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NFFN - Comité permanent

Finances nationales

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Finances nationales

Fascicule 5 - Témoignages du 7 novembre 2006


OTTAWA, le mardi 7 novembre 2006

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui à 9 h 30 afin d'examiner les questions relatives à l'équilibre fiscal vertical et horizontal entre les divers niveaux de gouvernement du Canada, et d'en faire rapport.

Le sénateur Joseph A. Day (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Honorables sénateurs, le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui pour poursuivre ses travaux sur les questions relatives à l'équilibre fiscal vertical et horizontal entre les divers ordres de gouvernement du Canada. Cette étude arrive à point sur une question qui suscite beaucoup d'attention à l'échelle nationale.

Cette question concerne directement les gouvernements des provinces et des territoires; nous avons donc également invité toutes les provinces et tous les territoires à nous faire part de leur opinion, que ce soit par écrit ou par l'entremise d'une comparution devant le comité.

Nous avons aujourd'hui le plaisir de souhaiter la bienvenue aux représentants de la Nouvelle-Écosse. L'honorable Michael Baker, député et ministre des Finances, est accompagné de Vicki Harnish, sous-ministre, et d'Elizabeth A. Cody, sous-ministre adjointe.

L'honorable Michael Baker, député à l'Assemblée législative, ministre des Finances, province de la Nouvelle-Écosse : Permettez-moi tout d'abord, au nom des Canadiens, de vous remercier ainsi que les membres de votre comité pour votre travail sur cette importante question. Même si elle ne constitue pas une priorité pour la plupart des Canadiens, la façon dont le gouvernement fédéral s'attaque aux déséquilibres fiscaux aura des répercussions positives ou négatives, directement ou indirectement, sur presque toutes les familles canadiennes.

Comme vous pouvez le constater, mes propos s'articuleront autour des questions les plus préoccupantes pour la Nouvelle-Écosse.

En tête de notre liste, il y a la nécessité de s'attaquer aux inégalités fiscales entre les provinces et territoires et au sein de ceux-ci. À défaut de mesures appropriées, ces inégalités pourraient devenir incontrôlables et modifier fondamentalement la nature de notre fédération et, par le fait même, mettre notre prospérité future en péril.

J'espère que cela constitue un sérieux avertissement, car c'était mon intention.

Si la péréquation n'est pas adéquatement financée ou, pire encore, si elle est édulcorée, il est évident que les disparités entre les régions s'accroîtront. Si on veut que le Canada devienne un vrai pays, les services offerts aux Canadiens doivent êtres à peu près de même niveau, peu importe où ils vivent. Voilà le minimum auquel tous les Canadiens ont le droit de s'attendre.

Permettez-moi de tracer brièvement les grandes lignes des mesures qui, selon la Nouvelle-Écosse, seraient conformes aux principes de la péréquation et aux objectifs de la Constitution.

La péréquation doit être renforcée afin de s'assurer de la justesse des transferts. Nous croyons qu'il faut rétablir la norme des dix provinces. L'adoption de la norme des cinq provinces était arbitraire et a coûté extrêmement cher à la Nouvelle-Écosse, et, à notre avis, elle va à l'encontre des principes de la Constitution. Depuis son adoption, au début des années 80, la Nouvelle-Écosse a essuyé une perte de plus de 3,3 milliards en recettes fédérales.

Nous croyons également que le régime fiscal représentatif devrait être maintenu, car il traduit le mieux la capacité des provinces de produire des recettes. Bien que nous souscrivions à l'idée de prévisibilité et de volatilité amortie, à l'aide de moyennes mobiles, les paiements annuels doivent tout de même refléter les conditions actuelles. Par conséquent, nous suggérons d'adopter des moyennes triennales à partir de l'année en cours.

Nous n'approuvons pas l'imposition de plafonds artificiels, qui limitent la mesure dans laquelle le gouvernement fédéral est prêt à respecter l'engagement constitutionnel qu'il a pris envers les Canadiens. Nous sommes en faveur de l'inclusion complète des recettes de l'exploitation des ressources, y compris 100 p. 100 des recettes tirées des frais d'utilisateurs et des ressources naturelles.

Pour ce qui est des recettes tirées de l'exploitation des ressources naturelles, leur exclusion de la formule de péréquation favoriserait injustement les provinces riches en ressources naturelles qui reçoivent également des transferts de péréquation. Ces provinces pourraient ainsi continuer à profiter pleinement de leurs recettes tirées de l'exploitation des ressources naturelles tout en se prévalant de tous les avantages que procure la péréquation. Du même coup, toutefois, l'exclusion des recettes tirées de l'exploitation des ressources naturelles diminuerait la capacité fiscale moyenne sur laquelle s'appuie la péréquation et, de ce fait, aurait des répercussions négatives sur les provinces moins favorisées, car cela les forcerait à réduire leurs services sous la norme nationale ou à augmenter les impôts pour être au- delà de cette norme.

Je reviendrai sur ce point un peu plus tard, car il concerne les recettes que la Nouvelle-Écosse tire de l'exploitation des ressources extracôtières et la façon dont, contrairement à la croyance populaire, ces recettes appuient les intérêts des provinces qui reçoivent des paiements de péréquation.

Même si les améliorations que je viens d'exposer respectent les principes et les objectifs de la péréquation cités dans la Constitution canadienne, la Nouvelle-Écosse reconnaît que tout le monde devra probablement faire un compromis si l'on veut que la péréquation soit efficace et qu'elle soit acceptable pour tous les Canadiens. Nous, en Nouvelle-Écosse, sommes prêts à engager des discussions à ce sujet.

J'aimerais maintenant prendre quelques minutes afin de réfuter certains mythes ou malentendus qui entourent la péréquation et que certaines personnes qui ont comparu devant le comité continuent à alimenter, ainsi que d'autres, plus particulièrement la notion selon laquelle la péréquation récompense les provinces qui gaspillent et dépensent sans compter, ou celle selon laquelle l'Entente Canada-Nouvelle-Écosse sur la gestion des ressources pétrolières extracôtières sape les principes de la péréquation. Sauf le respect que je leur dois, ceux qui préconisent la première font preuve d'une incompréhension fondamentale de la nature et de la composition de notre pays.

Le Canada n'est pas, comme ces derniers semblent le suggérer, constitué de dix provinces et de trois territoires, ayant les mêmes possibilités économiques, la même capacité de générer de la richesse, les mêmes économies d'échelle ou les mêmes coûts.

Au Canada, tout est hétéroclite : la population; la nature, la quantité et la valeur des ressources naturelles; les niveaux de revenus; les niveaux d'endettement. Ce n'est pas un simple état d'esprit; ces différences sont réelles et structurelles. Tous ces facteurs, et il y en a d'autres, se traduisent par des capacités fiscales et des dépenses nécessaires différentes d'une province et d'un territoire à l'autre.

Par exemple, la majorité des déclarants de la Nouvelle-Écosse n'ont pas du tout le même niveau de revenu qu'ailleurs au pays. En gros, 66 p. 100 de nos déclarants gagnent moins de 30 000 $ par année, alors qu'un petit 9 p. 100 de notre population supporte 49 p. 100 du fardeau fiscal des particuliers. Dans les provinces riches, les contribuables au revenu élevé représentent une portion beaucoup plus importante de l'assiette de l'impôt du revenu des particuliers.

Voici quelques statistiques supplémentaires qui en disent long : en 2004, la Nouvelle-Écosse était classée au troisième rang pour le taux d'imposition des particuliers à revenu élevé et moyen, et au deuxième rang pour le taux d'imposition des sociétés. Autrement dit, la Nouvelle-Écosse est à la limite de sa capacité de générer des recettes par l'imposition. D'une part, notre capacité de générer des recettes par l'imposition est inférieure à celle des autres provinces. D'un autre côté, nos coûts de prestation de soins de santé et d'autres services essentiels, par habitant, sont plus élevés.

Par exemple, au Canada, la Nouvelle-Écosse arrive au deuxième rang quant au vieillissement de la population; en outre, elle possède le plus haut taux de personnes handicapées et arrive parmi les premières au chapitre du taux de maladies chroniques. En 2005-2006, les dépenses en santé représentaient à elles seules presque 48 p. 100 du total des dépenses de programmes. Avec l'une des populations les plus âgées et malades au pays, ces pressions liées aux soins de santé ne feront que s'accentuer à mesure que notre population vieillira et que plus de contribuables jeunes et en santé seront attirés vers l'Ouest par des salaires que nous ne pouvons pas offrir. Au fil du temps, cela exercera une pression encore plus grande sur la capacité de la Nouvelle-Écosse d'engager les autres dépenses nécessaires, notamment dans l'éducation, la recherche et la technologie ainsi que dans la sécurité des routes et des collectivités, bref tout ce qui aidera notre économie à atteindre la norme nationale et à faire prospérer notre pays.

Monsieur le président, en tant que province qui reçoit des paiements de péréquation, nous ne dépensons pas l'argent de la péréquation sans compter, contrairement à ce que certaines personnes semblent croire. Dans la mesure du possible, nous utilisons ces sommes pour doter la Nouvelle-Écosse du niveau de service auquel, selon la Constitution, tous les Canadiens ont droit. Émettre des hypothèses générales axées sur les dépenses et non sur la capacité fiscale globale n'aide pas vraiment à faire avancer ce qui, déjà, constitue une question très complexe et très difficile à résoudre.

Encore une fois, pour le compte rendu, je tiens à préciser que la Nouvelle-Écosse a présenté cinq budgets équilibrés consécutifs. Nous avons amélioré nos cotes de solvabilité et nous avons fait d'importants remboursements sur notre dette, remboursements pour lesquels nous avons utilisé intégralement les 830 millions de dollars que nous avons touchés dans le cadre de l'Entente Canada-Nouvelle-Écosse sur la gestion des ressources pétrolières extracôtières. En outre, nous comptons de plus en plus sur nos propres succès et sources de revenus.

En 1996-1997, les recettes provinciales représentaient 61,3 p. 100 de nos recettes globales. En 2006-2007, elles sont passées à 64,2 p. 100. Ce ne fut pas facile à réaliser, compte tenu de l'augmentation des coûts des soins de santé et des autres services publics. Il a fallu faire des choix difficiles, et il ne semble pas que nos choix seront plus faciles dans un avenir rapproché.

Notre déficit est énorme en matière d'infrastructure — plus de 3 milliards de dollars pour les routes et autoroutes seulement. La demande sans cesse croissante de services améliorés dans une foule d'autres secteurs et, comme je le faisais remarquer un peu plus tôt, notre taux d'imposition élevé minent notre compétitivité, non seulement pour attirer les particuliers et les entreprises, mais également pour garder notre personnel qualifié. C'est la raison pour laquelle nous comptons toujours sur la péréquation, laquelle représente environ 22 p. 100 de nos recettes globales.

Je résumerai cette partie de mon exposé comme suit : ceux qui d'un point de vue philosophique s'opposent à la péréquation, s'opposent, en conséquence, à la notion selon laquelle tous les Canadiens, peu importe où ils vivent, ont droit à des niveaux de services relativement équitables, et ce, à des niveaux d'imposition relativement équitables. Avec tout le respect que je dois aux auteurs de la Constitution, je dirai qu'ils ont raison et que ce sont les autres qui ont tort. La péréquation a été consacrée dans la Constitution afin, sinon d'offrir les mêmes chances aux provinces, à tout le moins d'améliorer le sort de celles qui sont moins favorisées. Elle a été ajoutée à la Constitution afin que le Parlement du Canada puisse créer un lien entre tous les Canadiens. Il s'agit autant d'une question de valeurs canadiennes que d'une question pécuniaire.

J'aimerais maintenant m'attaquer à l'idée selon laquelle l'Entente Canada-Nouvelle-Écosse sape les principes de la péréquation, de sorte qu'elle équivaut à une péréquation à l'extérieur de la péréquation. Cette idée découle peut-être de la méconnaissance du contexte constitutionnel et historique de l'entente et des objectifs auxquels elle répond sur le plan juridique et en matière de politiques.

C'est une entente bilatérale qui a résolu un conflit de compétence de longue date entre la Nouvelle-Écosse et le Canada, lequel remontait au début des années 80. En 1982, la Nouvelle-Écosse a accepté de mettre de côté ses prétentions en matière de compétence en contrepartie d'un régime de cogestion et d'un partage des recettes tirées de l'exploitation des ressources extracôtières. Pour le Canada, l'entente, plus particulièrement en ce qui a trait au partage des recettes tirées de l'exploitation des ressources extracôtières, avait pour fondement les obligations constitutionnelles en vertu de l'article 36.1, relativement à la promotion du développement économique dans toutes les régions. On s'attendait à ce que l'exploitation des ressources extracôtières ait lieu, après avoir réglé ce conflit juridique.

L'entente de 1982 et celle qui a suivi en 1986 garantissaient à la Nouvelle-Écosse qu'elle serait la principale bénéficiaire de ses recettes tirées de l'exploitation des ressources extracôtières, jusqu'à ce qu'elle atteigne la capacité fiscale par habitant qui avait été convenue — les auteurs ont noté que cette capacité devrait être considérablement supérieure à la moyenne nationale. En fait, ils ont établi une capacité fiscale de 140 p. 100. Les auteurs de l'entente ont agi de la sorte, car ils savaient que la péréquation pourrait menacer le but de l'entente. C'est pourquoi ils ont sciemment ajouté les paiements compensatoires de péréquation pour empêcher la récupération des recettes tirées de l'exploitation des ressources extracôtières.

L'Entente Canada-Nouvelle-Écosse est bilatérale; les ententes bilatérales sont fondamentales pour que le Parlement du Canada puisse aider les provinces à atteindre leur plein potentiel économique. Il ne s'ensuit pas cependant que de telles ententes fragilisent le programme de péréquation parce qu'elles peuvent, directement ou indirectement, améliorer la capacité fiscale actuelle ou future d'une province. Autrement, cela nuirait au principe de développement économique et aux autres aspects légitimes des ententes bilatérales entre le Canada et les provinces, ce qui ne servirait pas les intérêts de n'importe quelle région de notre pays.

Il y a une seule différence importante entre notre entente bilatérale avec Ottawa pour appuyer le développement de nos ressources extracôtières et celles conclues notamment par Ottawa pour appuyer l'industrie aérospatiale au Québec ou l'industrie automobile en Ontario : nous avons dû faire une concession pour appuyer nos objectifs en matière de développement économique, tandis que les autres provinces n'ont pas eu à le faire.

Quoi qu'il en soit, dans tous les cas, le gouvernement du Canada exerçait son droit constitutionnel en vertu de l'article 36.1, c'est-à-dire favoriser la prospérité de chaque province dans l'intérêt de chaque citoyen — l'un des objectifs constitutionnels les plus importants du Parlement du Canada.

Pour le compte rendu, je tiens à répéter ce que j'ai dit plus tôt : la totalité des recettes tirées des ressources extracôtières de la Nouvelle-Écosse est prise en compte dans la formule de la péréquation. Elles font augmenter les retombées pour les provinces qui reçoivent des paiements de péréquation. Leur exclusion, comme l'exclusion des recettes tirées des ressources naturelles dans n'importe quelle autre province, saperait sérieusement l'esprit et la finalité de la péréquation, car il s'agirait d'une sous-estimation considérable de leur contribution à la capacité fiscale.

Monsieur le président, j'ai consacré la plus grande partie de mon exposé à vous parler des déséquilibres fiscaux d'une province à l'autre. J'espère que la raison pour laquelle je consacre plus de temps au déséquilibre horizontal qu'au déséquilibre vertical est claire. En termes simples, je crois que les iniquités fiscales entre les provinces constituent la plus grande menace à la prospérité et à l'unité de notre pays. En outre, je crois que la question du déséquilibre vertical est bien comprise.

La plupart des observateurs, y compris ceux du gouvernement fédéral actuel, ont accepté le fait que les compressions dans les transferts fédéraux aux provinces en matière de santé et de programmes sociaux représentent en grande partie la raison pour laquelle Ottawa affiche constamment d'immenses surplus, tandis que la plupart des provinces doivent se démener afin de continuer à offrir des services publics de qualité et de respecter leur budget — et je me permets d'ajouter que ces surplus fédéraux rendent la possibilité de renforcer la péréquation plus abordable.

Pour corroborer mon point de vue, et pour une question de temps, j'aimerais attirer votre attention sur le témoignage de mon collègue de l'Île-du-Prince-Édouard, le ministre Murphy; il a clairement fait ressortir que, dans les dernières années, le coût de la péréquation exprimé en pourcentage du PIB fédéral est passé de 1,3 p. 100 du PIB, ou 8 p. 100 des recettes du fédéral en 1982, à 0,8 p. 100 du PIB, ou 5,1 p. 100 des recettes fédérales actuelles.

Je voudrais également rappeler les préoccupations que le ministre Murphy a exprimées à l'égard du transfert des points d'impôt comme moyen d'annuler l'écart vertical. Le transfert profiterait beaucoup plus aux provinces grandes et riches qu'aux provinces petites et pauvres où la valeur des points d'impôt est nettement inférieure. Autrement dit, il élargirait les écarts horizontaux actuels entre les provinces.

Permettez-moi également d'attirer votre attention sur une autre préoccupation sur laquelle, j'en suis sûr, la plupart de mes collègues seront d'accord —, à savoir que les économies du gouvernement fédéral réalisées à la suite du retrait des programmes à frais partagés ne doivent pas servir à financer les augmentations de la péréquation. Agir de la sorte reviendrait à nier ou peut-être à réduire la capacité d'une province, particulièrement les provinces plus petites et moins riches, à maintenir, voire à améliorer, le niveau des services publics offerts.

Actuellement, en Nouvelle-Écosse, 22 ententes fédérales-provinciales relatives aux frais partagés arriveront à échéance en 2006-2007; leur valeur est de 31,8 millions de dollars. Il serait fallacieux que le gouvernement fédéral prétende s'être attaqué au déséquilibre fiscal lorsqu'il se défile des ententes à frais partagés qu'il a financées dans le passé. Au mieux, le Canada n'y gagnerait rien et cela ne ferait rien pour régler la question des déséquilibres horizontaux et verticaux.

De la même façon, tout plafond à la péréquation doit préserver les gains difficilement obtenus par la Nouvelle- Écosse et Terre-Neuve-et-Labrador dans le cadre de leurs ententes sur les ressources extracôtières.

Comme je le mentionnais plus tôt, la Nouvelle-Écosse a mis de côté ses revendications à l'égard des ressources extracôtières par la signature d'une entente bilatérale contraignante avec Ottawa, entente visant à favoriser la croissance de l'économie de la Nouvelle-Écosse et la prospérité du Canada. Si le Parlement du Canada prenait une mesure pour déroger aux dispositions de l'entente concernant les paiements de péréquation compensatoires, cela le mettrait dans une position intenable, car il fragiliserait ou annulerait le partage des recettes établi dans l'accord de 2005. Une telle démarche remettrait en question la bonne foi, à vrai dire l'honneur, de la Couronne.

J'espère que le comité comprend mieux la position de la Nouvelle-Écosse à l'égard des déséquilibres fiscaux horizontaux et verticaux auxquels elle est confrontée, et que j'ai réfuté quelques mythes et dissipé quelques malentendus.

Merci de votre temps et d'avoir écouté le point de vue de la Nouvelle-Écosse. Je me ferai un plaisir de répondre à toute question.

Le président : Merci beaucoup, monsieur le ministre. Vos commentaires et votre tour d'horizon de la question sont les bienvenus. Il sera intéressant d'examiner vos points de vue à l'égard de l'entente sur les ressources extracôtières et de ses répercussions.

Merci d'avoir évoqué l'équilibre vertical. Cependant, nous avons décidé qu'au début de la présente étude, nous examinerions l'équilibre horizontal, ou la péréquation. Par la suite, nous nous attaquerons probablement à la question de l'équilibre vertical entre le gouvernement fédéral et les provinces et nous aborderons peut-être le déséquilibre par rapport aux municipalités. C'est à ce moment-là que nous souhaiterons nous pencher sur votre situation unique par rapport au procès sur le développement régional du Cap-Breton. Cependant, nous n'en parlerons pas aujourd'hui.

Le sénateur Eggleton : Le ministre comparaîtra-t-il de nouveau lorsqu'il sera question de l'équilibre vertical? Si non, je lui poserai des questions sur ce sujet.

Le président : Veuillez vous limiter à l'essentiel quant à vos questions sur l'équilibre vertical. Un autre témoin doit comparaître aujourd'hui et nous avons d'autres points à l'ordre du jour. Je sais que cette question vous préoccupe et nous y reviendrons en temps et lieu.

Je donne la parole au sénateur Baker, de Terre-Neuve-et-Labrador, qui a probablement eu des problèmes en raison du fait qu'il porte le même nom de famille que le ministre.

Le sénateur Baker : Au cas où l'auditoire ne comprendrait pas le sens des termes « horizontal » et « vertical », nous abordons le déséquilibre fiscal entre les provinces.

Un ou deux mois après la nomination du témoin au poste de ministre des Finances de la Nouvelle-Écosse, Standard & Poor's a porté la cote de solvabilité de la province à A plus. Les trois agences de notation ont maintenant donné à la Nouvelle-Écosse la cote A plus. Standard & Poor's a précisément fait référence à la position du ministre sur différents dossiers, plus particulièrement en ce qui touche les déficits.

Il y a vingt-cinq ans, le témoin était avocat plaidant en Nouvelle-Écosse. J'aimerais savoir ce qu'il pense exactement de l'entente spéciale sur les recettes tirées des ressources extracôtières entre la Nouvelle-Écosse et le gouvernement fédéral et du traitement de cette entente par certaines autres provinces et plus particulièrement par le comité d'experts.

Êtes-vous en train de dire que l'entente relative aux recettes tirées des ressources extracôtières avec le gouvernement fédéral ne devrait en aucune façon être associée à la formule de péréquation? Vous avez fait référence aux autres ententes conclues par d'autres provinces et d'autres régions pour illustrer l'entente sur les ressources extracôtières de la Nouvelle-Écosse. Êtes-vous en train de dire que la formule de péréquation et les discussions qu'elle suscite ne devraient pas concerner l'entente que vous avez conclue? Pourriez-vous préciser? Veuillez donner un exemple de ce que les autres provinces auraient reçu de semblable à ce que votre province a obtenu, ce qui montrerait que la discussion devrait être orientée ainsi.

M. Baker : Mon expérience d'avocat m'a appris à reconnaître les questions insidieuses. Et en voilà une.

La Nouvelle-Écosse soutient que, depuis la première entente conclue en 1982, on a réglé le conflit de longue date qui opposait le gouvernement du Canada à la Nouvelle-Écosse à l'égard de la propriété des ressources extracôtières. Dans le cadre de cette entente, la Nouvelle-Écosse devenait la principale bénéficiaire de ses ressources extracôtières.

Quant à l'entente actuelle, le point de vue de la Nouvelle-Écosse et du gouvernement du Canada est clair : il s'agissait d'une entente bilatérale. Elle ne faisait pas partie de la péréquation. Elle ne visait pas à modifier la péréquation. En fait, à cause de cette entente, les autres provinces qui reçoivent des paiements de péréquation devaient obtenir et ont déjà obtenu plus d'argent. Le but n'a jamais été d'augmenter les paiements de péréquation de la Nouvelle-Écosse. En réalité, selon le point de vue de la Nouvelle-Écosse, l'accord a techniquement entraîné une baisse du montant du paiement de péréquation. Elle reçoit simplement un transfert bilatéral distinct.

Prenons un exemple. Le gouvernement parle des routes dans les environs de Montréal. Je ne m'y oppose aucunement, car il s'agirait d'un accord bilatéral conclu entre le gouvernement du Canada et celui du Québec sur une question d'intérêt particulier pour cette province. J'ai de la difficulté à comprendre pourquoi, simplement parce que la Nouvelle-Écosse tire profit de l'entente sur les ressources extracôtières — à savoir, se fait payer d'une façon ou d'une autre —, certaines personnes croient que cela va fondamentalement à l'encontre des principes de la péréquation. Je ne crois pas que ce soit le cas. En fait, la façon dont les principes de la péréquation ont été respectés fait en sorte que le groupe d'experts aurait peut-être aimé intégrer cette entente bilatérale dans la formule de péréquation.

Le sénateur Baker : En revanche, vous dites que toutes les recettes tirées de l'exploitation des ressources naturelles de chaque province devraient être comprises dans le calcul des paiements de péréquation.

M. Baker : Oui.

Le sénateur Baker : Vous dites toutefois que les sommes accordées notamment à titre de subventions pour les céréales dans l'Ouest canadien ne devraient pas être comprises.

M. Baker : C'est exact.

Le sénateur Baker : C'est une façon intéressante de voir les choses.

M. Baker : Notre pays est très diversifié. Chaque province canadienne, peu importe sa capacité fiscale, est aux prises avec des défis différents. Comme gouvernement et comme pays, nous devons trouver des façons d'y répondre. Nous croyons que, dans la mesure où les recettes tirées de l'exploitation des ressources naturelles, particulièrement celles de la Nouvelle-Écosse, se répercutent sur la capacité fiscale d'une province, elles doivent être prises en compte dans la formule. Cependant, nous n'avons rien contre les accords bilatéraux qui pourraient apporter un avantage à n'importe quelle province canadienne.

Vous avez fait référence, monsieur le sénateur, aux céréales dans l'Ouest. Il importe peu qu'il s'agisse des céréales dans l'Ouest ou de la porte d'entrée du Pacifique, qui représente un enjeu considérable pour la Colombie-Britannique. À l'aide de ces méthodes, les provinces et le gouvernement du Canada concluent des accords sur des questions bilatérales qui, essentiellement, entraînent un transfert d'argent. Au bout du compte, il s'agit d'un transfert d'argent. Il y a certes le principe, mais il y a également le transfert d'argent. Les recettes tirées des ressources naturelles doivent être intégrées à la formule de péréquation dans la mesure où elles influent sur la capacité fiscale d'une province. En revanche, je n'ai aucune objection à ce que les accords bilatéraux puissent occasionner des transferts d'argent à une province.

Le sénateur Baker : Monsieur le ministre, vous dites que j'ai cité l'exemple des céréales dans l'Ouest canadien; ce n'est pas le cas. Je reprenais ce que vous avez dit mot pour mot dans une intervention précédente; vous avez d'abord proposé cet exemple. Je suis d'accord avec vous.

La Nouvelle-Écosse soutient que toutes les recettes tirées des ressources naturelles devraient être comprises dans le calcul de la formule de péréquation, mais pas les subventions spéciales pour les céréales, ni les autres revenus de produit, ni les montants dont profitent l'industrie automobile en Ontario ou l'industrie aérospatiale au Québec.

M. Baker : C'est exact. Ces accords bilatéraux sont exclus de la péréquation.

Le sénateur Baker : Vous ne dites rien quant à la norme des dix provinces. Pourquoi?

M. Baker : Je dis que la norme des dix provinces est fondamentale.

Le sénateur Baker : Vous croyez?

M. Baker : Oui.

Le sénateur Baker : Le groupe d'experts recommande un plafond. Évidemment, en tant que résident de Terre- Neuve-et-Labrador, je vois rouge, car n'est-il pas vrai que Terre-Neuve-et-Labrador y perdrait au change?

M. Baker : J'ai déjà entendu cela.

Le sénateur Baker : Terre-Neuve-et-Labrador serait immédiatement perdante. La Nouvelle-Écosse aussi, mais pas immédiatement. Est-ce juste?

M. Baker : Non, pas immédiatement.

Le sénateur Baker : Que voulez-vous dire?

M. Baker : Nous espérons un jour posséder une capacité fiscale beaucoup plus importante que celle que nous avons aujourd'hui. Certains voient la péréquation d'un mauvais œil, car elle fait augmenter la capacité fiscale d'une province. C'est exactement le but de la péréquation — à savoir, faire en sorte que la Nouvelle-Écosse, sans vouloir manquer de respect, ne soit plus une province qui touche des paiements de péréquation. Le gouvernement de la Nouvelle-Écosse souhaite de tout cœur en arriver à ce que la Nouvelle-Écosse, ne reçoive plus de paiements de péréquation suite à l'adoption d'une formule vraie, juste et équitable. La Nouvelle-Écosse sera alors une province nantie.

Le sénateur Baker : J'ai été très impressionné d'apprendre que les deux tiers des contribuables de la Nouvelle-Écosse gagnent moins de 30 000 $ par année, que 8 p. 100 des gens payent 50 p. 100 de vos impôts et que 40 p. 100 de vos dépenses sont réservées aux soins de santé.

M. Baker : Oui.

Le sénateur Baker : Et finalement, vous avez fait remarquer que les paiements de péréquation sont garantis par la Constitution.

M. Baker : Absolument.

Le sénateur Eggleton : Bonjour, monsieur le ministre. Le gouvernement de l'Ontario affirme qu'il y a suffisamment d'argent dans la formule de péréquation actuelle et qu'il n'y a pas de raison d'en faire plus. Par contre, si nous examinons les différentes recommandations, le gouvernement et, probablement, les Ontariens pencheraient davantage pour le rapport du groupe d'experts que pour celui du groupe consultatif, simplement parce qu'on y recommande l'imposition d'un plafond.

Sans ce plafond, nous pourrions nous retrouver dans une situation où la capacité fiscale de votre province, entre autres, serait supérieure à celle de l'Ontario. Est-ce vraiment de cette façon que vous percevez la péréquation?

M. Baker : Sans vouloir manquer de respect envers la province de l'Ontario, j'ai hâte au jour où la capacité fiscale de la Nouvelle-Écosse sera supérieure à celle de toutes les autres provinces canadiennes, puisqu'il s'agit-là évidemment des intérêts que je défends. Par contre, l'idée d'imposer un plafond, dans la mesure où il est appliqué à l'entente sur les ressources extracôtières, nous différencie certainement de l'Ontario. Nous avons un site Web qui décrit les différences entre notre gouvernement et celui de l'Ontario.

L'entente conclue avec la Nouvelle-Écosse et celle passée avec Terre-Neuve-et-Labrador sont des ententes bilatérales qui, selon nous, devraient être exclues du principe de péréquation. La différence réside en fait dans l'inclusion des montants de l'entente dans la formule de péréquation.

Le sénateur Eggleton : Étant un ancien maire de Toronto, je m'intéresse également à la politique locale. Nous traiterons de la question de la capacité verticale une fois que nous aurons réglé l'aspect horizontal.

L'association des municipalités de la Nouvelle-Écosse en avait long à dire sur le sujet et a publié un rapport. Une poursuite a été déposée par la municipalité régionale du Cap-Breton. Comment régler la question des municipalités? Elles fournissent tous les jours des services essentiels à la population : police, lutte contre les incendies, et cetera.

Comment comptez-vous redresser la situation?

M. Baker : Je ne ferai aucun commentaire sur la poursuite. C'est une phrase souvent prononcée, mais l'affaire est vraiment devant les tribunaux.

Bien sûr, les municipalités fournissent de précieux services aux Canadiens, et ces services sont organisés différemment selon la province. Je sais que la gamme des services fournis par des municipalités dans une région du pays diffère beaucoup de celle offerte par des municipalités d'une autre région. Par exemple, en Nouvelle-Écosse, la province assume une bonne part de l'entretien des routes et de l'infrastructure routière. En fait, elle est l'une des premières, sinon la première, à ce chapitre. Dans d'autres provinces, comme l'Ontario, les municipalités s'occupent beaucoup plus de cet entretien.

Il existe une vaste gamme de services. C'est l'une des difficultés oubliées — en d'autres mots, il existe des différences, entre les provinces, dans l'organisation des administrations municipales et dans la responsabilité de différents types de services.

Évidemment, le traitement réservé aux municipalités doit être équitable. En Nouvelle-Écosse, nous croyons qu'elles sont traitées équitablement. Bien sûr, il arrive à l'occasion que certaines municipalités ont le sentiment de ne pas avoir reçu leur juste part de ressources. Cela se produit dans d'autres municipalités que la municipalité régionale du Cap- Breton. En fin de compte, la question ne doit pas être tranchée par les tribunaux; la solution doit émaner des autorités provinciales.

Le sénateur Mercer : J'habite un secteur rural de la Nouvelle-Écosse. À ce titre, je peux vous parler du déficit de trois milliards de dollars dans l'infrastructure routière. J'ai envie de faire du lobbying auprès de vous pour la réfection des routes, mais je ne le ferai pas; nous pourrons en discuter plus tard.

J'ai été l'un des premiers à souligner mon inquiétude à l'égard des réflexions du ministre Flaherty sur l'entente après sa nomination à titre de ministre des Finances, et je suis très préoccupé par cette question, tout comme le sénateur Baker. Je crains que ces réflexions deviennent autre chose. En avez-vous discuté avec le ministre fédéral? On dit que des gens en ont parlé, mais il ne s'agit pas simplement de « gens ». Il s'agit du ministre fédéral des Finances.

M. Baker : J'ai parlé de la position du gouvernement de la Nouvelle-Écosse avec le ministre. Comme je l'ai mentionné plus tôt, le ministre a parfaitement le droit de recevoir cette information, mais il n'a fait que confirmer l'avoir reçue.

Bien sûr, notre position est très claire quant à la façon dont l'entente devrait être traitée. Le gouvernement canadien actuel appuie l'entente et il l'a prouvé. Je vais le prendre au mot et croire qu'il continuera à le faire.

Le sénateur Mercer : Si cela devait changer en cours de route, je suppose donc que vous seriez l'un des premiers à demander des explications au gouvernement.

M. Baker : Je peux vous dire que la position du gouvernement de la Nouvelle-Écosse est catégorique : l'entente sur les ressources extracôtières ne peut être modifiée sans le consentement de la province de la Nouvelle-Écosse. Ne pas obtenir son consentement serait inadmissible. Évidemment, je ne vois aucune raison en ce moment pour que le gouvernement de la Nouvelle-Écosse accepte de modifier l'entente.

Le sénateur Mercer : Ayant été présent à la cérémonie de signature de l'entente à Halifax, je connais l'importance qu'a celle-ci pour la Nouvelle-Écosse.

M. Baker : C'est important pour tous les citoyens de la Nouvelle-Écosse.

Le sénateur Mercer : J'aimerais changer de sujet. Dans votre exposé, vous avez dit qu'il existe actuellement 22 ententes de partage des coûts qui ont été conclues entre le gouvernement fédéral et la Nouvelle-Écosse, qui viennent à échéance en 2006-2007 et dont leur valeur est de 31,8 millions de dollars. Où en sont les négociations? Je comprends qu'il y a plus d'une entente, mais où en sommes-nous dans les négociations entre la province et le gouvernement fédéral sur ces questions?

M. Baker : Je crois qu'environ la moitié de ces ententes sont actuellement en négociation. C'est pourquoi je voulais vous faire part de notre inquiétude face à la possibilité que certaines de ces ententes puissent venir à échéance. Honnêtement, plusieurs de ces ententes concernent des secteurs où le gouvernement de la Nouvelle-Écosse devrait soit réduire radicalement les services, soit prendre en charge cette responsabilité et fournir les fonds requis. Ce qui ajouterait tout simplement plus de contraintes à notre situation.

Le sénateur Mercer : Avons-nous la liste de ces ententes? Cela me préoccupe.

M. Baker : Nous pouvons remettre la liste au comité.

Le sénateur Mercer : Ce serait utile. Certains d'entre nous pourraient régulièrement poser des questions à ce sujet. Je ne veux pas que les Néo-Écossais soient pénalisés parce que le gouvernement ne mène aucune négociation sur la moitié de ces ententes.

Le sénateur Mitchell : Comment votre régime de redevances se compare-t-il à celui de l'Alberta? Le savez-vous, de mémoire?

M. Baker : Tout ce que je peux répondre c'est que notre régime de redevances est inférieur d'une certaine façon, car nous avons toujours eu des ressources extracôtières à plus haut risque.

Le sénateur Mitchell : Si je lis entre les lignes, je crois que vous faites référence à AIMS, un groupe de réflexion de votre province.

M. Baker : Effectivement.

Le sénateur Mitchell : Son argument vous intéressait, mais pas assez pour y adhérer.

Le sénateur Stratton : C'était par contre le cas, en ce qui me concerne.

Le sénateur Mitchell : Vous n'êtes probablement pas assez de droite pour qu'ils votent pour vous.

J'ai constaté avec beaucoup d'intérêt que vous avez dit que tous les revenus découlant de l'entente seraient affectés au remboursement de votre dette. Pourriez-vous nous indiquer le montant de votre dette et combien vous remboursez?

M. Baker : Notre dette est de 12,2 milliards de dollars. C'est la dette de la province. Elle a baissé, grâce aux paiements que nous avons reçus en vertu de l'entente. Nous avons utilisé ce paiement pour rembourser la dette. Théoriquement, nous prenons chaque année le montant de péréquation pour rembourser la dette et nous l'inscrivons comme montant annualisé dans nos comptes courants.

Le sénateur Mitchell : Quel est le montant total de votre remboursement sur la dette, en ce qui concerne le capital?

Vicki Harnish, sous-ministre, Finances Nouvelle-Écosse, gouvernement de la Nouvelle-Écosse : Il est de 830 millions de dollars. Toutefois, puisqu'il y a une différence entre la comptabilité caisse et la comptabilité d'exercice que nous utilisons, nous affectons au surplus chaque année la portion des 830 millions que nous prévoyons gagner cette année-là. La somme de 12,2 milliards de dollars représente la valeur comptable de la dette directe nette qui sera réduite des 830 millions en huit ans, selon la comptabilité d'exercice.

Le sénateur Mitchell : Voilà ce qui prouve la fausseté des conclusions du groupe AIMS, selon lesquelles la péréquation entraîne une dette.

M. Baker : Absolument. Notre premier ministre de l'époque s'était engagé à rembourser, car notre dette avait augmenté au fil du temps en raison de notre incapacité à financer les programmes. Il s'agissait d'une mesure concrète de la part du gouvernement. Évidemment, vous disposez de beaucoup d'argent, et c'est tentant de le dépenser. Nous avons toutefois conclu que le remboursement de la dette servirait les intérêts à long terme de la Nouvelle-Écosse, et la Nouvelle-Écosse a légiféré en ce sens.

Le sénateur Mitchell : En conclusion, je voudrais aborder la question de l'éducation postsecondaire et du rôle que joue le gouvernement fédéral dans la création de normes nationales ou des mesures qu'il prend au moins pour encourager l'éducation postsecondaire au Canada. Comment pensez-vous que cela devrait être financé? Quel rôle croyez-vous que le gouvernement fédéral devrait jouer? Entre autres choses, l'éducation postsecondaire est essentielle à la productivité du pays. Or, nous avons un problème de productivité, et l'investissement dans l'éducation est un élément essentiel.

M. Baker : Le gouvernement fédéral a un rôle à jouer dans l'éducation postsecondaire. J'en ai discuté avec le ministre fédéral et nous croyons certainement qu'il a un rôle à jouer. En Nouvelle-Écosse, et ce n'est un secret pour personne, nous avons les frais de scolarité les plus élevés ou parmi les plus élevés au pays, en raison de la formule de financement. Nous avons la chance de recevoir des étudiants provenant des autres provinces et de l'étranger. Notre financement est calculé par habitant, c'est-à-dire qu'il est fondé sur la proportion de Canadiens habitant la Nouvelle- Écosse et non sur le nombre d'étudiants, ce qui entraîne un problème de financement pour l'éducation de niveau universitaire. Nous croyons évidemment que cette question devrait au moins être prise en considération par rapport au financement universitaire. Qu'il s'agisse du financement de la R-D ou de tout autre financement pour les universités, les infrastructures posent un énorme problème aux universités. En raison du nombre élevé d'universités en Nouvelle- Écosse, 11 universités pour environ 950 000 personnes, vous comprenez certainement les pressions qui s'exercent à ce chapitre.

Le sénateur Di Nino : Bienvenue, monsieur le ministre. Permettez-moi de revenir à la question de la juste répartition des richesses du pays — le transfert de fonds, comme vous l'appelez. Vous avez dit que les ententes bilatérales devraient être exclues des calculs de la péréquation. Alors, veuillez m'aider à comprendre, s'il existait un lien entre une région ou une province et le gouvernement fédéral, ce dernier pourrait, dans le cadre d'ententes bilatérales, transférer beaucoup plus d'argent à cette région ou province, ce qui minerait l'équilibre ou l'équité dont nous discutons présentement.

M. Baker : Je crois que certaines questions sont protégées dans la Constitution et je crois que la péréquation en est une. D'autres sont protégées par un autre processus qu'on appelle la politique. Je suis suffisamment traditionnaliste pour croire que les institutions parlementaires et le processus politique protègent le mieux bon nombre de nos droits. Selon moi, si une région donnée du Canada recevait des avantages disproportionnés par rapport aux autres, il existe un mécanisme pour redresser la situation : le processus politique.

Il est déplacé pour un gouvernement d'avantager une partie du pays plus qu'une autre de façon disproportionnée et sans aucun précepte, mais il est possible de le faire. Je ne crois toutefois pas que traiter tout le monde de la même façon revient à les traiter également et c'est sur ce point que mon opinion diffère fondamentalement de celle de certains qui estiment que la seule façon de traiter toutes les personnes équitablement consiste à les traiter exactement de la même façon. Je suis un parent. J'ai appris il y a longtemps que traiter mes enfants équitablement ne signifie pas nécessairement les traiter de la même façon. J'ai un enfant de 15 ans et un autre de 12 ans. Je suis certain que celui de 12 ans pourrait être satisfait de cette approche, tandis que celui de 15 ans pourrait trouver cela insultant.

Le sénateur Di Nino : De toute évidence, vous comptez parmi ceux qui ont préconisé d'inclure 100 p. 100 des recettes de l'exploitation des ressources naturelles dans le calcul, alors qu'il y a un groupe de pression puissant qui penche pour 50 p. 100. Les groupes de travail ont également une opinion divergente sur ce point.

Cette question n'est-elle pas du même ordre? N'est-ce pas le même type d'argument, à savoir qu'inclure tous les revenus signifie qu'il ne devrait pas y avoir d'exceptions, y compris avec les ententes bilatérales? Ce n'est pas nécessairement notre position, mais j'aimerais profiter de votre sagesse.

M. Baker : Encore une fois, je soutiens simplement que la péréquation définie dans la Constitution est différente du processus établi dans les ententes bilatérales. Nous sommes en présence de deux processus différents, avec deux résultats différents et, dans l'ensemble, c'est ce qui rend la fédération canadienne aussi dynamique. Prenons un exemple : si l'on voulait financer l'industrie de la pêche, les subventions ne seraient pas d'une grande utilité pour la Saskatchewan. Pour la même raison, les subventions pour le blé ne seraient pas d'une grande utilité à l'ensemble de l'économie de la Nouvelle-Écosse. Notre pays est doté d'une diversité qui entraîne des préoccupations qui diffèrent d'une région à l'autre, même à l'égard de l'environnement. On peut très bien affirmer que nos préoccupations sont différentes; toutefois, l'opinion qu'ont les Néo-Écossais de leur environnement est différente de celle qu'ont les Ontariens et les Albertains des leurs.

Le sénateur Di Nino : Monsieur le ministre, je crois que nous pouvons dire que tous les pays démocratiques répartissent leurs richesses d'une façon ou d'une autre, et qu'il existera toujours des différences entre les régions quant à savoir qui devrait obtenir quoi et si chacune est traitée équitablement.

Un des témoins a fait un commentaire que j'ai trouvé assez révélateur. Pour paraphraser, il a affirmé que la péréquation ne devrait pas être blâmée pour les problèmes des différentes régions ou provinces. Cet argument est souvent utilisé en politique, particulièrement en période électorale. Pourriez-vous nous donner votre avis sur ce sujet?

M. Baker : Comme je l'ai dit plus tôt, la Nouvelle-Écosse a des préoccupations différentes de celles des autres provinces et régions du pays. Nous avons de grands avantages. Par exemple, nos régimes fiscaux et nos capacités de fournir des services publics sont assez comparables. Nous sommes conscients que nous devons évoluer dans un monde compétitif, au Canada comme à l'étranger, et en Nouvelle-Écosse nous n'utilisons pas cet état de fait pour reculer devant les défis; nous nous y attaquons de front. J'ai mentionné notamment que nos sources de revenu ont augmenté et qu'un certain nombre d'autres mesures sont prises.

Nous avons besoin d'un contexte dans lequel l'ampleur du défi ne nous empêche pas de devenir une province nantie. Nous croyons qu'il est injuste d'avoir notamment un régime fiscal qui décourage nos jeunes de rester en Nouvelle- Écosse, où leur niveau de vie serait considérablement réduit. Il est difficile d'attirer les immigrants au Canada si, dans une partie du pays, on offre un niveau très différent de soins de santé, par rapport au reste du pays. Les Canadiens ont le droit d'exiger et d'espérer un niveau relativement égal de soins de santé, qu'ils vivent en Nouvelle-Écosse ou à Terre- Neuve-et-Labrador, à une extrémité du pays, ou en Colombie-Britannique, à l'autre extrémité.

Le sénateur Stratton : Vous dites que les provinces et régions sont différentes, et que ces différences doivent être prises en considération. Je suis plutôt d'avis que la péréquation devrait s'appliquer également à chaque province et à chaque région, et qu'il faudrait traiter distinctement les problèmes et préoccupations propres à chacune, qu'il s'agisse de la Nouvelle-Écosse, du Manitoba ou de l'Île-du-Prince-Édouard, sans recourir à la péréquation.

Nous devons nous en tenir au principe fondamental. Le terme « péréquation » signifie « égalité dans la répartition ». Toutes les provinces devraient être traitées également à ce chapitre.

C'est pour cette raison que j'ai aimé l'exposé du groupe AIMS, qui a proposé des moyens autres que la péréquation. C'est ce que notre comité avait besoin d'entendre, même si, comme l'a mentionné le sénateur Mitchell, de telles idées étaient un peu trop de droite pour lui. C'est très bien. Nous avons besoin de les entendre, que nous soyons d'accord ou non.

Comment réagissez-vous à l'affirmation voulant que, si toutes les provinces sont traitées sur un pied d'égalité dans le processus de péréquation, nous pouvons nous attaquer d'une autre façon aux problèmes et préoccupations propres à chaque province?

M. Baker : Je ne pense pas avoir saisi la question. Je souscris certainement au principe que la péréquation doit traiter chaque province équitablement. En fait, c'est un peu ce dont nous discutons ici. Par exemple, la norme des cinq provinces et la norme des dix provinces traitent-elles chaque province de façon équitable? Je crois que la norme des dix provinces y parvient parce qu'elle compare les provinces entre elles et non à une norme artificielle inférieure.

Je conviens que la péréquation consiste à traiter les gens équitablement et également, mais qu'il faut recourir également aux ententes bilatérales ou multilatérales.

Le sénateur Stratton : En somme, nous sommes d'accord sur le principe qu'il s'agit là de la façon d'envisager la péréquation.

M. Baker : Oui, c'est exact.

Le sénateur Stratton : Si nous sommes d'accord sur ce point, nous pouvons faire avancer les choses assez rapidement. Qu'il s'agisse d'une norme à cinq ou à dix provinces, c'est là un débat différent selon la région d'où vous venez.

M. Baker : Il s'agit de plus que ça. Il faut établir les principes qui permettent le plus clairement d'établir une comparaison et de déterminer ce qu'est la péréquation. Selon nous, les frais d'utilisation devraient être inclus dans la péréquation, car nous croyons qu'il faut tenir compte de tous les revenus dont le gouvernement dispose et pas seulement des recettes fiscales. De fait, pour des raisons juridiques, nous approuvons la plupart des frais d'utilisation de la même manière que vous approuvez une taxe en Nouvelle-Écosse. Frais d'utilisation ou taxe? C'est une distinction artificielle. Il existe des façons de financer le gouvernement. Je l'ai mentionné plus tôt à propos des administrations municipales. Cela dépend de la structure que vous vous donnez. C'est un fardeau fiscal. Si vous êtes un contribuable, vous examinez la situation fiscale. Si vous songez à vous installer ou à démarrer une entreprise en Nouvelle-Écosse, vous examinerez la situation fiscale dans les différents endroits — taxes municipales, barème d'indemnisation des accidents du travail, taux d'imposition des sociétés —, puis vous déciderez quel est le meilleur endroit où installer votre entreprise. Halifax, Winnipeg, Toronto ou St. John's, à Terre-Neuve-et-Labrador?

Le sénateur Stratton : En ce qui touche la péréquation, l'un des exposés mettait en évidence des statistiques troublantes, à savoir que le Manitoba compte le plus de bureaucrates par habitant au pays. Il touche des paiements de péréquation et, selon vous, il y a là quelque chose qui cloche. J'aimerais explorer un peu plus à fond cette question.

Si vous recevez des paiements de péréquation, est-ce que les conditions à satisfaire sont-elles suffisamment définies? Si vous recevez des fonds fédéraux, vous devriez justifier la façon dont ils sont dépensés aux Manitobains et au gouvernement fédéral. En effet, lorsque les statistiques nous apprennent que le Manitoba compte le plus grand nombre de bureaucrates au pays, c'est préoccupant. Est-ce une façon responsable de toucher des paiements de la péréquation et de les dépenser?

M. Baker : Je n'ai pas de commentaires à faire sur le Manitoba.

Le sénateur Stratton : Je comprends. C'est mon exemple.

M. Baker : Cependant, j'ai des commentaires à formuler sur la Nouvelle-Écosse. Je crois que, parfois, les statistiques sont fallacieuses, et je vais vous en donner un exemple. Le Queen Elizabeth II Health Sciences Centre, un établissement de santé qui offre également des soins à d'autres provinces, se trouve en Nouvelle-Écosse. D'autres provinces envoient des patients dans cet établissement. Ainsi, quelqu'un peut, par exemple, consulter les statistiques et dire que, pour un certain type de professionnels de la santé, nous avons un nombre plus élevé par habitant que celui d'une province voisine. Dans les faits, il faut regrouper ces professionnels de la santé en un endroit au profit de tous les gens de la région.

Nous devons être prudents par rapport aux économies d'échelle. La population étant en moins bonne santé, nous avons créé le ministère de la Promotion et de la Protection de la santé pour une raison bien précise. De nombreux professionnels de la santé, espérons-le, travaillent à la protection et à la promotion de la santé. Il serait trompeur d'affirmer, par conséquent, que le vieillissement de la population et la dégradation de sa santé sont des phénomènes plus fréquents en Nouvelle-Écosse qu'ailleurs au pays et que, d'une manière ou d'une autre, nous gaspillons donc notre argent en offrant ce service.

Lorsque vous comparez des statistiques comme celles dont vous nous avez fait part concernant le Manitoba, il est important de les analyser pour déterminer s'il y a du gaspillage, ce que tout le monde essaie d'éviter, ou si cela signifie vraiment que les besoins du Manitoba sont différents. Je ne spéculerai pas ces besoins différents au Manitoba, mais je peux tout de même affirmer qu'en Nouvelle-Écosse, plus particulièrement dans le secteur de la santé, les besoins sont différents par rapport aux autres régions du pays.

Le sénateur Stratton : Je suis d'accord. Ce que je dis, en revanche, c'est qu'on devrait avoir des comptes à rendre à la population et au gouvernement fédéral, qui verse les paiements de la péréquation. Cela ne devrait pas être à sens unique. Voilà, je crois, ce que le public voudrait voir se produire si, à vrai dire, ce n'est pas déjà fait.

Le sénateur Murray : Tout comme vous, je crois que ces problèmes devraient être réglés sur la scène politique.

Lorsqu'il est question de péréquation, il faut premièrement tenir compte du fait qu'elle est censée se fonder sur la capacité fiscale relative d'une province, c'est-à-dire la mesure dans laquelle cette capacité peut lui procurer des recettes. Afin d'établir la capacité fiscale d'une province, il m'apparaît évident, et je crois que ça l'est pour la plupart des gens, qu'il faut évaluer les 10 provinces pour obtenir un résultat pertinent. Il me semble également évident qu'il faut mesurer toutes les sources de recettes.

Le groupe d'experts souscrit à tout cela, sauf pour ce qui est des recettes d'exploitation des ressources naturelles, car il dit : « Non, non, seulement 50 p. 100 des recettes d'exploitation des ressources naturelles pour calculer le droit à péréquation. » M. Al O'Brien, président du groupe d'experts, est extrêmement compétent et expérimenté qui, comme nous le savons tous, a comparu devant le comité. M. Lacroix, un des membres du groupe d'experts, a comparu un peu plus tard, et il y a eu également M. Paul Boothe, qui est chevronné en la matière. Aucun n'a tenté de nous convaincre que cette formule de 50 p. 100 est fondée sur des principes. Ils ont presque raconté la vérité. La formule de 50 p. 100 visait à régler le problème de la capacité financière, un enjeu avec lequel le ministre fédéral des Finances doit composer. On peut le comprendre.

Le groupe consultatif auquel j'ai participé a dit qu'il faut utiliser la totalité des recettes pour calculer le droit à péréquation et que, si le problème de la capacité financière se pose, il faut réduire proportionnellement le montant, au su de tout le monde. Il faut ensuite défendre cette réduction et en débattre avec les provinces, au Parlement et à d'autres tribunes. Année après année, les gouvernements fédéraux successifs se sont attaqué au problème de la capacité financière en modifiant la formule, la manipulant de diverses façons pour, en fin de compte, obtenir le montant qu'ils voulaient. Selon moi, cette façon de faire n'est pas très efficace et ne repose certes pas sur des principes.

J'aimerais vous remercier d'avoir placé ces accords sur les ressources extracôtières dans leur contexte historique et de l'avoir fait si clairement. Vous avez dit entre autres : « L'accord de 1982 et son successeur, celui de 1986, garantissaient à la Nouvelle-Écosse qu'elle serait la principale bénéficiaire des recettes tirées de l'exploitation des ressources extracôtières, jusqu'à ce qu'elle atteigne la capacité fiscale par habitant qui avait été convenue — les auteurs ont noté que cette capacité devrait probablement être considérablement supérieure à la moyenne nationale. En fait, ils ont établi une capacité fiscale de 140 p. 100. »

Je ne sais pas si c'était en 1982 ou en 1986.

M. Baker : C'était en 1982.

Le sénateur Murray : Quoi qu'il en soit, vous nous dites que les objectifs et les principes de ces accords, que le gouvernement Martin a conclus avec votre province, Terre-Neuve-et-Labrador, sont totalement cohérents avec ceux de 1982 et 1986; ils ne s'éloignent nullement des principes et objectifs. Est-ce vrai?

M. Baker : Je suis désolé, pourriez-vous répéter votre question?

Le sénateur Murray : Est-ce que les accords que vous ainsi que Terre-Neuve-et-Labrador avez négociés avec le premier ministre Martin sont totalement cohérents avec les objectifs et les principes des ententes conclues en 1982 et 1986?

M. Baker : Absolument.

Le sénateur Murray : Est-il vrai que l'un des problèmes qui se posent depuis 1982, c'est que le rythme de développement de ces ressources, peut-être celles au large de la Nouvelle-Écosse et celles au large de Terre-Neuve-et- Labrador, n'est pas aussi important que ce que prévoyaient les premiers accords?

M. Baker : Tout le monde sait que la Nouvelle-Écosse est aux prises et a été aux prises avec des problèmes de développement cycliques inquiétants. Puisque j'ai vécu toute ma vie en Nouvelle-Écosse, je me souviens de certaines périodes de grande activité économique liée à l'exploration et au développement au large des côtes, et d'autres périodes où il n'y en avait pas. En conséquence, nous n'en avons pas retiré les revenus stables — si vous me permettez de m'exprimer ainsi — que nous avions prévus à un moment donné.

Le sénateur Murray : Je suis intrigué : on a mentionné une capacité fiscale future et hypothétique de 140 p. 100 pour la Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve-et-Labrador. Vous êtes actuellement loin du compte. À quel pourcentage êtes-vous actuellement?

M. Baker : Je n'en suis pas certain, mais je peux vous dire que nous n'en sommes pas à 140 p. 100. Nous sommes à 76 p. 100.

Le sénateur Murray : Après la péréquation?

M. Baker : Avant la péréquation.

Le sénateur Murray : Après la péréquation, quel pourcentage obtenez-vous?

Elizabeth A. Cody, sous-ministre adjointe, Finances Nouvelles-Écosse, gouvernement de la Nouvelle-Écosse : Cela dépend de la norme. Si la norme est celle à 5 provinces, nous atteindrions 96 p. 100.

M. Baker : Le pourcentage est certainement inférieur à 100 p. 100.

Le sénateur Murray : Le comité consultatif a dit qu'il faut utiliser 100 p. 100 des ressources naturelles pour calculer le droit à péréquation. Bien sûr, la question du plafond ne se pose pas dans ce cas. Est-ce que vous connaissez la capacité fiscale de Terre-Neuve-et-Labrador après la péréquation?

Le sénateur Baker : Elle a monté en flèche.

M. Baker : Je peux vous dire que Terre-Neuve-et-Labrador tire sa capacité fiscale des recettes provenant de ses ressources, si cela peut vous aider. Selon nos statistiques, la Nouvelle-Écosse est à 76,18 p. 100 et à 77,78 p. 100 pour les recettes provenant de ses ressources.

Le sénateur Murray : L'argument avancé est que, si on incluait la totalité des recettes d'exploitation des ressources naturelles, Terre-Neuve-et-Labrador dépasserait les 100 p. 100. Quel pourcentage la séparerait des 140 p. 100?

Sénateur Baker, le savez-vous?

M. Baker : Je ne pense pas qu'elle soit très proche.

Le sénateur Baker : Non, je ne le sais pas.

Le sénateur Murray : J'ai quelques points à soulever concernant l'inclusion des recettes. Je préfère ce que le groupe d'experts a suggéré à l'égard des impôts fonciers. Le groupe consultatif, nommé par le Conseil de la fédération, n'a pas été dans le détail. Il propose un système stratifié qui, à mon avis, a du sens.

Ce qui a été dit concernant la réduction du nombre d'assiettes fiscales pour le faire passer de 33 à 5 a également du sens à mon avis. Je crois que cela simplifierait l'exploitation. J'aimerais également entendre vos commentaires à ce sujet.

Pour finir, je ne peux pas me décider concernant les frais d'utilisation. Notre comité ne les a pas exclus, contrairement au groupe d'experts. Ce dernier veut le faire. Je trouve son argument intéressant, car il est si difficile d'établir le montant du droit qui permettrait de recouvrer le coût réel du service. Il s'est demandé s'il faut inclure les frais de scolarité. Je ne connais pas la réponse à cette question.

Vous dites que vos frais d'utilisation sont, pour la plupart, votés par l'assemblée législative. Je ne suis pas certain que cela soit la norme partout. Je ne connais aucun ministre des Finances, sauf peut-être vous, qui a admis, au moment de présenter le budget, que les frais d'utilisation imposés par le gouvernement sont, en réalité, un impôt.

M. Baker : Les frais d'utilisation sont une source de revenus. On les préfère à un autre impôt parce qu'on souhaite, sur le plan des politiques, transférer le fardeau de recevoir certains services à un certain groupe de personnes. Par exemple, une loi néo-écossaise garantit que le revenu net d'exploitation de notre registre des véhicules à moteur est affecté à nos routes. En conséquence, lorsque vous achetez votre permis de conduire en Nouvelle-Écosse, vous contribuez à l'entretien et à la construction des routes.

On pourrait faire valoir qu'il nous suffirait de taxer le carburant et de recouvrer ce montant ou de baisser la taxe sur le carburant et d'augmenter les frais. Cependant, pour les conducteurs de la Nouvelle-Écosse, ces taxes finiront par représenter un fardeau.

Je n'ai pas réfléchi à la question de savoir s'il faut inclure ou exclure les frais de scolarité universitaires. Je n'y vois aucune logique. La plupart des provinces et territoires imposent des droits pour les permis de conduire, et je ne pense pas qu'il soit opportun de les inclure dans la capacité fiscale.

Pour ce qui est des cinq principes simplifiés, la transparence est un bon principe. D'après les discussions que j'ai eues avec mes collèges à l'assemblée législative, je sais que certains semblent absents lorsqu'on parle du calcul de la péréquation. Ce serait une bonne chose d'instaurer un système qui permettrait à davantage de Canadiens de comprendre comment elle est calculée. Dans l'ensemble, l'idée d'instaurer une formule transparente est bonne.

Je comprends l'argument philosophique proposant d'inclure ou d'exclure 100 p. 100 des recettes d'exploitation des ressources naturelles. Cependant, je n'arrive pas à comprendre la logique associée aux 50 p. 100. En mettant les choses au mieux, ce n'est pas tenir compte de tous les principes. Nous croyons que la meilleure solution consiste à inclure la totalité des recettes d'exploitation des ressources naturelles. Je comprends toutefois en partie la logique avancée par d'autres intervenants.

Comme je l'ai dit plus tôt, nous croyons qu'il faut trouver un compromis. Tel que vous l'avez précisé, monsieur le sénateur, il y a peut-être des problèmes de capacité financière auxquels doit s'attaquer le gouvernement du Canada. Visiblement, le niveau de péréquation se répercutera sur la capacité financière de certains autres programmes. La capacité financière et les principes de péréquation doivent être abordés différemment.

Le sénateur Murray : Et qu'en est-il des impôts fonciers?

M. Baker : Nous sommes ouverts en ce qui concerne les recettes provenant des impôts fonciers. Cela ne pose pas tellement de problèmes à la Nouvelle-Écosse, et nous sommes prêts à étudier la question.

Le sénateur Baker : Les membres du comité ont la chance de pouvoir compter sur l'expertise du sénateur Murray, ce qui nous aidera lorsque nous devrons formuler nos recommandations.

Lorsque nous lui avons posé des questions sur l'épuisement des ressources extracôtières, le témoin a dit que l'exploitation dure depuis longtemps. Il s'agissait d'un nouveau domaine dans lequel la Nouvelle-Écosse s'aventurait. Je me suis alors souvenu que la première loi qui a été promulguée à l'assemblée législative visait à prendre le contrôle de toutes les ressources au large de la Nouvelle-Écosse, dans la mesure de leur exploitabilité. Les experts avaient prédit que ces ressources seraient exploitables jusqu'aux côtes de l'Afrique, d'une côte à l'autre de l'Atlantique. Je constate qu'ils le pensent toujours.

Pour défendre votre point de vue contraire à celui des autres provinces, vous pourriez utiliser deux arguments simples. Premièrement, l'Alberta a obtenu une exemption de sept ou huit ans à l'égard de tous les revenus d'exploitation du pétrole. Ces revenus ne sont pas pris en compte dans la formule de calcul de la péréquation. Deuxièmement, si l'on vous attaque concernant l'idée d'affecter de l'argent aux régions pauvres, vous pourriez faire valoir que, selon les chiffres d'Exportation et développement Canada, ces régions pauvres contribuent souvent le plus à l'économie du pays, en ce qui concerne les exportations par habitant. Celles-ci contribuent le plus à faire de nous des nantis à Ottawa et à assurer la vitalité de nos villes, et ce grâce à leurs exportations, sans lesquelles vous ne pourriez pas imprimer de l'argent.

Si l'on attaque votre logique de cette façon, pourquoi ne précisez-vous pas ce que l'Alberta a reçu initialement, à savoir l'exemption totale des recettes, ou pourquoi ne présentez-vous pas les chiffres qui montrent que la Nouvelle- Écosse contribue plus par habitant à l'économie du Canada que plusieurs grandes villes? Pourquoi ne défendez-vous pas énergiquement vos arguments?

M. Baker : Peut-être que les Néo-Écossais ont la réputation de présenter des arguments circonspects. Il ne faudrait toutefois pas confondre cela avec un manque de compassion à l'égard de nos arguments. Je crois que l'entente avec la Nouvelle-Écosse sur les ressources extracôtières ne diffère pas des autres décisions que le gouvernement du Canada et le Parlement du Canada ont prises par le passé. Par exemple, la frontière qui séparait le Québec et l'Ontario au moment de la création de la Confédération a été prolongée au moment opportun, ce qui a permis à ces deux provinces de disposer d'importantes ressources naturelles dans le nord. Cela a été fait en temps opportun.

Il n'est pas moins opportun que la Nouvelle-Écosse tire pleinement profit de ses ressources extracôtières. Il s'agit de notre arrière-pays, comme l'est le nord pour l'Ontario et le Québec. Les Néo-Écossais devraient tout autant tirer profit de leurs ressources extracôtières. Si, lorsqu'elles seront exploitées à plein rendement, ces ressources nous procurent une situation supérieure à celle d'une autre région du pays, la formule de péréquation devrait alors être mise à contribution pour offrir aux autres provinces le niveau d'imposition et de services de la Nouvelle-Écosse à ce moment-là.

Le sénateur Baker : Je suis certain que les autres sénateurs se joignent à moi pour féliciter le témoin pour l'excellent exposé qu'il a fait au nom de la Nouvelle-Écosse.

M. Baker : Monsieur le président, j'aimerais présenter une annexe à mon mémoire. L'annexe explique en détail certains des points de vue que j'ai exprimés.

Le président : Ce serait très utile. Nous espérons présenter un rapport provisoire dans deux ou trois semaines, sur la question. Nous pourrions à nouveau communiquer avec vous pour aborder les questions verticales. Le sénateur Eggleton a quelques questions à ce sujet, et vous pourriez peut-être nous aider.

Je vous remercie, monsieur le ministre Baker, madame Harnish et madame Cody. Vous avez très bien présenté le point de vue de la Nouvelle-Écosse, et cela nous sera utile.

Le comité poursuit ses travaux à huis clos.


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