Aller au contenu
SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES AFFAIRES SOCIALES, DES SCIENCES ET DE LA TECHNOLOGIE

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le mercredi 26 mai 2021

Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit aujourd’hui, à 16 heures (HE), par vidéoconférence, pour étudier la teneur des éléments des sections 21, 22, 23, 24, 28, 29, 32, 33, 34, 35 et 36 de la partie 4 du projet de loi C-30, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 19 avril 2021 et mettant en œuvre d’autres mesures.

La sénatrice Chantal Petitclerc (présidente) occupe le fauteuil.

[Français]

La présidente : Bonjour. Je m’appelle Chantal Petitclerc, sénatrice du Québec, et j’ai le plaisir et le privilège de présider ce comité.

Aujourd’hui, nous tenons une réunion du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie par vidéoconférence.

[Traduction]

Avant de commencer, j’aimerais vous faire part de quelques suggestions utiles qui, selon nous, vous aideront à assister à une réunion efficace et productive.

Premièrement, les participants sont priés de laisser leur micro en sourdine en tout temps, sauf si la présidence leur accorde la parole, et ils seront responsables d’activer et de désactiver leur micro en conséquence pendant la réunion. Avant de prendre la parole, veuillez attendre qu’on vous nomme. Je demanderais aux sénateurs d’utiliser la fonction « lever la main » pour indiquer leur désir d’intervenir. Une fois que vous avez la parole, veuillez faire une pause de quelques secondes pour laisser le signal audio s’établir.

[Français]

Si vous éprouvez des difficultés techniques en matière d’interprétation, veuillez le signaler à la présidente ou au greffier, et nous nous efforcerons de résoudre le problème. Si vous éprouvez d’autres difficultés techniques, veuillez communiquer avec le greffier du comité en utilisant le numéro d’assistance technique qui vous a été fourni.

Veuillez noter qu’il est possible que nous devions suspendre les travaux pendant ces périodes, car nous devons nous assurer que tous les sénateurs et toutes les sénatrices sont en mesure de participer pleinement à cette réunion.

[Traduction]

Enfin, je voudrais rappeler à tous les participants que vous ne devez pas copier, enregistrer ou photographier les écrans Zoom. Pour consulter ou reproduire du contenu de la réunion, utilisez plutôt les délibérations officielles diffusées sur le site Web SenVu.

Je vais maintenant présenter les membres du comité qui participent à la réunion d’aujourd’hui.

[Français]

Nous avons le plaisir d’accueillir le sénateur R. Black, la sénatrice Bovey, la sénatrice Frum, la sénatrice Dasko, la sénatrice Forest-Niesing, le sénateur Kutcher, le sénateur Manning, la sénatrice Mégie, la sénatrice Moodie, la sénatrice Omidvar, ainsi que la sénatrice Moncion.

Aujourd’hui, nous terminons notre étude de la teneur de plusieurs sections du projet de loi C-30, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 19 avril 2021 et mettant en œuvre d’autres mesures.

Jusqu’à présent, nous avons entendu près de 40 témoins, et ce, pendant environ 12 heures. Aujourd’hui, avec nos deux prochains groupes de témoins, nous examinerons la section 34 de ce projet de loi. Cette section autorise le versement aux provinces de sommes destinées à l’apprentissage et à la garde des jeunes enfants pour l’exercice qui commence le 1er avril 2021.

Sans plus tarder, je vous présente les témoins de ce premier groupe.

Nous recevons Mme Karen Hall, directrice générale, Direction générale des politiques stratégiques et de service, ainsi que Mme Elizabeth Allen, directrice, Direction générale des politiques stratégiques et de service, d’Emploi et Développement social Canada.

J’invite Mme Hall à faire ses remarques d’ouverture. Nous passerons ensuite aux questions.

[Traduction]

Karen Hall, directrice générale, Direction générale des politiques stratégiques et de service, Emploi et Développement social Canada : Bonjour, honorables sénateurs. Je vous remercie sincèrement de me donner l’occasion de témoigner devant vous aujourd’hui.

Comme vient de le dire la présidente, je m’appelle Karen Hall et suis directrice générale de la Direction générale des politiques stratégiques et de service à Emploi et Développement social Canada, ou EDSC. Je suis accompagnée d’Elizabeth Allen, une directrice au sein de ma direction générale. Nous sommes ici aujourd’hui pour vous entretenir de la section 34.

Comme précisé, cette section porte sur l’affectation de crédits aux services d’apprentissage et de garde des jeunes enfants aux provinces et territoires pour l’exercice 2021-2022. La section comprend plus particulièrement trois éléments :

D’abord, elle autorise le versement aux provinces et territoires des sommes qui figureront aux accords bilatéraux sur l’apprentissage et la garde des jeunes enfants pour cet exercice.

Ensuite, elle précise que ces versements peuvent être assujettis aux conditions fixées par le ministre dans le cadre de ces mêmes accords bilatéraux.

Enfin, elle établit que ces versements aux provinces et territoires ne peuvent totaliser plus de 2,95 milliards de dollars.

Ensemble, ces trois éléments forment le but du crédit législatif de l’exercice en cours, soit veiller à ce que le gouvernement fédéral puisse transférer les fonds prévus pour cet exercice aux provinces et territoires sur signature des accords bilatéraux. Le financement des exercices suivants sera assuré par des crédits approuvés annuellement, comme c’est le cas pour les accords bilatéraux en vigueur depuis 2017.

Je vais vous donner un peu plus de contexte. Le budget de 2021 prévoit jusqu’à 30 milliards de dollars sur cinq ans et 8,3 milliards de dollars par année par la suite pour l’apprentissage et la garde des jeunes enfants, y compris l’apprentissage et la garde des jeunes enfants autochtones. Dans le cadre de cette annonce, le gouvernement propose de collaborer avec les provinces et les territoires pour réaliser des progrès considérables en vue d’établir un réseau qui fonctionne pour les familles. Le budget propose donc de consacrer 27,2 milliards de dollars, sur les 30 milliards de dollars, aux provinces et aux territoires. Ce financement serait suffisant pour réduire de 50 % le coût des services de garde réglementés d’ici la fin de 2022 dans l’ensemble des provinces et des territoires et pour ramener les frais de garde à 10 $ par jour d’ici 2025-2026, ainsi que pour accroître le nombre de places dans des garderies réglementées de qualité partout au pays et favoriser la croissance d’une main-d’œuvre qualifiée en éducation de la petite enfance.

Le budget propose également un financement par l’entremise du Fonds pour l’accessibilité afin d’aider à rendre les garderies plus accessibles aux enfants, aux parents et au personnel ayant un handicap.

Par ailleurs, le budget propose la mise sur pied d’un conseil consultatif national chargé de fournir des conseils d’experts sur les enjeux et les défis auxquels fait face le secteur de l’apprentissage et de la garde des jeunes enfants. Le conseil sera soutenu par un secrétariat fédéral qui relève d’Emploi et Développement social Canada et qui a été créé dans le cadre de l’Énoncé économique de l’automne de 2020. Ainsi, le budget de 2021 prévoit un financement supplémentaire des capacités.

Honorables sénateurs, la pandémie de COVID-19 a mis en lumière l’importance de l’apprentissage et de la garde des jeunes enfants pour les familles et l’économie. Les parents, en particulier les mères, comptent sur des services de garde abordables et de qualité pour les aider dans leurs démarches d’intégration, de réintégration ou de maintien en emploi. Dans le contexte de la relance, ce constat s’applique aussi aux femmes qui veulent terminer leurs études, améliorer leurs compétences ou lancer une entreprise.

L’accès à des services d’apprentissage et de garde des jeunes enfants de qualité contribue également à la réussite scolaire future des enfants et à leur bien-être général.

Enfin, les répercussions économiques des services de garde d’enfants sont considérables. Comme le souligne le budget, des études montrent que pour chaque dollar investi dans l’éducation de la petite enfance, entre 1,50 $ et 2,80 $ reviennent à l’économie en général.

À l’heure actuelle, le gouvernement s’emploie à collaborer avec les provinces et les territoires afin de conclure des accords visant à améliorer l’accès aux services de garde réglementés grâce au financement annoncé dans le budget de 2021. Le budget s’appuie sur l’approche axée sur la collaboration que le gouvernement a adoptée avec les provinces et les territoires depuis la signature, en 2017, du Cadre multilatéral d'apprentissage et de garde des jeunes enfants. Ce cadre expose les éléments clés de l’approche commune en matière de garde d’enfants, comme les principes fondamentaux, l’établissement de l’ordre de priorité des investissements dans les services de garde réglementés et un accord pour en faire rapport publiquement, à partir d’un ensemble commun d’indicateurs.

À partir de 2017, des accords bilatéraux de trois ans ont été établis avec chaque province et territoire. Ces accords ont été prolongés d’un an, le dernier exercice étant 2020-2021, ce qui, ensemble, a représenté un investissement de 1,2 milliard de dollars au cours des quatre dernières années. Aux termes de chaque accord, les provinces et les territoires s’engagent à respecter un plan d’action qui énonce les domaines prioritaires dans lesquels il faut investir et les indicateurs communs qui doivent faire l’objet d’un rapport annuel comme condition de financement.

De même, le gouvernement collabore avec les peuples autochtones dans le contexte du Cadre d’apprentissage et de garde des jeunes enfants autochtones, qui a été élaboré conjointement avec des partenaires autochtones en 2018 et grâce à un investissement supplémentaire proposé dans le budget de 2021 pour les cinq prochaines années.

Enfin, au-delà du financement proposé dans le budget et le cadre, un certain nombre de mesures supplémentaires sont en cours pour appuyer l’apprentissage et la garde des jeunes enfants de manière plus générale. J’aimerais attirer votre attention là-dessus. Ces mesures ont été initialement financées dans le cadre du budget de 2017. Leur financement a été rendu permanent dans l’énoncé économique de l’automne.

Tout d’abord, pour soutenir l’innovation et les politiques fondées sur des données probantes, le Programme d’innovation en matière d’apprentissage et de garde des jeunes enfants favorise des pratiques de pointe à l’appui de la nature changeante de ce domaine. De plus, le ministère de l’Emploi et du Développement social remplit un mandat de collecte de données et de recherche afin de combler les lacunes en matière de données, de mesurer les progrès et d’éclairer la prise de décisions en matière d’apprentissage et de garde des jeunes enfants. Des travaux sont en cours avec Statistique Canada et des chercheurs dans le domaine pour améliorer la base des données probantes. En outre, on élaborera une stratégie de données et de recherche au cours des prochains mois pour guider ces travaux à l’avenir, en tenant compte des conseils du groupe d’experts en matière de données et de recherche sur l’apprentissage et la garde des jeunes enfants, dont le mandat de deux ans se termine le 1er juin.

En conclusion, la première année de financement dont il est question dans la section 34, qui fait l’objet de nos discussions aujourd’hui, contribuera à tracer la voie vers l’instauration d’un réseau pancanadien, en collaboration avec les provinces et les territoires. Je serai heureuse de répondre à vos questions. Merci.

La présidente : Je vous remercie. Oui, passons aux questions. Nous allons commencer par la sénatrice Bovey, qui est la vice-présidente de notre comité.

La sénatrice Bovey : Merci, madame Hall. J’ai beaucoup aimé vos observations.

J’aimerais vraiment en savoir plus sur la façon dont le gouvernement compte s’entendre avec les provinces et la façon dont il collabore déjà avec elles afin de réduire de 50 % les frais moyens des services d’apprentissage et de garde préscolaires réglementés à l’extérieur du Québec d’ici la fin de 2022. Je peux me tromper, mais en lisant la section 34, je ne vois aucune mention des territoires, mais vous les avez évoqués. Je voudrais que vous confirmiez que les territoires ont effectivement le même accès à leur part du financement pour l’apprentissage et la garde des jeunes enfants.

Mme Hall : Je vous remercie de la question.

Je vais d’abord répondre à la deuxième partie. Le financement s’applique bel et bien aux territoires. Je crois comprendre que, dans le langage jurisprudentiel ou juridique, toute mention des provinces englobe aussi les territoires. En tout cas, l’intention est certes de verser des fonds également aux territoires.

En ce qui concerne la façon dont nous collaborerons avec les provinces et les territoires, tout d’abord, nous entamons des négociations avec les gouvernements provinciaux et territoriaux, ce qui limite quelque peu ce dont je pourrai parler aujourd’hui. Toutefois, je tiens à souligner que nous avons des relations très solides avec les provinces et les territoires dans ce domaine. Nous avons des accords bilatéraux en place depuis trois ans, qui ont été prolongés au cours du dernier exercice et, d’ailleurs, l’énoncé économique de l’automne a rendu permanent le financement prévu dans le budget de 2017. En ce moment, nous négocions la prolongation de l’ancien financement. Les relations sont solides et axées sur la collaboration, et il y a une base solide sur laquelle nous pouvons nous appuyer. À mesure que nous avancerons, nous serons guidés par le cadre multilatéral. Nous travaillerons à partir des assises déjà établies dans le cadre, ainsi qu’aux termes des accords existants.

La sénatrice Bovey : Ce cadre et ces assises sont donc compatibles, ou s’agit-il d’un ensemble différent de cadres pour chaque province? Au fond, je cherche à savoir en quoi consiste la base nationale.

Mme Hall : Bien sûr, il y a un seul cadre. C’est un cadre que toutes les provinces et tous les territoires, sauf le Québec, ont signé. Le Québec a indiqué que, même s’il choisit de préserver son autonomie dans ce domaine sur son territoire, il est d’accord avec les principes du cadre en général. Nous disposons donc de cette base nationale que toutes les provinces et tous les territoires ont déclaré appuyer, ce qui constitue un élément très important pour ce dossier. Cela devrait permettre de faire avancer les accords prévus dans le budget de 2021.

La sénatrice Bovey : Je vous remercie.

Le sénateur R. Black : Nous savons que les collectivités rurales, éloignées et nordiques ont de plus en plus de difficulté à accéder à une multitude de services gouvernementaux, notamment aux services de garde d’enfants. Est-ce qu’une partie du financement prévu dans la section 34 servira à appuyer précisément ces collectivités rurales, éloignées et du Nord?

Mme Hall : Je vous remercie de la question.

Aux termes des accords en vigueur, il y a déjà des engagements et des travaux en cours pour fournir un meilleur accès aux services de garde d’enfants dans les régions rurales et éloignées, y compris pour les communautés autochtones. L’intention est certainement de faire en sorte qu’à l’avenir, les services de garde d’enfants dans les régions rurales et éloignées constituent une partie importante du réseau pancanadien.

Nous reconnaissons la difficulté de trouver des services de garde d’enfants dans les régions rurales et éloignées, appelées communément les « déserts en matière de services de garde ». Ce phénomène peut également se manifester dans des zones urbaines, mais nous sommes certes conscients que le manque de disponibilité des services de garde d’enfants pose problème dans le contexte des régions rurales et éloignées.

Le sénateur R. Black : Je vous remercie beaucoup de votre réponse.

La sénatrice Dasko : Merci, madame Hall, d’être des nôtres aujourd’hui.

J’aimerais commencer par vous poser une question sur le montant total de 2,95 milliards de dollars. Comment cette somme est-elle répartie entre les provinces? Est-ce en fonction du nombre d’habitants? Est-ce ainsi que vous allez distribuer l’argent? S’agit-il d’une répartition par habitant selon la population totale d’une province ou plutôt en fonction de l’âge des enfants ou de la proportion de la population qui est constituée d’enfants d’un certain âge? Voilà ma première question. J’en ai deux ou trois autres.

Mme Hall : Je vous remercie.

En ce qui a trait à la méthode d’attribution, nous fournirons de plus amples renseignements à ce sujet en temps et lieu, mais je ne peux pas en discuter aujourd’hui.

La sénatrice Dasko : On ne sait donc rien sur la répartition des fonds, ni même sur la possibilité d’une répartition par habitant? Bon, d’accord.

J’aimerais creuser un peu plus la question posée par la sénatrice Bovey. Je sais que vous ne pouvez pas révéler les détails de vos négociations, mais je pense simplement à ma province, l’Ontario. Je veux aller un peu plus loin. Quels facteurs examinerez-vous de concert avec la province de l’Ontario? Quels sont les points de discussion? Quels sont les facteurs à prendre en considération dans le cadre de vos négociations avec l’Ontario?

Mme Hall : Je vous remercie de la question.

Je dirais qu’il s’agit de considérations qui s’appliquent de façon générale à l’ensemble des provinces et des territoires, tout en reconnaissant la compétence des gouvernements provinciaux et territoriaux en matière de services de garde d’enfants, ainsi que les circonstances particulières de chaque province et territoire.

Certes, le budget a été très clair en ce qui concerne l’engagement de réduire les frais et l’importance d’une telle mesure. Ce sera donc un aspect important des discussions.

Par ailleurs, conformément aux accords de 2017, la création de places constituera également un élément important pour ce qui est d’assurer une plus grande accessibilité aux services de garde d’enfants partout au pays.

Le budget présente aussi d’autres éléments qui seront des facteurs importants à prendre en considération pour la suite des choses. Mentionnons, entre autres, la main-d’œuvre, c’est-à-dire l’assurance d’avoir une main-d’œuvre suffisante et bien formée pour appuyer un réseau de qualité, ainsi que l’inclusion des personnes handicapées, des Canadiens noirs et racialisés, des communautés de langue officielle en situation minoritaire, des Canadiens autochtones et d’autres groupes ethniques.

À cela s’ajoutent des exigences relatives à la production de rapports et certaines dispositions prévues dans le budget pour assurer une base de données probantes et fiables à l’avenir.

Voilà donc quelques-uns des sujets sur lesquels nous nous concentrons dans le cadre des négociations avec chaque province et territoire.

Bien sûr, nous travaillerons en partenariat avec les provinces et les territoires. Ainsi, leurs priorités, leurs circonstances uniques, leurs objectifs et leur contexte politique particulier seront également des éléments très importants lorsque nous collaborerons avec chacun d’eux en vue de conclure des accords.

La sénatrice Dasko : Quelle place occupent les fournisseurs privés de services de garde d’enfants dans le cadre des négociations et de la distribution des fonds destinés aux provinces?

Mme Hall : Je vous remercie.

Le budget prévoit que la priorité sera accordée aux services de garde sans but lucratif, mais il reconnaît le rôle et l’inclusion des fournisseurs à but lucratif au sein du réseau.

De façon plus générale, il faut savoir si les fournisseurs privés sont réglementés ou autorisés — certains le sont et d’autres ne le sont pas. Par conséquent, le cadre et le financement fédéral, aux termes des accords actuels et futurs, mettront l’accent sur les services de garde réglementés, ce qui comprendra certains fournisseurs privés, mais peut-être pas tous.

La sénatrice Dasko : C’est très utile. Je vous remercie.

Le sénateur Kutcher : Je remercie infiniment nos témoins de leur présence parmi nous aujourd’hui et de leurs observations, ainsi que de leur travail acharné et de leur dévouement dans ce dossier vraiment important. C’est encourageant.

Bon nombre des participants à cet appel Zoom ont vu leurs enfants et leurs petits-enfants aller à la garderie. Nous savons que les éducatrices et éducateurs en garderie ont toujours été sous-évalués et sous-payés. Envisagez-vous des stratégies pour mettre fin à cette dévalorisation et, plus précisément, est-ce que les accords bilatéraux contiendront des dispositions permettant de faire en sorte que ce personnel soit valorisé et rémunéré convenablement pour le travail essentiel qu’elles font?

Mme Hall : Je vous remercie de la question. Permettez-moi d’y répondre en deux parties.

Pour ce qui est des mesures déjà en place, j’aimerais revenir à l’énoncé économique de l’automne, qui propose ou qui prévoit 420 millions de dollars pendant l’exercice en cours afin de soutenir la main-d’œuvre en éducation de la petite enfance. Ce montant sera distribué aux provinces et aux territoires en fonction du nombre d’habitants et servira à appuyer la main-d’œuvre en éducation de la petite enfance. Les provinces et les territoires disposeront d’une grande souplesse quant à la façon d’utiliser ces fonds pour soutenir le personnel des services de garde d’enfants, notamment sur le plan de l’éducation, des bourses d’études ou d’autres moyens de soutien. Ce financement, qui est prévu pour le présent exercice, constitue un point de départ pour reconnaître l’importance de la main-d’œuvre.

De plus, l’énoncé économique de l’automne fait état d’une stratégie de la main-d’œuvre en éducation de la petite enfance qui serait élaborée par le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux et qui permettrait d’examiner de façon plus stratégique les problèmes avec lesquels le secteur doit composer, en plus de fournir une voie à suivre pour commencer à aborder certains de ces enjeux. Le travail lié à cette stratégie vient de commencer dans le contexte fédéral-provincial et il se poursuivra au cours des prochains mois en vue de l’élaboration d’une stratégie qui précise vraiment la marche à suivre.

Si on se tourne vers l’avenir, en ce qui a trait au réseau pancanadien, le budget reconnaît l’importance de la main-d’œuvre des services de garde d’enfants et les taux de rémunération qui existent actuellement dans le secteur. La reconnaissance de la main-d’œuvre et la prise de mesures de soutien pour les dépenses de fonctionnement liées à la prestation de services de garde seraient des éléments que nous envisagerions ou dont nous discuterions avec les provinces et les territoires au moment de déterminer l’utilisation des fonds fédéraux.

Le sénateur Kutcher : Si je comprends bien, c’est sur votre radar, mais il n’y a encore rien de concret.

Mme Hall : Oui, je pense que c’est juste. C’est certainement sur le radar, et des fonds substantiels ont été engagés à cet égard. Pour ce qui est de l’avenir, nous collaborerons avec les provinces et les territoires pour éclairer la voie. En outre, je pense que le réseau pancanadien repose sur la reconnaissance de l’importance de la main-d’œuvre en éducation de la petite enfance.

Le sénateur Kutcher : Je suis impatient que cela arrive et que notre pays ait beaucoup plus de considération pour ces employées qui s’occupent de nos enfants.

La prochaine question porte sur un sujet légèrement différent : comment évaluera-t-on l’incidence de cette orientation stratégique sur la santé, la santé développementale et le bien-être des enfants canadiens? Comment saurons-nous si l’initiative atteint ou non ses objectifs et pour qui?

Mme Hall : Je vous remercie de cette question.

À mesure que prendra forme le réseau pancanadien, la communication d’informations et de données sera cruciale pour connaître l’incidence de l’investissement fédéral, compte tenu de l’ampleur de ce dernier. À court terme, il y aura des rapports, parfois selon des modalités négociées. Il y a donc des limites à ce que je puis dire aujourd’hui, mais nous entendons évaluer l’incidence concrète de l’investissement fédéral sur le terrain sous la forme de réduction de frais, de création de places et d’inclusion, par exemple. Ces indicateurs s’apparentent à ceux qui sont utilisés aujourd’hui, soit les indicateurs communs prévus dans le cadre multilatéral.

Pour ce qui est d’évaluer l’effet du financement fédéral sur la population générale, ces questions à long terme exigent des sources de données à long terme, souvent des sources longitudinales, pour pouvoir suivre cet effet au fil du temps. Au chapitre des données et du financement de la recherche, nous travaillons avec Statistique Canada pour déterminer ce qui peut être fait pour améliorer les données disponibles afin de fournir aux chercheurs les informations dont ils auront besoin dans l’avenir pour réaliser ce genre d’évaluation.

La sénatrice Moodie : Je vous remercie beaucoup, madame Hall, d’être venue nous parler aujourd’hui et de faire la lumière sur ce très important changement dans le secteur de la garde d’enfants au Canada.

J’ai deux ou trois questions, mais j’aimerais vraiment poursuivre la discussion que vous venez d’avoir sur les données. En ce qui concerne l’avenir et la compréhension, je crois comprendre qu’il manque des données, et vous vous êtes montrée très franche à ce propos. Vous avez souligné qu’il manque de données et que vous savez que votre compréhension des données comporte des lacunes, mais vous comptez aussi collaborer avec Statistique Canada dans l’avenir, comme vous venez de l’indiquer. Je me demande si vous comptez examiner les données sur les besoins des Noirs, des Autochtones et des communautés racialisées en matière de garde d’enfants. J’aimerais vraiment savoir si vous avez l’intention d’obtenir des données désagrégées qui permettront de faire la lumière sur l’abordabilité et l’accessibilité de la garde d’enfants pour ces groupes du Canada, juste pour nous donner une idée de l’incidence que cet investissement initial aura sur eux. C’est la première question que je vous poserais.

Mme Hall : Je vous remercie de la question.

Il est certainement très important de surveiller l’incidence de l’apprentissage et de la garde des jeunes enfants sur les groupes définis comme vulnérables dans le cadre. Les provinces et les territoires fournissent à l’heure actuelle certaines données sur l’effet du financement sur les familles à faible revenu ou d’autres groupes.

Quant aux données désagrégées sur les Noirs et les communautés racialisées, elles se font rares. Il est donc difficile de déterminer les ensembles de données qui sont disponibles et la manière dont la situation peut être évaluée efficacement. Statistique Canada a effectué des travaux de couplage de données qui, selon moi, porteront fruit dans l’avenir, car nous disposerons ainsi de données désagrégées et d’analyses intersectionnelles en plus grand nombre pour mieux comprendre l’incidence de l’apprentissage et de la garde des jeunes enfants, ainsi que la portée du programme en comprenant comment les diverses communautés du pays en bénéficient.

La sénatrice Moodie : Je vous remercie.

Je veux approfondir un peu plus la question à laquelle vous avez fait allusion dans vos échanges avec la sénatrice Dasko au sujet des fournisseurs privés et des fournisseurs sans but lucratif qui pourraient être inclus dans le spectre des fournisseurs dans ce domaine. Vous n’êtes pas entrée dans les détails, mais j’ai l’impression que les attentes relatives aux normes et à la qualité joueront un rôle prépondérant dans le cadre de cet exercice et seront liées très étroitement au financement. Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet?

Mme Hall : Je vous remercie.

La qualité est le fondement même du réseau que le gouvernement entend instaurer avec le budget. La grande qualité constitue un des éléments fondamentaux clés du nouveau réseau et sera extrêmement importante. Souvent, la réglementation sert de moyen pour assurer la qualité des services. Elle ne constitue pas une panacée : elle établit une norme minimale. Elle fixe une norme en ce qui concerne les ratios, les programmes, l’espace physique, et cetera. Le cadre et le financement fédéral mettent l’accent sur les services réglementés pour ajouter un degré de garantie de qualité et de sécurité pour les enfants pris en charge.

La qualité fera partie des discussions lors des négociations avec les provinces et les territoires afin de voir comment nous pouvons travailler de concert afin d’offrir les services de garde de la plus haute qualité possible, données probantes à l’appui. De bonnes recherches ont été publiées récemment sur la qualité. En fait, il existe un corpus datant d’un certain nombre d’années, et les nouvelles données publiées par diverses sources devraient nous aider à déterminer la direction à emprunter en nous permettant de savoir ce qui améliore le plus la qualité de l’apprentissage et de la garde des jeunes enfants.

[Français]

La sénatrice Mégie : Je remercie Mme Hall. Le système québécois de garde d’enfants est considéré comme un modèle, et la province est un peu la pionnière pour ce type de services. Cependant, il lui reste un défi à relever, et c’est celui de l’utilisation de ces services par des familles fortunées qui entre en concurrence avec l’utilisation des services de garde par les familles à faible revenu. Selon vous, est-ce un problème? Si oui, est-ce que ce problème pourrait être évité dans le système que vous êtes en train de mettre en place dans d’autres provinces? S’il y a des mesures qui permettraient de prévenir cela, y avez-vous déjà pensé?

[Traduction]

Mme Hall : Je vous remercie de la question.

Le modèle québécois fait certainement figure de modèle pour le reste du Canada. Il est en place depuis un certain nombre d’années et représente une belle réussite. Il n’est cependant pas parfait et nous pouvons tirer des leçons de l’expérience du Québec.

Lors de l’implantation du réseau pancanadien, il faudra veiller à ce que les familles à faible revenu et les familles issues de communautés racialisées, de communautés de langue officielle en situation minoritaire et d’autres groupes du pays aient accès à des services d’apprentissage et de garde des jeunes enfants de qualité. Il importera désormais d’assurer un accès équitable à ces services, et c’est un point qui fera l’objet de discussions et de négociations avec les provinces et les territoires lorsque nous chercherons à conclure avec des accords bilatéraux.

La sénatrice Omidvar : Je vous remercie de témoigner devant nous aujourd’hui, madame Hall.

Comme vous pouvez l’imaginer, nous sommes tous enchantés et enthousiasmés d’être enfin sur le point de créer un programme national de garde d’enfants au pays. Je veux vous interroger sur la première année et la somme de 2,95 milliards de dollars que vous dépenserez, car cette première année pourrait bien donner le rythme et jeter les fondements de la réussite. À la fin de la première année, quand vous aurez — espérons-le — dépensé les 2,95 milliards de dollars, de quoi aura l’air la réussite, selon vous?

Mme Hall : Je vous remercie de cette question, qui est fort intéressante.

Le montant de 2,95 milliards de dollars est prévu pour la première année. Dans le budget, le gouvernement s’est fixé comme premier objectif de réduire de 50 % les frais des services de garde réglementés dans le réseau d’ici la fin de 2022. Le financement de cette première année ne peut pas nécessairement être considéré isolément, mais doit être vu comme une première étape vers l’atteinte de ce premier jalon afin de mettre le réseau sur la voie de la réussite à long terme. Des éléments comme le soutien de la main-d’œuvre, une vive attention à l’inclusion et la réussite de la mise en œuvre des investissements du Fonds pour l’accessibilité afin de contribuer à garantir l’accessibilité physique aux centres de la petite enfance joueront également un rôle important dans l’établissement des fondations.

La sénatrice Omidvar : Si vous êtes incapables de dépenser la somme de 2,95 milliards de dollars, pouvez-vous reporter ce montant ou se perdra-t-il dans les limbes du Trésor?

Mme Hall : Deux choses peuvent se produire ici.

Si nous ne concluons pas d’accord avec une province ou un territoire, alors le crédit législatif pour l’exercice concerné expirera. Nous devrons alors demander un report en passant par le processus habituel des appropriations et du budget supplémentaire des dépenses afin d’obtenir le financement. L’affaire relèverait du ministre des Finances, bien entendu.

Par contre, si nous concluons un accord, mais que la province ou le territoire ne peut dépenser entièrement les fonds au cours de l’exercice, alors les accords bilatéraux prévoient des dispositions de report permettant de reporter certaines parties du financement à l’exercice suivant, avec l’aval d’Emploi et Développement social Canada. Cette mesure, soigneusement encadrée, fournit cette souplesse supplémentaire.

La sénatrice Omidvar : Je vous remercie. C’est bon à savoir. Cela dépend de province en province, comme toujours.

Mme Hall : Cela dépendra des circonstances, oui.

La sénatrice Omidvar : Je veux passer à la main-d’œuvre et aux éducatrices et éducateurs de la petite enfance. Je crois comprendre, d’après votre exposé, qu’ils passeront d’un statut non réglementé à un statut réglementé au sein du réseau, ce qui constituera toute une transition pour de nombreux employés de ce secteur. Il s’agit en grande partie d’immigrantes et de femmes des minorités visibles, qu’elles travaillent dans des garderies informelles ou formelles dans de grands centres urbains. Envisage-t-on d’accorder un droit acquis dans le nouveau réseau ou est-ce qu’il y aura une coupure nette entre les personnes qui seront réglementées et feront partie du réseau, et celles qui — pour une raison quelconque — ne peuvent pas être réglementées et en seront exclues?

Mme Hall : Je vous remercie de la question. Permettez-moi de revenir un peu en arrière.

Le financement fédéral actuel est destiné aux services de garde réglementés. Dans le réseau pancanadien, on entend maintenir l’approche dans le cadre de laquelle le financement fédéral soutiendra les services de garde réglementés, et les provinces et les territoires pourront déterminer si et comment ils veulent financer les services de garde non réglementés dans leur réseau. Pour l’instant, le gouvernement fédéral met l’accent sur les services de garde réglementés. C’est un des éléments fondamentaux du nouveau réseau.

La sénatrice Omidvar : Offrez-vous du soutien aux provinces pour renforcer la capacité du personnel non réglementé de devenir réglementé?

Mme Hall : En ce qui concerne le financement de la main-d’œuvre, les provinces et les territoires disposeront d’une certaine marge de manœuvre quant à l’utilisation des fonds. En outre, on peut entreprendre des démarches — avec le financement fédéral fourni ou les ressources provinciales et territoriales, par exemple — pour voir comment on peut aider les propriétaires de garderie actuellement non réglementées à s’intégrer au réseau réglementé.

La sénatrice Omidvar : D’accord. Je vous remercie beaucoup de ces réponses. Je vous en suis très reconnaissante.

Mme Hall : Je vous remercie.

La sénatrice Moncion : Ma question porte sur ce que vous avez dit à propos de l’investissement. Pour chaque dollar investi, on récolterait de 1,50 à 2,80 $. Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur la productivité?

Mme Hall : Volontiers. Je vous remercie de la question.

Le sujet a fait l’objet de maints écrits. Les données économiques et l’éventail d’études qui ont été entreprises — y compris celles qui l’ont été tout récemment — mettent en exergue l’importance économique et l’incidence des services de garde d’enfants. Cette incidence se manifeste à long terme. Les services de garde d’enfants aident les femmes et les familles à travailler, ont un effet sur la croissance et le PIB et, par voie de conséquence, ont un impact sur les revenus et les dépenses du gouvernement.

Dans l’ensemble, on estime que l’incidence des services de garde d’enfants — ou ce qu’on peut appeler le rendement de l’investissement — va de 1,50 à 2,85 $ . De plus, d’autres estimations portent sur des parties de la question ou ont une portée plus large.

La sénatrice Moncion : Je vous remercie.

Il n’a pas été beaucoup question de la productivité découlant de l’apprentissage et de la garde des jeunes enfants. Nous n’en avons pas entendu beaucoup à ce sujet comparativement aux dépenses.

J’ai d’autres questions à vous poser, dont une sur les mesures d’encadrement. Vous avez parlé des facteurs que vous envisagez d’appliquer universellement, comme la reconnaissance des compétences provinciales, la réduction des frais — un élément important de l’équation — et la disponibilité d’une main-d’œuvre suffisante afin d’assurer la qualité de l’investissement. Pourriez-vous traiter des mesures d’encadrement? Comment surveillerez-vous les fonds qui seront versés et l’usage qui en sera fait?

Mme Hall : Je vous remercie de la question.

La surveillance et l’encadrement constituent des éléments importants. Les sommes versées étant substantielles, il importe certainement de veiller à ce qu’elles soient dépensées aux fins prévues.

À l’heure actuelle, avec les accords existants, de rigoureuses mesures de reddition de comptes sont déjà en place. D’abord, chaque province ou territoire doit faire rapport annuellement des résultats des investissements fédéraux au gouvernement fédéral. Une fois ces rapports analysés, nous publions un rapport national. Le rapport de 2017-2018 a été rendu public. D’autres rapports seront publiés au fil du temps afin de donner un aperçu de la manière dont les fonds sont utilisés. La reddition de compte est en soi importante.

En outre, certaines dispositions exigent que les provinces et les territoires présentent des états financiers vérifiés au gouvernement fédéral afin de faire état de l’utilisation des fonds. Cette mesure de garantie supplémentaire permet de montrer exactement comment les fonds ont été dépensés. Dans l’avenir, il est attendu que les mêmes genres de mesures joueront un rôle important dans la reddition de comptes sur les fonds accordés.

La sénatrice Moncion : Je vous remercie.

La présidente : Nous avons le temps d’effectuer un bref second tour. Si nous nous en tenons tous à une question et une réponse, tout le monde aura l’occasion d’intervenir.

La sénatrice Bovey : Madame Hall, j’ai beaucoup aimé ce que vous avez dit sur les territoires. Je porte un grand intérêt au Nord, aux Inuits, à l’Arctique et aux petites communautés qui sont intégrées malgré la distance qui les sépare. Tout en comprenant que vous ne pouvez pas entrer dans les détails, je me demande si vous pourriez parler brièvement de la disponibilité de la main-d’œuvre et expliquer comment vous espérez pouvoir renforcer les capacités des services de garde d’enfants pour qu’ils soient conformes à la réglementation.

Mme Hall : Je vous remercie.

Nous savons certainement qu’il est difficile d’offrir des services de garde d’enfants dans le Nord, avec la dispersion et la distance. Les territoires ont, dans l’ensemble, fait bon usage des fonds qui leur ont été accordés pour la formation de la main-d’œuvre, trouvant notamment de manières novatrices d’offrir de la formation à la main-d’œuvre existante. Ils ont pu s’adapter pendant la pandémie de COVID afin de pouvoir continuer de fournir cette formation malgré les contraintes liées aux déplacements et les autres problèmes causés par la COVID. Dans l’avenir, la main-d’œuvre constituera certainement un élément important pour les territoires.

Je dirais aussi que je n'ai pas beaucoup parlé de l’initiative sur l'apprentissage et la garde des jeunes enfants autochtones aujourd’hui. Les communautés des Premières Nations, inuites et métisses reçoivent un financement substantiel — venant d’une enveloppe distincte du financement provincial-territorial — qui soutient également la qualité et les services de garde d’enfants gérés par les autochtones, y compris chez les Inuits.

La sénatrice Dasko : J’ai une question sur le cadre de réglementation qui est utilisé. S’agit-il d’un cadre composé d’éléments établis par le gouvernement fédéral ou du cadre de réglementation d’une province, de telle sorte que l’établissement est considéré, comme réglementé s’il cadre avec la définition provinciale de la réglementation? C’est un peu une question générale. Juste pour aller un peu plus profondément, le cadre de réglementation inclut-il quoi que ce soit sur les niveaux minimaux de formation ou de dotation dans les services de garde d’enfants? C’est un peu une question mixte.

Mme Hall : C’est excellent. Je vous remercie.

La réglementation de la garde d’enfants étant de responsabilité provinciale et territoriale en vertu de la Constitution, ce sont les règlements provinciaux et territoriaux qui régissent le domaine dans chaque province et territoire. On retrouve de nombreux éléments communs à l’échelle du pays, mais aussi des caractéristiques propres à chaque gouvernement. Ces règlements ont évolué au fil du temps à mesure que les réseaux prenaient de l’ampleur, s’adaptant aux priorités des habitants de la province ou du territoire.

De façon générale, les règlements exigent une formation minimale obligatoire et précisent les ratios de dotation, potentiellement la superficie en mètres carrés par enfant en fonction de l’âge, le temps passé à l’extérieur, la sorte de techniques de modification du comportement qui peuvent être utilisées, le cas échéant, la nourriture à servir, les heures de repas et la quantité de nourriture à fournir. Ils établissent réellement le contexte entourant la garde d’enfants. Ils ne constituent pas une panacée; ils fixent une norme minimale, et cette norme encadre le réseau dans chaque province ou territoire.

Le sénateur Kutcher : Je pense que nous convenons tous qu’il faut disposer de solides données longitudinales pour comprendre l’incidence de ces interventions. Il n’est nul besoin de réinventer la roue. Avant la pandémie, Statistique Canada a effectué l’Enquête canadienne sur la santé des enfants et des jeunes auprès de quelque 45 000 jeunes de 0 à 18 ans dans toutes les régions du pays. Cette enquête a déjà été réalisée. La méthode est fort rigoureuse, mais nécessite quelques améliorations ici et là. Il serait également possible de l’améliorer avec un échantillon précis d’enfants de moins de six ans, que l’on suivrait pour colliger des données longitudinales. Cette approche présenterait aussi l’avantage d’englober le reste des enfants canadiens. Êtes-vous en discussions avec Statistique Canada pour potentiellement établir un lien avec une enquête canadienne améliorée et renforcée sur les enfants et les jeunes afin de répondre à ces questions?

Mme Hall : Je vous remercie de la question.

Nous maintenons une excellente communication avec Statistique Canada à divers égards. Nous avons financé de nouvelles études, comme l’Enquête sur les modes d’apprentissage et de garde des jeunes enfants, ou EMAGJE, laquelle offre une nouvelle source de données. Nous comptons mener des enquêtes sur les fournisseurs. Statistique Canada a effectué certains travaux avec le Registre des entreprises pour nous aider à mieux répertorier les entreprises de garde d’enfants. À cela s’ajoute un éventail d’études de recherche qui ont été entreprises.

Pour ce qui est de dire ce qu’il est possible de faire avec l’Enquête longitudinale nationale sur les enfants et les jeunes, ou ELNEJ, ces travaux sont en cours. Nous étudions un certain nombre de possibilités afin de déterminer ce qui pourrait être fait avec l’enveloppe budgétaire disponible et d’établir la manière la plus efficace de procéder.

Statistique Canada réfléchit également à l’usage de l’échantillon de l’ELNEJ et à ce qui pourrait être fait pour utiliser ces données aujourd’hui et pour déterminer s’il est possible d’utiliser cet échantillon avec des méthodes novatrices. Aucune décision n’a été arrêtée, mais Statistique Canada cherche à voir quelle utilisation cette ancienne enquête pourrait avoir dans l’avenir.

Le sénateur Kutcher : Je vous remercie.

La sénatrice Moodie : Madame Hall, je veux vous poser une brève question sur votre vision de l’avenir. Le Budget de 2021 accorde 30 milliards de dollars sur cinq ans, il me semble, pour établir et élargir le réseau universel d’apprentissage et de garde des jeunes enfants. Vous avez brièvement traité de la première année et de ce que vous vouliez réaliser, énumérant ce que vous considérez comme des facteurs de réussite, comme la réduction des frais, le soutien de la main-d’œuvre et l’investissement des fonds pour l’accessibilité. Comment voyez-vous l’année suivante et celles qui suivront? Comment pensez-vous dépenser jusqu’à 30 milliards de dollars?

Mme Hall : Je vous remercie de la question.

Pour ce qui est de dire comment nous envisageons les cinq prochaines années et où nous finirons par arriver, c’est une question très importante. Nous avons deux principaux jalons, le premier étant la réduction de 50 % des frais d’ici 2022, et le second, l’instauration de frais de 10 $ par jour d’ici 2025-2026. Ce sont là les deux objectifs quantitatifs figurant dans le budget. À mesure que s’écouleront les cinq années de l’initiative, l’atteinte de ces deux jalons constituera un élément clé de la réussite.

La présidente : Je vous remercie. Cela répond-il à votre question pour l’instant, sénatrice Moodie?

La sénatrice Moodie : Oui.

La sénatrice Omidvar : Je voudrais réorienter légèrement la discussion vers la participation des femmes au marché du travail. On présume que la garde d’enfants permettra à un plus grand nombre de femmes de travailler, comblant du même coup l’écart de participation entre les hommes et les femmes. C’est une présomption raisonnable à faire, mais disposez-vous de prévisions et de projections quant aux jalons et aux indicateurs à mesurer, alors que nous mettons en œuvre la stratégie? Quelles sont vos prévisions sur l’entrée de femmes sur le marché du travail grâce à la garde d’enfants? Au fil du temps, des hommes pourraient entrer sur le marché du travail également. Je veux simplement que vous me donniez une idée de la manière dont vous pensez que cette tendance évoluera dans l’avenir avec la disponibilité de services de garde d’enfants.

Mme Hall : Je vous remercie.

La disponibilité des services de garde d’enfants aidera certainement les femmes et d’autres personnes à entrer sur le marché du travail. Ce sera assurément le cas des mères qui, à titre de deuxièmes titulaires de revenu dans le couple, gagnent le revenu le moins élevé. Cela pourrait potentiellement aider les chefs de famille monoparentale. Toutes sortes de parents pourraient en bénéficier.

Les gens pourraient être touchés de diverses manières. D’abord, si les frais de garde d’enfants sont plus bas, les gens pourraient décider d’aller travailler. Par exemple, une famille peut débourser 1 500 $ par mois en frais de garde pour deux bambins. C’est une dépense substantielle qui peut décourager le second titulaire de revenu à prendre un emploi ou à se rendre au travail, puisque les frais de garde sont très élevés.

En outre, le fait de bénéficier de services de garde fiables pourrait en inciter certains à travailler davantage, augmentant ainsi leur effort de travail. S’ils travaillent par quarts de travail, ils pourraient en effectuer un de plus s’ils peuvent confier leurs enfants à des services de garde la fin de semaine, etc.

Le budget contient une prévision d’impact. Je pense que ce sont quelque 240 000 personnes qui pourraient entrer sur le marché du travail. Le budget décrit ensuite l’incidence que cela pourrait avoir.

Le Québec permet de tirer des leçons intéressantes à ce chapitre. Quand on examine l’incidence sur la participation au marché du travail, particulièrement celle des femmes, pendant la mise en œuvre du réseau de garde d’enfants du Québec, on observe un effet substantiel.

La sénatrice Omidvar : Je vous remercie.

La sénatrice Moncion : Ma question porte sur les salaires. À l’Île-du-Prince-Édouard, par exemple, les salaires sont très bas chez les fournisseurs de services de garde d’enfants. Le personnel change continuellement. Au Québec, je sais que ces travailleurs sont syndiqués. Quelles mesures d’encadrement envisagez-vous d’instaurer pour porter les salaires à un niveau viable pour le réseau et pour garder les travailleuses sur le marché du travail? Les accords que vous conclurez avec les provinces contiendront-ils des dispositions à ce sujet?

Mme Hall : Je vous remercie de la question.

Le recrutement et le maintien en poste des éducatrices et éducateurs de la petite enfance constituent une question très importante dans le cadre de l’instauration du réseau pancanadien. La somme de 420 millions de dollars accordée cette année afin de soutenir la main-d’œuvre vise réellement à tenir compte de ces défis et à aider les provinces et les territoires à déployer des efforts précoces pour attirer et conserver la main-d’œuvre.

Comme le budget le souligne, les salaires ne sont certainement pas élevés dans ce domaine. Alors que nous instaurerons le réseau pancanadien, nous collaborerons avec les provinces et les territoires à propos du financement des dépenses d’exploitation fourni au sein de leurs réseaux afin de réduire les frais, d’améliorer la qualité et de rémunérer les travailleurs à leur juste valeur.

La sénatrice Moncion : La syndicalisation du réseau pancanadien ou des fournisseurs de services de garde d’enfants pourrait permettre à toutes ces travailleurs de gagner de bons salaires, mais je vous remercie.

La présidente : Je vous remercie beaucoup d’avoir répondu à nos nombreuses questions, madame Hall. Vous nous avez été d’une aide considérable.

[Français]

Nous sommes maintenant prêts à entendre nos prochains témoins, alors que nous continuons notre étude de la section 34.

Nos témoins sont Mme Morna Ballantyne, directrice générale de l’organisation Child Care Now; M. Craig Alexander, président du blogue Alexander Economic Views, économiste en chef et conseiller de la haute direction chez Deloitte Canada, ainsi que, à titre personnel, M. Ken Boessenkool, professeur praticien à la Fondation J.W. McConnell de l’École de politiques publiques Max Bell de l’Université McGill.

Nous allons commencer par Mme Ballantyne, qui sera suivie de M. Alexander et de M. Boessenkool.

[Traduction]

Morna Ballantyne, directrice générale, Child Care Now : Je vous remercie, madame la présidente et honorables sénateurs.

Je m’appelle Morna Ballantyne, directrice générale chez Child Care Now, l’association nationale de promotion de la garde d’enfants.

Dans son discours du budget, la ministre des Finances, Chrystia Freeland, a indiqué que le plan du gouvernement en matière de garde d’enfants constitue le point culminant d’un demi-siècle d’efforts. En effet, mon organisation a été fondée il y a 40 ans dans la foulée d’une conférence sur la politique nationale qui a réuni 900 délégués, principalement des femmes, pour réagir à l’augmentation... [Difficultés techniques]

La présidente : Pendant que nous tentons de résoudre le problème de son, nous entendrons nos autres témoins. Espérons que Mme Ballantyne pourra nous revenir plus tard.

Craig Alexander, économiste en chef et conseiller de la haute direction, Alexander Economic Views et Deloitte Canada : Je vous remercie beaucoup de m’offrir l’occasion de vous parler d’une question économique cruciale.

Le fait est qu’en plus d’avoir provoqué une crise sanitaire et une crise économique, la pandémie a révélé certaines des faiblesses structurelles très profondes du Canada. Nous l’avons constaté avec la faiblesse des prestations d’assurance-emploi qui allaient être versées. La pandémie a mis en lumière les problèmes qui se posent quant aux soins prodigués aux aînés, mais aussi l’importance cruciale de la garde d’enfants au sein de l’infrastructure économique.

Je suis économiste appliqué et prévisionniste économique. J’ai passé des années dans des institutions financières, notamment à titre d’économiste en chef à la Banque TD, et je suis actuellement conseiller de la haute direction chez Deloitte. Vous trouverez peut-être étrange qu’un macroéconomiste traite de l’éducation de la petite enfance, mais au cours des 10 dernières années, j’ai réalisé un certain nombre d’études de cas économiques.

À quoi devons-nous réfléchir si le gouvernement entend subventionner la garde d’enfants? Pendant la pandémie, nous avons pu constater qu’il faut absolument disposer de services de garde pour que les parents puissent travailler. La réaction naturelle consisterait peut-être à se dire que nous savons maintenant que la garde d’enfants est importante, mais ce qu’il faut, c’est se demander comment les enfants occupent leur temps quand ils sont en service de garde, car il y a là une occasion de développer leurs ensembles de compétences. De fait, les données sur le développement du cerveau nous indiquent que les enfants commencent à apprendre et à se développer à un très jeune âge, longtemps avant leur entrée à l’école primaire. Cela signifie que les programmes d’apprentissage préscolaire peuvent les aider à développer des compétences cognitives et sociales qui les aideront à mieux se débrouiller dans la vie. Ainsi, je pense non seulement que tout investissement de fonds publics devrait servir à offrir des services de garde d’enfants, mais aussi que ces derniers devraient inclure un rigoureux volet d’apprentissage préscolaire.

Le Canada a toujours insuffisamment investi dans l’apprentissage préscolaire. Quand on compare ses taux d’inscription aux programmes d’apprentissage préscolaire à ceux des autres pays de l’OCDE, on constate qu’ils sont bas. La durée est également faible; or, la durée est le facteur qui a le plus d’incidence sur le développement des compétences. Plus de temps les enfants bénéficient de l’apprentissage préscolaire, meilleur sera le développement de leurs compétences. En outre, au Canada, l’apprentissage préscolaire est davantage offert par des éducatrices et des éducateurs de la petite enfance non certifiés; il y a donc aussi un problème de qualité.

Selon moi, du point de vue économique, les investissements effectués à cet égard ont des avantages pour les parents, les enfants, la société, l’économie et le gouvernement. L’expérience du Québec témoigne des effets que la garde d’enfants peut avoir sur la participation au marché du travail. Les travaux que j’ai réalisés révèlent qu’environ 90 000 femmes pourraient s’ajouter sur le marché du travail, mais certains estiment que ce chiffre pourrait atteindre 300 000. La garde d’enfants contribue également à éliminer des obstacles à la réussite des femmes sur le marché du travail, car ce sont elles qui assument une part disproportionnée des responsabilités familiales en prenant soin des enfants. Une corrélation n’est pas un lien de causalité, mais si on jette un coup d’œil aux pays affichant des taux d’inscription à l’apprentissage préscolaire très élevés, on constate que les écarts salariaux y sont beaucoup plus faibles. La garde d’enfants réduit aussi le stress chez les parents, qui sont ainsi plus productifs.

Outre les avantages pour les parents, il y a des avantages pour les enfants, découlant essentiellement de la formation de leurs compétences essentielles et générales. On remarque souvent que certaines études montrent que sur le plan des compétences cognitives, les enfants privés d’éducation préscolaire peuvent se rattraper, mais on peut se demander à quel prix. Par exemple, la Colombie-Britannique dépense 1,6 milliard de dollars par année dans des programmes d’éducation spécialisée. Je suis d’avis que si nous faisons mieux à ce chapitre et que si plus d’enfants suivent des programmes d’éducation préscolaire de grande qualité, nous résoudrons les problèmes de développement plus tôt et réduirons ainsi le coût de certains besoins en éducation spécialisée dans les réseaux d’enseignement primaire et secondaire.

L’effet multiplicateur sur l’économie et le rendement de l’investissement obtenus ont fait l’objet de moult études. Les nombreuses études universitaires réalisées sur le sujet estiment que chaque dollar investi rapportera de 1,5 à 5 $. Quand j’ai travaillé pour le Conference Board du Canada, j’ai participé à une étude à très long terme sur les avantages globaux, qui ne portait pas seulement sur l’incidence sur la participation au marché du travail, soit là où l’effet multiplicateur est souvent le plus faible. Quand on commence à évaluer l’incidence potentielle sur les enfants et l’économie, on constate que l’effet multiplicateur est de loin supérieur à celui figurant dans le budget. Dans le budget, je considère qu’il est absolument raisonnable d’utiliser l’estimation la plus prudente. Tout ce que je dis, c’est que l’effet risque d’être plus substantiel que prévu. Si on induit cet effet multiplicateur économique supplémentaire, cela se traduira par une augmentation des revenus dans l’économie et, par voie de conséquence, des impôts. Il y a donc un effet fiscal. L’une des études portant sur l’expérience du Québec montre que dans l’ensemble, sur une période de 12 ans, le réseau québécois a généré plus de revenus que de coûts.

Il y a aussi des avantages pour la société. Les enfants qui bénéficient le plus de l’apprentissage préscolaire sont ceux qui viennent de familles démunies et de ménages à faible revenu. On pourrait donc penser que la réaction stratégique consisterait à simplement cibler ces familles et ces ménages, mais ce serait une erreur. Nous savons, pour avoir observé les centres d’apprentissage préscolaire et les résultats qu’y récoltent les enfants, que les enfants de classes composées de participants issus d’un large spectre de contextes socioéconomiques obtiennent de bien meilleurs résultats que ceux qui suivent des programmes ciblant expressément un segment.

Selon moi, l’apprentissage préscolaire s’inscrit dans un éventail de moyens qui peuvent nous aider à éliminer les inégalités. Il peut également contribuer à résoudre certains problèmes de pauvreté en faisant augmenter la participation au marché du travail. En 2017, par exemple, 43 % des familles dont la mère ne travaillait pas ont gagné un revenu annuel inférieur à 36 000 $. Dans mon esprit, il s’agit d’un investissement bénéfique pour l’économie à court terme, car il accroîtra la participation au marché du travail alors que la main-d’œuvre vieillit. Je pense qu’il permettra également de réduire les obstacles auxquels les femmes se heurtent sur le marché du travail. C’est bon pour les enfants et pour l’économie. Je pense que cet investissement permettra aux enfants et aux travailleurs d’être plus résilients à long terme. Je recommande fortement la création d’un réseau d’apprentissage et de garde d’enfants universel et de haute qualité reposant sur un programme pédagogique et offert par des éducatrices et des éducateurs certifiés.

Nous devons veiller à ce que le financement soit adéquat et continu. Je crois qu’il faut un financement semblable à celui associé à l’éducation, et non le recours aux crédits d’impôt, parce que je crois qu’au bout du compte, c’est une question d’éducation. Nous aurons besoin d’un nombre suffisant d’éducateurs de la petite enfance certifiés, ce qui signifie que nous devrons probablement leur offrir un meilleur salaire afin de régler certains problèmes comme le haut taux de roulement et l’abandon de la profession après quelques années de travail parce qu’elle ne permet pas d’obtenir un revenu adéquat. Nous devons veiller à ce que les fonds investis permettent d’atteindre les objectifs qui ont été fixés. Il est donc très important pour le gouvernement d’investir dans les données et le suivi du rendement et des résultats.

Je crois qu’il est aussi important d’accroître la sensibilisation à l’égard des avantages de l’investissement dans ce domaine, parce que la plupart des gens qui s’y opposent pensent que ce métier n’est qu’une forme de gardiennage bonifié et ne comprennent pas vraiment de quoi nous parlons. Nous parlons ici d’éducation. Dans le cadre d’une tribune téléphonique à laquelle j’ai participé, je parlais d’un rapport sur l’éducation de la petite enfance que nous avions rédigé lorsque je travaillais à la Banque TD. Une personne a appelé et a dit ceci : « Je ne veux pas que l’argent de mes impôts serve à cela. Je suis passée devant l’une de ces installations et j’ai regardé à l’intérieur. Savez-vous ce que faisaient ces enfants? Ils jouaient. Pourquoi l’argent de mes impôts devrait-il financer le jeu des enfants? » J’ai dû me mordre la langue. Toutes sortes de réponses me sont passées par la tête. Je me disais : « Non, ne dis pas ceci; ne dis pas cela. » J’ai fini par lui dire : « Vous savez que c’est par le jeu que les enfants apprennent, n’est-ce pas? » Il y a de fausses perceptions à l’égard du financement en matière d’éducation de la petite enfance. Je crois qu’il faut investir, mais aussi promouvoir les avantages de l’éducation. Au bout du compte, les investissements doivent couvrir les coûts opérationnels, mais aussi les infrastructures connexes.

Merci.

La présidente : Merci. Je suis certaine que nous vous poserons beaucoup de questions.

Ken Boessenkool, professeur praticien de la Fondation J.W. McConnell, École de politiques publiques Max Bell, Université McGill, à titre personnel : Honorables sénateurs, je vous remercie. Je passe tout de suite à mon discours de cinq minutes.

À l’heure actuelle, le système de garde d’enfants du Canada est associé à un ensemble d’outils stratégiques, notamment une aide pécuniaire et fiscale pour les parents et la réglementation et le financement des places en garderie. Ce système permet une grande souplesse.

Dans son dernier budget, le gouvernement fédéral a annoncé qu’il injecterait d’importantes sommes d’argent dans ce secteur. Il fait valoir que le financement fédéral sera octroyé dès que des accords bilatéraux auront été conclus, dans le but de réaliser des progrès importants en vue de bâtir un système qui fonctionne pour les familles.

Je crois que le plan comporte des éléments positifs. Premièrement, Ottawa entreprend le processus en sachant que la prestation des services de garde relève des gouvernements provinciaux. Le gouvernement fédéral n’a pas l’intention d’imposer une entente unique à toutes les provinces ou même aux neuf provinces autres que le Québec. À mon avis, c’est une bonne chose.

Aussi, ce plan mise sur les infrastructures déjà en place, ce qui permet de réduire les contributions parentales de moitié pour commencer, et de maintenir une contribution parentale à 10 $ par jour. Bien qu’il ne s’agisse que d’aspirations fédérales, le fait est qu’Ottawa a clairement l’intention de maintenir un système de paiement par les parents plutôt que de gonfler le système en vue de créer une pré-prématernelle gratuite et universelle dès l’âge de deux ans, comme certains l’ont proposé. Je crois que la participation continue des parents et le caractère adaptable du plan sont de bonnes choses.

Il contient toutefois des éléments négatifs. Premièrement, Ottawa ne fait rien pour régler le plus important programme de garde d’enfants qu’il gère. La déduction pour frais de garde d’enfants est un programme misogyne, conçu pour les gens riches. La déduction doit être un crédit remboursable afin d’être plus généreuse envers les familles à moyen et à faible revenu; elle doit se fonder sur le revenu familial et non sur celui du parent ayant le plus faible revenu, comme c’est le cas à l’heure actuelle. C’est une erreur que de ne pas modifier cette déduction.

De plus, malgré tout le tapage et l’excitation associés au budget, dans les faits, le plan en matière de garde d’enfants ne représente que la position initiale de négociation du gouvernement fédéral. Ce sont des aspirations, dont les résultats dépendront des négociations avec les provinces.

Du point de vue provincial, nous nous retrouvons à la même place qu’avant en ce qui a trait aux types de programmes de garde d’enfants. La seule différence, c’est que le gouvernement injecte de nouveaux fonds fédéraux pour bonifier ces programmes. À mon avis, les documents budgétaires n’établissent même pas clairement si les provinces doivent investir dans les programmes, malgré le souhait évident du gouvernement fédéral de voir les provinces fournir la moitié du financement. Toutefois, nous avons là une occasion.

Maintenant que le gouvernement fédéral a joué ses cartes, l’attention devrait se tourner vers les provinces. C’est à leur tour de jouer, collectivement ou individuellement, pour améliorer le système. Certaines provinces voudront peut-être copier le modèle québécois et offrir un programme à faible coût journalier, et un crédit d’impôt remboursable à ceux qui n’y ont pas recours. D’autres provinces pourraient réformer la partie provinciale de la déduction pour frais de garde d’enfants, comme l’a fait l’Ontario, afin de la transformer en crédit d’impôt remboursable, et proposer un programme de bons pour subventionner les nouvelles places en garderie, comme je l’ai évoqué dans un article que j’ai rédigé pour l’Université McGill. Une ou deux provinces voudront peut-être tenter de bâtir ce système universel et gratuit de pré-prématernelle pour les enfants de deux ans et plus, bien que le financement soit nettement insuffisant pour ce type de programme. De toute façon, ce serait une erreur, à mon avis. Chaque province devrait concevoir son propre système et déterminer le montant qu’elle souhaite y investir. Les provinces devraient réaliser leurs propres aspirations, et non celles du gouvernement fédéral.

Cette solution n’est pas parfaite, mais elle est typiquement canadienne. Nous sommes une fédération. En injectant des fonds dans les programmes provinciaux avant de conclure des ententes avec les provinces, Ottawa a fait les choses à l’envers, à mon avis. Je crois toutefois que les deux ordres de gouvernement peuvent améliorer les choses si c’est ce qu’ils souhaitent vraiment faire, ce qui profitera aux familles canadiennes.

Je vous remercie de m’avoir invité.

La présidente : Nous vous remercions pour votre déclaration.

Mme Ballantyne : Dans son discours budgétaire, la ministre des Finances Chrystia Freeland a décrit le plan du gouvernement pour la garde d’enfants comme étant l’aboutissement d’un combat d’un demi-siècle. En effet, mon organisation a été fondée il y a 40 ans, à la suite d’une conférence d’orientation nationale qui avait réuni 900 délégués, la plupart des femmes, pour s’attaquer à une crise de plus en plus grave en matière de garde d’enfants. C’était en 1982. La participation des mères de jeunes enfants au marché du travail augmente de manière significative depuis les années 1960 et sans un accès à des services de garde sécuritaires, elles devaient se contenter de solutions précaires. Bon nombre d’entre elles devaient travailler à temps partiel, tandis que d’autres ont dû abandonner complètement le marché du travail. Bien avant la pandémie, nous savions à quel point la garde d’enfants était importante pour le bien-être des enfants, la sécurité économique des familles — surtout des femmes —, ainsi que la force et la croissance économiques. Depuis 40 ans, nous disons que pour rendre abordables, accessibles et inclusifs l’apprentissage et la garde des jeunes enfants, il faut un système universel dans l’ensemble du Canada, géré et financé par le gouvernement fédéral.

Le gouvernement fédéral nous dit que cette fois-ci, il le fera. Le budget de 2021 prévoit consacrer 34 milliards de dollars au financement de l’apprentissage et de la garde des jeunes enfants au cours des cinq prochaines années, et au moins 9,2 milliards de dollars par année ensuite. Ces montants suffisent à convaincre toutes les provinces et les territoires de collaborer avec le gouvernement fédéral, mais s’il n’utilise pas son pouvoir de dépenser pour transformer les services de garde d’enfants, l’argent et l’occasion seront gaspillés. Le budget fédéral promet de réduire les frais de manière significative pour les parents. Il promet plus de garderies à but non lucratif et il répond au besoin d’augmenter les salaires des éducateurs à la petite enfance. Pour atteindre ses objectifs, le gouvernement fédéral devra négocier avec chaque province et chaque territoire.

Nous savons, d’après les données provenant du Canada et d’ailleurs, quels sont les éléments essentiels d’un bon système de garde d’enfants. Je vais vous parler de quatre de ces éléments.

Premièrement, les garderies accréditées doivent être entièrement financées par l’État. Les parents devraient financer une petite partie des services par l’entremise de frais abordables. Ainsi, l’accès aux garderies serait équitable et les fournisseurs de services ne miseraient plus sur la contribution des parents pour garder leurs portes ouvertes. C’est ce lien de dépendance qui a failli faire s’écrouler le système pendant la pandémie.

Deuxièmement, le gouvernement devrait être responsable d’élargir l’offre de services. Le marché ne devrait plus décider où, quand et comment les programmes de garde d’enfants sont offerts, et s’ils sont offerts ou non.

Troisièmement, il faut mettre en œuvre une stratégie pour aborder les questions de recrutement, de maintien en poste et de qualité des programmes. La rémunération concurrentielle doit être la priorité.

Quatrièmement, l’expansion du système doit se limiter aux secteurs public et à but non lucratif. C’est la seule façon d’atteindre l’objectif du budget : bâtir un système équitable et de grande qualité.

Les cyniques disent que la promesse budgétaire en matière de garde d’enfants ne sera jamais réalisée. Les pessimistes disent que le gouvernement fédéral outrepasse son mandat en imposant une solution universelle. Nous disons qu’il est possible de le faire, et de bien le faire, si les gouvernements misent sur les données probantes. Nous croyons que le gouvernement fédéral a le droit et l’obligation de construire des infrastructures sociales qui donneront aux parents un vrai choix en matière de garde d’enfants, qui permettront aux femmes d’avoir un emploi rémunéré et qui faciliteront la relance économique du pays.

Merci.

La présidente : Merci à vous trois. Nous avons beaucoup de questions à vous poser, mais peu de temps pour le faire. Nous tenions à connaître vos points de vue. Nous allons tenter d’être disciplinés dans nos questions. Nous allons d’abord entendre nos vice-présidentes.

La sénatrice Frum : Ma question s’adresse à M. Boessenkool. D’abord, bonjour.

Dans un éditorial du Financial Post, on dit que le plan minimise la complexité de travailler avec les provinces à l’établissement d’un programme à frais partagés, surtout en raison de l’état des finances provinciales, de l’augmentation prévue des coûts de soins de santé et de la tendance d’Ottawa de réduire sa part des coûts une fois les programmes en place. En termes simples, on ne sait pas si la plupart des provinces ont les moyens de mettre sur pied un nouveau programme d’une telle envergure avec le gouvernement fédéral. Monsieur Boessenkool, vos commentaires ont piqué ma curiosité. Vous dites que les provinces ne sont pas tenues de payer la moitié des coûts, mais c’est ainsi que peut fonctionner un tel programme. Pouvez-vous nous en parler davantage?

M. Boessenkool : Merci, sénatrice. Je suis heureux de vous revoir.

Je crois que ce qui se trouve dans le budget, c’est un point de départ pour la négociation, qui reflète les aspirations du gouvernement fédéral. Je ne veux pas entrer dans les détails juridiques de ce que peut ou non faire le gouvernement avec son pouvoir de dépenser, mais le comité devrait peut-être se pencher sur la question, parce qu’il y a des limites à ce qu’Ottawa peut imposer aux provinces en ce qui a trait à la forme et à la nature des programmes qu’elles conçoivent. D’après ce que je lis dans les documents et mes discussions avec des gens qui n’ont pas la même idée que moi de ce que devrait être la garde d’enfants, on n’exige pas des provinces qu’elles fournissent la moitié ou le double du financement. Le gouvernement fédéral a des aspirations, et il met son argent sur la table.

Depuis 2017, le gouvernement fédéral a conclu de nombreux accords avec les provinces en matière de garde d’enfants...

Daniel Charbonneau, greffier du comité : Monsieur Boessenkool, je vous demanderais de parler un peu plus lentement, s’il vous plaît.

M. Boessenkool : Je suis désolé. J’essaie d’en dire le plus possible.

Depuis 2017, le gouvernement fédéral s’est entendu au sujet d’un ensemble de principes avec les provinces, mais ce n’est pas un ensemble de mécanismes de prestation. Cette partie revient aux provinces. Le gouvernement fédéral ne gère aucun service de garde. Il n’en réglemente pas un non plus. Ce sont les provinces qui s’en chargent.

Comme je l’ai dit dans mon discours préliminaire, je crois que pour la suite, les provinces devront s’asseoir à la table. Elles devront établir ce qu’elles veulent financer avec l’argent du gouvernement fédéral. Elles doivent aussi désigner le financement supplémentaire qu’elles sont prêtes à octroyer, le cas échéant. Ainsi, nous aurons 10 programmes de garde d’enfants très différents au pays, qui reflètent les besoins des diverses provinces, ce qui est une très bonne chose, à mon avis. C’est exactement ce que nous devrions faire. Le gouvernement fédéral donne de l’argent aux provinces, qui décident de la façon de l’utiliser. Si les 10 programmes du pays sont différents, c’est très bien. C’est ainsi que fonctionne le fédéralisme.

La sénatrice Frum : Nul besoin d’être cynique, donc, pour dire que le plan, selon sa description actuelle, ne reflète pas ce qui se passera sur le terrain.

M. Boessenkool : Je crois que le plan, tel qu’il est actuellement décrit, pourrait être mis en œuvre dans certaines provinces. Toutefois, en ce qui a trait à l’idée que nous allons avoir des services de garde universels gratuits ou à 10 $ pour tout le monde, dans l’ensemble du pays : a) cela n’arrivera pas, parce que le financement offert ne représente qu’une fraction du coût d’un tel système; b) ce n’est pas ainsi que fonctionne le fédéralisme. Les provinces décident comment elles gèrent et supervisent le système de garde d’enfants. Les provinces vont décider de ce qu’elles veulent faire.

Selon ce que je comprends du budget, le gouvernement fédéral présente ses aspirations et les provinces y réagissent — comme je l’ai dit à plusieurs reprises —, et elles peuvent réagir de diverses façons. Je crois que le cadre du gouvernement fédéral est assez souple et ouvert pour permettre aux provinces d’y trouver leur compte, et qu’il y aura des négociations intéressantes avec elles.

La sénatrice Frum : Merci.

La sénatrice Bovey : Je remercie tous les témoins de leur présence. J’aimerais poser deux questions, rapidement : l’une à M. Alexander et l’autre à Mme Ballantyne.

Monsieur Alexander, vous avez dit que les gens quittaient la profession d’éducateur en garderie parce qu’elle ne permettait pas un cheminement professionnel. Ne croyez-vous pas que ce plan peut assurer un cheminement professionnel à ces personnes, afin qu’elles fassent carrière dans le domaine de l’éducation de la petite enfance?

Madame Ballantyne, sur votre site Web, vous faites référence à l’examen consultatif du système de garde d’enfants du Québec, qui prendra fin à la mi-juin. Pouvez-vous nous dire ce que vous pensez du modèle québécois et quelles seront les préoccupations soulevées dans le cadre de l’examen consultatif, à votre avis? Merci.

M. Alexander : En ce qui a trait au roulement du personnel dans le domaine, d’après mes discussions avec les éducateurs et les gestionnaires des centres de la petite enfance, bon nombre des diplômés — environ la moitié — ne travaillent pas en tant qu’éducateurs dans le domaine; ils n’utilisent pas le diplôme qu’ils ont obtenu. Parmi ceux qui travaillent dans le domaine, le taux de roulement est énorme, surtout autour de la cinquième année de travail. Les diplômés commencent à travailler dans le domaine, mais ont tendance à le quitter après cinq ans.

La sénatrice Bovey : Est-ce qu’on peut changer les choses?

M. Alexander : C’est l’une des questions importantes que je me suis posées. Souvent, la réponse est qu’en raison des échelles salariales, après cinq ans, les éducateurs se rendent compte qu’ils ne gagneront pas assez d’argent et ils tentent de trouver un emploi dans un autre secteur.

Lorsque j’ai créé divers modèles et que j’ai étudié les répercussions économiques des investissements dans ce domaine, je me suis rendu compte qu’il fallait augmenter les salaires. J’ai réduit l’écart entre le salaire des enseignants du primaire et celui des éducateurs de la petite enfance. Je l’ai réduit de moitié. Je ne l’ai pas comblé, mais j’ai tenté d’établir un salaire qui permettrait une conservation accrue du personnel ou qui inciterait un plus grand nombre de diplômés à faire carrière dans le domaine.

Mme Ballantyne : Je vous remercie pour votre question.

Je ne peux m’empêcher de faire un commentaire : dans sa réponse, Craig Alexander explique pourquoi la rémunération doit être la priorité.

En ce qui a trait au Québec, nous avons été très heureux d’entendre, dans le discours du Trône, l’énoncé économique et le budget, que le gouvernement allait se tourner vers le Québec afin de tirer des leçons et non d’importer ou d’imposer le modèle québécois.

Ce que bon nombre de personnes en dehors du Québec ne comprennent pas, c’est que la province n’a pas qu’un seul système. On peut dire qu’elle en compte au moins deux. Le Québec finance l’apprentissage et la garde des jeunes enfants de deux façons. Il subventionne directement les fournisseurs de services, tant ceux à but non lucratif que ceux à but lucratif. Il les finance directement — par l’entremise de ce qu’on appelle le financement opérationnel — et il finance indirectement les services en offrant un remboursement de taxe aux parents.

Le coût auquel tout le monde fait référence — le faible coût au Québec, qui est maintenant de 8,35 $ par jour et qui est indexé chaque année le 1er janvier — s’applique uniquement aux services de garde fournis et subventionnés directement par le gouvernement.

Ce que nous savons, d’après les études, c’est que la qualité des services de garde financés directement par le gouvernement est supérieure. Nous savons que les listes d’attente pour ces services sont importantes parce que la demande est très grande... Elle est plus grande que la demande pour les services de garde privés non subventionnés et non réglementés.

Ce modèle nous permet de tirer la leçon suivante : lorsqu’on met sur pied un tel système, il faut que les fonds publics soient directement consacrés à la prestation des services. Il ne faut pas donner l’argent aux parents, parce qu’on renforce la vision mercantile de la garde d’enfants. Il faut un financement public. L’offre doit être financée par le gouvernement.

J’aimerais corriger une chose dite par M. Boessenkool. Les gouvernements provinciaux n’exploitent pas non plus les services de garde. Au Canada — et même au Québec —, les services de garde sont exploités en grande partie par des organisations à but non lucratif, des particuliers et certaines organisations à but lucratif. Il ne s’agit pas d’un système géré et financé par l'État. Et cela ne fonctionne pas. Il faut changer les choses.

La présidente : Nous vous remercions pour vos commentaires.

Le sénateur R. Black : Je remercie les témoins de leur présence aujourd’hui. J’avais préparé des questions pour chacun d’entre eux. Je vais m’en tenir à une seule question pour le moment et si j’en ai l’occasion, j’en poserai d’autres plus tard. Sinon, ce n’est pas grave.

Monsieur Boessenkool, y a-t-il d’autres mesures stratégiques que le gouvernement canadien devrait ou pourrait mettre en œuvre pour mieux appuyer les familles qui veulent avoir accès aux services de garde?

M. Boessenkool : Merci, et merci à Mme Ballantyne de m’avoir corrigé. Je voulais dire qu’à l’heure actuelle, les provinces encadrent et réglementent les services de garde; je ne voulais pas dire qu’elles les financent et les exploitent. En fait, elles financent les services de garde.

Dans mon discours préliminaire, j’ai dit qu’à l’heure actuelle, le gouvernement offrait une déduction pour les frais de garde d’enfants. Cette déduction a été créée il y a longtemps. Elle se fonde sur le plus faible revenu du ménage. Elle reflète une vision misogyne de la garde d’enfants, voulant que le revenu secondaire d’une famille soit discrétionnaire. Je crois qu’il faut transformer la déduction pour les frais de garde d’enfants en un crédit d’impôt remboursable pour la garde d’enfants. Comme l’a fait valoir Mme Ballantyne, le Québec offre ce crédit aux nombreuses familles dont les enfants ne fréquentent pas un service de garde financé par l’État à 8,35 $ par jour. L’Ontario l’offre aussi depuis peu dans le cadre de son système de garde d’enfants. Ainsi, l’Ontario et le Québec offrent la meilleure aide fiscale an matière de garde d’enfants. Cette question devrait être une priorité pour le gouvernement fédéral, parce qu’il est responsable de la prestation du programme. Pourquoi n’améliore-t-il pas son propre programme avant de se mêler de ce que font les provinces? C’est une chose que je ne comprendrai jamais.

Je crois aussi que l’offre de places en garderie est importante. On peut voir les choses de cette façon : qu’arriverait-il si pour la naissance de leur enfant, les parents obtenaient un bon unique de 5 000 à 10 000 $, qui pourrait être donné à un service de garde? De nombreux parents d’un nouveau-né vivent un grand stress et de l’anxiété en raison du manque de places en garderie. Pourquoi ne pas leur donner un bon qu’ils pourraient offrir à un service de garde et ainsi créer de nouvelles places en garderie? Le financement serait donc dirigé vers les services de garde qui en ont besoin. Nous savons où naissent les enfants. Parfois, le gouvernement fédéral octroie un montant égal par habitant, et nous ne savons pas si l’argent va au bon endroit. Cette solution profiterait directement aux familles et injecterait plus d’argent dans le système afin de créer plus de places.

Ce sont les deux éléments hautement prioritaires, à mon avis : améliorer le soutien fiscal offert par le gouvernement fédéral et offrir aux nouveaux parents un bon pour faciliter la création de nouvelles places.

Le sénateur R. Black : Merci pour vos propositions.

La sénatrice Moodie : Je remercie les témoins de comparaître devant nous aujourd’hui. J’aime beaucoup entendre vos points de vue.

Ma première question s’adresse à M. Alexander. J’espère que Mme Ballantyne pourra la commenter également. La garde d’enfants est de plus en plus perçue à titre de politique économique qui favorise la prospérité. Quelle serait l’incidence d’un système universel de garderies — s’il était adopté — sur le PIB, sur notre productivité et sur les enfants à long terme?

La deuxième partie de ma question est la suivante : selon d’autres témoins, ce système comptera la participation de fournisseurs à but non lucratif et de fournisseurs privés, qui recevront un financement et devront respecter certaines exigences en matière de qualité et de productivité relatives à l’éducation de la petite enfance. Alors que nous discutons des répercussions à long terme, en aval, sur le bien-être des enfants — surtout en ce qui a trait à leur santé, à leur développement, à leur potentiel éducatif et à leur productivité à long terme —, croyez-vous que l’approche proposée par le gouvernement nous permettra d’atteindre un tel objectif?

M. Alexander : Je vous remercie pour votre question.

La productivité est prise en compte dans les prévisions relatives au rendement de l’investissement dans ce domaine.

L’investissement immédiat permet une participation accrue des femmes au marché du travail. Si des femmes compétentes sont forcées de quitter le marché du travail, la productivité s’en trouve réduite. La carrière des femmes qui s’absentent du marché du travail pendant un certain temps pour s’occuper de leurs enfants pour ensuite y revenir est souvent perturbée. Ces femmes peuvent accuser un certain retard, ce qui peut changer leur cheminement de carrière de façon permanente. Ainsi, on ne réalise pas le plein potentiel de ces personnes sur le plan de la productivité.

Pour ce qui est des enfants, on sait que les programmes d’éducation de la petite enfance de qualité peuvent améliorer les compétences cognitives et sociales. On parle ici de littératie, de numératie et de compétences en matière de réflexion. Sur le plan de la productivité, des études montrent que pour une augmentation de 1 % du taux de littératie, on augmente le taux de productivité du travail d’environ 1,5 %. Il s’agit d’un argument solide en matière de productivité.

De plus, en offrant un meilleur départ aux enfants afin qu’ils soient mieux préparés à l’école, ils pourront miser sur ces compétences tout au long du primaire et du secondaire. Il est plus facile et moins coûteux d’aborder les problèmes de développement des enfants le plus tôt possible. Un bon départ permet de mieux guider les enfants sur le chemin de la réussite. Les enfants dont le taux de littératie est plus élevé sont plus susceptibles de terminer leurs études secondaires. Ils sont plus susceptibles d’aller vers l’éducation postsecondaire, et de poursuivre leur éducation.

Pour l’avenir, nous avons besoin de gens qui ont les meilleures compétences possible. N’est-ce pas? Parmi les travailleurs touchés par la récession actuelle, ceux qui n’ont pas acquis les compétences de base que sont la littératie, la numératie et la pensée critique auront beaucoup de difficulté à perfectionner leurs compétences pour faire face aux changements du marché du travail que nous connaissons. De façon similaire, les enfants devront être le plus résilients possible. Pour les aider, il faut leur apprendre la base des compétences essentielles.

Est-ce que je crois que nous pouvons y arriver? La réponse est oui. Je suis tout à fait d’accord avec ce qu’a dit un autre témoin au sujet de l’État fédéral. C’est tout à fait correct de laisser les provinces mettre en œuvre le programme comme elles le souhaitent, mais si le gouvernement fédéral effectue un bon suivi et produit des données et des analyses de qualité au sujet des résultats pour les enfants, on constatera probablement qu’au fil du temps, les modèles préconisés sont ceux qui donnent les meilleurs résultats. Le gouvernement fédéral peut jouer un rôle très important et fournir des données probantes sur la situation relative à l’éducation et la garde d’enfants. Ainsi, les gouvernements provinciaux auront tendance à adopter un système qui améliorera la qualité des services.

Mme Ballantyne : J’aimerais ajouter une chose aux propos de M. Alexander. Il faut tenir compte d’un élément important lorsqu’on pense aux avantages de l’apprentissage et de la garde des jeunes enfants. La qualité des programmes est d’une grande importance, et elle dépend grandement de l’éducation, de la formation et du perfectionnement professionnel continu des intervenants. C’est pourquoi la rémunération est un élément essentiel... Parce qu’il est très difficile de trouver des éducateurs de qualité si on ne leur offre pas un salaire intéressant.

Je dirais aussi que dès le départ, le bien-être et l’inclusion sociale des enfants passent par un programme universel, et non par un programme auquel certains ont accès et d’autres non.

Pour ce qui est des répercussions économiques, nous avons commandé une étude qui utilisait les données recueillies par d’autres. J’aimerais vous donner quelques chiffres. Bien sûr, cette étude compte de nombreuses hypothèses, mais on peut examiner les mesures prises par d’autres administrations et d’autres pays qui ont mis en place un système universel financé par l’État. En Norvège, par exemple, 93 à 95 % des enfants de 0 à 12 ans étaient inscrits aux programmes de garde d’enfants. Pour atteindre un tel taux de participation, il faudra créer de nombreuses places, engager beaucoup de gens et renforcer un secteur qui est déjà assez solide : celui de l’apprentissage et de la garde d’enfants.

Nous estimons que dans 10 ans, si les choses sont bien faites, le secteur générerait entre 63 et 107 milliards de dollars en contribution supplémentaire au PIB du pays. En outre, 725 000 femmes de plus participeraient au marché du travail. Le secteur lui-même générerait 200 000 emplois supplémentaires, principalement chez les femmes, encore une fois. Cela entraînerait la création de divers emplois indirects liés aux intrants nécessaires au fonctionnement de secteurs comme le secteur de l’apprentissage et de la garde des jeunes enfants. Cela s’ajouterait à tous les avantages économiques dont M. Alexander a parlé concernant la santé et le bien-être des enfants.

La sénatrice Moodie : Merci beaucoup à vous deux.

La sénatrice Omidvar : Merci à nos trois remarquables présentateurs. Ces témoignages sont très intéressants. J’ai trois courtes questions pour lesquelles j’espère obtenir de brèves réponses.

Monsieur Boessenkool, ma première question s’adresse à vous. Vous avez décrit, à juste titre, les perpétuelles négociations fédérales-provinciales comme des aspirations dont les résultats dépendront des négociations avec les provinces. J’aime votre description. Il ne fait aucun doute que les normes, la qualité, les intrants et les résultats varieront. Ma question porte sur le conseil consultatif national annoncé dans le cadre de cette initiative. Est-ce davantage une aspiration? Comment comptez-vous lui donner un certain pouvoir?

M. Boessenkool : Je peux répondre à cela brièvement. Si j’étais chargé de sa conception, je ferais exactement ce que M. Alexander vient de dire : j’en ferais un organisme de collecte et de diffusion de données. Nous devons savoir ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. Je vous invite à consulter une étude de M. Kevin Milligan qui fait état des mauvais résultats du programme québécois de garderies à 10 $ par jour. Il existe différents types de données. Je chargerais cet organisme de la collecte, de la diffusion et de la publication de données détaillées sur ce qui fonctionne, les résultats pour les enfants et tout le reste. Voilà le rôle que je confierais à cet organisme.

La sénatrice Omidvar : Merci.

Monsieur Alexander, j’ai une question pour vous. Mme Ballantyne a indiqué que le recours élevé au programme de services de garde de Norvège — 93 à 95 % — est toujours cité en exemple. Selon vous, une utilisation semblable au Canada, si nous arrivons là un jour, nous permettra-t-elle aussi de connaître une hausse de notre taux de natalité national?

M. Alexander : La situation varie d’un pays à l’autre. Lorsque je pense à l’augmentation potentielle de la participation au marché du travail au Canada, je compare essentiellement la participation des hommes à celle des femmes. Dans la situation actuelle, même avec une augmentation de la participation des femmes au marché du travail de seulement 1 à 2 points de pourcentage — beaucoup moins que la Norvège —, cela représente environ 90 000 femmes de plus sur le marché du travail, ce qui est une hausse importante. M. Pierre Fortin a fait une modélisation de l’expérience québécoise reproduite à l’échelle canadienne pour en déterminer les effets. Le chiffre qu’il a obtenu était plus près de 300 000.

Je tiens à souligner que même en utilisant les chiffres les plus conservateurs, j’obtiens une très forte augmentation de la participation au marché du travail et des résultats. Fondamentalement, je pense que l’éducation est le grand catalyseur. Je pense aussi que certains obstacles auxquels les femmes sont confrontées — pas tous, mais certains — sont liés au fait qu’elles assument une part disproportionnée de la garde des enfants.

La sénatrice Omidvar : Suis-je naïve de penser qu’en facilitant la vie des gens et en nous occupant d’eux, les Canadiens auront plus d’enfants?

M. Alexander : Je n’ai aucune idée de l’incidence que cela aurait sur le taux de fécondité. Si cela n’a aucune incidence, nous aurons un bon rendement du capital investi; si cela a un effet, le rendement sera encore meilleur.

La sénatrice Omidvar : Merci.

Madame Ballantyne, je vous comprends d’insister avec tant d’ardeur pour l’augmentation des salaires et de la rémunération des éducatrices et éducateurs de la petite enfance. Pourriez-vous nous renseigner brièvement sur les coûts de la formation menant à l’obtention d’un diplôme d’EPE? Quelle est la durée du programme? Combien cela coûte-t-il? Je tiens à mettre cela en contexte pour tout le monde.

Mme Ballantyne : Premièrement, les qualifications minimales varient d’une administration à l’autre. Au Canada, la situation actuelle est malheureusement très difficile en raison des problèmes de recrutement et de rétention. Beaucoup d’employés des services de garde n’ont pas les qualifications minimales requises. Nous continuons de faire exception aux règlements simplement pour garder le secteur ouvert. Voilà la situation désespérée dans laquelle nous sommes actuellement. Évidemment, la pandémie a aggravé la situation.

La plupart des administrations exigent deux années d’études postsecondaires. Nous pensons que cela devrait être plus.

J’ajouterais qu’il ne faut pas seulement examiner les exigences scolaires requises pour les éducatrices et les éducateurs, mais celles pour les responsables de programmes. Il n’y a actuellement aucune qualification minimale ou aucun programme d’études pour les directeurs ou les superviseurs de programmes. Tout cela doit être changé et, encore une fois, il faudra modifier la rémunération.

Toutefois, je me dois de préciser, puisque M. Alexander a souligné ce point, qu’il y a un débat sur la question de savoir s’il faut investir dans la formation et le perfectionnement professionnel et s’il s’agit de la solution pour attirer plus de gens sur le terrain. Notre problème, actuellement, est la rétention des éducateurs. Nous ne pourrons pas élargir le réseau, quels que soient sa nature et l’endroit — et cela vaut aussi pour le Québec — si nous ne réglons pas la question de la main-d’œuvre. Voilà pourquoi nous sommes d’avis que les accords doivent comprendre des dispositions obligeant les provinces et les territoires à élaborer une stratégie de main-d’œuvre, avec possibilité d’utiliser les fonds fédéraux pour appuyer cette stratégie.

M. Alexander : J’ajouterais que le roulement est surtout attribuable au départ des éducateurs en garderie qui quittent la profession après cinq ans. Cela m’apparaît important, car je sais que dans la plupart des professions, les deux premières années, on est encore au stade d’apprenti. Vous êtes encore en apprentissage du métier. Ce n’est qu’à la troisième, la quatrième et la cinquième année qu’on devient réellement un spécialiste formé dans le domaine. Donc, nous perdons des éducatrices expérimentées, qui sont remplacées par de nouvelles diplômées, ce qui a une incidence sur la qualité des programmes, à mon avis. La question de la rétention est très importante.

La présidente : Merci de ces réponses et de cette précision. C’est très intéressant et, en fait, très préoccupant.

Le sénateur Kutcher : C’est une « jump ball » : nous savons que les éducatrices et éducateurs en garderie diplômés sont sous-évalués et sous-rémunérés. Selon vous, quelles devraient être leur rémunération minimale et leurs conditions de travail? Pensez-vous que des accords bilatéraux peuvent permettre une uniformité à l’échelle nationale, de façon à éviter d’importants écarts de rémunération d’une province à l’autre, comme dans certaines professions du secteur de la santé, comme chez les médecins, par exemple?

La présidente : La question est-elle pour quelqu’un en particulier, sénateur Kutcher?

Le sénateur Kutcher : Non. Au basketball, « jump ball » signifie que n’importe qui peut y aller.

La présidente : Je vois. Cela s’est perdu dans la traduction. Qui veut répondre?

Mme Ballantyne : Je veux bien me lancer. Je vais saisir la balle au bond. Je serai brève.

Je pense qu’il est impossible pour le gouvernement fédéral — du point de vue des compétences et pour une multitude d’autres raisons — d’établir un salaire minimum ou une grille salariale pour les éducatrices et éducateurs en garderie dans l’ensemble du pays.

Le gouvernement fédéral peut toutefois utiliser son pouvoir de dépenser et saisir l’occasion que représente la négociation des accords pour veiller à ce qu’on traite de la question des salaires. Ce qu’il faut voir dans toutes les administrations, c’est une grille salariale concurrentielle établissant un taux de base propre à chaque administration. Évidemment, les éducatrices et éducateurs en garderie devraient participer au processus.

Précédemment, lorsqu’il était question de syndicalisation, les fonctionnaires du gouvernement fédéral ont fait remarquer qu’une bonne partie du secteur n’est pas syndiqué. Les éducatrices et éducateurs en garderie n’ont pas de pouvoir de négociation collective. Pour le moment, du moins jusqu’à la mise en place d’un système, ils doivent compter sur l’intervention des gouvernements pour fixer des normes minimales en matière de rémunération, supérieures aux salaires minimums en vigueur, pour assurer la mise en place d’un système de garderies offrant des services de grande qualité et ainsi favoriser le recrutement du personnel nécessaire à la création d’un réseau.

Lorsque le précédent gouvernement libéral de l’Ontario a décidé d’augmenter le salaire minimum, un important pourcentage de l’effectif des garderies était sous la barre des 15 $ l’heure et une aide financière spéciale a dû être accordée au secteur pour augmenter les salaires à 15 $ l’heure. C’est dire à quel point les éducatrices et éducateurs de la petite enfance sont mal payés.

M. Alexander : Je pense que Mme Ballantyne l’a très bien exprimé.

Outre ce que le gouvernement fédéral négocie avec chacune des provinces, pour revenir à la notion de collecte de données par le gouvernement fédéral et au suivi de l’impact, vous constaterez probablement que la qualité des programmes est liée à la rémunération des travailleurs du secteur et que cela devrait s’améliorer avec le temps. Le système devrait avancer dans une direction. Actuellement, une des raisons pour lesquelles les éducatrices et éducateurs ne sont pas mieux payés, c’est que leurs services ne sont pas valorisés sur le marché. Si vous commencez à mesurer les résultats de manière objective, notamment ceux des différents programmes, vous aurez un marché caractérisé par une transparence accrue quant à la qualité et à l’incidence des programmes.

La présidente : Merci. Monsieur Boessenkool, voulez-vous ajouter quelque chose avant que nous passions à la dernière question?

M. Boessenkool : Une phrase : nous n’aurons pas de système national universel unique et nous ne devrions pas en avoir.

La présidente : C’est parfaitement clair, merci.

La sénatrice Dasko : Je vais poser une question que j’aimais poser dans mon ancienne profession, et je n’en dirai pas plus sur ce que c’était. Quoi qu’il en soit, par rapport à ce système, vous avez tous des objectifs différents et des résultats qui vous semblent importants. Pensez-vous que le gouvernement fédéral a trop, pas assez ou correctement investi dans ce système pour atteindre les objectifs que vous jugez importants? Vous pouvez tous répondre comme bon vous semble. Merci.

M. Boessenkool : Sondeuse un jour, sondeuse toujours, sénatrice Dasko?

Je ne choisirai aucune de ces réponses, car nous l’ignorons. Les différentes provinces ont des aspirations et des objectifs différents, donc je pense que la réponse est 10 chiffres différents dans 10 provinces différentes.

M. Alexander : J’ai fait un travail d’évaluation pour le Conference Board du Canada qui portait notamment sur l’investissement nécessaire pour atteindre les taux d’embauche et les taux moyens de maintien en poste des autres pays de l’OCDE. Le montant figurant dans l’actuel budget fédéral correspond presque exactement à notre estimation des coûts. Je pense que le montant du financement correspond, j’espère, à ce qui est nécessaire pour donner un résultat qui placerait le Canada au moins dans la moyenne des pays de l’OCDE. La clé sera la façon dont l’argent sera utilisé.

En terminant, je dirais que je veux un système universel. J’y tiens indiscutablement. L’affaire, c’est que le Canada est une fédération. Le gouvernement fédéral ne peut pas imposer un tel système. Pour moi, c’est comme les soins de santé. Les provinces gèrent leur propre système de soins de santé. Lorsque notre système national de soins de santé a été créé, le gouvernement fédéral a versé des fonds, et le système a évolué pour devenir ce qu’il est aujourd’hui. Aurons-nous un système universel immédiatement? Non. Mais c’est un pas dans la bonne direction.

Mme Ballantyne : Je dirais que c’est le bon montant, en partie parce que ce que nous avons demandé figure dans le budget, presque au dollar près.

Plus important encore, le montant est suffisant pour inciter les provinces et les territoires à se présenter à la table. Il y a deux ou trois choses importantes à retenir au sujet de cet engagement budgétaire. D’abord, c’est un engagement à long terme, soit cinq ans avec une possibilité de prolongation. En outre, on laisse entendre dans le budget que le montant sera ajusté en fonction de l’évaluation. Donc, il pourrait augmenter.

Deuxièmement, ce sont des fonds fédéraux. Ce n’est pas un programme à frais partagés tel qu’on les connaît, même s’il a été présenté comme tel, à tort. Les provinces n’ont pas à dépenser un dollar pour obtenir un dollar en fonds fédéraux. C’est essentiel, car les provinces ont une capacité fiscale moins grande que le gouvernement fédéral, surtout en ce moment.

L’autre élément crucial, c’est qu’un montant plus élevé poserait problème. Ce qui est vraiment important, c’est que le financement augmente chaque année. Nous devons créer le système progressivement. Nous devons nous donner au moins 10 ans pour atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés.

La présidente : Merci. Merci, chers collègues. Merci beaucoup à nos trois témoins. Vos commentaires ont été à la fois intéressants, pertinents et utiles. Je tiens à vous présenter des excuses. Nous vous avons quelque peu pressés. Si des commentaires vous reviennent à l’esprit plus tard, n’hésitez pas à nous les communiquer. Lire vos observations nous intéresse toujours, même après la réunion.

Honorables sénateurs, c’est notre dernier groupe de témoins pour aujourd’hui. En fait, c’est ainsi que nous terminons notre examen du projet de loi C-30. Pour terminer la journée, nous allons maintenant entendre l’honorable Carla Qualtrough, ministre de l’Emploi, du Développement de la main-d’œuvre et de l’Inclusion des personnes handicapées. Madame la ministre, bienvenue à nouveau au comité des affaires sociales. C’est toujours un plaisir de vous accueillir au comité.

[Français]

La ministre Qualtrough est accompagnée de fonctionnaires d’Emploi et Développement social Canada, qui sont les suivants : M. Graham Flack, sous-ministre, M. Atiq Rahman, sous-ministre adjoint, Direction générale de l’apprentissage, M. Elisha Ram, sous-ministre adjoint délégué, Direction générale des compétences et de l’emploi, Mme Karen Robertson, dirigeante principale des finances, ainsi que M. Cliff C. Groen, sous-ministre adjoint principal, Direction générale des prestations et des services intégrés, Service Canada.

[Traduction]

Madame la ministre, je vous invite à faire votre allocution d’ouverture.

L'honorable Carla Qualtrough, c.p., députée, ministre de l’Emploi, du Développement de la main-d’œuvre et de l’Inclusion des personnes handicapées : Merci beaucoup, madame la présidente. Permettez-moi de souligner que les fonctionnaires d’Emploi et Développement social Canada qui m’accompagnent comptent parmi les personnes les plus brillantes et les travailleurs les plus acharnés que nous ayons au Canada. Je suis très privilégiée de les avoir.

J’aimerais mentionner que je me trouve sur le territoire traditionnel des Premières Nations Tsawwassen et Musqueam.

Je vous remercie sincèrement de l’invitation à comparaître. C’est toujours avec enthousiasme que je comparais devant les comités sénatoriaux. Comme vous le savez tous, j’ai le plus grand respect pour le travail que vous accomplissez.

Sénateurs et sénatrices, le budget de 2021 comporte trois grands objectifs : achever la lutte contre la COVID-19; mettre en place une économie plus juste, plus écologique et plus résiliente dont tous bénéficieront; ainsi que créer des emplois et stimuler la croissance.

[Français]

Depuis le début de la pandémie, notre gouvernement a accordé la priorité aux Canadiens en leur offrant le soutien dont ils avaient besoin pour continuer de joindre les deux bouts, tout en étant en sécurité et en bonne santé.

Comme plusieurs travailleurs sont encore sans emploi ou travaillent moins d’heures, nous continuerons de prendre toutes les mesures nécessaires pour aider les Canadiens.

[Traduction]

C’est pourquoi le gouvernement propose dans le projet de loi C-30, la Loi no 1 d’exécution du budget de 2021, des semaines supplémentaires pour les prestations canadiennes de la relance économique de même que la prolongation des mesures temporaires du régime d’assurance-emploi. Le projet de loi C-30 fait passer le nombre maximum de semaines admissibles à 50 pour la Prestation canadienne de la relance économique et à 42 pour la Prestation canadienne de la relance économique pour proches aidants, pour les demandes présentées entre le 27 septembre 2020 et le 25 septembre 2021.

Il faut se rappeler que les prestations canadiennes de la relance économique ont été créées parallèlement aux nouvelles mesures d’assouplissement de l’assurance-emploi entrées en vigueur l’automne dernier. Pour revenir plus en arrière, au printemps dernier, face aux lacunes de l’assurance-emploi pour répondre à la pandémie, le gouvernement a pris la décision stratégique de mettre en place des mesures ne relevant pas du régime d’assurance-emploi afin de venir en aide immédiatement aux Canadiens touchés par la COVID-19.

Lors de la transition de ces mesures vers le système d’assurance-emploi en septembre dernier, le gouvernement a mis en place des mesures d’assouplissement qui permettent à davantage de Canadiens d’avoir accès aux prestations. Nous avons instauré un seul taux de chômage minimum pour l’ensemble du Canada, des heures automatiquement créditées pour les prestations régulières et les prestations spéciales, des prestations hebdomadaires minimales de 500 $, et des mesures plus simples qui permettent de verser plus rapidement les prestations.

Dans le budget de 2021, il est proposé de maintenir plusieurs des mesures d’assouplissement de l’assurance-emploi jusqu’en septembre 2022. Parmi ces dernières on compte une exigence nationale minimale de 420 heures pour les prestations régulières et spéciales de même qu’une admissibilité aux prestations pendant 14 semaines. On compte également une réduction du seuil fondé sur les gains pour les pêcheurs et pour les travailleurs autonomes qui ont choisi de participer au régime d’assurance-emploi et sont admissibles aux prestations spéciales. De plus, des modifications ont été apportées au traitement des raisons de la perte d’emploi et des sommes versées lors de la cessation d’emploi. Finalement, le projet-pilote pour les travailleurs saisonniers est prolongé jusqu’en octobre 2022. Le seul changement permanent au régime d’assurance-emploi est l’augmentation à 26 semaines de la période d’admissibilité aux prestations de maladie.

[Français]

En ce qui concerne les prochaines étapes ayant trait à l’assurance-emploi, nous sommes déterminés à moderniser le programme pour qu’il reflète mieux la façon dont les Canadiens travaillent et pour améliorer l’accès aux prestations.

Un régime d’assurance-emploi fort favorisera un marché du travail sain.

[Traduction]

Avant de passer brièvement aux autres éléments de la partie 4 de la Loi no 1 d’exécution du budget de 2021, je sais que certains d’entre vous ont des préoccupations au sujet des limites du régime d’assurance-emploi. Je serais heureuse de répondre à vos questions et d’obtenir vos observations et vos suggestions à ce sujet.

Brièvement, afin de couvrir le sujet dans son ensemble, je précise que le projet de loi C-30 propose également, à la partie 4, les éléments suivants : des réformes au Tribunal de la sécurité sociale faisant en sorte que les appels seraient plus simples, plus rapides et davantage axés sur les clients; un paiement unique de 130 millions de dollars au gouvernement du Québec afin de compenser certains des coûts liés à l’harmonisation du Régime québécois d’assurance parentale avec les mesures temporaires de l’assurance-emploi mises en place en réponse à la COVID-19; le renoncement aux intérêts sur les prêts canadiens aux étudiants et les prêts canadiens aux apprentis du 1er avril 2021 au 31 mars 2023.

Sénateurs et sénatrices, à la lumière de tout cela, je demeure plus que jamais résolue à veiller à ce que les Canadiens disposent du soutien dont ils ont besoin pour achever la lutte contre la COVID-19 et faire en sorte que notre pays sorte de cette pandémie plus fort que jamais. Je suis convaincue que nous pouvons y arriver tous ensemble et répondre aux besoins des Canadiens.

[Français]

Je vous remercie, et j’attends vos questions avec impatience.

[Traduction]

La présidente : Merci beaucoup, madame la ministre. Nous avons des questions. Nous commençons par l’une des vice-présidentes du comité.

La sénatrice Bovey : Merci, madame la ministre, d’être avec nous aujourd’hui. Je tiens simplement à exprimer ma reconnaissance pour le travail que vous avez accompli tout au long de la pandémie, une période qui a été difficile pour tout le monde. Je dois dire que malgré les difficultés auxquelles beaucoup de gens sont confrontés, la résilience des Canadiens a été démontrée.

Aujourd’hui, c’est la section 34 du projet de loi C-30 qui me préoccupe. On peut lire ce qui suit dans le budget de 2021 :

L’accès à des services abordables d’apprentissage et de garde des jeunes enfants augmentera la participation des femmes au marché du travail et réduira l’écart de participation des femmes au marché du travail à mesure qu’un plus grand nombre de mères entrent sur le marché du travail.

Cela étant, j’ai une question à deux volets. Premièrement, j’aimerais savoir quelles sont les prévisions de votre gouvernement quant à l’augmentation possible de la participation des parents au marché du travail, en particulier des femmes, découlant des investissements proposés pour les services d’apprentissage et de garde des jeunes enfants.

Deuxièmement, nous avons entendu dire que de nombreuses éducatrices et de nombreux éducateurs en garderie quittent le domaine après cinq ans en raison de la rémunération insuffisante et du fait que ce n’est pas une carrière. Pouvez-vous nous éclairer et nous dire si, selon vous, le secteur de l’apprentissage et de la garde des jeunes enfants est, et peut être, un véritable choix de carrière? Merci.

Mme Qualtrough : Je vous remercie de ces questions vraiment très importantes sur les services de garde d’enfants.

Pour répondre d’abord à votre deuxième question, je suis convaincue que c’est le cas et que cela doit être le cas. Les initiatives de formation sectorielle sont l’un des aspects auquel mon portefeuille, à EDSC, consacre beaucoup d’efforts. En collaboration avec le ministre Hussen et son équipe, nous prenons des mesures ciblées pour créer un modèle de perfectionnement professionnel simplifié à l’échelle du pays afin de reconnaître l’accréditation, mais aussi l’importance du travail de ces travailleuses, car ce sont habituellement des femmes, comme vous l’avez souligné.

Nous devons examiner soigneusement nos systèmes. Nous pouvons investir dans des places en garderie inclusives et accessibles, mais il nous faut aussi du personnel bien rémunéré et bien formé pour enseigner à nos enfants. Dans le dossier de l’apprentissage et la garde des jeunes enfants, je me concentre sur la formation du personnel, car plus nous créons de places, plus nous avons besoin de personnel bien formé et bien rémunéré, pour revenir à votre point. Je porte toutefois une attention particulière à la question de l’inclusion, dans ce dossier précis, notamment en discutant avec les parents d’enfants handicapés et les parents handicapés pour assurer que ce système est réellement inclusif.

Quant à l’augmentation de la participation des femmes au marché du travail qui en découlera, je m’excuse, car je n’ai pas ce chiffre sous la main. Je ne sais pas si M. Flack ou un des membres de l’équipe a ces données. Je sais, pour avoir lu beaucoup d’études, que plus les femmes auront accès à des services de garde abordables et de qualité, plus les femmes iront sur le marché du travail et plus notre économie sera productive.

Monsieur Flack, avez-vous cela? Je m’excuse. Je n’ai pas les chiffres sur la participation au marché du travail liée à l’accès aux services de garde.

Graham Flack, sous-ministre, Emploi et Développement social Canada : Notre modélisation, qui s’appuie sur l’expérience du Québec, indique que nous pourrions nous attendre à une augmentation de 7,5 à 8,5 points de la participation des femmes à la population active.

L’autre élément à modéliser, qui est plus délicat, n’est pas seulement le retour à la population active, mais les niveaux de participation plus élevés, soit le passage du travail à temps partiel au travail à temps plein chez les femmes qui ont accès à des services de garde adéquats.

La modélisation est basée sur l’expérience réelle du Québec. Comme vous le savez peut-être, le Québec enregistrait la plus faible participation des femmes au marché du travail lors de la création du modèle de garderies à 10 $, et affiche maintenant le meilleur taux de participation des femmes au marché du travail au pays.

Merci.

La sénatrice Bovey : Merci.

Madame la ministre, je vous remercie de la réponse. Parlons brièvement de formation. La formation, l’éducation, les universités et les collèges sont principalement de compétence provinciale. Toutefois, le gouvernement fédéral investit beaucoup d’argent dans la recherche. Il investit beaucoup d’argent dans les projets d’immobilisations des universités. Il investit dans les bourses d’études et de perfectionnement. Que peut faire le gouvernement fédéral pour augmenter le nombre de personnes qui veulent suivre une formation en éducation de la petite enfance et faire en sorte, peut-être, que cette formation ne soit plus principalement offerte au niveau collégial, mais qu’elle soit davantage fondée sur la recherche et offerte au niveau universitaire? Cela aiderait-il à créer un cheminement de carrière?

Mme Qualtrough : Absolument, sénatrice. Je vous remercie de la question.

Il faut savoir, comme vous l’avez dit, qu’historiquement, puisque la formation est surtout de la compétence des provinces, les investissements du fédéral se font principalement sous forme de transferts aux provinces. Ce sont elles qui ont créé les réseaux et les programmes de formation et qui savent ce qui se passe dans leur région. Dans ce budget, nous avons diversifié notre stratégie de formation pour reconnaître la possibilité d’établir des liens entre le gouvernement fédéral et certains secteurs, notamment le secteur des services d’apprentissage et de garde des jeunes enfants, qui fait partie des secteurs cibles mentionnés dans le budget. Il s’agit aussi de collaborer avec les secteurs pour créer des modèles de formation adaptés aux emplois existants et futurs, offrir du perfectionnement professionnel et créer une culture de formation continue. Nous mettons aussi en place ce que nous appelons des modèles de formation communautaire, qui consistent à intervenir à l’échelle communautaire pour cerner les besoins en emploi et en main-d’œuvre et les occasions, puis à travailler avec la communauté pour la création d’une formation adaptée pour combler ces emplois et tirer parti de ces occasions.

Nous diversifions la formation. Nous sommes actifs, surtout en raison des succès que nous avons obtenus en travaillant directement avec les associations de l’industrie dans le cadre du programme du Sceau rouge, mais il s’agit essentiellement de saisir l’occasion de nous informer auprès des acteurs d’un secteur pour connaître leurs besoins et les compétences requises, et de travailler directement avec eux. Cela permettra de créer un réseau national, mais aussi d’établir des normes nationales sur la professionnalisation du secteur de l’apprentissage et de la garde des jeunes enfants.

La sénatrice Bovey : Merci beaucoup, madame la ministre.

Le sénateur R. Black : Madame la ministre, je vous remercie de vous joindre à nous ce soir.

Nous parlons aujourd’hui de la section 34 de la partie 4, mais dans votre déclaration préliminaire, vous avez proposé de parler des limites du régime d’assurance-emploi. Je sais que notre collègue de l’Île-du-Prince-Édouard, la sénatrice Griffin, est très préoccupée par les deux limites à l’Île-du-Prince-Édouard et par les inégalités et l’injustice qui en découlent dans une petite partie de la province. Peut-on espérer voir des changements à l’avenir afin d’offrir une plus grande égalité des chances aux prestataires de l’assurance-emploi?

Mme Qualtrough : Merci.

Évidemment, je suis une éternelle optimiste. Nous cherchons continuellement à nous améliorer. Des travaux en cours pourraient mener à des changements concernant les régions de l’assurance-emploi. Il s’agit bien sûr de la révision actuellement menée par la Commission de l’assurance-emploi, qui examine les limites de l’assurance-emploi tous les cinq ans pour voir si elles sont toujours adéquates et adaptées aux réalités du marché du travail de la région. Cet examen est en cours. Cela a été un peu plus long en raison de la pandémie, mais lorsque les représentants d’EDSC et moi aurons reçu ses recommandations et qu’elles auront été transmises au Cabinet, nous serons bien mieux placés pour déterminer toute modification éventuelle à apporter aux limites. Cela pourrait se faire par l’intermédiaire de ce processus, et je m’engage à le laisser suivre son cours.

D’ici là, toutefois, les exigences nationales d’admissibilité uniformes de 420 heures, jumelées à la durée minimale des prestations de 14 semaines, permettront de régler ce problème, du moins en partie, car il ne sera plus possible qu’une personne de l’Île-du-Prince-Édouard ayant accumulé le même nombre d’heures de travail qu’une autre personne n’ait pas droit à l’assurance-emploi alors que l’autre y a droit. Les deux personnes ont les 420 heures et le minimum de 14 semaines. C’est une solution partielle immédiate grâce à la souplesse que nous créons par l’intermédiaire du budget.

J’aimerais aussi souligner que vous trouverez à l’annexe 4 du projet de loi C-30 une liste des régions de l’assurance-emploi qui sont maintenant incluses dans le projet pilote saisonnier, et les deux régions de l’Île-du-Prince-Édouard sont incluses. Les travailleurs saisonniers des deux régions de la province auront droit aux cinq semaines supplémentaires offertes dans le cadre du projet pilote saisonnier. Donc, c’est une solution plutôt utile, quoiqu’incomplète, d’après ce que vous dites.

Je suppose qu’à plus long terme, l’occasion fondamentale — et la plus importante, pour moi —, ce sont nos consultations sur la modernisation du régime d’assurance-emploi, en examinant la question des limites et des régions de manière approfondie afin de déterminer s’il s’agit de la voie à suivre et déterminer quels changements, le cas échéant, pourraient et devraient être apportés au régime.

Le sénateur R. Black : Merci beaucoup. Je veillerai à ce que notre collègue lise les bleus, pour ainsi dire.

Ma question s’adresse maintenant à vous ou à vos collègues. Quel genre de données utilisera-t-on pour orienter l’élaboration du système pancanadien d’apprentissage et de garde des jeunes enfants? Les données serviront-elles à effectuer un examen périodique du système afin de s’assurer que le programme reste à jour et qu’il est viable financièrement?

Mme Qualtrough : Je demanderai à mes fonctionnaires de répondre à cette question. Je rappelle que le dossier de l’apprentissage et de la garde des jeunes enfants ne fait pas partie de mon portefeuille à EDSC. Les fonctionnaires ont donc de meilleurs renseignements que moi à ce sujet.

Le sénateur R. Black : Pas de problème. Merci.

M. Flack : L'un des éléments et piliers de la stratégie annoncée par le gouvernement est un élément de données pour enrichir les données dont nous disposons dans ce domaine. Nous mettons actuellement en place un secrétariat au sein d’EDSC et nous renforçons les données pour mesurer les succès à plusieurs égards, y compris les points que vous avez soulevés. D’intéressants travaux de recherche universitaires ont été faits dans ce domaine au Canada, notamment une étude des notes au Programme international pour le suivi des acquis des élèves ou PISA, des études longitudinales sur l’impact et les résultats obtenus chez les enfants selon le type de garderie et la qualité des services de garderie. Nous espérons pouvoir enrichir cet ensemble de données de façon plus permanente.

Le sénateur R. Black : Merci beaucoup.

La sénatrice Moodie : Ministre Qualtrough, c’est toujours merveilleux de vous voir ici au comité. Merci d’avoir amené votre équipe.

Madame la ministre, j’étais en train d’examiner votre lettre de mandat supplémentaire il y a quelques jours, dans laquelle j’ai noté que vous avez été chargée par le premier ministre de soutenir la ministre de la Diversité et de l’Inclusion et de la Jeunesse et la ministre des Femmes et de l’Égalité des genres et du Développement économique rural dans le cadre d’un processus d’évaluation de l’ACS+ afin d’améliorer le cadre et les paramètres de cet outil analytique en portant une attention particulière à l’analyse intersectionnelle de la race, de l’identité autochtone, du handicap et de l’identité sexuelle, entre autres caractéristiques.

Durant l’étude de notre comité, madame la ministre, nous avons demandé à plusieurs reprises aux fonctionnaires de votre ministère de nous fournir des données désagrégées sur l’incidence des diverses mesures du budget et de nous communiquer l’analyse pertinente de l’ACS+ et, malheureusement, nous n’avons souvent jamais reçu les données nécessaires ou les données demandées.

Madame la ministre, ma question porte sur les Canadiens. Comment les Canadiens peuvent-ils croire que les politiques de ce gouvernement sont fondées sur les meilleures données disponibles? Les données désagrégées sont nécessaires pour veiller à ce que nous ayons une image détaillée des besoins des diverses populations. Or, nous avons entendu de la part de plusieurs fonctionnaires que ce gouvernement n’a pas les données désagrégées disponibles pour justifier la mise en œuvre de nombreuses mesures dans ce projet de loi. Comment pouvons-nous être sûrs, sans données, que ce budget ne renforcera pas les obstacles systémiques auxquels sont confrontés de nombreux Canadiens?

Mme Qualtrough : Merci, sénatrice. C’est une question très importante.

Je passe une grande partie de mon temps à essayer de comprendre l’intersectionnalité entre le handicap, le genre et le fait d’être un Canadien racialisé ou autochtone. J’admets ouvertement que le gouvernement du Canada a beaucoup de travail à faire pour obtenir des données désagrégées que nous pouvons utiliser et présenter de différentes façons afin de nous assurer que nous maximisons la portée de nos programmes.

L’une des choses sur lesquelles les ministres que vous avez mentionnées et moi-même avons travaillé, c’est d’aller au-delà de l’ACS+ et de nous éloigner d’un modèle de superposition de différentes lentilles, si vous voulez, et de voir à quoi ressemblerait une véritable lentille intersectionnelle inclusive pour la prise de décision. C’est un grand navire à diriger. Nous avons fièrement progressé vers l’adoption d’une lentille axée sur le handicap, une lentille axée sur le genre et une lentille axée sur l’identité autochtone, mais la prochaine étape consiste à rassembler tout cela d’une manière cohérente et intersectionnelle afin de nous assurer que nous comprenons l’incidence d’un programme particulier sur une femme autochtone qui ne voit pas très bien et qui vit dans une région rurale du Canada. C’est plus difficile que vous le pensez, mais nous y travaillons.

Je sais que M. Flack peut fournir plus de détails. Son équipe de sous-ministres et lui travaillent fort pour obtenir des données désagrégées.

M. Flack : Oui. Dans le passé, il y a eu de l’opposition aux données désagrégées. Par exemple, lorsque j’étais à Sécurité publique Canada, on s’opposait à l’idée de fournir des données sur la criminalité en fonction, par exemple, des caractéristiques raciales. Je dirais qu’il y a eu un changement radical au cours des dernières années en ce qui concerne l’ouverture et, en fait, la nécessité absolue d’obtenir des données désagrégées.

Le meilleur exemple récent que nous puissions vous donner est que nous avons travaillé avec Statistique Canada pour modifier la plus importante mesure du travail dont nous disposons, à savoir l’Enquête sur la population active. Dans les données que Statistique Canada recueille et les questions qu’il pose pour l’EPA, il relève des caractéristiques qui nous ont permis de désagréger les données pour les Canadiens racialisés et de donner une très bonne idée de ce qui se passait pendant la COVID. C’est effectivement ainsi que nous avons pu avoir une idée de la situation. Statistique Canada est l’entité principale qui recueille les données. Anil Arora, son sous-ministre, s’est montré ouvert à l’idée d’aller dans cette direction.

Dans notre ministère en particulier, nous avons une intersection de la sorte. La ministre Qualtrough est responsable du handicap et de l’inclusion, beaucoup de nos programmes sont axés sur l’égalité entre les sexes, et le ministère offre de nombreux programmes destinés aux Autochtones. Nous voyons la nécessité d’obtenir ces données, et nous nous engageons dans cette voie.

La sénatrice Moodie : Merci beaucoup.

La sénatrice Omidvar : Merci, madame la ministre, et merci à votre équipe d’être des nôtres aujourd’hui.

Je vais également prendre la liberté de me concentrer sur l’assurance-emploi. En 2011, j’ai coprésidé, avec Roy Romanow, l’examen du régime de l’assurance-emploi par l’Institut Mowatt. Ce que nous avons déterminé à l’époque, il y a environ 11 ans, reste tristement vrai, à mon avis. Ce n’est pas un système; c’est un ensemble disparate. Il y a des exceptions. Il y a des règlements ciblés qui régissent certaines régions par rapport à d’autres. C’est, comme nous l’appelions à l’époque, une loterie fondée sur le code postal.

Je sais que la Commission de l’assurance-emploi examine le système, mais ce que j’aimerais savoir, c’est quels sont les principes qui sont utilisés pour examiner le système? S’agit-il des principes d’équité, de justice, d’accès, de rapidité? Des témoins nous ont dit que cet examen prendrait deux ans, et ils ont ajouté que deux ans, c’est trop long, car les gens veulent l’avoir maintenant. Les travailleurs à faible revenu, les travailleurs à la demande, ne peuvent pas se permettre d’attendre deux ans. Que répondriez-vous à ces personnes?

Mme Qualtrough : Merci de la question et de l’intérêt passionné que vous portez à ce dossier.

Je pense beaucoup à l’assurance-emploi. Je crois vraiment que la COVID a mis en lumière un système qui, comme beaucoup le savent, et comme vous le savez depuis un certain temps, est défaillant et exclusif et qui doit être réparé. Il faut le corriger immédiatement, tout en trouvant un équilibre entre l’appel à l’action des intervenants et leur demande d’être inclus et d’être consultés sur ce que nous devrions faire.

De nombreuses études ont été réalisées sur l’assurance-emploi. Je suis tout à fait d’accord avec vous sur la nature disparate de ce système. Le système a été construit par les gouvernements successifs avec différents projets de prédilection et différents objectifs. Certains ont inclus des paramètres de type politique sociale dans ce qui était, essentiellement, un régime d’assurance de base. Il est vraiment compliqué et lourd et ne reflète pas la façon dont les Canadiens travaillent de nos jours.

En gardant cela à l’esprit, les principes qui, selon moi, devraient sous-tendre un système d’assurance-emploi fonctionnel et performant au Canada sont les suivants : l’accès, c’est-à-dire s’assurer que l’accès aux prestations est équitable; la suffisance des prestations pour que les gens puissent vivre dans la dignité; l’équité entre les régions; l’équité entre les travailleurs; la limitation des facteurs de dissuasion au retour au travail; et enfin, de façon générale, le système doit promouvoir un marché du travail sain. Lorsque je parle de l’assurance-emploi et que je mets les gens au défi de voir grand et de se demander ce qu’ils feraient différemment, ce sont les six principes que je ne perds pas de vue lorsque je réfléchis à cette question.

La sénatrice Omidvar : Merci. C’était une réponse très complète. Je vous en suis très reconnaissante.

Qu’en est-il de la rapidité? Devrions-nous nous satisfaire d’un examen qui se termine dans deux ans et qui prend deux autres années pour mettre en œuvre les recommandations? Les gens le veulent maintenant.

Mme Qualtrough : Je suis totalement d’accord avec vous. Je souris parce que je ne suis pas connue pour ma patience au sein du ministère. Je suis quelqu’un qui veut du changement et je le veux maintenant. Je veux faire sauter les systèmes et les améliorer. Sachez que c’est quelque chose que je mets constamment les fonctionnaires au défi de faire. Encore une fois, il y a tout un éventail de considérations en jeu.

Absolument, les changements que nous avons mis en place temporairement l’année dernière et pour la prochaine année jettent les bases de l’orientation que je prévois pour le système. Tous les éléments que vous voyez temporairement sont en jeu dans l’optique de trouver une solution permanente pour ce programme particulier.

Lorsque nous examinons la rapidité avec laquelle nous pouvons le faire, il ne s’agit pas seulement de déterminer les résultats politiques souhaités. Nous devons, comme je l’ai dit, trouver un équilibre entre le besoin de consultation et l’avis des intervenants. Nous devons également tenir compte des coûts. Bien que ces grands changements semblent vraiment importants, ils auront une incidence sur les cotisations, et nous devons donc décider si nous apportons un grand changement qui coûte cher, comment cela influencera-t-il notre capacité de faire d’autres choses dans le système?

Il faut du temps pour effectuer les changements systémiques que nous souhaitons. L’ordre, le séquençage des changements sera très important. Si nous décidons de faire A, B et C, nous ne pouvons pas faire D tout de suite. Nous voulons peut-être faire D en premier, mais alors nous ne pouvons pas faire A en premier. Je dois régulièrement me rappeler à la réalité en ce qui concerne les opérations, car je veux tout faire d’un coup.

Et puis, bien sûr, il y a l’aspect pratique. Pouvons-nous effectuer un changement quelconque par l’entremise de la législation? Par l’entremise de la réglementation? Il ne s’agit pas seulement d’un système d’assurance-emploi utopique. Il y a l’aspect pratique. Comment faire le plus rapidement possible? Dans quel ordre devons-nous procéder aux changements? Dans quels domaines devons-nous tenir des consultations ou dans quels domaines existe-t-il un consensus général? Nous devons vérifier auprès de quelques intervenants.

Tout cela est en jeu. C’est ainsi que nous essayons d’atténuer la frustration à laquelle vous faites allusion, ou que vous exprimez peut-être carrément, et que je partage.

La sénatrice Omidvar : Merci, madame la ministre.

Le sénateur Kutcher : Merci à tous les témoins. Madame la ministre, c’est agréable de vous revoir, même si c’est virtuellement.

Ma question porte sur la petite enfance. Il est nécessaire de disposer de données longitudinales solides pour comprendre l’incidence de ces changements politiques sur le développement sain des enfants, à court et à long terme. À l’heure actuelle, il n’existe aucune étude longitudinale en cours au Canada qui nous fournit cette information. Envisageriez-vous de renforcer l’Enquête canadienne sur la santé des enfants et des jeunes, peut-être en augmentant l’échantillon d’enfants de moins de six ans, afin que nous puissions à la fois comprendre comment les enfants sont touchés par ces changements de politique en matière de garde d’enfants et d’apprentissage préscolaire et comment cette incidence peut ensuite être suivie dans les années prépubères et post-pubères?

Mme Qualtrough : Merci, sénateur.

Je serais personnellement favorable à tout outil permettant d’obtenir les données exactes auxquelles vous faites référence — cette étude d’impact longitudinale à plus long terme — afin d’obtenir une compréhension beaucoup plus exhaustive des résultats.

Monsieur Flack, pouvez-vous décrire un peu comment nous combinons notre système d’AGJE à une collecte de données plus rigoureuses et nous expliquer si l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes est en jeu?

M. Flack : Le secrétariat en cours de création est conçu pour travailler non seulement au niveau fédéral, mais aussi avec les gouvernements provinciaux. Souvent, ils ont un meilleur accès à ces données, et ce sont souvent eux qui les administrent. C’est le genre de choses que nous voulons aborder à cette table pour déterminer, à partir de conseils d’experts, ce qu’il y a de mieux à faire et pour avoir à cette table non seulement des représentants du gouvernement fédéral, mais aussi des provinces et des territoires, afin qu’ils puissent assurer le suivi nécessaire.

Donc, oui, nous sommes prêts à examiner tous ces éléments. La collecte de données est l’une des composantes de la stratégie d’apprentissage et de garde des jeunes enfants. Je ne pense pas que des décisions aient encore été prises, parce que le secrétariat est sur le point d’être mis en place et que nous voulons consulter les provinces à ce sujet, qui ont exploité ce système à grande échelle.

Le sénateur Kutcher : Merci beaucoup de ces remarques.

J’insisterai pour que l’on s’y intéresse de près. Il s’agit de la seule étude longitudinale à phases multiples en cours qui porte sur un échantillon important, et c’est tellement essentiel. De nombreuses études sur le développement de la petite enfance nous ont appris que nous devons suivre ces enfants jusqu’à l’âge adulte pour pouvoir constater l’ampleur de certaines de ces interventions précoces. Je vous serais reconnaissant que vous y jetiez un coup d’œil.

Ensuite, madame la ministre, j’ai été ravi d’apprendre que vous vous concentrez sur l’amélioration de la formation du personnel d’éducation de la petite enfance. Elle est très importante et absolument nécessaire. Cependant, nous avons entendu plus tôt aujourd’hui que la rétention de la main-d’œuvre est une préoccupation importante et qu’elle est attribuable en grande partie au fait que nous sous-estimons le personnel d’éducation de la petite enfance et le sous-payons. Comment le gouvernement fédéral abordera-t-il cette question à l’avenir à l’échelle nationale?

Mme Qualtrough : C’est une question importante. C’est un élément crucial du travail que nous essayons de réaliser dans le domaine de l’économie de soins.

Il faut réellement valoriser le travail. Ce que j’attends et j’espère, c’est qu’à mesure que nous professionnaliserons les titres de compétence, que nous rationaliserons et uniformiserons le système dans tout le pays en termes d’accès à la formation et que nous réduirons le coût des places en garderie, la valeur de ce travail sera reconnue, ce qui n’a que trop tardé, et les gens seront donc mieux payés.

Je sais que cela semble fluide, que ce n’est pas une nécessité systémique ou structurelle de ce que devrait être le salaire de base. Je sais que le ministre Hussen a beaucoup réfléchi à ce sujet. M. Flack pourraitl nous faire part d’une partie de ses réflexions, mais de mon point de vue, en ce qui concerne la formation, il est vraiment important que nous offrions des mesures incitatives à la formation, à l’apprentissage tout au long de la vie et à des améliorations continues, car vous avez raison. Nous voyons beaucoup de personnes entrer dans ce domaine, acquérir de l’expérience, puis saisir une occasion ailleurs parce que c’est plus payant ou plus stable comme type de travail. Nous avons vraiment besoin que les gens restent dans ces systèmes.

Le sénateur Kutcher : Merci de ces remarques. Nous reviendrons pour savoir ce que vous avez fait.

Nous avons beaucoup entendu parler des retombées économiques de ces avantages liés à l’éducation de la petite enfance et au retour sur le marché du travail, mais nous n’avons rien entendu sur les avantages sociaux. Je suis au courant de certaines données — ce n’est pas un domaine où je suis un expert — sur l’amélioration des relations parents-enfants et des compétences parentales — ces petites améliorations sociales. Votre ministère a-t-il effectué des travaux pour montrer comment ce type d’intervention peut effectivement améliorer ces aspects de la société canadienne?

Mme Qualtrough : Je vais demander à M. Flack de répondre à cette question car il sera en mesure d’y répondre rapidement.

M. Flack : Nous pouvons vous fournir ce que nous avons dans ce domaine, mais cette partie est moins bien étudiée que les répercussions sur les enfants dans le cadre d’études longitudinales ou les répercussions sur la participation au marché du travail. Il y a moins de données dans ce domaine. Mais oui, il y en a, mais elles ont surtout été réalisées au niveau universitaire. Nous n’avons pas eu une histoire d’investissements délibérés dans cet espace de données. C’est quelque chose que nous espérons changer avec la création du secrétariat.

Le sénateur Kutcher : Merci beaucoup.

La présidente : Merci. Si vous pouvez nous faire parvenir les données auxquelles vous faites référence, nous vous en serions reconnaissants également.

La sénatrice Forest-Niesing : Avant de poser ma question, je tiens à préciser que j’ai le nez cassé à la suite d’un accident survenu en fin de semaine et je m’excuse donc pour mon apparence. Ma plaisanterie, bien sûr, est que vous devriez voir l’autre gars.

Madame la ministre Qualtrough, je tiens à vous remercier sincèrement d’être venue comparaître devant nous, d’avoir amené votre équipe et d’avoir répondu à nos questions, comme vous le faites toujours, de manière franche et exhaustive. Je vous en suis très reconnaissante.

J’ai quelques questions à vous poser, et je commencerai par la plus simple. La pandémie a mis en lumière tant d’inégalités. L’une d’elles concerne les différents marchés. La situation économique avant la pandémie sera très différente si l’on compare la situation avant la pandémie et celle après la pandémie. Il suffit de comparer l’industrie de la restauration à celle de la rénovation. Quiconque a acheté du bois récemment en conviendra. Nous pouvons observer l’effet inverse de la pandémie sur l’industrie du divertissement par rapport à l’industrie des loisirs de plein air, par exemple. La question que je vous pose est la suivante : le gouvernement a-t-il tenu compte et tiendra-t-il compte de ces inégalités économiques ou des effets inégaux de la pandémie lorsqu’il élaborera ses mesures d’aide aux travailleurs touchés? Le cas échéant — et je suppose que c’est le cas —, comment s’y prend-il?

Mme Qualtrough : Madame la sénatrice, soit dit en passant, vous vous adressez à la ministre aveugle au sens de la loi; je ne peux donc pas voir votre visage.

La réponse courte est « absolument ». Nous pourrions discuter pendant une heure de la manière dont la pandémie a accéléré certaines tendances qui se dessinaient déjà et dont elle a complètement transformé des industries et des secteurs majeurs. Nous tentons de répondre à cette situation de diverses façons, d’abord au moyen de la création d’emplois — nous essayons de créer et de subventionner des emplois dans des secteurs particuliers —, mais aussi par le truchement de la formation. Je parle ici notamment de la formation sur les compétences de base, formation grâce à laquelle les personnes acquièrent des compétences transférables qu’elles pourront mettre à profit tout au long de leur vie et de leur carrière, peu importe l’emploi qu’elles occupent. Je pense également à nos initiatives sectorielles, dans le cadre desquelles nous investissons dans des programmes et des solutions permettant aux travailleurs de s’adapter rapidement à une nouvelle industrie. Nous avons mené un projet pilote à Toronto récemment : 40 serveurs ayant travaillé dans la restauration pendant de nombreuses années ont eu la possibilité de se recycler en suivant un cours sur le télémarketing et la télévente, des domaines faisant appel à des compétences semblables et leur donnant le plaisir d’interagir avec les gens. Très peu de temps après avoir reçu la formation — en 2 à 4 semaines —, 97 % d’entre eux ont décroché des emplois. Il s’agit de procéder de manière très délibérée et de cibler énergiquement les emplois que nous savons disponibles ou les compétences nécessaires pour les occuper. On n’offre pas de la formation juste pour offrir de la formation, pour ainsi dire.

Je pourrais en dire beaucoup plus à ce sujet, mais je ne veux pas prendre tout votre temps.

La sénatrice Forest-Niesing : C’est excellent que vous preniez une approche aussi ciblée. Merci beaucoup pour votre réponse.

En lisant les diverses mesures prévues par le projet de loi pour venir en aide aux personnes n’ayant pas droit à l’assurance-emploi à un autre titre, comme les proches aidants et d’autres groupes, j’ai remarqué que dans de nombreux cas, le processus à suivre pour avoir accès aux mesures de soutien semble de plus en plus complexe, et ce, malgré la simplicité fort prometteuse des mesures d’urgence mises en place pour la population canadienne au début de la pandémie. C’est cette complexité croissante qui me pousse à vous demander, madame la ministre, si l’on réfléchit sérieusement à la possibilité d’instaurer un revenu minimum garanti. Dans une réponse précédente, vous avez présenté les six critères principaux dont vous tenez compte lorsque vous réfléchissez aux buts ou aux objectifs de l’assurance-emploi. À mes yeux, ces objectifs ressemblent beaucoup à ceux d’un revenu minimum garanti. Le gouvernement considère-t-il cette possibilité? Dans la négative, qu’est-ce qui l’en empêche, malgré les recommandations en ce sens de diverses parties, y compris du Comité sénatorial des finances nationales?

Mme Qualtrough : C’est un autre sujet auquel nous pourrions consacrer toute une réunion, madame la sénatrice.

Je peux vous dire qu’à mesure que nous sortirons de la phase d’intervention d’urgence et que nous entrerons dans celle de la reprise, les programmes comprendront de plus en plus de mesures d’intégrité préalables. Au départ, les questions ne servaient qu’à des fins d’attestation : « Avez-vous un numéro d’assurance sociale? Avez-vous perdu votre emploi à cause de la COVID? » Nous devions utiliser la PCU pour distribuer de l’argent. Aujourd’hui, nous avons encore à procéder à la vérification postérieure de tous ces dossiers. Nous tentons de trouver un équilibre entre assumer un plus grand risque pour être en mesure de verser rapidement les fonds et renforcer la vérification préalable dans le but d’éviter la fraude.

En ce qui a trait au revenu de base universel, les discussions portent souvent sur des mesures ciblées par opposition à un régime universel en vertu duquel chaque personne a droit à un revenu minimum, peu importe l’endroit où elle se trouve, son lieu de résidence, son identité et sa capacité de travailler. La décision finit toujours par être de fournir plus de soutien aux personnes qui en ont le plus besoin. À l’heure actuelle, nous utilisons l’Allocation canadienne pour enfants pour lutter contre la pauvreté, dans une certaine mesure. Elle a sorti des centaines de milliers d’enfants de 0 à 18 ans de la pauvreté. Nous avons aussi des programmes à l’intention des 65 ans et plus. Toutefois, le gouvernement fédéral n’offre pas vraiment de programmes visant à aider les Canadiens en âge de travailler à vivre dans la dignité.

Mes efforts sont axés sur la création d’une nouvelle prestation d’invalidité pour les Canadiens handicapés en âge de travailler. Même si je pense que l’objectif global est d’instaurer un revenu minimum de base, en ce moment, nous choisissons de verser les fonds à des groupes particuliers afin de leur offrir plus de soutien.

Je vous dirais, et le ministre Hussen vous dirait aussi, que des projets pilotes sont en cours. Son équipe examine la question. Encore une fois, je n’ai pas beaucoup de temps et je suis désolée, mais je serai heureuse de vous transmettre les renseignements pertinents. Je ne les ai tout simplement pas à portée de la main.

La sénatrice Forest-Niesing : Je pense bien que je vais devoir vous acheter un café un jour.

Mme Qualtrough : Certainement.

La sénatrice Forest-Niesing : J’en serais ravie. Je vous remercie.

La sénatrice Dasko : Madame la ministre, je vous remercie d’être de retour au Sénat. Je suis heureuse de vous voir et d’entendre ce que vous avez à dire.

J’espère que vous ne vous opposerez pas à ce que je reprenne un sujet abordé plus tôt, soit les initiatives liées aux services de garde d’enfants. Dans le travail accompli par le gouvernement, le modèle québécois est présenté comme une sorte d’idéal. Vous avez annoncé du financement pour cinq ans. Selon vous, les régimes qui seront mis en place partout au pays ressembleront-ils à celui du Québec? Est-ce l’objectif du programme relatif aux services de garde d’enfants, étant donné que le gouvernement loue si hautement le modèle québécois? J’aimerais avoir une idée de la vision que vous avez du système de garde d’enfants qui sera créé au cours des cinq prochaines années.

Mme Qualtrough : Je vous remercie, madame la sénatrice. J’espère réussir à vous donner une réponse satisfaisante.

J’ai participé au groupe de travail ministériel chargé de l’élaboration de ce programme. Je pense que notre objectif est de créer un système tirant des leçons du modèle québécois, mais fondé sur les principes de l’abordabilité — le coût doit être bas pour qu’un plus grand nombre de personnes aient accès aux services — et de la qualité. Ce sont les principes qui sous-tendent le modèle québécois, mais ce régime n’est pas parfait; il a rencontré des écueils. Notre travail consiste à tirer des leçons de l’expérience du Québec, sans commettre les mêmes faux pas, pour ainsi dire. Certes, les principes de base sont les mêmes.

M. Flack pourrait vous donner plus de détails, mais c’est ainsi que je le vois.

M. Flack : Nous avons déjà conclu des accords-cadres avec chaque province et territoire. Ces accords-cadres laissent une marge de manœuvre. À titre d’exemple, l’ensemble des provinces et des territoires ont accepté que les fonds soient versés à des services de garde réglementés, mais il y a de la souplesse sur ce plan : dans certaines provinces, il y a une plus grande proportion de services de garde sans but lucratif que de garderies à but lucratif, alors qu’ailleurs, c’est le contraire.

De plus, les mécanismes de prestation varient. Comme vous le savez, certaines provinces ont choisi de commencer l’instruction formelle plus tôt et de favoriser l’accès universel pour tous les enfants à partir de quatre ans, et même, à quelques endroits, à partir de trois ans. D’autres se concentrent plutôt sur les services de garde avant et après l’école, par exemple.

Les accords-cadres sont conçus de façon à donner de la souplesse aux provinces, tout en établissant des principes communs de réglementation, d’accessibilité et d’abordabilité. Le gouvernement a annoncé qu’il espérait que les ressources fédérales permettraient aux provinces de réduire de 50 % les frais moyens d’ici la fin de 2022, par exemple. Il espère aussi être en mesure de faire augmenter suffisamment le nombre de places pour répondre à la demande.

Il ne s’agit pas d’un modèle unique, mais il est fondé sur des principes fondamentaux que l’ensemble des provinces et des territoires ont adoptés.

La sénatrice Dasko : Pouvez-vous confirmer que le gouvernement fédéral a bel et bien l’intention de couvrir les coûts de la maternelle pour tout le pays? C’est ce que j’ai entendu dire. Pouvez-vous confirmer que c’est une des choses que vous avez l’intention de faire?

M. Flack : Les mesures comprises dans le régime feront l’objet de négociations avec les provinces. La maternelle fait partie de l’éducation de la petite enfance. Dans la mesure où des places sont ajoutées à cette fin, c’est une possibilité, mais nous n’avons pas officiellement ouvert le prochain cycle de négociations avec les provinces. C’est un enjeu que les provinces ont soulevé. À titre d’exemple, certaines provinces ont exprimé la volonté de commencer à offrir la maternelle plus tôt afin d’en universaliser l’accès. Le gouvernement fédéral pourrait envisager la possibilité d’aider à financer une telle mesure. Ce sont des possibilités qui feront l’objet de négociations.

La sénatrice Dasko : C’est vrai, alors. J’avais entendu parler de cette possibilité; je voulais donc vous demander de confirmer que le gouvernement l’examinait sérieusement. Imaginez si le gouvernement fédéral finançait la maternelle d’un océan à l’autre. Ce serait quelque chose, n’est-ce pas? Ce serait une avancée extraordinaire, quand on y pense.

La présidente : Sénatrice Mégie, j’ai lu que vous aviez reçu la réponse à votre question. C’est excellent.

Madame la ministre, j’aurais une question à vous poser avant que nous passions au deuxième tour. Elle concerne la section 32, celle portant sur l’augmentation de 10 % des prestations de la Sécurité de la vieillesse et le paiement unique de 500 $. Si je vous pose la question, c’est parce que le comité a reçu quelques témoins qui craignaient que cette mesure crée deux catégories d’aînés. Qu’arrivera-t-il aux personnes âgées de 65 à 74 ans? De fait, un Canadien a exprimé la même préoccupation dans une lettre envoyée à mon bureau. Que répondez-vous à ces personnes?

Mme Qualtrough : Je vous remercie pour la question, madame la présidente.

Cette mesure faisait partie du programme que notre gouvernement a présenté durant les élections de 2019. Elle est fondée sur le fait que nous vieillirons toutes et tous, si Dieu le veut. Lorsqu’on arrive à l’âge de 75 ans, il se passe certaines choses : on commence à épuiser ses épargnes; les coûts marginaux des soins augmentent; la probabilité qu’on ait un handicap atteint 40 %. Par conséquent, les besoins financiers d’une personne de 75 ans sont plus grands que ceux d’un aîné de 65 ans.

Ce n’est certainement pas une solution universelle. Nous cherchons toujours des moyens de faire mieux, mais la décision d’augmenter de 10 % les paiements de la Sécurité de la vieillesse pour l’ensemble des prestataires est basée sur la reconnaissance de la précarité des conditions de vie des aînés de 75 ans et plus, comme je viens de l’expliquer. Cela ne signifie pas que nous ne sommes pas prêts à examiner d’autres mesures pouvant être prises pour soutenir nos aînés; cependant, l’augmentation générale de 10 % des prestations de la Sécurité de la vieillesse représente la première étape, et une étape fort importante.

La présidente : Je vous remercie pour votre réponse.

Nous avons le temps de faire un deuxième tour de questions. Madame la ministre, je sais que vous avez dit que vous pouviez rester avec nous.

Mme Qualtrough : Je suis désolée, je ne suis pas reconnue pour la brièveté de mes réponses.

La présidente : Nous vous sommes très reconnaissants du temps que vous nous accordez.

Le sénateur R. Black : Madame la ministre, l’idée d’un secrétariat a été soulevée à quelques reprises, d’abord en réponse à ma question sur les données. Avez-vous une estimation du coût de la création d’un tel secrétariat et des coûts annuels?

Mme Qualtrough : M. Flack peut vous la fournir.

M. Flack : Je la cherche frénétiquement. Je vais la trouver et la mettre dans la fenêtre de discussion.

Le sénateur R. Black : Je vous remercie d’être des nôtres, madame la ministre.

La sénatrice Bovey : Merci encore une fois, madame la ministre, et merci aussi à vos collaborateurs de leur présence.

Nous avons beaucoup parlé des provinces. Comme nombre d’entre vous le savent, l’Arctique m’intéresse au plus haut point. Je pense que nous reconnaissons tous que la situation dans le Nord canadien est unique étant donné la grande distance qui sépare les collectivités et l’interrelation des enjeux. Je reviens à la section 34. Comment allons-nous former et soutenir les éducateurs de la petite enfance du Nord, de sorte à avoir, je l’espère, un effet réel sur l’éducation et la formation des citoyens — et particulièrement des citoyens autochtones — du Nord?

Mme Qualtrough : C’est une question très importante.

Dans le modèle de l’apprentissage et de la garde des jeunes enfants, nous reconnaissons qu’il faut tenir des discussions avec les communautés autochtones et concevoir l’apprentissage et la formation en fonction de ce que ces communautés jugent être leurs priorités.

Je pense que M. Flack est mieux placé que moi pour fournir des précisions à ce sujet.

M. Flack : Je suppose que le programme-cadre de notre ministère est le Programme de formation pour les compétences et l’emploi destiné aux Autochtones. Il s’agit en fait d’un modèle de transfert des ressources à l’entité pertinente, qui est alors libre de déterminer les besoins locaux et la meilleure façon d’y répondre. Nous recevons des rapports grâce auxquels nous pouvons mesurer les résultats obtenus, ce qui permet une adaptation, au niveau local, en fonction des besoins locaux. Les communautés échangent leurs pratiques exemplaires, et nous avons constaté que c’était un élément essentiel. Nous avons adopté la même approche pour tous les éléments de la composante de l’apprentissage et de la garde des jeunes enfants autochtones. Grâce à une approche fondée sur des distinctions, le développement peut se faire au niveau de la collectivité sans les restrictions habituellement imposées aux programmes.

La sénatrice Bovey : Cette approche permettrait la transmission des connaissances traditionnelles et des langues autochtones.

M. Flack : En effet. Dans le Programme de formation pour les compétences et l’emploi destiné aux Autochtones et dans le domaine de l’apprentissage et de la garde des jeunes enfants, les langues autochtones — dont j’étais responsable à mon poste précédent au sein de Patrimoine canadien — constituent un élément essentiel. Bon nombre des chefs de file du domaine de l’apprentissage et de la garde des jeunes enfants seraient d’avis que les langues autochtones constituent l’un des éléments les plus importants de la restauration des cultures. Comme vous le savez, un grand nombre des langues autochtones de notre pays sont menacées de disparition. Lorsque nous rencontrons ces chefs de file, nous constatons que la jeunesse est perçue comme un espoir. Les décisions se prennent donc au niveau de la communauté.

La sénatrice Bovey : Merci. Et merci à vous, madame la ministre.

La sénatrice Omidvar : Je remercie la ministre et le personnel d’être encore présents.

Je voudrais maintenant aborder la section 23, qui porte sur le salaire minimum de 15 $ de l’heure. Lors de la réunion du comité de la semaine dernière, nous avons entendu le point de vue des parties prenantes, à savoir des entreprises et des syndicats. Comme vous pouvez l’imaginer, madame la ministre, pour les uns, le nouveau salaire minimum fédéral est une grande avancée et, pour les autres, c’est un cauchemar, et ces deux opinions ne pourront jamais être conciliées. Mais il est important de trouver la vérité, et nous sommes conscients que la vérité doit se situer quelque part entre ces deux points de vue. J’aimerais savoir si vous appuieriez la création d’une commission sur les faibles salaires, dont le mandat serait précisément de découvrir la vérité de manière impartiale et non partisane. Des pays comme l’Allemagne, le Japon et le Royaume-Uni ont tous bénéficié de la réalisation d’études sur l’incidence du salaire minimum et de l’élimination des préjugés qui y sont associés. Je pense qu’il est temps de créer ce genre de commission. Qu’en pensez-vous, madame la ministre?

Mme Qualtrough : Je vous remercie de votre question.

C’est un concept qui m’est quelque peu familier. Il ne relève pas de mon portefeuille, mais plutôt de celui de la ministre du Travail. Mais encore une fois, je ne rate jamais une occasion d’en apprendre davantage, surtout si cela peut profiter aux gouvernements provinciaux et fédéral dans le domaine de l’emploi. Une part importante de nos activités et un grand nombre de nos travailleurs relèvent en fait de la compétence des provinces. Si nous avons la possibilité d’en apprendre davantage et de partager ces connaissances avec l’ensemble de la main-d’œuvre, je pense que c’est une excellente idée.

La sénatrice Omidvar : Il reviendrait cependant au gouvernement fédéral de créer cette commission.

Mme Qualtrough : Tout à fait. Je veux dire que nous pourrions transmettre les connaissances acquises aux secteurs de compétence provinciale.

La sénatrice Omidvar : Certainement. Merci, madame la ministre.

La présidente : Merci, monsieur Flack, pour votre réponse à la question du sénateur Black dans le groupe de discussion. Pour que la réponse soit consignée au compte rendu, le coût du secrétariat de l’apprentissage et de la garde des jeunes enfants s’élève à 12 millions de dollars par an. C’est exact?

M. Flack : Le profil de financement fluctue; il s’agit d’un montant de 7,8 millions de dollars. Je vais obtenir le profil complet, car il varie, et nous le fournirons au comité dès demain.

La présidente : Nous vous en serions très reconnaissants.

Je pense que nous n’avons pas d’autres questions. Je tiens à vous remercier, madame la ministre, ainsi que votre équipe, de votre présence, de votre temps et de la précision de vos réponses. Nous vous en sommes très reconnaissants alors que notre comité achève l’étude des 11 sections du projet de loi C-30 que nous avons dû examiner. Merci beaucoup.

Je tiens à remercier mes collègues. Je souhaite remercier tout particulièrement l’équipe qui appuie notre équipe. Je vois notre greffier sur place à Ottawa, qui s’assure, dans le cadre des mesures actuellement requises, que nous pouvons nous réunir virtuellement. Nous lui sommes très reconnaissants. Merci d’avoir rendu cette réunion possible pour nous et pour la population canadienne.

(La séance est levée.)

Haut de page