Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Finances nationales
Fascicule 7 - Témoignages du 1er novembre 2011
OTTAWA, le mardi 1er novembre 2011
Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui à 9 h 30 pour faire une étude sur les raisons pouvant expliquer les inégalités entre les prix de certains articles vendus au Canada et aux États-Unis, étant donné la valeur du dollar canadien et les répercussions du magasinage transfrontalier sur l'économie canadienne.
Le sénateur Joseph A. Day (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Chers collègues, je déclare ouverte la séance du Comité sénatorial permanent des finances nationales.
[Français]
Ce matin nous poursuivons notre étude spéciale sur les raisons pouvant expliquer les inégalités entre les prix de certains articles vendus au Canada et aux États-Unis.
[Traduction]
Dans la première partie de notre réunion de ce matin, nous sommes très heureux d'accueillir M. John Baldwin, qui a déjà comparu devant des comités sénatoriaux. Nous sommes ravis de le retrouver parmi nous. Il est directeur de la Division de l'analyse économique à Statistique Canada. Avant de travailler au sein du gouvernement fédéral, il était enseignant, plus particulièrement à l'Université Queen's, pour ceux que cela intéresse.
Monsieur Baldwin, vous avez la parole. Nous allons entendre votre déclaration préliminaire, puis nous passerons à la période des questions et réponses.
John Baldwin, directeur, Division de l'analyse économique, Statistique Canada : Bonjour. Je vous ai distribué une présentation, accompagnée des notes d'allocution que je vous lirai.
Je suis directeur de la Division de l'analyse économique de Statistique Canada et je suis parmi vous aujourd'hui pour rendre compte de la mise à jour d'une étude que nous avons réalisée auparavant sur les différences historiques en matière de prix entre le Canada et les États-Unis. L'étude emploie les données du Programme de parité du pouvoir d'achat des comptes nationaux.
Pour ce qui est des comparaisons entre le Canada et les États-Unis, il faut d'abord un peu de contexte. Statistique Canada recueille des données sur les prix des biens et services que les Canadiens se procurent afin de suivre les variations de l'inflation. Les données sur les prix à la consommation, que vous avez probablement tous vues à maintes reprises dans la presse, sont résumées dans l'indice des prix à la consommation, qui est publié régulièrement par le bureau. Statistique Canada collige également des données sur les prix exigés pour acquérir les biens et services produits et élabore un indice des prix à la production afin de permettre aux analystes de surveiller les tendances en matière de prix au niveau de l'industrie. Les prix à la production sont également utilisés pour convertir les estimations de revenu au niveau de l'industrie en mesures de production basées sur le volume ou en mesures de production réelle, comme certaines personnes les appellent.
Les deux programmes, c'est-à-dire les indices des prix à la consommation et à la production, permettent de recueillir des données sur un grand nombre de produits et de services afin d'offrir un échantillon représentatif des prix dans l'économie. Les pondérations des dépenses employées pour créer des moyennes sont déterminées par des enquêtes spéciales portant sur les tendances de dépenses des consommateurs pour les enquêtes sur la consommation et à partir de tableaux intrants-extrants qui suivent la production dans l'économie au niveau de l'industrie pour les indices des prix à la production. Ils constituent la pierre angulaire des programmes en matière de prix.
Statistique Canada administre également un programme qui fournit les données que j'ai utilisées dans une diapositive ultérieure pour comparer les prix au Canada et aux États-Unis. Cette série de données permet de comparer les prix des produits et services qui sont achetés par les Canadiens et les Américains. Toutefois, elles ne sont pas recueillies de la même manière que les autres séries. Elles sont recueillies conjointement avec les autorités statistiques américaines à la demande initiale de l'organisation internationale appelée l'Organisation de coopération et de développement économiques, ou l'OCDE.
Les données sur les prix des produits de consommation et d'investissement sont tirées des programmes sur les indices des prix à la consommation et à la production, dont je viens de parler, et elles sont comparées aux données américaines afin de créer un indice de prix global, appelé l'indice de parité du pouvoir d'achat. Cet indice est conçu pour faciliter les comparaisons des dépenses relatives entre les pays. Par exemple, ces données nous permettent d'évaluer d'abord la valeur de vente relative des automobiles vendues au Canada par rapport à celles vendues aux États-Unis pour ensuite calculer le nombre relatif d'automobiles vendues.
Le Programme de parité du pouvoir d'achat sert principalement à comparer les niveaux de dépenses d'un pays à l'autre en matière de volume. L'indice est utilisé pour créer une mesure de la quantité relative des dépenses au Canada et aux États-Unis. Il permet de répondre à la question de savoir si le montant total acheté, exprimé en matière de consommation, d'investissement ou de production gouvernementale par habitant, est plus élevé ou moins élevé au Canada qu'aux États-Unis. Pour ce faire, l'indice cumule les prix relatifs d'un grand nombre de produits, puis les résume et les regroupe en un seul indice, qui est ensuite utilisé pour diviser les revenus relatifs et les dépenses dans les deux pays, afin d'obtenir des mesures de volume relatives.
Le Programme de parité du pouvoir d'achat n'est pas un programme statistique d'envergure si on le compare à ceux qui mesurent les prix à la consommation et à la production. Dans ce programme, on ne recueille pas des données sur un ensemble aussi vaste de marchandises. Malheureusement, il n'est pas conçu pour fournir beaucoup de détails sur les produits ni pour produire des données avec des degrés de précision comparables à ceux de l'indice des prix à la consommation et de l'indice des prix à la production dont j'ai parlé tout à l'heure. Il s'agit essentiellement d'un programme qui est conçu en réponse aux demandes internationales de l'OCDE pour permettre une comparaison du volume réel entre les pays afin de déterminer quelle quantité les Canadiens achètent par rapport aux Américains et aux Européens. Ce programme permet donc d'établir une telle mesure avec un degré d'exactitude qui est pertinent à cet objectif, sans toutefois offrir beaucoup de données détaillées.
Par contre, le programme fournit des données détaillées sous-jacentes. Pour les besoins de la réunion d'aujourd'hui, nous avons mis à jour une étude réalisée précédemment et couvrant la période de 1985 à 1999. Je souligne que les estimations que je vais vous présenter sont préliminaires, car nous n'avons reçu la demande qu'il y a 10 jours, mais vous aurez une idée des prix moyens relatifs.
Avant de passer aux données sur la quatrième diapositive, je tiens à présenter quelques mises en garde importantes. Le Programme de parité du pouvoir d'achat est conçu pour nous donner une estimation des prix moyens relatifs dans un ensemble relativement grand de produits. Il n'est pas conçu pour donner énormément de détails. Le programme de l'indice des prix à la consommation, pour sa part, tient compte d'environ 1 000 prix, chacun divisé en plusieurs groupes sous-jacents de produits. L'indice des prix à la production contient 6 000 prix. Par contre, la série de chiffres particulière dont il est question est beaucoup plus petite; on y trouve moins de 900 prix, si je me souviens bien. Ces prix sont ensuite agrégés dans le cadre de notre étude pour obtenir environ 140 groupes. Pour avoir une idée du niveau de détail, ces groupes comprennent des biens comme des pâtes alimentaires, de la volaille, et cetera.
Passons maintenant à la diapositive 4. Pour faire des comparaisons plus détaillées entre les deux pays à partir de cette base de données, nous avons tiré les données sur chaque bien et service de la base de données qui étaient utilisées pour le Programme de parité du pouvoir d'achat. Nous avons calculé les prix moyens dans chacune des 147 catégories générales. Nous avons ensuite établi une médiane pour les 147 catégories générales, la médiane étant une estimation de la valeur centrale du prix relatif des produits au Canada et aux États-Unis.
Les prix que nous utilisons ici sont les prix définitifs exigés. Ils comprennent les taxes et toutes les marges bénéficiaires. Comme les deux pays ont des taxes différentes, même si tous les prix exigés au niveau de la production étaient les mêmes, le consommateur ne paierait pas exactement les mêmes prix, mais nous n'avons pas pu enlever ces taxes pour l'étude en question.
Nous avons également divisé les produits présentés en deux groupes : ce que j'appelle les biens échangeables et les biens non échangeables. Dans les études économiques, cette catégorisation permet de déterminer si les prix sont égaux d'un pays à l'autre, parce qu'on croit qu'il y a plus de chances qu'il y ait des égalités entre les biens échangeables que les biens non échangeables. Les biens échangeables comprennent des choses comme des voitures, alors que les biens non échangeables désignent des choses comme des coupes de cheveux.
À la diapositive 6, je présente les résultats de l'étude préliminaire. Ce graphique compare les niveaux de prix au Canada à ceux aux États-Unis, tout en tenant compte du taux de change. Autrement dit, nous prenons le prix canadien et le divisons par le prix américain en dollars canadiens pour trouver le ratio entre les deux valeurs. Une valeur de un sur ce graphique indique que les biens canadiens ont la même valeur que les biens américains lorsque les différences dans les taux de change sont prises en compte. Ce calcul donne ce qu'on appelle le « niveau de prix comparés » corrigés selon le taux de change. Dans cette mesure, une valeur supérieure à un indique un prix plus élevé au Canada qu'aux États-Unis, alors qu'une valeur inférieure à un désigne que le prix est moins élevé de ce côté-ci de la frontière. Par exemple, un niveau de prix comparés de 1,2 signifie que le prix canadien est de 20 p. 100 supérieur au prix américain. Un niveau de prix comparés de moins de 0,8 signifie que le prix canadien est de 20 p. 100 inférieur au prix américain.
Les données que j'ai pu recueillir à la hâte pour la réunion d'aujourd'hui couvrent la période de 1985 à 2008, soit la dernière année pour laquelle nous avons reçu des données de nos partenaires américains pour permettre une comparaison. En fait, les données vont jusqu'à 2002, et nous avons extrapolé les résultats en utilisant d'autres séries de données de Statistique Canada.
Les prix sous-jacents des produits ont été divisés en deux groupes. Les biens échangeables sont désignés par la ligne rouge et les biens non échangeables, par la ligne bleue; nous avons aussi ajouté le taux de change en mauve parce que le prix canadien relatif, corrigé selon le taux de change au fil du temps, a tendance à suivre le taux de change.
Maintenant, quelles observations pouvons-nous faire à partir de ce graphique précis? Permettez-moi de signaler deux ou trois points. En 1985, lorsque nous avions un taux de change de 73 cents entre le Canada et les États-Unis, le prix canadien moyen des biens échangeables était évalué à 98 p. 100 du prix américain. Le prix des biens échangeables est passé à 114 p. 100 du prix américain en 1990, après que le dollar s'est apprécié à 86 cents. On voit ici que le prix monte lorsque l'appréciation survient dans les années 1990. Il a ensuite chuté à 95 p. 100 en 2002, lorsque le dollar s'est déprécié à 64 cents. Le prix relatif des biens échangeables au Canada a augmenté ces dernières années. Il s'est établi à 118 p. 100 du prix américain en 2005, lorsque le dollar s'est apprécié à 83 cents, et a augmenté à 128 p. 100 en 2008, lorsque le dollar s'est apprécié à 94 cents. Il est resté au même niveau depuis.
Ces changements sont survenus parce que les prix canadiens ont tendance à être plus rigides que le taux de change. À la lumière de ces données qui remontent loin dans le temps, on peut faire le constat suivant : lorsque le dollar canadien se déprécie au fil du temps, les prix canadiens n'augmentent pas autant que les prix américains. En effet, dans les années 1990, on pouvait acheter une voiture moins cher au Canada qu'aux États-Unis. Par contre, lorsque le dollar canadien s'apprécie — comme c'est le cas dans la récente période, et ce, à un rythme assez rapide par rapport à la tendance à long terme —, les prix canadiens ne diminuent pas autant que les prix américains, advenant une répercussion des variations du taux de change.
Passons maintenant à la diapositive 7, où l'on présente les conclusions de cette brève étude. D'abord, les prix des biens échangeables canadiens ont tendance à ne pas égaler les prix américains. Ensuite, l'écart de prix entre le Canada et les États-Unis a évolué au fil du temps. Au début des années 1990, les prix médians pour les biens échangeables étaient plus élevés au Canada qu'aux États-Unis; vers la fin des années 1990, les prix médians au Canada pour ces produits étaient légèrement inférieurs aux niveaux américains, sans oublier bien entendu que ces prix comprennent les taxes. Ces dernières années, les prix médians pour les biens échangeables sont devenus plus élevés au nord de la frontière.
Passons à la dernière diapositive. Nous concluons que les mouvements créant les écarts de prix sont liés aux variations du taux de change. Lorsque le dollar canadien s'est déprécié dans le passé, les consommateurs canadiens en ont profité parce que les prix en vigueur au pays n'ont pas augmenté au même rythme que les coûts plus élevés des produits importés. Plus récemment, l'inverse s'est produit. Enfin, l'écart entre les prix des biens échangeables canadiens et américains est devenu plus grand au cours des dernières années.
Par ailleurs, je tiens a ajouter qu'en ce qui concerne les biens non échangeables — l'autre courbe dont je n'ai pas parlé, parce que les gens y accordent moins d'attention —le prix relatif a également augmenté ces dernières années; autrement dit, on a observé une augmentation du niveau de prix général au Canada.
Voilà.
Le président : Merci beaucoup, monsieur Baldwin. Nous avons bien aimé votre présentation. Ce sont des statistiques intéressantes. Si on regarde la diapositive 5, la ligne rouge désigne les biens échangeables, et vous avez parlé tout à l'heure du panier de biens. Vous n'avez pas fait une analyse d'un produit à l'autre; vous avez plutôt fait une moyenne pour le panier de produits, n'est-ce pas?
M. Baldwin : Nous avons pris tous les produits qui entrent dans l'indice de parité du pouvoir d'achat, puis nous les avons divisés arbitrairement en biens échangeables et en bien non échangeables, d'après notre jugement professionnel. Ces distinctions ne sont pas parfaites. Un produit qui, à une époque, était non échangeable est maintenant un peu plus échangé qu'avant, mais cela s'est fait rapidement. Cette distinction vise à indiquer que les niveaux entre les deux sont bel et bien différents.
Le président : Dans votre panier de biens échangeables, comment avez-vous traité les produits qu'on pourrait normalement décrire comme étant « échangeables », mais qui ont une situation spéciale au Canada, par exemple les œufs et la volaille, bref les types de produits dont la production est contrôlée?
M. Baldwin : Ils sont inclus dans la catégorie des biens échangeables. Dans notre étude précédente sur la comparaison des prix jusqu'en 2000, nous avons brièvement examiné si ce groupe de produits échangeables, que vous qualifiés de réglementés ou dont le commerce est plus restreint qu'ailleurs, ne s'est pas comporté exactement de la même manière que les autres produits. D'autres études que nous avons réalisées ont également révélé des différences dans ces marchés. Je me souviens d'une étude que nous avons effectuée sur la question de savoir si les gains de productivité se répercutent sur les gains de prix relatifs. C'est une étude qui remonte à 10 ans. Nous avions observé plusieurs aberrations dans certaines industries qui étaient clairement liées au fait que le commerce dans ces industries se faisait différemment. Si je me souviens, il n'y avait aucune répercussion sur les gains de productivité en ce qui concerne la bière. Nous n'avons pas encore examiné cette série de données de manière détaillée. Nous pourrions le faire, mais comme je l'ai dit, je ne suis pas sûr du degré de précision des séries sous-jacentes à ces niveaux. Il n'y avait pas beaucoup de ressources consacrées au regroupement de ces séries. Je le répète : les séries répondaient à une demande de l'OCDE parce que cette organisation fait beaucoup de comparaisons entre les pays.
Le président : Vous avez dit que la mesure de la parité du pouvoir d'achat pourrait ne pas présenter le même niveau de crédibilité que certains des autres outils à cause des chiffres sur la parité du pouvoir d'achat. S'agit-il d'un programme qui, d'après vous, pourrait et devrait croître dans l'avenir pour que vous ayez des données plus précises et plus fiables?
M. Baldwin : On peut certainement y consacrer plus de ressources, mais cela va dépendre des priorités fixées par le bureau.
Le président : Y a-t-il des discussions à ce sujet dont nous devrions être au courant?
M. Baldwin : Non, pas à ma connaissance.
Le sénateur Finley : J'ai lu les deux documents produits précédemment. La conclusion dans les deux rapports antérieurs ainsi que dans un autre rapport — dont M. Chandra nous parlera peut-être dans la prochaine heure — est que le marché canadien réagit très lentement aux fluctuations du taux de change. Je crois que c'était l'une de vos principales constatations en 2002 et en 2004. C'est quelque chose que je pouvais discerner il y a longtemps, avant l'ère de l'informatisation. Quoi qu'il en soit, nous sommes sûrement rendus à il est possible de modifier relativement rapidement tout un inventaire de produits. La plupart des produits sont assortis d'un code à barres qui est balayé au point de vente au détail.
Pourquoi faut-il tellement de temps pour que les fluctuations du taux de change se manifestent, selon vous? Y a-t-il quelque chose que nous pourrions faire — peut-être adopter une loi ou faire de la promotion — pour accroître la réceptivité du marché?
M. Baldwin : C'est une bonne question. Il faut beaucoup de recherches, chose que nous n'avons malheureusement pas faite. Vous avez raison de dire que dans les études antérieures, nous avons constaté un retard dans le rajustement. Cela s'explique par le fait que les prix ont tendance à être rigides. Il y a certes beaucoup de longues études économiques qui portent sur la rigidité des prix, que ce soit ici ou aux États-Unis, plus précisément sur des questions comme celles de savoir si les prix devraient ou ne devraient pas être rigides et si le système économique devrait réagir instantanément aux changements de prix. Je ne suis pas un spécialiste en la matière, et je n'ai pas tiré de conclusion professionnelle à titre d'économiste sur ce qui, selon moi, devrait avoir lieu sur un marché parfait. Je suis désolé, mais je n'ai pas la compétence pour répondre à cette question.
Le sénateur Finley : Je suppose qu'on devrait poser la question à quelqu'un d'autre.
En passant, vous avez certainement raison au sujet de l'exclusion de la bière, parce que c'est un produit qui réagit à divers stimuli. Hier soir, j'ai appelé un de mes amis qui vit à Chicago pour lui demander combien coûtait une caisse de Labatt Bleue. Il m'a dit que cela coûtait 8,99 $. À Ottawa, une caisse de 12 cannettes de Labatt Bleue coûte 21,95 $. J'ai l'impression que notre symbole national ne devrait pas être l'ours polaire ou le castor, mais une caisse de Labatt Bleue; en tout cas, on semble y accorder plus de valeur.
Je peux comprendre le concept des biens échangeables. En ce qui concerne les biens non échangeables, vous avez mentionné l'exemple des coupes de cheveux. Pourriez-vous donner d'autres exemples? Peut-on dire, de façon générale, que c'est une distinction entre les services et les produits?
M. Baldwin : C'est généralement considéré comme une distinction entre les services et les produits. J'ai tendance à éviter de les décrire en ces termes parce que la classification que nous avons utilisée comprend certains produits qui, à l'époque où nous avons réalisé la toute première étude et examiné la documentation pour nous aider avec le système de classification, n'étaient pas beaucoup échangés, mais qui le sont davantage maintenant. Même les services, dans un sens, font maintenant l'objet d'échanges commerciaux. Par conséquent, il se peut que la terminologie ne convienne plus à cause des changements économiques survenus au fil du temps.
Nous avons inclus les services publics, mais nous savons maintenant que l'électricité est échangée à travers les frontières plus qu'elle ne l'était au début de la période que nous avons examinée. Les projets de construction, par contre, se font à l'intérieur d'un pays et ne sont généralement pas déplacés. Mais ce n'est plus le cas. Nous savons qu'Imperial Oil, dans le cadre de son projet Kearl, déplace son équipement de construction à partir de la Corée. Même dans ces industries, il y a plus d'échanges commerciaux et, par conséquent, on peut s'attendre à ce que ces prix soient plus sensibles qu'avant aux pressions internationales. Bref, même si la distinction est probablement moins utile qu'avant, elle existe quand même sur le plan du niveau de prix.
Quel était mon autre exemple d'un bien échangeable qui répond de plus en plus à la demande internationale? Ah oui, j'ai rencontré une jeune femme qui travaille pour un service de ressources humaines à Toronto. Elle ferait donc partie du secteur des services classifié d'une industrie des services au Canada, probablement sous la catégorie des services professionnels. Elle passe tout son temps à répondre aux besoins en ressources humaines d'entreprises situées en Californie. Elle est dans le secteur des services au Canada, mais son prix est touché par la demande étrangère, et ses services sont échangés, même si cela n'est pas apparent.
Le sénateur Finley : Peut-on inclure les services médicaux?
M. Baldwin : Nous avons en fait exclu les services médicaux de cette étude particulière. Nous avons enlevé les services de santé et les services médicaux à cause des difficultés à déterminer les prix dans ce domaine particulier. Je n'en ai pas fait mention ici, mais c'était indiqué dans le document antérieur; nous avons exclu les secteurs des soins de santé et de l'éducation pour tenter de mettre l'accent sur ce qui est généralement appelé le secteur des affaires.
Le sénateur Finley : Je reviendrai sur ce point au second tour, s'il y a lieu.
Le sénateur Ringuette : Monsieur Baldwin, des 140 groupes de produits que vous avez mentionnés, combien d'entre eux sont échangeables et combien ne le sont pas?
M. Baldwin : C'est une question que j'ai oublié de vérifier avant de comparaître devant le comité. Je dirais que les biens échangeables constituent environ le tiers ou la moitié des 140, mais je peux vous donner une réponse plus précise après la réunion.
Le sénateur Ringuette : Oui. Je regarde le graphique que vous nous avez remis, à la page 6. Jusqu'en 2002, selon votre graphique, il y avait des augmentations et des diminutions raisonnables qui semblaient avoir une sorte de relation avec le taux de change et vos deux groupes des biens échangeables et non échangeables.
Toutefois, de 2002 à 2010, on constate que cette relation n'est plus du tout la même comparativement au taux de change. Si je prends la période de 2002 à 2005, les écarts ne sont pas du tout liés aux années précédentes. Puis, il y a un autre écart important en 2008.
Que s'est-il passé en 2008 pour qu'il y ait une si grande différence entre les biens échangeables et les biens non échangeables par rapport au taux de change? Il nous faut cerner la cause. Que s'est-il passé précisément pour qu'il y ait un si grand écart entre le taux de change et les biens échangeables et non échangeables?
M. Baldwin : C'est une question difficile à répondre. À ma connaissance, un événement qui a eu lieu vers la fin de la décennie, c'est évidemment le début du ralentissement. Les biens non échangeables constituent un secteur où les coûts sont beaucoup plus liés à des facteurs économiques internes, comme le taux de salaire relatif. Il se peut fort bien que le secteur des biens non échangeables soit effectivement influé plus radicalement que le secteur des biens échangeables. Je ne sais pas. C'est une question que nous pourrons examiner plus à fond.
Peut-être que, du côté des biens échangeables — et nous devrions vérifier cela —, certains de ces produits mentionnés tout à l'heure qui jouissaient d'une plus grande protection ont réussi à faire évoluer leurs prix de manière différentielle au cours de cette période. Il se peut que les marchés réglementés aient exercé une influence. Ce ne sont pas tous les biens échangeables qui évoluent de la même manière.
Je vous ai préparé ce document rapidement. Il contient des moyennes qui, à mon avis, sont représentatives de ce qui se passe. Il y a des changements sous-jacents qui se produisent, et nous pourrons les examiner de manière plus détaillée.
Le groupe des biens échangeables est composé de produits de consommation et de produits d'investissement. Hier, nous avons examiné rapidement la différence. Les produits d'investissement ont répondu davantage aux prix américains. Ces produits ressemblaient aux produits du secteur des biens non échangeables, puisqu'ils ne bougeaient pas aussi rapidement. C'était clairement du côté des consommateurs. Nous n'avons pas vérifié quels produits de consommation ont vu leur prix augmenter plus radicalement vers la fin de la décennie. Nous pouvons examiner cette question plus à fond et vous en rendre compte.
Le sénateur Ringuette : Je vous en serais reconnaissante.
M. Baldwin : Nous avons été intrigués par les résultats de l'examen rapide d'hier. Nous allons certainement en rendre compte, mais nous n'avons pas encore déterminé si les données seront maintenues ou si elles sont de qualité suffisante pour répondre à ces questions.
Le sénateur Ringuette : Concernant le graphique à la page 6, en 2010, les prix des biens non échangeables ont augmenté considérablement plus que ceux des biens échangeables. Vous avez dit que c'était attribuable à des facteurs internes. Est-ce dû au taux de l'inflation au Canada? Qu'est-ce qui aurait causé une telle situation?
Je suis intriguée. Je peux voir les données.
M. Baldwin : Vous aimeriez que j'en parle plus longuement.
Le sénateur Ringuette : J'aimerais savoir pourquoi c'est différent. Que s'est-il passé? Entre 2002 et 2010, on a assisté à plus de fluctuations, me semble-t-il, qu'il y a 15 ans. Que s'est-il passé et pourquoi?
J'ai déjà parlé devant le comité, à plusieurs reprises, de la différence dans le prix de l'essence et du fait que le Canada s'étend sur un vaste territoire. Je suppose que l'essence se classe dans votre catégorie des biens échangeables.
M. Baldwin : Je crois que oui, mais je n'en suis pas sûr; je vais devoir vérifier ce point. Je n'arrive pas à repérer rapidement cet article dans la liste des 146.
Le sénateur Ringuette : Le facteur coût est très important dans ce cas-ci, tant au Canada qu'aux États-Unis.
M. Baldwin : En effet.
Le sénateur Ringuette : Pourriez-vous également nous fournir l'indice des prix à la consommation pour les années allant de 1985 à 2010, aussi bien pour le Canada que les États-Unis?
M. Baldwin : Oui, nous le pouvons.
Le sénateur Ringuette : Nous pourrons peut-être déceler le développement d'une autre sorte de relation possible.
M. Baldwin : Je pourrais répondre à la dernière question. Une des choses que nous avons faites pour revérifier les chiffres avant de venir ici, c'était de voir si la tendance chronologique dans les chiffres reflète les agrégats auxquels j'ai fait allusion tout à l'heure. Nous osons espérer que les changements de niveaux survenus avec le temps reflètent les mouvements relatifs de l'IPC. Dans notre cas particulier, je préfère en fait les mouvements relatifs du déflateur implicite des prix en provenance des comptes nationaux qui influent sur les dépenses de consommation, et ils ne sont pas les mêmes. Nous avons comparé ce facteur au déflateur implicite des prix qui proviennent de l'extérieur des comptes nationaux. Ces deux éléments se suivent de façon assez rapprochée, du moins sur de courtes périodes. C'est pourquoi nous vous présentons cette période avec une certaine confiance.
Nous vous remettrons plusieurs de ces indices et leurs tendances à long terme en ce qui concerne les mouvements relatifs.
Le président : Avez-vous quelque chose à rajouter?
M. Baldwin : Je vais vous laisser poursuivre, mais je voulais répondre à votre question précédente sur les mouvements pour essayer d'expliquer une aberration ou un résultat inhabituel.
En examinant ces données, on se demande si l'aberration est attribuable à des observations de mauvaise qualité ou au bruit qui existe sur de courtes périodes dans ces séries.
Quand on tient compte de l'indice des prix à la consommation ou de l'indice implicite des prix dont je viens de parler, il y a des milliers de prix qu'on peut utiliser. Ce n'est pas le cas ici. Je reviens à la manière dont ces données ont été rassemblées. Elles ont été recueillies en réponse à l'OCDE. Nous avons besoin de la coopération des Américains. Ils doivent nous donner une liste de produits. Nous devons les examiner, les comparer et nous demander s'ils sont comparables. Ce n'est pas toujours le cas. C'est plus facile lorsqu'on a des données de son propre pays. On peut faire des comparaisons chronologiques et on parle du même produit ou d'un produit semblable. Il est difficile de comparer un Boeing 777 à un Bombardier Dash 8 ou au nouvel avion de série C. Le prix relatif, comme vous pouvez le deviner, n'est pas comparable. Le même problème survient dans d'autres cas. Une brique américaine n'a pas la même taille qu'une brique canadienne. Il devient donc difficile de choisir exactement le même produit. C'est pourquoi nous disons que la qualité des données n'est pas la même que celle d'autres séries. On ne dit pas que les données sont de mauvaise qualité, mais qu'elles ne sont tout simplement pas conçues pour des études détaillées. La qualité de ces données convient aux fins auxquelles elles étaient destinées, à savoir un indice agrégé de prix, mais elle convient probablement moins à l'étude de produits précis. C'est peut-être moins le cas pour les mouvements à court terme.
Nous vous remettrons les réponses aux questions que vous soulevez et nous ferons des mises en garde si nous jugeons qu'elles sont justifiées.
Le président : Merci. Si vous avez des renseignements à nous envoyer, veuillez les faire parvenir à la greffière qui s'occupera de les distribuer à tous les membres du comité.
M. Baldwin : D'accord.
Le président : Je vous remercie.
Le sénateur Ringuette : J'aimerais revenir brièvement à un point; vous avez dit que vos données incluent les taxes.
M. Baldwin : Oui.
Le sénateur Ringuette : Pour quelle raison?
M. Baldwin : Nous essayons d'obtenir le prix définitif d'un produit, que nous utilisons pour exprimer en prix constants les revenus qui sont dépensés pour les produits, les biens, les services et les investissements dans les deux pays afin d'en venir à un indice de volume relatif. Ces revenus comprennent les taxes. Pour les besoins de la cause, c'est pourquoi on a recueilli les prix avec les taxes. Malheureusement, on ne peut pas les enlever. Autrement dit, dans le système initial, on ne pouvait pas dire : « Donnez-nous le prix du produit sans les taxes et avec les taxes. » Si les taxes n'ont pas été exclues, on ne peut pas les enlever.
Le sénateur Finley : Pour établir les prix avec les taxes, de quelle région du Canada tenez-vous compte? L'Alberta n'a pas de taxe de vente, alors que l'Ontario et le Québec en ont. Lequel de ces barèmes de prix utiliseriez-vous pour la taxe, ou s'agit-il d'une moyenne?
M. Baldwin : C'est censé être une moyenne.
Par exemple, toutes les données pour l'indice de parité du pouvoir d'achat proviennent des autres programmes. Comme je l'ai dit, l'indice des prix à la consommation comprend un peu plus d'un mille produits représentatifs. Pour cet indice, on recueille en fait 685 000 prix relevés partout au pays afin de calculer toutes les moyennes requises pour tenir compte de ce genre de complexité. On obtient alors une moyenne qui est représentative.
Le sénateur Marshall : Cette information est intéressante. Je sais que nous l'utiliserons dans le cadre des travaux du comité. Qui utilise ces données habituellement, compte tenu du volume considérable? Vous générez des données et des études. Pourriez-vous nous donner une idée des organismes qui utilisent ces données, mis à part le Comité sénatorial permanent des finances nationales?
M. Baldwin : Il faut remonter à la période après la Seconde Guerre mondiale, avec le plan Marshall et l'organisme prédécesseur de l'OCDE. À cette époque, on devait recueillir des données pour évaluer efficacement les progrès réalisés en Europe de l'Ouest et dans l'ensemble des pays occidentaux. L'OCDE a été créée à partir de l'organisation initiale, dont le nom m'échappe, et elle continue de recueillir ces données afin de permettre des comparaisons entre les pays. C'est l'OCDE qui a amené les divers organismes statistiques au monde à commencer à recueillir ces données et à les lui fournir.
En fait, dans le cadre du programme initial, Statistique Canada n'a pas publié les chiffres; il a produit des chiffres bruts à l'intention de l'OCDE. Au bout du compte, toutefois, on s'est rendu compte qu'il serait avantageux pour les deux parties si Statistique Canada déployait plus d'efforts pour recueillir des données à des fins de comparaison.
Les États-Unis ont fourni des données à l'OCDE, et nous avons emboîté le pas. Or, la comparaison entre le Canada et les États-Unis découlant de ce processus indirect était si mauvaise et si embarrassante que Statistique Canada et les États-Unis ont commencé à assurer une plus grande coordination pour que les comparaisons entre le Canada et les États-Unis soient plus logiques.
La quantité de ressources consacrées à ce programme permet de répondre à la demande, qui est de faire des comparaisons générales du PIB par habitant au Canada par rapport aux États-Unis. Quand on présente les données à l'OCDE pour en discuter, on fait attention de souligner le degré de précision des chiffres, par exemple lorsqu'on dit que le Canada est 85 p. 100 des États-Unis. Le taux de 85 p. 100 est attribuable à l'inexactitude, et l'inexactitude est attribuable au fait qu'il y a un écart de confiance qu'il faut associer à l'estimation du prix relatif. Ainsi, l'estimation réelle — j'utilise le chiffre de 85 p. 100 à titre d'exemple — se trouve quelque part entre 80 et 90 p. 100. Par conséquent, tous les pays occidentaux qui ont un taux entre 80 et 90 p. 100 se trouvent dans la même situation que le Canada. On ne peut pas faire des distinctions. Voilà ce qui fait défaut avec le programme.
Quand je tiens compte des comparaisons, il y a beaucoup d'écarts de prix, du moins des écarts problématiques, comme le prix des avions, comme je l'ai mentionné tout à l'heure.
Le sénateur Marshall : Ce sont des données historiques. Les changements sont-ils habituels? Je pose la question parce que le comité a entendu d'autres témoins qui nous ont recommandé d'apporter des changements aux tarifs, aux droits douaniers et aux exemptions personnelles. Mettez-vous l'accent seulement sur le passé? Que se passe-t-il avec ces données? Apporte-t-on des changements? Pouvez-vous prendre les changements proposés et les transposer sur vos données pour déterminer ce qui va se passer dans l'avenir?
M. Baldwin : Nous ne l'avons pas fait, et je doute que nous puissions le faire.
Le sénateur Marshall : Pour revenir à ma question précédente, en ce qui concerne les données qui sont produites et rendues compte, que se passe-t-il après? Ces données entraînent-elles des changements ou sont-elles valables seulement à des fins historiques?
M. Baldwin : Comme je l'ai dit, les données sont principalement utilisées à des fins de comparaisons entre les pays, par les analystes d'ici et d'ailleurs, pour essayer d'évaluer le rendement économique du Canada. Quant à savoir si ces données exercent une influence sur les politiques en matière d'amélioration du rendement économique, c'est une question d'opinion.
Le sénateur Marshall : Si le comité devait envisager de recommander des changements comme la hausse des exemptions personnelles ou la réduction des tarifs, Statistique Canada ne pourrait pas utiliser ces changements pour en déterminer les répercussions sur le pays, n'est-ce pas?
M. Baldwin : À mon avis, nous n'avons pas de groupe de modélisation apte à répondre à une telle demande dans un court délai, mais il appartient clairement à Statistique Canada, et non pas à moi, de répondre à cette question.
Le sénateur Marshall : Merci.
Le sénateur Wallace : Merci, monsieur Baldwin. Les biens échangeables qui sont achetés et consommés au Canada et aux États-Unis peuvent soit être produits au pays, soit être importés d'autres pays.
Avez-vous des statistiques sur les changements possibles dans le pourcentage des biens échangeables ou la nature des biens échangeables qui seraient importés au Canada? Existe-t-il également des statistiques pour les États-Unis pour comparer les tendances d'importation au Canada et aux États-Unis et pour déterminer si elles ont changé? À mon sens, en cas de changement, c'est-à-dire si un des pays a importé plus de produits en provenance de pays à faible coût de production, cela entraînerait une baisse du prix du produit échangeable dans ce pays. Si nous comparons le Canada et les États-Unis, nous pourrions repérer des différences dans l'établissement des prix attribuables au simple fait qu'un pays importe plus de biens échangeables qu'un autre.
Y a-t-il des statistiques qui pourraient être analysées à cet égard? Le cas échéant, si vous en avez pris connaissance, y a-t-il eu des changements dans la tendance d'importation des biens échangeables entre le Canada et les États-Unis?
M. Baldwin : En réponse à la première partie de votre question, il y a des données qu'on pourrait utiliser pour examiner la mesure dans laquelle on importe des produits particuliers — les biens échangeables, par exemple —, ou déterminer si le taux de pénétration de ces produits par rapport à la demande totale au pays a évolué avec le temps. Je n'ai pas mené une telle étude, mais elle pourrait être réalisée.
Je ne connais aucune étude américaine sur le sujet. Cela ne signifie pas qu'il n'en existe pas. Si on disposait des deux séries de données, on pourrait en effet examiner la mesure dans laquelle les taux de pénétration des produits importés ont évolué avec le temps et, selon moi, il y aurait lieu de se demander comment ces changements influent les prix du produit final. C'est un exercice complexe, mais je pense que c'est faisable.
Le sénateur Wallace : Quand on compare le Canada aux États-Unis, on pense au coût de la production intérieure, aux répercussions sur la production intérieure et à comment le tout se traduit dans les prix de détail. Toutefois, comme on le sait, l'impact des importations dans chacun des deux pays — impact qu'on pourrait contrebalancer par des droits compensatoires à l'importation susceptibles de changer le prix payé par les consommateurs — pourrait être une question importante si un pays décidait de se fier moins à la production intérieure et davantage à la production importée et faisait ainsi baisser la note pour les consommateurs. De toute façon, comme vous l'avez dit, les données seraient là.
M. Baldwin : Une des préoccupations des économistes qui étudient la question, c'est de déterminer la mesure dans laquelle le taux de change a fait baisser le coût des produits importés et la mesure dans laquelle le secteur manufacturier canadien en a profité pour améliorer sa compétitivité en matière de coûts. Jusqu'à maintenant, je n'ai vu aucun résultat de ce genre d'étude.
Le sénateur Wallace : Merci, monsieur Baldwin.
Le président : En guise de question complémentaire, relativement à l'importation de produits, on vient de faire l'hypothèse que l'importation réduirait les coûts pour les consommateurs, mais elle pourrait également servir à accroître la marge de profit de l'importateur ou du détaillant. Dans votre analyse, tenez-vous compte des marges aux États-Unis par rapport à celles au Canada pour un même produit?
M. Baldwin : Non.
Le président : Merci.
Le sénateur Peterson : Merci de vos observations. En ce qui a trait à la loi du prix unique, est-elle valable? Fonctionne-t-elle? Procure-t-elle des avantages?
M. Baldwin : D'après la lecture que je fais de la documentation, un grand nombre d'économistes ayant étudié cette question en sont venus à la conclusion générale que la loi du prix unique n'est pas valable pour tous les produits ou même pour de vastes groupes de produits. En fait, des études très pointues révèlent généralement une déviation sur de courtes périodes dans certains pays.
D'après l'étude que nous avons produite précédemment et que le sénateur Finley a lue hier soir avant de s'en dormir...
Le sénateur Finley : Je suis resté éveillé.
M. Baldwin : ... on indique que durant la courte période visée, les prix au Canada et aux États-Unis étaient en moyenne les mêmes au cours de la période allant de 1985 à 1999, mis à part quelques périodes où ils étaient supérieurs et inférieurs. En moyenne, les prix se rapprochaient, même si, comme on l'a vu, cela ne semble pas être le cas après l'an 2000.
La deuxième partie de la question est de savoir si on en tire un avantage, et c'est une question difficile à répondre. À mon avis, cela revient à la question de savoir si, de façon général, il est avantageux d'avoir des échanges commerciaux qui égalisent les prix d'un pays à l'autre pour que les consommateurs puissent profiter du prix le plus bas mis à leur disposition. C'est davantage une question philosophique.
Le sénateur Peterson : Le sénateur Finley a donné un bon exemple, celui de la bière. Il y a un changement assez radical. Le fait de se demander ce qui s'est passé pourrait nous donner des pistes. Je suis sûr qu'il y a d'autres exemples, mais je serais porté à croire que ce cas pourrait nous donner une direction à suivre, mais peut-être que je me trompe.
Le président : Avez-vous une question complémentaire à poser, sénateur Peterson?
Le sénateur Peterson : Non, merci.
Le président : Il serait intéressant d'étudier plus à fond le prix de la bière à une date ultérieure. Je vais l'ajouter à notre liste.
Le sénateur Finley : Je ne sais pas si je devrais adresser cette question à votre division. Mesurez-vous le marché des biens échangeables usagés, par exemple, les voitures, le matériel agricole, les aéronefs et un certain nombre d'autres articles d'occasion entre le Canada et les États-Unis? Y a-t-il une mesure à cet égard, ou en tenez-vous déjà compte?
M. Baldwin : Je ne peux répondre à votre question quant à savoir si les marchés d'occasion sont compris dans les indices de prix. Je n'ai rien vu dans les comparaisons entre le Canada et les États-Unis; je n'ai pas vu une catégorie d'articles ou de produits d'occasion. Toutefois, il existe une autre catégorie et je vais me renseigner pour savoir s'ils sont compris dans cette dernière. Il serait difficile de prélever un échantillon dans ce marché et de tenir une liste de prix exacts.
Le sénateur Finley : J'ai parlé à un autre ami qui vient de déménager du Canada aux États-Unis. Son épouse et lui, avant de savoir qu'ils déménageraient aux États-Unis, ont décidé d'acheter un véhicule d'occasion. Ils l'ont acheté aux États-Unis. Mon ami estime avoir sauvé au moins 11 000 $ et peut-être même autant que 20 000 $ dans cette transaction. Nos recherches nous ont permis de constater qu'un Ford F-350 2011 usagé, je crois qu'il s'agit là d'une camionnette, se vend 25 000 $ aux États-Unis, et 44 000 $ au Canada. C'est un écart considérable, et il existe de nombreux autres exemples du genre.
Je vous demande si vous pouvez faire ce genre de choses et, si vous ne le pouvez pas, je vais continuer de m'informer auprès des gens tant que je n'aurai pas trouvé quelqu'un qui peut, j'imagine. J'espère que vous vous pencherez là- dessus. D'ailleurs, si vous ne le faites pas actuellement, vous pourriez peut-être inclure cela dans votre panier de produits et il y aurait peut-être moyen de le faire.
M. Baldwin : Merci.
Le sénateur Ringuette : Je suis d'accord avec le sénateur Finley. Le prix des automobiles, et surtout le prix des nord- américaines que nous connaissons depuis toujours, qu'elles soient construites ou non au Canada, varie énormément. Ce ne semble pas être le cas des voitures Honda et Toyota, qui sont construites au Canada.
Je reviens à la question que je voulais poser : combien de firmes de marketing international seraient prêtes à payer pour les données de Statistique Canada?
M. Baldwin : Je devrai vous donner une réponse à ce sujet.
Le sénateur Ringuette : Je reviens à votre tableau à la page 6. La mondialisation nous a donné de nombreuses autres techniques de marketing et d'établissement des prix. Pour revenir à la réponse que vous avez donnée au sénateur Marshall, vous avez dit que vous accumulez des données sur les prix à la consommation au Canada et sur les prix que les Canadiens sont prêts à payer pour certains produits. Cela irait dans le même sens que la tendance que nous avons vue et serait probablement un facteur dans l'accroissement de l'écart entre 1985 et 2002 au sujet duquel je vous ai déjà interrogé. Il existe maintenant beaucoup plus de connaissances spécialisées et d'information.
Si un manufacturier en Allemagne ou en France sait que les Canadiens achèteront un produit même s'il coûte 10 ou 12 p. 100 de plus au Canada qu'aux États-Unis — ils ne représentent que 10 p. 100 du marché nord-américain — cela serait probablement un indicateur en ce qui concerne l'importante différence dans vos donnés en 2008. Je veux parler ici du fait que les spécialistes du marketing international savent très bien qu'ils peuvent vendre leurs produits plus cher au Canada. Les Canadiens ont toujours montré qu'ils paieraient un prix plus élevé.
Je reviens à ma question : combien de firmes de marketing international seraient prêtes à payer pour vos données? Je suppose que vous les vendez.
M. Baldwin : J'avais répondu un peu rapidement à votre question. À ma connaissance, aucune firme de marketing international n'a demandé ces données ou n'a payé pour les avoir. Cela ne signifie pas pour autant que ce ne soit pas arrivé. Nous avons un service de marketing, mais je pense que non, de telles données n'ont pas été fournies. Un des objectifs de la division de l'analyse économique consiste à fournir des renseignements pertinents dans la mesure du possible, à trouver l'information dans les bases de données de Statistique Canada pour alimenter le débat. C'est ce que nous avons fait dans le cas présent, et c'est la raison pour laquelle le premier document a été rédigé. À l'époque, on cherchait à savoir si les prix étaient correspondants.
Comme vous le savez sûrement, aux termes de la Loi sur la statistique, Statistique Canada ne peut produire de données confidentielles. J'ai moi-même reçu une demande pour laquelle il aurait fallu produire, avec une base de données, de l'information détaillée comportant des prix précis dans des marchés donnés. Nous avons établi que nous produirions des données sur des compagnies précises et que cela serait illégal.
Nous avions également besoin du concours de nos homologues américains et nous leur avons demandé s'ils accepteraient que ce que j'appelle leurs données au « niveau d'agrégation 147 — industrie » soient divulguées et ils ont refusé. Nous sommes contraints, quand nous puisons dans cette base de données, de tenir compte d'un ensemble de facteurs et non seulement de la qualité par rapport à ce que nous pouvons faire pour informer le public. Mon rôle consiste à aider ceux qui posent ces questions, mais nous ne pouvons aller au-delà d'un certain point, car nous sommes assujettis à la Loi sur la statistique, et nous devons connaître les préoccupations de ceux qui nous fournissent l'information.
Il s'agit là d'une considération dans nos extractions de données et ce serait très certainement préoccupant si des firmes de marketing international nous demandaient des données très détaillées. Si vous me demandiez si ces firmes veulent les estimations de la parité du pouvoir d'achat, je vous dirais qu'elles peuvent les obtenir au moyen de CANSIM, sans payer plus que les frais demandés par CANSIM. Toutefois, les données qui concernent des marchés très précis peuvent devenir confidentielles dans certains cas et il nous faut alors retourner voir les données initiales pour vérifier si elles viennent d'un petit nombre de compagnies et déterminer si elles peuvent ou non être divulguées aux termes de la Loi sur la statistique.
Le sénateur Ringuette : Feriez-vous cela pour chaque demande?
M. Baldwin : Oui.
Le sénateur Ringuette : J'imagine que vous avez des lignes directrices pour déterminer dans quelle mesure des données précises peuvent être divulguées au demandeur.
M. Baldwin : Oui, nous en avons.
Le président : Monsieur Baldwin représentait Statistique Canada. Nous vous remercions de nous avoir fourni ces renseignements intéressants. Il nous tarde de recevoir le matériel que vous nous enverrez.
[Français]
Honorables sénateurs, nous poursuivons notre étude spéciale sur les raisons pouvant expliquer les inégalités entre les prix de certains articles vendus au Canada et aux Etats-Unis.
[Traduction]
Pour la deuxième partie de la matinée, nous avons le plaisir d'accueillir M. Chandra, qui est professeur adjoint d'économie d'entreprise à l'École de gestion Rotman de l'Université de Toronto. Il a récemment déménagé de la Colombie-Britannique pour occuper ce poste.
Monsieur Chandra, vous avez la parole. Nous sommes très contents de vous recevoir aujourd'hui.
Ambarish Chandra, Université de Toronto, École de gestion Rotman, témoignage à titre personnel : Merci, monsieur le président. Je suis très heureux d'être ici. Mon nom est Ambarish Chandra et je suis professeur adjoint d'économie d'entreprise à l'Université de Toronto. J'ai obtenu mon doctorat en économie à l'Université Northwestern et jusqu'en juin dernier, j'enseignais à l'Université de la Colombie-Britannique à Vancouver.
Dans ma recherche, je me suis penché sur la concurrence entre les entreprises et les habitudes des consommateurs dans des industries comme les médias, l'essence et l'automobile. La recherche que je mène actuellement porte sur le sujet qui nous occupe aujourd'hui, c'est-à-dire les différences de prix entre le Canada et les États-Unis. Je mène en ce moment trois projets qui sont directement liés à la question à l'étude.
Le premier, réalisé en collaboration avec mes anciens collègues de l'Université de la Colombie-Britannique, Keith Head et Mariano Tappata, porte sur le processus décisionnel des résidants du Canada et des États-Unis qui traversent la frontière pour magasiner, plus particulièrement la façon dont le taux de change, le prix de l'essence et la distance par rapport à la frontière influencent leur décision. La deuxième étude porte sur la mesure dans laquelle les Canadiens choisissent de prendre l'avion à des aéroports américains plutôt qu'à des aéroports canadiens pour se rendre ailleurs aux États-Unis ou à l'étranger. Il s'agit d'une question particulièrement pressante à l'heure actuelle. La troisième étude porte sur les raisons pour lesquelles les Canadiens choisissent d'acheter des voitures aux États-Unis plutôt qu'au Canada, et sur la façon dont ils s'y prennent.
Passons maintenant au sujet à l'étude, à savoir les écarts de prix entre le Canada et les États-Unis. Il semble y avoir deux questions. Premièrement, pourquoi ces écarts existent-ils? Deuxièmement, quelles mesures peuvent être prises, le cas échéant, pour les combler?
J'estime qu'il y a trois grandes raisons qui expliquent les écarts de prix entre le Canada et les États-Unis. Premièrement, les entreprises canadiennes doivent habituellement payer des taxes et des tarifs plus élevés que les entreprises américaines, tout particulièrement pour les importations de matières premières et autres. Deuxièmement, les États-Unis représentent un marché plus important, ce qui permet la répartition des coûts sur un plus grand nombre de consommateurs et une plus grande concurrence. Ces deux facteurs entraînent habituellement une réduction des prix finaux. Troisièmement — et c'est le point sur lequel j'aimerais insister —, il y a le taux de change. M. Baldwin a d'ailleurs parlé un peu de ce point ce matin.
Actuellement, selon les normes historiques, le dollar canadien est extrêmement fort, et les biens fabriqués au Canada semblent surévalués essentiellement parce que nous utilisons le taux de change d'aujourd'hui pour comparer les prix entre les deux pays. Le problème est le suivant : lorsque les taux de change augmentent ou diminuent, les entreprises ne changent pas toujours leurs prix en conséquence, ce qui peut donner l'impression que les prix ne sont pas harmonisés entre les deux pays. L'inverse est vrai aussi. Il y a dix ans, les prix fixés au Canada étaient relativement avantageux et les Américains venaient en grand nombre magasiner au Canada. Aujourd'hui, c'est l'inverse.
Une des conséquences inévitables de la taille du marché canadien par rapport à celle du marché américain et du grand rôle joué par les bourses de marchandises dans nos exportations est que la relation entre les monnaies canadienne et américaine est considérablement volatile. Les taux de change ont toujours connu d'importantes fluctuations, mais ces dernières années, le degré de volatilité a augmenté. Le dollar canadien est passé de 62 cents en 2001, ce qui était le plus bas niveau jamais enregistré, à 1,08 $ en 2007, soit le niveau le plus élevé de son histoire. Tout cela s'est passé sur une période de six ans seulement. Dans la période suivant immédiatement la crise financière, soit à l'automne 2008, le dollar canadien a perdu environ 20 p. 100 de sa valeur à l'intérieur de cinq mois, puis a augmenté rapidement par la suite.
La situation économique que nous connaissons actuellement est sans précédent. Des changements de 1 ou 2 p. 100 dans la valeur des monnaies à l'intérieur d'une même journée sont désormais communs, ce qui n'était pas le cas par le passé. Dans ce contexte, les entreprises font face à une grande incertitude, tant en ce qui concerne les taux de change à venir que leurs perspectives économiques générales. Il n'est pas pratique pour elles de réagir aux fluctuations à court terme dans le prix de leurs intrants. Les entreprises sont réticentes à réduire les prix, surtout si elles prévoient devoir les augmenter de nouveau ultérieurement. Ce comportement est compréhensible dans une certaine mesure, mais je ne suis pas ici pour défendre les entreprises.
Demandons-nous maintenant s'il y a quelque chose que le Canada pourrait ou devrait faire pour régler la question des écarts de prix avec les États-Unis. À mon avis, il y a deux possibilités. D'abord, le Canada devrait harmoniser les taxes et les tarifs pour les entreprises qui doivent se procurer du matériel et des ressources à l'étranger avec les tarifs des États-Unis pour des ressources identiques. Selon certains médias, une proposition de la sorte ferait peut-être déjà l'objet d'un examen dans le cadre de l'entente sur le périmètre de sécurité que le Canada et les États-Unis envisagent de conclure.
Deuxièmement, le comité pourrait envisager l'assouplissement des mesures d'exemption personnelles s'appliquant aux Canadiens voyageant à l'étranger. Je dois dire que je me suis longuement penché sur cette proposition. Le dollar canadien est actuellement très fort, comme le sait le comité, et cette force est attribuable à de nombreux facteurs. Comme je le soutiens, conjointement avec Keith Head de l'Université de la Colombie-Britannique, dans un article voisin de la page éditoriale du Globe and Mail paru plus tôt cette année, le moment est venu pour tous les Canadiens de tirer parti de cette situation.
Comme nous l'avions souligné dans cet article, à l'heure actuelle, aucune exemption de taxes et de droits n'est offerte aux Canadiens qui se rendent à l'extérieur du pays pendant moins de 24 heures. En revanche, les États-Unis accordent une exemption de 200 $ à tous les résidants américains qui viennent au Canada pendant moins de 24 heures. De façon générale, les exemptions du Canada sont plus restrictives que celles des États-Unis pour les voyages de moins d'une semaine. Chose intéressante, le Congrès des États-Unis étudie actuellement un projet de loi qui permettrait de faire passer les exemptions personnelles à 1 000 $ pour les voyages aller-retour le même jour. Toutefois, les rapports révèlent que le Canada s'oppose à faire de même pour ses citoyens, et ce, malgré la vive insistance des États-Unis en ce sens.
Je crois que le Canada devrait saisir cette occasion et libéraliser les exemptions personnelles. Une telle mesure donnerait lieu à de nombreux résultats bénéfiques pour le Canada. Premièrement, cette mesure atténuerait considérablement les pressions exercées sur l'Agence des services frontaliers du Canada. Comme nous l'avions indiqué dans notre article, les ressources que l'ASFC consacre à la vérification des achats des consommateurs ne peuvent être affectées aux autres fonctions de l'Agence, lesquelles sont considérables et essentielles. Un comité du Sénat avait souligné en 2007 que la politique canadienne n'établissait pas l'équilibre requis et avait recommandé au Canada d'harmoniser ses exemptions avec celles des États-Unis.
Deuxièmement, les Canadiens tireraient des avantages directs de la libéralisation des exemptions personnelles. Comme je l'ai mentionné précédemment, le moment est venu de permettre aux contribuables et aux citoyens canadiens de bénéficier des avantages de la force de notre dollar et de nos perspectives économiques relativement solides.
Troisièmement, cette mesure accentuerait les pressions exercées sur les détaillants canadiens pour qu'ils offrent des prix équivalents à ceux des États-Unis. Ainsi, tous les consommateurs canadiens, même ceux qui ne franchissent pas la frontière pour faire des achats, en tireraient parti.
Quatrièmement, j'estime qu'une occasion sans précédent s'offre à nous d'accroître le commerce et les déplacements transfrontaliers, ce qui constituerait un avantage pour les deux pays, mais surtout pour le Canada. Depuis des années, Ottawa soulève des préoccupations au sujet de l'« épaississement » de la frontière canado-américaine. Nous avons ici l'occasion d'alléger les modalités bureaucratiques des déplacements transfrontaliers en permettant aux Américains et aux Canadiens de voyager et faire du commerce plus facilement dans un pays comme dans l'autre.
Il se peut que ma proposition soulève certaines préoccupations. On pourrait craindre que les recettes fiscales du gouvernement soient touchées. Je ne crois pas que le fait d'accroître les exemptions personnelles aurait une incidence importante sur les recettes. Je me ferai un plaisir de vous en dire davantage à ce sujet. On pourrait également craindre que les entreprises au Canada, les entreprises canadiennes, s'opposeront à une telle mesure. Je n'ai pas le moindre doute qu'elles le feront. Il y a cependant quelques points à prendre en considération : d'abord, la politique actuelle profite grandement aux entreprises au Canada. Je propose simplement de transférer une partie des avantages tirés aux citoyens et aux contribuables canadiens. Ensuite, bon nombre des entreprises qui tirent parti des restrictions sur les déplacements et le commerce en place ne sont même pas canadiennes; la plupart sont américaines. Par exemple, Apple vend ses produits à des prix considérablement plus élevés au Canada qu'aux États-Unis. Les médias ont aussi rapporté que des entreprises comme J. Crew et Best Buy font la même chose. En outre, les recherches effectuées révèlent que des entreprises américaines comme Amazon, qui vend des livres, et Safeway, qui est une chaîne de magasins d'alimentation, vendent au Canada des produits identiques à des prix beaucoup plus élevés qu'aux États-Unis. Ces entreprises n'ont pas des coûts plus élevés au Canada, elles vendent leurs produits plus cher tout simplement parce qu'on les laisse faire. Selon moi, si les entreprises peuvent agir ainsi, elles doivent en profiter. Les entreprises ont pour but de faire de l'argent. Toutefois, j'estime que nous devrions faire en sorte que les consommateurs puissent plus facilement faire leurs achats là où ils le souhaitent. Je n'arrive pas à comprendre pourquoi la politique publique canadienne devrait être conçue pour profiter expressément aux entreprises américaines.
Voilà qui met fin à mes observations. Il me fera plaisir de répondre aux questions.
Le président : Merci beaucoup. Vous soulevez des points intéressants, monsieur Chandra. Certains sénateurs souhaitent discuter avec vous. J'accorde en premier la parole au sénateur Eggleton, de Toronto.
Le sénateur Eggleton : Bienvenue et merci d'être venu. Comme c'est intrigant. Si nous passions à 1 000 $ par jour, ne pensez-vous pas que les gens se mettraient à traverser la frontière en grand nombre? Dans quelle mesure cela perturberait-il les détaillants canadiens? Selon vous, ils seraient obligés de devenir plus concurrentiels, mais eux-mêmes font valoir que les droits et les taxes sont plus élevés au Canada, que la différence de prix n'est pas attribuable à la soif du profit. Je pense que beaucoup de gens se soucieraient de l'incidence de la mesure sur les entreprises.
Pouvez-vous démontrer que, à moyen et long terme, nous n'avons rien à craindre en ce sens?
M. Chandra : Je ne préconise pas nécessaire qu'on passe à 1 000 $ du jour au lendemain. La mesure de l'exemption est quelque chose que nous pouvons déterminer, et il me ferait plaisir de vous donner mon opinion à ce sujet. À l'heure actuelle, l'exemption est nulle. Vous pourriez revenir des États-Unis aujourd'hui en possession d'un paquet...
Le sénateur Eggleton : Pour un voyage de 24 heures, l'exemption est de 25 $, n'est-ce pas?
M. Chandra : Elle est de 50 $.
Le sénateur Eggleton : D'accord, 50 $, mais pas le même jour.
M. Chandra : Si vous partiez aujourd'hui et reveniez avec un paquet de gomme à mâcher, vous devriez en théorie payer des droits. En réalité, ce n'est pas quelque chose qu'on remarque, mais le fait est que l'exemption actuelle est nulle. Je ne suis pas en train de dire qu'on devrait la faire passer à 1 000 $.
Le sénateur Eggleton : À votre avis, à quel niveau l'exemption devrait-elle être fixée, au début?
M. Chandra : Il serait idéal qu'en premier lieu, nous ayons un accord de principe aux termes duquel l'exemption serait supérieure à zéro. Je ne suis pas en mesure de vous dire un chiffre, mais il me ferait plaisir de contribuer à la discussion sur ce sujet. Je ne pense pas que nous en soyons encore là. Si nous faisons passer l'exemption à un niveau raisonnable, par exemple celui en vigueur aux États-Unis —bien qu'à mon avis, je pense que nous pourrions être un peu plus audacieux et la fixer à un niveau plus élevé...
Le sénateur Eggleton : Quelle est-elle à l'heure actuelle?
M. Chandra : L'exemption accordée est actuellement de 200 $ pour les voyages aller-retour.
Si nous égalons ce chiffre, quelques choses se passeront. Au début, un paquet de monde se dira : « Attendez un instant. Les prix sont meilleurs aux États-Unis. Allons-y. » Je suis certain qu'il y aura des reportages sur l'accroissement des ventes aux États-Unis au détriment du Canada. Les entreprises canadiennes se plaindront certainement de la même chose. On en parlera pendant quelques mois, mais au fil du temps, on passera à autre chose. Au fil du temps, je prédis que les prix au Canada — notamment des biens marchands comme les petits produits électroniques, les iPad vendus par Apple — se rapprocheront de ceux aux États-Unis. Il y aurait une convergence des prix entre le Canada et les États-Unis.
Deuxièmement, on se soucierait de la perte de recettes fiscales, mais la semaine dernière, l'ASFC a fait remarquer au présent comité qu'elle perçoit seulement 190 millions de dollars en taxes et en droits sur les achats transfrontaliers. L'exemption est nulle, mais dans les faits, l'ASFC n'a ni le temps ni les ressources nécessaires pour surveiller les petits achats. La loi devrait refléter cette réalité. Quel est le but de fixer l'exemption à zéro dans la loi si cette disposition n'est pas appliquée et s'il n'est pas clairement établi que la perte de revenus pour le gouvernement est minime?
Le sénateur Eggleton : C'est un bon point. À propos de l'harmonisation des taxes et des droits que vous proposez, pouvez-vous nous citer un produit en exemple afin d'illustrer comment nous pourrions réduire les droits de douane pour qu'ils soient égaux à ceux imposés par les États-Unis et nous expliquer en quoi cela aurait une incidence positive sur les prix aux Canada?
M. Chandra : Prenons par exemple — cela ne relève pas vraiment de mon domaine d'expertise. Je me spécialise en déplacements transfrontaliers et en différences de prix transfrontalières, pas en importation de matières premières qu'utilisent les entreprises. Cependant, j'estime que si nous égalisions le terrain de jeu et si les entreprises canadiennes payaient les mêmes droits sur les importations de matières premières, de produits électroniques et de vêtements venant d'Asie, par exemple, nos prix ressembleraient davantage aux prix aux États-Unis. Ainsi, les consommateurs seraient moins tentés de magasiner aux États-Unis.
Le sénateur Eggleton : À condition, bien entendu, que le détaillant ou le fabriquant fasse profiter les consommateurs de ces économies.
M. Chandra : Au bout du compte, si la concurrence est suffisante au Canada, ils seraient obligés de le faire. À mon avis, c'est le cas. Les entreprises canadiennes versent beaucoup d'argent en taxes. Je répète que mon but n'est pas de faire des excuses pour les entreprises canadiennes, mais il demeure qu'elles sont soumises à des conditions plus restrictives que leurs homologues américains.
Le sénateur Runciman : Si je ne m'abuse, vous êtes le troisième témoin à préconiser l'ajustement de l'exemption devant le présent comité. Je suis plutôt d'accord, comme je vis près de la frontière. Je pense que beaucoup d'agents des services frontaliers accordent déjà une exemption officieuse. Certains d'entre eux ont déjà témoigné du fait que, jusqu'à concurrence de 100 $, par exemple, les épiceries sont autorisées. Si l'on commençait à soumettre ces consommateurs à des vérifications, la frontière serait encore plus congestionnée qu'elle l'est aujourd'hui.
Vous avez parlé de la raison pour laquelle le Canada n'a pas encore ajusté l'exemption. Vous avez parlé de recettes fiscales. En avez-vous déjà directement parlé avec le gouvernement? Je parle notamment du lever de boucliers parmi les détaillants, malgré le fait que le Conseil du commerce au détail a affirmé ne pas avoir pris position sur cette question, même officieusement. Qu'avez-vous entendu à propos de la motivation du gouvernement? Je comprends la question des recettes fiscales, mais cherche-t-on avant tout à protéger les détaillants canadiens? Qu'en pensez-vous?
M. Chandra : Je ne sais pas, exactement. Les médias et d'autres nous ont posé la même question, à moi et à mon collègue, Keith Head, après la parution de notre éditorial. Apparemment, les médias auraient également contacté le ministre des Finances pour lui poser la même question, et celui-ci aurait répondu — c'est du moins ce qu'ont rapporté les médias — qu'il se souciait des recettes fiscales, du fait qu'une augmentation des achats au Canada signifierait une perte de recettes fiscales aux États-Unis. Je répète que je suis certain que l'association des détaillants s'insurgerait si on décidait de libéraliser le système. Toutefois, je n'ai aucune idée si elle exerce des pressions en coulisses pour éviter que cela se passe. C'est peut-être une des raisons cachées qui explique l'inaction du gouvernement.
Le sénateur Runciman : J'en conclus donc que vous et vos collègues auraient du mal à démontrer votre théorie jusqu'à ce qu'elle soit mise en pratique, graduellement ou non.
M. Chandra : Vous avez tout à fait raison. C'est impossible à dire tant qu'on n'aura pas fait le pas. Le mieux qu'on puisse faire, c'est vous dire ce qui se passerait au meilleur de nos connaissances, en fonction de la théorie sous-jacente et de ce que nous avons lu à propos de la mesure de l'intégration des deux marchés. À notre avis, une plus grande intégration des marchés entraînerait une convergence plus rapide des prix. Par conséquent, nous ne pensons pas que les gens se rueraient à la frontière en grand nombre. Peut-être au début, je ne conteste pas cette possibilité, mais je doute que cela se maintiendrait à long terme.
Cela dit, vous avez quand même raison, et c'est justement pourquoi je ne préconise pas qu'on fasse immédiatement passer l'exemption à 1 000 $. On pourrait néanmoins y tendre graduellement, si nous sommes ouverts en principe à l'idée selon laquelle on ne devrait pas limiter la liberté des Canadiens de se déplacer et d'acheter des biens où qu'ils veulent.
Le sénateur Runciman : Vous vous êtes intéressé tout particulièrement au secteur de l'automobile. Pouvez-vous nous en parler? Certains témoins nous ont parlé de différences appréciables, notamment en ce qui concerne les voitures fabriquées au Canada, par exemple. Pouvez-vous nous expliquer le phénomène?
M. Chandra : J'ai écouté le témoignage de M. Baldwin, qui a mis les automobiles dans la catégorie des biens marchands; fondamentalement, il n'a pas tort. Cependant, en réalité, ce ne sont pas des biens marchands, car de nombreux règlements nous empêchent d'acheter une voiture aux États-Unis et de la ramener au Canada. Le règlement de Transports Canada, par exemple, vient s'ajouter aux exigences en vigueur aux États-Unis. Qui plus est, comme notre recherche nous l'a appris récemment, les fabricants américains n'offrent plus de garantie aux Canadiens qui achètent une voiture aux États-Unis et la ramènent au Canada. Ce n'est pas étonnant, puisqu'ils sont favorables à la segmentation du marché. Ils aiment pouvoir vendre leurs produits à des prix différents en fonction du marché. Toutes les théories portent à croire que c'est ainsi qu'ils maximisent leurs profits. L'exemple des voitures est compliqué à cause de la question des garanties; si les entreprises veulent segmenter le marché, elles le peuvent. La politique gouvernementale ou publique peut difficilement changer cela.
J'ai écouté l'exemple cité par le sénateur Finley. Il est vrai que beaucoup de voitures coûtent plus cher au Canada. D'autres coûtent moins cher, cependant. N'oublions pas que le dollar est très fort, relativement parlant. Il y a dix ans, les voitures coûtaient moins cher; la plupart des choses coûtaient moins cher. Comme l'a dit M. Baldwin, même il y a trois ans, quand le dollar a chuté, les prix ne se sont pas ajustés rapidement, c'est pourquoi la différence actuelle est attribuable à la force du dollar.
Le sénateur Runciman : Vous êtes-vous penché sur l'incidence de la réglementation provinciale? Le sénateur Finley a parlé du prix de la bière. En Ontario, par exemple, le gouvernement a fixé un prix minimum pour empêcher qu'on n'en fasse un produit d'appel, par exemple, comme le font beaucoup de détaillants américains. À quel point le gouvernement provincial joue-t-il un rôle important dans le maintien des prix élevés au Canada?
M. Chandra : Je pense que cela varie d'un produit à l'autre, mais dans le cas de la bière, il n'est pas seulement question du prix minimum, mais bien du monopole exercé sur les ventes; c'est le choix du gouvernement de l'Ontario. Je pense que si la situation était différente, le prix le serait également.
Le président : On en revient toujours à la bière.
Le sénateur Finley : J'espère que l'exemption de 1 000 $ s'appliquera également à la bière, parce que j'ai beau ne pas en boire, je reconnais que 8,99 $ pour une douze de Labatt Bleue, c'est une bien bonne affaire.
Monsieur Chandra, j'aimerais connaître votre opinion sur un ou deux points. Premièrement, j'ai lu que votre éditorial dans le Globe and Mail a amené l'ASFC à parler, la semaine dernière, du fait que si on cessait de se soucier des produits courants qui traversent la frontière, l'ASFC pourrait plus facilement exécuter ses tâches plus importantes. Au début, elle en a convenu, mais très tard cette même soirée, un des représentants a ajouté que, bien évidemment, toute augmentation de l'exemption entraînerait une augmentation considérable des déplacements transfrontaliers, ce qui compliquerait le travail de l'agence.
C'est une façon de voir la chose. Partons du principe qu'il a raison. Dans votre rapport — qui, si j'ai bien compris, n'est pas encore terminé puisqu'il contient encore toutes sortes de points d'interrogation et de renvois qui ne mènent à rien — vous dites, en utilisant un mot dont j'admets ignorer le sens, que l'augmentation exogène de 100 p. 100 des délais d'attente à la frontière entraînerait une diminution de 30 à 48 p. 100 des passages transfrontaliers, dépendamment de la province.
D'une part, vous proposez l'augmentation de l'exemption afin de faciliter la tâche aux agents des services frontaliers alors que ceux-ci affirment que la mesure les rendra plus occupés. Si plus de gens traversent la frontière, les délais d'attente seront plus longs, ce qui entraînera une réduction des passages. Pouvez-vous m'expliquer ce paradoxe?
M. Chandra : Ce n'est pas facile à expliquer, c'est justement pourquoi j'ai parlé d'« augmentation exogène » des délais d'attente à la frontière. S'il y avait une augmentation exogène des délais d'attente, autrement dit, une augmentation pas du tout attribuable au fait que plus de gens traversent la frontière — disons que l'effectif de l'ASFC serait coupé de moitié ou que celle-ci consacrerait deux fois plus de temps aux inspections — les données nous permettent de prédire l'incidence de ce phénomène sur les délais d'attente et sur le nombre de personnes qui choisissent d'aller aux États-Unis. Si plus de voitures se rendaient à la frontière en raison de la force du dollar canadien ou de l'augmentation de l'exemption et que cela faisait croître les délais d'attente, cela risquerait-il de réduire la fréquence des passages? C'est impossible à dire à moins d'avoir toutes les données. Je ne prétends pas pouvoir répondre à cette question.
Le sénateur Finley : Il me semblait bien que c'était un problème difficile.
Dans un de vos rapports, vous affirmez que le consommateur attribue une valeur de 20 $ à chaque heure de conduite afin de déterminer s'il vaut la peine ou non de traverser la frontière. De chez moi, je peux apercevoir Erie, en Pennsylvanie. Malheureusement, un vaste plan d'eau qu'on appelle le lac Érié nous sépare, m'obligeant ainsi à faire le tour, d'un côté ou de l'autre, ce qui prend longtemps. Si l'on tient compte des exemptions et d'autres facteurs économiques — je me demande justement si cela fait partie de votre modèle — on peut conclure que, pour dépasser le minimum de 24 heures, il faut inévitablement passer la nuit quelque part. Je dirais même qu'il faudrait passer plusieurs nuits aux États-Unis pour que le déplacement, au taux de 20 $ par heure, en vaille la peine. En avez-vous tenu compte dans votre système? Je dois dire que vous manipulez fort bien les formules. Elles m'ont absolument ravi, même si je n'y ai rien compris.
M. Chandra : Vous avez tout à fait raison. Cela prend un certain temps pour se rendre à la frontière. Dans votre cas, vous devez contourner le lac Érié. Pour ma part, je dois contourner le lac Ontario pour me rendre de Toronto à Niagara, ou encore passer par Kingston. C'est justement ce qu'illustrent nos constatations. Malgré ce que disent les médias, l'ensemble des Canadiens n'attendent pas impatiemment d'aller magasiner de l'autre côté de la frontière. C'est une longue route. Il faut du temps, de l'argent et de l'essence, qui coûte cher. Les données détaillées de l'ASFC et de Statistique Canada nous permettent de déterminer où vivent les gens et la distance qu'ils sont prêts à parcourir. La plupart des gens qui traversent la frontière vivent à côté. Il nous arrive d'entendre une histoire comme quoi quelqu'un à Edmonton s'est rendu aux États-Unis pour profiter d'une bonne affaire, mais ce sont des cas isolés. La plupart des gens qui sont prêts à traverser la frontière vivent proche de celle-ci. Ça ne vaut pas la peine de conduire pendant six heures.
Le sénateur Finley : Le rendement diminue.
M. Chandra : Précisément. C'est pourquoi la libéralisation des exemptions n'entraînera pas une ruée vers les magasins américains. Quelques personnes de plus peut-être traverseraient la frontière. Je pense que cela ferait pression sur les entreprises canadiennes. Si Apple souhaite vendre son iPad 20 p. 100 plus cher au Canada, soit. Les Canadiens, eux, pourront l'acheter 20 p. 100 moins cher aux États-Unis. Je pense que cela entraînerait une convergence des prix.
Le sénateur Finley : J'ai posé la question à M. Baldwin, qui a comparu avant vous. Tous les rapports que j'ai lus, le vôtre et ceux de Statistique Canada, s'entendent sur le fait que le système réagit mal aux fluctuations du taux de change. M. Baldwin a parlé de prix rigides, entre autres. Qu'en pensez-vous? Pouvons-nous faire quelque chose pour faire en sorte que les prix s'ajustent plus rapidement, ou bien est-ce hors de question étant donné les chaînes d'approvisionnement et d'inventaire? On serait porté à croire qu'avec les ordinateurs et les codes à barres, la redistribution serait un jeu d'enfants.
M. Chandra : Les prix ne s'ajustent pas suffisamment rapidement pour répondre aux fluctuations du taux de change. Ce n'est pas parce que la rapidité de l'ajustement des prix laisse à désirer. Aucun élément de preuve ne porte à croire cela. En général, toutes les entreprises, dans le monde entier, prennent du temps à répondre à tout changement de circonstance. Ce qui est inhabituel en l'occurrence, ce n'est pas la rapidité avec laquelle les entreprises ajustent leurs prix, mais bien la vitesse à laquelle le taux de change fluctue. Comme je l'ai dit dans mon exposé, il peut y avoir un changement de un à deux pour cent en une journée. À l'issue de l'audience, la valeur du dollar canadien pourrait avoir augmenté de un pour cent depuis ce matin; ce ne serait pas étonnant, surtout étant donné la situation économique actuelle. Il faut qu'on apprenne à vivre avec la rapidité des fluctuations du taux de change, étant donné les relations commerciales canado-américaines.
Le sénateur Finley : Ça ne semble pas être le cas à la pompe, cependant.
M. Chandra : Il pourrait sembler que les entreprises prennent du temps à ajuster leurs prix, mais les entreprises canadiennes ne sont pas plus lentes que les autres.
Par exemple, il serait peu pratique pour Tim Hortons ou Starbucks de changer les prix sur leurs menus et leurs affiches de un pour cent tous les jours. Ça ne serait pas pratique. Ça ne serait pas dans leur intérêt. Pour prendre un autre exemple, Amazon.com et Amazon.ca vendent les mêmes livres de part et d'autre de la frontière. Ces entreprises n'ont aucun point de vente traditionnel. Leurs prix sont affichés sur leur site Internet. On pourrait croire qu'elles seraient en mesure de changer leurs prix facilement en fonction du taux de change, mais elles ne le font pas. Des chercheurs à Montréal ont démontré qu'Amazon, une entreprise qui pourrait modifier ses prix rapidement, ne le fait pas. J'ignore les rouages internes des entreprises, mais de telles décisions ne seraient pas confiées à des ordinateurs ou à des gestionnaires. Quelle que soit la raison, il leur faut du temps pour prendre ces décisions.
Je pense que l'essence est un cas particulier pour plusieurs raisons, dont nous pourrions parler si vous le voulez. En général, je ne me soucierais pas de la vitesse à laquelle les entreprises canadiennes ajustent leurs prix. Je pense qu'elles s'y prennent de la même façon qu'ailleurs.
Le sénateur Ringuette : Monsieur Chandra, dans le mémoire que vous nous avez soumis ce matin, vous affirmez, par exemple, qu'Apple vend ses produits beaucoup plus cher au Canada qu'aux États-Unis.
Admettons que le gouvernement du Canada adopte votre première recommandation, qui concerne l'accroissement de l'exemption dont bénéficient les particuliers. Les Canadiens se mettraient donc à acheter des produits Apple aux États-Unis. Pensez-vous vraiment que cela pousserait Apple à vendre ses produits au Canada au même prix qu'aux États-Unis?
M. Chandra : Pas sur le coup. En général, les entreprises détestent réduire les prix. Elles hésitent à le faire. De nombreuses recherches ont démontré qu'elles préféreraient les maintenir pendant longtemps plutôt que de les réduire. Cependant, je ne pense pas qu'Apple augmenterait le prix de ses produits au Canada. Après un certain temps, il y aurait une convergence des prix.
Le sénateur Ringuette : C'est une supposition. Parlez-vous de 10, 20 ou 30 ans?
M. Chandra : Je ne pense pas que ça prendrait si longtemps, mais ça ne se ferait pas du jour au lendemain. Tout dépend du produit. Le prix des voitures ne changera pas, en grande partie parce que les fabricants de voitures font en sorte que les voitures vendues au Canada et aux États-Unis répondent à des spécifications légèrement différentes. Il est difficile d'effectuer une comparaison transfrontalière d'une même marque. Il se peut que le prix d'un certain produit ne change pas du tout. Cependant, si on permet aux consommateurs d'acheter un produit identique aux États-Unis, les entreprises qui les vendent ici seront obligées de réduire leurs prix. J'ignore combien de temps il leur faudrait pour le faire, mais cela arrivera.
Le sénateur Ringuette : J'habite près de la frontière. J'examine également les prix sur Internet. Plus tôt, vous avez parlé d'Amazon.com et d'Amazon.ca. Un américain qui achète un livre sur Amazon.com ne paye aucun frais d'expédition. Il se le fait livrer chez lui. Un citoyen canadien qui place une commande sur Amazon.com parce que les prix sont meilleurs que sur Amazon.ca doit payer des frais d'expédition. Cela nous ramène à l'autre question que vous avez soulevée à propos de l'essence qui coûte 28 p. 100 plus cher au Canada qu'aux États-Unis. Une bonne partie de cette différence est attribuables aux taxes, autant fédérales que provinciales.
M. Chandra : C'est vrai.
Le sénateur Ringuette : Même si l'on accroît l'exemption dont bénéficient les particuliers, les facteurs dont doivent tenir compte les consommateurs ainsi que les détaillants et les fabricants qui souhaitent desservir le marché canadien seront les mêmes.
M. Chandra : Tout à fait. Comme je l'ai dit plus tôt, il y a trois grandes raisons pour lesquelles les prix sont différents au Canada et aux États-Unis. Nous ne pouvons éliminer les deux premières. Nous ne pouvons rien changer au fait que le Canada est un plus petit marché et qu'il coûte plus cher de faire affaires dans un petit marché. Nous ne pouvons rien changer au fait que l'essence coûte plus cher ici. C'est le choix qu'ont fait les gouvernements et les citoyens du Canada au fil des années. Nous pouvons néanmoins nous attaquer à la troisième raison, le fait que les entreprises réagissent lentement aux fluctuations du taux de change. Ce ne sont pas seulement les deux premiers facteurs qui expliquent la différence des prix.
Le sénateur Ringuette : Dans toutes les analyses que vous avez effectuées, avez-vous tenu compte de tous les intervenants du marché qui majorent les prix, que ce soient les fabricants ou les expéditeurs, puis les grossistes, d'abord à l'échelle continentale, puis à l'échelle régionale? Le détaillant est le dernier maillon de la chaîne d'approvisionnement. Il doit vivre avec le marché et les conditions de ses fournisseurs. En plus, il doit vivre avec le fait qu'il doit verser 3 p. 100 de ses ventes, en moyenne, à Visa et MasterCard qui, de leur côté, dépensent des milliards de dollars en publicité pour inciter les consommateurs canadiens à tout acheter avec leur carte de crédit.
M. Chandra : Nous cherchons en l'occurrence à expliquer la différence de prix entre le Canada et les États-Unis. Nous nous concentrons sur les différences entre les deux marchés. Les entreprises américaines doivent elles aussi payer des frais aux compagnies de carte de crédit. Elles font elles aussi partie d'une chaîne d'approvisionnement et doivent composer avec les majorations des intermédiaires.
Le sénateur Ringuette : Et le volume?
M. Chandra : Précisément, le volume. Je répète que c'est là la principale raison. Le volume est moindre au Canada, il le sera toujours. Notre population est un dixième de celle des États-Unis. C'est une réalité que nous ne pourrons malheureusement jamais changer.
Le sénateur Marshall : Merci beaucoup d'avoir accepté de comparaître devant nous ce matin.
J'aimerais revenir aux véhicules. Je viens de Terre-Neuve-et-Labrador, une île isolée. Pourtant, je connais des gens qui descendent aux États-Unis pour acheter leur voiture. J'étais au courant du changement dans le traitement des garanties. Votre recommandation à propos de l'exemption n'aura aucune incidence dans ce cas-ci.
M. Chandra : Non.
Le sénateur Marshall : Les droits et les tarifs douaniers ne changeront rien.
M. Chandra : Effectivement.
Le sénateur Marshall : Est-il possible d'harmoniser nos prix avec ceux des États-Unis, ou devons-nous nous résigner à la situation actuelle? Y a-t-il moyen d'y parvenir?
M. Chandra : Je pense qu'il y a beaucoup de choses auxquelles nous devons nous résigner. Nous n'arriverons jamais à un point où les prix de tous les biens seront les mêmes dans les deux pays. Tâchons également de ne pas oublier qu'il arrive souvent que les produits coûtent moins cher au Canada, à cause du taux de change. Comme je l'ai déjà dit, il y a dix ans, quand la valeur du dollar était faible, tout coûtait moins cher, même que les Américains venaient magasiner ici. J'ignore si les voitures coûtaient elles aussi moins cher, c'est une question qu'on pourrait étudier, mais c'était le cas de beaucoup d'autres produits. Je ne pense pas qu'il est réaliste de vouloir égaliser le prix de tous les produits. L'objectif plus réaliste consiste plutôt à harmoniser le prix des produits de consommation courants qu'on peut facilement acheter et consommer des deux côtés de la frontière et qui, à l'heure actuelle, sont vendus beaucoup plus cher ici.
Le sénateur Marshall : Qu'en est-il des voitures en particulier? Ce sont des articles importants, et les gens remarquent les différences de prix. Aux États-Unis, elles coûtent des milliers de dollars de moins. Y a-t-il quelque chose que le comité peut recommander pour régler ce problème?
Vous avez parlé de règlements plus tôt. Les prix des véhicules sont soumis à tellement de règlements. Pouvons-nous faire quelque chose à cet égard?
M. Chandra : Je ne pense pas que ce soit notre plus gros problème. Je pense même que le règlement s'est assoupli au fil des ans. Nous sommes sur la bonne voie. Cependant, les entreprises profitent de la différence dans les exigences imposées au Canada et aux États-Unis pour vendre leurs voitures à un prix différent. Elles savent que les consommateurs peuvent difficilement acheter leur produit dans un marché et s'en servir dans un autre. L'assouplissement du règlement entraîne habituellement une diminution des prix. Cependant, je ne pense pas que ce soit notre plus gros problème. Le gros problème, c'est que les fabricants peuvent eux-mêmes établir ces programmes. Ma recherche démontre que, au cours des quelques dernières années, ils ont considérablement réduit le nombre de garanties offertes aux consommateurs canadiens. Tous les fabricants en ont fait de même, autant à l'étranger qu'en Amérique du Nord.
Le sénateur Marshall : Je connais la situation puisque je connais des gens qui achètent leurs véhicules aux États- Unis.
Vous avez dit dans votre introduction que certains de vos collègues se penchent encore sur cette question. Vous ai-je bien compris?
M. Chandra : Sur le marché de l'automobile?
Le sénateur Marshall : Oui.
M. Chandra : Je travaille à une étude avec un collègue de l'Université de la Colombie-Britannique, mais il s'agit d'une étude préliminaire.
Le sénateur Marshall : Quand prévoyez-vous présenter un rapport à ce sujet? Sera-t-il prêt avant que nous ayons terminé notre étude?
M. Chandra : Je ne le crois pas. Les recherches académiques progressent à pas de tortue.
Le sénateur Marshall : Avez-vous publié des résultats préliminaires, ou attendez-vous d'avoir complété l'étude?
M. Chandra : Nous préférons habituellement attendre que l'étude soit complétée, sinon nous pourrions tirer des conclusions inexactes.
Le président : Donc, si j'ai bien compris, les constructeurs de véhicules ont grandement réduit les garanties qu'ils offrent pour les automobiles fabriquées aux États-Unis et vendues au Canada?
M. Chandra : C'est exact.
Le président : S'agit-il du marché des véhicules d'occasion?
M. Chandra : Non, des véhicules neufs. Dans bien des cas, les constructeurs exigent que le véhicule acheté aux États- Unis ait au moins six mois d'usure pour que les garanties américaines soient honorées au Canada. Dans certains cas, ils ne les honorent pas du tout.
Le sénateur Runciman : J'ai une question au sujet des produits coûteux. Un exploitant de marina m'a parlé des Sea- Doo de Bombardier fabriqués au Canada. Il semble que le détaillant paie au constructeur ou au grossiste un prix plus élevé que son homologue américain. Avez-vous déjà étudié certains de ces produits coûteux, et pourquoi y a-t-il d'importants écarts de prix?
M. Chandra : Il y en a. On pourrait mener diverses études sur chacun de ces secteurs et de ces produits. Les compagnies aériennes en particulier posent problème, car, je le répète, c'est une question de taille du marché. Il existe essentiellement deux ou trois compagnies aériennes au Canada, soit une d'importance et quelques plus petites, alors qu'il y a beaucoup plus de compagnies aux États-Unis, où le marché et la demande sont beaucoup plus importants. Le pouvoir de négociation des compagnies aériennes pour un même avion est beaucoup plus grand que celui des compagnies canadiennes, et elles obtiendront toujours de bons prix.
Le sénateur Runciman : Cela dépend du marché.
M. Chandra : Exactement.
Le sénateur Nancy Ruth : Je crois que la fabrication des Sea-Doo et des Ski-Doo a été transférée du Canada aux États-Unis il y a sept à dix ans de cela. Est-ce que cela aurait une incidence sur les écarts de prix? Votre réponse au sénateur Runciman était fonction d'une fabrication canadienne, alors que je parle d'une fabrication américaine. Quelle incidence cela aurait-il sur les prix?
M. Chandra : Je ne connais pas suffisamment cette industrie pour pouvoir répondre adéquatement.
Le sénateur Nancy Ruth : Ma question est hypothétique. Elle a plus ou moins rapport avec la contrebande, au sujet de laquelle nous n'avons pas vraiment de données. Nous avons tous des histoires, j'en suis certaine.
Tout d'abord, est-ce que les banques font pression pour, disons, une limite de 1 000 $? Peu de Canadiens pourraient dépenser 1 000 $ sans utiliser une carte de crédit.
M. Chandra : En effet.
Le sénateur Nancy Ruth : Les banques vont percevoir leur dû que le bien soit acheté ici ou aux États-Unis, mais est- ce qu'elles auraient avantage à faire augmenter la limite?
M. Chandra : Peut-être. Tout secteur pouvant être qualifié de soutien à une activité comme le voyage ou les mouvements transfrontaliers bénéficierait du fait que davantage de personnes traversent la frontière. Cela pourrait inclure les banques, mais je ne suis pas au courant qu'elles aient fait pression en ce sens.
Le sénateur Nancy Ruth : Disons que les Canadiens qui peuvent se permettre de dépenser 1 000 $ pendant un voyage d'une journée ou un congrès d'un week-end pourraient, par exemple, acheter deux merveilleuses cravates italiennes ou un sac à main Gucci d'une valeur de 1 000 $ ou 2 000 $. Pensez-vous que cela ferait augmenter la contrebande?
M. Chandra : Je crois que cela aurait l'effet contraire. Il n'y a actuellement aucune exemption pour de tels achats. J'ai lu le témoignage de l'ASFC de la semaine dernière devant ce comité. Ses agents n'ont souvent pas le temps de vérifier les véhicules. Les gens pourraient déclarer n'avoir fait aucun achat alors qu'ils en ont fait. Je ne serais pas surpris que ce soit le cas. Comme vous l'avez dit, les gens n'ont pas 1 000 $ à dépenser en un seul voyage; c'est une grosse somme, et je ne préconise pas une limite de 1 000 $. Ceux qui avaient l'habitude de faire une visite occasionnelle aux États-Unis pour acheter des vêtements et des appareils électroniques sans déclarer quoi que ce soit déclareraient peut-être leurs achats maintenant, à la condition qu'ils ne soient pas illégaux.
Le sénateur Dickson : Vous avez fait un excellent exposé. Vous vous souviendrez peut-être que d'autres témoins avant vous ont dit qu'un de nos défis consistait à sensibiliser le public à certaines des solutions les plus simples qu'il pourrait y avoir. Je dois dire que vous en avez cerné certaines dans votre exposé. Il y en a une à laquelle j'adhère totalement, sur le plan de la politique publique à tout le moins, selon laquelle les politiques publiques devraient servir la majorité des Canadiens, et non pas uniquement les grands détaillants. Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet?
M. Chandra : J'enseigne les affaires. On pourrait croire que je prône des solutions ou des politiques favorables aux entreprises, mais c'est tout le contraire. Je suis essentiellement un économiste, et je crois que les politiques publiques qui permettent une vigoureuse concurrence entre les entreprises profitent beaucoup aux consommateurs. Nous devrions concevoir des politiques publiques pour le bénéfice des consommateurs et des contribuables. Nous devrions concevoir des politiques publiques pour le bénéfice des Canadiens, essentiellement. On y parvient généralement en suscitant une concurrence féroce entre les entreprises, que ce soit au Canada ou à l'étranger. C'est l'un des moyens qui les obligeront à agir ainsi.
Le sénateur Dickson : Suggérez-vous d'augmenter les exemptions?
M. Chandra : Entre autres.
Le sénateur Dickson : Comme j'ai une formation d'avocat, j'ai aussi été frappé par le fait que nous ne devrions pas traiter les Canadiens comme de vulgaires criminels. C'est pourquoi nous devrions faire en sorte de leur accorder le plus rapidement possible une exemption à la frontière, qu'il s'agisse de 200 $ ou d'un autre montant. Je ne vis pas dans une région frontalière. Les gens auraient l'esprit en paix et il n'en coûterait rien au gouvernement.
M. Chandra : C'est drôle, car nous avons utilisé la même phrase dans une page en regard de l'éditorial il y a quelques mois. Soit nous traitons les Canadiens comme de vulgaires criminels pour un geste que la plupart d'entre nous jugeons inoffensif et que, je crois, bien des gens poseraient, soit nous leur permettons de faire quelque chose qui semble naturel et qui permettrait d'affecter ailleurs, et de façon plus judicieuse, des ressources qui servent à surveiller ou restreindre cette activité.
Le sénateur Dickson : Ils passent probablement des cigarettes en contrebande, par exemple.
Le sénateur Finley : Ou de la bière.
Le sénateur Dickson : Oui, de la bière.
Ma dernière question vise la troisième page de votre document, où vous vous demandez si le Canada ne pourrait pas faire quelque chose au sujet des écarts de prix. Vous énumérez deux possibilités. La première, selon laquelle le Canada devrait songer à harmoniser les taxes et les tarifs des entreprises qui doivent s'approvisionner à l'étranger, me pose problème. Avez-vous songé aux coûts associés à la mise en œuvre de cette proposition?
M. Chandra : Comme je l'ai dit, c'est pourquoi j'ai à peine parlé de cette proposition, car elle ne relève pas de mon domaine de compétence. Je me suis attardé davantage sur la seconde proposition, celle des exemptions. Pour revenir brièvement sur la première proposition, je dirai qu'il s'agirait d'une mesure globale à appliquer de concert avec la deuxième proposition, et qu'elle ne permettrait plus aux entreprises canadiennes de se plaindre, car elles seraient soumises aux mêmes droits à l'importation que les entreprises américaines. Les recettes fiscales du Canada provenant des taxes et des tarifs douaniers seraient bien entendu moins élevées en ce qui concerne les importations de matières premières en provenance de l'Asie, par exemple. Comme je l'ai dit, ce n'est pas mon domaine de compétence, et je n'ai aucune idée de l'importance de cette baisse de recettes. Je ne crois pas nécessaire de réduire toutes les recettes fiscales, mais si nous le faisons dans ce domaine, on pourrait les contrebalancer ailleurs.
Le sénateur Dickson : Savez-vous si des études ont été réalisées pour quantifier le coût de votre première proposition?
M. Chandra : Pas que je sache.
Le président : Sénateur Dickson, dans ce paragraphe, M. Chandra a indiqué que dans bien des cas il faudrait réduire les tarifs et les droits transfrontaliers concernant ces biens. Vous avez l'impression, sans qu'aucune étude précise n'ait été réalisée, que ces tarifs et ces droits sont plus élevés au Canada qu'aux États-Unis?
M. Chandra : En effet, ils sont plus élevés sur les importations de matières premières, et sur les importations en général.
Le président : S'il n'y a pas d'autres questions, monsieur Chandra, au nom du Comité sénatorial permanent des finances nationales, je vous remercie d'avoir pu venir ici avec un si court préavis. Vous avez écrit beaucoup de documents et les avez portés à notre attention, et nous les étudierons. Je m'attends à ce que notre examen se poursuive jusqu'à la fin du premier semestre de 2012. Si jamais vous souhaitez faire part à notre comité d'autres développements ou commentaires, n'hésitez pas à les transmettre à la greffière du comité. Nous serons heureux d'avoir de vos nouvelles.
M. Chandra : Je n'y manquerai pas. Merci.
(La séance est levée.)