Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts
Fascicule 4 - Témoignages du 12 février 2008
OTTAWA, le mardi 12 février 2008
Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts se réunit aujourd'hui à 19 h 6 pour examiner, en vue d'en faire rapport, la pauvreté rurale au Canada.
Le sénateur Joyce Fairbairn (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente : Bonsoir, honorables sénateurs et chers téléspectateurs. Bienvenue à cette séance du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts sur la pauvreté rurale et le déclin rural.
Nous sommes très heureux ce soir d'être en présence, par vidéoconférence depuis l'Australie, de M. Peter Kenyon, fondateur et directeur de Bank of I.D.E.A.S., société australienne d'experts-conseils créée en 1990 dans le but d'aider les collectivités à évaluer, à concevoir et à mettre en œuvre des politiques et des stratégies de développement économique. Merci, monsieur Kenyon, d'avoir pris le temps de vous joindre à nous ce soir.
En mai 2006, le comité a été autorisé à examiner, en vue d'en faire rapport, la pauvreté rurale au Canada. Entre- temps, il a produit un rapport provisoire. Nous avons parcouru toutes les provinces du Canada. Nous nous sommes rendus dans 17 collectivités rurales et avons rencontré plus de 260 personnes et organisations, mais notre tâche n'est toujours pas achevée.
La semaine prochaine, certains d'entre nous iront dans le Nord du pays, où il fait très froid, pour entendre les préoccupations des résidants et des organisations de ces collectivités rurales nordiques.
Les régions rurales aux quatre coins du globe subissent des transformations. Le Canada ne fait pas cavalier seul parmi les pays développés, et nous devons prendre conscience de l'état actuel et futur de nos régions rurales. Il est donc important d'examiner la façon dont les autres pays ont abordé la pauvreté rurale et le déclin rural, par l'entremise de politiques, de programmes et de stratégies.
Il y a beaucoup de similitudes entre l'Australie et le Canada, notamment : un vaste territoire, des villes densément peuplées et en expansion, des régions rurales peu densément peuplées, une culture anglo-saxonne, des populations autochtones et minoritaires importantes, une structure fédérale, d'importantes richesses économiques, notamment des ressources naturelles, et j'en passe.
Compte tenu de ces similitudes, il n'est pas étonnant que la nature de la pauvreté rurale et du déclin rural en Australie ressemble à celle du Canada.
Nous sommes très heureux de compter parmi nous M. Kenyon, qui a donné un coup de main aux collectivités rurales d'un bout à l'autre de l'Australie. Son expertise l'a amené à parcourir plusieurs pays, notamment le Sud-Est et le Centre de l'Asie, le Sud de l'Afrique, les îles du Pacifique, la Nouvelle-Zélande, l'Europe occidentale, les États-Unis, le Moyen-Orient et même le Canada.
C'est dommage que vous ne puissiez pas être à nos côtés ce soir. Vous auriez pu constater à quel point il fait froid. Nous disposons d'une heure avec M. Kenyon pour aborder un vaste éventail de points.
Peter Kenyon, directeur, Bank of I.D.E.A.S. : Merci beaucoup. Je suis ravi d'être parmi vous. À Perth, la température est aux antipodes de la vôtre étant donné qu'il fait actuellement 38 degrés. C'est une journée très chaude.
C'est un honneur pour moi de discuter avec vous de cette question que nous avons en commun, soit le développement rural et les préoccupations liées à la pauvreté et au développement économique.
Brièvement, je possède de l'expérience en enseignement et en développement des jeunes, principalement en milieu rural. Pendant de nombreuses années, j'ai occupé le poste de directeur responsable de l'embauche du gouvernement de l'État. Par conséquent, les questions liées à l'emploi et au développement économique me tiennent à cœur.
Comme vous l'avez mentionné, en 1990, j'ai participé à la mise sur pied de la société Bank of I.D.E.A.S., un acronyme qui signifie Initiatives for the Development of Enterprising Actions and Strategies. Notre mission est d'établir comment favoriser le développement de collectivités saines et l'entrepreneuriat dans les économies locales, en mettant à contribution les jeunes dans des rôles de premier plan.
Nous avons l'habitude de travailler avec une vaste gamme de collectivités, y compris les collectivités urbaines, mais je m'intéresse particulièrement aux collectivités rurales de petite taille, me passionnant pour celles en déclin — comme c'est probablement le cas chez vous, d'une certaine manière.
Je pense qu'ici, en Australie, quelque 70 p. 100 de nos petites collectivités rurales intérieures sont bel et bien en péril. Leur population diminue et leurs entreprises ferment leurs portes; et il est évident que les jeunes ne veulent pas passer leur vie dans de telles collectivités. J'ai à cœur la promotion des points forts et des points d'intérêt de ces collectivités ainsi que des avantages qu'elles offrent sur le plan social et sur le plan économique. Tout comme au Canada, il s'agit certainement d'une bataille que nous devons mener.
Nous faisons face au même défi fondamental que vous : l'avenir n'est plus ce qu'il était pour les petites villes et les régions rurales. Au début des années 1900, lorsque nous sommes devenus une fédération, la majorité des gens, soit près de 55 p. 100 de la population, vivait dans des fermes et des petites villes de l'ensemble du pays. Toutefois, de nos jours, nous assistons à un retour du pendule.
On entend souvent dire que seule la Belgique est plus urbanisée que notre pays. Nous sommes assurément un des pays ayant la plus importante population côtière. Environ 84 p. 100 de notre population habite dans dix villes, et près de 90 p. 100 habite à cent kilomètres ou moins de la côte. L'Australie est devenue un pays incroyablement urbanisé et comptant une importante population côtière malgré l'étendue et la superficie de son territoire.
Le déclin démographique que connaissent les collectivités rurales entraîne également d'autres problèmes pour elles. Ce déclin, tout comme le vieillissement de la population, constitue un grave problème. Je crois que l'un des problèmes les plus importants est la pénurie grandissante de main-d'œuvre qualifiée.
Bon nombre de nos métiers traditionnels ont également disparu. À l'origine, les régions rurales étaient fortement axées sur l'agriculture. Cependant, la situation évolue, surtout en ce qui a trait aux emplois. On estime qu'il y a environ 100 000 emplois de moins dans les fermes qu'en 1970. Il y a de moins en moins d'emplois traditionnels liés à l'agriculture, et je pense que la proportion de ceux qui travaillent dans une ferme est en chute.
Également, depuis la Seconde Guerre mondiale, il est question d'élaborer des politiques de développement régional. Il s'agit là d'un objectif majeur des gouvernements d'État comme du gouvernement fédéral. L'appellation est ici quelque peu erronée. Il serait préférable de parler de politique de développement de centres régionaux. Nous avons été témoins du développement d'importants centres régionaux dans les régions rurales. Beaucoup sont toujours en expansion, et l'Australie en compte un nombre important. Toutefois, bien des petites villes environnantes dépérissent.
Le terme qu'utilisent les collectivités rurales pour désigner ces centres est « collectivités éponges », car ils attirent la population et les entreprises établies dans les environs. Les gens partent habiter dans ces centres et on assiste à la rationalisation et à la régionalisation des emplois, des entreprises et, particulièrement, des services gouvernementaux et bancaires, qui sont concentrés dans ces centres. Cela a manifestement un impact majeur sur l'ensemble des petites villes de l'Australie.
On assiste également en Australie à un déplacement massif vers la côte; le terme « retour à la région côtière » est souvent utilisé pour décrire ce phénomène. Nombreux sont ceux qui s'y installent, en provenance non seulement des régions rurales, mais aussi des banlieues. Les collectivités côtières exercent un attrait particulier sur les baby-boomers à la retraite et sur d'autres. Bon nombre de ces collectivités se trouvent en région rurale. Elles ont cependant un caractère typiquement côtier contrairement aux villes intérieures de l'Australie. C'est probablement dans ces collectivités que l'accroissement de la population est le plus marqué, notamment pour le groupe des 50 à 70 ans, qui espèrent y trouver une bonne qualité de vie à leur retraite.
Il y a actuellement en Australie, dans une moindre mesure, ce que j'appelle un « retour à la campagne », où les gens manifestent un intérêt pour les villages et la philosophie de vie rurale. Ce phénomène est peut-être le fruit de la récente flambée des prix des maisons dans les principales villes. De nombreuses personnes cherchant à se loger à moindre coût ont décidé de s'installer dans les zones rurales, dont la plupart sont en périphérie des centres régionaux et des principales villes où ces gens se rendent pour travailler.
Nous avons donc un important problème de transport quotidien, puisque les gens quittent les petites villes pour se rendre quotidiennement dans les centres régionaux. Cette réalité entraîne des conséquences quant à la contribution de ces personnes dans les petites villes où elles habitent.
Pour ce qui est de la valeur du capital social, nous remarquons une baisse : beaucoup de gens partent tôt, reviennent tard et contribuent très peu à leurs petites villes. Il s'agit d'un véritable problème social sur lequel notre organisme s'est penché. Comment reconstituer la population, retrouver le capital social et recréer les liens sociaux au sein de ces collectivités?
J'ai mentionné que l'agriculture est toujours très importante comme valeur d'exportation au pays. Parlons de production économique : notre pays est toujours très fort en matière de production agricole. Par contre, l'agriculture n'occupe pas la main-d'œuvre ou la population comme par le passé.
Une politique gouvernementale est cruciale; nous avons tendance à croire que tout ce que l'on trouve en région rurale touche à l'agriculture, et ce n'est certainement pas le cas. Bien qu'il y ait toujours eu une relation entre la ferme et la campagne, je soupçonne que la majorité de la population qui vit en région rurale à l'heure actuelle n'est pas directement liée à l'agriculture.
La santé des petites villes est toujours importante pour ces fermes. Notre travail porte beaucoup sur cette réalité puisque nous croyons qu'il y a un lien entre la santé de la ferme et celle des petites villes. Ces petites villes sont très importantes en ce qui a trait à l'emploi à l'extérieur de la ferme. Dans la plupart des fermes en Australie, il faut qu'un membre de la famille travaille à l'extérieur. L'économie et la vie professionnelle dans ces petites villes sont des points importants. Une partie de notre travail traite particulièrement des façons d'explorer les emplois et le développement des entreprises à l'extérieur des fermes comme un point important lié directement à l'agriculture.
Nous constatons deux autres grands phénomènes économiques qui touchent les régions rurales de l'Australie. Premièrement, le tourisme prend de l'ampleur et s'apprête à devenir l'industrie la plus importante du pays, tout comme au Canada et partout dans le monde. Il s'agit certainement de l'industrie qui croît le plus rapidement, et les régions rurales de l'Australie offrent beaucoup d'atouts. Bon nombre de nos petites villes ont misé sur le tourisme et les débouchés économiques qui y sont associés. Compte tenu que 75 p. 100 des emplois dans cette industrie sont destinés aux personnes de moins de 25 ans, il s'agit d'une industrie importante à laquelle les collectivités doivent s'intéresser, pour la valeur des emplois, et particulièrement pour son attrait aux yeux des jeunes gens.
Deuxièmement, le secteur des ressources de l'Australie connaît, à l'heure actuelle, un immense essor. C'est probablement l'époque la plus prospère que ce pays ait jamais connue en matière d'exploitation minière. Nous avons toujours été une région minière, un peu comme le Canada. Or, l'appétit actuel des Chinois et, de plus en plus, des Indiens pour le minerai de fer, le pétrole, le gaz naturel, l'or et toute une gamme d'autres minerais signifie qu'un essor important est en cours. La plupart de ces exploitations minières se trouvent dans des régions isolées.
Cependant, comme pays, nous avons prôné le recours aux navettes aériennes pour les employés de passage. Cela signifie que, malgré l'essor, nous ne créons pas de collectivités. D'ailleurs, cet essor a un effet désastreux sur les collectivités avoisinantes puisque le prix des logements et des services, entre autres, a connu une hausse vertigineuse. C'est particulièrement le cas dans le Nord-Ouest de mon État, probablement la région qui connaît la plus forte activité minière. Bon nombre de nos collectivités rurales subissent un stress énorme simplement parce que ces travailleurs viennent y vivre pour une période de dix à 14 jours puis repartent.
Cependant, bon nombre d'entreprises d'exploitation minière achètent les parcs immobiliers. En effet, dans l'un des grands centres, elles ont acheté pratiquement tous les bars, les parcs de caravanes et les lieux d'hébergement. Cela a eu d'importantes conséquences et a fait grimper en flèche le prix des maisons et des loyers ainsi que le coût de la vie. Pour ceux qui n'ont pas prospéré par l'entremise de l'industrie, cela a eu des effets graves.
Enfin, aujourd'hui représente une date marquante dans l'histoire de l'Australie. Il y a environ une heure et demie, notre premier ministre et le parlement fédéral ont présenté des excuses à ceux que nous avons nommés la « génération volée » : des enfants indigènes enlevés à leurs foyers et leurs familles. Bon nombre d'entre nous sommes optimistes que cette demande de pardon symbolique marquera le début d'un mouvement visant à éliminer la pauvreté extrême chez les indigènes, en particulier dans les régions isolées et rurales de l'Australie. Leur espérance de vie est presque la moitié de celle des peuples non indigènes. Leurs niveaux d'emploi et d'éducation, selon tous les indicateurs, se situent bien au- dessous des niveaux nationaux et de tous les niveaux acceptables. Les conditions de logement, l'éducation et les possibilités d'emploi dans les régions rurales et particulièrement dans les collectivités éloignées où beaucoup des personnes indigènes habitent sont très mauvaises. C'est une situation qui inquiète bon nombre d'entre nous. Nous espérons que le geste symbolique du Parlement fédéral entraînera des mesures concrètes. Je dirais qu'il s'agit d'un aspect de la pauvreté rurale qui représente notre principal sujet de préoccupation à l'heure actuelle.
En ce qui concerne notre travail auprès des collectivités rurales, nous avons emprunté des idées des quatre coins de la planète. Nous avons surtout établi des liens avec le Nebraska, aux États-Unis, qui comporte beaucoup de ressemblances avec mon État, l'Australie-Occidentale. Nous avons grandement profité de beaucoup des mesures de développement économique communautaire instaurées par le Nebraska afin de contrer le dépeuplement des années 1980 et 1990.
Grâce à ces idées, nous avons établi un certain nombre de cadres de référence que nous avons tenté, à la Bank of I.D.E.A.S., d'instaurer et de mettre en valeur. En créant des liens avec des organismes gouvernementaux et avec un certain nombre de ministères d'États et de ministères fédéraux responsables des régions rurales, nous avons eu l'occasion d'influencer les politiques, et, de façon plus importante, les stratégies. Je crois beaucoup aux politiques et à la création d'un cadre de travail. Néanmoins, je suis beaucoup plus enthousiasmé par la mise en œuvre de stratégies pratiques et par l'examen du rôle du gouvernement.
En conclusion, pour ce qui est des différentes interventions que nous voulons mettre de l'avant, je dirais qu'il y a probablement cinq points que vous pourriez vouloir aborder en profondeur. Ce sont des aspects qui, selon nous, doivent être abordés de façon intégrée et exhaustive dans le cadre de toute politique et stratégie.
Le premier aspect est la mentalité. Je soupçonne que l'un des plus importants problèmes auxquels sont confrontés les gens des régions rurales est le fait qu'ils n'ont pas été capables d'accepter que l'avenir ne ressemble pas à ce que nous avons déjà connu. Beaucoup de gens aspirent à une époque semblable à celle où les prix du pétrole et du blé ont atteint des sommets inégalés. Ils souhaitent revenir à la vie des années 1950, 1960 et 1970. Or, nous ne sommes plus à ces époques et il faut changer nos mentalités. Beaucoup de gens des petites villes doivent faire peau neuve. C'est sans contredit une étape qui débute par un changement de mentalité. Les gens doivent cesser d'attendre que le messie débarque de Canberra, de Sydney et de Melbourne, les principales villes, pour régler leurs problèmes. Les habitants des régions rurales doivent être beaucoup plus engagés dans la planification et la mise en œuvre d'un avenir positif. J'estime que le rôle du gouvernement est de faciliter ce changement de mentalité plutôt que de continuer à entrer dans ces collectivités et en ressortir en coup de vent, et à tout diriger à partir d'une base centrale.
Le deuxième aspect est le leadership. Nous avons fait rédiger un nombre important de rapports sur le développement rural. Ils ont tous en commun le point le plus important pour la prospérité des collectivités rurales : les chefs de file locaux. L'un des domaines dans lequel je crois qu'il faut investir davantage est la création et le développement de chefs de file locaux.
Nous avons fait préparer un rapport substantiel. Il serait très utile que votre comité le consulte, si vous ne l'avez pas déjà fait. Il a été publié par McKinsey & Company, une firme internationale d'experts-conseils. Il y a un peu plus de douze ans, le gouvernement fédéral australien a chargé l'entreprise d'examiner pourquoi certaines régions de l'Australie prospéraient alors que d'autres dépérissaient. Qu'est-ce qui fait une différence en matière de développement régional?
Cette étude a coûté un million de dollars, ce qui en fait une recherche importante. En bout de ligne, par contre, la valeur de cette recherche a été résumée en une phrase bien simple. Dans ce rapport, on déclarait : « À choisir entre 50 millions de dollars ou 10 millions de dollars et 20 chefs de file locaux, nous choisirions les 20 chefs de file locaux et le montant inférieur. »
Selon moi, cette affirmation illustre parfaitement que l'aspect déterminant des régions rurales de l'Australie est le leadership. Tous les rapports en parlent, nous sommes tous d'accord. Par contre, j'ai l'impression que pour ce qui est d'investir dans le développement d'entreprises, nous sommes encore loin de ce qui doit être fait.
Le troisième aspect important est ce que j'appellerais « l'obsession des occasions ». Les collectivités doivent commencer à sortir des sentiers battus. Les habitants et les dirigeants de ces collectivités doivent commencer à aborder la diversification de leurs économies de façon beaucoup plus créative, tout comme la façon d'accueillir de nouvelles industries, et la façon d'examiner comment la technologie, le tourisme et les autres secteurs offrent de nouvelles possibilités dans les régions rurales. Encore une fois, comment encourager cette obsession des occasions? Comment appuyer les gens qui planifient et analysent cette invention?
Nous avons récemment été chargés de mettre en œuvre un programme simple intitulé Create. Le programme vise à favoriser l'esprit d'initiative en milieu rural grâce à l'éducation, à travailler avec les jeunes dans les écoles primaires et secondaires et à aider les jeunes à réfléchir à ce que l'on entend, dans ce contexte, par personne entreprenante. Le programme les expose à d'autres modèles de petites villes, de gens et d'entreprises pleins d'initiative.
Le quatrième aspect qui, selon moi, est essentiel, est le développement des entreprises. Nous avons été en mesure d'effectuer beaucoup d'études de cas au sujet d'entreprises prospères dans les régions rurales de l'Australie. C'est merveilleux d'avoir la chance de se pencher à fond sur les entreprises qui ont connu un succès fulgurant, d'étudier les ingrédients de leur réussite et de les transmettre aux autres entreprises.
Je peux vous citer plusieurs cas. Par contre, mon exemple préféré est celui d'un type qui a été élevé dans la pauvreté absolue dans une petite ville. Il a été expulsé de l'école à 12 ans et, à ce jour, il ne sait toujours ni lire, ni écrire. Installé dans une petite ville de seulement 3 000 personnes, cet homme nommé Tom O'Toole exploite la boulangerie ayant le plus important chiffre d'affaires de l'hémisphère méridional. Cette entreprise est située à trois heures et demie d'une capitale. Elle se trouve sur une route ne menant nulle part. Dans une ville de 3 000 habitants, l'entreprise compte 74 employés dans son café-boulangerie. M. O'Toole possède maintenant sept boulangeries qui fonctionnent toutes à ce niveau, et toutes sont installées dans des petites villes isolées. M. O'Toole a su répandre la bonne nouvelle et la recette de son succès.
Nous sommes emballés à l'idée de tirer des leçons de ces personnes. Le pub le plus primé en Australie est un pub de campagne isolée. Sept personnes habitent ce village; et pourtant, le pub, lui, compte 29 employés. Il y a dix ans, c'était un pub typique, délabré et perdu en pleine campagne. Aujourd'hui, les gens arrivent par avion de partout au monde pour y déjeuner le vendredi. Comment cela se fait-il? Ce sont ces expériences qui sont importantes afin de rebâtir ces petites villes et de les aider à faire peau neuve.
Enfin, nous devons cibler nos efforts afin d'attirer des jeunes dans ces collectivités. J'insiste surtout sur la catégorie des jeunes de 25 à 35 ans. C'est un aspect critique. Il y a peu d'espoir que ces petites localités puissent retenir les jeunes âgés d'une quinzaine d'années puisque nous n'offrons pas les services d'éducation pour les inciter à rester. Par contre, les personnes du groupe d'âge de 25 à 35 ans sont très importantes. C'est à cet âge que les gens commencent leurs familles, achètent des maisons, lancent des entreprises et deviennent entraîneurs d'équipes de football, entre autres.
L'un des aspects les plus importants sur lesquels nous devons nous pencher est d'aider les collectivités à mettre en œuvre des stratégies pendant que ces jeunes s'y trouvent encore, jusqu'à ce qu'ils aient 15 ans. Il faut les aider à garder contact avec ces jeunes gens lorsqu'ils partent et à leur fournir des raisons de revenir lorsqu'ils auront entre 25 et 35 ans.
La pénurie de main-d'œuvre qualifiée est un énorme problème dans notre pays, et les collectivités rurales se rendent maintenant compte qu'il s'agit là d'un effet secondaire provoqué par la perte de beaucoup de jeunes.
C'était un peu un sommaire de ce que nous sommes, de ce qui nous intéresse, et peut-être quelques-unes de nos observations sur la direction qu'a prise ou que devrait prendre l'Australie.
La présidente : Merci beaucoup. En vous écoutant, je dirais que l'Australie a beaucoup d'avance sur nous, mais ce dont vous parlez est tout de même le sujet de notre étude. Je sais que mes collègues voudront vous poser des questions. Ce que vous nous dites est très utile.
Le sénateur Gustafson : Nous sommes heureux que vous partagiez vos observations avec nous, même si nous sommes à des milliers de milles de distance. C'est certainement intéressant d'en apprendre sur votre situation en Australie
Vous dites que 84 p. 100 des Australiens habitent dans les villes.
M. Kenyon : Quatre-vingt-quatre pour cent de notre population habite dans dix villes de l'Australie.
Le sénateur Gustafson : Nous avons le même problème ici au Canada. Nous pouvons amener les jeunes à travailler sur les installations de forage pétrolier, dans les champs de pétrole, mais nous avons des problèmes lorsque nous cherchons à les embaucher pour travailler dans des fermes.
L'Australie est-elle autosuffisante en matière d'énergie?
M. Kenyon : Nous avons d'importantes ressources, et des investissements considérables qui se concentrent surtout sur la côte Nord-Ouest pour le gaz naturel, le pétrole, et autres. Nous importons toujours du pétrole, mais nous avons à notre portée une multitude de ressources et nous espérons devenir autosuffisants dans ce domaine.
Je ne suis pas un expert dans le domaine. Je ne pourrais pas vous dire quelle est la proportion à l'heure actuelle. Tout ce que je sais, c'est que nous semblons assujettis, comme le reste du monde, aux hausses du prix du pétrole, même si nous disposons de ressources pétrolières importantes. Nous sommes un pays très riche en ressources naturelles. En ce moment, nous connaissons la meilleure époque d'activité minière jamais connue et nous avons toujours été un pays reconnu pour son exploitation minière; c'est incroyable.
La population est déracinée de partout. J'habite dans une petite ville à l'extérieur de Perth. Deux restaurants ont dû fermer leurs portes parce qu'ils ne pouvaient pas trouver suffisamment d'employés. Une de nos boulangeries ne peut pas ouvrir le dimanche par manque de main-d'œuvre. Nous sommes aux prises avec une grave pénurie de travailleurs qualifiés, et ce problème ne fera que s'exacerber par l'essor du secteur minier.
La chambre de commerce a calculé qu'au cours des dix prochaines années, il faudra 70 000 travailleurs qualifiés de plus. Dans un pays de 20 millions d'habitants, ce besoin attirera la population — il le fait déjà d'ailleurs — et il aura des répercussions, surtout dans les petites villes. Les fermiers n'arrivent déjà pas à trouver la main-d'œuvre dont ils ont besoin. On propose de mettre en œuvre des programmes d'accueil de travailleurs qualifiés provenant des pays du Pacifique et de l'Asie. Cette mesure soulève tout un débat à l'heure actuelle. Nous assouplissons nos règlements en matière d'immigration afin d'accueillir plus de gens. J'ai lu l'autre jour que nous avons fait venir 400 électriciens du Vietnam dans notre État. Le problème de pénurie de main-d'œuvre qualifiée est grave et les collectivités rurales y goûtent.
Le sénateur Gustafson : En ce qui concerne votre poste d'administrateur et les banques, dans quelle situation sont vos fermiers? Sont-ils endettés ou aisés? Quelle est la situation? Ici, au Canada, le prix du grain a augmenté de façon exorbitante. Est-ce la même chose en Australie?
M. Kenyon : C'est certainement le cas. Je tiens d'abord à dire que nous ne sommes pas une banque commerciale. Nous sommes une banque d'idées. Nous avons établi notre organisme dans une banque désaffectée, dans une petite ville. Nous nous voyons comme des rassembleurs et des distributeurs de bonnes idées.
Nous avons effectivement des prix phénoménaux dans le domaine de l'agriculture. Le fait que la majeure partie du pays connaît des périodes de sécheresse influence ces prix. Certaines de nos meilleures régions productrices en sont à leur troisième année de sécheresse. J'ai animé un atelier récemment dans une petite ville, et les participants ont révélé qu'ils considèrent cette année comme la quatorzième année de sécheresse.
La sécheresse a beaucoup influencé la situation. Dans les régions du Nord de mon État, le plus important producteur de céréales au pays, l'an dernier, la saison a été horrible. C'était probablement la troisième mauvaise saison. J'imagine que si nous n'avons pas de pluie cette année, certaines de ces fermes ne seront plus viables. Les collectivités avoisinantes ont atrocement souffert. Oui, les prix sont élevés et certains fermiers s'en tirent très bien, mais il y a aussi une autre force incontrôlable : la sécheresse.
Nous avons des inondations graves sur la côte Est en ce moment, comme vous le savez peut-être. Cette situation aura également des conséquences.
Le sénateur Callbeck : Merci beaucoup pour votre introduction. Moi aussi je suis d'une région rurale, alors je comprends très bien votre passion relative au déclin des collectivités rurales.
Vous avez fondé et vous dirigez la Bank of I.D.E.A.S., un service de consultation qui aide les petites collectivités à évaluer, à concevoir et à mettre en œuvre des stratégies de développement économique. Comment êtes-vous financés?
M. Kenyon : Nous tirons notre financement des contrats et projets parrainés par différents ordres de gouvernement ou encore les collectivités, par exemple la Chambre de commerce. Nous menons également beaucoup d'activités à l'échelle internationale. Nous dirigeons des projets dans plus de 50 pays. À l'heure actuelle, je m'occupe entre autres de la mise en œuvre d'une stratégie à l'intention des jeunes pour UNICEF Somalie, qui nous donne des fonds pour ce projet.
Même si nous sommes une entreprise privée et que nous devons financer toutes nos activités en menant des projets, il nous arrive de participer à des processus d'appel d'offres. Cependant, la plupart des projets sont réalisés à la demande d'administrations locales ou d'États.
À l'heure actuelle, je mets sur pied un programme financé par la Municipal Association of Victoria visant à attirer et à retenir les entreprises. Nous mettons également en œuvre une stratégie axée sur les jeunes pour les collectivités aborigènes Djirbalngan dans les régions éloignées du nord du pays en collaboration avec le ministère fédéral responsable des transports et des services régionaux.
Comme je l'ai dit, nous recevons du financement de l'UNICEF. Nous sommes très actifs en Afrique du Sud, où les différents projets sont financés par des organismes de développement économique locaux. En effet, le financement provient de différentes sources. Au Canada, nous avons mené à deux reprises des projets pour le compte des ministères provinciaux de l'agriculture et du développement régional de l'Ontario et de la Saskatchewan.
Le sénateur Callbeck : Vous avez indiqué que le tourisme était le secteur connaissant la croissance la plus rapide en Australie. Dans votre pays, y a-t-il des programmes ou des plans qui ont stimulé le tourisme dans les régions rurales?
M. Kenyon : Il existe certains programmes, mais rien d'important. Il s'agit plutôt de programmes de financement qui ont permis à des collectivités rurales de développer de nouveaux produits touristiques, avec beaucoup de succès. Au moins 50 p. 100 des fonds réservés aux régions que gère notre service de développement régional sont affectés à des projets visant à développer le tourisme ou l'économie. Il s'agit là d'un élément important de notre programme. Nous avons mené différentes initiatives visant à renforcer certains secteurs, par exemple le renouvellement des pubs locaux. Les gens s'intéressent à ce genre d'établissements, qui inspirent une certaine nostalgie.
Nous menons également des programmes axés sur le service à la clientèle. L'association des hôtels du pays et la Western Australian Tourism Commission m'ont demandé de procéder à une étude sur les pubs locaux qui ont réussi à se créer une nouvelle image. On redoutait les répercussions d'une nouvelle loi antitabac, imposant une interdiction de fumer dans tous les hôtels et restaurants, y compris les établissements des régions rurales. Un grand nombre de petits pubs locaux, dépendant sans doute de la clientèle de quelques ivrognes passant leur journée à boire et à fumer au bar, étaient menacés par ces mesures. Le programme visait à aider ces pubs à faire face à l'interdiction de fumer et à profiter de l'occasion pour se forger une nouvelle image, particulièrement dans le secteur du tourisme. Dans bien des cas, ces initiatives ont aidé les gens à aller de l'avant.
Le sénateur Callbeck : Vous avez indiqué que nous devrions nous concentrer sur cinq secteurs, notamment attirer de nouveau les jeunes entre 25 et 35 ans. Pouvez-vous nous donner des exemples de collectivités ou régions rurales qui ont réussi à le faire?
M. Kenyon : Oui. Une de mes villes préférées, Hyden, est située à environ trois heures et demie de route de Perth. Elle est aux confins des terres agricoles, près de ce que nous appelons la « rabbit-proof fence ». La ville même de Hyden compte 200 habitants, et la région, 600. Il s'agit d'une des villes les plus accomplies et les plus axées sur les jeunes que je connaisse. Si vous allez au pub local un vendredi soir, vous y trouveriez sans doute pas moins de 100 personnes. Le nombre de personnes qui se retrouvent au pub le vendredi soir est un bon indicateur de l'attrait d'une région.
Cette ville ne compte pas une, mais deux équipes de soccer. La plupart des villes n'ont plus d'équipes de soccer. Récemment, on a construit à Hyden environ 15 unités d'hébergement pour les jeunes. Seules les personnes de moins de 30 ans peuvent y habiter. La plupart des villes se concentrent sur les logements pour les personnes âgées et les retraités. Pourtant, dans cette ville, on s'est dit que les jeunes avaient des besoins en matière de logement et on a pris des mesures à cet égard. Cette ville appuie les jeunes qui retournent y vivre afin d'y démarrer une entreprise. J'ai appris que, dans cette ville, on croit qu'il faut agir lorsque les enfants sont encore très jeunes, pour s'assurer que les jeunes d'un an à quinze ans grandissent dans une ville plaisante qui dispose des installations auxquelles ils tiennent. Hyden est un endroit qu'ils considéreront toujours comme leur chez-soi.
En outre, les habitants estiment que, lorsque les jeunes partent pour les études ou le travail, il est important de rester en communication avec eux, où qu'ils se trouvent dans le monde. À Hyden, des gens produisent un bulletin hebdomadaire et un bulletin mensuel qui sont automatiquement transmis par courriel à tous les jeunes qui ont été à l'école primaire de la ville. On envoie périodiquement des lettres aux jeunes, par exemple « chère Joanne, ta ville se souvient de toi. As-tu pensé revenir parmi nous? » Cette lettre n'est qu'un prétexte pour leur demander s'ils sont conscients des possibilités d'investissement et des occasions d'affaires que représente la localité. On est constamment à l'affut de ces possibilités et on garde contact avec les jeunes.
Il est important d'avoir en place des stratégies concrètes qui ciblent les jeunes de 25 à 35 ans. J'ai appris de certains États américains l'importance des réunions d'anciens étudiants et des autres activités de ce genre. Un grand nombre de chambres de commerce dans ce pays font la promotion de ces activités, qui a pour effet de ramener les jeunes le temps d'une soirée agréable. Le lendemain, un autobus les attend, et des gens leur présentent les possibilités d'hébergement, de développement économique, de travail et de commerce. Il s'agit de se montrer pratique.
En Australie, plusieurs des centres régionaux qui vivent une pénurie de main-d'œuvre qualifiée ont commencé à adopter cette stratégie. Ils veulent attirer les jeunes qui sont partis, en commençant par ceux et celles qui sont attachés à la ville. Les jeunes associent des sentiments agréables à certains des endroits, et on en tire parti. Il faut commencer par miser sur ce groupe. Nous avons d'autres exemples fantastiques de villes, mais très peu. Nous cherchons à promouvoir une approche à trois volets : s'occuper des jeunes, rester en communication avec eux lorsqu'ils quittent la ville et mettre en place des stratégies pour les attirer de nouveau, en mettant l'accent particulièrement sur le groupe des 25 à 35 ans.
Le sénateur Mahovlich : Alice Springs me vient à l'esprit lorsque je pense aux régions rurales de l'Australie. J'aimerais savoir comment se porte cette ville, où je ne suis pas retourné depuis une trentaine d'années. Il n'y a pas plus rural que cette ville. Je crois d'ailleurs que le prince Charles et la princesse Diana ont déjà visité cet endroit. Qu'avez- vous fait pour Alice Springs? Le principal attrait touristique est Ayers Rock. Est-ce que la région est encore active?
M. Kenyon : La population d'Alice Springs a augmenté considérablement depuis ce temps. Cette ville offre certainement tous les mêmes services que nos grandes villes. Il s'agit de la deuxième ville en importance dans le Territoire du Nord. Elle doit compter environ 100 000 habitants. Elle regroupe tous les secteurs. On y offre des services d'éducation impressionnants. Toutefois, comme vous l'avez mentionné, le tourisme est la pierre d'angle de l'intérieur de l'Australie. Un grand nombre de personnes viennent encore pour voir le rocher en question, qui est situé à environ quatre à cinq heures de route d'Alice Springs, ce qui n'est pas à la porte. À sa façon, Alice Springs a développé ses propres attraits, principalement le tourisme axé sur la culture aborigène, les galeries d'art, des restaurants très intéressants et autres activités du genre.
Nous avons effectué un certain nombre d'études de cas sur des Aborigènes novateurs qui ont démarré des entreprises dans la région d'Alice Springs. Vous devriez y retourner. Vous seriez surpris. C'est incroyable. Dans le cadre de son engagement à renforcer le tourisme rural, le gouvernement national a rétabli la ligne de chemin de fer bien connue, qui va d'Adelaide au Sud, passe par Alice et se rend jusqu'à Darwin au Nord. Il s'agit d'un des voyages en train les plus populaires dans notre pays. Ce type d'améliorations aide beaucoup. Alice Springs est un endroit merveilleux, une belle ville qui a une foule de leçons à communiquer sur la façon de diversifier son économie. Par contre, il s'agit d'une ville aux prises avec de nombreux problèmes liés à la pauvreté et au chômage chez les Aborigènes ainsi que les autres difficultés qui en découlent. C'est sur ces questions que doivent être axées les stratégies.
Le sénateur Mahovlich : Merci. Je suis heureux d'apprendre cela.
Le sénateur Mercer : Merci beaucoup d'être parmi nous ce soir. Vous avez dit que la température était de 38 degrés là-bas. Nous aussi nous enregistrons 38 degrés, mais ce nombre est précédé d'un tiret. En réalité, il fait moins 8 degrés. Je m'intéresse à ce que vous avez dit au sujet de la ville de Hyden, qui compte environ 200 habitants. Vous avez mentionné que l'on reste en contact avec les jeunes qui ont quitté la ville, que l'on met l'accent sur les jeunes, que le pub attire 150 personnes tous les vendredis soir et qu'il y a deux équipes de soccer.
Qui paye la facture pour toutes ces activités? Qui paye pour rester en contact avec les jeunes qui ont quitté la ville pour d'autres régions de l'Australie? D'où viennent les fonds pour l'infrastructure nécessaire au maintien de ce lien?
M. Kenyon : Dans tous les pays à l'échelle du monde, ma petite ville préférée est une collectivité où les choses bougent. C'est une des raisons pour lesquelles j'ai parlé de cette ville. Il faut prendre le taureau par les cornes. Dans les régions rurales de l'Australie, la plupart des villes attendent les renforts, et c'est là un des plus grands problèmes. Certaines villes ne font rien à moins d'obtenir une subvention du gouvernement. En visite dans une collectivité, on m'a déjà demandé : « Comment puis-je obtenir une subvention pour m'assurer un avenir? » Voilà presque une contradiction. L'exemple de Hyden nous montre que, pour faire changer les choses, il faut que la population et les dirigeants de la ville investissent et agissent.
Hyden est une destination touristique des plus populaires, en raison de Wave Rock, un rocher situé à environ trois kilomètres de la ville. Au début des années 1960, la ville ne comptait pas d'hôtel, de camping ou d'infrastructure touristique. Par suite d'un article dans la revue National Geographic, quelques touristes provenant des quatre coins du monde ont commencé à venir admirer cet attrait, et la population locale a décidé d'unir ses efforts. À vrai dire, dix agriculteurs ont décidé d'investir 70 livres chacun pour développer l'infrastructure touristique.
Aujourd'hui, la ville de Hyden est propriétaire d'une infrastructure fiable, qui vaut probablement autour de 10 millions de dollars. On y trouve selon moi le meilleur hôtel local au pays. On y trouve deux centres des congrès ainsi qu'un restaurant pouvant accueillir de grands groupes. On a fait des merveilles.
Il y a cinq ans, les fils et les filles de ce groupe d'agriculteurs ayant investi dans la ville se sont réunis et ont déterminé que leurs enfants ne pouvaient pas travailler à temps plein à la ferme. Ils ne pouvaient pas leur trouver du travail à temps plein dans leurs entreprises agricoles, mais ils ne voulaient pas que ces jeunes quittent la ville. Par conséquent, 21 agriculteurs ont investi 10 000 $ chacun dans un fonds communautaire appelé le Hyden Business Development Pty Ltd. Les agriculteurs ne veulent pas obtenir de l'argent en retour, ils veulent créer de l'emploi.
Grâce à cet investissement, ils ont obtenu des fonds fédéraux. Tout cet argent a servi à mettre en place l'infrastructure nécessaire pour développer un épatant petit secteur commercial. Ils ont même l'infrastructure pour établir un parc industriel. Ils ont effectué leurs propres sondages pour déterminer quels secteurs commerciaux devraient être développés davantage. Ils ont créé l'infrastructure et se sont rendus à Perth pour faire de la publicité. Par exemple, ils ont constaté de prime abord qu'il n'y avait pas d'électricien d'automobiles et ont évalué qu'environ 700 000 $ de travaux étaient effectués à l'extérieur de la ville dans ce domaine. Ils ont alors construit le meilleur atelier ainsi qu'une maison. Ils ont travaillé à l'aménagement extérieur pendant quatre week-ends, parce qu'ils savaient qu'ils auraient de la difficulté à convaincre un tel électricien de venir avec sa famille. Ce n'est jamais facile.
Ils sont retournés à Perth pour annoncer qu'ils avaient un commerce à vendre et garantissaient un revenu de 700 000 $ la première année. Ils ont reçu 14 réponses de personnes intéressées, et si je ne me trompe, ils ont choisi un bon catholique qui avait sept enfants, pour peupler l'école primaire locale. C'est comme ça qu'on fait les choses à Hyden.
Il faut que les collectivités pensent de cette façon. Les agriculteurs de la région ont formé une initiative de marketing coopératif. Ils sont conscients qu'ils doivent agir eux-mêmes s'ils veulent atteindre leurs objectifs. C'est le genre d'attitude qu'ils ont adoptée. Comme je l'ai déjà dit, il faut changer la mentalité des habitants des régions rurales, pour qu'ils cessent d'être dépendants et d'attendre que d'autres viennent régler leurs problèmes. Il faut amener ces personnes à prendre en main leur avenir et leur donner les compétences pour prendre les rênes. Il est très emballant de voir les choses bouger dans ce sens.
Nous avons beaucoup appris des États-Unis en général et du Nebraska en particulier, qui mettent l'accent sur les fondations communautaires. Vous ne serez pas surpris d'apprendre qu'Hyden a été la première ville de l'Ouest de l'Australie à établir une fondation communautaire. Hyden est une ville qui reconnaît l'importance d'investir dans son milieu. Inutile de vous dire qu'il s'agit d'une des villes dans lesquelles les gouvernements souhaitent investir, parce qu'ils savent que cette ville ira loin et qu'elle est prête à mettre du sien.
Nous avons de bons exemples du même genre, et c'est le modèle que nous préconisons.
Le sénateur Peterson : Vous avez mentionné que vous cherchez à encourager les personnes âgées à rester dans les régions rurales ou à s'y installer. Les soins de santé posent-ils un problème? Que fait-on à cet égard?
M. Kenyon : Manifestement, il s'agit d'une importante difficulté. Les services de santé subissent de plus en plus de pressions financières. Nous luttons constamment contre la fermeture des hôpitaux en régions rurales. La plupart des villes ont beaucoup de difficulté à attirer des médecins, qui peuvent gagner beaucoup plus dans les centres urbains.
Je soupçonne qu'au moins le tiers, sinon la moitié, des médecins qui pratiquent dans les régions rurales de l'Australie proviennent d'outre-mer. Nous avons fait venir dans les petites villes un grand nombre de médecins de l'Afrique du Sud. Les soins de santé posent un grave problème, dont il faut bien tenir compte.
Je trouve passionnant de voir le nombre de collectivités qui ont réinventé leurs services de santé et ont créé leur propre guichet de services de santé en mettant sur pied par exemple des coopératives.
Nous avons regroupé certaines des études de cas mentionnés, y compris celle dont je viens de parler et celle à Hyden, dans une publication intitulée A Kit for Small Town Renewal. Il s'agit d'une collection d'exemples de réussite dans les petites villes, qui expliquent leur façon de faire. Je veillerai à vous faire parvenir un exemplaire de ce document par l'entremise de la greffière, ainsi qu'un document décrivant vingt entreprises rurales dynamiques que nous avons aidées à mettre sur pied et un autre document sur les entreprises aborigènes.
Le sénateur Peterson : Vous avez mentionné que votre gouvernement a récemment présenté des excuses aux populations aborigènes. Quelles autres responsabilités votre gouvernement exerce-t-il à l'égard de ces gens?
M. Kenyon : Ces excuses ont été prononcées ce matin, il y a seulement deux heures de cela, par le Parlement. Il s'agit d'un événement symbolique important.
Notre premier ministre a invité à cette occasion l'opposition à former un Cabinet comme en temps de guerre pour mettre sur pied une approche conjointe gouvernement-partis d'opposition. Ainsi, le premier ministre et le chef de l'opposition coprésideraient un comité afin d'obtenir des résultats concrets.
Le premier ministre s'est fixé comme objectif de réduire de moitié l'écart entre l'espérance de vie des Aborigènes et des non-Aborigènes d'ici cinq ans. Au cours de cette même période, il veut instaurer des services d'éducation préscolaire dans toutes les collectivités éloignées, et il a fait des promesses dans les secteurs de l'hébergement et de l'éducation.
C'est une initiative très audacieuse entreprise par un premier ministre. Il a terminé son discours en disant que son gouvernement serait jugé par sa capacité de respecter ces promesses — en visant une approche bipartite, en essayant d'éviter de faire de la question aborigène un enjeu politique et en fixant des objectifs concrets qu'il vise maintenant à atteindre.
Cependant, comme vous, nous avons un gouvernement fédéral et des gouvernements d'état ou provinciaux, et nos gouvernements provinciaux sont responsables de la majorité des affaires aborigènes, en particulier dans les domaines de la santé et de l'éducation. Encore là, il est important qu'ils participent.
Le gouvernement fédéral et les États ont d'importants programmes qui touchent les peuples aborigènes, mais je crois que nous serions tous très déçus par les résultats obtenus au cours des 30 dernières années. Bon nombre d'entre nous ont bon espoir que le geste symbolique que le parlement fédéral a posé aujourd'hui favorisera une approche davantage coordonnée et intégrée.
Une partie de notre problème — et je suis certain que cela ne se produit pas dans votre pays, mais c'est toujours le cas dans le nôtre —, c'est que les gouvernements agissent comme des tribus en guerre quand on essaye de faire collaborer les ministères, sans parler des gouvernements des États et du gouvernement fédéral, ce qui est toujours un défi, mais cela doit être fait. C'est un domaine où nous devons voir un changement.
J'espère aujourd'hui, en raison de l'attention qu'on lui a accordée et du fait qu'un premier ministre était prêt à s'avancer et à fixer des objectifs très ambitieux, que nous travaillerons dans le but d'atteindre ces objectifs. Je suis optimiste et j'ai bon espoir que l'opposition se joindra à la proposition pour participer à un arrangement similaire à un cabinet de guerre sur cette question particulière, ce qui est en soi une initiative passionnante.
La présidente : C'est, en effet, une initiative passionnante. Nous avons ces problèmes ici, au Canada, et nous tentons de les régler. Cette mesure semble très énergique, et je vous souhaite bonne chance.
Le sénateur Callbeck : Est-ce que la plupart des immigrants qui arrivent en Australie vivent dans vos grands centres, ou êtes-vous capables de diriger certains d'entre eux vers les régions rurales?
M. Kenyon : La plupart d'entre eux, comme le reste de la population, aiment être attirés par les villes et les Melbourne de ce monde, et nous avons de vastes populations d'immigrants dans ces villes. Cependant, nous avons un certain nombre de programmes, en particulier des programmes pour les entreprises, qui touchent la migration de gens d'affaires vers les régions. Certains d'entre eux ont connu beaucoup de succès.
Bon nombre de nos grands conseils engagent souvent, avec l'aide du gouvernement, une personne qui cible ce type de secteur. Je sais que, dans certains de nos secteurs régionaux, il y a une vaste population de Vietnamiens, en particulier en horticulture. Cobram compte un nombre important de réfugiés afghans.
Oui, il y a un certain mouvement de ce genre. Évidemment, le secteur minier en est un. Toutefois, là encore, on a recours à un service de navette aérienne. De nombreuses personnes sont attirées par ce secteur en raison, entre autres, des salaires. Il y a un certain mouvement, en particulier en ce qui concerne la migration des gens d'affaires vers les régions et les zones rurales.
La présidente : Manifestement, vous aimez votre travail et vous avez fait un exposé très énergique ce soir. Je suis persuadé que cela nous inspirera à poursuivre ce que nous tentons de faire. C'est difficile. Cependant, vous avez certainement fait un travail remarquable dans votre pays. Nous vous remercions de votre temps et nous vous souhaitons bonne chance.
M. Kenyon : Merci et bonne chance dans votre étude.
La présidente : Nous sommes très heureux d'avoir avec nous ce soir, à titre personnel, John Stapleton, ancien directeur de recherche du Task Force on Modernizing Income Security for Working-Age Adults. Bienvenue, monsieur Stapleton. Nous nous sommes déjà rencontrés. Nous sommes heureux que vous soyez parmi nous.
Nous poursuivons notre étude sur la pauvreté en milieu rural au Canada. Lors de nos déplacements dans les provinces, nous avons été profondément touchés par les groupes exceptionnels et diversifiés de Canadiens qui ont partagé avec nous leur passion, leurs connaissances et leurs préoccupations au sujet du Canada rural. Nous avons été touchés par leur générosité et par leur hospitalité. Ils nous ont accueillis à bras ouverts dans leurs collectivités et parfois dans leurs maisons. Le comité en est maintenant à l'étape finale de son étude.
M. Stapleton a été le directeur de recherche du groupe de travail, un groupe diversifié dont les membres étaient réunis pour examiner des moyens d'améliorer le système de sécurité du revenu. Bien que le groupe de travail ait œuvré principalement à Toronto et en Ontario, son rapport et ses conclusions valent pour l'ensemble du Canada.
John Stapleton, ancien directeur de recherche, Task Force on Modernizing Income Security for Working-Age Adults, à titre personnel : Merci. Je suis venu ici ce soir pour vous parler du groupe de travail sur la modernisation de la sécurité du revenu des adultes en âge de travailler.
Le groupe de travail a été créé à l'automne 2004. Il s'agit d'une large coalition formée de chefs de file à l'échelon municipal et comprenant la Toronto City Summit Alliance, elle-même une vaste alliance de chefs de file municipaux, et la St. Christopher House, un centre communautaire multiservices qui travaille avec les personnes à faible revenu dans Parkdale, dans l'ouest de Toronto.
Les membres du groupe de travail étaient des spécialistes et des chefs de file d'organismes à but non lucratif, du milieu universitaire, du milieu des affaires, du secteur de la main-d'œuvre et du secteur gouvernemental de la société civile, ainsi que des intervenants possédant une expérience concrète des programmes de sécurité du revenu. En ce sens, c'était une initiative unique en son genre.
Un groupe d'experts, dont j'étais le directeur de recherche, a appuyé le groupe de travail en passant en revue les recherches existantes, en comblant les lacunes et en formulant des solutions et des recommandations. Le groupe de travail a déterminé que près de 300 000 travailleurs ontariens ne gagnent pas suffisamment d'argent pour joindre les deux bouts, même s'ils travaillent à temps plein toute l'année, en raison de leur faible revenu, de la perte de prestations sociales quand ils entrent sur le marché du travail et de l'accroissement des coûts liés à l'emploi.
Les Ontariens qui reçoivent des prestations d'aide sociale ou d'invalidité — dont le nombre s'élève à plus de 450 000, ce qui est plus élevé que le nombre de personnes qui travaillent à temps plein toute l'année et qui vivent tout de même dans la pauvreté — se retrouvent souvent pris au piège dans un système qui ne fournit pas un revenu suffisant et qui fait obstacle à l'obtention d'un emploi stable et à une participation active dans la collectivité.
Certains des principaux problèmes sous-jacents que le groupe de travail a examinés et qui ont permis de tirer ces conclusions sont : le manque de coordination entre les programmes et les paliers de gouvernement, qui se traduit par un enchevêtrement de règles; les restrictions liées à l'admissibilité; et les facteurs dissuasifs qui pénalisent souvent les adultes bénéficiaires de l'aide sociale qui trouvent un emploi de premier échelon, augmentent leurs heures de travail ou acceptent une augmentation de salaire. Par conséquent, bon nombre d'adultes sont incapables de sortir du cadre de l'aide sociale ou d'éviter de passer répétitivement d'une faible participation sur le marché du travail à l'aide sociale.
J'ajouterais qu'à Toronto, la période moyenne de recours à des prestations d'aide sociale se situe environ à 27 mois, alors qu'elle était d'environ neuf mois il y a de cela neuf ou dix ans. La clientèle est très différente maintenant.
La difficulté de modifier la politique sur la sécurité du revenu est un autre problème sous-jacent, car les programmes de soutien sont tous conçus de manière à réduire les coûts au maximum sans tenir compte des répercussions sur les autres programmes. Souvent des programmes autonomes cannibalisent un autre programme en tentant de demeurer rentables. Quand l'admissibilité est réduite pour un programme, elle se trouve parfois réduite pour d'autres, par la même occasion.
Le groupe de travail a donc reconnu que l'urgence de régler les problèmes liés à la sécurité du revenu était à la fois d'ordre économique et social. Notre économie a besoin de tous les adultes en âge de travailler, et ce besoin s'accroîtra avec le vieillissement de la population. Nous sommes dans une période de demande de main-d'œuvre.
Le groupe de travail a formulé une série de recommandations en matière de politique visant à transformer le système de sécurité du revenu actuel en un groupe de programmes efficaces pour les adultes en âge de travailler. Nous avons établi qu'une série de solutions à multiples facettes est nécessaire pour obtenir un filet de sécurité sociale solide qui aborde les problèmes les plus urgents auxquels font face les adultes en âge de travailler qui touchent un faible revenu. Nous devons d'abord accroître leur revenu, afin de réduire les coûts qu'ils doivent assumer pour vivre et travailler et pour protéger et tirer profit de leurs avoirs personnels et financiers. Les recommandations visaient le gouvernement fédéral, le gouvernement de l'Ontario, l'administration municipale et d'autres intervenants de la société civile qui peuvent apporter des solutions.
Le groupe de travail a publié son rapport Time for a Fair Deal en mai 2006. Il a exhorté le gouvernement du Canada, premièrement, à réformer le régime d'assurance-emploi pour contrer la réduction considérable de la couverture des chômeurs et la diminution connexe de l'accès à des mesures de soutien et des possibilités de formation. En fait, le rapport indiquait que les chômeurs vivant dans la municipalité régionale d'Ottawa-Carleton avaient la plus faible couverture de l'Ontario. Nous avons mentionné qu'à Toronto la couverture des chômeurs s'élevait à 22 p. 100 pour les programmes d'assurance-emploi, mais ce taux était en fait de moins de 20 p. 100 au moment de la rédaction du rapport.
Deuxièmement, à créer une nouvelle prestation fiscale remboursable — c'est-à-dire que vous recevez un remboursement, même si vous ne payez pas d'impôt — sous forme de crédit d'impôt de base pour tous les adultes en âge de travailler qui touchent un faible revenu, ainsi qu'un supplément au revenu gagné pour les salariés à faible revenu.
Troisièmement, à fournir et à administrer un programme national de soutien du revenu pour les personnes ayant un handicap si grave qu'elles ont peu de chances de s'intégrer à la population active.
Quatrièmement, à instaurer une prestation fiscale pour le revenu gagné — et bien entendu, nous avons la prestation fiscale pour le revenu gagné incluse dans le budget de M. Flaherty l'an passé — pour accroître le revenu des salariés à faible revenu au Canada, aider à contrebalancer les coûts liés à l'emploi et rendre avantageux le passage de l'aide sociale au marché du travail pour un plus grand nombre de personnes. En Ontario, cette mesure devrait être combinée à un régime d'assurance-santé et d'assurance des frais dentaires pour les travailleurs à faible revenu ayant les mêmes objectifs.
Cinquièmement, à remanier et à améliorer la Prestation fiscale canadienne pour enfants, la PFCE, en se concentrant sur l'harmonisation de la Prestation universelle pour la garde d'enfants, la PUGE, et la nouvelle Prestation ontarienne pour enfants annoncée en Ontario l'an dernier, afin d'assurer le versement de prestations adéquates et équitables tout en préservant les incitations à travailler.
Le groupe de travail a formulé les recommandations suivantes à l'intention du gouvernement ontarien : s'assurer que les ententes fédérales-provinciales, en particulier celles qui touchent le marché du travail et l'immigration, sont mises en œuvre rapidement et intégralement; mettre en place un processus d'examen du salaire minimum; fournir aux travailleurs à faible revenu une assurance de base couvrant les soins de santé, les médicaments sur ordonnance, les soins de la vue et les soins dentaires; mettre l'accent sur l'application des normes d'emploi afin de protéger les droits des travailleurs; améliorer et augmenter la portée des normes d'emploi pour inclure les nouveaux types de travail, en particulier le travail contractuel; augmenter la valeur maximale de l'avoir des bénéficiaires d'aide sociale à 5 500 $ pour une personne seule et à 9 000 $ pour une famille — ces niveaux auraient été ceux du Régime d'assistance publique du Canada, si ce dernier était resté en vigueur; enfin, réinstaurer certaines politiques provinciales afin d'établir les prestations d'invalidité au même niveau que celles versées aux personnes âgées — en Ontario, un écart existe entre les prestations versées aux personnes âgées et celles versées aux personnes handicapées depuis 1975. Toutefois, puisque l'indexation est une règle fédérale et une exception provinciale, nous avons en Ontario, par exemple, des prestations d'invalidité qui sont plus de 20 p. 100 en deçà des prestations versées aux personnes âgées.
Nous recommandons également que le gouvernement améliore et élargisse les mesures de soutien et les possibilités de formation et permette aux bénéficiaires du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées qui peuvent travailler malgré leur handicap d'intégrer le marché du travail sans compromettre leur admissibilité à l'assurance-santé et à l'assurance des frais dentaires. Je suis heureux de dire que cette mesure particulière a été mise en œuvre en Ontario.
Le groupe de travail a exprimé ses préoccupations à propos de la situation critique dans laquelle se retrouvent les enfants pris en charge par les services de protection de l'enfance une fois qu'ils ont atteint l'âge de 18 ans, car ils disposent alors de peu de soutien comparativement aux enfants qui vivent avec leurs parents.
Les membres du groupe de travail croient que la mise en œuvre de ces recommandations importantes améliorerait grandement la situation en vue d'assurer que les adultes en âge de travailler ont le soutien dont ils ont besoin pour vivre dans la dignité et participer activement à notre économie et à la vie communautaire.
Récemment, on a assisté à un certain nombre de développements prometteurs aux échelons fédéral et provincial depuis la publication du rapport du groupe de travail. À l'échelon provincial, il s'agit de la modification de règles afin d'éliminer les barrières à l'emploi dans les programmes d'aide sociale, de l'augmentation modeste des prestations d'aide sociale et de la nouvelle Prestation ontarienne pour enfants. Cette prestation a fourni aux familles à faible revenu, peu importe la source de revenu, un montant forfaitaire de 250 $ par enfant en juillet dernier et ira jusqu'à un maximum annuel de 1 100 $ par enfant d'ici 2011.
Le gouvernement fédéral a instauré une très modeste prestation fiscale pour le revenu gagné, a augmenté les prestations fédérales pour enfants et envisage la modification de l'assurance-emploi afin d'accroître l'accessibilité et les niveaux de prestations. Cela a été mentionné dans le dernier discours du Trône.
Toutes ces mesures seront utiles, mais la plupart d'entre elles sont des modifications aux programmes existants. Deb Matthews, députée provinciale de l'Ontario et membre du groupe de travail, qui est maintenant la ministre responsable de la stratégie de réduction de la pauvreté en Ontario, a mentionné que l'un de ses électeurs lui a dit récemment que les personnes pauvres n'ont pas besoin de plus de programmes, ils ont besoin de plus d'argent. Le plus grand défi persiste : restructurer et moderniser notre système et nos programmes de sécurité du revenu pour répondre aux besoins de la main-d'œuvre d'aujourd'hui et s'assurer que les Ontariens qui travaillent ici ont un niveau de vie décent et que ceux qui ne peuvent pas travailler peuvent vivre dans la dignité.
La mise en œuvre de ces recommandations importantes améliorera énormément la situation afin d'assurer que les adultes en âge de travailler ont le soutien dont ils ont besoin pour vivre dans la dignité et participer pleinement à notre économie et à la vie communautaire.
Enfin, le groupe de travail a émis une mise en garde, et c'était peut-être un pressentiment : nous ne devrions pas attendre la prochaine récession pour procéder à la réforme de nos programmes de sécurité du revenu. Espérons que nous continuerons de le faire.
Le sénateur Peterson : Merci de votre exposé. Vous dites qu'il ne s'agit que d'un rapport du groupe de travail et que rien de cela n'est mis en œuvre?
M. Stapleton : Certaines des mesures ont été mises en œuvre.
Le sénateur Peterson : D'accord, alors je poursuis. Les gouvernements ont tendance à revenir à la charge quand les gens tentent d'améliorer leur situation. Les gens font plus d'argent, un petit peu plus d'argent, alors le gouvernement le récupère et il les ramène à l'aide sociale. Est-ce qu'une analyse coût-avantage a été faite à ce sujet? Le montant additionnel doit être beaucoup plus petit que si ces personnes se tournaient à nouveau vers l'aide sociale.
M. Stapleton : Je ne suis pas au courant d'une analyse coût-avantage à ce sujet, mais il existe un certain nombre de programmes qui sont menés séparément, ce qu'on appelle parfois le cloisonnement ministériel. Chacun de ces programmes doit exiger des frais pour ses services — dans le cas des loyers proportionnés au revenu, on exige un loyer plus élevé — ou, dans le cas des programmes d'aide sociale, réduire les sommes versées aux bénéficiaires à mesure qu'ils réussissent à s'en sortir.
Par exemple, une mère monoparentale vivant dans un logement social décide d'intégrer le marcher du travail, et pour chaque dollar qu'elle gagne, elle perdra 50 cents en prestations d'aide sociale. La même personne verrait son loyer augmenter de 30 cents parce que, évidemment, si elle a un loyer proportionné au revenu et que son revenu augmente de 1 $, elle perdra 30 cents de ce dollar.
On en vient au point où les différents programmes commencent à interagir, où ils créent ces taux élevés de récupération qui peuvent parfois excéder 100 p. 100. Évidemment, quand on excède 100 p. 100, il n'est pas économiquement rationnel — c'est une expression que nous utilisons — de s'intégrer à la population active. Il est important que ces divers programmes gouvernementaux, plutôt que d'être cloisonnés, aient des administrateurs qui se parlent entre eux afin que ces hauts taux de récupération n'aient pas un effet dissuasif qui empêche les gens de tenter de devenir autonomes en s'intégrant à la population active.
Le sénateur Peterson : Il semblait y avoir un certain revenu annuel garanti. Je vois ici que le seuil de la pauvreté se situe à 15 000 $. Si c'était établi et que le montant était fixé, alors les bénéficiaires d'aide sociale sauraient ce qu'ils peuvent gagner, jusqu'à concurrence de ce montant, et on les laisserait tranquilles. Cependant, s'ils gagnaient plus que ce montant, il pourrait peut-être y avoir une certaine forme de récupération. Est-ce à cela que vous voulez en venir?
M. Stapleton : Nous n'avons pas proposé la stratégie particulière que nous avions ici comme un revenu annuel garanti. Elle n'aurait pas les caractéristiques d'une garantie, car certains avantages, comme la prestation fiscale pour le revenu gagné, ne seraient pas une garantie. Elle ne serait versée qu'aux travailleurs. Son crédit remboursable — comme il est sous-entendu au Canada que le crédit pour TPS est une forme de revenu annuel garanti, qui a peut-être certaines caractéristiques d'un revenu annuel garanti — est peu élevé.
L'expression « revenu annuel garanti » adopte différentes significations en fonction des personnes. Je m'explique. À l'heure actuelle, le Canada, par l'entremise des Programmes de la sécurité du revenu, investit environ 125 milliards de dollars dans divers programmes de protection du revenu. Dans l'ensemble, ces programmes représentent environ 125 milliards de dollars. Or, le Canada compte approximativement 9 millions de familles. Si l'on divise la somme investie par le nombre de familles canadiennes, on obtient un montant de 14 000 $ par famille. Bien entendu, peu importe le programme de revenu annuel garanti, il est fort probable que nous ne verserions pas 14 000 $ à chaque famille au pays. Selon ce calcul, l'aide offerte serait diluée, sans compter que bon nombre de familles canadiennes n'ont pas besoin d'aide financière.
Étant donné leur complexité et leur désuétude, il serait fort tentant de regrouper le vaste éventail de programmes de la sécurité du revenu en un seul programme. De plus, comme vous l'avez mentionné, certains d'entre eux se font concurrence et tiennent compte des montants versés dans la cadre des autres programmes. L'idée d'un programme global permettant d'éliminer ces obstacles est intéressante. Un programme offrant un certain revenu, nécessitant peu de gestion et regroupant tous les programmes existants.
C'est à cette étape que nous commençons à peaufiner le programme. Du moins, en théorie. Nous affirmons que seules certaines personnes recevraient une aide financière. Bien entendu, l'objectif est de réduire graduellement les montants versés à une personne ou famille donnée à mesure que s'accroît son indépendance financière. Nous ne souhaitions pas établir une garantie. Nous voulions remanier certains des programmes actuels et y inclure des crédits d'impôt remboursables et des prestations fiscales pour le revenu gagné qui, à notre avis, favoriseraient grandement la sécurité du revenu sans toutefois regrouper tous les programmes existants en un seul programme global.
Le sénateur Peterson : Ça pourrait s'appeler « vivre avec dignité », si vous voulez. Nous souhaitons que les gens puissent vivre dans la dignité. Pour ce faire, nous pourrions, comme vous l'avez mentionné, avoir recours aux programmes existants. Cependant, le processus est si contourné que, la plupart du temps, en essayant de concevoir une trampoline, nous finissons par créer un filet de sûreté où les gens viennent s'échouer.
Le sénateur Callbeck : À bien y penser, vos programmes et vos suggestions sont en fait des politiques de revenus à grande échelle. Certains vous diraient que ce n'est pas une bonne solution, que nous devrions utiliser les fonds disponibles pour aider les plus démunis, comme les chefs de famille monoparentale et les gens ayant une déficience mentale ou physique, et cetera.
Qu'en pensez-vous?
M. Stapleton : Les programmes canadiens ont donné de très bons résultats. Ceux qui visent les personnes âgées fonctionnent bien. C'est pourquoi nous concentrons nos efforts sur les adultes en âge de travailler. Bien que certaines personnes âgées vivent encore dans la pauvreté, nous avons fait d'énormes progrès en ce qui concerne les mesures de sécurité du revenu à leur intention depuis les années 1920. Le régime de prestations pour les enfants se porte assez bien. Les systèmes pour les enfants et les personnes âgées présentent quatre caractéristiques intéressantes.
En premier lieu, on trouve la prestation de base. Pour les personnes âgées, il s'agit de la Sécurité de la vieillesse (SV), et pour les enfants, de la Prestation fiscale canadienne pour enfants (PFCE), qui découle de l'ancienne prestation familiale.
En second lieu, on trouve le Supplément de revenu garanti (SRG), instauré il y a 40 ans. C'est une prestation mensuelle soumise à une évaluation du revenu qui est versée aux pensionnés de la Sécurité de la vieillesse. Du côté des enfants, le pendant de cette prestation a été mis en place à un autre moment de notre histoire. Le Supplément de la prestation nationale pour enfants (SPNE) a été mis en œuvre en 1998.
Fait intéressant, on trouve, au Canada, des instruments enregistrés d'épargne comme le régime enregistré d'épargne- retraite (REER), auquel les adultes cotisent en vue de la retraite, et le régime enregistré d'épargne-études (REEP), pour les enfants.
En dernier lieu, le Canada offre des avantages fiscaux qui permettent aux gens d'épargner en vue de la retraite ainsi qu'aux parents et à d'autres d'épargner pour les études des enfants. Aucun programme semblable n'a été mis sur pied pour venir en aide aux adultes en âge de travailler.
Nous avons conçu, à divers moments de notre histoire, un éventail de programmes parallèles pour les aînés et les enfants. Les programmes d'aide pour les adultes en âge de travailler ne font que commencer, de façon plutôt modeste je dois dire. Un programme à l'intention des travailleurs, la prestation fiscale pour revenu gagné, a été instauré l'an dernier. Il comporte un volet pour les personnes handicapées et un autre pour les familles à faible revenu ou les chefs de famille monoparentale. Il vise à aider ces personnes à surmonter les difficultés auxquelles elles sont confrontées, particulièrement en ce qui a trait à l'accès au marché du travail.
Il n'existe cependant pas de crédit d'impôt de base global qui permettrait à tous de régler leur compte avec le gouvernement fédéral. Notre régime enregistré d'épargne pour les adultes en âge de travailler, alors qu'ils sont dans une position favorable au point de vue fiscal, n'est en rien comparable à ceux offerts au Royaume-Uni et aux États- Unis. À notre façon, nous semblons nous diriger vers des programmes de la sécurité du revenu pour l'ensemble de la population, et pas seulement pour les personnes âgées et les enfants.
Le sénateur Callbeck : Vous mentionnez les personnes handicapées. L'une de vos recommandations à l'intention du gouvernement fédéral concernait la prestation et la gestion d'un programme de soutien du revenu national pour les personnes handicapées. À quoi songiez-vous? Ce programme s'adresserait aux personnes qui ne peuvent accéder au marché du travail, n'est-ce pas?
M. Stapleton : Oui, en effet. Le programme vise à reconnaître que, contrairement à ce qu'on pensait il y a 40 à 50 ans, les personnes handicapées font partie de la population active. Nous avons créé le Régime de pensions du Canada auquel nous avons ajouté le volet « prestation d'invalidité » pour les personnes ne pouvant accéder au marché du travail. Le point de vue des personnes handicapées et celui de la société canadienne ont évolué au fil des ans. Nous reconnaissons désormais que l'ensemble de la population, dans la mesure du possible, peut avoir accès au marché du travail.
Le volet invalidité représente environ 25 milliards des 125 milliards de dollars consacrés à la vaste gamme de programmes de la sécurité du revenu. Il englobe les programmes d'aide sociale provinciaux pour les personnes handicapées, la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail — anciennement la Commission des accidents du travail —, le Régime de pensions du Canada, les programmes privés d'invalidité et les crédits d'impôt pour personnes handicapées du gouvernement fédéral. Le groupe de travail a posé la question suivante : serait-il possible de revoir la façon dont sont distribués les 25 milliards de dollars versés dans le cadre des programmes de la sécurité du revenu pour les personnes handicapées afin d'établir un programme d'invalidité plus exhaustif excluant les créneaux traditionnels qui, comme c'est le cas pour le programme de prestations d'invalidité du Régime de pensions du Canada, peuvent être désuets pour les personnes souhaitant accéder au marché du travail? C'est ça la différence. C'est l'une des préoccupations des gens souhaitant accéder au marché du travail.
Le sénateur Mahovlich : Quel est le groupe d'âge des adultes en âge de travailler?
M. Stapleton : En général, ils ont de 18 à 64 ans. Au point de vue de la sécurité du revenu, le groupe d'âge des enfants va de la naissance à 17 ans. Les gens de 65 ans et plus représentent le groupe des personnes âgées. C'est de cette façon que les programmes de la sécurité du revenu sont organisés. Diverses prestations pour enfants sont versés de la naissance jusqu'au 18e anniversaire. Quand aux prestations de la Sécurité de la vieillesse et aux programmes de la retraite, ils commencent à 65 ans.
Le sénateur Mahovlich : Beaucoup de gens prennent leur retraite à 55 ans.
M. Stapleton : Oui, ceux qui en ont la chance.
Le sénateur Mahovlich : Je me rappelle de l'époque où les prestations d'assurance-chômage pouvaient durer jusqu'à huit mois. Vous dites qu'elles peuvent maintenant durer jusqu'à 22 mois?
M. Stapleton : Non, ce n'est pas ce que je dis. Il s'agit ici du pourcentage de gens sans emploi. Combien d'entre eux ont accès au programme d'assurance-emploi? Les conditions d'admissibilité sont aujourd'hui très strictes et il existe un critère appelé norme variable d'admissibilité. L'endroit où l'on réside au Canada et le taux de chômage existant ont une incidence sur l'admissibilité d'un individu au programme d'assurance-emploi.
Dans le cas de la région d'Ottawa, au moment où nous avons rédigé ce rapport, moins de 20 p. 100 des personnes sans emploi pouvaient bénéficier du programme. D'un côté, on constate un important surplus d'argent versé au programme par les entreprises et les cotisants, et de l'autre, un nombre important de cotisants qui ne peuvent bénéficier du programme.
Le sénateur Mercer : Merci, monsieur Stapleton d'être ici ce soir. Sujet très intéressant. Vous parlez de diviser 125 milliards de dollars entre le nombre de familles qui en ont besoin. Cela a du sens. Lorsqu'on enlève le nombre de personnes qui n'en ont pas besoin, cela en fait plus pour les autres.
Vous avez également parlé des régimes enregistrés d'épargne-retraite. Il se trouve que je siège au Comité sénatorial spécial sur le vieillissement. J'ai appris cette semaine que moins de 40 p. 100 des Canadiens ont des régimes de pension non gouvernementaux —, que ce soit un régime géré par leur employeur ou un régime privé autogéré. Beaucoup de ces personnes sont dans la situation où, même si elles ont un petit revenu d'un modeste REER, si elles touchent le Supplément de revenu garanti de la Sécurité de la vieillesse, ce montant est imposé au taux alarmant de 100 p. 100 si l'on prend en compte tous les facteurs d'imposition.
M. Stapleton : Oui, cela peut monter à 100 p. 100.
Le sénateur Mercer : Voilà un bon moyen de dissuader quiconque à faire quoi que ce soit. C'est certainement le cas pour ceux qui sont à la retraite. Nous sommes confrontés à une importante pénurie de main-d'œuvre. Plus tôt, nous avons entendu des témoignages selon lesquels nous ne sommes pas les seuls dans ce cas et que cette situation se retrouve un peu partout au monde.
Dans vos études, vous dites que l'âge de la vie active se situe entre 18 et 64 ans. Or, nous sommes actuellement confrontés à une situation où il y a une grave pénurie de main-d'œuvre dans toutes les régions du pays, et où l'on essaie de convaincre les gens de 65 ans et plus de revenir sur le marché du travail, du moins ceux qui ont le temps disponible, les compétences, la santé et la capacité pour le faire — peut-être pas nécessairement le travail qu'ils faisaient à l'âge de 30 ans, mais un autre type de travail.
Vous êtes-vous penché sur ces questions lorsque vous avez fait vos études?
M. Stapleton : C'est une des questions qui se sont posées à nous et qui a été soulevée à maintes reprises. Les REER reposent sur le principe voulant qu'à l'âge de la vie active, on a un revenu plus important qu'à l'âge de la retraite. Par conséquent, lorsqu'on commence à retirer de l'argent de son REER pour le verser dans un Fonds enregistré de revenu de retraite ou FERR, et cetera, on est assujetti à un moindre taux d'imposition mais on aura bénéficié d'une déduction lorsque l'on gagnait davantage.
Souvent, les gens qui ont un revenu modeste s'aperçoivent que leur revenu augmente au moment où ils arrivent à l'âge de 65 ans. Une personne qui a un revenu modeste ne devrait donc pas souscrire un REER, car son revenu va augmenter lorsqu'elle arrivera à l'âge de 65 ans et son taux d'imposition risquera d'augmenter.
Les prestations de programmes d'assistance sociale de tous types, les prestations pour enfants, et autre, ne sont pas imposables alors que les prestations de la Sécurité de la vieillesse et du RPC le sont. La situation dont vous avez parlé en particulier est celle du Supplément de revenu garanti, où le fait de retirer de l'argent d'un REER a pour effet de diminuer les prestations de SRG que l'on reçoit. Les avantages que confèrent les REER sont donc nuls pour les personnes à revenu modeste; en fait, ces personnes n'ont aucun intérêt à souscrire un REER.
Certes, la publicité se garde bien de faire cette distinction. Les conseils que l'on reçoit généralement à ce sujet disent qu'il est universellement avantageux de souscrire un REER et d'épargner par ce moyen alors qu'en fait ce n'est pas le cas.
Bien que le rapport soit muet sur ce point, c'est certainement une question qui a été soulevée lors de nos délibérations.
Le sénateur Mercer : L'une des suggestions qui ont été faites consiste à permettre aux personnes qui n'ont pas l'avantage d'avoir un REER de gagner un certain revenu provenant soit d'un FERR, soit d'un travail rémunéré : on pourrait par exemple autoriser un niveau de revenu de 4 000 ou de 6 000 $ qui serait exclu du montant imposable.
Cela pourrait inciter des gens qui sont à la retraite à revenir au travail à temps partiel, et contribuer à réduire la pénurie de main-d'œuvre. Mais pourquoi quelqu'un ferait-il cela si son revenu est pour être imposé à 100 p. 100? Cela pourrait aussi contribuer à améliorer la situation de certains retraités et avoir par exemple pour effet de libérer certains types de logements du fait que ces personnes auraient peut-être désormais les moyens de s'offrir quelque chose d'un peu mieux.
M. Stapleton : Toutes ces mesures fiscales incitatives sont bénéfiques. Bien sûr, elles coûteraient de l'argent en programmes gouvernementaux.
Le sénateur Mercer : Elles ne coûteraient rien. Certes, on pourrait toujours mettre un montant d'argent sur ces mesures, mais il s'agirait d'impôts non perçus et non pas de subsides gouvernementaux aux contribuables.
M. Stapleton : Je suis d'accord.
Le sénateur Mercer : C'est un différent type de mesure incitative. Car c'est une chose que de demander au gouvernement de donner de l'argent aux particuliers; mais c'en est une autre si on ne leur prend rien : c'est alors une forme d'incitatif.
M. Stapleton : Absolument.
Le sénateur Mahovlich : Qu'en est-il des immigrants qui arrivent au pays? Ont-ils besoin d'avoir un travail avant d'arriver?
M. Stapleton : Cela dépend de la catégorie d'immigrant : ainsi, une situation particulière serait le cas d'une personne qui arriverait comme réfugié parrainé. Nous avons des immigrants qui appartiennent à la catégorie du regroupement familial, des immigrants indépendants et d'autres qui appartiennent à la catégorie des travailleurs qualifiés; il y a une grande diversité de raisons pour lesquelles les gens arrivent ici.
En ce qui concerne les programmes de sécurité du revenu, il faut savoir que bon nombre d'entre eux prennent un certain temps avant de verser des prestations. D'abord, il faut être résident permanent et être admis légalement au Canada afin de bénéficier de tout programme. Dans la plupart des programmes provinciaux et fédéraux, il y a toutes sortes de délais de carence avant que le bénéficiaire puisse recevoir une assistance quelconque; ces délais peuvent varier de trois à six mois, voire atteindre un an.
Pour ce qui est du programme de la Sécurité de la vieillesse, la période d'attente est beaucoup plus longue. Il faut attendre dix ans avant d'y être admissible. Évidemment, dans le cas des programmes d'aide sociale, la période d'attente est beaucoup plus courte.
Le sénateur Gustafson : Le monsieur d'Australie qui est intervenu disait que l'attitude des gens était un aspect très important. Je me demande effectivement si nous sommes dans la bonne voie. Il me semble que l'on ne fait qu'essayer de régler les problèmes avec de l'argent et que les choses ne font qu'empirer. Je sais bien qu'il y a des situations où une personne n'est pas en mesure de gagner sa vie. Je ne parle pas de cela; ces personnes ont vraiment besoin d'aide.
Mais à l'heure actuelle, du moins dans notre région, si l'on peut trouver un menuisier — ou un plombier ou un électricien — pour moins de 400 $ par jour, on a beaucoup de chance. C'est quasi impossible d'en trouver; pourtant, on a beaucoup de difficulté à attirer des gens qui pourraient contribuer à la société tout en gagnant bien leur vie.
Je me demande si, dans une certaine mesure, nous ne sommes pas responsables de cette mentalité.
M. Stapleton : Ce qui me frappe, sénateur, c'est quand on remonte à l'époque où le Régime d'assistance publique du Canada a été créé, en 1966. Il ne faut pas oublier que beaucoup de programmes que nous avons aujourd'hui ont vu le jour en 1966 et 1967. Ainsi, les RPC, PSV et SRG actuels ont été établis au cours d'une courte période avant l'année de notre centenaire.
Dans le Régime d'assistance publique du Canada établi en 1966, il était question des personnes considérées comme ne faisant pas partie de la main-d'œuvre dite active. Le régime considérait généralement que les femmes ne faisaient pas partie de la population active. Il considérait les femmes comme n'étant pas le principal soutien de famille. Il était question des personnes invalides. Dans chaque cas, il était clair et entendu qu'un grand nombre d'adultes en âge de travailler n'étaient pas inclus dans la population active.
Aujourd'hui, la situation de l'emploi est beaucoup plus robuste. La société a beaucoup changé et maintenant presque tout le monde travaille. Non seulement on s'attend à ce qu'une personne travaille dès lors qu'elle en est capable, mais il n'y a plus de parent seul qui dise ne pas vouloir travailler. De fait, au cours de nos délibérations, rares étaient ceux qui disaient ne pas vouloir un emploi rémunéré.
C'est ce qui se produit dans le cas des personnes handicapées. Tous ces gens qui étaient considérés comme ne faisant pas partie de la population active il y a 40 ans, nous les considérons aujourd'hui — et ils se considèrent eux-mêmes — en tant qu'actifs, ce qui est une bonne chose.
Nous avons ces programmes, dont beaucoup sont issus de l'époque où les programmes gouvernementaux étaient destinés à fournir un revenu aux gens qui ne travaillaient pas. Par exemple, dans le cas du programme de prestations d'invalidité du RPC, dès lors que la personne revient au travail, ses prestations cessent complètement de lui être versées. Pas seulement à 50 p. 100 ou à 25 p. 100, mais à 100 p. 100. Et cela parce qu'il s'agit d'un programme de la première génération.
Ma réponse à votre question et mon point de vue à ce sujet, c'est que la société a changé. Les mentalités ont changé et, dans bien des cas, nos programmes n'ont pas suivi. Ils sont devenus une entrave, et ils bloquent les gens et les rendent réticents à accepter un travail qu'ils pourraient faire.
Vous avez raison de soulever le problème de la pénurie de main-d'œuvre, et qu'il est difficile de trouver des gens qualifiés. Il faudrait que ceux qui ont toujours été en dehors de la population active soient incités à intégrer le marché du travail.
Le sénateur Gustafson : Et qu'en est-il des immigrants qui arrivent chez nous? Il me semble que l'on devrait plutôt attirer ceux qui ont une bonne instruction. Il me semble que tout le monde s'entend pour dire que ces personnes pourraient contribuer à la société.
Par exemple, il est très difficile aujourd'hui de trouver des travailleurs agricoles. Si l'on ne peut pas trouver un agriculteur de 70 ans à la retraite pour venir nous aider, nous n'aurons pas d'aide; un point c'est tout.
Il y a des gens qui veulent travailler sur les plates-formes de forage, dans des conditions très pénibles. Ils sont prêts à travailler sur une plate-forme à -19 degrés, avec tout ce matériel en acier et toute cette eau. C'est loin d'être agréable. Croyez-moi, cela vaut les 35 dollars de l'heure qu'ils sont payés.
Il me semble qu'il faudrait changer certaines choses pour régler tous ces problèmes. Aujourd'hui, les riches s'enrichissent de plus en plus et les pauvres ne cessent de s'appauvrir.
M. Stapleton : C'est ce que confirment les statistiques.
Le sénateur Gustafson : Cela semble le cas.
M. Stapleton : Oui sénateur. Concernant la situation que vous avez mentionnée, soit que nous devons importer des travailleurs, il est vrai que le mot du jour est que notre croissance et notre main-d'œuvre — au vu de notre situation démographique et du prochain départ à la retraite de la génération du baby-boom — seront largement tributaires de l'immigration.
Ce ne serait pas nécessairement le cas si nous pouvions faire des efforts supplémentaires pour intégrer les membres de notre population active qui sont essentiellement exclus de la main-d'œuvre. C'est précisément le genre de mesures que nous recommandons dans ce rapport afin que nous soyons en mesure de changer ces programmes et de donner aux personnes des incitatifs à y participer. Il serait logique sur le plan économique pour eux d'y participer.
Le sénateur Gustafson : Je me demande si nous tirerons les leçons que les Américains n'ont jamais apprises, même avec leur programme de logement. Je crois avoir entendu sur CNN que 8 000 logements avaient été abandonnés à Cleveland. Nous nous dirigeons vers une époque où les coûts de logement sont devenus si élevés que même deux travailleurs n'ont pas la capacité financière d'acheter une maison. Même deux travailleurs dont le revenu est supérieur au salaire minimum ne peuvent se permettre un logement de 500 000 $. La population vieillit et de moins en moins de personnes contribuent à la richesse du pays.
M. Stapleton : Nous avons pu attirer deux économistes principaux affiliés à des banques à ce groupe de travail sur la modernisation de la sécurité du revenu pour les adultes en âge de travailler (MISWAA). Ces personnes travaillent au centre-ville de Toronto. Elles voient la structure des coûts et ce qu'il en coûte pour vivre et travailler dans cette ville. Les gens deviennent vite très préoccupés par la façon de joindre les deux bouts à Toronto où les coûts de logement sont si élevés.
Bien sûr, les gens se déplacent souvent sur de longues distances par divers modes de transport public. Le coût d'un billet de train GO, combiné à celui d'un laissez-passer de la Toronto Transit Commission, signifie qu'il faut gagner beaucoup d'argent avant de rentabiliser ses coûts. C'est pourquoi nous commençons à voir certaines pénuries de main- d'œuvre au centre-ville de Toronto.
Le sénateur Peterson : Vous avez mentionné plus tôt que, dans la région d'Ottawa — il se peut que je me trompe —, 80 p. 100 des sans-emploi n'ont pas accès au régime?
M. Stapleton : Ils n'ont pas accès à l'assurance-emploi.
Le sénateur Peterson : Pour quelles raisons?
M. Stapleton : Tout d'abord, il y a un certain nombre de personnes qui ne cotisent pas au régime parce qu'elles sont des entrepreneurs indépendants et se retrouvent dans une situation où elles ne reçoivent pas de salaire. Elles ne sont pas des employés; elles se retrouvent plutôt dans une situation contractuelle où elles peuvent être propriétaires uniques, ce qui est peut-être le seul moyen pour elles de se tailler une place dans ce secteur en particulier. C'est une situation que nous avons observée à maintes reprises dans les collectivités d'immigrants, par exemple. Ces personnes n'auront pas accès à l'assurance-emploi lorsqu'elles perdront leur emploi.
Deuxièmement, il y a le seuil du nombre d'heures de travail accumulées qui détermine le droit à des prestations d'assurance-emploi. Bon nombre des titulaires d'emplois, surtout dans le secteur des services — derniers embauchés, premiers licenciés — où les personnes ont un sentiment d'appartenance précaire à la main-d'œuvre, tentent d'accumuler le plus grand nombre d'heures de travail possibles au moyen de postes fractionnés et de divers emplois en demande.
Ottawa, par exemple, est une région où le taux de chômage est peu élevé, et la région du Grand Toronto est un secteur où le taux de chômage est moyennement peu élevé. Par conséquent, le nombre d'heures requis en vertu de cette disposition précise de la Loi sur l'assurance-emploi, ce qu'on appelle la norme variable d'admissibilité, signifie que le seuil est très élevé.
Troisièmement, il y a bien sûr les personnes qui travaillent à temps partiel à titre d'employés, mais qui seront entrepreneurs indépendants ailleurs. Elles éprouveront aussi beaucoup de difficultés à accumuler le nombre d'heures requis.
Nous avons une situation dans laquelle chaque employé salarié doit débourser près de 2 p. 100 de son chèque de paie, et ce, dès le premier dollar de sa rémunération comme employé. Nous le voyons tous sur notre chèque de paie en tant que retenue au titre de l'assurance-emploi.
Les gens cotisent au régime, puis ils n'ont pas la possibilité d'y avoir accès.
Le sénateur Peterson : Les employeurs ont une part de responsabilité dans cette situation. Ils veulent des employés à temps partiel parce qu'ils ne veulent pas payer d'avantages sociaux à long terme. Le problème sera probablement toujours présent. Je suppose que les recettes de l'assurance-emploi sont versées dans les recettes générales. S'agit-il de recettes réservées?
M. Stapleton : Elles s'accumulent comme surplus national, puis sont versées au gouvernement. Le gouvernement pourrait mettre de l'avant le point de vue opposé, c'est-à-dire que, lorsque le régime d'assurance-emploi accuse un déficit, les montants nécessaires au régime doivent être prélevés sur les recettes générales. Cependant, nous n'avons pas connu une telle situation.
Le sénateur Peterson : Je suis persuadé que cela ne se produira pas.
M. Stapleton : Je crois que je suis de votre avis sur ce point.
Le sénateur Callbeck : Il y a quelques points concernant les commentaires des témoins. Vous avez parlé du Régime d'assistance publique du Canada, qui bien sûr, est le programme à frais partagés : pour chaque dollar que la province dépense en services sociaux, le gouvernement fédéral accorde un dollar.
Nous avons entendu des témoins déclarer que le gouvernement fédéral devrait réintroduire le Régime d'assistance publique du Canada. Vous en avez discuté et vous avez expliqué que le régime avait été introduit dans les années 1960, à une époque bien différente de la nôtre. Si je comprends bien, vous ne croyez pas que ce soit la bonne ligne de conduite.
M. Stapleton : Je vais choisir mes mots avec circonspection, madame le sénateur. Lorsque nous examinons les années 1960, nous remarquons qu'il y avait un certain nombre de programmes fédéraux à frais partagés : des programmes pour voies publiques, des programmes de relance de l'agriculture, la Loi sur l'aménagement rural et le développement agricole ou le programme ARDA et le Fonds de développement économique rural ou le programme FODER, ce qui s'ajoute à ces programmes. C'était l'époque où le gouvernement fédéral espérait que les provinces s'engagent à verser les mêmes sommes qu'il consacrait.
La situation financière actuelle est très différente, surtout en cette période où il y a le Transfert canadien en matière de santé, le Transfert canadien en matière de programmes sociaux et les changements apportés à la péréquation et aux divers niveaux de financement. Il est sans doute impossible de simplement retourner en arrière et de proposer de ramener un programme fédéral à frais partagés uniquement pour ce secteur sans tenir compte de tous les autres.
Nous avons retiré le principe de la péréquation du Transfert canadien en matière de programmes sociaux et nous en avons fait un programme uniforme. Toutefois, nous avons le régime d'assurance-emploi dont nous avons discuté aujourd'hui en réponse à diverses questions. Ce programme favorise nettement certaines provinces parce que leur taux de chômage est plus élevé, ainsi que certaines régions du pays — parce que le régime est divisé en régions — où il existe un élément de péréquation.
En raison du type de règlements qu'il a mis en place touchant les provinces et territoires, le Régime d'assistance publique du Canada était un programme très efficace en ce qui a trait à l'établissement de normes nationales. Cependant, avant de simplement rétablir le Régime d'assistance publique du Canada, nous aurions intérêt à étudier attentivement tous les autres changements en matière de financement qui ont eu lieu dans la fédération.
Cela dit, le gouvernement fédéral joue un rôle majeur en ce qui a trait au pouvoir d'application des ressources, en ce qui a trait aux Programmes de la sécurité du revenu du fédéral, soit par modification constitutionnelle, soit par pouvoir d'application des ressources ou encore au moyen du régime fiscal. Puisqu'il finance 80 p. 100 du système de sécurité du revenu au Canada, le gouvernement fédéral ne devrait pas rester silencieux sur les attentes fédérales en matière de sécurité du revenu. Même s'il finance ces 80 p. 100, il n'a pas vraiment de plan général sur les moyens d'utiliser la sécurité du revenu au sein de la fédération. Ainsi, il semble qu'il revient au gouvernement fédéral — comme il l'a fait avec le Régime d'assistance publique du Canada dans le cadre de ses projets de fédéralisme coopératif avec les provinces et les territoires — d'élaborer une vision générale de la forme que devrait prendre la sécurité du revenu au Canada. C'est ce dont nous avons vraiment besoin en l'absence d'un programme comme le Régime d'assistance publique du Canada.
Le sénateur Callbeck : Nous avons entendu certains témoins soutenir que nous avons besoin d'une stratégie nationale de lutte contre la pauvreté. Connaissez-vous les stratégies en place à Terre-Neuve-et-Labrador et au Québec?
M. Stapleton : Oui, quatre provinces ont maintenant mis en œuvre des stratégies provinciales de lutte contre la pauvreté. Fait intéressant, ces quatre provinces, Terre-Neuve-et-Labrador, la Nouvelle-Écosse, le Québec ou l'Ontario, ont instauré leur propre régime provincial de prestations pour enfants. Il semble que l'adoption de ces régimes ait entraîné un exercice de réflexion sur l'adoption d'une stratégie de lutte contre la pauvreté dans leur propre province. Nous verrons, au cours des prochaines années, ces quatre provinces s'entendre sur une vision commune pour sortir les Canadiens de la pauvreté.
Un sondage Angus Reid a révélé en septembre dernier que 80 p. 100 des Canadiens croient que la pauvreté est un problème majeur. Une proportion identique de 80 p. 100, peut-être pas tous les mêmes répondants, ont dit que les gouvernements n'étaient pas efficaces dans la lutte contre la pauvreté. Si l'on peut en croire le sondage, la situation actuelle inquiète gravement les Canadiens. Cependant, ils ne sont pas d'avis que les gouvernements font un bon travail. Il semble que les provinces entendent ces réponses et croient que, compte tenu du rendement économique du Canada — ainsi que du faible taux de dépenses relatives aux programmes sociaux par rapport à d'autres pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques —, nous avons vraiment une occasion à saisir, que nous sommes à un moment décisif de notre histoire, où nous pouvons commencer à discuter de l'élimination de la pauvreté et que ces discussions seront massivement appuyées par la population.
Étant donnée que 80 p. 100 des fonds consacrés aux Programmes de la sécurité du revenu sont dépensés à l'échelon fédéral, il appartient, à mon avis et selon l'avis du groupe de travail, au gouvernement fédéral de jouer un rôle majeur dans l'élaboration d'une stratégie nationale de lutte contre la pauvreté.
La présidente : Merci beaucoup, honorables sénateurs, et merci beaucoup, monsieur Stapleton. C'est un exposé très instructif que vous nous avez donné ce soir. Merci de votre présence.
Honorables sénateurs, avant que vous ne quittiez, nous allons prendre une petite pause pour nous occuper d'un détail interne que nous devons régler.
Vous avez tous une feuille; la greffière nous dit qu'il y a un règlement interne dont nous devons discuter avant que nous quittions pour notre voyage vers le Nord.
Je vous demande si vous êtes d'accord; je vais simplement lire ce qui est écrit :
Que, conformément à l'article 89, la présidence soit autorisée à tenir des réunions du 18 février 2008 au 21 février 2008 pour entendre des témoignages et à en permettre la publication sans qu'il y ait quorum, pourvu que deux membres du comité soient présents.
C'est purement à titre de précaution. Nous sommes en pleine forme.
Puis-je avoir un motionnaire et un comotionnaire?
Le sénateur Peterson : Je propose le tout.
La présidente : Tous sont-ils d'accord?
Des voix : D'accord.
La présidente : Merci.
La séance est levée.