Délibérations du Comité
sénatorial spécial sur le
Vieillissement
Fascicule 6 - Témoignages du 28 avril 2008
OTTAWA, le lundi 28 avril 2008
Le Comité sénatorial spécial sur le vieillissement se réunit aujourd'hui, à 12 h 34, pour examiner les incidences du vieillissement de la société canadienne en vue d'en faire rapport.
Le sénateur Sharon Carstairs (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente : Bonjour à tous et bienvenue à cette séance du Comité sénatorial spécial sur le vieillissement. Le comité examine les incidences du vieillissement de la société au Canada. Aujourd'hui, nous examinerons plus particulièrement les options proposées dans le chapitre 2 de notre deuxième rapport provisoire intitulé Une population vieillissante : Enjeux et options qui a été déposé au Sénat le 11 mars 2008. Ce chapitre traite de questions touchant le vieillissement actif et l'âgisme.
Nous avons invité, pour nous aider à comprendre les enjeux entourant ces sujets, Donald Paterson de l'Université de Western Ontario; Elaine Gallagher du Centre du vieillissement de l'Université de Victoria; Chad Witcher du Alberta Centre for Active Living; Glenn Miller du Canadian Urban Institute; Ian Scott de Seniors College of Prince Edward Island; et Ruth MacKenzie de Bénévoles Canada.
Nous entendrons d'abord les exposés liminaires après quoi nous passerons aux questions.
Donald Paterson, professeur, École de kinésiologie, Faculté des sciences de la santé, Université de Western Ontario, à titre personnel : Merci de m'avoir invité à venir vous parler. Je constate en parcourant la liste des témoins que vous avez entendus jusqu'à maintenant qu'aucun d'entre eux n'a abordé l'importance de l'activité physique pour les adultes âgés. À titre de directeur de la Recherche du Canadian Centre for Activity and Aging, je m'intéresse à la question depuis 20 ans.
La preuve n'est plus à faire que l'inactivité physique est un facteur de risque important et démontré de mortalité, toutes causes confondues, et de diverses maladies chroniques dont les maladies cardiaques, le diabète, l'ostéoporose et les cancers du colon et du sein. Chez les personnes physiquement actives et modérément en forme, ces risques diminuent dans une proportion variant entre 30 p. 100 et 60 p. 100. Fait sans doute encore plus important, chez les personnes plus âgées, la détérioration de la forme physique et de la force limitent l'aisance avec lesquelles elles s'adonnent à leurs activités quotidiennes et annoncent de futures limitations fonctionnelles.
Ma propre étude longitudinale d'adultes âgés vivant dans la collectivité a révélé qu'une forme cardiorespiratoire détériorée était liée de façon significative à des risques accrus de dépendance d'ici huit ans. Chez les personnes dont la forme physique est meilleure que la moyenne, le risque de devenir dépendantes était de 50 p. 100 inférieur. Il en découle donc que la forme physique est essentielle pour prévenir ou retarder l'apparition des maladies chroniques associées au vieillissement, pour retarder et limiter la durée de la période d'invalidité et de dépendance. Dans une société vieillissante, les avantages pour la santé d'une plus grande forme physique de la population ont d'immenses retombées économiques et sociales.
J'ai publié récemment une analyse des recommandations d'exercices destinée aux adultes âgés. Cette étude m'avait été commandée par l'Agence de la santé publique du Canada. Il s'agissait d'une analyse critique de la quantité et de la nature de l'activité physique requises pour prévenir la maladie ou promouvoir la santé et préserver l'indépendance. Les activités physiques recommandées sont celles qui contribuent à une amélioration de la forme cardiorespiratoire. Ces activités doivent être d'une intensité modérée et modérément vigoureuses, 30 minutes par jour, de quatre à cinq fois par semaine et entraînant une consommation de 1 000 kilocalories par semaine. Chez l'adulte âgé dont la forme est moyenne, cela équivaut à trois heures de marche rapide.
Une étude réalisée par l'American College of Sports Medicine et la American Heart Association confirme qu'il faut promouvoir une activité physique d'intensité modérée et vigoureuse. Permettez-moi de souligner que ces activités doivent s'ajouter aux activités légères fréquemment exécutées au jour le jour : travaux ménagers, marche de détente ou activité de très courte durée.
On m'a demandé de commenter le chapitre 2, « Vieillissement actif ». J'aimerais toutefois faire une observation au sujet du chapitre 4, « Vieillir en santé ». L'expression « activité physique » ne figure qu'une seule fois dans le chapitre qui traite des déterminants de la santé et des maladies chroniques. Il y a environ 40 ans, le rapport Lalonde sur la santé des Canadiens mettait déjà l'accent sur le mode de vie et la prévention et en particulier sur l'activité physique. Je ne saurais trop insister sur l'incidence éventuelle de l'activité physique et de la prévention des maladies chroniques pour prévenir la perte d'indépendance.
S'agissant du chapitre 2, compte tenu de mes commentaires au sujet des plus récentes lignes directrices basées sur des données réelles quant à la dose d'activité physique requise, je dois dire que la promotion de la « vie active » n'est pas une politique prometteuse. Les expressions telles que « vie active », « modifiant un temps soit peu son mode de vie » et « mode de vie sain et actif » révèlent une incompréhension de la quantité d'activité qui donne en réalité des résultats positifs pour la santé. C'est transmettre le mauvais message à ceux qui voudraient faire le nécessaire pour améliorer leur santé. Il faut un exercice modérément vigoureux pour des périodes de plus de dix minutes à la fois — pas davantage d'activités quotidiennes ni l'accumulation d'activités plus légères tout au long de la journée. Les activités générales de loisir telles le jardinage, la marche à un rythme normal et les travaux ménagers ne protègent pas, c'est prouvé, contre le déclin de la capacité fonctionnelle et sont pas des déterminants d'une réduction des maladies chroniques. Les initiatives de santé publique devraient plutôt promouvoir l'exercice intense dont la marche à une cadence vigoureuse.
Dans le chapitre 2, on recommande la promotion de l'exercice et l'éducation de masse. Il est peut-être utile d'informer les adultes âgés des avantages démontrés de l'activité physique et des types d'activités recommandées. Toutefois, étant donné la nécessité de s'adonner à des activités précises qui améliorent la forme physique, j'estime qu'il est important de trouver des façons de soutenir l'offre de ces programmes d'exercice aux aînés dans la collectivité. II faut aussi former des dirigeants, des instructeurs et des éducateurs. Des programmes d'exercice et des programmes modèles de formation des dirigeants ont été élaborés par le Canadian Centre for Activity and Aging.
La formation de professionnels à l'organisation d'exercices pour les aînés est une activité viable à l'Université. Toutefois, le hic de cette stratégie c'est que les perspectives de carrière sont très limitées. Il faudrait peut-être encourager le secteur privé à élaborer ces programmes d'exercice pour les aînés.
On recommande par ailleurs dans le chapitre 2 d'éliminer les obstacles qui empêchent les adultes âgés d'être plus actifs et recommande de cibler les personnes les moins actives : Personnes à faible revenu, peu scolarisées, membres des groupes ethniques ou personnes vivant dans les régions rurales. Puisqu'il existe une corrélation directe entre la forme physique d'une part et la santé et l'indépendance, d'autre part, il est clair qu'il serait avantageux pour la santé et la société d'encourager ceux qui ont une forme moyenne à faire des efforts pour améliorer leur forme physique. Ce serait peut-être plus efficace d'encourager d'abord ceux qui seraient plus susceptibles de changer leurs habitudes en ce qui a trait à l'exercice pour que ce groupe fixe en fait une norme que les personnes les plus récalcitrantes pourraient tenter d'atteindre.
Il est aussi question dans le chapitre 2 de la volonté de réduire les besoins en matière de prestations de soins, de soins à domicile et de soins de longue durée. Les exercices d'entraînement en force musculaire et en équilibre ont des avantages qui renforcent les capacités fonctionnelles des groupes cibles. Des programmes à l'intention de ces groupes ont été élaborés par le Centre. Ces programmes sont importants mais ils n'ont pas sur la population l'incidence que peuvent avoir des programmes de prévention destinés aux aînés de tous âges qui vivent dans la collectivité. Je propose que les programmes ciblent les aînés vivant dans la collectivité. Même si une faible proportion de la population décide de s'astreindre à une activité physique énergique, cela aura une incidence appréciable sur la santé. Nous devons élaborer une norme sociétale d'exercice chez les adultes âgés afin d'obtenir des avantages sur le plan de la forme et de la santé.
Je répondrai volontiers à vos observations et à vos questions.
Elaine Gallagher, directrice, Centre on Aging, Université de Victoria, à titre personnel : Merci de me donner l'occasion de comparaître devant ce comité spécial. On m'a dit que je dispose de cinq minutes pour commenter le chapitre 2 de votre rapport.
Lorsque j'ai préparé cet exposé j'ai consulté certains de mes collègues du Centre on Aging, dont l'un fait de la recherche sur la conduite automobile et les aînés. J'ai aussi consulté quelques groupes d'aînés avec lesquels je suis associée et j'ai consulté certains hauts fonctionnaires du ministère de la Santé de la Colombie-Britannique. Ce ne sont pas donc pas mes commentaires personnels mais plutôt la synthèse de points de vue provenant de diverses sources.
À la partie 2.1, à la page 18 de la version électronique de votre rapport, vous semblez dire que quand on devient moins actif, quand on vieillit, c'est nécessairement une mauvaise chose et le rapport semble faire l'amalgame entre ralentir et l'inactivité totale. Les travaux que nous avons réalisés sur les chutes révèlent pourtant que ralentir et être prudent protège les personnes âgées plus frêles. D'ailleurs, les personnes âgées plus fragiles peuvent le mieux prévenir des problèmes en ralentissant un peu le rythme de leurs activités et en faisant preuve de plus de prudence.
Il faudrait peut-être modifier le libellé de cette section pour préciser clairement dans le paragraphe la différence qui existe entre ralentir quand c'est indiqué de le faire, ce qui peut avoir valeur de prévention, et le déclin prématuré et malsain des niveaux d'activités. Ce paragraphe ne reflète pas cette différence mais confond plutôt les deux.
L'attention que vous portez à la vie active et à nos travaux sur les villes et villages-amis des aînés est excellente. J'ai été enquêteuse principale pour la Colombie-Britannique dans le cadre du projet de l'Organisation mondiale de la Santé et chercheuse principale dans le cadre de l'étude fédérale-provinciale-territoriale sur les collectivités isolées et rurales et plus particulièrement sur les collectivité saines, amies des aînés, petites, rurales et éloignées.
En Colombie-Britannique, nous tentons d'étendre cette initiative à l'ensemble de la province avant le début des Jeux olympiques de 2010. Nous voulons pouvoir dire que nous sommes les premiers au monde à être l'hôte des Jeux olympiques amis des aînés et nous cherchons des façons créatives de faire participer les aînés à titre de bénévoles ou de travailleurs rémunérés.
Je vous félicite d'avoir souligné ce travail. Nous recommandons que l'initiative soit adoptée dans tout le Canada. Je rencontre demain les ministres fédéral-provinciaux-territoriaux et, le surlendemain, les collaborateurs de ces ministres pour discuter de la mise en œuvre dans tout le Canada de cette initiative des collectivités-amies des aînés. Nous croyons qu'elles pourraient contribuer à changer du tout au tout la façon dont les collectivités se préparent au vieillissement de leur population.
J'ai trouvé une excellente analyse des publications traitant du bénévolat. Les auteurs ont constaté que les aînés font du bénévolat pour diverses raisons y compris les avantages sociaux pour la société et la possibilité de contribuer à la société; mais ils font aussi du bénévolat pour utiliser leurs compétences et leurs connaissances, pour apprendre de nouvelles choses, pour acquérir de nouvelles compétences, pour être stimulés intellectuellement ou pour se sentir bien et appréciés. Les aînés qui voudraient faire du bénévolat doivent parfois y renoncer en raison de problèmes de santé, d'autres engagements, d'un emploi du temps chargé ou d'un manque de temps. Ils veulent pouvoir aller passer quelques mois dans le sud ou faire une croisière si un forfait abordable se présente.
Ceux qui recrutent et retiennent des bénévoles doivent posséder ces renseignements. Ils doivent savoir ce qui motive les gens à faire du bénévolat, à continuer d'en faire, et les obstacles qu'ils doivent surmonter. Afin de promouvoir le bénévolat tout au long de la vie, les écoles pourraient offrir des crédits pour les cours de bénévolat. Certaines écoles le font déjà pour intéresser les enfants au bénévolat dès leur jeune âge. Les employeurs pourraient offrir des horaires souples pour favoriser les activités de bénévolat. Davantage d'organismes pourraient offrir des prix pour reconnaître le travail des bénévoles. Si la plupart des aînés ne veulent pas être payés pour les services qu'ils rendent, leurs frais pourraient être remboursés. Des récompenses telles des cartes de café chez Tim Hortons ou Starbucks sont souvent bien appréciées. Il est absolument essentiel qu'il y ait un coordonnateur rémunéré.
S'agissant de l'apprentissage tout au long de la vie, vous formulez de très bonnes suggestions dans votre rapport. À mon avis, les aînés ne devraient pas avoir à payer des frais de scolarité au lieu d'avoir droit uniquement à une déduction d'impôt. Vous pourriez combiner les campagnes de sensibilisation à l'apprentissage tout au long de la vie avec les campagnes de ParticipACTION. Nous avons tendance à classer les gens en fonction de leur corps, de leur intellect et de leur esprit. Je préfère l'approche holistique et je vois la personne comme un tout. ParticipACTION pourrait être un mouvement qui fait la promotion du bien-être physique, social et mental et non uniquement la promotion du bien-être physique. Toutes ces choses vont de pair. L'activité physique est source de stimulation sociale et même intellectuelle. Il faut maintenir en forme le corps, l'esprit et l'intellect et pas seulement l'un des trois.
En ce qui a trait à la recommandation 10, nous devons effectivement promouvoir l'initiative des collectivités-amies des aînés mais la recommandation mentionne expressément la promotion auprès des groupes professionnels concernés. Or, s'il est vrai que ces groupes doivent être mobilisés, nous avons constaté que le travail se fait mieux s'il est dirigé par un comité auquel siègent divers intervenants : fonctionnaires municipaux, principaux leaders des aînés et d'autres intervenants représentatifs de la collectivité. Les personnes handicapées, les aînés plus riches et plus pauvres et des représentants des différents groupes ethniques et culturels doivent aussi être consultés. Ce mouvement se veut holistique et ne doit pas s'adresser uniquement aux groupes professionnels concernés comme le précise actuellement votre recommandation.
Vous abordez à la page 18 de la version électronique de votre rapport les obstacles au vieillissement actif. L'un des obstacles qui n'est pas mentionné et que l'on pourrait peut-être ajouter à la liste c'est l'âgisme que l'on s'impose, surtout quand on dit « je ne peux pas faire cela à mon âge ». Pour de nombreux aînés, la définition personnelle de ce qu'ils sont « capables de faire » est peut-être l'un des obstacles les plus difficiles à surmonter. Les travaux de M. Paterson et d'autres montrent que les gens sont capables de faire beaucoup plus qu'ils ne le croyaient.
À la recommandation 13, je ne limiterai pas les déductions d'impôt aux seuls frais d'inscription à des centres d'activités, comme le veut le libellé actuel. Tous les programmes de conditionnement physique devraient être admissibles, qu'il s'agisse de danse, de natation, de curling ou de toute autre activité qui encourage les gens à faire de l'exercice en plus de leurs activités quotidiennes, comme l'a mentionné M. Paterson. Je ne limiterais pas les déductions d'impôt aux seuls frais d'inscription à des centres d'activités parce que de nombreux aînés ne se sentent pas à l'aise d'aller faire de l'exercice dans des gymnases remplis de jeunes de 21 ans très en forme.
En ce qui a trait à la recommandation 14, nous devons nous attaquer le plus tôt possible à l'âgisme et notamment auprès des jeunes à l'école. Cela devrait obligatoirement faire partie du programme d'études. Il faut enseigner aux enfants à voir les aînés comme des personnes qui contribuent elles aussi à la société. Nous avons instauré à l'Université de Victoria un programme appelé Masterminds. C'est une façon de lutter contre l'âgisme. J'ai décidé de commencer les conférences de ce mois-ci en invitant des professeurs qui viennent parler du travail qu'ils font depuis leur départ à la retraite. Nous avons reçu des écrivains, des artistes, des théologiens, des scientifiques et d'autres. Ils nous parlent des livres et des pièces qu'ils ont écrits ou dans lesquelles ils ont joué, et des projets de recherche qu'ils ont parrainés. Je pense que l'idée de Masterminds pourrait être adoptée dans tout le pays afin de montrer l'importance des contributions que font les gens après leur départ à la retraite.
Vous pourriez par exemple commander une étude sur l'âgisme et examiner plus particulièrement quels moyens se sont avérés efficaces pour lutter contre l'âgisme ailleurs dans le monde. Nous ne possédons pas toutes les réponses pour ce qui est de la lutte contre l'âgisme — phénomène répandu et subtil — mais nous pourrions engager une lutte systématique.
Quant aux recommandations 15 et 16, il faut effectivement remplacer les critères fondés sur l'âge par une grille d'évaluation des compétences pour beaucoup de choses y compris la conduite automobile et la retraite. Toutefois, il faut avoir une définition claire des compétences. Cela implique l'adaptation aux changements dans un certain nombre de sous systèmes physiques et mentaux de l'organisme. Par exemple, nous avons offert notre programme d'autodiagnostic des maladies chronique à plus de 10 000 participants depuis 2000. Ce programme enseigne aux gens à gérer leur santé et à améliorer leur activité physique et leur nutrition. Avec un soutien suffisant, ce programme pourrait être diffusé plus largement dans tout le pays. M. Patrick McGowan est le chef de file de cette initiative.
Il faut faire davantage de recherche sur l'évaluation de la compétence. Les instituts canadiens de recherche en santé pourraient être chargés de financer un concours spécial sur cette question. Ils pourraient travailler avec les décideurs pour mettre à l'épreuve de nouvelles lignes directrices fondées sur des résultats de recherche. Par exemple, j'ai trouvé une étude selon laquelle toutes les personnes souffrant de la maladie d'Alzheimer ne sont pas incompétentes lorsqu'elles subissent des tests de conduite automobile. Pourtant, nous aurions tendance à supposer qu'une personne souffrant de la maladie d'Alzheimer serait mauvais conducteur.
Les aînés ne causent pas un nombre disproportionné d'accidents de la route. Par habitant, ils ont moins d'accidents que ceux du groupe d'âge 16 à 64 ans et ont près de la moitié moins d'accidents que ceux du groupe d'âge 21 à 24 ans. Les conducteurs plus âgés ont tendance à s'autoréglementer. Ils conduisent plus lentement, évitent de conduire la nuit et évitent les routes où la circulation est intense ou celles qu'ils connaissent moins bien. À l'avenir, les aînés pourront être plus réticents à s'auto réglementer, alors il nous faudra trouver des façons d'évaluer la compétence de ceux qui refusent de s'auto réglementer. Toutefois, je crois que l'autoréglementation devrait être le message social à transmettre. Nous pourrions dire aux aînés qu'au fur et à mesure qu'ils vieillissent ils doivent s'auto réglementer pour ce qui est de la conduite automobile; voilà ce que devrait être le message puisque c'est déjà ce que font la majorité des aînés.
Pour lutter contre la notion de l'âgisme, nous devons promouvoir le concept du bien vieillir. Pour l'Australie, c'est un modèle fondé sur la promotion du maintien de l'indépendance personnelle et de l'auto responsabilité aussi longtemps que possible en fonction des capacités et des choix individuels. Cela étant, et dans le même temps, nous devons éviter de faire assumer aux gens la responsabilité de leur santé et de leur propre bien-être, c'est-à-dire jeter le blâme sur la victime. Or, ces modèles ont parfois tendance à le faire, c'est-à-dire que tout dépend de vous. Mais il n'en est rien, puisqu'il nous incombe à nous tous, solidairement, de travailler à la promotion d'un mode de vie actif et sain et de bien vieillir.
Chad Witcher, représentant, du Alberta Centre for Active Living : Je suis étudiant en doctorat à la Faculty of Physical Education and Recreation à l'Université de l'Alberta à Edmonton. Je suis ici au nom de mon ancienne directrice de thèse de maîtrise, le professeur Sandra O'Brien Cousins, professeur émérite en gérontologie de l'exercice, qui m'a Alberta Centre for Active Living. Je voudrais vous formuler nos sincères remerciements pour l'occasion qui nous est donnée de prendre part à cette importante tribune, parce que nous souscrivons sans réserve à la promotion de la santé par un mode de vie actif à tous les âges.
Le Canada est un chef de file mondial pour ce qui est d'examiner le mode de vie actif et l'âgisme, en partie parce que nos travailleurs ont traditionnellement été encouragés à prendre leur retraite et à aller se reposer à l'âge de 65 ans. Cela dit, la réforme de la retraite obligatoire élargira probablement les horizons et la mentalité des adultes âgés quant à la façon de vivre pleinement leur vie plus tard. S'agissant des personnes âgées de 65 ans et plus aujourd'hui, la recherche sur la motivation à l'exercice porte à croire que le maintien en forme des personnes âgées actuelles s'accompagnera de difficultés énormes. À ce sujet, une étude réalisée par le professeur O'Brien Cousins pour la Coalition d'une vie active pour les aîné(e)s en 2005, intitulée Overcoming Ageism in Active Living, offre un éclairage informatif.
Ma propre recherche sur la promotion de l'activité physique chez les personnes âgées contribue aussi à la compréhension des difficultés de mobiliser les adultes âgés qui vivent dans des collectivités rurales. Elle souligne l'importance d'une meilleure compréhension de la façon dont les contextes passé et actuel peuvent influencer la participation à des activités physiques de loisirs.
Nous prenons acte de la sagesse des trois approches exposées au chapitre 2. En effet, nous appuyons l'élimination des obstacles au vieillissement actif, à l'échange des connaissances et des meilleures pratiques, et adhérons sans réserve au lancement d'une stratégie nationale pour combattre l'âgisme. Après tout, nous cherchons tous des solutions à l'échelon individuel, collectif et national.
En ce qui concerne les obstacles, qu'en savons-nous et que devrions-nous faire? Nous savons que le sédentarisme est un grave problème chez les adultes canadiens âgés. Seule une minorité de ces derniers sont suffisamment actifs physiquement. Paradoxalement, bien que l'on constate des améliorations profondes chez les adultes âgés et sédentaires qui font fréquemment des étirements, de la marche et de l'activité de renforcement musculaire, les adultes âgés sédentaires en santé disent qu'ils n'ont pas forcément besoin d'une physiquement en forme pour être en bonne santé, tandis que les personnes âgées malades disent qu'il est trop tard, qu'elles sont trop vieilles ou qu'elles ne sont pas suffisamment en forme pour prendre part à ces activités. Nombre d'entre elles se sentent fragiles parce qu'elles sont fragiles. Elles sont devenues trop frêles, trop rigides et trop instables pour vivre sans craindre des chutes. Qu'à cela ne tienne, la recherche montre que les personnes âgées frêles ont le plus à gagner de l'activité physique quotidienne.
La sensibilisation publique contribuera-t-elle à accroître la participation à l'activité physique? Peut-être pas. Les personnes âgées sédentaires disent qu'elles savent déjà que faire de l'exercice est bon pour le corps, mais estiment néanmoins que ce n'est pas bon pour elles. Il se peut donc que le problème sous-jacent soit l'âgisme auto-imposé.
Nous devrions travailler à éliminer les obstacles individuels et écologiques à la participation à l'activité physique en offrant l'inspiration et le soutien nécessaires. Sur un plan individuel, les éducateurs, les infirmières, les travailleurs de soutien à domicile et autres professionnels des soins de la santé qui ont été spécialement formés peuvent aider les adultes âgés à intégrer l'activité physique à leurs vies de façon structurée ou non. Les adultes âgés qui sont moins mobiles et plus frêles peuvent apprendre à participer à des activités physiques bénéfiques dans leurs propres domiciles.
D'un point de vue écologique, nous devons mettre l'accent sur les aspects de l'environnement qui peuvent empêcher ou encourager l'activité physique. Il est important que les adultes âgés se sentent en sûreté dans leurs quartiers. Il est important que l'on puisse marcher dans les collectivités. Il ne faut pas qu'il y ait de neige ou de glace sur les trottoirs, et les rues, les promenades et les sentiers de marche doivent être bien éclairés. Aider les collectivités à bâtir ou à améliorer une infrastructure qui encourage l'activité physique à tous les âges serait un investissement sage.
Comme je l'ai déjà mentionné, nous aimons bien l'idée du lancement d'une stratégie nationale pour lutter contre l'âgisme, comme l'a été le lancement du Guide d'activités physiques canadien pour une vie active saine pour les aînés il y a environ une décennie durant l'Année internationale des personnes âgées. À la page 167 de leur ouvrage, Ory et coll. disaient en 2003 que le défi consiste « à aller au-delà de la simple communication des avantages essentiels pour la santé pour mettre l'accent sur l'encouragement et l'inspiration des auditoires pour les amener à devenir actifs, tout en faisant attention de ne pas les désaffecter ou les repousser. » [Traduction]
Une telle inspiration pourrait émaner d'une campagne nationale qui pourrait mobiliser des personnes âgées partout au Canada. Par exemple, nous pourrions doubler le nombre de personnes âgées actives rapidement en instaurant un système de jumelage actif, en vertu duquel une personne âgée active aiderait une personne âgée inactive à commencer à bouger. Les partenaires jumelés qui réussissent à maintenir leur engagement pourraient recevoir une distinction nationale sous forme d'une épinglette Personne âgée active.
En conclusion, nous appuyons l'investissement considérable dans le mieux-être des adultes âgés. L'approche à trois volets qui consiste à surmonter les obstacles individuels et environnementaux et à lutter contre l'âgisme à l'échelon national est opportune autant que louable. Je me ferais un plaisir de répondre à vos questions.
Glenn Miller, directeur, Éducation et recherche, Canadian Urban Institute : Nous nous réjouissons de pouvoir comparaître devant vous. Le comité signale à juste titre que les personnes qui ont été actives physiquement toute leur vie sont plus portées à continuer ce mode de vie après la retraite. Nous croyons que la conception matérielle et la configuration de nos collectivités jouent un rôle important dans la promotion d'un mode vie actif. Grâce au bon travail fait par l'Organisation mondiale de la Santé autour de l'élaboration du concept de « villes-amies » des aînés, les décideurs canadiens sont de plus en plus conscients du fait que nous devons nous préparer et nous adapter aux impératifs d'une société vieillissante. Mais on doit comprendre que l'opportunité ne suffit pas. En effet, d'importantes raisons devraient pousser le gouvernement fédéral à prendre des mesures concrètes pour s'attaquer à ces problèmes.
La plupart des gens s'accordent pour dire que vieillir chez soi est un objectif souhaitable. Cela dit, notre recherche montre qu'à moins que des mesures soient prises pour régler un certain nombre de difficultés, de la planification urbaine à la façon dont nous offrons nos services publics, la qualité de vie des Canadiens âgés risque d'empirer.
La réalité de la vie en milieu urbain au Canada est telle que la plupart des Canadiens dépendent d'une voiture personnelle pour aller au travail, faire leurs courses et faire toutes les choses qui nous permettent de jouir d'une des qualités de vie les plus enviables au monde. Si une majorité de citoyens âgés vivent dans des collectivités où il est indispensable d'avoir une voiture pour être fonctionnel, qu'arrive-t-il alors quand ces personnes âgées deviennent trop vieilles pour conduire?
Une majorité de Canadiens âgés vit dans des maisons unifamiliales en milieu urbain. Or, la plupart des banlieues résidentielles, construites après la Seconde Guerre mondiale, ont été conçues en tant que communautés qui dépendent de l'usage d'une voiture et où les services et commodités essentiels, notamment les boutiques, les centres de soins de santé, les bibliothèques et les centres communautaires, ne sont pas à distance de marche. Même quand ces services sont offerts dans les centres commerciaux, le manque de trottoirs et la largeur des artères périphériques constituent une perspective effrayante pour ceux dont l'agilité et la force ont commencé à diminuer.
La génération actuelle des baby-boomers qui, au fil des décennies, deviendront des citoyens âgés, a des attentes plus élevés en ce qui a trait à la mobilité que celles des générations précédentes. Par conséquent, la mobilité réduite, qui est inéluctable quand les personnes âgées ne peuvent plus conduire, aura une incidence négative sur la qualité de vie, à moins que des mesures ne soient prises pour régler le problème.
D'ici environ 25 ans, moment auquel les personnes âgées représenteront un quart de la population canadienne, la configuration des agglomérations au Canada offrira un aspect très différent de celui que présentent les villes aujourd'hui. Étant donné l'incidence que ce phénomène aura sur les finances publiques, la prestation de services publics et les priorités de réaction du secteur privé, la société subira vraisemblablement des changements en profondeur.
Nous avons fait une recherche sur les pratiques exemplaires dans deux pays qui sont plus avancés que le Canada sur le plan du vieillissement de leur population : le Japon et le Royaume-Uni. D'après nos constatations dans ces pays, nous exhortons le comité à étayer son rapport intérimaire et à envisager de recommander que le gouvernement adopte les principes d'une conception universelle ou englobante pour guider les mesures prises par tous les ministères et ses relations avec les autorités provinciales et territoriales.
Le Japon a procédé ainsi il y a près de 10 ans et désormais, la société japonaise bénéficie des résultats positifs de la conception englobante dans tous ces aspects. S'il est vrai que le Japon a la population la plus vieille du monde développé, tous les secteurs, du transport à la prestation de services gouvernementaux, sont conçus avec le souci de les rendre également accessibles à tous. Cette approche proactive aide le Japon à atténuer l'incidence de l'âgisme.
Dans la foulée de cette première recommandation, nous recommandons d'emprunter une idée au Royaume-Uni. Le gouvernement de ce pays met en œuvre une politique interministérielle appelée « Lifetime Homes, Lifetime Neighbourhoods ». Cette politique s'inscrit dans un ensemble d'initiatives plus vastes visant à promouvoir la durabilité car elle est assortie de cibles musclées pour incorporer la conception englobante sur le marché du logement privé, dans la prestation des services de planification et municipaux. L'atout clé de ce programme tient au fait que ses principes doivent être intégrés dans tous les ministères publics. La santé est un élément central mais, contrairement à la situation au Canada, les ministères intervenant au niveau du cadre qui doit être construit, c'est-à-dire la planification, le logement et les transports de même que la prestation de services gouvernementaux en faveur de l'appui au revenu et des communications, sont traités de la même façon.
Le rapport, qui ne date pas d'un mois, affirme :
Une bonne conception est à l'avantage de tous, quel que soit l'âge, mais quand il y a des problèmes de mobilité ou encore des troubles sensoriels ou cognitifs, elle peut faire la différence entre une vie autonome ou l'exclusion sociale.
Un foyer pour une vie entière n'est pas suffisant car il faut des quartiers pour une vie entière ou les personnes âgées ne sont pas marginalisées ou oubliées parce qu'ils ne peuvent pas avoir accès aux immeubles ou aux espaces publics [...] Les quartiers sont conçus pour que le transport, les bons commerces, les espaces verts, les sanitaires confortables et les bancs soient destinés stratégiquement à l'intention des personnes de tous âges, quel que soit leur état de santé.
La prospérité future du Canada est en grande partie tributaire de la façon dont nos villes pourront s'adapter à ce que l'IUC qualifie de « tsunami démographique ». Outre les pressions démographiques, d'autres forces puissantes interviennent dans la progression du tsunami. L'impact ne sera pas le même dans toutes les régions du pays, étant donné les différences de climat, du niveau d'immigration et de moteurs économiques régionaux. L'avenir sera décidé suivant la façon dont nous réussissons à remettre à niveau les collectivités existantes et la façon dont nous modifions notre façon de concevoir les nouvelles collectivités au cours des décennies à venir afin de constituer un environnement où un quart de la population admissible à la retraite vivra.
Je voudrais en terminant demander aux membres du comité de réfléchir à deux choses. Premièrement, le gouvernement fédéral devra évaluer les incidences d'une société vieillissante au-delà des enjeux fiscaux et sanitaires et financer, tout en offrant sa collaboration, la recherche effectuée par ces divers organes, ministères et commissions ainsi que par les autres paliers de gouvernement. La conception va grandement aider à atteindre cet objectif. Deuxièmement, les urbanistes, sous la houlette d'organisations comme l'Institut urbain du Canada et l'Institut canadien des urbanistes et ses affiliés provinciaux sont en très bonne posture pour promouvoir des partenariats de collaboration avec tous le paliers du gouvernement, avec les autres professionnels de la conception, les promoteurs et les autres investisseurs pour aborder avec les moyens créatifs la conception de nouvelles collectivités et la remise à niveau des collectivités existantes.
Ian Scott, président, Seniors College de l'Île-du-Prince-Édouard : Je voudrais féliciter le Sénat d'avoir entrepris cette étude. Il s'agit d'un examen exhaustif de bien des sujets. Je vais, grâce à quelques exemples, parler essentiellement du vieillissement actif.
Je vais d'abord parler du Collège des aînés de l'Île-du-Prince-Édouard. Nous sommes affiliés à l'Université de l'Île- du-Prince-Édouard mais nous avons constitué notre propre conseil d'administration. En dix ans, nos adhérents sont passés de 45 à 527. L'organisation est orientée vers ses adhérents qui payent 120 $ par an et sont libres de suivre tous les cours qu'ils souhaitent pendant l'année. C'est illimité. Nous desservons quatre collectivités à l'Île-du-Prince-Édouard. Le collège est axé sur l'apprentissage avec les pairs qui connait de plus en plus de vogue de par le monde afin de donner des possibilités aux gens de plus de 50 ans. L'ennui est qu'il y a peu de relations entre les diverses organisations. Les cours offerts sont par exemple des cours sur l'histoire de la famille, l'astronomie, la magie mathématique, l'écriture du vécu et le chant. Nous offrons plus de 100 cours. La meilleure description du collège se trouve sur notre site Internet, via une bande vidéo. Le premier domaine enregistré au Canada, à savoir upei.ca/seniorscollege, vous permettra de visionner cette bande vidéo qui décrit la façon de donner aux gens les moyens de mieux se réaliser. Nous dérivons une force puissante du fait que nous croyons que les personnes âgées ont beaucoup à apporter et qu'elles font une différence dans leur milieu.
Nous utilisons les installations de l'université de la communauté édifiée grâce aux deniers publics. Souvent, la plupart d'entre nous pensent que nos bibliothèques universitaires, qui sont parmi les plus complètes du pays, ont un statut unique. Nous leur conférons un statut élitiste et nous oublions que ce sont nos universités — les meilleures dans la collectivité. Quand les gens fréquentent un campus et se servent des installations, ils commencent à se rendre compte qu'ils font partie de la collectivité du campus. C'est un processus habilitant. Nous sommes conscients de la chance que nous avons d'être invités sur le campus et nous utilisons intensément les installations qui s'y trouvent. Le problème est que très vite ces installations ont été saturées sur le campus et que nous avons dû chercher des locaux ailleurs. Toutefois, le campus est un élément essentiel de nos opérations.
Quelle que soit la planification envisagée, il est capital que des salles à usage multiple soient intégrées dans la collectivité afin qu'elles puissent être réservées. Quotidiennement, nous avons le problème de trouver des espaces que nous pouvons réserver. Certains de nos membres n'ont pas de moyen de transport et ils acceptent de marcher plusieurs milles pour se rendre à leur cours. Cela témoigne éloquemment de leur dévouement car ils sont prêts à faire l'effort, qui est en même temps un exercice, pour assister aux cours.
Je voudrais vous donner un autre exemple. Un des membres de notre conseil d'administration est le parfait exemple de la personne âgée active. Elle a entrepris ses études de doctorat dans la soixantaine, a obtenu son diplôme et actuellement, elle conseille les étudiants au doctorat. Récemment, elle a écrit un article sur un sujet qui me tient beaucoup à cœur : L'alphabétisation. Je félicite le Sénat qui joue un rôle de chef de file en matière d'alphabétisation au Canada, ce qui a grandement influencé les décisions gouvernementales. Elle a intitulé son étude, qui a été présentée il y a quelques semaines à New York, It takes a Village to Raise a Reader : Building Literacy Across Generations. Elle a analysé un programme intergénérationnel très actif à l'Île-du-Prince-Édouard intitulé Project L.O.V.E. (Let Older Volunteers Educate). Le programme jumelle un bénévole âgé et un élève de l'école élémentaire qui a besoin d'une attention particulière. Il ne s'agit pas de remplacer les aides-enseignants mais de créer un système de jumelage et une relation étroite. Le but est de rendre ce que l'on a reçu et de participer à la vie des collectivités que nous avons édifiées.
Le projet fait partie d'un mouvement intergénérationnel et vient combler la disparition des structures de la famille élargie en la remplaçant. Nous avons dans l'Est du Canada tout particulièrement subi la réalité du départ de nos jeunes. Dans toutes les familles que je connais à l'Île-du-Prince-Édouard, il y a des membres qui ont quitté l'île. Ce phénomène n'était pas aussi courant il y a 50 ans qu'aujourd'hui. Bien des jeunes qui vivent dans les centres urbains n'ont pas de grands-parents vivant tout près d'eux. Ces enfants grandissent sans connaître ce lien étroit. Le programme permet de combler cet écart et donne aux grands-parents bénévoles la possibilité de faire partie de la vie d'un jeune.
En outre, le programme aide les personnes âgées à se sentir gratifiées et à garder contact avec la jeune génération tout en aidant cette dernière à renouer avec la sollicitude par le biais de l'expérience de la lecture. Une lecture en commun ne tient pas tant au décodage des mots sur la page. Il s'agit plutôt de la sollicitude qui fait prendre conscience de l'importance de l'écrit, de la lecture, de ce qui est une porte d'accès à notre culture et à l'acquisition de la connaissance.
Au dernier paragraphe de la page 13 de votre rapport, il est question d'un certain nombre de programmes novateurs au pays pour favoriser l'apprentissage chez les aînés. Des témoins ont dit au comité que de nouveaux programmes pourraient être créés plus rapidement si les fournisseurs avaient l'occasion de se rencontrer pour échanger des idées et mettre en commun leurs pratiques exemplaires. Je voudrais souligner cette suggestion mais je ne l'ai pas retrouvée dans les recommandations. La recommandation 13 pourrait être étayée, grâce à quelques modifications dans le libellé, pour tenir compte du fait que ceux qui fournissent ce genre de programme à coût modique à l'échelle du pays sont des bénévoles. Nous offrons notre temps. En tant que retraité, je n'ai pas la possibilité de voyager énormément, mais les professionnels du domaine le font. Mes nombreuses années d'expérience dans le domaine de l'alphabétisation et au gouvernement m'ont amené à rencontrer des collègues aux quatre coins du pays, ce qui a été un apport précieux dans l'évolution des programmes à l'Île-du-Prince-Édouard. Plus particulièrement, le coup de main des collègues a été utile pour travailler dans de petites collectivités et dans une petite province isolée. Tout ce que nous pourrions faire pour encourager les communications entre ceux qui organisent des programmes à l'intention des retraités, consoliderait grandement les efforts et aiderait à répandre la bonne parole.
L'été dernier, nous avons organisé une conférence régionale qui a attiré des représentants de sept provinces. De la rencontre ont émané de nouveaux collèges pour aînés, l'un ayant été ouvert à Halifax en janvier, un autre qui le sera à Sackville au Nouveau-Brunswick, en collaboration avec l'Université Mount Allison en septembre prochain, et un au Cap Breton également.
Nous vous encourageons à reprendre le libellé de la recommandation 13 pour rappeler que ceux qui travaillent au niveau communautaire ont besoin d'aide pour répandre la bonne parole et pour s'entraider.
Ruth MacKenzie, présidente, Bénévole Canada : Je suis ravie qu'on m'ait invitée à venir témoigner. Nous entreprenons un travail important. Il est louable que vous ayez reconnu l'importance des bénévoles pour le bien-être des aînés canadiens. Aujourd'hui, puisque c'est le premier jour de la semaine nationale du bénévolat, je vous en remercie.
Les valeurs que véhicule l'engagement bénévole au Canada sont solides. Quarante-cinq pour cent de la population — 12 millions de Canadiens — consacrent chaque année près de deux milliards d'heures à des activités bénévoles. Ce qui est déconcertant, c'est qu'une grande partie de ces heures sont le fait de quelques-uns. Soixante-dix sept pour cent des heures de bénévolat sont attribuables à 11 p. 100 des Canadiens. Encore plus déconcertant, une proportion appréciable de ces 11 p. 100 sont des adultes âgés. Si nous ne trouvons pas les moyens de mobiliser les générations vieillissantes pour garantir leur contribution maximale, le bénévolat et en fait nos collectivités seront en péril.
Les recommandations contenues dans votre rapport concernant le moyen de rendre plus faciles les activités de bénévolat sont fermes et auraient indéniablement une incidence positive sur l'engagement bénévole de la part de nos aînés. Votre recommandation concernant un financement pluriannuel est importante. Une part essentielle de l'engagement bénévole tient à la relation entre les bénévoles et le choix du domaine où ils consacreront leur temps. Cette relation repose sur la confiance, la fiabilité, la continuité et l'intensité, des notions impossibles à maintenir en l'absence de l'assurance que cette relation existant le 31 mars va pouvoir être maintenue le 1er avril, l'assurance qu'au début d'un exercice financier, on ne risque pas que les programmes et les protagonistes sur lesquels on compte risquent de disparaître.
L'infrastructure est un élément essentiel — souvent délaissée par les bailleurs de fonds, tant publics que privés. Cette recommandation souligne que le bénévolat, pour organique qu'il soit dans son éthique, n'en est pas pour autant gratuit ni exempt du besoin d'être soutenu et encouragé. C'est pourquoi il est important d'avoir un leadership national, pour formuler les questions de recherche et y trouver des réponses : savoir ce qui attend les bénévoles et le secteur à but non lucratif et pouvoir ainsi se préparer à adapter la participation des bénévoles en fonction de l'évolution des questions, des tendances, des revirements et des intérêts.
Votre recommandation visant à reconnaître et promouvoir le bénévolat tout au long du cycle de vie est stratégique; toutefois, chaque Canadien ou Canadienne a des circonstances de vie bien particulières et en évolution constante. Il faut reconnaître que chacun vient au bénévolat pour des raisons différentes, admettre et respecter le fait que les gens font du bénévolat et cessent d'en faire à différents stades de leur vie, de comprendre la jeunesse, la génération sandwich, les stades socioéconomiques de la vie, le rôle des employeurs, le bénévolat familial ou intergénérationnel, l'expérience des nouveaux Canadiens et, bien sûr, l'objet principal de l'étude de votre comité :les aînés.
C'est délibérément que j'ai gardé pour la fin votre première recommandation : des crédits d'impôt pour le bénévolat. Pour stimuler le bénévolat, il est important de tenir compte des obstacles au bénévolat. Les bénévoles ont tendance à appartenir à la classe moyenne; les statistiques indiquent qu'ils ont fait des études et se classent dans les tranches supérieures de revenus. On pourrait donc en conclure qu'il existe un obstacle économique au bénévolat et que, par conséquent, fournir une mesure d'incitation économique au bénévolat serait logique.
Mais la question des crédits d'impôt me perturbe un peu. Si l'idée est d'encourager les personnes à plus faible revenu à faire du bénévolat, ce sont des ménages peu susceptibles de tirer un avantage majeur d'un crédit d'impôt. Par contre, trouver un mécanisme permettant de rembourser les dépenses pour lesquelles les bénévoles en sont autrement de leurs poches serait très, très avantageux. De nombreux organismes à but non lucratif sont sur la corde raide d'un point de vue financier et ne peuvent rembourser aux bénévoles leurs frais directs. Or, il y a des situations où le coût d'un ticket de bus est en fait un obstacle pour bien des gens.
La question d'accorder une valeur économique au bénévolat est de fournir des mesures fiscales incitatives et d'actualité dans le secteur, qui en reconnaît l'importance. N'empêche qu'il subsiste toute une série de questions sans réponses quant aux avantages réels ou encouragements associés à une telle approche. Mesurer le bénévolat en termes économiques nuit-il à sa valeur inhérente, diminue-t-il l'importance de la passion et des éléments qualitatifs qui sont à l'origine de la participation des bénévoles? A-t-il été prouvé que fournir des mesures incitatives économiques comme des crédits d'impôt se traduiront par une participation accrue? Les bénévoles vont-ils effectuer le nombre d'heures maximum associé aux crédits puis se laver les mains de la question? Est-ce que le fait d'accorder des incitatifs fiscaux aux personnes âgées qui font du bénévolat aura des répercussions négatives sur la participation des autres tranches d'âge, qui ne jouissent pas d'un tel avantage? La proposition est intéressante, voire attrayante, mais il faut effectuer des recherches plus approfondies pour mieux mesurer les répercussions positives possibles, ainsi que les risques posés à la participation des bénévoles et à la culture ou philosophie du bénévolat.
L'aspect le plus inquiétant de la recommandation est le fardeau accru qu'elle pourrait imposer aux gestionnaires de bénévoles qui ont déjà du mal à faire face à toutes leurs responsabilités. Je vous exhorte à tenir compte des ressources considérables dont un organisme à but non lucratif aurait besoin pour gérer les relevés d'heures et les tenir à jour. Il ne faut surtout pas perdre de vue le risque d'une participation accrue des bénévoles, associé à une diminution de notre capacité à bien gérer ces ressources.
En conclusion, j'exhorte le comité à mettre en œuvre les recommandations qui se traduiront, on le sait, par une augmentation significative de la capacité des organismes à faire participer les bénévoles, avant de se pencher sur l'octroi éventuel de crédits d'impôt. Si le concept des crédits d'impôt est mis en œuvre de façon réfléchie, après des recherches approfondies permettant de bien le comprendre, il est possible qu'il donne de bons résultats. J'exhorte aussi le comité à enrichir de ses constatations d'autres initiatives au sein du gouvernement, voire à créer un sous-comité sénatorial spécial sur l'état et le futur du bénévolat au Canada, en guise de dernière recommandation.
La présidente : Merci beaucoup. Le débat et la discussion ont été intéressants. J'aimerais voir dialoguer MM. Witcher et Paterson. J'ai été intéressée par le fait que M. Paterson semble encourager beaucoup plus d'activité physique. Monsieur Witcher, tout en allant dans le même sens, vous semblez dire que parfois nul n'a de pire ennemi que soi-même. Comment est-ce qu'on passe à ce que vous présentez comme peut-être un certain malaise à l'idée d'être actif physiquement au stade que vous recommandez, monsieur Paterson, comme étant absolument essentiel? Je vous signale d'ailleurs que vous prêchez ceci à quelqu'un qui s'est auto-diagnostiquée comme allergique à l'exercice.
M. Witcher : Ma foi, autant commencer par votre allergie. De prime abord, il semblerait y avoir un conflit, avec M. Paterson d'un côté et moi de l'autre. Mais, sur le fond, je suis d'accord avec lui : nombreuses sont les recherches qui montrent que, pour obtenir des avantages positifs de l'activité et de l'exercice physiques, il faut envisager graduellement d'y consacrer 60 minutes ou plus chaque jour.
Vu que la majorité des adultes âgés sont actuellement totalement inactifs physiquement, d'un point de vue promotionnel, il est important de les faire passer d'une inactivité totale à une certaine activité. Il serait très difficile de faire passer les gens qui sont actuellement inactifs à un état d'activité physique relativement intensif.
M. Paterson : La question ne date pas d'hier. C'est l'approche behavioriste qui nous a valu le concept de vie active, en partant du principe qu'en amenant les gens à en faire un peu plus, on les convertira à un mode de vie active. Les guides d'activités en sont un exemple. Or, ils n'ont pas réussi. L'activité de la population n'a pas augmenté. La recherche a désormais clairement prouvé que certaines activités étaient nécessaires, si bien que la vie active, même si chacun s'y mettait, n'aurait aucune répercussion positive sur la santé de la nation.
Votre allergie à l'exercice ne m'inquiète pas outre mesure, dans la mesure où, en vieillissant, la perte de capacités fonctionnelles est telle qu'une marche vigoureuse devient de l'exercice. Telle est mon opinion.
L'un des mes slogans est le suivant : « mettez-vous en forme pour la vie active. » Si nous pouvons amener les aînés à suivre un cours de huit semaines appelé « Mettez-vous en forme pour la vie active », les informer des avantages de l'exercice et, surtout, leur montrer comment s'y prendre — vu qu'ils ressentent au départ une certaine appréhension —, ils s'adonneraient à d'autres activités dans leur vie quotidienne. On a au centre de nombreux exemples de ce type d'évolution. Une femme qui avait cessé de faire du golf y est revenue deux ans plus tard parce que, si elle pouvait survivre à une classe d'éducation physique à 7 h 30 du matin, elle pouvait faire ses 18 trous. Maintenant elle fait les deux. Ce n'est pas si intimidant que cela, d'amener les gens à faire de l'exercice.
L'autre aspect de la question est qu'il n'est pas nécessaire d'amener toute la population à s'y mettre. D'un point de vue économique et sociétal, il y aurait d'énormes économies de coûts si l'on amenait juste 10 p. 100 de la population à éviter les maladies chroniques et le besoin d'être assistée.
M. Miller : L'idée d'exercice naturel représente peut-être un moyen terme. C'est une idée dont on parle dans le domaine de l'urbanisme : il y a exercice naturel quand existe une collectivité qui permet de se déplacer en marchant, contrairement aux banlieues axées sur l'automobile que nous avons malencontreusement construites.
Lorsqu'on envisage la population des aînés, avec les trois grands groupes d'âge que vous avez identifiés dans votre rapport, il est utile d'envisager également les « futurs aînés », le groupe des moins de 65 ans et de s'assurer de les informer. En effet, s'ils n'ont pas été actifs par le passé, le moment est sans doute bien choisi pour les sensibiliser afin que, une fois qu'ils seront plus âgés, ils soient en mesure de modifier leur comportement.
Mme Gallagher : Dans notre travail avec les collectivités rurales et éloignées, nous avons constaté qu'elles affrontaient des défis différents de ceux qui existent dans les zones urbaines. Quand il s'agit d'encourager des gens à devenir plus actifs ou plus en forme, il n'y a pas d'approche passe-partout. Les habitants de ces régions ont été nombreux à évoquer combien l'hiver était âpre et combien il leur était alors difficile de sortir de chez eux. En l'absence totale de transports publics pour se rendre où que ce soit, faute d'avoir un membre de la famille ou un ami qui peut vous conduire en voiture, on est coincé chez soi pour une bonne partie des rudes mois d'hiver.
Tous ces éléments sont reliés. Il ne s'agit pas seulement d'amener les gens à sortir et à faire de l'exercice. Il y a parfois d'autres obstacles et d'autres facteurs particuliers dans une collectivité dont il faut tenir compte.
Le sénateur Mercer : Monsieur Paterson, en vous écoutant parler en réponse à l'encouragement de notre présidente à lancer la discussion, je ne pouvais m'empêcher de penser à ma mère, qui a 88 ans, et qui me préoccupe toujours parce qu'elle ne fait pas beaucoup d'exercice. J'ai essayé de l'encourager à ne pas rendre au magasin du coin pour acheter son lait mais d'aller au supermarché, de mettre son litre de lait dans son chariot et d'arpenter systématiquement toutes les allées du supermarché, histoire de faire un peu d'exercice, ce serait bon elle et cela lui prendrait sans doute une heure et demie, vue qu'elle est plutôt sociable et qu'elle s'entretiendrait avec la moitié des gens au magasin. Parfois, il est assez facile de faire de l'exercice.
Il y a longtemps, je me rendais en Caroline du Nord pour rendre visite à ma belle-sœur. En été, la température était parfois étouffante, comme cela peut être le cas dans les États-Unis du sud. Or, j'ai remarqué un programme de marche au centre commercial du coin, prévu tôt le matin, de 8 heures à 10 heures, avec des allées bien tracées sur le sol du centre commercial. Cela permettait aux aînés de marcher le matin dans un milieu climatisé et de faire ainsi de l'exercice sans s'exposer aux températures de plus de 90 degrés.
Ici, nous avons le problème opposé, celui du froid. Y a-t-il au pays de bons exemples d'initiatives de ce type? Elles sont intéressantes pour les détaillants aussi, parce que, si les aînés sont au centre commercial, après l'exercice, ils s'arrêtent au Tim Hortons pour prendre une tasse de café ou achètent leur litre de lait à l'épicerie du centre commercial, et ainsi de suite.
M. Paterson : Il y a un programme de marche dans trois centres commerciaux de London. Pour l'étoffer un peu, nous avons sur place un leader d'exercice, présent dans chaque centre commercial, le matin et en fin d'après-midi, aux heures où la plupart des aînés ont décidé de pratiquer la marche. Les parcours sont clairement indiqués, afin que les aînés sachent quelle distance ils sont parcourus et, s'ils le souhaitent, combien de temps il leur a fallu. Le leader est là pour prodiguer les conseils sur la façon de marcher d'une façon énergique et pour les aider à rester motivés.
Il y a une autre ressource que nous n'exploitons pas dans les zones urbaines : celle des écoles. Ceci dit, si on déneigeait les trottoirs, ils seraient plus propices à la marche. Mais, pour en revenir aux écoles, nous nous heurtons à une résistance incroyable, dont j'ignore la cause.
Le sénateur Mercer : Les aînés sont pourtant peu enclins au vandalisme.
M. Paterson : Il y a des programmes de marche dans les centres commerciaux et il y a d'autres endroits où cela pourrait être organisé, si on obtenait la permission. C'est une bonne idée.
Le sénateur Mercer : Madame Gallagher, je veux faire une recommandation. Je partage votre préoccupation au sujet des collectivités rurales et éloignées. Je siège également au Comité sénatorial de l'agriculture et des forêts, qui vient d'achever une étude de fond sur la pauvreté rurale, qui devrait être publiée bientôt. Dans notre étude, nous avons évoqué certaines de ces préoccupations, si bien que vous voudrez peut-être y jeter un coup d'œil.
Monsieur Scott, votre collège pour les aînés, à l'Île du Prince-Édouard, m'intéresse. Qui assure l'enseignement et qui rémunère les professeurs?
Monsieur Scott : Nous sommes autosuffisants. Le collège dépend en bonne partie de bénévoles; le conseil d'administration est entièrement constitué de bénévoles. Nous ne pouvons même pas nous faire rembourser nos frais de déplacement. Nous nous efforçons de limiter nos coûts autant que possible. Nous avons un coordinateur que nous payons environ 10 $ de l'heure, si on part du principe qu'il travaille peut-être 10 heures par semaine. En fait, il travaille quasiment à temps plein. Il est très dévoué mais cela lui rapporte seulement environ 5 000 $ par an. Il est à la retraite.
Nous payons nos facilitateurs 300 $ le cours. Un cours se donne pendant huit semaines, période assez brève pour que cela ne constitue pas un engagement majeur. Nous organisons trois trimestres entre septembre et juin, avec de légères pauses à la Noël.
Pour ce qui est du coût, les frais d'inscription à l'année s'élèvent à 120 $, ce qui suffit à assurer notre autosuffisance. Nous payons une petite somme, environ 10 $ par personne, pour les cours qui ont lieu sur le campus. Nous avons aussi accès aux bâtiments confessionnels, où nous sommes merveilleusement bien accueillis. Il y a même des fois où l'église offre le café et tout le reste, avec peut-être une sébile où on peut déposer des contributions qui vont aux œuvres de charité de l'église. Les églises nous accueillent donc à bras ouverts, mais on fait les choses à peu de frais.
Le sénateur Mercer : Je viens du secteur bénévole et j'ai consacré toute ma carrière à travailler avec des bénévoles partout au pays, notamment pour le YMCA, qui acceptait toujours les gens même quand ils ne pouvaient pas payer.
Que se passe-t-il si quelqu'un veut suivre le programme du collège sans avoir les moyens de payer les frais de scolarité?
Monsieur Scott : Nous traitons les choses au cas par cas. Il y a des circonstances exceptionnelles, par exemple des gens qui ont le cancer et qui ne savent pas du tout s'ils pourront suivre plus d'un ou deux cours. Nous leur accordons une inscription honoraire ou gratuite pour l'année pour tenir compte de leur situation. Nous avons offert des inscriptions gratuites à des personnes qui nous ont dit être pauvres. Nous n'avons pas de programmes spécifiques à cet effet, mais nous traitons les cas au fur et à mesure qu'ils se présentent.
Le sénateur Mercer : Si vous avez besoin d'aide, je suis sûr que votre YMCA local pourrait vous aider. Ils appliquent une norme.
Madame MacKenzie, je veux m'assurer que votre dernière recommandation, soit l'éventuelle création d'un sous- comité sur l'état du bénévolat au Canada et son futur, ne se perde pas en cours de route.
Je ne sais pas si mon personnel, qui m'écoute, me le pardonnera, mais j'aimerais me porter volontaire pour être membre de ce comité. Les chiffres que vous avez signalés au début de votre rapport sont absolument exacts : le nombre des bénévoles diminue et nous sommes moins nombreux à faire plus d'heures. Nous atteignons un stade critique où certaines des associations communautaires des plus importantes risquent de perdre leur capacité de fonctionner. Si on ne tient pas compte des groupes confessionnels, qui sont différents, la situation est encore plus grave. Les chiffres sont vraiment inquiétants dans le cas des groupes communautaires.
Y a-t-il au pays des exemples d'organismes qui ont dû cesser leurs activités, faute de bénévoles?
Mme MacKenzie : Presque tous les organismes vous diront qu'il y a une pénurie de bénévoles. Mais juste comme ça, je ne me souviens pas d'un organisme qui a cessé d'exister uniquement en raison d'un manque de bénévoles.
Je sais que les organismes ont du mal à planifier pour l'avenir, et à se positionner de manière stratégique au sein de la collectivité. Ils ont de graves difficultés à recruter des administrateurs. Or, c'est souvent le conseil d'administration qui permet la planification stratégique. Les organismes sont très vulnérables, pour ce qui est de leur position en fonction de l'avenir, à cause du manque de bénévoles.
Au sein de ces organismes, la gestion des bénévoles est une fonction critique, dont les titulaires sont rarement reconnus pour leur importance, pour le fait qu'ils s'occupent du programme des bénévoles, qu'ils voient les tendances et les changements dans le bénévolat et qu'ils savent ce qui doit être fait. Par exemple, il pourrait ne plus être possible de garder un programme qui avait créé des attentes, pour servir le thé dans un service d'oncologie, chaque mercredi après-midi, pour les 35 années à venir.
Les programmes les plus ancrés dans les types de bénévolat traditionnels et anciens seront très vulnérables au cours des 10 à 15 prochaines années. Cette cohorte, celle des super bénévoles, donne actuellement beaucoup d'heures de bénévolat, plus du double de ce que donne la cohorte qui arrive en deuxième place. Quand ses membres cesseront de donner de leur temps pour devenir des utilisateurs de services bénévoles, la situation sera critique. Si on n'apporte pas de changements importants dans le bénévolat, des exemples de ce genre se multiplieront au cours des 10 prochaines années, bien que je ne puisse pas, pour l'instant, vous en donner un exemple.
Le sénateur Mercer : Je pense que Mme Gallagher a parlé de l'intégration du bénévolat aux programmes des écoles secondaires et primaires. Je pense que c'est une excellente chose. Il y a quelques années, il y avait un projet pilote de ce genre, ici, dans la région de la capitale nationale. Je sais qu'il a connu un franc succès, et que les jeunes étaient très enthousiastes, considérant que le bénévolat était une expérience enrichissante. Les bénévoles savent cela. Je pense qu'il est possible pour nous tous de lutter contre le manque de bénévoles pour venir en aide aux personnes âgées. Nous avons un peu parlé de forme physique. Il serait possible de recourir au service des jeunes, qui fréquenteraient ainsi des personnes âgées, et vice versa.
Mme MacKenzie : C'est crucial. Il faut penser au bénévolat chez les jeunes et nous assurer que leur première expérience de bénévolat soit positive. Le bénévolat est ensuite assimilé en eux, et ils deviendront des bénévoles à vie. Il est crucial d'intégrer le bénévolat aux programmes scolaires. Il est important que ces programmes soient vus et gérés de manière positive.
En Ontario, on a un exemple de gestion malhabile. Un programme qui oblige tous les élèves d'écoles secondaires à faire 40 heures de bénévolat pour obtenir leur diplôme, ce n'est pas un programme de bénévolat, c'est une obligation. Beaucoup de jeunes y voient quelque chose qui peut être punitif. Je ne dis pas qu'il n'y a là aucun potentiel. Je pense que si l'on associe la participation à la société et la mobilisation des citoyens aux programmes scolaires, il est possible de faire en sorte que les jeunes considèrent leur bénévolat, ou le service communautaire qu'ils sont tenus de faire, comme un travail bénévole positif pour eux, comme pour la société, et qui les rattache à quelque chose de plus grand qu'eux.
Souvent, le bénévolat est la première chose qui fait sortir les jeunes de leur propre petit monde. Ils ne s'occupent pas que de leur petite personne, mais de quelque chose de plus grand qu'eux, ils font partie de leurs communautés et ont l'occasion de voir le rôle que chacun peut jouer dans la communauté, pour la façonner et y changer des choses. Si cela leur est bien présenté, et que les occasions d'agir sont bien gérées, l'effet sur les jeunes peut être profond.
La présidente : Pour ajouter à votre propos, madame Gallagher, précisons qu'il est merveilleux que les jeunes puissent faire du bénévolat, mais leur expérience ne sera positive que si le bénévolat se fait dans un domaine qui les intéresse.
Quand j'étais enseignante, j'ai rapidement constaté qu'habituellement, il n'y a pas un membre du personnel qui cherche des occasions de bénévolat adaptées aux intérêts des jeunes. Par exemple, un garçon qui est un athlète peut être associé à une équipe de soccer pour enfants, et ce sera pour lui une activité fantastique. En revanche, si vous demandez à quelqu'un comme moi, quelqu'un de maladroit, de s'occuper d'une équipe de soccer, je ne saurais même pas par où commencer.
Mme MacKenzie : Oui, encore une fois, c'est ce que j'appelle l'allergie.
La présidente : Oui, ce serait inutile.
J'aimerais revenir aussi à l'une de vos observations sur la souplesse. Il me semble que vous ne pourrez recruter des bénévoles âgés que si vous avez cette souplesse. Quand une personne âgée s'engage à faire du bénévolat pendant un an, elle veut tout de même pouvoir aller au chalet l'été, ou dans le Sud pendant quelques semaines l'hiver, sans se sentir coupable de ne pas faire ses heures de bénévolat l'été, ou pendant ces deux semaines en janvier.
Mme MacKenzie : Vous avez tout à fait raison. Là encore, il faut vraiment bien comprendre le bénévolat. Ceux qui gèrent les bénévoles doivent être formés et intégrés à des organismes s'ils ont les compétences nécessaires pour gérer des bénévoles. Il importe que cette reconnaissance se fasse aussi chez les dirigeants de l'organisme, au conseil d'administration, à la présidence ou chez le directeur exécutif. Il faut penser au bénévolat de manière stratégique, au- delà du conseil d'administration ou du comité de financement. Il faut reconnaître et comprendre que les bénévoles ne sont pas gratuits, qu'il leur faut de l'appui, de l'encouragement et du leadership. Il faut investir dans l'infrastructure.
Bénévoles Canada en est un exemple, tout comme les centres de bénévolat communautaires. Ceux qui réfléchissent au bénévolat au quotidien auront l'occasion de répondre à ces questions de recherche, de faire ces apprentissages et de créer des programmes de soutien du bénévolat adaptés à l'évolution des besoins et des attentes des bénévoles.
Le sénateur Keon : Une réponse de M. Miller m'amène à poser une question, mais je voudrais que tous nos témoins puissent y répondre, même si elle s'écarte un peu de leur exposé.
Vous avez parlé de conception inclusive. Dans le journal de ce matin, on disait qu'à Ottawa, des couples dont les enfants sont partis quittent la banlieue pour s'installer dans des condos au centre-ville. Apparemment, la demande de condos dépasse l'offre, peu importe le prix. Ces gens ne sont pas encore bien vieux, mais il me semble qu'il y a là une occasion en or d'intégrer les notions dont vous avez presque tous parlé dans votre exposé, pour améliorer le milieu où ces gens deviendront des personnes âgées.
Nous avons un beau pays, mais les relations entre les gouvernements fédéral, provincial et territorial et les grandes administrations municipales ne sont pas simples. M. Scott, je crois, disait qu'il fallait un village pour élever une personne alphabétisée. On dit souvent qu'il faut un village pour élever un enfant, mais nous avons perdu tous nos villages. Il n'y a toutefois pas de raison de ne pas avoir des villages au sein des grandes villes; nous avons des communautés, mais nous ne savons pas très bien quoi en faire.
Il m'importe peu de savoir qui répondra en premier, mais j'aimerais que vous le fassiez tous. Comment influencer le gouvernement supérieur, le gouvernement fédéral? Il y a le Cabinet, mais chaque ministre est préoccupé par ses obligations. Les ministres sont très occupés. Dans divers pays, des comités du Cabinet se consacrent à l'intégration d'un secteur ou d'un autre. La création de communautés adaptées aux besoins des personnes âgées va bien au-delà du mandat d'un ministre ou d'un gouvernement, sans parler des ONG.
D'après vous, comment notre rapport pourrait-il aider les gens de bonne volonté à se coordonner, à intégrer leurs actions pour offrir aux personnes âgées un milieu idéal?
M. Miller : Ce sont là des propos intéressants. Vous le disiez, nous vivons dans un monde complexe. Il y a notamment le problème des normes. Le gouvernement fédéral, par exemple, par l'intermédiaire de son ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux, de la SCHL ou de bien d'autres de ses ministères, pourrait adopter les principes de la conception inclusive ou universelle, qui était pionnière dans l'élimination des obstacles pour les personnes handicapées. Cette conception peut ensuite être intégrée à la conception de tous les programmes.
Une anecdote l'illustre bien : quand Mike Harcourt était maire de Vancouver, une personne en fauteuil roulant l'a mis au défi de quitter l'hôtel de ville et de le rencontrer au café White Spot, tout proche. M. Harcourt a essayé de le rencontrer, mais il n'y est pas arrivé, parce que le café n'était pas accessible aux personnes handicapées. Il a fait quelque chose qui a amorcé une réaction en chaîne. Il a demandé à son service des Travaux publics de modifier les normes pour y intégrer les bateaux de trottoirs. Le milieu de l'ingénierie a repris cette idée et dans le temps de le dire, on en voyait partout en Amérique du Nord. Aujourd'hui, les trottoirs sont toujours construits avec un bateau.
Ces petites normes ont commencé une réaction en chaîne pour éliminer les obstacles pour les personnes handicapées. On pourrait appliquer le principe à des obstacles non matériels. Ainsi, lorsqu'un gouvernement conçoit un programme et songe à l'associer étroitement à des sites Web, on tombe dans le problème de l'alphabétisation et de l'accès des citoyens à Internet. Le gouvernement doit une vision plus large et comprendre qu'il ne faut pas que toutes les ressources soient consacrées à l'information axée sur Internet; il faut penser à ceux qui n'y ont pas accès.
Un gérontologue de Birmingham, en Angleterre, a dit que lorsqu'on conçoit des choses pour les jeunes, on en exclut les personnes âgées, mais que si l'on conçoit en fonction des personnes âgées, tout le monde est inclus. Il faut penser généralement de manière inclusive. Nous ne pouvons nous permettre de penser seulement aux personnes âgées, il faut penser à tout le monde.
Au sujet du logement, le gouvernement britannique s'est fixé un objectif ambitieux, soit de demander aux constructeurs de logement du secteur privé d'intégrer aux constructions des suppléments qu'on ne trouve actuellement que dans les projets destinés aux personnes âgées. Ainsi, ils ne construiront plus seulement pour une étape de la vie. Quand cela se verra à l'échelle de toute la communauté, les résultats seront marquants, et cela pourrait être très positif.
Mme Gallagher : J'ai travaillé avec la Dre Nancy Edwards, de l'Université d'Ottawa, à une étude sur les divers facteurs de risques de chutes et de blessures chez les personnes âgées. C'est une fenêtre sur le monde de la conception. C'est peut-être unique, mais ça met en lumière certains des problèmes.
Nous avons constaté une chose intéressante au sujet des escaliers : les normes n'exigent pas que la hauteur de la marche soit de sept pouces au minimum, avec une profondeur maximale de 11 pouces. Or, on a montré que cette proportion de 7/11 était très sécuritaire pour les personnes âgées, et permettait de réduire le nombre de chutes.
Pourtant, quand nous avons présenté ce concept pour qu'il devienne une norme en Ontario, au moment où on révisait le Code du bâtiment, comme on le fait seulement une fois tous les cinq ans, le secteur de la construction s'y est vivement opposé. D'ailleurs, notre proposition a été rejetée. Le secteur de la construction disait que pour satisfaire à cette norme, il faudrait augmenter la pente des escaliers et couper trois ou quatre pieds de superficie de plancher à l'étage supérieur, en raison du changement d'angle des escaliers. On prétendait que cela serait trop coûteux, si pour chaque immeuble construit, il fallait éliminer trois ou quatre pieds de superficie, à chaque étage. On estimait que c'était impossible, si le secteur voulait demeurer rentable.
Le concept a donc été rejeté, ce qui montre qu'il y a des intérêts divergents. Il n'y a pas que les politiciens qui soient en cause. Quand il y a des faits solides et de bonnes initiatives, d'autres enjeux surviennent et d'autres intérêts doivent être pris en compte. C'est une question de valeurs et d'économie. Il faut trouver un moyen de réaliser ces choses de sorte que ces obstacles ne nous nuisent pas quand il s'agit d'arriver à une bonne conception.
Un regroupement de 41 localités du nord de la Colombie-Britannique ont décidé d'adopter le concept de visitabilité, un concept assez intéressant. Il prévoit en effet qu'une personne handicapée devrait pouvoir vous rendre visite sans problème pendant trois ou quatre heures. Cela signifie qu'il doit y avoir des toilettes au rez-de-chaussée, qu'il ne doit pas y avoir d'escalier à l'entrée et que les portes doivent être suffisamment larges pour laisser passer un fauteuil roulant. C'est cela, il y a trois éléments au concept. Depuis, tout nouveau logement dans ces 41 collectivités devra respecter cette norme de visitabilité dès l'étape de la construction, afin qu'une personne handicapée puisse visiter ces logements, sans difficulté.
C'est une notion toute simple, mais qui pourrait nous aider grandement à faire adopter l'idée que quelqu'un d'autre devrait pouvoir vous visiter chez vous, ou y vivre. C'est un bon concept, viable et peu coûteux et un bon point de départ pour réfléchir à ces questions.
J'aime aussi l'idée de la conception universelle. Si on pouvait la faire adopter à l'échelle du pays, comme c'est le cas au Japon, ce serait fantastique, mais peut-être un peu ambitieux au départ. Il faut commencer par une idée plus facile à gérer, à réaliser, au départ, et passer ensuite à un modèle plus complet, une fois atteint un certain succès.
M. Scott : Le moment serait bien choisi, juste au moment où on commence à penser vert pour la vie quotidienne et pour le logement. Nous ne pouvons nous permettre de continuer à brûler de l'huile de chauffage et du gaz naturel comme si ces ressources étaient durables. Il faut que le logement soit plus économique et plus efficient. À un moment où des facteurs économiques et des facteurs énergétiques nous forcent à envisager la construction verte pour les logements, il est temps également de songer à un ensemble d'autres facteurs.
Ces dernières années je suis tombé sur deux exemples qui méritent d'être examinés. Si nous nous penchons sur les pratiques exemplaires à l'échelle nationale, il faut faire quelque chose dans ce domaine.
Le premier est un concours d'architecture britannique il y a une quinzaine d'années qui a proposé une idée nouvelle à l'époque où les taux hypothécaires montaient. Au Royaume-Uni, les jeunes comme ailleurs n'ont pas beaucoup de moyens pour s'acheter une propriété. Il s'agissait essentiellement d'un duplex dont une unité était plus grande que l'autre. Le financement se faisait sur une base variable de manière à aider le jeune couple — je sais, c'est un stéréotype — dans les premières années, peut-être pour accroître sa capacité de gagner un revenu. Au début, le jeune couple contribue davantage à l'hypothèque. Il occupe la petite unité et loue la plus grande. Ensuite, le jeune couple veut commencer une famille et ne veut pas être obligé de gagner deux salaires pendant un certain temps. De cette manière, le taux d'hypothèque baisse le temps que la famille grandisse. Il déménage ensuite dans la grande unité et loue la plus petite. Enfin, il redéménage dans la petite, qui est entièrement accessible, tout en restant dans le même quartier. Il a acquis de l'avoir propre grâce à sa propriété et peut compter sur le revenu de location de la grande unité pendant la retraite. Il a déjà remboursé son prêt hypothécaire à ce moment-là et bénéficie d'un revenu de retraite.
L'hypothèque qu'il a payée pendant toute la durée varie en fonction de ses besoins et c'est structuré de telle sorte qu'elle sera remboursée à temps, mais c'est entièrement variable. Les deux unités sont adaptées de manière à ce qu'elles puissent servir à divers stades. C'était une idée très avant-gardiste découlant d'un concours d'architecture à l'intention des concepteurs et des architectes.
L'autre modèle pour lequel j'ai beaucoup d'admiration se trouve à Wolfville en Nouvelle-Écosse. C'est un ensemble domiciliaire appelé Tideways. Un groupe de personnes âgées en est à l'origine. Wolfville est une localité intéressante qui a donné des innovations au pays. L'usage du tabac en présence d'enfants dans la voiture n'était pas dans la conscience nationale avant qu'une petite ville de Nouvelle-Écosse adopte un règlement municipal qui l'interdise. Chaque province a ensuite emboîté le pas trouvant que c'était parfaitement sensé : les enfants ne doivent pas être exposés à la fumée secondaire.
À Wolfville, un groupe s'est constitué dans les années 1970, conscient qu'il fallait faire quelque chose au sujet du logement de ses membres. Il ne voulait pas de condominiums aux charges lourdes et qui immobilisait beaucoup de capital. Le modèle s'inspirait du logement coopératif à but non lucratif. Ça a bien marché. Ces gens ont acheté un terrain et embauché un architecte et ont fait construire trois bâtiments. L'emplacement et l'aménagement sont magnifiques. Vous pouvez avoir votre potager, si vous le voulez. Vous pouvez aussi profiter des espaces verts entretenus par d'autres. C'est relié au réseau de transport en commun. Dans la plupart des petites localités, il est difficile de vivre sans véhicule, mais pour eux, c'est possible et ils continuent d'avoir accès aux autres services locaux.
Le projet a été financé par la SCHL et c'est ce qui leur a ouvert la porte : ils ont pu faire construire sans le moindre capital. Ils ont fini de payer un des bâtiments, puis en ont mis un autre en chantier. Aujourd'hui, 30 ans plus tard, ils en ont trois. Voilà un exemple de ce que l'on peut faire.
La tranche supérieure du marché, les condos, va toujours s'occuper de la tranche supérieure. Ce sont les autres Canadiens qui doivent nous préoccuper, ceux qui pour une raison ou pour une autre n'ont pas les moyens de s'offrir un condo. Il nous faut un éventail d'options. M. Miller a parlé de Lifetime Homes, Lifetime Neighbourhoods. Si nous concevons des plans écologiques autour des options viagères, nous pouvons créer des communautés qui marchent.
M. Paterson : J'ai une observation au sujet des installations. Quand les fonds de Wintario coulaient à flots — je sais, parce que je fais partie d'un club d'anciens joueurs de hockey — à Woodstock et à Lambeth, le centre local regroupait une patinoire, une piscine, un centre du troisième âge et une bibliothèque. Les installations sont superbes et les personnes âgées s'en servent, suivent des cours de gymnastique et se servent du matériel tandis que leurs petits-enfants jouent dans la ligue de hockey des Timbits.
Ma deuxième observation fait suite à la question du sénateur Keon à propos de ce qu'il pourrait dire aux membres du cabinet pour les influencer. Nous allons avoir beaucoup de personnes âgées. Déjà, dans le mois qui vient de s'écouler, nous avons eu une crise au sujet de personnes âgées atteintes de maladies chroniques et qui occupent des lits d'hôpitaux. D'autres malades étaient dans le couloir parce qu'il n'y avait plus de place aux soins de longue durée. La recherche montre une réduction de 50 p. 100 du risque d'avoir besoin de soins de longue durée chez ceux qui sont modérément en forme. Une forme physique moyenne réduit de moitié les risques d'avoir besoin de soins de longue durée. C'est parce que beaucoup de gens se retrouvent aux soins de longue durée non pas à cause de dysfonctions cognitives, mais parce qu'ils ne peuvent plus marcher.
Nous avons trois sénatrices ici. À 74 ans, vous allez vivre encore 15 ans. Les hommes sont malins : ils meurent. Sur ces 15 ans, vous pouvez vous attendre en moyenne à en passer six aux soins de longue durée. Quand une femme atteint l'âge de 85 ans, elle ne peut pas sortir d'une chaise sans s'appuyer sur les accoudoirs. Elle ne peut pas se tenir debout : ses jambes ne sont pas assez fortes. Quand on voit des gens qui célèbrent leur 100e anniversaire à la télé, il est très rare qu'on les voit debout ou en train de souffler des bougies. Nous perdons de la mobilité et finissons aux soins de longue durée. On peut éviter cela grâce à l'activité physique. C'est cela que je dirais au cabinet.
M. Witcher : J'ai une courte observation ou peut-être une solution pratique. L'essence de la question est : qu'est-ce que le gouvernement fédéral peut faire. J'y ai pensé et je songeais à des subventions fédérales qui pourraient être versées aux municipalités désireuses de mieux s'adapter aux aînés. Si l'on s'y prend comme il faut, l'idée pourrait avoir du succès.
Mme Gallagher : J'aimerais intervenir sur ce point. L'Union des municipalités de la Colombie-Britannique, grâce à des subventions du gouvernement provincial, offre une subvention de 5 000 $ à toute localité qui souhaite tenir une assemblée et des consultations afin d'évaluer si elle est adaptée aux aînés. Deux collègues et moi-même avons reçu du financement du gouvernement pendant trois ans à titre d'équipe de mise en œuvre à l'intention des localités adaptées aux aînés. Nous avons travaillé avec la communauté pour évaluer ses besoins. Une autre subvention de 35 000 $ est offerte à toute localité qui élabore un projet, comme le fait d'installer plus de bancs publics, des toilettes à l'intention des personnes âgées ou de faire d'autres petits aménagements destinés à faciliter la vie des personnes âgées.
Mais ça ne suffit pas. Les gens à qui j'ai parlé au gouvernement provincial m'ont dit qu'il serait bon que le gouvernement fédéral appuie l'initiative et la fasse connaître au reste du pays. Cela se ferait sans doute au moyen d'un transfert de fonds plutôt que de programmes directs. Il faudrait toutefois que les sommes soient réservées exclusivement à cette fin pour mettre en évidence cette contribution précieuse.
On peut faire beaucoup de choses au niveau municipal. C'est là où l'on s'occupe des questions locales. Elles varient selon les régions du pays. Il n'y a pas de solution universelle. On ne peut pas établir de normes d'adaptation aux aînées qui conviennent à toutes les municipalités. Les solutions doivent être locales.
Il faut aussi trouver le moyen d'assurer que la voix des aînées sera entendue dans la durée. Ça ne peut pas être ponctuel et sans lendemain. Il est important d'avoir des conseils consultatifs locaux dynamiques composés d'aînés pour assurer la pérennité des progrès. Cela leur permet de se faire entendre quand il est question d'aménagements et quand il faut décider où affecter les budgets municipaux et quels travaux publics sont nécessaires pour rendre la communauté plus conviviale pour eux.
Il ne faut pas se contenter d'une campagne qui a du succès cette année parce que c'est l'Organisation mondiale de la Santé qu'il l'a lancée. Il faut songer à des changements structurels dans la société pour faire en sorte que les ingénieurs locaux et les localités prennent des décisions au sujet des promenades, des sentiers, des trottoirs et le reste et consultent les aînés et les autres qui se servent de ces aménagements pour s'assure qu'ils répondent à leurs besoins à long terme.
Le sénateur Cools : Je remercie les témoins de leurs exposés remplis de sensibilité et de compassion. C'est un sujet si important et d'une telle ampleur que je dois aussi remercier la sénatrice Carstairs et le sénateur Keon de nous avoir emmenés dans ce débat important sur cet aspect essentiel de l'activité humaine : le vieillissement.
Je veux rappeler publiquement une demande que j'ai faite lors de la dernière réunion quand nous sommes tombés par hasard sur ce que vous avez appelé la conception universelle. La dernière fois, j'ai signalé que les architectes et les constructeurs d'habitation sont prêtes à répondre aux besoins qui se font jour, par exemple, le fait que beaucoup couples veulent que la chambre à coucher principale soit au rez-de-chaussée. C'est une nouvelle tendance que je constate. De plus, beaucoup de familles veulent maintenant un appartement accessoire que peuvent occuper leurs enfants en attendant.
J'ai demandé aux témoins s'ils avaient des données ou des éléments qui montraient que la société répondait à ces nouveaux besoins. Ils ont dit ne pas en avoir, mais ils étaient certains que cela se faisait. Ils ne pouvaient pas encore le mesurer. Ils ont dit que nous devrions faire venir des témoins qui pourraient nous aider à étudier cette question. J'aimerais remettre cette question sur le tapis.
Les créateurs, les urbanistes et les promoteurs immobiliers voudront peut-être en parler. Ça me semble parfaitement raisonnable et naturel. Dans les annonces de maisons à vendre, je vois souvent maintenant qu'il y a un appartement accessoire. Dans la maison où j'habite, la chambre principale se trouve au rez-de-chaussée. Ça me semble éminemment censé pour les gens de mon âge et plus âgés.
Je veux faire suite aux questions du sénateur Keon. Il serait instructif pour nous d'étudier la planification et la conception urbaines. Les témoins d'aujourd'hui nous ont rendu un grand service. Si nous devions faire des recommandations au sujet de l'aménagement domiciliaire, nous apprendrions peut-être que beaucoup de choses sont déjà en branle et qu'il ne manque qu'un appui parlementaire ou politique.
Beaucoup de ces installations existent déjà désormais. Nous n'en sommes même pas conscients. Il y a des rampes d'accès pour fauteuil roulant. Depuis des années, dans les maisons où je suis allée, la salle de bain est au rez-de- chaussée. Il y a quelques années, c'était révolutionnaire.
La présidente : La SCHL a comparu devant nous et nous a donné de l'information. Une grande partie des habitations du pays sont financées par les prêts hypothécaires de la SCHL. Elle fixe certains critères qui peuvent être déterminants.
Le sénateur Cools : Je pensais à un constructeur comme Tamarack Homes et d'autres. Beaucoup de promoteurs sont tournés vers l'avenir. Leur vocation est de gagner de l'argent et souvent ce sont eux qui sont à la tête du marché.
Monsieur Paterson, vous êtes dans le monde du mouvement. Vous avez dit kinésiologie.
M. Paterson : Oui.
Le sénateur Cools : L'autre mot, c'est mouvement : le mouvement du corps. La science du mouvement est merveilleuse. Le contraire du mouvement, après tout, c'est l'inertie — l'immobilité ou l'absence de vie. Je vous remercie d'avoir fait figurer ces mots dans le compte rendu d'aujourd'hui.
Vous avez tous dit que dorénavant, nous devons aborder la vie avec beaucoup plus de sensibilité à l'égard des besoins des humains et du manque de compréhension des humains vis-à-vis de leurs propres besoins. Il est difficile pour quelqu'un qui a 20 ans de s'imaginer à 60 ans ou même à 40 ans. Vous posez une question importante et profonde : comment aide-t-on l'être humain à s'imaginer et se projeter dans l'avenir et à deviner ce que seront ses besoins dans quelques années à peine? C'est une question profonde.
Je pense que les gens vont vieillir comme ils ont vécu. Ceux qui comme moi font beaucoup d'exercice et se lèvent tôt continueront à se lever tôt et à faire de l'exercice. La vraie question est de savoir comment le comité peut faire avancer l'idée que nous devons faire en sorte que les êtres humains comprennent leur propre nature et leur essence et que le vieillissement est une partie naturelle de la vie. Si vous étiez dans le domaine du sport, vous sauriez qu'un sportif est vieux dès l'âge de 25 ans. Du point de vue des politiques gouvernementales, comment peut-on introduire ce concept dans l'élaboration des politiques et comment pouvons-nous peut-être influencer les ministères compétents de manière à ce qu'ils épousent cette formule?
Il y a quelques jours, un merveilleux médecin pour qui j'ai de l'affection m'a dit : « La seule façon dont je peux répondre à votre question, sénateur, c'est de dire que je suis devenu vieux trop tôt et intelligent trop tard. » Il y a dans cette question une dimension et une dynamique philosophique et spirituelle que nous sommes appelés à contester.
M. Paterson : Il n'est jamais trop tard pour commencer. Même si je continue à jouer au hockey parce que je le faisais quand j'étais jeune, au centre nous avons fort bien réussi à incorporer des non-sportifs à nos programmes.
Le premier programme que nous avons offert il y a 20 ans s'appelait « Retirement Research ». Il était réservé exclusivement aux hommes et se donnait dans l'année où ils allaient prendre leur retraite. On les mettait au hasard dans un groupe de contrôle ou un groupe d'exercice. Pour avoir parlé à ces hommes, je sais que beaucoup d'entre eux ne voulaient pas faire partie du groupe d'exercice. Ils imaginaient de l'entraînement militaire. Ils ont dit : « J'espère que je ne me retrouverai pas dans ce groupe d'exercice où l'on compte comme à l'armée. » Une fois dans le programme, ils ont adoré cela. À la fin du programme, le groupe de contrôle voulait faire partie du programme d'exercice. L'étude était terminée, mais 19 ans plus tard le groupe existe toujours. L'université leur permet de faire leurs exercices sur la piste et sur la patinoire. Il y en a qui ne voulaient pas faire de l'exercice. Aujourd'hui, 20 ans plus tard, le club est toujours actif et n'a plus rien à voir avec les chercheurs.
Si nos méthodes sont fortes, une fois que les personnes âgées se sont rendu compte qu'il n'est pas trop tard pour commencer et une fois qu'elles en font partie, elles vont adorer cela. Il y a d'abord le contact social, comme d'autres l'ont dit. On ne peut pas expulser ces gens du centre. Nous voulions faire venir les gens, leur montrer comment participer, les transformer en accros de l'exercice, puis les renvoyer dans leur milieu. Mais ils refusent tout net. Ils reviennent sans cesse au centre parce que c'est là que se trouve leur réseau de connaissance. Ils vont voir des matches des Blue Jays et organisent des vins et fromage. Il est remarquable de voir des gens qui, avant, ne faisaient qu'une seule chose par jour et qui aujourd'hui en font plusieurs. S'ils avaient un vin et fromage dans leur soirée, ils se reposaient tout le reste de la journée. Aujourd'hui, ils viennent faire leurs exercices le matin, vont assister au match des Blue Jays dans l'après-midi et reviennent à London à temps pour le vin et fromage en soirée. C'est revigorant.
Le sénateur Cools : L'un des défis auxquels nous devons faire face consiste à orienter les politiques publiques afin de favoriser l'activité physique comme mode de vie.
Par exemple, un député tenait beaucoup à la notion de sport amateur. Selon lui, appuyer les sports amateurs serait la meilleure chose pour le pays. Il a dit que les sports amateurs attirent de nombreux bénévoles qui, en plus d'appuyer les athlètes amateurs, deviendront eux-mêmes actifs physiquement. Selon lui, le meilleur investissement que le gouvernement pouvait consacrer à la santé de la collectivité consisterait à donner davantage pour appuyer les sports amateurs.
Une telle idée s'inscrit-elle dans vos réflexions?
M. Paterson : Je n'y avais pas pensé. Ça semble être une bonne idée. Je me souviens aussi de Roland Michener. Je suis assez vieux pour me souvenir d'avoir lu quelque chose au sujet de sa course dans le journal. Si le sénateur Carstairs pouvait passer dans les journaux en raison d'une course, nous aurions probablement gain de cause.
Le sénateur Cools : Une balade en vélo serait peut-être mieux.
Mme Gallagher : Il faut différentes approches ciblées pour les différents publics. On ne peut pas adopter une seule approche.
Par exemple, nous avons créé un programme appelé SAIL, ou « Seniors Active in Independant Living », pour lequel j'ai proposé la candidature de ma collègue, le Dr Vicky Scott, pour le Prix de l'application des connaissances des IRSC, qu'elle a obtenue cette année. Grâce à ce programme, nous avons travaillé avec des aides de maintien à domicile, soit ceux qui se rendent sur place et aident les bénéficiaires de service de soins à domicile à se laver. Les aides de maintien à domicile réalisent une évaluation des risques de chute et, grâce à cela, procèdent à des interventions. Il peut s'agir, par exemple d'un programme simple d'exercice à la maison que le travailleur fait pendant dix minutes avec le bénéficiaire des soins à domicile.
Ces aides de maintien à domicile sont parmi les travailleurs des soins de santé les plus sous-utilisés au pays. Ils reçoivent peu ou pas de formation, leur salaire se situe tout au bas de l'échelle et on ne reconnaît pas leurs efforts lorsqu'ils détectent des signes précoces de démence, de fragilité et d'autres problèmes. Ils pourraient faire beaucoup, avec un peu plus de formation.
Par exemple, grâce au programme, ils ont été en mesure d'identifier les risques de chute au point où, dans notre première étude, nous avons vu une réduction de 44 p. 100 des chutes parmi les gens qui avaient reçu des services de ces travailleurs qualifiés, dans le cadre du programme. Les aides font dix minutes d'exercice physique lors de chaque visite. Cela prenait dix minutes de plus. Aucune des organisations de service de soutien à domicile ne se préoccupait des conséquences économiques du temps que cela prenait. Elles ont dit que cela valait la peine. Cela donnait aux aides les connaissances, la formation et les renseignements dont ils avaient besoin pour travailler avec l'une des populations les plus à risque et les plus difficiles que nous avons. Les gens adoraient le programme.
Un certain nombre de clients ont été en mesure d'aller plus loin et de participer à un groupe d'exercice dans leur immeuble, par exemple, si un tel groupe existait. Certains ont décidé de se rendre dans un centre de loisir du voisinage et de participer à un programme de conditionnement physique. Toutefois, pour commencer, il a fallu que les aides de maintien à domicile passent dix minutes à chaque visite pour faire des exercices de base de souplesse, d'entraînement musculaire et de mobilité. Cela s'est avéré très fructueux.
Aujourd'hui, tous les organismes de santé en Colombie-Britannique adoptent ce programme et le présentent à leurs aides de maintien à domicile. Toutefois, il s'agit aussi d'une excellente idée qui pourrait faire une grande différence à l'échelle nationale pour ce groupe de population.
Il faut adopter une approche différente pour chaque groupe. Une campagne publique massive qui dit « Allez au gym » ne fonctionnera pas pour les aînés dont la santé est fragile, qui vivent à la maison et qui reçoivent des services à domicile. En outre, l'approche dont j'ai parlé ne fonctionnera pas pour ceux qui sont très actifs et qui participent aux activités communautaires. Par conséquent, les approches doivent être adaptées à la situation réelle de ceux que vous tentez de cibler.
Le sénateur Cools : Il serait bien de pouvoir aider à susciter la perception, au sein du système scolaire, que la mobilité et l'activité sont positives et doivent être appuyées dans tous les domaines.
Mme Gallagher : Je suis d'accord. Il existe deux bons moments pour commencer à faire de l'exercice : quand on est jeune et aujourd'hui.
Le sénateur Cools : C'est très bien. Vous me rappelez l'homme qui a dit : « Où est le problème? Arrêter de fumer, c'est facile. Je le fais tous les jours. »
Y a-t-il autre chose à dire au sujet de ce concept que l'activité physique doit faire partie intégrante de la vie quotidienne?
M. Scott : Vous avez mentionné des concepts très importants sur la façon dont nous envisageons l'activité et dont nous nous préparons afin de ne pas devenir des aînés fragiles trop tôt. Dans une discussion précédente, M. Witcher a indiqué que la population qu'il étudiait avait un mode de vie rural très actif, dans le cadre duquel l'exercice se faisait pendant le travail quotidien; à la fin de la journée, les gens avaient terminé leurs activités grâce à cet exercice naturel.
La société devient de plus en plus sédentaire. Je pense que nous passons plus de temps devant l'ordinateur que nécessaire. C'est mon cas, du moins. Cela fait partie de notre vie et nous permet de communiquer, entre autres, mais il s'agit d'un mode de vie sédentaire. Nous devons être plus actifs.
Les avantages de l'exercice du point de vue de la santé mentale étaient mentionnés dans votre rapport, mais nous n'en avons pas beaucoup parlé aujourd'hui. Il ne faut pas faire fi de ce concept. Les données scientifiques existent. De nombreuses études ont prouvé qu'une heure d'activité physique fonctionne aussi bien que des médicaments pour certains patients, en particulier ceux qui souffrent de dépression. Il y a donc définitivement un lien entre une vie active et une vie saine. Nous avons parlé de la composante sociale. Ici aussi, nous avons vu l'exercice naturel, lorsque nous rencontrons des gens pendant la journée, en particulier lorsqu'on vit dans un foyer où il y a de nombreuses personnes représentant plusieurs générations.
L'isolement social est une réalité dans notre environnement. La vie et l'apprentissage actifs favorisent un plus grand nombre de contacts sociaux et réduisent l'isolement. Votre rapport en fait clairement mention, ce qui est important.
Comment pouvons-nous veiller à ce que l'exercice ne devienne pas un handicap? Nous avons tous entendu parler de ceux qui ont les articulations abîmées à force de trop s'entraîner et de faire trop d'exercice.
Le sénateur Cools : C'est mon cas.
M. Scott : Il existe maintenant toute une série d'activités à faible impact, comme l'aquaforme, les exercices en piscine, ce genre de chose. De nombreux éléments prouvent qu'il est en fait possible de prévenir la fragilité chez les aînés. Nous pouvons favoriser les éléments qui réduisent l'isolement. Cela a des effets bénéfiques, tant du point de vue physique que mental.
Le sénateur Cools : Madame la présidente, peut-être pourrions-nous renforcer les domaines pertinents.
La présidente : Nous en discuterons plus tard.
Le sénateur Chaput : Ma question est très brève et porte sur les bénévoles. Madame MacKenzie, je crois vous avoir entendu dire que la majorité des aînés qui se portent bénévoles ont un revenu moyen et que les aînés qui ont un faible revenu ne semblent pas se porter bénévoles autant. Y a-t-il eu des études à ce sujet?
Mme MacKenzie : Je ne parlais pas particulièrement des aînés, mais, en général, de la population de bénévoles, dont les revenus sont plus élevés et qui ont une formation universitaire.
Le sénateur Chaput : Vous parlez des bénévoles, pas nécessairement des aînés?
Mme MacKenzie : Oui.
Le sénateur Chaput : Vous ne dites pas que c'est le cas parmi les aînés?
Mme MacKenzie : C'est exact.
Le sénateur Chaput : Lorsque vous avez parlé des bénévoles et de leurs besoins, vous avez parlé de l'importance des coordonnateurs.
Mme MacKenzie : Oui.
Le sénateur Chaput : Pourriez-vous en parler un peu plus?
Mme MacKenzie : Il est particulièrement important d'avoir un gestionnaire des bénévoles parmi le personnel d'une organisation ou comme responsabilité dans une organisation qui n'a pas de personnel. Il faut que les bénévoles soient bien gérés. Les postes des bénévoles doivent être conçue de façon à apporter une contribution significative à la mission d'une organisation. On a parlé plus tôt du dévouement à une cause particulière, ce qui est vrai, en particulier, au sujet de la raison pour laquelle les gens se portent bénévoles. Il est important que les bénévoles puissent faire usage de leurs compétences de façon à contribuer directement à la cause. Il est important de concevoir des postes bénévoles qui sont liés à la raison d'être d'une organisation.
Les gens sont de plus en plus occupés. Ils veulent être certains que lorsqu'ils font don de leur temps à une organisation, celui-ci sera bien utilisé. Ils veulent être reconnus. C'est la semaine de l'action bénévole. Il s'agit du moment parfait pour remercier les bénévoles pour leur contribution. Il est essentiel, au sein d'une organisation, de se doter d'une personne qui comprend les éléments psychosociaux qui poussent les gens à se porter bénévoles et ce qu'ils souhaitent tirer de leur bénévolat; cette compétence est souvent sous-évaluée au sein d'une organisation, tout comme l'infrastructure générale et l'appui au bénévolat le sont généralement dans les organisations. Il s'agit d'une composante essentielle dans toute organisation.
Le sénateur Chaput : Selon vous, comment cette composante essentielle peut-elle être mise en place? Avez-vous des idées au sujet de la meilleure façon de procéder?
Mme MacKenzie : La gestion des bénévoles est une profession reconnue. Ici aussi, il est essentiel de continuer à reconnaître l'importance de ce leadership en ce qui a trait au bénévolat, comme une composante fondamentale d'une organisation. Il faut comprendre que même si le bénévolat est indissociable de qui nous sommes, dans bien des cas, il faut y penser et le cultiver. Souvent, les gens ne font pas don de leur temps, à titre de bénévole, parce que personne ne le leur a jamais demandé. Les gens doivent savoir que le bénévolat est essentiel et exige des connaissances, de l'analyse, de la recherche, de la compréhension, des outils et des ressources afin de maximiser le recrutement des bénévoles, mais également pour maximiser la contribution des bénévoles.
Le sénateur Chaput : Cela m'amène à vous parler d'un programme qui a été créé il y a quelques années. Je ne me souviens pas de son nom, mais il consistait à former des bénévoles. Un comité sénatorial a rencontré des aînés à l'Île- du-Prince-Édouard. L'idée n'était pas de discuter des problèmes touchant les aînés, mais il y avait des aînés dans la salle. Ils parlaient de la formation des bénévoles. Trois dames âgées disaient : « Nous n'avons pas besoin de venir ici et qu'on nous dise ce qu'est le bénévolat. Nous voulons faire quelque chose. » Nous avons entendu la même chose ailleurs. Ils veulent faire quelque chose de significatif à leurs yeux, mais il faut que ces efforts soient coordonnés afin que cela réponde à leurs besoins.
Mme MacKenzie : C'est vrai. De plus en plus, par contre, les postes volontaires exigent certaines compétences. Les organisations de bénévoles cherchent des gens qui ont des compétences précises pour réaliser des tâches précises, ou elles recrutent de jeunes gens qui veulent acquérir des compétences précises grâce à des contributions volontaires. Dans ce cas, la formation est extrêmement importante.
Le sénateur Chaput : Le font-ils également dans le cas des aînés?
Mme MacKenzie : Tout à fait. La génération des baby boomers a apporté une partie des premiers changements à la participation des bénévoles. De plus en plus, nous constatons que les gens qui font partie de ce groupe d'âges ont peu de temps à consacrer : ils veulent une plus grande souplesse pendant leurs heures de bénévolat, ils veulent savoir qu'ils viennent pour une période de temps définie, ils veulent faire quelque chose de très précis et ils veulent que leur contribution ait le plus d'impact possible.
Le sénateur Mercer : J'aimerais poursuivre la discussion sur les bénévoles et leur formation. Une façon d'y arriver est liée à ce que nous faisons à la fin du processus, à la façon dont nous les remercions, à la façon dont nous les reconnaissons, à la façon dont nous veillons à ce que leurs compétences soient mises à contribution. Les gens ont des compétences différentes à offrir dans le cadre de leur bénévolat, et il faut apprendre à les maximiser. Madame MacKenzie, vous avez tout à fait raison de dire que nous devons reconnaître les gens qui gèrent également ces aspects, parce que la coordination des bénévoles est une partie très importante du processus.
Comme vous le savez, il est absolument essentiel que le bénévolat soit amusant. Il faut que ce soit agréable. Vous ne comptez probablement pas le nombre de bénévoles qui participent au processus politique. S'ils sont honnêtes, tous les partis politiques vous diront que le nombre de personnes qui travaillent bénévolement pour les partis politiques diminue. En politique, on dépend de plus en plus des professionnels. Il y a moins de gens qui font du porte-à-porte et plus de gens des agences de télémarketing qui vous appellent.
Il s'agit d'une question liée à la reconnaissance et à la mesure du temps et de la valeur. Bénévoles Canada peut vraiment nous aider à cet égard. Je sais que pendant les années que j'ai passées au Y, nous mesurions toujours le temps de nos bénévoles de façon très minutieuse et nous tentions d'y attribuer une valeur. Ainsi, les professionnels qui dirigeaient l'organisation constataient ce que cela signifierait que de remplacer les bénévoles par du personnel rémunéré.
Si nous devions remplacer les bénévoles par des employés rémunérés dans chaque province ou chaque collectivité au pays, rien ne se ferait. Nous ne pourrions pas nous le permettre; les bénévoles font en sorte que tout fonctionne.
Mme MacKenzie : C'est tout à fait vrai. J'ai une statistique qui me revient sans cesse en tête, parce que j'ai réalisé quatre entrevues ce matin : des centaines de milliers de bénévoles travaillent dans nos organismes de bienfaisance dans le domaine de la santé et dans le système de santé. On estime que le travail bénévole a une valeur de plus de 20 milliards de dollars. Vous avez donc tout à fait raison : on ne peut pas le remplacer.
Vous avez parlé du processus démocratique. À chaque élection fédérale, environ 40 000 personnes participent et appuient le candidat de leur choix et participent au processus démocratique dans son sens le plus large. C'est absolument essentiel; il est également essentiel d'obtenir de telles mesures. Cette question est liée aux bailleurs de fonds, au gouvernement et à la valeur de nos programmes.
Il y a également un autre aspect qui est essentiel. J'adore reprendre ce qu'Albert Einstein a dit : ce qui compte ne peut pas toujours être compté et ce qui peut être compté ne compte pas forcément. Je pense que lorsqu'on parle de la valeur des bénévoles pour assurer le processus démocratique au pays, on ne peut pas vraiment attribuer une valeur monétaire à cela. Par exemple, la différence entre le déroulement d'une élection au Canada et au Zimbabwe est souvent liée aux bénévoles, et il est impossible d'attribuer une valeur monétaire à cela.
Si on pense au travail en centre de soins palliatifs, quelle est la valeur, en dollars, attachée au fait de tenir la main d'un enfant mourant? Je pense que c'est extrêmement important; et je pense que Bénévoles Canada est bien placé pour jouer un rôle de leadership dans ce domaine. Toutefois, il est aussi absolument nécessaire de reconnaître qu'il ne s'agit pas simplement de la valeur quantitative; il faut tenir compte avant tout de la valeur qualitative.
Ces histoires concernant la signification du bénévolat pour notre tissu social, notre qualité de vie et notre mode de vie devraient être évaluées au même titre que la valeur économique du bénévolat. Je vais m'en tenir à cela.
Mme Gallagher : Nous avons tendance à voir le travail rémunéré et le bénévolat comme deux choses entièrement distinctes. Il y a peut-être des domaines où les choses sont moins claires, où il y a des chevauchements, et il y aurait des occasions d'attirer des personne à revenu plus faible ou des personnes qui ont éprouvé des difficultés économiques dans le secteur du bénévolat en leur offrant des petites allocations pour une partie de leur travail. Nous pourrions peut-être réaliser quelques projets pilotes et voir les résultats. Il ne s'agit pas simplement d'un choix entre l'un ou l'autre.
Je sais que vous devez composer avec des syndicats et une mentalité qui remonte à des lustres voulant que le bénévolat soit toujours gratuit. Mais il y a peut-être une certaine marge de manœuvre. Nous n'avons aucune difficulté à utiliser une échelle mobile pour déterminer la valeur des services que reçoivent les personnes âgées, alors pourquoi ne pas utiliser une échelle mobile quelconque pour déterminer la valeur des services qu'ils offrent aux autres?
Je ne veux pas ouvrir une boîte de Pandore aujourd'hui, mais nous avons peut-être besoin de voir les choses d'un œil différent pour l'avenir si nous voulons attirer de nouveaux bénévoles.
La présidente : Je tiens à vous remercier tous, parce que vous avez chacun et chacune apporté une contribution spéciale aujourd'hui. Il faudra que je repense ma propre allergie, étant donné que je ne veux pas me retrouver dans un de ces établissements de soins de longue durée.
En ce qui concerne l'inclusivité et le bénévolat, ce que nous avons entendu, c'est qu'on peut être plus circonspect et faire plus attention tout en demeurant actif. Je ne crois pas qu'il s'agit de deux extrêmes. Je me souviens d'avoir suggéré, dans le cas de mon beau-père, qu'il fallait vraiment enlever les carpettes parce qu'il n'arrivait plus à soulever les pieds suffisamment. Mais cela ne voulait pas dire que je souhaitais qu'il ne lève plus du tout les pieds. Toute l'idée du design urbain et de conception universelle inclusive était extrêmement importante.
Ce que vous avez dit, monsieur Witcher, concernant le vieillissement qu'on s'impose nous-mêmes était des propos très importants qu'il fallait qu'on entende. C'est évident qu'en tant qu'enseignante, il est extrêmement important pour moi de promouvoir l'éducation, et l'apprentissage continu pendant toute la vie est très important.
Je ne crois pas qu'il y ait un seul politicien autour de la table qui ne comprenne pas la valeur du bénévolat. Comme le président de ma campagne électorale a dit, les députés sont les seuls qui peuvent décrocher un poste avec l'aide de 500 à 1 000 personnes. C'est la vraie nature de la politique. J'ai été élue plusieurs fois et je comprends la valeur du bénévolat.
Je vous remercie tous. Vous étiez un groupe très intéressant et j'espère que vous allez voir beaucoup de vos idées dans notre rapport final.
Le comité poursuit ses travaux à huis clos.