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AEFA - Comité permanent

Affaires étrangères et commerce international


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le mercredi 30 novembre 2022

Le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international se réunit aujourd’hui, à 16 heures (HE), avec vidéoconférence, pour examiner, pour en faire rapport, le service extérieur canadien et d’autres éléments de l’appareil de politique étrangère au sein d’Affaires mondiales Canada.

Le sénateur Peter M. Boehm (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Honorables sénateurs, je m’appelle Peter Boehm, je suis un sénateur de l’Ontario et je suis président du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international. Avant de commencer, j’inviterais les membres du comité présents aujourd’hui à se présenter, en commençant par ma gauche.

Le sénateur Woo : Yuen Pau Woo, de la Colombie-Britannique

[Traduction]

Le sénateur Ravalia : Mohamed Ravalia, de Terre-Neuve-et-Labrador.

Le sénateur Greene : Stephen Greene, de la Nouvelle-Écosse.

[Français]

La sénatrice Gerba : Amina Gerba, du Québec.

[Traduction]

La sénatrice Coyle : Mary Coyle, Antigonish, de la Nouvelle-Écosse.

Le sénateur Harder : Peter Harder, de l'Ontario.

La sénatrice M. Deacon : Marty Deacon, de l'Ontario.

Le sénateur Richards : David Richards, du Nouveau-Brunswick.

La sénatrice Boniface : Gwen Boniface, de l'Ontario.

Le président : Merci beaucoup, je vous souhaite la bienvenue, chers collègues. Je souhaite aussi la bienvenue à tous les Canadiens qui nous regardent aujourd’hui sur ParlVU.

Nous poursuivons donc notre étude portant sur le service extérieur canadien. Comme vous le savez, le but de cette étude est d’évaluer dans quelle mesure notre service extérieur et l’appareil de politique étrangère sont bien adaptés et prêts à répondre aux défis mondiaux actuels et futurs. Bien qu’Affaires mondiales Canada joue un rôle de premier plan quand il s’agit de définir, de faire progresser et de représenter les intérêts du Canada à l’étranger, le ministère s’appuie souvent sur d’autres ministères et agences, avec qui il collabore, pour s’acquitter de ses responsabilités. Vous vous souviendrez qu’en octobre, le comité a commencé à examiner le recoupement entre les mandats et le travail d’AMC, du service extérieur et d’autres ministères. Nous avions alors reçu des témoins de cinq ministères et organismes. Aujourd’hui nous recevons un autre acteur gouvernemental qui joue un rôle à l’international, ce qui est peu dire dans le cas de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes qui ont une envergure réellement internationale, ce dont nous leur sommes redevables.

Du ministère de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes, nous recevons le major-général Blaise Frawley, vice-chef d’état-major adjoint de la Défense, et le major-général Greg Smith, directeur général, Politique de sécurité internationale, sous-ministre adjoint (Politiques). Messieurs, bienvenue et merci d’avoir accepté notre invitation.

Avant d’entendre votre déclaration et de passer aux questions, je vais demander aux sénateurs et aux témoins présents dans la salle de s’abstenir de se pencher trop près de leur microphone ou de retirer leur oreillette lorsqu’ils le font. Cela permettra d’éviter tout retour sonore qui pourrait avoir un impact négatif sur le personnel du comité et d’autres personnes dans la salle qui porteraient une oreillette.

Nous sommes prêts pour vos remarques préliminaires. Ce sera suivi d’une période de questions des sénateurs.

[Français]

Major-général Blaise Frawley, vice-chef d’état-major adjoint de la Défense, ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes : Monsieur le président, mesdames et messieurs les sénatrices et sénateurs, au nom des Forces armées canadiennes et du ministère de la Défense nationale, je vous remercie de nous avoir invités à discuter des questions liées à l’étude du comité sur le Service extérieur du Canada.

Aujourd’hui, je suis accompagnée du major-général Greg Smith, directeur général, Politique de sécurité internationale, et sous-ministre adjoint (Politiques).

[Traduction]

En tant que vice-chef d’état-major adjoint de la Défense, l’une de mes responsabilités est de superviser le Directorat de liaison avec l’étranger — ou DLÉ en abrégé. Le DLÉ a pour mandat d’établir, de maintenir, de soutenir et d’entretenir des relations de défense durables avec des nations étrangères afin de soutenir les intérêts stratégiques de défense du Canada. Cela est possible grâce à l’échange d’informations opportunes et précieuses sur les questions de défense, ce qui favorise l’établissement de nouvelles relations de défense et le renforcement des principaux partenariats de défense actuels. Le DLÉ comprend à la fois le Bureau de liaison avec l’étranger et les programmes des attachés de défense canadiens ou ADC.

Le programme du Bureau de liaison avec l’étranger se concentre sur les attachés du service extérieur ici au Canada et sur la section VIP qui coordonne les visites militaires et de défense étrangères au Canada et à l’intérieur du pays. Contrairement au Bureau de liaison avec l’étranger, le programme ADC se concentre sur la présence militaire permanente du Canada dans le monde. Plus précisément, les ADC fournissent des conseils et un soutien pour obtenir une plus grande interopérabilité et une meilleure fourniture des capacités de défense pour les opérations courantes, de circonstance ou potentielles.

Au sein des pays, le personnel de l’ACD et du Bureau de l’ACD est à l’écoute du Haut-Commissaire, de l’Ambassadeur ou du Chef de mission désigné en fournissant des conseils militaires, un soutien approprié et de l’aide, selon les besoins. Tous les membres du bureau de l’ACD sont membres de la mission diplomatique du Canada et agissent sous la direction du chef de mission canadien dans toutes les affaires, à l’exception de celles qui concernent spécifiquement le ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes.

[Français]

Comme on le souligne dans Protection, Sécurité, Engagement : La politique de défense du Canada, la diplomatie militaire est essentielle pour appuyer les priorités du gouvernement en matière de politique étrangère. Elle est essentielle au succès de l’engagement du Canada dans le monde. Elle nous est indispensable pour protéger et défendre notre pays, nos citoyens, ainsi que nos valeurs et nos intérêts.

[Traduction]

Travaillant côte à côte avec le personnel d’Affaires mondiales Canada en tant que membres des missions diplomatiques du Canada, nos attachés de défense établissent et renforcent les relations qui sont essentielles à notre capacité de nous adapter à l’environnement de sécurité en constante évolution et d’apporter des contributions significatives à la communauté internationale.

[Français]

J’ai le privilège de faire partie d’une équipe tout aussi dévouée regroupant des membres des Forces armées canadiennes et des employés de la fonction publique qui font partie de la Direction de la liaison avec l’étranger et des attachés de défense du Canada.

[Traduction]

Suite à ce bref aperçu du Directorat de liaison avec l’étranger, le major-général Smith va maintenant faire de brèves remarques. Nous serons ensuite heureux de répondre à vos questions. Merci.

Major-général Greg Smith, directeur général, Politique de sécurité internationale, sous-ministre adjoint (Politiques), ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes : Bon après-midi, sénateurs et distingués invités. Je suis heureux de me joindre à mon collègue, le major-général Frawley, pour vous parler aujourd’hui et répondre à vos questions concernant notre rôle dans la collaboration avec Affaires mondiales Canada et le service extérieur du Canada. Dans mon rôle de directeur général, Politique de sécurité internationale, je suis responsable des relations bilatérales et multilatérales de la défense nationale à l’échelle internationale. Nous fournissons également un soutien politique aux questions internationales émergentes, ainsi qu’aux opérations des Forces armées canadiennes. Le lien avec Affaires mondiales Canada est bien établi et fait partie intégrante du soutien du ministère de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes aux objectifs stratégiques globaux du gouvernement du Canada. C’est ce qui ressort de la lettre d’introduction du ministre des Affaires étrangères dans la politique de défense du Canada — Protection, Sécurité, Engagement — où il est dit ceci :

Une armée hautement compétente et flexible, capable de travailler en étroite collaboration avec ses alliés et partenaires, est un instrument inestimable de la politique étrangère du Canada.

[Français]

Or, en tant qu’instrument, la Défense nationale a besoin de lignes de communication solides entre ceux qui développent notre politique étrangère et s’engagent sur le plan international et ceux qui sont responsables de la mise en œuvre des opérations et des engagements dans le cadre de cette politique étrangère.

[Traduction]

À cet égard, les divers mécanismes d’élaboration de politiques du ministère de la Défense nationale travaillent en collaboration avec Affaires mondiales en fournissant une défense, des perspectives et des conseils, et en recherchant des occasions de s’engager dans des activités qui s’alignent sur la politique et les priorités gouvernementales déjà établies.

[Français]

Cela se fait par l’entremise de conseils, de réunions et de groupes de travail officiels, tant à l’intérieur des ministères, comme les groupes de travail interministériels, qu’avec nos alliés et nos partenaires, par l’entremise de divers dialogues stratégiques et de discussions d’état-major entre militaires et entre politiques et militaires. Par exemple, la Commission permanente mixte de défense Canada-États-Unis sur la défense, qui est mieux connue sous l’acronyme PJBD en anglais —

[Traduction]

... pour Permanent Joint Board on Defence ou Commission permanente mixte de défense.

Le soutien que la Défense nationale apporte au service extérieur par l’intermédiaire de son réseau d’attachés de défense vient également renforcer ces efforts. Les attachés offrent un soutien à nos missions et à nos ambassades à l’étranger, fournissent des conseils de défense aux chefs de mission et apportent une précieuse compréhension de l’atmosphère et de la situation à nos équipes politiques au pays.

[Français]

Dans le cadre de leur travail, les attachés de défense se concentrent sur les activités qui visent à établir, à maintenir et à entretenir des relations militaires et de défense durables avec les nations hôtes. Ainsi, des informations pertinentes et opportunes relatives aux intérêts du Canada sont disponibles pour appuyer la prise de décisions stratégiques et opérationnelles.

[Traduction]

Ces lieux de discussion combinés, renforcés par une communication informelle à tous les niveaux — des responsables politiques aux cadres — permettent une relation de collaboration entre la Défense nationale et Affaires mondiales. Cela favorise à son tour un environnement positif pour résoudre les différences d’opinions et, en fin de compte, fournir de meilleurs conseils en matière de politiques au gouvernement du Canada.

Je me réjouis de contribuer à cette discussion aujourd’hui et de répondre à vos questions sur le rôle du ministère de la Défense nationale dans le soutien du service extérieur et l’élaboration des politiques.

[Français]

Le président : Merci beaucoup pour votre présentation.

[Traduction]

La sénatrice M. Deacon : Merci beaucoup à vous deux d’être ici en personne cet après-midi. Je pense que vous comprenez très bien le travail que nous avons essayé de faire ces derniers mois. Il s’agit en partie d’apprendre les structures et la façon dont tout fonctionne, et aussi de réfléchir à la façon dont nous pouvons nous améliorer ensemble.

Dans la même veine, puisque vous décrivez tous les deux différentes parties de votre travail, pourriez-vous nous dire s’il y a des structures ou des fonctions qui vous ralentissent, qui font double emploi ou qui sont redondantes dans votre travail? Y a-t-il des structures officielles qui, selon vous, pourraient être repensées afin d’être plus efficaces ou plus lestes dans les relations avec Affaires mondiales Canada?

Mgén Frawley : Merci de la question, monsieur le président. Pour ce qui est des structures et de leur taille, je dirais que, du point de vue de la diplomatie de la défense, nous avons la bonne taille, en ce sens que nous réfléchissons très attentivement aux endroits où nous affectons nos ressources limitées à l’extérieur du Canada, et nous nous assurons de ne pas sur- ou sous-doter les missions. Notre empreinte est relativement petite par rapport à celle des ambassades, des hauts-commissariats et des organisations dont nous faisons partie.

Je dirais donc que notre structure est de la bonne taille, mais nous sommes toujours en train d’évaluer si nous devons ou non nous adapter, si nous devons croître ou diminuer dans des domaines donnés.

La sénatrice M. Deacon : D’après ce que vous venez de dire, il y a beaucoup de roulement. Il n’y a peut-être pas de roulement dans votre cohorte, mais il y en a autour de vous. Est-ce que cela pourrait aussi être un facteur dans le cadre de votre travail?

Mgén Frawley : De nouveau, merci de la question, monsieur le président. Le roulement est toujours un défi, en ce sens qu’il s’agit toujours pour nous de trouver l’équilibre entre les affectations trop courtes ou trop longues et les affectations de la bonne durée. Nos attachés de défense canadiens demeurent normalement trois ans en poste, ce qui leur donne suffisamment de temps pour établir des relations, comprendre le travail qu’ils doivent faire et le réaliser, cela en étant conscient que les gens autour d’eux peuvent changer plus ou moins rapidement.

Cependant, déterminer exactement ce qu’est ce point idéal, surtout compte tenu du fait que certains déménagent dans des endroits où ils n’étaient jamais allés auparavant et établissent des relations qui ne sont pas aussi anciennes que d’autres... pour nous, la période de trois ans fonctionne bien.

Mgén Smith : Merci, monsieur le président.

Je me suis demandé comment parvenir à nous améliorer. Bien sûr, chaque organisation peut s’améliorer, et c’est ce que nous essayons de faire. Je décrirais notre relation particulière avec Affaires mondiales Canada en vous disant qu’il y a des structures formelles et informelles. Sur le plan formel, nous organisons des réunions de temps à autre, tous les quelques mois, et plus fréquemment encore aux échelons inférieurs. Nous avons également des communications quotidiennes et horaires.

Je ne veux pas que vous ayez l’impression que je parle de deux groupes distincts qui n’échangent pas. J’ai un vis-à-vis à Affaires mondiales Canada, qui relève de la Direction générale de la sécurité internationale et des affaires politiques, à qui j’ai envoyé cinq ou six courriels aujourd’hui. Nous sommes en communication constante, puisque nous travaillons ensemble sur les mêmes dossiers. Je suis directeur général, mais sur le terrain ou dans différents pays, ce genre de communication se produit constamment. Les gens vivent et travaillent ensemble. Bien que les relations puissent toujours être meilleures et qu’il soit toujours possible de mieux travailler, je dirais qu’il s’agit d’une très bonne relation, tant officiellement qu’officieusement.

Le président : Merci beaucoup.

Le sénateur Harder : Merci encore de votre présence que nous apprécions. Un aspect de la relation dont vous n’avez pas parlé, et que j’ai personnellement vécu, concerne l’enrichissement mutuel. Quand j’étais aux Affaires étrangères, j’ai appris de mon expérience de remplacement d’officiers du ministère de la Défense nationale, le MDN, et je sais que des agents du Service extérieur ont été recrutés par la direction générale des politiques. Je pense que vous pourriez nous en parler.

Mon autre question est un peu plus générale. À l’occasion de notre déploiement en Afghanistan — et je ne fais pas allusion au contexte hostile —, je pense que nous avons tous tiré des enseignements sur la façon d’améliorer la symétrie et le rythme des opérations. Pouvez-vous nous parler des leçons apprises en Afghanistan, qui a d’ailleurs été ma plus récente expérience de contestation organisationnelle sur les plans cinétique et stratégique?

Mgén Smith : Monsieur le président, je vais commencer par répondre à cette question, après quoi mon collègue devra peut-être mieux vous expliquer mes propos. J’espère que non.

L’enrichissement mutuel... tout à fait. En fait, dans mon groupe, il y a six directorats d’une quarantaine de personnes. Un quart peuvent être des militaires, les autres étant des fonctionnaires civils. Pour les fonctionnaires, les affectations s’enchaînent très vite, puisqu’ils peuvent passer d’Affaires mondiales Canada, à Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, aux organismes centraux. Je n’aime pas les voir partir, mais c’est extraordinaire de les voir revenir, car ils sont porteurs de beaucoup d’informations et qu’ils peuvent expliquer comment les choses fonctionnent ailleurs, ce qui incite à mieux faire et à mieux collaborer. Il se fait beaucoup d’enrichissement mutuel comme on dit. Je dirais que, même si c’est malheureux parce qu’on cherche toujours à garder les meilleurs éléments, ce genre de roulement est extrêmement utile, surtout dans le cas de ceux ayant travaillé au Bureau du Conseil privé et dans d’autres organismes centraux.

Pour ce qui est des leçons apprises en Afghanistan, la plupart des pays occidentaux ont été surpris, sur le plan stratégique, par l’effondrement brutal de l’Afghanistan. J’y ai passé 22 mois de ma vie. Beaucoup d’entre nous ont été surpris de la façon dont cela s’est fait. Mais une fois cette surprise stratégique initiale passée, je dirais que les opérations qui ont eu lieu — l’Op AEGIS — ont été très réussies entre les différents éléments du gouvernement qui ont travaillé très fort pour faire sortir les Canadiens et des Afghans de ce pays. Ils ont collaboré avec de nombreux pays dans la région du Golfe, en particulier, comme plaque tournante pour faire sortir ces gens.

Il s’agissait d’une tragédie — comme nous l’avons tous vu aux nouvelles —, mais je crois que l’opération a été un vif succès, compte tenu de la collaboration qui était nécessaire. Il y a des leçons que nous devons en tirer, mais je crois que de façon générale, malgré l’ampleur de la surprise, les choses se sont très bien déroulées.

Mgén Frawley : Monsieur le président, compte tenu de vos directives concernant des réponses concises, je vais faire un commentaire, mais je serai très bref.

Ce que j’appelle l’enrichissement mutuel n’est pas vraiment une préoccupation dans le cas de nos attachés de défense. La plupart ont beaucoup d’expérience au sein des Forces armées canadiennes, ayant probablement de 30 à 35 années de service. Par conséquent, bon nombre d’entre eux occupent un ou deux de ces postes très importants à l’extérieur du Canada, ce que nous appelons HORSCAN, et bon nombre d’entre eux prennent leur retraite alors qu’ils occupent un poste d’attaché de défense. Nous voudrions certainement profiter de l’expérience qu’ils acquièrent en les ramenant au Canada ou en les réintégrant dans les Forces armées canadiennes à leur retour. Mais cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas ou qu’il n’y aurait pas des avantages énormes pour les gens qui décident de passer à Affaires mondiales Canada, à ce genre d’emploi. Ce qu’ils « apporteraient au combat » serait très bénéfique.

Le président : Merci beaucoup.

Le sénateur Ravalia : Merci, messieurs. Ma question porte sur la récente Stratégie indo-pacifique. Comment décririez-vous la relation entre le ministère de la Défense nationale et Affaires mondiales en ce qui concerne l’élaboration de cette stratégie, compte tenu des menaces potentielles qui peuvent exister dans cette partie du monde? Avez-vous l’impression d’avoir suffisamment de personnel pour être en mesure d’intervenir en cas de crise dans la région indo-pacifique?

Mgén Smith : Merci, monsieur le président. Je vais essayer d’être bref pour répondre à cette bonne question. La Stratégie indo-pacifique a effectivement été élaborée en étroite collaboration avec Affaires mondiales Canada. De toute évidence, de nombreux ministères sont concernés. Nous avons un rôle à jouer à cet égard, et elle a été élaborée en collaboration avec Affaires mondiales Canada.

Pour ce qui est de votre deuxième question, cela a également été fait de la même façon — vous avez entendu parler de reconstitution, le défi que nous devons relever à la suite de la diminution des effectifs dans les Forces armées canadiennes. À mesure que nous élaborions la Stratégie indo-pacifique et qu’il nous fallait indiquer à Affaires mondiales Canada le rôle que nous voulions jouer, nous l’avons fait expressément avec la Force aérienne, la Marine, l’Armée de terre et d’autres éléments pour nous assurer que nous avions les effectifs nécessaires pour ce que nous étions disposés à faire ou ce que nous étions prêts à faire.

En effet, alors que nous continuons de devoir relever le défi de la reconstitution, de rétablir nos effectifs, je pense qu’il est très important de dire tout d’abord qu’il s’agit d’une mission et d’une stratégie extrêmement importantes à soutenir et que cela amène également de jeunes Canadiens dans le monde entier à faire un travail extraordinaire et à voir ce qu’ils peuvent faire pour appuyer ces objectifs d’Affaires mondiales.

Mgén Frawley : Monsieur le président, en ce qui concerne nos attachés de défense, surtout dans cette région, nous avons entrepris un examen de la diplomatie de défense il y a environ huit mois, donc avant la publication de la stratégie, pour faire exactement ce que le major-général Smith a mentionné, c’est-à-dire examiner notre empreinte à l’échelle mondiale. Avons-nous la bonne taille? Avons-nous les effectifs nécessaires dans la zone de responsabilité de l’OTAN? Avons-nous les effectifs nécessaires au sein du commandement indo-pacifique des États-Unis? Avons-nous les effectifs nécessaires pour ce que nous considérons comme le reste du monde en ce qui concerne la façon dont nous les regroupons?

Nous sommes au beau milieu de cette étude, et il est évident qu’elle sera façonnée par la Stratégie indo-pacifique. Mais ce que je peux vous dire, c’est que notre présence dans cette partie du monde est en fait très saine, si je peux m’exprimer ainsi. Nous sommes présents dans 12 pays, et nous sommes chargés de la représentation canadienne dans 24 pays de l’Indo-Pacifique. Donc, les Forces armées canadiennes et le ministère sont déjà bien représentés dans la région indo-pacifique.

Le président : Je vais poser une question supplémentaire. En ce qui concerne la Stratégie indo-pacifique, étant donné que le gouvernement et plusieurs ministères y participent, y compris le MDN et les Forces canadiennes, étant donné que vous cherchez à augmenter vos effectifs, envisagez-vous d’embaucher plus de gens, de leur offrir une formation en langues étrangères ou d’embaucher plus de gens de la région pour appuyer le volet des langues étrangères, puisque l’attaché n’a peut-être pas assez de temps lorsqu’il quitte un autre poste pour apprendre une langue très difficile?

Mgén Smith : Merci, monsieur le président. Permettez-moi de répondre d’abord parce qu’il y a un élément d’augmentation des effectifs pour le faire, même si je suis certain que mon collègue aura des choses plus sages à dire. Une partie de la Stratégie indo-pacifique nous oblige à affecter des agents de politique à certains endroits stratégiques de la région indo-pacifique. Nous continuons de travailler là-dessus et, évidemment, nous devons discuter avec ces pays pour nous assurer qu’ils sont tout à fait d’accord avec l’idée. Il y a donc une augmentation des effectifs. Faire plus avec les mêmes ressources serait un défi. Je m’attends à ce qu’il y ait un petite augmentation au quartier général, mais surtout sur le terrain, si je peux l’appeler ainsi. C’est un élément important de façon à ce que nous soyons présents et que nous soyons plus disponibles.

Mgén Frawley : Pour ma part, monsieur le président, au moment où nous arrivons à une conclusion relativement à l’examen de la diplomatie de la défense, si nous déterminons qu’en fait nous devons ajouter quelques autres endroits — des attachés de défense canadiens à d’autres endroits —, les efforts de suivi consisteraient à déterminer la formation dont ils ont besoin, la formation linguistique. À l’heure actuelle, nous offrons de la formation linguistique à un certain nombre de nos attachés de défense, et nous examinerions cet aspect pour déterminer quelle est la langue d’affaires prédominante dans ces pays ou ce dont ils ont exactement besoin. Nous formons nos attachés de défense de façon très rigoureuse, si je peux m’exprimer ainsi, avant qu’ils ne partent pour nous assurer qu’ils comprennent toutes les nuances de cette responsabilité.

Le président : Merci beaucoup.

Le sénateur Woo : Messieurs les généraux, bonjour. Permettez-moi une petite note mentale pour que le comité puisse faire le suivi de l’examen de la diplomatie de la défense afin que nous puissions en obtenir une copie au moment de sa publication et l’utiliser dans le cadre de notre étude.

Général Frawley, j’aimerais revenir à la question de l’enrichissement mutuel et demander s’il n’y aurait pas lieu d’en faire plus pour que le personnel en uniforme trouve des places dans d’autres secteurs de la bureaucratie, pas seulement à Affaires mondiales, mais dans l’ensemble de la fonction publique.

Si je soulève ce point, c’est seulement parce que j’ai observé que dans certains pays, en particulier chez nos partenaires du G7, il y a plus d’échanges entre les forces armées et l’administration publique, et ils semblent très bien s’en tirer. Je pense notamment aux Américains et, dans une moindre mesure, aux Britanniques.

Pourriez-vous nous parler des possibilités de ce genre d’enrichissement mutuel plus poussé à l’échelle de la fonction publique et nous dire si vous pensez que cela présente des avantages pour la fonction publique canadienne en général et aussi pour les forces armées?

Mgén Smith : Merci, monsieur le président. Je vais essayer de répondre à cette question et ensuite voir si mon collègue veut ajouter quelque chose.

Oui, l’enrichissement mutuel est extrêmement important. Ici, à Ottawa, je pense que nous nous débrouillons assez bien. Nous avons un certain nombre de personnes au BCP, ce qui nous est très utile pour comprendre, du point de vue militaire, ce qui se passe et qui va au-delà de la transaction, pour établir une relation avec des organismes centraux comme celui-là.

De plus, nous avons un grand nombre de grands centres de coordination importants, que ce soit l’État-major de liaison des Forces canadiennes (Londres), une très grande délégation conjointe; l’État-major de liaison des Forces canadiennes (Washington), un groupe tout aussi important dirigé par un major-général; notre délégation conjointe à l’OTAN — la fonction publique, Affaires mondiales Canada, et les militaires travaillent ensemble, sous la direction d’un lieutenant-général ou d’un vice-amiral, avec l’ambassadeur; et à New York, encore une fois, il y a une délégation conjointe composée de militaires, de fonctionnaires de la Défense et de l’ambassadeur. Je pense donc que nous avons un certain nombre de nœuds très importants dans le monde avec des alliés essentiels où nous avons déjà établi ces sites d’enrichissement mutuel.

Mgén Frawley : Si vous me le permettez, monsieur le président, pour ajouter à ce que le major-général Smith a mentionné, nous avons une empreinte assez solide dans d’autres ministères et dans certains secteurs essentiels. Le défi pour nous en ce moment — et le major-général Smith l’a mentionné —, c’est la reconstitution des Forces armées canadiennes. Il nous manque, je crois, environ 10 000 personnes, mais, bien sûr, ce nombre change probablement chaque jour. Nous devons donc être très prudents. Bien que certains de ces secteurs soient extrêmement importants pour nous, nous ne pouvons pas nous éparpiller à l’excès.

Cela ne veut pas dire que nous ne pouvons pas mieux comprendre la situation et où nous devrions placer ces gens. Mais il serait difficile pour les Forces armées canadiennes, du moins à l’heure actuelle, de créer de nouveaux postes qui deviendraient pour nous un défi à combler. Mais c’est quelque chose que nous continuerons d’évaluer.

[Français]

La sénatrice Gerba : Merci à nos témoins. Nous apprécions beaucoup vos informations et le travail que vous faites sur le terrain. J’ai d’ailleurs rencontré certains de vos agents en Afrique.

Votre ministère a collaboré avec Affaires mondiales Canada sur la politique étrangère féministe du Canada. Les Forces armées canadiennes font notamment partie de l’Initiative Elsie, qui vise à favoriser la participation des femmes aux opérations de paix. Comment s’est faite cette collaboration? Pourrait-elle être améliorée?

Mgén Smith : Le ministre trouve que la politique étrangère féministe est très importante. Comme on l’a déjà mentionné, le Programme sur les femmes, la paix et la sécurité est un volet important de notre travail, tout comme la nouvelle Stratégie du Canada pour l’Indo-Pacifique. Nos initiatives comportent quatre volets pour la Défense nationale. Certains volets sont axés sur l’augmentation de la capacité et une sous-composante concerne le Programme sur les femmes, la paix et la sécurité. C’est une initiative que nous allons mener spécifiquement dans la région indo-pacifique.

Je peux dire également que le Canada joue un rôle de premier plan dans ces initiatives, soit l’Initiative Elsie et le Programme sur les femmes, la paix et la sécurité. Je collabore à l’échelle internationale. Donc, je voyage beaucoup. Le Programme sur les femmes, la paix et la sécurité est l’une des initiatives dans laquelle nous sommes souvent engagés, à la demande de nos collègues à l’international. Je sais que c’est une initiative que nous valorisons beaucoup; c’est une partie importante de nos activités quotidiennes.

La sénatrice Gerba : Y a-t-il une façon d’améliorer votre collaboration dans ce programme, particulièrement avec Affaires mondiales Canada?

Mgén Smith : Nous continuons de travailler. C’est une initiative relativement nouvelle pour moi, mais à mon bureau, nous avons désormais un directeur qui s’occupe seulement du Programme sur les femmes, la paix et la sécurité. Il s’occupe également d’autres activités. Il est également responsable de l’Initiative Elsie. Nous continuons toujours d’améliorer notre travail. Nos alliés et nos partenaires internationaux manifestent beaucoup d’intérêt afin que nous collaborions davantage avec eux à ce chapitre.

La sénatrice Gerba : Ai-je encore une minute de temps de parole?

Le président : Oui.

La sénatrice Gerba : Comme je l’ai mentionné dans mon introduction, je reviens d’un pays africain où j’ai rencontré l’un de vos agents. Il nous a dit qu’il couvrait 13 pays. Croyez-vous qu’il est raisonnable pour un seul agent de couvrir 13 pays de l’Afrique francophone?

Mgén Frawley : C’est une très bonne question. En Afrique, nous avons un peu moins d’attachés de défense, comparativement à d’autres pays dans le monde. C’est un cas spécifique. Je pense qu’il est le seul agent à couvrir autant de pays. C’est beaucoup de travail pour une seule personne. Malheureusement, la situation devra rester telle qu’elle est jusqu’à ce que notre étude soit terminée, afin de déterminer le nombre d’attachés de défense dont nous aurons besoin en Afrique.

Par contre, comme je l’ai dit, en février ou en mars, nous aurons une meilleure idée du nombre d’attachés dont nous aurons besoin en Afrique.

Le président : Merci.

[Traduction]

Le sénateur Richards : Merci à nos invités. La sénatrice Gerba vient de dire quelques mots sur le sujet, et je parle de l’enrichissement mutuel. Dans tous les secteurs de la sécurité au Canada, il semble y avoir actuellement un manque de moral et de recrutement. Est-ce que cela se répercute sur la fonction publique au ministère des Affaires mondiales, et comment pouvons-nous corriger la situation? Pouvons-nous remplir nos obligations militaires globales?

Mgén Smith : Merci. J’ai un grand nombre de fonctionnaires qui travaillent pour moi, et je ne dirais pas qu’ils ont des problèmes de moral. Ils forment un groupe extrêmement motivé. En réalité, j’essaie en fin de compte de les affecter un peu partout plutôt que de leur dire qu’ils sont censés continuer à travailler ici. Ils fonctionnent à l’adrénaline. Je m’occupe de ce que j’appelle les « opérations de politiques courantes », alors si nous devons présenter des points de discussion à la ministre ou quelque chose du genre — c’est un groupe très motivé. Je suis impressionné par leurs compétences, leur niveau de scolarité et leur maîtrise de l’anglais et du français. Je ne peux parler que de ma petite partie du monde, mais ils m’impressionnent énormément. Je n’ai pas vu de problèmes de moral.

C’est la même chose pour mon groupe militaire. Ils ont tendance à être plus âgés, mais ils forment un groupe extraordinaire de personnes très motivées, instruites et expérimentées qui essaient simplement de travailler pour le Canada.

Le sénateur Richards : Je ne remets pas du tout en question nos militaires. Je dis que nous semblons avoir de la difficulté à attirer des jeunes femmes et des jeunes hommes compétents dans l’armée. Je ne pense pas que nous soyons une division complète dans nos forces armées, et je me demande simplement comment nous pouvons compenser cela et intéresser plus de jeunes à une carrière militaire ou à une carrière à Affaires mondiales.

Mgén Frawley : Tout à fait, c’est une préoccupation. Ce n’est pas seulement une préoccupation du ministère ou des Forces armées canadiennes. Il est très difficile de se battre pour les talents de nos jeunes.

Dans le cadre de la reconstitution des FAC — le programme ou le plan de reconstitution des Forces armées canadiennes —, nous cherchons à revigorer notre recrutement et les processus que nous utilisons. Nous cherchons à moderniser les processus et à réintroduire davantage le facteur humain dans notre recrutement. Nous sommes allés un peu plus en ligne, et maintenant nous recommençons à faire participer plus de gens à ce processus, de sorte que lorsque quelqu’un se présente, il voit un autre être humain. Ce n’est pas seulement virtuel; il s’agit de parler à quelqu’un en personne.

De plus, nous élargissons nos démarches afin de trouver des jeunes pour les intégrer aux Forces armées canadiennes, et nous le faisons de telle sorte que, en fin de compte, nous voulons que les Forces armées canadiennes et le ministère ressemblent davantage au Canada. Ce que nous faisons pour attirer des jeunes évolue et change. Nous voulons nous assurer que nous nous tournons vers les données démographiques afin de faire en sorte de ressembler davantage au portrait démographique du Canada.

Le sénateur Richards : Major-général, je pense qu’il s’agit d’une carrière extraordinaire, c’est pour cette raison que j’ai posé la question.

Le président : Merci beaucoup.

La sénatrice Coyle : Encore une fois, merci à nos deux invités d’être ici pour nous partager ces informations. Nous attendons avec impatience les résultats de votre étude interne. Cela nous sera très utile.

Vous avez déjà décrit quelques-unes des configurations du CDA — je me trompe peut-être de terme — dont l’une est celle des grands pôles comme l’OTAN, le pôle de Washington, le pôle du Royaume-Uni et le pôle de l’ONU à New York. Ce sont des organisations dotées de ressources considérables. On nous a dit, à l’autre bout du spectre, qu’une seule personne s’occupe de trois pays.

Pourriez-vous nous décrire ce qui se passe entre ces deux extrêmes pour ce qui est de la participation des militaires canadiens aux missions du Canada à l’étranger?

Mgén Frawley : Certainement. Je vous remercie de cette question. Pour vous donner une idée de l’ampleur de la présence de nos attachés de défense dans le monde, sachez que l’on compte environ 110 employés, ce qui s’entend des attachés de défense à proprement parler, des attachés adjoints — mais tous les pôles n’en ont pas un — et des assistants administratifs de la défense canadienne qui sont des sous-officiers supérieurs assurant le fonctionnement sur place. La taille et la portée exactes de ces postes varient en fonction de l’emplacement et du volume de travail. Bien sûr, les plus grands pôles couvrent plus de pays. Nous avons donc 110 employés dans 45 pays, mais qui couvrent quelque 145 pays.

Cela nous ramène à une question posée tout à l’heure. Nous avons un attaché dans un pays donné — je crois que vous parliez de l’Afrique du Sud, mais corrigez-moi si je me trompe. L’Afrique de l’Ouest. La même chose vaut pour l’Afrique du Sud. Les attachés sont nombreux et accrédités dans plus d’un pays. En fait, nous assurons la couverture d’autres pays où ils se rendent occasionnellement.

Cela vous donne une idée de la façon dont les choses fonctionnent. Dans la plupart des cas, deux à quatre personnes couvrent à la fois le pays où elles se trouvent et deux ou trois autres pays, et il arrive qu’elles en couvrent plus encore.

Au Royaume-Uni et aux États-Unis, nous avons des services de plus grande envergure, mais on ne parle plus d’attachés de défense, car il s’agit d’ELFC, des employés de liaison des Forces canadiennes, stationnés à Washington et à Londres. En raison de notre présence dans ces pays et des relations que nous entretenons avec eux, en dehors du programme des attachés de défense, ces services sont beaucoup plus importants et nous avons plus de personnel dans ces bureaux apparentés à ceux de nos attachés de défense. Cela vous donne une idée générale de la situation à l’échelle mondiale.

La sénatrice Coyle : Vous avez mentionné que la plupart de vos attachés de défense sont des militaires en fin de carrière ayant gravi les échelons et qui ont une grande expérience. En fait, ils approchent sans doute de leur retraite, même si vous aimeriez retenir leurs services.

Évidemment, ce n’est pas tout le monde qui peut faire partie de ce groupe. Quel est le degré d’intérêt de votre personnel pour ces postes? Qui aspire à occuper ces postes, pourquoi aspire-t-on à atteindre ces postes très importants et quelles sont les qualités que vous recherchez chez ceux que vous sélectionnez?

Mgén Frawley : Je vous remercie de cette question. C’est une excellente question. Je pense que je vais répondre très brièvement à la deuxième question.

Quels sont les critères de sélection des candidats? Tout d’abord, nos divers éléments, soit l’armée de terre, la marine, l’aviation ou les opérations spéciales, assument la responsabilité de sélectionner les gens pour les postes clés au sein des Forces armées canadiennes. Ces éléments nous donnent le nom des personnes qui ont manifesté un intérêt pour ces postes. Nous examinons leur parcours militaire, leur expérience en matière de déploiement, leur expérience éventuelle du commandement, et nous tenons compte d’autres aspects de nature plus personnelle — mais pas trop tout de même — comme la santé et les relations familiales. En effet, une fois à l’étranger, ces personnes ne sont pas les seuls à représenter le Canada. Le plus souvent, le membre des forces armées et son épouse représentent le Canada, et la formation s’adresse certes au militaire, mais très souvent aussi à son épouse.

Le processus de sélection est très rigoureux, car nous voulons être sûrs d’envoyer les bonnes personnes. Généralement, pour les raisons que je viens de donner, ce sont des gens de grande expérience qui possèdent certaines qualités... tout le monde n’est pas forcément doué pour établir des relations ou pour communiquer avec des homologues de la défense très haut gradés. Il faut des personnes possédant certaines aptitudes pour établir des relations, des gens ayant la personnalité voulue pour ce faire.

Le président : Merci beaucoup.

La sénatrice Boniface : Je tiens à remercier nos invités de leur présence ici et de leur service pour notre pays.

Revenons aux problèmes de recrutement et de maintien du personnel en poste. Pour ce qui est des répercussions sur les services dont nous avons parlé, existe-t-il une stratégie spécifique à ce sujet? Supposons, par exemple, que vous ne parveniez pas à combler un poste vacant. Disposez-vous d’un plan B pour pourvoir ces postes névralgiques?

Mgén Frawley : Merci de cette question, sénatrice. J’apprécie que vous l’ayez formulée de façon que je puisse me concentrer sur le programme des attachés de défense. Le maintien en poste et le recrutement ne relèvent pas de moi, en ma qualité de vice-chef d’état-major de la Défense, mais c’est un sujet que je connais bien. L’impact sur le programme des attachés de défense est très important, et je vous remercie d’avoir posé la question.

Dans les Forces armées canadiennes, nous désignons les postes en termes de catégories, soit A, B et C. Les postes de catégorie A désignent des opérations à l’extérieur du Canada et des opérations de la plus haute importance pour le Canada, et ils sont normalement pourvus à 95 %, voire plus. On retrouve ensuite les deux autres catégories. Le programme des attachés de défense fait partie de la catégorie A. Quant à la façon dont nous comblons ces postes, nous le faisons en appliquant notre système de catégories. Dans ce cas-ci, il s’agit de la catégorie la plus élevée.

On parle d’un nombre relativement faible en regard de la taille des Forces armées canadiennes, qui comptent au-delà de 60 000 militaires. Ces services comptent une centaine de personnes, ce qui est peu. En outre ils ont des grades qui ne posent pas problème sur le plan de la reconstitution des effectifs, en ce sens que ce sont surtout les grades intermédiaires qu’il est difficile de renouveler, comme les capitaines, les majors, les sergents et les adjudants, qui réalisent l’essentiel du travail pour les Forces armées canadiennes. Nous comblons les postes en établissant des priorités, parce que nous sommes conscients de l’importance des missions à l’extérieur du Canada.

La sénatrice Boniface : Permettez-moi de changer de sujet. Si l’on considère les défis qui se posent dans l’Arctique, en particulier face à la Russie et à la Chine qui, pour ainsi dire, revendiquent un espace, pouvez-vous décrire comment le MDN travaille avec Affaires mondiales Canada afin d’asseoir notre présence et d’assurer notre défense dans le Nord?

Mgén Smith : Merci. C’est une question pertinente. Nous travaillons bien sûr avec Affaires mondiales Canada depuis un certain temps. La modernisation du NORAD a été annoncée récemment. Elle implique une collaboration étroite avec Affaires mondiales Canada. Nous nous entretenons fréquemment avec nos homologues de ce ministère à ce sujet, et nous allons continuer à le faire. Des investissements de 38,6 milliards de dollars sont prévus pour les 20 prochaines années. Il faut continuer à travailler avec nos partenaires d’Affaires mondiales Canada et, bien sûr, avec de nombreux autres services gouvernementaux pour que tout soit fait correctement et que tout soit bien coordonné. Je dirais que c’est un succès. Cela prendra un certain temps, mais nous travaillons ensemble.

La sénatrice Boniface : Je vous remercie de vos réponses.

Le sénateur MacDonald : Nous avons beaucoup parlé du recrutement aujourd’hui, mais nous ne savons toujours pas comment s’expliquent ces problèmes de recrutement. Si l’on compare à ce qui se passait il y a 20 ou 30 ans, la situation est-elle pire aujourd’hui qu’il y a 20 ans et si oui, pourquoi? Il doit y avoir des raisons évidentes pour lesquelles le recrutement est si difficile. Pourriez-vous nous en dire plus?

Mgén Frawley : Merci de la question, monsieur le président. Comme je l’ai mentionné, dans le cadre de mes fonctions de vice-chef d’état-major de la Défense, je ne m’occupe pas spécifiquement du recrutement et du maintien en poste. C’est le commandement du chef du personnel militaire qui en est responsable. Bien sûr, si je ne vous fournis pas suffisamment de détails ou si vous souhaitez obtenir plus de précisions, je peux toujours m’en enquérir et vous revenir avec les informations.

Cependant, si je peux me permettre un commentaire. La situation des dernières années à cause de la COVID-19 n’a pas aidé les Forces armées canadiennes. La COVID-19 a fait du tort à un certain nombre d’organisations et elle a bien sûr eu une incidence sur nos effectifs, ce qui semble avoir entravé notre capacité à attirer des gens dans nos rangs. C’est là sans compter que les nombreux problèmes associés au haut commandement et au changement de culture de l’organisation ont peut-être amené les jeunes Canadiens à se questionner sur l’opportunité de faire partie de notre organisation. Et puis, bien sûr, nous sommes en concurrence avec d’autres organisations qui recherchent les mêmes profils que nous, qui souhaitent recruter des jeunes très compétents.

Pour ce qui est de la question du changement de culture. Comme vous le savez sans doute, le poste de chef — Conduite professionnelle et culture a été créé il y a plus d’un an, et nous sommes en passe de devenir une organisation beaucoup plus diversifiée, inclusive et respectueuse. C’est un processus itératif qui prend de l’ampleur.

Plus nous progressons, plus nous nous améliorons dans ces domaines, plus je pense que les Forces armées canadiennes deviendront une option attrayante, une bonne option pour nos jeunes Canadiens.

Mgén Smith : Vous aurez sans doute remarqué la passion qui nous anime. Nous tenons à recruter, et nous avons un énorme parti pris. Nous pensons que notre organisation est merveilleuse, et nous aimerions que de jeunes Canadiens joignent nos rangs. J’ai eu plusieurs occasions de côtoyer d’autres services gouvernementaux à l’échelle internationale, et je dirais que tous les services gouvernementaux sont confrontés aux mêmes défis que nous. D’autres ministères ont leurs propres défis à relever pour attirer des gens. De plus, au cours de mes voyages à l’étranger, j’ai constaté que la « Grande Démission » est un phénomène qui se produit partout dans le monde, à différents degrés, et qu’un certain nombre d’organisations militaires dans le monde s’efforcent de regarnir leurs rangs et d’attirer des jeunes. C’est un problème que nous essayons de résoudre, mais il ne s’agit pas d’un phénomène qui concerne uniquement les Forces armées canadiennes.

Le sénateur MacDonald : Le recrutement est un problème, mais pour ce qui est des personnes déjà recrutées, qui sont déjà dans l’armée, les départs semblent également constituer un problème. Je pense qu’une carrière militaire, si je me fie à ce que me disent les gens que je connais, une carrière militaire peut être une très bonne carrière, une carrière très enrichissante, une carrière à part entière. Alors pourquoi y a-t-il tant de départs? Pourquoi tant de gens quittent-ils l’armée?

Mgén Frawley : Je vous remercie encore une fois pour cette question, monsieur le président. Au début de la pandémie de COVID-19, nous avons constaté une augmentation du nombre de départs, mais nous travaillons sur un certain nombre de programmes. Encore une fois, la liste est longue, et j’aimerais pouvoir vous fournir cette information par écrit à une date ultérieure. Il y a une longue liste de choses que nous faisons pour nous assurer que les Forces armées canadiennes demeurent une option de carrière intéressante, pour réduire le nombre de libérations et de départs.

Encore une fois, j’aimerais fournir cette information par écrit.

Le président : Merci. Nous en sommes à la fin du premier tour, mais j’aimerais poser une autre question.

Lorsque vous interagissez avec Affaires mondiales Canada, le faites-vous sur le plan de la préparation et de la formation? Par exemple, il y a l’Institut canadien du service extérieur qui offre des cours, qui vont de la formation en langues étrangères à la formation interculturelle, en passant par la façon de traiter avec les chefs de mission et la façon de négocier. Dans une perspective plus large, pour ce qui est du réseau des attachés des Forces canadiennes dans le monde, est-ce que vous vous prévalez de ces cours ou est-ce que vous donnez votre propre formation à l’interne?

J’ajouterais, bien sûr, une formation sur la façon d’interpréter les directives du service extérieur.

Mgén Frawley : Merci de la question, monsieur le président. Il ne fait aucun doute que nous assurons la liaison avec Affaires mondiales Canada, pas tant pour fournir la même formation, mais plutôt pour offrir une formation inspirée en grande partie de celle donnée par Affaires mondiales Canada.

Il s’agit d’un cours de trois mois, au début duquel se situe la formation linguistique.

Nous formons environ 30 nouvelles personnes par année. Ce n’est pas énorme, mais c’est un volume assez important. Il est certain que nous travaillons avec Affaires mondiales Canada, ou AMC, pour nous assurer que ce que nous offrons prépare ces personnes à occuper des postes dans l’une de nos ambassades canadiennes.

Mgén Smith : La seule chose que j’ajouterais, c’est que je suis responsable du programme de formation et de coopération militaires, ce qui signifie que je connais un peu mieux l’aspect militaire de la formation. Bien sûr, nous avons un excellent institut à Toronto, le Collège des Forces canadiennes. Deux des cours les plus connus qui y sont offerts sont les plus longs, soit le Programme de commandement et d’état-major interarmées — qui permet d’amener un major au niveau de lieutenant-colonel et un capitaine de corvette au niveau de capitaine de frégate — et le Programme de sécurité nationale, qui amène les colonels au niveau d’officiers généraux. Nous avons aussi des interactions avec la fonction publique.

En fait, lorsque j’ai participé au Programme de sécurité nationale, il y a quelques années, il y avait aussi trois membres de la fonction publique, et je crois que nous avons tous beaucoup appris les uns des autres. Cela n’est pas très fréquent, mais nous avons des interactions de ce genre, et il est tout aussi difficile du côté militaire d’apprendre comment interagir avec des collègues d’Affaires mondiales Canada et d’autres collègues du gouvernement.

Le président : Merci beaucoup. Nous allons passer au deuxième tour.

La sénatrice Coyle : Il a été mentionné, mais je ne me souviens plus par qui, je crois que c’était peut-être vous, major-général Frawley, que l’on souhaite que les recrues ressemblent davantage à la population canadienne, soient plus représentatives de la population canadienne. Je suis curieuse de savoir combien de vos attachés de défense sont des femmes. Je serais curieuse de savoir cela et aussi si vous voyez des obstacles ou des incitatifs pour que les femmes se retrouvent dans ces postes. Par ailleurs, cherchez-vous à faire monter dans les rangs — comme vous le faites, de toute évidence — des gens qui sont des Canadiens, mais qui représentent aussi les populations auprès desquelles ils sont appelés à travailler? Ils ne doivent donc pas seulement avoir l’air de Canadiens, mais avoir l’air qu’ont les Canadiens dans les pays où ils seront affectés.

Mgén Frawley : Merci de la question, monsieur le président.

Je peux donc vous dire que sur la centaine de nos attachés de défense actuellement à l’étranger, 21 sont des femmes. Le défi, comme vous l’avez souligné à juste titre, c’est que nous recrutons ces personnes dans un groupe qui existe déjà au sein des Forces armées canadiennes et qui est composé à environ 20 % de femmes, je crois. Les autres sont des hommes.

Bien sûr, étant donné que ce groupe est déjà là, les gens que nous recrutons ressemblent beaucoup à ceux qui le composent.

Idéalement, pour l’avenir, le profil démographique de l’ensemble des membres des Forces armées canadiennes devrait s’améliorer, tout comme le profil démographique des gens qui sont à l’étranger.

Pour ce qui est de ressembler aux habitants des endroits où nous les envoyons, c’est plus difficile dans les faits, et je dirais que ce n’est pas le cas à l’heure actuelle, mais que c’est quelque chose que nous pourrions certainement envisager.

Il y a quelques exemples. À Paris par exemple, l’attaché est presque toujours canadien-français. C’est beaucoup plus facile pour cette personne de travailler dans cet environnement. Mais c’est certainement quelque chose que nous pouvons examiner.

La sénatrice Coyle : Merci.

Le président : Je pense que nous sommes arrivés à la fin du premier groupe de témoins. Au nom du comité, j’aimerais remercier le major-général Frawley et le major-général Smith de leurs exposés et de leurs réponses à nos questions. Je pense que vous avez enrichi nos délibérations. Merci de vous être joints à nous.

[Français]

Chers collègues, nous reprenons nos travaux. Nous passons maintenant à la deuxième partie de notre réunion.

[Traduction]

Pour poursuivre sur le thème du service extérieur, nous allons maintenant examiner de plus près le concept des « organismes distincts », auquel certains de nos témoins précédents ont fait allusion dans leurs témoignages.

Pour nous aider à cet égard, nous accueillons d’abord Doreen Steidle, une ancienne agente du service extérieur qui, entre autres affectations, a été haute-commissaire du Canada à Singapour, de 2000 à 2003, et présidente-directrice générale — la première je crois — de Passeport Canada. Soyez la bienvenue.

Nous accueillons ensuite, du Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada, Marie-Chantal Girard, sous-ministre adjointe principale, Relations avec les employés et rémunération globale; Aline Taillefer-McLaren, directrice principale de la participation des syndicats et du soutien au Conseil national mixte, Secteur des relations avec les employés et de la rémunération globale; et par vidéoconférence, Simon Crabtree, directeur exécutif des politiques et programmes en matière de pension et rémunération globale, Secteur des relations avec les employés et de la rémunération globale. Je pense que ces titres sont exacts. Je vous remercie de votre patience.

Enfin, nous accueillons Allen Sutherland, secrétaire adjoint du Cabinet, Appareil gouvernemental et Institutions démocratiques, au Bureau du Conseil privé.

Bienvenue et merci à tous d’être parmi nous. Nous sommes prêts à entendre votre déclaration préliminaire, qui sera suivie, comme d’habitude, des questions des sénateurs et de vos réponses. Madame Steidle, vous avez la parole.

Doreen Steidle, ambassadrice (à la retraite), à titre personnel : Merci beaucoup de m’avoir invitée à comparaître aujourd’hui. Comme vous le savez, mon mémoire porte sur la possibilité qui pourrait être offerte à Affaires mondiales d’obtenir le statut d’organisme distinct et sur l’impact positif que cela pourrait avoir sur la gestion du service extérieur.

D’entrée de jeu, je tiens à souligner que je ne suis pas une experte des ressources humaines et que j’ai consulté des sources d’information en ligne sur ce sujet. Par conséquent, j’ai peut-être fait des erreurs de fait ou d’interprétation et, le cas échéant, je m’en excuse à l’avance.

J’aborde ce sujet en tant qu’agente du service extérieur ayant fait carrière pendant 34 ans et maintenant à la retraite, que cheffe de mission pendant deux ans, qu’ancienne PDG de Passeport Canada, que sous-ministre adjointe des Services ministériels et que dirigeante principale des finances de l’ancien ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Je me suis spécialisée en finances et en gestion des ressources pendant la majeure partie de ma carrière au Canada.

J’ai écouté les témoignages des experts qui ont comparu devant le comité et j’en suis venue à la conclusion que notre ministère des Affaires étrangères doit tirer parti de toute l’autorité créatrice dont il dispose pour remanier sa structure organisationnelle, avec un régime de gestion des ressources humaines correspondant. Ce serait beaucoup mieux que de continuer à mettre en œuvre des changements à la marge ou de faire des promesses de changement qui pourraient ne pas être tenues.

Si le Conseil du Trésor est toujours ouvert à la création de nouveaux organismes distincts — et je ne connais pas la réponse à cette question —, alors je me demande si ce ne serait pas une occasion en or de repenser le service extérieur et la représentation du Canada de façon plus générale et fondamentale qu’au cours des exercices passés et actuels.

Tout d’abord, permettez-moi de dire que j’appuie le projet concernant l’avenir de la diplomatie lancé par la ministre Joly plus tôt cette année. Il est bon de sonder le personnel et de mettre sur pied des groupes de travail pour faire des recommandations sur les changements à court et à moyen terme. Mais est-ce que cela transformera les choses?

J’ai été frappée par le témoignage de Marissa Fortune, analyste du projet, qui a comparu devant le comité le 28 septembre. Lorsqu’elle a mené des sondages auprès des employés, elle a constaté qu’ils ont :

[...] réitéré les mêmes problèmes et préoccupations que l’on tentait de régler il y a 15 ans.

J’ai été vraiment découragée d’entendre cela. En cette période de défis et de pressions sans précédent à l’échelle mondiale, cette jeune diplomate et ses collègues semblent faire face aux mêmes problèmes que ceux qui ne semblent pas avoir été réglés par le régime de gestion des ressources humaines en place de 2007 à 2022.

Le comité a entendu d’autres employés à la retraite et en poste qui abondent dans le même sens, alors je ne répéterai pas leur témoignage.

Mais je reviens à ma question : doit-il en être ainsi? Si nous pouvons et pouvions avoir le pouvoir de le faire, pourquoi ne pas saisir l’occasion et recommencer, en ayant l’avenir en tête et en s’inspirant d’un canevas vierge? Nous avons parcouru le quart du XXIe siècle et, pourtant, nous continuons de greffer, d’ajouter, de soustraire et de reclassifier des groupes d’employés sur ce qui est essentiellement la base de l’ancien ministère des Affaires extérieures qui remonte à l’après-guerre.

Je remarque que 27 ministères, organismes et secrétariats sont maintenant des organismes distincts. Ils doivent donc avoir profité de pouvoirs élargis et, à tout le moins, remanié leur régime de ressources humaines. Si leur direction et leurs employés ont pu consacrer du temps, du capital intellectuel et des ressources humaines à cette entreprise très fondamentale, ne serait-il pas approprié qu’Affaires mondiales et les organismes centraux songent à faire de même?

Ne pourrions-nous pas examiner les pratiques exemplaires et les leçons tirées de ces organismes distincts, dont plusieurs comptent beaucoup plus d’employés qu’Affaires mondiales? Est-ce le moment d’examiner globalement d’autres modèles de prestation des services, les classifications, les niveaux, la rémunération, les personnes recrutées et la façon dont elles le sont? Dans l’affirmative, quel serait l’échéancier pour la mise en œuvre du statut d’organisme distinct à Affaires mondiales? Autrement, pourquoi cela ne serait-il pas possible?

Je crois que nous pouvons réformer et revitaliser le service extérieur canadien et repenser les fondements de la représentation du Canada à l’étranger. Nous pouvons le faire en parallèle avec les travaux relatifs au projet sur l’avenir de la diplomatie et nous poser des questions très difficiles sur l’avenir et la nature de l’engagement du Canada dans le monde, ainsi que sur la meilleure façon de nous en acquitter. Nous avons entendu les problèmes; il est peut-être temps maintenant de penser à des solutions créatives.

Je crois que nous pouvons en arriver à une nouvelle structure, à un ministère des Affaires étrangères conçu au Canada, moderne et agile, qui peut inspirer ses employés et nous positionner, nous et notre pays, pour le reste du siècle.

Cela pourrait en outre donner aux jeunes employés l’espoir qu’il existe une nouvelle façon d’envisager la représentation à l’étranger, de sorte que dans 15 ans, un jeune agent ne regarde pas la situation qui prévalait en 2022 en disant que rien n’a changé.

Je vous remercie de votre temps aujourd’hui. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.

Le président : Merci. Nous allons maintenant entendre Marie-Chantal Girard, suivie d’Allen Sutherland.

[Français]

Marie-Chantal Girard, sous-ministre adjointe principale, Relations avec les employés et rémunération globale, Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada : Merci, monsieur le président. Avant de commencer, je tiens à souligner que je m’adresse à vous à partir du territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinabe. Vous avez mentionné mon titre plus tôt; j’ajouterais que le secteur se trouve au sein du Bureau de la dirigeante principale des ressources humaines.

Le Bureau de la dirigeante principale des ressources humaines (BDPRH) est le centre d’expertise pour la gestion des ressources humaines dans la fonction publique fédérale. Nous élaborons les stratégies et les orientations générales, ainsi que les normes qui permettent aux administrateurs généraux de s’acquitter de leurs responsabilités en matière de gestion efficace des personnes au sein de leur organisation.

[Traduction]

Le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada, en tant qu’organisme administratif du Conseil du Trésor, fournit des orientations afin que les ressources soient sainement gérées dans l’ensemble du gouvernement.

Il est important de noter que dans le contexte des organismes distincts, le Conseil du Trésor est l’employeur. Actuellement, nous fonctionnons selon une approche coordonnée avec des organismes distincts en ce qui concerne la négociation collective et l’établissement des conditions d’emploi pour la fonction publique fédérale. Dans cette approche, tous les organismes distincts doivent obtenir leur mandat de négociation collective de la présidente du Conseil du Trésor, y compris les objectifs à poursuivre et les limites à respecter, avant de s’engager dans une négociation collective.

Les mandats de négociation collective sont fournis dans le contexte de la stratégie de négociation globale du gouvernement du Canada et pour éviter les risques de pressions horizontales lors de l’établissement des conditions d’emploi et des salaires. Les organismes distincts doivent également consulter le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada au sujet de toute condition d’emploi nouvelle ou modifiée qui n’est pas couverte par le processus de négociation collective.

Le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada offre un soutien continu aux organismes distincts tout au long du processus de négociation, mais sans lien de dépendance afin de préserver l’indépendance de l’organisme distinct.

Je m’efforcerai de répondre aux questions que vous pourriez avoir dans ce domaine d’activité, mais je tiens à vous expliquer qu’il y a certaines limites. En particulier, je ne suis pas en mesure de commenter les questions relatives à l’appareil gouvernemental, ou d’autres décisions qui relèveraient en fin de compte des prérogatives du premier ministre. Toutefois, ce que je peux faire, c’est de fournir des informations sur les politiques des ressources humaines relevant de la compétence du Bureau du dirigeant principal des ressources humaines et, dans une certaine mesure, expliquer les différentes implications pour la gestion des ressources humaines.

J’espère que cela sera utile aux travaux du comité. Merci.

Le président : Merci.

Avant de donner la parole à M. Sutherland, je rappelle à mes collègues qui souhaitent poser des questions de le signaler à notre greffière, Mme Lemay, ou à moi-même. J’ai seulement un nom sur la liste, alors je m’inquiète un peu.

Nous passons maintenant à M. Sutherland.

Allen Sutherland, secrétaire adjoint du Cabinet, Appareil gouvernemental et Institutions démocratiques, Bureau du Conseil privé : Merci. Je suis heureux de témoigner devant le comité à l’appui de votre étude du service extérieur canadien et des éléments de l’appareil de la politique étrangère au sein d’Affaires mondiales Canada.

Afin de maximiser mon utilité pour vous et pour encadrer la discussion d’aujourd’hui, je vais donner un bref aperçu de l’appareil gouvernemental, de la prise de décisions et de quelques considérations clés qui s’y rattachent, notamment en ce qui concerne les organismes distincts. Je pense que nous pourrons ensuite entamer la discussion.

Le premier ministre est chargé de déterminer comment l’appareil gouvernemental fédéral est structuré pour faire avancer les priorités stratégiques, servir les ministres dans le cadre de leurs attributions au sein de notre système de gouvernement responsable, fournir des services à la population canadienne et, plus généralement, mettre en œuvre le programme du gouvernement. Cela inclut de déterminer quelles organisations peuvent être nécessaires, ainsi que leurs rôles, responsabilités et relations entre elles.

Comme les distingués sénateurs du comité l’auront observé, un changement à l’appareil gouvernemental peut prendre de nombreuses formes. En fait, le terme « appareil » est souvent mal utilisé, comme le terme « mondialisation ». Parfois, les gens l’attribuent — en fait, je ne suis pas certain que votre titre l’utilise de la bonne façon non plus, mais laissons cela de côté. Cela peut donc prendre différentes formes. Il peut s’agir de la création, de l’élimination ou de la restructuration d’organisations ou d’entités gouvernementales, mais cela peut aussi avoir une incidence sur les pouvoirs, les tâches et les fonctions de ceux qui occupent des postes de direction.

La Loi sur la gestion des finances publiques, la LGFP, établit les cadres institutionnels du gouvernement du Canada. Cela comprend les ministères, les sociétés d’État et tout ce qui se trouve entre les deux, à savoir beaucoup d’entités. J’aimerais rappeler que chaque forme organisationnelle est unique. Si vous consultez attentivement les dispositions législatives, vous verrez qu’elles sont légèrement différentes les unes des autres, et c’est dans ces différences que se situent certains des aspects vraiment intéressants de l’appareil gouvernemental.

Chaque forme organisationnelle possède des caractéristiques particulières conçues pour atteindre des buts précis et réaliser des objectifs stratégiques. Les formes organisationnelles de base se situent sur un spectre qui détermine dans quelle mesure les entités concernées sont directement sous l’autorité de leur ministre responsable. Souvent, c’est la relation avec le ministre qui détermine la forme organisationnelle.

En plus de déterminer la forme organisationnelle de chaque institution, les annexes de la LGFP indiquent également si l’institution est assujettie au régime administratif dirigé par le Conseil du Trésor. Je crois que Doreen Steidle et Marie-Chantal Girard l’ont mentionné.

Parlons des organismes distincts. Alors que la plupart des institutions fédérales, y compris les ministères, sont assujetties aux règles du Conseil du Trésor — aux cadres du Conseil du Trésor —, les organismes distincts ont la souplesse et les obligations connexes d’élaborer leur propre régime de gestion des personnes, représentant la Couronne à titre d’employeur aux fins des ressources humaines et des relations de travail. En général, le statut d’organisme distinct est conféré lorsqu’un régime distinct de gestion des ressources humaines est jugé nécessaire pour répondre à des besoins opérationnels particuliers. Cela pourrait inclure, par exemple, la sécurité nationale, et vous verrez cela dans la liste des 26 organismes que Doreen Steidle a mentionnés, je crois. Il pourrait s’agir d’exigences opérationnelles ou de la capacité de fixer des conditions d’emploi pour attirer une main-d’œuvre hautement technique ou spécialisée. On voit aussi cela dans la liste.

Le principe directeur des conseils concernant l’appareil gouvernemental est que la forme doit suivre la fonction, avec une vision claire du problème à traiter et des objectifs de politiques à rencontrer. Autrement dit, ce qu’une organisation est appelée à faire aide à déterminer le type d’organisation requis et ses caractéristiques clés.

Et bien que l’on s’appuie sur des précédents — ce qui s’est produit par le passé — et sur certains des principes qui sous-tendent l’appareil, une évaluation au cas par cas est toujours cruciale, tout comme de déterminer comment les différents éléments relatifs à l’appareil pourraient avoir une incidence sur la capacité d’une organisation à remplir son mandat, ainsi que les implications possibles sur le reste de l’écosystème fédéral.

Les conseils relatifs à la forme d’une organisation, y compris l’applicabilité du régime de gestion des ressources humaines du Conseil du Trésor, sont guidés par une série de questions et de considérations, dont la question de savoir si, ou dans quelle mesure, le résultat souhaité pourrait être atteint sans changement à l’appareil gouvernemental. Je ferais valoir qu’il s’agit d’une question cruciale.

Si les changements à l’appareil gouvernemental ont le potentiel d’être transformateurs, ils sont aussi invariablement perturbateurs, impliquent des compromis et peuvent s’accompagner de coûts de transaction importants. Par exemple, il faut généralement beaucoup de temps et de ressources pour mettre pleinement en œuvre un changement à l’appareil gouvernemental, pour que ce changement porte ses fruits et pour que l’organisation atteigne le but qu’elle s’est fixé.

Affaires mondiales Canada a évolué au fil du temps, tout comme la représentation du Canada à l’étranger. Par exemple, l’évolution récente du MAECI, le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, en 1995, au MAECD, le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement, en 2013, puis à Affaires mondiales Canada, en 2015, témoigne du désir d’avoir une plus grande intégration horizontale dans le portefeuille international.

L’évolution de la forme institutionnelle est tout à fait naturelle et cohérente avec les changements que nous voyons plus généralement dans l’ensemble de l’appareil gouvernemental fédéral à mesure que les institutions s’adaptent, par exemple, aux changements au niveau du contexte sociétal, des objectifs stratégiques ou des exigences opérationnelles. À cet égard, un coup d’œil rapide au service diplomatique du Canada montre que l’évolution des affaires étrangères reflète l’évolution parallèle du pays en entier. Le passage de colonie à nation représente une piste historique assez intéressante.

Comme pour toutes les questions relatives à l’appareil gouvernemental, il y a beaucoup à considérer, tant au sein d’Affaires mondiales Canada qu’en ce qui concerne l’ensemble de l’appareil gouvernemental fédéral. Je vous remercie encore une fois de m’avoir invité à prendre la parole aujourd’hui. J’attends avec impatience la discussion.

Le président : Merci beaucoup. Chers collègues, il y a beaucoup de matière à réflexion dans ces exposés, alors je vais lancer la série de questions. Je vous rappelle que nous accordons quatre minutes à chacun pour la question et la réponse.

Le sénateur MacDonald : Ma première question s’adresse à Mme Steidle. Vous avez eu la gentillesse de soumettre une étude à notre comité, et je vous en remercie. J’aimerais vous en parler. Dans cette étude, vous avez recommandé que le comité étudie le fonctionnement des organismes distincts. Vous avez également fait valoir que le gouvernement devrait envisager de donner à Affaires mondiales Canada le statut d’organisme distinct. Vous dites que cela permettrait une refonte complète du régime de ressources humaines du ministère, y compris dans les domaines du recrutement, de la classification des employés et des conditions de service.

Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet? Quels seraient les avantages et les inconvénients potentiels de cette démarche?

Mme Steidle : Pour être honnête, je vois surtout des avantages. Comme le professeur Chapnick l’a dit, le défi que nous avons aux Affaires étrangères, c’est le roulement. Nous avons beaucoup de niveaux et beaucoup de roulement. Il y a la permutabilité, l’absence de permutabilité, beaucoup de classifications différentes de gens qui travaillent tous ensemble et des protocoles d’entente qui lient Affaires mondiales et d’autres ministères. La situation est donc vraiment difficile et représente presque un kaléidoscope de la gestion des ressources humaines. À cela s’ajoute la responsabilité de réagir aux événements internationaux. C’est un ensemble très complexe à gérer.

Je suis convaincue qu’avec la mise en place d’un nouvel organisme, il serait possible d’envisager les choses sous un angle complètement différent — de prendre du recul — et de dire : « De quoi avons-nous besoin pour nous positionner pour travailler dans le contexte international? Qui devons-nous recruter et pourquoi? » Parce que le recrutement — et je sais que le comité a posé beaucoup de questions au sujet du recrutement — n’est qu’un continuum d’obligations envers un employé tout au long de sa carrière et, parallèlement, d’obligations de ce dernier envers vous en tant qu’employeur. Le travail des Affaires étrangères et du Service extérieur est très différent. Il s’apparente davantage au service dans l’armée. Une fois que vous vous engagez et que vous êtes envoyé à l’étranger, vous n’êtes pas seul en cause. Il y a votre conjoint, il y a l’éducation de vos enfants et il y a votre sécurité. Ensuite, vous revenez au Canada et vous devez vous réintégrer.

Je crois que si nous avions un organisme distinct, nous pourrions trouver un meilleur incitatif pour le recrutement et le maintien en poste, dans le cadre de son élaboration, de la politique et de la réflexion sur ces questions. C’est un autre problème qui se pose aux affaires étrangères. Il est très difficile de retenir les gens une fois qu’ils ont atteint un certain point. Il y a beaucoup de roulement. Pour ce qui est du recrutement, du maintien en poste et des questions soulevées dans le sondage auprès de la fonction publique, nous pouvons simplement adopter une approche holistique. Nous pouvons voir les choses d’un tout autre œil. Nous pouvons déterminer qui nous pouvons et devons attirer et ce que nous ferons avec ces personnes une fois qu’elles sont en poste.

Le sénateur MacDonald : Y a-t-il des inconvénients potentiels et, le cas échéant, comment peut-on les éviter?

Mme Steidle : Les gens diront peut-être que c’est plus coûteux que les modalités actuelles, et je dirais que nous devrions probablement tenir compte des montants qui ne sont pas dépensés par le ministère des Affaires mondiales chaque année. Autrement dit, quelle proportion de son affectation totale n’a-t-il pas dépensée chaque année? Il y a peut-être un peu d’argent qui reste à la fin de l’année et qui pourrait être consacré aux activités de RH, à la formation linguistique ou à d’autres activités de formation. Je pense que le ministère pourrait peut-être s’engager à ce que le coût d’un nouvel organisme distinct ne soit pas plus élevé que le coût actuel.

Dans une certaine mesure, si vous réduisez les niveaux — et n’oubliez pas que nous avons cinq niveaux de cadres supérieurs avant même celui des sous-ministres. Il y a des sous-ministres, cinq niveaux de cadres, avec et sans permutation, quatre niveaux d’agents du service extérieur, six niveaux de gestion de projet, et ainsi de suite. C’est un ministère à plusieurs niveaux. Nous pourrions jeter un regard neuf là-dessus. Nous pourrions envisager d’avoir moins de niveaux, de catégories et de classifications. Nous devrions certainement pouvoir le faire avec l’enveloppe salariale actuelle.

Le président : Merci. C’est la fin de ce segment. Je sais que nous souhaitons en apprendre davantage à ce sujet. La question sera probablement abordée de nouveau plus tard.

La sénatrice Coyle : Merci. Je vais poser une question à Mme Steidle, et les autres témoins pourront intervenir s’ils le souhaitent.

Je vais citer M. Sutherland en vous posant ma première question. M. Sutherland nous a conseillé de veiller à ce que la forme respecte la fonction et de nous interroger sur les résultats souhaités et les changements qui doivent clairement être apportés. Je ne pense pas que quiconque soutiendra qu’il n’est pas nécessaire de procéder à un changement transformationnel, plutôt que d’apporter des modifications mineures, car il y a manifestement un certain nombre de problèmes.

Peut-on atteindre les résultats souhaités sans changer l’appareil? Ce sont deux choses que j’ai retenues de M. Sutherland. Les points de vue et les conseils de M. Sutherland ont-ils un effet sur les recommandations que vous formulez?

Mme Steidle : Il se trouve que je suis d’accord pour dire que « la forme suit la fonction ». Ce qu’il faut se demander, c’est quelle est la fonction. Que voulons-nous faire à l’étranger? Que voulons-nous faire au Canada? Quel travail faut-il effectuer et qui est le mieux à même de l’effectuer? Quels sont les compétences que nous recherchons, des spécialistes ou des généralistes? Que cherchons-nous dans ce monde moderne avec lequel nous essayons de dialoguer? C’est ainsi que je procéderais, c’est-à-dire que je ferais marche arrière au lieu de décider d’entrée de jeu ce que j’aimerais voir.

Il y a certaines hypothèses de base que je formulerais en lançant un remaniement, qui consisteraient à nous demander si nous pouvons le faire au même coût, avec moins de paliers et de catégories et, de quelque façon, avec une sorte de structure incitative qui permette de recruter et de garder le personnel. Ensuite, nous poserions des questions très fondamentales au sujet du service extérieur, comme : « Est-ce une carrière pour la vie? » Lorsque je suis arrivée en 1977, ce l’était. Trente-quatre ans plus tard, je peux dire que cela a été ma vie. Nous devons être très conscients de cela, car ce n’est peut-être plus pour la vie, et dans ce cas, pourquoi? Le cas échéant, que faisons-nous pour aider les familles et les gens qui y consacrent une partie de leur vie?

La forme suit donc la fonction, mais je commencerais par ces questions fondamentales.

Le président : Si vous permettez, sénatrice Coyle, je vais vous interrompre et proposer qu’un des autres témoins réponde aussi.

La sénatrice Coyle : Avez-vous des exemples de cas où cela s’est fait en toute logique et que cela a fonctionné — qu’un nouvel organisme ait été créé à partir d’un ancien ministère ou quelque chose de semblable? Pouvez-vous nous donner un bon exemple d’un changement radical où les résultats qu’on voulait obtenir ont effectivement entraîné un changement dans l’appareil gouvernemental?

M. Sutherland : L’exemple classique, qui figure dans le document de Mme Steidle, est l’Agence du revenu du Canada, l’ARC, qui est devenue en 1999 un organisme spécial. Je vous dirais cependant que l’ARC est une créature tout à fait unique en son genre, un peu comme l’ornithorynque. Vous rappelez-vous que j’ai dit que chaque organisation est unique? Eh bien, l’ARC l’est particulièrement en ce sens que le commissaire, qui est une sorte de secrétaire permanent — le sous-ministre — relève à la fois du ministre et d’un conseil composé de fonctionnaires fédéraux et provinciaux. Il s’agit de Bob Hamilton, qui est au service du ministre pour une partie des besoins de l’organisation, et au service de la commission pour l’autre partie. Tantôt, il sert le programme politique du jour en servant le ministre, mais tantôt il exerce presque une fonction ministérielle quand il s’agit de gérer les ressources humaines, ce qui est tout l’objet de l’organisme spécial.

Je vous ferai remarquer qu’aucun ministère n’est un organisme spécial. Si vous regardez la liste des 26 organismes, vous verrez qu’ils ont des mandats très précis et qu’ils excellent à faire ce qu’ils font. C’est pourquoi la plupart d’entre eux sont des établissements publics. Ils n’ont pas un large éventail d’exigences en matière de ressources humaines, mais un éventail très restreint et spécialisé.

Il faudrait y réfléchir très soigneusement si on voulait appliquer ce modèle à quelque chose comme Affaires mondiales Canada, un ministère à service complet qui sert un ministre au jour le jour, avec une grande coordination interministérielle et un grand nombre de rôles dévolus à trois ministres.

Il ne s’agit pas de rejeter d’emblée les idées qui s’écartent des sentiers battus, mais ce serait une situation tout à fait unique.

Le sénateur Ravalia : Merci à nos témoins.

Ma question s’adresse à Mme Steidle. Je vous remercie de votre mémoire éclairant. Compte tenu de votre vaste expérience, est-ce qu’il y a des comparatifs internationaux d’un service extérieur qui fonctionne suivant le modèle que vous envisagez?

Mme Steidle : Non, pas du tout. C’est ce qui m’intrigue le plus. Nous ne pourrions pas nous tourner vers d’autres pays pour savoir comment ils font leur service extérieur. Nous pourrions recommencer tout seuls. Faisons-le et qu’ils regardent ce que nous concevons.

Toutes les mises en garde de mon collègue M. Sutherland me font juste penser que c’est un beau défi. J’aimerais bien y travailler, y réfléchir. Ne pouvons-nous pas prendre un ministère qui a tant de diversité et le ramener à plus de simplicité, lui donner une nouvelle structure et de nouvelles attributions en matière de ressources humaines? Même si nous n’allons pas jusqu’à la mise en œuvre, il faudrait au moins l’examiner et voir s’il y a des portes de sortie, des choses qui ne sont pas négociables.

Lorsque nous regardons les services extérieurs d’autres pays, nous nous tournons souvent vers les États-Unis, par exemple, et une chose qui fait notre admiration, depuis toujours, c’est que leurs agents du service extérieur passent tous par une formation consulaire et une affectation consulaire de deux ans, parce qu’un visa consulaire trace un cheminement de carrière, un « cône », comme disent les Américains. C’est très intéressant parce que cela donne à tous une base commune. On peut les appeler en cas d’urgence. On peut utiliser les ressources de la mission pour une crise consulaire, comme je dis, parce que tout le monde a reçu la formation de base. Certains veulent peut-être rester et se spécialiser dans ce travail et d’autres pas.

Il y a du mérite à cela. Ce n’est pas impossible à faire dans un organisme distinct. Il s’agit de bien concevoir le programme de formation. Il y a beaucoup de flexibilité. Tout dépend de ce qu’on veut faire.

Le sénateur Ravalia : Vous parliez tantôt, monsieur Sutherland, de l’Agence du revenu du Canada et du potentiel qu’il y a à fonctionner séparément, tout en étant une sorte d’unité au sein du gouvernement. Si nous devions créer un organisme distinct avec plus de pouvoirs indépendants, selon le modèle proposé par Mme Steidle, pensez-vous que ce serait faisable ou que ce serait contraire aux principes de base du gouvernement?

M. Sutherland : J’ai parlé de l’évolution et des sigles qui sont passés de MAECI à MAECD avant qu’on arrive à Affaires mondiales Canada parce que cela témoigne d’un changement très important dans la position du service extérieur quand on parle d’intégration dans l’ensemble du portefeuille international et d’une plus grande intégration avec le gouvernement.

Je me demande si on perdrait cela en créant un organisme distinct. Nous avons travaillé très fort pour essayer d’intégrer le développement, la diplomatie, la défense et le commerce. Donc, en créant de la distinction, est-ce qu’on perd quelque chose?

De même, en cloisonnant davantage le portefeuille international, est-ce qu’on élève une barrière entre le reste de la fonction publique et les Affaires étrangères? En particulier, est-ce qu’on entrave le mouvement du personnel à l’entrée et à la sortie du portefeuille international?

J’ai moi-même profité d’un séjour aux Affaires étrangères avant d’assumer des responsabilités intérieures, mais le passage de l’un à l’autre est une expérience enrichissante pour notre politique étrangère et aussi pour notre fonction publique, tant au pays qu’à l’international. Une des choses qui m’inquiètent, c’est qu’on fasse quoi que ce soit qui pourrait nuire à cela.

La sénatrice M. Deacon : J’ai la tête qui tourne. Merci à tous d’être ici aujourd’hui.

Nous sommes ici à siéger et à procéder à un examen, et c’est vraiment important. Nous sommes peut-être tous en train d’apprendre où en sont les affaires étrangères et tout le reste à l’heure actuelle, ce que nous voulons être et pour qui, et comment mesurer tout cela. Tout dépend par quel bout de la lorgnette on regarde : dans un sens, on a le sentiment d’être vraiment créatif, et dans l’autre, le souci de ne pas enrayer l’appareil gouvernemental.

Avec tout cela, j’en suis encore à réfléchir à quelques questions que mes collègues ont commencé à poser. Je vais m’en tenir à cela et essayer quelque chose de différent.

Évidemment, dans notre comité, il y a des gens qui s’y connaissent plus que d’autres dans les structures de la fonction publique. Vous verrez assez rapidement dans quel camp je me trouve, mais si Affaires mondiales Canada devenait un organisme distinct, qu’est-ce que cela signifierait pour quelque chose d’aussi... je ne veux pas dire fondamental... mais quelque chose d’aussi central que le rôle de la ministre des Affaires étrangères au sein d’Affaires mondiales Canada? Est-ce que cela change quoi que ce soit au niveau des orientations stratégiques, ou qu’est-ce que cela suppose pour quelque chose que nous connaissons tous, la nomination des ambassadeurs, par exemple? Pourriez-vous me parler un peu de cela d’abord, chacun et chacune de vous?

M. Sutherland : Je peux en prendre une partie.

Vous avez demandé à propos du rôle de la ministre. Il est certain que si nous envisagions un changement de l’appareil gouvernemental, une partie de la question serait de savoir si le ministère, et en particulier la haute direction — le sous-ministre, bien sûr, mais peut-être le ministre —, est prêt à mener un pareil exercice de gestion du changement.

Et nous ne parlons pas encore de l’ampleur des changements. Est-ce qu’ils viseraient l’ensemble d’Affaires mondiales Canada? Les agents du service extérieur? Seulement ceux qui sont à l’étranger? Ou aussi ceux qui sont affectés au Canada? Est-ce qu’ils viseraient aussi les délégués commerciaux? Les agents de développement?

L’analyse qui sous-tendrait la recommandation au premier ministre devrait évaluer notamment si les conditions de gestion du changement sont en place et si la direction est capable de s’y soumettre. Une des choses que j’ai dites est que les changements à l’appareil gouvernemental sont perturbateurs. Ils créent beaucoup d’incertitude au sein du personnel. On ne sait plus trop où on se situe, on s’en inquiète et on se pose des questions. De qui est-ce que je relève? Qu’en est-il de ma sécurité d’emploi? Qu’en est-il de mon revenu? Qu’en est-il de mes avantages sociaux?

Ce serait tout un exercice de changement à gérer.

La sénatrice M. Deacon : Comme vous le savez, nous avons aussi des premiers ministres et des ministres. Nous en avons eu neuf en relativement peu de temps, juste cette partie de la hiérarchie. Je voulais simplement dire cela avant que Marie-Chantal Girard n’intervienne.

Mme Girard : Si le premier ministre devait donner des directives, cela comprendrait la façon de gérer la transition. Cela toucherait les structures de gouvernance, les tâches, les responsabilités, et je peux vous donner un exemple de l’enchaînement de fonctions et d’éléments que cela couvrirait.

Cela toucherait les attributions. Comme M. Sutherland vient de l’expliquer, il faudrait répondre aux questions suivantes : quelle serait l’ampleur des changements, et donc leur incidence sur les fonctions dans les paramètres actuels du gouvernement? Qui serait responsable de quoi? Après cela, nous rédigerions la loi corrélative et toutes les directives, les politiques et les programmes qui seraient touchés.

Nous savons que c’est un milieu de travail syndiqué, alors il faudrait tenir compte du nombre d’employés qui pourraient être non syndiqués, exemptés ou syndiqués. Si les agents négociateurs qui les représentent sont les mêmes que dans la fonction publique actuellement, il faudra alors les orienter dans le dossier de la rémunération globale : est-ce qu’ils voudront que ces employés soient assujettis aux dispositions en vigueur ou bien qu’ils aient des dispositions distinctes? Je pourrai y revenir de façon plus détaillée, mais cela toucherait les pensions et les avantages sociaux, donc la santé, les soins dentaires, l’invalidité, etc. Cela toucherait aussi les niveaux de salaire, les classifications et les conditions d’emploi.

Il faudrait aussi clarifier la question de la mobilité parce qu’il y a des organismes distincts qui ne peuvent pas détacher automatiquement leurs employés auprès de la fonction publique fédérale.

Il nous faudrait un certain nombre de directives pour ériger une nouvelle structure sur le cadre de gouvernance que le premier ministre déciderait de donner à cette organisation.

Le président : Merci beaucoup.

Le sénateur Woo : Merci aux témoins. Madame Steidle, vous avez cerné un certain nombre de problèmes liés à la structure actuelle d’AMC et vous avez proposé des solutions comme la diminution des différents niveaux et paliers, du chevauchement des responsabilités, etc. Pourquoi ces choses ne peuvent-elles pas être faites dans la structure actuelle?

Mme Steidle : Je pense que c’est pour toutes les raisons qu’a données Mme Girard. Nous avons un régime réglementaire de ressources humaines qui régit la fonction publique du Canada. Affaires mondiales et ses employés font partie de ce régime avec les syndicats, les classifications, les niveaux, etc. Vous ne pouvez pas simplement dire que nous ne voulons plus de ce groupe. Ce n’est pas vraiment possible.

Je me suis jointe au service extérieur de ce qui était alors le ministère de la Main-d’œuvre et de l’Immigration, en 1977. J’ai ensuite été transférée de l’un à l’autre des différents noms et titres de ce qui allait devenir les Affaires étrangères. Il arrive assez souvent qu’on change les groupes et qu’on les fasse entrer et sortir des Affaires étrangères.

L’intégration dans l’ensemble du portefeuille est vraiment la clé. Qu’arriverait-il si le portefeuille était intégré? Et si c’était dans la tente? La question est vraiment de savoir quelle est la taille de la tente du ministère des Affaires étrangères? Inclut-elle seulement les affaires étrangères, l’ancien service extérieur et les agents des affaires politiques et des affaires publiques? Ou s’agit-il d’une entité beaucoup plus grande et plus solide conçue autrement, qui inspire ses employés, qui embauche différemment, qui offre des incitatifs? Je pense simplement qu’il y a une nouvelle façon de voir les choses et une façon différente de le faire.

Le sénateur Woo : Le transfert d’un système à l’autre poserait d’énormes problèmes de transition. Vous n’avez pas à répondre à cette question, mais cela fait partie du défi.

Mme Steidle : Je suis à la retraite, sénateur Woo.

Le sénateur Woo : Oui, ce n’est pas votre problème.

J’aimerais poser à M. Sutherland une question un peu philosophique ou symbiotique. Ce n’était pas vraiment une critique de votre part, mais vous avez émis des réserves à propos de l’emploi du mot « appareil » dans le titre de notre étude. J’aimerais savoir quelles sont vos réserves, car cela pourrait nous aider à clarifier ce que nous devrions vraiment examiner.

M. Sutherland : Veuillez m’excuser si je vous ai offensé.

Le sénateur Woo : Non. Cela nous serait très utile.

M. Sutherland : C’est un réflexe parce que ce terme est souvent utilisé.

Il y a beaucoup de dynamisme dans le cadre des règles. Je m’inscris en faux contre l’idée qu’il faut toujours changer une organisation pour obtenir un résultat différent. S’il y a des problèmes de moral dans une institution, il faudrait peut-être poser des questions difficiles, dans le cadre des règles, afin de dynamiser les règles administratives pour les améliorer et obtenir plus de dynamisme de votre organisation. Il n’est pas toujours nécessaire de chambouler l’appareil pour changer l’institution.

Je suppose que ce que je constate, c’est que les gens s’en prennent à l’appareil, sans comprendre que c’est très perturbateur. Il faut de nombreuses années pour se remettre d’un changement d’appareil, alors qu’en fait, un leadership dynamique et une interprétation dynamique des règles existantes peuvent vous permettre d’obtenir certains des résultats dont vous parlez.

Le président : Merci.

Mme Girard : Si vous me le permettez, sénateur Boehm, j’aimerais ajouter quelque chose. Le Bureau du dirigeant principal des ressources humaines fournit des conseils. Chaque chef de service est responsable de son service. Comme le BDPRH se plaît à le dire, nous essayons de mettre en œuvre un modèle où il y a de la liberté. Chaque organisation est unique. Il n’y a pas deux gardes côtières. Il n’y a pas deux agences spatiales. Chaque institution doit examiner ses défis particuliers et la façon dont elle peut les aborder de façon créative.

Le président : Merci.

[Français]

La sénatrice Gerba : Merci à nos témoins. Merci beaucoup, madame Steidle, pour le témoignage et pour le mémoire que vous nous avez soumis. C’est très instructif.

Vous avez indiqué dans vos propos introductifs que vous êtes découragée, parce que cela fait 15 ans et que les changements n’ont toujours pas été faits à Affaires mondiales Canada. On pourrait même dire que certains d’entre eux remontent encore plus loin.

Vous avez une longue expérience en matière de gestion. Comment expliquez-vous ces obstacles? Y a-t-il une réticence au changement à l’interne? Si c’est le cas, en adoptant ce que vous proposez comme solution, qu’est-ce qui va changer?

[Traduction]

Mme Steidle : C’est une très bonne question, et je vous en remercie.

Si j’ai trouvé le témoignage du jeune agent si émouvant, c’est parce que je faisais partie du groupe de la haute direction qui a étudié les questions de RH au ministère, en 2007. J’ai été très déçue d’apprendre qu’en 2022, les agents ont constaté que rien n’avait changé. Cela me déçoit beaucoup.

Cela nous ramène aux questions suivantes : que recommandions-nous à l’époque et quels étaient les problèmes que nous prévoyions? Encore une fois, les problèmes sont les mêmes. On ne porte pas suffisamment attention aux questions qui concernent les agents. Je parle ici du service extérieur. Quels sont ces problèmes? Eh bien, c’est l’emploi du conjoint. Où mes enfants iront-ils à l’école? Il s’agit des conditions de service. Pour des raisons de réduction des coûts, avons-nous réduit certains des avantages qui vous encouragent à aller à l’étranger? Voilà le genre de choses dont il faut tenir compte. Le monde est beaucoup plus dangereux. Les modalités du service extérieur n’ont peut-être pas suivi le rythme de cette évolution. La définition de « conjoint » a changé; les partenariats ont changé. La définition de la famille est très différente de ce qu’elle était il y a 15 ans.

Nous devons être proactifs et aller de l’avant. Nos employés s’y attendent. Il ne s’agit pas seulement de diversité et d’inclusion. Il s’agit de s’occuper d’un employé pendant toute la durée de sa carrière et, espérons-le, de lui fournir les conditions qui lui permettront d’atteindre le plus haut niveau possible, d’aspirer au poste qu’il désire et qu’il peut assumer s’il en est capable. Il n’y a rien de mal à ne pas être promu sous-ministre. C’est bien. Si vous pouvez atteindre le niveau que vous souhaitez atteindre, nous vous appuierons si vous êtes prêt à travailler avec nous au sujet de votre carrière.

Une meilleure gestion de carrière, une gestion plus ciblée, la prise en charge de la personne — je pense que tout cela revient à ce que nous avons dit que nous ferions.

Lorsqu’on parle d’une nouvelle agence, les ressources humaines doivent être au cœur de la refonte.

Le président : Quelqu’un d’autre veut-il ajouter quelque chose à ce sujet? Il reste un peu de temps.

[Français]

Mme Girard : Merci beaucoup pour la question, sénatrice Gerba. Sur ce point-ci, j’entends un appel à la modernisation, un bel alignement entre des réalités très diverses partout dans le monde et ce que l’employeur peut offrir.

J’aurais deux commentaires à faire à ce sujet. Déjà, au sein de nos discussions sur le renouvellement des conventions collectives, nous conservons, dans le mandat global de négocier, une partie des ressources pour répondre à des besoins spécifiques des organisations avec lesquelles nous négocions pour les employés, d’une part. Donc, dans chacune des conventions collectives, on retrouve des améliorations qui vont répondre à ces besoins cycle après cycle.

Pour faire suite au commentaire de ma collègue Mme Taillefer-McLaren, qui gère le Conseil national mixte, la Directive sur le service extérieur est, elle aussi, négociée et modernisée à intervalles réguliers.

Mme Taillefer-McLaren : Merci de votre question, sénatrice. En ce qui concerne les conditions et les dispositions d’emploi, le Conseil national mixte est un forum de choix à l’intérieur duquel plusieurs directives sont négociées. Ce sont des directives qui s’appliquent à l’ensemble des syndicats qui choisissent d’inclure certaines directives dans leur convention collective.

Dans le cas du service à l’étranger, il y a les directives du service extérieur qui, elles, parlent de différents éléments, comme la définition de « conjoint ». C’est une définition qui a évolué. On ne parle pas seulement de conjoint, mais aussi de conjoint de fait, homosexuel et hétérosexuel. On parle également des conditions qui touchent l’éducation, comme les dispositions qui sont offertes aux employés pour l’éducation de leurs enfants lorsqu’ils sont à l’étranger, que ce soit l’éducation à l’étranger ou l’éducation au Canada, dans certains cas.

Donc, les négociations par rapport à l’évolution des besoins des employés qui servent à l’étranger se font dans le cadre d’une revue cyclique des directives du service extérieur, qui ont tenu compte des changements ou ont évolué au fil des années.

La sénatrice Gerba : Qu’est-ce qui empêche que cela soit fait dans le contexte actuel, et qu’est-ce qui changerait si on adoptait un statut d’organisme spécial?

Le président : Je suis désolé, sénatrice Gerba. Le temps alloué à la période des questions est écoulé. Je vous inscris pour la deuxième ronde, si vous le désirez.

[Traduction]

La sénatrice Boniface : Merci d’être ici. C’est une question tellement intéressante.

Madame Steidle, à la lecture de votre rapport, je n’arrête pas de penser à l’expression « adapté à l’objectif », et que tout cela est adapté à l’objectif. Pouvez-vous m’aider à comprendre pourquoi il ne serait pas possible de le faire dans le contexte actuel?

Mme Steidle : Vous savez, il n’y a rien de pire qu’un employé à la retraite.

La sénatrice Boniface : Oh, je sais.

Mme Steidle : Je préfère être un peu prudente, mais, encore une fois, je m’en tiens à l’observation de M. Chapnik. Il y a un roulement au niveau du ministre et de son cabinet. À Affaires mondiales, il y en a trois. Il y a des sous-ministres qui passent par divers postes à la fonction publique. Vous avez des sous-ministres délégués, des sous-ministres adjoints, des directeurs généraux et des directeurs. La moitié d’entre eux ne sont pas permutants. Ils occuperont le poste et se porteront candidats pour un autre, puis ils partiront. Mais ensuite, il y a les agents permutants qui travaillent côte à côte, et pendant l’été, ils sont affectés et vous attendez que leur remplaçant arrive. À tout moment, plusieurs niveaux de cadres supérieurs sont déplacés. Il y a un roulement énorme.

Dans un organisme distinct, on pourrait dire que tout le monde est permutant. Vous pouvez dire ce que vous voulez, mais vous pouvez aussi dire qu’il y a moins de strates. On pourrait dire qu’il n’est pas nécessaire d’avoir des directeurs généraux, mais seulement l’équivalent des directeurs et des SMA. Il y a toutes sortes de structures possibles, mais je pense que le roulement est une chose qui est vraiment difficile à gérer. Et je dois dire que lorsque vous avez à la fois le roulement interne et le roulement des événements externes pour lesquels vous devez donner des conseils en matière de politique étrangère, mener des négociations commerciales, répondre aux activités et aux actions d’autres pays, tant bilatéralement que multilatéralement, et offrir des services aux gens d’affaires canadiens qui voyagent et des services de passeport consulaires, cela donne un énorme méli-mélo. C’est un kaléidoscope d’activités et de gens toujours en mouvement. Il doit y avoir une meilleure façon de gérer tout cela.

La sénatrice Boniface : Je vais m’adresser aux fonctionnaires. L’un des commentaires que j’entends et ce que nous avons entendu autour de la table — bien qu’il se trouve que j’ai quelqu’un qui travaille à Affaires mondiales, et c’est une chose dont Mme Girard a parlé —, c’est qu’il incombe aux gestionnaires de gérer compte tenu du cadre qui leur est fourni. Je me demande, lorsque vous réfléchissez à ce que vous entendez de la part des employés et à ce que nous avons entendu à cette table, si le problème est que les gestionnaires devraient apprendre à gérer différemment et mieux, ou que le cadre stratégique ne correspond pas à ce que les gestionnaires doivent fournir?

Mme Girard : La capacité est toujours une considération et un problème. Dans une organisation structurée autour d’un modèle qui évolue si rapidement, il faut en tenir compte. Je dirais que si nous regardons l’autre côté de la médaille, si le premier ministre faisait de nous un organisme distinct, ce que nous avons observé et les conversations que nous avons eues en tant qu’employeur portaient sur la transition et le risque de perte de capacité. Certaines personnes refuseraient catégoriquement de partir et de fonctionner dans le cadre de la nouvelle gouvernance et du régime de rémunération globale qui pourrait être offert.

C’est donc une question de capacité, oui. C’est un défi pour toutes les organisations. C’est un défi de notre époque, avec la crise à laquelle nous faisons face, avec la rapidité de l’information et les pressions qui viennent de partout, je dirais que nous devrions réfléchir à la façon dont nous pouvons, en tant que modèle intégré — comme M. Sutherland l’a souligné — renforcer cette capacité.

Le président : Je vais vous interrompre. Vous avez largement dépassé votre temps. Désolé, sénatrice. En fait, nous n’aurons même pas un deuxième tour, parce que je veux poser une question.

Nous allons également examiner ce qui se fait dans les autres pays, ce qu’ils font avec leurs ministères des Affaires étrangères, et je pense que nous avons eu une très bonne discussion aujourd’hui. Dans ma vie antérieure, lorsque je me suis joint au service extérieur, c’était le ministère des Affaires extérieures. Monsieur Sutherland, ajoutez à votre... Quel âge ai-je?

Je suis entré dans la fonction publique en 1981, et cette année-là, il y a eu une fusion avec Industrie, Commerce et Commerce. En fait, Industrie et Commerce a été dissous. La fonction commerciale est donc venue, d’où le MAECI. Plus tard, en 2013, l’Agence canadienne de développement international, l’ACDI, a également été absorbée ou fusionnée. Toutes ces choses se sont produites. Cependant, si nous remontons à 1981, c’est la seule fois où il y a eu une Commission royale d’enquête sur la situation dans le service extérieur, la Commission McDougall.

Bon nombre des points qui ont été soulignés dans son rapport ont été soulevés par la suite, et aujourd’hui. Je suis très heureux que Mme Taillefer-McLaren ait eu l’occasion de parler parce que le document le plus élaboré, le plus complet et, j’ajouterais, le plus déroutant est en fait le document qui contient la directive sur le service extérieur. Bonne chance dans vos négociations et pour l’examen triennal.

Je vous pose la dernière question. Y a-t-il un moyen de simplifier tout cela? Tous ceux qui servent à l’étranger, y compris ceux qui proviennent d’autres ministères et organismes gouvernementaux, sont visés par cette disposition. Il doit y avoir une façon de rendre cela plus simple, plus facile à comprendre et plus facile à administrer. Vous avez le dernier mot.

Mme Taillefer-McLaren : Merci. À mon avis, lors du dernier examen cyclique, les deux parties ont fait de vaillants efforts. Il ne faut pas oublier que l’examen cyclique des directives ne concerne pas seulement l’employeur, mais aussi l’agent négociateur. Dans une section des DSE, les Directives sur le service extérieur pour ceux qui emploient ce jargon, il y a une directive en particulier, la DSE15, qui porte sur la réinstallation. Nous avons fait un bel effort pour simplifier la DSE15 et la réduire de 60 à 27 pages. Elle contient la même information et simplifie l’administration; elle fait ces deux choses. C’est, je pense, quelque chose dont se soucient les deux parties, c’est-à-dire l’employeur et l’agent négociateur, pour s’assurer que c’est un document qui peut être lu — lu agréablement et non pas comme un livre qu’on garde sur la table de chevet pour s’endormir.

Le président : Merci beaucoup. Je crains que nous soyons arrivés à la fin de notre séance. Dans le cadre de cette étude, nous voudrons peut-être vous réinviter pour en savoir plus.

Je remercie tous les témoins de leur contribution aujourd’hui. Nous vous en sommes très reconnaissants.

(La séance est levée.)

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