Délibérations du comité sénatorial permanent des
Peuples autochtones
Fascicule 5 - Témoignages du 27 septembre 2006 - Séance de l'après-midi
WINNIPEG, le mercredi 27 septembre 2006
Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujourd'hui, à 13 h 26, dans le but d'étudier, afin d'en faire rapport, la participation des peuples et entreprises autochtones aux activités de développement économique au Canada.
Le sénateur Gerry St. Germain (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Le comité a été chargé d'étudier, afin d'en faire rapport, la participation des peuples et entreprises autochtones aux activités de développement économique au Canada. Nous accueillons aujourd'hui M. Joe Morrisseau, directeur exécutif auprès du ministère des Affaires autochtones et du Nord, Manitoba, et M. Bob Monkman, directeur des relations communautaires, Division des relations avec les Autochtones, chez Hydro-Manitoba.
Joe Morrisseau, directeur exécutif, ministère des Affaires autochtones et du Nord, Manitoba : Je tiens d'abord à remercier le comité de m'avoir invité à comparaître devant lui, au nom du sous-ministre, qui est en vacances. Je le remplace.
J'ai préparé un document PowerPoint, qui vous a été distribué. Je ne m'attarderai que sur certaines pages pour aller plus vite. J'ai aussi quelques données démographiques générales à vous transmettre sur les Autochtones. Je voudrais vous parler de deux initiatives précises qui ont été lancées au Manitoba : la stratégie visant à renforcer la participation des Autochtones à l'économie, ou le plan SAPE, et le programme Combler l'écart, qui a été créé dans la foulée des pourparlers de Kelowna, en novembre dernier.
La stratégie visant à renforcer la participation des Autochtones à l'économie découle d'un rapport du groupe FPTA, qui est composé de représentants fédéraux, provinciaux, territoriaux et autochtones. Le rapport a été adopté à l'unanimité lors d'une réunion du groupe à Winnipeg, en mai 2000. Assistaient à cette réunion les ministres responsables des affaires autochtones à l'échelle fédérale, provinciale et territoriale, et les dirigeants de cinq organisations nationales : l'APN, le RNM, le CPA, l'ITC et l'AFAC. Comme certains d'entre vous le savent peut-être déjà, le programme Combler l'écart a vu le jour en novembre dernier, en Colombie-Britannique, après qu'on eut constaté qu'il existait un écart considérable entre les Autochtones et les Canadiens en général dans plusieurs domaines, dont les suivants : santé, éducation, logement, relations et possibilités économiques. Lors de la Conférence des premiers ministres de l'Ouest, les premiers ministres ont rencontré les dirigeants des organisations autochtones nationales, reconfirmé leur engagement de combler l'écart, et discuté des moyens d'obtenir la collaboration du gouvernement fédéral.
Le tableau de la page 2 du document illustre tout simplement les taux de croissance annuels observés chez les Autochtones. La population autochtone augmente presque 10 fois plus vite que la population non autochtone au Manitoba. C'est beaucoup.
Le tableau de la page 3 donne un survol de la situation des Autochtones au Manitoba. Selon le recensement de 2001, le Manitoba comptait cette année-là 1,1 million habitants, les Autochtones représentant presque 14 p. 100 de la population. Toujours en 2001, les enfants autochtones représentaient jusqu'à 23,1 p. 100 de tous les enfants âgés de 0 à 14 ans, et 25 p. 100 de tous les enfants âgés de 0 à 4 ans. Entre 40 et 50 p. 100 des Autochtones, ce qui représente entre 60 000 et 70 000 habitants, vivaient à Winnipeg.
Quand nous parlons de participation à l'économie, nous faisons allusion à un concept très large qui englobe non seulement le travail, mais également l'emploi, le chômage, le sous-emploi, l'éducation et la formation, les petites entreprises, les investissements et le développement communautaire. Nous devons prendre des mesures pour éliminer les obstacles à la pleine participation des Autochtones à l'économie.
Je sais que votre mandat est d'étudier la participation des peuples autochtones aux activités de développement économique. Or, nous sommes d'avis que, peu importe l'enjeu, l'éducation est la clé de tous les succès. Si nous ne nous attaquons pas à cette question, nous ne réussirons pas à régler les problèmes touchant la santé, la justice, la famille et les enfants qui frappent les communautés autochtones. L'éducation, à notre avis, joue un rôle capital en ce qu'elle crée des possibilités pour le démarrage d'entreprises autochtones.
Vous trouverez à la page 5 quelques exemples des écarts qui existent. En 2001, le revenu moyen des Autochtones âgés de 50 ans et plus s'établissait à 12 5005 $ comparativement à 21 600 $ pour les non-Autochtones. L'écart était à peu près le même il y a cinq ans. Les Autochtones âgés de 15 ans et plus touchaient un salaire moyen de 10 000 $, et les non-Autochtones, de 19 000 $. Nous pouvons voir, d'après ces statistiques, que la situation s'est stabilisée au cours des cinq dernières années.
Les niveaux de revenu varient beaucoup d'un groupe à l'autre. Par exemple, d'après le recensement de 2001, le revenu moyen des Métis était de 15 900 $, et celui des Indiens de l'Amérique du Nord, de 10 500 $. Toujours d'après les mêmes données, le revenu moyen des Indiens de l'Amérique du Nord vivant à l'intérieur d'une réserve était de 8 900 $. L'écart est donc considérable.
Pour ce qui est du bien-être économique et des taux d'emploi, les Autochtones affichaient un taux d'emploi de 47,8 p. 100 comparativement à 62 p. 100 pour les non-Autochtones. Il s'agit d'un écart de 17 points de pourcentage. En 1996, l'écart était de 23 p. 100 en 1996. Ces chiffres sont encourageants, même si la période qui sépare les deux recensements est trop courte pour dégager une tendance. Encore une fois, les taux d'emploi chez les Autochtones du Manitoba varient d'un groupe à l'autre.
À la page 7, il est question de la participation des Autochtones à l'éducation, selon leur niveau de scolarité. Le tableau illustre l'écart qui existe entre la population autochtone et la population en général, en se fondant sur le taux de participation et les indices des taux de chômage en fonction du niveau de scolarité. Pour calculer les indices, il faut diviser le pourcentage applicable aux Autochtones par le pourcentage s'appliquant à la population en général pour chacune des catégories d'étude respective. Une valeur-indice supérieure à 1 indique qu'il y a, en proportion, plus d'Autochtones dans cette catégorie, alors qu'une valeur-indice inférieure à 1 indique qu'il y a, en proportion, moins d'Autochtones dans cette catégorie. Sauf pour ce qui est de la catégorie « certaines écoles secondaires », les taux de participation des Autochtones de l'Ouest sont identiques ou supérieurs à ceux de la population en général, peu importe le niveau de scolarité atteint. Les Autochtones de l'Ouest titulaires d'un diplôme d'études secondaires participent également plus activement au marché du travail que ne le fait la population en général, ce qui est positif pour le marché de l'emploi et les besoins futurs de main-d'œuvre du Canada.
Le tableau de la page 8 indique que, même si le taux de participation des Autochtones est plus élevé que celui de la population en général, le taux de chômage est une fois et demie à trois fois plus élevé chez les Autochtones que chez les Canadiens en général dans l'Ouest du Canada. Il s'agit-là d'un point important. Les taux de chômage sont au moins deux fois plus élevés chez les Autochtones que chez les Canadiens en général, peu importe le niveau de scolarité. Dans certains cas, les valeurs-indices sont quatre fois plus élevées.
Nous avons analysé certaines études menées dans l'Ouest du Canada, notamment un sondage réalisé par la Canada West Foundation, à Calgary, qui a examiné de près la situation des collectivités autochtones de l'Ouest du Canada. D'après la Canada West Foundation, même si les taux de participation des Autochtones sont similaires à ceux de la population en général, les Autochtones ont moins de chance de trouver un emploi. Le taux de chômage chez les Autochtones est trois fois celui de la population en général. Autre point : le niveau de scolarité est considéré comme un facteur de succès important. D'après le sondage, les habitants de l'Ouest considèrent que l'amélioration du niveau d'éducation et de la situation sur le marché du travail des Autochtones devrait constituer une priorité pour le gouvernement. De plus, les programmes devraient être fondés sur des idées et des stratégies efficaces qui ont été appliquées à des situations réelles. Ils devraient également être évalués de manière à pouvoir être adaptés aux Autochtones.
Le tableau 12 décrit les mesures prises par le Manitoba pour améliorer la participation des Autochtones à l'économie de la province. Cette participation passe par l'éducation, la formation, l'emploi, la création de petites entreprises, les investissements, le développement communautaire et l'élimination des obstacles à une pleine participation à l'économie. Nous devons améliorer les initiatives existantes et en élaborer de nouvelles, en mettant l'accent sur les objectifs et non les programmes. Nous devons établir de nouvelles stratégies pour atteindre les objectifs suivants : par exemple, favoriser la création d'entreprises et le développement de l'esprit d'entreprise chez les Autochtones, pour ne mentionner que celui-là. Par ailleurs, nous devons, pour éliminer les obstacles, accroître le nombre de diplômés et venir en aide aux jeunes à risque. Les Autochtones doivent avoir accès à des programmes qui leur permettent d'acquérir de l'expérience de travail à un très jeune âge. Il est nécessaire, pour cela, que les gouvernements et les communautés autochtones collaborent avec les chefs d'entreprise et les employeurs.
Au début de mon exposé, je vous ai parlé du programme Combler l'écart, qui s'étend sur dix ans, soit jusqu'en 2016. Il s'agit d'une stratégie-cadre pangouvernementale qui vise à combler l'écart socio-économique qui existe entre les Autochtones et les non-Autochtones au Manitoba. Le programme de dix ans est coordonné par un comité interministériel formé de cadres supérieurs de chaque ministère. C'est le ministère des Affaires autochtones et du Nord qui en responsable. Le travail ne fait que commencer. Le comité interministériel a tenu sa première réunion. Des groupes de travail vont être créés au mois d'octobre dans les cinq domaines suivants : éducation et petite enfance, relations et reddition de comptes, logements et infrastructures, santé et bien-être, et débouchés économique. Je tiens à préciser que nous voulons, par cette démarche, renforcer, et non pas remplacer ou reproduire, les processus interministériels existants. Le succès du programme dépend pour beaucoup des efforts des autres ministères. Le ministère des Affaires autochtones ne peut combler l'écart à lui seul. Les ministères de la Santé et de l'Éducation doivent faire leur part. Nous aurons d'ailleurs besoin de leur aide lorsque nous discuterons du financement de nouvelles initiatives. En effet, nous voulons créer un environnement positif pour les initiatives ministérielles, les inscrire dans un cadre qui prône une plus grande coordination au niveau de la planification, du développement et de la mise en oeuvre.
Il n'est pas question, ici, de combler les écarts par défaut en adoptant une approche purement statistique. Compte tenu des caractéristiques de la population autochtone, en l'occurrence la structure par âge, il n'est pas toujours possible d'établir une équivalence numérique. Divers facteurs doivent être pris en compte lorsque vient le temps de mesurer les progrès accomplis. Par exemple, comme les populations plus jeunes se trouvent à un stade différent de leur cheminement de carrière, on ne peut raisonnablement s'attendre que ce groupe touche le même revenu moyen.
Le programme Combler l'écart nous donne l'occasion de coordonner les efforts du gouvernement provincial, de ses partenaires au niveau fédéral, de la communauté autochtone et du secteur privé. Nous voulons amener tous ces intervenants à mettre l'accent sur un objectif que tous les Canadiens jugent importants : améliorer la qualité de vie des Autochtones, peu importe l'endroit où ils vivent. Faire de cette vision une réalité exige l'adoption de mesures qui peuvent changer le monde.
Black Elk a dit, « Une vision sans action n'est qu'un mirage; une action sans vision n'est qu'une vaine occupation; mais une vision qui débouche sur l'action change le monde. »
Je vais faire parvenir une copie de ce rapport au comité. Le premier ministre du Manitoba, M. Doer, a organisé un sommet sur le développement des entreprises autochtones et l'intégration des Autochtones au marché du travail. Il a mis sur pied un comité consultatif économique composé de représentants autochtones et de chefs d'entreprise du Manitoba. Le rapport, qui a été publié en 2005, contient des renseignements fort intéressants.
Bob Monkman, directeur, Relations communautaires, Division des relations avec les Autochtones, Hydro-Manitoba : Je tiens à remercier le comité d'avoir invité Hydro-Manitoba à présenter un exposé sur les activités économiques au sein des communautés autochtones. J'aimerais vous faire part des initiatives que nous avons entreprises à ce chapitre.
Je m'excuse. Je me suis rendu compte, aujourd'hui, que le mémoire devait être déposé dans les deux langues. J'exploite un camp de chasse à l'orignal et je viens tout juste d'y revenir, ce qui fait je n'ai pas eu beaucoup de temps pour me préparer.
Hydro-Manitoba compte 5 500 employés, dont 700 sont des Autochtones. L'objectif d'Hydro-Manitoba est d'être reconnu comme un leader en Amérique du Nord dans les domaines suivants : sécurité, tarifs, fiabilité, satisfaction du client et gestion de l'environnement. Nous sommes sensibles aux besoins des clients, des employés et des intervenants. Nous savons aussi à quel point il est important d'améliorer les relations de travail avec les Autochtones. L'entreprise tient d'ailleurs à jouer un rôle de file à cet égard.
Sur ce point, il est essentiel d'effectuer des investissements importants dans les régions où vivent et travaillent les Autochtones. Nous devons, si nous voulons renforcer les relations de travail avec les Autochtones, concilier les intérêts et les ambitions des Autochtones dont l'identité est définie par les liens culturels et spirituels traditionnels qui les rattachent aux cours d'eau et aux terres que nous exploitons.
Les Autochtones participent de façon importante à nos activités de planification, de construction, de fonctionnement et d'entretien. Nous entretenons des relations économiques avec divers intervenants : stagiaires, employés, fournisseurs, clients, entrepreneurs, ainsi de suite. Nos relations avec les Autochtones de nombreuses collectivités du Nord sont différentes de celles que nous avons avec les Autochtones qui vivent en milieu urbain et dans les régions rurales du sud.
Notre objectif stratégique, en tant qu'entreprise, est de donner l'exemple en renforçant les relations de travail avec les Autochtones. Nous voulons, entre autres, régler et gérer les problèmes qui découlent des projets existants, améliorer les possibilités d'emploi et de carrière que nous offrons aux Autochtones, continuer de parfaire les programmes de formation et de maintien en poste qui s'adressent aux employés autochtones, promouvoir et encourager les relations d'affaires avec les entreprises autochtones.
La main-d'œuvre de l'entreprise est très spécialisée : 75 p. 100 des employés travaillent dans les domaines du commerce, de la finance, de la technologie et du génie. Nos effectifs doivent être représentatifs des collectivités dans lesquelles nous vivons et travaillons. Voici les objectifs que nous nous sommes fixés en matière d'emploi autochtone pour 2007 : postes de cadre, 12 p. 100 d'Autochtones; Autochtones du Nord, 37 p. 100; postes de gestion, 5,5 p. 100; postes spécialisés, 6 p. 100. Récemment, Hydro-Manitoba a dépassé l'objectif fixé pour les postes de cadre, de même que celui fixé pour l'emploi d'Autochtones du Nord.
Nous avons constaté que l'adoption d'une approche intégrée axée sur le recrutement, la sélection, la formation, le maintien en poste et l'avancement est bénéfique. Notre société offre des emplois de courte durée dans le domaine de la construction, de la formation en cours d'emploi aux employés qui veulent travailler dans le domaine de la construction, des emplois à long terme dans le domaine du fonctionnement et de l'entretien, de la formation en cours d'emploi aux employés de l'entreprise, des stages de formation préalables à l'emploi dans les domaines de l'exportation et de l'entretien, et de la formation en cours d'emploi auprès d'entrepreneurs qui fournissent des services d'exploitation et d'entretien.
Nous appliquons une politique d'achat dans le Nord qui existe depuis le début des années 90. Au cours des dix dernières années, Hydro-Manitoba a acheté pour 300 millions de dollars de biens et de services d'entreprises autochtones. Cette politique favorise la participation d'entreprises autochtones du Nord à nos activités économiques. Elle permet d'entreprendre des initiatives dans les domaines suivants : échange d'informations, projets axés sur les capacités des entreprises de la collectivité, négociations directes, appels d'offres restreints et projets conjoints avec des entreprises non autochtones.
Concernant nos stratégies de développement à long terme, nous comptons poursuivre la construction de centrales hydroélectriques dès qu'il sera possible de le faire. Nous sommes en train d'élaborer des plans pour tirer partie des marchés d'exportation. Nous entendons favoriser la participation des Autochtones aux projets de développement à long terme en tenant, par exemple, de vastes consultations, en faisant appel à leur savoir traditionnel lors des processus d'évaluation environnementale, en accordant des contrats à des entreprises autochtones du Nord, en discutant des effets négatifs sur l'environnement des projets avant la construction, en créant de nouvelles possibilités de revenu au moyen de projets axés sur les exportations.
Nous voulons protéger autant que possible les droits et les intérêts des Autochtones en mettant sur pied des projets qui sont viables sur le plan économique et acceptables sur le plan environnemental. Pour y arriver, nous devons aligner les intérêts des collectivités autochtones sur les nôtres en fournissant aux habitants de celles-ci les moyens d'améliorer leur bien-être sur le plan socio-économique.
Hydro-Manitoba est heureuse de vous faire part des mesures qu'elle a prises pour favoriser la participation des Autochtones dans ses activités économiques. Vous voulez savoir quels conseils nous pouvons donner à d'autres à ce chapitre. Nous recommandons que les entreprises définissent leurs intérêts dès le début du processus de planification. Elles doivent clarifier leurs besoins en matière de participation autochtone, les résultats qu'elles souhaitent obtenir et les procédés qu'elles entendent utiliser pour y arriver. Cette démarche renforce le processus de développement. Ensuite, nous recommandons l'élaboration de stratégies pour améliorer les relations interculturelles et venir à bout des problèmes et des défis culturels qui existent en milieu de travail. Enfin, nous encourageons les gens à repenser les préjugés qu'ils entretiennent. Il faut promouvoir la compréhension et le respect des cultures autochtones, accepter les points de vue différents.
Vous voulez savoir ce quelles mesures le comité doit recommander au gouvernement fédéral. Nous avons quatre suggestions à faire à ce sujet. Premièrement, le gouvernement fédéral doit accorder des capitaux de placement aux groupes autochtones qui souhaitent investir dans des activités de développement économique. Deuxièmement, le gouvernement fédéral doit consacrer plus de ressources aux programmes d'éducation et de formation communautaires qui mettent l'accent sur l'alphabétisation et l'acquisition de compétences techniques et de compétences en affaires, afin que les personnes aient l'occasion d'acquérir les connaissances dont ils ont besoin pour occuper des postes techniques et spécialisés. Troisièmement, le maintien du programme Partenariat pour les compétences et l'emploi des Autochtones doit être assuré. Quatrièmement, le gouvernement fédéral doit fournir des incitatifs pour former, employer, recruter, encadrer et conseiller les Autochtones et enfin établir des partenariats avec eux sur le plan économique.
Vous voulez savoir quels sont les problèmes et les difficultés auxquels nous avons eu à faire face. D'abord, nous avons, en tant que société, le devoir de promouvoir la participation des Autochtones à nos activités économiques. Or, il est difficile de recruter des Autochtones qui possèdent les compétences requises pour occuper des postes techniques ou spécialisés loin de chez eux. Nous avons de la difficulté aussi à nous doter, à l'interne, des capacités qui nous permettront de gérer les nouveaux processus de participation et les problèmes qui y sont associés. Enfin, nous devons composer les problèmes environnementaux dont nous avons hérités.
Vous voulez savoir quelle est la raison de ces difficultés? D'abord, le temps et l'argent qui sont consacrés aux efforts visant à accroître la participation des Autochtones ne peuvent être absorbés par un projet. Les programmes d'études offerts dans de nombreuses collectivités autochtones ne permettent pas aux étudiants d'acquérir les connaissances et les compétences de base requises pour occuper des postes techniques ou spécialisés.
Vous voulez savoir quelles mesures doivent être prises pour surmonter ces difficultés. À notre avis, les cadres supérieurs doivent trouver de nouvelles façons de relever les défis que présentent les partenariats conclus avec des entreprises autochtones. Ils doivent encourager l'acquisition continue du savoir et mettre en place des programmes et des politiques qui permettent aux Autochtones de participer davantage aux activités économiques.
Vous voulez savoir ce qui nous a aidés à réussir. Quatre grands facteurs ont contribué à notre succès. Premièrement, nous avons procédé à une évaluation commerciale et stratégique de nos intérêts et encouragé les cadres supérieurs à trouver des solutions aux problèmes de concert avec les dirigeants autochtones. Deuxièmement, nous avons mis sur pied un cadre pour faciliter l'établissement de relations avec les communautés autochtones qui ont des intérêts divergents. Troisièmement, nous nous sommes efforcés d'éliminer l'incidence négative qu'ont les mythes, les stéréotypes et les préjugés liés aux peuples autochtones sur l'efficacité des employés et de la société. Quatrièmement, lorsque nous entreprenons des projets qui touchent les Autochtones, nous collaborons dès le début avec eux de manière à développer des relations de travail efficaces et soutenues.
Ekosi. Meegwech. Merci.
Le président : Est-ce que certaines centrales d'Hydro-Manitoba se trouvent sur des terres traditionnelles autochtones? Est-ce que vous partagez les recettes tirées de l'exploitation des ressources une fois qu'il est établi que les centrales se trouvent sur des terres autochtones?
M. Monkman : Nous ne partageons nos recettes avec aucune des collectivités autochtones. La raison est la suivante : nous relevons du gouvernement provincial. Par conséquent, le partage des recettes doit se faire par l'entremise de la province, et non par l'entremise d'Hydro-Manitoba.
Le président : Est-ce que la centrale de Kelsey, par exemple, se trouve sur des terres cédées en vertu d'un traité?
M. Monkman : Non.
Le président : Est-ce que ces terres font l'objet de discussions dans le cadre des négociations touchant le règlement des revendications territoriales ou les droits fonciers issus des traités?
M. Monkman : Plusieurs terres visées par les droits fonciers issus de traités ont été cédées à certaines des collectivités dans le cadre d'ententes de règlement et autres accords qui ont été conclus par le biais de la Convention sur l'inondation des terres du Nord et les ententes sur les revendications territoriales globales.
Le sénateur Peterson : Ma question s'adresse à M. Morrisseau. Vous avez parlé d'une nouvelle initiative dans votre exposé. Le tableau de la page 12 décrit les mesures que vous aimeriez prendre pour améliorer la participation des Autochtones à l'économie de la province. Est-ce que le gouvernement doit, pour arriver à financer ou mettre en œuvre cette initiative, partager les recettes tirées de l'exploitation des ressources dans le Nord? Est-ce qu'il doit utiliser une partie des recettes générées par les projets d'aménagement hydroélectrique pour élaborer un plan stratégique à plus long terme?
M. Morrisseau : Je ne sais pas comment répondre à la question. La prochaine centrale, qui porte le nom de Wuskwatim, va être aménagée non loin du territoire d'une communauté crie. En anglais, elle porte le nom de Nelson House. Elle a un nom cri, et je n'ose pas le prononcer, mais il s'agit de la première nation Nelson House, qui est se trouve juste au nord de Thompson. Une entente a été conclue entre Hydro- Manitoba et la collectivité de Nelson House. En vertu de cette entente, la première nation de Nelson House est copropriétaire de la centrale. Je crois que l'entente a été conclue en mai ou en juin dernier.
M. Monkman : Elle a été signée le 6 juin.
M. Morrisseau : Ce projet va générer des recettes pour la collectivité tant et aussi longtemps qu'il y va y avoir de l'eau dans les rivières et que la centrale va produire de l'électricité.
Le gouvernement du Manitoba et le gouvernement fédéral ont essayé, dans le passé, de mettre sur pied des programmes d'aide à l'intention des collectivités touchées par le projet d'aménagement hydroélectrique. M. Monkman a parlé de la Convention sur l'inondation des terres du Nord, qui a été signée quand les premières centrales hydroélectriques ont été construites sur la rivière Churchill et le fleuve Nelson. Il n'a pas été facile de mettre en œuvre la convention. Il a fallu tenir d'autres négociations et conclure des ententes globales. Ces négociations ont lieu entre les deux paliers de gouvernement et les cinq Premières nations touchées. Il s'agissait des Premières nations Nelson House, Cross Lake, Norway House, York Landing et Split Lake, si je ne m'abuse. Une fois l'entente signée, on a tenté de la mettre en œuvre, mais comme il n'y avait pas beaucoup de progrès, des négociations ont été entreprises directement avec chacune des Premières nations. Ces négociations ont donné lieu aux ententes globales mentionnées par M. Monkman. Je n'ai pas les détails sous la main, mais il s'agit d'accords de plusieurs millions de dollars, assortis de programmes visant à indemniser les Premières nations pour les dommages qui ont été causés non seulement aux terres à l'intérieur de leurs réserves, mais également à l'intérieur de leur territoire traditionnel.
Quelques explications s'imposent ici. La majorité des terres situées dans le nord du Manitoba sont des terres de la Couronne qui appartiennent à la province en vertu d'un transfert qui a eu lieu en 1930, année où le gouvernement fédéral a cédé la gestion de ces terres au Manitoba. Presque tout le nord du Manitoba, au-delà de la frontière démarquée par le ministère des Affaires indiennes, est considéré comme un territoire non organisé. Il s'agit de terres appartenant à la Couronne.
Les Premières nations et les Métis y vivent depuis très longtemps, de sorte que ces terres font partie de leur territoire traditionnel. De manière générale, ce territoire traditionnel correspond aux zones de piégeage des cinq collectivités, notamment, que j'ai mentionnées. Le territoire traditionnel où ces collectivités se livrent depuis toujours à la chasse, à la pêche et au piégeage est bien délimité. Il s'agit toutefois de terres de la Couronne provinciale.
Le sénateur Peterson : Je comprends ce que vous dites, mais pourquoi ne pas quantifier les dommages au lieu de les définir? Si vous choisissez la formule du partage des recettes, qui est définitive, il sera plus facile de faire ce calcul, parce que je présume que les recettes ont beaucoup augmenté au fil des ans dans cette région. Le fait d'en soustraire une partie, par kilowattheure, simplifierait les choses. D'après ce que vous dites, ce processus peut demander beaucoup de temps.
Monsieur Monkman, je constate qu'Hydro-Manitoba collabore de très près avec la communauté autochtone au chapitre de l'emploi. Je vois que vous avez déjà atteint votre objectif de 37 p. 100 d'emplois dans le Nord. Est-ce que ce chiffre correspond à 37 p. 100 des effectifs?
M. Monkman : Oui.
Le sénateur Peterson : Vous avez atteint cet objectif avant 2007. Envisageriez-vous de le porter à 50 p. 100?
M. Monkman : Absolument.
Le sénateur Peterson : Vraiment?
M. Monkman : Oui. Nous pouvons réévaluer nos objectifs. Nous en avons fixé certains il y a de nombreuses années. Nous les avons fixés, sauf que nous ne pouvions savoir à l'époque si nous allions être en mesure de les atteindre. Nous l'avons fait. Nous pouvons donc les revoir à la hausse.
Le sénateur Sibbeston : Monsieur Morrisseau, est-ce que le gouvernement a déjà négocié des contrats avec des collectivités autochtones? Je viens des Territoires du Nord-Ouest. Je sais qu'il y a une autoroute qui traverse une collectivité autochtone. Le gouvernement a tout simplement choisi de négocier le contrat d'entretien avec la bande ou l'entreprise métisse présente dans la région. Cette façon de faire permet aux collectivités autochtones d'entrer en affaires, d'obtenir des contrats, de se familiariser avec le monde des affaires. Est-ce que l'on observe la même chose au Manitoba?
M. Morrisseau : Oui, sénateur, et il y a beaucoup d'activités à ce chapitre. Je vais vous parler d'abord de mon ministère, qui est composé de trois divisions : le gouvernement local, le développement et le secrétariat des affaires autochtones, dont je relève. La division responsable des projets de développement du gouvernement local administre les programmes offerts à quelque 50 petites collectivités autochtones du Nord. Ce ne sont pas des premières nations, mais des Autochtones, des Métis, ainsi de suite. Cette division est responsable des dépenses liées aux projets d'immobilisations comme l'eau, les égouts, la construction et la réparation des routes internes. Pour que la collectivité tire profit de ces projets, le ministère demande habituellement à la division, avant que l'appel d'offres ne soit lancé, qu'elle établisse un plan des dépenses d'immobilisations de concert avec les représentants du gouvernement local de ces collectivités. De cette façon, les collectivités savent dans quel secteur et à quel endroit les dépenses vont être effectuées au cours de l'année à venir. Pendant la saison de construction, le ministère, lorsque c'est possible, cède le contrat au conseil communautaire et l'aide à l'administrer. Les entreprises soumissionnaires sont obligées de transiger directement avec la collectivité et ses représentants pour que celle-ci puisse tirer parti des emplois, des petits contrats, ainsi de suite. C'est ce que fait mon ministère.
Le ministère provincial des services gouvernementaux a mis sur pied ce qu'on appelle l'initiative d'approvisionnement auprès des entreprises autochtones. Par cette initiative, le gouvernement manitobain tente d'encourager les petites entreprises autochtones à répondre aux besoins de la province en matière de biens et services. Le ministère a essayé de promouvoir cette initiative dans les collectivités autochtones. Il dispose maintenant d'une liste d'entreprises qui sont en mesure de soumissionner en vue d'obtenir des contrats.
Le ministère suit les règles générales; notamment, les contrats sont attribués aux entreprises qui ont présenté la plus basse soumission. Il faut prendre des mesures particulières à l'égard des collectivités autochtones. Il faut créer des outils qu'elles peuvent utiliser, et c'est ce que nous faisons. Les gros ministères, comme celui de la Santé, participent à la création des outils visant à aider les collectivités autochtones à leur fournir des biens et services.
Il est important de parler à mon avis du projet d'expansion du canal de dérivation ici même à Winnipeg. Dans le cadre de ce projet, un pourcentage des emplois offerts vise les Autochtones et on a fait en sorte que les collectivités autochtones soumissionnent en vue d'obtenir certains contrats. La Première nation de Nelson House a présenté une soumission et elle a obtenu un contrat pour le projet d'expansion du canal. Nous savons qu'elle est en train d'acquérir de l'expérience en matière de terrassement. Cette expérience lui servira pour le projet de la centrale de Wuskwatim, qui est en train d'être construite près de chez-elle. C'est ce que je crois.
Le président : Êtes-vous en train de négocier un partage des revenus provenant de l'exploitation des ressources avec les Autochtones de Nelson House?
M. Morrisseau : Peut-être que M. Monkman peut répondre plus précisément à votre question. Je crois comprendre que les revenus augmenteront parce que la collectivité sera partiellement propriétaire de la centrale. Elle a en effet négocié en vue de devenir propriétaire en partie de la centrale.
Le président : Est-ce que la centrale se trouve sur les terres de la réserve ou sur les terres ancestrales?
M. Monkman : Sur les terres ancestrales.
Le président : Pourquoi le partage ne s'appliquerait-il pas dans le cas de toutes les installations, car dans ces régions éloignées, les gens ne peuvent pas espérer établir une base économique à moins de pouvoir obtenir une partie des revenus provenant de l'exploitation des ressources? C'est ce que je pense. J'ai déjà visité ces régions. J'ai déjà survolé la région de Kelsey lorsqu'elle était en train de se développer dans les années 1960. Je la connais bien. On ne permet pas aux collectivités d'obtenir directement une part des revenus tirés de la production d'hydro-électricité; on se limite à payer pour avoir le droit d'utiliser une installation qui est construite sur leur territoire. Pourquoi ne pas partager rétroactivement les revenus générés par les autres installations puisque dans ce cas-ci il y aura un partage des revenus?
M. Monkman : Je suppose qu'il s'agit d'un projet dans lequel la collectivité aura investi elle-même des capitaux jusqu'à concurrence d'un certain pourcentage en vue d'être en partie propriétaire et de pouvoir toucher une part des revenus tirés de la production d'électricité par cette centrale. Il est parfois arrivé qu'Hydro-Manitoba ne fasse aucun profit, alors si cela se produisait cette fois-ci, elle perdrait elle aussi de l'argent.
Le sénateur Dyck : À la page 2 de votre document, vous affirmez que les intérêts des entreprises et des Autochtones se rejoignent considérablement dans le nord du Manitoba. C'est ce dont nous parlions je crois. De toute évidence, il y a des enjeux commerciaux et environnementaux qui touchent les deux. Plus loin, aux pages 6 et 7, vous parlez d'ententes futures. Il semble que dans ces cas-là, il s'agit de projets dans lesquels la première nation en question était en mesure d'investir et de participer ainsi au capital.
Est-ce comme ça que cela fonctionne? Pour pouvoir devenir un partenaire important, la première nation doit disposer de capitaux à investir de sorte qu'elle puisse obtenir une part des profits qu'Hydro-Manitoba pourrait réaliser.
M. Monkman : C'est vrai en ce qui concerne tous les autres projets de centrale, comme celle de Conawapa. Cependant, c'est Hydro-Manitoba qui a investi dans le projet initial pour la collectivité de Nelson House afin de faire avancer les choses.
Le sénateur Dyck : Hydro Manitoba a donc investi pour faire démarrer le projet.
M. Monkman : Oui.
Le sénateur Dyck : Je vais citer un passage de la page 4 de votre document :
Pour améliorer les relations de travail, il est important de concilier nos intérêts et nos ambitions avec ceux des peuples autochtones, dont l'identité est liée aux rapports de nature traditionnelle, culturelle et spirituelle qu'ils entretiennent avec les eaux et les terres que nous voulons exploiter.
Pouvez-vous expliquer ce que vous entendez par « concilier » et comment vous allez y parvenir?
M. Monkman : Dans un premier temps, nous avons conclu une entente avec les collectivités dans les années 1990. Dans un deuxième temps, nous avons prévu de construire de nouvelles centrales et lignes de transport. Une nouvelle ligne de transport sera construite à Wukswatin, et il a été déterminé qu'une certaine somme serait versée annuellement à la collectivité de cette région tant et aussi longtemps qu'une ligne de transport passera sur son territoire. C'est également ce qui est prévu en ce qui concerne les lignes de transport des grandes centrales qui s'étendraient sur des centaines de milles. Nous prévoyons créer des programmes de versements qui n'existaient pas par le passé.
Le sénateur Dyck : Cette forme d'indemnité existera dans l'avenir, mais elle ne sera pas rétroactive.
M. Monkman : Je ne peux pas vous l'affirmer, car je ne le sais pas. À ma connaissance, ce n'est pas l'intention qui a été exprimée. Nous allons nous en tenir aux ententes qui ont déjà été conclues et à celles qui doivent l'être.
Le sénateur Dyck : Quels objectifs visez-vous quant à l'embauche de personnes des groupes désignés? Consultez- vous, par exemple, les groupes du Nord du Manitoba, où la majorité des gens sont autochtones? Les objectifs pour cette région devraient certes être différents de ceux fixés pour d'autres régions où la population autochtone est moins grande. Tenez-vous compte de ce facteur lorsque vous établissez les objectifs?
M. Monkman : Oui, nous en tenons compte. La plupart des gens de métier que nous recherchons sont des électriciens, des mécaniciens, etc.; tous des métiers qui font partie du programme du sceau rouge. Nous examinons la diplomation dans les écoles du nord et en ce qui a trait au programme de formation. Cela fait partie du processus. Nous essayons de déterminer combien de temps il faudra aux étudiants pour atteindre le niveau d'instruction nécessaire pour pouvoir occuper les emplois que nous avons à offrir. Dans le cas du programme de formation, nous calculons ce qu'il en coûte pour apprendre un métier à un étudiant autochtone. M. Morrisseau a parlé de la situation démographie du nord et du reste de la province. Nous l'examinons de près.
Le sénateur Dyck : Je suppose que vous aviez de bonnes relations de travail avec les diverses collectivités puisque vous avez pu lancer un programme de formation vous permettant de combler vos besoins et ceux des collectivités.
M. Monkman : Ce n'est pas toujours facile, car la communauté peut trouver que notre objectif n'est pas le même que le sien. Il faut faire attention à la façon dont on aborde la situation. Nous avons tissé beaucoup de liens avec les écoles. La plupart des membres de notre comité sont autochtones, y compris moi-même, et sont originaires de ces collectivités. Nous savons ce que c'est que de gravir les échelons et nous savons ce qu'exige l'atteinte de nos objectifs dans la vie.
Le sénateur Hubley : Monsieur Morrisseau, je suis en train d'examiner la page 6 de votre document qui concerne l'écart sur le plan de l'emploi. Vous présentez les taux d'emploi chez les Autochtones et les non-Autochtones pour 1996 et 2001. Comme vous l'avez fait remarquer, il y a eu une amélioration en 2001 en ce qui concerne les personnes et les étudiants non autochtones. Pouvez-vous expliquer cette amélioration et nous dire aussi si cette tendance se maintiendra.
M. Morrisseau : Oui, je crois que cette tendance se maintiendra, car la présente génération d'Autochtones fréquentent les établissements postsecondaires. Chez les Autochtones, on met beaucoup plus l'accent maintenant sur l'éducation et la formation. Les entreprises, quant à elles, prennent de plus en plus conscience des compétences que les Autochtones ont à offrir. Le secteur privé a une meilleure compréhension des Autochtones et de la situation démographique, dont il vaut mieux tenir compte, qu'on le veuille ou non, comme je l'ai signalé.
Comme vous le savez probablement très bien, il y a quelques années, on nous a prévenus que toutes les nations développées du monde se feront la lutte pour recruter des travailleurs. En fait, c'est déjà commencé. Au Manitoba, la population autochtone est sous-utilisée sur le marché du travail. Je ne peux pas croire que la situation ne va pas s'améliorer. Le secteur privé est conscient du fait que, si nous ne formons pas les Autochtones de sorte qu'ils puissent participer à l'économie et occuper des emplois, ils vont se retrouver du côté des perdants, si je puis m'exprimer ainsi. Ils seront des clients, si je peux dire, des ministères de misère, comme j'aime les appeler. Je parle du ministère de la Justice et du ministère des Services communautaires et sociaux. Il faut créer des programmes pour remédier à cette situation, sinon le prix à payer sera beaucoup plus lourd.
Le sénateur Hubley : Est-ce que toutes les grandes entreprises comptent un service des relations avec les Autochtones, à l'instar d'Hydro-Manitoba?
M. Monkman : Pas que je sache, mais il y en a peut-être quelques-unes qui en ont un. C'est le président et le vice- président qui ont fait en sorte de créer un service des relations avec les Autochtones. Si d'autres grandes entreprises faisaient de même, cela contribuerait à abattre les obstacles et à régler tous les problèmes qui font en sorte qu'il est difficile pour les Autochtones d'intégrer le marché du travail. Notre société s'est engagée à investir dans leur formation, et d'autres entreprises doivent faire de même.
Le sénateur Hubley : Ce genre de prise de conscience devrait pratiquement faire partie de la culture d'entreprise. Toute société devrait être sensible aux besoins de la population. Je m'attendais à une toute autre réponse. Je pensais que vous alliez me dire qu'il s'agit d'une tendance qu'on observe au sein des grandes entreprises; que la plupart des grandes sociétés considèrent déjà la population autochtone comme une ressource, alors je suis un peu étonné.
M. Monkman : Je crois que certaines entreprises ont fait un effort pour embaucher davantage d'Autochtones et ont changé leur façon de voir les Autochtones dans le contexte du marché du travail. Cependant, personnellement, je crois que nous devons faire davantage dans la province.
Le sénateur Hubley : Sur le plan de la responsabilité des entreprises?
M. Monkman : Certainement; et qu'il s'agisse des entreprises ou non. Cela vaut aussi pour les petites entreprises. Je possède moi-même une petite entreprise et j'embauche des Autochtones parce que c'est ce que je veux. Ce doit être aussi un choix personnel.
Le président : Je ne devrais pas dire qu'Hydro-Manitoba se sent coupable. J'étais là dans les années 1960 lorsque le mode de vie traditionnel des Autochtones a été bouleversé. C'est peut-être pour réparer les torts causés dans le passé qu'Hydro-Manitoba fait preuve d'une telle initiative aujourd'hui.
Le sénateur Lovelace Nicholas : Lors de votre exposé, vous avez déclaré que la population des Premières nations augmente rapidement. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi il existe encore des écarts sur les plans des revenus et de l'emploi? Cette augmentation englobe-t-elle les Premières nations des petites collectivités?
M. Morrisseau : Oui, ce sont des données qui concernent l'ensemble de la province, et je peux vous dire qu'il existe bien des raisons qui expliquent la croissance de la population.
D'autres sénateurs ont demandé comment s'y prend le secteur privé pour rejoindre les Autochtones. Il y a le Conseil pour le développement des ressources humaines autochtones du Canada, dont le siège est à Saskatoon. Kelly Lindsay en est le président. Vous êtes au courant de ce qu'il a accompli dans le passé. J'y ai siégé lorsqu'on avait invité le Manitoba et la Saskatchewan à participer. Au début, je me demandais quel était le but du Conseil. Quand j'ai eu compris son intention, j'ai tenté de créer un organisme de la sorte au Manitoba. Je me suis adressé au Business Council du Manitoba, qui regroupe les 30 ou 40 plus grandes entreprises de la province, pour lui demander s'il était prêt à fournir un bureau à une personne qui travaillerait avec ses membres à l'élaboration de stratégies en matière de ressources humaines destinées précisément aux Autochtones. L'idée était de conclure une entente avec un certain nombre d'organisations. Le conseil dirigé par Kelly Lindsay en était un, tout comme le ministère provincial de l'Éducation. Nous avons partagé les coûts et nous avons établi un budget pour le poste en question. J'aurais très bien pu toutefois installer cette personne dans mes bureaux ou mon secteur.
Je ne sais pas comment les choses se passent ailleurs, mais au Manitoba, le secteur privé a une façon de faire particulière. Il aime mener ses affaires selon la façon qui lui convient. J'ai pensé que la personne en question pourrait travailler au sein du Business Council. Cet organisme a aimé l'idée, mais il ne pensait pas qu'il était le mieux placé pour accueillir cette personne. M. Carr travaillait déjà au sein du Business Council, et il est toujours là d'ailleurs. L'organisme entretient des rapports avec la Chambre de commerce de Winnipeg. M. Carr m'a dit que je devrais demander à Dave Angus si son organisme était disposé à accueillir cette personne. C'est ce que j'ai fait, et cela a fonctionné. C'était il y a six ans. Je sais que la personne qui a été embauchée pour essayer d'encourager les entreprises à élaborer des stratégies visant les Autochtones se retrouvait souvent plutôt à leur parler de façon générale des Autochtones. C'est peut-être parce que je travaille dans le domaine que je suis étonné du manque de connaissance des entreprises. C'est de l'information générale qu'elles demandaient.
Vous trouvez peut-être que mon commentaire vient contredire les propos que j'ai tenus tout à l'heure, à savoir que le secteur privé se préoccupe de plus en plus des Autochtones. Je pense toujours que c'est vrai en effet; je crois encore qu'au cours des cinq dernières années, le secteur privé de la province s'est intéressé davantage à la question des Autochtones et se tourne vers cette collectivité pour y trouver des travailleurs. Vous savez qu'IBM est une multinationale reconnue pour sa diversité, et je dois dire que la diversité, dans le monde d'aujourd'hui, c'est la clé du succès. Plus votre main-d'œuvre est diversifiée, meilleurs seront vos résultats. Lorsqu'il y a un problème à régler, la solution est toujours meilleure lorsque des gens de diverses cultures y ont réfléchis. Je sais que nous avons signé une entente avec cette entreprise. IBM est une société privée qui a mis sur pied divers programmes dans les collectivités autochtones, notamment un programme d'alphabétisation dans certaines communautés, dont Sioux Valley et Sandy Bay, je crois. Elle veut mettre en place un programme d'alphabétisation et d'éducation à Moar Lake en vue à long terme de faire des affaires avec les Autochtones. Il s'agit d'une stratégie à plusieurs volets. D'autres entreprises privées lui ont d'ailleurs emboîté le pas.
Nous avons de multiples intérêts dans la collectivité autochtone. L'éducation est essentielle pour nous, mais nous avons une formation en enseignement. Nous avons deux services qui s'occupent de la formation en enseignement. Nous apportons le point de vue stratégique et nous essayons de promouvoir l'idée que les secteurs privé et public doivent avoir des stratégies en matière de ressources humaines spécialement conçues pour les Autochtones.
L'Office régional de la santé de Winnipeg compte un effectif plus important que la province du Manitoba, et c'est quelque chose pour le peuple autochtone. Nous avons signé une entente avec l'office il y a trois ans et nous commençons à voir les résultats. L'office engage de plus en plus d'Autochtones. Il a mis sur pied une équipe autochtone qui travaille auprès de tous les hôpitaux de Winnipeg afin de les aider à réviser leurs stratégies de ressources humaines pour qu'elles favorisent davantage les relations avec les Autochtones. Nous avons signé des ententes semblables avec la majorité des offices régionaux de la santé du Manitoba. Les résultats varient selon l'emplacement. L'ORF de Brandon a un excellent modèle; en plus d'élaborer une stratégie écrite qu'il essaie de suivre, il a mis sur pied un organisme consultatif très vaste. Certaines collectivités autochtones lui donnent des avis sur sa stratégie, etc. Nous n'en sommes qu'aux premières étapes, mais nous sommes très optimistes.
Le sénateur Peterson : Ceci est davantage une observation qu'une question. Nous avons reçu le groupe MKO ce matin, qui a parlé d'une grande partie du nord de la province. Sa position était assez différente de ce que vous nous dites cet après-midi. Ses porte-parole ont affirmé qu'il n'y a pas de consultation, très peu d'emplois, aucun partage des revenus, ce genre de choses. Or, vous dites le contraire. Selon moi, nous devrions tous essayer de nous mettre au diapason ou de nous rapprocher davantage. Ce n'est qu'une suggestion.
Le président : Merci, monsieur Morrisseau et merci, monsieur Monkman, d'être venus aujourd'hui. Nous apprécions la franchise et l'intégrité que vous avez apportées au débat. Je vous prie de continuer le travail que vous faites; il y a encore beaucoup à faire. De nombreux défis vous attendent. Le Manitoba constitue l'un des plus grands défis que nous avons. Il se situe très haut dans l'échelle, alors nous espérons pouvoir accomplir certains progrès, et il est à souhaiter que notre rapport puisse contribuer à régler certains problèmes de développement économique que connaissent nos collectivités autochtones.
Mesdames et messieurs les sénateurs, notre prochain groupe de témoins comprend des représentants du Tribal Councils Investment Group of Manitoba, de la Southeast Community Futures Development Corporation et de la Tribal Wi-Chi-Way-Win Capital Corporation.
Robert Campbell, directeur, Expansion et relations publiques, Tribal Councils Investment Group of Manitoba Ltd. : Je vous remercie de me permettre de comparaître devant vous. Je suis le directeur de la division Expansion et relations publiques du Tribal Councils Investment Group of Manitoba. Je suis également le président national du conseil d'administration du Conseil pour l'avancement des agents de développement autochtones et j'ai acquis une vaste expérience auprès des collectivités autochtones et dans le domaine du développement économique.
J'aimerais tout d'abord remercier le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones d'avoir invité le Tribal Councils Investment Group of Manitoba à présenter un exposé sur le développement économique et le développement d'entreprises. J'aimerais remercier sincèrement le Sénat d'avoir choisi cet excellent hôtel pour la tenue de ses audiences, un établissement que possède et exploite First Canadian Hotels and Entertainment, une filiale de TCIG. Cet hôtel quatre étoiles compte 272 chambres et offre 13 000 pieds carrés pour la tenue de conférences; ce qui importe encore plus, pour le comité, cet hôtel appartient à des Premières nations.
Compte tenu du temps alloué à notre exposé, il est très difficile pour une entreprise de notre envergure d'aborder en détail un sujet de cette ampleur. Je vais essayer de vous donner un bref aperçu de notre organisation et de me concentrer sur quelques domaines clés dans lesquels le gouvernement fédéral pourrait jouer un rôle plus important auprès des entreprises autochtones. Bien que nous soyons pratiquement inconnus dans de nombreux coins du pays, nous avons toujours cru qu'avant de parler de nos réalisations et de nos succès, nous devions d'abord faire nos preuves. Je crois que nous avons franchi cette étape et que nous avons acquis la confiance nécessaire pour commencer à nous faire connaître au reste du monde.
J'aimerais vous parler d'une vision qui est devenue réalité et d'une réalité qui se répand rapidement parmi les entreprises autochtones. Voici notre histoire. Depuis nos humbles débuts d'il y a 15 ans, nous avons bâti, grâce à notre travail acharné, notre dévouement et notre détermination, l'une des entreprises des Premières nations les plus prospères du pays. Nous sommes un modèle de réussite pour tous les milieux d'affaires, autochtones ou non, et nous sommes fiers et honorés de nous trouver dans ce cercle, aux côtés d'un grand nombre d'autres modèles de rôles pour la communauté autochtones et les Premières nations.
J'aimerais vous amener sur le parcours que nous avons suivi grâce à l'unité et la résolution de sept conseils tribaux, nos actionnaires, une foule d'entreprises en croissance et une famille diversifiée d'entreprises, qui ont fait de nous l'une des sociétés les plus prospères du Manitoba. En fait, nous figurons parmi les 100 meilleures entreprises, qui constituent la tranche supérieure de 1 p. 100 de toutes les entreprises manitobaines, et nous sommes la première et la seule entreprise des Premières nations à atteindre ces hauts niveaux de performance.
Faisant nos premiers pas avec un investissement modeste de 175 000 $ de nos sept actionnaires, c'est-à-dire 25 000 $ chacun, nous sommes aujourd'hui des joueurs de taille dans l'économie générale. Notre bureau central et bon nombre de nos filiales ont reçu la certification ISO et on nous a invités à présenter notre candidature pour être reconnus parmi les entreprises les mieux gérées au Canada. Grâce à la force de notre peuple, nous créons une synergie et nous obtenons ainsi une formule magique où un plus un égale cinq. La synergie est créée lorsque notre réussite devient la réussite de tout notre peuple. Comme la meute de loups travaillant ensemble, de façon unifiée et stratégique, il n'y a rien à notre épreuve.
C'est ainsi que nous avons réussi à donner un rendement annuel de 44 p. 100 à nos actionnaires au cours des 15 dernières années; à notre connaissance, il s'agit d'un exploit inégalé par nos compétiteurs, et ce chiffre continue d'augmenter. Je suis certain que la première question que vous poserez après mon exposé sera « Comment puis-je investir dans votre entreprise? »
Je dois préciser que nous devons notre succès à un conseil d'administration solide qui a une vision et la capacité de se concentrer sur notre mandat, nos affaires et la création de richesses. Nous savons que les affaires constituent une culture en soi, que nous devons réaliser et embrasser. Ajoutons à cela un capitaine qui peut garder le cap dans toutes les tempêtes, qui tient bien le gouvernail et qui a la sagesse de nous rendre à bon port. Vous devez avoir un chef qui a du flair, des connaissances et un instinct pour pouvoir vous diriger. Dans notre cas, il s'agit de M. Allan McLeod, notre président-directeur général, un jeune Autochtone remarquable dont la compétence se reflète dans tout ce que TCIG accomplit.
Votre comité est ici pour entendre quelques leçons que nous avons apprises et prendre en considération quelques- unes de nos recommandations. Je crois qu'il importe de souligner que la communauté autochtone et le développement économique sont des sujets qui ont fait l'objet de maintes et maintes études, mais nous semblons être bien en retard sur le courant dominant. On dirait que l'une des meilleures occasions économiques qui se présentent consiste à étudier la condition économique du peuple autochtone et à pontifier sur ce que nous pourrions être. Je crois que le temps est venu de mettre un terme aux études, d'agir, de prendre des risques calculés et de faire des incursions pour que notre peuple devienne autosuffisant et autonome, peu importe le mot qui est à la mode aujourd'hui à Ottawa. Je préfère penser que notre autonomie s'inscrit dans le tissu de la société canadienne, où nous pouvons prospérer et avoir des chances égales pour nos familles et les générations futures.
Notre entreprise montre comment la collectivité autochtone peut imprimer un changement dans une perspective économique, comment nous pouvons devenir de véritables joueurs dans l'économie générale, comment nous pouvons établir la base commerciale qui permettra de créer des emplois, de soutenir des programmes et des services et de contribuer à notre bien-être. Voilà comment, selon nous, se crée une nation et voilà la preuve que notre peuple peut être compétitif et peut devenir un chef de file dans tous les domaines s'il a les outils et la possibilité de le faire.
Pour TCIG, le monde a commencé lorsque nous avons reçu l'ordre et le mandat de nous implanter dans l'économie générale, un endroit où bon nombre d'entreprises autochtones ne s'étaient jamais aventurées, un endroit où, nos dirigeants le savaient, nous devions jouer un rôle actif si nous voulions vraiment changer les choses. Nous le savions depuis trop longtemps; nous avions été des clients et des consommateurs, mais des propriétaires. Grâce à nous, de nombreuses entreprises non autochtones sont devenues très prospères sans que notre peuple n'en profite en retour. Nous savions que nous formions nous-mêmes un énorme secteur économique, mais toutes nos ressources économiques nous échappaient sans que nous tentions de les retenir. Comment pouvez-vous construire une économie si vous donnez tout?
J'ai fourni quelques rapports annuels au comité pour qu'il puisse suivre mes propos, mais en bref, nous sommes les propriétaires et les exploitants de diverses entreprises ou l'un des principaux actionnaires d'une foule d'autres entreprises qui profitent toutes à notre peuple en fournissant les ressources financières dont nous avons grandement besoin pour assurer notre avenir.
Nous avons d'abord fait l'acquisition d'une petite franchise Pepsi — et j'aimerais souligner que c'est ce que vous avez devant vous aujourd'hui — dans le nord du Manitoba et nous en avons fait l'une des principales organisations Pepsi qui existent aujourd'hui; elle dessert 20 p. 100 du territoire canadien, enregistre des ventes sept fois plus élevées que son concurrent et a été reconnue à maintes reprises par Pepsi comme étant l'un de ses meilleurs producteurs en Amérique du Nord. Des tests sont faits régulièrement à notre bureau pour consommation de « Coke ». Je dois le souligner également.
Forts de cette réussite, nous avons mis sur pied First Canadian Health. Nous traitons les demandes de remboursement des services de santé non assurés de presque tous les Indiens inscrits au Canada et ce, depuis plus de huit ans. Nous sommes ainsi devenus l'un des plus importants entrepreneurs du gouvernement fédéral au Canada; chaque année, nous traitons efficacement des demandes évaluées à près de 500 millions de dollars tout en fournissant des conseils à Santé Canada concernant son système. Toutefois, nos conseils tombent bien souvent dans l'oreille d'un sourd. Je peux dire, par exemple, que nous avons cerné des possibilités d'économies de l'ordre de centaines de millions de dollars au chapitre des médicaments d'ordonnance, qui n'ont pourtant pas semblé intéresser le gouvernement. Combien d'entreprises aurait-on pu aider grâce à cet argent? Nous avons obtenu ce contrat dans le cadre du programme obligatoire des marchés réservés aux entreprises autochtones, dont je vais reparler tout à l'heure.
Plus récemment, nous avons créé une nouvelle entreprise avec la Croix-Bleue, Medi-Health Solutions, et nous sommes sur le point de nous engager dans une toute nouvelle branche d'activité qui va grandement profiter aux deux partenaires pendant de nombreuses années.
De là, nous avons mis sur pied First Canadian Fuels, qui nous permet de distribuer du carburant et d'établir des concessions dans les milieux autochtones et des Premières nations partout au Manitoba et, ultimement, partout au Canada.
Nous avons First Canadian Hotels and Entertainment, qui, comme je l'ai dit, est le propriétaire du très bel hôtel Radisson du centre-ville, où nous nous trouvons présentement. Depuis que nous en avons fait l'acquisition, nous avons gagné le prix du président international de Radisson et nous commençons à peine à améliorer cette propriété pour en faire un des meilleurs hôtels de Winnipeg et du Manitoba. Notre taux d'occupation est passé de 55 à plus de 90 p. 100; cette tendance à la hausse se poursuit, et cet hôtel ne nous appartient que depuis un an.
Nous sommes un important actionnaire de Perimeter Aviation, le plus gros transporteur régional de la province, qui dessert le Manitoba, une partie du Nunavut et au-delà. Nous avons acquis plusieurs compagnies aériennes sous notre bannière et depuis, les ventes sont passées de 20 à plus de 80 millions de dollars par année. Ses actions sont vendues au grand public par l'entremise du Exchange Industrial Income Fund et, avec Jasper Tank et d'autres acquisitions, nous permettons à d'autres d'investir et de prendre part à notre succès.
Récemment, avec le dirigeant mondial CH2M Hill, nous avons mis sur pied First Canadian Water pour répondre aux urgents besoins d'infrastructure de notre peuple; cette entreprise aura un impact direct sur la santé tout en assurant les services d'un entrepreneur consciencieux qui travaillera avec notre peuple pour régler quelques-uns de nos plus grands problèmes.
TCIG est fier d'être le deuxième plus grand actionnaire de Beaver Securities, un service de courtage universel, la première et la seule entreprise des Premières nations au Canada à offrir un tel service pour aider notre peuple à planifier son avenir. Nous savons l'importance du transport par camion, ce qui nous a amenés à nous tailler une place importante dans les réseaux de camionnage Big Freight, qui vont de l'Alaska au Mexique et partout entre les deux. Nous sommes un important partenaire de Westfield Real Estate Investment Trust; nous possédons, à l'heure actuelle, des propriétés évaluées à plus de 500 millions de dollars, de l'Alberta au Manitoba, profitant de l'effervescence du marché et faisant en sorte que les Premières nations y participent activement. Je vous encourage à vous rendre au Johnston Terminal, au marché The Forks, ou à l'immeuble de la Commission des grains, au centre-ville, pour voir quelques-unes de nos propriétés.
Par l'entreprise de Rupertsland Holdings, nous avons mobilisé les ressources économiques des Premières nations de la Saskatchewan, des Territoires du Nord-Ouest et du Yukon. Nous avons créé un fonds commun d'investissements qui est devenu l'un des plus importants actionnaires de la North West Company, qui génère un rendement de 500 p. 100 sur notre investissement et qui montre qu'en nous unissant, nous pouvons devenir un investisseur majeur dans n'importe quelle transaction. Dans un avenir rapproché, nous allons promouvoir un nouveau projet, un tout nouveau fonds commun d'immobilisations, pour faire l'acquisition d'une institution géante au Canada; alors, gardez l'œil ouvert.
Nous sommes heureux d'investir dans True North, l'aréna de Winnipeg, et l'équipe de hockey le Moose du Manitoba. Notre aréna est maintenant l'un des plus achalandés en Amérique du Nord et un endroit primé de Winnipeg. Nous avons participé à la création de la First Nations Bank et nous avons reconnu l'importance d'avoir nos propres institutions financières pour faire prospérer nos entreprises.
Enfin, nous sommes maintenant les propriétaires de Paragon Pharmacies, qui exploite 20 magasins en Colombie- Britannique et en Alberta, et nous prévoyons étendre nos activités dans des marchés à créneaux partout en Saskatchewan et au Manitoba dans les années à venir. TCIG a également une fondation pour soutenir la culture, la jeunesse et l'entreprenariat, et nous continuons de célébrer la réussite des entreprises autochtones au Manitoba et à organiser des conférences et des galas pour mettre en valeur notre communauté et son potentiel.
Je sais que j'ai pris beaucoup de temps à vous dire qui nous sommes, mais c'est le temps que nous devons prendre aujourd'hui pour dire bonjour. Nos rêves sont devenus réalité et notre réalité deviendra notre héritage. Nous sommes conscients que nous ne pourrons jamais vous raconter toute notre histoire ou vous donner un compte rendu détaillé de notre aventure, et ce n'est pas notre but aujourd'hui. J'invite le comité à venir nous rencontrer et à découvrir qui nous sommes. Je crois que nous pouvons contribuer grandement à vos efforts et nous serions heureux de poursuivre le dialogue.
J'aimerais prendre le temps qui reste pour vous donner quelques suggestions pour améliorer les conditions des entreprises autochtones. Je peux vous parler longuement du fossé qui existe entre notre monde et la société et de la nécessité de créer des économies locales et régionales. Il y a des problèmes de financement et un manque de ressources économiques adéquates. Les divers ministères et agences du gouvernement chargés de soutenir les efforts autochtones doivent élargir leur vision. Je pourrais dire aussi que notre peuple ne pourra jamais combler l'écart entre lui et la société s'il ne fait pas partie de l'économie. Je pourrais dire également que l'argent est gaspillé et que les décisions sont souvent prises par des gens qui n'ont ni les compétences ni les connaissances voulues. Et je pourrais dire encore bien davantage. Ces constatations se trouvent déjà dans une multitude de rapports et d'études. Il ne sert à rien de redire ce que la plupart d'entre vous savez déjà. Nous pourrions formuler une multitude de recommandations aux entreprises, aux gouvernements, aux agences, aux médias et à notre peuple pour que ce dernier joue un meilleur rôle dans l'économie, mais j'aimerais profiter de l'occasion pour vous dire que le gouvernement fédéral peut se concentrer dans un certain nombre de domaines pour appuyer notre cause commune.
Je vais parler plus particulièrement du gouvernement fédéral car ce groupe et le Sénat peuvent ensemble avoir un effet sur le changement et les conditions au sein du gouvernement et c'est ce dont nous avons besoin. C'est de cette façon que vous pouvez nous aider.
Au cours de la dernière décennie, une politique d'approvisionnement a été mise en œuvre pour aider les entreprises autochtones à s'impliquer directement dans l'approvisionnement en biens et en services pour le gouvernement fédéral. Cette politique s'étendait à tous les ministères et était coordonnée par Affaires indiennes et du Nord Canada. C'est notre version d'une loi qui existe aux États-Unis pour aider les entreprises indiennes et des minorités; cette loi a eu un effet significatif au niveau de la création, la durabilité, l'expansion et la prise en charge des gens et des entreprises.
Le Canada avait certaines réserves, sans faire de jeu de mots, pour renforcer sa politique et s'assurer que tous les ministères la suivent et l'adoptent. Le gouvernement n'a pas encore atteint ses objectifs et ne s'y est pas vraiment efforcer. Le gouvernement fédéral a créé une politique obligatoire concernant l'approvisionnement par laquelle les bénéficiaires des biens et services achetés sont à 80 p. 100 ou plus des Autochtones. En ce qui concerne ce contrat, la priorité doit être accordée aux entreprises d'Autochtones. Cette politique obligatoire est corrompue en ce moment même.
Par exemple, notre entreprise, First Canadian Health dont j'ai parlé tout à l'heure, est dans une situation dans laquelle le nouveau contrat relatif aux services de santé non assurés, dont les seuls bénéficiaires sont les Autochtones, n'est pas appliqué. En fait, il est exclu même s'il répond à toutes les conditions de l'impartition réservée obligatoire du Programme d'approvisionnement auprès des entreprises autochtones.
Sans aucune raison ni fondement, au bon vouloir de la bureaucratie, le gouvernement fédéral a abandonné son mandat, sa politique et l'engagement pris envers les entreprises autochtones. Nous avons été un excellent fournisseur et beaucoup d'autres entreprises autochtones auraient voulu aussi participer à ce programme d'approvisionnement, mais dans sa grande sagesse le gouvernement semble déterminé à le mettre à l'extérieur et créer des règles du jeu inéquitables. Il semble que les politiques et les programmes élaborés pour notre intérêt sont supprimés lorsque nos gens arrivent à exceller en les suivant.
J'ai assisté récemment à un forum qui portait précisément sur ce sujet et où les entreprises autochtones de toutes les régions du Canada ont vigoureusement protesté, et malheureusement vainement, contre tout changement du Programme d'approvisionnement auprès des entreprises autochtones. Le gouvernement affirme avoir de nouvelles idées concernant notre participation au secteur des achats sans nous demander notre avis, sans nous consulter et sans que nous le sachions. L'exemple américain, un engagement légiféré, fonctionne et à assurer des avantages considérables à beaucoup de monde et à sensibiliser les compagnies grand public et à les encourager à s'associer pour partager la réussite. Le Canada se cache derrière une solution superficielle qualifiée de « politique » qu'il peut apparemment modifier dans la foulée sans se soucier de ceux qui seront touchés par ce changement.
Ne réinventez pas la roue. Renforcer les politiques existantes. Assurez-vous qu'elles sont en vigueur. Laissez-nous participer aux décisions concernant l'orientation future. Visez une loi dans ce sens, permettez-nous de partager. Le gouvernement fédéral peut, par l'intermédiaire du Programme d'approvisionnement et sans de nouvelles ressources financières, avoir un effet important et positif sur notre bien-être économique.
Nous vous exhortons de vous assurer, à votre retour à Ottawa, que le programme d'approvisionnement auprès des entreprises autochtones devienne une priorité pour le gouvernement. Faites en sorte qu'il reste en vigueur. Appliquer l'élément obligatoire. Donnez-nous les moyens de nous aider.
Le financement aux entreprises versé par le gouvernement est alimenté par environ 6 p. 100 du budget consacré aux Autochtones. J'ai déjà mentionné que nos gens continueront à peiner dans la situation actuelle et si nous n'avons pas une place dans l'économie, si nous continuons à perdre nos ressources économiques, si nous ne créons pas notre économie, si nous ne créons pas d'emploi et de richesse au niveau local. Une part plus grande du financement actuel devra être versée aux entreprises. Il faudra plus d'argent pour que nos entreprises restent en affaires. Le développement économique exige une plus grande part du gâteau. Après des années d'importants investissements sociaux, où en sommes-nous? Apprenez à quelqu'un à pêcher et il n'aura jamais faim. Je crois que nous le savons tous. C'est une vérité depuis le commencement des temps, faites en sorte que le gouvernement fédéral la réalise.
Sur ce, nous et beaucoup d'autres continuons à prospérer. Il ne semble pas raisonnable que nos efforts ne soient pas récompensés et soutenus par des programmes de financement actuels. Nous faisons de grands progrès et nous avons besoin de soutien pour continuer dans cette voie. Le TCIG est un organisme ne dépendant pas du financement du gouvernement; il n'y en a pratiquement pas pour nous-mêmes si nous le voulions. Nous constatons que les gouvernements font des investissements considérables dans les grandes entreprises; des investissements pour d'autres ou pour nous. Donnez-nous accès à des fonds importants. Nous vous donnerons des résultats mesurables. Nous élèverons ces fonds à des sommets inégalés, là où ils auront des effets durables et considérables pour notre peuple. Je vous invite à voir un programme créé pour des grandes entreprises autochtones, comme la nôtre, sûres et éprouvées. Donnez-nous accès aux types de financement qui pourront faire de nous de très grandes entreprises comme celles qui reçoivent des centaines de millions de dollars. Nous savons combien Bombardier est important. Beaucoup d'entre nous utilisent des motoneiges et des avions. Donnez-nous la même chance.
Pour terminer, je recommande de chercher des mécanismes de financement nouveaux et innovateurs qui s'appliquent à l'infrastructure. Nous savons tous qu'il y a une demande de logements, de traitement des eaux, de routes et la liste continue. Il y a des possibilités de partenariat entre le secteur public et le secteur privé. Nous avons à plusieurs reprises vu des exemples à l'extérieur. Le moment est venu pour le gouvernement fédéral de faire preuve d'innovation avec le secteur privé et de proposer des solutions. Si un projet a besoin de financement aujourd'hui, trouvons un moyen de le faire. Permettons au secteur privé d'investir avec un financement à long terme soutenu par le gouvernement fédéral.
J'ai vu beaucoup de projets nécessaires traîner des années avant d'être financés par le gouvernement fédéral et à ce moment, le coût s'était multiplié par dix. Trouvez un moyen de faire quelque chose à ce sujet avec des dollars à leur valeur d'aujourd'hui et en utilisant le financement de quelqu'un d'autre. Sachez qu'éventuellement vous l'achèterez. J'espère qu'en puisant dans votre sagesse vous essaierez d'encourager le gouvernement fédéral à explorer cette question au sein de la collectivité autochtone.
Je sais que j'ai utilisé le temps qui m'est réservé, Je vous remercie d'avoir écouté le point de vue de TCIG cet après- midi. Je répondrai avec plaisir à vos questions et à toute éventuelle invitation à parler encore plus de cette question ou de toute autre question concernant le développement économique des Autochtones. Votre travail est très important et nous vous remercions pour vos efforts. Nous vous prions de faire en sorte que ce processus se concrétise et ne reste pas au stade des beaux discours qu'un trop grand nombre d'entre nous ont entendus toutes ces années. Nos recommandations ne nécessitent pas des fonds supplémentaires. Nous ne demandons pas des fonds supplémentaires. Il y a des façons innovatrices pour traiter les niveaux de financements traditionnels afin qu'ils soient plus efficaces pour nous. C'était la présentation de Tribal Councils Investment Groups.
Carol Johnston, directeur, Southeast Community Futures Development Corporation : Notre service du développement économique comprend trois programmes. Southeast Community Futures Development Corporation est un programme financé par la Diversification de l'économie de l'Ouest, Southeast Training and Employment Program, qui est financé par RHDCC. Nous exécutons aussi le Programme de développement économique des collectivités au sein du MAINC. Notre service est administré par un conseil d'administration et un comité des prêts. Notre conseil d'administration est composé d'un représentant de chaque Première nation que nous représentons, soit les neuf collectivités des Premières nations du Sud-Est le long du côté est du lac Winnipeg.
Notre comité des prêts se compose de cinq représentants. Deux d'entre eux sont des représentants de notre conseil d'administration, un membre est membre de la collectivité, un est un jeune et l'autre est un comptable général licencié. Le personnel de notre corporation se compose de moi-même, le directeur, du secrétaire exécutif, d'un analyste financier, d'un responsable des prêts, d'un coordinateur formation/emploi et d'un coordinateur de l'emploi. Les trois programmes sont développés au niveau local avec pour but le renforcement de notre économie locale en facilitant l'entrepreneuriat, en donnant accès à la formation et en aidant le développement économique des collectivités.
La région géographique couverte par le Sud-Est est vaste, c'est le moins qu'on puisse dire, allant du point nord de la Poplar River First Nation sur le 53e parallèle au point sud de Buffalo Point sur la frontière entre le Canada et les États- Unis. Cinq des neuf collectivités sont accessibles seulement par avion et par des routes praticables l'hiver pendant trois mois de l'année. La région se trouve principalement dans le Bouclier canadien et se caractérise donc par des rochers, des arbres et de l'eau.
La population de nos collectivités des Premières nations a augmenté considérablement au cours des cinq dernières années. Aujourd'hui, la population totale à l'intérieur et à l'extérieur des réserves compte un peu plus de 10 000 personnes. L'activité économique dans notre région consiste des ressources naturelles, de l'industrie forestière, de la pêche, du piégeage, du tourisme, de l'industrie du jeu, de la fabrication et des magasins de vente au détail. L'activité sur le marché du travail s'élève à 49,16 p. 100, le taux provincial étant de 67,3 p. 100. Les taux de participation des hommes et des femmes en âge de travailler dans ces collectivités étaient sensiblement inférieurs aux taux de participation de la province. Les bas niveaux de participation sont attribués en grande partie à la pénurie d'offres d'emploi offertes aux résidents des collectivités. Les Premières nations, les centres d'administration, les bureaux du conseil de bande sont les principaux employeurs dans nos collectivités.
Les problèmes et les faiblesses que nous avons rencontrés dans la réalisation de nos programmes incluent les distances entre les collectivités et le manque de routes praticables en toutes saisons dans cinq de nos collectivités du Nord. Les coûts de transports élevés pour administrer les trois programmes et surtout les coûts associés à l'établissement et au soutien des initiatives d'entreprise, nouvelles ou existantes, nous posent des problèmes. Nous avons des problèmes avec le niveau de formation des membres de la collectivité et le manque de coopération des gouvernements provinciaux ou des Premières nations. L'accès au capital est un problème ainsi que l'accès aux programmes existants à cause des critères d'admissibilité. Nous rencontrons des problèmes en ce qui concerne le temps qu'il faut pour que les projets soient approuvés, ce qui, en fin de compte, compromet dans beaucoup de cas la mise en œuvre du projet.
Je suis membre du Manitoba Economic Development Advisory Committee pour le Manitoba. Notre comité de révision du projet a été réduit au cours des cinq dernières années et l'un de nos principaux problèmes, c'est que tout projet dépassant 100 000 $ doit être approuvé par Ottawa. Le temps qu'il faut pour que ces projets soient approuvés à l'administration centrale compromet le projet. Nous finissons par essayer de dépenser des dollars car ils n'on pas pu respecter les délais requis pour ce programme étant donné l'échéance que l'on a pour dépenser les dollars durant l'exercice.
Le président : Êtes-vous installés dans la collectivité?
Mme Johnston : Non.
Le président : Comment est formée votre organisation?
Mme Johnston : Nous formons une division du développement économique de Southeast Resource Development Council qui aide les neuf Premières nations le long du côté est du lac Winnipeg. Nous avons un bureau à Winnipeg et cinq emplacements au nord accessibles uniquement par avion.
Le président : J'essaie seulement de m'assurer que je comprends bien qui vous représentez.
Mme Johnston : Les collectivités continueront à rencontrer des problèmes à l'avenir en raison de la structure actuelle de la population. La population en âge de travailler dans nos collectivités va augmenter dramatiquement au cours des quinze prochaines années. Pour assurer et améliorer l'avenir de ceux qui atteindront l'âge de travailler, il faudra créer énormément d'emplois et fournir beaucoup de formation.
L'un de nos atouts, c'est notre personnel, notre organisation affiliée, Southeast Resource Development Council et notre conseil d'administration bénévole très engagé. Nos collectivités collaborent depuis 1978. Nous travaillons dans un environnement politique positif afin d'apporter des changements dans les collectivités autochtones.
J'ai recueilli ces recommandations dans un certain nombre de rapports et d'évaluation faits sur les programmes de développement économique des Autochtones ces dernières années. Je peux dire, je crois que je l'ai mentionné à quelqu'un, qu'un rapport a été fait par l'ACM, le MKO, l'agent de l'acquisition de l'installation et le MAINC sur le développement économique au Manitoba. Une analyse de l'écart a été faite et des recommandations sont jointes au rapport.
Une évaluation du programme de développement économique du MAINC a aussi été faite il y trois ans. Nous avons invité les soixante-deux responsables de développement économique des Premières nations au Radisson pendant trois jours pour évaluer ces programmes. D'excellentes recommandations ont résulté de cette évaluation; cependant, elles n'ont pas été mises en œuvre quand ce programme a été lancé.
Parmi les recommandations, il y avait l'augmentation du financement du développement économique des Premières nations; un meilleur accès au capital privé; une meilleure coordination pour le développement des ressources humaines; le renforcement des programmes d'approvisionnement; la révision et la mise en œuvre des rapports existants et des programmes de développement économique.
Crystal Laborero, chargée de projet, Tribal Wi-Chi-Way-Win Capital Corporation : Comme vous le savez, je suis chargée de projet chez Tribal Wi-Chi-Way-Win Capital Corporation. Quand je suis arrivée cet après-midi, M. Morrisseau mentionnait un projet avec le Business Council of Manitoba et la Chambre de commerce et il a parlé de moi. C'était mon poste précédent. La raison pour laquelle je dis cela, c'est parce que j'ai un certain nombre d'années d'expérience dans le milieu des affaires. Je vais dire certaines choses aujourd'hui qui peuvent ne pas être des expériences de Tribal Wi-Chi-Way-Win mais les miennes.
Tribal Wi-Chi-Way-Win est un établissement de crédit qui fournit des ressources aux entrepreneurs des Premières nations. Il existe depuis 1993 et comptait trois employés au début. À cette époque, nous projetions de faire des prêts commerciaux. Tribal Wi-Chi-Way-Win a été fondé grâce aux efforts de cinq conseils tribaux du Manitoba et d'un certain nombre de Premières nations indépendantes. Les principaux objectifs sont de fournir un financement pour l'établissement, l'expansion et la diversification des entreprises autochtones, d'améliorer l'accès au capital pour les entrepreneurs et de créer des possibilités de développement des entreprises au moyen de l'éducation et du partage de l'information. Je reviendrai sur cela en détail car c'est une question très importante pour les entrepreneurs autochtones, promouvoir leur croissance et leur développement à l'aide de nos services consultatifs.
Le prêt commercial constitue notre principale activité. Nous y avons ajouté un programme de prêts agricoles. Nous avons affaire à un certain nombre d'agriculteurs autochtones au Manitoba à qui nous fournissons des services. Nous avons aussi un portefeuille de prêts pour les jeunes afin de les sensibiliser et les encourager à devenir aussi des entrepreneurs. Les services consultatifs font nouvellement partie de nos activités. En fait, nous mettons à disposition un agent des services aux entreprises, un agent des services aux jeunes, un conseiller agricole pour les Premières nations ainsi qu'un représentant au nord du Manitoba. Nous avons créé le poste d'agent des services aux entreprises il y a deux ans car nous accordons des prêts pour le développement.
Nos taux d'intérêt sont élevés, je ne vais pas vous le cacher, mais ils le sont parce que nous ne recevons aucun fonds de fonctionnement et que nous sommes aussi un prêteur de dernier recours. Nous voyons des gens enthousiastes, engagés et habités par l'esprit d'entreprise puis, malheureusement, nous constatons qu'ils n'ont pas les compétences en gestion requise pour réaliser leurs rêves. Nous consacrons beaucoup de temps à essayer de faire en sorte que les gens soient en mesure d'entreprendre leurs projets. Nous nous sommes rendu compte que ça devenait une tâche tellement pénible que nous avons dû embaucher un agent des services aux entreprises. Nous avons recueillis des fonds pour financer ce poste, mais nous devons en faire la demande chaque année. Nous en sommes arrivés à la conclusion que nous devions créer nos clients.
Soudainement, nous constatons que c'est la même chose dans le secteur de la jeunesse et des services aux jeunes. Notre prêteur fait des exposés dans les collectivités afin de présenter aux jeunes les possibilités qui leur sont offertes.
Tribal Wi-Chi-Way-Win s'est vite rendu compte que pour durer, il fallait diversifier les activités et faire deux ou trois choses à cette fin. En plus de notre portefeuille de prêts de huit millions de dollars, nous avons aussi une sous-société en partenariat avec le Programme canadien de prêts aux étudiants. Nous avons un important partenaire à Toronto. Nous sommes le seul centre d'appels autochtones au Manitoba. En fait, nous pourrions même être le seul au Canada aujourd'hui, donc cela est très important car nous sommes associés à cette grande organisation. Je pense que nous travaillons dans ce secteur parce que d'une part nous sommes très proactifs et d'autre part parce que l'approvisionnement est réservé.
Je veux me faire l'écho de mes collègues. Les politiques d'approvisionnement sont très importantes parce qu'elles permettent d'ouvrir des portes et nous avons pu mettre le pied dans la porte, puis nous faufiler tout entier, et nous entretenons maintenant une relation à très long terme avec cette entreprise. Cela ne serait pas arrivé si le programme d'approvisionnement n'avait pas existé.
Le 1er octobre, nous faisons l'acquisition d'une petite entreprise de services financiers et nous envisageons sérieusement d'essayer de fournir certains services financiers parce que nous trouvons que le système bancaire traditionnel ne fonctionne pas pour nos collectivités. Nous avons un certain nombre de clients réguliers. Je vous ai dit que nos taux d'intérêt étaient élevés parce que nous accordons des prêts pour le développement d'entreprises et, en fait, nous avons amené ces personnes jusqu'au point où elles avaient beaucoup de capitaux propres dans leurs entreprises. Un jour, les gens sont prêts à s'adresser au système bancaire traditionnel et à emprunter, mais parce qu'ils sont en relation avec nous, nous sommes des Autochtones qui traitent avec des Autochtones, nous connaissons leur situation, nous connaissons leurs collectivités, nous connaissons leur clientèle, ils se sentent très à l'aise de travailler avec nous. Nous pensons qu'il est important de maintenir le même type de relation et de commencer à l'envisager à un niveau plus personnel.
Nous sommes un organisme communautaire qui a vraiment à coeur de faire une différence dans la collectivité. Je suis gêné de dire que nous devons exiger 13 p. 100 pour un prêt parce que les gens font des emprunts sans avoir de garantie. Nous devons être une entreprise durable. Nous sommes critiqués en tant que membres de la communauté autochtone par la masse qui pense que nous obtenons du financement pour ceci et pour cela. Ce n'est pas le cas. Je pense que lorsque vous regardez les véritables chiffres, vous voyez que ce n'est pas le cas.
Quatre-vingt-quinze pour cent de notre conseil d'administration et 95 p. 100 de notre personnel est autochtone. L'âge moyen de nos gens est de 33 ans et 50 p. 100 de notre personnel participe à un processus d'éducation et d'apprentissage à vie. Nous encourageons tous les membres de notre personnel à suivre une formation quelconque parce que nous sommes conscients que ces employés peuvent nous quitter. Nous sommes conscients que nous formons des personnes qui vont contribuer à l'économie et à notre collectivité. C'est important dans le contexte global du développement économique.
Nous avons décidé de devenir un employeur de choix au sein de la collectivité autochtone. Nous voulons vraiment faire une différence. Compte tenu de tous les types d'entreprises auxquelles nous allons participer, cela deviendra de plus en plus important au fur et à mesure que nous avancerons.
Au cours des trois dernières années, nous avons accordé 15 bourses d'étude à des étudiants qui fréquentent des établissements postsecondaires. Nous sommes un organisme en croissance, à tel point que nous manquons de place. J'occupe la salle de conférence. Nous avons dû sortir la table de conférence pour faire de la place pour mon bureau.
Je pense qu'une des principales raisons qui expliquent pourquoi nous avons eu du succès en tant qu'organisme, c'est parce que nous estimons vraiment que nos ressources humaines constituent notre actif le plus important. Nous avons connu du succès parce que nous avons également essayé, de manière très diligente, de séparer la politique des affaires. Je ne sais pas comment expliquer cela autrement.
Certains des défis et des occasions sont, évidemment, les taux d'intérêt élevés. Nos gens paient le prix pour ces taux d'intérêt. Les nouveaux entrepreneurs payent les taux d'intérêt les plus élevés à cause de l'absence de fonds de fonctionnement. Nos clients agriculteurs ont d'énormes difficultés à avoir accès aux programmes provinciaux parce que la ligne de démarcation entre les responsabilités des différents paliers de gouvernement est encore floue. Nous avons des gens qui sont coincés entre les politiques fédérales relatives aux Premières nations et les programmes agricoles provinciaux. Nous tentons d'assurer la défense de nos agriculteurs et nous fournissons beaucoup d'éducation et de sensibilisation sur ce qui arrive dans cette industrie.
Les services de consultations sont devenus une partie vitale de notre entreprise en raison du manque de connaissances des affaires de nos clients. Je ne peux insister suffisamment sur le fait que j'aimerais voir cela devenir un élément obligatoire du financement des nouvelles entreprises. J'ai des histoires d'horreur de clients qui arrivent avec une boîte de souliers contenant tous leurs reçus et mon agent de prêt s'assoit avec eux pour les aider à suivre le processus. Cela ne veut pas dire que ces gens ne sont pas engagés ou qu'ils ne sont pas passionnés par la gestion de cette entreprise, mais il y a des endroits où leurs connaissances des affaires font défaut.
Nous aimerions recommander la création d'un programme d'incitatifs qui encouragerait les entrepreneurs, à leurs débuts, à suivre une formation dans ce domaine. Cela les aiderait plus tard. Cela aiderait tous ces prêteurs débutants et aiderait à créer plus d'occasions pour les entrepreneurs autochtones.
Je pense qu'un autre défi ou occasion est la situation géographique de nos clients. Nous offrons des services à tous les gens des Premières nations dans la province. Évidemment, cela a aussi un effet sur les budgets d'exploitation. Autre constatation, nous commençons à voir une forte augmentation des populations urbaines. Nous savons tous que la migration vers les villes est à la hausse et nos clients se retrouvent confrontés au système bancaire traditionnel. Ils se font pousser, bousculer et on leur ferme la porte au nez et comme cela ne fonctionne pas, ils reviennent nous voir. Cela devient compliqué, je pense, parce que la concurrence est beaucoup plus forte pour nos clients urbains.
Je voulais insister encore une fois sur la politique d'approvisionnement. Si on pouvait examiner cette question, il s'agirait très certainement d'un élément très important.
Enfin, je veux vous dire qu'il est vraiment important de consulter les peuples autochtones. Tout au long de notre histoire, tout le monde a pris des décisions à notre place en disant, voici ce que nous avons décidé qui fonctionnerait pour vous en tant que peuple. Nous savons que si vous avez regardé du côté du développement de la collectivité ou du développement économique, vous aurez besoin de leaders, de leaders autochtones pour faire partie de ce processus.
J'aimerais vous remercier de votre temps et je serais très intéressée de voir le document. C'est la troisième fois que je participe à un comité du Sénat et je dois dire que j'ai été déçue des deux premières fois, parce que je n'ai pas vu que l'on avait donné suite aux recommandations.
Le sénateur Peterson : Crystal, je ne pense pas que vous ayez à vous excuser pour les taux d'intérêt de 13 p. 100. Les taux d'intérêt de financement secondaire pour les projets immobiliers sont de 16 à 18 p. 100 et peuvent même aller jusqu'à 20 p. 100. Vous n'avez pas à vous excuser, compte tenu de votre domaine de risque.
Monsieur Campbell, dans votre groupe, est-ce que vous consentez des prêts à des bandes qui sont vos actionnaires?
M. Campbell : Non, nous ne sommes pas un établissement de prêts, nous sommes un établissement d'investissement. Nous représentons les sept conseils tribaux qui comptent en tout 55 bandes et plus de 100 000 membres des Premières nations.
Le sénateur Peterson : Est-ce que vous distribuez des dividendes chaque année?
M. Campbell : Absolument, au taux de 44 p. 100 annuellement, et nous le faisons depuis 15 ans.
Le sénateur Peterson : Excellent. Il faut qu'il y ait des sociétés comme la vôtre. Cet argent devrait être destiné au développement économique. Lorsqu'il est remis aux bandes, il devrait être mis de côté.
M. Campbell : Notre objectif est d'être en mesure un jour de remplacer tout le financement que nous recevons à cet égard et de nous autofinancer.
Le sénateur Peterson :Excellent, merci.
Le président : Est-ce que vous couvrez la totalité de la province du Manitoba?
M. Campbell : Nous couvrons les sept conseils tribaux, la totalité de la province du Manitoba. Il faut garder à l'esprit qu'il y a 64 Premières nations dans la province, dont seulement 55 sont régies par les conseils tribaux eux- mêmes, alors il existe certaines bandes indépendantes. Il ne s'agit pas de bandes qui font partie de notre système, y compris ma collectivité natale de Norway House et la collectivité natale du président de notre société, Alan McLeod, qui vient de Cross Lake.
Le président : Madame Johnston, existe-t-il un conseil d'administration pour la Southeast Community Futures Development Corporation dans votre région?
Mme Johnston : Nous sommes une des 16 Southeast Community Futures Development Corporations du Manitoba. La région que nous desservons est constituée des neuf Premières nations liées au conseil tribal. Il s'agit du groupe qui a adhéré au programme dès 1985. Notre conseil d'administration global s'occupe également de la formation, de l'emploi et du programme de développement économique du MAINC. Il s'agit d'une façon plus facile et moins coûteuse de le faire parce que nous partageons toutes les dépenses au sein de notre programme.
Le président : Avez-vous été en mesure de financer des entrepreneurs, jeunes ou vieux, pour les aider à démarrer?
Mme Johnston : Nous avons financé des entrepreneurs de tous les âges. Nous avons débuté comme entreprise autonome en 1985. Nous avons amené la société à des offres autonomes et nous avons été rebaptisés et placés sous divers programmes. Nous avons trois programmes de fonds d'emprunt, un programme de fonds d'emprunt régulier, un programme pour les entrepreneurs handicapés et un programme de fonds d'emprunt pour les jeunes. Nous avons débuté avec un fonds de 975 000 $ à prêter pour l'ensemble des collectivités de nos neuf Premières nations. Depuis notre création, nous avons financé environ 210 entreprises. Nous avons transformé cet argent en un portefeuille d'environ 4,1 millions de dollars.
Le président : Félicitations. Il n'y a pas d'autres questions, alors j'aimerais vous remercier tous de vos exposés.
Honorables sénateurs, nous avons une autre personne de l'Aboriginal Council of Winnipeg qui aimerait faire un court exposé.
Je veux vous remercier encore une fois, monsieur Campbell, pour le leadership dont vous avez fait preuve. Je connais votre organisme par l'intermédiaire du chef Robert Daniels et je pense que vous faites un excellent travail. Je suis d'accord avec le sénateur Peterson que vous faites preuve d'un leadership réel et je vous encourage à continuer. Nous n'allons rien boire qui provient de la canette rouge. Madame Johnson, vos défis sont devant vous. Madame Laborero, ne vous excusez jamais pour les 13 p. 100.
Larry Wucherer, président, Aboriginal Council of Winnipeg : Je veux dire quelques mots après avoir entendu vos exposés pendant toute la journée. Je pense que j'ai eu une journée semblable à entendre toutes les paroles et les idées différentes et des projets intéressants.
L'Accord de Kelowna était un accord pitoyable. Absolument pitoyable. Il s'agissait d'une approche spécifique qui favorisait l'Assemblée des Premières nations, le Ralliement national des Métis et le groupe Inuit Tapirisat Kanatami. Cet accord ignorait les Autochtones qui vivent en milieu urbain. Je ne parlerai pas au nom des femmes autochtones. Je peux vous assurer que nous avons une excellente relation avec l'Association des femmes autochtones du Canada et Mother of Red Nation, la filiale provinciale ici au Manitoba. Ces deux groupes ont été extrêmement déçus de l'Accord de Kelowna.
Dans un grand nombre d'exposés présentés aujourd'hui, vous avez entendu parler de l'approche pan-autochtone. Pour être bien franc, j'ignore ce qu'ils veulent dire par là. J'ai demandé ce que cela voulait dire, pan-autochtone. Que je sache, et je suis certain que vous le savez également, la Constitution reconnaît les droits des Premières nations, des Métis, des Inuits et des peuples autochtones du Canada. La Constitution ne reconnaît pas l'Assemblée des Première nations; elle ne reconnaît pas le Ralliement national des Métis et le groupe inuit.
Je soulève ce point parce que le message que je veux vous transmettre cet après-midi, c'est que lorsque vous parlez de programmes, vous devez comprendre que le développement économique autochtone est la lumière dans notre tunnel, c'est la lumière qui nous permettra de sortir de notre situation. Mais comment faire pour nous en sortir? Je pense que le sénateur Peterson et quelques autres, et même Mme Laborero, en ont touché un mot, à savoir qu'il doit y avoir une façon de séparer la politique de la prestation réelle des services et du soutien réel aux peuples autochtones.
Nous devons comprendre comment séparer la politique de l'aide réelle apportée aux gens sur le terrain. Par l'intermédiaire de notre groupe politique, l'Aboriginal Council, nous représentons les Autochtones vivant en milieu urbain. Et l'ACM a fait son exposé, je l'ai entendue, et MMF. Eh bien, je peux vous dire que ces groupes n'ont rien eu à voir avec le développement des Autochtones vivant en milieu urbain à Winnipeg. Il y a une centaine de groupes sans égard au statut, comme nous aimons les appeler. Nous aidons tout Autochtone, sans distinction; nous ne cherchons pas à préciser quelle sorte d'Autochtone ou de Première nation il s'agit, nous les aidons.
Ces groupes utilisent les données statistiques de Winnipeg; je trouve que c'est un peu de la fourberie, parce que ce sont les fournisseurs de services, c'est notre groupe, qui a fait tout le travail sur le terrain pendant des années à Winnipeg.
Maintenant, lorsque nous parlons des occasions d'affaires liées à l'approvisionnement, je pense que j'ai eu moi- même des réunions avec les présidents des Chambres de commerce, la Chambre de commerce de Winnipeg, la Chambre de commerce du Manitoba, au sujet des entreprises. Comment faire pour qu'il y ait plus d'Autochtones dans les affaires? À leurs yeux, et je suis d'accord avec eux, ce sont les avenues, une des occasions de la stratégie en matière d'approvisionnement du côté fédéral et provincial.
Certaines des choses qui n'ont pas été dites ici, et vous avez entendu certains des défis et certaines des recommandations, mais une des choses dont nous devons parler, c'est le processus pour obtenir des contrats d'approvisionnement, les exigences en matière de garantie, et les engagements financiers qui doivent être pris pour obtenir ces choses.
Je ne suis pas d'accord avec quelque chose qu'a dit plus tôt Joe Morrisseau. Je ne pense pas qu'il y ait un appétit de la part de la communauté d'affaires non autochtone pour travailler avec la communauté autochtone, mais ils ne savent pas comment faire. Dans mes discussions avec les Chambres de commerce, une des choses que nous avons constatées, c'est comment pouvons-nous obtenir des genres d'agents d'approvisionnement, et faire en sorte que le gouvernement examine une forme quelconque de programme de commandes réservées pour avoir effectivement accès à des contrats d'approvisionnement, mais comment pouvons-nous faire cela dans une sorte de modèle de partenariat? Je suis extrêmement impressionné par la volonté de la communauté non autochtone de venir travailler avec nous.
Une chose dont on ne parle pas et je pense que M. Morrisseau a parlé de misère, et je dis que notre peuple constitue une industrie de la misère. Nous constituons le plus gros poste budgétaire pour le gouvernement provincial et le gouvernement fédéral. Notre situation socioéconomique désespérée est bien connue. Là où je veux en venir avec tout ceci, c'est qu'il y a une centaine de groupes d'Indiens non inscrits et sans statut à Winnipeg. Je leur ai parlé. J'ai eu des réunions avec eux. Il y a le Native Women's Transition Centre, qui est un refuge pour les femmes victimes d'abus. Si ce centre avait un compagnon cuisinier, il pourrait montrer aux femmes à cuisiner et à faire du travail de traiteur. La jeunesse aimerait apprendre à fabriquer des T-shirts. Il y a de nombreux petits artisanats. Je suppose que vous avez vu cela; il existe tout simplement un très large spectre d'entreprises susceptibles d'intéresser notre communauté.
Ce que je vous dis, c'est qu'il y a toute une infrastructure qui existe déjà à Winnipeg et que cette infrastructure veut et reconnaît la nécessité du développement économique, mais il n'y a pas de ressources, il n'y a pas de soutien, il n'y a pas de pensée originale pour aborder cette question. Je pense que l'actif le plus important, c'est la quantité de travail que nous avons déjà accompli. Je suis d'accord avec Robert Campbell. Je ne vous parle pas d'argent neuf; je vous parle de réorienter l'argent et de se concentrer sur des solutions de la base qui viennent des gens de la base.
De notre point de vue, 95 p. 100 de tout l'argent fédéral est destiné aux réserves. Mais nous parlons du milieu urbain. Nous sommes pris dans ce bourbier constitutionnel; très bien, vos offres relèvent peut-être de la responsabilité provinciale, ou du côté fédéral, eh bien, nous avons des cartes de traité et la transférabilité des droits et des choses du genre, mais comment reconnaissons-nous et trouvons-nous une solution pour régler ce problème?
Je veux vous laisser avec quelques pensées. À Winnipeg, par le biais de la Stratégie pour les Autochtones vivant en milieu urbain, je ne sais pas si vous en avez beaucoup entendu parler jusqu'ici, mais à Winnipeg, tous les groupes politiques sont réunis. Nous avons les groupes communautaires, nous avons le milieu des affaires et nous avons les organismes de philanthropie, comme Centraide. Ce groupe est capable de travailler ensemble et de se concentrer sur des questions. Et nous nous concentrons sur les familles et l'éducation. Nous examinons l'élaboration de stratégies de développement économique.
Juste pour vous informer, il y a trois autres groupes dans la province du Manitoba. Tous ces groupes différents travaillaient sur une stratégie de développement économique autochtone. Nous essayons de faire valoir l'idée suivante : pourquoi ne travaillerions-nous pas ensemble sur une stratégie? Pourquoi ne pas réunir ensemble les différentes régions et combiner nos ressources?
Au cours d'une des pauses, j'ai parlé de certaines choses que nous pourrions utiliser dans notre communauté pour les petits entrepreneurs; ce sont des exemples qui viennent de l'Inde, comme les micro-prêts. Ce sont des programmes qui permettent aux gens d'avoir accès à des ressources. Toutefois, parce qu'ils n'ont pas les garanties ou la cote de crédit nécessaires, il s'agit d'amener la communauté à signer, je n'arrive pas à trouver le terme, mais c'est la communauté qui appuie la personne en disant oui, il devrait recevoir peut-être 1 000 $. Nous les appuyons; vous réunissez 20 personnes, comme la famille, non pas comme si vous alliez faire signer une pétition, mais vous amenez les membres de la famille à les appuyer. Ce genre d'initiatives combinées à la communauté autochtone urbaine, par l'intermédiaire de véhicules comme la Stratégie pour les Autochtones vivant en milieu urbain, nous permettraient de commencer à mettre les choses en branle.
Un dernier exemple que je donne toujours aux jeunes. Lorsqu'ils veulent sortir le vendredi soir, les jeunes gens n'ont pas d'argent le matin, mais à force de gratter et d'essayer d'emprunter un dollar ici et là, ils finissent par avoir suffisamment d'argent en soirée pour acheter une caisse de bière et un paquet de cigarettes. Ils appellent cela des compétences de survivant. Ils pensent qu'il s'agit d'une compétence négative. Dans le monde des affaires, on dit qu'ils sont pleins de ressources et qu'ils réussissent. Je pense que nous devons commencer à éduquer nos jeunes au sujet des compétences qu'ils ont, au sujet des occasions qu'ils ont au sein de cette main-d'oeuvre et dans le monde.
Meegwech.
Le président : Merci beaucoup, monsieur Wucherer, nous tiendrons compte de vos propos. Nous vous sommes reconnaissants que vous ayez accepté de collaborer avec nous du point de vue temps. Si vous avez quoi que ce soit d'autre à dire au comité, présentez-le à la greffière du comité et nous allons certainement en tenir compte.
M. Wucherer : Merci beaucoup, honorables sénateurs.
La séance est levée.