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OLLO - Comité permanent

Langues officielles

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Langues officielles

Fascicule 13 - Témoignages du 23 novembre 2009


OTTAWA, le lundi 23 novembre 2009

Le Comité sénatorial permanent des langues officielles se réunit aujourd'hui à 17 h 16 pour faire une étude sur l'application de la Loi sur les langues officielles, ainsi que des règlements et instructions en découlant, au sein des institutions assujetties à la loi. Sujet : Étude de la partie VII et d'autres enjeux.

Le sénateur Andrée Champagne (vice-présidente) occupe le fauteuil.

[Français]

La vice-présidente : Honorables sénateurs, je vois que nous avons le quorum. Je déclare donc la séance ouverte. Je vous souhaite la bienvenue au Comité sénatorial permanent des langues officielles. Je suis Andrée Champagne, sénateur du Québec, vice-présidente du comité.

Avant de présenter les témoins pour la réunion de ce soir, j'aimerais vous présenter les membres du comité qui sont ici aujourd'hui.

À ma droite, le sénateur Losier-Cool du Nouveau-Brunswick; le sénateur Tardif, de l'Alberta; le sénateur Pépin, du Québec; et le sénateur Jaffer, de la Colombie-Britannique.

À ma gauche, le sénateur Seidman, du Québec; le sénateur Fortin-Duplessis, du Québec; et le sénateur Mockler, du Nouveau-Brunswick.

Le comité étudie présentement l'état de la mise en œuvre de la partie VII de la Loi sur les langues officielles et, tout particulièrement, les mesures prises par les organisations fédérales à cet effet.

Nous accueillons en première partie de la réunion des représentants de la Gendarmerie royale du Canada : le surintendant principal Alain Tousignant, directeur général, Apprentissage et perfectionnements; M. Pat Teolis, sous- commissaire intérimaire, Service divisionnaire de la police de protection; ainsi que Mme Nathalie Ferreira, directrice, Direction des langues officielles. Les membres du comité vous remercient d'avoir accepté leur invitation aujourd'hui.

Monsieur Tousignant, je vous invite maintenant à prendre la parole et je suis certaine que les sénateurs auront des questions pour vous après.

[Traduction]

Surintendant principal Alain Tousignant, directeur général, Apprentissage et perfectionnement, Gendarmerie royale du Canada : Je vous remercie d'avoir invité la Gendarmerie royale du Canada à répondre à vos questions aujourd'hui. Comme il a été mentionné, je suis le surintendant principal Alain Tousignant. Je représente le dirigeant principal des Ressources humaines, le sous-commissaire Peter D. Martin, qui a été empêché de venir aujourd'hui. Qu'on me permette de présenter les collègues qui m'accompagnent : Pat Teolis, des Événements majeurs et Services de protection, qui fournira des renseignements précis sur la sécurité des Jeux olympiques et paralympiques d'hiver de Vancouver 2010, ainsi que Nathalie Ferreira, directrice des Langues officielles à la GRC, qui répondra aux questions sur la partie VII de la Loi sur les langues officielles.

Je dirai pour commencer que la GRC s'efforce de se montrer un modèle en matière de mise en œuvre et de respect de toutes les lois, y compris de la Loi sur les langues officielles, qui honore notre patrimoine national et notre identité linguistique particulière. Nous nous efforçons d'être en permanence une institution exemplaire, qui respecte les droits et obligations concernant les langues officielles conformément aux exigences de la Loi sur les langues officielles et du règlement connexe.

[Français]

Lors de l'entrée en vigueur du projet de loi S-3, la GRC a déployé beaucoup d'efforts pour apporter les ajustements nécessaires afin de respecter ses obligations en vertu de la Loi sur les langues officielles, tout comme nous le ferions pour toute autre loi que nous sommes tenus de respecter et d'appliquer.

Même si la GRC ne figure pas parmi les institutions fédérales désignées qui doivent produire un rapport officiel de reddition de comptes à Patrimoine canadien, elle insiste pour en produire un pour prouver son engagement envers la mise en œuvre de la partie VII de la Loi sur les langues officielles.

La GRC s'efforce de trouver et de prendre des « mesures positives » pour appuyer l'engagement du gouvernement à l'égard de la mise en œuvre des articles 41 et 42 de cette loi. Nous tenons pleinement à faire le nécessaire au mieux de nos capacités et dans le cadre de notre compétence, afin de favoriser l'épanouissement des minorités francophones et anglophones du Canada et de promouvoir la pleine reconnaissance et l'usage du français et de l'anglais dans la société canadienne.

[Traduction]

Pour ce faire, la GRC a rehaussé la visibilité et l'importance de cette loi de la manière suivante : La partie VII est devenue une section à part entière au sein de la Direction des langues officielles et un poste de coordonnateur national a été créé afin de diriger et de superviser la mise en œuvre et la promotion de cette partie de la Loi dans l'ensemble de l'organisation.

Des initiatives axées sur la mise en œuvre et la promotion de la partie VII ont été intégrées au Plan d'action sur les langues officielles de la GRC 2007-2010.

En janvier 2008, la partie VII de la Loi sur les langues officielles a été ajoutée à la politique interne sur les langues officielles figurant dans le Manuel d'administration de la GRC, afin de sensibiliser davantage les employés de la GRC à la nécessité de mettre en œuvre des initiatives qui font la promotion de la dualité linguistique et qui appuient le développement des communautés de langue officielle en situation minoritaire.

[Français]

Sous la gouverne et l'orientation techniques du coordonnateur national concernant la partie VII, des coordonnateurs régionaux participent également à la mise en œuvre de cette partie de la loi qui est également intégrée à leur plan régional sur les langues officielles.

Les coordonnateurs de langues officielles dans l'ensemble de la GRC collaborent activement avec les minorités francophones et anglophones et font partie de divers comités interministériels qui visent à appuyer le développement de ces minorités ainsi qu'à promouvoir la pleine reconnaissance et l'usage du français et de l'anglais dans la société canadienne.

Dans le cadre de sa campagne de sensibilisation et d'éducation intitulée « Un héritage à notre avantage », la GRC continue d'élaborer et de distribuer des produits et des outils dans l'ensemble de la gendarmerie afin de renseigner son personnel sur ses droits et obligations en matière de langues officielles. La partie VII fait partie intégrante de cette campagne.

Enfin et surtout, nous continuons de recruter au sein de toutes les communautés qui forment la mosaïque canadienne, y compris, évidemment, des communautés de langue officielle en situation minoritaire. À notre avis, il s'agit d'une situation où toutes les parties en jeu gagnent. Cette façon de faire, non seulement accroît les capacités de la GRC en raison de la vaste gamme d'aptitudes des personnes recrutées, mais aussi offre des possibilités d'emploi et de perfectionnement professionnel à tous les citoyens canadiens qui aimeraient s'engager dans la force de police du Canada et d'apporter un changement positif dans les collectivités partout au pays.

[Traduction]

Nous prenons des mesures proactives et positives, dans les centaines de communautés en situation minoritaire que nous servons chaque jour, afin de souligner les exigences et l'engagement du gouvernement. La GRC continue d'encourager son personnel à dépasser ses obligations énoncées dans la Loi sur les langues officielles et son règlement. Conscients de l'importance et de la valeur de notre dualité linguistique, non seulement nous poursuivons nos efforts pour la préserver, mais aussi nous en faisons la promotion en tant qu'atout opérationnel. Les langues, qui ouvrent la porte à la communication, peuvent se révéler l'outil plus efficace et le plus précieux pour le bien commun.

Cette notion, alliée à la volonté de servir la population dans la langue officielle de son choix et de respecter la dualité linguistique, est l'un de nos objectifs. Elle fait partie intégrante de notre cadre stratégique : nous en tenons compte non seulement dans l'application quotidienne de la Loi, mais aussi dans la planification et la tenue d'événements majeurs, dont les Jeux olympiques d'hiver 2010 à venir.

[Français]

Depuis que la GRC a appris, en 2003, que le Canada accueillerait les Jeux olympiques et paralympiques d'hiver de 2010 à Vancouver et qu'elle serait l'organisme fédéral responsable des Jeux, suivant la déclaration du gouvernement du Canada, elle a travaillé sans relâche à la planification des opérations de sécurité pour cet événement marquant. Peu après l'annonce, le Groupe intégré de la sécurité de Vancouver 2010 a été créé. Ce groupe est composé de membres de la GRC, du service de police de Vancouver, du service de police de Vancouver Ouest, des Forces canadiennes et de bien d'autres organismes d'application de la loi. Le Groupe intégré de la sécurité de Vancouver 2010 a pour mission exclusive de planifier et d'exécuter les opérations de sécurité lors des Jeux olympiques et paralympiques d'hiver de 2010.

Le bilinguisme est une priorité opérationnelle pour la GRC. C'est pourquoi nous souscrivons pleinement aux objectifs de la Loi sur les langues officielles, non seulement pendant les Jeux d'hiver de 2010, mais également dans le cadre de nos opérations quotidiennes. De plus, nous sommes conscients que nous devons fournir des services exemplaires au public canadien et étranger et que nous devons offrir un milieu de travail propice à l'usage des deux langues officielles, conformément à la Loi sur les langues officielles et à son règlement d'application.

[Traduction]

Notre organisation a pris les mesures voulues pour que les opérations du Groupe intégré de la sécurité de Vancouver 2010 soient exécutées dans les deux langues officielles du Canada. Pour ce faire, nous avons repéré les ressources bilingues nécessaires par des recherches dans la base de données interne et par la communication avec les coordonnateurs de la mobilisation des divisions de la GRC ainsi qu'avec nos partenaires policiers. Notre stratégie de mobilisation a tenu compte des facteurs clés de la création d'un effectif bilingue et, dans ce cadre, a fait appel notamment à des représentants du Québec, du Nouveau-Brunswick et d'Ottawa.

Dans les mois à venir, plus de 1 600 policiers provenant de 116 services de police municipaux, régionaux et provinciaux se joindront à l'effectif de sécurité de Vancouver 2010. Tous les membres du personnel d'application de la Loi ont été choisis, au moment de décider qui serait mobilisé et en quelle capacité, en fonction de leurs compétences opérationnelles et linguistiques.

Je tiens à préciser que les affectations de personnel de sécurité pour les Jeux d'hiver de 2010 tiennent compte de la nécessité de maintenir les niveaux de service et de respecter les priorités policières dans les collectivités d'où proviennent les policiers mobilisés. Tout sera mis en œuvre pour minimiser les effets des Jeux olympiques de 2010 sur la prestation des services de première ligne, y compris sur les services en français ou en anglais.

[Français]

Ayant repéré les ressources pouvant être mobilisées, nous avons pu établir un effectif dont environ 20 p. 100 sont des policiers bilingues. De plus, afin de pouvoir fournir les services de sécurité dans les deux langues officielles, nous avons planifié le tout de façon à ce que les membres bilingues soient bien répartis dans les sites et les quarts de travail. Le personnel bilingue sera aussi affecté aux endroits très passants et aux endroits où il y aura des contacts avec le public, comme les postes de contrôle des piétons et des véhicules ainsi que les points d'accès aux sites.

Le Groupe intégré de la sécurité de Vancouver 2010 a aussi établi des lignes directrices qui veilleront à ce que les membres bilingues de la GRC ou d'autres services de police soient affectés à ces endroits afin de fournir des services dans l'une ou l'autre des langues officielles du Canada, selon la préférence du membre du public.

Le contexte opérationnel des Jeux a aussi amené la GRC à recourir à 5 000 agents de sécurité du secteur privé qui auront pour rôle d'effectuer le contrôle de sécurité des piétons aux points d'accès des sites. Nous pourrons ainsi continuer d'assumer nos responsabilités dans les collectivités que nous servons. Cela dit, il est également essentiel pour l'organisation que les services de sécurité du secteur privé soient offerts dans les deux langues officielles.

[Traduction]

Le processus d'approvisionnement a été mené de manière consciencieuse. Avant de faire appel à des entrepreneurs privés en sécurité et à d'autres fournisseurs de services contractuels liés à la sécurité, nous avons vérifié que ceux-ci étaient bien conscients de leurs obligations en matière de langues officielles et qu'ils savaient qu'ils devaient engager des personnes qui peuvent communiquer en français comme en anglais.

De plus, nous sommes toujours résolument déterminés à fournir en français et en anglais tous nos documents administratifs et opérationnels officiels destinés aux employés, de même que tous nos produits de communication externes avec le public, que ce soit dans notre site Web ou par l'intermédiaire de nos relations avec les médias.

Pendant les Jeux, par exemple, environ 65 p. 100 des porte-parole et des agents des relations avec les médias de la GRC pourront communiquer avec le public et les médias dans les deux langues officielles.

[Français]

Après les Jeux, nous démontrerons une fois de plus que nous nous acquittons de notre obligation de rendre des comptes aux termes de la Loi sur les langues officielles du Canada en présentant un rapport au commissaire aux langues officielles ainsi qu'au Grand témoin de francophonie, dont l'équipe assistera aux Jeux et examinera les efforts pangouvernementaux en matière de bilinguisme. Nous avons appuyé les initiatives en question dans une optique prévoyante en fournissant sans cesse des renseignements aux deux organes d'examen.

Nous avons bon espoir que les opérations de sécurité pendant les Jeux d'hiver de 2010 établiront un équilibre entre les besoins du contexte opérationnel et la nécessité de servir le public dans les deux langues officielles du Canada. La GRC continuera de déployer des efforts pour s'acquitter de toutes ses obligations aux termes de la Loi sur les langues officielles et pour promouvoir l'utilisation accrue des deux langues officielles du Canada dans toute la gendarmerie. C'est ainsi que notre organisation réussira à organiser les meilleurs Jeux d'hiver en travaillant ensemble à la sécurité, la paix et la célébration.

[Traduction]

Pour terminer, la GRC a la volonté et la détermination de respecter la Loi sur les langues officielles. En bref, notre objectif est simple : nous visons à engager uniquement les personnes voulues, dotées des habiletés et aptitudes linguistiques requises, au lieu et au moment qui conviennent. La population canadienne n'en attend pas moins, à bon droit.

[Français]

La vice-présidente : Merci beaucoup, monsieur Tousignant. La première question sera posée par le sénateur Fortin- Duplessis.

Le sénateur Fortin-Duplessis : Ma question vous surprendra peut-être. Vous êtes sûrement au courant du fait que, récemment, une firme de Vancouver fut engagée par la GRC pour recruter de jeunes travailleurs bilingues d'Ottawa qui seront affectés à des tâches de sécurité et à l'accueil aux Jeux olympiques de Vancouver. Cette firme a mis sur pied un centre de recrutement temporaire à l'Université d'Ottawa. Or, aucune place n'a été accordée au français dans le cadre de cette campagne de recrutement à l'Université d'Ottawa.

Lorsque la porte-parole de cette firme a été interrogée sur le processus de recrutement et le fait qu'il soit uniquement en anglais, elle a répondu que les employés doivent tout d'abord parler et lire l'anglais pour effectuer leurs tâches. Le Commissariat aux langues officielles fut alors saisi d'une plainte.

Pourquoi avez-vous demandé à cette firme de faire le recrutement?

Nathalie Ferreira, directrice, Direction des langues officielles, Gendarmerie royale du Canada : Lors de la mise en place des contrats, nous avions fait part du fait qu'il devait y avoir une orientation et une sensibilisation par rapport aux obligations de chaque tiers agissant en notre nom. Malheureusement, lors de la première tentative ou campagne de recrutement, les démarches n'ont peut-être pas été prises comme elles devaient l'être au tout début.

Nous avons rectifié la situation dès que l'on a reçu mot qu'une plainte avait été déposée et qu'il existait des problèmes. Nous avons contacté la section d'ISU, qui a contacté immédiatement la compagnie pour leur expliquer leurs obligations en tant que tiers agissant au nom de la GRC. Ils ont rectifié la situation au mois de septembre, avec une deuxième campagne de recrutement, cette fois-ci auprès de la Cité collégiale, qui fut menée de façon bilingue.

Le sénateur Fortin-Duplessis : Actuellement, combien de jeunes personnes bilingues ont été engagées?

Pat Teolis, sous-commissaire intérimaire, Service divisionnaire de la police de protection, Gendarmerie royale du Canada : On parle d'environ 610 employés bilingues sur 5 000, soit une proportion d'environ 11 p. 100 pour les Jeux olympiques.

Le sénateur Fortin-Duplessis : J'aurai une question touchant un autre sujet un peu plus tard. Je vais laisser mes collègues poser leurs questions.

Le sénateur Tardif : J'ai été heureuse de vous entendre affirmer votre engagement et vos efforts par rapport à la mise en œuvre de la Loi sur les langues officielles. Cependant, lorsqu'on considère les résultats, on peut se demander quel est le problème.

Selon l'évaluation du commissaire aux langues officielles, votre rendement en 2008-2009 fut de très faible à moyen. En ce qui concerne la gestion, vous avez obtenu une note moyenne. En ce qui a trait au service au public, la partie IV de la loi, votre note fut moyenne. Pour la langue de travail, vous avez obtenu une note faible. Toutefois, pour la participation équitable, votre note fut exemplaire — c'est le seul résultat positif. Pour ce qui est du développement des communautés et de la promotion de la dualité linguistique, la partie VII de la loi, votre note fut moyenne. Votre note globale fut : moyen.

De plus, la GRC figure parmi les dix institutions faisant l'objet du plus grand nombre de plaintes déposées, et ce, au cours de huit des neuf dernières années.

Quel est le problème?

Mme Ferreira : Je ne sais pas si vous connaissez la façon dont l'équipe du commissaire procède pour faire l'évaluation du rendement. Chaque année, nous avons une rencontre, puis une rétroaction sur le rendement de l'année antérieure, afin de nous expliquer les motifs de leur évaluation. Il est vrai que nous avons beaucoup de chemin à faire et que l'on doit améliorer notre service au public, surtout dans les communications verbales. Toutefois, nous avons obtenu une note parfaite lorsqu'il a été question d'assurer une offre active au téléphone et par communication écrite.

J'aimerais noter que nous avons déployé beaucoup d'efforts, et continuons à le faire, pour sensibiliser notre personnel sur leurs obligations à assurer une offre active, s'assurer que tout est écrit et à la disposition du public, et que l'information et les services soient offerts dans les deux langues officielles. Nos efforts sont continuels.

Pour ce qui est du rendement et de la façon dont nous sommes évalués, voici ce qu'on nous a expliqué. Lorsqu'une institution fédérale a des initiatives en place qui se poursuivent l'année suivante, elle ne reçoit pas nécessairement une note supérieure. L'appréciation demeure la même ou elle peut baisser s'ils jugent que l'on aurait dû mettre sur pied d'autres initiatives.

Le problème avec une organisation de notre taille est qu'il s'avère parfois difficile d'entreprendre une initiative à l'échelle du pays. Néanmoins, nous continuons nos efforts et notre engagement demeure le même.

Le sénateur Tardif : J'aimerais revenir à cette question du personnel. Lorsque vous octroyez des contrats à de tierces parties ou à la fonction publique, incluez-vous des clauses linguistiques?

Mme Ferreira : Tout à fait. Si on prend l'exemple du contrat avec Contemporary Services Canada, une clause fut incluse pour expliquer la façon dont on s'acquitterait de nos obligations, par rapport à la mise en œuvre de la loi, d'offrir des services bilingues là où le personnel et le public le requièrent.

La façon dont on s'y prend pour servir le public dans la langue de son choix est incluse dans le contrat. Une clause parle des obligations de toute tierce partie qui agira au nom de la GRC.

Le sénateur Tardif : Avez-vous des directives, par exemple, du ministère de la Justice ou du Secrétariat du Conseil du Trésor par rapport à vos obligations pour le recrutement de personnel?

Mme Ferreira : Certainement. Toutes nos politiques et nos directives découlent en effet des directives et des politiques du Secrétariat du Conseil du Trésor et des agences centrales.

Le sénateur Tardif : Quel pourcentage de francophones a-t-on identifié dans les contrats? Quel est le pourcentage de francophones alloué par le Secrétariat du Conseil du Trésor?

Mme Ferreira : Normalement, le pourcentage de francophones est basé sur la demande. Ce chiffre peut varier en fonction du contrat, là où il est requis. Tout dépend de la demande. Par rapport au règlement et à la Loi sur les langues officielles, on se base sur la demande, par exemple, de 5 p. 100. C'est ce qui va affecter nos contrats.

Le sénateur Tardif : Si on prend l'exemple de Vancouver, quel pourcentage a-t-on attribué?

Mme Ferreira : Le pourcentage de la population dans l'Ouest canadien qui parle le français ou qui se sert du français, par exemple, se situe à environ 2 p. 100. Ce chiffre vous donne une idée de la population qui parle français ou qui a des habiletés dans les deux langues officielles.

En Colombie-Britannique, le pourcentage diminue. Il se situe à environ 1,5 p. 100, si je ne m'abuse. Je ne peux pas vous confirmer ce pourcentage de façon précise, mais il est inférieur.

Le sénateur Tardif : Avec ces chiffres de 2 p. 100 et de 1,5 p. 100, vous considérez que vous rencontrez vos obligations en vertu de la Loi sur les langues officielles?

Mme Ferreira : Il ne s'agit pas de notre pourcentage. C'est le pourcentage statistique des francophones à travers l'Ouest canadien.

Le sénateur Tardif : Vous reflétez ce pourcentage.

Mme Ferreira : Nous reflétons plus que ce pourcentage

Le sénateur Tardif : Dans votre recrutement?

Mme Ferreira : Beaucoup plus.

Le sénateur Tardif : Quelles sont alors vos statistiques, entre autres, pour ce contrat?

Mme Ferreira : En termes de statistiques, je peux vous donner un bref aperçu de l'ensemble des fonctionnaires, des membres réguliers et des membres civils ou, si vous voulez, je peux vous donner un exemple concret de notre effectif bilingue des membres réguliers de la force.

Pour ce qui est des membres réguliers de la force, si nous regardons les postes occupés actuellement — moi, je préfère m'en tenir aux gens et aux corps qui peuvent offrir un service, qui sont réellement dans les postes et peuvent desservir le public dans la langue de leur choix —, nous parlons présentement d'une capacité bilingue de...

Le sénateur Tardif : Pour sauver du temps, peut-être pourriez-vous nous faire parvenir cette information?

Mme Ferreira : Certainement, mais pour le moment, je peux vous dire que le pourcentage des employés répondant aux exigences linguistiques relatives à leur poste s'élève à peu près à 84 p. 100.

Le sénateur Tardif : On parle de 84 p. 100 de 2 p. 100?

Mme Ferreira : Il ne faut pas confondre; le 2 p. 100 n'est pas relatif à la GRC. Notre effectif bilingue dépasse de beaucoup 2 p. 100.

Le sénateur Tardif : Alors, quel est ce chiffre, Madame? Pouvez-vous déposer un exemple de contrat que vous avez remis à la fonction publique incluant cette clause linguistique?

Mme Ferreira : Oui, nous pourrions vous faire parvenir l'exemple du contrat avec Contemporary Security Canada. Il indique nos obligations linguistiques.

Pour ce qui est du pourcentage, comme vous le disiez, nous n'avons pas exactement le pourcentage dans ces clauses. Je sais que dans le contrat initial, il était question d'un pourcentage requis de 3 p. 100 strictement pour le fournisseur de services privés. Donc, pour répondre aux obligations linguistiques dans la soumission de Contemporary Services Canada, le pourcentage requis était de 3 p. 100 minimum et la GRC assurerait tout le reste. Donc, le 3 p. 100 était strictement un minimum concernant Contemporary Services Canada, alors que la GRC s'acquitterait de tout le reste.

M. Tousignant : On peut vous donner le nombre de postes bilingues et le nombre de postes pour les membres réguliers bilingues dans le pays, comparé à la population.

Le sénateur Tardif : Certainement. J'essayais de comprendre comment vous fonctionnez pour le recrutement, le pourcentage alloué au recrutement de francophones dans les diverses régions du pays.

La vice-présidente : C'est sans doute des chiffres que nous pourrions recevoir un peu plus tard.

[Traduction]

Le sénateur Jaffer : Je suis très contente d'entendre toutes les mesures que vous avez prises pour veiller à ce que les deux langues officielles soient bien représentées aux Jeux olympiques d'hiver de 2010, mais je ne suis pas sûre d'avoir bien compris les chiffres. Excusez-moi de vous le demander à nouveau. J'ai cru à un moment vous entendre dire 65 p. 100, mais le sous-commissaire a ensuite parlé de 11 p. 100.

M. Tousignant : Les 65 p. 100 se rapportent aux agents des relations avec les médias, au pourcentage de ces agents qui offriront des services dans les deux langues officielles.

M. Teolis : Si vous le voulez bien, je peux clarifier. Environ 6 000 agents de police seront présents aux Jeux, dont 1 100 seront bilingues. Les 11 p. 100 concernent les 5 000 agents de sécurité privés, c'est-à-dire que 11 p. 100 de ces gens, soit environ 610, seront bilingues. Il faut y ajouter les militaires, mais je ne dispose d'aucun chiffre sur leur niveau de bilinguisme.

Le sénateur Jaffer : Je vous ai entendu dire que vous faites certaines choses selon la loi — je le dis avec respect, ne le prenez pas mal — et que, selon la loi encore, vous veillez à fournir certaines choses.

Pourriez-vous m'expliquer — sinon aujourd'hui, du moins plus tard par la présidence — comment vous vous y prenez pour créer une culture de bilinguisme à la GRC. Je ne pense pas que ce soit une simple question de droit, bien que le droit ait bien entendu son importance.

Pour prendre un exemple, vous avez fait un travail extraordinaire sur la question de l'alcool au volant. Vous nous avez forcés à requérir des peines sévères, dans les lois, pour la boisson au volant. Je mets cela largement au crédit de votre organisation. Vous avez ainsi réussi à engendrer une culture où l'alcool au volant a cessé d'être acceptable.

Comment vous y prenez-vous pour créer une culture qui garantisse le bilinguisme dans tout le pays?

Mme Ferreira : Pour créer cette culture, nous avons lancé une campagne de sensibilisation et de promotion, sous la désignation « Un héritage à notre avantage ». Le but principal est de sensibiliser le personnel à ses obligations linguistiques, à ses droits à titre d'employé et de citoyen, et aux obligations de la GRC en matière d'application de la Loi sur les langues officielles, avec son règlement.

Il s'agit de changer l'idéologie ambiante. Nous essayons non seulement de présenter la Loi sur les langues officielles et d'expliquer son caractère de loi et d'obligation, mais aussi de montrer qu'elle est un atout pour notre fonctionnement et un avantage tant pour nous-mêmes que pour la population canadienne. Le but est de montrer les bons côtés du bilinguisme, de s'en servir, si l'on veut, comme d'un élément contraignant, d'un outil pour mieux communiquer et faire progresser la situation.

Le sénateur Jaffer : Offrez-vous une formation aux personnes unilingues qui rejoignent vos rangs?

Mme Ferreira : Absolument. Nous avons récemment lancé une formation linguistique à l'intention des membres unilingues francophones. Notre décision de cibler ce groupe linguistique répondait à un fort besoin, et a permis d'aborder l'un de nos plus graves problèmes. Nous avons mis en place un projet pilote qui offre une formation linguistique juste après le passage à la Division Dépôt, alors que les agents sont mobilisés et auprès de leurs familles dans les différentes régions.

Ce programme de formation linguistique est intensif. À la première étape, les agents suivent des cours linguistiques en classe, où ils apprennent tout le nécessaire. La deuxième étape est un programme intégré à la formation pratique, soit l'aspect pratique. On combine maintenant les deux, ce qui revient plus ou moins à faire d'une pierre deux coups.

Dès qu'ils ont acquis les rudiments de la langue seconde et que leurs compétences linguistiques sont suffisantes pour se débrouiller et ne poser aucun risque pour eux-mêmes, le public et la GRC, on les envoie au programme de formation pratique, et ils entament leur carrière.

Le sénateur Jaffer : Et les anglophones unilingues?

Mme Ferreira : Nous nous en occuperons. La première étape consistait à mettre en œuvre cette partie du programme; la deuxième consistera à faire de même pour nos homologues anglophones.

Le sénateur Jaffer : Pouvez-vous nous dire quand vous offrirez le même programme aux anglophones, et combien de gens vous formez dans les deux programmes?

Mme Ferreira : Nous continuons en fait à former les homologues anglophones. Les anglophones et les francophones éprouvent des besoins différents. Les besoins des francophones se situent au début de leur carrière, parce qu'il faut connaître l'anglais pour progresser dans les différentes régions du Canada. Si nous regardons la réalité canadienne, la GRC est bilingue, mais il existe bien plus de régions anglophones que francophones. Dans cette optique, il était plus important de nous occuper des francophones, parce que leurs besoins se situent au début de leur carrière. Une fois qu'ils ont maîtrisé l'anglais, ils vont de l'avant et ils sont désormais bilingues.

Pour les anglophones, la nécessité du bilinguisme se fait sentir davantage vers le milieu de leur carrière. Beaucoup suivent une formation linguistique initiale, mais le besoin grandit à mesure qu'ils progressent dans leur carrière, afin d'accéder à des postes d'autorité et de direction supérieurs.

Nous offrons encore une formation linguistique aux membres tant anglophones que francophones. Le projet pilote que je viens de mentionner n'est qu'une de nos nouvelles initiatives, mais en fait nous offrons aux deux groupes les mêmes possibilités de formation.

Le sénateur Jaffer : Quel est le nombre total d'agents de la GRC dans tout le pays? Si vous ne connaissez pas le chiffre exact, vous pourrez nous le fournir plus tard.

M. Tousignant : Nous pourrons vous donner le nombre exact en même temps que nous communiquons toutes les statistiques. Il se situe aux alentours de 19 000 membres répartis un peu partout.

Le sénateur Jaffer : De ce nombre, combien sont francophones?

Mme Ferreira : Je pourrais peut-être vous donner une approximation, puis la confirmer par la suite.

Le sénateur Jaffer : Je formule dès maintenant toutes mes demandes. Combien de membres sont bilingues? Combien sont francophones?

Quel genre de recrutement faites-vous dans la communauté francophone? Cette communauté est en pleine croissance partout au pays. Je sais que la GRC fait un travail de recrutement extraordinaire dans ma province et je suis très fière de l'action qu'elle y mène auprès des autres minorités; l'excellence de votre travail est un exemple pour tous. Je sais comment vous recrutez les autres minorités dans ma province, mais je n'ai aucune idée de la façon dont vous encouragez les francophones à se joindre à vous.

M. Tousignant : On se sert dans tout le pays du même modèle de recrutement que celui employé en Colombie- Britannique, par exemple. Quant au nombre exact de postulants qui se présentent aux examens, par exemple au Québec, je pourrai vous le communiquer, mais je ne l'ai pas ici.

[Français]

La vice-présidente : J'ai l'impression, qu'un unilingue anglophone peut être promu et avoir une belle carrière dans la GRC sans jamais apprendre le français, mais que l'unilingue francophone est mieux de se dépêcher à apprendre l'anglais sinon il n'ira nulle part. C'est un peu ce que vous expliquez depuis tout à l'heure. Est-ce une perception ou simplement la vérité?

Mme Ferreira : Il faut bien comprendre la situation. Il y a deux volets. Les besoins sont différents pour les francophones et les anglophones. Le besoin d'apprendre une deuxième langue est ressenti à différents points de leur carrière. Si on regarde tout simplement la tendance, pour les francophones, le besoin d'apprendre l'anglais est ressenti plus tôt dans la carrière. C'est aussi en partie dû à la réalité du pays.

La vice-présidente : C'est ce que je vous disais. Le francophone est obligé d'apprendre l'anglais et vite ou alors il n'ira nulle part.

Mme Ferreira : Pour ce qui est de l'anglophone, il ressent le besoin un peu plus tard dans la carrière. Il arrive souvent que le francophone devenu bilingue accède aux postes plus élevés. Alors, dire que c'est l'anglophone qui va progresser dans sa carrière et qu'ultimement c'est lui qui réussira n'est pas tout à fait la réalité. Souvent le besoin d'apprendre la deuxième langue pour un francophone est ressenti en début de carrière alors que pour l'anglophone c'est plutôt vers le milieu de sa carrière ou un peu plus tard. Vous voyez la nuance?

M. Tousignant : Je vais prendre mon exemple personnel. Quand j'ai joint la GRC à l'âge de 19 ans, je ne parlais pas un mot d'anglais. La formation linguistique que j'ai reçue au début dans ma carrière et le fait d'avoir travaillé dans des provinces de l'Ouest ont contribué au bon cheminement de ma carrière jusqu'à ma situation présente. Je pense avoir eu autant d'occasions de réussir que les autres et même qu'aller chercher ma formation linguistique très tôt dans ma carrière m'a beaucoup aidé à progresser dans mon cheminement dans la GRC.

La vice-présidente : Nous comprenons tous que vous ne seriez pas surintendant principal si vous ne parliez pas anglais.

Le sénateur Pépin : C'est intéressant. Proportionnellement, si on prend l'ensemble des employés de la GRC, combien y a-t-il de francophones et d'anglophones?

Mme Ferreira : Pour ce qui est de l'ensemble des employés, nous avons ici les chiffres, mais malheureusement, ils sont divisés en services publics et autres. Mais je pourrai vous les faire parvenir.

M. Tousignant : Les chiffres sont disponibles, il s'agit juste de les obtenir selon vos paramètres.

Le sénateur Pépin : Tenez-vous toujours compte de la partie VII, au sens de son application, dans les décisions que vous prenez même s'il peut y avoir des situations où cela pourrait être plus difficile?

Mme Ferreira : Je peux vous donner un exemple concret. Tout d'abord, la partie VII fait partie intégrante de notre Plan d'action triennal des langues officielles de 2007 à 2010. En plus de cela, nous offrons à Patrimoine canadien un rapport sur les initiatives. Nous avons commencé à rédiger un rapport qui n'est pas nécessairement officiel, parce que nous ne sommes pas tenus en tant qu'institution non désignée de nous rapporter de façon officielle. Par contre, on a décidé de le faire. Nous travaillons de près avec Patrimoine canadien et nous offrons tout le spectre des initiatives que nous avons entreprises par rapport à la partie VII et la mise en œuvre des articles 41 et 42.

Nous en avons eu un exemple concret il y a quelques mois lorsque dans la région de l'Atlantique nous avons décidé de fermer trois détachements. Puisque cela a eu un impact sérieux sur les communautés environnantes, nous avons tenu des consultations. Nous avons invité les communautés de langue officielle minoritaire à venir participer à ces consultations, à poser des questions et à nous faire part de quelconques inquiétudes qu'ils auraient par rapport à la fermeture de ces détachements, l'impact que cela pourrait avoir sur leur communauté, leur commerce, et autres. Donc il y a eu des comités consultatifs, une table où ils ont été invités à nous soumettre leurs questions pour qu'on puisse ouvrir la discussion.

Suite à cela, notre coordonnatrice nationale y a participé en tant que représentante de la partie VII et du programme de langues officielles. Elle a agi en termes de liaison, en tant que représentante de la GRC.

Nous avons aussi soumis un sondage aux communautés pour leur demander leur rétroaction, leur avis sur la consultation, ce qu'ils en avaient pensé, avec des suggestions. Cela a été très bien reçu de leur côté.

Le sénateur Pépin : Est-ce qu'il y a des obstacles internes ou externes qui rendent la mise en œuvre de vos obligations à l'égard de la partie VII plus difficile et si oui, quels sont-ils?

Mme Ferreira : Par la nature de nos fonctions, puisqu'on est une entité qui s'occupe de la protection, de la sécurité et de la santé, on est quand même limité dans ce que l'on peut faire en tant qu'institution fédérale envers la promotion et le développement des communautés. Au contraire de certaines institutions qui peuvent offrir un certain financement direct pour appuyer le développement des communautés, nous, on ne peut pas le faire. Notre institution offre des services de résolution de problème. Donc on tient des consultations, des tables de concertation où nous rencontrons les communautés et où nous participons à la résolution de problème ensemble. L'échange, le partage d'idées, c'est le genre d'initiatives que l'on peut offrir. Bien entendu, notre recrutement, qui est fait au sein de toute la communauté canadienne, inclut également un recrutement qui est fait au sein des communautés de langue officielle minoritaires.

À tour de rôle cela devient un avantage pour les deux. Nous accroissons notre effectif avec une force assez diversifiée, avec des capacités assez complètes, qu'elles soient linguistiques ou autres, et c'est aussi un avantage pour les membres de ces communautés parce que cela leur offre des opportunités d'emploi et un avancement de carrière. Donc nous voyons cela de cette façon.

Une autre difficulté que l'on voit souvent c'est la définition des « mesures positives ». Comme vous le savez, c'est quand même une idée assez vague, mais c'est très bien parce que cela permet une flexibilité aux institutions fédérales afin de mettre sur pied différentes initiatives. D'un autre côté, ce qui s'avère un peu plus difficile c'est l'interprétation d'une « mesure positive ». Pour certains, ce que nous faisons peut être vu comme une « mesure positive », alors que pour d'autres, cela ne tombe pas dans le cadre de la définition d'une « mesure positive ».

Je vous donne un petit exemple. Dans le cadre du projet pilote que nous menons pour les nouveaux membres francophones, pour aider et appuyer nos membres et leur famille, nous avons décidé de développer des trousses qui leur permettent, lorsqu'ils arrivent dans leur communauté, de savoir où sont les services, où se diriger pour des services dans leur communauté francophone minoritaire dans l'Ouest ou ailleurs et, au Québec, pour les communautés de langues officielles anglophones. Nous produisons un annuaire avec tous les services possibles et nous donnons aussi une liste des écoles, et cetera, et des points de contact au sein de ces communautés où les familles peuvent se rendre si elles ont besoin de quoi que ce soit.

Nous avions vu cela comme une initiative utile, car les familles des membres, deviennent, une partie intégrante de cette communauté de langue officielle minoritaire parce que ces époux et ces épouses, qui maintenant font partie d'une communauté où la langue officielle de choix n'est pas nécessairement leur langue maternelle, ne sont plus dans la majorité. Pour nous, nous considérons leurs familles comme des membres de la communauté de langue officielle minoritaire.

Pour d'autres agences ou d'autres entités, ce n'est peut-être pas le cas. On les définit comme étant une partie intégrante du membre, donc c'est la famille du membre, donc c'est à la GRC de s'occuper d'eux et cela ne tombe pas dans le cadre d'une « mesure positive ». Vous comprenez?

Le sénateur Pépin : C'est un peu comme les familles de militaires.

Mme Ferreira : Exact.

Le sénateur Losier-Cool : Madame a répondu en partie à ma question complémentaire lorsqu'elle a parlé de ce qu'est vraiment une « mesure positive ». Vous avez donné l'exemple du cas où l'on devait enlever trois postes de la GRC en Atlantique et où vous êtes allé dans un processus de consultation. Ce processus de consultation, est-ce qu'il est dans votre plan de travail ou bien est-ce qu'il a lieu suite à des pressions de la part de la communauté? Venant d'une communauté minoritaire, j'ai passé ma vie à exercer des pressions, également au plan linguistique pour les services bilingues au Nouveau-Brunswick.

Mme Ferreira : Je dirais que dans ce cas-ci, cela a été vraiment une initiative qui a été prise. Je ne suis pas au courant du fait qu'il y ait eu des pressions ou une demande à la GRC; je crois qu'il y a eu assez de sensibilisation dans les régions. Dans la région de l'Atlantique, je sais que la coordonnatrice a travaillé en étroite collaboration avec les communautés de langue officielle minoritaire. Elle participe à des comités et je crois que c'est comme cela qu'ils ont développé une relation qui leur permet de savoir qu'on doit faire des consultations.

Une autre chose que la GRC fait, pour justement être proactive plutôt que réactive, c'est que notre campagne de sensibilisation inclut la sensibilisation de notre personnel à nos obligations face à la partie VII, ce que l'on doit prendre comme « mesure positive » et ce que cela signifie? Également, avec l'aide et les outils de Patrimoine canadien, nous avons élaboré un pamphlet qui explique les étapes d'un comité consultatif. Lorsqu'il y a une rencontre avec les communautés, on y explique quelles sont les étapes à suivre avant, pendant et après pour préparer notre gestion ou les parties impliquées à savoir quoi faire, comment s'y prendre, quelles questions poser, quelles sortes de questions leur seront posées, de sorte qu'on sache un peu à quoi s'attendre.

Le sénateur Losier-Cool : Alors, on peut dire que les nombreuses plaintes que le commissaire aux langues officielles a mentionnées dans tous ses rapports depuis 2007 — et peut-être avant — et dont la GRC faisait principalement l'objet ont amené votre plan de consultation?

Mme Ferreira : Je ne peux pas vous dire cela exactement parce que les plaintes varient selon les parties. Les plaintes que nous recevons ne sont pas toutes nécessairement au titre de la partie VII. Nous avons eu certaines plaintes qui ressortent de la partie VII, d'autres de la partie IV — les services au public par exemple. Ces plaintes nous amènent à continuer nos efforts, certainement. Elles nous amènent à essayer d'améliorer notre rendement et à mettre sur pied des initiatives, de tous côtés, pour prendre en compte chaque partie de la loi et traiter chacune de nos faiblesses. Nous nous en servons certainement pour améliorer nos services face au public en général et notre mise en œuvre de la loi, mais je ne peux pas dire que toutes ces plaintes ont amené nos initiatives concernant la partie VII, car toutes ne sont pas liées à la partie VII.

Le sénateur Losier-Cool : Elles sont liées à la Loi sur les langues officielles.

M. Tousignant : L'existence d'un plan stratégique de 2007 à 2010 nous aide aussi à progresser vis-à-vis des questions de langues officielles, pour nous améliorer et continuer à aller chercher une cote supérieure à la moyenne.

[Traduction]

Le sénateur Seidman : Merci de votre venue ce soir. La cote de rendement que nous observons ici est faible, mais votre exposé met l'accent sur les mesures utiles — et il est évident que, dans les derniers douze à dix-huit mois environ, vous avez pris des mesures qui se rapportent à la partie VIII de la Loi sur les langues officielles.

Tenez-vous des consultations régulières avec les communautés de langue officielle en situation minoritaire, soit les communautés anglophones au Québec et les communautés francophones dans le reste du pays? Tenez-vous aussi des discussions avec les gouvernements provinciaux?

Mme Ferreira : D'après ce que j'en sais, nous avons des coordonnateurs dans les régions qui assistent aux réunions interministérielles, lesquelles se tiennent avec d'autres institutions gouvernementales. Parfois, les communautés de langue officielle en situation minoritaire assistent aux réunions et prennent part aux discussions. Pour les gouvernements provinciaux, je ne suis pas sûre. Quoi qu'il en soit, nos coordonnateurs siègent aux comités interministériels et aux comités formés avec les communautés de langue officielle en situation minoritaire dans les différentes régions.

Si je peux ajouter quelques mots, nous siégeons aussi à des comités interministériels à l'échelle nationale avec le ministère de la Justice, le ministère du Patrimoine canadien et Sécurité publique Canada, si je ne m'abuse. Le but est de trouver d'autres projets susceptibles de faciliter le développement de ces communautés, ainsi que de favoriser la reconnaissance aussi bien de l'anglais que du français. Nous essayons de siéger au plus grand nombre possible de comités, afin de trouver de nouvelles initiatives, pertinents à la GRC, qui appuieraient cette partie de la loi.

Le sénateur Seidman : Je voudrais clarifier votre processus de consultation auprès des différentes communautés en situation minoritaire dans les provinces. Au Québec, par exemple, des anglophones sont établis dans certaines régions. Consultez-vous ces communautés quand vous planifiez?

Mme Ferreira : Elles sont consultées si une initiative de la GRC est susceptible d'avoir des répercussions pour elles. Dans ce cas, notre but est de nous informer de ces répercussions, de leur donner la possibilité de poser des questions et de fournir des précisions.

Le sénateur Seidman : Nous sous sommes peut-être mal compris. Pour développer cette culture à la GRC, est-ce que vous consultez les communautés afin d'apprendre des façons d'améliorer encore les relations et le recrutement?

M. Tousignant : Nous menons un sondage sur la clientèle dans tout le pays, y compris au Québec. Ce sondage porte en partie sur les langues officielles et sur les services assurés par la GRC. Nous réalisons de la sorte une consultation dans toutes les régions du pays. J'ignore si elle se révélera utile. Je ne détiens toutefois aucune information qui concerne spécifiquement Montréal.

Le sénateur Seidman : Merci.

[Français]

Le sénateur Mockler : Alors que j'étais solliciteur général au Nouveau-Brunswick, la note globale pour 2004-2005 était faible; et c'était la même chose pour les années 2005-2006 et 2006-2007. Des améliorations sont apparues dans les périodes 2007-2008 et 2008-2009 portant la note globale à moyenne.

Ma question fait suite à une question posée par le sénateur Tardif : pourrait-on obtenir le profil linguistique de chacune des provinces? Vous n'avez pas besoin de répondre tout de suite, mais vous pourriez faire parvenir cela à la présidente du comité via la greffière.

J'ai suivi cela de très près au Nouveau-Brunswick, dans le cadre de vos nouvelles mesures proactives, lorsque vous avez consulté notre population dans le nord-ouest du Nouveau-Brunswick, dans la région de Saint-Léonard, afin d'avoir leurs commentaires. Des rapports internes à la GRC ont-ils été produits suite à ces consultations auprès de la population? Je sais que vous l'avez fait aussi dans d'autres régions de l'Atlantique, dans d'autres provinces maritimes.

Et le cas échéant, le comité pourrait-il en obtenir copie pour savoir exactement ce que disaient les gens lors de la consultation qui, selon moi, a été bonne? J'aimerais toutefois avoir le rapport parce que c'est certainement un mécanisme que vous devriez utiliser plus agressivement dans les années à venir.

M. Tousignant : Je n'ai pas ce rapport, mais je vais faire des recherches et les démarches nécessaires pour savoir si le rapport existe.

Mme Ferreira : Je peux répondre à la question. Encore une fois, les rapports que nous faisons sont, comme vous le dites, à l'interne parce que ce ne sont pas encore des rapports officiels. Nous avons le rapport de rétroaction des communautés suite à cette rencontre; et oui, nous pourrions vous faire parvenir l'ensemble des commentaires qui nous ont été envoyés.

Le sénateur Losier-Cool : J'aurais une question supplémentaire concernant les données de pourcentages que vous allez nous faire parvenir.

Sur la question des agents bilingues aux Jeux olympiques de Vancouver, je pense qu'il y en aura 600 — de toute façon, ce que je voudrais savoir, c'est si ce pourcentage reflète un peu le pourcentage de tous les francophones qui seront aux Jeux olympiques; les athlètes et les spectateurs de tous les pays? Ou est-ce que cela reflète seulement le pourcentage de francophones de l'Ouest canadien, « là où le nombre le justifie », comme on a souvent dit?

M. Teolis : Nous tentons de regrouper le nombre le plus important possible de membres de la GRC et des membres travaillant avec le département de sécurité privée qui soient bilingues. Nous ne savons pas combien de spectateurs ou d'athlètes sont bilingues, mais je peux vous dire que le nombre de policiers sera de plus de 6 000, dont 20 p. 100 seront bilingues; ce qui veut dire un nombre d'environ 1 200 policiers bilingues.

Dans ce nombre de policiers sont inclus des membres qui viennent d'autres corps policiers que la GRC. Nous avons cherché à rejoindre des policiers bilingues provenant d'autres corps policiers et 632 membres de ces autres corps policiers sont bilingues. Ils seront présents avec les membres de la GRC.

Le sénateur Losier-Cool : Ces autres corps policiers sont tous canadiens?

M. Teolis : Oui; 116 départements à travers le Canada vont envoyer des policiers aux Jeux olympiques.

Le sénateur Losier-Cool : La sécurité est donc assurée par les Canadiens, c'est-à-dire que les athlètes provenant de la France ne viendront pas avec leurs services de sécurité?

M. Teolis : Certains pays viennent avec des officiers de liaison, mais ne fournissent pas des services de sécurité comme tels. Ils vont coopérer avec la GRC afin de s'assurer de la sécurité de leurs athlètes.

Le sénateur Pépin : J'ai une question supplémentaire. Vous avez dit que les militaires se joindront aux différents corps policiers. Mais quand vous leur avez demandé de se joindre à vous, avez-vous demandé de façon spécifique des militaires bilingues?

M. Teolis : Cela n'a pas été demandé de façon spécifique, mais nous espérons qu'ils le seront.

Le sénateur Pépin : On pourrait peut-être en faire la suggestion.

M. Teolis : Oui, certainement.

Mme Ferreira : Je voulais juste ajouter un petit commentaire par rapport au pourcentage. Une question a été posée en demandant si le pourcentage reflétera toute la participation francophone lors des Jeux olympiques. J'aimerais dire tout simplement que nous travaillons très fort à la GRC afin de revenir au message de base. Le principe de base est le suivant : le but n'est pas nécessairement ou seulement — tout comme dans notre campagne de sensibilisation et de marketing, — de remplir ou de respecter nos obligations; c'est d'essayer d'aller au-delà.

Notre objectif, malgré nos faibles moyens, est d'aller au-delà de nos obligations et de faire en sorte que nous assistions à un changement de culture et que la dualité linguistique soit considérée comme un atout.

Le but n'est donc pas nécessairement de se limiter au pourcentage requis par la loi, mais de pouvoir offrir un service dans la langue de choix du public, là où il est requis. C'est ce que la GRC veut essayer de faire.

Nous pourrions très bien vous fournir des pourcentages, et cetera; et nous allons le faire à votre demande, certainement. Mais le but demeure, que ce soit pour un événement comme les Jeux olympiques ou pour un autre — mais surtout pour celui-ci parce qu'il est vraiment à notre porte — d'offrir le service dans la langue de choix du public.

Le sénateur Losier-Cool : Bravo! Beau principe.

Le sénateur Fortin-Duplessis : Comme je suis résidente de la ville de Québec, je suis au courant que le commissaire aux langues officielles a reçu une plainte au sujet de l'unilinguisme des agents de la GRC qui ont été dépêchés à Québec pour assurer la sécurité pendant le Sommet de la francophonie, qui s'est tenu du 17 au 19 octobre 2008.

Cette plainte émane du président d'Impératif français, M. Jean-Paul Perreault, et qui trouve insultant que des agents appelés à servir la population et les dignitaires dans la vieille capitale soient incapables de s'exprimer en français.

Il avait basé sa plainte sur le fait qu'un journaliste avait posé la question à quatre membres de la GRC, leur demandant où était le centre de presse, et aucun d'eux n'a été capable de répondre en français. C'était quatre unilingues anglophones.

Le fait qu'on n'ait pas porté attention à la compétence linguistique des agents vous inquiète-t-il, alors que l'on accueille des dignitaires francophones de partout dans le monde? De plus, que compte faire la GRC pour qu'une telle situation ne se reproduise plus à l'avenir?

M. Teolis : Bien sûr cela nous inquiète. En ce qui concerne cet événement, il fallait recruter plusieurs officiers de sécurité alors qu'on devait continuer à offrir le service bilingue au reste du Canada. Nous avons demandé que le plus de membres bilingues possible puissent venir à travailler à Québec pour cet événement.

Nous avons fait le suivi de cet événement et il s'est avéré que l'on pouvait faire mieux. On aurait pu déployer les membres bilingues aux endroits où il y avait le plus d'interaction avec le public parce qu'on sait qu'il y a eu une situation où l'on a posé des questions en français à des membres qui étaient unilingues anglais.

Le sénateur Fortin-Duplessis : Au Canada, nous sommes souvent appelés à recevoir des groupes qui sont majoritairement francophones à l'occasion d'événements importants. J'espère que la prochaine fois vous tiendrez compte de ce fait et que vous respecterez cela.

M. Teolis : C'est pourquoi pour les Jeux olympiques on essaie de recruter 20 p. 100 de membres provenant d'autres corps de police qui sont bilingues. Cela représente plus de 1 000 officiers bilingues.

Mme Ferreira : Vous nous demandiez ce que nous allions faire pour nous assurer que cela ne se reproduise plus. Justement, il ne s'agit pas d'une excuse. C'est que malheureusement nous sommes limités en termes de ressources et cela nous force à faire de la gestion de risque.

Comme l'expliquait mon collègue, nous devons affecter les ressources selon le degré de risque. Et pour rectifier la situation en ce qui concerne les Jeux olympiques, la GRC a fait appel à des membres d'autres corps policiers, dont ceux du Québec, qui pourront desservir le public dans la langue de son choix.

De cette façon, nous nous assurons d'avoir un effectif bilingue partout à travers le pays et de continuer à nous acquitter de nos fonctions et de nos obligations en matière de langues officielles, là où c'est nécessaire.

La vice-présidente : Je pense que nous en serons à la dernière question puisque nous devons procéder à la deuxième partie de notre réunion à 18 h 30.

Le sénateur Tardif : Avant de poser ma question, j'aimerais faire un commentaire concernant l'information que vous avez partagée avec nous, en regard de la formation linguistique offerte aux unilingues francophones et non offerte aux unilingues anglophones.

Cela me semble être problématique par rapport à l'égalité d'accès à la formation linguistique. Le fait que les francophones seraient supervisés par des superviseurs anglophones affecterait la langue de travail. Il y a aussi le fait que lorsqu'on reçoit une formation linguistique, c'est dans le but d'offrir un service à une population.

La population risque donc de ne pas pouvoir être servie dans la langue officielle de son choix, et ce, par manque de formation linguistique des membres de la Gendarmerie royale du Canada. Vous avez indiqué que parce qu'il n'y avait pas de définition de « mesures positives », c'était sujet à interprétation.

Avez-vous reçu des avis du ministre de la Justice par rapport au sens du terme « mesure positive » et à la façon dont on devait mettre en œuvre les « mesures positives » pour respecter cette partie de la Loi sur les langues officielles?

Mme Ferreira : Je vais d'abord répondre à votre question qui concerne la formation linguistique. J'ai peur de m'être mal exprimée, mais je veux vous assurer qu'actuellement la formation linguistique est offerte aux unilingues anglophones au sein de notre organisation. Elle est offerte tant aux anglophones qu'aux francophones.

L'exemple du projet pilote dont je vous parlais était tout simplement un projet pilote au sein du programme de formation linguistique que nous avons à la GRC. Mais je vous assure que l'apprentissage de la langue est accessible tant aux anglophones qu'aux francophones et que nous nous assurons de l'équité de cette façon.

Pour ce qui est du projet pilote, nous n'en sommes qu'à ses débuts et puisqu'il n'y a que deux personnes qui travaillent vraiment à ce projet, nos ressources sont quand même limitées. Malheureusement, selon la réalité, nous allons de l'avant un pas à la fois.

Nous aurions aimé mettre sur pied un programme simultané pour les francophones et les anglophones, mais encore une fois, nous avons dû accepter la réalité et répondre aux besoins des francophones. Le but est d'éventuellement mettre sur pied un projet pilote pour les nouveaux membres anglophones également. Ceci étant dit, je tiens à vous assurer qu'actuellement la formation linguistique est offerte aux deux groupes linguistiques.

Pour ce qui est de la question concernant les « mesures positives », nous avons une définition globale de ce que constitue une « mesure positive ». Des agences centrales nous acheminent des exemples d'initiatives prises au sein d'autres ministères et qui pourraient nous aider à développer d'autres idées. C'est de là que découlent nos idées d'initiatives qui pourraient possiblement s'appliquer à la GRC.

Par contre, certaines mesures ne sont pas nécessairement applicables à la réalité de la GRC. J'espère que cela répond à votre question.

Le sénateur Tardif : Pourriez-vous nous faire parvenir cette définition globale ainsi que les exemples qui vous sont transmis par les divers ministères?

Mme Ferreira : Certainement.

La vice-présidente : Cela mettra fin à la première partie de la réunion d'aujourd'hui. Madame Ferreira, Monsieur Teolis et Monsieur Tousignant, merci d'être venus nous rencontrer et pour répondre à nos questions. Nous souhaitons tous que la GRC devienne la force policière la plus bilingue en Amérique du Nord.

(La séance est suspendue.)

(La séance reprend.)

La vice-présidente : Honorables sénateurs, nous poursuivons notre étude sur l'état de la mise en œuvre de la partie VII de la Loi sur les langues officielles et tout particulièrement les mesures prises par les organisations fédérales à cet effet.

Le comité est intéressé à en apprendre davantage sur les accomplissements et initiatives de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique à cet égard.

[Traduction]

Nous accueillons maintenant, pour la deuxième partie de la séance, l'honorable Keith Ashfield, ministre d'État de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique. M. Paul J. LeBlanc, vice-président exécutif de l'Agence, l'accompagne.

Monsieur le ministre, les membres du comité vous remercient d'avoir accepté l'invitation à comparaître aujourd'hui. Je vous invite à prendre la parole, après quoi les sénateurs poseront des questions.

L'honorable Keith Ashfield, C.P., député, ministre d'État de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique : Merci. Je suis heureux d'être parmi vous ce soir.

J'aime voir le sénateur Mockler tenu en échec par le grand nombre de personnes présentes. Je ne doute pas qu'il soit parfois difficile de le maîtriser. Le sénateur et moi avons été collègues à la législature provinciale du Nouveau- Brunswick, et nous nous connaissons de longue date.

C'est avec plaisir que je comparais devant vous en ma qualité de ministre d'État de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique (APECA). Comme vous l'avez mentionné, je suis accompagné par Paul J. LeBlanc, vice-président exécutif de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique. Nous nous efforcerons ensemble d'exposer comment l'APECA interprète et met en application la partie VII de la Loi sur les langues officielles.

Mais il me paraît nécessaire, pour bien montrer comment l'APECA applique la partie VII, de brosser un court tableau des communautés de langue officielle en situation minoritaire qui reçoivent des services de l'Agence.

Le français est la langue officielle minoritaire dans le Canada atlantique, comme vous le savez. Le Canada atlantique abrite le tiers environ de la communauté francophone de notre pays. Selon le recensement de 2006, la population des quatre provinces de l'Atlantique s'élève à environ 2,2 millions d'habitants.

Composée d'Acadiens et d'autres francophones, la communauté francophone du Canada atlantique compte environ 275 000 âmes, soit à peu près 12 p. 100 de la population de la région. La majorité des Acadiens et des autres francophones résident dans ma province, le Nouveau-Brunswick.

Cette communauté se compose en grande partie de groupements répartis dans tout le Canada atlantique. À Terre- Neuve-et-Labrador, la population francophone est concentrée à St. John's, la capitale provinciale; dans la péninsule de Port-au-Port, dans l'Ouest de l'île; et à Labrador City.

En Nouvelle-Écosse, la communauté de langue officielle en situation minoritaire se retrouve surtout au cap Breton, à Halifax, dans les régions de Clare d'Argyle dans le Sud-Ouest, et dans l'ensemble des communautés rurales de la province.

Les Acadiens et les francophones de l'Île-du-Prince-Édouard sont concentrés dans la région Évangéline. Le dynamisme de cette communauté est bien connu et respecté de tous.

Au Nouveau-Brunswick, la communauté francophone occupe surtout trois régions : Madawaska, dans le secteur Nord-Ouest de la province; la Péninsule acadienne, dans le Nord-Est; et le Sud-Est de la province — Moncton, Shediac, Bouctouche et environs.

Dans ces province, les communautés bénéficient de l'appui de nombreux organismes qui coordonnent diverses activités, depuis l'éducation et la santé jusqu'au développement économique et aux affaires. Le service à la communauté acadienne et francophone du Canada atlantique vient tout naturellement à l'APECA, car cette communauté fait partie du tissu social de la région. De fait, bon nombre des employés de l'APECA sont eux-mêmes issus de la minorité francophone desservie par l'Agence.

Je voudrais souligner un point concernant la partie VII de la Loi sur les langues officielles. L'article 41 est ainsi rédigé :

Le gouvernement fédéral s'engage à favoriser l'épanouissement des minorités francophones et anglophones du Canada et à appuyer leur développement.

Dans l'ensemble du Canada atlantique, les communautés de langue officielle en situation minoritaire sont fortes et dynamiques. Organisme fédéral, l'APECA a pris l'engagement d'apporter une aide à cette communauté, tout autant qu'à toutes les collectivités et à la population de la région.

Il sera utile de commencer par donner un court historique de l'Agence. Créée en 1987, l'APECA a pour mandat d'appuyer la compétitivité, l'innovation et la productivité des entreprises, et de créer ainsi des possibilités de croissance économique dans la région atlantique. Par ailleurs, l'APECA collabore avec différentes communautés au développement et à la diversification des économies locales. Non contente de faire valoir les points forts du Canada atlantique et de sa population, l'APECA apporte elle aussi son soutien à la prospérité régionale grâce à son action dans trois secteurs principaux : l'expansion des entreprises, qui consiste à améliorer l'environnement commercial et à donner un coup de pouce aux entreprises aux stades du démarrage, de l'expansion et de la modernisation; le développement communautaire, soit la collaboration avec les communautés en vue de stimuler l'essor économique, d'améliorer l'infrastructure locale et de créer des débouchés dans l'économie locale; et la défense des intérêts et la coordination à l'égard des politiques. Dans ce dernier rôle, l'APECA se fait le champion du Canada atlantique et représente les intérêts de la région, à l'échelle nationale, dans des dossiers comme l'élaboration de politiques, la recherche et l'analyse, et elle collabore aussi avec d'autres ministères afin d'assurer la coordination des politiques et des programmes.

Les quelque 30 bureaux locaux de l'Agence desservent pratiquement chaque pouce de la région atlantique. Son administration sociale est à Moncton, au Nouveau-Brunswick, et elle compte des bureaux régionaux dans toutes les capitales provinciales du Canada atlantique.

Les partenariats avec les organismes fédéraux, régionaux et provinciaux — comme les organismes de développement économique régional (ODER) et les Corporations au bénéfice du développement communautaire (CBDC) — sont aussi au cœur du rôle de l'Agence et des services qu'elle offre.

Institution fédérale selon les termes de la Loi sur les langues officielles, l'Agence se fait un devoir fondamental d'assurer la prestation des services au public dans les deux langues officielles s'il est jugé que ces services font « l'objet d'une demande importante ». À ce titre, l'APECA se conforme volontiers à cette obligation énoncée dans la loi, et à d'autres aussi, comme l'égalité du statut, l'emploi des deux langues officielles sur les lieux de travail et l'égalité des chances d'emploi et d'avancement dans les institutions fédérales.

Mais par-dessus tout, aux fins du présent exposé, l'APECA applique les obligations énoncées au paragraphe 41(1) de la Loi, qui prescrit que « Le gouvernement fédéral s'engage à favoriser l'épanouissement des minorités francophones et anglophones du Canada et à appuyer leur développement, ainsi qu'à promouvoir la pleine reconnaissance et l'usage du français et de l'anglais dans la société canadienne. »

L'APECA prend, et a toujours pris, des mesures actives à l'égard des communautés de langue officielle au Canada atlantique, c'est-à-dire qu'elle a toujours entretenu des liens étroits avec ces communautés et s'est efforcée, avant même qu'on en impose l'obligation, d'instaurer une relation à la fois ouverte et transparente.

L'Agence estime que sa façon de traiter avec les communautés francophones constitue en soi une mesure positive, au sens que donne à cette expression le paragraphe 41(2) de la Loi. Dans ses activités et ses initiatives, l'APECA tient compte de la nature et des besoins particuliers de chacune des communautés de langue officielle en situation minoritaire dans la région.

En 2004, par exemple, l'APECA a conclu avec le ministère du Patrimoine canadien un accord de création d'un fonds de 10 millions de dollars destiné aux projets de célébration du 400e anniversaire de la fondation du premier établissement français permanent en Amérique du Nord, en 1604.

Lancé en 2004, le Partenariat culturel et économique du Canada atlantique (PCECA) représente un effort concerté de la part des deux ministères pour stimuler le développement économique durable dans la région de l'Atlantique. Dans ce cadre, on a fait valoir la culture de la région et célébré l'histoire et la diversité culturelle du Canada atlantique, dans le contexte des cérémonies du 400e anniversaire.

Dès l'annonce du partenariat, les communautés de langue officielle en situation minoritaire ont été informées des possibilités de financement, puis elles ont été invitées à concourir à la détermination des mesures susceptibles d'avoir le plus d'effet.

L'application de la politique sur les langues officielles poursuit son évolution dans l'ensemble du gouvernement. Dans cette optique, l'APECA actualise sa politique interne sur les langues officielles de manière qu'elle demeure à la fois universelle et conforme à toutes les dispositions de la Loi. Cette politique a pour but de formuler une approche intégrée de la mise en œuvre de la partie VII de la Loi.

La nouvelle politique donnera une présentation globale de la question des langues officielles, et établira qu'elles ne peuvent pas, et ne doivent pas, être considérées d'un point de vue abstrait. La politique montrera qu'une analyse de cette question est au cœur de notre mode de fonctionnement.

Le Comité intégré des langues officielles de l'Agence témoigne que celle-ci voit les langues officielles d'un point de vue global. Ce comité se compose d'employés de sections de l'APECA chargées de la surveillance aussi bien des services offerts au public selon la partie IV, en français et en anglais, que de l'intégration des enjeux relatifs aux langues officielles dans l'élaboration et l'exécution des programmes, aux parties IV et VII. La réunion de ces deux fonctions dans un comité unique permet à l'Agence de réaliser une approche intégrée de ses obligations en matière de langues officielles.

Sous l'angle financier, l'APECA a apporté une forte contribution tant commerciale que non commerciale aux communautés francophones du Canada atlantique. Dans les cinq dernières années, elle a financé, à raison de plus de 60 millions de dollars, des projets de la communauté de langue officielle en situation minoritaire dans la région. Ces montants comprennent les contributions provenant du Programme de développement des entreprises de l'Agence et d'autres sources : le Partenariat interministériel avec les communautés de langue officielle, des partenariats avec le ministère du Patrimoine canadien, le Plan d'action fédéral 2003-2008 sur les langues officielles, qui a versé environ 2,4 millions de dollars, et le Partenariat culturel et économique du Canada atlantique, dont il a déjà été question.

Touchant l'actuel Plan d'action sur les langues officielles — également désigné Feuille de route pour la dualité linguistique canadienne, 2008-2013, agir pour l'avenir —, l'Agence prend une part active à la création de projets avec les communautés francophones, appuyée en cela par le volet du Plan intitulé « Initiative de développement économique ». Plusieurs projets en sont au stade de l'approbation. Dans les mois à venir, l'Agence prévoit mener une autre série de consultations avec les communautés linguistiques minoritaires afin de susciter davantage d'intérêt.

Outre les fonds destinés au plan d'action, l'APECA a appuyé des projets par l'intermédiaire de son Programme de développement des entreprises, notamment le Congrès mondial acadien, qui s'est tenu dans la Péninsule acadienne, au Nouveau Brunswick, en août 2009. Par ailleurs, l'Agence finance actuellement un projet d'envergure destiné aux Jeux olympiques d'hiver de 2010 : le Pavillon du Canada atlantique, initiative commerciale mettant en vedette des entreprises du Canada atlantique à la Place de la Francophonie 2010, à Granville Island, à Vancouver, en Colombie-Britannique.

Parmi les autres projets ayant reçu un récent appui financier de l'APECA, mentionnons la restauration du Pays de la Sagouine, symbole touristique et culturel dans la région de Beauséjour au Nouveau-Brunswick; la route d'Iberville, à Terre-Neuve-et-Labrador; la stratégie de promotion des artistes acadiens sur la scène internationale; et la création de produits de tourisme expérientiel, comme la pêche au homard, les arts et la culture. Ce ne sont là que quelques exemples de l'appui accordé par l'APECA aux communautés de langue officielle en situation minoritaire dans le Canada atlantique.

L'APECA ne ressent pas le respect des langues officielles comme une obligation, mais comme la manifestation d'un bon sens pratique, qui pousse à se montrer attentif aux besoins de la clientèle de base définie dans le mandat de l'Agence. L'APECA entretient des rapports étroits avec les intervenants dans le développement économique de ces communautés, comme en témoigne avec éloquence le comité régional APECA-RDÉE, établi depuis 2006 et composé de coordonnateurs responsables de la mise en œuvre de l'article 41. Ces coordonnateurs, appartenant au siège social et aux bureaux régionaux de l'APECA, collaborent régulièrement avec les quatre directeurs provinciaux du RDÉE.

Les langues officielles font partie intégrante de toutes les activités et de toutes les mesures de l'Agence. Ces services sont dans la nature même de notre organisme. Ainsi, l'appui apporté par l'Agence aux communautés de langue officielle en situation minoritaire n'est pas ressenti comme une obligation, mais comme un réflexe en réaction à la réalité démographique de notre région, qui est à l'image de la diversité culturelle de notre pays et de ses valeurs de tolérance et de réflexion prospective.

Notre gouvernement, sous la direction de notre premier ministre, tire fierté du soutien que l'APECA a constamment apporté à la minorité francophone au Canada atlantique. La collaboration de l'APECA avec la communauté dépasse de loin ses obligations minimales, soit la possibilité pour le public canadien de communiquer avec le gouvernement fédéral dans l'une ou l'autre des langues officielles.

L'Agence a toujours veillé à obtenir la participation véritable de nos communautés linguistiques minoritaires au développement du Canada atlantique. Nous serons heureux de répondre à vos questions.

[Français]

Le sénateur Fortin-Duplessis : La Feuille de route pour la dualité linguistique 2008-2013 veille à ce que les institutions fédérales, notamment celles qui ont un mandat à remplir en vertu de la Loi sur les langues officielles, s'assurent d'une meilleure gouvernance et coordination horizontale afin d'intégrer leur travail respectif et d'accroître l'efficacité de leurs actions conformément au cadre de l'imputabilité et de la coordination en langues officielles.

Pourriez-vous nous dire comment votre institution réussit à mettre en œuvre l'engagement fédéral à l'égard des francophones en situation minoritaire?

Paul J. LeBlanc, vice-président exécutif, Agence de promotion économique du Canada atlantique : Permettez-moi de décrire quelques éléments clés dans l'organisation de l'agence en vertu de ses responsabilités en matière de langue officielle. Je vais élaborer sur quelques points que le ministre a énoncés dans son introduction.

Par exemple, nous avons créé à l'APECA un secrétariat des langues officielles qui fait partie intégrante de notre boîte de politiques et de développement de programmation, ce qui ne ressemble pas à ce que l'on retrouve typiquement dans une section des ressources humaines.

Dans un des trois grands volets de notre mandat, le développement communautaire, nous retrouvons un secrétariat dédié aux langues officielles. Nous avons un quartier régional dans chacune des quatre provinces de l'Atlantique et dans chacun des quartiers se trouve une personne dévouée principalement à l'exécution de nos obligations selon l'article 41. Nous avons ce comité interne à l'APECA.

Le devoir de ces personnes est d'établir et de maintenir un contact avec les communautés minoritaires afin de s'assurer qu'elles comprennent bien, dans tous les coins de l'Atlantique, quelles sont les priorités, notre implication dans la planification stratégique et notre responsabilité à contribuer de manière positive sur le développement, la planification et autres. En retour, nous recevons des propositions d'investissement qui nous permettent par la suite d'investir dans des projets comme ceux que le ministre a énoncés il y a quelques minutes. Il y en a des centaines, et j'oserais dire des milliers. C'est une question d'organisation aux plans systématique et structurel de l'agence pour pouvoir donner effet à nos responsabilités. C'était un exemple.

Nous avons aussi plusieurs partenaires dans le développement de notre programmation. Le ministre a parlé des organisations de développement communautaire locales. Ce sont des boîtes locales avec des comités de direction qui viennent des communautés. Il y en a au Canada atlantique de façon à couvrir tout le territoire de l'Atlantique.

Toutes les communautés minoritaires bénéficient d'une organisation locale de développement pour voir à leurs aspirations de développement. Nous finançons ces organisations. Nous exigeons de ces organisations une planification annuelle et multiannuelle. Nous faisons un suivi continu avec ces organisations et comme partie intégrante de la gouvernance, nous exigeons la reconnaissance et le respect des obligations de l'agence sous l'article 41. Autrement dit, nous transférons ces obligations et responsabilités à nos partenaires, avec de bons résultats et une grande efficacité.

J'aurais plusieurs autres exemples à vous donner, mais je sais que vous avez d'autres questions et je vais m'arrêter ici.

Le sénateur Fortin-Duplessis : Vous vous êtes tellement bien exprimé que vous avez répondu à ma deuxième question en même temps.

Pour terminer, pourriez-vous nous en dire un peu plus sur la mise en œuvre de la Feuille de route au sein de votre institution? Pouvez-vous être encore un petit peu plus précis, s'il vous plaît?

M. Leblanc : En ce qui concerne la Feuille de route pour les cinq prochaines années, il est important de mentionner la collaboration de Patrimoine canadien dans la planification préliminaire de ce programme. Nous avons énormément apprécié les différentes consultations et leur aide dans la préparation des documents finalement acheminés au cabinet afin de voir ces fonds alloués à cette initiative. Je pense qu'il vaut la peine de mentionner cette collaboration efficace dès les débuts. Grâce à ce travail de collaboration, nous avons finalement reçu une allocation de 6,4 millions de dollars pour cette période de cinq ans. Nous avons pu consulter exhaustivement et assez facilement les communautés de notre région grâce à ce réseau d'agents perspicaces qui ont su développer depuis longtemps des partenariats et des relations permettant de consulter efficacement.

Nous avons reçu un grand nombre de propositions. Nous en sommes présentement à l'étape de l'analyse et, sous peu, nous commencerons à approuver et à annoncer des investissements dans ce prochain chapitre d'investissement sur le programme.

C'est très positif. J'oserais dire que ces fonds, provenant de Patrimoine canadien ne représentent — c'est très important — qu'une fraction de l'investissement total que l'on fera en utilisant les fonds de l'APECA, parce qu'on investit suivant notre mandat fondamental de développement économique, évidemment.

Le sénateur Pépin : Je vous remercie d'être venus. Au cours de la dernière année, la Cour suprême a rendu une décision dans l'affaire Desrochers selon laquelle le gouvernement devait prendre les mesures nécessaires pour que les anglophones et les francophones contribuent de façon égale à la prestation de services. Votre institution a-t-elle pris les mesures nécessaires pour tenir compte de cette décision de la Cour suprême?

[Traduction]

M. Ashfield : L'APECA compte environ 757 employés, dont la grande majorité est sur place dans le Canada atlantique. Selon son profil linguistique, le français est la langue première de 261 employés, et l'anglais de 496 employés. Comme 469 de nos postes sont bilingues, nous possédons les connaissances et l'efficacité voulues pour fonctionner sur place dans les deux langues sur l'ensemble du territoire du Canada atlantique.

Sur la question de la décision de la Cour, je laisse à M. LeBlanc le soin d'y répondre.

[Français]

M. LeBlanc : Comme le précise le ministre, nous sommes sûrement, depuis nos tout débuts, en 1987, très sensibles et très engagés dans la réalité bilingue et biculturelle de notre région, et certainement dans sa réalité acadienne francophone. Du fait même de notre mandat, notre succès existe uniquement dans la mesure où l'on peut permettre des réussites dans chacune de nos communautés; cela fait partie de notre mandat fondamental.

Nous avons donc des politiques de développement en langues officielles, mais ce cas à la Cour suprême a tout de même attiré notre attention et nous nous sommes assuré que nous étions sur la bonne voie; cela nous a poussés à réviser nos politiques. Nous sommes maintenant convaincus que nous sommes en règle avec la jurisprudence.

Cela étant dit, deux domaines retiennent toujours notre attention. Il faut toujours chercher à nous améliorer et progresser. De un, nous sommes en train de réévaluer notre propre politique interne des langues officielles; elle est conforme avec les politiques qui existent depuis quelques années au fédéral, mais face aux priorités de renouvellement de la fonction publique, par exemple, au roulement de personnel, aux nouvelles jurisprudences, il est devenu impératif de faire une révision. Cette démarche est en cours et sera conclue à la fin de cette année ou au début 2010. Il nous fera plaisir de partager ce document avec le comité.

L'autre domaine que je voulais mentionner est la formation de notre personnel : Antérieurement à cette décision de la cour, nous avons offert des sessions de formation à tout notre personnel.

Le sénateur Pépin : Autant aux francophones qu'aux anglophones?

M. LeBlanc : Le personnel de l'Agence au complet. Cette matière fait partie de notre formation, de l'orientation du nouveau personnel; cela fait partie de la formation de nos débutants en gestion. En partie à cause de cette décision, nous avons décidé d'ajouter un volet de formation globale impliquant tous les employés de l'agence qui arriveront d'ici la fin de l'année 2009.

Donc, oui, quelques mesures ont été prises suite à l'affaire Desrochers, cela nous a poussés à jaser un peu plus avec nos avocats, ce que l'on fait tout le temps.

La vice-présidente : Cela fait vivre les avocats.

M. LeBlanc : Exactement. Quand on commence à jaser avec les avocats, ils n'arrêtent pas.

Le sénateur Pépin : Par contre, vous avez mis tout le monde sur un pied d'égalité; vous avez impliqué tout le personnel francophone et anglophone. C'est très bien.

Je me réfère à la présentation de monsieur le ministre. Évidemment, j'ai une version française. À la page 23 de 30, lorsqu'on parle de l'Agence qui participe à la mise sur pied de plusieurs projets communautaires francophones, on dit : plusieurs projets sont rendus à l'étape de l'approbation et l'agence prévoit entreprendre une autre série de consultations avec les communautés linguistiques minoritaires pour susciter plus d'intérêt au cours des mois à venir.

Je me suis demandé pourquoi. L'intérêt était-il moins fort lorsque vous avez commencé votre projet? Les gens étaient-ils moins intéressés?

M. LeBlanc : Non. Au contraire, il y a eu beaucoup d'intérêt. Mais c'est un projet qui a une durée de vie de cinq ans, n'est-ce pas, on n'envisagerait pas engager tous les fonds dans une seule étape nécessairement. Il y a eu beaucoup de réponses. J'avoue que parmi tous ceux que l'on a eus, c'est sûr qu'on ne peut pas supporter tous les projets qu'on a reçus. Il y a de très bonnes propositions, de très bons projets. Il y a des communautés qui nous ont approchés et dont on ne pourra pas supporter les projets tels que proposés. Fidèles à nos habitudes, nous ne les refuserons pas, mais nous travaillerons plutôt avec eux afin de trouver des initiatives faisables.

Donc, cette phrase réfère à cela essentiellement.

[Traduction]

M. Ashfield : Je crois que six projets sont en cours d'évaluation, et que ceux-ci sont du nombre. Ils en sont à différents stades d'approbation. Mentionnons par exemple la Commission du tourisme acadien du Canada atlantique (CTACA), qui fait la promotion du tourisme et offre des forfaits touristiques propres à l'Acadie; le projet de leadership en entrepreneuriat pour les jeunes et le développement économique communautaire — essentiellement un projet économique fondé sur les connaissances; le forum des affaires; Rendez-vous Acadie-Québec; et des services de traduction. Tous ces projets subissent une évaluation à l'heure actuelle.

Comme l'a dit M. LeBlanc, le programme a une durée de vie de cinq ans. On ne peut pas le déballer au complet d'un seul coup. Il faut y aller par étapes. Des applications supplémentaires se présenteront au fil du temps.

[Français]

Le sénateur Pépin : Au dernier paragraphe de la page 24 de 30, on dit que l'agence finance des projets d'envergure à l'occasion des Jeux olympiques. Cela mettra en vedette des entreprises de l'Atlantique, à la Place de la francophonie, et à Granville Island à Vancouver. Connaissez-vous le pourcentage de francophones qui participeront à ces projets comparativement aux anglophones?

M. LeBlanc : Je peux vous assurer sans aucun doute que les francophones de l'Atlantique seront représentés dans une proportion supérieure à leur pourcentage de la population. Il s'agit d'une initiative entre nous et les quatre provinces dans le but de présenter le Canada-Atlantique au monde grâce à cette fenêtre que constituent les Jeux olympiques. Le tout a lieu à la Place de la francophonie.

La représentation francophone et l'aspect bilingue de la région furent la priorité depuis le début. Cette priorité fut présente dans les négociations entre le ministre et chacune des provinces. Nous insistons sur ce point à chaque occasion et sommes tout à fait convaincus que les francophones seront très bien représentés. Il nous fera plaisir de vous fournir les données et les chiffres à l'appui dans les mois qui suivront.

Le sénateur Losier-Cool : J'aimerais tout d'abord souhaiter la bienvenue à nos compatriotes du Nouveau- Brunswick.

Je vous félicite de votre présentation. En tant que sénateur du Nouveau-Brunswick, j'ai trouvé votre présentation intéressante et bien développée. Je sais que l'APECA a toujours été engagée dans le respect des deux langues officielles. Vos pratiques à ce niveau sont exemplaires. Avez-vous partagé le fruit de ces pratiques avec d'autres organismes?

[Traduction]

M. Ashfield : Nous sommes engagés dans la création du nouvel organisme de développement régional dans le Sud de l'Ontario. Je crois que neuf de nos gens aident à guider cet organisme à travers les premiers stades de développement; nous sommes donc bel et bien engagés. Les organismes de développement régionaux communiquent entre eux. De même, je communique régulièrement avec les autres ministres d'État des organismes de développement régional, mes homologues, et nous échangeons certaines de nos pratiques exemplaires.

M. LeBlanc vous expliquera peut-être mieux où nous en sommes avec notre nouvel organisme dans le sud de l'Ontario. Sa création est un grand pas en avant. Nous avons commencé en 1987 : nous comptons donc près de 23 années d'expérience dans ce domaine, et nous avons de nombreux employés de longue date — vingt ans ou plus — qui sont avec nous depuis le début. Nous possédons une vaste et précieuse expertise que nous pouvons communiquer à d'autres organismes.

Le sénateur Losier-Cool : Je suis très contente d'entendre tout ce que vous faites. C'est une vraie réussite.

Je voudrais maintenant passer à un autre sujet. J'attire votre attention sur un article paru ce matin dans le Telegraph Journal de Saint John, au Nouveau-Brunswick, intitulé « ACOA sees a significant drop in revenue last year » (L'APECA constate une forte baisse des recettes l'année dernière).

Que doit-on conclure de cet article, ou pouvez-vous le commenter?

[Français]

Monsieur LeBlanc, vous avez indiqué qu'en avril dernier, lorsque le PICLO a été aboli, on a mis sur pied un autre programme de collaboration avec Patrimoine canadien qui semblait être plus favorable. La baisse du revenu est-elle reliée au PICLO?

M. LeBlanc : La réponse toute simple est la suivante. Non, ce n'est pas relié au PICLO. Un grand nombre d'investissements et de fonds administrés par l'APECA ne sont pas remboursables. Ces fonds sont plutôt communautaires ou de nature socioéconomique. Il ne s'agit pas de contributions financières versées à une entreprise, mais à des associations ou groupes culturels pour promouvoir l'économie et la société en général. Nous avons toutefois un volet commercial, ce sont nos prêts aux entreprises. L'article dont vous parlez se réfère au fait qu'on a remarqué une baisse des revenus remboursés par les requérants.

Le sénateur Losier-Cool : Pour quelle raison?

M. LeBlanc : Ce fait s'explique par deux raisons. Tout d'abord, depuis quelques années, on a emprunté moins du côté commercial, ce qui a favorisé le côté non commercial. Cet élément, qui représente la grande partie de ce chiffre, n'est pas du tout inquiétant. En d'autres mots, on parle d'un essor planifié. On a délibérément dirigé des fonds vers le côté non commercial, pour investir un peu plus dans les universités, en sciences et technologies. On a des programmes de développement et d'entreprenariat destinés uniquement aux femmes, aux jeunes entrepreneurs et aux communautés francophones. Plusieurs de ces programmes sont non commerciaux. On retrouve toujours une espèce de va-et-vient entre les deux volets.

En diminuant le nombre de prêts, on diminue le taux de remboursement. C'est ce qui explique en grande partie ce phénomène.

Un autre phénomène mérite d'être expliqué. La conjoncture économique actuelle, qui perdure depuis près de deux ans, pose les défis économiques que nous connaissons. Une des façons d'aider les entrepreneurs de l'Atlantique est de leur accorder plus de temps pour rembourser leurs dettes. Toutefois, ce facteur ne représente que 10 p. 100 du montant.

Le sénateur Losier-Cool : Je comprends donc que ce phénomène ne va pas affecter négativement les projets menés par l'APECA.

Ce point m'amène au sujet des universités dans la région de l'Atlantique. Quelles initiatives l'APECA a-t-elle mises de l'avant pour aider les universités de l'Atlantique, notamment en ce qui a trait aux étudiants en situation minoritaire ou encore aux étudiants internationaux? Atlantic Canada Universities est-elle une agence ou une association en lien avec l'APECA?

M. LeBlanc : Vous parlez de l'organisme Association of Atlantic Universities (AAU)?

Le sénateur Losier-Cool : En effet.

M. LeBlanc : Jusqu'à tout récemment, Yvon, de l'Université de Moncton, présidait le groupe.

Pour remplir son mandat de développement régional, l'APECA se fie à plusieurs partenaires. Les universités sont d'importants partenaires. Hier, en quittant Moncton, j'écoutais un reportage sur le Centre de recherche sur le cancer de l'Université de Moncton. Les investissements de l'APECA ont aidé ce centre à voir le jour. Nous l'avons supporté depuis ses débuts, grâce à notre programme d'investissement en innovation.

Nous avons soutenu le centre depuis ses débuts avec notre programme d'investissement en innovation. Je n'ai pas les chiffres exacts, mais je dirais que nous avons de 3 millions à 5 millions de dollars dans ce programme uniquement. Nous avons de façon proactive, encouragé le développement d'une association de traducteurs professionnels au niveau atlantique avec un bureau général au Nouveau-Brunswick. Nous avons investi plusieurs centaines de milliers de dollars — je dis investi parce que ces contributions rapportent au grand public — pour promouvoir cette industrie de traduction qui est un atout vraiment unique pour le Nouveau-Brunswick, la seule province bilingue au Canada; et ceci implique largement l'Université de Moncton. Ces initiatives ont impliqué l'Université de Moncton, le réseau des collègues communautaires francophones au Nouveau-Brunswick et l'industrie, évidemment; nous avons eu la collaboration de la province dans ces travaux, aussi.

J'offre cela comme quelques exemples précis. L'agence investit, en moyenne, entre 60 et 70 millions de dollars par année dans son programme d'innovation, mieux connu en anglais comme Atlantic Innovation Fund, un programme très important.

Les grands requérants sous ce programme sont nos universités. Nous travaillons de façon proactive pour les avoirs là et certainement de façon proactive avec l'université francophone pour les voir présents dans ces fonds. Ma collègue, la présidente de l'agence, la sous-ministre Monique Colette, est championne pour l'Université de Moncton; je le suis pour l'université Mount Allison, juste à côté. Il y a beaucoup de promotion de fait.

Le sénateur Losier-Cool : Peter Mansbridge va parler de vous!

M. LeBlanc : Je l'espère! Nous parlons de lui.

Le sénateur Losier-Cool : À part l'université de Moncton — si le sénateur Comeau était ici, il parlerait certainement de Sainte-Anne — est-ce que les francophones des autres provinces, et je sais qu'il y a des francophones à Terre-Neuve, ont des projets aussi qui profitent de l'APECA?

M. LeBlanc : Oui, ils profitent de l'APECA, absolument. Le ministre l'a mentionné, la majorité de nos postes sont bilingues. Dans ces postes nous avons des professionnels bilingues et un très grand nombre de ces professionnels bilingues sont des Acadiens et autres francophones de ces communautés, partout. Mon directeur des politiques à Moncton, c'est un chic type de Chéticamp. Les gens viennent de toutes les communautés francophones. Nous avons un projet, dans la dernière Feuille de route, qui porte sur l'éducation électronique avec l'Université de Sainte-Anne, justement.

Donc oui, la plus grande population se trouve à Moncton. Mais le ministre a mentionné que nous avons 30 bureaux de l'APECA au Canada atlantique. Il n'y a pas un coin où une communauté francophone au Canada atlantique n'est pas près d'un bureau de l'APECA en place dans cette région.

Le sénateur Tardif : Monsieur le ministre, je suis heureuse de voir et de constater votre engagement envers les francophones du Canada atlantique, ainsi que votre engagement à mettre en œuvre la partie VII de la Loi sur les langues officielles.

Dans la partie VII de la Loi sur les langues officielles, il y a maintenant une nouvelle obligation, l'obligation de mettre en œuvre des « mesures positives » pour l'épanouissement du développement des communautés de langues officielles en situation minoritaire.

Pouvez-vous nous dire, dans toutes ces questions de « mesures positives », quelle définition vous donnez au concept de « mesures positives »?

[Traduction]

M. Ashfield : J'imagine que nous donnons à « mesure positive » la définition fournie par Patrimoine canadien dans son guide des institutions fédérales : « [...] toute mesure contribuant à l'épanouissement des communautés de langue officielle en situation minoritaire ou à la promotion de la pleine reconnaissance et de l'usage du français et de l'anglais dans la société canadienne. »

Parmi les exemples de mesures utiles prises par l'APECA, mentionnons qu'elle consulte les organisations représentatives des communautés de langue officielle en situation minoritaire à l'échelle nationale et régionale, et qu'elle cultive les relations avec ces organisations. Nous avons mis sur pied des comités spéciaux ayant pour mandat précis de se concentrer à l'échelle régionale sur l'accroissement de la vitalité de ces communautés au Canada atlantique, et de les aider. Les comités veillent aussi à ce que les coordonnateurs régionaux de l'article 41 répondent aux besoins et aux attentes des communautés de langue officielle en situation minoritaire.

Je pourrais donner une longue liste des mesures que nous avons prises et que nous considérons positives.

[Français]

Le sénateur Tardif : Vous avez indiqué que la définition que vous utilisez provient de Patrimoine canadien. Est-ce que vous avez reçu des conseils aussi du ministère de la Justice à cet égard?

[Traduction]

M. Ashfield : Je demanderai peut-être à M. LeBlanc de donner la réponse, avec le concours du ministère de la Justice.

[Français]

M. LeBlanc : Si on écoute la définition que le ministre a lue, c'est une définition qui est très large, très ouverte, et qui permet beaucoup d'initiatives. Il suffit d'avoir des gens de bonne volonté qui veulent apporter ces initiatives et qui sont équipés pour le faire, avec les ressources financières et autres.

Pour notre part, nous trouvons cette définition très utile, car elle ne comporte pas de contrainte, elle nous donne la direction, on comprend le sens et cela nous donne une grande marge de manœuvre.

Nous sommes en dialogue assez souvent avec nos avocats de Justice Canada, car nous avons, à l'APECA, une unité d'avocat de Justice Canada, sur les lieux, à Moncton. Évidemment, nous travaillons avec eux tous les jours. Nous avons des dialogues sur des questions de langues officielles, mais nous n'avons pas eu une opinion formelle de Justice Canada sur cette question. On ne l'a pas demandée donc on ne l'a pas eue. Je pense que c'est parce que nous n'en avons pas ressenti le besoin, pour les raisons que j'ai mentionnées.

Le sénateur Tardif : Vous avez parlé de consultation, mais lorsque vous prenez une décision, tenez-vous compte de leur impact sur la communauté francophone, par exemple, dans la région atlantique?

[Traduction]

M. Ashfield : Absolument, oui, et toujours.

[Français]

Le sénateur Tardif : Est-ce que, dans vos discussions avec les gouvernements provinciaux, les questions de clauses linguistiques ou d'épanouissement des communautés francophones sont soulevées aussi?

M. LeBlanc : Oui, absolument. J'aurais dû le mentionner plus tôt, le ministre et moi parlions de la manière dont nous nous sommes organisés pour assumer ces responsabilités. J'ai parlé de ce comité des agents de l'APECA. Nous avons ce qu'on appelle des comités tripartites avec chacune des provinces. Nous avons un comité avec l'APECA, la province du Nouveau-Brunswick et les communautés minoritaires du Nouveau-Brunswick, pour traiter exactement des aspirations de ces communautés au Nouveau-Brunswick. Nous avons un comité semblable à Terre-Neuve, à l'Île- du-Prince-Édouard et en Nouvelle-Écosse. Nous en avons dans les quatre provinces.

Donc oui, nous avons un engagement continu, systématique, à haut niveau — au niveau du sous-ministre adjoint et souvent avec un sous-ministre adjoint ou un sous-ministre au niveau de la province — précisément sur cette question de la minorité linguistique. C'est une énorme priorité au Nouveau-Brunswick, évidemment, et même avec les plus petits chiffres; on trouve que c'est une grande priorité à l'Île-du-Prince-Édouard et en Nouvelle-Écosse, certainement. Ces provinces sont heureuses d'avoir un partenaire dans l'APECA avec lequel on peut investir ensemble d'une façon harmonisée. À Terre-Neuve, le pourcentage est très petit, mais nous avons des employés parfaitement bilingues à Terre-Neuve. Nous avons un homme à Gander qui parle français et qui pourrait m'en apprendre. Quand je vais à Saint-Pierre et Miquelon pour traiter avec les Français — car nous y avons une commission mixte — j'amène souvent mon collègue de Terre-Neuve, qui ravit les Terre-Neuviens; ils sont ravis de voir une personne qui a une si grande maîtrise du français. D'ailleurs, il a étudié à Saint-Pierre et Miquelon.

Le sénateur Tardif : Vous avez indiqué que la définition de « mesures positives » est très large. S'il y avait une réglementation, cela pourrait-il appuyer davantage la mise en œuvre de l'article 41 portant sur les « mesures positives »? Croyez-vous qu'il serait bénéfique d'avoir une réglementation?

[Traduction]

M. Ashfield : Non, c'est le contraire qui serait vrai. Une réglementation imposerait certainement beaucoup de restrictions et serait douteuse. À l'heure actuelle, nos programmes nous laissent beaucoup de liberté pour agir et pour faire la promotion des droits du français auprès des minorités de langue française. À notre avis, l'adoption de règlements précis — de règles, disons — serait trop restrictif.

Nous disposons aujourd'hui de la flexibilité voulue pour fonctionner dans les limites de notre programme; en ce qui me concerne, c'est mieux ainsi. À mon sens, une règlementation n'offre absolument aucun avantage.

M. LeBlanc aura peut-être son mot à dire sur la question.

M. LeBlanc : Notre cadre actuel est très bon pour les personnes de bonne volonté qui possèdent le nécessaire pour s'acquitter de leur travail, qui le comprennent et qui reçoivent des instructions claires, parce qu'il leur confère un certain pouvoir. Si vous demandez, je dirais oui, mais est-ce suffisant? Si ce n'est pas suffisant, est-ce qu'un règlement serait notre deuxième choix? Je suggère qu'un règlement ne serait pas un bon deuxième choix, et que le genre de travail que fait votre comité est nettement préférable.

Autrement dit, il faut exiger que ceux parmi nous qui sont sur le terrain, qui affirment détenir les bons outils et le cadre nécessaire, rendent vraiment compte de leur travail et prouvent qu'ils obtiennent les résultats recherchés. Il vaudrait mieux améliorer ces cadres de responsabilisation que de fixer des cadres précis et pointilleux pour notre travail. L'esprit de cet élément de la Loi s'appuie en réalité sur l'imagination, l'enthousiasme, la créativité, la bonne volonté, la capacité de réagir, et cetera : plus on resserre le nœud, plus les gens ont de la difficulté à laisser libre cours à toutes ces qualités.

Le sénateur Tardif : Ce que vous dites me plaît énormément. Votre référence au cadre de responsabilisation est intéressante. Ma seule observation est qu'on nous dit parfois qu'il est très difficile, en l'absence d'une définition exacte des mesures positives, de déterminer si on a atteint les résultats rattachés à des mesures positives. Si vous vous ne disposez pas d'une définition précise, comment pouvez-vous déterminer quels sont les résultats attendus du cadre de responsabilisation?

M. LeBlanc : Je dis parfois en plaisantant que j'ai de la difficulté à expliquer à ma mère la nature exacte de mon travail. Ma mère a 85 ans, et si je lui parle de « mesure positive pour la vitalité d'une communauté », je n'ai aucune difficulté à lui expliquer ce que cela veut dire et, pour sa part, elle n'a aucune difficulté à le comprendre.

C'est pourquoi je dis qu'à mon avis, un peu plus d'insistance sur la responsabilisation éliminerait sans doute ce genre de situation. Mieux vaut trop essayer que pas assez. Je ne peux pas imaginer que quelqu'un qui essaie une chose, dans la conviction que c'est une mesure positive, finisse par apprendre que cette chose n'était pas en fait positive.

Le sénateur Tardif : Merci.

Le sénateur Losier-Cool : Les sénateurs ont eux aussi de la difficulté à expliquer aux Canadiens la nature de leur travail.

Le sénateur Seidman : Monsieur le ministre, merci de votre présence parmi nous aujourd'hui. Vous avez souligné que vous faites appel à la sensibilisation et à des partenariats dynamiques pour consulter les communautés minoritaires. Je dirais que cette façon de faire est tout à fait louable, et constitue un exemple à suivre pour les autres organismes.

Je voudrais maintenant apprendre de vous la méthode que vous employez pour tirer le maximum de profit des consultations. Quelles sont les procédures utilisées? Est-ce que vous systématisez les choses? Comment identifiez-vous les groupes communautaires officiels, et ainsi de suite?

M. Ashfield : Nous avons l'avantage très net d'être des organismes de développement économique régionaux. L'avantage véritable est que le travail est effectué par des gens sur place dans la communauté, qui ont des contacts quotidiens avec sa population. Ils ont tous une connaissance directe des choses, comme nous l'avons dit précédemment. Nous avons plus de 30 bureaux, certains disséminés dans toutes les régions du Canada atlantique. Notre administration centrale est à Moncton et chacune des capitales provinciales abrite un bureau régional.

À peu près 720 de nos gens, sur un total de 769, travaillent sur place dans le Canada atlantique et ont des contacts quotidiens avec les gens. Ils comprennent donc bien le Canada atlantique et les problèmes éprouvés par chacune de ses communautés respectives.

Le cas des régions est entièrement différent. Elles sont très différentes d'une province à l'autre. On note aussi de grandes différences parmi les régions à l'intérieur de chaque province. Il est donc primordial d'avoir des gens sur place qui font ce travail de sensibilisation nécessaire à la croissance de notre Agence, et qui font aussi la promotion de la langue, du développement économique ou autre — bref, tout ce qui définit notre mission. C'est là notre avantage principal, et c'est aussi notre mode d'action.

M. LeBlanc pourra peut-être nous faire part de quelques exemples particuliers.

M. LeBlanc : Oui, j'aurais bien deux ou trois précisions à ajouter. Nous avons déjà mentionné que chacun de nos bureaux régionaux a des gens qui se consacrent à cet aspect, qui détiennent des responsabilités particulières pour la sensibilisation en fonction de l'article 41 de la Loi. Ils doivent se rendre dans les communautés, ils doivent consulter, et ils doivent faire acte de présence.

L'un des messieurs costauds et au visage taillé à la hache, derrière moi, appelle régulièrement ces gens, qui doivent lui rendre compte. M. Inder est le directeur de notre secrétariat. Il exige des rapports trimestriels, dans lesquels ils doivent donner le nom de ceux qu'ils ont rencontrés, ce qu'ils ont fait et comment la stratégie fonctionne.

[Français]

Ce n'est pas du laisser-aller. Ce ne sont pas que de beaux mots et des idées. C'est structuré, systématique. Cela fait partie des plans annuels et quinquennaux et ces résultats sont rapportés dans le rapport annuel que nous envoyons à Patrimoine canadien.

Les communautés francophones, en Nouvelle-Écosse par exemple, sont parmi celles pour lesquelles notre sous- ministre adjoint pour la Nouvelle-Écosse doit atteindre ses buts parce que dans le cas contraire, il ne réussit pas son objectif de développement économique. Il ne peut réussir une économie si le tiers de la population traîne de l'arrière. C'est fondamental. C'est tellement central au mandat que c'est presque une seconde nature.

Le sénateur Mockler : Je m'en voudrais de ne pas joindre mes commentaires à ceux du sénateur Losier-Cool concernant le leadership déployé par l'APECA à travers l'Atlantique.

Je serai un peu subjectif. Étant donné que je connais très bien le ministre, je suis certain qu'il ne perd pas une heure de la journée à ajouter davantage au leadership de l'APECA.

Il existe une étroite collaboration avec des partenaires, qu'il s'agisse de l'Association francophone des municipalités du Nouveau-Brunswick, de Saint-Thomas-d'Aquin, de la SANB, du Développement culturel acadien francophone à travers l'Atlantique ou encore Santé en français avec l'Université de Moncton ainsi que l'Université de Sainte-Anne.

Monsieur LeBlanc vous avez dit que la Feuille de route était une très belle collaboration avec Patrimoine canadien, qu'il s'agissait d'un point très positif. C'est consigné dans le hansard et je vous en félicite.

[Traduction]

Pouvez-vous entrer dans le détail de ces fonds, des augmentations que vous avez reçues et des conséquences futures pour les minorités au Canada?

M. LeBlanc : Pour nous préparer à cette comparution, et aussi pour gérer nos affaires, nous avons examiné nos dossiers des cinq dernières années. Nous tenions surtout à être à jour. À l'issue de l'examen dont le ministre a fait mention dans sa déclaration, nous avons pu établir un chiffre — un investissement de 60 millions de dollars dans les communautés francophones au cours des cinq dernières années.

Ces 60 millions de dollars concernent uniquement ce que nous désignons des « investissements dans le développement communautaire », à l'exclusion des investissements dans le développement commercial. Ils n'englobent pas la totalité de nos investissements commerciaux, qui s'élèvent probablement à deux fois ce montant. Les particularités de notre système automatisé nous empêchaient d'obtenir facilement le chiffre voulu, mais nous investissons dans des entreprises dans toutes ces communautés. Nous nous occupons de projets de 100 000 $ ou même, récemment, d'une exploitation forestière de quelque deux millions de dollars, si je ne m'abuse. Le ministre a fait l'annonce de 14 millions de dollars pour l'expansion de la sylviculture en Nouvelle-Écosse et au Nouveau-Brunswick, dans le cadre du fonds d'adaptation communautaire, qui s'inscrit dans le programme de stimulation du gouvernement.

On passe ainsi des programmes de stimulation à l'investissement forestier au Nouveau-Brunswick. L'exploitation forestière, indispensable à cette province, fait appel en large proportion à la communauté francophone.

[Français]

Les gens de la francophonie au Canada atlantique sont très impliqués et engagés dans l'industrie de la forêt.

[Traduction]

L'exemple le plus frappant concerne les 60 millions de dollars que nous avons examinés. Nous avons probablement 100 millions de dollars de plus du côté commercial, peut-être même davantage. Nous pourrions invoquer une série infinie d'exemples de projets.

[Français]

Le sénateur Mockler : Pouvez-vous élaborer sur le réseau de développement économique de l'employabilité?

[Traduction]

Quelle est la place de ce réseau dans le plan d'action de l'APECA relatif à la mise en œuvre de la partie VII? Je sais que votre équipe mérite des applaudissements pour les chiffres qu'elle a obtenus. Pouvez-vous toutefois expliquer le plan d'action pour le réseau de développement économique?

[Français]

M. LeBlanc : Les RDEE forment un réseau national qui se trouve dans chacune des quatre provinces de l'Atlantique, tout comme dans les autres provinces et les territoires et relève du ministère des Ressources humaines, et non de notre ministère ou de celui de l'Industrie. Les RDEE existent depuis assez longtemps et il s'agit d'un petit rassemblement de gens dont le mandat est de contribuer à la planification stratégique pour le développement économique de nos communautés francophones, ceci avec une perspective prioritaire concernant l'employabilité; donc création d'emplois et préparation des gens pour le monde de l'emploi. Pour nous, c'est encore un autre réseau de partenaires très important.

J'ai mentionné plus tôt notre comité interne responsable du paragraphe 41. Nous avons un comité où nous rassemblons nos joueurs à l'intérieur de l'APECA avec les quatre RDEE du Canada atlantique. Nous sommes engagés avec eux systématiquement dans la planification et l'identification d'investissements. Nous les aidons pour leur mandat de planification et eux nous aident en retour en nous donnant des conseils par rapport aux meilleurs investissements. C'est une autre source d'information et de coordination; puis cela fonctionne bien au Canada atlantique.

Le sénateur Mockler : Cela touche directement les communautés.

M. LeBlanc : Absolument. C'est leur mandat et c'est un mandat provincial. J'ai déjà mentionné comment nous nous concentrons sur des régions particulières de la province avec nos groupes locaux de développement, ainsi que nos bureaux locaux.

La vice-présidente : Merci beaucoup.

[Traduction]

Monsieur le ministre, je vous remercie d'avoir accepté notre invitation. Comme l'a dit M. LeBlanc il y a une minute, l'invitation vous a poussé à regarder autour de vous pour examiner un peu ce que vous avez fait. D'après tout ce que nous avons entendu ce soir, il est heureux pour les provinces atlantiques que vous vous occupiez d'elles.

[Français]

Merci beaucoup, monsieur LeBlanc. Honorables sénateurs, la séance est levée.

(La séance est levée.)


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