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APPA - Comité permanent

Peuples autochtones

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Peuples autochtones

Fascicule 8 - Témoignages du 18 octobre 2006


OTTAWA, le mercredi 18 octobre 2006

Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujourd'hui, à 18 h 16, pour examiner, en vue d'en faire rapport, le processus fédéral de règlement des revendications particulières.

Le sénateur Gerry St. Germain (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Honorables sénateurs, bonsoir. J'ai le plaisir de déclarer ouverte cette séance du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones. Je m'appelle Gerry St. Germain; je viens de la Colombie-Britannique, et je suis le président du comité.

Aujourd'hui, notre comité poursuit ses travaux spéciaux concernant les revendications particulières. Il entend examiner le processus fédéral de règlement des revendications particulières en vue de formuler des recommandations pouvant contribuer à un règlement opportun et satisfaisant des doléances des Premières nations à cet égard.

Ce soir, honorables sénateurs, nous entendrons la vérificatrice générale du Canada, puis des représentants de deux organisations, l'une du Manitoba et l'autre, de la Saskatchewan, qui possèdent une vaste expérience en matière de revendications particulières.

Nous avons également parmi nous un invité, M. David General, qui est chef des Six Nations et qui est ici ce soir à titre d'observateur.

Bienvenue, monsieur General.

D'abord, permettez-moi de souhaiter la bienvenue à Mme Sheila Fraser, vérificatrice générale du Canada. Aujourd'hui, elle est accompagnée du vérificateur général adjoint, M. Ronnie Campbell, ainsi que de M. Jerome Berthelette, directeur principal.

Madame Fraser, je crois que vous allez nous faire un exposé. Bienvenue parmi nous, et merci d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer. Tous les membres du comité attendaient cette réunion avec impatience, et le fait qu'ils soient ici en grand nombre atteste de l'intérêt que suscite votre présence ici ce soir.

Veuillez commencer, madame Fraser.

Sheila Fraser, vérificatrice générale du Canada, Bureau du vérificateur général du Canada : Merci, monsieur le président, et merci, honorables sénateurs, de me donner l'occasion de discuter des travaux de notre bureau en ce qui a trait aux revendications particulières.

Comme on l'a mentionné, je suis accompagnée ce soir de Ronny Campbell, vérificateur général adjoint, et de Jerome Berthelette, directeur principal, qui sont tous les deux responsables de nos travaux au ministère des Affaires indiennes et du Nord Canada.

Ces dernières années, notre bureau a effectué des vérifications portant sur des revendications territoriales globales et sur la mise en œuvre d'ententes de règlement d'un type de revendications particulières. Les revendications territoriales globales sont des revendications des Premières nations à l'égard de terres qui n'ont pas fait l'objet d'un traité. Elles reposent sur l'affirmation de la pérennité des droits ancestraux et du titre autochtone sur le territoire revendiqué. La négociation d'ententes de règlement de revendications territoriales globales vise à établir clairement, pour toutes les parties, les droits d'utilisation des terres et des ressources. Monsieur le président, en novembre, mon bureau publiera les résultats d'une autre vérification portant sur des revendications territoriales globales. Ce chapitre portera sur la participation du gouvernement fédéral au processus des traités de la Colombie-Britannique.

À l'opposé des revendications territoriales globales, les revendications particulières concernent le non-respect présumé d'obligations légales et de traités déjà conclus avec les Autochtones ou l'administration inadéquate de terres ou d'autres biens visés par la Loi sur les Indiens ou d'autres ententes officielles. Les revendications liées au non-respect présumé par le gouvernement de ses obligations peuvent comprendre les écarts suivants : le non-respect d'une disposition d'un traité ou de toute autre entente; le manquement à une responsabilité prescrite par la Loi sur les Indiens ou à toute autre obligation légale; le non-respect d'une obligation découlant de l'administration par le gouvernement de fonds ou de tout autre bien des Premières nations; la vente illégale ou toute autre forme d'aliénation, par le gouvernement, de terres appartenant aux Premières nations.

Au 31 mars 2006, le ministère des Affaires indiennes et du Nord négociait des ententes de règlement de 729 revendications particulières, ce qui représente des dettes éventuelles importantes. Au moment de préparer les comptes publics, on calcule les dettes éventuelles d'après les meilleures estimations de la direction, au moyen d'une formule établie et d'une méthode d'évaluation.

Étant assez complexe, la méthode exige beaucoup de travail de la part du ministère. Lorsqu'une nouvelle revendication est acceptée, celle-ci est classée parmi l'une des 76 catégories définies par le ministère. Ainsi, les revendications particulières peuvent être : des droits fonciers issus de traités, par exemple du fait que les terres n'ont pas été mises de côté pour les Autochtones; la prise de possession de terres, par exemple pour l'attribution de permis ou l'installation de lignes de transport d'électricité; et la cession ou l'aliénation de terres, par exemple pour la construction d'autoroutes.

La nouvelle revendication particulière sera évaluée en fonction de sa classification, selon la valeur moyenne historique des ententes de règlement conclues par le passé pour chaque type de revendication. Les nouvelles ententes de règlement influeront donc sur la valeur moyenne de la classification et, par conséquent, sur la valeur des revendications particulières faisant l'objet de négociations selon leur type de revendication. Les valeurs des revendications sont attribuées en fonction du type, uniquement par le ministère des Affaires indiennes et du Nord.

[Français]

Dans le chapitre 7 de notre rapport de novembre 2005, nous avons fait état des progrès réalisés par le gouvernement pour ce qui est de respecter ses obligations en vertu des attentes sur les droits fonciers issus de traités, plus particulièrement les ententes conclues avec les Premières nations du Manitoba et de la Saskatchewan. Les ententes sur les droits fonciers issus de traités permettent de traiter les lacunes passées en ce qui a trait aux terres qui devaient être cédées aux Premières nations en vertu de ces traités.

Nous avons vérifié si le ministère des Affaires indiennes et du Nord dispose d'un cadre pour administrer les ajouts aux réserves qui sont établis aux termes des ententes sur les droits fonciers issus de traités, conformément aux obligations légales que lui confère ces ententes. Nous avons constaté que les lacunes dans les pratiques de gestion du ministère ont limité ces progrès dans la conversion en réserve d'un grand nombre d'acres de terre que les Premières nations ont sélectionnés en vue de les ajouter à leurs réserves dans les deux provinces. Trois grands obstacles ont été cernés, soit des évaluations environnementales périmées, des ressources insuffisantes affectées aux travaux d'arpentage et l'absence d'une stratégie visant à aider les Premières nations à régler les questions concernant les intérêts de tiers.

Nous avons aussi constaté que le ministère avait peu suivi les progrès réalisés dans la sélection des terres et qu'il n'avait établi aucun plan ni aucune cible visant la conversion des terres sélectionnées. De plus, les pratiques de gestion des dossiers étaient inadéquates et comportaient plus d'outils et de directives à l'intention du personnel.

Nous avons formulé six recommandations liées à ces aspects clés. Nous n'avons pas encore fait le suivi des mesures prises par le ministère depuis notre vérification. Toutefois, nous avons constaté que son site Web renferme maintenant des directives réalisées sur l'évaluation environnementale des sites, comme le ministère s'y était engagé en réponse à nos recommandations. Dans les prochaines années, nous comptons faire le suivi des progrès réalisés par le ministère dans le règlement des droits fonciers issus de traités.

[Traduction]

Un autre de nos chapitres pourra être utile à votre étude portant sur les revendications particulières. En mai de cette année, nous avons publié notre rapport Le Point, dont l'un des chapitres portait sur l'étendue des progrès réalisés à l'égard des recommandations formulées à la suite de vérifications terminées ou rendues publiques entre 2000 et 2003. Malgré que ces chapitres ne portent pas sur des revendications territoriales comme telles, ils font toutefois état des résultats de notre examen d'un vaste éventail de programmes fédéraux destinés aux Premières nations.

Dans notre vérification de suivi, nous avons formulé plusieurs observations importantes dont j'aimerais vous faire part ce soir. Nous avons constaté que le gouvernement fédéral a fait des progrès satisfaisants dans la mise en œuvre de la plupart des 37 recommandations formulées dans nos chapitres. Cependant, nous avons constaté que les progrès réalisés à l'égard de 15 de nos recommandations n'étaient pas satisfaisants. En règle générale, ce sont les recommandations qui sont les plus importantes pour la qualité de vie et le bien-être des membres des Premières nations.

[Français]

Ces vérifications nous avaient permis de cerner sept facteurs qui semblaient avoir joué un rôle essentiel dans la mise en œuvre réussie de nos recommandations : l'intérêt soutenu de la direction, la coordination efficace des programmes gouvernementaux, la consultation fructueuse auprès des Premières nations, le développement des capacités des Premières nations, la création d'institutions des Premières nations, l'établissement d'un fondement législatif approprié pour les programmes et finalement, la prise en compte de la question des rôles incompatibles du ministère des Affaires indiennes et du Nord. Selon nous, le ministère fera des progrès, du moins en partie, dans l'amélioration et la rationalisation du processus des revendications particulières dans la mesure où il tiendra compte de ces facteurs essentiels dans la conception des programmes.

Monsieur le président, je termine ainsi ma déclaration d'ouverture. Mes collègues et moi seront heureux de répondre aux questions des membres du comité.

Le président : Merci beaucoup, Madame Fraser.

[Traduction]

Le sénateur Peterson : D'autres témoins ont parlé des problèmes qu'ils croyaient être à l'origine des dettes éventuelles. Trois domaines sont concernés : les revendications globales, les revendications particulières et les droits fonciers issus de traités. Disposons-nous de chiffres sur ces trois éléments?

Mme Fraser : Au moment de préparer les comptes publics, le gouvernement calcule les dettes des revendications particulières en utilisant la méthodologie que j'ai expliquée plus tôt. Pour ce qui est des revendications territoriales globales, on ne fait aucune évaluation des dettes avant qu'il y ait des ententes, parce que celles-ci dépendent beaucoup des approbations des différents paliers de gouvernement, et que de gros montants peuvent être en jeu. Par conséquent, avant de comptabiliser une dette, le gouvernement a tendance à attendre pratiquement jusqu'à ce qu'on ait conclu une entente définitive. Quant aux revendications particulières, on procède à une estimation qu'on réévalue chaque année, et un montant est enregistré dans les Comptes publics du Canada.

Le sénateur Peterson : Est-ce qu'on connaît ce montant?

Mme Fraser : Oui, mais je vous demanderais de vous en informer auprès des fonctionnaires du ministère des Affaires indiennes et du Nord Canada. J'hésite à vous révéler cette donnée car je ne suis pas certaine que le gouvernement souhaite qu'elle soit divulguée. Je ne crois pas qu'elle apparaisse séparément dans le bilan. Nous pouvons comprendre que révéler ces chiffres est délicat, mais je pense que c'est une information que le ministère devrait pouvoir vous fournir.

Le sénateur Peterson : C'est là où le bat blesse. Les Premières nations disent que, comme ce montant n'a été ni quantifié ni précisé, ou qu'il est trop peu élevé, on n'a pas prévu les sommes appropriées. Je crois que ces dettes pourraient atteindre un montant très important et, par conséquent, rien ne se produit vraiment.

Mme Fraser : On présente ces données dans les états financiers; malheureusement, je ne les ai pas avec moi. Je peux vous indiquer, et nous pouvons envoyer cette information par écrit au comité, que les notes afférentes aux états financiers exposent le montant des dettes éventuelles ayant trait notamment à diverses poursuites dont le gouvernement fait l'objet. Nous devons également tenir compte du fait qu'en cas de poursuites, le défendeur n'indiquera pas à celui qui le poursuit combien d'argent il consentira à verser. Cela fausserait tout le processus. Je conçois que le gouvernement puisse être réticent à fournir de nombreux détails, mais il serait probablement possible pour lui de révéler le montant total.

Le sénateur Peterson : L'autre problème évoqué par les intervenants est le processus de définition des dettes et de reconnaissance des revendications. Certaines d'entre elles remontent à 10 ou 12 ans. On nous a dit qu'à lui seul, le règlement des revendications en suspens, des 500 ou 600 qui sont reconnues, pourrait prendre de 80 à 90 ans. Nous n'accomplissons vraiment aucun progrès, et il continuera d'en être ainsi si l'on persiste à tourner en rond avec les chiffres et à se dire impuissant tant qu'on n'en sait pas davantage.

Les intervenants ont indiqué qu'un tribunal indépendant pourrait être utile. J'ignore où il interviendrait dans le processus. Néanmoins, entre le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, le MAINC, Justice Canada et le gouvernement, les dossiers piétinent et sont paralysés parce qu'il ne semble pas y avoir de volonté de les faire avancer. Je crois que vous avez indiqué dans votre rapport que les choses progressaient seulement jusqu'à un certain point, puis traînaient pendant quelques années avant de refaire surface. Les Premières nations se sont montrées extrêmement patientes face à toutes ces questions, mais je ne suis pas certain que nous pourrons compter là-dessus bien longtemps.

J'apprécierais d'entendre vos commentaires sur le processus. Comment pouvons-nous le simplifier? Comment le faire fonctionner? Comment nous fixer des objectifs? Comment pourrez-vous vérifier la performance? Je sais que c'est toujours une question de temps, d'argent et de ressources humaines, mais j'ai l'impression que nous devrions le faire plus souvent qu'à tous les trois ou quatre ans.

Mme Fraser : Merci, sénateur, pour vos commentaires. Malheureusement, aucun de nos travaux n'a porté en particulier sur ce processus. Nos vérifications, du moins jusqu'ici, ont eu tendance à porter sur l'application des ententes une fois celles-ci conclues. En ce qui concerne les droits fonciers issus des traités, il y avait une entente claire au sujet du territoire à céder et nous avons étudié les raisons pour lesquelles on prenait autant de temps à convertir en réserves des terres qui ne faisaient l'objet d'aucun litige. L'opération prenait énormément de temps. Nous avons surtout commencé nos vérifications lorsqu'il y avait une entente. Nous sommes actuellement en train de faire une vérification sur la gestion de Justice Canada. Je ne sais pas si cette question en fait partie, mais je peux certainement examiner s'il y a quoi que ce soit que nous pouvons faire à cet égard. Quelque chose me dit qu'il s'agit davantage d'une gestion générale des dossiers. Quoi qu'il en soit, je peux demander à mon équipe d'évaluer la question, et nous allons certainement en tenir compte dans nos futurs travaux de vérification.

Le sénateur Peterson : Vos recommandations pourraient vraiment nous aider à faire bouger les choses dans toute cette affaire. Merci beaucoup.

[Français]

Le sénateur Gill : Vous abordez plusieurs points importants dont le développement, la consultation fructueuse, la création d'institutions et l'établissement de fondements législatifs appropriés pour les programmes des Premières nations et des rôles incompatibles que joue le ministère des Affaires indiennes et du Nord. Vous touchez à l'essentiel. C'est ce que réclament les Premières nations depuis que le Canada existe.

Vous dites qu'il n'y a pas eu de résultats, et c'est le point névralgique des revendications. Qu'arrive-t-il au plan des revendications?

Mme Fraser : Nous avons examiné les cas qui ont eu du succès afin d'en déterminer les causes. Après discussion avec des représentants du ministère des Affaires indiennes et des Premières nations, nous avons pu mettre en relief des facteurs qui ont permis de faire avancer les dossiers et d'avoir du succès. Si la direction du ministère porte intérêt au dossier et maintient le suivi, il y a des résultats. D'autres facteurs sont également très importants, mais le suivi et l'intérêt soutenu de la part de la direction représente un atout majeur.

Un des problèmes fréquemment mentionnés concerne le roulement du personnel. Les responsables de dossiers sont trop souvent remplacés. Cela exige de renouer constamment des liens de confiance et entraîne une perte de temps inutile.

[Traduction]

Le sénateur Gill : En plus de ce que vous venez de dire, vous avez mentionné un élément fondamental, à savoir qu'il faut régler la nature conflictuelle des rôles que joue le MAINC. Que voulez-vous dire par là?

[Français]

Mme Fraser : Le ministère reconnait la nature conflictuelle des rôles qu'il joue. D'une part, il rend des services aux Premières nations, fournit du financement pour leurs programmes et, d'autre part, il est poursuivi par les Premières nations devant les tribunaux lorsqu'il ne respecte pas ses obligations. Son rôle de fiduciaire auprès des Premières nations est un exemple. Plusieurs rôles sont conflictuels en soi.

C'est au gouvernement de s'organiser comme il le souhaite, mais il doit tenir compte du fait qu'il est difficile d'entretenir une relation de confiance avec les Premières nations dans ces conditions.

Le sénateur Gill : C'est ce que déplorent les Premières nations. Vous dites que ce scénario dure depuis longtemps. Si c'est vous qui le dites, peut-être que le ministère des Affaires indiennes vous écoutera davantage.

Peut-on espérer que le ministère corrige la situation? Établir des bases législatives pour les programmes est primordial pour les Premières nations. J'imagine que vous ferez un suivi.

Mme Fraser : Pour ce qui est du problème des rôles conflictuels, le vérificateur général hésite toujours à se prononcer sur ce qu'il appelle « des questions de mécanique gouvernementale ». Le gouvernement décide de la façon dont il veut s'organiser, mais le vérificateur général peut toujours lui mentionner un problème particulier et lui demander au moins d'en tenir compte. On hésite beaucoup à lui dicter sa conduite.

Cela fait une dizaine d'années que nous soulevons la question de l'absence de fondement législatif quant au programme des médicaments pour les Premières nations. Cela crée énormément de difficultés quand on veut obtenir le consentement des Premières nations pour obtenir des analyses, prévenir des cas d'abus et la prescription de médicaments inappropriés.

Je crois qu'on a fait au moins quatre vérifications successives sur ce programme. Chaque fois, la question d'une base législative est soulevée. Le ministère dit ne pas être d'accord avec nos recommandations. Peut-être est-ce une question que le comité voudrait soulever avec le ministère.

Le sénateur Gill : Peut-on établir un lien entre ce que vous recommandez, c'est-à-dire une législation appropriée pour éviter les conflits que le gouvernement ou le ministère peut avoir lui-même, et les montants d'argent dépensés pour les revendications? Parce que des revendications sont en cours depuis 25 et 30 ans. J'imagine qu'il y a un responsable; est- ce les Indiens ou est-ce le gouvernement qui est responsable des dépenses qui ont été effectuées, faute d'une législation appropriée ou faute d'un rôle défini?

Mme Fraser : Il est certain qu'il faut établir des rôles et des responsabilités clairement définis. Une législation peut sûrement aider à concrétiser cela, mais j'hésite par contre à dire que cela va être la solution à tous les problèmes.

On note dans certains dossiers que même lorsqu'il y a un engagement ou une entente, et qu'il est clair qu'il y a obligation que le gouvernement fédéral doit transférer des terrains aux réserves, cela ne se fait pas dans un délai raisonnable.

La législation peut être utile, mais c'est aussi le suivi et la mise en œuvre de tout le reste qui doit être amélioré par l'établissement d'un meilleur processus et d'un suivi plus rigoureux.

Le sénateur Gill : Souvent, les populations indiennes ont à porter l'odieux d'une mauvaise administration, alors que c'est faute de mécanismes gouvernementaux appropriés qui ne sont pas en place. Cela donne les résultats que l'on peut constater : il n'y a pas de solution ou cela prend du temps et on dit alors que les Indiens sont des gens qui dépensent beaucoup d'argent.

Mme Fraser : Notre rôle est d'effectuer la vérification auprès des ministères du gouvernement fédéral. Nous n'effectuons pas de vérification auprès des Premières nations et des communautés, bien que nous ayons collaboré de façon excellente et de façon volontaire pour effectuer nos travaux de vérification.

Nous notons toutefois qu'il y a place à beaucoup d'amélioration au sein du gouvernement fédéral en ce qui concerne ces processus et ceci dans le respect des engagements qu'il a pris.

[Traduction]

Le président : J'ai une brève question pour vous, madame Fraser. D'après votre expérience, ou celle de votre bureau, si on mettait sur pied une commission indépendante pour traiter de ces revendications particulières, y aurait-il une façon d'élaborer un système de reddition des comptes, de sorte que le gouvernement aurait l'assurance que cette entité particulière ne jette pas l'argent des contribuables par les fenêtres, mais peut arriver à des solutions? Comme le sénateur Peterson le dit, tant qu'une instance indépendante ne sera pas créée, le financement restera insuffisant, paraît-il. À moins que nous changions le système actuel pour créer une instance indépendante qui traitera des revendications particulières, qui sont notre dette envers les Autochtones, ce que nous leur devons. Ce n'est pas comme si nous tentions de négocier une revendication globale. Il s'agit de cas indéniables de fraude et de mauvaise gestion de la part d'agents du ministère, et cetera.

Y a-t-il pour nous un moyen d'élaborer un budget et un système qui vous satisferaient, en tant que vérificatrice générale, ce qui nous permettrait d'accomplir ce qui doit être accompli d'une façon beaucoup plus rapide et efficace?

Mme Fraser : J'aimerais croire que c'est possible. J'estime qu'il y a des principes de bonne reddition de comptes et de bonne gouvernance qui peuvent être appliqués dans n'importe quelle situation. J'ai trouvé intéressant que vous indiquiez que l'une des raisons invoquées pour justifier le retard était un financement inadéquat. Je ne vois pas exactement comment une organisation distincte résoudrait le problème. Si, actuellement, le financement est insuffisant, ce sera la même chose avec une nouvelle instance.

Il est important de cerner les causes premières de cet arriéré. D'après mon expérience, plusieurs de ces dossiers sont très longs et complexes. Cela n'excuse pas nécessairement les retards, dont certains sont sans doute inacceptables, mais on doit souvent consacrer beaucoup de temps à ces dossiers. Il faut également se pencher sur tout le processus, c'est-à- dire pas seulement examiner l'entité qui s'en charge.

Le sénateur Sibbeston : Ma question est la suivante : en tant que vérificatrice générale du Canada, vous êtes évidemment chargée de vérifier le travail effectué au sein du gouvernement. Ne sentez-vous pas le besoin urgent de vous concentrer sur un dossier en particulier, par exemple celui des revendications particulières, qui est si important et même essentiel pour les Canadiens et les Premières nations de notre pays? S'il existe un dossier susceptible d'entraîner des perturbations et la désobéissance civile, comme durant la crise d'Oka et plus récemment celle de Caledonia, c'est bien celui des revendications non résolues entre les Premières nations et le gouvernement fédéral.

Ne voyez-vous pas de motifs pressants de découvrir le véritable problème, la raison des retards dans le règlement des revendications et d'essayer de voir quelles mesures pourraient être prises pour accélérer le processus? Ainsi, en tant que pays et gouvernement, nous pourrions régler ces problèmes et continuer notre vie, dans un certain sens.

Mme Fraser : Je reconnais que la question des revendications est très importante; évidemment pour les Autochtones, mais aussi pour l'ensemble du pays. Nous avons commencé à essayer de nous attaquer à ce dossier, mais étant donné sa complexité, nous avons d'abord décidé d'étudier la mise en œuvre des ententes de règlement. Nous finirons probablement par nous pencher sur le dossier, mais nous voulons en premier lieu développer nos propres compétences pour être en mesure d'effectuer une vérification efficace.

Par contre, si le comité trouve qu'une telle vérification est particulièrement importante et nous demande de la mener, je peux dire qu'habituellement, nous essayons d'accéder aux demandes des comités parlementaires. Si, dans le cadre de votre étude, vous jugez que d'autres questions devraient faire l'objet d'un examen de notre part, nous serions certainement disposés à le faire.

Le sénateur Sibbeston : Je vois bien le travail que vous avez fait dans ce dossier. Vous avez examiné la question des droits fonciers issus des traités, au Manitoba et en Saskatchewan, et vous avez décelé des inefficacités ainsi que de nombreuses lacunes administratives; cela vous donne peut-être une idée. Les droits fonciers sont complexes, mais peut- être pas autant que les revendications particulières. Je suis certain que les revendications se rapportent souvent aux traités, aux ententes ou aux accords.

Quant à savoir si l'accord est complet, je soupçonne que certaines revendications outrepassent les dispositions écrites des ententes. Cela a été le cas dans les Territoires du Nord-Ouest, d'où je viens, et où on avait signé un traité avec les Autochtones du Nord en 1921. Cependant, lorsque le tribunal a examiné le traité lui-même, il a pu voir qu'il n'était pas bien défini. Aux yeux des Autochtones, on ne respectait pas le traité tel qu'il était rédigé.

Il ne traduisait pas exactement ce qui avait été conclu en 1921. J'imagine que c'est le cas dans plusieurs autres revendications. Je constate que les revendications sont très complexes et que le processus suivi par les Affaires indiennes et du Nord Canada, AINC, repose en partie sur les avis juridiques donnés par le ministère de la Justice. Ce qui ralentissait le processus, nous a-t-on dit, c'est le fait que le ministère de la Justice prenne dix ans pour émettre un avis juridique au sujet des revendications.

Si vous deviez effectuer une vérification de tout le processus au sein d'AINC, examineriez-vous aussi les procédures du ministère de la Justice pour déterminer la cause de ces retards, à savoir s'il y a suffisamment de personnel et si celui- ci est assez qualifié pour régler toutes ces revendications?

Mme Fraser : Sous toute réserve, je pourrais peut-être vous parler des travaux de vérification dont fera état notre rapport qui paraîtra à la fin novembre. Comme je l'ai mentionné dans mon exposé, nous avons procédé à une vérification du processus de négociation des traités en Colombie-Britannique, dans le cadre de laquelle nous avons tenté de dégager les facteurs qui ont pu ralentir le processus.

J'ai bien l'impression que les considérations juridiques et les causes portées devant les tribunaux entrent en ligne de compte. Je ne veux pas trop m'avancer parce que nous devons attendre le dépôt du rapport, mais je me doute bien que le comité s'y intéressera lorsqu'il sera publié en novembre.

Le président : Portera-t-il sur les revendications territoriales globales?

Mme Fraser : Sur le processus de négociation des traités en Colombie-Britannique.

Le président : Ce processus vise surtout des revendications territoriales globales, n'est-ce pas?

Mme Fraser : Tout à fait.

Le président : Merci.

Le sénateur Hubley : Merci pour votre exposé et bienvenue à tous.

Bon nombre de nos questions porteront sur le financement. En votre qualité de vérificatrice, lorsque le fonctionnement d'un ministère, pour une raison ou une autre, ne répond pas à vos attentes, vous appartient-il, si je puis m'exprimer ainsi, de dire que ce ministère est sous-financé et de recommander qu'il reçoive plus de fonds pour que puissent exister les sept facteurs qui, selon vous, sont essentiels au règlement d'une revendication?

Mme Fraser : Le Bureau du vérificateur général hésite beaucoup à dire qu'un ministère a besoin de plus d'argent. Dans le cadre de nos vérifications, nous pouvons relever les écarts entre le financement nécessaire à l'atteinte des objectifs fixés par un ministère et le financement qui lui est réellement versé à cette fin.

Par exemple, pendant un certain nombre d'années, le ministère de la Défense nationale avait des attentes qui ne correspondaient pas du tout au financement qu'il recevait. Lorsque le Bureau du vérificateur général a signalé ce point, certaines personnes ont interprété cette observation comme une demande de fonds supplémentaires pour la Défense nationale. Nous avons répondu qu'il ne s'agissait pas de cela, mais plutôt que les attentes pourraient être redéfinies en fonction du financement. Cependant, il n'est pas juste que les fonctionnaires ou les personnes touchées par ce ministère tentent d'atteindre des objectifs ou d'obtenir quelque chose alors que les ressources sont insuffisantes.

C'est ce que nous vérifions dans le cas de bien des programmes. Nous évaluons si les ministères disposent de suffisamment de ressources pour réaliser les objectifs qu'ils ont établis.

Le sénateur Hubley : C'est un problème fréquent. Les revendications s'accumulent, mais le nombre de règlements est stagnant ou diminue; cela crée évidemment des problèmes.

D'entrée de jeu, vous avez recommandé un intérêt soutenu de la part de la direction; en effet, c'est indispensable. Le fait que du nouveau personnel reprenne le dossier depuis le début occasionne beaucoup de retard. Certaines revendications importantes n'ont pu être réglées parce qu'il n'y avait aucun mécanisme à cet effet, et c'est frustrant.

Cet arriéré coûte cher aux Premières nations; les Canadiens ont donc le devoir moral de prendre cette question très au sérieux. Au cours de notre étude, nous observons les deux côtés de la médaille. Tout ce que vous faites est bien, mais il y a toujours un problème; nous devons donc essayer de combler les lacunes, d'une façon ou d'une autre, pour que le processus commence à fonctionner.

J'ai lu vos recommandations et certaines relèveraient probablement d'un tribunal des revendications indépendant, quelque chose qui nous a été dit par quelques témoins. De façon générale, je crois qu'il doit y avoir une décision au nom du gouvernement et, plus important encore, des Canadiens et des Canadiennes. Le dilemme moral ici pour moi, c'est que cela dure depuis si longtemps et, pourtant, nous n'arrivons même pas à faire du rattrapage.

Mme Fraser : Dans un de nos rapports, nous avons tout bonnement traité du financement. Nous avons noté que le financement des programmes destinés aux Premières nations a augmenté au cours des dernières années, mais pas au même rythme que la croissance de la population. Nous avons signalé que le financement du ministère des Affaires indiennes et du Nord du Canada a augmenté de 1,6 p. 100, compte non tenu de l'inflation, au cours des cinq années de 1999 à 2004, tandis que la population des Indiens inscrits au Canada, selon le ministère, a augmenté de 11,2 p. 100.

Je suggérerais au comité d'inviter le ministère des Finances à comparaître pour parler du cadre fiscal et de la façon dont il voit le financement pour le règlement des revendications et les autres questions, lorsqu'il fait ses attributions.

Le sénateur Hubley : C'est une très bonne suggestion.

Veuillez m'excuser si vous avez déjà répondu à la question suivante : pouvez-vous ou non chiffrer les dettes éventuelles concernant les 729 revendications particulières?

Mme Fraser : Je ne peux pas le faire. Vraiment, c'est au gouvernement de donner ce chiffre.

Le sénateur Hubley : Peut-être que nous pourrions poser la question à un autre ministère.

Mme Fraser : Absolument.

Le sénateur Dyck : Merci de votre exposé. Il était très clair et concis.

Nous avons entendu une variété de points de vue des gens assis de l'autre côté, qui attendent que leurs revendications soient réglées. Votre rapport sur les droits fonciers issus de traités indique dans le cas de la Saskatchewan en particulier, et à un moindre degré, dans celui du Manitoba, que le taux de succès a été plus élevé en ce qui concerne les ententes réelles qui ont été signées et les terres qui ont été converties en réserves, de sorte qu'en Saskatchewan, près de 60 p. 100 des terres ont été converties en réserves.

Vous avez également dit que dans le cas de ces ententes, il n'y avait pas de dispute entourant la quantité de terres qui devait être cédée à la Première nation particulière. Considérez-vous qu'il s'agisse là d'un facteur déterminant pour ce qui est d'accélérer le processus, comparativement à certaines des revendications territoriales particulières en suspens? Est-ce que l'absence de dispute serait un facteur clé?

Mme Fraser : Absolument. Lorsque nous avons examiné les droits fonciers issus de traités dans cette vérification particulière, à nos yeux, le fait qu'il n'y avait pas de dispute au sujet de la quantité de terres à céder était, de toute évidence, un facteur déterminant. Il a fallu des années de négociations pour en arriver à un règlement et à une entente, et maintenant, il s'agit de considérer comment l'entente est mise en application. Nous avons constaté, comme vous l'avez dit, qu'au Manitoba, seulement 12 p. 100 des terres avaient été converties depuis 1994, c'est-à-dire, 12 ans après la signature d'une entente claire sur le nombre d'acres de terres à convertir, et pourtant, seulement 12 p. 100 des terres avaient été converties définitivement. Cela indique qu'il existe un problème réel dans la mise en application des ententes. Dans ces vérifications particulières, nous ne sommes pas allés voir en arrière pour examiner le processus qui mène à ce résultat. Une fois qu'il y a une entente, on peut supposer que les choses se dérouleront de manière plus expéditive et qu'elles prendront beaucoup moins de temps.

Le sénateur Dyck : J'étais curieux de savoir pourquoi la situation au Manitoba était si différente ou s'il s'agissait essentiellement d'une question de moment. Les ententes de la Saskatchewan étaient les premières en ligne et peut-être que, pour une raison quelconque, elles ont été traitées plus rapidement. Les autres peuvent s'être retrouvées prises entre les deux, comme ce que nous voyons à l'heure actuelle dans le cas du processus des revendications particulières où près de la moitié des demandes sont en attente d'un avis juridique.

Mme Fraser : Nous avons examiné la vérification pour voir si nous pouvions déceler des particularités quelconques entre les deux régions. Nous avons noté dans notre rapport que si les termes des ententes pouvaient différer quelque peu et pourraient expliquer une partie de la différence, nous croyons que la principale raison, c'est la façon avec laquelle les régions respectives traitent les dossiers. Il appert que c'est le processus de gestion au sein du ministère qui est à l'origine d'une aussi grande différence.

Le sénateur Dyck : Le point 15 de votre exposé écrit parle d'amélioration et de rationalisation du processus des revendications particulières. À votre avis, si plus de ressources étaient accordées et si le processus était rendu plus efficace, est-ce que cela constituerait une meilleure approche que si nous faisions table rase de ce que nous faisons maintenant — comme le sénateur St. Germain l'a mentionné — pour mettre sur pied une commission indépendante? Il semble que le processus actuel ne fonctionne tout simplement pas. Pouvons-nous continuer d'essayer de l'améliorer? Pouvons-nous y investir suffisamment d'argent et le rationaliser suffisamment pour qu'il fonctionne, ou devons nous repartir à zéro?

Mme Fraser : Je suis désolée, sénateur, mais je ne suis pas certaine d'avoir les connaissances nécessaires pour répondre à ce qui est une très bonne question. Peut-être que le MAINC et Justice Canada pourraient répondre. Il est important de comprendre les problèmes qui existent dans le système et, ensuite, de voir s'il y a des façons d'améliorer ce système.

Le sénateur Dyck : En termes de reddition de comptes, vous avez dit qu'une des difficultés pourrait être que les revendications sont traitées, mais qu'il n'y a pas de mécanisme pour s'assurer que le MAINC se dote effectivement d'un plan stratégique. Quelqu'un devrait fixer des objectifs et les obliger à rendre des comptes, de sorte que le ministère ne puisse pas retarder les choses indéfiniment. Est-ce quelque chose de faisable?

Mme Fraser : Nous avons examiné cette question et nous avons constaté qu'il n'y avait pas de plan stratégique global sur la façon dont le ministère s'acquitte des engagements qu'il a contractés. Il devrait y avoir un plan et ce plan devrait faire l'objet d'un suivi. J'en reviens à la question de l'intérêt soutenu de la direction, de telle sorte que quelqu'un devrait s'assurer que l'on atteint les objectifs fixés et que, si tel n'est pas le cas, des mesures correctives sont prises.

Le sénateur Dyck : Qui ou quel comité pourrait exiger qu'il rende des comptes?

Mme Fraser : Le présent comité fait un excellent travail à cet égard.

Le président : Vous faites preuve de grâce et de prudence, madame Fraser. Vous êtes à Ottawa depuis au moins six mois.

Le sénateur Watt : Il est agréable de vous revoir, madame Fraser. Je vais reprendre là où nous avions laissé la discussion la dernière fois que nous avons parlé, à savoir s'il y a une possibilité que votre organisme entreprenne un examen de l'argent qui est transféré du gouvernement fédéral au gouvernement provincial. Je pense que vous savez à quoi je fais allusion : la Convention de la Baie James et du Nord québécois.

Nous avons une entente de financement avec le gouvernement du Canada et avec la province de Québec. Pour tout ce qui relève de la compétence provinciale, le gouvernement provincial à l'obligation d'assurer 75 p. 100 de nos besoins de financement et le gouvernement fédéral fournit 25 p. 100. S'il s'agit de quelque chose qui relève de la compétence fédérale, le gouvernement fédéral a l'obligation de fournir 75 p. 100 et le gouvernement provincial, 25 p. 100.

Comme vous le savez, certaines parties de l'entente sont enchâssées dans la Constitution, mais nous avons toujours des problèmes malgré le fait de que nous soyons passés par le processus de revendications globales, et cetera. J'aime toujours savoir si nous en obtenons pour notre argent lorsque le gouvernement fédéral transfère de l'argent au gouvernement provincial, et tous ces agissements. En avons-nous pour notre argent? Avez-vous eu le temps d'examiner cette question?

Mme Fraser : Nous n'avons pas examiné cette question, sénateur, parce que notre mandat consiste strictement à vérifier le gouvernement fédéral. Comme vous le savez certainement, chaque province a son vérificateur général et nous n'avons pas accès aux gouvernements provinciaux ni à tout palier de gouvernement autre que le gouvernement fédéral.

Toutefois, nous avons une très bonne relation avec les vérificateurs généraux provinciaux. À l'occasion, nous travaillons en parallèle avec eux. Par exemple, dans notre vérification portant sur le processus des traités de la Colombie-Britannique, le vérificateur général de la Colombie-Britannique examine la participation de la Colombie- Britannique. Il déposera un rapport le même jour que je déposerai le mien sur la participation fédérale. Nous avons travaillé en étroite collaboration.

Nous pouvons certainement étudier la possibilité de donner suite à votre suggestion. Nous prévoyons une vérification portant sur les programmes de bien-être social pour les enfants des Premières nations. Évidemment, cela doit faire intervenir nos collègues provinciaux parce qu'une très grande partie de ces programmes est offerte par l'intermédiaire des provinces. Plusieurs provinces ont manifesté leur intérêt pour travailler avec nous sur cette question. Nous essayons de faire plus de travail en collaboration avec les provinces.

Le sénateur Watt : Je devrai attendre plus longtemps pour savoir si nous en avons pour notre argent.

Mme Fraser : Cela pourrait prendre un certain temps.

Le président : Restons-en aux revendications particulières.

Le sénateur Watt : Je parle des revendications particulières parce que je suis déjà passé par le processus des revendications globales. C'est de cela dont je parle.

Je désire maintenant traiter d'un autre domaine que vous et le sénateur Gill avez mis en évidence, pour insister sur l'importance des instruments décrits au point 14. Je comprends ce que vous dites lorsque vous parlez de la coordination efficace des programmes gouvernementaux. Nous éprouvons de nombreux problèmes à cet égard. Comme vous le savez, le MAINC est en train de devenir une « jungle », à tel point qu'il est difficile pour les gens ordinaires de se rendre au ministère et d'avoir une rencontre avec le ministre. Le ministre diffuse l'information, mais il appartient aux gens de s'y retrouver. C'est un véritable casse-tête, parce qu'il y a tellement de pièces et de parties éparpillées un peu partout dans de nombreux programmes. Il y a même du chevauchement entre certains programmes.

Est-ce que je comprends bien l'idée que vous avez mise en évidence?

Mme Fraser : Oui, sénateur, tout à fait, bien qu'en partie. Je vais vous donner un autre exemple. Nous avons fait une vérification du logement; nous avons constaté qu'il y avait des programmes offerts par le MAINC et des programmes offerts par la SCHL, et qu'il n'y avait pas une bonne coordination entre les deux programmes pour faire face à une question sérieuse.

Le sénateur Watt : Concernant cette question précise, nous regardons toujours un ministère — le MAINC — qui est une tarte qui doit être découpée en de très nombreux morceaux. Affaires indiennes et du Nord Canada ne devrait pas avoir vraiment de rôle à jouer dans le développement du logement ou pour répondre aux besoins en matière de logement, autre que celui de fournir du financement. Peut-être qu'on pourrait informer le MAINC de cela, par le biais de vos recommandations, que la responsabilité pour le logement devrait revenir à la Société centrale d'hypothèques et de logement.

Nous commençons à avoir certains Autochtones qui conçoivent les programmes et qui décident ce que le ministère devrait faire. Peut-être qu'ils seraient mieux en mesure d'offrir ces programmes que le MAINC. Je fais simplement une observation; je ne dis pas que c'est comme cela que cela devrait se faire, mais je veux soulever la question. Je parlais avec mon bon ami de la Colombie-Britannique, qui est comptable agréé et membre d'une Première nation. Il est venu à Ottawa aujourd'hui pour rencontrer le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien sur cette question précise, parce qu'il est membre du conseil d'administration de la SCHL.

En tant qu'Autochtones, on nous donne la terre. À une époque, toute la terre nous appartenait, mais maintenant, on nous donne des parcelles de terre, et la seule façon que nous pouvons en obtenir, c'est en négociant, même si elle nous appartenait à une autre époque. C'est de cette façon que le système fonctionne.

Pour ce qui est des consultations fructueuses auprès des Premières nations, nous avons toujours des problèmes à l'occasion, mais peut-être que nous commençons à arriver au point où nous prenons conscience qu'elles doivent être consultées. Il y a toujours un problème, et j'en suis conscient.

Vous avez parlé du développement des capacités des Premières nations. C'est ici que nous commençons à mordre dans la chair. Cela pourrait se matérialiser, parce que les peuples autochtones partout au pays, qu'il s'agisse des Premières nations, des Inuits ou des Métis, ont besoin d'instruments. Sans instruments, ils ne peuvent aller nulle part. Le seul instrument valable dont ils disposent au niveau de la communauté, c'est le conseil de bande ou le conseil communautaire. Dans ma région, dans la société inuite, la situation est légèrement différente. Nous avons diverses institutions : nous avons des instances dirigeantes, un système de justice et nous avons notre propre système d'éducation. Avant de commencer à aller dans cette direction, vous ne serez pas capables de faire ce que vous suggérez de faire dans votre exposé. Est-ce que je comprends que vous reconnaissez que les institutions doivent appartenir aux Autochtones et être dirigées et contrôlées par eux? Est-ce bien ce que vous dites?

Mme Fraser : Essentiellement, oui. Le ministère reconnaît que de nombreux programmes et services ont été transférés ou dévolus aux gens des Premières nations sans que la base ou les institutions nécessaires soient en place. Le système d'éducation en est un exemple. Il y a une reconnaissance de ce fait et que cette capacité doit être développée.

Le sénateur Watt : En ce qui concerne l'établissement d'un fondement législatif approprié pour les programmes, encore une fois, ce n'est pas quelque chose que vous pouvez avoir sans les institutions. Est-ce que vous parlez de la capacité des peuples autochtones de légiférer dans le cas de certains programmes, d'adopter des politiques et des orientations pour l'avenir?

Mme Fraser : En partie, oui. C'était aussi, comme je l'ai mentionné plus tôt, lorsque nous avons examiné les programmes sur les médicaments sur ordonnance. Un autre bon exemple, c'est lorsque nous avons fait une vérification sur la qualité de l'eau dans les réserves et que nous avons constaté qu'il n'y avait pas de normes sur la qualité de l'eau, alors que tous ici nous vivons dans des villes qui possèdent des normes en matière de qualité de l'eau. Un fondement législatif approprié est nécessaire pour qu'un grand nombre de ces programmes ou de ces normes, et cetera, soient en place. De toute évidence, une participation très active des peuples des Premières nations sera nécessaire pour élaborer ces programmes de réglementation.

Le sénateur Watt : Vous ne pointez pas vraiment le ministère des Affaires indiennes et du Nord du Canada comme étant celui qui n'a pas le fondement législatif approprié. Ce n'est pas ce que vous dites?

Mme Fraser : Non. C'est au sein des programmes du ministère des Affaires indiennes et du Nord du Canada et des responsabilités.

Le sénateur Watt : En ce qui concerne la question des rôles incompatibles, ce n'est pas une question simple qui peut être corrigée rapidement. Je ne comprends pas pourquoi nous n'avons pas mis sur pied un mécanisme de règlement des différends simple auquel un non-Autochtone peut avoir recours s'il a un grief contre les Autochtones et auquel un Autochtone peut avoir recours s'il a un grief contre un non-Autochtone ou contre le gouvernement. À moins d'aller devant les tribunaux, nous n'avons pas d'instruments pour résoudre ces questions. C'est une des raisons pourquoi les questions prennent de plus en plus d'ampleur, au point où on ne peut plus les gérer. Il nous faut briser ce cycle d'une façon quelconque.

Au cours des 23 années que je passées ici, je n'ai vu aucun tentative visant à améliorer ou à résoudre tous les problèmes auxquels sont confrontés les peuples autochtones. Ce n'est pas uniquement les peuples autochtones qui en assument les coûts. Le pays tout entier doit payer parce qu'il ne peut pas prendre de décision; nous devrons mettre fin à cette situation. Lorsque viendra mon tour de partir à l'âge de 75 ans et que je regarderai ce que j'ai fait, quelle influence j'aurai exercée en tant que parlementaire ici pendant un certain nombre d'années, j'aurai probablement très honte.

Le sénateur Gustafson : Merci d'avoir comparu ce soir, madame Fraser.

La question que j'ai à vous poser vient de l'expérience que j'ai vécue à titre de député de la circonscription de Souris—Moose Mountain pendant 14 ans. Des revendications territoriales ont été réglées dans cette région. Nous avons constaté que l'un des problèmes les plus difficiles, c'est que le gouvernement provincial et le gouvernement fédéral n'arrivent pas à décider qui est responsable de quoi. Avez-vous constaté cela dans votre recherche? Je parle des routes, de l'administration, des municipalités rurales et tout le reste. Pour ce qui est de ralentir les choses, c'était le problème le plus difficile qu'il y avait.

Mme Fraser : Nous avons trouvé des indications de cela lorsque nous avons fait la vérification sur les droits fonciers issus de traités. Une partie du délai était attribuable au fait que des négociations devaient avoir lieu avec des tierces parties, qu'il s'agisse de municipalités ou de quoi que ce soit d'autre. Nous avons dit que le gouvernement fédéral devait en faire davantage pour aider à résoudre ces questions et pour faire en sorte que les dossiers progressent plus rapidement.

Le président : Dans le rapport de 1991, le vérificateur général a dit que le MAINC et le gouvernement devraient évaluer à nouveau les méthodes et les concepts fondamentaux pour le règlement des revendications. Essentiellement, ils sont arrivés avec ces recommandations : modifier la politique des revendications particulières — et voici que 15 ans plus tard, nous ne sommes pas plus avancés qu'avant; mettre sur pied un processus accéléré pour traiter les demandes de moins de 500 000 $; accroître les pouvoirs du ministre qui pourra approuver les demandes allant jusqu'à 7 millions de dollars; créer une commission pour les revendications autochtones particulières, laquelle est en place; et créer un groupe d'étude mixte canadien-autochtone qui examinera la politique et le processus en matière de revendications. Ces recommandations viennent de votre bureau. Je ne pense pas que vous étiez vérificatrice générale à cette époque.

Mme Fraser : Non.

Le président : Plus ça change et plus c'est pareil, madame Fraser. Vous avez fait la comparaison ou l'analogie avec la Défense nationale, et je pense que Justice Canada doit faire face au même dilemme lorsque que le ministère évalue ces revendications. Cela prend neuf ans. Des témoins sont venus nous dire : « Nous n'avons tout simplement pas les ressources. Nous avons deux ou trois avocats qui travaillent sur une pluie de revendications ».

Vous ai-je bien compris lorsque vous avez dit que c'est peut-être un domaine où vous pourriez faire une recommandation?

Mme Fraser : Toute la question de la gestion des revendications particulières est un domaine que nous pourrions vérifier. Étant donné son importance, je présume que cette question fera partie de nos plans pour les années à venir.

Comme je l'ai dit, nous faisons à l'heure actuelle une vérification sur la gestion au sein de Justice Canada. Comme je l'ai suggéré, vous pourriez vouloir faire comparaître le ministère des Finances parce qu'il ne s'agit pas uniquement de l'argent qui est attribué au ministère pour gérer les dossiers, mais également de l'argent pour les règlements. Comment prévoient-ils cet argent et comment en tiennent-ils compte dans le cadre fiscal? Cela pourrait être une question que le comité pourrait vouloir étudier davantage.

Le président : Dans le climat de frustration, de démarches judiciaires et de confrontation qui existe à l'heure actuelle, d'où vous vient votre mandat? Est-ce que quelqu'un vous donne des directives? Pouvons-nous vous demander d'une manière gentille de bien vouloir le faire?

Mme Fraser : J'essaie toujours de faire place aux demandes des comités parlementaires. Si, dans votre étude, vous voyez d'autres questions également — même des questions plus précises, plus étroites —, sur lesquelles vous croyez qu'il serait utile que nous fassions un certain travail, nous allons certainement prendre la demande en considération.

[Français]

Le sénateur Gill : Comme l'a mentionné le sénateur St. Germain, il y a beaucoup d'attente de la part des Premières nations et des Inuits en ce qui concerne les vérifications sur le plan gouvernemental.

Sans nécessairement avoir de mandat du gouvernement, vous pourriez peut-être vous donner vous-même un mandat? Vous avez fait mention d'une augmentation du budget des affaires indiennes de 1.6 p.100 tandis que la population, elle, réclame plutôt 11.2 p. 100 d'augmentation par année. Cela représente un décalage important.

Évidemment, beaucoup d'argent est consacré au traitement des revendications particulières. Est-il possible de vérifier à combien s'élèvent les sommes allouées en compensation et de vérifier si au bout du compte, après le processus, il reste toujours des fonds?

Mme Fraser : Oui, il est possible de faire ces vérifications. J'aimerais préciser que c'est le Bureau du vérificateur général qui décide des vérifications à faire. Mais évidemment, le Bureau du vérificateur général tient généralement compte des recommandations des comités parlementaires.

[Traduction]

Le sénateur Sibbeston : Si cette démarche peut aider le travail de notre comité et encourager d'une manière quelconque la vérificatrice générale à vérifier la section des revendications particulières du ministère des Affaires indiennes et du Nord du Canada, j'ai une motion portant que le comité demande à la vérificatrice générale de vérifier la partie d'Affaires indiennes et du Nord Canada qui s'occupe des revendications particulières dans le but d'accélérer le règlement des revendications.

Le président : Une motion a été présentée.

Le sénateur Hubley : Est-il possible de mettre un échéancier quelconque là-dessus?

Le président : Peut-être s'agit-il de quelque chose que nous pourrions discuter à l'étape du rapport, plutôt que maintenant, et risquer ainsi de mettre la vérificatrice générale dans une situation embarrassante. Nous devrions en discuter, parce qu'il y a des échéanciers à fixer et des questions à régler.

Nous allons traiter de cette question immédiatement; nous n'allons pas étudier une question qui est déjà embourbée. Nous allons sortir notre rapport rapidement. La minute que nous estimerons avoir suffisamment de munitions pour aller de l'avant, nous allons rédiger un rapport. À ce moment-là, nous serons heureux de traiter de cette question d'une manière qui donnera des orientations assez claires pour la demande. C'est davantage une demande qu'une directive.

Mme Fraser : Je vous en suis très reconnaissante et je vais certainement prendre la demande en considération.

J'aimerais prévenir les sénateurs que nous avons évidemment un programme de travail que nous avons déjà entamé concernant d'autres vérifications. Il faut généralement entre 12 et 18 mois pour faire une vérification. Nous ne serons peut-être pas aussi rapides, peut-être, que votre rapport.

Le président : Madame Fraser, je suis très conscient de votre charge de travail. Je peux seulement dire que la frustration du sénateur Watt et de nombreux autres dans de si nombreux domaines est une indication. C'est une indication que mon vice-président, le sénateur Sibbeston, veuille aller de l'avant dans cette question, et je ne le blâme pas.

Malheureusement, nous commençons à manquer de temps. Mais dans votre cas, madame Fraser, les dépassements de temps sont une cause utile.

Monsieur Campbell et monsieur Berthelette, de même que madame Fraser, nous vous remercions de votre exposé et des réponses franches et directes que vous avez données aux questions qui vous ont été posées.

Vous avez un travail difficile et vous vous en acquittez très bien. Continuez cet excellent travail.

Avez-vous des objections à retirer votre motion, sénateur Sibbeston

Le sénateur Sibbeston : Évidemment, non. Je la retire.

Le président : Honorables sénateurs, nos prochains témoins sont le chef Elaine Chicoose, M. Jayme Benson, le chef Morris Shannacappo et M. Ralph Abramson.

Soyez les bienvenus au comité.

Chef Elaine Chicoose, Première nation Pasqua, Federation of Saskatchewan Indian Nations : Merci. C'est la deuxième fois que je viens à Ottawa. La politique des revendications particulières est très lente et frustrante. Ma Première nation, Pasqua, a une revendication particulière relative à la cession de 1906 qui traîne au ministère depuis environ 20 ans. Cette situation est très frustrante pour toutes les personnes concernées.

Je suis une chef de cinquième génération. Le chef Pasqua a été signataire du Traité no 4. Je suis fière de ma Première nation et de nos traités. Nous sommes très frustrés par la façon dont les choses se passent et du temps qu'il a fallu pour que notre revendication particulière chemine dans le système; déjà trois chefs ont travaillé sur cette question.

Le président : Merci, chef. Nous partageons vos frustrations et c'est la raison pour laquelle nous avons entrepris la présente étude.

Jayme Benson, directeur des revendications particulières, Federation of Saskatchewan Indian Nations : Bonsoir. Merci de nous avoir invités à comparaître devant vous. C'est un honneur.

La fédération représente les Premières nations de la Saskatchewan. La Saskatchewan s'est révélée une des régions qui a connu le plus de succès au pays en ce qui concerne le règlement des revendications. Vous avez entendu parler un peu de cela par la vérificatrice générale concernant les droits fonciers issus de traités. Cela s'applique également aux revendications particulières. Malgré cela, nous avons encore plus de 90 revendications particulières qui ne sont pas résolues dans le processus des revendications particulières.

Je crois que l'on vous a tous remis une copie du mémoire écrit que nous avons préparé. Nous n'avons pas beaucoup de temps, alors je vais parler uniquement de quelques points saillants.

Je sais que vous avez entendu de nombreux autres témoins et j'ai lu certaines de ces délibérations dans lesquelles ils parlent des problèmes touchant le processus des revendications particulières.

Parmi ces problèmes figurent les longs délais, l'injustice, un système inefficace, un manque de ressources et un système qui ne permet pas d'apporter une conclusion finale aux revendications. La chef Chicoose a parlé de la revendication relative à la cession de 1906 de sa Première nation qui est dans le système depuis 1985, et qui n'est toujours pas réglée.

Les poursuites en justice ne sont pas une bonne option pour le règlement des revendications. Lorsque j'ai préparé le présent exposé, j'ai fait certaines recherches sur les coûts de l'affaire Sampson Cree. La CBC a rapporté — après avoir fait une demande d'accès à l'information — que du côté fédéral, on avait dépensé 45 millions de dollars, ce qui ne tient pas compte des salaires des employés de Justice Canada et d'Affaires indiennes et du Nord Canada. De leur côté, les avocats des Premières nations ont reconnu avoir dépensé 75 millions de dollars dans cette poursuite devant les tribunaux. L'affaire fait toujours l'objet d'un appel, alors les coûts vont continuer de croître. Outre tous les autres inconvénients des poursuites en justice, leur coût est astronomique. C'est de l'argent qui devait être dépensé pour régler les revendications.

La Federation of Saskatchewan Indian Nations, FSIN, est d'accord avec la déclaration récente du ministre Prentice concernant la nécessité de négocier les revendications plutôt que d'y faire face par d'autres moyens. Il est facile de parler des problèmes qui touchent le processus de revendications et je suis certain que de nombreux témoins vous les ont énumérés à maintes reprises, mais la vraie question concerne les solutions. Nous avons essayé de nous concentrer sur cette question dans notre mémoire. Il est clair que le manque de ressources est un problème. Nous recommanderions certainement des améliorations au processus inefficace.

Si vous essayez de rendre le processus plus efficace, nous vous conseillons de faire en sorte que ce ne soit pas uniquement les gens du gouvernement qui discutent entre eux de la façon d'améliorer leur propre système, mais qu'ils travaillent en collaboration avec les organismes des Premières nations, comme la FSIN, et des organismes du Manitoba ayant de l'expérience dans le domaine des revendications, de manière à rendre leurs efforts plus efficaces. Vous êtes intervenu à temps, parce qu'une des recommandations présentées dans notre mémoire était de faire en sorte que la vérificatrice générale examine le processus des revendications particulières. Vous nous avez damé le pion dans ce cas particulier.

J'ai attendu la question qui a été posée plus tôt quant à savoir s'ils allaient régler les problèmes de ressources et d'inefficacité du processus. Pour être franc, je ne crois pas que vous réussirez jamais à rattraper l'arriéré tant que vous n'aurez pas apporté une conclusion finale aux revendications. La seule façon d'y arriver, lorsque le Canada n'est pas d'accord pour négocier une revendication, c'est en ayant recours à un système pour trancher la revendication. À l'heure actuelle, si vous présentez une revendication, la conclusion finale de la revendication ne survient que lorsque cette revendication est acceptée pour négociation et qu'elle est réglée. Même les revendications rejetées par le gouvernement demeurent dans le système, où elles peuvent traîner pendant des années, voire même des décennies, sans qu'il y ait un mécanisme pour dire oui ou non à ces revendications. Pour y arriver, il faut mettre en place un processus de revendications indépendant.

Cela ne devrait pas être quelque chose de très difficile à faire, parce que la plus grande partie du travail concernant un tel processus de revendications a déjà été fait. Il y a certainement le projet de loi C-6 sur le règlement des revendications particulières. Lorsque nous avons comparu devant le présent comité du Sénat, nous avons proposé des amendements concrets au projet de loi pour combler ses lacunes les plus sérieuses, ce qui créerait un meilleur système que celui que nous avons à l'heure actuelle. Les lacunes que nous avons essayé de corriger étaient l'accessibilité des revendications, les critères, la question des délais et la question de l'indépendance. Dans notre mémoire, j'ai annexé les amendements que nous avons proposés au projet de loi C-6 et qui ont reçu l'appui des chefs de la Saskatchewan devant leur assemblée. C'est là la façon de procéder pour trouver un mécanisme réaliste pouvant être mis en oeuvre assez rapidement pour mettre sur pied un processus de revendications indépendant qui permettrait d'apporter une conclusion finale aux revendications, non seulement pour les Premières nations, mais également pour les gouvernements et pour tous les Canadiens et Canadiennes. Personne ne veut voir ces questions demeurer sans solution pendant des décennies.

Le président : Merci, monsieur Benson, d'avoir été concis. Chef Shannacappo, vous avez la parole.

Chef Shannacappo, président, Treaty & Aboriginal Rights Research Centre of Manitoba Inc. :

[Le témoin s'exprime dans une langue autochtone.]

J'aimerais remercier le comité du Sénat de nous recevoir et de nous permettre de présenter un exposé. Je suis de la réserve indienne de Rolling River issue du Traité no 4. Je suis le neuvième chef de Rolling River depuis l'époque de la signature du traité et j'en suis à mon cinquième mandat. Je ne vais par m'engager dans un discours trop redondant parce que je fais miennes les frustrations qui ont été exprimées par ceux et celles qui m'ont précédé, y compris la vérificatrice générale. Je siège également au Comité international de l'Assemblée des chefs du Manitoba et j'ai fait des interventions aux Nations Unies au cours des cinq dernières années. L'an prochain, je ferai une nouvelle intervention, qui portera sur les terres et les ressources.

J'étais quelque peu vexé ce soir lorsque nous avons parlé des contribuables qui utilisaient leur argent d'une manière inappropriée. Ce sur quoi nous avons vécu, c'est sur les ressources naturelles, surtout lorsqu'il s'agit de l'argent des Indiens. Je n'aime pas que l'on en parle comme s'il s'agissait de l'argent des contribuables. Peut-être que c'est une autre question que la vérificatrice générale pourrait envisager d'étudier, outre la question des traités.

La reddition de comptes, dont nous avons parlé ici, est une voie à deux sens. J'aimerais également voir la vérificatrice générale faire une bonne vérification des fonds qui proviennent de nos ressources naturelles, que nous n'avons pas cédées en vertu des traités, pour voir comment cet argent est dépensé et s'il est partagé de manière appropriée. Sur ce, je vais céder la parole à M. Abramson qui travaille avec nos gens depuis la création du Treaty & Aboriginal Rights Research Centre of Manitoba Inc.

Ralph Abramson, directeur, Treaty & Aboriginal Rights Research Centre of Manitoba Inc. : J'aimerais remercier le comité de nous permettre de faire un exposé. Cela fait maintenant plus de 30 ans que je participe à ce processus. Je reprends à mon compte les observations de M. Benson. Au coeur de cette question se trouvent les revendications contre le gouvernement fédéral faites par les Premières nations qui, dans certains cas, remontent à il y a 100 ans. Toute personne raisonnable qui examine la documentation liée à ces revendications peut voir qu'il y a des dommages et qu'il est nécessaire de résoudre la question. Il y a un arriéré de plus de 700 revendications. La clé du problème qui touche depuis toujours ce processus, c'est que le gouvernement est en conflit d'intérêts, parce qu'il est à la fois juge et partie. Le but de l'évaluation des revendications semble non pas de déterminer s'il y a une revendication, mais d'essayer de réduire le plus possible la responsabilité du gouvernement.

Depuis la mise en place du processus de revendications, les Premières nations du Manitoba ont reconnu le fait qu'il y avait un conflit d'intérêts, mais elles ont tout de même essayé de participer à ce processus pour voir ce qui pouvait être fait. Nous avons eu un certain degré de succès en termes de droits fonciers et de règlement des revendications, mais cela s'est fait en dépit du processus et non pas à cause de lui.

Il y a deux recommandations pour améliorer le système. Comme l'a dit M. Benson, au cours des années, on a effectué beaucoup de travail pour trouver des façons d'améliorer le processus. L'élément clé dans tout ce travail est de faire participer les Premières nations à l'élaboration d'un processus qui traitera les revendications d'une manière efficace. Le processus ne devrait pas être soumis à l'influence de l'une ou l'autre des deux parties — le gouvernement ou les Premières nations. Les Premières nations du Manitoba ont toujours dit qu'elles voulaient un jugement équitable des revendications, non pas qu'elles voulaient avoir la haute main sur le processus. Elles veulent seulement voir ces questions traitées et réglées avec justice.

Un certain nombre d'efforts ont été réalisés dans le passé, le dernier étant le groupe de travail mixte qui a formulé un certain nombre de recommandations qui, si elles avaient été mises en oeuvre, auraient pu permettre de mettre en place un processus applicable. En utilisant les ressources qui sont disponibles aujourd'hui, nous avons besoin d'un processus mixte pour élaborer un modèle qui fonctionnerait, mais il faudrait qu'il soit doté des ressources appropriées. Même s'il s'agissait du meilleur processus au monde, s'il n'est pas doté de ressources appropriées, il ne fonctionnera pas.

Nous avons vu ce qui est arrivé au début des années 90, juste après la crise d'Oka; de nombreuses ressources additionnelles ont été consacrées aux revendications particulières. Initialement, il y a eu une pluie de règlements, mais après un certain temps, nous sommes revenus au point de départ — le gouvernement n'avait plus peur et a repris la haute main sur le processus. Ainsi, les revendications n'étaient pas validées et certaines revendications traînent dans le système depuis 20 ans. Des ressources additionnelles font partie du problème, mais ce n'est pas la seule chose. Des ressources additionnelles consacrées au processus actuel aideraient dans une certaine mesure, mais on finirait par revenir au point où nous en sommes à l'heure actuelle.

La recommandation que nous avons présentée dans notre mémoire, c'est que les Premières nations doivent participer à l'élaboration d'un nouveau processus pour traiter les revendications particulières. Il doit être indépendant, sans influence indue de la part du gouvernement fédéral ou des Premières nations, et il doit avoir des ressources appropriées. Cette recommandation est fondée sur les expériences que nous avons eues au Manitoba avec le système de revendications.

Je serai heureux de répondre à vos questions.

Le président : Chef Shannacappo, de quelle région êtes-vous?

M. Shannacappo : De la Première nation de Rolling River.

Le président : Est-ce à l'ouest de Winnipeg?

M. Shannacappo : Oui, c'est à environ 2 h 30 de route à l'ouest de Winnipeg, juste avant d'arriver au parc national du Mont-Riding, qui est mon territoire traditionnel.

Le président : Je suis originaire du Manitoba, alors j'essaie de situer votre région. Chef Chicoose, d'où venez-vous en Saskatchewan?

Mme Chicoose : La Première nation Pasqua habite à environ 45 minutes de route au nord-ouest de Regina, Saskatchewan.

Le président : Est-ce en direction de Davidson?

Mme Chicoose : Vous pensez à Saskatoon. C'est près de Regina, dans la belle vallée de la Qu'Appelle.

Le sénateur Hubley : Soyez les bienvenus ce soir. Merci de vos exposés et de vos observations.

Je ne crois pas qu'il s'agisse d'une question difficile, mais lorsque nous parlons d'une commission ou d'un tribunal des revendications indépendant, je crois que la vérificatrice générale a dit que, peut-être, nous ne ferions que transférer les problèmes d'un endroit à un autre. Avez-vous réfléchi à la structure d'un tribunal des revendications indépendant? Qui devrait siéger à ce tribunal? Devrait-il fonctionner au sein d'un ministère ou devraient-ils s'agir d'un organisme distinct qui régit les revendications? Devrait-il rendre des comptes et faudrait-il fixer des objectifs, et cetera. Vous avez dit que les Premières nations devraient certainement participer, mais qui d'autre devrait participer à ce processus?

M. Benson : C'est une question assez vaste. Pour ce qui est de transférer le problème, je crois qu'un organisme indépendant résoudrait certain des problèmes. Un des problèmes que nous avons dans le système actuel, ce sont les longs délais, mais une partie de la raison pour laquelle nous avons ces délais, c'est qu'il n'y a personne d'un côté comme de l'autre, mais surtout du côté du gouvernement, pour diriger le troupeau et dire : « Assez, c'est assez. Cette revendication doit passer à l'étape suivante. Il faut que cela se fasse. »

Dans un contexte de poursuites devant les tribunaux, le tribunal fixerait l'échéancier. Une partie des amendements que nous avons proposés au projet de loi C-6 visaient justement à traiter de cette question particulière. Un organisme indépendant aurait la haute main sur le processus et sur le calendrier. En termes d'indépendance et de conflit d'intérêts, vous n'auriez plus la situation où le Canada doit juger des revendications contre lui-même, parce que vous auriez un organisme indépendant pour trancher.

Plus important encore, en termes de conclusion finale, il y a un énorme arriéré dans le système actuel parce que les revendications traînent indéfiniment. Une commission des revendications des Indiens peut recommander un plan d'action particulier, mais le gouvernement peut l'ignorer. Si vous avez un organisme qui dit : « Voici les éléments de preuve et cette revendication est valable. Voilà ce que cela vaut » ou « cette revendication n'est pas valable », alors, cette décision lie les parties et cette revendication sort du système; alors, vous ne faites pas simplement transférer les problèmes, si cela est sensé.

Pour ce qui est de savoir à qui l'organisme indépendant doit rendre des comptes, je crois que, même dans le rapport du groupe de travail mixte et dans le projet de loi C-6, il doit toujours rendre des comptes au Parlement. Parce qu'il est indépendant, cela ne veut pas dire qu'il peut faire n'importe quoi; il reste tout de même régi par la loi ou les autres lois quelles qu'elles soient qui s'appliquent à lui. Je pense que certaines de ces craintes ne se matérialiseraient pas nécessairement.

M. Abramson : Comme l'a dit M. Benson, on peut répondre à cette question particulière en regardant le rapport et les recommandations du groupe de travail mixte. Cette question particulière a été examinée, et dans un certain détail. Il y avait plusieurs modèles différents pour la création d'un tel organisme. Le point clé, c'est que si cet organisme a l'autorité de mettre ses décisions en application, il doit être plus rapide que le gouvernement. À l'heure actuelle, le gouvernement n'a pas de date limite et, comme l'a dit M. Benson, il est impossible de faire bouger le gouvernement sur ces questions. C'est là le problème. Il n'est pas dans son intérêt d'agir. S'il fait traîner les choses en longueur, il n'y a pas de conséquences. Il y a de nombreuses conséquences pour les Premières nations, mais pas pour le gouvernement.

M. Shannacappo : J'aimerais ajouter quelque chose. Où trouveriez-vous un organisme neutre? Nous faisons un exposé devant le présent comité, et j'admire le travail que vous faites et comment vous représentez le pays, mais où iriez-vous? Allons-nous nous adresser à quelqu'un de l'extérieur du pays pour rendre des décisions en tant qu'organisme neutre? Demanderons-nous au créateur de jouer à pile ou face pour savoir qui a raison? C'est une merveilleuse question et j'estime que la seule façon que nous allons parvenir à une entente, c'est si les deux parties continuent de discuter sans que le juge, le jury et le bourreau en provenance du gouvernement canadien viennent dire : « Voici qui nous avons choisi. » Si nous choisissions nos avocats indiens pour siéger à la table, je vous rappelle que ces derniers ont prêté serment après avoir reçu leur diplôme de droit qu'ils parleront au nom du système de droit canadien. Encore une fois, ils siègent du côté du juge, du jury et du bourreau. Où allons-nous trouver un organisme neutre? À qui allons nous demander d'être le prochain juge?

Le président : Avez-vous une recommandation, monsieur?

M. Shannacappo : J'en ai une.

Le président : Ne soyez pas timide ici. Si nous continuons de faire ce que nous avons toujours fait, rien ne changera.

M. Shannacappo : Je crois qu'on en parle beaucoup aux Nations Unies où il est question de représentants. Je crois qu'il faudra, à un certain moment, envisager un système différent comprenant des représentants internationaux qui suivraient attentivement la situation au pays et la façon dont les peuples autochtones, les premiers habitants de ce pays, sont traités, surtout dans le domaine des terres et des ressources.

Le sénateur Sibbeston : Les témoins me donnent l'impression d'être très expérimentés et de bien connaître la question des revendications particulières. Il est intéressant que vous ayez eu quelques succès dans le système, pourtant vous voyez qu'il faut encore faire de grandes améliorations et, en particulier, avoir un organisme indépendant qui permettra au processus de réussir.

Je suppose, en fin de compte, que vous estimez qu'avec le système actuel dans lequel le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien est à la fois juge, juré et procureur et a un tel contrôle, il ne peut pas y avoir de solution qui convienne à toutes les revendications. Malgré tout ce que j'ai dit et ce que nous faisons, il faut un organisme indépendant qui statuera sur les cas et aura le pouvoir de prendre une décision d'une façon ou d'une autre.

Évidemment, dans ce cas, le comité devra œuvrer dans ce sens et voir ce qu'il peut faire pour convaincre, faire rapport et adopter cette approche. C'est un défi.

Avez-vous quelque espoir? Pensez-vous que le système politique pourrait éventuellement arriver à une entente sur l'établissement d'un organisme indépendant? Pensez-vous que le gouvernement actuel, où tout gouvernement à venir, prendra une décision qui mettra sur pied un organisme judiciaire indépendant pour étudier toutes les revendications?

M. Abramson : Oui, si les décideurs consacrent du temps, évaluent toutes les preuves et les coûts, pas du règlement des revendications, mais ce qu'il en coûterait dans le cas où les revendications ne sont pas réglées. Il a été question tout à l'heure de passif éventuel; il ne peut que s'accroître. Si nous mettons de côté tous les préjugés concernant les revendications et si nous étudions les preuves, nous verrons qu'il serait plus économique et plus logique que les Premières nations et le gouvernement collaborent pour mettre en place un système indépendant disposant de ressources appropriées. C'est la seule solution. Si la situation ne change pas, le nombre des réclamations en souffrance ne pourra que croître — il y en a plus de 700 aujourd'hui. Je suis sûr que des prévisions sur la croissance de ce nombre ont été faites. À moins de régler la question rapidement, le nombre de réclamations ne fera qu'augmenter. Le problème aussi s'empirera. Le gouvernement a tout intérêt à aborder la question maintenant.

Le président : J'ai essayé de poser une question à ce sujet et ce faisant j'ai mentionné les contribuables, chef. Je vous prie de m'excuser si je vous ai offensé. Si nous devions recommander un organisme indépendant, comment devrions- nous aborder la question de l'absence d'un chéquier que l'on peut utiliser à sa guise? C'est ce que j'ai essayé de demander à la vérificatrice générale. Si nous faisons une recommandation et qu'il devra disposer de ressources appropriées, que faire pour que le système n'échappe pas à tout contrôle? Nous devons avoir la confiance de tous les citoyens canadiens — des Premières nations et toutes les parties impliquées. Des critères d'imputabilité doivent être établis. Avez-vous une idée de ce que nous devrions faire pour y arriver?

Supposons que nous demandons à Rudolph Stavenhagen, ou à quelqu'un aux Nations Unies — j'utilise ce nom parce qu'il me vient à l'esprit — d'être arbitre dans un organisme indépendant. Comme élaborer un processus de chéquier que l'on utilise à sa guise qui permette à la responsabilité et la crédibilité de résister à un examen minutieux?

M. Benson : Je peux répondre partiellement à la question, car il y a une réponse dans le rapport du groupe de travail mixte. J'ai fait partie du groupe de travail mixte, M. Abramson aussi. Le ministère des Finances et le Conseil du Trésor ont tous deux soulevé la question : est-ce un chéquier que l'on peut utiliser à sa guise? L'avant-projet de loi dans le rapport du groupe de travail mixte comprenait, ce que nous appelons, un programme financier quinquennal. Les tribunaux pourraient accorder durant les cinq années un montant maximal à délimiter par le gouvernement et les Premières nations. Il fallait garantir au gouvernement que l'organisme dépenserait le montant durant les cinq années.

Il n'y avait pas de plafond pour les revendications particulières. Toutes les revendications pourraient être soumises au tribunal, mais les dépenses de l'organisme ne pouvaient pas dépasser un plafond. Il faudrait une décision du Cabinet pour changer cela.

Le rapport du groupe de travail mixte, qui a été accepté par l'Assemblée des Premières nations et par la plupart des organisations des Premières nations, assurait qu'il n'y aurait pas de chéquier que l'on peut utiliser à sa guise.

Pour revenir à la question posée par le sénateur Sibbeston, une occasion se présente aujourd'hui parce que le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Jim Prentice est l'un des plus ardents défenseurs de la réforme des revendications. Il a fait partie de la Commission des revendications des Indiens. C'est quelqu'un qui n'a cessé de parler du besoin d'un organisme indépendant de règlement des revendications.

La question n'est pas que les partis politiques le refusent. L'obstacle est toujours venu de la bureaucratie qui ne veut pas perdre le contrôle, que ce soit le ministère de la Justice, le ministère des Finances ou le Conseil du Trésor.

Le sénateur Sibbeston : J'ai entendu parler du groupe de travail mixte. Lorsque nous étudions le projet de loi C-6, il a été beaucoup question du groupe de travail mixte. Je suis originaire d'une région du pays où il y a beaucoup de coopération entre les Autochtones et le gouvernement. Pour moi, le groupe de travail mixte était quelque chose de positif. Le seul problème est, qu'en fin de compte, le gouvernement n'en a pas assuré le suivi. Je n'ai pas compris pourquoi le gouvernement a commis une telle trahison; le gouvernement était impliqué et avait accepté un processus mixte, pourtant à la fin, il n'était plus d'accord. J'ai été surpris et un peu honteux que le gouvernement fédéral se soit rétracté et n'ait pas assuré le suivi de la recommandation du groupe de travail.

Le projet de loi C-6 a été éventuellement adopté. Quelques modifications ont été proposées, pour essayer de l'améliorer progressivement. Je remarque qu'il n'est pas entré en vigueur.

Nous avions un gouvernement à majorité libérale qui aurait pu le faire. Aujourd'hui, avec un gouvernement minoritaire, quelles chances ont ces changements d'être apportés? Quelle est la probabilité d'avoir le tribunal ou l'organisme indépendant si nécessaire au règlement de toutes ces revendications?

Je me demande si lait que Jim Prentice, qui connaît bien la question, ait participé au processus des revendications et à la Commission donne un peu d'espoir et nous pouvons ainsi espérer fournir un bon rapport et de fortes recommandations et s'il est encore ministre dans six mois ou un an, il connaîtra suffisamment le dossier et sera suffisamment fort au sein du gouvernement pour faire les changements nécessaires. On peut nourrir des espoirs pour l'avenir.

Y a-t-il des commentaires à ce sujet? Ai-je raison de penser ainsi?

M. Shannacappo : Les traités doivent être mieux expliqués. Si j'ai une tasse de café et que je veux la partager avec les sénateurs, mais que j'ai la tasse, je leur en donnerai une gorgée de temps en temps pour les tenir éveillés à la table, c'est toujours moi qui ai la tasse. Je bois quand je veux boire. Cependant, je leur en donne une gorgée quand j'estime qu'ils en ont besoin, seulement pour les tenir éveillés à la table. Quand la tasse est vide, est-ce que je veux encore cette tasse? Non. Je ferai autre chose.

Je vous renvoie à un excellent livre intitulé « Confessions d'un tueur à gages économique ». Essentiellement, c'est ce qui se passe, à mon avis, dans mes territoires avec les peuples autochtones. Ils ont été sauvagement battus. On leur a sauvagement retiré leur culture et on les a mis dans des pensionnats. Je n'arrive pas à imaginer que mon peuple puisse se conduire ainsi envers un autre peuple.

Il n'y a pas à ma connaissance de ministre des affaires allemandes ou de ministre des affaires ukrainiennes. Pourtant, nous devons demander au ministre la permission de faire ces choses, pour l'amour de Dieu.

Il y avait une époque, il n'y a pas très longtemps, où les gens de ma communauté étaient réprimandés par le ministre des Affaires indiennes parce qu'ils ne restaient pas à l'intérieur de ces limites.

Aujourd'hui, je veux construire une salle de spectacles dans mon territoire qui offrira des spectacles de classe internationale. Je n'ai pas le droit de le faire, car j'ai besoin de la permission de quelqu'un d'autre, pourtant c'est dans mon territoire et dans ma terre. Tout ce que je veux, c'est gagner 10 millions de dollars au lieu que mon peuple se batte pour recevoir du gouvernement fédéral un maigre montant de 5 millions de dollars.

J'admire et je respecte M. Prentice. Il y aussi des gens qui nous placent dans cette situation et qui nous disent : « Vous devez avoir les réponses. Vous êtes un orateur, alors défendez votre cause et proposez aussi des solutions. N'allez pas à Ottawa seulement pour vous plaindre, proposez des solutions. N'allez pas siéger pour dire nous avons besoin de plus d'argent. » J'en ai marre de mendier. Nous avons des solutions.

Le président : Certains d'entre nous œuvrent dans ce sens.

J'ai une mesure législative d'autonomie gouvernementale devant le Sénat maintenant même. Elle est bloquée pour des raisons partisanes. Cela n'a aucun sens. Beaucoup d'entre nous rejoignent vos propos. Le sénateur Sibbeston et moi avons beaucoup voyagé ensemble. Nous ne sommes pas membres du même parti, mais nous sommes d'accord pour ce qui est des dossiers concernant les peuples autochtones. Vos paroles ne tombent pas dans les oreilles de sourds.

Je sais que d'autres sénateurs comme les sénateurs Peterson, Dyck, Hubley, Watt et Gustafson sont très au fait de vos besoins. Pouvons-nous y répondre ou non, monsieur, puisse Dieu nous aider.

Le sénateur Peterson : Je remercie les témoins. Vous nous avez fourni une bonne documentation. Vous avez certainement identifié et confirmé les questions que nous devons traiter, soit, entre autres, les revendications en souffrance, le conflit d'intérêts et le fait que les Premières nations doivent participer. Nous devons établir un programme financier, que vous avez mentionné tout à l'heure, d'une durée de trois à cinq ans. Nous devons fixer un montant, afin que le gouvernement sache ce à quoi nous avons affaire. Cela le rassurera. Ainsi, il sera exactement ce qu'il en est.

En ce qui concerne la tierce partie qui fera office de tribunal, peut-être n'est-ce pas le mot exact. Nous avons besoin d'une tierce partie qui joue le rôle de facilitateur et assure la poursuite de processus. Nous constatons que ces choses commencent, elles s'enlisent et restent bloquées pendant deux ou trois ans. Les personnes concernées partent et ça recommence.

Nous essaierons de trouver la solution idéale; nous ne la trouverons probablement pas, mais nous essaierons quelque chose qui lancera le processus. Il est invraisemblable que le règlement de certaines de ces questions prenne autant de temps. Nous ferons de notre mieux. Nous vous remercions pour les renseignements que vous nous avez fournis.

Au Saskatchewan, chef Chicoose, ils semblaient bien travaillés et réglaient beaucoup de revendications. Puis, vous dites qu'ils sont arrivés chez vous et que ça s'est arrêté; que ça n'avance pas. Que se passe-t-il avec une revendication? Certaines sont bien traitées et d'autres non. Qu'est-ce qui est si difficile pour que ce soit retardé aussi longtemps?

Mme Chicoose : La terre a été cédée en 1906. Il y a 100 ans. Elle n'est entrée dans le système qu'en 1985. Il y a eu un refus préliminaire. Nous avons dû présenter d'autres arguments. Puis nous avons présenté un argument de droit supplémentaire.

Ils nous ont demandés de remplir beaucoup de choses différentes, ce que nous avons fait. Finalement, nous avons dit que nous ferons une demande à la Commission des revendications des Indiens. C'était il y a deux ans, et c'est toujours là-bas. Finalement, notre argument a été refusé. Nous avons reçu une lettre en mai 2005. Pendant tout ce temps, ils nous ont fait croire que le résultat sera positif. Ils nous ont demandé du temps, et nous leur en avons donné. C'est très frustrant de traiter avec des gens différents, des analystes différents, des employés différents et le changement de personnel au sein du ministère.

Pendant que notre revendication était en attente, nous aurions pu faire tellement de choses avec l'argent, réaliser des avantages économiques dans notre Première nation. Nous n'avons aucun revenu aujourd'hui, comme le chef l'a dit. Nous voulons être capables de faire quelque chose pour notre peuple. Nous avons besoin de ressources.

Nous avons notre terre. Notre terre est sûre, mais nous n'avons pas suffisamment d'argent pour mettre en œuvre les programmes dont ont besoin nos collectivités. C'est la raison pour laquelle nous aimerions que nos revendications soient plus rapidement traitées dans le système. Nous perdons de l'argent tous les ans.

Notre revendication suivait celle de Kahkewistahaw, qui a été réglée il y a deux ou trois ans. Nos mêmes gens étaient impliqués dans la mauvaise gestion de leur revendication, les Kahkewistahaw. Cela s'est passé en 1907, la nôtre en 1906, pourtant la leur a été réglée, mais pas la nôtre. Où est la différence? Les mêmes gens étaient impliqués dans les mêmes questions; c'est très injuste.

Le sénateur Peterson : Nous ferons notre possible pour identifier certaines de ces questions et nous devons espérons que nous en accélèrerons le processus.

Le sénateur Dyck : Merci pour vos déclarations. Il est très clair d'après les détails que vous avez tous les deux décrits qu'a votre avis une commission indépendante est la manière de procéder.

En termes de logistique, supposons que cela devienne possible. Que pensez-vous qu'il arrivera au processus actuel des revendications particulières déjà en traitement quand un autre organisme a commencé le traitement? Quelle est la période de transition? De quelle manière envisagez-vous la gestion de la transition?

M. Benson : D'abord, ils ne commenceront pas à zéro. Le type de processus de revendications indépendant envisagé consiste en deux parties : La commission qui facilite la négociation, puis le tribunal qui statue sur les revendications si elles ne peuvent pas être résolues.

Les revendications en processus, si le Canada les considère et accepte de négocier ces revendications, pourraient être aussi facilement négociées par la nouvelle commission qui contrôlerait le processus.

L'actuelle Commission des revendications des Indiens participe déjà à la plupart des négociations tenues au Saskatchewan et joue un rôle de facilitateur. Ils n'auront pas à commencer à zéro. L'avocat du ministère de la Justice, qui examine cette revendication, la négocierait que ce soit dans le système actuel ou dans un autre système.

Une décision concernant ce qu'il faudra faire des revendications devra être prise avant l'actuelle Commission des revendications des Indiens, car beaucoup d'entre elles sont en traitement. Lorsque nous avons soulevé cette question, dans le rapport du groupe de travail mixte et auprès des fonctionnaires du gouvernement après le projet de loi C-6, on prévoyait une transition d'un an ou deux pour permettre à la Commission des revendications des Indiens de terminer ses enquêtes.

Une Première nation peut décider, à la fin ou au milieu du processus, de ne pas continuer le processus avec la Commission des revendications des Indiens, mais d'attendre la nouvelle commission. Tout ce qui était déjà commencé n'aura pas à être éliminé.

M. Abramson : Vous avez le rapport et les recommandations du groupe de travail mixte, et vous avez aussi beaucoup de discussions tenues sur ce genre de questions. Nous reconnaissons que la mise en place d'un nouvel organisme créera un arriéré de revendications, les revendications à la Commission des revendications des Indiens et les nouvelles revendications.

Vers la fin du mandat du groupe de travail mixte, nous nous sommes penchés sur la question de ces trois volets. Comme M. Benson l'a dit, il faudra une période de transition. Nous reconnaissons que ce genre de question devra être abordée.

Le sénateur Dyck : Monsieur Benson, vous avez dans votre proposition une série de modifications visant à améliorer le projet de loi C-6. Est-ce que ces modifications seraient acceptées par les Premières nations dans tout le Canada ou seraient-elles acceptées par tout le monde?

M. Benson : Elles ont été élaborées par la Fédération des nations indiennes de la Saskatchewan, ce sont donc nos modifications. Il serait probablement préférable de reprendre l'idée d'un groupe de travail mixte comme celui qui comprenait des représentants des organisations des Premières nations — nous, le Manitoba, l'APN, et d'autres — le ministère de la Justice et le ministère des Affaires indiennes et du Nord Canadien. Ces modifications pourraient servir de fondement à la modification du projet de loi C-6, mais je crois que vous voudriez en débattre. Nous les avons élaborées en tenant compte de nos préoccupations, mais il peut y avoir d'autres préoccupations dans d'autres régions du pays et dont il n'est pas forcément question dans nos modifications.

En fait, il devrait y avoir plus de discussions que de modifications. Nous estimons, toutefois, qu'elles constituent une bonne base.

Le président : Le plafond et la nomination d'arbitres ou de commissaires n'étaient-ils pas les plus grands obstacles? Il me semble que c'était les deux obstacles. N'est-ce pas?

M. Benson : Le retard était aussi un obstacle. Le retard a suscité beaucoup d'inquiétudes, car en vertu du projet de loi C-6, le gouvernement pouvait encore retarder le processus autant qu'il le voulait.

Nous avons proposé trois options pour régler ce problème relativement à nos modifications. Premièrement, en tout temps, comme dans le cas d'un litige, le requérant ou la Première nation peut annoncer qu'il en a assez et qu'il veut passer à l'arbitrage.

Deuxièmement, que la Commission inclut des délais dans le projet de loi. Par exemple, si une revendication est déposée, le gouvernement aura deux ou trois ans pour l'étudier. S'il ne le fait pas, ce délai est considéré comme suffisant pour que la Première nation demande une décision ayant force exécutoire.

Troisièmement, si une Première nation estime que le processus prend trop de temps, sans que des délais particuliers aient été fixés, elle peut faire appel afin que la Commission prenne une décision et que le processus continue.

Parmi les obstacles que vous avez mentionnés, le retard est l'obstacle important.

Le sénateur Watt : J'essaierai de me limiter à ce qui, à notre avis, constitue le problème, un problème que nous n'avons pas pu surmonter en tant que peuple autochtone dans les relations avec le gouvernement.

Je convins qu'un organisme indépendant apporterait la solution à certains problèmes, mais pas à tous les problèmes auxquels sont confrontés. En même temps, cet organisme indépendant relèvera d'un ministère, probablement celui des Affaires indiennes et du Nord canadien. Il aura encore un rôle à jouer même s'il est indépendant. Comme vous l'avez dit, nous devons avoir des contacts avec un ministère afin que certaines décisions puissent être prises au nom du gouvernement du Canada.

Notre expérience depuis un certain nombre d'années nous a appris que le ministère des Affaires indiennes et Nord canadien, peu importe le parti au pouvoir, ne répond pas, et n'a jamais répondu, à nos besoins et ce depuis le début. Ce ministère n'a pas été forcément établi pour nous, pour nous aider. Il a été établi pour défendre le gouvernement. C'est la situation difficile à laquelle nous sommes confrontés.

Nous nous empressons quelquefois de dire que nous avons nos propres organismes. Nous devons admettre que nous n'avons pas nos propres organismes. Nous devons les créer et avoir la capacité d'obtenir du financement pour nos institutions, afin de pouvoir discuter de gouvernement à gouvernement, quelque chose que nous faisons bien, mais ce n'est pas vraiment le cas.

Ce que je veux dire, monsieur le président, c'est que peut-être le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien a trop de responsabilités, comme celles d'assurer la prestation de programmes et, supposément, lutter pour les peuples autochtones et les défendre, en vertu de la Constitution.

Le moment n'est-il pas venu pour que nous commencions à envisager la création de notre ministère qui ne s'occupera pas de programmes, mais d'une nouvelle initiative? Cela éliminera les problèmes que nous connaissons. Il n'est pas nécessaire que ce ministère soit permanent, mais les Autochtones de toutes les régions du pays lui donneront une mission claire en lui disant : « Voici ce dont nous avons besoin pour régler rapidement ce problème. » L'économie de notre pays en est ralentie.

Nous pourrions apprendre à devenir très convaincants en apprenant à parler entre nous d'une manière que ceux d'en face comprendraient.

Je soulève ce point afin que l'on y réfléchisse. Je ne crois que nous aboutirons à quoique ce soit avec le même ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, quelles que soient les personnes et leur affiliation politique. Ce qui est derrière cette personne politique, le ministre, c'est la bureaucratie. C'est à la bureaucratie que nous avons affaire; et c'est ça le problème.

Je crois que nous devons créer un nouveau ministère et une bureaucratie, car il ne sera pas permanent. Ce pourrait être le seul moyen de faire avancer les choses qui, du moins dans mon cas, traînent depuis 23 ans. Je ne crois pas que la création d'un organisme indépendant soit la solution. Ai-je encore beaucoup à apprendre?

M. Shannacappo : Lorsque nous examinons le problème pour le résoudre, l'examiner, le disséquer, l'assembler, combien de fois avons-nous fait cela et l'avons présenté à la table? Il a été maintes fois soulevé. Le groupe de travail mixte était supposé régler tous ces problèmes. C'est peut-être cela la solution, peut-être devons-nous créer un nouveau ministère pour régler ce problème tout seul, pour aborder la question des terres.

Le sénateur Watt : Même si l'on arrive au point où il faut aborder les revendications une à la fois. Si les revendications particulières nous posent problème — ce n'est pas le seul problème que nous avons, toutes les revendications nous posent des problèmes — nous pourrions vouloir éliminer tous ces organismes établis par le gouvernement avec le temps et créer un organisme, pas un organisme de revendications particulières ou de revendications globales. Si nous parlons de gouvernement à gouvernement, si nous développons des relations de gouvernement à gouvernement, pourquoi aurions-nous besoin de tous ces organismes existants? Ils ne nous aident pas aujourd'hui; ils ne nous aideront pas à l'avenir.

Le président : Merci, sénateur Watt.

Je crois que le public ne sait pas ce que sont exactement les revendications particulières : une fraude, un détournement, un mauvais usage des terres des peuples des Premières nations. Il ne s'agit pas strictement de négociations visant à établir ceci, cela ou quelque chose d'autre. Il s'agit d'une manœuvre frauduleuse de fonctionnaires du gouvernement permettant l'utilisation des terres pour des chemins de fer et des autoroutes. Le public devrait comprendre que nos Premières nations ne demandent que justice pour régler les injustices commises dans le passé concernant la propriété et, dans la plupart des cas, les terres qui leur ont été attribuées.

Le sénateur Watt est ici depuis longtemps et connaît très bien, comme le groupe de témoins, beaucoup de ces questions.

Chef Chicoose, voulez-vous ajouter quelque chose?

Mme Chicoose : Oui. Les Premières nations veulent seulement être traitées aussi justement et équitablement que tous les autres citoyens. Ces terres nous appartiennent. Ces ressources sont tout ce qui nous reste. Les terres, comme vous l'avez dit, ont été prises sans aucune considération à notre égard à l'époque. Il faut s'acquitter de ces obligations. Je l'entends ici autour de la table. Les gens doivent comprendre et savoir que nous voulons justice et être traités équitablement.

Il y a tellement d'images négatives concernant les peuples autochtones. Les gens disent que des millions de dollars sont versés aux peuples autochtones. Au niveau de la base, nous n'en voyons pas la couleur. Je les ai entendus parler de logements au SCHL et au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Ils reçoivent tous beaucoup d'argent pour nous et que recevons-nous? Des miettes.

La symétrie n'est pas une solution aux problèmes des Premières nations. Ils écartent beaucoup de bandes en raison de loyers impayés et de logements mal construits. Il faut des solutions différentes. Ils ont besoin de la participation des dirigeants des Premières nations et de nos collectivités. Nous connaissons les problèmes. Nous vivons chaque jour dans ces collectivités.

Combien d'entre vous ont mis les pieds dans une réserve des Premières nations pour voir ce qui s'y passé? Vous ne saviez même pas où se trouvent Pasqua ou Rolling River. C'est triste. Il s'agit de notre pays. Nous avons besoin que quelque chose accélère le processus. Je sais qu'il y a beaucoup de frustration chez les peuples Indiens dans les terres territoriales, et cetera.

Nous devons commencer à essayer de travailler ensemble, et ceci est une bonne chose que d'essayer de s'écouter et comprendre notre situation et ce que nous voulons, et nous devons participer à la recherche des solutions à nos problèmes.

Le président : Merci beaucoup, chef. Nous n'avons certainement pas toutes les réponses, mais je peux vous dire que le comité essaie de mieux comprendre. Nous nous sommes déplacés; nous sommes allés dans les terres rencontrer des gens. Il est évident que nous n'avons pas pu tout voir. Je ne vivrais pas assez longtemps pour les visiter toutes, même en étant membre du comité depuis si longtemps. Nous croyons que nous comprenons, mais nous n'avons jamais été à votre place et jusqu'à ce que nous le soyons, je ne crois pas que nous comprendrons tout à fait. Nous devons espérer comprendre suffisamment pour faire une différence, aider votre peuple et les peuples autochtones du pays.

Je sais que le comité avec lequel je travaille — six membres sont avec moi ce soir —, je sais que leur engagement et leurs cœurs sont à la bonne place, espérons que nous suivrons la bonne voie pour obtenir les résultats que vous méritez.

Sur ce, je vous remercie de votre venue et de vos déclarations.

La séance est levée.


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