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AEFA - Comité permanent

Affaires étrangères et commerce international


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le jeudi 5 mai 2022

Le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international se réunit aujourd’hui, à 11 h 30 (HE), avec vidéoconférence, pour étudier la teneur des éléments de la partie 9 du projet de loi S-6, Loi concernant la modernisation de la réglementation.

Le sénateur Peter M. Boehm (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Je m’appelle Peter Boehm, je suis un sénateur de l’Ontario et je suis président du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international.

[Traduction]

Permettez que je présente les sénateurs participant à la réunion : Gwen Boniface, de l’Ontario; Mary Coyle, de la Nouvelle-Écosse; Marty Deacon, de l’Ontario; Amina Gerba, du Québec; Stephen Green, de la Nouvelle-Écosse; Peter Harder, le vice-président du comité; Victor Oh, de l’Ontario; Yuen Pau Woo, de la Colombie-Britannique. Soyez tous les bienvenus, vous et notre public d’aujourd’hui.

Conformément à l’ordre adopté par le Sénat le 28 avril 2022, le comité examine la teneur des éléments de la partie 9 du projet de loi S-6, Loi concernant la modernisation de la réglementation.

Pour nous y aider, nous accueillons deux fonctionnaires qui représentent respectivement le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada et l’Agence des services frontaliers du Canada, c’est-à-dire M. James van Raalte, directeur exécutif, Direction de politiques et de coopération en matière de réglementation; Mme Janine Harker, directrice, Division des politiques du secteur commercial et des échanges commerciaux, Direction générale de la politique stratégique.

Je remercie les témoins de leur participation. Soyez les bienvenus. M. van Raalte, vous avez la parole.

James van Raalte, directeur exécutif, Direction de politiques et de coopération en matière de réglementation, Secrétariat du Conseil du Trésor : Mesdames et messieurs les sénateurs, je vous remercie.

Je présente d’avance mes excuses aux sénateurs qui ont étudié ce projet de loi dans d’autres comités pour mes répétitions, mais il est important pour le comité de bien comprendre le contexte. Le projet de loi S-6, Loi concernant la modernisation de la réglementation, propose de modifier 29 lois au moyen de 46 modifications qui contribueront à maintenir les règlements adaptés aux besoins d’aujourd’hui, en réduisant le fardeau administratif des entreprises, en facilitant les communications numériques avec l’État, en simplifiant les processus réglementaires, en prévoyant des exemptions de certaines exigences réglementaires pour la mise à l’épreuve de nouveaux produits et en facilitant le commerce transfrontalier grâce à l’harmonisation plus poussée des règles entre les divers gouvernements.

Le projet de loi S-6 est le deuxième projet de loi annuel de modernisation de la réglementation qui émane du gouvernement. Le premier était intégré dans la Loi d’exécution du budget de 2019.

Annoncé dans l’Énoncé économique de l’automne de 2018, le projet de loi annuel sur la modernisation de la réglementation se veut un mécanisme législatif récurrent qui permettra au gouvernement de modifier, conformément au bon sens, diverses lois, d’un seul coup, pour corriger des exigences excessivement compliquées, incohérentes ou dépassées qu’auront dénoncées les entreprises et les citoyens canadiens.

Le projet de loi S-6 fait partie des plans du gouvernement pour améliorer le système réglementaire canadien tout en continuant à assurer la santé et la sécurité des Canadiens ainsi que la protection de l’environnement. Chaque modification que prévoit le projet de loi a en soi une portée modeste. Prises dans leur ensemble, elles auront beaucoup d’effet et contribueront au projet de modernisation réglementaire du gouvernement. Le fait de les regrouper dans un même projet de loi permet des économies de temps et d’argent.

Le projet de loi S-6 est conçu précisément pour proposer diverses modifications législatives non controversées d’un seul coup. Ce sont des correctifs que la présidente du Conseil du Trésor peut présenter ou parrainer au nom de ses collègues ministres. Tout ce qui se situe au-dessus de ce seuil peut être un bon candidat pour la modernisation des règlements, mais il incombe à chacun des ministres responsables de le proposer, pour en permettre l’examen par le public et le Parlement.

Sur les 46 modifications proposées, 33 seraient identifiées par les parties prenantes, et les 13 autres répondraient à des questions soulevées par le Comité mixte permanent des examens de la réglementation.

Le Secrétariat du Conseil du Trésor a lancé une consultation du public, après annonce dans la Gazette du Canada au cours de l’été de 2019, dans laquelle il invitait les parties prenantes intéressées à faire connaître leur opinion sur des thèmes touchant la modernisation des règlements, notamment en proposant des idées pour ce mécanisme législatif. Quarante-huit mémoires ont fait référence au projet de loi dans le cadre de cette consultation, mais la plupart des réponses débordaient de ce cadre ou proposaient des modifications aux règlements plutôt qu’aux lois. Toutes ces réponses ont été communiquées aux ministères et organismes compétents. Après cette consultation, on publiait, en novembre 2020, la Synthèse des commentaires recueillis : Rapport sur la modernisation de la réglementation.

Les quatre thèmes suivants se sont dégagés des autres pour les modifications à apporter aux lois d’après cette consultation : premièrement, réduction du fardeau administratif; deuxièmement, assouplissement des règlements et possibilités accrues d’expérimentation; troisièmement, harmonisation avec les principaux partenaires commerciaux; quatrièmement, suppression des exigences redondantes, incompréhensibles ou faisant double emploi.

De même, en août 2019, il a été fait appel aux ministères et organismes de réglementation. Nous avons reçu 174 propositions qui touchaient 72 lois et plus de 14 organismes. Toutes les propositions figurant dans le projet de loi S-6 ont été revues en profondeur pour en assurer l’innocuité pour la santé, la sécurité et la sûreté des Canadiens ainsi que la protection de l’environnement

En plus de ce qui se trouve dans le projet de loi S-6, on a réservé des propositions supplémentaires pour examen ultérieur. Les raisons en étaient diverses, notamment leur portée trop grande ou leur nature non réglementaire, tandis que d’autres n’ont pas été prises en considération, par exemple si elles visaient à modifier des frais de service ou si elles proposaient des activités supplémentaires qui, de fait, contribuaient à augmenter le fardeau administratif.

Bref, l’élaboration de la troisième version de ce projet de loi, déjà engagée, s’inspirera des leçons de la pandémie de COVID. La présidente du Conseil du Trésor a promis de déposer ce troisième projet de loi de modernisation de la réglementation au printemps de 2023. De plus, le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada se servira de sa nouvelle plateforme, récemment inaugurée, Parlons des règlements fédéraux, pour connaître le point de vue des entreprises et des citoyens canadiens sur d’éventuelles améliorations à apporter au système réglementaire fédéral. Les consultations sur le quatrième projet de loi devraient être lancées à l’automne de 2022.

Merci.

Janine Harker, directrice, Division des politiques du secteur commercial et des échanges commerciaux, Direction générale de la politique stratégique, Agence des services frontaliers du Canada : Je suis ravie de venir témoigner sur un projet de modification de la Loi sur les douanes, qui se trouve dans la partie 9 du projet de loi S-6.

Le projet de modification de l’article 164 de cette loi donnera l’autorité première de prendre des règlements pour la mise en œuvre des accords de libre-échange. Cette modification permettra d’accomplir un certain nombre de choses.

D’abord, elle simplifiera la rédaction des règlements pour la mise en œuvre des accords de libre-échange, parce que l’autorité pour le faire sera claire et sans équivoque. Même si les pouvoirs de prendre des règlements pour la mise en œuvre des accords de libre-échange se trouvent déjà dans la Loi sur les douanes, ils sont disséminés un peu partout dans le texte. Par exemple, la version actuelle du paragraphe 164(1.1) donne le pouvoir de prendre des règlements pour l’interprétation, l’application et l’exécution uniformes d’un protocole, d’un chapitre ou d’une disposition précise des accords de libre-échange énumérés dans la partie 5 de l’annexe de la loi. L’alinéa 35.1(4)b) de la loi donne le pouvoir de prendre des règlements concernant les certificats d’origine, tandis que le paragraphe 97.1(1) se rapporte expressément aux certificats d’origine des marchandises exportées. Le paragraphe 43.1(2) de la loi donne le pouvoir de prendre des règlements pour des décisions anticipées...

Le président : Madame Harker, puis-je vous interrompre un moment et vous demander de ralentir le débit, pour que les interprètes puissent suivre?

Mme Harker : Toutes mes excuses.

Simplement pour compléter les dispositions réglementaires qui existent déjà, le paragraphe 43.1(2) de la loi accorde le pouvoir de prendre des règlements pour des décisions anticipées, tandis que le paragraphe 43.1(1) décrit l’action réciproque des décisions avancées et des accords de libre-échange.

Une disposition unique pour la mise en œuvre de règlements concernant les accords de libre-échange facilitera la détermination du pouvoir au moment de la rédaction et, bien sûr, elle permettra au Comité mixte permanent des examens de la réglementation de déterminer où réside le pouvoir de prendre des règlements concernant les accords de libre-échange. L’existence d’un seul pouvoir habilitant pourrait également simplifier la modification des règlements, si un tribunal ou une commission canadienne devaient déterminer qu’un règlement en vigueur est en contradiction avec les exigences d’un accord de libre-échange. Enfin, un pouvoir unique garantira la possibilité, pour un règlement rédigé pour la mise en œuvre d’accords de libre-échange, de répondre à des exigences nouvelles ou imprévues.

Si, traditionnellement, l’objectif premier des accords de libre-échange était de réduire ou de supprimer les obstacles aux échanges liés à l’imposition de droits, les nouveaux accords comportent souvent, dès la rédaction, des clauses sur d’autres questions, comme la protection de la propriété intellectuelle, la prise en considération de l’environnement et de la main-d’œuvre ainsi que les contrats de service. L’existence d’un pouvoir unique garantira la possibilité, pour un règlement des douanes, d’appliquer ces accords en intégrant ces nouveaux éléments d’appréciation et en y répondant, s’il y a lieu.

Je m’arrête ici. Je suis à votre disposition pour répondre à vos questions.

Le président : Je vous remercie pour vos exposés.

Avant de passer aux questions, que chacun sache qu’il disposera, au maximum, de cinq minutes de temps de parole au premier tour, ce qui comprend questions et réponses. Si vous souhaitez poser une question, veuillez nous faire signe, à notre greffière, Mme Lemay, ou à moi, et nous vous inscrirons sur la liste.

Le sénateur Oh : Chers témoins, soyez les bienvenus.

Affaires mondiales Canada a compté 12 accords commerciaux actuellement en négociation par le Canada, notamment avec l’Association des Nations de l’Asie du Sud-Est, l’Inde, le MERCOSUR, l’Alliance du Pacifique et le Royaume-Uni. Quels règlements douaniers le gouvernement du Canada pourrait-il prendre si les négociations aboutissaient, et dans quelle mesure les règlements douaniers qui mettent ces accords en œuvre seraient-ils touchés par l’article 161?

Le président : Madame Harker, c’est votre rayon, je pense.

Mme Harker : Oui. Merci pour la question.

Je pense qu’on ferait mieux de poser la question sur l’aboutissement des négociations à Affaires mondiales Canada. Je ne pourrai rien dire des règlements précis qu’on pourrait mettre en place tant que je n’aurai pas assimilé le texte définitif des accords ni des lois connexes.

Dans votre deuxième question, s’agissait-il de l’article 161 ou de l’article 164 de la Loi sur les douanes?

Le sénateur Oh : De l’article 161.

Mme Harker : Je pourrais l’étudier et vous communiquer une réponse écrite. Pour le moment, je ne dispose d’aucun renseignement précis que je pourrais vous donner tout de suite.

Le sénateur Oh : Merci.

Le président : Merci, madame Harker. Nous acceptons votre offre de réponse écrite que nous voudrions connaître dès que vous pourrez nous la communiquer, pour l’inclure dans notre rapport.

Le sénateur Woo : Je remercie M. Raalte and Mme Harker de comparaître.

Madame Harker, ma question concerne le régime actuel des règlements pris en application d’un accord de libre-échange. Pouvez-vous dire si on n’a pas réussi à mettre en place de tels règlements, faute de pouvoirs clairs, ce à quoi le projet de loi S-6 pourrait porter remède?

Mme Harker : Merci pour la question.

À ma connaissance, aucun accord de libre-échange, actuellement, ne nous donne du fil à retordre pour l’application des règlements. Dans le passé, il nous est plutôt souvent arrivé d’accélérer la cadence pour faire coïncider les projets et les règlements avec l’entrée en vigueur d’un accord. Parfois, on craint de peut-être négliger un détail, dans notre hâte de produire un règlement complet, qui satisfait à toutes les exigences de l’accord. Grâce à la disposition prioritaire, nous nous sentons confiants et assurés pour, plus tard, s’il faut revenir en arrière et peut-être trouver un détail qui serait passé inaperçu à la rédaction, avoir le pouvoir de continuer et de le faire.

Le sénateur Woo : Merci.

Le sénateur Harder : Je remercie les témoins.

M. van Raalte, de l’estimé Secrétariat du Conseil du Trésor, j’ai une question sur le processus. Je salue dans votre déclaration votre proposition d’un plan de travail pour rendre annuel le projet de loi sur la modernisation de la réglementation, comme il était censé l’être, vu qu’il ne s’est pas révélé comme tel depuis son annonce. Cela ne donne pas bonne mine au processus. J’apprécie l’entente profonde entre le Conseil du Trésor et les ministères compétents, d’une part, et les parties prenantes, mais l’irritation que ressent le secteur privé, à cause des règlements, au Canada, provient notamment des disputes de compétence entre les règlements fédéraux et ceux des provinces qui viennent lui compliquer la vie. Pouvez-vous décrire les mesures que vous prenez, dans les institutions et même, peut-être, sur le plan électronique ou en profitant des technologies dont vous facilitez la naissance, comment vous pouvez mieux harmoniser ce qui relève des provinces avec les avancées fédérales pour que le consommateur du règlement — en premier lieu le secteur privé — ressente plus de rationalité et de cohérence?

M. van Raalte : Monsieur le président, je vous remercie de cette question très pertinente.

Conformément à l’accord de libre-échange entre le gouvernement du Canada, les provinces et territoires, le Canada préside une table missionnée de contrôle réglementaire, à laquelle les provinces et les territoires ont chacun leurs représentants. Ce comité est chargé exactement de ce dont vous parlez, c’est-à-dire d’examiner les obstacles au commerce intérieur et supprimer le double emploi et les incohérences entre les règlements des provinces — c’est potentiellement uniquement le cas, si c’est à l’extérieur des compétences fédérales — mais, également, des règlements fédéraux, provinciaux et territoriaux. Ce comité se réunit mensuellement, parfois plus souvent, pour son plan de travail. Nous avons le contrôle du travail des organismes coopératifs de réglementation, c’est-à-dire les spécialistes qui sont sur le terrain dans chaque province et territoire, et nous émettons des orientations et des conseils sur l’établissement des priorités de ces plans de travail.

Pour accoucher de la réponse, l’un des premiers problèmes définis par la table de coopération a été les innombrables codes de construction en vigueur dans notre pays. Le gouvernement fédéral a réussi à faciliter la conclusion d’un accord de conciliation avec les provinces des territoires pour mieux harmoniser ces codes. Vous seriez étonné d’apprendre que les normes de conception d’une toilette peuvent ne pas être compatibles d’une province à l’autre. On estime que l’économie canadienne économise grâce à ce travail entre 750 millions et 1 milliard de dollars par année.

Le sénateur Harder : Merci beaucoup. Votre réponse comble mes espoirs, c’est-à-dire mettre en relief la possibilité de progresser encore dans la mise en œuvre de l’accord de libre-échange. Dans une étude que j’ai lue récemment, on disait que le produit intérieur brut du Canada augmenterait de 3 à 4 % grâce à la mise en œuvre réglementaire plus exhaustive de l’accord interprovincial de libre-échange. On me dit que la plupart des obstacles à ce progrès proviennent de désaccords entre les provinces, par opposition à la coordination entre les provinces et le gouvernement fédéral. Pourriez-vous le confirmer brièvement et nous donner l’espoir de ce gain de productivité qu’attendent avec impatience vos homologues des provinces?

Le président : Je dois vous interrompre, puisque les cinq minutes sont écoulées. Si vous êtes d’accord, vous pourrez reposer la question à votre prochaine intervention.

La sénatrice Boniface : Peut-être pouvez-vous répondre à la question du sénateur Harder pour moi. Je n’ai pas besoin de mon temps au complet, alors poursuivez, pour assurer la continuité.

M. van Raalte : Je vous remercie de la question.

Sachez que nous considérons qu’une bonne partie du problème se situe entre les provinces. Quand je dis cela, il pourrait se poser juste entre deux provinces ou entre toutes les provinces et tous les territoires. Le problème pour tous les gouvernements, c’est de faire le compte de toutes les frictions, de déterminer où elles se manifestent et de définir l’ampleur du problème. Je ne tente pas de fournir une réponse formatée, car il s’agit d’une question d’envergure et qu’il faut savoir quelles provinces réglementent quelque chose, comment elles le font et comment elles peuvent mieux le faire.

Avec notre plateforme appelée Parlons des règlements fédéraux que j’ai évoquée à la fin de mon exposé, le premier thème que nous abordons dans le cadre de nos consultations est celui de la collaboration en matière de réglementation. Nous voulons recueillir des observations de tous les intervenants au sujet de ce genre d’obstacles intérieurs au commerce et des obstacles commerciaux internationaux, car nous avons des tables officielles de collaboration en matière de réglementation avec l’Union européenne et les États-Unis.

Sénateurs, je me ferai un plaisir de vous communiquer le lien afin de faire connaître cette plateforme de consultation qui vise à détecter les obstacles au commerce pour que nous puisions informer nos collègues provinciaux de ces obstacles. Les problèmes pourraient également se trouver entre les instances fédérales et provinciales, sénateurs.

La sénatrice Boniface : Ma question est brève, bien plus générale et vise à informer quiconque regarde la séance.

Pouvez-vous nous donner un exemple du genre de règlement actuellement en place dont le ministre de la Sécurité publique se servirait au chapitre du libre-échange? Je tente d’établir un lien entre son ministère et le libre-échange.

Mme Harker : Certainement. La Loi sur les douanes attribue des responsabilités au ministre de la Sécurité publique et au ministre du Revenu national. Dans le cas de la mise en œuvre d’accords de libre-échange, il revient au ministre de la Sécurité publique de mettre en œuvre de nombreuses dispositions réglementaires de la Loi sur les douanes, comme celles relatives au dédouanement des marchandises avant le paiement des droits et des taxes. Tout ce qui concerne la circulation des marchandises proprement dites relève du ministre de la Sécurité publique.

Le président : Honorables collègues, le sénateur Michael MacDonald, de la Nouvelle-Écosse, et la sénatrice Marie-Françoise Mégie, du Québec, viennent de se joindre à nous.

[Français]

La sénatrice Gerba : Ma question s’adresse à M. van Raalte. D’après un rapport de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante, 90 % des entreprises canadiennes estiment que l’allégement du fardeau administratif devrait être une priorité du gouvernement.

Pouvez-vous nous expliquer de quelle manière la modification du projet de loi S-6 aidera les entreprises canadiennes — notamment celles qui sont actives à l’international — à réduire concrètement leurs charges administratives? Merci.

[Traduction]

M. van Raalte : Je vous remercie de la question.

Je répondrai en indiquant que la politique fiscale et l’administration des impôts sont de la responsabilité du ministère des Finances. L’administration de cette politique relève de Revenu Canada et non de mes responsabilités en matière de politiques réglementaires. Je renverrais donc cette question à ces deux ministères.

Le gouvernement a une règle de un-pour-un, sénatrice, laquelle exige que pour chaque nouveau règlement qui s’accompagne d’un fardeau administratif, le ministère doive, au dollar près, éliminer un fardeau administratif ailleurs au sein du portefeuille de règlements. C’est ce que nous appelons la règle du un-pour-un, laquelle est enchâssée dans la Loi sur la réduction de la paperasse. Depuis l’instauration de cette règle en 2012-2013, le fardeau administratif net a décru de 60,5 millions de dollars au gouvernement fédéral.

[Français]

La sénatrice Gerba : La modification proposée au projet de loi S-6 ferait en sorte que le ministre pourrait prendre des dispositions en vue, notamment, de mettre en œuvre tout accord mentionné à la première colonne de la partie 5 de cette annexe.

Actuellement, il y a beaucoup d’accords qui se négocient dans le monde. Si ce projet de loi devait aller de l’avant, il devrait être assez flexible pour inclure des accords qui se négocient aujourd’hui, qui sont au nombre d’environ 12 dans le monde, et également inclure un accord important avec la Zone de libre-échange continentale africaine.

Y a-t-il une certaine flexibilité pour ajouter d’éventuels nouveaux accords?

[Traduction]

Mme Harker : Nous avons la souplesse nécessaire pour ajouter de nouveaux accords de libre-échange. Une fois ratifiés, ils pourraient être ajoutés à l’annexe. De plus, cette nouvelle mesure réglementaire nous permettra d’adopter des règlements même si un nouvel accord de libre-échange ratifié ne figure pas dans l’annexe, par exemple. À l’heure actuelle, vu la manière dont la loi est écrite, nous sommes limités aux accords qui sont inscrits dans l’annexe et aux chapitres ou aux dispositions qui y énumérés. Ce pouvoir de prise de règlement à large portée nous permettrait d’élaborer et de mettre en œuvre des règlements même si le chapitre ou la disposition dont il est question ne figure pas à l’annexe 5.

La sénatrice M. Deacon : Je vous remercie tous les deux de témoigner aujourd’hui.

Il m’a fallu du temps pour passer en revue les divers aspects du projet de loi S-6. Je veux revenir au « pourquoi ». L’objectif consiste à corriger ou à modifier le système excessivement complexe, incohérent et peut-être périmé qui existe actuellement.

Au Sénat, ce projet de loi est étudié de diverses manières par un certain nombre de comités. Comporte-t-il, selon vous, des aspects qui seront plus difficiles à faire adopter que d’autres, d’après vos conversations? Est-ce qu’une partie ou deux seront plus difficiles à faire adopter vu la manière dont elles sont présentées?

Le président : Sénatrice Deacon, posez-vous votre question aux deux témoins?

La sénatrice M. Deacon : Oui, absolument.

Le président : Je vous remercie.

M. van Raalte : Je peux peut-être commencer à répondre, monsieur le président. Je vous remercie de la question.

Je pense que l’avis que les fonctionnaires ont sur ce qui peut être litigieux ou non peut différer de celui des parlementaires. Selon l’évaluation et les conseils de la fonction publique, ce sont des questions simples, logiques et non litigieuses qui pourraient être soumises à l’examen des parlementaires. Ce ne sera pas parfait à cet égard.

Je pense qu’au regard du temps écoulé depuis le moment où nous entendions proposer ce projet de loi en 2020 — en raison de la pandémie, d’autres projets de loi beaucoup plus importants ont été proposés au Parlement —, le point de vue des parties prenantes a peut-être évolué en trois ans. Au cours des délibérations, vous avez peut-être entendu que de nouvelles idées ont émergé. Quand les parties prenantes voient l’ébauche de libellé quand elles sont consultées aux premières étapes de l’élaboration, il faut parler des concepts, puis les conseils sont formulés au Cabinet à titre confidentiel, et l’ébauche du libellé du projet de loi est présentée à la fin du processus. Quand les parties prenantes voient les détails du libellé, elles pourraient dire que ce n’est pas exactement ce dont elles parlaient. Je dois prévoir une certaine marge de manœuvre au sujet de la définition de « non litigieux » pour tenir compte de l’évolution du point de vue des parties prenantes.

En général, nous avons confiance en cette mesure législative. Nous avons été interrogés — il s’agit de ma troisième comparution devant un comité — sur diverses parties du projet de loi, dont la portée et le niveau d’ambition ont été remis en question. J’ai fait remarquer aux comités que si le Sénat a des conseils sur les projets de loi futurs, sur ces genres de mesures et sur l’ampleur qu’il voudrait voir, ces conseils seraient également les bienvenus.

Le président : Madame Harker, vous disposez d’environ une minute pour répondre.

Mme Harker : Je vous remercie, monsieur le président.

J’abonde dans le même sens que mon collègue, M. van Raalte, et ajouterais qu’à titre de représentante de l’Agence des services frontaliers du Canada, je ne peux traiter que des amendements qui concernent le mandat et les responsabilités de mon ministère. Je ne suis pas vraiment en mesure d’émettre des suppositions sur le succès ou l’absence de succès des amendements proposés pour d’autres ministères.

La sénatrice M. Deacon : Je pensais aborder la question de la période de 2020-2022. Je vous remercie de votre réponse.

La sénatrice Coyle : Merci beaucoup à Mme Harker et à M. van Raalte, nos deux invités d’aujourd’hui. J’ai des questions pour chacun d’entre vous, et j’espère que le temps me permettra de les poser.

J’ai deux questions pour M. van Raalte. Vous avez parlé des diverses manières dont se déroulent les consultations menées auprès des parties prenantes. Nous avons entendu un peu plus de commentaires au cours de la période de questions d’aujourd’hui.

Pourriez-vous parler de la communication active? Vous avez parlé de publier des renseignements dans la Gazette du Canada et d’un nouvel outil pour consulter des Canadiens et les parties intéressées. Quel genre de communication active menez-vous, particulièrement auprès des parties prenantes qui s’intéressent peut-être à la partie 9 que nous étudions aujourd’hui? Quel genre de communication active faites-vous et à quelles parties prenantes s’adresserait-elle?

Vous nous avez également parlé des résultats de certaines de vos consultations et indiqué que certains des commentaires ne cadraient pas avec la portée de la mesure dont nous parlons. Quand des commentaires ne cadrent pas avec la portée, qu’en advient-il?

M. van Raalte : Ce sont là de vastes questions, monsieur le président. Je tenterai d’être bref.

En ce qui concerne la communication active, la vaste majorité de l’information diffusée quotidiennement sur les questions législatives et réglementaires relève des ministères et des organismes responsables. Je vous donnerai l’exemple d’un comité consultatif dont je fais partie à Agriculture et Agoalimentaire Canada, lequel préside la Table sur la réglementation souple. Ce comité réunit Agriculture et Agroalimentaire Canada, l’Agence canadienne d’inspection des aliments et Santé Canada — soit les organismes de réglementation du secteur —, ainsi que des intervenants de l’industrie. Un représentant provincial du secteur agricole en fait partie, et j’y représente le Conseil du Trésor. Il s’agit d’une expérience intéressante au chapitre de la communication active. Ce groupe suit des projets relatifs à l’expérimentation et à l’innovation en matière de réglementation et cherche à déterminer comment évaluer le mieux possible le fardeau de la réglementation au sein du système, admettant que ce fardeau ne concerne pas que le gouvernement fédéral, mais aussi les provinces, les territoires, les municipalités et des pays étrangers. Je pense que c’est un excellent exemple de ce qu’il se fait sur le plan de la communication active. Mme Harker a peut-être un exemple de ce que l’ASFC fait à cet égard.

Pour ce qui est de dire ce qu’il advient des commentaires qui ne cadrent pas avec la portée de la mesure, nous transmettons tout ce qui arrive au Secrétariat du Conseil du Trésor aux ministères et aux organismes responsables. Les questions de réglementation ne nous concernent pas; elles relèvent des ministères et des organismes. Parfois, nous facilitons une consultation d’ensemble au sein du gouvernement du Canada. Nous recevons des commentaires ponctuels de parties prenantes au sujet d’un problème qu’elles éprouvent avec le système et pour lequel elles ont besoin de notre aide afin de le résoudre. Nous assumons une responsabilité active quant à ces questions et mettons peut-être les parties prenantes en rapport avec la bonne personne au sein du système. Quand des commentaires ne cadrent pas avec la portée de la mesure, tout dépend de la situation.

De façon plus générale, je dirais qu’il existe au Canada un problème au chapitre de ce que j’appellerais la littératie réglementaire quand il s’agit de se débrouiller dans ce système fort complexe, de comprendre la différence entre les lois, les règlements et les orientations figurant dans la réglementation, et de s’y prendre le mieux possible pour faire modifier les choses quand on se heurte à un irritant ou à un problème ou quand on arrive avec quelque chose de nouveau qui n’est pas nécessairement couvert par la réglementation. Ce concept de littératie réglementaire, monsieur le président, nous l’avons présenté à l’OCDE, car je pense que c’est un problème qui touche des pays de toutes les régions du monde sur les plans de la démocratie et la foi envers les institutions. Je n’ai pas encore de réponse, mais je pense que l’honorable sénatrice a soulevé un point qui fait l’objet d’un dialogue actif qui s’avère nécessaire, ne serait-ce que pour mieux comprendre le problème et la manière de le résoudre.

Le président : Je vous remercie, monsieur van Raalte. Les cinq minutes sont écoulées, sénatrice Coyle.

Comme il n’y a pas d’autres questions, je voudrais en poser une moi-même. J’aimerais demander à Mme Harker de répondre à la question que la sénatrice Coyle a posée. De plus, en écoutant cet exposé fort intéressant sur la manière dont fonctionnent les consultations menées auprès des parties prenantes — je sais que les consultations et les méthodes diffèrent entre chaque ministère —, j’aimerais savoir combien de demandes — les 33 sur 46 — concernent le nouvel ALENA — l’ACEUM — afin de tenter de satisfaire les demandes des parties prenantes. Madame Harker, je ne sais pas si cette dernière question est juste ou non, mais quoi qu’il en soit, veuillez répondre à la question de la sénatrice Coyle.

Mme Harker : Je répondrai à la question de la sénatrice Coyle. Je ne suis pas certaine de pouvoir répondre à la question du président.

Pour ce qui est de la question de la sénatrice Coyle, je donnerai suite aux propos de M. van Raalte en indiquant que nous avons une sorte d’organisation consultative semblable appelée Comité consultatif sur les activités commerciales à la frontière, lequel est formé par l’ASFC et des représentants des industries partenaires de la chaîne d’approvisionnement et de la chaîne commerciale. Il y a entre autres des importateurs, des exportateurs, des courtiers en douane et des agents d’expédition. C’est l’organe principal par l’entremise duquel nous communiquons l’information et mobilisons nos partenaires de la chaîne commerciale afin de connaître les points qui les préoccupent et de communiquer de nouveaux renseignements, comme nous l’avons fait lors du dépôt du présent projet de loi. Nous nous réunissons régulièrement, soit de manière collective, soit dans le cadre de sous-groupes de travail en matière de politique et de programme.

Je vous présente mes excuses, monsieur le président; je ne suis pas certaine d’avoir l’information sur les diverses propositions qui ont été faites et de savoir combien concernaient l’ACEUM ou le nouvel ALENA.

Le président : Je vous remercie. C’est juste un point qui m’intéresse personnellement. Je garderai ma question pour de futurs témoins.

Honorables sénateurs, je ne pense pas qu’un seul d’entre vous souhaite procéder à un second tour. Je voudrais donc remercier M. van Raalte et Mme Harker des excellents exposés qu’ils ont présentés et des réponses qu’ils ont faites à nos questions.

Avant de lever la séance, je voulais dire que nous avons reçu la Loi d’exécution du budget. Comme prévu, divers éléments seront renvoyés à notre comité. Par conséquent, nous vous transmettrons plus d’informations sur la manière dont nous échelonnerons les séances et entendrons les témoins, en tenant notamment compte de l’étude que nous menons actuellement.

S’il n’y a plus de points à aborder, je vous remercie beaucoup, honorables sénateurs.

(La séance est levée.)

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