Délibérations du comité sénatorial permanent des
Peuples autochtones
Fascicule 12 - Témoignages du 24 octobre 2005 (séance de l'après-midi)
PRINCE GEORGE, le lundi 24 octobre 2005
Le Comité sénatorial des peuples autochtones se réunit aujourd'hui à 13 h 3 pour étudier, afin d'en faire rapport, la participation des peuples et entreprises autochtones aux activités de développement économique au Canada.
Le sénateur Nick G. Sibbeston (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Bonjour, nous accueillons cet après-midi le chef Roland Willson, de la Première nation de West Moberly.
Soyez le bienvenu, chef Willson. Nous vous écoutons.
Le chef Roland Willson, Première nation de West Moberly : Je représente l'une des sept Premières nations situées sur le territoire établi en vertu du Traité 8, en Colombie-Britannique. Je sais que vous avez parlé de cela plus tôt. Le territoire du traité 8 est situé dans le nord-est de la Colombie-Britannique. Je sais que vous vous apprêtez à sortir des cartes.
Lisa L. Patterson, analyste, Bibliothèque du Parlement : Il y a également une carte sur le mur, derrière vous. Elle n'est pas placée à un endroit très commode, mais si vous pouviez nous indiquer où vous vous trouvez sur cette carte, cela pourrait nous aider un peu.
M. Willson : Notre territoire occupe le tiers de la province. La province a modifié unilatéralement le périmètre de notre territoire, et nous tenons actuellement des discussions à cet égard.
Le territoire établi en vertu du Traité 8, pour votre information, couvre environ le tiers du Canada. Il couvre l'Alberta, la province de la Colombie-Britannique, l'Alberta, la Saskatchewan, le nord du Manitoba et une petite partie des Territoires du Nord-Ouest.
Ma région est responsable d'une part énorme des revenus générés en Colombie-Britannique à l'heure actuelle.
À l'heure actuelle, le nord-est de la Colombie-Britannique est un point chaud pour l'exploitation pétrolière et gazière. Les deux mines de charbon qui viennent tout juste d'ouvrir leurs portes sur le territoire de West Moberly sont, je crois, les deux premières en quinze ans dans la province. La mine de charbon de Pine Valley a été la première à ouvrir ses portes, et celle de Western Canadian Coal est venue ensuite. Elles sont toutes deux situées dans la région de Tumbler Ridge. L'exploitation minière a déclenché la relance de Tumbler Ridge — à vrai dire, de l'ensemble de la Colombie-Britannique. Nous avons actuellement 30 nouvelles demandes de concessions de charbon dans notre région, tout autour du territoire de la Première nation de West Moberly. C'est un territoire partagé où convergent des intérêts multiples. Notre territoire traditionnel est décrit dans le traité 8. Il y a des zones d'intérêt où nous pratiquons nos modes de vie traditionnels, et où nous perpétuons nos modes de vie traditionnels. Nous sommes très actifs sur le terrain : la chasse, la pêche, le piégeage.
Nous pourrions bien débattre des intentions réelles et de l'esprit du traité. Nous croyons qu'il s'agissait surtout d'économie. Un de nos droits concernait le piégeage. À l'époque de la signature du traité, le piégeage était l'une des principales industries au Canada. Toute notre région a été aménagée en fonction de cette activité.
Ensuite, la Compagnie de la Baie d'Hudson est arrivée. De nos jours, peu de gens assurent leur subsistance grâce au piégeage; on s'y adonne plutôt pour maintenir un mode de vie. C'est une tradition. Nous nous adonnions au piégeage avant l'arrivée de la Compagnie de la Baie d'Hudson, en vue de procurer des pelleteries et de la nourriture à notre peuple, et d'assurer sa subsistance. Nous continuons de faire cela, non pas tant pour faire de l'argent que pour assurer la survie d'un mode de vie.
C'est une promesse de traité qui se révèle plutôt vide maintenant. Le piégeage avait été prévu à titre de moteur économique dans le traité; toutefois, les principales activités économiques en Amérique du Nord n'ont plus grand- chose à voir avec le piégeage. On s'intéresse à l'exploitation des ressources.
Vous trouvez peut-être que je saute du coq à l'âne. Je m'en excuse.
Nous nous intéressons principalement à créer et à maintenir notre mode de vie. Nous avons un énoncé de mission, que vous trouverez dans notre mémoire, et nous le respectons. L'énoncé de mission a été formulé par notre communauté. Grâce à un certain nombre de réunions, il y a quelques années, nous sommes partis du modèle de gouvernance d'AINC fourni dans la Loi sur les Indiens. Nous avons créé notre propre régime de gouvernance. D'ailleurs, Affaires indiennes et du Nord Canada utilise actuellement notre modèle de gouvernance à titre d'exemple de pratiques exemplaires. Nous avons établi un niveau élevé de responsabilisation et de transparence. Nous sommes responsables de notre nation, et nous sommes comptables à ses membres.
Laissez-moi vous parler un peu de qui nous sommes. Notre Première nation est la plus petite parmi les signataires du traité 8. Ce sont de vieux chiffres, et je m'en excuse. Nous affichons maintenant une imposante liste de 190 membres, et nous connaissons une croissance rapide. Histoire de vous donner quelques détails démographiques, il y a environ 89 personnes sur la réserve, 37 hommes et 28 femmes.
À l'heure actuelle, le taux de chômage est d'environ 1 à 2 p. 100. Ce taux enviable est principalement imputable à la tenue de négociations avec l'industrie, car nous essayons de tirer avantage d'occasions que pourraient nous offrir les exploitants des ressources qui viennent sur le territoire; nous nous assoyons avec eux et nous négocions avec eux au moyen de méthodes responsables et convenables.
Nous pouvons attribuer presque tout le succès de West Moberly à notre modèle de gouvernance. Nous avons un excellent modèle de gouvernance. Je crois personnellement que les nations qui ne sont pas prospères ont une structure de gouvernance lacunaire. Il n'y a pas de durabilité. Il n'y a pas de certitude.
La communauté doit être certaine de la façon dont ses activités seront menées, quel que soit le chef ou le dirigeant. La communauté doit savoir que ses intérêts futurs seront bien représentés.
J'obtiens une orientation de mes membres, par l'entremise des mandats qu'on me confie. Mon poste est le seul poste élu au sein de mon conseil, dans ma communauté. Nous sommes un organisme axé sur la famille. Nous avons quatre grandes familles. Elles élisent ou nomment le conseiller, et ensuite, l'ensemble des membres décident qui sera le chef. Dans le cadre de ce processus, ils établissent le mandat, ils établissent les structures redditionnelles. Nous assurons une transparence totale. Nous laissons nos membres et tous nos partenaires consulter nos livres, car cela permet d'établir une relation de confiance.
Je ne sais pas ce que je peux ajouter.
Au lieu d'avoir la main tendue, nous croyons qu'il serait préférable d'avoir un coup de main. La politique de la main tendue ne fonctionne pas. Le ministère des Affaires indiennes et la Loi sur les Indiens ont été créés à cette fin.
Pour ma part — et je parle également, je crois, au nom de ma communauté — je crois que, à titre de pupilles de l'État, nous sommes perçus comme des bénéficiaires de l'aide sociale. L'ensemble du système, l'ensemble de la structure est conçu de cette façon. On nous a rassemblé et placé dans des réserves, mis de côté, et on nous a dit qu'on prendrait soin de nous. Pour une raison ou pour une autre, nos membres, notre peuple, nos aînés ont cru cela. Ils se sont contentés de regarder les choses arriver. L'exploitation à grande échelle de nos territoires n'a procuré aucun débouché aux Premières nations.
Nous choisissons, grâce à notre structure de gouvernance, de devenir actifs, de nous asseoir avec les gens sur notre territoire et de négocier avec eux. Nous avons cessé de nous en remettre aux bons soins d'Affaires indiennes. Nous avons déterminé que, pour tenir les rênes de notre destinée, nous devons prendre cette décision, et nous devons nous déniaiser et nous activer, afin de tirer avantage de ces occasions qui se présentent.
Ainsi, nous avons noué des relations avec des sociétés d'exploitation du charbon, du pétrole et du gaz, et des sociétés d'exploitation forestière. West Moberly a des permis de coentreprise, avec Canfor, pour 250 000 mètres cubes de volume. Nous avons conclu des ententes avec Tembec, Canfor, LP. La plus grande usine de fabrication de panneaux à copeaux orientés au monde est située à Fort St. John.
Nous participons à des initiatives visant à fournir à la scierie des services liés au bois. Quarante pour cent du revenu est immobilisé. Cinquante pour cent des revenus de la province à l'heure actuelle — ce qui permet à la Colombie- Britannique d'améliorer les routes et l'infrastructure, et de donner de l'argent à ces pays qui sont aux prises avec des difficultés, et je suis d'accord pour qu'elle fasse cela — ont été générés dans notre cour, dans la cour non seulement de West Moberly, mais aussi de l'ensemble du territoire du traité 8, et avec une participation relativement modeste de la part des Premières nations locales.
Nous avons conclu un PE avec le ministère de l'énergie et des mines au sujet des consultations. Cette entente, unique en son genre, prévoit que la responsabilité fiduciaire revient à la Couronne, et qu'elle est tenue de consulter les Premières nations. Le ministère de l'Énergie et des Mines est le seul ministère à avoir conclu une telle entente, principalement à l'initiative de l'industrie.
J'étais assis à l'arrière quand le chef Justa Monk a pris la parole. On lui a posé la question : « Êtes-vous en contact avec les gens d'EnCana? »
J'ai présenté un exposé à l'ACPP, l'Association canadienne des producteurs pétroliers.
Il n'est pas difficile de comprendre qui contrôle le gouvernement. Le gouvernement obtient son argent grâce à l'exploitation des ressources, et grâce au revenu généré par cette activité, par les impôts perçus à l'égard de ces terres. Si l'industrie n'est pas contente, alors le gouvernement n'est pas content, car cela a une incidence sur les rentrées de fonds.
Nous sommes très conscients de cela. Nous essayons d'axer nos relations d'affaires sur le respect, l'honneur et l'intégrité, mais si les choses se corsent, nous n'hésitons pas à jouer du coude. Nous choisissons de ne pas le faire. Nous préférons négocier et nouer des relations de travail avec les gens. Bien souvent, par contre, lorsqu'on se présente à cette réunion, c'est perçu comme un signe de faiblesse, et les gens ont tendance à essayer de profiter de la situation.
Nous nous sommes assis avec des entreprises, et nous avons tenu des discussions fructueuses au sujet de l'établissement de relations, et nous sommes intéressés à participer au développement et à le soutenir. Nous ne nous opposons pas au développement. Le développement doit être durable.
Il y a également eu des discussions au sujet de l'exploitation minière, c'est-à-dire l'exploitation de ressources non renouvelables. C'est exact, les ressources minérales ne sont pas renouvelables, mais l'activité minière est également l'un des principaux moteurs de l'économie de la Colombie-Britannique à l'heure actuelle, et ce moteur est dans notre cour.
Qu'on le veuille ou non, ce développement va avoir lieu. La petite communauté de West Moberly ne s'est jamais opposée aux activités de la province et à son besoin de générer des revenus, de se tailler, sur le marché mondial, une place de choix, afin de pouvoir faire concurrence aux États-Unis, à la Chine et au Japon, en ce qui concerne l'exploitation des ressources, et notre communauté ne va probablement jamais lui mettre des bâtons dans les roues.
Cependant, ce développement ne devrait pas se faire aux dépens des autres. Quand Bull Moose et Quintet ont ouvert leurs portes, aucun membre de ma communauté n'est allé travailler là-bas. Nous n'avons pas touché un sou de l'exploitation de ces ressources. Je suppose que les retombées prennent la forme de paiements d'aide sociale dans notre communauté.
Le chef Justa Monk a expliqué que le développement a lieu, et qu'il n'y a aucune retombée — sauf lorsque nous recevons nos chèques d'aide sociale. Je n'ai pas d'autre choix que d'être d'accord avec lui. Quand nous avons commencé à réagir, notre situation était peu enviable. Le taux de chômage était élevé. Notre communauté affichait un taux d'alcoolisme élevé. Nous avions un problème avec la toxicomanie. Ces problèmes existent encore, mais grâce à nos travaux, nous avons créé des programmes en vue de sensibiliser les gens à ces choses.
Le président : Chef Willson, à la page 6, vous résumez très bien les choses qui ont bien marché pour vous. C'est exactement le genre d'information que notre comité veut obtenir.
Je vous demanderais de nous fournir brièvement des précisions à l'égard de certains aspects mentionnés dans votre mémoire, car je crois que c'est très pertinent.
M. Willson : Pour ce qui est des aspects qui ont inhibé la Première nation de West Moberly, j'en ai déjà décrit une partie. Il y a les problèmes sociaux liés aux familles, à la drogue et à l'alcoolisme, et c'est propre à toutes les communautés, pas seulement les communautés des Premières nations. Je me baladais avec ma fille dans les environs, en auto, hier soir, et devant le 7-Eleven, il y avait des gens non autochtones en état d'ébriété. Ma fille m'a demandé : « Pourquoi sont-ils là? » Nous en avons parlé un peu.
C'est pertinent, ça existe. C'est un problème. Nous sommes conscients du problème. Nous essayons de mettre des choses en place pour régler ces problèmes. Nous tentons de sensibiliser la population à d'autres options. Nous avons créé des occasions positives dont les gens peuvent tirer avantage.
Affaires indiennes et du Nord Canada est un autre facteur qui inhibe West Moberly. Le ministère n'a, à mes yeux, aucune utilité. Il ne nous apporte qu'une énorme bureaucratie. Nous nous plions aux exigences d'Affaires indiennes et du Nord, mais nous ne comptons pas sur lui. C'est très frustrant de devoir communiquer avec le ministère lorsqu'on veut que quelque chose soit fait. Il n'est pas là pour nous aider. Il est là pour limiter son accès aux risques. Il est très frustrant d'avoir affaire aux gens d'Affaires indiennes et du Nord. Ils changent leurs politiques, et nous mettent sur des listes d'attente. Ils ne nous informent pas des changements apportés aux politiques, et lorsque nous y contrevenons, ils gèlent tous nos projets, et ils nous font des remontrances parce que nous ne respectons pas les règles qu'ils ont établies, ces règles qu'ils ont changées sans nous en informer.
Un autre aspect qui nous inhibe concerne les divers bailleurs de fonds — source intarissable de tracas. Il y a une foule d'occasions qui s'offrent : Par exemple, on peut présenter une demande de financement par l'entremise d'Entreprise autochtone Canada et d'Affaires indiennes et du Nord. Mais nous ne nous faisons pas d'illusions. Nous présentons nos demandes, mais nous trouvons d'autres façons d'aller de l'avant avec nos projets. Aucune de nos réalisations ne découle d'une aide fournie par ces organismes. Nous avons tout fait par nos propres moyens, et c'est mieux comme ça, car nous avons appris par nos erreurs, c'est en faisant face à l'adversité et en nous relevant que nous avons appris à ne compter sur personne d'autres que nous-mêmes.
Nous sommes toujours à couteaux tirés avec la province de la Colombie-Britannique. Nous avons signé un traité avec le gouvernement fédéral. Le gouvernement fédéral a signé le traité avec les Premières nations, et cédé l'ensemble du territoire à la province. Nous allons à des réunions. Nous assistons aux négociations, et nous écoutons le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial se renvoyer la balle en ce qui concerne la responsabilité à l'égard des Indiens. Ils ne veulent pas être responsables, alors ils limitent leur accès. Les tribunaux se prononcent, et créent un précédent à l'égard de la façon dont on est censé faire affaire avec les Premières nations.
Lorsque nous regardons une décision, nous disons : « Voici ce que dit le tribunal. » Les gouvernements provincial et fédéral disent : « Voici ce que le tribunal ne dit pas. Par conséquent, nos interventions auprès de vous seront fondées sur ce que la décision ne dit pas. Elle dit que nous devons faire ceci, mais nous ne sommes pas tenus de faire cela, et nous pouvons, ainsi, limiter nos responsabilités à votre égard, notre exposition aux risques, en limitant cela et en nous attachant à cet autre aspect. »
Les tribunaux ont déterminé que le recours aux tribunaux n'est pas une bonne façon de traiter avec les Premières nations; les gouvernements devraient plutôt s'asseoir avec elles et négocier. À maintes reprises, les Premières nations ont dû poursuivre la province, et poursuivre le gouvernement fédéral, faire la même chose, encore et encore. Je ne crois pas que cette façon de faire corresponde aux intérêts de quiconque. Cela ne fait qu'engraisser les avocats et brouiller les relations entre les Premières nations et le gouvernement.
Le manque d'argent est un facteur qui inhibe la Première nation de West Moberly. Des occasions se présentent à nous très rapidement. Le monde des affaires agit rapidement. Dans ce domaine, comme à New York, il peut se passer bien des choses en une minute. Nous devons être en mesure de garder notre sang-froid et de saisir les occasions qui se présentent. Notre nation est la plus petite des nations signataires du Traité 8, et notre financement est fonction d'un taux par habitant, alors nous ne recevons pas grand-chose.
Justa Monk a dit qu'il reçoit 98 000 $ par année pour le développement économique. Je serais ravi d'avoir cela. Nous touchons 10 p. 100 de cette somme. Nous recevons 150 000 $ par année pour le développement social, et, chaque année, nous leur renvoyons cette somme parce que nous ne sommes pas autorisés à utiliser cet argent. Nous touchons environ 10 000 $ par année pour le développement économique. Or, il faut environ 40 000 $ pour établir un plan stratégique. En ce qui concerne la planification stratégique du développement économique, il faut environ cinq ans pour établir le plan et l'exécuter, et il y a des limites à ce qu'on peut faire avec 10 000 $. Pour promouvoir le développement économique, il faut embaucher un agent du développement économique, et aucune des personnes ici présentes ne serait disposée à accepter un salaire annuel de 10 000 $ ou 50 000 $ pour cinq ans. Nous devons financer ce poste, et ce sont des sommes qui doivent être générées à l'extérieur de ce que nous touchons d'Affaires indiennes et du Nord.
Je vous parlerai maintenant de ce qui a bien fonctionné pour West Moberly. J'ai déjà parlé de notre solide structure de gouvernance. Il faut être doté d'une structure de gouvernance solide. Tout repose sur la gouvernance. Si vous n'êtes pas doté d'une structure de gouvernance, vos dirigeants ont la possibilité de dévier. Je suis comptable de mes actes. Si je ne fais pas bien mon travail, je n'ai plus d'emploi. Je ne peux pas cacher de l'argent, je ne peux pas gaspiller l'argent. Notre structure de gouvernance n'est pas parfaite — de fait, nous nous affairons actuellement à l'examiner et à formuler des recommandations en vue de la modifier —, mais c'est la meilleure chose que nous ayons. Elle est supérieure à celle d'Affaires indiennes et du Nord, ou à toute autre chose dans la Loi sur les Indiens.
Il importe d'avoir une équipe déterminée. Toutes les personnes qui travaillent avec nous sont déterminées à travailler avec nous. Nous nous concentrons sur les affaires. Nous essayons de ne pas mêler la politique à nos activités d'affaires. La politique, c'est le meilleur moyen de ruiner quelque chose. Il y a un processus que nous devons mener à terme, et lorsque ce processus de consultation est terminé, et que l'on considère que le projet nous convient, nous le confions aux gens qui sont responsables de notre développement économique, et nous les laissons prendre les commandes. Nous établissons les règles fondamentales qui régissent leurs activités, et tant qu'ils respectent ces règles, nous laissons les affaires rouler.
La transparence au chapitre de l'information financière — j'ai déjà mentionné cet aspect — et la responsabilisation sont d'autres facteurs qui ont bien fonctionné pour nous. Nous tenons des assemblées générales de bande. Nous invitons le vérificateur financier, et nous permettons aux membres de lui poser des questions. Nous devons être comptables pour toutes les organisations avec lesquelles nous sommes liés. Nous avons un certain nombre de sociétés qui ont été établies.
Quel conseil la Première nation de West Moberly prodiguerait-elle à d'autres communautés voulant s'adonner à des activités de développement économique? Je réponds à cette question de façon générale : dites ce que vous pensez, pensez ce que vous dites, ne faites pas de manigances. N'essayez pas de faire semblant d'être mon ami en vue de me soutirer quelque chose. Je ne vous ferai pas cela, ne me le faites pas. Traitez-moi avec respect. Respectez ma communauté et faites preuve d'intégrité, et ma nation vous rendra la pareille. Je suis aussi capable de piquer une colère que quiconque, mais je ne veux pas piquer une colère. Je préfère axer mes énergies vers des initiatives positives et fructueuses. Tout le monde croit que la façon de faire des Premières nations consiste à frapper du poing sur la table. Je ne crois pas que ce soit le cas. Je crois qu'il y a une meilleure façon de faire. Si je dois frapper sur la table pour attirer l'attention de quelqu'un, je le ferai. Si je dois lancer une chaise, je suis tout à fait capable de le faire, mais je ne tiens pas à le faire. Essentiellement, veillez à ce que l'ordre règne dans vos activités. Vous devez être en mesure de savoir où vous en êtes en tout temps, à connaître votre position. Votre communauté doit savoir ce qui se passe. Les voies de communications doivent être ouvertes, et ces voies de communications doivent être connues.
Le président : Vous avez fourni des renseignements détaillés sur votre façon de fonctionner et l'approche que vous privilégiez. Vous nous avez fourni beaucoup d'information sur votre façon de mener vos activités.
Le sénateur Christensen : Je suis intéressée par le très petit nombre de membres de votre bande, et par le très faible taux de chômage.
Vous avez dit que les conseillers sont nommés par les quatre familles. Est-ce que votre élection est liée à celle de ces quatre conseillers, ou êtes-vous élu séparément?
M. Willson : Je suis élu non pas par les quatre conseillers, mais bien par les membres.
Le sénateur Christensen : Alors, il y a une élection pour le chef et une autre pour les quatre conseillers?
M. Willson : Oui, deux élections distinctes.
Le sénateur Christensen : Comment la communauté a-t-elle fait pour jouer un rôle aussi important? Cela m'a l'air de bien fonctionner. D'ailleurs, nous avons tellement entendu de choses aujourd'hui, et à d'autres endroits, concernant le fait que l'éducation est un problème clé, et qu'il est difficile de mobiliser la communauté et les jeunes.
Comment avez-vous surmonté cet obstacle? Est-ce que vos jeunes ont des modèles positifs à suivre?
M. Willson : Je ne sais pas si je dirais que nous avons surmonté ces obstacles. Quand nous nous sommes préparés pour la séance d'aujourd'hui, nous nous sommes attachés aux questions qui nous avaient été posées en vue de notre témoignage. Nous avons notre part de problèmes : notre taux de décrochage est élevé. Toutefois, la structure industrielle étant ce qu'elle est, un jeune de 17 ans peut prendre une scie ronde et toucher 60 000 $ à 70 000 $ par année à travailler dans le champ de pétrole. Nous passons beaucoup de temps sur cette question. Nous leur disons que cela ne va pas durer toujours, et que lorsqu'ils arrêteront d'utiliser la scie ronde, et que leur corps sera fatigué, qu'est-ce qu'ils vont faire? Nous sommes constamment confrontés à ces défis. C'est un défi continuel. Nous avons connu une évolution considérable. Nous sommes au point où nous en sommes en raison d'événements survenus dans le passé, et notre communauté a décidé que les choses ne se passeraient plus jamais de cette façon.
Notre structure de gouvernance est née d'un manque de responsabilisation. Les fonds étaient mal gérés. De prime abord, nous avions l'air d'une Première nation typique. Nous avions une dette de 300 000 $. Nous devions beaucoup d'argent à Santé Canada. Nous étions à deux doigts de la gestion par un tiers. Nos dirigeants n'étaient pas aussi honorables qu'ils auraient dû l'être. Nous étions soumis à des pressions externes. Affaires indiennes et du Nord n'assumait pas ses responsabilités. Certaines procédures comptables qui devaient être appliqués n'étaient pas respectées. Notre communauté a fini par convenir qu'elle ne pouvait plus confier sa destinée à d'autres personnes, alors nous avons dû prendre les choses en main.
Le sénateur Christensen : Combien de temps vous a-t-il fallu pour rétablir la situation?
M. Willson : Ce n'est pas terminé. C'est un processus continu. Je ne crois pas que nous puissions jamais arriver à bout.
Le sénateur Christensen : Vous avez dit que vous disposez d'autres façons de réunir des fonds, et que vous touchez annuellement 10 000 $ du ministère. Quels autres moyens avez-vous envisagés? Qu'en est-il des obligations et de choses comme ça? Est-ce une question qui a été soulevée?
M. Willson : Nous sommes partis avec bien peu de choses. Nous avons bâti ce que nous avons actuellement grâce au travail et à la bonne foi de notre communauté. Nous avons toujours mené nos activités d'une certaine façon. Les gens aiment venir nous parler, alors nous avons misé sur cela afin d'accéder à autre chose.
Nous concluons des ententes, les gens nous promettent des choses, et, une fois l'entente signée, ils partent, et on ne les revoit plus. Nous allons les chercher, et nous leur disons : « Vous aviez dit que vous alliez faire telle ou telle chose. » Nous les tenons responsables.
C'est un processus continu. Lorsque des occasions se présentent, nous négocions; nous établissons des sociétés afin de créer des sources de revenu. Par analogie, je dirais que nous essayons de fabriquer une table qui a plus de quatre pattes. Si vous avez une table à quatre pattes et que vous en coupez une, la table devient très instable. Nous tentons de créer des sources de revenu pour la bande, afin que nous puissions payer les études de nos enfants. Le budget d'éducation que nous a consenti Affaires et Indiennes du Nord s'élevait à 60 000 $ il y a un certain nombre d'années. Avec une telle somme, on ne peut envoyer que quelques jeunes dans un établissement d'études postsecondaires. On ne va pas très loin avec ça.
Nous avons fait passer ce budget à 250 000 $. Nous disons aux enfants qu'ils doivent élaborer un plan de carrière s'ils veulent aller à l'école. Nous leur disons que nous ne sommes pas intéressés à soutenir des « étudiants professionnels ». S'ils dévient du chemin qu'ils s'étaient tracé, nous leur disons : « Écoutez, vous aviez dit que vous alliez faire telle ou telle chose, et vous ne le faites pas. Que faites-vous? Vous n'allez pas juste dépenser pour dépenser. » Nous leur disons qu'il y a des gens qui veulent aller aux études et qu'ils ne demanderaient pas mieux que d'être responsables de ce qu'ils font, et que nous allons cesser de les soutenir, afin de soutenir ceux qui sont prêts à faire ce qu'ils ont à faire. Nous leur disons qu'ils doivent nous rendre des comptes, tout comme nous devons leur rendre des comptes.
Le sénateur Christensen : Où avez-vous obtenu votre financement pour la coentreprise?
M. Willson : Grâce à des négociations. Nous avons un permis de coentreprise. Nous créons des sources de revenu de cette façon. Nous avons conclu des ententes avec des sociétés, comme EnCana et Burlington. Lorsqu'elles arrivent, nous tentons de négocier des ententes sur les répercussions et les avantages. Elles vont exploiter les ressources qui sont sur notre territoire, alors nous devrions en tirer un quelconque avantage.
Nous demandons de l'argent pour nos programmes culturels, pour nos programmes d'éducation, et cetera. Nous offrons un libre accès à nos livres, de sorte que nous pouvons rendre compte de toute somme qui nous est versée. Nous pouvons montrer aux gens où va l'argent. Nous avons des comités de gestion mixtes, des comités des comptes, où tout le monde est assis à la table, et nous proposons d'envoyer deux étudiants à l'école de foresterie. Si le comité accepte, il nous donne l'argent, on va de l'avant. Tout cela se fait à l'amiable.
S'ils veulent avoir accès au territoire, ils devront venir nous parler.
Le sénateur Christensen : C'est ce dont parlait le sénateur Campbell.
Le sénateur Zimmer : Chef Willson, j'ai trouvé votre exposé très précis, juste, honnête et progressif. Un des aspects que vous avez abordés a attiré mon attention : on parle toujours de ressources renouvelables et de ressources non renouvelables. Bien sûr, les ressources non renouvelables sont les ressources minérales, pétrolières et gazières, et les pâtes et papiers. Ce qui a attiré mon attention, c'est le projet d'éoliennes. À quel point est-ce réaliste? De nombreux organismes veulent se lancer là dedans, mais ils oublient une chose : il n'y a pas de vent là où ils sont. Est-ce que cela pourrait être une source de revenu pour vous, est-ce que l'énergie éolienne pourrait se révéler très rentable? Est-ce une idée plutôt réaliste, ou s'agit-il plutôt d'un projet pilote?
M. Willson : J'aurais bien aimé vous présenter un exposé sur PowerPoint, car j'aurais des images très intéressantes à vous présenter. Notre région, comme je tentais de l'expliquer, est riche en ressources pétrolières et gazières, en charbon, en méthane de gisements houillers, et en ressources forestières. Quand la province de la Colombie-Britannique a mis fin à l'exploitation forestière, le nord-est de la province a tout simplement continué de rouler. La région a tout simplement continué de travailler.
L'énergie éolienne, c'est du nouveau. La Colombie-Britannique est la seule province qui n'exploite pas l'énergie éolienne. Le nord-est de la Colombie-Britannique affiche le taux d'énergie éolienne le plus élevé au Canada, et on n'y trouve pas une seule éolienne. C'est pourtant à cet endroit que le vent est le plus constant.
Et ce n'est pas tout : l'ensemble de la région compte parmi les points chauds au chapitre de l'énergie géothermique. Nous affichons également la plus grande quantité de lumière du soleil. Je ne comprends pas cela, car il ne fait pas toujours très chaud là-bas, mais, en moyenne, c'est là qu'il y a le plus de lumière du soleil. Les occasions là-bas sont énormes.
L'énergie éolienne, ça coûte cher. Nous devons négocier avec B.C. Hydro à cet égard. Je ne crois pas que cela représenterait un revenu important pour West Moberly, outre le travail contractuel qui en découlerait. Nous envisageons des options de partenariat avec les projets de centrales éoliennes. L'un des projets qu'on propose de mettre en œuvre chez nous vaut 500 millions de dollars. C'est beaucoup d'argent, et c'est un projet d'envergure. Nous aimons bien cette notion d'énergie renouvelable. Nous allons manquer de gaz. Dès 2080, le gaz naturel auquel nous avons facilement accès aujourd'hui ne sera plus là. Ils devront trouver d'autres moyens.
À mon avis, nous devons nous tourner vers les sources d'énergie renouvelables.
Le sénateur Zimmer : Je vous félicite de vous aventurer dans cette voie, car c'est la voie de l'avenir, et ce sont les choses que nous devons envisager, non seulement pour générer des revenus, mais aussi pour respecter l'environnement et faire des choses qui sont d'avenir. Je salue vos efforts à l'égard de ce projet.
Le sénateur Lovelace Nicholas : Chef Willson, j'ai une question à vous poser au sujet de l'éducation. Lorsqu'un membre de votre communauté obtient son diplôme, est-ce que cette personne travaille au sein de la communauté, ou à l'extérieur?
M. Willson : Dans le cadre des ententes que nous concluons, l'un des principaux aspects de nos négociations concerne les possibilités d'emploi.
À l'heure actuelle, quiconque veut travailler peut travailler. Bien souvent, les gens ne veulent pas faire ce que nous avons à leur offrir, alors il y a des limites à ce que nous pouvons faire. Les gens doivent prendre leur vie en main. Nous avons des occasions. Notre nation est le premier fournisseur d'emplois en importance de notre communauté, mais des occasions s'offrent. Nous avons négocié des occasions pour les gens de la communauté. Il suffit qu'une personne décide ce qu'elle veut faire. Nous recommandons fortement aux gens de s'établir un plan de carrière et de se concentrer sur quelque chose.
Nous nous penchons sur une foule d'enjeux.
Le sénateur Lovelace Nicholas : Lorsqu'ils décrochent leur diplôme, où veulent-ils travailler? Ce que j'aimerais savoir, finalement, c'est s'ils veulent travailler au sein de la communauté ou à l'extérieur de la communauté?
M. Willson : Notre communauté est chanceuse, car nous sommes dans le feu de l'action. Nous ne sommes pas isolés comme certaines autres communautés. Néanmoins, les communautés des Premières nations sont tricotées très serrées. Elles sont axées sur la famille, le soutien familial est crucial.
De l'autre côté du couloir, ici, il y a un centre de services aux Premières nations. L'un de mes membres est actuellement aux études ici, et il peut se rendre à ce centre et obtenir du soutien.
Certains de nos membres ne veulent pas quitter la communauté; ils veulent travailler au sein de la communauté. Toutefois, en raison de notre emplacement, nous n'avons pas de débouchés sur la réserve, alors les gens doivent travailler à l'extérieur.
En ce qui concerne les efforts en vue de protéger notre mode de vie, nous devons établir l'équilibre pour ce qui est d'autoriser le développement dans certaines zones, sachant que cela minera notre capacité de chasser.
Nous n'avons pas le droit de manger le poisson du réservoir Williston. Nous venons tout juste d'exécuter un projet relatif à la contamination au plutonium. Les orignaux dans l'une des zones avoisinantes sont contaminés. Nous savons que les orignaux mangent des plantes contaminées. Le poisson de notre lac est disparu. Il n'y a plus de touladi. Il faut repeupler le lac.
Nous tentons de protéger cela, mais, en même temps, nos familles doivent manger. Nous devons comprendre que l'économie de la Colombie-Britannique et du Canada ainsi que celle d'autres pays dépendent des ressources qui viennent de notre région, et nous devons trouver un équilibre. Si les gens veulent travailler, nous devons leur dire qu'ils doivent quitter la communauté, qu'ils ne peuvent rester parce qu'il n'y a pas de travail.
Ainsi, il faut toujours chercher à établir l'équilibre. Certains veulent rester, d'autres veulent partir. C'est comme l'oiseau dans le nid : à un moment donné, il faut le pousser et le faire voler de ses propres ailes. On espère qu'il ne va pas tomber, mais, s'il tombe, on l'aide à se relever et à repartir.
Le président : Je vous remercie, chef Willson, d'avoir pris le temps de nous fournir de l'information. Nous vous souhaitons bonne chance.
M. Willson : Merci beaucoup. J'espère que mon témoignage s'est révélé utile.
Le président : Nous n'avons malheureusement que 30 minutes par témoin, mais cela nous donne un aperçu des gens de diverses régions ou de la province, et nous aide à mieux comprendre. Même si nous avons peu de temps, je n'ai aucun doute quant au fait qu'il sera avantageux d'entendre tous les témoins que nous accueillons aujourd'hui.
Je cède maintenant la parole à Thomas Smith, conseiller et agent de développement économique de la Première nation Tlowitsis. Allez-y, monsieur Smith.
Thomas Smith, conseiller, agent de développement économique, Première nation de Tlowitsis : Je suis ici à titre de représentant de la Première nation de Tlowitsis. Le territoire traditionnel de ma tribu correspond essentiellement à l'embouchure du bras de mer Knight et à la partie nord-est de l'île de Vancouver. Il peut vous sembler étrange que je me sois déplacé jusqu'ici pour comparaître devant votre comité, mais la séance de Vancouver était déjà complète.
Mon peuple croyait que ce serait une bonne idée pour moi de témoigner devant le comité, car nous avons éprouvé quelques difficultés au chapitre du développement économique. Ainsi, quand le communiqué de presse a été diffusé, nous nous sommes sentis concernés.
Ma Première nation est une petite tribu constituée de 350 personnes. Ils sont essentiellement privés de leur communauté. Il n'y a pas de lieu communautaire. Ils sont partout, à Vancouver, Port Hardy, Campbell River. En d'autres mots, nous n'avons pas une communauté bien établie, de sorte qu'il est très difficile de faire des choses.
Nos foyers originaux ont été fermés vers la fin des années 60, mais le site lui-même était tout de même trop petit pour permettre une quelconque croissance. Il n'y avait ni école, quoi que ce soit là-bas. Nos gens ont dû s'établir à divers endroits afin que leurs enfants puissent aller à l'école.
Notre Première nation a pris part à une foule d'initiatives économiques. Je suis membre du conseil depuis plus de 20 ans, et nous avons consacré beaucoup de temps et d'argent à embaucher des professionnels et à essayer de concevoir des programmes en vue de procurer des retombées économiques pour les membres de notre communauté.
Lorsqu'il s'agit de financer des propositions, il n'y a généralement pas assez d'argent. Il n'y a pas assez d'argent pour financer quelque projet que ce soit, de quelque taille que ce soit, qui pourrait créer des emplois et générer des revenus pour notre Première nation.
Pour nous, travailler avec Affaires indiennes est un cauchemar. Ces gens semblent vivre dans leur propre monde, dans leur tour d'ivoire à Vancouver. L'obtention de fonds auprès du ministère s'est révélée vraiment difficile pour nous. Nous ne savons pas si c'est parce que nous sommes une Première nation de petite taille, ou si le processus rend difficile l'obtention de financement pour l'élaboration de programmes ou de projets.
Nous avons toujours eu à composer avec des retards constants au chapitre de la prise de décisions par des agents gouvernementaux, ce qui finit par occasionner des coûts supplémentaires. Nous n'arrivons pas à faire en sorte que les gens répondent à nos appels, et la situation s'est aggravée au cours des quatre ou cinq dernières années. Nous nous butons toujours aux boîtes vocales. Ils ne répondent pas à nos lettres. Le directeur général régional n'a pas le temps de nous rencontrer pour parler d'enjeux importants.
Quelqu'un a mentionné Entreprise autochtone Canada. Certains des autres organismes de financement, qui sont supposément fondés sur le développement économique des Premières nations, nous occasionnent tout autant de problèmes lorsque vient le temps d'obtenir du financement pour nos programmes ou pour la conception de projets économiques.
Nous travaillons sur un projet de centre de villégiature dans l'une de nos réserves, sur l'île de Vancouver. Nous avons présenté un projet d'entreprise au ministère, dans le cadre de son programme relatif aux grandes entreprises. Le projet aurait dû mettre six semaines avant de se rendre au comité d'examen, mais il a fallu six mois. De plus, nous avons dû dépenser des sommes excessives d'argent en vue de répondre à des questions.
J'ai un document avec moi. Cette petite section, c'est un projet d'entreprise. Le reste concerne nos rapports avec le ministère au sujet de diverses questions, avec des personnes qui nous ont dit que nous ne savons pas ce que nous faisons, ou des choses comme cela.
En ce qui concerne nos relations avec AINC, je ne sais pas. Il est vraiment difficile pour nous d'aller de l'avant. Nous avons eu des idées merveilleuses, des idées qui auraient pu créer beaucoup d'emplois et d'emplois payants, de concert avec le reste de la collectivité de Campbell River. Pour une raison qui nous échappe, nous n'arrivons tout simplement pas à franchir cette dernière étape pour lancer le projet.
À l'heure actuelle, un groupe financier est disposé à investir trois millions de dollars dans notre projet de centre de villégiature, mais, pour une raison ou une autre, cela ne semble pas influencer le ministère et ses programmes.
Mais nous essayons de passer à autre chose. Nous avons présenté ce projet au comité d'examen, qui a déterminé que notre projet était déficient. Nous avons dépensé la majeure partie de notre budget de développement économique sur ce projet; de plus, nous avons emprunté de l'argent, à même nos propres comptes de recettes à Ottawa, pour garder le projet à flot. Nous nous retrouvons ainsi dans une situation un peu difficile, car nous avons dépensé plus d'argent que nous n'en avions dans notre compte. Par conséquent, nous avons encore quelques dettes qui n'ont pas été réglées, notamment des honoraires d'avocats.
Nous aimerions voir le ministère prendre ses décisions plus rapidement. Il n'y a aucune raison de devoir attendre de six ou sept semaines pour une simple décision. J'ignore pourquoi le processus est si compliqué. Ma Première nation fonctionne selon un système coutumier héréditaire, et lorsque nous prenons des décisions, cela ne prend pas beaucoup de temps. Quand nous avons une idée et que nous établissons les détails, nous prenons une décision et nous allons de l'avant.
Pour ce qui est de transmettre la résolution du conseil de bande au ministère afin que les choses se fassent, et de transmettre toute l'information connexe — c'est une perte de temps, et cela n'aide personne.
Notre Première nation aimerait que la Loi sur les indiens soit modifiée afin que les Premières nations jouissent d'une souplesse accrue leur permettant de donner suite à leurs idées et de faire ce qu'ils veulent sur la réserve, au lieu d'avoir à subir le long processus de cession, en ce qui concerne les baux principaux. Cela prend deux ans. À partir du moment où on élabore une proposition, un projet d'entreprise, il faut prévoir trois ou quatre ans. Le dernier chef a également soulevé cette question. Il faut deux ou trois ans avant de se rendre au point où on peut négocier ou parler à d'éventuels partenaires de coentreprises en vue d'un projet. Ce serait beaucoup mieux si nous n'avions pas à subir le processus au cours duquel on demande à un bureaucrate du ministère l'autorisation de faire ceci ou cela. Il y aura toujours quelque chose. Ils vont invoquer une politique ou une autre, et nous devons nous y soumettre, et ils doivent suivre la filière. On nous impose toujours des pages et des pages d'échéances. Nous devons attendre qu'ils fassent ceci et cela avant d'aller de l'avant.
Encore une fois, cela prend du temps et de l'argent. Comme je l'ai dit, nous sommes une Première nation modeste, comme de nombreuses autres, et notre capacité financière de faire toutes ces choses est limitée. Il serait souhaitable de créer un guichet unique, un endroit au ministère où on regroupe tout ce qui est nécessaire au développement économique, au lieu de devoir composer, plus tard dans le processus, après avoir fait beaucoup de travail, avec une personne qui nous lance un autre morceau de papier en nous disant de faire ceci ou cela, ce qui, au bout du compte, nous prend six ou sept mois de plus. Le processus est ahurissant.
Un des aspects qui me frustrent tout particulièrement concerne les programmes financiers visant à aider les Premières nations, qu'ils relèvent d'Industrie Canada ou d'Affaires indiennes. Ils ne semblent jamais tenir compte du fait que la plupart des Premières nations disposent de ressources ou de capitaux limités. Les programmes dont je parle exigent des engagements financiers qui vont tout simplement au-delà de nos moyens. Vingt-cinq pour cent — ils veulent de l'argent comptant. Nous n'avons pas d'avoir propre, car nous ne sommes pas propriétaires des réserves. Si nous voulons apporter des améliorations à la réserve, nous devons passer par le processus de cession en vue d'obtenir des capitaux propres et de procurer des choses à notre réserve. Par conséquent, nous sommes toujours limités.
L'ensemble du processus doit être modifié, car il nuit aux communautés, et il mine leur capacité de devenir autonomes et de mettre en œuvre des programmes de développement économique adaptés à leurs besoins et à leur région.
Nous croyons être une première nation plutôt progressiste. De fait, dans la salle du conseil, nous taquinons les gens en disant que nous devrions nous appeler « Panasonic », car nous sommes en avance sur notre temps.
Par exemple, nous avons lancé des projets, il y a 20 ans, comme des projets de centres de villégiature et de menuiserie sur l'île de Vancouver, entre autres, que d'autres commencent tout juste à lancer.
Nous prions le comité de faire tout ce qu'il peut pour qu'on mette davantage l'accent sur les besoins des Premières nations, afin qu'elles puissent aller de l'avant sans avoir à composer avec des montagnes de paperasserie. Le processus est d'une lourdeur insoutenable.
À l'heure actuelle, nous caressons un projet qui fournira suffisamment d'emplois et générera beaucoup de revenus. Le but à long terme de ma Première nation est d'acquérir une propriété et de s'établir à quelque part, en communauté. C'est un autre aspect qui est à la source de problèmes avec Affaires indiennes. Notre communauté n'a pas d'endroit où vivre, mais le ministère des Affaires indiennes ne veut plus soutenir la création de réserves supplémentaires.
Nous sommes actuellement dans un processus de traité, alors on attend et on patiente jusqu'à ce que cela se produise. Toutefois, certains membres de notre communauté ont besoin d'une communauté maintenant. Il est très difficile de gouverner une communauté dispersée. Ils n'ont vraiment pas l'impression de faire partie d'une communauté, même s'ils sont fiers de leur patrimoine.
Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de comparaître devant votre comité.
Le sénateur Campbell : Vous dites que vous êtes actuellement dans un processus de traité; c'est bien ça?
M. Smith : Oui.
Le sénateur Campbell : Quelles sont vos attentes à cet égard?
M. Smith : À vrai dire, j'attends de prendre ma retraite.
Le sénateur Campbell : J'essaie de comprendre. Vous dites que, par exemple, quelqu'un était disposé à investir trois millions de dollars. De quelle taille était ce projet?
M. Smith : L'ensemble de notre projet — un projet de 6 millions de dollars.
Le sénateur Campbell : Je suppose que le secteur privé est prêt à investir trois millions de dollars; c'est bien ça?
M. Smith : Oui.
Le sénateur Campbell : Qui est propriétaire de la terre?
M. Smith : Il s'agit d'une terre de réserve.
Le sénateur Campbell : Votre nation est-elle capable d'aller chercher les trois millions de dollars qui manquent?
M. Smith : Voici ce que nous cherchions à faire avec le ministère : il y a un programme dans le cadre duquel le ministère fournit 25 p. 100, et nous devons dénicher l'argent et les capitaux propres qui manquent de notre côté. On exige au moins 10 p. 100 d'argent comptant, et le reste pourrait être sous forme de capitaux propres. C'est ce que nous proposions. Nous demandions 1,5 million de dollars du ministère.
Le sénateur Campbell : Et cela ne s'est pas produit?
M. Smith : Non. Nous avons tenté de rencontrer le directeur général régional et le ministre afin d'en discuter. Il y a eu tellement de retards que cela a occasionné des coûts supplémentaires au projet, qui s'ajoutent à ce que nous avions déjà dépensé, et personne ne veut en parler.
Le sénateur Campbell : Vous dites que vous faites cela depuis 20 ans — l'établissement de centres de villégiature, des projets de menuiserie, ce genre de choses. J'essaie de comprendre. Êtes-vous propriétaire des centres de villégiature?
M. Smith : Nous parlons d'être propriétaire de ce centre de villégiature, oui, celui dont nous parlons.
Le sénateur Campbell : Dans le cas des autres centres, vous étiez essentiellement responsable de les mettre sur pied et de les faire démarrer?
M. Smith : Non, nous n'avons vraiment rien eu. Je me suis peut-être mal exprimé, ou je n'ai pas été assez clair. Nous avons travaillé sur divers projets, mais nous n'avons jamais eu l'occasion d'en mener un à terme, parce que nous éprouvons de la difficulté à recueillir des capitaux et à obtenir du financement de la part des programmes.
Le sénateur Campbell : Il doit être difficile de faire cela quand votre peuple ne peut même pas se réunir au même endroit?
M. Smith : Effectivement. C'est très difficile.
Le sénateur St. Germain : Où était votre assise territoriale? Étiez-vous aux abords de la rivière Campbell?
M. Smith : Non. À l'origine, notre village était situé à l'embouchure du bras-de-mer Knight, situé à environ 60 à 80 milles au nord de la rivière Campbell.
Le sénateur St. Germain : Je connais. C'est là qu'était votre assise territoriale. Il s'agit encore de vos terres de réserve, n'est-ce pas?
M. Smith : Oui. Nous avons 11 réserves, dont la superficie totale est de 467 acres, mais il ne s'agit que de petites enclaves. Elles sont isolées, et dispersées sur le territoire. La plus grosse est un lot de 260 acres, mais 200 de ces acres sont à flanc de montagne, alors ils ne sont d'aucune utilité. On ne peut même pas cultiver des arbres viables sur ces 200 acres.
Le sénateur St. Germain : Est-ce du côté du bras-de-mer Knight?
M. Smith : Oui.
Le sénateur St. Germain : A-t-on envisagé la possibilité de rassembler toutes les bandes autochtones? Les Northwest Tribal Treaty Nations ont présenté un exposé à notre comité ce matin. J'ai l'impression qu'en ce qui concerne les relations avec le MAINC, il s'agit de diviser pour régner. Vous êtes vraiment tenu en otage à l'égard de tout ce que vous voulez faire.
Je ne crois pas qu'il y ait une solution simple. Tous les gouvernements ont essayé de régler ce problème. Il y a eu la CRPA, et il y a eu une pléthore d'études et de commissions qui ont formulé des recommandations. Il me semble que, plus ça change, plus c'est pareil.
Y a-t-il eu une réflexion sur la question?
L'une des questions qui ont été soulevées, particulièrement à l'égard des petites communautés — et j'ai parlé de cela avec un de nos adjoints, l'autre jour : je me demandais où nous en étions avec cette étude. Une des questions qui ont été soulevées concernait le fait que, quand on a une petite population, la moitié de cette population est jeune, et l'autre moitié, ce sont des aînés. Cela réduit la réserve de talents, car on ne jouit pas de la force du nombre. Cela n'a aucune importance qui on est, qu'on soit Autochtone ou non.
Il me semble que, si vous étiez en mesure d'établir une relation de travail, où le gouvernement et votre communauté pourriez vous consacrer à des causes communes, croyez-vous que cela pourrait améliorer la situation, ou est-ce que je rêve en couleur?
M. Smith : Je dirais que vous voyez un peu la vie en rose. Nous avons essayé à maintes reprises de faire ces choses. L'incompatibilité des caractères est un plus gros problème que l'élaboration d'une sorte de stratégie de ce genre.
Je suis un descendant des Kwakiutl, et c'est un peuple assez têtu. Chaque fois que nous essayons de travailler ensemble, il y a toujours quelque chose qui semble nous diviser. En général, c'est l'argent.
Pour ce qui est de certains autres groupes, et de ce qu'ils veulent faire à l'avenir, et de la façon dont ils veulent assurer leur développement, c'est difficile, car ils s'engagent dans des voies différentes, et à une vitesse différente. Il est difficile même d'essayer d'aider les gens à faire du rattrapage ou d'en ralentir d'autres, pour, en quelque sorte, établir un équilibre.
Nous avons déjà fait partie d'un organisme régi par un traité comptant 11 membres. À l'heure actuelle, il n'en reste plus que quatre. Nous faisons cavalier seul. Nous étions membres de la Hamatla Treaty Society. Cependant, parce que nous voulions aller de l'avant et que d'autres n'aimaient pas notre façon de faire les choses, on nous a demandé de partir.
Il y a des gens qui ne veulent tout simplement pas aller de l'avant. Je suppose que ma petite tribu ne peut tout simplement pas attendre. Nous aimerions aller de l'avant; nous aimerions tirer avantage des occasions qui se présentent maintenant.
Le sénateur St. Germain : Est-ce que les dernières lois adoptées à Ottawa — par exemple, la Loi sur la gestion financière et statistique des Premières nations, entre autres — vous ont été d'une utilité quelconque, ou ont-elles seulement aidé les groupes jouissant déjà d'assises économiques solides?
M. Smith : J'ignore si cela nous aide vraiment, car nous sommes dans une situation sans issue, puisque nous n'avons pas de communauté digne de ce nom. Il faut tenir des assemblées communautaires pour faire certaines choses — par exemple, la cession de terres en vue de la création d'un bail principal permettant d'apporter des améliorations et d'aménager la terre, et d'établir des partenariats. Pour faire cela, il faut tenir une assemblée communautaire en vue d'approuver ce processus. Sinon, on ne peut pas vraiment le faire.
Avec notre projet, nous avons tenté de contourner ce processus en subdivisant la propriété et en émettant des CP, et en les détenant en fiducie afin de procéder à l'aménagement et de commencer la construction. Plus tard, nous aurions amorcé le processus de cession et mis les choses en perspective.
Les Premières nations devraient jouir de toute la souplesse dont elles ont besoin pour faire des choses, et la Couronne ne devrait pas gêner leurs mouvements en leur disant que la terre est toujours détenue en fiducie. Elle peut toujours être détenue en fiducie, mais les Premières nations devraient être en mesure d'assurer le développement économique sur le territoire. Cela n'a pas beaucoup de sens.
Le sénateur St. Germain : Avez-vous des terres sur l'île proprement dite?
M. Smith : Nous avons une terre de réserve à l'embouchure de la rivière Adam, et c'est là que nous voulons établir notre centre de villégiature.
Le sénateur St. Germain : Quelle est la superficie de cette terre?
M. Smith : Elle fait 48 acres.
Le sénateur St. Germain : Demandez-vous une superficie supplémentaire? Cherchez-vous à obtenir d'autres terres?
M. Smith : Pas pour l'instant; mais il s'agit, essentiellement, de l'une de nos sélections de terre dans le cadre du processus de traité.
Le président : S'il n'y a plus de questions, je vous remercie, monsieur Smith, d'avoir comparu devant notre comité, et d'être venu de si loin pour nous rencontrer.
Sachez que nous prenons bonne note de l'information que vous avez présentée, en particulier à l'égard de vos rapports avec Affaires indiennes.
M. Smith : Merci beaucoup.
Le président : Notre prochain témoin est Gordon Sebastian, des 4 Nations.
Avant de commencer votre exposé, nous aimerions savoir ce que sont les 4 Nations.
Gordon Sebastian, directeur général, 4 Nations : Les 4 Nations sont Kwadacha, la bande de Takla Lake, Tsay Keh Dene et la Gitxsan House de Nii Kyap.
Avant de commencer mon exposé, je vous présente brièvement les points que je compte soulever. Le premier point est à la page 3 de mon mémoire, au troisième paragraphe. Laissez-moi vous le lire :
Le comportement des gouvernements fédéral et provincial à cet égard a clairement créé des barrières économiques qui vont à l'encontre des directives de la Cour suprême.
Ce point sera le fil conducteur de mon exposé.
Le deuxième point que je veux aborder concerne le mandat du comité sénatorial; je veux, essentiellement, veiller à ce que vous compreniez la méfiance des peuples autochtones.
Le troisième point que je souhaite aborder se trouve à l'onglet 4. À l'onglet 4, vous trouverez un projet d'entente relatif à un processus de consultation et d'aménagement, daté du 6 janvier. Il s'agit d'une entente conclue par les 4 Nations et la Northgate Minerals Corporation et ses filiales. Je crois que vous connaissez ces gens. Je suis certain que le maire Campbell les connaît probablement.
Avant de commencer mon exposé, je tiens à vous présenter très brièvement un aperçu de cette entente, afin que vous compreniez ce que je vous explique.
L'onglet 4 est un exemple de démarche amorcée par les 4 Nations en vue de travailler avec les sociétés. Vous verrez les problèmes auxquels nous sommes confrontés, les obstacles qui ont été établis par le gouvernement, lorsque je vous décrirai la situation. Je vous renvoie à la page 12 de l'onglet 4. Je vais faire un survol des rubriques.
Au paragraphe 8, « Suivi environnemental ». Voici un extrait de ce paragraphe :
À l'égard de tous travaux sur le terrain ou de tout suivi à effectuer à l'égard d'études archéologiques ou environnementales exigées dans le cadre de la demande visant le projet, Northgate invitera chacune des 4 Nations à charger un membre de participer aux travaux sur le terrain...
Par conséquent, nous participerons à ce genre de travail.
Au paragraphe 9, à la page 13 — « Comité consultatif ». Nous espérions établir un comité consultatif dont les activités seraient fondées sur les politiques élaborées par le peuple Gitxsan — la politique relative aux ressources pétrolières et gazières et forestières. Très spécifiquement, nous avons une politique relative à l'eau. Il n'existe aucune autre politique de ce genre en Amérique du Nord, et je crois que vous pouvez comprendre cela.
À la page 15, au paragraphe 10 — « groupe de travail sur les avantages ». Nous nous pencherons sur les occasions d'emploi et de formation pour nos jeunes. Pour ce qui est des « occasions d'affaires », plus bas dans la page, nous envisageons de nous lancer dans l'approvisionnement des sociétés minières, par exemple, en alimentation. Nous avons des gens qui possèdent des avions — alors, ce genre de choses.
À la page 16, il y a une rubrique intitulée « Occasions au chapitre de l'éducation et des bourses ».
Enfin, à la page 17 — et ce point est particulièrement lié à votre mandat, alors je vous invite à en prendre note. Au paragraphe 11, à la page 17 — « Approche conjointe en matière de partage des recettes tirées de l'exploitation des ressources ». Je tiens à vous rappeler, mesdames et messieurs les sénateurs, que, à l'égard du projet de Kemess South, le gouvernement fédéral a reçu 1,3 milliard de dollars de revenus fiscaux, et que le gouvernement provincial a touché 35 millions de dollars de recettes fiscales.
En ce qui concerne la prise de décisions, je vous invite à passer à l'onglet 1. À la page 12, vous verrez la rubrique « processus décisionnel des wilphl Gitxsan ». Vous savez qui sont les wilphl Gitxsan. Le Sim'oogit est responsable du bien-être des wilphl Gitxsan, en raison de ses connaissances traditionnelles et de son expérience de vie. Ce paragraphe décrit comment et pourquoi le grand chef ou le Sim'oogit prend des décisions relatives aux terres.
Ensuite, je vous invite à passer à la page 8. À la page 8, vous trouverez un portrait de la société Gitxsan. On y décrit, par exemple, du côté droit de la page, l'Ayookim Gitxsan, c'est-à-dire les lois, les règles qui ont régi nos actes pendant 10 000 ans. Vers le bas de la page, il y a le Yuuhlimox, c'est-à-dire la formation d'un chef, la façon de prendre des décisions liées aux lois. Vous y trouverez une définition.
Dans le coin supérieur gauche se trouve la Gwalax yee'nst — et je sais que le sénateur Sibbeston sera capable de prononcer tous ces mots lorsque j'aurai terminé — qui désigne le patrimoine. Le patrimoine du peuple dont nous parlons comprend les terres, les ressources, le poisson, les cours d'eau, et ce genre de choses.
À l'onglet 3, vous trouverez un document relatif à un conseil mixte de la gestion des ressources. C'est une structure que nous avons présentée aux deux gouvernements; toutefois, nous n'avons reçu aucune réponse de leur part.
Je vais commencer mon exposé. Je tiens à vous remercier, au nom des 4 Nations, y compris au nom de Simogyat Mo'ot, représentant de la Gitxsan House de Nii Kyap.
Mon exposé concerne spécifiquement la capacité des 4 Nations de participer au développement économique dans le nord de la Colombie-Britannique. Les 4 Nations sont la bande Tsay Keh Dene, la bande de Kwadacha, la bande de Takla Lake et la Gitxsan House de Nii Kyap.
Le comité sénatorial a pour mandat de recueillir de l'information sur la participation des collectivités et des entreprises autochtones aux activités économiques, au-delà des prescriptions étroites des programmes et politiques de l'État. C'est une citation directe de votre mandat. Ces paroles sont pour les 4 Nations une grande source de joie et d'espoir.
Aujourd'hui, on vous a relaté une foule d'anecdotes au sujet des programmes et de certaines politiques du gouvernement. En général, les prescriptions étroites des bureaucrates du gouvernement consistent à créer des solutions et à forcer les Indiens à s'adapter à ce moule. Le problème de ces bureaucrates, c'est qu'ils ne connaissent pas bien les peuples autochtones auxquels ils tentent d'imposer des solutions.
Pourquoi est-il si important de comprendre la société des 4 Nations? Dans sa décision du 11 décembre 1997 au sujet du Gitxsan, chose que les deux gouvernements semblent avoir oubliée, la Cour suprême du Canada a déclaré qu'avant de concilier la présence antérieure des sociétés autochtones avec l'affirmation de la souveraineté de la Couronne, il fallait tout d'abord comprendre la société Gitxsan, telle que décrite par les Gitxsan. En comprenant les sociétés des 4 Nations de ce point de vue, on crée un point de référence à partir duquel une telle reconnaissance est possible. Ainsi, la présence antérieure des sociétés des 4 Nations à la souveraineté de la Couronne aura un sens et de la valeur, et on pourra évaluer l'ampleur de cette reconnaissance.
Pour l'instant, je vous invite à regarder l'onglet 1.
À la première page de l'onglet 1, vous verrez, du côté droit, une carte. À gauche se trouve une photo de l'une de nos communautés, sur le territoire Gitxsan, et à droite, vous voyez une photo de l'un de nos cours d'eau. Je pense que c'est la rivière Findlay
Si vous allez à la page 4, vous verrez une carte du Canada. Du côté gauche, vous verrez la Colombie-Britannique, dont la partie jaunie correspond au territoire Gitxsan. C'est à l'égard de ce territoire que nous sommes allés devant les tribunaux, et nous avons prouvé que ce territoire nous appartient. Nous sommes allés en cour depuis, et nous avons prouvé que ce territoire nous appartient. De prime abord, au moins, nous avions une solide revendication territoriale, une très solide revendication de droits.
À la page 5, vous verrez que la partie jaune a été colorée. Vous verrez qu'il y a neuf bassins hydrographiques sur le territoire Gitxsan. Du côté supérieur droit, où se trouve le chiffre 8, vous verrez le bassin Sustut. Dans cette zone, il y a huit territoires familiaux. Il ne s'agit pas de réserves. Ce sont des territoires où l'or, les arbres et toutes les ressources minérales nous appartiennent. Du côté droit, dans la pointe la plus aiguë, c'est là que se trouvent les mines Kemess. En ce qui concerne les 4 Nations, nous sommes toutes représentées dans cette zone. Nous sommes toutes liées. Juste au- dessus de nous, il y a les Tsay Keh Dene et les Kwadacha, et à droite de la zone orange, il y a la bande de Takla Lake.
Si vous avez le temps de lire le reste de l'information qui se trouve sous cet onglet, vous pourrez prendre connaissance des structures de la société Gitxsan, à la page 8, dont je vous ai parlé précédemment, qui vous aideront à comprendre en quoi les Gitxsan sont liés à la terre. Les autres nations membres des 4 Nations entretiennent des liens similaires avec la terre.
Reportons-nous maintenant à la page 12, où l'on trouve le processus décisionnel du chef. Il est écrit ce qui suit :
Le simigiget est responsable du bien-être du wilphl Gitxsan. En se fondant sur la formation additionnelle, les expériences de vie et l'acquisition d'une grande compréhension et introspection, les chefs, en compagnie d'autres membres importants et d'une grande maturité, déterminent le chemin que le wilp doit parcourir pour assurer son bien-être et sa viabilité. Les membres du wilp dépendent d'eux exclusivement lorsqu'il s'agit de prendre des décisions adéquates qui sont critiques pour le bien-être et la subsistance du wilp.
C'est quelque chose de nouveau pour vous. Pour comprendre le fonctionnement de la société Gitxsan, il faut savoir qu'il ne s'agit pas d'un conseil de bande où vous fonctionnez au moyen de RCB, où vous devez obtenir l'approbation d'un représentant d'Ottawa. C'est quelque chose de nouveau pour vous, et j'espère que vous prendrez du temps pour examiner cet onglet.
Laissez-moi vous parler de votre autorité légale à agir en tant que comité sénatorial.
Les 4 Nations pressent fortement votre comité de reconnaître les décisions rendues par les tribunaux favorables aux intérêts autochtones en ce qui concerne l'exploitation des ressources en Colombie-Britannique. Votre comité sénatorial peut jouer un rôle important et obliger les gouvernements à transcender leurs politiques et programmes particuliers pour tenir compte des intérêts des 4 Nations en ce qui concerne les activités relatives au développement économique.
Comme vous le savez, le droit en Colombie-Britannique reconnaît que les 4 Nations peuvent, de prime abord, fortement revendiquer des droits et revendiquer la propriété des terres et des ressources de la Colombie-Britannique. Les 4 Nations sont organisées et prêtes à mettre en œuvre les paragraphes 166 à 169, comme l'a énoncé la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Delgamuukw.
C'est pourquoi les 4 Nations pressent votre comité d'aller au-delà des politiques et des programmes particuliers — c'est votre mandat — en mettant en œuvre les trois aspects du titre aborigène, comme l'énonce la Cour suprême du Canada.
Le paragraphe 166 se lit comme suit :
La façon dont l'obligation de fiduciaire s'applique relativement à la deuxième étape du critère de justification... Trois aspects du titre aborigène sont pertinents en l'espèce. Premièrement, le titre aborigène comprend le droit d'utiliser et d'occuper de façon exclusive les terres visées; deuxièmement, le titre aborigène comprend le droit de choisir[...]
On lit « droit de choisir », ce qui est très intéressant. Si vous avez un quelconque pouvoir ou que vous pouvez forcer le gouvernement à commencer à accepter ce point, nous serons bien placés pour participer au développement économique.
Je continue de citer ce paragraphe.
[...] les utilisations qui peuvent être faites de ces terres, sous réserve de la restriction ultime que ces usages ne sauraient détruire la capacité de ces terres d'assurer la subsistance des générations futures de peuples autochtones; troisièmement, les terres détenues en vertu d'un titre aborigène ont une composante économique inéluctable.
Le comité sénatorial pourrait utiliser ce paragraphe 166. Vous pourriez le faire imprimer sur un chandail et vous pourriez le porter sur la colline du Parlement ou à Victoria. De cette façon, vous iriez au-delà de vos programmes et de vos politiques puisque vous accepteriez un élément nouveau.
Je vais vous donner un exemple de la façon dont cet obstacle dressé par les deux ordres du gouvernement agit en Colombie-Britannique.
Les deux ordres de gouvernements ont laissé de côté les 4 Nations au cours du projet d'expansion de Kemess North. Northgate Minerals Corporation est une entreprise d'extraction des métaux et d'exploration minérale du Canada; elle est propriétaire de la mine de cuivre et d'or Kemess dans le centre-nord de la Colombie-Britannique et exploite cette mine. De plus, elle possède des concessions minières dans la région de la mine de Kemess et dans les alentours. Northgate propose d'étendre les activités de Kemess en ajoutant une nouvelle mine à ciel ouvert. Le site de la nouvelle mine à ciel ouvert se trouve au nord de la mine Kemess, à l'intérieur des concessions minières de Northgate et des terres des 4 Nations.
Le développement économique réalisé par l'industrie minière en Colombie-Britannique a manifestement porté atteinte au titre et aux droits des 4 Nations, qu'avait reconnus la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Delgamuukw.
Reportons-nous maintenant au paragraphe 167 de l'arrêt Delgamuukw rendu par la Cour suprême. Vous devrez porter un chandail de taille large pour ajouter ce nouveau paragraphe.
Le paragraphe 167 se lit comme suit :
Il faut que les gouvernements démontrent...
À l'heure actuelle, il s'agit d'une directive très intéressante de la Cour suprême du Canada qui a totalement été laissée de côté par votre gouvernement.
... « que les modalités de répartition de la ressource ainsi que la répartition elle-même reflètent l'intérêt prioritaire » (au par. 62) des détenteurs du titre aborigène sur les terres visées. Par analogie avec l'arrêt Gladstone, cela pourrait vouloir dire, par exemple, que les gouvernements prennent en compte la participation des peuples autochtones à la mise en valeur des ressources de la Colombie-Britannique, que la concession de fiefs simples pour l'agriculture ainsi que de baux et permis à des fins d'exploitation forestière ou minière tienne compte de l'occupation antérieure des terres visées par un titre aborigène, que les obstacles économiques à l'utilisation par les Autochtones de leurs terres (p. ex. le paiement de droits pour l'obtention de permis) soient sensiblement réduits...
Même la cour vous demande de réduire vos obstacles.
Les décisions prises par les gouvernements fédéral et provincial sur cette question ont manifestement créé des obstacles économiques qui contreviennent aux directives de la Cour suprême du Canada. Les deux ordres de gouvernement ont refusé de négocier un processus qui comprend la participation des 4 Nations.
Reportons-nous à l'onglet 2. Il s'agit du protocole de consultation que nous avons envoyé aux deux ordres de gouvernements il y a plusieurs mois, mais ils ont peur d'engager des discussions concernant ce protocole de consultation. Dans leurs propres documents, ils énoncent qu'ils doivent consulter les Premières nations. Celles-ci doivent participer. Par conséquent, nous leur avons envoyé un projet de processus — c'est l'onglet 2, que vous pourrez lire — mais ils n'en ont pas tenu compte. Je vais expliquer pourquoi ils n'en ont probablement pas tenu compte.
Si vous allez à la page 10, sous l'onglet 2, vous constaterez que, si la province souhaite délivrer des permis d'exploration, alors elle devra reconnaître le mode d'exploitation des Premières nations en ce qui concerne les terres, l'eau, les lacs et les rivières, les rives, notamment — nous avons nommé tous les lacs — le lac Duncan, tous les lacs de la région, la rivière Findlay, toutes les criques, toutes les rives, l'aéroport qu'utilisent ceux qui exploitent la mine Kemess, le lac Thutade, les cours d'eau, le tourisme exclusif, les pourvoiries et le titre et les droits de chasse.
Dans le paragraphe intitulé « partage des recettes », nous demandons 60 millions de dollars par année et 15 millions de dollars au moment de la signature de cette entente.
Il y a une rubrique intitulée « restauration et remise en valeur des mines », à la page 12. Dans nos territoires aux alentours, il y a plusieurs exemples qui montrent que, une fois que la ressource est retirée de la terre, celle-ci est finie; il n'y a plus rien. Les cours d'eau sont vides, l'habitat des poissons n'est plus.
Puis, il y a un paragraphe intitulé « autres questions relatives à l'aménagement ».
Honorables sénateurs, les 4 Nations ont également proposé que les deux ordres de gouvernement tiennent compte d'un organe responsable de la gestion des ressources formé de membres des 4 Nations. L'organe responsable de la gestion des ressources vise à administrer et à réglementer toutes les activités relatives aux terres et aux ressources sur les terres traditionnelles dans l'intérêt des 4 Nations et du territoire. L'organe est responsable de toutes les activités relatives au minerai et à l'exploration minière, à la production, à l'achèvement et à la distribution qui ont lieu sur des terres traditionnelles, notamment en ce qui concerne le suivi environnemental, la restauration, la conformité avec les lois et l'application de ces dernières, les activités géophysiques, la construction et ainsi de suite; il représente également l'organe de réglementation au chapitre de ces activités.
Cet organe responsable de la gestion des ressources regroupe les 4 Nations, c'est-à-dire Gitxsan, la bande de Takla Lake, Kwadacha et Tsay Keh Dene, qui comptent environ 15 000 personnes. La nation Gitxsan compte à elle seule 12 000 personnes.
Le pouvoir de cet organe responsable de la gestion des ressources est énoncé au paragraphe 168 de l'arrêt Delgamuukw c. La Reine. Laissez-moi vous citer ce paragraphe.
En outre, les autres aspects du titre aborigène tendent à indiquer que l'obligation de fiduciaire peut se manifester autrement que par l'idée de priorité. Premièrement, le titre aborigène comprend le droit de choisir les utilisations qui peuvent être faites d'une parcelle de territoire.
Nous avons déjà entendu auparavant.
... Cet aspect du titre aborigène indique qu'il est possible de respecter les rapports de fiduciaire entre la Couronne et les peuples autochtones en faisant participer les peuples autochtones à la prise des décisions concernant leurs terres.
En 1997, la Cour suprême du Canada a émis ces propositions.
Les 4 Nations et Northgate Minerals Corporations entament une relation qui reconnaît que l'on doit tenir compte de ces intérêts prima facie avant de mener toute activité économique sur les terres traditionnelles des 4 Nations.
En ce qui concerne les utilisations traditionnelles des terres — et c'est ce sur quoi portaient les négociations entre nous et Ken Stowe, le président de Northgate Minerals. C'est ce sur quoi nous nous sommes entendus au chapitre des utilisations traditionnelles.
Les « utilisations traditionnelles » des 4 Nations représentent la façon dont celles-ci utilisent le lax yip et Keyoh à des fins traditionnelles, notamment en ce qui concerne, sans toutefois s'y limiter, les structures physiques, comme des campements, des emplacements de pique-nique, des fumoirs, des résidences temporaires et permanentes, des jardins d'herbes médicinales, des lieux de sépulture et d'autres lieux servant à des fins traditionnelles, conformément à la culture, à la langue et aux lois des 4 Nations.
Vous pouvez maintenant constater à quel point l'onglet 1 est important.
À l'onglet 4, il est intéressant de souligner que seules les rubriques suivantes ont été approuvées par Northgate Minerals : « suivi environnemental », « comité consultatif », « groupe de travail sur les avantages », « possibilités d'emploi et de formation », « occasions d'affaires », « occasions au chapitre de l'éducation et des bourses », « approche conjointe en matière de partage des recettes tirées de l'exploitation des ressources ». Les responsables de Northgate Minerals comprennent que nous perdons des milliards de dollars en ressources, ressources que nous avons pleinement le droit de revendiquer, selon vos tribunaux. La Cour suprême de la Colombie-Britannique énonce que la nation Gitxsan détient d'emblée un titre et un droit à l'égard de ces terres, mais il n'existe aucune politique à ce sujet. Deux des tables de négociation ne tiennent pas compte du tout de cela pour élaborer des politiques. Cette année, on nous a encore dit : attendez, nous avons une nouvelle relation que nous voulons mettre en œuvre à un certain moment en 2006. J'ai déjà attendu un long moment. Comme vous pouvez le constater, il ne me reste plus que deux cheveux noirs environ, alors j'espère qu'il y aura des changements avant que mes cheveux ne deviennent blancs.
Honorables sénateurs, le défi que doit relever votre comité consiste à aller au-delà des étroites prescriptions des politiques et des programmes particuliers des gouvernements de façon concrète. Cela comprend la participation des collectivités et des entreprises autochtones aux activités relatives au développement économique.
Les 4 Nations font tout leur possible. Toutefois, les obstacles économiques dressés par les deux ordres de gouvernement dans cette situation posent problème. Ils sont déroutants pour une grande entreprise comme Northgate Minerals. Nous faisons notre possible, nous avons établi une relation, et, au même moment, les deux ordres de gouvernement refusent de permettre aux Premières nations de participer à l'examen des effets environnementaux. Nous avons demandé un budget de trois millions de dollars aux deux ordres de gouvernement pour notre participation à l'examen des effets environnementaux du projet Kemess South. Ils nous ont dit que nous pouvions avoir 40 000 $. Du point de vue des 4 Nations, ce n'est que de la cupidité pure et simple. C'est la seule raison pour laquelle le gouvernement a dressé cet obstacle.
Je propose, honorables sénateurs, que vous abordiez le problème de la méfiance, de la mise en œuvre de la loi, de la cupidité des deux ordres de gouvernement perçue par le peuple autochtone, car les dirigeants de Northgate Minerals ont vraiment montré qu'ils voulaient régler cette situation. Ce n'est pas l'impression que nous avons eue de la part du gouvernement.
Lorsque vous lisez les trois paragraphes que j'ai énoncés au cours de mon discours, vous constaterez que le fait d'assurer la subsistance des terres est très important. La Cour suprême a reconnu que le fait d'assurer la subsistance des terres pour les peuples des Premières nations est très important.
Sur cette photo, vous voyez, à droite, Kemess South. Il y a un bassin à résidus. Vous verrez l'eau que retient ce bassin. Vous pouvez voir les arbres qui en sortent. Ce sont des arbres de 40 pieds. Je ne crois pas qu'une personne présente ici aimerait boire de cette eau ou y prendre un bain. Je ne crois même pas que vous voudriez vous en approcher.
À gauche se trouve le lac Duncan; c'est le lac que l'on veut remplir de résidus dans le cadre du projet Kemess North. On dit que c'est sans danger pour l'environnement. Le ministère des Pêches possède un plan d'aucune perte nette dans le cadre duquel on prendrait les poissons de ce lac pour les mettre dans un autre. Nous savons que la diversité génétique des poissons est telle qu'ils ne survivraient pas. Lorsque les poissons naissent dans un certain habitat, ce dernier est le seul dans lequel ils peuvent vivre, et c'est là qu'ils retournent. Si vous les mettez dans un autre lac, ils ne survivront pas.
Merci.
Le sénateur Campbell : Monsieur Sebastian, j'ai posé cette question à d'autres personnes qui ont comparu devant nous : est-ce votre terre?
M. Sebastian : Oui.
Le sénateur Campbell : La Cour suprême reconnaît-elle ce fait?
M. Sebastian : Oui.
Le sénateur Campbell : Alors, je ne comprends pas pourquoi, s'il s'agit de votre terre, vous ne pouvez pas appliquer vos règles.
Ce que vous me dites — mais peut-être que quelque chose m'échappe. Si je suis mineur, que je trouve des minéraux sur votre terre, mais que je n'obtiens pas votre permission, je dois obtenir celle des gouvernements fédéral et provincial, et ce que vous avez à dire sur votre terre passe en deuxième?
M. Sebastian : C'est exact. La façon de régler le problème consiste à faire en sorte que vos lois tiennent compte de nos intérêts, et cette question, c'est-à-dire notre possession de la terre, touche nos intérêts.
Le sénateur Campbell : Vous dites qu'il en coûtera trois millions de dollars pour mener une étude environnementale?
M. Sebastian : C'est exact.
Le sénateur Campbell : On est prêt à vous consentir 40 000 $?
M. Sebastian : C'est exact.
Le sénateur Campbell : Pourquoi ne leur dites-vous pas que vous n'acceptez pas que l'on vienne sur votre terre?
M. Sebastian : C'est ce que nous disons. Les prospecteurs n'auront pas le droit de passer.
Le sénateur Campbell : Que peuvent-ils faire si vous dites cela? Que peuvent-ils vous faire?
M. Sebastian : Bien sûr, ils vont obtenir une injonction.
Le sénateur Campbell : Comment peuvent-ils obtenir une injonction puisque l'arrêt de la Cour suprême énonce qu'il s'agit de votre terre? L'injonction est invalide.
M. Sebastian : C'est exact; c'est bien cela. Alors, que pouvons-nous dire? Personne ne reconnaît ces lois. La Cour suprême du Canada a pris une décision. La Cour suprême de la Colombie-Britannique a pris une décision. Toutefois, nos tribunaux ne reconnaissent pas cela.
Le sénateur Campbell : Alors, ils obtiennent une injonction contre vous, mais vous ne pouvez pas faire la même chose?
M. Sebastian : C'est exact.
Le sénateur St. Germain : Avez-vous conclu une entente concernant le territoire?
M. Sebastian : Non. Nous avons tenté de le faire en 1996. C'était au cours de notre procès. Juste avant que la Cour suprême ne rende sa décision finale, nous menions des négociations, et les représentants de la province ont quitté la table de négociations de la nation Gitxsan, car ils ne voulaient pas reconnaître l'onglet 1, qui explique la nature et les valeurs de la nation Gitxsan. Nous l'avons rédigé en anglais du mieux que nous le pouvions afin que vous puissiez comprendre la nation Gitxsan.
Ils ne voulaient pas reconnaître cet onglet, alors ils ont quitté notre table. C'est pourquoi nous n'avons pas conclu d'entente, parce qu'ils ne voulaient pas comprendre et accepter le fait que la nation Gitxsan et les 4 Nations ont leur propre société.
Le sénateur St. Germain : Est-ce que New Hazelton se trouve dans votre région?
M. Sebastian : Oui.
Le sénateur St. Germain : Alors Kitwanga aussi?
M. Sebastian : Oui.
Le sénateur St. Germain : Je sais où vous êtes situé.
Vous avez été présents à la table de négociation pendant un long moment, n'est-ce pas?
M. Sebastian : C'est exact. Notre territoire s'étend sur 32 000 kilomètres carrés.
Le sénateur St. Germain : Vous êtes adjacent aux Nisga'a?
M. Sebastian : C'est exact.
Le sénateur Campbell : Pourquoi s'intéresseraient-ils à la façon dont votre société a fonctionné? Quel intérêt peuvent-ils avoir dans le fait que vous tentez de conclure un traité concernant vos terres?
M. Sebastian : Cela concerne la façon dont nous prenons nos décisions.
Il faut simplement comprendre la façon dont nous fonctionnons et dont nous exploitons nos terres, la façon dont nous transmettons les successions lorsque des gens décèdent et que l'exploitation se poursuit. C'est ce que les prospecteurs doivent savoir, car c'est ce à quoi ils portent atteinte, mais ils ne veulent pas le savoir, car cela suppose une indemnisation.
Si nous envoyions une facture au gouvernement en ce qui concerne la violation de nos droits à Kemess North, la province ferait faillite.
Le sénateur Campbell : On ne parle même pas de Kemess South?
M. Sebastian : C'est exact. Nous n'en avons pas encore parlé. Northgate est très clair à ce sujet : c'est sur sa table, nous allons en parler lorsque nous aurons réglé la question de Kemess North, car il y a eu beaucoup de dommages là- bas. On doit remettre beaucoup de choses en état.
Le sénateur Zimmer : Monsieur Sebastian, je vais poursuivre dans la même voie que le sénateur Campbell. J'aimerais comprendre : ils peuvent demander et obtenir une injonction contre vous, mais vous ne pouvez pas faire la même chose. Est-ce exact?
M. Sebastian : C'est exact.
Le sénateur Zimmer : Qu'est-ce qui explique cette situation?
M. Sebastian : Je présume que la plus grande collectivité doit survivre. Les riches ont besoin d'encore plus d'argent, au détriment de nos droits. Nous nous sommes occupés de ces terres pendant 10 000 ans.
La Cour suprême du Canada aurait pu nous donner un titre absolu. Il n'y avait aucune raison pour qu'elle ne le fasse pas. C'est ce que nous accordent actuellement les tribunaux inférieurs. La Cour suprême de la Colombie- Britannique reconnaît à première vue que nous avons des droits. Votre appareil judiciaire fait porter le fardeau à la province. Elle doit prouver qu'elle détient un meilleur titre. Si je tente de présenter cet argument en cour — s'ils obtiennent une injonction, nous devons prouver que notre titre est meilleur — cela ne fonctionnera pas dans votre tribunal.
Le président : Je vous remercie, monsieur Sebastian, d'avoir présenté votre exposé.
Notre prochain témoin est M. Jim Angus, de la nation Gitxsan.
Jim Angus, chef héréditaire, Wii Aliist, nation Gitxsan : Honorables sénateurs, je vous remercie de me permettre de présenter un exposé devant vous aujourd'hui.
[M. Angus parle en langue autochtone.]
Tout d'abord, j'aimerais remercier la Première nation de Lheidli T'enneh de nous avoir permis de nous trouver sur leur terre, de nous avoir permis de visiter cette magnifique région.
Chers membres du comité permanent, je vous parle aujourd'hui au nom de la nation Gitxsan au sujet d'un enjeu très important pour les Gitxsan Simgiigyet. Nous voulons vous souligner l'importance de l'exploitation des ressources sur nos territoires, plus particulièrement en ce qui concerne le pétrole et le gaz.
Nous avons regardé, incrédules, la Couronne provinciale enlever tous les arbres viables de nos territoires sans tenir compte de l'avenir ou de la viabilité de la terre. Nous avons Gwalyeinsxw, notre plus importante ressource, puisqu'elle représente tout ce qui se trouve au-dessus et en dessous du sol sur le territoire. Il s'agit de notre histoire orale locale, de nos emblèmes, de nos noms, de nos totems, de nos chansons et de nos danses. Tout cela doit être transmis à la génération suivante et ne jamais être atténué ni détruit de façon irréparable. Votre Cour suprême l'a reconnu en 1997 dans l'arrêt Delgamuukw et elle a par la suite énoncé que nous avons le droit de choisir les utilisations qui peuvent être faites des terres, qu'il existe un élément économique évitable et que nous avons le droit de gagner un revenu modeste.
Aujourd'hui, je mettrai l'accent sur le droit de choisir les utilisations qui peuvent être faites des terres. Tout d'abord, dans la nation Gitxsan, nous sommes séparés en Huwilp, ce qui signifie en maisons ou groupes. Je crois que l'une des pièces jointes au document présenté par M. Sebastian aujourd'hui contient une carte. Chaque région sur cette carte est accompagnée d'un nom Huwilp, du nom d'un chef. Dans les tribunaux de la Colombie-Britannique, nos membres ont pendant trois ans tenté de prouver que nous existions avant l'arrivée des Européens, que nous existons toujours aujourd'hui, et que les Gwalax Yee'nst existeront encore pendant bon nombre d'années. On ne peut modifier cette situation. C'est une structure très complexe qui couvre chaque aspect de notre vie.
Avant l'arrivée des Européens, nous avions mis en place un système d'aide sociale qui fonctionnait très bien. Nous avions un système dans le cadre duquel on conseillait les gens dans le besoin, et ce système fonctionnait très bien. Nous avions mis en place un système de soutien pour appuyer les différents chefs à l'égard de leurs activités. Cela fonctionnait très bien. Ce système existe toujours aujourd'hui et il existera encore pendant bien des décennies.
Chaque groupe a un Simoogit, un chef et un chef auxiliaire, qui assume un leadership en fonction des besoins collectifs du groupe. Nous sommes collectivement responsables de 33 000 kilomètres carrés de lax yip.
Dans les documents, vous voyez certains termes comme « terre » et « territoire ». Je préfère le terme « lax yip », car la définition de terre et de territoire ne correspond pas vraiment à notre définition de lax yip. Lorsque vous voyez ces deux mots, modifiez-les.
Nous sommes divisés en neuf bassins administratifs. Depuis 15 ans, peut-être même davantage, nous proposons une politique relative à la viabilité des bassins et, récemment, nous avons cherché à mettre en œuvre des politiques sur le lax yip qui concilient notre titre, nos droits et nos intérêts sociaux avec ceux de l'État.
En tant que Simoogit, nous collaborons pour garantir la viabilité de notre lax yip pendant des milliers d'années. Nous collaborons en tant que chefs de différents bassins pour garantir la viabilité de tout ce qui existe sur notre lax yip.
Nous avons créé des politiques, et la première, le Oil and Gas Ayookw, ou la Loi sur le pétrole et le gaz naturel, est datée de 2004. À ce moment-là, nous nous sommes rendu compte de la situation. L'exploitation du pétrole et du gaz naturel avait commencé sur l'ensemble de notre territoire, partout, et il s'agit pour nous d'une très, très, très grande préoccupation. Le Oil and Gas Ayookw énonce nos intérêts en ce qui concerne notre titre et nos droits autochtones relatifs à l'ensemble du lax yip des Gitxsan, comme les divers tribunaux le reconnaissent et comme nous le soutenons dans notre salle des fêtes au moyen de notre Ayookw.
Toute activité qui se déroule au cours des fêtes est vue par les chefs des autres clans, alors l'activité en question dans cette salle des fêtes est vue par ces gens. Cette situation est très complexe, et des systèmes de soutien sont conçus et établis dans toutes les régions à l'intention des chefs.
Notre société repose sur la tradition orale. Au cours de notre bataille judiciaire, nous devions faire reconnaître et accepter le fait par les tribunaux que notre histoire est orale. Cela remonte à cette citation formulée il y a 15 ans concernant l'élaboration d'une politique sur le pétrole et le gaz naturel. Nous avons seulement commencé à écrire ces choses au cours des dernières années. Depuis toujours, l'histoire de la nation Gitxsan se transmettait à notre peuple par notre adaawx — notre histoire orale.
La couverture que je porte a une histoire. Il y a un emblème sur elle. On peut raconter cette histoire. L'adaawx représente l'histoire du peuple Gitxsan, comme nous la connaissons par l'entremise du tribunal; elle traduit la façon dont chaque groupe a un lien avec toutes les régions en ce qui concerne la fête, le fait de nommer les gens, la terre, le matériel et les choses sur la terre, le nom, l'histoire du nom. Gwalax yee'nst — il y a une carte qui fait état des noms. Le nom des chefs demeure le même. Ils sont toujours restés pareils et le demeureront pendant une très, très longue période. Mon nom, Jim Angus, est en fait Wii Aliist. Lorsque je mourrai, une autre personne deviendra Wii Aliist. Ce sera toujours Wii Aliist sur ce territoire.
Cette politique vise à concilier nos intérêts avec ceux de l'État en ce qui concerne les activités relatives au pétrole et au gaz naturel, qui sont des ressources non renouvelables, par conséquent non durables. Les décisions concernant l'aménagement des terres doivent être prises en collaboration avec le Gitxsan Huwilp et doivent le respecter. Pour parvenir à un consensus, qui représente notre principal outil de prise de décisions collectives, les deux parties doivent détenir des renseignements adéquats et avoir une compréhension commune.
Voici quelques-uns des principes communs de la politique : le titre, la souveraineté et les droits de la nation Gitxsan en ce qui concerne les éléments qui se trouvent à la surface du sol et ceux qui se trouvent sous sa surface; la nation Gitxsan a le droit de profiter économiquement de l'aménagement du lax yip; les particuliers, les gouvernements et les entreprises qui souhaitent proposer des activités d'aménagement sur le lax yip de la nation Gitxsan doivent couvrir les frais relatifs à l'embauche de décideurs de la nation Gitxsan à l'égard d'activités et de projets particuliers; toutes les activités relatives au pétrole et au gaz naturel doivent être approuvées par le Huwilp de la nation Gitxsan; toutes les décisions favorables prises par ce dernier doivent mener à des discussions et à des négociations sur le partage des recettes et d'autres avantages sur le plan économique; les frais relatifs à toutes les activités menées pendant le projet ou après celui-ci devront être couverts par le gouvernement ou l'entreprise responsable du projet, notamment en ce qui concerne les frais relatifs à la remise en état du site; et le processus est conçu pour faire concorder nos intérêts avec ceux du gouvernement.
M. Sebastian a parlé en détail de la restauration, et c'est l'un des domaines où le gouvernement manque totalement de respect dans la façon dont il nous traite — si l'on s'appuie sur les décisions judiciaires rendues. En ce qui me concerne, les gouvernements sont très en retard avec leurs lois et politiques, puisqu'ils n'ont pas concilié ces dernières avec les décisions judiciaires rendues au cours des dernières années.
Nous sommes intéressés à rencontrer tous les organismes gouvernementaux pour mener des discussions détaillées concernant la politique. Nous voyons qu'il est nécessaire de mieux se comprendre et de garantir que les décisions prises concernant le développement des ressources sur les terres de la nation Gitxsan tiennent compte des intérêts de cette nation.
Voici les enjeux qui nous concernent : on n'organise aucune consultation et on ne tient pas compte des intérêts de la nation Gitxsan — c'est une grave situation que nous vivons en ce qui concerne l'aménagement et les différentes entreprises; il faut davantage de ressources pour garantir que l'on détient suffisamment de renseignements à jour pour prendre des décisions éclairées liées à l'utilisation, à la planification et à la gestion de la terre; la politique est inadéquate et ne permet pas au gouvernement de s'acquitter de son obligation fiduciaire et d'aborder la question du titre et des droits de la nation Gitxsan; enfin, le gouvernement n'est pas prêt à discuter d'enjeux comme l'indemnisation, les possibilités économiques et la prise de décisions de la nation Gitxsan.
Nous formulons les recommandations suivantes — selon nous, il s'agit de l'une des parties les plus importantes de l'exposé que nous vous présentons, honorables sénateurs, aujourd'hui : le gouvernement doit mettre en œuvre une politique qui reconnaît la responsabilité juridique actuelle envers les Premières nations — ce qui suppose une conciliation de nos intérêts; accepter le processus décisionnel de la nation Gitxsan et s'en servir comme point de départ pour les activités relatives aux ressources menées sur la terre de la nation Gitxsan, le lax yip de cette nation; accepter et traiter de façon équitable les politiques de la nation Gitxsan relatives aux diverses ressources et à leur gestion du lax yip de cette nation; fournir des fonds à la nation Gitxsan et travailler dans le cadre d'entreprises conjointes pour mettre en place des bassins viables — ici, le mot important est « viables »; enfin, mettre en œuvre des stratégies axées sur les possibilités économiques qui profitent à la nation Gitxsan et répondent à ses intérêts au chapitre de la planification de la gestion des ressources et du partage des recettes. Dans ce domaine, l'une des choses les plus importantes, selon moi, est la gestion des ressources.
Le peuple Gitxsan doit être responsable de la gestion de nos ressources sur notre lax yip; c'est essentiel.
Ici aujourd'hui, j'ai entendu les personnes qui ont présenté les divers exposés parler de la situation relative au chômage que nous vivons dans nos collectivités. Dans la mienne, il y a des moments au cours de l'hiver — en janvier et en février — où, en raison du travail saisonnier, le taux de chômage atteint des 95 à 98 p. 100.
Pour ceux d'entre nous qui sommes assez chanceux pour avoir un emploi, la période des fêtes peut nous rendre très mal à l'aise puisque nous achetons des cadeaux pour nos petits-enfants et nos enfants en sachant très bien que notre voisin, par exemple, ou la personne vivant un peu plus loin, n'a presque rien dans ses poches. Cette situation doit changer. Nous devons modifier les conditions dans lesquelles vit notre peuple. Nous ne pouvons pas continuer à vivre comme nous le faisons actuellement.
En terminant, nous avons déployé des efforts collectifs pendant de nombreuses décennies, comme la plupart d'entre vous le savez. Nous sommes allés devant les tribunaux de la Colombie-Britannique, devant la Cour suprême de la Colombie-Britannique et devant la Cour suprême du Canada.
C'était une longue bataille pour notre peuple, pour la nation Gitxsan. Cela n'a pas été facile. J'ai vu bon nombre de membres de notre peuple s'en aller vers un monde meilleur, et un grand nombre d'entre nous faisons notre possible pour poursuivre le travail des personnes qui nous ont guidés.
Nous sommes ici pour dire que nous sommes prêts à collaborer avec toute personne qui souhaite exploiter le lax yip de la nation Gitxsan et qui peut le faire en utilisant des politiques, dans la mesure du possible, en collaboration avec un Huwilp de la nation Gitxsan.
[M. Angus parle en langue autochtone.]
L'une des choses que j'ai dites dans ma langue, c'est que notre cheminement en tant que peuple Gitxsan est parsemé d'embûches, mais nous devons continuer pour garantir que nous laissons un monde meilleur à nos petits-enfants, à nos arrière-petits-enfants et à ceux qui ne sont pas encore nés. Nous devons changer la façon dont les peuples de nos Premières nations au Canada vivent. Nous devons le faire. Nous ne pouvons pas laisser la situation telle qu'elle est.
Finalement, laissez-moi vous dire que j'ai été assez chanceux pour ne pas avoir été obligé de fréquenter un pensionnat. Je me suis rendu à la gare pour aller dans un pensionnat d'Edmonton, mais 15 minutes avant que le train n'arrive, quelques personnes et moi avons décidé de ne pas y aller.
Dieu merci, j'ai pu établir des liens avec mes parents et, ce qui est probablement encore plus important, avec ma grand-mère et sa sœur et avec la grand-mère et son frère de l'autre côté de ma famille et d'apprendre la tradition de notre peuple, d'apprendre notre culture et de comprendre la langue que je parle.
Sur ce, honorables sénateurs, je vous remercie du fond du cœur.
Le président : Merci beaucoup, chef Angus.
Vous avez fait allusion aux 33 000 kilomètres carrés dont votre nation est responsable. Vous avez soulevé la question de l'importance de la gouvernance et du contrôle sur les terres afin de connaître du succès, en tant que nation, dans le domaine des affaires. C'est le domaine que nous examinons. Nous examinons les problèmes des Autochtones qui se lancent en affaires et qui veulent connaître du succès et la façon dont ils peuvent y arriver. Cette question de gouvernance, cette question de contrôle sur les terres est fondamentale pour régler ces problèmes. À cet égard, vous nous avez fourni des renseignements qui seront très utiles pour notre étude et pour le travail que nous faisons.
Je veux vous remercier de nous avoir fourni ces renseignements. Je veux également vous remercier, en tant que chef héréditaire de votre nation, de l'exposé que vous nous avez présenté.
Le sénateur St. Germain : Chef Angus, vous avez dit que nous ne pouvions pas continuer à vivre comme nous le faisons de crainte de compromettre l'avenir des enfants. Le sénateur Sibbeston et moi, qui faisons partie de ce comité depuis beaucoup plus longtemps que la plupart des autres membres, en plus du sénateur Christensen, sommes d'accord avec cela, et c'est pourquoi nous sommes ici. Je ne crois pas qu'il existe une solution simple.
M. Angus : Non.
Le sénateur St. Germain : Je ne veux pas piéger personne, mais vous avez parlé d'un monde meilleur pour nos enfants, nos petits-enfants et les enfants qui naîtront dans la collectivité autochtone. C'est vraiment l'aspect fondamental. C'est ce que nous tentons de comprendre — comme vous l'avez dit, pourquoi, pendant la saison des Fêtes, des personnes ont tout, et d'autres rien.
J'ai vécu cette situation. Mon père était un travailleur de la construction métis, à moitié indien, qui ne travaillait jamais pendant l'hiver. Si nous avions de quoi à survivre pendant le mois de décembre, nous étions vraiment chanceux. Par conséquent, je comprends ce dont vous parlez.
Vous avez dit que vous avez eu de la chance de ne pas fréquenter un pensionnat, et, manifestement, un événement a changé les choses dans votre vie, c'est-à-dire que vous avez trouvé un emploi rémunéré.
Pouvez-vous nous aider à rédiger ce rapport, à donner des conseils aux autres?
Il y a le leadership, l'éducation, la gouvernance, et la gouvernance signifie les droits fonciers et Dieu sait quoi. Pouvez-vous nous dire quelque chose, en tant qu'Aîné et chef héréditaire, qui pourrait nous aider?
M. Angus : Merci de poser cette question. J'ai dit que j'avais été chanceux parce que j'ai pu apprendre les valeurs, celles qui nous caractérisent en tant qu'êtres humains, soit l'honneur, la confiance, le respect et l'humour.
Ma grand-mère disait toujours : « Je sais que tu ne comprendras pas ce que je te dis, mais assis-toi et écoute-moi. Un jour, cela aura du sens. »
Quand j'avais 15 ans, j'avais l'habitude de penser : « Mon Dieu, tu dois penser que je suis stupide. » Toutefois, même à mon âge, je ne fais que commencer à comprendre certaines des choses qu'elle m'a dites. C'est la valeur des liens entre les jeunes et les grands-parents des enfants.
Dans la société actuelle, les grands-parents sont tous trop occupés. Les enfants sont également tous trop occupés à faire d'autres choses. Les membres de nos Premières nations perdent leur langue et ils n'établissent pas de liens avec les parents et surtout pas avec les grands-parents.
L'autre petit commentaire que ma grand-mère me faisait est le suivant : « Si tu fais quelque chose, fais-le bien. »
[M. Angus parle en langue autochtone.]
Cette phrase signifie que vous devez être très exigeant, faire de votre mieux, peu importe ce que vous faites.
C'est ce genre de commentaires qui sont restés dans ma pauvre petite cervelle, et je vais faire tout mon possible pour les transmettre aux jeunes. Je ne crois pas que cela concerne uniquement les peuples des Premières nations. Je crois que nous, en tant qu'une société générale, devons transmettre nos enseignements à nos arrière-arrière, et ainsi de suite, petits-enfants.
Le sénateur St. Germain : J'ai bien aimé votre exposé. Il nous a appris des choses. Nous en apprenons toujours — certains d'entre nous avons des enfants plus vieux que vous — ou, du moins, j'apprends toujours.
Merci.
Le président : Merci beaucoup, chef Angus, d'avoir présenté votre exposé et de nous avoir fait l'honneur d'être présent avec nous aujourd'hui.
Un assez grand nombre d'élèves du collégial sont venus pour écouter notre comité, alors il ne fait aucun doute qu'ils auront également profité de votre exposé.
M. Angus : Merci.
Le président : Je voudrais simplement mentionner que certains membres du public sont des étudiants qui participent à un programme d'études des Premières nations, et qu'il y a aussi quelques étudiants en science politique. Mavis Erickson est la chargée de cours; elle est également avocate.
Honorables sénateurs, notre prochain témoin est M. Harry Pierre, du Conseil tribal de Carrier Sekani.
Harry Pierre, chef tribal, Conseil tribal de Carrier Sekani : Bon après-midi, honorables sénateurs. Je vais dire quelques mots dans ma propre langue.
[M. Pierre parle en langue autochtone.]
J'espère que vous, les membres du comité permanent, écouterez ce que j'ai à dire.
À une certaine époque, nous gouvernions le peuple. Dans chaque collectivité, il y avait un whip. Je ne sais pas vraiment si ce poste a déjà été occupé par une femme; il se peut qu'il ait toujours été occupé par un homme.
Si l'on commettait un meurtre dans la collectivité, et qu'une autre tribu était peut-être en cause, les whips des deux collectivités se réunissaient. Ils disaient : « Nous devons en faire part au peuple. Nous ne pouvons tolérer cela. Nous sommes des chasseurs; nous avons des armes. Nous ne voulons pas voir des accidents se produire. » On organisait alors un potlatch, soit un dîner. Au cours de cette réunion, le whip de l'une des collectivités prenait le bâton d'orateur et disait : « Nous sommes ici pour régler un problème très important — un meurtre. Cela touche votre famille, de même que la vôtre. Je veux que vous vous placiez en rangs là-bas. Cinq ou six orateurs vont se placer de chaque côté, du côté de la victime et du côté de l'accusé. Le whip disait : « Nous ne sortons pas d'ici avant d'avoir réglé ce problème. » C'est de cette façon que nous réglions les situations.
Les familles se réunissaient. On prenait un enfant d'un côté pour le placer dans une autre famille. L'enfant pleurait. La grand-mère de l'autre famille ramenait l'enfant. « Nous ne voulons pas que cet enfant pleure pour toujours. Alors, vous serez nos esclaves pendant les six prochains hivers, peut-être les sept prochains. » C'est de cette façon que cela se passait.
Les membres de la famille de l'accusé prenaient soin des membres de la famille de la victime. Ils répondaient à leurs besoins quotidiens. S'ils avaient besoin de combustible pour la maison, de faire sécher de la nourriture ou du poisson — nous n'avions pas l'électricité à ce moment-là — les membres de la famille de l'accusé s'en occupaient. Cela prenait beaucoup de temps à préparer. Les Aînés parlent encore de la graisse d'ours qui vivaient dans les montagnes — c'était un délice pour nous.
Puis, trois ou quatre après l'imposition de la peine, les membres de la famille de la victime faisaient un potlatch. Ils offraient du thé, et l'on parlait de quelque chose d'unique. Le whip recevait le bâton d'orateur et parlait de la façon dont les événements se déroulaient pour finalement parler aux membres de la famille qui avaient organisé le potlatch. Il leur disait : « Je crois que nous sommes ici dans un but précis. Quel est-il? » Les membres répondaient : « Nous sommes ici pour pardonner à la famille qui a tué notre fils il y a deux, trois, quatre ans. Nous sommes prêts à lui pardonner. Les membres de cette famille nous ont bien servis; je crois que nous ne voulons pas devenir trop paresseux. Nous voulons faire certaines choses nous-mêmes. » C'est de cette façon que l'on réglait les cas de meurtre.
Les cérémonies de mariage étaient très importantes. On parlait en détail de ces événements.
Il y a longtemps, on enseignait aux gens à devenir des guerriers. On entend encore parler de ces histoires aujourd'hui; l'une des grands-mères a écrit un livre à ce sujet.
On s'occupait de tout ça. Dans notre territoire, un chef s'occupait uniquement de la guerre.
Nous avions un chef responsable du bien-être général du peuple. Si les enfants d'une famille devenaient orphelins, par exemple, si la mère décédait, on enseignait à la famille comment survivre, comment coudre des vêtements, comment prendre soin des enfants, comment s'occuper d'une maison et comment préparer la nourriture en prévision de l'hiver. Si c'est l'homme qui décédait, on assignait deux ou trois personnes à la famille. Elles enseignaient aux membres la façon d'utiliser la terre, de ne pas faire de chasse excessive dans une région.
L'eau était propre en tout temps. On tentait même de nettoyer l'eau en accomplissant certains rituels sacrés — que je ne souhaite pas partager avec vous. Peut-être aimeriez-vous nous demander de vous en faire part un jour.
On s'occupait de tous les aspects de notre terre. Même lorsque les fruits des champs ne poussaient pas dans notre territoire, nous savions comment régler ce problème. Les membres de notre peuple savaient comment régler cela. On s'occupait de tout, notamment du bien-être des Aînés. Le whip disait : « Cet homme n'a aucune famille étendue. Il demeurera avec telle et telle famille ce mois-ci, et le mois prochain, il demeurera avec cette autre famille. L'hiver suivant, il restera dans cette famille. »
On faisait l'éloge des chasseurs pour leurs capacités. Dans notre territoire, on faisait l'éloge de toute personne qui affichait de bonnes capacités dans un domaine quelconque.
Nous ne sommes jamais allés dans un autre territoire pour chasser des animaux, les prendre au piège ou pêcher. Nous n'entrions dans un autre territoire que si nous y étions invités. Nous étions invités à pêcher à Babine lorsque le saumon ne remontait pas la rivière Fraser. Nous étions invités.
Tout est sacré pour nous, tout. Même les mots que je dis sont sacrés, les journées sont sacrées, tout est sacré.
Nous avions notre propre religion. Notre créateur a créé toute l'eau. Il a accompli beaucoup de choses. Notre créateur est né car sa mère a bu l'eau qui contenait des aiguilles de pin, et elle est devenue enceinte. Une fois né, il a grandi très rapidement.
Moi-même, je n'ai pas été chanceux. Je suis allé au pensionnat. Je suis resté là-bas de 1951 à 1957 et je me rappelle toujours mon numéro, le 12. Ce qui me dérangeait le plus au pensionnat, c'était le fait que nous devions traire les vaches — il y avait un vaste troupeau laitier — deux fois par jour, une fois tôt le matin, puis une autre fois vers l'heure du souper. Nous ne pouvions jamais boire de lait frais; nous n'avions que du lait écrémé.
Nous faisions l'élevage d'un grand nombre de poulets et de poules. De même, nous avions également un troupeau de quelque 1 200 bovins. Nous abattions beaucoup de bœufs à l'automne, mais nous n'en mangions jamais. Peut-être avons nous mangé les cervelles ou quelque chose comme cela, tout ce que les autres ne voulaient pas, c'est ce que nous avions, mais le reste du bœuf était placé dans une étamine et il était transporté par train. On nous disait qu'on l'envoyait vers une autre mission; je ne sais pas à quel point cela était vrai.
Nous avions l'habitude de produire du foin, beaucoup plus que le pensionnat n'en avait besoin. Les responsables du pensionnat avaient également l'habitude de vendre ce foin.
C'était la même histoire avec les porcs. Nous en élevions beaucoup. Nous n'en mangions jamais. C'était la même chose avec les œufs. Nous en ramassions beaucoup — deux, trois fois par jour, mais nous n'en mangions jamais. Même situation en ce qui concerne les poules — nous ne mangions jamais de viande de volaille.
On nous a simplement transformés en esclaves. Il n'existe aucune reddition de comptes véritable lorsqu'il s'agit des Premières nations.
Un grand nombre d'orateurs qui sont passés avant moi, ont parlé du partage des recettes. Celui-ci ferait toute une différence dans la vie des peuples des Premières nations. En ce qui concerne nos jeunes dans la rue qui consomment des drogues et de l'alcool, nous pourrions les aider et les réintégrer à notre collectivité et, avec un peu d'espoir, les guérir.
Comme vous le savez bien, la discrimination au Canada est très répandue. Si vous ne me croyez pas, rendez-vous à Blueberry Hill, par exemple, et voyez combien de membres des Premières nations s'y trouvent. C'est la même chose en ce qui concerne les prisons fédérales — qui sont à moitié remplies de membres des Premières nations, peut-être même plus que la moitié. La plupart des détenus sont des membres des Premières nations.
Nous n'aimons pas la façon dont le gouvernement fédéral tente de nous assimiler, tente de nous transformer en Blancs, ce que nous ne sommes pas.
Le saumon revient dans notre territoire à un certain moment au cours du mois de juin. Nous entendons le tonnerre. Pour aucune raison, nous entendons le tonnerre. Nous entendons les Aînés dire que c'est le saumon, que le saumon se tourne vers la montagne. C'est ce qu'ils veulent dire.
Trois semaines plus tard, lorsque nous entendons le tonnerre et voyons les éclairs au-dessus de nos lacs, il y a du saumon dans nos eaux. La puissance du tonnerre dénote la quantité de saumon qui revient. Nous avons cela.
Beaucoup de personnes croient que les membres des Premières nations n'apprennent pas comment prendre soin de leurs enfants. Ils n'en ont tout simplement jamais eu la chance. Le système judiciaire s'en prend continuellement à eux et éloigne leurs enfants — une autre forme d'assimilation. Je n'aime pas utiliser ces termes, mais c'est ce qui se produit. Cela ne sert à rien d'en parler dans le dos des gens.
Dans notre territoire, le système d'autonomie gouvernementale était très puissant jusqu'en 1950, environ. En 1950, le ministère des Affaires indiennes est entré dans notre vie. À Taché, la dernière personne à avoir bâti sa propre maison était un certain M. Felix, qui est décédé. Les habitants construisaient leur maison en rondins; ils étaient aidés d'un attelage de chevaux. Nous y allions dans nos temps libres. Nous les aidions. En fait, je suis l'un de ceux qui fabriquaient les bardeaux. J'étais jeune à cette époque, très jeune, mais on m'avait dit d'aller là-bas pour apprendre la façon de travailler.
Nous jouions dehors, et quelqu'un nous a dit : « Vous n'allez pas jouer toute votre vie. Allez regarder comment on fabrique des bardeaux. Regardez-le faire. » Alors, nous sommes allés là-bas, nous nous sommes assis, nous avons observé et nous avons rapidement compris que nous étions meilleurs que Harvey. Nous lui avons dit que nous étions meilleurs que lui. Il nous a répondu : « C'est bien. » Il m'a dit : « Je veux voir pendant combien de temps tu pourras continuer. Je veux que tu continues jusqu'au jour de ta mort. »
Je le regardais. Harvey était un homme âgé, et j'ai compris ce qu'il voulait dire.
Beaucoup de personnes tentaient de punir leurs enfants en vue de leur apprendre comment travailler pour rester sur la terre, et on appelle cela des mauvais traitements. On ne laissait pas ces personnes élever leurs enfants. Ils sont accusés et emprisonnés pour cette raison.
Beaucoup de jeunes filles de nos Premières nations ont été appréhendées dans des collectivités éloignées et placées dans des endroits comme Prince George, des jeunes filles de 14 et de 15 ans. Elles cherchaient leurs propres amis des Premières nations. Parfois, elles les trouvaient, mais la plupart du temps, elles tombaient sur la mauvaise personne. Elles devenaient toxicomanes et alcooliques. Après cela, il semble qu'elles n'étaient plus d'aucune utilité pour qui que ce soit.
Ce sont les répercussions de l'arrestation des jeunes sur nous. En fait, je suis parfois si en colère que je dis simplement aux responsables du système judiciaire de nous laisser tranquille et de nous laisser nous débrouiller. Nous disposions auparavant de notre propre système judiciaire.
Le tribunal populaire — même si vous brisiez une fenêtre, vous deviez vous présenter devant les membres de la famille et leur dire que c'était votre faute, et les membres de cette famille vous demandaient de la rembourser, pas en espèces, mais par du travail, car ils savaient que vous n'aviez pas d'argent.
Ce sont des enseignements très importants que nous avions.
De nos jours, une personne est accusée, elle va en prison, où elle reçoit trois repas par jour, puis elle retourne à la maison puisqu'elle a purgé sa peine. Je ne crois pas qu'il s'agisse d'une véritable sanction.
Notre peuple était très fier de ce qu'il était.
Aujourd'hui, je vois la boxe, le hockey et toutes sortes de sports. Avant, les gens pratiquaient également des sports. Certains soirs, on faisait de la raquette sur la neige. On faisait des courses. On portait des charges équivalentes et on faisait des courses.
La compétition consistait parfois à simplement se rendre jusqu'au sentier de piégeage ou, parfois, à s'y rendre et à revenir.
C'est tout ce que j'ai à dire.
Le président : Merci beaucoup d'avoir présenté votre exposé. Avez-vous des questions?
Le sénateur St. Germain : Merci beaucoup, chef, d'être venu ici et de nous avoir offert votre témoignage qui vient du fond du cœur.
Vous avez dit que, dans les années 50, le MAINC, c'est-à-dire le ministère des Affaires indiennes et du Nord Canada, est entré dans votre vie. Pouvez-vous nous dire ce que cela a changé à cette époque?
M. Pierre : Oui, des représentants du ministère sont entrés dans le village de Taché, d'où je viens. Ils nous ont dit que nous pouvions chasser l'orignal en tout temps, ce que nous faisions de toute façon. Ils nous ont dit qu'ils allaient tous nous identifier dans le cas où nous tomberions dans le lac ou quelque chose du genre, alors ils ont pris les empreintes digitales de chacun d'entre nous. Personne ne connaissait ses droits. Je ne veux pas mentionner le nom de l'agent du ministère — peut-être est-il lié à vous, je ne le sais pas.
Le sénateur St. Germain : Je ne crois pas, mais on ne sait jamais.
M. Pierre : Les responsables du ministère des Affaires indiennes ont pris les empreintes digitales de tout le monde, même celles d'un homme aveugle.
L'année suivante, ils sont venus dans notre village. Comme vous le savez, nous utilisons des chiens. Nous les entraînons; ils sont bons pour le transport de matériel. Ils sont venus et ont abattu tous nos chiens. Ils ont parlé d'une maladie canine qui circulait et ont dit que c'était comme ça que la grippe de 1918 avait commencé. Ils ont dit qu'elle pourrait réapparaître. C'est pourquoi ils allaient tuer tous les chiens pour garantir que nous ne l'attrapions pas. Nous avons dû repartir à zéro. En fait, une personne a dû se rendre à Takla Landing pour aller chercher quelques chiens pour notre village. Nous avons vécu de telles situations.
J'ai commencé à fréquenter le pensionnat en 1951. C'est ce que je voulais dire lorsque j'ai dit que ma vie avait complètement changé.
Le sénateur St. Germain : Chers collègues, j'imagine que j'ai posé ma question principalement à titre informatif, car si nous ne savons pas ce qui est arrivé à ces personnes, nous ne serons peut-être jamais en mesure de régler les problèmes auxquels elles font face à l'heure actuelle dans notre société.
Merci beaucoup, chef. Je suis très honoré. Merci.
Le président : Merci beaucoup d'avoir présenté votre exposé.
M. Pierre : Je suis désolé, j'aurais pu présenter un meilleur exposé; je remplaçais quelqu'un d'autre.
Le président : Nous avons entendu tous nos témoins.
Comme les étudiants et d'autres personnes sont encore présents, j'aimerais prendre un moment pour donner un aperçu du Sénat et de notre comité et de la façon dont nous travaillons — simplement pour vous renseigner.
Le Sénat fait partie du Parlement du Canada. Comme vous le savez peut-être, le Parlement comprend la Chambre des communes, dont les membres sont élus. Environ tous les quatre ans, il y a des élections. Les candidats élus se rendent à Ottawa, où ils représentent toutes les différentes régions du pays. Il y a 308 députés.
Le Sénat est l'autre partie du Parlement. Il y a 105 sénateurs. Nous sommes nommés par le Premier ministre. Nous représentons nos régions. Nous sommes responsables de passer en revue toutes les lois. Tous les projets de loi qui passent par la Chambre des communes se rendent inévitablement devant le Sénat.
Nous réservons le même traitement à tous les projets de loi. Nous faisons trois lectures de chaque projet de loi. Nous adoptons un projet de loi, ou nous l'amendons, si nous pensons qu'il en vaut la peine. C'est un processus du Parlement du Canada : les projets de loi émanent de la Chambre des communes et, une fois qu'ils sont adoptés, ils sont présentés devant le Sénat.
On nous qualifie parfois de chambre de second examen objectif. Comme vous pouvez le constater, nous sommes tous un peu plus vieux et peut-être un peu plus sages que les jeunes membres de la Chambre des communes; alors, nous avons recours à notre expérience et à notre sagesse pour passer en revue toutes les lois proposées par les membres de la Chambre des communes et adopter le projet de loi ou l'amender.
C'est de cette façon que l'on promulgue les lois au Canada.
En plus de passer les lois en revue, le Sénat s'occupe également d'un grand nombre de comités, dont le présent comité, c'est-à-dire le Comité des peuples autochtones. Notre comité est responsable des projets de loi ou des lois ayant trait à des enjeux autochtones.
Un assez grand nombre de projets de loi ont touché les Autochtones. Lorsque j'ai été tout d'abord nommé au Sénat en 1999, nous avons traité la question de la revendication territoriale de la nation Nisga'a. Plus récemment, on a conclu une entente sur l'autonomie gouvernementale pour la Première nation de Westbank, qui n'est pas très loin d'ici, dans la région de Kelowna. Le printemps dernier, un projet de loi traitait des Inuits du Labrador. Une législation fédérale du ministère des Affaires indiennes permet de s'occuper d'autres questions.
Notre comité mène également des études. À l'heure actuelle, nous nous occupons de la participation des Autochtones au développement économique. Nous voyageons partout au pays et nous voyons que les Autochtones commencent à mener des affaires. C'est un phénomène, un événement très positif, et nous voulions étudier ce sujet pour connaître le pourquoi et le comment de cette situation. Même s'il y a des régions dans notre pays où les Autochtones s'en sortent très bien, il y a d'autres régions où ils ne s'en sortent pas aussi bien. Nous voulions examiner les facteurs qui mènent au succès, de même que ceux qui empêchent les Autochtones de se lancer en affaires.
C'est pour cette raison que nous sommes ici. Nous avons entrepris cette étude en novembre dernier. Nous avons entendu un grand nombre de témoins à Ottawa. Nous avons entendu le témoignage d'universitaires. Nous avons écouté les représentants gouvernementaux, notamment ceux des Affaires indiennes, des Ressources naturelles et du vérificateur général. Nous avons également entendu le témoignage des représentants de l'APN, de même que de ceux provenant d'organismes métis et inuits. Par conséquent, nous souhaitions visiter les diverses régions du pays pour entendre ce qu'avaient à dire les chefs et les membres des collectivités qui participent aux affaires, pour entendre de première main leurs expériences.
C'est pourquoi nous sommes ici aujourd'hui. Nous avons décidé de commencer par la Colombie-Britannique. L'endroit où nous sommes aujourd'hui est loin d'Ottawa, alors nous avons décidé de venir dans le nord de la Colombie-Britannique pour écouter les Autochtones de la région. Demain, nous nous rendons à Vancouver pour entendre les chefs autochtones de cette région. Par la suite, nous allons à Kelowna, puis à Calgary. C'est là que prendra fin cette semaine d'audiences.
Un peu plus tard au cours de l'automne, nous irons en Saskatchewan et au Manitoba. Puis, au début de l'année prochaine, nous nous rendrons en Ontario et au Québec, puis probablement dans les Maritimes, d'où provient le sénateur Lovelace Nicholas.
Je vais simplement présenter quelques-uns des sénateurs qui siégeaient aujourd'hui. Je vous présente donc Ione Christensen, du Yukon, de même que Sandra Lovelace Nicholas, qui a été nommée tout récemment. Elle vient du Nouveau-Brunswick, à l'est de notre pays. Nous avons également accueilli Rob Zimmer, qui a été également nommé récemment. Le sénateur Zimmer provient du Manitoba, où se trouvent tous les bisons, je crois. Je vous présente également Larry Campbell, dont vous avez peut-être entendu parler. Il vient de Vancouver. Nous avons également accueilli Gerry St. Germain, lui aussi de la Colombie-Britannique, mais originaire du Manitoba. Je me nomme Nick Sibbeston, et je viens des Territoires du Nord-Ouest. Je suis sénateur depuis maintenant environ six ans. Je préside le comité.
Je suis tellement heureux que des étudiants et d'autres personnes soient venus nous voir et observer le travail que nous faisons. Nous travaillons vraiment fort et nous faisons tout notre possible. Par l'entremise de notre comité sénatorial, nous espérons jeter de la lumière sur certains sujets et servir notre pays.
Nous présenterons notre rapport dans environ un an. Notre travail sera probablement interrompu par une élection, qui aura lieu à un certain moment au printemps prochain. Les membres de notre comité ne peuvent se déplacer au cours d'une élection. Dans une telle situation, nous devons cesser notre travail jusqu'à la formation d'un nouveau gouvernement.
Nous continuerons de travailler et de voyager partout au pays, et dans environ un an, nous préparerons un rapport; alors gardez l'œil ouvert. Nous rédigerons un rapport comprenant des recommandations à l'endroit du gouvernement concernant les améliorations qu'il peut apporter aux services qu'il offre aux Autochtones.
De même, cela doit aller dans les deux sens. Les membres des Premières nations doivent également faire leur part, s'intéresser à la question et faire tout leur possible pour participer.
Nous formulerons des recommandations qui s'appliqueront vraisemblablement au gouvernement, de même qu'aux Autochtones de notre pays.
Sur ce, je vous remercie encore du fond du cœur.
La séance est levée.