LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES AFFAIRES SOCIALES, DES SCIENCES ET DE LA TECHNOLOGIE
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le jeudi 13 mai 2021
Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit aujourd’hui, à 9 heures (HE), par vidéoconférence, pour étudier la teneur des éléments des sections 21, 22, 23, 24, 28, 29, 32, 33, 34, 35 et 36 de la partie 4 du projet de loi C-30, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 19 avril 2021 et mettant en œuvre d’autres mesures.
La sénatrice Chantal Petitclerc (présidente) occupe le fauteuil.
[Français]
La présidente : Je suis Chantal Petitclerc, sénatrice du Québec, présidente de ce comité.
Aujourd’hui, nous tenons une réunion du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie par vidéoconférence.
Avant de commencer, j’ai quelques rappels à vous faire pour que cette réunion virtuelle se déroule bien.
[Traduction]
Premièrement, nous vous demandons de laisser vos micros en sourdine en tout temps, sauf si la présidence vous accorde la parole. Vous serez responsables d’activer et de désactiver votre micro en conséquence pendant la réunion. Avant de prendre la parole, veuillez attendre qu’on vous nomme. Je vous demanderais d’utiliser la fonction « Lever la main ». Aussi, veuillez attendre quelques secondes pour laisser le temps au signal audio de s’établir et pour aider les interprètes.
[Français]
Si vous éprouvez des difficultés techniques en ce qui a trait à l’interprétation, veuillez le signaler à la présidente ou au greffier. N’oubliez pas qu’un numéro d’assistance technique vous a été fourni.
[Traduction]
Sachez qu’en cas de problèmes techniques, il se peut que nous devions suspendre les travaux, car nous voulons bien sûr nous assurer que tout se passe bien pour les sénateurs et sénatrices et qu’ils sont en mesure de participer pleinement.
Enfin, je voudrais vous rappeler à nouveau que vous ne devez pas copier, enregistrer ou photographier vos écrans zoom.
[Français]
Sans plus tarder, je vous présente les membres du comité qui participent à la réunion de ce matin.
Nous avons le plaisir d’avoir parmi nous le sénateur R. Black, la sénatrice Bovey, la sénatrice Frum, la sénatrice Dasko, la sénatrice Forest-Niesing, le sénateur Kutcher, le sénateur Manning, la sénatrice Mégie et la sénatrice Moodie. Nous avons aussi le plaisir d’avoir parmi nous les sénatrices Moncion, Omidvar et Griffin.
Bienvenue à cette réunion. Nous poursuivons notre étude de la teneur de plusieurs sections du projet de loi C-30, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget.
Ce matin, nous examinons les sections 35 et 36. Ces sections apportent des modifications à la Loi sur les prestations canadiennes de relance économique, le Code canadien du travail et la Loi sur l’assurance-emploi, qui touchent les prestations pour les Canadiens et les Canadiennes.
Je vous présente les témoins pour cette partie de la réunion.
Nous accueillons, d’Emploi et Développement social Canada, Mme Caroline Cantin, directrice, Direction générale des compétences et de l’emploi, Mme Catherine Demers, directrice générale, Direction générale des compétences et de l’emploi, M. Mike MacPhee, directeur général, Service Canada, Mme Barbara Moran, directrice générale, Programme du travail, M. Sébastien St-Arnaud, gestionnaire, Programme du travail, Mme Mona Nandy, directrice générale, Direction générale des compétences et de l’emploi, M. George Rae, directeur, Direction générale des compétences et de l’emploi, ainsi que M. Benoit Cadieux, directeur, Direction générale des compétences et de l’emploi.
J’invite maintenant Mme Demers à prendre la parole.
Catherine Demers, directrice générale, Direction générale des compétences et de l’emploi, Emploi et Développement social Canada : Bonjour. Je m’appelle Catherine Demers. Je suis directrice générale de la politique de l’assurance-emploi. Je suis très heureuse d’être parmi vous ce matin pour vous donner un aperçu de la section 35, et plus particulièrement des amendements et des modifications qui sont proposés à la Loi sur les prestations canadiennes de relance économique. J’aimerais simplement vous dire que mes remarques d’introduction seront en anglais. Bien entendu, je répondrai aux questions dans les deux langues.
[Traduction]
Les articles 289 à 301 de la section 35 modifient la Loi sur les prestations canadiennes de la relance économique afin de prolonger temporairement la durée de la Prestation canadienne de la relance économique et de la Prestation canadienne de la relance économique pour proches aidants.
Dans le cadre de la transition de la PCU, le gouvernement a introduit le 27 septembre 2020 trois prestations temporaires d’un an pour fournir un soutien au revenu pour travailleurs canadiens touchés par la COVID : la Prestation canadienne de la relance économique, la Prestation canadienne de la relance économique pour proches aidants et la Prestation canadienne de maladie pour la relance économique. En mars, le gouvernement a augmenté le nombre de semaines de chaque prestation. La Prestation canadienne de la relance économique, la PCRE, et la Prestation canadienne de la relance économique pour proches aidants, la PCREPA, ont été prolongées de 12 semaines, faisant passer la durée maximale des prestations de 26 semaines prévues initialement à 30 semaines, pour les demandes présentées entre le 27 septembre 2020 et le 25 septembre 2021.
Pour continuer de soutenir les travailleurs durant la relance économique des prochains mois, la Loi d’exécution du budget propose une série d’amendements en vue de prolonger davantage la PCRE et la PCREPA jusqu’en juin, ce qui permettra à ceux et celles qui auront bientôt épuisé leurs 38 semaines de prestations d’avoir toujours accès aux mesures de soutien. Cela comprend des amendements prolongeant encore une fois de 12 semaines la PCRE et faisant passer le nombre maximal de semaines de 38 à 50. Au cours des 4 premières semaines de ces 12 semaines supplémentaires, les gens recevront 500 $ par semaine, puis ils recevront pour les 8 semaines restantes de la prolongation 300 $ par semaine réclamée. Cela veut dire que ceux et celles qui bénéficieront d’une prolongation de la PCRE après 42 semaines ainsi que les nouveaux prestataires qui présenteront leur première demande après le 18 juillet recevront des prestations de 300 $ par semaine, auxquelles ils ont droit jusqu’au 25 septembre.
De plus, la Prestation canadienne de la relance économique pour proches aidants sera prolongée de quatre semaines de plus, faisant passer le nombre maximal de semaines offertes de 38 à 42. Le taux de prestations durant ces quatre semaines supplémentaires restera le même que maintenant, c’est-à-dire 500 $ par semaine. Cela s’accompagne d’un amendement correspondant au Code canadien du travail, visant à renforcer la protection de l’emploi pendant une période de congé, qui s’appliquera aux employés assujettis aux lois fédérales au cours de la même période. Un autre amendement ajoute une nouvelle exigence d’admissibilité à la PCRE pour les personnes qui demandent plus de 42 semaines ou qui présentent leur première demande après le 18 juillet 2021, soit celle d’avoir rempli une déclaration de revenus pour l’année d’imposition 2019 ou 2020. Cette section propose aussi des modifications législatives donnant l’autorité réglementaire de prolonger davantage les trois prestations au besoin, après le 25 septembre.
Dans l’éventualité d’une prolongation en septembre, des dispositions sont aussi prévues pour permettre à ceux et celles qui ont épuisé le maximum de 50 semaines de prestations d’assurance-emploi d’être admissibles à la PCRE, par exemple en permettant que leur revenu d’assurance-emploi provenant de leurs prestations régulières ou d’une combinaison de prestations régulières et de prestations spéciales soit considéré comme un revenu aux fins de l’admissibilité à la PCRE. Cela permettra d’éviter qu’il y ait une semaine où ces personnes n’auront pas de revenu, si leurs prestations d’assurance-emploi prennent fin au milieu d’une période de deux semaines de la PCRE. Ces personnes recevront le même taux de prestations, de 300 $ par semaine.
[Français]
Ceci conclut mon aperçu de la section 35. Je serai heureuse de répondre à vos questions.
La présidente : Merci, madame Demers. Nous essayons de vérifier si nous avons réussi à établir une connexion avec Mme Nandy, qui devait prendre la parole au sujet de la section 36. Selon ce que je comprends, elle n’est pas avec nous.
Mme Demers : Elle éprouve toujours des difficultés techniques.
La présidente : Est-ce qu’elle était la seule qui pouvait répondre à nos questions sur la section 36?
Mme Demers : Oui. C’est elle qui devait présenter la section 36, faire une introduction et répondre aux questions. Malheureusement, elle essaie toujours d’avoir accès à la réunion.
[Traduction]
La présidente : Le témoin qui devait présenter la section 36 a un peu de difficulté à se connecter. Voici ce que je propose — et je sais que beaucoup de sénateurs et de sénatrices ont déjà levé la main —, je propose que nous nous concentrions sur la section 35 et que nous posions des questions à Mme Demers tout de suite, et nous essaierons de trouver une solution au problème de connexion de Mme Nandy.
Comme d’habitude, nous commençons par nos vice-présidentes. Sénatrice Dasko, je voulais vous dire que c’est la deuxième fois que j’oublie de vous présenter. Je ne sais pas pourquoi, et je m’en excuse. C’est la dernière fois que ça arrive. Je vous présente toutes mes excuses.
La sénatrice Bovey : Merci, madame Demers. Vous nous avez donné un aperçu très utile.
J’ai deux questions. Premièrement, j’ai remarqué que, dans la section « Questions et réponses » du document que nous a remis le ministre des Finances au sujet de la section 35 de la partie 4, lorsqu’on explique la différence entre le nombre de semaines offertes pour les prestations d’assurance-emploi et pour la PCREPA, il est indiqué que le ministère va continuer de surveiller la situation pour s’assurer que les gens ont accès à un soutien adéquat.
Comment va-t-on surveiller la situation et quels facteurs va-t-on prendre en considération pour décider concrètement de ce qu’est un « soutien adéquat » pour les Canadiens et les Canadiennes?
Mme Demers : Merci, madame la sénatrice. Le but des prolongations proposées pour juin est effectivement de continuer de fournir du soutien aux travailleurs qui ont de la difficulté à retourner sur le marché du travail, compte tenu du contexte économique actuel. Pendant que l’économie se redresse, il est proposé de fournir du soutien supplémentaire jusqu’en septembre. Cela permettra aux gens qui auraient épuisé leur nombre maximal de semaines de prestations d’ici le 19 juin de continuer de recevoir ce genre de soutien. Essentiellement, c’est le but de ce qui est proposé.
Je crois que vous avez aussi évoqué dans votre question la possibilité de prolonger davantage les prestations après septembre, soit jusqu’au 20 novembre, comme cela a été annoncé dans le budget et comme je le disais dans mon exposé relativement aux amendements législatifs proposés. Nous surveillerons la situation en tenant compte de la situation économique, du marché du travail, du taux de chômage, du taux d’activité... d’un certain nombre d’indicateurs. En gros, nous allons examiner un ensemble de facteurs et nous continuerons — parce que c’est quelque chose que nous faisons de façon continue — de surveiller la situation de très près au cours de l’été, évidemment dans le contexte de la campagne de vaccination et en tenant compte de la mesure dans laquelle les travailleurs continuent de pouvoir retourner au travail.
La sénatrice Bovey : Dans le même ordre d’idées, j’aimerais vous poser une question sur le soutien offert aux travailleurs qui ont un problème de santé préexistant susceptible de les rendre plus vulnérables à la COVID-19 et à ses variants. À mesure que nous rouvrons l’économie, allons-nous prendre en considération ces problèmes de santé préexistants pour déterminer ce qui constituerait une offre d’emploi raisonnable?
Mme Demers : La Prestation canadienne de maladie pour la relance économique sera offerte jusqu’au 25 septembre à ceux et celles qui ne peuvent pas reprendre le travail ou qui ont dû réduire leur horaire de travail en raison d’une maladie liée à la COVID. Cela va continuer.
La sénatrice Bovey : Donc, les problèmes de santé préexistants continuent. Merci beaucoup. Je suis heureuse de l’entendre.
La sénatrice Frum : Madame Demers, la version originale de la Loi sur les prestations canadiennes de relance économique était un projet de loi distinct, qui a été adopté en octobre 2020. Je sais que vous êtes une fonctionnaire et pas une politicienne, mais je voulais vous demander si vous saviez pourquoi on propose des modifications à la Prestation canadienne de la relance économique dans le document budgétaire alors qu’on pourrait modifier le projet de loi original? Les amendements qui sont proposés dans un projet de loi omnibus sont examinés, bien sûr, avec beaucoup moins de rigueur. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi ces modifications sont proposées ici et pourquoi nous n’avons pas modifié la loi originale?
Mme Demers : L’approche qui a été retenue, par rapport à la présentation de ce projet de loi, n’est pas du tout de mon ressort. Malgré tout, je peux dire que les prolongations proposées en juin ont pour but de faire en sorte qu’il n’y aura aucun écart entre les paiements pour ceux qui auront peut-être besoin de plus de soutien. La proposition concernant la prolongation de la Prestation canadienne de la relance économique, ou PCRE, a un caractère d’urgence, d’un point de vue politique; c’est ce que je répondrais.
La sénatrice Frum : D’accord. Je comprends. Vous êtes aussi le seul témoin à qui je peux poser des questions, mais merci beaucoup.
Le sénateur R. Black : Je viens d’une région rurale, et ma question à notre témoin porte justement là-dessus. Pouvez-vous nous dire si les travailleurs autonomes et les petites entreprises familiales ont eu des difficultés, peu importe lesquelles, à accéder aux mesures liées au chômage et aux prestations de la relance? Comme je le dis, je m’intéresse particulièrement à l’accès à la PCRE des travailleurs autonomes canadiens qui vivent dans les collectivités rurales, éloignées et du Nord, où les occasions d’emploi sont souvent rares et où il y a beaucoup d’exploitations agricoles familiales qui embauchent des travailleurs étrangers temporaires. Pouvez-vous formuler des commentaires là-dessus, s’il vous plaît?
Mme Demers : La Prestation canadienne de la relance économique est offerte à tous les travailleurs et travailleurs autonomes qui ont perdu plus de 50 % de leurs heures de travail en comparaison avec ce qu’ils faisaient auparavant par semaine. Elle répond effectivement aux besoins des employés et des travailleurs autonomes qui sont touchés par la COVID et qui ne sont pas admissibles aux prestations d’assurance-emploi. Elle offre un large éventail de mesures de soutien, comme l’accès aux mesures d’assurance-emploi temporaires — ce dont nous allons parler un peu plus tard —, à ceux et celles qui ne sont pas admissibles à la Prestation canadienne de la relance économique, et ce, dans toutes les régions du Canada.
Le sénateur R. Black : Y a-t-il des différences au niveau de l’accès entre les collectivités rurales et urbaines? Savez-vous s’il y a des gens qui ont dit qu’ils étaient préoccupés par l’accès dans les collectivités rurales, éloignées et du Nord?
Mme Demers : L’accès devrait être le même partout. Les règles sont les mêmes d’un bout à l’autre du Canada. Quant à la prestation de services et aux activités qui y sont liées, je ne pourrais pas vous en parler précisément, en particulier si vous pensiez à des cas précis. Pour ce qui est de la politique et de son application, l’offre est la même pour tous les Canadiens et toutes les Canadiennes, qu’ils vivent en région urbaine, en région rurale ou en région éloignée.
Le sénateur R. Black : Merci beaucoup. Deuxièmement, nous avons entendu parler des problèmes liés aux demandes frauduleuses de prestations de relance. Nous savons maintenant qu’il y en a eu. A-t-on fait quoi que ce soit pour empêcher que d’autres demandes frauduleuses soient acceptées et pour s’assurer que ce sont les Canadiens et les Canadiennes qui ont vraiment besoin de soutien qui y ont accès?
Mme Demers : Je vais peut-être devoir m’informer auprès de mes collègues pour vous répondre. Je ne sais pas si les bonnes personnes sont avec nous aujourd’hui pour vous parler des mesures d’intégrité. Est-ce que nous pouvons prendre vos questions en note?
Le sénateur R. Black : Aucun problème. Merci.
J’ai une question très courte. Selon quel raisonnement passe-t-on de 500 à 300 $ à un certain moment? Pourquoi un montant différent? Pourquoi un changement?
Mme Demers : Une chose très importante qu’il faut garder à l’esprit est que, tout d’abord, ces prestations sont offertes jusqu’en septembre. La prolongation proposée va permettre à ceux et celles qui ont épuisé toutes leurs semaines de continuer de recevoir du soutien. Il faut donc prendre cela en considération. On offre 12 semaines de plus de soutien au revenu supplémentaire, à raison de 500 $ par semaine comme d’habitude pendant 4 semaines. Puis, nous allons offrir pour les huit autres semaines un remplacement partiel du revenu, à mesure que l’économie continue de se redresser et pour soutenir les travailleurs, qui vont continuer de recevoir un remplacement du revenu pendant qu’ils cherchent du travail.
Le sénateur R. Black : Merci beaucoup d’avoir répondu.
La sénatrice Moodie : Madame Demers, merci d’être avec nous aujourd’hui. Je voulais vous demander quel impact particulier les changements de la section 35 du projet de loi C-30 proposés auront sur divers groupes de population. Je pense aux Autochtones, aux personnes handicapées et aux Canadiens et Canadiennes racialisés.
Mme Demers : Merci de votre question. Je peux dire que nous avons recueilli des données sur l’utilisation de la Prestation canadienne de la relance économique, par exemple par les travailleurs et les travailleuses, et que c’est équivalent.
Pour ce qui est de la Prestation canadienne de la relance économique pour proches aidants, nous savons qu’elle profite beaucoup plus aux femmes qu’aux hommes, et nous savons pourquoi. Pour toutes les autres prestations, c’est équivalent, mais, pour la prestation pour proches aidants, ce sont surtout les femmes qui l’utilisent, et nous nous attendons à ce que cette tendance se maintienne.
Je vais devoir m’informer auprès de mes collègues qui recueillent cette information, si vous voulez une ventilation plus détaillée par groupe démographique.
La sénatrice Moodie : J’aimerais vous demander plus d’information à propos des données, si cela ne vous dérange pas, madame Demers. Si je comprends bien ce que vous dites, vous n’avez très probablement pas déjà recueilli de données ventilées sur les personnes qui reçoivent la Prestation canadienne de la relance économique pour proches aidants. Quelles données va-t-on recueillir, si ces amendements sont adoptés, pour déterminer si les changements ont un impact disproportionnel sur certaines populations spécifiques? Est-ce que vous avez des données? Dans la négative, quels changements envisagez-vous d’apporter par rapport à la collecte de données?
Mme Demers : Je crois que nous recueillons tout un éventail de données démographiques, par exemple sur le sexe, l’âge et la distribution géographique. Je vais devoir vérifier pour vous donner plus d’information.
La sénatrice Moodie : Je m’intéresse surtout aux Autochtones, aux personnes handicapées et aux Canadiens et Canadiennes racialisés. Merci.
La présidente : Madame Demers, nous allons communiquer avec vous pour obtenir ces données spécifiques.
[Français]
La sénatrice Forest-Niesing : Madame Demers, merci beaucoup d’être avec nous et de répondre à nos questions, particulièrement sans l’aide des gens qui devaient être là pour vous appuyer.
En lisant les mesures proposées pour venir en aide aux travailleurs n’ayant pas droit à l’assurance-emploi et aux aidants naturels, je me suis fait la réflexion que le tout est devenu d’une grande complexité, et ce, malgré des débuts très prometteurs quant à la simplicité des prestations d’urgence offertes aux Canadiens en ces temps difficiles, particulièrement au début de la pandémie. Cette complexité m’amène à vous poser deux questions.
Quel est le coût de l’administration de ce programme, y compris les variations ayant trait à la fonction publique?
De plus, à votre connaissance, est-ce que le gouvernement travaille à l’élaboration d’une proposition visant à établir un salaire minimum garanti? Cela représenterait une option plus facile à gérer à long terme, afin d’éliminer les incertitudes vécues par les Canadiens les plus vulnérables du pays. Sinon, ces derniers doivent attendre des décisions gouvernementales chaque fois que la limite des prestations d’urgence est sur le point d’être franchie.
Si la réponse est non, selon vous, qu’est-ce qui empêche le gouvernement d’entreprendre une telle démarche, particulièrement à la lueur des nombreuses requêtes qui viennent de toutes parts, comme celle du Comité sénatorial permanent des finances nationales?
Mme Demers : Je vous remercie de votre question. Je vais commencer par répondre à votre question sur les coûts. Les coûts estimés pour les semaines supplémentaires de prestations sont de 2,5 milliards de dollars et sont échelonnés sur une période de deux ans.
En ce qui concerne l’examen des besoins à plus long terme, donc la situation du marché du travail pour les travailleurs et les mesures de soutien au revenu, cela s’effectue par le ministère et par la direction générale en collaboration avec les provinces et les territoires, compte tenu de la séparation des responsabilités.
C’est un travail de longue haleine qui prendra de l’ampleur. Il va s’accélérer dans le contexte de ce qui a été annoncé dans le budget, avec les consultations sur l’assurance-emploi. Donc, je ne parle pas spécifiquement d’un salaire minimum garanti, parce que c’est une question qui va bien au-delà, mais plutôt de la question du soutien au revenu des travailleurs qui vivent différentes circonstances.
Comment peut-on s’assurer que nos programmes d’aide aux travailleurs soient bien liés aux réalités du marché du travail et de ces travailleurs? On a annoncé qu’il y aura des consultations pour trouver des méthodes pour améliorer nos programmes.
La sénatrice Forest-Niesing : Pour ce qui est des améliorations apportées, est-ce que vous vous souciez de la complexité du processus et du besoin de le rendre moins complexe?
Mme Demers : Cela fait partie des enjeux que l’on doit examiner. Nous allons apporter des améliorations en tout point, c’est-à-dire non seulement en ce qui a trait à la manière dont le programme est défini, mais aussi aux façons d’en faciliter l’accès, d’apporter des précisions et d’assurer que l’information se rende aux populations qui sont visées par ces programmes et ces prestations.
La sénatrice Forest-Niesing : Merci, madame Demers.
[Traduction]
La sénatrice Omidvar : Avant de poser ma question, j’aimerais dire que les séances n’ont commencé que depuis deux jours, mais déjà, il est clair que la question des données est un point faible. Je crois que c’est une observation que nous allons faire.
Ma question s’adresse à Mme Moran, et c’est à propos de l’accès à la PCU, qui est devenu un pilier de la résilience économique de notre pays. Selon l’ombudsman des contribuables canadiens, M. François Boileau, il arrive que des personnes attendent pendant plus d’un mois leurs prestations de la PCU, le temps que l’ARC confirme qu’elles sont admissibles. Vous prolongez le programme et vous l’élargissez, mais j’aimerais savoir ce que vous faites pour vous assurer que les Canadiens et les Canadiennes reçoivent leurs prestations en temps opportun.
Mme Demers : Merci de la question. Je ne sais pas si certains de mes collègues de Service Canada sont avec nous; il n’y a pas de représentant de l’Agence du revenu du Canada, responsable de la Prestation canadienne de la relance économique. Peut-être qu’il y a en ligne d’autres de mes collègues qui pourraient répondre aux questions sur la prestation de services.
La sénatrice Omidvar : Ou peut-être que vous pourriez envoyer plus tard votre réponse par écrit au comité.
Mme Demers : Absolument.
La sénatrice Omidvar : Puis-je vous poser ma prochaine question?
La présidente : Absolument.
La sénatrice Omidvar : Ma prochaine question concerne la Prestation canadienne de la relance économique pour proches aidants. Pas plus tard que le mois dernier, le Financial Post a rapporté que moins de la moitié des fonds avait été utilisée par les Canadiens, et je ne comprends pas pourquoi, en particulier compte tenu de la fermeture des écoles. Maintenant, nous allons prolonger cette prestation, et je crois que c’est une bonne idée, mais pourriez-vous me dire pourquoi, selon vous, la participation au programme n’a pas été aussi forte que prévu?
Mme Demers : Nous surveillons le taux de participation. Je dois dire que les estimations du taux de participation, au début, ce n’était que cela : des estimations. Le travail a été fait très tôt à l’automne, alors que nous ne savions pas exactement comment la pandémie allait évoluer et quels seraient vraiment les besoins. C’était réellement une évaluation du maximum ou de la limite supérieure. Nous devions évaluer comment la situation pouvait évoluer. Nous constatons que les gens continuent d’utiliser et de demander la Prestation canadienne de la relance économique pour proches aidants. Si vous aimeriez avoir une meilleure explication sur ce que nous avons observé au cours des derniers mois, quant à l’évolution de la situation, et sur ce que cela révèle par rapport à l’utilisation, nous pouvons certainement vous envoyer une réponse plus tard.
La sénatrice Omidvar : Je vous en serais reconnaissante. Merci.
La sénatrice Dasko : Merci aux témoins d’être avec nous aujourd’hui. J’aimerais seulement poser une question pour obtenir des éclaircissements sur la PCREPA. Je comprends qu’elle vise les personnes qui ne sont pas admissibles à l’assurance-emploi. Je me demande si vous pouviez clarifier quelque chose pour moi. La prestation comble-t-elle les écarts qui ne sont pas couverts par les congés de soignant au titre de l’assurance-emploi? Je crois savoir que les congés de soignant sont toujours un volet du programme d’assurance-emploi. Pouvez-vous me dire s’il y a un chevauchement ou un recoupement entre la prestation dont nous parlons présentement — et qui sera modifiée — et les congés de soignant au titre de l’assurance-emploi?
Mme Demers : Merci de votre question. Je vais demander à mon collègue, M. Benoit Cadieux, d’expliquer la différence entre le volet de l’assurance-emploi et cette mesure précise liée à la COVID, parce que la prestation pour proches aidants a évidemment pour but très direct de répondre aux besoins des gens qui ne peuvent plus travailler en raison de la COVID.
La sénatrice Dasko : Il y a autre chose que je vous demanderais de préciser : les congés de soignant au titre de l’assurance-emploi sont-ils utilisés aussi en réaction à la COVID, ou est-ce strictement quelque chose qui s’applique à des situations en dehors de la COVID? Merci. C’est une question complémentaire que je voulais poser.
Mme Demers : Merci. La réponse est non, mais je vais laisser M. Cadieux vous donner une réponse plus complète.
La sénatrice Dasko : Merci.
Benoit Cadieux, directeur, Direction générale des compétences et de l’emploi, Emploi et Développement social Canada : Merci de la question, madame la sénatrice. Les prestations de compassion et les prestations pour proches aidants de l’assurance-emploi ont pour but de fournir du soutien aux personnes qui doivent prendre soin de quelqu’un qui est gravement malade ou qui risque de mourir dans un certain nombre de semaines. Ce sont des prestations très ciblées. Elles ne sont pas censées être offertes pour fournir des soins aux gens malades, par exemple aux gens qui sont atteints de la COVID, à moins qu’ils n’en soient gravement malades. Dans ce cas, les prestations pourraient être offertes.
La Prestation canadienne de la relance économique pour proches aidants est beaucoup plus vaste. Elle s’applique aux cas où, par exemple, l’école de votre enfant est fermée, ce qui veut dire qu’il doit rester à la maison et que vous devez en prendre soin. C’est une prestation beaucoup plus large. Elle est essentiellement utilisée pour couvrir les situations qui ne sont habituellement pas visées par le programme d’assurance-emploi, lorsqu’un travailleur doit rester à la maison pour prendre soin d’un enfant ou d’un membre de la famille parce que les établissements qu’ils fréquentent ne sont pas accessibles.
La sénatrice Dasko : Merci. Y a-t-il des gens qui utilisent le programme de congé de compassion en lien avec la COVID? Est-ce que cela arrive aussi? D’après ce que je sais, les gens ne peuvent pas accéder aux deux programmes.
M. Cadieux : C’est exact. Vous ne pouvez pas recevoir la Prestation canadienne de la relance économique pour proches aidants et des prestations d’assurance-emploi en même temps.
Nous n’avons pas d’information sur la cause de la maladie ou la raison pour laquelle une personne a accès aux prestations de compassion ou aux prestations pour proches aidants de l’assurance-emploi. Nous ne recueillons pas de données là-dessus.
La sénatrice Dasko : Merci. Vous avez répondu à ma question.
La présidente : Chers collègues, Mme Mona Nandy a réussi à se connecter. Je vais conserver l’ordre des questions que je vois à l’écran, mais je veux que nous puissions d’abord l’écouter, au cas où il y aurait d’autres problèmes. Nous allons prendre un moment, et Mme Nandy va présenter sa déclaration préliminaire sur la section 36.
Mona Nandy, directrice générale, Direction générale des compétences et de l’emploi, Emploi et Développement social Canada : Bonjour. Je suis sincèrement désolée de mon retard, j’ai eu de la difficulté à me connecter à la séance aujourd’hui. C’était un cauchemar technologique.
Merci de m’avoir invitée à vous parler aujourd’hui.
Mon but aujourd’hui est de vous présenter la section 36 de la loi d’exécution du budget, laquelle comprend des amendements à la Loi sur l’assurance-emploi visant à mettre en œuvre une longue série d’amendements pour donner suite aux annonces du budget de 2021.
Compte tenu du grand nombre d’amendements, je propose de vous en parler selon quatre catégories. La première catégorie serait les amendements visant à conserver un accès flexible aux prestations d’assurance-emploi pour une période d’un an, alors que le marché du travail continue de se redresser après les retombées de la pandémie de COVID-19.
La deuxième catégorie d’amendements vise à prolonger les mesures temporaires de l’assurance-emploi qui expireraient autrement en septembre 2021 pour les prestataires saisonniers et les pêcheurs.
La troisième viserait à maintenir les mesures de soutien à la formation et les mesures d’intégrité liées à la prestation d’assurance-emploi d’urgence.
La dernière catégorie d’amendements proposés de la Loi sur l’assurance-emploi rendrait permanents les changements visant à améliorer les prestations de maladie de l’assurance-emploi.
Sénatrice Petitclerc, aimeriez-vous que je continue de parler de ces amendements ou est-ce que cet aperçu va suffire?
La présidente : Je crois que nous devrions passer aux questions, compte tenu du peu de temps que nous avons et du fait que nous devons parfois nous arrêter à cause de la vidéoconférence. Je sais que mes collègues ont des questions à vous poser et aussi d’autres questions sur la section 35. Je suggérerais donc de poursuivre les questions, à moins que mes collègues ne soient pas d’accord. Je crois que ce serait la meilleure façon d’utiliser notre temps.
Le sénateur Manning : Merci à nos témoins de ce matin. Cela tombe à point, parce que ma question portait justement sur l’accès à l’assurance-emploi pour les travailleurs saisonniers et les pêcheurs. Je crois que c’est la deuxième catégorie dont notre témoin a parlé plus tôt, dans ses commentaires.
L’année dernière, je crois savoir que, quand une personne travaillant dans une industrie saisonnière n’avait pas accumulé assez d’heures pour être admissible à l’assurance-emploi — comme 150 heures ou peu importe le nombre —, on lui reconnaissait 300 heures pour qu’elle soit admissible. D’après ce que je comprends, selon l’information qui circule, cela est prolongé jusqu’en septembre de cette année, pour les gens qui présenteront une demande d’ici septembre. Je ne sais pas si cela veut dire le 1er septembre ou la fin du mois de septembre. J’aimerais avoir plus de précisions sur ces 300 heures.
Beaucoup de gens ont communiqué avec moi au cours du dernier mois, parce qu’ils s’inquiétaient à propos des activités de cet été dans le domaine du tourisme, des pêches, et cetera. Ils sont préoccupés par la possibilité que la saison de cette année ressemble à la saison 2020.
Je ne sais pas si j’ai bien posé ma question, mais peut-être que nous pourrions commencer la discussion et ainsi trouver quelques réponses.
Mme Nandy : Merci, monsieur le sénateur. C’est une excellente question. Vous avez raison. Nous avons introduit un crédit ponctuel de 300 heures, en septembre 2020, et son expiration est prévue le 25 septembre 2021. Ces crédits s’appliquent à tous ceux qui veulent accéder aux prestations régulières, y compris les travailleurs saisonniers. Cela étant dit, ce qui est proposé, dans les amendements à la Loi sur l’assurance-emploi, c’est un ensemble de changements qui amélioreraient réellement l’accès aux prestations régulières et spéciales pour les travailleurs, y compris les travailleurs saisonniers; cela améliorerait aussi l’accès à l’assurance-emploi pour les pêcheurs.
Peut-être que je pourrais fournir plus de détails pour aider à répondre à votre question. Ces mesures réduiraient le nombre d’heures d’emploi assurable requis pour être admissible aux prestations régulières de l’assurance-emploi, passant de ce qui était, avant la COVID, un seul variable de 420 à 700 heures, selon le taux de chômage régional, à ce qui devrait être, après la sanction royale, une nouvelle exigence d’admissibilité à l’échelle nationale d’un minimum de 420 heures d’emploi assurable. Les personnes qui reçoivent des prestations régulières de l’assurance-emploi auraient aussi droit à 14 semaines de prestations au minimum, et cela s’appliquerait aussi aux travailleurs saisonniers qui sont admissibles et aux pêcheurs admissibles à l’assurance-emploi.
Actuellement, une autre mesure temporaire introduite en septembre 2020 a été l’uniformisation du taux de chômage de 13,1 % à l’échelle du pays. Le taux de chômage minimum cessera d’être appliqué à compter du 11 septembre, mais nous proposons, dans ces amendements, de le prolonger de deux semaines afin que les prestataires de l’assurance-emploi ne soient pas à nouveau exposés à cette variabilité — de 420 à 700 heures — pendant la période de deux semaines jusqu’au 26 septembre, quand la nouvelle exigence nationale d’admissibilité de 420 heures va entrer en vigueur. Ainsi, la transition vers ces nouveaux changements temporaires sera fluide.
J’ajouterais aussi que cette exigence nationale d’admissibilité de 420 heures s’applique non seulement aux prestations régulières de l’assurance-emploi, mais aussi aux prestations spéciales de l’assurance-emploi, pour fournir un accès plus souple. Donc, avec ces changements, nous éliminons — ou nous proposons d’éliminer — la distinction temporairement, dans la loi, entre les prestataires de la première et de la deuxième catégories. Donc, les prestataires admissibles à l’assurance-emploi qui ont accumulé au moins 420 heures d’emploi assurable auront accès aux prestations spéciales. Présentement, la façon dont la loi est formulée crée une distinction entre les prestataires de la deuxième et de la première catégories, c’est-à-dire entre ceux qui ont accumulé plus ou moins de 600 heures. Cela ne sera plus nécessaire une fois que nous aurons mis en œuvre un critère d’admissibilité uniforme de 420 heures.
Comme je l’ai dit, ces changements profiteront aux travailleurs saisonniers et aux pêcheurs qui touchent l’assurance-emploi, parce que nous apportons des réductions correspondantes aux exigences en matière de revenu pour les travailleurs autonomes qui ont choisi d’accéder aux prestations spéciales d’assurance-emploi, puis des réductions équivalentes aux seuils de revenu pour les pêcheurs qui touchent l’assurance-emploi au moyen des modifications proposées au Règlement sur l’assurance-emploi qui s’inscrivent dans la LFI.
Le sénateur Manning : Par rapport au crédit de 300 heures, c’est une utilisation unique. Est-ce offert aux travailleurs saisonniers cet été, s’ils ne s’en ont pas déjà prévalu, et quelle serait la date limite?
Mme Nandy : Le crédit va expirer. C’est un crédit ponctuel, comme vous l’avez dit, mais toutes les mesures temporaires qui ont été introduites en septembre 2020 viendront à échéance le 25 septembre 2021.
Le sénateur Manning : D’accord.
[Français]
La sénatrice Mégie : Monsieur Cadieux, j’ai l’impression d’avoir mal compris votre réponse à la sénatrice Dasko par rapport à la Prestation canadienne de la relance économique pour proches aidants. Pouvez-vous faire la distinction entre la Prestation canadienne de la relance économique pour proches aidants liée à la COVID-19 ou autre et les prestations pour les proches aidants en ce qui concerne ce qu’on appelait le « congé de compassion » par le passé? Est-ce que cela affecte cette portion du « congé de compassion » pour les proches qui s’occupent de parents souffrant d’une maladie chronique, d’un handicap physique ou mental ou d’un autre problème chronique? Pouvez-vous faire la distinction, s’il vous plaît?
M. Cadieux : Oui, absolument. Merci pour votre question, madame la sénatrice. Comme je l’ai mentionné à la sénatrice Dasko, la distinction est que la prestation pour proches aidants offerte conformément au programme de l’assurance-emploi vise ceux qui doivent prendre soin d’une personne qui est gravement malade ou qui risque de mourir dans les prochaines semaines. Elle vise donc à permettre aux familles d’être présentes et de prendre soin d’une personne gravement malade, et son objectif est très précis.
En ce qui concerne la Prestation canadienne de la relance économique pour proches aidants, elle est beaucoup plus large. Cette prestation permet aux parents et aux familles de rester à la maison et de ne pas travailler s’ils doivent s’occuper d’un enfant ou d’un autre membre de la famille qui, en raison de la pandémie de COVID-19, doit rester à la maison alors que cette personne serait habituellement à l’école ou à l’extérieur de la maison.
La sénatrice Mégie : Merci. Madame la présidente, puis-je poser une question à Mme Nandy, s’il vous plaît?
La présidente : Très rapidement, s’il vous plaît.
La sénatrice Mégie : Madame Nandy, est-ce que votre équipe a déjà évalué les coûts de tous ces changements à l’assurance-emploi pour les petites entreprises?
Mme Nandy : Je vous remercie de la question, sénatrice Mégie. Je devrai communiquer avec mon équipe pour faire des vérifications. Je sais que nous avons fait une estimation des coûts, mais je ne sais pas à combien ils s’élèvent, particulièrement pour les petites entreprises, comme vous l’avez mentionné.
La sénatrice Mégie : Pouvez-vous nous envoyer cela par écrit si votre équipe n’est pas complète à l’heure actuelle?
La présidente : Absolument, sénatrice Mégie. Nous allons nous assurer de faire le suivi et d’avoir cette réponse pour tous les sénateurs.
[Traduction]
Nous avons presque terminé la période pour le premier groupe d’intervenants. Madame la sénatrice Omidvar, vous aviez la main levée, et maintenant je ne la vois plus. Faites-nous savoir si vous voulez poser une question.
Je vous demande votre coopération pour poser une question très rapide avec un préambule limité, puis nous pourrons nous préparer pour le prochain groupe d’intervenants.
La sénatrice Frum : J’ai une question pour Mme Demers. En réponse à une question, vous avez dit que le coût associé aux mesures prévues à l’article 35 s’élève à 2,5 milliards de dollars sur deux ans. Toutefois, lorsque le programme a commencé, on avait estimé ce coût à 6 milliards de dollars. En mars de cette année, le coût avait atteint 11 milliards de dollars, soit presque le double. Dans quelle mesure êtes-vous certaine de votre estimation actuelle de 2,5 milliards de dollars sur deux ans?
Mme Demers : Merci, madame la sénatrice. L’estimation que nous utilisons combine un certain nombre de facteurs afin d’examiner des modèles d’utilisation aujourd’hui et le contexte économique actuel, donc les données de l’Enquête sur la population active et les données sur le chômage. Ce sont des estimations qui sont toujours inconnues pour ce qui est du retour éventuel plus rapide sur le marché du travail avec la reprise de l’économie ou d’autres fermetures ou confinements. Nous surveillons ces changements et voyons comment ils influencent nos taux de participation qui se répercutent ensuite sur nos estimations de coût.
[Français]
La sénatrice Forest-Niesing : Ma question s’adresse à Mme Demers et porte encore une fois sur les coûts. En répondant à ma question tout à l’heure, et vous venez aussi tout juste d’en parler, vous avez abordé le sujet des coûts associés à l’ensemble de ce programme. Ce qui m’intéresse plus particulièrement, c’est de connaître les coûts associés à la gestion de ce programme. Si vous pouviez nous les fournir par écrit à la suite de la réunion d’aujourd’hui, ce serait fort apprécié.
La présidente : Merci, beaucoup sénatrice. Je pense que c’est possible de faire ce suivi, n’est-ce pas, madame Demers?
Mme Demers : Nous allons faire le suivi, oui.
[Traduction]
La sénatrice Griffin : L’Île-du-Prince-Édouard n’a une population que d’environ 160 000 personnes en temps normal. En 2014, on est passé de une zone d’assurance-emploi à deux. Même le gouvernement provincial demande depuis ce moment qu’on retourne à une zone.
Si la LFI est adoptée avec deux zones, pouvez-vous confirmer pour moi qu’une loi fédérale serait maintenant nécessaire pour retourner à une zone? Comment cela joue-t-il dans les consultations sur les zones d’assurance-emploi qui sont prévues?
Mme Nandy : Bonjour, sénatrice Griffin. Merci d’avoir posé la question. Il faudrait que la réglementation change les zones d’assurance-emploi ou les régions d’assurance-emploi qui sont mentionnées dans le Règlement sur l’assurance-emploi précisément. Ce ne serait pas une loi fédérale qui serait exigée dans ce cas-là.
Pour ce qui est de la deuxième partie de votre question sur les consultations, comme il a été annoncé dans le budget de 2021, en plus des mesures temporaires visant à faciliter l’accès à l’assurance-emploi, on a prévu une série de consultations ciblées, y compris auprès des travailleurs dans des industries saisonnières. Dans le cadre de ces conversations, il pourrait y avoir des discussions sur les régions de l’ensemble du pays où ces travailleurs saisonniers travaillent.
La présidente : Merci.
La sénatrice Dasko : Ma question est assez brève. C’est seulement un éclaircissement sur les changements apportés au Code canadien du travail en ce qui concerne le congé pour raisons médicales.
Qui est visé par ce programme de congé? Sont-ils des travailleurs visés par l’assurance-emploi ou non? Travaillent-ils juste dans les industries réglementées par le gouvernement fédéral ou ailleurs?
Quel rapport cela a-t-il, le cas échéant, avec le débat qui se tient à l’échelon provincial concernant les jours de maladie et le fait que les provinces mettent en œuvre ou non des jours de maladie? Je vais m’arrêter ici, ce n’est qu’un éclaircissement qui concerne particulièrement les changements à la section 36.
Barbara Moran, directrice générale, Programme du travail, Emploi et Développement social Canada : Merci, madame la sénatrice. Je serais heureuse de répondre à la question. Pour ce qui est de savoir à qui cela s’applique, c’est pour les personnes qui se trouvent dans les administrations assujetties à la réglementation fédérale, donc les transports, les télécommunications et ainsi de suite. La mesure vise à prolonger le congé pour raisons médicales non payé disponible afin que les employés profitent de l’assurance-emploi, s’ils y sont admissibles.
Par rapport à votre question sur le débat qui a cours en ce moment, c’est principalement centré sur le congé de maladie payé, qui est une question différente. Il s’agit du congé pour raisons médicales non payé pour lequel une prestation est en place s’ils y sont admissibles.
En vertu du Code canadien du travail, nous avons une autre disposition sur les congés, une disposition sur le congé personnel. Si un employé a travaillé plus de trois mois auprès du même employeur, les trois premiers jours de ce congé peuvent lui être payés. Encore une fois, cela dépend de la province. Toutes les provinces ont un certain type de congé pour raisons médicales non payé, et il semblerait maintenant qu’un certain nombre d’entre elles commencent à proposer un nombre limité de congés pour raisons médicales payés, parfois liés à la COVID.
La sénatrice Dasko : Merci.
La sénatrice Omidvar : J’ai été expulsée pendant un certain moment, donc si ma question a été posée, n’hésitez pas à dire qu’elle a été posée et qu’on y a répondu, et nous pouvons gagner du temps.
J’ai une question précise et une question générale. La question précise est la suivante : avec ces prolongations de l’assurance-emploi, y a-t-il des coûts additionnels pour les petites entreprises, ou les primes sont-elles toujours gelées et le demeureront?
Mme Nandy : Les primes sont gelées jusqu’en 2023. Cela a été établi. Pour ce qui est des coûts futurs, je pense que la sénatrice Mégie a posé une question à laquelle nous avons convenu de fournir un certain type de suivi sur la référence particulière aux coûts pour les petites entreprises.
La sénatrice Omidvar : Merci. Mon autre question est plutôt tournée vers l’avenir. Le gouvernement a annoncé une commission fédérale sur l’assurance-emploi pour examiner le vaste casse-tête que l’assurance-emploi est devenue, vu les régions et les heures d’admissibilité ainsi que les caractéristiques relatives à l’inadmissibilité, et cetera. Quand la commission fédérale devrait-elle commencer son travail? Et dans le cadre de ses délibérations, examinera-t-elle la nouvelle économie, tout particulièrement les travailleurs à la demande?
Mme Nandy : Madame Omidvar, merci de poser la question. Comme je le disais plus tôt, on fait référence à des consultations et à la nécessité de tenir des discussions avec les Canadiens afin de guider les réformes à long terme futures du régime d’assurance-emploi en vue d’en faire un régime d’assurance-emploi pour le XXIe siècle. Un des sujets précis de ces consultations ciblées mentionnées dans le budget serait, en fait, d’explorer la possibilité d’une prestation pour les travailleurs autonomes et les travailleurs à la demande.
La sénatrice Omidvar : Avez-vous des délais que vous pouvez nous fournir quant à savoir à quel moment la commission commencera son travail?
Mme Nandy : Les consultations, le plan et les dates sont toujours en cours d’élaboration. Nous sommes toujours dans les premiers jours, car nous venons d’avoir le budget. Nous sommes en train de réfléchir d’une certaine façon au moment approprié pour ces choses. Non, en ce moment, je n’ai pas précisément de dates à vous communiquer.
La sénatrice Omidvar : Merci.
La présidente : Je remercie nos témoins. Les choses ont été un peu difficiles ce matin. Si vous aimeriez ajouter quelque chose à votre témoignage, vous pouvez le faire par écrit, et, bien sûr, nous ferons le suivi avec certaines des questions précises.
Je crois que la sénatrice Griffin avait d’autres questions. Si c’est le cas, je lui demanderais de les envoyer par écrit, et je suis sûre que nos témoins accepteront de bonne grâce de répondre à ces questions particulières, car nous devons passer à notre prochain groupe d’intervenants.
[Français]
Nous poursuivons avec notre deuxième groupe de témoins, avec lesquels nous étudierons également les sections 35 et 36 du projet de loi C-30.
Nos témoins pour le moment sont M. Pierre Céré, porte-parole, Conseil national des chômeurs et chômeuses, ainsi que Mme Kelly Masotti, vice-présidente, Défense de l’intérêt public, et M. Stephen Piazza, gestionnaire principal, Défense de l’intérêt public, de la Société canadienne du cancer.
Sans plus tarder, j’invite M. Céré à faire sa déclaration. Il sera suivi par Mme Masotti.
Pierre Céré, porte-parole, Conseil national des chômeurs et chômeuses : Honorables sénatrices et sénateurs, merci de votre invitation.
Nous savons toutes et tous que, depuis le printemps 2020, la crise sanitaire s’est doublée d’une crise économique, sans mesure commune avec tout ce que nous avons connu de notre vivant jusqu’à maintenant.
Entre la mi-mars et la fin septembre 2020, environ 9 millions de personnes ont perdu leur emploi, soit 45 % de la population active. En moyenne, 9 millions de personnes ont perçu pendant trois mois la Prestation canadienne d’urgence (PCU), remplacée par la suite par la Prestation canadienne de la relance économique (PCRE). À la fin septembre 2020, on a remis sur les rails le régime d’assurance-emploi en adoptant des mesures majeures d’assouplissement s’apparentant à une véritable réforme du programme d’assurance-emploi. Cette réforme est toutefois temporaire.
Si l’on veut se faire une idée claire et exempte de préjugés pour connaître les réalités du monde du travail, on regarde la caisse d’assurance-emploi. Du 27 septembre 2020 au 2 mai 2021, donc au cours d’une période de sept mois, plus de 4 millions de demandes d’assurance-emploi ont été traitées. Il y a actuellement 2,3 millions de bénéficiaires. Du côté de la PCRE, les trois types de prestations totalisent, depuis le 27 septembre dernier, 2,8 millions de bénéficiaires.
Une récente étude du Fonds monétaire international propose d’« éviter un retrait prématuré » des programmes de soutien, tout en soulignant que « les leçons de la crise représentent une excellente occasion de revoir le système d’assurance-emploi », y compris son rôle stabilisateur. J’ajouterais que le FMI a raison.
Par contre, les objectifs de la Loi d’exécution du budget ne vont pas pleinement dans ce sens. En effet, à la section 35, les mesures de prolongement de la PCRE prévoient que les huit dernières semaines, ou celles qui sont accumulées depuis le 18 juillet 2021, seront réduites à 300 $ par semaine, et qu’au mieux la date butoir du 25 septembre pourrait être prolongée jusqu’au 20 novembre 2021. Je vous pose la question : le Sénat a-t-il le pouvoir d’amender ce projet de loi d’exécution du budget et d’uniformiser les prestations à 500 $, pour ainsi se placer au-dessus des intérêts partisans et des petits jeux politiques?
En ce qui concerne l’assurance-emploi, la section 36 du projet de loi est très complexe. On met en place des mesures d’amélioration temporaires pour un an, soit pour 2021-2022, pour ensuite revenir au statu quo en 2022.
Nous saluons certaines mesures temporaires, comme la mise en place d’un critère unique d’admissibilité pour l’ensemble canadien à 420 heures; le fait que les sanctions rattachées aux raisons de la cessation d’emploi ne tiennent compte que du seul dernier emploi; que des rémunérations de cessation d’emploi n’aient pas de répercussions sur les prestations de chômage; que les travailleurs saisonniers de 13 régions administratives du Canada puissent bénéficier d’un supplément de cinq semaines de prestations.
Par contre, il y a deux angles morts dans ces mesures : pour le calcul du taux de prestations, on revient sans détour au statu quo, avec un dénominateur variable fixé par le taux de chômage. Quant à la période de prestations, c’est, tout compte fait, déjà le retour au statu quo et à des périodes de prestations trop courtes. Ces angles morts auraient dû être évités, par exemple, par des mesures temporaires établissant un dénominateur fixe de 14 jours et une période de prestations universelle de 50 semaines, comme ce qui existe actuellement.
En agissant ainsi, le gouvernement n’aide pas les régions de la même manière. Il va même pénaliser certaines régions, alors que la pandémie, elle, touche tout le Canada.
Enfin, augmenter les prestations de maladie de 15 à 26 semaines est un geste porteur et historique, mais pourquoi retarder leur mise en place au mois d’août 2022? Si c’est en raison du système informatique, ce dernier a le dos large.
Le gouvernement repousse son projet de réformer le programme d’assurance-emploi. Qu’à cela ne tienne! En attendant, il faut donc des mesures temporaires à la hauteur des besoins. Les angles morts et les failles doivent être corrigés prestement, comme cela a été le cas l’an dernier avec la PCU. Quant à la commission qui sera nommée pour évaluer ce programme et faire des recommandations, elle doit travailler pendant une période d’un an, et non deux ans.
Historiquement, le Canada a été un architecte de grandes réalisations sur le plan international, par exemple la Déclaration universelle des droits de l’homme et bien d’autres réalisations, tout comme sur le plan intérieur, comme le régime d’assurance-maladie et nombre d’autres réalisations.
Le filet social est d’une importance capitale pour faire face au chômage et aux crises. Il faut agir en conséquence.
Le Sénat est un lieu idéal pour réfléchir avec sagesse aux lois de notre pays. Nous vous invitons à modifier et à amender ce projet de loi d’exécution du budget.
Je vous remercie de votre attention.
La présidente : Merci à vous.
[Traduction]
Kelly Masotti, vice-présidente, Défense de l’intérêt public, Société canadienne du cancer : Merci beaucoup. Bonjour, sénateurs et sénatrices. Je suis accompagnée aujourd’hui de mon collègue, Stephen Piazza. Aujourd’hui, nous sommes heureux de prendre la parole pour appuyer le projet de loi C-30, tout particulièrement la section 36, telle qu’elle est libellée, une prolongation de la prestation de maladie du régime d’assurance-emploi.
La prolongation proposée de la prestation de maladie du régime d’assurance-emploi, qui passerait de 15 à 26 semaines, aura des conséquences positives sur les personnes atteintes du cancer. Nos commentaires porteront sur cette prestation particulièrement, et cette disposition précise, ainsi que sur l’importance qu’elle aura pour la communauté du cancer. Nous encourageons fermement tous les sénateurs à appuyer ce changement important.
La prestation de maladie du régime d’assurance-emploi est demeurée pratiquement inchangée depuis les années 1970. Elle fournit aux employés assurés jusqu’à 15 semaines d’aide financière s’ils sont incapables de travailler pour des raisons médicales, à condition qu’ils y soient admissibles en ayant déjà travaillé plus de 600 heures.
Lorsque les Canadiens font face au cancer, leur lutte est non seulement médicale, mais aussi financière. En plus d’une diminution du revenu, ils sont aussi exposés à une augmentation des dépenses, comme les médicaments, le coût des déplacements médicaux, et les frais de stationnement et de soins à domicile. Le stress associé à ce fardeau financier influe sur leur bien-être émotionnel, et donc, sur leurs besoins psychosociaux.
Nous aimerions vous raconter une histoire que Kathy MacNaughton a écrite à propos de son époux David. Elle dit ceci :
Il ne pouvait plus travailler comme menuisier; quelque chose qui était exceptionnellement difficile pour un homme comme David qui se targuait de pouvoir subvenir aux besoins financiers de sa famille.
Par l’entremise de son employeur, David était admissible à une couverture dans le cadre de la prestation de maladie du régime de l’assurance-emploi. Mais la prestation n’offrait que 15 semaines de couverture, et le traitement du cancer de David dépassait de loin cette période.
Lorsque ses prestations ont été épuisées, il n’avait plus de revenu. Outre le cancer, ce qui préoccupait le plus David était de savoir comment il allait contribuer financièrement.
Pendant que David recevait ses traitements, notre facture d’assurance automobile était due, et nous devions trouver de l’argent pour la payer. Je lui ai dit de ne pas s’inquiéter; nous trouverions une solution.
C’est clair que, pour des gens comme Kathy et beaucoup d’autres Canadiens, le statu quo ne fonctionne tout simplement pas. Étant donné que les Canadiens vivent plus longtemps, qu’ils ont des carrières plus longues, plus de gens sont susceptibles de contracter une maladie s’ils sont sur le marché du travail. Vu que près de un Canadien sur deux devrait développer un cancer dans sa vie et que plus de un million de Canadiens sont atteints d’un cancer ou en ont combattu un, il y a un besoin crucial pour fournir du soutien supplémentaire.
Je vais maintenant céder la parole à mon collègue Stephen afin qu’il poursuive.
Stephen Piazza, gestionnaire principal, Défense de l’intérêt public, Société canadienne du cancer : Une prolongation de la prestation de maladie du régime d’assurance-emploi jusqu’à 26 semaines est un très bon début et aura des répercussions majeures sur la vie des personnes atteintes de cancer. Nous félicitons le gouvernement de faire cet investissement important qui permettra à de nombreux Canadiens de ne pas avoir à choisir entre un chèque de paie et un traitement contre le cancer.
À 26 semaines, la prestation de maladie du régime d’assurance-emploi s’alignera sur les prestations de compassion pour les soignants, qui a été prolongée en 2016. La prolongation est aussi appuyée par l’écrasante majorité de Canadiens d’après nos récentes données de sondage. D’après un sondage mené par la SCC en février 2021, 88 % des Canadiens sont en faveur de la prolongation des prestations de maladie à 26 semaines, qu’elle soit financée par l’employeur ou à même leur chèque de paie. De même, 84 % sont favorables à une prolongation pouvant aller jusqu’à 50 semaines.
Une prolongation à 26 semaines est un très bon début, mais nous aimerions que la prestation soit élargie encore davantage afin de mieux répondre aux besoins de tous les types de cancer. La durée moyenne des traitements contre le cancer et du rétablissement physique pour le cancer du sein, le cancer du côlon et le cancer du rectum, trois des cancers les plus souvent diagnostiqués, dépasse 26 semaines, s’établissant entre 26 et 36, à 37 et à 47 semaines respectivement.
On estime que 77 % des bénéficiaires de prestations de maladie qui épuisent les 15 semaines ne retournent pas immédiatement au travail. Environ les trois quarts de ces bénéficiaires ont pris au moins 26 semaines de congé supplémentaires.
Une autre prolongation voudra dire qu’encore plus de Canadiens pourront profiter de ce soutien important offert par le programme. La Société canadienne du cancer continuera de travailler avec le gouvernement et avec toutes les parties pour miser sur cet investissement sans précédent afin qu’encore plus de gens puissent accéder aux mesures de soutien financier dont elles ont besoin pour réussir à traverser leur période de diagnostic et de traitement.
Merci beaucoup de votre temps et de votre attention. Nous sommes impatients de répondre à vos questions.
[Français]
La présidente : Je remercie les témoins. Nous avons effectivement des questions pour vous. Nous allons commencer par les vice-présidentes, la sénatrice Frum et la sénatrice Bovey; elles seront suivies par le sénateur R. Black. Sénatrice Frum, vous avez la parole pour poser la première question.
[Traduction]
La sénatrice Frum : Ma question s’adresse aux témoins de la Société canadienne du cancer.
Nous savons que le lent programme d’approvisionnement en vaccins du gouvernement et le faible taux de Canadiens entièrement vaccinés ont, à bien des égards, eu les plus lourdes conséquences sur les Canadiens atteints de cancer, particulièrement en raison des arriérés touchant les interventions chirurgicales.
Avez-vous une idée de la mesure dans laquelle la communauté canadienne du cancer a été touchée par la pandémie? Vous attendez-vous à voir une croissance des besoins financiers pour ces programmes?
Mme Masotti : Merci, sénatrice Frum. C’est une excellente question.
Il est encore très tôt pour que nous puissions vous fournir des chiffres raisonnables concernant les patients atteints de cancer. Ce que nous savons, c’est qu’il y a un arriéré dans de nombreuses provinces, et cette situation nous préoccupe fortement. Je vais céder la parole à M. Piazza, qui se concentre principalement sur l’Ontario. Je sais qu’il peut faire référence à certains chiffres pour l’Ontario.
M. Piazza : D’abord, en ce qui concerne l’arriéré touchant les interventions chirurgicales que nous observons et les dommages collatéraux de la COVID-19 sur le système de traitement du cancer, en Ontario seulement, nous avons un arriéré de plus de 13 000 chirurgies du cancer et de plus de 100 000 chirurgies au total, au-delà du seul cancer. Dans un certain nombre de provinces, nous voyons que, en plus de cet arriéré touchant les interventions chirurgicales, il y a aussi un arriéré dans les dépistages du cancer.
Par rapport à votre point, madame la sénatrice, nous craignons de voir un certain genre de tsunami de nouveaux diagnostics de cancer lorsque la pandémie sera derrière nous, quand nous passerons à travers cet arriéré. Ce n’est pas tant la question de savoir si nous verrons ces cancers; c’est à quel stade ils seront présents. Avec cet arriéré dans le dépistage, nous verrons un plus grand nombre de cancers présents à un stade plus avancé, ce qui a des conséquences sur la survie.
J’aimerais prendre un peu de temps pour parler des conséquences psychosociales de la pandémie sur les personnes qui font face à un cancer lorsqu’elles voient leurs traitements reportés, leurs dépistages qui prennent du retard et qu’elles attendent que les gouvernements leur donnent la priorité, dans certains cas, avec une première ou une deuxième dose d’un vaccin.
À ce jour, la Société canadienne du cancer a mené trois sondages auprès de la communauté du cancer, le premier en juillet 2020. Il portait sur la première vague de la pandémie. Le deuxième a eu lieu en novembre 2020, et le troisième, en janvier 2021. Nous avons constaté un niveau considérablement accru d’anxiété chez les personnes aux prises avec un cancer et leurs soins, dans chacune des trois rondes des sondages. Le nombre de soignants pour les personnes exposées à un diagnostic de cancer était en fait supérieur au nombre de personnes ayant reçu un diagnostic elles-mêmes, ce qui montre vraiment les répercussions sur les personnes atteintes d’un cancer, mais aussi sur leurs soignants.
La sénatrice Frum : Merci beaucoup de cette réponse.
La sénatrice Bovey : J’aimerais remercier tous les témoins. Je voudrais faire un suivi sur la question posée par la sénatrice Frum. Je pense que nombre d’entre nous ont été des soignants pour des êtres chers atteints du cancer et ont fait partie de ces sagas. Je peux seulement imaginer à quel point il est plus difficile de jouer ce rôle maintenant durant la pandémie.
J’ai remarqué que, dans votre communiqué de presse sur le budget de 2021, vous étiez relativement satisfaits des dispositions sur l’augmentation de la taxe sur le tabac, l’augmentation de la taxe sur les cigarettes électroniques, l’augmentation du financement pour les soins palliatifs et la recherche sur le cancer chez les enfants. Dans ce communiqué de presse, vous avez mentionné que, pour la première fois, les congés en vertu de la prestation de compassion équivaudraient aux congés pour une personne atteinte de cancer au titre de l’assurance-emploi.
J’aimerais revenir un peu en arrière. À votre avis, pourquoi cet écart existait-il en premier lieu? Comment expliquez-vous l’écart qui existait et sa correction dans le budget? Pensez-vous que la correction sera continue?
Mme Masotti : Merci de votre question, madame la sénatrice. La Société canadienne du cancer a certainement apporté son soutien en 2016 et en 2017 lorsque les discussions avaient cours au sujet d’une prolongation de la prestation pour soignants. Nous étions là pour annoncer aux Canadiens le jour où ils pourraient commencer à recevoir ces prestations. Nous ferons la même chose pour chaque prestation que le gouvernement canadien annoncera pour les patients atteints du cancer. Il est important que la communauté sache que ces prestations existent et que les patients puissent y accéder.
Je ne peux pas dire pourquoi cette prestation est arrivée en premier et la prestation de maladie en deuxième, mais je peux dire que, même si nous avons été ravis de la prolongation de la prestation pour soignants, il est devenu très malheureusement évident que les patients atteints de cancer eux-mêmes ne recevaient pas la même période de congé que celle dont ils avaient besoin pour pouvoir se rétablir, recevoir des traitements puis, s’ils le voulaient, retourner au travail, ce qui est en fin de compte notre objectif. Dans un très grand nombre de cas, le cancer peut être considéré comme une maladie chronique. C’est dans ces cas que les gens ont besoin de cette période pour se remettre sur pied afin de pouvoir retourner au travail, ce qui est leur objectif et notre objectif pour eux.
Même s’il y avait cet écart, nous avons alors décidé qu’il était temps pour nous de continuer de parler de la prestation de maladie, parce que c’est très important pour les gens atteints de cancer. La prolongation de 15 à 26 semaines, comme mon collègue, M. Piazza, l’a dit, est un très bon départ. Comme l’autre témoin l’a dit, il s’agit d’un changement sans précédent du régime et il profitera à de nombreux Canadiens.
Dans le budget, le gouvernement affirme que 169 000 Canadiens profiteront de cette prolongation, ce dont nous nous réjouissons. Mais comme mon collègue, M. Piazza, l’a dit aussi, il est possible de prolonger cela encore davantage. Nous savons qu’un grand nombre de cancers nécessitent une période plus longue que les 26 semaines.
Nous nous sommes permis de faire quelques sondages publics. Le public canadien est largement en faveur; 88 % des Canadiens sont en faveur d’une prolongation au-delà de ces 26 semaines. Nous continuerons de regarder la situation et de défendre les intérêts au nom des Canadiens qui vivent avec le cancer dans le pays.
La sénatrice Bovey : Je présume que vous ajouterez à cela ce que M. Piazza a dit, que vous craignez — j’utiliserai le mot — que les cancers soient diagnostiqués maintenant à un stade plus avancé en raison du ralentissement des diagnostics durant la pandémie. Puis-je présumer que, dans l’avenir, vous inclurez ces réalités et les données qui ressortent de ces réalités dans votre demande de besoins pour l’avenir?
Mme Masotti : Absolument. Nous avons eu le privilège de faire un exposé devant le Comité permanent de la santé il y a quelques semaines, où nous avons parlé de ces préoccupations à ce moment-ci. Je suis heureuse de communiquer certaines de ces recommandations que nous avons formulées au nom de la Société canadienne du cancer. Aujourd’hui, nous sommes ici pour parler de la prolongation de l’assurance-emploi, mais je serai plus qu’heureuse de vous faire part de nos autres priorités et de la façon dont nous soutenons les Canadiens atteints de cancer.
La sénatrice Bovey : Merci beaucoup.
Le sénateur R. Black : J’ai une question pour notre premier témoin, M. Céré. Vous avez signalé que des changements touchant des modifications du projet de loi C-30 sont nécessaires pour aider les personnes confrontées au chômage au Canada en ce moment. Juste par souci de clarté et de concision, qu’est-ce que le gouvernement peut faire d’autre pour continuer d’aider ces Canadiens sans emploi dans l’avenir? Pourriez-vous dire de manière claire et concise quoi d’autre devrait être fait? Merci.
[Français]
M. Céré : Faites-vous référence à la section 35 ou à la section 36? À la PCRE ou à l’assurance-emploi, sénateur?
[Traduction]
Le sénateur R. Black : Vous pouvez me faire part de vos réflexions sur l’une ou l’autre.
[Français]
M. Céré : Dans la section 35 de la PCRE, il est très bien d’envisager une prolongation et d’uniformiser le tout avec la période de prestations de l’assurance-emploi, c’est-à-dire de l’envisager sur une période de 50 semaines. Il y a manifestement un jeu politique au Parlement : pour les huit dernières semaines ou pour les nouveaux demandeurs à partir de juillet, le taux baisse à 300 $. Pourquoi? Attendons-nous qu’un parti de l’opposition présente un amendement? Est-ce qu’il y a un jeu politique, qu’il y ait des élections ou non? Il n’est pas normal de baisser ce taux en temps de pandémie. Nous sommes toujours en pandémie et en temps de crise. La situation de l’emploi n’est pas encore rétablie.
Nous demandons au Sénat de rétablir ce montant parce que l’année dernière, le montant était rétabli au Parlement. Est-ce que le Sénat serait en mesure de le ramener à 500?
Quant à l’assurance-emploi, c’est là où le bât blesse pour ce qui est de deux éléments, soit le calcul du taux et celui de la période de prestations. On rétablit la norme variable, soit le dénominateur, à partir duquel on calcule le taux de prestations. Cela portera préjudice à d’innombrables régions, aux communautés autochtones et aux travailleurs saisonniers qui sont enclavés dans de grandes régions administratives de l’assurance-emploi, où le dénominateur pourrait être de 20.
Si quelqu’un a travaillé 15 semaines et qu’on divise ce chiffre par 20 pour faire la moyenne, on porte préjudice. Le taux de prestations, c’est ce qu’il y a dans l’assiette, et la période de prestations revient à ce que l’on connaît depuis 1996, c’est-à-dire de courtes périodes. Il y a des gens qui auront bien peu dans leur assiette pour peu de temps. Ce n’est pas normal et le gouvernement peut corriger cela.
J’invite le Sénat à apporter ces modifications très simples : un dénominateur, soit 14, et une période de prestations, soit 50. On parle ici de l’article 330 du projet de loi d’exécution du budget. Voilà.
[Traduction]
Le sénateur R. Black : Merci beaucoup.
[Français]
La sénatrice Mégie : Merci aux témoins. J’ai une question pour M. Céré. Oublions la COVID-19 et admettons qu’elle est passée. Qu’est-ce que vous pensez — et vous en avez sûrement entendu parler — de l’idée d’assurer un revenu minimum garanti au lieu d’effectuer une réforme de l’assurance-emploi?
M. Céré : Le revenu minimum garanti, c’est très bien d’en parler dans des congrès politiques, devant différentes instances. Encore faut-il comprendre qu’il y a plusieurs écoles de pensée autour de ce sujet et qu’il faut définir les contours de ce projet. Cela peut être vu comme le revenu qui va remplacer toutes les autres formes de remplacement du revenu. Celles-ci sont nombreuses et, souvent, de compétence provinciale. Je pense au remplacement du revenu pour les accidents de travail, les maladies professionnelles, l’assurance salaire, l’assurance automobile. La liste est longue. Si on veut établir un revenu minimum garanti, il s’agit d’un noble chantier, mais on doit y réfléchir longtemps, trouver les points d’équilibre, et cetera.
Par contre, si on voit le revenu minimum garanti comme un seuil en deçà duquel personne ne devrait se retrouver, on devra s’ajuster avec les programmes d’aide sociale des provinces. Je souhaite bonne chance à celui qui voudra lancer ce chantier pour ce qui est des négociations constitutionnelles. Ce sera vraiment sympathique et long.
En attendant, peut-on utiliser le régime d’assurance-emploi et élargir sa couverture vers le monde du travail non protégé, comme celui du travail autonome? Bien sûr. On a étudié tous ces dysfonctionnements du programme d’assurance-emploi depuis 1990. Il ne faut pas oublier que les années 1990 ont été des années d’austérité qui ont enfermé le régime d’assurance-emploi dans une camisole de force depuis 30 ans, et c’est ce qui explique pourquoi le régime s’est effondré l’année dernière. Il ne pouvait pas survivre à cela. Il nous faut un régime du XXIe siècle, mais pas en 2085. Les solutions sont connues. Tout a été analysé, toutes les pierres ont été retournées. Le Comité des ressources humaines a entendu des centaines de témoins et étudié des dizaines de mémoires. Le gouvernement connaît les solutions. Commençons, mon Dieu. S’il faut une commission, allons-y, mais seulement pour un an. Il pourrait y avoir des mesures temporaires pour 2021 et 2022 et, pendant ce temps, une commission pourrait étudier l’ensemble de l’œuvre, qui est effectivement très complexe, pour arriver avec des recommandations, puis passer enfin au régime du XXIe siècle.
La sénatrice Mégie : Merci, monsieur Céré.
La sénatrice Forest-Niesing : J’ai une question pour les deux témoins. J’allais également vous demander de vous exprimer par rapport au revenu minimum garanti, mais votre réponse était très claire. Je suis inquiète et j’aimerais vous entendre tous les deux parler de la complexité croissante de ce régime. Pour les individus à qui vous répondez et que vous aidez, est-ce que cela représente un défi? Je voudrais bien entendre vos recommandations à cet égard.
[Traduction]
Mme Masotti : Je peux commencer. En ce qui concerne la complexité croissante du régime, je dirais que notre organisation doit voir la mise en œuvre de cette prolongation de 15 semaines à au moins 26 semaines. Bien que nous respections l’engagement du gouvernement d’envisager une réforme globale du régime d’assurance-emploi, la prestation de maladie est une des cinq prestations spéciales, et c’est la dernière des cinq prestations spéciales à être modifiée. Nous encouragerions constamment le gouvernement à faire en sorte que cette prestation ne soit pas liée à la réforme globale du régime d’assurance-emploi. C’est la dernière prestation. Il doit y avoir une parité avec la prestation pour soignant, pour que nous ne soyons plus dans une situation où les soignants ont plus de temps que les patients eux-mêmes. C’est pourquoi nous encouragerions l’appui et l’adoption de ce projet de loi d’exécution du budget particulier. Monsieur Piazza, je ne sais pas s’il y a autre chose que vous aimeriez ajouter.
M. Piazza : Je vais parler brièvement de l’expérience des patients qui reçoivent un diagnostic. En plus de devoir naviguer dans le régime d’assurance-emploi, ils doivent peut-être aussi chercher à obtenir des remboursements pour des médicaments contre le cancer. Si vous vivez en Ontario, vous naviguez dans le Programme de médicaments Trillium, et vous devez composer avec le passage vers votre centre de traitement du cancer et depuis celui-ci. Vous devez vous dépêtrer avec les soins destinés à vos enfants pendant que vous recevez ces traitements contre le cancer. Donc, en plus de votre expérience dans le cadre de la prestation de maladie de l’assurance-emploi, vous devez gérer un certain nombre d’autres éléments qui ont une incidence sur votre vie et tenter de vous débrouiller.
Je vous demanderais de bien vouloir garder tout cela à l’esprit lorsque nous parlons de cette population.
[Français]
La sénatrice Forest-Niesing : Monsieur Céré, je suis particulièrement intéressée de vous entendre à ce sujet, mais dans un contexte différent de l’amendement que vous proposez.
M. Céré : Votre question s’adresse à moi, madame la sénatrice? Du côté de la PCRE, ce que prévoit la Loi d’exécution du budget à la section 35, je ne crois pas que cela se fera au Parlement. Il y a un jeu politique à cause des élections possibles. En toute sincérité, je vous invite à soutenir l’amendement, parce que vous pourrez ainsi vous placer au-dessus des intérêts partisans. C’est comme l’année dernière, quand le gouvernement commençait toujours avec 300 $ ou 400 $, et ensuite il y avait un jeu politique avec l’opposition. Là, il faudrait que cela vienne du Sénat et que l’on uniformise la cessation ou la continuité de la PCRE à 500 $, ce qui me semblerait normal. Je peux même présumer que le gouvernement s’y attend.
Du côté de l’assurance-emploi, soit la section 36, des gens vont subir de très graves préjudices à partir de septembre. Ce n’est pas en raison du critère d’admissibilité. C’est bien qu’on établisse un critère unique d’admissibilité à travers le Canada, soit de 420 heures. Sauf quand il s’agit de calculer le taux, c’est-à-dire le taux des prestations, on revient avec une norme variable. Les régions administratives sont découpées de façon arbitraire. Ce sont des régions fourre-tout, en quelque sorte, avec diverses réalités de travail, notamment le travail saisonnier, le travail à temps partiel, le travail sur appel et, bien sûr, le travail à temps plein. Il y a aussi les communautés autochtones, qui sont enclavées dans des régions administratives très larges et qui ont toutes sortes de réalités.
Au Québec, par exemple, la région du Bas-Saint-Laurent est rattachée aux régions de l’autre côté du fleuve, notamment les régions de Charlevoix et de la Haute-Côte-Nord, et elle inclut une partie du Lac-Saint-Jean. Il s’agit de toutes sortes de réalités de travail différentes. On pourrait se retrouver avec des taux de chômage qui ont baissé parce que, dans certaines parties de cette région, l’emploi va bien. Dans d’autres parties de ces régions, ce n’est pas le cas, parce que les emplois sont saisonniers. Des gens devront se résoudre à diviser par 20, alors qu’ils auront travaillé 15 semaines. Leur taux de prestations diminuera du quart ou du tiers. En ce qui concerne la période de prestations, on revient au statu quo, ce qui est dénoncé sur toutes les tribunes depuis 1996. Il n’est pas normal de revenir à ce taux, surtout pas en pleine pandémie. On ne peut pas faire cela. Si on pouvait partager l’écran, je vous montrerais une proposition de modification toute simple à l’intérieur du projet de loi d’exécution du budget, qui rétablirait des mesures temporaires pour aider les gens et pour demander au gouvernement de créer une commission dont les travaux dureraient un an, ce qui serait sans doute possible.
Au Québec, en 2013, on a lancé une Commission nationale d’examen sur l’assurance-emploi, qui a fait un travail remarquable en moins d’un an. À l’époque, la dernière grande commission des années 1980 était la Commission Forget. C’est possible de faire un travail comme celui-là en un an, parce qu’on pourrait passer de mesures temporaires qui prennent fin en 2022 à un régime du XXIe siècle. Pour le moment, il y a deux éléments où le bât blesse, soit le taux et la période de prestations. Je crois qu’il est inacceptable qu’on ait envisagé de placer ces éléments dans la suite des mesures temporaires, et ce, en pleine pandémie.
La présidente : Merci beaucoup de cette réponse.
[Traduction]
Sénatrice Moodie, vous aviez la main levée, mais je ne la vois plus maintenant, donc tenez-nous au courant. Entretemps, nous passerons au prochain sénateur.
Le sénateur Manning : Je remercie nos témoins ce matin.
Je sais que nous parlons des modifications du régime d’assurance-emploi en ce qui concerne les personnes qui souffrent d’un cancer et d’autres prestations de maladie. Le cancer n’est pas une préoccupation individuelle; cela devient rapidement une préoccupation familiale, du point de vue financier et de la santé. En mai 1999, ma propre sœur a découvert qu’elle était atteinte du cancer du sein et elle est décédée en juin 2000, 13 mois plus tard. C’était effectivement une grande préoccupation familiale pour tout le monde, de nous assurer que nous étions tous là pour aider.
Je voudrais donc connaître les idées ou les suggestions de la Société du cancer liées non seulement aux prestations d’assurance-maladie, mais à tout ce que nous pourrions examiner au Sénat concernant des façons d’améliorer la vie des personnes qui souffrent de cette terrible maladie.
J’aimerais poser une question dont la réponse m’a peut-être échappé. Avez-vous des statistiques sur le nombre de personnes qui se sont prévalues du programme de 15 semaines? Je sais que vous avez dit quelque chose, mais j’essayais de prendre des notes. Avez-vous des statistiques par rapport au nombre de personnes qui se sont prévalues des prestations de maladie de 15 semaines, mais qui auraient profité des 26 semaines ou même du programme de 50 semaines s’il avait été offert?
Mme Masotti : Merci de poser la question, monsieur le sénateur. Donnez-moi une seconde pour examiner les données que j’ai à ma disposition. Je peux certainement vous revenir avec des renseignements supplémentaires. Monsieur Piazza, n’hésitez pas à intervenir.
Selon les données de 2019 de BC Cancer, l’écart dans la durée nécessaire pour le traitement et la guérison se situait entre 26 et 36 semaines pour les personnes atteintes du cancer du sein et de 37 semaines pour le cancer du côlon. Ce sont les deux types de cancer les plus courants pour les Canadiens. Nous sommes donc favorables à toute période supplémentaire — au moins 26 semaines — afin que ces patients puissent prendre le temps dont ils ont besoin pour se rétablir.
À titre de comparaison, 28 des 36 pays de l’OCDE offrent au moins 26 semaines, ou six mois, de congé payé pour une maladie personnelle.
Monsieur Piazza, voulez-vous fournir des chiffres supplémentaires?
M. Piazza : Oui. Un peu plus du tiers de ces bénéficiaires de la prestation de maladie du régime d’assurance-emploi ont utilisé le nombre maximum des 15 semaines. Sur ce tiers, 77 % prennent du temps supplémentaire, outre ces 15 semaines. De plus, j’ai dit dans ma déclaration qu’environ les trois quarts de ces bénéficiaires ont pris au moins 26 semaines supplémentaires de congé après cette période.
Le sénateur Manning : D’accord. Merci.
La sénatrice Omidvar : Ma question s’adresse à M. Céré.
Je suis entièrement d’accord avec vous : le régime d’assurance-emploi est dépassé. Il a été conçu pour la situation qui régnait il y a 40 ans, et nous portons toujours son héritage durant ces périodes très difficiles. Je conviens qu’un examen plus rapide nous servirait mieux.
Mais je veux vous poser une question par rapport à l’élargissement des prestations dans l’avenir. Si ces prestations étaient élargies, elles s’assortiraient d’un coût supérieur. Le coût est assumé par les employeurs et les employés; nous le savons tous. L’employeur paie 7 $, et l’employé, 5 $. C’est une pomme de discorde chez les petites entreprises. Les groupes de petites entreprises ont proposé que la prime soit partagée à parts égales entre l’employeur et l’employé.
Qu’en pensez-vous?
[Français]
M. Céré : Je vous dirais qu’il y a sûrement un certain nombre d’éléments, madame la sénatrice. Tout d’abord, on a un taux de cotisation de 1,58 % qui est gelé depuis 2020, encore cette année et l’an prochain. C’est la cotisation ouvrière, et il s’agit du plus bas taux de cotisation depuis 1980. En 1981, on parlait d’un taux de 1,80 %. Le taux de cotisation aussi bas parce qu’on a fait des surplus. Auparavant, le gouvernement détournait les surplus. On connaît tous l’histoire des surplus de la caisse d’assurance-emploi qui ont été détournés. Le gouvernement actuel ne veut pas accumuler de surplus. Depuis 2016, il s’est toujours organisé pour arriver avec une certaine parité dans la caisse. On a tout de même un taux de cotisation qui est très bas. Si on revenait à ce qu’il était, par exemple, en 2008, à 1,73 %, cette marge de manœuvre nous permettrait de régler un bon nombre de situations.
Par exemple, le directeur parlementaire du budget s’est penché sur la question des prestations de maladie à 50 semaines. Après avoir fait ses calculs, il a évalué qu’une augmentation de 6 ¢ du taux de cotisation permettrait d’offrir un régime de prestations de maladie de 50 semaines. Il est actuellement de 26 semaines. Il y a assurément un gain historique, parce que la période de prestations de maladie n’a pas bougé depuis 1971. On peut dire qu’il était temps.
Quand je vous dis que tout a été documenté, ce n’est pas de la rhétorique. Sur l’ensemble de l’œuvre, toutes les pierres ont été retournées, toutes les solutions ont été envisagées, tous les calculs ont été faits. Tout a été évalué au Comité des ressources humaines de la Chambre des communes. Nous sommes en mesure de nous doter d’un régime équilibré, sensé et protecteur qui couvre les différentes réalités du monde du travail, qu’il soit à temps partiel, saisonnier ou autonome.
Bon nombre de pays dans le monde ont un programme qui protège les travailleurs autonomes. L’OCDE dit que le Canada est un des seuls pays qui n’a pas de programme de ce genre. Il est grand temps d’arriver au XXIe siècle.
Cela dit, en ce qui concerne votre question sur la parité des cotisations à l’assurance-emploi, c’est une revendication des employeurs, et je l’ai entendue. De fait, nous avons aussi entamé un dialogue avec le monde employeur, et nous entendons leurs revendications sur la parité.
Par ailleurs, rappelons-nous qu’historiquement, depuis la fondation du programme d’assurance-emploi, l’État canadien participait au financement de la caisse d’assurance-emploi selon différentes formules qui ont évolué dans le temps. C’est le gouvernement qui était au pouvoir en 1989 qui a retiré à l’État le financement de la caisse d’assurance-emploi.
On pourrait revenir à cela. Par exemple, l’État pourrait assumer les coûts de l’administration du programme d’assurance-emploi. On sait que ces coûts, qui s’élèvent à environ 2 milliards de dollars par année, sont assumés par les cotisations des travailleurs et des employeurs. De cette façon, on pourrait libérer une charge qui repose sur les épaules de l’employeur et du travailleur pour la mettre sur celles de l’État. En ce qui a trait à la responsabilité, différentes formules qui sont parfaitement viables et acceptables par toutes les parties peuvent être étudiées.
[Traduction]
La présidente : Honorables sénateurs, nous avons un peu de temps. Si quelqu’un a une question, nous serons heureux de l’entendre.
[Français]
Si aucun de mes collègues n’a de questions, j’aimerais obtenir une précision. Monsieur Céré, vous avez beaucoup parlé de l’impact de la section 36 sur les différentes régions. J’aimerais connaître votre avis à ce sujet. Est-ce que cette section a un impact spécifique sur chaque province? En d’autres termes, est-ce que certaines provinces seront atteintes globalement de différentes manières?
M. Céré : Il y aura un impact partout. En fait, la norme variable a été suspendue l’année dernière. La ministre Qualtrough, avec astuce et intelligence — je dois l’avouer — a imposé un taux artificiel de chômage à 13,1 % partout au Canada. Cela a eu deux effets, le premier étant que, pendant un an, le critère d’admissibilité était de 420 heures pour tout le monde. Le deuxième effet touchait le calcul du taux de prestations, en faisant la moyenne pour les 14 meilleures semaines. Tout le monde a reçu le même traitement équitable, et cela fonctionnait.
On revient maintenant avec les 420 heures pour 2021-2022. On ne revient toutefois pas avec le fameux diviseur unique de 14. Cela fait en sorte que, dans plusieurs régions du Canada, certains travailleurs saisonniers travailleront 15 ou 16 semaines selon la saison, et le diviseur de leur région sera peut-être fixé à 20. La moyenne salariale et le taux de prestations vont diminuer dramatiquement. Il en va de même pour la période de prestations, qui redevient variable. Vous le voyez dans le projet de loi. Ce tableau est vraiment extraordinaire. C’est surtout un tableau qui indique aux gens qu’ils n’ont pas beaucoup de semaines de prestations. Tout cela a été fait en 1996, dans l’esprit de faire des économies d’échelle et des surplus dans la caisse d’assurance-emploi, et c’est ce qu’ils avaient réussi à faire à l’époque.
Aujourd’hui, ce n’est plus le temps de faire cela. Il faut protéger les gens adéquatement, et je pense qu’on a un gouvernement qui peut faire preuve de courage politique.
Je m’explique mal qu’on ait reporté la réforme de l’assurance-emploi du XXIe siècle, parce qu’on s’était réellement engagé à le faire. On a tellement cru que cela se ferait en 2021-2022, peut-être par blocs, mais voilà que l’on reporte la réforme sous prétexte que le système informatique est désuet. En dépit d’un système désuet, 9 millions de personnes ont reçu la PCU et 3 millions de personnes reçoivent la PCRE en ce moment. Il y a 2,5 millions de prestataires de l’assurance-emploi. Le système a peut-être besoin d’une mise à jour, mais il peut fonctionner. Pourquoi reporter les 26 semaines de prestations de maladie au mois d’août 2022? À mon avis, il y a beaucoup de politique dans tout cela et c’est un peu malheureux.
Je termine avec un dernier point, madame la présidente. Je comprends les divergences d’opinions entre le monde des employeurs et celui des travailleurs, mais je sais aussi qu’il y a une façon de trouver des solutions équilibrées qui vont convenir aux deux parties. On l’a fait au Québec avec le régime d’assurance parentale. De plus, on peut établir des consensus sur bien d’autres sujets; encore faut-il s’asseoir, discuter et trouver les éléments sur lesquels on pourra s’entendre. On peut aller de l’avant.
La présidente : Merci beaucoup pour cette réponse, et merci à nos témoins.
[Traduction]
Merci à vous tous d’avoir présenté vos exposés et répondu à nos questions. Si vous avez oublié quelque chose et que vous voulez ajouter quelque chose, n’hésitez pas à nous l’envoyer. Nous serons heureux de le lire et de le recevoir.
[Français]
C’est ce qui met fin à notre réunion. S’il n’y a pas d’autres questions, je remercie encore une fois nos témoins.
(La séance est levée.)