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OLLO - Comité permanent

Langues officielles

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Langues officielles

Fascicule 10 - Témoignages du 28 septembre 2009


OTTAWA, le lundi 28 septembre 2009

Le Comité sénatorial permanent des langues officielles se réunit aujourd'hui à 17 h 6 pour faire une étude sur l'application de la Loi sur les langues officielles, ainsi que des règlements et instructions en découlant, au sein des institutions assujetties à la loi. Sujet : Les Jeux olympiques et paralympiques d'hiver 2010.

Le sénateur Maria Chaput (présidente) occupe le fauteuil.

[Français]

La présidente : Honorables sénateurs, je vois que nous avons le quorum. Je déclare donc la séance ouverte.

Avant de passer à la présentation des témoins et la télédiffusion, j'aimerais discuter brièvement de la présidence pour la prochaine réunion. La vice-présidente et moi-même serons absentes de la réunion de lundi prochain. La ministre de la Santé a confirmé sa disponibilité à comparaitre lors de cette réunion.

Si vous me le permettez, j'aimerais entendre une motion pour que l'honorable sénateur Losier-Cool soit élue présidente suppléante du comité pour la réunion qui se tiendra le lundi 5 octobre 2009.

Le sénateur Comeau : Je propose la motion.

La présidente : Vous êtes d'accord pour que le sénateur Losier-Cool assume la présidence à titre de suppléante pour la réunion du lundi 5 octobre?

Des voix : D'accord.

La présidente : Je vous souhaite la bienvenue au Comité sénatorial permanent des langues officielles. Je suis le sénateur Maria Chaput du Manitoba, présidente du comité.

Pour commencer, j'aimerais vous présenter les membres du comité présents aujourd'hui. À partir de mon extrême gauche, nous avons le sénateur Comeau et le sénateur Nolin. À ma droite se trouvent le sénateur Tardif, le sénateur Losier-Cool et le sénateur Greene.

Nous accueillons aujourd'hui le commissaire aux langues officielles, M. Graham Fraser, accompagné de Mme Johane Tremblay, commissaire adjointe intérimaire à la Direction générale des politiques et communications, et Mme Ghislaine Charlebois, commissaire adjointe à la Direction générale de l'assurance de la conformité.

Le 15 septembre, le commissariat aux langues officielles a rendu public le suivi à son étude intitulée : Une occasion en or, Vancouver 2010 : Viser un modèle Canadien de la dualité linguistique dans le sport international. Dans son rapport, il fait état d'observations récentes concernant les préparatifs visant à offrir des services dans les deux langues officielles aux Jeux de 2010. Comme vous le savez sans doute, le comité a lui aussi rendu public un rapport de suivi au sujet de la dualité linguistique aux Jeux de 2010.

Monsieur Fraser, les membres du comité vous remercient d'avoir accepté l'invitation à comparaître aujourd'hui. Je vous invite maintenant à prendre la parole.

[Traduction]

Graham Fraser, commissaire aux langues officielles, Commissariat aux langues officielles : Mesdames et messieurs les sénateurs, membres du Comité sénatorial permanent des langues officielles, bonsoir. Je suis heureux de pouvoir échanger avec vous sur mon rapport de suivi des Jeux olympiques et paralympiques de 2010 à Vancouver, que j'ai publié tout récemment. J'ai été heureux de voir que votre comité a également rendu public son rapport sur le sujet, et vos recommandations m'ont impressionné. L'intérêt soutenu de votre comité pour cette question a été un apport important à l'avancement de ce dossier d'envergure.

Au mois de décembre 2008, j'ai publié un rapport soulignant des lacunes importantes quant aux obligations en matière de langues officielles du Comité d'organisation des Jeux olympiques et paralympiques de 2010 à Vancouver (le COVAN) et de Patrimoine canadien. J'avais également souligné la bonne volonté et l'engagement du COVAN, mais aussi les nombreux défis qu'il restait à surmonter pour faire des Jeux d'hiver de 2010 un événement qui reflète la nature du Canada et sa dualité linguistique.

Je constatais notamment que plusieurs institutions fédérales ne réalisaient pas que les Jeux constituent un test important de leur capacité à servir le public dans les deux langues officielles. Mon personnel a donc mené une campagne de sensibilisation auprès des institutions fédérales l'hiver dernier.

[Français]

À cinq mois de la tenue des Jeux, je constate que des progrès importants ont été réalisés. Beaucoup a été fait par le COVAN, et certaines institutions fédérales ont mis sur pied des initiatives novatrices pour offrir au public une performance d'envergure olympique et aussi authentiquement canadienne. Cependant, le rapport de suivi que j'ai publié souligne un bon nombre de lacunes importantes. Si elles ne sont pas rectifiées rapidement, elles pourraient compromettre le succès des Jeux sur le plan des langues officielles.

Le temps presse et un coup barre s'impose. Il ne reste que 137 jours avant le début des Jeux. Pour être fin prêts lorsque le signal de départ retentira, le COVAN, Patrimoine canadien et les diverses institutions fédérales qui offriront des services aux Canadiens et aux visiteurs dans le cadre des Jeux doivent poser des gestes décisifs au cours des prochaines semaines.

Mon rapport de suivi contient 11 recommandations. Certaines concernent le COVAN, d'autres Patrimoine canadien dans son rôle de coordination, et plusieurs s'adressent aux institutions fédérales, notamment celles présentes dans les grands aéroports du pays.

[Traduction]

La plupart des recommandations s'adressant aux COVAN portent sur le recrutement et l'encadrement des bénévoles, la signalisation, la traduction et la prestation de services au public. J'ai été heureux d'apprendre que le gouvernement fédéral a annoncé un investissement supplémentaire de 7,7 millions de dollars destinés à la traduction, à la signalisation pour les sites olympiques et aux cérémonies de remise des médailles. Étant donné l'urgence et l'importance de l'enjeu, il était grand temps que le COVAN et Patrimoine canadien trouvent une solution. Cette annonce est bien sûr positive.

Le COVAN a maintenant tous les moyens à sa disposition pour réussir et pour assurer le plein respect de toutes les clauses de l'annexe A de l'entente multipartite. Je m'attends à ce que les fonds supplémentaires dont disposera le COVAN donnent des résultats concrets qui permettront aux athlètes, aux représentants des médias et à la population canadienne d'avoir une expérience positive lors des Jeux.

Cela dit, il ne faudrait pas que les autres lacunes soulignées dans mon rapport de suivi soient ignorées. Des changements récents au modèle que le COVAN compte utiliser pour l'affichage extérieur sont très encourageants. Je reste cependant préoccupé par le peu d'empressement démontré par les partenaires municipaux et provinciaux du COVAN à ce chapitre. L'exemple de l'Anneau olympique de Richmond est le symptôme d'un problème bien plus large. Les fonds supplémentaires pour la signalisation devraient permettre au COVAN d'éviter qu'une telle situation ne se reproduise.

Concernant les bénévoles, le rapport de suivi note que le niveau de bilinguisme des bénévoles est adéquat. Également, le COVAN semble en voie d'atteindre son objectif de 3 500 bénévoles bilingues, sur un total de 25 000. Cette proportion de 14 p. 100 semble toutefois ne laisser que très peu de place au déplacement et au remplacement du personnel. Le plan de répartition des bénévoles devra inclure des moyens d'affecter les bénévoles bilingues là où ils sont requis, et ce, en tout temps.

Comme vous le notez dans votre rapport, j'ai aussi trouvé le spectacle du compte à rebours très décevant du point de vue du reflet de la francophonie au pays. La qualité des festivités culturelles entourant les Jeux devra être grandement supérieure pour permettre à tous les Canadiens de s'y reconnaître et pour projeter une image complète de la richesse culturelle du Canada. Cela est particulièrement vrai pour les cérémonies d'ouverture et de clôture des Jeux, des spectacles qui seront diffusés à l'échelle de la planète.

Voilà, en gros, ce dont mon rapport fait état concernant les aspects sous la responsabilité du COVAN.

[Français]

Pour la plupart des gens qui iront à Vancouver pour célébrer, travailler ou participer aux compétitions, l'expérience olympique commencera à l'aéroport et dans d'autres lieux où des institutions fédérales sont en contact avec le public. C'est pourquoi mon rapport examine en détail les mesures prises par ces institutions.

Nous avons également effectué sur le terrain une série d'observations de la disponibilité du service à de nombreux endroits. Les résultats m'inquiètent considérablement.

Notre analyse des observations sur le terrain montre que malgré les efforts accomplis par certaines institutions pour améliorer le résultat, le réflexe d'offrir activement le service en français et en anglais n'est pas généralement présent.

De façon générale, les aéroports ne sont pas prêts à accueillir les gens dans les deux langues officielles. Les services en français sont souvent complètement absents. Et lorsqu'ils existent, les employés ont quand même tendance à faire le premier contact avec les visiteurs en anglais seulement.

À l'aéroport de Vancouver, la porte d'entrée des Jeux, les contrôles de sécurité, Air Canada, de même que les autorités aéroportuaires obtiennent des résultats particulièrement alarmants, y compris une note de zéro pour l'accueil bilingue par les concessionnaires de l'aéroport de Vancouver.

En tant que fournisseur officiel et aéroport hôte des Jeux de 2010, l'aéroport de Vancouver accueillera des milliers de voyageurs. Si l'on se fie aux résultats des observations, le maintien du statu quo est évidemment insuffisant. La situation est aussi loin d'être parfaite à l'aéroport Pearson de Toronto. Ce dernier est le plus important aéroport du Canada et un centre névralgique. Par conséquent, une grande partie des visiteurs qui se rendront aux Jeux de 2010 y feront escale.

D'un côté plus positif, je tiens tout de même à souligner que les employés de Parcs Canada et de Service Canada peuvent offrir un service bilingue dans presque tous les cas. Ces institutions doivent cependant s'assurer que tous leurs employés accueillent les visiteurs dans les deux langues officielles pour leur indiquer qu'un service bilingue est disponible.

La Société canadienne d'hypothèques et de logement qui administre le site important de Granville Island semble elle aussi être en mesure d'offrir des services bilingues, mais fait face aux mêmes défis quant à l'accueil bilingue. J'ai demandé à chacune de ces institutions de partager avec moi après les Jeux un rapport d'évaluation de leur rendement quant à l'usage des deux langues officielles. J'espère qu'il s'agira surtout d'histoire de succès et d'innovation plutôt que d'échecs embarrassants.

En conclusion, je tiens à préciser une dernière chose, les Jeux olympiques et paralympiques de 2010 à Vancouver sont les Jeux de tous les Canadiens. Il est essentiel que ces Jeux reflètent les valeurs canadiennes dont fait partie la dualité linguistique. Je ne veux pas que les visiteurs se fassent accueillir par une phrase comme « Sorry, I don't speak French. »

J'appuie aussi votre troisième recommandation qui traite de la nécessité d'élaborer des outils pour les bénévoles afin d'assurer une offre active de services dans les deux langues officielles. Mon propre rapport de suivi comprend également la recommandation à l'intention des institutions fédérales qui va dans le même sens.

Pour ma part, je crois qu'il est nécessaire de mettre en place un système, un protocole ou une méthode qui permettrait au personnel du COVAN, aux agents de sécurité ou à d'autres employés de dire à un visiteur « un instant s'il vous plaît » et de demander à un collègue bilingue de prendre la relève.

[Traduction]

Dans l'Ouest canadien, 600 000 personnes maîtrisent nos deux langues officielles, dont la moitié habitent la Colombie-Britannique. Plusieurs institutions fédérales prouvent chaque jour que les langues officielles sont une composante importante d'un service de qualité. Et là où il existe des défis, des solutions existent aussi. Ces solutions peuvent aussi bien être élaborées par les différents acteurs eux-mêmes que provenir de mon rapport... ou du vôtre.

Je suis heureux de constater les progrès accomplis, mais inquiet de voir que certains éléments clés ne sont toujours pas en place. Les différents acteurs doivent agir maintenant pour donner le coup de barre nécessaire.

[Français]

Les Jeux constituent un évènement d'envergure international et une occasion unique pour mettre en valeur la dualité linguistique comme valeur fondamentale du Canada. Les attentes de la Francophonie internationale à l'égard du Canada sont élevées. Comme le souligne M. Raffarin, ancien premier ministre français, et Grand Témoin de la Francophonie aux Jeux de Pékin, le Canada étant officiellement un pays bilingue, personne ne comprendrait que le français y soit en retrait.

C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions.

La présidente : Merci, monsieur le commissaire. La première question sera posée par le sénateur Nolin.

Le sénateur Nolin : Je voudrais féliciter le commissaire ainsi que ses adjoints pour leurs efforts soutenus. Il n'est pas toujours facile de valoriser le fait bilingue du Canada. Les Canadiens sont fiers et reconnaissent, souvent silencieusement, cet élément très distinctif du Canada. Il y a un grand élément de fierté et aussi de défi dans le fait d'accueillir les Jeux olympiques à Vancouver.

Une de nos petites recommandations, vous l'aurez remarqué, est l'implication du Bureau du Conseil privé. Il nous est apparu important de mobiliser un joueur majeur de la coordination de l'activité gouvernementale canadienne. J'aimerais savoir si vous voyez là une source de solution.

Dans votre témoignage, vous dites que vous êtes, je présume avec l'aide de votre personnel, en communication avec divers fournisseurs de services fédéraux. Vous avez fait allusion à la Société canadienne d'hypothèques et de logement et à Parcs Canada. D'autres pourraient peut-être épauler l'effort fédéral dans la livraison des Jeux olympiques bilingues. Comment trouvez-vous cette recommandation?

M. Fraser : J'ai effectivement remarqué cette recommandation; lors d'une rencontre avec le greffier, je lui ai mentionné que cette recommandation était dans votre rapport.

Effectivement, Mme Tremblay était aussi en contact avec un de ces adjoints pour s'assurer que l'appareil était conscient de cette recommandation et on nous a assuré que c'était le cas.

Il me fait plaisir de penser que le ministre Moore a annoncé, six heures après le dépôt de notre rapport, une somme de 7,7 millions de dollars. Je ne crois pas que cette prise de décision ait eu lieu dans les six heures qui ont suivi notre rapport. Si des gens le pensent, je ne les contredirai pas, mais je pense que cela démontre une volonté exprimée par le gouvernement.

Il y a cinq mois, le ministre et d'autres représentants du gouvernement ont comparu devant votre comité et ont témoigné de leur détermination. Il est important de rappeler à toutes les instances des organismes centraux que c'est important.

Le Conseil du Trésor est une institution importante qui a la responsabilité de surveillance des institutions fédérales. J'ai eu des conversations avec des membres du gouvernement à qui j'ai rappelé l'importance d'utiliser les espaces fédéraux disponibles pour avoir des informations dans les deux langues tant au gouvernement fédéral que dans les institutions fédérales.

Souvent, lorsqu'on arrive à l'aéroport pour les Jeux olympiques, on ne cherche pas seulement des informations sur les vols, mais aussi d'autres informations comme où aller. Il y a là une occasion pour le gouvernement fédéral de s'assurer que l'information soit disponible bien avant que les gens arrivent sur les sites que ce soit par écrans cathodiques, télévisions internes, banderoles, affiches ou autres. Certaines failles de disponibilité des services dans les deux langues officielles ont été identifiées dans les aéroports.

Il est très bien d'envoyer le message aux organismes centraux comme le Conseil privé. Madame Tremblay avez-vous autre chose à ajouter?

Johane Tremblay, commissaire adjointe par intérim, Direction générale des politiques et des communications, Commissariat aux langues officielles : Non, cela va dans le même sens que de rappeler le rôle du Conseil du Trésor.

Le sénateur Nolin : Vous savez, la dernière chose qu'on voudrait voir, dans un recoin de l'administration fédérale, quand tout cela sera fini — et c'est un peu ce qui animait notre recommandation —, c'est quelqu'un qui lèverait la main et dirait : « Pourquoi vous ne me l'avez pas demandé? J'avais déjà fait cela, j'aurais pu vous aider. » On ne voudrait pas qu'une telle chose se produise. C'est pour cela qu'on croit qu'il y a sûrement un chef d'orchestre quelque part qui peut vous aider et aider le ministre Moore qui, malgré beaucoup de bonne volonté, j'en suis convaincu, n'a pas la capacité de rejoindre tous ces individus qui évoluent dans l'appareil fédéral, qui pourraient certainement donner un petit coup de main et lever la main après les événements et dire : «Vous ne me l'avez pas demandé ».

M. Fraser : Dans tout ce processus, malgré les failles qu'on a identifiées, il n'y a pas d'adversaire. Personne n'est contre l'idée. Il y a un consensus selon lequel il faut que cela se fasse. Parfois, il y a certains éléments qui sont arrivés à l'étape du financement puis il y avait des critères qui n'étaient pas tout à fait taillés en fonction des besoins. C'est pour cette raison que cela a pris un certain temps.

Le sénateur Nolin : C'est la force d'inertie.

M. Fraser : La force d'inertie. Je pense que votre raisonnement a été perspicace!

Le sénateur Nolin : Merci bien! Je terminerai sur cette belle note!

Le sénateur Tardif : Monsieur le commissaire, c'est toujours un plaisir de vous revoir. Je tiens à vous féliciter, ainsi que toute votre équipe, pour l'excellent rapport que vous avez produit. En lisant les observations et les commentaires dans le rapport, j'ai été troublée par toute la question concernant les services au public qui voyage. Plus particulièrement, par les institutions telles que Air Canada, l'Agence des services frontaliers du Canada et l'Administration canadienne de la sûreté du transport aérien. Il semblerait qu'il y a très peu d'offres actives de service en français. Je le sais parce que je voyage souvent entre Edmonton et Ottawa et dans bien des cas, le service bilingue, c'est de pouvoir dire « Hello! Bonjour! » Voilà, ça termine là.

Est-ce que vous avez confiance que ces institutions pourront remplir leurs obligations en matière de langues officielles? Et quels mécanismes avons-nous pour les inciter davantage à respecter leurs obligations?

M. Fraser : J'essaie toujours d'éviter la question de confiance ou de non-confiance parce que je ne veux pas que la question se pose sur mes états d'âme. On a identifié des écarts, on a identifié des failles et on continue de surveiller de près. Le problème pour le public voyageur, c'est, d'une certaine façon, plus grave que le problème des Jeux olympiques parce que c'est la première fois qu'on tient des Jeux olympiques à Vancouver. Les gens qui organisent les Jeux ont signé une entente multipartite et ils font des efforts, mais ce n'est pas comme si ces individus travaillaient pour un organisme qui avait ces obligations depuis 40 ans. Lorsqu'on parle d'Air Canada et des installations aéroportuaires, il est question d'obligations déjà existantes. D'ailleurs, c'est pour cette raison que ce qui est important, c'est de rappeler à ces organisations l'importance de leurs obligations et l'importance d'offrir du service dans les deux langues officielles. Il faut en effet leur rappeler que tout cela n'est pas juste un règlement quelque part dont ils ignorent peut-être l'existence, mais que c'est quelque chose d'actuel, de réel, lié à notre identité canadienne et au concept fondamental de service aux Canadiens et au public voyageur.

Suite à nos observations, j'ai remarqué qu'il y a certaines institutions qui ont vraiment répondu à l'appel. Parcs Canada a préparé un DVD pour ses employés. Les agents des organisations de sécurité ont également fait un effort. L'Agence des services frontaliers fait un effort considérable afin qu'il y ait des services dans des postes d'entrée où, traditionnellement, on ne pense pas à cela. On fait donc une relocalisation des employés pour augmenter le service bilingue. Il y a des institutions fédérales qui font des efforts vraiment louables, qui voient cela comme un défi et qui sont déterminées à relever le défi. Il y en a d'autres où on est moins certain que le message passe.

On va donc continuer à les surveiller de près. Je me suis engagé à présenter des rapports trimestriels au comité de la Chambre. D'ici les Jeux olympiques, j'aurai l'occasion de voir s'il y a eu des progrès. Aussi, des rencontres sont prévues cette semaine afin d'en discuter. Ghislaine, pouvez-vous en parler un peu?

Ghislaine Charlebois, commissaire adjointe, Direction générale de l'assurance de la conformité, Commissariat aux langues officielles : Oui, on a organisé cette semaine une rencontre avec l'Association des concessionnaires de l'aéroport de Toronto pour justement les sensibiliser à leurs obligations. C'est quelque chose de très positif. On va directement s'adresser à ces concessionnaires. Comme le disait le commissaire, notre travail est de continuer à rappeler aux institutions que c'est maintenant qu'ils ont des obligations et que ce n'est pas seulement pendant les Jeux olympiques. Quand on se fait répondre que c'est « business as usual », ce qu'on leur dit par nos observations, c'est que « business as usual », ce n'est déjà pas bon. On leur dit : « Il faut que vous mettiez des mesures permanentes en place pour vous assurer que le service soit disponible et qu'il le sera également lors des Jeux olympiques et après. »

Le sénateur Tardif : Merci pour cette information. Est-ce que vous demandez aux organisations qu'elles vous soumettent un plan concret ou stratégique de ce qu'elles vont faire? Vous avez noté certaines déficiences concernant les services offerts au public voyageur. Est-ce que les organisations en cause doivent maintenant vous soumettre un plan d'action? Il faut dire que Air Canada est une compagnie nationale, qui est aussi commanditaire des Jeux olympiques de 2010. Elle a des engagements à respecter. Je sais qu'on a toujours des problèmes avec Air Canada, mais la situation est critique.

M. Fraser : Oui, vous allez voir qu'il y a un certain nombre d'institutions à qui on demande de nous faire part de leur plan d'ici le 30 novembre. Il s'agit de la recommandation no 9. Air Canada, l'Administration canadienne de la sûreté du transport aérien, l'Agence des services frontaliers du Canada et les autorités aéroportuaires doivent démontrer d'ici le 30 novembre « qu'elles ont pris des mesures concrètes pour faire en sorte que le personnel de première ligne qui travaillera durant les Jeux olympiques et paralympiques d'hiver de 2010 à Vancouver respecte l'obligation de chacune de faire une offre active de service dans les deux langues officielles ». C'est le 30 novembre qu'on attend une réponse de la part des institutions.

Le sénateur Losier-Cool : Bienvenue monsieur le commissaire. J'aimerais continuer un peu dans la même ligne que le sénateur Nolin.

Je ne sais pas si c'est de la perspicacité ou quoi, mais je veux vous faire part qu'il déborde peut-être du mandat du commissaire.

Il y a deux semaines, avec des parlementaires de toutes les provinces, des territoires et de la Louisiane, j'ai assisté à une rencontre de l'Assemblée régionale Amérique à Halifax. J'étais accompagnée de notre collègue, le sénateur Champagne, présidente de la section canadienne, qui est très intéressée par le dossier des Jeux olympiques. Entre autres, elle a fait adopter une recommandation suivant certains avis contenus dans nos rapports.

Deux questions ont retenu l'attention des parlementaires, pour lesquelles nous n'avons pas vraiment eu de réponse, soit : les bénévoles bilingues et les services d'interprétation.

Ces parlementaires — il y en avait de la Saskatchewan, de l'Alberta — se demandaient jusqu'à quel point les parlements des provinces avaient été approchés. On a parlé du Conseil du Trésor et des institutions fédérales, mais les parlements ont-ils été approchés par leur personnel, par exemple? Ces parlementaires ont du personnel bilingue pour les bénévoles. Peut-être est-ce hors de votre mandat, mais le COVAN, avec son comité consultatif, a-t-il approché les bénévoles? Les services d'interprétation de chaque province pourraient peut-être se prêter à cela. Comme vous avez dit tout à l'heure, personne n'est contre, tout le monde est d'accord et veut participer.

M. Fraser : Je sais que c'est avec le Québec que l'une des premières ententes a été organisée. Cela fait trois ou quatre ans de cela. Je sais que le premier ministre du Québec s'intéresse beaucoup au dossier. Je pense qu'il y a eu aussi des discussions avec le gouvernement du Nouveau-Brunswick.

Le sénateur Losier-Cool : Oui, effectivement.

M. Fraser : Si je comprends bien — et je sors de mon mandat présentement —, mais si je comprends bien les difficultés, c'est que l'interprétation des événements sportifs exige une certaine expertise dans le domaine, donc les interprètes des débats parlementaires n'ont pas nécessairement — avec tout le respect que je leur dois — l'expertise pour interpréter des événements sportifs comme le patinage artistique, par exemple. Il s'agit de domaines spécialisés.

Concernant les bénévoles, un objectif de 14 p. 100 a été établi et ils ont identifié 3 500 bénévoles bilingues. On entend dire qu'un nombre plus élevé de membres du personnel a une certaine connaissance des deux langues officielles, mais qu'ils ne sont pas dans des positions désignées bilingues.

Vous avez recommandé, et nous également, un système de coordination pour faire en sorte que des bénévoles bilingues soient disponibles dans une équipe volante afin de prendre la relève si quelqu'un requiert de l'information auprès d'un bénévole non bilingue. Nous sommes d'accord qu'un certain système doit être mis en place.

Quant au détail de votre question, je ne sais pas exactement quelles démarches ont été entreprises auprès des parlements provinciaux.

Le sénateur Losier-Cool : La première préoccupation que vous avez mentionnée, soit la question de l'expertise au niveau de l'interprétation, a été soulevée par les parlementaires, d'où une hésitation à passer une résolution. Nous allons informer les gouvernements que cette interprétation requiert la présence de spécialistes.

M. Fraser : Je peux vous dire que, dès le début de mes conversations avec des gens du gouvernement, j'ai suggéré que le gouvernement fédéral fournisse un bassin d'expertise pour l'interprétation. J'ai proposé qu'on réfléchisse à l'utilisation d'un tel bassin d'expertise. Je sais que, dès le début, cela a été soulevé, mais à quel point sommes-nous allés au-delà d'une telle suggestion afin de faire en sorte que les interprètes soient encouragés à devenir bénévole, je ne sais pas?

Le sénateur Losier-Cool : Nous en sommes à combien de bénévoles maintenant?

M. Fraser : Nous avons identifié 3 500 bénévoles.

Le sénateur Losier-Cool : S'ils viennent d'Edmonton, par exemple, leur voyage est-il payé?

M. Fraser : Non, la responsabilité d'un bénévole est de payer son propre transport et son hébergement. Et ce n'est pas toujours évident.

[Traduction]

Le sénateur Greene : Vous avez parlé des cérémonies d'ouverture et de clôture. Avez-vous pu en avoir un aperçu? Si oui, quelles en sont les lacunes?

M. Fraser : Non, je n'ai rien pu voir. Les organisateurs tiennent absolument à ce que ces cérémonies demeurent une surprise, et nous pouvons certainement comprendre qu'ils ne veuillent pas en communiquer les détails. Ils veulent émerveiller le monde. Mais chacune des conversations que j'ai eues avec les organisateurs me porte à croire que je serai impressionné.

Ils sont conscients des critiques qui ont été faites à propos du spectacle du compte à rebours qui s'est tenu un an avant le début des Jeux. Je crois d'ailleurs qu'au printemps dernier, Guy Matte, de la Fondation canadienne pour le dialogue des cultures, a expliqué en détail au comité comment ce malentendu avait pu avoir lieu. À n'en pas douter, le peu de français que comptait le spectacle a ouvert les yeux des organisateurs. Ils m'ont assuré qu'ils avaient appris de leur expérience et que les cérémonies d'ouverture et de clôtures ne susciteront pas la même réaction.

Je ne voudrais surtout pas rompre le secret, mais tout porte à croire que je serai agréablement surpris et impressionné. Je les crois sur parole.

Le sénateur Greene : Ravi de vous l'entendre dire.

Vous dites que la qualité des festivités culturelles entourant les Jeux devra être grandement supérieure pour permettre à tous les Canadiens de s'y reconnaître et pour projeter une image complète de la richesse culturelle. Je suis tout à fait d'accord, mais comment pourra-t-on en rehausser la qualité? Qu'est-ce qui manque? De quelles festivités parlez-vous, si ce n'est des cérémonies d'ouverture et de clôture?

M. Fraser : Toute une série d'activités culturelles se tiendront sur les différents sites situés sur l'île Granville et autour du parc olympique. La réaction négative suscitée par le spectacle du compte à rebours a galvanisé un grand nombre d'organismes culturels, comme la Fédération des francophones de la Colombie-Britannique et la Fondation canadienne pour le dialogue des cultures, pour ne nommer que ceux-là, qui talonnent désormais les organisateurs des Jeux pour que ces activités culturelles fassent non seulement la part belle à la culture de langue française, mais mettent aussi en vedette des artistes francophones de l'extérieur du Québec.

Je le répète, je n'ai pas vu la liste des artistes qui se produiront, mais je prends la question très au sérieux. J'estime d'ailleurs ne pas être le seul et j'ai fait tout ce qui était en mon pouvoir pour que les deux cultures linguistiques soient représentées comme il se doit.

[Français]

Le sénateur Comeau : Madame la présidente, je voudrais revenir à un commentaire émis par notre collègue le sénateur Tardif au sujet des services aux aéroports, alors que quelqu'un arrive et dit : « Hello, Bonjour ». J'ai fait une tentative à Halifax et, très souvent, j'ai été surpris du fait que les gens parlaient peu le français, à ma grande surprise.

M. Fraser : En général, la suite c'est : « Any liquids or gels? »

Le sénateur Comeau : C'est cela. Mais là, je vais dire : « Bonjour, comment ça va? » et, très souvent, ils vont dire : « Ça va bien ». Mais si je vais un petit peu plus loin, très souvent les gens peuvent parler un petit peu français. Parfois, c'est le français qu'ils ont appris au secondaire; parfois ce sont des francophones, mais qui ne sont pas confortables de parler en français parce qu'on leur a dit dans le passé que leur français n'était pas très bon — comme je me fais souvent dire que ce n'est pas un français de Paris et je le reconnais. Toutefois, je me fais comprendre et cela ne me dérange pas tellement si mon français n'a pas des accents parisiens. Mais pour beaucoup de gens, cela les agace un peu parce qu'ils se sentent inconfortables.

M. Fraser : Oui, tout à fait.

Le sénateur Comeau : Vous avez dit, je pense, qu'au-delà des 3 500 personnes désignées bilingues, il y en avait probablement un grand nombre d'entre elles qui seraient bilingues, mais qui n'osent pas s'afficher comme des personnes bilingues. Comment pourrait-on encourager ces gens à s'afficher bilingues, même si leur français n'est pas parfait?

M. Fraser : C'est une très bonne question et elle s'applique non seulement aux Jeux olympiques, mais également aux institutions fédérales en général qui touchent le public voyageur.

Comme vous, j'ai eu l'expérience de me faire dire « Hello, bonjour » et d'avoir répondu « Bonjour » et, un peu à ma surprise, de voir quelqu'un qui peut me répondre qui peut soutenir une conversation.

Je crois qu'un des éléments qui a peut-être joué un rôle quant à cette crainte d'utiliser le français que l'on a, c'est la formalisation des obligations linguistiques. Il existe certains préjugés vis-à-vis des obligations et les gens se disent qu'ils n'ont pas le niveau requis : le niveau A ou le niveau B.

Et si on pense en termes de services aux Canadiens et non pas en termes d'obligations, je crois que c'est une façon de servir les gens. J'ai déjà vu des gens à bord de trains de Via Rail ou d'avions d'Air Canada qui se sont trouvés face à un passager qui ne comprenait ni le français ni l'anglais, mais qui parlait espagnol. Et tout à coup, on s'est arrangé avec la plus grande sympathie du monde pour utiliser les phrases d'espagnol que l'on pouvait mettre ensemble pour servir ce passager. Tout à coup, ce n'était pas une question d'obligation, de test ou de formation; c'était un geste humain qui m'a beaucoup impressionné. J'ai réfléchi au fait que si on avait cette même attitude envers la question linguistique canadienne, on ferait un pas en avant.

Nos observations ont permis de voir, dans des bureaux de Parcs Canada où des gens travaillaient avec des gens de la Colombie-Britannique — où ces obligations n'existent pas — que les gens étaient un peu surpris, mais pas choqués. Il y avait donc un effort de réponse sur le plan humain.

Bref, je pense que si on considère la question de la dualité linguistique et du bilinguisme officiel comme une valeur et non comme une obligation, c'est bien. Souvent, je répète que des systèmes hiérarchiques — et toute bureaucratie est par nécessité un système hiérarchique — ont le don de transformer des valeurs en fardeau. Et quand on considère la question linguistique comme un fardeau, c'est plus difficile de la percevoir comme une valeur.

Pour le COVAN, pour les bénévoles et aussi pour certains services fédéraux, ils impriment maintenant des phrases sur une petite carte qu'on peut insérer dans une poche et qu'il est donc facile de sortir pour lire des phrases assez simples, de base pour donner de l'information clé à quelqu'un. Ce n'est pas une grande conversation, mais au moins c'est un geste pour des gens qui veulent aider d'autres gens.

Le sénateur Comeau : Vous m'avez appris quelque chose ce soir. Je ne me rendais pas compte qu'il y avait environ 600 000 personnes dans l'Ouest canadien qui parlent les deux langues.

M. Fraser : Oui.

Le sénateur Comeau : Vous m'étonnez avec ce nombre. Je ne me rendais pas compte de cela. Je pensais que c'était un nombre moindre. Comment peut-on se brancher avec ces gens; 600 000, c'est un gros nombre?

M. Fraser : Chaque année, 30 000 étudiants en Colombie-Britannique sont en immersion. C'est plus que sa part de la population canadienne. C'est à Edmonton en Alberta qu'il y a le meilleur système d'immersion au Canada.

Le sénateur Comeau : Autre que l'Université Sainte-Anne.

M. Fraser : Je parle des systèmes d'éducation primaire et secondaire. Il y a un excellent système de formation linguistique aux niveaux primaire et secondaire à Edmonton. Quand on fait le calcul du nombre de jeunes qui ont suivi des cours d'immersion, cela ne date pas d'hier. Et même si après des études secondaires on en perd un peu, le fait d'avoir fait des études en immersion laisse des traces profondes et la capacité de s'exprimer avec un certain confort dans la langue même si on n'a pas poursuivi des études postsecondaires.

Le sénateur Comeau : J'ai une dernière question. Vous avez fait référence au Grand Témoin des derniers Jeux olympiques : M. Raffarin, l'ancien premier ministre de la France. En avons-nous un cette fois-ci pour la Colombie- Britannique?

M. Fraser : Oui, c'est M. Pascal Couchepin qui est un ancien président de la Confédération suisse qui a fait une visite au Canada. J'ai eu une rencontre avec lui au printemps et ensuite il est allé à Vancouver faire sa première visite. Il continue jusqu'au mois de novembre, je crois, à exercer des responsabilités ministérielles en Suisse. Après cela, il va se consacrer à sa tâche de Grand Témoin.

Le sénateur Comeau : Mais en tant que Grand Témoin, son mandat n'est pas de régler les problèmes tels qu'ils surviennent, mais surtout de faire un rapport par la suite?

M. Fraser : C'est cela. L'institution du Grand Témoin a d'abord été créée par la France et par la suite, la France a transmis cette responsabilité ou cette opportunité à l'Organisation internationale de la Francophonie. Il y a d'abord eu Mme Lise Bissonnette qui a été Grand Témoin pour les Jeux de Turin; par la suite, l'ancien premier ministre Raffarin a été Grand Témoin pour les Jeux de Pékin; et maintenant M. Couchepin sera le Grand Témoin pour Vancouver.

Après mes conversations avec M. Couchepin, je comprends qu'il regarde en avant. Ils veulent qu'à l'avenir, le Canada établisse le standard pour les prochains Jeux, soit ceux de Londres pour 2012, ou ceux des Jeux futurs, dont la ville sera choisie dans les semaines qui viennent, entre Rio et trois autres villes.

Je pense que le grand défi pour nous, c'est que l'Organisation internationale pour la Francophonie tient pour acquis que nous allons établir le standard d'or. Cela nous incite donc à relever des défis parce qu'il y a une présomption de la part de la Francophonie internationale que le Canada sera à la hauteur et qu'ils pourront utiliser le même système que nous afin de pouvoir dire aux Anglais que c'est possible. Les prochains Jeux d'hiver seront en Russie, je crois. Ils pourront donc dire : « Voici le standard qu'on attend de vous à l'avenir. »

Le sénateur Nolin : Avez-vous partagé cette information avec les gens du Conseil privé?

M. Fraser : Oui.

Le sénateur Nolin : Quelle fut leur réaction?

M. Fraser : Disons qu'ils ont démontré un intérêt soutenu pour la question. Et je pense que les gouvernements en général sont de plus en plus conscients.

Le sénateur Nolin : Si notre façon de faire au Canada établi la barre à un certain niveau qui définit l'exemple pour les autres, la responsabilité est très grande.

M. Fraser : Oui, tout à fait.

Le sénateur Nolin : Il ne s'agit pas seulement de livrer des Jeux bilingues. C'est plutôt d'élever la barre à la hauteur à laquelle on voudrait que les Jeux, dorénavant, soient livrés. Et c'est une énorme responsabilité. Cela signifie que c'est très sérieux.

Le sénateur Losier-Cool : C'est peut-être dû à la haute estime dans laquelle M. Diouf tient le Canada. C'est pour cette raison qu'il est important, si on accepte...

Le sénateur Nolin : Ce que je comprends, c'est que le CIO va se servir de ce rapport pour dire : « Sans que ce soit parfait — on s'entend sur le fait que la perfection n'existe pas —, voici comment, dorénavant, on voudrait que le côté linguistique des Jeux soit respecté. » Il me semble que la responsabilité qui nous échoit est énorme. Je voudrais que cette responsabilité soit comprise et partagée. Et qu'elle ne soit pas un secret d'État.

Nous savons tous qu'au Canada, on a un talent fou à établir des secrets et à les conserver, et on découvre à un moment donné que c'est un grand secret.

M. Fraser : Disons que personnellement, je n'en ai pas fait un secret.

Le sénateur Nolin : Tant mieux! Bravo!

M. Fraser : J'ai rencontré M. Couchepin. On voulait faire front commun afin que l'un ne soit pas utilisé contre l'autre dans nos discussions.

Le sénateur Nolin : J'ai comme l'impression que cela ajoute un élément de plus au chapitre 7. Est-ce que cela se peut? Je ne connais pas tellement cette question.

La présidente : Avant de passer au deuxième tour, j'aurais une question pour vous, monsieur le commissaire. Qu'est- ce qui se passe avec la télédiffusion en français des Jeux? Comment évaluez-vous le travail qui a été fait par le consortium jusqu'à présent? Va-t-il atteindre l'objectif fixé et qu'ils ont présenté lorsqu'ils sont venus au comité? Est-ce que les ententes ont été négociées, signées? Où en sont-ils avec la diffusion des Jeux en français?

M. Fraser : Je n'ai pas beaucoup de nouvelles informations à ce sujet. Je sais qu'aux dernières réunions du conseil d'administration du consortium, en août dernier, il y a un membre du conseil qui, après avoir soulevé la question, s'est fait assurer qu'effectivement tout le processus était en marche.

Ce que je comprends c'est que le défi qui était le leur était la négociation avec des petites compagnies, des câblodistributeurs; en plus des grandes sociétés, il y a à peu près 200 petites compagnies. Ils ont adopté le même système en disant : « Négocier une entente sur le canal généralement utilisé qui donnerait accès gratuitement à certaines émissions à venir afin que ce canal soit libéré pour les Jeux. »

L'impression que j'ai, c'est que ces négociations continuent. J'ai remarqué vos recommandations au consortium de continuer les discussions avec Radio-Canada. Je crois que vous avez bien identifié les obstacles qui continuent d'exister.

Mais j'ai également remarqué que le président du CRTC a aussi envoyé un message très clair au consortium et à Radio-Canada leur demandant de régler ce problème. Malheureusement, je n'ai pas eu d'autres informations depuis. Mais effectivement, je crois que vous avez mis le doigt sur des problèmes réels.

La présidente : Pourvu que vous le sachiez, il n'y a pas encore d'entente finalisée entre le consortium et la Société Radio-Canada?

M. Fraser : À ce que je sache, non.

Le sénateur Nolin : Il s'agit là d'un endroit où le fameux secret devrait être partagé. Cela s'imposerait presque. Pour que tous acceptent de relever ce défi — il ne s'agit pas que des parlementaires et de vous —, tout le monde, incluant les radiodiffuseurs, s'ils veulent être à la hauteur de ce défi, devrait savoir qu'il y a quelqu'un qui mesure notre façon de faire.

Le sénateur Losier-Cool : Mais ce consortium en a déjà parlé au COVAN et à Radio-Canada, n'est-ce pas? Il n'y a pas déjà eu des pourparlers à cet effet?

M. Fraser : Le problème avec le COVAN, qui a toujours été présent, c'est que l'entente négociée était entre le consortium et l'Organisation internationale des Olympiques; le COVAN ne faisait pas partie de ces discussions. Je pense que M. Furlong trouvait un peu frustrant d'être ciblé par certaines critiques dans l'état où se trouvait le dossier, il y a deux ans. Ils ont fait énormément de progrès depuis ce temps. Mais le COVAN ne pouvait pas être impliqué dans ces discussions.

La présidente : Lorsqu'ils se sont présentés devant notre comité, le représentant du consortium était présent. On nous a parlé de l'entente qu'ils voulaient négocier avec la Société Radio-Canada et les propositions n'étaient pas raisonnables. Si les choses en sont restées là, je ne crois pas qu'il y ait entente. Nous avions alors fortement encouragé les responsables d'être raisonnable et de négocier quelque chose qui va justement permettre la diffusion des Jeux en français à travers le Canada.

La situation est préoccupante. J'ai tenté d'obtenir des informations à savoir si quelque chose avait été négocié, mais je n'y suis pas parvenue. J'espère que les pourparlers se poursuivent dans le but d'assurer la diffusion des Jeux en français à travers le Canada.

Les anglophones du Québec font-ils face aux mêmes défis en ce qui concerne la diffusion en anglais des Jeux, ou est- ce que le problème ne se pose que pour les francophones hors Québec?

M. Fraser : Je crois que les anglophones du Québec sont desservis par la station CFCF de Montréal, du réseau CTV, qui est disponible chez la plupart sinon toutes les compagnies de câblodistribution. Il est possible que quelques communautés n'aient pas accès, mais elles sont en minorité.

Le sénateur Nolin : Vous semblez positive.

Mme Tremblay : De façon similaire, 9 000 foyers hors Québec, situés dans certaines régions, n'ont pas accès à la câblodistribution ou à la télé par satellite. Ce peut être le cas également pour quelques petites communautés anglophones minoritaires du Québec.

Le sénateur Nolin : Même si on n'en est pas encore arrivé à une entente, je crois comprendre que la situation s'est améliorée. Les choses évoluent positivement.

M. Fraser : Oui.

Le sénateur Nolin : Il faut au moins être satisfait de ces petites avancées.

M. Fraser : Tout au long du processus, je n'ai pas voulu entrer dans une discussion sur les chiffres à savoir le pourcentage qui est acceptable.

Le sénateur Nolin : Surtout compte tenu de l'aspect commercial.

M. Fraser : Je maintiens que tout Canadien devrait avoir accès aux Jeux. Il faut toutefois être réaliste. Avec les changements technologiques, de moins en moins de gens captent les signaux télévisions à l'aide d'antennes en forme d'oreilles de lapin. Celles-ci ne se retrouvent pas chez les grands amateurs sportifs. Ceux et celles qui veulent vraiment suivre le sport à la télévision, en général, investissent.

Une autre question fut discutée pour les communautés isolées qui n'ont pas accès au câble. Certaines compagnies considèrent la possibilité d'installer, dans un centre communautaire, un écran satellite. Toutefois, j'ignore où en sont ces discussions dans la planification de la part du consortium.

Le sénateur Losier-Cool : Pouvez-vous nous dire brièvement où en sont les pourparlers avec la municipalité de Richmond au sujet du fameux anneau olympique? Est-ce chose faite?

M. Fraser : Dans l'enveloppe de 7,7 millions de dollars, 1,5 million est consacré spécifiquement à l'affichage bilingue permanent. Or, on m'a chuchoté qu'un des éléments ciblés est l'anneau de Richmond.

Sans l'avoir vu, je craignais que le nom ne soit gravé dans le ciment, mais ce n'est pas le cas. J'ai vu une photo sur laquelle apparaît un affichage unilingue anglais et il semble que cet affichage ne puisse être reproduit en français. À mon avis, cela témoigne d'un manque sérieux de communication au début de la planification. Encore une fois, la communication s'est faite avec le Comité international olympique, mais le message n'a pas été clairement transmis à la municipalité.

À ce que je sache, la municipalité n'a pas formulé d'objection fondamentale. Le fait que le gouvernement a clairement identifié à cet effet 1,5 million de dollars, dans l'enveloppe de 7,7 millions, indique, à mon avis, une volonté à corriger ces lacunes.

Le sénateur Tardif : J'ai également une question en ce sens. Selon certains commentaires, il semblerait que la signalisation pour l'anneau olympique à Richmond apparait en anglais, en gros caractères, et que la version française n'apparaît qu'en petits caractères. Et il semble que la signalisation bilingue ne sera pas affichée avant les Jeux, mais uniquement pendant les dix jours où ils se tiendront. Est-ce toujours le cas, ou le fait d'avoir reçu un montant d'argent du gouvernement fédéral les incitera à garder la signalisation de façon permanente?

Pouvez-vous nous dire s'il s'agit de rumeurs ou s'il y a un fond de vérité dans ces commentaires?

M. Fraser : Votre question comporte deux éléments. Nous avons vu durant l'été une ébauche de la signalisation. Nous avons alors exprimé que le design était inacceptable, étant donné que la version anglaise apparaissait en gros caractères et que la version française apparaissait en italique. Cela donnait l'impression que le message réel était en anglais et que le sous-titre était en français.

Nous avons fait part de cette opinion aux organisateurs du COVAN. Ceux-ci ont réagi assez vite et sont revenus avec une nouvelle présentation, que nous avons trouvée acceptable. D'ailleurs, nous mentionnons dans le rapport le fait que nous avons été rassurés par ce changement.

Le système est conçu pour l'affichage olympique dans tous les sites et l'objectif s'insère dans la planification typographique de l'affichage.

Pour ce qui est de l'anneau de Richmond et l'affichage sur les autres sites qui feront partie du legs des Jeux olympiques, on remarque une volonté de la part du gouvernement, grâce à cette annonce de financement, de faire en sorte que les lacunes soient corrigées et non uniquement d'installer pour deux semaines de petits drapeaux ou des banderoles amovibles en français.

Le sénateur Tardif : Suite à certaines de vos recommandations, un comité consultatif pour les langues officielles a été mis sur pied à l'intérieur du COVAN. Ce comité est-il actif et joue-t-il un rôle pour régler certaines de ces questions?

M. Fraser : Il semble que ce soit le cas. Le premier ministre Raffarin de même que la sous-ministre de Patrimoine canadien, Judith Larocque, font partie de ce comité.

C'est une façon assez importante de faire en sorte qu'il y ait une courroie d'information directe sur les questions linguistiques.

Le sénateur Tardif : Je suis d'accord avec vous, monsieur le commissaire. Il semble y avoir plusieurs choses qui surgissent quant à savoir à quel point ce comité est actif et au courant.

M. Fraser : Je n'ai pas d'évidence, mais je présume qu'on a déjà vu le progrès. Nous sommes tous dans la même position. On met tous nos doigts sur les boutons et on espère que l'ascenseur arrivera. On ne saura jamais quel doigt était le doigt crucial qui a fait que l'ascenseur est arrivé. Le fait qu'il y ait des pressions qui viennent d'autres rapports; de votre rapport, de notre rapport, l'arrivée de M. Couchepin, la présence de M. Raffarin au comité consultatif, voilà des moyens de faire comprendre à tous les éléments l'importance des enjeux.

Le sénateur Tardif : Il faut un rôle de coordination. Il faut que les gens travaillent ensemble pour atteindre l'objectif, parce qu'il reste très peu de temps, finalement.

M. Fraser : Je suis tout à fait d'accord.

La présidente : Le sénateur Tardif m'a ouvert la porte lorsqu'elle a parlé de choses qui surgissent. Vous êtes sûrement au courant qu'une firme de Vancouver fait actuellement du recrutement de jeunes travailleurs à Ottawa en vue des Jeux olympiques de Vancouver. Ils veulent avoir de jeunes travailleurs, des employés bilingues pour l'accueil et la sécurité. Ils ont un centre de recrutement temporaire installé à l'Université d'Ottawa. Ils ont commencé jeudi dernier et d'après ce que je lis ici, aucune place n'a été accordée au français dans le recrutement qui se faisait à l'Université d'Ottawa.

Lorsque la porte-parole de cette firme de Vancouver a été interrogée sur le processus de recrutement uniquement en anglais, elle a répondu que les employés doivent prioritairement parler et lire l'anglais pour effectuer leur tâche.

Je tenais à le mentionner parce que c'est très important. Ce sont des choses qui surgissent, et je me demande, monsieur le commissaire, qui a demandé à cette firme de faire le recrutement, qui l'a embauchée et quelles directives a- t-elle reçues pour faire du recrutement à l'Université d'Ottawa et de ne pas être conscient que le français est aussi prioritaire dans le recrutement d'employés bilingues pour l'accueil et la sécurité?

M. Fraser : J'ai une bonne et une mauvaise nouvelle pour le comité. On a reçu une plainte. Le fait de recevoir une plainte veut dire qu'on fait enquête; on va essayer de répondre à toutes ces questions. Mais je ne peux pas en parler.

La présidente : Je comprends.

M. Fraser : On est conscient, on fait enquête. Ghislaine, y a-t-il autre chose à ajouter?

Mme Charlebois : Pour répondre à votre question de qui a embauché cette firme, je peux vous dire que c'est la GRC qui est responsable de coordonner la sécurité des Jeux olympiques. On fait présentement enquête et notre enquête va soulever les points que vous venez de relater.

La présidente : Si personne n'a de questions pour le commissaire, il ne me reste qu'à le remercier d'avoir comparu à notre comité. Soyez assuré que ce ne sera pas la dernière fois que vous serez invité.

M. Fraser : Merci.

La présidente : Honorables collègues, nous allons suspendre la séance et revenir dans quelques instants à huis clos pour discuter des travaux futurs de notre comité.

(Le comité poursuit ses travaux à huis clos.)


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