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OLLO - Comité permanent

Langues officielles

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Langues officielles

Fascicule 10 - Témoignages du 4 octobre 2010


OTTAWA, le lundi 4 octobre 2010

Le Comité sénatorial permanent des langues officielles se réunit aujourd'hui à 17 h 8 pour faire une étude sur l'application de la Loi sur les langues officielles ainsi que des règlements et instructions en découlant. (Sujet : Les communautés anglophones du Québec.)

Le sénateur Maria Chaput (présidente) occupe le fauteuil.

[Français]

La présidente : Je vous souhaite la bienvenue au Comité sénatorial permanent des langues officielles. Je suis Maria Chaput, sénateur du Manitoba et présidente du comité. Pour débuter, j'inviterais les membres du comité à se présenter.

Le sénateur Champagne : Je suis Andrée Champagne, sénateur de la province de Québec. Je souhaite la bienvenue à nos témoins.

Le sénateur Fortin-Duplessis : Je suis Suzanne Fortin-Duplessis, sénateur. Il me fait extrêmement plaisir de vous rencontrer tous les trois.

[Traduction]

Le sénateur Seidman : Je suis Judith Seidman, sénateur de Montréal, Québec.

[Français]

Le sénateur Tardif : Bonjour, je suis Claudette Tardif, sénateur de l'Alberta.

[Traduction]

Le sénateur Fraser : Je suis le sénateur Joan Fraser, de Montréal.

[Français]

La présidente : Nous accueillons aujourd'hui le commissaire aux langues officielles, M. Graham Fraser, qui comparaît dans le cadre de l'étude du comité portant sur les communautés anglophones du Québec. M. Fraser est notre premier témoin suite au déplacement de notre comité à Québec, Sherbrooke et Montréal dans le cadre de cette étude.

J'aimerais rappeler aux sénateurs que le comité se rencontrera à huis clos, suite à la comparution du commissaire, pour discuter des prochaines réunions du comité et des prochaines étapes de l'étude.

Monsieur Fraser, c'est toujours avec un grand plaisir que le comité vous accueille. Vous êtes accompagné de deux hauts fonctionnaires du commissariat, Mme Eva Ludvig, votre représentante dans la région du Québec, et M. Sylvain Giguère, commissaire adjoint à la direction générale des politiques et communications. Monsieur le commissaire, je vous invite à prendre la parole. Par la suite, les sénateurs auront des questions à vous poser.

Graham Fraser, commissaire aux langues officielles, Commissariat aux langues officielles : Bonjour, honorables sénateurs et membres du Comité sénatorial permanent des langues officielles. Je suis heureux de vous rencontrer au moment où vous étudiez la communauté anglophone du Québec. J'apprécie l'occasion de présenter, dans le cadre de ce comité, mes réflexions sur les défis que connaissent les communautés anglophones du Québec et sur les possibilités qui s'offrent à elles.

Je tiens tout d'abord à préciser que je partage votre intérêt à l'égard de ces communautés. Comme j'ai habité au Québec pendant dix ans, j'ai pris connaissance de première main de la situation des communautés anglophones.

[Traduction]

Depuis mon entrée en fonction en tant que commissaire il y a presque exactement 4 ans, j'ai effectué 29 visites au Québec. J'ai rencontré des représentants de divers groupes — le Comité d'action sociale anglophone, à Gaspé; les Coasters, dans la Basse-Côte-Nord; le Voice of English-speaking Québec, à Québec; l'Association des Townshippers, dans les Cantons de l'Est; et la Regional Association of West Quebecers —, ainsi que ceux du Quebec Community Groups Network, le QCGN, qui réunit ces organismes. J'ai aussi eu l'occasion de m'entretenir avec des représentants des trois universités, McGill, Concordia et Bishop.

[Français]

Je félicite le comité d'avoir pris l'initiative de mener une étude qui porte spécifiquement sur les communautés anglophones du Québec. Je salue également le fait que des audiences publiques ont eu lieu à Québec, Sherbrooke et Montréal. Durant sa première tournée au Québec, le comité a pu entendre des témoignages sur les enjeux importants pour la communauté anglophone du Québec.

C'est une chose d'examiner la situation à la lumière de mes propres visites partout dans la province, mais cela en est une toute autre d'entendre les représentants de la communauté parler eux-mêmes de leur réalité comme vous l'avez fait.

[Traduction]

Comme je sais que vous l'avez entendu, certains mythes subsistent à propos des communautés anglophones du Québec. Dans sa déclaration du 13 septembre 2010, Linda Leith vous a parlé des stéréotypes tenaces selon lesquels les anglophones sont riches, blancs, dorlotés et choyés. Pourtant, un récent rapport de Statistique Canada sur la minorité de langue officielle de la province révèle que les choses ont changé.

Un article récent de la Gazette de Montréal, qui s'appuie sur ce rapport, souligne que les anglophones québécois ont un revenu inférieur à celui des francophones de compétences égales, qu'ils ont un taux de pauvreté plus élevé et qu'ils sont beaucoup moins nombreux à occuper un emploi dans la fonction publique. Le rapport de 122 pages brosse un portrait complet des près d'un million de Québécois, soit 13,4 p. 100 de la population, dont l'anglais est la première langue officielle.

Comme vous l'avez appris au cours de vos audiences, la langue anglaise elle-même n'est pas menacée. Le défi consiste plutôt à assurer la pérennité et la vitalité de la communauté anglophone du Québec et de ses institutions. Cette communauté et ses dirigeants ont fait part au comité de leur désir constant de contribuer à la société québécoise, tout en conservant la culture et l'identité qui leur sont propres.

[Français]

Tout comme l'ensemble de la société canadienne, la communauté anglophone du Québec a évolué au fil du temps. Elle s'est adaptée à un contexte politique et linguistique en mutation et à un cadre juridique changeant.

Toujours à l'instar de la société canadienne, elle est devenue très hétérogène et, loin de former un bloc homogène, ses membres et les réalités qui les concernent sont très variés. Il existe, cependant, des différences considérables entre les diverses communautés anglophones du Québec.

[Traduction]

Comme vous le savez, la réalité des communautés anglophones de Montréal est différente de celle des communautés qui vivent à l'extérieur de la région métropolitaine. Nous avons tenu compte de ce facteur lorsque nous avons étudié, en 2008, la vitalité de trois communautés anglophones : celles de Québec, des Cantons de l'Est et de la Basse-Côte- Nord.

Ces études visaient à mieux connaître la vitalité des communautés anglophones à l'extérieur de la région montréalaise, en tenant compte du contexte qui leur est propre. Elles ont révélé ce que le comité a lui-même entendu, c'est-à-dire qu'un sentiment d'isolement est bien présent, surtout dans les communautés éloignées.

Au fil du temps, il y a eu un changement considérable dans les perspectives au sein des communautés anglophones, qui ont mis l'accent sur l'initiative personnelle et la souplesse. Un trait particulier des communautés anglophones est que leurs membres ont tendance à faire appel à leur famille, à des personnes et à des réseaux lorsqu'ils ont besoin de services, même lorsque le gouvernement en assure la prestation.

[Français]

Ces changements au cours des années ont eu une incidence sur l'organisation et la façon dont se perçoivent les communautés. On observe, dans bon nombre d'entre elles, une réticence à avoir recours aux services offerts et à se dire anglophones. Entre autres, les communautés se sentent invisibles et croient que le gouvernement et les décideurs ne comprennent pas bien leurs besoins. Le fait que la communauté anglophone du Québec se sente exclue et qu'elle considère que sa contribution à la société québécoise et canadienne est méconnue alimente ce sentiment d'invisibilité.

La communauté anglophone du Québec a toujours été inclusive et disposée à intégrer les nouveaux arrivants. Sa diversité et son évolution ont aussi été façonnées par l'immigration ainsi que par l'émigration vers d'autres parties du Canada.

Vous avez entendu parler du « milieu manquant », qui fait référence à la génération qui a quitté le Québec au cours des années 1970 et 1980 et aux répercussions de cette immigration sur les communautés anglophones. Vous connaissez aussi les conséquences de l'arrivée de nombreux immigrants. Aujourd'hui, 20 p. 100 des Québécois anglophones font partie de minorités visibles. Cette diversité aide les communautés anglophones à faire connaître leur riche histoire, à préparer l'avenir et à construire des ponts au Québec et partout au Canada. La diversité de la communauté est considérée comme un atout, surtout par les jeunes, mais ses changements démographiques et sociaux ont une grande incidence sur le renouvellement de sa population. Ils ont aussi des répercussions sur le renouvellement des institutions, surtout dans le contexte du vieillissement de la population.

Les études sur la vitalité des communautés montrent que de nombreux facteurs, comme la pénurie d'emplois ou le manque d'occasions de perfectionnement, l'accès limité aux services, aux ressources et aux activités, incitent les jeunes à quitter les régions pour rechercher de meilleurs débouchés. Les jeunes anglophones veulent rester au Québec et contribuer au bien-être de leur communauté. Ils souhaitent oublier les conflits passés et les deux solitudes. Ils sont de plus en plus bilingues et scolarisés. S'il s'agit là d'avantages, c'est aussi ce qui peut inciter les jeunes à quitter Québec en vue d'améliorer leur sort. Ce fait peut sembler contradictoire, mais c'est le paradoxe auquel se confrontent les membres de ces communautés. Nos études précisent toutefois que les communautés se mobilisent pour combattre cette tendance, en encourageant les jeunes à être actifs au sein de la communauté et à demeurer dans la région.

Cela dit, il faut aussi un stimulant économique pour inciter les jeunes et les populations en général à rester au Québec. Les perspectives d'emplois limitées, le sous-emploi et le chômage, qu'il soit lié au niveau de scolarité d'une personne ou à la réalité économique d'une région, sont autant de facteurs qui font en sorte qu'il est difficile de retenir les membres des communautés, peu importe leur âge. Ce n'est là qu'un exemple relatif à la question plus vaste que j'ai soulevée au début de mon allocution, à savoir le défi qui consiste à garantir l'épanouissement et la vitalité des communautés anglophones et de leurs institutions.

Vous avez entendu que les membres de la communauté anglophone du Québec éprouvent de la difficulté à accéder aux services médicaux et sociaux dans leur langue, surtout dans les collectivités éloignées. Certains de ces problèmes ont d'ailleurs été signalés dans nos études sur la vitalité. Le réseau communautaire de santé et de services sociaux, CHSSN, qui reçoit des fonds dans le cadre de la Feuille de route pour la dualité linguistique canadienne, investit beaucoup d'efforts à cette fin, en collaboration avec l'Université McGill. Il reste toutefois des progrès à accomplir pour faire en sorte que les gouvernements comprennent mieux les besoins des communautés. Nos études révèlent que l'accès aux services améliore tant la qualité de vie des membres de la communauté que la vitalité de leur communauté. De plus, il incite les gens à rester dans leur région ou à y retourner.

[Traduction]

Le manque d'institutions et d'activités culturelles constitue un autre facteur clé qui nuit à la vitalité et au renouvellement des communautés. La visibilité et l'accessibilité des institutions et des réseaux culturels contribuent considérablement à la vitalité des communautés. Des organismes culturels nouveaux ou revitalisés, comme le Morrin Centre à Québec, jouent un rôle essentiel, en favorisant chez les anglophones un sentiment d'identité, d'appartenance et d'attachement à leur communauté. De tels organismes ont aussi une importance cruciale pour ce qui est de communiquer avec l'ensemble de la population. Ils peuvent donc constituer un autre facteur qui incitera les membres d'une communauté à rester et à s'investir dans les organisations communautaires. Encore une fois, ce ne sont là que quelques-uns des exemples liés à la question plus vaste du rôle du gouvernement fédéral et de la façon dont celui-ci contribue à l'épanouissement de la communauté anglophone du Québec.

J'espère que les travaux du comité sénatorial aideront le gouvernement fédéral à mieux comprendre les besoins et les priorités des communautés anglophones du Québec. Votre étude est cruciale pour elles. J'espère aussi que le gouvernement fédéral partage cette opinion et qu'il étudiera sérieusement vos constatations.

Bien que les défis que doit relever la communauté anglophone ressemblent parfois à ceux des communautés francophones minoritaires, ils ne devraient pas être abordés de la même façon. En effet, il faut éviter d'adopter une approche unique selon laquelle ce qui convient aux communautés francophones en situation minoritaire convient aussi aux communautés anglophones du Québec. Les politiques et les programmes du gouvernement devraient être suffisamment souples pour répondre aux besoins propres à la communauté anglophone en fonction de ses réalités.

Les principales initiatives du gouvernement fédéral, comme la Feuille de route pour la dualité linguistique canadienne, devraient tenir compte des défis et besoins propres à la communauté anglophone du Québec, qui diffèrent, à bien des égards, de ceux des communautés francophones minoritaires. La communauté anglophone se situe dans un contexte politique, social, économique et culturel particulier. À mon avis, une plus grande collaboration interministérielle est nécessaire pour mieux répondre à ses besoins.

N'oublions pas que la communauté anglophone du Québec forme une communauté de langue officielle en situation minoritaire, laquelle jouit des mêmes droits linguistiques garantis par la Constitution que les communautés francophones en situation minoritaire. En conséquence, le Quebec Community Groups Network représente à l'échelle nationale l'une des communautés de langue officielle en situation minoritaire du Canada. En outre, en vertu de la partie VII de la Loi sur les langues officielles, le gouvernement fédéral et ses institutions doivent appuyer et faciliter le développement des communautés de langue officielle en situation minoritaire afin de favoriser l'épanouissement de ces dernières, lesquelles incluent la communauté anglophone du Québec. À cette fin, il doit bien comprendre la situation concrète des communautés. Or, comme le comité l'a souligné dans son rapport sur la partie VII de la Loi sur les langues officielles, de nombreuses institutions fédérales ont encore de la difficulté à prendre des mesures concrètes qui ont une incidence positive sur les communautés de langue officielle en situation minoritaire.

J'espère que des études comme celle qu'effectue le comité contribueront à une meilleure connaissance des besoins des communautés anglophones du Québec. Votre étude est un premier pas dans ce sens. J'espère que le gouvernement fédéral l'examinera attentivement, et qu'elle aidera ce dernier à repenser son rôle à l'égard de la communauté anglophone du Québec.

Je suis maintenant à votre disposition pour répondre à vos questions.

[Français]

Le sénateur Fortin-Duplessis : Ma question concerne les services. La minorité anglophone du Québec jouit de droits linguistiques en matière de services de santé et de services sociaux. En 1986, des modifications à la Loi sur la santé et les services sociaux, la loi 142, ont élargi les services à la collectivité anglophone. Cette loi québécoise oblige quelque 254 institutions de services sociaux et de santé à offrir des services en anglais. Cependant, la menace pour les communautés anglophones, source d'une certaine crainte révélée lors d'enquêtes, ne semble pas liée aux chiffres ou à l'accès aux services.

J'aimerais entendre votre opinion sur ce point. Pourriez-vous nous faire part de vos commentaires sur le sentiment d'inclusion et d'appartenance des communautés anglophones?

M. Fraser : Laissez-moi tout d'abord répondre à votre question concernant les services. Tout comme vous, j'ai été très heureux de voir l'impact du programme dans la Feuille de route en regard de la formation en anglais des employés du système de santé au Québec, au CHSSN et à l'Université McGill. C'est un total de presque 40 millions de dollars, 19 millions de dollars pour le CHSSN et 19 millions de dollars pour l'Université McGill. Cela a fait en sorte qu'au moins 4 000, maintenant 5 000 ou 6000 employés ont suivi des cours.

Quand j'étais dans l'Estrie, j'ai rencontré une personne qui était active dans le réseau de santé à Granby. Je lui ai demandé si le système de formation avait été utile et elle m'a répondu par l'affirmative, mais surtout en ce qui concerne les services primaires. Si un adolescent se casse un bras en tombant de bicyclette, il peut se faire soigner dans un CLSC en anglais. Par contre, dans le cas d'un fermier de 58 ans qui a des symptômes précoces d'Alzheimer, cela exige un type de formation qui va bien au-delà de la formation de base pour des prestations de services primaires. Donc, le vieillissement de la population fait partie des défis à relever dans les besoins de formation.

Sur la question de l'inclusion, il y a un élément subjectif dans la question à savoir si on se sent inclus ou exclus. Par exemple, pendant dix ans, je ne me suis jamais senti exclu, par contre d'autres l'ont vraiment senti et le sentent toujours. Vous avez entendu des témoignages de gens qui ont comparu devant votre comité à l'effet que le débat autour de la loi 103 en est un qui prend pour acquis que chaque gain pour le système anglophone est une perte pour le système francophone. Donc il y a un sentiment que le système anglophone en soi représente une menace pour la langue française au Québec. Pour ceux qui sont impliqués dans ces institutions, il s'agit d'un discours qui exclut. Il y a souvent cette attitude. J'ai déjà cité Linda Leif qui parle de stéréotype quand celui-ci n'a rien à voir avec la réalité. Quand les gens disent aux groupes qui cherchent du financement, vous n'en avez pas besoin, pourquoi ne pas aller chercher l'argent chez vos amis à Westmount. Cela aussi peut causer un sentiment d'exclusion.

Le sénateur Fortin-Duplessis : Selon vous, quels sont les grands besoins à combler en matière de recherche afin de mieux comprendre les réalités et les défis des communautés anglophones au Québec?

M. Fraser : D'abord, la question de la communauté. Nous en sommes au tout début de la question de recherche de la communauté anglophone. Cela paraît paradoxal, parce que c'est une communauté qui a une riche histoire, mais il y a quelques années, Rodrigue Landry, le chef d'une institution de recherche au Nouveau-Brunswick, cherchait un partenaire au Québec et ne pouvait pas en trouver. Aujourd'hui, il y a un institut attaché à l'Université de Concordia, et on commence maintenant. Je pense qu'il y a de la recherche à faire sur la mobilité, sur les besoins de vitalité des communautés, sur les besoins des jeunes et sur les facteurs qui peuvent retenir les jeunes dans la communauté. Je demanderais maintenant à Eva Ludvig s'il y a d'autres éléments qui devraient être mentionnés.

Eva Ludvig, représentante du commissaire, Région du Québec, Commissariat aux langues officielles : Je crois qu'il est intéressant d'avoir des données pour donner des arguments aux communautés lorsqu'elles iront chercher des appuis de différentes instances gouvernementales. On a parlé des mythes. Il est important d'avoir des données sur le niveau de bilinguisme des jeunes, sur la qualité de cette connaissance linguistique, sur la santé des institutions; il y a toute une gamme de données qui n'existent pas. Comme nous l'avons dit, il y a beaucoup de mythes. D'ailleurs, même lorsque les statistiques sur le revenu sortent par Statistique Canada, un débat persiste. Alors, on a besoin de ces données fiables et cela doit être fait de très bonne façon.

M. Fraser : J'aimerais revenir sur une question soulevée à votre comité et pour laquelle je n'étais pas au courant. La difficulté d'avoir des chiffres précis sur la question de décrochage est évidente. Si un étudiant quitte une école et la province, ce n'est pas vraiment du décrochage. Il est souvent difficile d'avoir des chiffres précis dans ce domaine. La question de décrochage n'est pas juste un problème pour la communauté anglophone du Québec, mais une question cruciale pour le pays dans son entier. Il nous faut mieux comprendre les raisons du décrochage et les chiffres réels qui entourent cette question.

Le sénateur Fortin-Duplessis : Concernant le décrochage, je pense que les écoles secondaires sont en mesure de nous fournir les renseignements. À la lueur des travaux exécutés pendant cette semaine de rencontres, nous avons été sensibilisés par les difficultés rencontrées dans la région gaspésienne; on y constate un taux élevé de décrochage du aux problèmes de consommation de drogues.

Dans cette région, ceux qui décrochent ne s'en vont pas nécessairement. Ils restent sur place, et vivent de l'aide sociale. Tandis que ceux qui réussissent iront travailler ailleurs.

M. Fraser : C'est le grand dilemme de la communauté.

Le sénateur Tardif : Vous avez indiqué l'importance de la recherche et des études. Justement lorsqu'on parle de recherche et d'études, il faut pouvoir compter sur une base de données fiable. Je me demandais jusqu'à quel point la décision récente du gouvernement d'éliminer le caractère obligatoire du formulaire long du recensement, rendrait plus difficile la collecte de données ou l'analyse de ces données pour le groupe des communautés anglophones. Jusqu'à quel point comptez-vous sur l'information donnée par Statistique Canada par rapport aux communautés de minorité linguistique?

M. Fraser : Je vais vous décevoir. Nous avons reçu une vingtaine de plaintes sur cette question. Nous en sommes à l'étape préliminaire d'une enquête. Je ne peux pas commenter et j'évite tout commentaire sur la question du recensement. D'une certaine façon, poser la question, c'est y répondre.

Le sénateur Champagne : Merci, Madame la présidente. Je ne peux que me raccrocher à la question posée par le sénateur Tardif.

Lorsque nous aurons vu quelles sont exactement les questions qui ont été rajoutées au formulaire court qui, lui, demeure obligatoire, on pourra vraiment se faire une idée juste sur les conséquences qu'auront ces changements au formulaire du recensement. On pourra à ce moment-là, prendre une décision, à savoir si on est pour ou contre l'abandon du long formulaire.

Dans votre allocution, vous nous parlez que la communauté anglophone du Québec a toujours été inclusive et disposée à intégrer les nouveaux arrivants. Vous disiez que 20 p. 100 des Québécois anglophones, des nouveaux arrivants, font partie des minorités visibles.

Les anglophones, à Québec, nous confiaient à quel point ils comptaient sur l'immigration pour venir grossir leur communauté. Évidemment, certains problèmes sont causés par cette entente particulière Canada-Québec.

Est-ce qu'on peut, d'après vous, suggérer quoi que ce soit au gouvernement, fédéral ou provincial, afin de séparer les deux problèmes? On se rend compte que le Québec veut s'accaparer la majorité des immigrants qui sont francophones au départ, mais pourrait-il en même temps ne pas fermer la porte aux anglophones qui seraient bienvenus dans les communautés anglophones existantes?

M. Fraser : Un des défis, et c'est effectivement un défi incontournable dans le contexte politique québécois, concerne l'accès aux écoles anglophones. C'est un sujet assez brûlant actuellement. Si on compare cela aux communautés minoritaires francophones à l'extérieur du Québec, un des facteurs clés dans leur processus de francisation est l'inscription dans des écoles francophones. Cette avenue n'est pas ouverte pour la communauté anglophone au Québec.

Il faut trouver d'autres possibilités pour que la communauté anglophone puisse maintenir sa vitalité et inciter les immigrants à en faire partie même si l'école, en général, n'est pas une porte d'entrée à la communauté.

C'est assez difficile, mais, par exemple, la partie VII de la loi oblige chaque institution fédérale à prendre des mesures positives pour promouvoir l'épanouissement des langues officielles en situation minoritaire. Il y a des façons d'aider la communauté dans ses démarches. Vous avez vu des centres de formation dans les communautés qui font un travail exceptionnel pour leurs membres minoritaires. Il y a d'autres façons de faire en sorte que les communautés puissent avoir des ressources communautaires, une vitalité économique et sociale. En partie, c'est un paradoxe pour les immigrants qui sont attirés par des communautés minoritaires, que ce soit au Québec ou dans d'autres provinces, car pour vivre dans une communauté linguistique minoritaire, il faut d'abord apprendre la langue de la majorité. Il faut donc que, dans les petites communautés qui veulent attirer des immigrants, il y ait une formation explicitement ouverte aux gens de la communauté minoritaire.

Il y a une chose que j'ai vue dans d'autres provinces, et cela a été confirmé par les témoignages que vous avez entendus, et c'est aussi un paradoxe, quant à la formation : des formations gratuites sont offertes aux immigrants, mais elles ne le sont pas pour la communauté elle-même. Il faut faire en sorte que l'Entente Canada-Québec puisse inclure un financement pour la formation linguistique non seulement pour des immigrants ou des gens qui viennent d'autres provinces, mais également pour les membres de la communauté.

Le sénateur Champagne : J'entendais le ministre Kenney, lors d'une récente allocution, nous dire à quel point on avait fait des efforts dans son ministère pour que des immigrants francophones aillent ailleurs qu'au Québec. Je sais, par exemple, qu'à Winnipeg, où nous étions réunis avec des parlementaires de la francophonie, il existe un programme extraordinaire pour inciter les gens à venir s'établir dans leur région.

Si on faisait le même genre de publicité, qu'on offrait les mêmes services à des anglophones, au Québec, comment réagirait la population? Traiterait-elle les protagonistes de traîtres si un effort aussi ciblé était fait pour attirer des immigrants anglophones au Québec? Quand on pense à tous les problèmes qu'on a avec les écoles passerelles et la loi 103, même quand on veut aider et faire de bonnes recommandations à notre gouvernement dans ce dossier, et c'est le devoir que vous vous êtes donné aussi, on se retrouve un peu, parfois, dans une situation qui est pour le moins pas facile, en tout cas, un peu gênante.

M. Fraser : Oui, tout à fait. C'est délicat. Je vais faire une observation, mais je ne sais pas si cela va vous aider ou non dans vos réflexions. J'ai constaté que lorsque la majorité francophone au Québec se sent confiante, stable, il y a un sentiment généralisé d'ouverture, de générosité et d'accueil aux autres, aux immigrants, aux anglophones. Par contre, si elle se sent attaquée, minée ou vulnérable, il y a une réaction de défense, et on ferme les portes. Il y a une attitude de repli.

Le résultat est qu'on a souvent une attitude très contradictoire envers une minorité qu'on ne croit pas être minoritaire. Une partie de la tâche est de faire comprendre à la majorité que la minorité anglophone est véritablement une minorité qui fait face aux mêmes problèmes que n'importe quelle communauté minoritaire. Et ce n'est pas une tâche facile.

On voit cela dans la réaction immédiate et viscérale dans le dernier rapport de Statistique Canada sur la situation économique de la communauté anglophone, où, tout d'un coup, il y a eu un débat. Des chiffres démontrent que 98 p. 100 des francophones croient que la communauté anglophone est plus riche que la communauté francophone.

Or, les chiffres démontrent que le revenu moyen des anglophones est inférieur à celui des francophones.

Cette perception existe depuis des siècles et persiste, ce qui n'aide pas la situation.

[Traduction]

Le sénateur Seidman : Monsieur le commissaire, nous vous sommes très reconnaissants de vous joindre à nous une deuxième fois. La première fois, c'était avant que nous entreprenions notre étude, et vous nous avez aidés en nous mettant au courant de la situation. Nous sommes particulièrement ravis de vous compter parmi nous maintenant que nous sommes de retour, pour nous appuyer dans notre tentative de contextualiser le tout.

Dans votre déclaration, vous avez dit que le gouvernement ne devrait pas nécessairement prendre les mêmes mesures avec la communauté anglophone minoritaire qu'avec les communautés francophones minoritaires. En effet, ce sont toutes deux des communautés de langue officielle en situation minoritaire, mais elles n'ont pas les mêmes besoins. Vous avez proposé de renforcer la collaboration interministérielle. Pourriez-vous, s'il vous plaît, nous en dire plus à ce sujet?

M. Fraser : J'ai aussi dit qu'une des difficultés que la communauté anglophone connaît, c'est le fait que la réglementation fédérale ne traite pas les organismes considérés comme nationaux parce qu'ils ont des membres dans plus d'une province de la même façon que les organismes qui sont actifs dans une seule province.

Bien que la population des communautés de langue anglaise du Québec est à peu près équivalente à celle des minorités de langue française hors Québec, la Fédération des communautés francophones et acadienne est traitée à un échelon plus élevé de la bureaucratie que la QCGN parce que la première est un organisme national, tandis que la seconde est un organisme provincial. Sur ce plan — paradoxalement, puisque j'ai dit que les communautés ne devraient pas recevoir le même traitement —, le fait de les traiter de la même façon, c'est-à-dire de leur conférer le statut de minorité nationale, constituerait une nette amélioration. Cette mesure simplifierait énormément la question.

L'autre domaine qui nécessite une plus grande collaboration interministérielle, c'est celui du développement économique. Différents ministères participent aux dossiers et, parfois, les mesures qu'ils prennent à l'égard de la minorité anglophone diffèrent beaucoup de celles qu'ils adoptent par rapport à la minorité de langue française. La décision DesRochers énonce clairement que les ministères fédéraux sont dans l'obligation de concevoir leurs programmes de façon à répondre aux besoins des communautés minoritaires. Or, dans la mesure où les ministères fédéraux sont au courant de l'obligation décrite par la Cour suprême, ils en tiennent davantage compte lorsqu'ils font affaire avec les communautés minoritaires francophones qu'avec les communautés minoritaires anglophones.

Le sénateur Seidman : Votre réponse est particulièrement intéressante et elle aide à comprendre ce que vous vouliez dire.

Au cours de notre voyage, j'ai souvent demandé aux témoins : « Que pouvons-nous faire pour aider? »

M. Fraser : C'est l'une des choses que j'allais dire lorsque je soupçonnais que vous poseriez la question.

Le sénateur Seidman : Beaucoup de réponses ont révélé qu'il est évident qu'à la surface, il semble y avoir beaucoup de confusion, mais il s'agit en fait probablement de frustration, car de nombreux enjeux qui ont été soulevés ne relèvent évidemment pas de la compétence fédérale — par exemple, l'éducation, les soins de santé, la culture, l'immigration, les petites entreprises et le développement économique. Que pouvons-nous faire? On se sent impuissant lorsque les gens nous demandent de les aider à régler des questions à propos desquelles nous avons l'impression de ne rien pouvoir faire.

Nous avons discuté avec certains témoins du manque de transparence dans la façon dont le gouvernement du Québec emploie les fonds transférés par le gouvernement fédéral et destinés à l'éducation dans la langue de la minorité, à l'enseignement de langue seconde et même à d'autres secteurs — je crois que le sénateur Champagne a déjà abordé le sujet —, dans les ententes relatives aux paiements de transfert fédéral-provincial, dans les paiements de péréquation et dans des domaines connexes.

Comment peut-on régler le problème? Y a-t-il quelque chose que nous pouvons faire pour aider à améliorer la transparence ou pour veiller à ce que la communauté de langue officielle en situation minoritaire du Québec reçoive vraiment les fonds qui lui sont destinés? J'ai de la difficulté...

M. Fraser : Permettez-moi de souligner que le problème que vous venez de décrire ne touche vraiment pas uniquement le gouvernement du Québec. Un ancien ministre provincial de l'Éducation m'a déjà avoué qu'une fois que le chèque du gouvernement fédéral arrive, les besoins sont nombreux et il y a beaucoup de pression pour qu'on place simplement les fonds dans l'enveloppe et qu'on les dépense de la façon qu'on juge bonne.

L'un des grands défis, c'est de trouver une façon de faire en sorte que l'argent qu'Ottawa investit dans l'enseignement de langue seconde est véritablement employé à cette fin. Dans nombre d'autres domaines, le Québec surpasse en fait la plupart des autres provinces parce qu'il tente plus activement de faire un suivi, mais la situation est tout de même grave. Je sais que Patrimoine Canada fait tous les efforts possibles pour suivre l'argent, mais des fonctionnaires fédéraux m'ont dit que, dans une certaine mesure, lorsqu'on a adopté une forme de financement sans condition, il est devenu très difficile de s'assurer que les gouvernements provinciaux dépensent les fonds de la manière prévue.

Toutefois, j'ai constaté que lorsque les représentants de la commission scolaire Eastern Townships se sont présentés devant vous et vous ont dit que les fonds fédéraux avaient servi à acheter des ordinateurs portatifs pour les enfants, le gouvernement du Québec était simplement ravi que quelqu'un d'autre paye cette facture. Je pense que ce qu'il faut, c'est trouver les jonctions, les domaines dans lesquels les gouvernements fédéral et provincial n'ont pas l'habitude de se disputer, et dans lesquels l'aide fédérale serait source de reconnaissance plutôt que de ressentiment. Ces domaines sont nombreux; ils comptent, par exemple, le financement du réseau de la santé, qui a produit des résultats concrets et grâce auquel des milliers d'agents de soins de santé primaires ont maintenant les compétences requises pour fournir des soins de ce genre après avoir suivi le programme soigneusement élaboré à l'Université McGill afin que les étudiants apprennent très clairement le vocabulaire nécessaire pour donner des soins de santé primaires.

Je m'inquiète parfois du fait que les provinces commencent à oublier que l'enseignement de langue seconde relève de leur compétence parce qu'elles présument dans une certaine mesure que les fonds fédéraux sont versés à cette fin. Il s'agit parfois d'une arme à double tranchant. Toutefois, c'est beaucoup moins le cas au Québec qu'ailleurs. Les provinces présument que le gouvernement fédéral s'occupe de l'apprentissage de la langue seconde et elles n'y portent donc pas beaucoup attention, mais il en est autrement au Québec.

[Français]

Le sénateur Tardif : Merci, madame la présidente. J'allais justement poser les mêmes questions que le sénateur Seidman. Ce sont d'excellentes questions, d'ailleurs. Je vais donc passer à autre chose.

Dans une de vos études sur les anglophones du Québec, vous avez indiqué que du point de vue institutionnel, les écoles et les établissements de santé et de services sociaux qui offrent des services à la communauté anglophone doivent composer avec des clientèles pluralistes qui reflètent la dichotomie entre Montréal et le reste du Québec. Est-ce toujours le cas? Et sous quel angle pourrions-nous examiner cette question?

M. Fraser : Je pense que les défis restent. Vous avez constaté les difficultés de ces institutions lorsque vous avez entendu les témoignages des gens de la Gaspésie et de la Basse-Côte-Nord. Ce sont de réels problèmes de prestation de services de la part d'institutions d'éducation et de santé. J'ai remarqué l'insistance avec laquelle le sénateur De Bané est revenu lorsqu'il a été question du nombre d'employés au sein du ministère de l'Éducation qui se consacraient à la communauté anglophone, en comparaison avec ceux qui se consacraient à la communauté francophone. Oui, il y a toujours des problèmes de prestation de services. Cependant, j'ai toujours été frappé par le dévouement des gens qui travaillent au sein du ministère.

[Traduction]

Mme Ludvig : L'une des choses qui différencie les services offerts à Montréal de ceux des régions — surtout dans les secteurs de la santé et de l'éducation —, ce sont les établissements historiques de Montréal, auxquels la communauté anglophone a accès. La situation n'est pas la même à l'extérieur de la métropole. De toutes les histoires que le comité a entendues, celle qui a particulièrement touché tout le monde est la suivante : dans la région de la Basse-Côte-Nord, des couples ont été placés dans des établissements de soins prolongés différents, et ils ne se sont jamais revus. Voilà le genre de réalité avec laquelle un nombre considérable d'anglophones du Québec doivent composer.

[Français]

Le sénateur Tardif : La différence entre les milieux ruraux et les milieux urbains fait-elle partie de l'équation?

M. Fraser : Tout à fait. Quand on a effectué notre étude sur la vitalité, on a examiné une communauté qui est vraiment à l'extrême, dans tous les sens du problème, c'est-à-dire la Basse-Côte-Nord. On y compte 5 000 anglophones, dont 80 p. 100 sont des anglophones unilingues qui, pendant des siècles, dépendaient de la pêche; une pêche qui ne leur rapporte plus de la même façon. Ils vivent entourés d'une population et d'institutions qui sont plus ou moins unilingues francophones.

Un citoyen m'a dit qu'il avait abandonné son commerce parce qu'il ne pouvait pas comprendre les règlements du gouvernement du Québec pour régler la question des ventes dans son commerce. Les relations entre les gens de cette région et le gouvernement du Québec sont difficiles sur les questions linguistiques, même avec le député fédéral. Ils sont à la merci d'une compagnie aérienne qui a le monopole dans cette région. J'ai également parlé à une femme dont les deux fils faisaient leurs études postsecondaires dans la région de Sherbrooke. Tous les deux passaient l'été en Alberta pour payer leurs études parce que s'ils revenaient à Blanc-Sablon pour travailler par l'entremise d'un programme d'été de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, tout l'argent qu'ils gagneraient à Blanc-Sablon servirait à payer les billets d'avion. Ils pouvaient aller travailler en Alberta et gagner assez d'argent pour payer les billets d'avion, leurs études et tout ce dont ils avaient besoin pour l'année scolaire. C'est une communauté qui fait face à des problèmes d'isolement géographique énormes — de transport et de services — et à des problèmes d'isolement linguistique.

Le sénateur De Bané : Monsieur le commissaire, je voudrais vous dire tout d'abord que j'ai connu tous les commissaires depuis 1969. Il y en a eu beaucoup de très grande qualité. Cependant, permettez-moi de vous dire, sans porter atteinte à votre modestie, que vous êtes, pour moi, au sommet de tous ceux que j'ai vus depuis 40 ans. C'est rare quelqu'un qui a une connaissance aussi approfondie des deux communautés.

Cela étant dit, il y a quelques points pour lesquels j'aimerais avoir vos commentaires. Comme vous l'avez dit, j'ai été très frappé qu'à Québec, sur presque 1 400 fonctionnaires, à peine 30 sont sous l'autorité de M. La France, sous-ministre adjoint aux affaires anglophones. Évidemment, 30 sur 1 400, c'est environ 2,2 p. 100. Seulement avec les chiffres, on voit qu'ils sont plutôt une courroie de transmission pour le reste du ministère. Ils ne sont que 2,2 p. 100 alors qu'ils sont beaucoup plus nombreux dans la population québécoise.

J'aimerais vous demander si vous pouvez nous fournir une comparaison de l'organigramme du ministère de l'Éducation du Québec, Secteur des services à la population anglophone, avec celui du Manitoba, de l'Ontario et du Nouveau-Brunswick. Dans chacune des trois provinces, il y a un groupe au sein du ministère de l'Éducation qui s'occupe de la communauté francophone en situation minoritaire ou acadienne.

Je saisirais davantage la situation comparative si votre bureau pouvait m'aider à obtenir cela. Ensuite, je sais que vous avez une connaissance approfondie de la communauté anglophone du Québec et je voudrais vous dire combien j'ai été impressionné par la qualité des gens que nous avons rencontrés à Québec, Lennoxville et Montréal.

On nous a dit à Montréal deux choses auxquelles je n'avais jamais pensé, à savoir que la langue anglaise n'est pas en danger au Québec, mais que la communauté anglaise, elle, l'est. Je n'avais jamais remarqué qu'il y avait eu une chute aussi considérable au cours des cinq ou six dernières années. Il ne s'agit pas là de la langue, mais bien de la communauté.

D'autre part, concernant un domaine que Mme Champagne connaît infiniment plus que nous tous, un représentant de la communauté artistique nous a dit à Montréal que les artistes anglophones sont environ au nombre de 7000, et nous a parlé du problème suivant. Du côté anglophone, ils sont en concurrence avec Hollywood et les médias ne s'intéressent pas à eux. Il nous a dit qu'ils étaient considérés du menu fretin par rapport à Hollywood et qu'ils étaient également ignorés du côté francophone, donc des deux côtés. Ils nous ont dit ne pas pouvoir vivre en tant qu'artistes si personne ne parle d'eux. C'est quelque chose qui m'avait échappé et cela m'a ouvert les yeux.

Finalement, je vais vous dire la chose qui m'a le plus choqué et j'espère que vous pourrez faire quelque chose à ce sujet. Vous savez qu'en 1991, à la suite de travaux d'un groupe d'étude qui portait le nom des deux coprésidents, la Loi de la radiodiffusion a été modernisée, ainsi que la mission de Radio-Canada. On a biffé les mots « unité nationale » et on a dit que le radiodiffuseur public devait refléter la globalité du Canada, ainsi que les différents groupes de langue officielle en situation minoritaire, et cetera. La loi a été très bien refaite en 1991.

Notre comité a passé une semaine au Québec à mener des audiences et je n'ai pas souvenance que le service français SRC de la Société Radio-Canada ait eu une seule nouvelle sur toutes ces audiences. Je ne les ai vus nulle part.

Du côté anglophone, il y a eu quelque chose de fugace, particulièrement à Sherbrooke. Mais ce n'était presque rien du tout. Voilà un sujet fondamental qui tombe en plein dans la mission de Radio-Canada et de CBC, sous l'égide de la loi de 1991, et c'est complètement ignoré. Cela me dépasse que les deux réseaux anglais et français du radiodiffuseur public, sur un sujet aussi important, aient à toutes fins utiles complètement ignoré cela.

Par contre, la commission Bastarache était couverte pendant au moins une heure le soir, et cinq à six heures durant la journée. Comment alors établir des ponts entre les deux communautés?

Des voix : Il n'y a pas de scandale...

Le sénateur De Bané : C'est cela. Et comme on n'en parle pas, nous avons ce que vous avez décrit tantôt; tant que perdure un sentiment d'insécurité, des mécanismes d'autodéfense hypertrophiés et des situations qui remontent à plusieurs lunes sont toujours vivaces; parce que chacun des réseaux est un mur étanche et, au Québec, la communauté anglophone, il faut oublier cela.

J'ai trouvé cela réellement inacceptable et je comprends pourquoi nous avons tant de problèmes. Il semble que le radiodiffuseur public ne veut pas nous en parler et préfère tous les jours nous faire des couvertures à partir de ce qui se passe à Paris ou ailleurs.

Regardez seulement les médias écrits francophones au Québec tels Le Soleil, La Presse, Le Devoir, Le Journal de Montréal; — Le Droit étant un cas à part — de tous ces journaux, aucun d'entre eux, si on fait exception de la colline parlementaire à Ottawa, n'a de correspondant dans les autres provinces canadiennes. Aucun. Le journal Le Droit, heureusement, en a à Toronto, et cetera.

Si maintenant le radiodiffuseur public qui lui a des journalistes à travers le Canada et qui en a partout au Québec ne veut pas couvrir une semaine entière d'un comité spécial du Sénat sur un sujet fondamental, je comprends comme vous dites qu'il y ait une telle méfiance et des mécanismes de défense tellement hypertrophiés.

Voilà les choses que je voulais dire et les plus tristes que j'ai vues durant cette semaine-là, au mépris de la Loi de la radiodiffusion de 1991. Voilà.

M. Fraser : J'aimerais vous répondre brièvement. Nous allons d'abord nous efforcer de trouver les données dont vous avez besoin. Concernant la question de la langue anglaise qui, comme vous dites, n'est pas menacée, mais que c'est plutôt la communauté qui l'est, je ferai le commentaire suivant. La première fois que j'ai entendu cette distinction faite entre la langue anglaise et la communauté anglophone, à savoir ce que cela représentait, c'était présenté sous un tout autre angle par feu Gérald Godin. C'était avant qu'il soit ministre à Québec. Il présidait un comité qui faisait des recommandations sur des amendements à apporter à la loi 101. C'était en 1983, je pense.

Dans son rapport, il a souligné que la communauté anglophone ne représentait pas une menace pour le français au Québec. Il a souligné qu'il y avait une menace pour le français au Québec, mais qu'il s'agissait de l'anglais en tant que langue internationale, comme les médias internationaux et l'omniprésence de l'anglais.

On ne parlait pas encore de mondialisation, mais il faisait une distinction nette pour expliquer à l'Assemblée nationale que la communauté anglophone, elle, ne représentait pas une menace au français ou pour la majorité. C'est la première fois que j'entendais cette distinction.

On peut débattre sur d'autres conclusions faites à ce comité, mais à ce moment-là c'était une distinction importante à faire. Quant à la question des artistes au Québec, j'ajouterais un autre point. Montréal est la ville la plus cosmopolite au Canada. Elle attire des artistes de partout au Canada et de partout dans le monde. Depuis plusieurs années à Montréal, on assiste à un épanouissement de la musique indépendante.

Ces artistes viennent à Montréal plutôt qu'à Berlin et ne s'identifient pas nécessairement à la communauté anglophone. Ils ne s'identifient pas non plus à la majorité francophone; ils s'identifient à la communauté artistique de Montréal. Un des défis pour la communauté anglophone serait d'établir des liens avec ces jeunes qui viennent d'un peu partout et qui sont attirés par l'énergie artistique que dégage Montréal et qui ne créent pas nécessairement des liens avec les communautés anglophones ou francophones.

Il y a une exception à cela. C'est que l'Office national du Film a reconnu Pop Montreal comme étant un événement culturel de la minorité anglophone. Il y a une composante de cinéma dans ce festival qui reconnaît la vitalité artistique, mais qui n'a pas de lien traditionnel avec ce qu'on pense être la communauté anglophone traditionnelle de Montréal ou du Québec.

En ce qui concerne l'étude Sauvageau de 1991, j'ai une autre histoire à raconter et qui est peut-être plus positive. Une des choses que j'ai observées dans les médias francophones au Québec, c'est que de plus en plus on couvre sans sarcasme et sans ironie certains évènements culturels ou touristiques qui ont lieu au Canada anglais. On en traite comme étant quelque chose de valable.

Par exemple, des articles ont paru à propos du Festival international du film de Toronto et il y a eu des textes dans la section Voyage du quotidien Le Devoir traitant d'excursions de kayak dans la baie géorgienne ou dans le comté Prince- Édouard en Ontario. En fait, on ne traite pas ces régions avec mépris, mais comme étant des régions tout à fait valables à visiter pour quiconque veut visiter un coin intéressant.

Il y a 30 ans lorsque j'étais au Québec, on n'aurait pas pensé rédiger un article sur une visite touristique en Ontario sans tenir des commentaires un peu sarcastiques sur le manque de services. Aussi, il y a 15 ans il se produisait un incident meurtrier lorsqu'un certain professeur de génie, Valery Fabrikant, a été l'auteur d'un massacre à l'Université Concordia. Lorsqu'on traitait du sujet dans les journaux, on se sentait obligé d'expliquer ce qu'était l'Université Concordia, comme si elle était située dans une autre province ou dans un autre État ou comme s'il s'agissait d'un corps étranger au Québec. Cela se faisait sans mépris, mais on présumait que personne ne saurait, en lisant le journal, qu'il y avait une Université Concordia à Montréal.

Il y a quatre ans presque exactement, lors de la tuerie à Dawson, Montréal a réagi avec unanimité à l'effet que c'était la perte d'une jeune Montréalaise dans une institution montréalaise. La ville entière s'est arrêtée pour les funérailles et personne n'a parlé de Dawson comme étant une université anglophone.

Et moi, dans ces deux tragédies, j'ai perçu du progrès. J'y ai vu un réflexe d'inclusion tout à fait louable. Alors oui, ce que vous avez dit est tout à fait vrai et je pense qu'on voit des signes de progrès.

La présidente : Je vois que le temps file. Monsieur le commissaire, pouvez-vous demeurer avec le comité jusqu'à 18 h 30?

M. Fraser : Oui, bien sûr.

La présidente : Merci. J'accepte une brève question supplémentaire du sénateur Fortin-Duplessis et du sénateur Fraser. Ensuite nous passerons à la deuxième ronde de questions.

Le sénateur Fortin-Duplesis : Ma question supplémentaire fait suite à ce le sénateur De Bané a dit. J'ai beaucoup aimé participer aux audiences et aux travaux de notre comité. Mais ce qui m'a énormément touchée moi aussi, c'est que les communautés ne semblent pas avoir facilement accès à des services de radiodiffusion, à des médias imprimés, à des médias communautaires dans leur langue et cela n'aide en rien ces communautés en région.

À votre avis, que peuvent faire des radiodiffuseurs publics tels que CBC? Pour vous donner un exemple, les communautés voulaient faire des annonces d'une pièce de théâtre que les gens avaient préparée, mais cela ne passait ni à la télévision, ni ailleurs. Cela les touchait. Moi aussi j'ai été touchée de voir que toute une communauté ne soit pas capable de faire connaître ses activités au reste du monde.

M. Fraser : Il est très difficile d'identifier des pistes d'appui efficaces de la part des médias qui, en général, oeuvrent dans le secteur privé. Il y a certains programmes d'appui qui existent à Patrimoine canadien pour des publications, pour des hebdomadaires pour des radios communautaires. Je n'ai pas des chiffres à portée de main pour vous énumérer des programmes, mais je sais que ces programmes existent.

Le Commissariat aux langues officielles a décidé de poursuivre Radio-Canada pour la fermeture de CBEF Windsor, lors de laquelle 878 plaintes ont été reçues. Il faut d'abord déterminer si le commissariat a juridiction dans ce dossier. Radio-Canada prétend que ce n'est pas le cas, mais si tel est le cas, il faut définir les obligations de CBC et Radio- Canada envers les communautés vis-à-vis la partie VII de la Loi sur les langues officielles.

Il y a un rôle que le gouvernement pourrait peut-être jouer un rôle, et qui n'entre pas dans les domaines de la programmation ou du journalisme. C'est l'appui pour l'accès à Internet haute vitesse. Comme tous le savent, certaines communautés n'ont pas encore accès à l'Internet à haute vitesse.

C'est de plus en plus par l'utilisation d'Internet qu'on sera en mesure de voir l'avenir des communications pour les petites communautés.

Le sénateur Fraser : Merci, madame la présidente.

[Traduction]

J'ai deux précisions à apporter pour le compte rendu. Premièrement, M. Fraser et moi sommes parents, mais nous ne sommes pas de connivence sur le dossier. En fait, c'est probablement l'un des sujets dont nous avons le moins parlé pendant les 40 dernières années.

Deuxièmement, je devrais mentionner, pour le compte rendu, qu'en réalité, la radio de la CBC a parlé de nous à Québec et elle m'a interviewée. J'ignore si elle a interviewé quelqu'un d'autre. Peut-être que oui, mais je lui dois bien cela. Elle a déployé cet effort-là, qui surpasse ce qu'elle fait pour nombre d'autres comités qui se déplacent. Nous sommes rarement reconnus pour notre travail, et je ne parle pas seulement de notre comité.

J'ai une demande à vous faire, monsieur le commissaire. Pouvez-vous, s'il vous plaît, ajouter une question à la liste des chiffres que vous allez chercher pour le sénateur De Bané? Je ne vous demande pas l'impossible. Savons-nous comment les organismes qui subventionnent les arts et la culture divisent leurs fonds selon le critère linguistique? Bien sûr, une troupe de danse est une troupe de danse, mais les auteurs écrivent en anglais ou en français, et il y a des théâtres et des cinéastes. Avons-nous une idée de la façon dont les divers organismes subventionnaires ou de financement traitent les artistes anglophones basés au Québec et les artistes francophones de partout ailleurs?

Vous avez affirmé que les Québécois de langue anglaise croient que les gouvernements et les décideurs ne comprennent pas bien leurs besoins. Vous avez donné cette partie de votre déclaration en français et vous avez dit « le gouvernement ». Ce n'est un secret pour personne que de nombreux Québécois anglophones pensent que le gouvernement provincial ne saisit pas bien leurs besoins ou ne s'y intéresse pas. À votre avis, est-ce également ou partiellement vrai en ce qui concerne le gouvernement fédéral?

M. Fraser : Oui. Permettez-moi de vous donner quelques exemples. D'abord, la communauté anglophone est considérablement sous-représentée au sein des ministères fédéraux établis au Québec. Cette sous-représentation n'est pas aussi prononcée que dans le cas du gouvernement provincial, mais elle est tout de même importante.

Dans certains bureaux régionaux du Québec, on ne comprend pas mieux la minorité de langue anglaise dans un ministère fédéral que dans un ministère provincial.

Aussi, par le passé, des représentants d'organismes de langue minoritaire m'ont dit que, dans certains domaines, ils trouvaient plus facile de faire affaire avec le gouvernement provincial que fédéral parce que le modèle provincial de la table de concertation n'a pas d'équivalent au fédéral.

En gros, le défi, c'était de faire en sorte qu'ils soient convoqués à la table de concertation ou que le dossier qui les intéressait y soit soulevé au palier provincial. La table de concertation est une forme de consultation publique bien connue. C'est un des outils employés par nombre des ministères provinciaux du Québec, et il est utilisé différemment.

Je pense que les mécanismes de consultation des ministères fédéraux ne sont pas aussi perfectionnés que ceux que certains ministères provinciaux ont mis en place.

Le troisième point est celui que j'ai mentionné dans ma déclaration. Le Quebec Community Groups Network est considéré comme un organisme régional plutôt que national et, pour cette raison, il a parfois beaucoup de peine à joindre les échelons supérieurs des ministères.

Le sénateur Fraser : Vous avez parlé du milieu manquant. Au Québec anglais, il s'agit de la génération intermédiaire manquante, chez laquelle on trouverait normalement les leaders communautaires essentiels au maintien de la santé et de la vitalité de la communauté. Or, aujourd'hui, de nombreuses personnes qui occuperaient ces postes sont parties, pour une raison ou pour une autre, et mènent leur vie ailleurs. Les personnes qui font encore le travail doivent donc porter un fardeau considérable et elles ont maintenant un certain âge. Une partie d'entre elles étaient déjà des leaders en 1970, et si elles le sont toujours à l'heure actuelle, soit 40 ans plus tard, c'est parce que la communauté n'a trouvé personne pour prendre la relève.

Connaissez-vous des programmes, ou pensez-vous qu'il vaudrait la peine de se pencher sur des programmes de leadership pour les jeunes anglophones du Québec, ou même, en fait, pour les communautés francophones d'ailleurs?

M. Fraser : La question a été soulevée pendant notre étude sur la vitalité, en particulier dans les Cantons de l'Est. Je crois comprendre que, là-bas, dans le cadre de la stratégie pour retenir les jeunes, on a commencé à travailler précisément à des programmes de leadership et de formation à l'emploi. En fait, il n'était pas seulement question de formation à l'emploi, mais aussi en recherche d'emploi, pour ainsi dire — c'est-à-dire de doter les jeunes des compétences dont ils ont besoin pour décrocher les emplois pour lesquels ils sont qualifiés, alors qu'ils pensent souvent à tort qu'ils n'ont pas les capacités langagières requises. C'est le seul programme que je connais et il faisait partie de cette stratégie.

L'un des paradoxes liés à la question de retenir les jeunes au Québec, c'est que, d'un côté, tout le monde reconnaît que, aujourd'hui, il faut être bilingue pour travailler au Québec. Or, de nombreux jeunes diplômés de l'université qui entrent sur un marché du travail concurrentiel croient que leurs capacités en français ne sont pas aussi bonnes que celles des diplômés francophones avec lesquels ils se mesureront dans le but d'obtenir un emploi; toutefois, ces capacités sont amplement suffisantes pour être considérées comme un atout majeur à Ottawa ou à Toronto ou dans d'autres régions du pays.

Ainsi, leur propre perception de leurs capacités langagières est telle que le niveau de bilinguisme qu'ils atteignent les pousse davantage à partir qu'à rester. C'est là une des armes à double tranchant de la communauté, de voir ses meilleurs membres s'en aller.

Mme Ludvig : Ce que je vais dire pourrait vous servir dans votre réflexion. Vous parlez de programmes de leadership et de jeunes, et il se passe parfois de bonnes choses ailleurs qu'on peut imiter. Par exemple, les communautés francophones ont des réseaux jeunesse qui n'existent pas au Québec, et le gouvernement fédéral pourrait aider à cet égard. Non seulement ces réseaux s'appuient mutuellement pour trouver des débouchés qui permettent de rester, mais ils travaillent aussi à la formation du leadership. Le gouvernement fédéral peut certainement prêter main-forte sur ce plan.

Le sénateur Fraser : Je sais que j'excède mon temps de parole, mais vous voudrez peut-être réfléchir à ce que je vais dire et nous écrire si vous avez des idées à ce sujet.

Dans le sens général de ce que le gouvernement fédéral peut faire, pouvez-vous nous donner des conseils par rapport aux améliorations qu'on pourrait apporter au système actuel d'ententes bilatérales, à ce qu'on pourrait faire pour rendre ces ententes plus souples ou plus précises ou quoi que ce soit lorsque vient le temps de les renégocier? De même, en ce qui a trait au Québec anglais, la Feuille de route est-elle la solution que nous voulons adopter? Suffit-elle? Y sommes-nous assez bien représentés?

M. Fraser : Vous gardez les questions faciles pour la fin.

Le sénateur Fraser : J'ai dit que vous voudrez peut-être y réfléchir et nous écrire.

[Français]

La présidente : Vous préféreriez répondre à cette question par écrit, monsieur le commissaire?

M. Fraser : Avec plaisir.

[Traduction]

Un élément que j'ajouterais et que vous voudriez peut-être prendre en considération — j'ignore si la question a été soulevée au cours de vos audiences, mais à ma connaissance, elle n'a pas été mentionnée à celle de Québec —, c'est que je sais qu'à Valcartier, le centre de ressources familiales aide beaucoup les conjoints anglophones à décrocher des emplois. Je pense qu'Emploi-Québec, qui n'avait pas les mêmes ressources ou capacités de trouver des emplois pour les anglophones de Québec, s'est adressé au centre.

Vous pourriez recommander des mesures que les bases militaires du Québec pourraient prendre pour nouer des relations avec les communautés, ainsi que pour se servir de leurs réseaux de centres de ressources familiales et de les élargir afin que ces centres, en collaboration avec Emploi-Québec, puissent établir des programmes de placement et de formation à l'emploi.

Le sénateur Fraser : Ce serait intéressant. Merci.

[Français]

La présidente : Le temps file. Trois autres sénateurs désireraient poser une question pour un deuxième tour de table. Les sénateurs consentiraient-ils à poser leur question afin que le commissaire puisse répondre par écrit?

Le sénateur Champagne : Le commissaire appréciera sûrement ma question, car elle n'est pas facile.

Tout d'abord, j'étais ravie de voir, cette fin de semaine, que le Théâtre Centaure de Montréal s'est finalement offert cette année des publicités télévisées. Je trouve cela extraordinaire.

J'aimerais revenir au rôle de nos immigrants et émigrants de même que celui de tous les nouveaux arrivants qui viennent augmenter le nombre de nos différentes communautés linguistiques particulièrement en situations minoritaires. On parle beaucoup de l'importance et du côté merveilleux de leur intégration dans le milieu. Et en tournant la page, on fait des prières pour éviter l'assimilation. Où tracez-vous la ligne entre leur intégration et leur assimilation?

[Traduction]

Le sénateur Seidman : Le sénateur Fraser est revenue en quelque sorte sur la question. Je voudrais citer la dernière phrase de l'avant-dernier paragraphe de votre déclaration : « J'espère que le gouvernement fédéral l'examinera attentivement » — en parlant de notre étude — « et qu'elle aidera ce dernier à repenser son rôle à l'égard de la communauté anglophone du Québec. »

J'aimerais vous demander, puisque vous connaissez si bien le domaine et vous avez évidemment aussi porté attention pendant que nous faisions notre travail, si vous pouvez réfléchir un peu et nous faire part de toutes vos idées, vous qui êtes si sage, sur ce que nous pouvons faire pour repenser notre rôle à l'égard de la communauté anglophone du Québec. Nous vous en serions grandement reconnaissants.

[Français]

La présidente : Monsieur le commissaire, au nom des membres du comité, je tiens à vous remercier très sincèrement, vous et votre équipe, d'être venus répondre à nos questions.

Vous êtes pour nous non seulement une source d'information, mais aussi d'inspiration. Alors merci beaucoup et au plaisir de vous revoir.

M. Fraser : Merci beaucoup. C'est toujours un plaisir d'être ici.

La présidente : Nous suspendons la séance et reprenons à huis clos.

(Le comité poursuit ses travaux à huis clos.)


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