie des renseignements à tout autre organisme du Canada qu'à la nouvelle agence qui remplace l'ADRC?
M. Racine: Non, sénateur, absolument pas.
Le sénateur Day: Ma dernière question, c'est qu'est-ce qui se passe aux États-Unis, en Europe et en Australie?
M. Everson: Je ne suis pas sûr de pouvoir vous donner une réponse exhaustive, mais si des agents du FBI devaient se présenter, aux États-Unis, à Delta Airlines et exiger de connaître les détails des réservations d'un passager sur un vol en provenance d'Atlanta, l'aéroport pivot, vers Denver, Delta exigerait de voir leur mandat. Ils n'ont aucun droit de plus que ceux dont jouissent les services policiers actuellement.
Cela étant dit, ils se présentent régulièrement avec des mandats pour obtenir ce genre de renseignements.
En Europe, il n'y a pas d'exigence de déclaration des renseignements sur les passagers. Je pense que c'est cela. Au Canada, bien entendu, comme je l'ai dit dans mes observations, on peut se présenter pour prendre un vol intérieur et dire: «je m'appelle Spike. Voilà mon argent. Je n'ai pas de sac. Je veux prendre l'avion». Tant que vous avez une pièce d'identité avec photo, délivrée par le gouvernement, qui dit que vous vous appelez «Spike», on ne vous en demande pas plus.
Le sénateur Day: Rien, dans cette loi proposée, ne vous obligerait à demander plus de renseignements que cela?
M. Everson: C'est probablement toute l'information dont on a besoin. Il se peut que nous ayons beaucoup plus de renseignements sur nos passagers. Il se peut qu'on ait des données d'un programme aéroplan, si le passager en est membre. Nous ne voulons pas donner l'impression que nos données sont inutiles aux services de sécurité ou que nous pensons qu'il faudrait les leur refuser. Nous avons des renseignements. Cependant, si on suit la logique qu'exposait le commissaire quand il était ici, par exemple, pour l'appliquer à nos renseignements, il est bien clair que nous devrions en recueillir plus. Ils ne peuvent pas faire grand chose avec Spike. Nous ne consignons même pas le type de pièce d'identité montré quand les passagers montent à bord de l'avion. Les agents d'embarquement regardent votre nom sur le billet, puis le nom qu'il y a sur la pièce d'identité pour s'assurer que c'est le même, et ils vérifient la photo pour s'assurer que vous êtes bien cette personne. Ils n'inscrivent pas ces renseignements sur un registre actuellement, alors on peut supposer que l'une des premières choses qu'ils voudraient qu'on fasse, c'est d'inscrire si c'était un permis de conduire, une fiche d'inscription électorale, ou quoi que ce soit d'autre. Ils voudraient cela comme documents de voyage, parce qu'on n'a pas besoin de passeport pour les vols intérieurs. Comme je l'ai dit, je pense que la date de naissance serait une indispensable aux services policiers, parce que c'est avec elle qu'ils font leurs vérifications.
Le sénateur Day: Vous faites maintenant des hypothèses sur ce qui pourrait arriver. Il n'y a rien, dans ce projet de loi, qui vous y obligerait.
M. Everson: Notre plaidoyer devant le Sénat est pour nous assurer qu'ils n'aient pas la liberté d'inventer ce dont ils pourraient avoir besoin. Nous aimerions jouir de certaines protections en ce qui concerne la manière dont nous allons procéder.
Le sénateur Day: Vous avez déjà signalé les préoccupations qu'éveille en vous le terme «control».
M. Averson: Les transporteurs aériens peuvent être obligés de recueillir plus de renseignements auprès de leurs voyageurs, si Transports Canada décide d'émettre une directive sur la sécurité à cet effet. Je pense que c'est dans la Loi sur l'aéronautique. Je ne voudrais pas donner l'impression d'un complot, mais rien n'empêche les agences de dire que nous aurons les renseignements, parce qu'elles nous obligent, en vertu de l'autre loi, à les recueillir. Par exemple, l'exigence de la pièce d'identité avec photo est venue après les événements du 11 septembre. Dès l'instant où les gens sont obligés de présenter une pièce d'identité avec photo, je ne pense qu'il serait bien difficile d'exiger que nous enregistrions la pièce d'identité avec photo et la versions dans nos banques de données.
La présidente: Peu de choses sont demandées actuellement pour les vols intérieurs aux États-Unis, mais avec le système CAPPS II, cette situation changerait.
M. Averson: C'est vrai.
La présidente: Ils cherchent, comme nous, un système plus sophistiqué de vérification des voyageurs à bord des vols intérieurs?
M. Averson: Oui. Comme vous le savez, le débat entre les transporteurs et le Congrès sur la façon de faire avec le système CAPPS II est très animé.
Le sénateur Phalen: Il y a que 34 éléments. Ils ne sont pas encore en vigueur. Est-ce que vous allez devoir poser ces questions?
M. Averson: Pas pour l'instant.
Le sénateur Andreychuk: On a entendu dans un témoignage, à tout le moins de façon informelle, si ce n'est pas formelle, que cette loi qui est proposée est nécessaire, en partie, pour assurer la conformité avec le CAPPS II. Est-ce que vous trouvez, comme moi, que la méthodologie et la technologie du CAPPS II ne sont pas encore définies et que le débat, au Congrès, fait encore rage? Nous ne sommes pas tout à fait sûrs de savoir à quoi nous nous adaptons.
M. Averson: Les transporteurs des États-Unis attendent tous de voir ce que seront les exigences réglementaires du CAPPS II. Ils ne savent pas quand elles seront publiées.
Le sénateur Day: Supposons que cette loi proposée ne soit pas adoptée, quelles seront les répercussions, sur le système CAPPS II, du projet de loi C-44, qui est déjà promulgué? Avons-nous besoin de cette loi proposée pour continuer de voyager à l'intérieur des États-Unis? Est-ce que c'est déjà prévu, en ce qui concerne la divulgation, dans une loi déjà en vigueur?
M. Averson: Le projet de loi C-44 nous a permis de transmettre des renseignements à d'autres pays, aux États-Unis surtout, sur les passagers qui devaient traverser la frontière. Les États-Unis n'ont aucun accès aux renseignements sur les passagers des vols intérieurs du Canada, pas plus qu'aucune agence de sécurité canadienne. Vous voulez savoir, si le projet de loi n'est pas adopté, quelle en sera l'incidence sur le CAPPS II? Je ne pense pas que nos transporteurs vont participer au système CAPPS II, parce que nous fournissons déjà des renseignements aux fins de transport, et que nous ne sommes pas autorisés à offrir les vols intérieurs aux États-Unis.
Le sénateur Day: C'est bien ce que je dis.
M. Averson: Peut-être quelqu'un d'autre voudra-t-il offrir plus de détails.
Le sénateur Merchant: Je m'inquiète un peu de ces renseignements que nous allons recueillir sur les gens. Vous dites que le Canada est au premier rang en matière de cueillette des renseignements. Est-ce que cela veut aussi dire que le Canada est le pays le plus sécuritaire? En quoi tous ces renseignements nous mettent-ils plus en sécurité?
M. Averson: Je ne voulais pas dire que le Canada recueille le plus de renseignements. Il est certain que l'Australie et les États-Unis en recueillent plus. Nous avons constaté que c'est avec les autorités canadiennes que les rapports étaient les plus faciles. Elles sont les plus pragmatiques et les plus utiles pour nous, tandis que nous essayons de relever le défi de fournir des données que contiennent les systèmes de renseignements très primitifs des transporteurs plus modestes et le système complexe de réservations d'Air Canada. Nous sommes heureux de devoir traiter, surtout, avec les autorités canadiennes. Le plus gros des renseignements que nous recueillons sur les passagers sont nécessaires pour fournir le service que nous avons reçu le mandat de fournir. La plupart des renseignements que nous recueillons sur les voyageurs sont éliminés très peu de temps après le vol. Nous ne gardons pas de vastes bases de données sur nos passagers. La seule exception est celle des membres du programme aéroplan, dont nous tenons le compte à jour. Nous avons des données sur leurs préférences.
Le sénateur Merchant: Les voyages en Amérique du Nord et du Sud ne sont pas tellement sécuritaires. Je sais qu'Israël et l'Allemagne ont des systèmes très sécuritaires. Ils les ont depuis longtemps, bien avant que nous ayons commencé à recueillir ce genre de renseignements.
Savons-nous si nos systèmes sont comparables aux leurs? Vous avez parlé de certains pays. Munich, en Allemagne, semble être très pointilleuse sur la sécurité.
M. Everson: Le dossier du Canada, en matière de sécurité, est exceptionnel. Il est clair que nous jouissons de l'environnement aérien le plus sécuritaire du monde depuis plusieurs années. Nos dépenses sur la sécurité, par passager, étaient nettement inférieures à celles d'Israël jusqu'aux événements du 11 septembre. Nos dépenses par passager, pour la sécurité et la vérification des passagers, actuellement — l'ACSTA pourrait en témoigner — se rapprochent du niveau de celles d'Israël. Notre taxe de sécurité est probablement la plus élevée du monde, bien qu'elle ait été ajustée dans le budget.
Peut-être mes collègues voudraient-ils en parler. Ce qui est le plus important, en matière de sécurité, surtout contre une menace terroriste, c'est qu'on ne peut jamais présumer être tout à fait à l'abri. On ne voudrait pas être absolument optimiste sur la question. Le Canada a fait un effort énorme pour faire de l'aviation une cible beaucoup plus difficile à atteindre pour les terroristes. Si j'étais terroriste, je ne m'en prendrais pas au secteur aérien du Canada, je m'en prendrais à autre chose, parce qu'il y a beaucoup d'incertitudes sur la manière d'approcher la cible, et les mesures de sécurité sont assez rigoureuses. Je sais que nous constatons, et je suis sûr que bien des sénateurs qui voyagent à l'étranger et reviennent au Canada constatent immédiatement que la montre ou le trousseau de clés qui est passé sans problème à New York va faire sonner les détecteurs à Toronto. Les systèmes de vérification du Canada sont très sensibles.
Le sénateur Merchant: Je ne vois pas comment on peut dire ça. Après les événements du 11 septembre, quand une analyse a été faite, on a trouvé bien des lacunes. Il est évident que les terroristes ont pu trouver une brèche dans nos systèmes de sécurité. Je ne parle pas seulement des systèmes canadiens, mais des systèmes nord-américains. Nous n'avons pas été touchés comme certains de ces pays.
M. Everson: C'est probablement vrai, bien que je ne sois pas sûr que nous saurions nécessairement si la GRC a arrêté quelqu'un. Je ne voudrais pas faire perdre beaucoup de temps au comité. Le 11 septembre a été une situation unique. Des gens ont tiré parti des règlements et ont put embarquer sur des avions avec de petites armes. Ces règlements ont changé. Ils n'ont pas trompé les systèmes de sécurité. Ils se sont tout simplement conformés aux règlements en matière de sécurité et s'en sont pris à des gens qui, pendant des dizaines d'années, avaient été formés pour ne pas lutter contre les terroristes. On leur avait dit de faire ce qui leur était demandé, de déposer l'avion. Ils devaient négocier.
Évidemment, c'est l'une des rares fois où le monde a été confronté à des gens qui n'avaient pas la moindre intention de négocier parce qu'ils allaient mourir ce jour-là. Est-ce que cela pourrait se reproduire? S'il arrivait que quiconque, dans un avion où je serais passager, commençait à attaquer l'équipage, je ne resterais pas à ne rien faire. Si des agresseurs disaient vouloir prendre l'avion en otage, je ne pense pas que les passagers réagiraient comme ils l'ont fait auparavant. L'équipage est maintenant avisé de ne pas céder. J'aimerais donner l'occasion à quelqu'un d'autre d'en parler.
M. Duguay: Vous avez tout à fait raison, sénateur, les mesures de sécurité varient dans le monde, mais de très peu en ce qui concerne les transporteurs aériens. Là où nous voyons une différence, c'est dans les exploitants d'aéroports. Vous avez parlé d'Israël. Leur système de sécurité est exhaustif. Il est intégré et fait sur mesure, spécifiquement pour un risque plus élevé que ce qu'il y a ici. Les aéroports européens établissent des normes pour la manière dont ils assurent la sécurité physique au sol.
Fort heureusement, la tendance est à l'harmonisation des mesures de sécurité. Les Américains sont probablement l'exception. Les mesures de sécurité dictées par l'État sont très semblables en ce qui concerne les transporteurs aériens.
Le sénateur Adams: Merci, madame la présidente. Depuis les événements du 11 septembre, les lignes aériennes ont perdu beaucoup de revenus. Certaines personnes ne veulent plus prendre l'avion. Est-ce qu'il y a un peu plus de publicité maintenant? Est-ce que la situation s'améliore? Avons-nous besoin du projet de loi C-7?
M. Everson: La situation s'améliore. Les volumes augmentent dans tous les aéroports canadiens, donc les transporteurs ont plus de passagers, ce qui est un grand soulagement après les deux années que nous venons de passer. Le rendement n'est pas particulièrement bon, parce que nous vendons le produit trop bon marché.
Le projet de loi C-7 est un projet de loi omnibus que proposent les organismes de sécurité et qui a des répercussions très vastes. Nous n'avons pas de position sur l'adoption du projet de loi. Comme je l'ai dit au début, nous coopérons avec les organismes de sécurité — il le faut — et c'est pourquoi nous ne contestons pas l'adoption du projet de loi. Nous ne nous opposons pas à ce que les organismes de l'État aient accès à nos renseignements, à partir du moment où c'est fait d'une manière qui ne nous handicape pas, qu'ils ne nous obligent pas à assumer une part des coûts faramineux et ne causent pas de problèmes opérationnels énormes dans les aéroports.
Le sénateur Adams: Nous avons entendu certains témoins dire que le projet de loi C-7 n'est pas vraiment nécessaire au Canada, c'est surtout les Américains qui le veulent. Est-ce vrai?
M. Everson: Je ne suis pas placé pour le savoir.
Le sénateur Adams: Entre-temps, est-ce que la compagnie aérienne a une police d'assurance, ou quelque chose du genre?
M. Everson: Nous avons une assurance, dont le coût a augmenté de façon phénoménale depuis le 11 septembre. C'est un grand souci de l'industrie.
Le sénateur Adams: C'est pourquoi je vous pose la question. Peut-être seriez-vous mieux protégé. Air Canada a surtout des passagers américains. En plus de ma propre police d'assurance, si je devais vous poursuivre pour quelques millions de dollars de plus parce que vous n'exploitez pas bien un système de sécurité et que les terroristes parviennent à embarquer sur l'avion, avez-vous une espèce quelconque d'assurance extérieure, pour vous protéger?
M. Everson: Si on voyait dans ce projet de loi une espèce d'assurance, parce qu'il est coûteux mais qu'il pourrait augmenter la sécurité sur nos avions, je ne serais pas contre. Il se pourrait qu'il y ait bien des choses, dans le projet de loi C-7, pour nous aider. Cependant, lorsque nous achetons des assurances, nous savons ce que nous achetons; nous savons ce que ça va nous coûter, nous savons l'ampleur de la protection offerte.
Nous devrions avoir le même type de relation, en ce qui concerne ce projet de loi. Il aurait dû y avoir de vastes échanges avec les organismes de l'État avant le dépôt de ce projet de loi, pour que nous comprenions exactement ce qu'ils prévoyaient nous exiger et ce que cela nous coûterait. À ce moment-là, j'aurais pu répondre à la question du sénateur Eyton — combien tout cela va-t-il coûter?
Dans la mesure où de plus amples renseignements sur les voyageurs augmentent la sécurité de l'avion, bien entendu, c'est excellent selon nous. Les opinions, cependant, pourraient diverger, sur la mesure de cette sécurité supplémentaire.
Dans la mesure où le projet de loi augmente la sécurité au Canada parce qu'il permet à la police de mieux suivre la trace des gens visés par un mandat, ou qu'il améliore le service de sécurité parce qu'elle peut chercher des personnes qui sont une menace pour le Canada, et je suppose, en l'occurrence, que ce sont des terroristes, c'est une responsabilité collective des contribuables. Il s'agit de la sécurité nationale. Ce n'est pas la responsabilité uniquement des exploitants de lignes aériennes. Ce que nous avons dit, c'est que si nous devons coopérer dans tout cela et que ce cela doit être onéreux, pour être juste, c'est à la collectivité de débourser, pas seulement aux exploitants privés.
Le sénateur Adams: Nous avons entendu, ce matin, la nouvelle qu'Air Canada fait plus de vérifications des bagages. Qui va payer pour cela? Est-ce que sera le contribuable, ou la compagnie aérienne?
M. Everson: La plupart des nouvelles dispositions relatives à la sécurité de la cargaison qui ont été imposées depuis le 11 septembre sont aux frais de l'exploitant. C'est le deuxième élément de sécurité qui nous a le plus occupés ces dernières années — on est passé des voyageurs, où, évidemment, le problème a été cerné, à la cargaison — et nous y avons consacré énormément de temps.
Mme Smith-Valade: Si vous parlez des bagages vérifiés...
Le sénateur Adams: Actuellement, je pense que vous avez un système de détection olfactive des bombes dans les bagages?
Mme Smith-Valade: Oui, c'est bien cela.
Le sénateur Adams: Voilà ma question. Il y a une dizaine d'années, ce même comité est allé à Londres, et nous sommes passés par un système comme celui-là, avec un carrousel et une machine à rayons X qui vérifiait les bagages qui y descendaient. Est-ce que vous adoptez le même système?
Mme Smith-Valade: C'est strictement un système exploité par l'ACSTA. C'était auparavant la responsabilité d'Air Canada et d'autres transporteurs qui font les vols internationaux, mais ce n'est plus nous qui nous en occupons. Pour être tout à fait franc, notre travail, c'est le transport aérien; et il est tout à fait approprié que d'autres organismes — l'ACSTA dans ce cas particulier — aient pris en charge ce qu'ils font très bien, c'est-à-dire la sécurité.
La présidente: Est-ce que ça vise toute la cargaison, pas seulement les bagages?
M. Duguay: C'est pour les bagages enregistrés. Le Canada est sur le point d'adopter un processus en cinq étapes, que le sénateur a observé à Londres — c'est tout à fait semblable. Les bagages enregistrés sont la responsabilité de l'ACSTA. Actuellement, comme le disait ma collègue, les mesures de sécurité de la cargaison sont strictement la responsabilité des transporteurs.
Le sénateur Phalen: Je voudrais poser une question pour revenir sur ces 34 éléments, dont on parlait tout à l'heure. Si quelqu'un achète un billet d'une agence de voyage, cela signifie, même si vous avez suivi fidèlement cette liste de 34 éléments, que vous n'auriez pas tous les renseignements sur ce vol. Est-ce bien vrai?
M. Everson: Le transporteur n'aurait probablement pas ces renseignements. L'agent de voyage les aurait.
Le sénateur Phalen: Est-ce que la GRC ou le SCRS ou d'autres organisations du genre, obtiennent ces renseignements de l'agence de voyage?
M. Everson: Je le suppose. Le projet de loi précise que c'est quiconque exploite un système de réservation de services aériens.
Le sénateur Phalen: S'ils obtiennent ces renseignements, est-ce qu'ils vous les transmettraient pour que vous ayez tous les renseignements sur les passagers du vol?
M. Everson: Non, je ne le pense pas.
Le sénateur Phalen: Si un pays vous demande des renseignements, ils ne seraient pas exhaustifs, n'est-ce pas?
M. Everson: Si un autre pays nous les demandait, non, ils ne seraient pas complets. La distinction, ici, c'est que les gens qui font la vente ont un client et veulent garder ce client. Ils ne veulent donner le renseignement à personne d'autre, et les agents de voyage ne transmettent pas spontanément tous les renseignements à la compagnie aérienne, parce que celle-ci pourrait tout simplement communiquer directement avec le client la fois suivante.
Le sénateur Phalen: Toutefois, ils devraient les transmettre à la GRC?
M. Everson: C'est bien cela.
Le sénateur Phalen: La question, c'est est-ce que la GRC ou le SCRS vous transmettraient ces données pour que vous ayez tous les renseignements sur tous les passagers de votre liste?
M. Everson: Non, absolument pas. S'il fallait donner ces renseignements aux Américains, c'est au transporteur du Canada qu'il incomberait de recueillir les renseignements lui-même.
Le sénateur Phalen: Il pourrait manquer beaucoup de détails à ces renseignements.
M. Everson: Oui.
Le sénateur Andreychuk: Actuellement, lorsqu'on vit à un endroit comme Regina, en Saskatchewan, il y a très peu de vols, le climat, les activités, et cetera étant ce qu'ils sont au Canada. Si on manque un vol, souvent, on va chercher une autre solution. Le vol d'Air Canada a déjà décollé, alors on va s'adresser à WestJet, ou à une autre compagnie. Est-il question, avec le gouvernement, de ce qui arrive dans ces cas-là?
De façon générale, ce sont les voyageurs d'affaires à qui cela arrive. Ce sont eux qui voyagent. Ils ont une réunion, ils veulent partir plus tôt et sont prêts à prendre n'importe quelle ligne aérienne. Par conséquent, c'est un aspect compétitif du secteur, mais c'est aussi ce qui fait sa prospérité.
Après les événements du 11 septembre, bien des entreprises ont renoncé à tenir des réunions «en personne». Elles trouvent d'autres moyens, parce que les voyages sont plus difficiles, ce qui nuit à l'entreprise. De toute évidence, d'autres personnes ont maintenant peur de prendre l'avion.
Avez-vous discuté de tous ces gens qui vont au comptoir, paient leur billet et fournissent des renseignements à ce moment-là? Est-ce que ceci empêchera ce genre de possibilité de voyage, particulièrement pour les entreprises? Si vous devez en assumer les coûts, quelles répercussions, selon vous, est-ce que cela aura sur ce segment de vos activités?
Ce sont des ventes sur place. En quoi seront-elles touchées? Si vous devez recueillir tous ces renseignements, est-ce que ce genre de ventes ne sera plus possible? Je peux arriver 15 ou 20 minutes avant le décollage, d'autres fois 45 minutes. Combien de temps de plus faudra-t-il, et de quel ordre seront les pertes?
Mme Smith-Valade: Si je comprends bien, vous parlez des voyageurs qui se présentent à un comptoir d'Air Canada et pour qui nous n'avons pas de réservations, soit parce qu'ils ont décidé de partir à la dernière minute, ou qu'ils ont réservé auprès d'un autre transporteur?
Le sénateur Andreychuk: Ou pour n'importe quelle autre raison, qui fait qu'ils veulent acheter un billet au comptoir.
Mme Smith-Valade: Ou parce qu'ils ont peut-être envie de faire l'essai de notre tout nouveau vol Vancouver-Regina sans escale.
Le sénateur Andreychuk: En chemin vers Ottawa, pourquoi pas?
Mme Smith-Valade: Évidemment, vous avez raison. Il est tout à fait vrai que nos systèmes sont conçus pour optimiser les possibilités de revenu qu'offre le voyageur de dernière minute. Vous avez raison. Le temps, pour ces voyageurs, c'est de l'argent, et je demanderais à M. Racine de parler des conséquences de la collecte de ces renseignements au comptoir, parce que c'est justement en ce qui concerne ce genre de voyageurs que cela devient coûteux.
M. Racine: C'est une excellente question. La vérité, que ce soit pour un voyage d'affaires ou une transaction irrégulière, comme nous l'appelons — peut-être avez-vous déjà vécu cette expérience déplaisante —, c'est que lorsqu'un transporteur ne peut pas faire décoller un avion et transfère tous ses passagers à un autre transporteur, tout ce que nous avons, c'est un nom. Nous avons un mécanisme pour faire le règlement, ajuster les sommes, et cetera. Même si vous n'êtes pas voyageur d'affaires, votre billet est valable auprès de n'importe quel autre transporteur. Dans certains cas, si c'est le seul moyen d'amener les voyageurs à leur destination, un transporteur va transférer 30 ou 100 passagers à d'autres transporteurs pour les faire décoller le même jour plutôt que de les garder une nuit. Ça dépend de la situation.
Dans ces cas-là, les passagers n'arrivent qu'avec un nom, c'est vrai. Nous savons que ces passagers sont sur notre avion, et nous leur assignons un siège. Nous les amenons à leur destination, et c'est tout ce que nous savons. Cela nous suffit pour percevoir notre dû auprès ce celui a fait la vente. C'est tout ce que nous avons vraiment besoin de savoir, du point de vue commercial.
Si nous devions recueillir plus de renseignements, ce genre de système ne fonctionnerait plus. Si je peux revenir sur la collecte des renseignements du passeport, en Europe, vous vous rappelez que j'ai dit que nous ne pourrions pas le faire manuellement, parce que c'est trop long. Si Air Canada doit annuler un vol de Regina, pour une raison quelconque, qu'un autre avion est disponible et que nous y faisons embarquer 50 passagers, s'il fallait une minute par passager pour recueillir plus de renseignements — ce qui n'est pas un délai déraisonnable — cela prendrait 50 minutes que nous n'avons pas. Votre scénario de 15 minutes ne fonctionnerait pas. Il faut qu'il y ait un système automatisé de collecte des renseignements, au moyen duquel il suffirait de faire passer un document par une espèce de lecteur, sinon, cela ne fonctionnera pas. C'est un exemple d'une myriade de situations où le fonctionnement actuel des lignes aériennes dans le monde entier serait perturbé si nous devions recueillir beaucoup de renseignements à la dernière minute. Nos horaires ne nous le permettent pas, nous ne sommes pas équipés pour cela et nous n'avons pas les systèmes automatisés — de fait, dans certains cas, il n'y a pas d'automatisation, sous aucune forme. C'est une grande préoccupation, et c'est une excellente question.
La présidente: La discussion a été extrêmement intéressante, avec beaucoup de détails. Nous vous en remercions.
Vous êtes maintenant libres.
Sénateurs, notre prochaine réunion publique aura lieu mardi, le 30 mars, dans la pièce 505 de l'édifice Victoria, et nous allons entendre l'honorable Anne McLellan, l'honorable Tony Valeri et d'autres fonctionnaires.
Ceci termine la partie publique de cette réunion du comité. Nous allons reprendre la séance à huis clos dans cinq minutes, pour examiner le rapport préliminaire sur l'examen des médias. Je demanderais donc à tout le monde, sauf aux sénateurs et au personnel du comité, de quitter la pièce.
La séance se poursuit à huis clos.