Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires juridiques et constitutionnelles
Fascicule 15 - Témoignages du 8 novembre 2006
OTTAWA, le mercredi 8 novembre 2006
Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, à qui a été déféré le projet de loi S-1001, Loi concernant Scouts Canada, se réunit aujourd'hui à 16 h 6 pour examiner le projet de loi.
Le sénateur Donald H. Oliver (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Honorables sénateurs, ceci est notre première réunion au sujet du projet de loi S-1001, Loi concernant Scouts Canada.
D'après le sommaire du projet de loi, le texte regroupe de met à jour les diverses lois régissant l'association dénommée les Boy Scouts du Canada afin de mieux correspondre à sa situation actuelle au Canada. Il remplace le nom de l'association par « Scouts Canada » et apporte d'autres changements techniques ou accessoires touchant l'administration de ses affaires.
Pour amorcer notre examen de ce projet de loi, j'ai le plaisir d'accueillir notre collègue, l'honorable sénateur Consiglio Di Nino, le parrain du projet de loi.
Bienvenue au comité. Je remarque que vous êtes accompagné de Rob Stewart, commissaire exécutif et directeur général de Scouts Canada.
Je vous souhaite la bienvenue à vous aussi,
L'honorable Consiglio Di Nino, parrain du projet de loi : Je vous remercie de bien vouloir accueillir devant vous le directeur général de Scouts Canada. Peut-être pourra-t-il mieux que moi répondre à certaines questions.
Ce projet de loi est présenté pour la troisième fois au Sénat. C'est principalement un projet de loi pour modifier le nom Les Boy Scouts du Canada, pour refléter le fait que l'organisation est mixte depuis plusieurs années. Cela date de 1974, quand des modifications ont été apportées à l'un des programmes de l'association. Il y a six ou sept ans, l'organisation est devenue officiellement mixte dans tous les programmes qu'elle offre.
Vous m'avez entendu parler de ce sujet pour la troisième fois le 27 juin, quand j'ai présenté le projet de loi. Il vise à projeter une image appropriée du scoutisme de nos jours, auquel participent tant les garçons que les filles, les jeunes hommes et les jeunes femmes du pays.
Des gens ont écrit pour suggérer que le projet de loi modifie des règlements administratifs de l'organisme. Le premier projet de loi a été présenté avant que les modifications aux règlements que contestent certains membres du mouvement scout soient entrées en vigueur. J'ai présenté le projet de loi S-1001 sous sa forme originale, qui est assez proche de ce projet loi-ci, avant la réunion générale annuelle lors de laquelle les règlements ont été modifiés. Certains membres de l'organisation contestent maintenant ces modifications.
Je pense que n'ai pas à en dire plus. Je suis ici pour répondre aux questions. Je serais heureux de situer le projet en contexte, mais la dernière fois que j'ai présenté un projet de loi devant le comité, le président m'a dit que si je parlais trop longtemps, il ne resterait pas assez de temps pour les questions des collègues.
Monsieur le président, j'invite volontiers mes collègues au dialogue sur ce projet de loi.
Le président : Merci, sénateur Di Nino.
L'article 1 du projet de loi stipule :
L'association a été constituée en personne morale par le chapitre 130 des Statuts du Canada de 1914, sous la dénomination « the Canadian General Council of Boy Scouts Association ».
Pourriez-vous nous expliquer l'objet de ce changement?
Pourriez-vous aussi m'en dire un peu plus sur les préoccupations que vous avez entendues exprimer au sujet de ce projet de loi? Est-ce qu'on vous a écrit? Avez-vous reçu des appels? Le cas échéant, quelles sont les principales plaintes ou préoccupations exprimées? Nous avons tous reçu des trousses d'information, mais j'aimerais que vous nous en parliez.
Le sénateur Di Nino : Le préambule du projet de loi fait l'historique des lois portant sur cette question. En 1994, l'association a été constituée en personne morale par une loi du Parlement sous la dénomination « the Canadian General Council of Boy Scouts Association », qui elle-même avait été constituée en personne morale en Grande- Bretagne par charte royale accordée en 1912, pendant le règne de George V. Le préambule poursuit avec la description d'autres changements qui sont survenus.
Ce projet de loi vise à modifier les statuts de la constitution en personne morale survenue en 1914, pour changer la dénomination pour Scouts Canada. Ce changement fait l'objet du premier article du projet de loi.
Pour ce qui est des préoccupations exprimées par ceux qui nous ont écrit — et je pense qu'il y en a trois en particulier — elles expriment une différence d'opinion sur la manière dont l'organisation devrait être dirigée et organisée.
J'ai appris que lorsque ce changement est survenu en 2003, il y avait trois principaux opposants à la modification aux règlements administratifs. Deux de ces trois personnes siègent maintenant au conseil d'administration national de l'organisation, dont son président, Glenn Armstrong. Ted Claxton nous a écrit, de même que Keith Martin — pas le député de la Colombie-Britannique.
Si je comprends bien M. Claxton — et M. Stewart en parlera aussi — il n'est pas d'accord avec le contenu du règlement modifié. C'est son avis, et il est tout à fait en droit de l'avoir et de l'exprimer.
Cela étant dit, d'après ce que j'ai compris, la grande majorité de l'effectif des Scouts était favorable aux changements. Il convient de répéter que deux des opposants les plus virulents à l'époque siègent maintenant au conseil national de l'organisation, dont son président.
Rob Stewart, commissaire général et directeur général, Scouts Canada : C'est vrai. Le processus a été entamé avant mon entrée en fonction en tant que directeur général. L'objet principal du changement était de refléter le fait que nous sommes maintenant un organisme mixte au Canada. Le désaccord exprimé est au sujet de notre deuxième règlement, de la manière dont nous avons structuré l'organisation et du fonctionnement du modèle de gouvernance. Il est lié à la démocratie et au désir de donner voix au chapitre, à l'avenir, à plus de membres de l'organisation.
De fait, depuis la modification du règlement, un plus grand nombre de délégués votants assistent maintenant à nos réunions annuelles. Avant la modification de notre structure, conformément au règlement, nous avions trois représentants pour chaque province et territoire. Depuis la restructuration nous avons maintenant 20 conseils, dont chacun a trois voix. Vous pouvez constater que le nombre de voix a augmenté. Dans le cadre de ce changement, l'un des trois délégués doit être un représentant des jeunes de notre organisation. Nous avons un vote obligatoire de nos jeunes, et nous avons créé quatre postes pour des jeunes à notre conseil d'administration. Nous avons essayé de renforcer cette représentation.
Notre conseil d'administration et notre organisation continuent de veiller à ce que nous appliquions les processus appropriés de sélection des délégués votants à notre réunion annuelle.
Le sénateur Ringuette : En ma qualité d'ancienne guide qui a vendu de nombreux boisseaux de pommes au Nouveau-Brunswick, je ne peux m'empêcher d'être attristée qu'il ne soit pas fait mention des Guides dans le projet de loi, pour refléter votre structure mixte,.
Le sénateur Di Nino : Le sénateur Ringuette et moi sommes devenus bons amis. Maintenant je comprends pourquoi — elle était guide et moi scout. C'est du bon monde.
Je m'intéresse au scoutisme depuis très longtemps, et j'aimerais rapidement tirer une chose au clair.
Nous avons reçu une lettre de M. Claxton, je crois, où il disait que je siégeais au conseil d'administration quand ces changements sont survenus. Je n'ai pas siégé au conseil très longtemps. J'y étais quand j'étais président de la région du Grand Toronto, et c'était avant même la naissance de certains de nos collègues sénateurs.
Cependant, je me rappelle avoir participé au débat sur le concept des Scouts comme organisation mixte. De longues discussions et consultations ont eu lieu bien avant que cela se concrétise ailleurs que dans le segment des aînés. Dans la région du Grand Toronto, nous avons amplement consulté les Guides, et elles n'ont jamais exprimé d'inquiétude, ni d'opposition. Elles comprennent que certaines filles préfèrent faire partie d'une organisation mixte. Nous sommes vraiment des organisations parentes qui travaillent en étroite collaboration.
Les Guides et les Scouts ont longuement dialogué sur le sujet avant la reconnaissance définitive des Scouts comme une organisation mixte.
M. Stewart : Je confirme les propos du sénateur Di Nino. Nous nous entendons bien avec les Guides. Nous entretenons un dialogue continu, et nous sommes bons amis. Nous collaborons quand nous le pouvons.
Le mouvement mixte est né dans la région rurale du Canada, où on avait de la difficulté à trouver suffisamment de chefs pour diriger les programmes pour les garçons et les filles. La solution trouvée a été d'englober les filles. Comme vous pouvez l'imaginer, dans une organisation historique tellement attachée à la culture, cela a causé des remous des deux côtés. Plusieurs expériences ont été menées pour vérifier que la solution était la bonne.
Nous ne faisons pas de raids dans l'effectif des Guides, et ne recrutons pas activement parmi elles. Notre effectif féminin est d'environ 10 à 15 p. 100 de l'effectif total, donc, selon les parts du marché, je ne crois pas que nous ayons beaucoup d'impact. Je ne sais pas, comme le sénateur Di Nino, combien de membres étaient auparavant des Guides. Je soupçonne que certaines sont venues à nous parce que leurs frères étaient avec nous.
La philosophie des Guides, que je respecte, est que les filles doivent être dans des positions où elles apprennent auprès d'un leadership féminin. Nous avons de bons rapports avec les Guides.
Le sénateur Ringuette : Je n'ai pas eu la bonne impression de ce projet de loi. Je pensais que c'était pour fusionner les Guides et Scouts Canada.
M. Stewart : Nous sommes deux organismes distincts. Nous nous réunissons régulièrement pour pleurer sur l'épaule l'un de l'autre, sur les défis que pose notre situation d'organismes sans but lucratif. Les Guides vendent encore pour des millions de dollars de biscuits chaque année, alors tout va bien pour elles.
Le sénateur Ringuette : Au Nouveau-Brunswick, nous étions pauvres, alors nous vendions des pommes que nous donnaient les pomiculteurs.
Le sénateur Milne : Le sénateur Banks a porté certaines préoccupations à l'attention du Sénat pendant sa deuxième lecture de ce projet de loi. Je ne sais pas exactement d'où vient ce diagramme, mais cela semble être un cercle fermé.
Pour revenir à ce que disait M. Stewart, l'organisme est donc maintenant plus démocratique et il y a 20 organisations par province qui peuvent chacune envoyer trois personnes à la réunion annuelle générale?
M. Stewart : Non, nous avons 20 conseils dans tout le pays. Bien des provinces, comme le Manitoba et la Saskatchewan, n'ont qu'un seul conseil. L'Ontario en a huit, la Colombie-Britannique trois et l'Alberta deux, en fonction de la population. Il y a 20 conseils dans tout le pays, dont chacun peut envoyer trois délégués.
Le sénateur Milne : Quels autres changements ont été apportés récemment dans la manière dont vous êtes régis, sans qu'il ait fallu une loi du Parlement pour les instaurer?
M. Stewart : Nous avons modifié notre modèle de gouvernance pour reproduire de près celui de Carver. L'un de nos soucis, avec l'ancienne méthode de gouvernance et l'ancienne structure, c'était de savoir qui en était responsable. Nous sommes, en fin de compte, un mouvement axé sur des programmes et nous voulions que les commissaires assument la responsabilité du fonctionnement des conseils.
Le sénateur Di Nino : Les commissaires sont des bénévoles.
M. Stewart : Oui. Je suis le seul employé rémunéré du conseil des gouverneurs. Tous les autres sont des bénévoles. Avant la restructuration la plus récente, nous avions toutes sortes de conseils qui instauraient toutes sortes de règlements et de politiques. Vous pouvez imaginer le fouillis de politiques et les responsabilités que cela engendrait pour nous.
Nous voulions définir les responsabilités plus clairement en ayant un conseil d'administration, un organe d'élaboration des politiques, et un comité administratif qui concrétiserait ces politiques en œuvre. Les conseils seraient relativement autonomes, dans l'exécution des politiques et des programmes de l'organisation.
Le changement avait divers motifs. Certaines modifications ont été apportées pour mieux définir les responsabilités. D'autres visaient les défis de la gestion du risque que nous rencontrions, particulièrement de la part de compagnies d'assurance qui voulaient savoir qui était responsable de quoi, qui rendait compte de quoi et qui définissait les règlements dans l'organisation. Quand on dit qu'un tas de gens peuvent énoncer des règlements et des politiques dans l'organisation, cela suscite des inquiétudes, du point de vue de la gestion des risques, et cela nous crée des difficultés.
Notre structure, qui a été modifiée, comporte maintenant les 20 conseils, qui rencontrent le conseil d'administration cinq ou six fois par année. Elle rend compte de ses activités à l'effectif chaque année, dans le cadre d'une réunion annuelle, à la fin de novembre.
Un autre changement c'est que moi, en tant que directeur général et commissaire exécutif, j'ai plus de responsabilité dans la direction des opérations courantes de l'organisation.
Le sénateur Milne : Quand vous dites qu'ils rendent compte de leurs activités à l'effectif, ce n'est pas l'effectif dans son ensemble, mais plutôt au groupe de la réunion générale annuelle?
M. Stuart : C'est bien cela. Nous rendons compte de nos activités aux délégués votants qui viennent à la réunion annuelle représenter leurs conseils.
Le sénateur Milne : Si vous pouvez apporter ce changement sans une loi du Parlement, pourquoi ne pas continuer ainsi et ne nous demander que de changer la dénomination de l'organisation?
Le sénateur Di Nino : Je ne comprends pas la question.
Le sénateur Milne : Ce projet de loi ne fait pas que modifier le nom de l'organisation — ce qui ne me pose pas le moindre problème — mais apporte aussi beaucoup de changement dans la manière dont elle est régie. Il est question d'achat et de vente, d'hypothèques, d'investissements, de transactions sur des terres, de propriétés, et cetera. Il y est question de tout un tas de choses que l'organisation veut faire, et je suppose qu'elle les fait déjà. Pourquoi avez-vous besoin de cette loi?
M. Stuart : Comme je n'étais pas ici quand ce processus a été entamé, je n'en suis pas sûr, mais je pense que ces dispositions font partie des éléments d'ordre administratif dont il est question dans le projet de loi. Le principal but visé est le changement de dénomination, mais étant donné que nous ne venons pas régulièrement devant le Parlement pour faire modifier une loi, notre but était de régler les questions d'ordre administratif de manière à ce que nous ayons un règlement qui régisse l'organisation, et que le règlement ait les éléments qui sont indiqués là-dedans. Le projet de loi définit plus clairement nos responsabilités en ce qui concerne l'acquisition et l'aliénation de propriétés, et d'autres choses. C'est vraiment le but visé. Quand on parle de ménage administratif, c'est l'objectif de ce projet de loi.
Le sénateur Milne : J'ai des craintes. Vous vous débrouillez bien sans cette loi. Vous ne voulez, en réalité, que le changement de dénomination. Je m'interroge sur la nécessité de ce supplément complexe du projet de loi.
Vous avez dit qu'il y avait trois principaux opposants dont M. Armstrong, qui est maintenant président du conseil d'administration.
M. Stuart : Oui.
Le sénateur Milne : D'où vient-il?
M. Stuart : Il est de Winnipeg.
Le sénateur Milne : Est-ce qu'il serait prudent de l'inviter, de même que M. Claxton, devant le comité pour que nous puissions entendre les deux points de vue? Est-ce qu'ils se sauteraient à la gorge l'un de l'autre? Pourrions-nous les inviter à titre d'experts de la question?
M. Stuart : Ce sont des scouts; ils sauront se montrer respectueux.
Le sénateur Di Nino : Nous voudrions rappeler à tout le monde que M. Claxton et les gens qui ont exprimé de l'opposition sont encore membres du mouvement scout. Il y a des dissidents dans toute organisation. C'est sain, démocratique, et certainement pas mal reçu. Par conséquent, je pense qu'il est bon de les entendre.
Quant aux modifications administratives, le projet de loi stipule que le siège de l'association est à Ottawa. Ce n'est pas d'hier, bien que cela n'ait jamais été précisé dans le règlement. Il stipule qu'il doit y avoir une réunion générale annuelle. Cela se fait déjà.
Quand j'ai interrogé l'avocat là-dessus, il a dit que le projet de loi est simplement pour légaliser ce qui se fait déjà. Il n'y a que très peu, sinon pas de changement de fond, à part ce qui s'est déjà fait.
Je pense qu'il serait bon d'entendre d'autres présentations là-dessus.
Le président : Outre les personnes que recommande le sénateur Milne, il y en a-t-il d'autres qui, selon vous, pourraient enrichir les délibérations du comité?
Le sénateur Di Nino : Je n'ai pas prévu que cela puisse poser des problèmes, et je ne m'en plains pas. Je pourrais probablement remplir le Sénat de centaines, sinon de milliers de gens qui viendraient ici à l'appui du projet de loi. Je ne pense pas que personne veuille cela.
Le temps compte. Comme je l'ai dit, en 2007, le mouvement scout fête son centenaire. J'aimerais que ce soit réglé avant la fin de l'année, mais cela dépend du comité. Il me conviendrait que dans le cadre d'une réunion, vous entendiez deux ou trois personnes exposer l'une ou l'autre perspective, pour une vingtaine de minutes chacun. Ce serait enrichissant pour le mouvement Scout et ce processus.
Le président : Merci.
Le sénateur Milne : Je suis d'accord.
Le sénateur Di Nino : Cette suggestion ne me pose pas le moindre problème, comme je l'ai dit au Sénat.
M. Stewart : Pour clarifier quelque chose qu'a dit le sénateur Di Nino au sujet des relations, Glenn Armstrong et Keith Martin, deux des opposants, ont eu des postes de dirigeant dans l'organisation. À l'époque, M. Armstrong était le président du conseil du Manitoba et M. Martin était le président du conseil de la Colombie-Britannique. Les règlements leur inspiraient diverses craintes, alors ils ont pris la tête d'un mouvement pour forcer un dialogue, en conséquence duquel 50 modifications ont été apportées.
Le sénateur Milne : Est-ce que c'était avant ce projet de loi?
M. Stewart : Le projet de loi existait déjà. Vous avez raison, le projet de loi comporte divers éléments. Il y a le changement de dénomination. Selon mon interprétation, ce qui est contesté concerne plus la démocratie ou son absence au sein de l'organisation.
MM. Martin et Armstrong ont contesté tout un tas d'aspects du règlement, ce qui a amené l'organisation à se regrouper et à mener des consultations plus approfondies avec les conseils qui se préoccupaient de la manière le règlement était formulé. En conséquence de ce processus, plus de 50 modifications ont été passées en revue et la décision majoritaire a été d'accepter le règlement que nous appliquons actuellement, à Scouts Canada.
Le sénateur Milne : Aucune de ces modifications n'apparaît dans le projet de loi que nous avons ici?
M. Stewart : Non. Ce projet de loi traite du règlement dans un sens général. Le règlement qui nous régit est un épais document qui décrit les rôles et responsabilités, les conseils, les votes, qui sont les membres, et ce genre de choses. C'est ce dont il a été discuté à l'époque.
Le sénateur Milne : Ce projet de loi promulgue ce règlement tel qu'il est, ou peut-il être modifié à l'avenir?
M. Stewart : Il faudrait que je pose la question à quelqu'un de plus compétent que moi en la matière, mais d'après ce que j'ai compris, il n'enchâsserait pas le règlement, le règlement pourrait être modifié. Par exemple, au sujet de la démocratie, nous nous efforçons encore de parvenir à une entente. Vous pouvez certainement vous imaginer quel plaisir c'est, dans notre pays, d'essayer d'amener tout le monde à s'entendre sur la procédure de scrutin. Nous travaillons encore sur un texte de directives claires sur le mode de sélection les délégués votant. Des méthodes diverses sont actuellement appliquées dans tout le pays.
À mon avis, nous conserverions le droit de modifier le règlement sans passer par le processus législatif.
Le sénateur Di Nino : L'article 7 du projet de loi stipule :
À chaque assemblée générale annuelle ou spéciale, l'Association peut prendre, modifier ou abroger ses règlements administratifs aux fins qui lui sont utiles...
C'est absolument clair. Ceci ne vise à rien faire d'autre que de confirmer les modifications administratives et techniques qui auraient dû être apportées il y a longtemps, en plus de changer la dénomination de l'association.
Le sénateur Andreychuk : Si je me souviens bien, c'est dans la partie concernant les organismes sans but lucratif de la Loi sur les corporations canadiennes qu'on lit que si vous modifiez votre constitution, pas votre règlement, vous devez passer par ce processus.
Si c'est le cas, est-ce que ceci est la somme de votre constitution, par opposition aux règlements administratifs? Comment parvenez-vous à ce point-ci? Je sais que la partie des corporations a une structure standard pour les organisations qui n'ont pas de format à suivre. Comment observez-vous la Loi sur les corporations canadiennes, ou êtes-vous allés plus loin que ce que la loi exige?
Le sénateur Di Nino : C'est une bonne question.
Le sénateur Milne : Ils devront nous fournir la réponse ultérieurement.
M. Stewart : Je n'en suis pas sûr.
Le sénateur Di Nino : À ce que je comprends, les règlements administratifs de l'association régiront l'organisation, et cette loi les appuierait, au plus tôt en serait le complément. Le projet de loi stipule clairement que l'association conserve le droit de prendre, modifier et changer les règlements administratifs.
Il vaudrait mieux avoir un avis juridique en bonne et due forme sur la question.
Le sénateur Andreychuk : Peut-être devrions-nous demander à un témoin de nous rafraîchir la mémoire sur la raison pour laquelle ce projet de loi nous est présenté. Je crois que certaines institutions religieuses ont demandé la même chose. Le sénateur Corbin a demandé pourquoi nous devrions ainsi porter un jugement sur les organisations, et il a décrété que c'était une façon archaïque de procéder. Nous avons fait appel auprès des gouvernements qui s'intéressent à cette situation. Je suppose que c'est une organisation de plus dans ce cas.
Le sénateur Di Nino : C'est juste.
Le sénateur Andreychuk : Nous autoriserions Scouts Canada à se gouverner d'une manière plus moderne et de rendre compte de ses activités à son effectif plutôt que de venir au Parlement. Cela nous gêne.
Le sénateur Di Nino : Si vous permettez, Scouts Canada se gouverne. C'est exactement ce que j'essaye de faire comprendre. Ce projet de loi ne modifie en rien les règlements administratifs ni le fonctionnement de l'organisation, à part pour refléter ces choses qui étaient censée être reflétées dans la charte originale de 1914.
Le président : Sénateur Di Nino, je suis nouveau au comité, vous le savez. L'attaché de recherche de la Bibliothèque du Parlement m'a remis un document que je n'avais pas vu auparavant, qui répond, du moins en partie, à la question du sénateur Andreychuk.
C'est le rapport du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles du mardi 25 mars 2004. Ils ont annexé à leur troisième rapport les observations suivantes :
Par ailleurs, le comité croit que les sociétés privées constituées par une loi spéciale du Parlement ne devraient plus avoir à s'adresser au Parlement pour moderniser leurs structures de gouvernance. Le comité avait déjà recommandé de modifier la loi sur les corporations canadiennes afin que les sociétés puissent régler ces questions à l'interne, et nous présentons de nouveau cette recommandation dans le cas du Queen's Theological College et de toutes les autres sociétés constituées par des lois spéciales placées dans la même situation.
La troisième partie de la Loi sur les corporations canadiennes est intitulée « Sociétés constituées par des lois spéciales. »
Le sénateur Di Nino : Je le comprends et je le savais.
Le sénateur Joyal : J'étais au comité quand le sénateur Andreychuk a fait cette observation. Je crois que le comité était d'avis unanime que c'était pertinent.
Je suis étonné que le projet de loi ne fasse mention de la Loi sur les corporations canadiennes qu'à l'article 12, pour énoncer une exception à l'application de l'article 102 de la loi. Cela ne dit pas que les autres parties de la loi s'appliquent aux Scouts. Il est bizarre qu'il n'y ait pas, dans le projet de loi, une seule disposition stipulant que pour toutes les autres questions, Scouts Canada est assujetti à l'article 3 de la Loi sur les corporations canadiennes. Nous connaissons le régime de la Loi sur les corporations canadiennes, mais ce projet de loi ne mentionne cette loi qu'en rapport avec une exception, alors qu'en fait, la loi ne semble pas s'y appliquer.
Pour moi qui suis avocat, c'est bizarre.
Si la Loi sur les corporations canadiennes ne s'applique pas formellement aux Scouts, il faudrait au moins que les états financiers soient présentés chaque année lors de votre assemblée générale. Ce n'est pas mentionné dans le projet de loi. Il y a une chose qui est importante, quand on recueille de l'argent, c'est de publier des états financiers tous les ans, les présenter et les faire approuver à votre assemblée annuelle. C'est la norme pour n'importe quelle société, qu'elle soit commerciale ou sans but lucratif, en vertu de la partie III de la Loi sur les corporations canadiennes.
L'article 6 du projet de loi stipule :
À chaque assemblée annuelle, l'association élit un comité exécutif parmi ses membres...
Il stipule aussi que lors de sa réunion annuelle, la corporation peut prendre règlement. J'ai lu les règlements pour voir s'il y est question de l'approbation des états financiers de l'élection des vérificateurs. Normalement, ces deux motions sont essentielles lors de n'importe quelle assemblée générale.
Le sénateur Andreychuk : Sénateur Joyal, si je me souviens bien, vous avez dirigé la discussion, auparavant, sur ce que la Loi sur les corporations canadiennes exige qu'il y ait dans la constitution, et ce qu'elle permet d'avoir dans les règlements administratifs.
Le sénateur Joyal : Oui, nous avons eu cette discussion auparavant, en rapport avec un autre projet de loi. J'essayais de déterminer ce qu'il n'y a pas dans le projet de loi et qui est dans la Loi sur les corporations canadiennes, et vice versa. Je n'ai pas la Loi sur les corporations canadiennes devant moi, mais j'ai soulevé la question parce que nous devrions recevoir des renseignements de nos conseillers juridiques. Ces questions seront au registre, alors ils peuvent les lire.
Je vois des problèmes avec la version française du projet de loi. L'article 1 du projet de loi parle de « The Corporation ». Le projet de loi se rapporte au chapitre 130 des Statuts du Canada et, en français, elle est appelée « la personne morale ». À l'article 2, la personne morale est appelée « L'association ». À l'article 3, en anglais c'est « The Corporation has the capacity of a natural person... » et en français, on lit « L'association a la capacité d'une personne physique... ».
Il me semble bizarre de désigner une corporation par les termes « une personne physique ». Il y a donc des enjeux, dans toutes sortes de lois, qui pourraient s'appliquer à « une personne physique ». Nous comprenons qu'une entité morale jouit d'un statut qu'une « personne physique» n'a pas. Si vous dites que c'est « une personne morale » à l'article 1, et ensuite que l'organisation a la capacité d'une « personne physique », et, en vertu de cette loi, tous les pouvoirs, droits et privilèges d'une personne physique, je peux vous donner une liste de droits et privilèges dont jouit une personne physique selon la Charte et la Constitution, que n'a pas une organisation.
Le sénateur Rivest : Le mariage.
Le sénateur Joyal : Oui, entre autres.
Le sénateur Di Nino : Est-ce que vous voulez vraiment parler de cela?
Le sénateur Joyal : J'y ai pensé, mais je ne voulais pas le mentionner. Il lit dans ma pensée. Le problème, c'est que ça me chicote.
Le sénateur Di Nino : Je le soupçonnais.
En ce qui concerne les deux sujets que vous avez soulevés, il est évident que des états financiers sont préparés tous les ans et, oui, les vérificateurs sont correctement désignés. Vous le savez, mais je ne sais pas si cela a rien à voir ici, du point de vue juridique. Je ne sais rien de la loi.
Pour ce qui est du français, on se fie, pour la préparation des projets de loi, sur les avocats et notre propre commis juridique. Je n'ai pas vu la version française sous cet angle. C'est une bonne observation. Je comprends que ce doit être changé. C'est une modification technique qui, je pense, peut être faite relativement facilement.
Le sénateur Joyal : Il faudrait mieux définir la question de l'effectif. Le paragraphe 1(2) stipule, en français :
L'association est constituée des personnes qui la composaient à l'entrée...
Et en anglais, c'est :
... consists of those persons who are members of the Corporation...
À l'article 6, on lit :
À chaque assemblée générale annuelle, l'association élit un comité exécutif parmi ses membres...
Elle ne dit pas si « les membres » sont seulement les membres du conseil d'administration, les membres actuels, ou n'importe quel membre de Scouts Canada. Il y a au moins une imprécision sur deux niveaux, ici, qu'il faudrait probablement préciser.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, si le projet de loi faisait référence à l'article 3 de la Loi sur les corporations canadiennes, nous saurions exactement sous quel régime fonctionne Scouts Canada. Ce projet de loi pourrait digresser de cet article pour reconnaître votre mode de fonctionnement particulier. Le problème, c'est que si vous proposez quelque chose qui ne couvre pas tout et qu'il n'y a pas de référence quant à l'endroit où on peut trouver les réponses.
Le nouveau statut de Scouts Canada présente quelques imprécisions au plan juridique. Si l'organisation saisit l'occasion de refondre sa constitution, elle règle les éléments imprécis. À l'article 4 de la loi, les règlements administratifs d'une personne morale doivent décrire clairement les responsabilités d'une société sans but lucratif. Quand la personne morale n'est pas visée par l'article 3 de la Loi sur les corporations canadiennes, ce doit être indiqué dans l'acte constitutif, et le projet de loi vise certains aspects, et d'autres pas. Il y a du flou en ce qui concerne l'effectif.
Il y a trois niveaux dans une organisation. Il y a l'effectif dans son ensemble, qui élit un conseil d'administration. Les membres du conseil d'administration élisent l'exécutif. C'est la structure normale de n'importe quelle organisation, qu'elle soit commerciale ou sans but lucratif. Ce projet de loi ne dit pas clairement comment fonctionne l'organisation. Je ne mets pas en doute ces préférences quant à son fonctionnement, mais nous devons comprendre clairement, à la lecture de la loi, comment fonctionne l'organisation. Est-ce que Scouts Canada est une exception à la Loi sur les corporations canadiennes, ou est-elle régie par la Loi, dans ses opérations normales? En quoi est-ce que Scouts Canada diffère du régime juridique commun de la Loi sur les corporations canadiennes?
C'est pourquoi nous avons fait il y a deux ans ces observations que vient de lire le président. Il y a cette différence. Je ne vois pas de problème avec la demande, mais nous devons comprendre la demande en ce qui concerne l'obligation à l'article 3 de la Loi sur les corporations canadiennes, parce que l'organisation est manifestement sans but lucratif.
Le sénateur Di Nino : La question a été soulevée, lors des trois dernières législatures, à savoir pourquoi les organisations devraient s'adresser au Parlement du Canada pour cette loi, quand cela peut être réglé par le biais de la Loi sur les corporations canadiennes? Les Scouts sont parmi les plus anciennes organisations du pays, et sont symboliquement associés à ceci. La charte de l'organisation lui a été accordée par une loi du Parlement. Le scoutisme a toujours été lié de près à l'évolution de notre pays et à toutes les entités de notre société. Les scouts veulent garder ce symbolisme, et je l'appuie. Quand cette question a été soulevée au Sénat, j'ai répondu au sénateur Corbin que les scouts demandaient que cela continue. De toute évidence, le Parlement doit faire un choix.
Les Scouts sont, sans conteste, régis par la Loi sur les corporations canadiennes, au même titre que toutes les corporations de ce pays, à moins d'être exclus pour une raison que j'ignore.
Cette discussion est utile en ce sens que M. Stewart et moi ne pouvons pas répondre aux questions d'ordre juridique. Nous voulions nous faire accompagner aujourd'hui de notre conseiller juridique, mais il n'était pas libre. On nous a dit qu'il était à l'étranger. Cependant, je voulais faire comprendre à mes collègues que, pour les raisons que j'ai énoncées à diverses reprises, nous souhaitons que ce projet de loi soit adopté au Sénat aussitôt qu'il peut l'être raisonnablement afin que la Chambre des communes puisse l'adopter au début de l'année prochaine afin que l'affaire soit réglée avant la célébration du centenaire du scoutisme.
Si le comité peut trouver un moment dans la semaine qui suit le congé, ou peu après, nous reviendrons avec plaisir entendre ceux qui ont des préoccupations. C'est pourquoi nous sommes ici. Je le fais avec plaisir et j'incite vivement le président et le comité à convoquer cette réunion très bientôt pour que nous puissions transmettre ce projet de loi à la Chambre des communes avant l'ajournement pour les Fêtes. Espérons que la Chambre des communes règlera rapidement la question au début de la nouvelle année.
Le président : Merci. Ce comité traite normalement de nombreuses lois, et les lois du gouvernement ont toujours priorité sur les lois d'initiative privée. Le comité tiendra compte de cette suggestion.
Le sénateur Milne : Monsieur le président, est-il possible à la Bibliothèque du Parlement d'examiner les questions relatives à la traduction qu'a soulevées le sénateur Joyal, et de voir s'il est possible de modifier le libellé?
Le président : La bibliothèque examinera cela et nous en fera bientôt rapport.
Le sénateur Joyal : Je partage entièrement les préoccupations de Scouts Canada qu'a exprimées le sénateur Di Nino. Je ne pense pas qu'aucun de nous voudrait retarder cela; nous voulons seulement nous assurer que ce soit bien fait.
Les questions que nous avons soulevées seront dans la transcription des délibérations du comité. Si vous les transmettez à vos conseillers juridiques, la prochaine fois que nous nous rencontrerons, ils pourront y répondre rapidement. Ce serait une façon expéditive de régler ce projet de loi. Nous ne voulons pas créer plus de problèmes. Vous en avez déjà bien assez à résoudre. Il est coûteux de faire venir des témoins, mais nous sommes tenus, en tant que chambre du Parlement, de nous assurer de faire les choses correctement, conformément aux lois du Canada. Nous ne souhaitons pas retarder ce projet de loi. Nous serions heureux que votre nouveau statut soit en vigueur pour votre anniversaire l'année prochaine.
Le sénateur Di Nino : Je tiens à vous remercier pour votre temps. Cet échange a été extrêmement constructif. Comme l'a suggéré le sénateur Joyal, nous obtiendrons les réponses du conseiller juridique qui, je l'espère, sera ici dans une semaine ou deux.
Le sénateur Joyal : J'ai une autre question. L'alinéa 13e) stipule que les lois mentionnées aux alinéas a), b), c) et d) sont abrogées, ne gardant que l'article 1 d'une loi qui est le chapitre 68 des Statuts du Canada de 1968-1969.
Peut-être à notre prochaine réunion votre avocat pourra-t-il nous dire exactement ce qu'il y a dans cet article que vous maintenez, alors que vous abolissez toutes les autres lois.
Le sénateur Di Nino : Absolument.
Le président : Sénateur Di Nino et monsieur Stewart, au nom du comité, je tiens à vous remercier tous les deux d'être venus aujourd'hui et d'avoir répondu à ces difficiles questions d'ordre juridique. Merci pour l'aperçu que vous nous avez donné.
Honorables sénateurs, le comité poursuivra sa réunion à huis clos pour discuter de ses affaires courantes.
La séance se poursuit à huis clos.