LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le jeudi 15 décembre 2022
Le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international se réunit aujourd’hui, à 12 h 42 (HE), avec vidéoconférence, pour étudier le service extérieur canadien et d’autres éléments de l’appareil de politique étrangère au sein d’Affaires mondiales Canada.
Le sénateur Peter M. Boehm (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Honorables sénateurs, je m’appelle Peter Boehm. Je suis un sénateur de l’Ontario et je préside le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international. Avant de commencer, j’inviterais les membres du comité qui participent à la réunion d’aujourd’hui à se présenter, en commençant par ma gauche.
Le sénateur Woo : Yuen Pau Woo, de la Colombie-Britannique.
[Français]
La sénatrice Gerba : Amina Gerba, du Québec.
[Traduction]
La sénatrice Coyle : Mary Coyle, de la Nouvelle-Écosse.
Le sénateur MacDonald : Michael MacDonald, de la Nouvelle-Écosse.
La sénatrice M. Deacon : Marty Deacon, de l’Ontario.
Le sénateur Harder : Peter Harder, de l’Ontario.
[Français]
Le président : Merci, chers collègues. Bienvenue à tous ainsi qu’à tous les Canadiens et Canadiennes qui nous regardent sur senvu.ca.
Aujourd’hui, nous continuons notre étude portant sur le service extérieur canadien. Comme vous le savez, le but de cette étude est d’évaluer si notre service extérieur et l’appareil de politique étrangère sont bien adaptés et prêts à répondre aux défis mondiaux actuels et futurs.
[Traduction]
Pour en discuter, nous avons l’honneur de recevoir l’honorable Mary Ng, ministre du Commerce international, de la Promotion des exportations, de la Petite Entreprise et du Développement économique. Bienvenue au comité, madame la ministre. Vous êtes accompagnée aujourd’hui des fonctionnaires suivants d’Affaires mondiales Canada : M. Alexandre Lévêque, sous-ministre adjoint, Politique stratégique; Mme Sara Wilshaw, déléguée commerciale en chef, Développement du commerce international, Investissement et innovation; et M. Bruce Christie, sous-ministre adjoint, Politique et négociations commerciales.
D’autres fonctionnaires d’Affaires mondiales Canada sont présents dans la salle, et il se peut que la ministre leur demande de répondre à des questions. En l’occurrence, je les inviterai à se présenter avant de prendre la parole.
Avant d’entendre votre déclaration, madame la ministre, puis de passer à la période de questions, j’aimerais rappeler et demander aux membres et aux témoins présents dans la salle de s’abstenir de se pencher trop près de leur microphone ou de retirer leur oreillette lorsqu’ils le font. Cela permettra d’éviter tout retour sonore qui pourrait blesser le personnel du comité et d’autres personnes dans la salle qui portent une oreillette pour l’interprétation.
Je mentionnerai également qu’une séance du Sénat tire à sa fin et que nous nous attendons à ce que des projets de loi soient mis aux voix. C’est donc fort probable que nous ayons à interrompre brièvement nos travaux afin que certains d’entre nous descendent rapidement pour aller participer au vote.
Madame la ministre, je vous invite à présenter votre déclaration préliminaire. Nous passerons ensuite aux questions des sénateurs. Nous suivrons le principe du premier arrivé, premier servi.
L'honorable Mary Ng, c.p., députée, ministre du Commerce international, de la Promotion des exportations, de la Petite Entreprise et du Développement économique : Merci beaucoup. Je suis ravie de me joindre à vous dans l’édifice du Sénat. Je pense que c’est la deuxième fois que je viens ici. C’était certainement beaucoup plus simple quand nous n’avions qu’à traverser le couloir pour nous voir.
Je vais procéder d’une manière un peu inhabituelle : je ne vais pas faire une longue déclaration préliminaire. En examinant les excellentes questions que vous avez posées aux témoins précédents, je me suis dit : pourquoi ne pas consacrer toute la durée de la réunion à une discussion?
Le sujet de votre étude est capital. Je remercie le comité d’examiner le présent et l’avenir de la diplomatie, son adaptation aux besoins, les raisons pour lesquelles le commerce international est important pour la population canadienne, notre travail actuel, ainsi que ce qui place notre organisation dans la position optimale pour faire en sorte que la population canadienne tire pleinement profit du commerce international et du marché mondial. Je vais m’arrêter là pour que nous passions directement aux questions, auxquelles je répondrai avec plaisir. Je souhaite avoir une discussion franche et constructive. J’espère que cela vous convient, monsieur le président.
Le président : Merci beaucoup, madame la ministre. Cela nous convient parfaitement. Je tiens simplement à rappeler à mes collègues que la discussion porte sur l’étude en cours, comme je l’ai dit au début de la séance.
Honorables sénateurs, comme d’habitude, vous disposerez de quatre minutes chacun. Nous avons commencé en retard, mais si la ministre le veut bien et malgré la possibilité que nos travaux soient interrompus, j’aimerais que nous siégions pendant l’heure complète, si possible. Cela dépend en grande partie de votre horaire, madame la ministre. Je pense que nous pouvons y arriver. Puisque les temps de parole ne sont que de quatre minutes, nous pourrons faire un deuxième tour. Chers collègues, comme toujours, je vous encourage à poser des questions précises et brèves afin de laisser plus de temps pour les réponses.
Le sénateur MacDonald : Madame la ministre, comme vous le savez, le gouvernement a déposé le projet de loi C-11 au Parlement dans le but de modifier la Loi sur la radiodiffusion, et vous avez rencontré la représentante au Commerce des États-Unis, Mme Katherine Tai. Les États-Unis ont soulevé des préoccupations à maintes reprises au sujet des répercussions des projets de loi C-11 et C-18 sur les services de diffusion numérique en continu.
Vous savez également que l’ancien président du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, ou le CRTC, M. Konrad von Finckenstein, a comparu devant le comité chargé d’examiner le projet de loi C-11. À ses dires, les diffuseurs de contenu américains ressentiront les effets des mesures discriminatoires du projet de loi, et nous pouvons nous attendre à ce que les États-Unis prennent des mesures de représailles en vertu de l’Accord Canada-États-Unis-Mexique, ou l’ACEUM. La représentante au Commerce des États-Unis vous a-t-elle fourni des détails sur les mesures de représailles que les États-Unis ont l’intention de prendre à l’endroit du Canada? D’après vous, quels secteurs canadiens seront les plus touchés?
Mme Ng : Je vous remercie pour la question. Je discute souvent avec ma collègue des États-Unis. Il le faut étant donné l’importance de cette relation pour le Canada. Les États-Unis sont le partenaire commercial principal du Canada. C’est justement l’ampleur de notre relation qui rend les différends inévitables.
J’ai communiqué clairement que les projets de loi et les mesures législatives déposés au Parlement canadien sont rédigés conformément aux règles commerciales. Le Canada est un ardent défenseur des règles; nous prenons donc très au sérieux notre responsabilité de respecter nos obligations internationales. J’ai bien fait comprendre à la représentante au Commerce des États-Unis que notre projet de loi, qui va de l’avant, est conforme aux règles. Nous avons eu une discussion à ce sujet, comme nous le faisons pour une vaste gamme de dossiers qui touchent le Canada et les États-Unis. Il s’agit d’une relation importante, et je suis toujours prête à discuter ouvertement avec nos partenaires commerciaux, en particulier les États-Unis.
Le sénateur MacDonald : J’ai juste une question complémentaire : si les États-Unis estiment que le projet de loi n’est pas conforme aux règles commerciales, quels secteurs les mesures de représailles risquent-elles de toucher, et que faisons-nous pour nous préparer à une telle éventualité?
Mme Ng : Durant la renégociation de l’ACEUM, nous avons longuement réfléchi à cette question. Nous tenions à ce que le mécanisme de règlement des différends soit intégré à l’accord. Comme nous l’avons vu, par exemple, dans une affaire liée aux panneaux solaires soulevée par le Canada, les pays ayant conclu des accords fondés sur des règles peuvent avoir recours aux processus de consultations et aux mécanismes à cet effet.
C’est ce que nous ferions, et nous nous attendrions certainement à ce que les États-Unis respectent aussi les règles que nous avons négociées ensemble.
Comme je l’ai déjà dit, quand une relation est aussi importante que celle que nous entretenons avec les États-Unis, il faut pouvoir avoir de grandes discussions sur des dossiers divers. Il m’arrive de porter des affaires à leur attention dans le but de trouver des solutions en ayant recours aux mécanismes fondés sur des règles prévus par les accords commerciaux. C’est leur raison d’être.
Le sénateur MacDonald : Je vous remercie, madame la ministre.
Le président : Sénateur MacDonald, voudrez-vous reprendre la parole durant la deuxième série de questions?
Le sénateur MacDonald : Nous verrons où nous en serons.
Le président : Merci.
La sénatrice M. Deacon : Bonjour, madame la ministre. Merci à vous tous d’être des nôtres.
À mes yeux, la stratégie pour l’Indo-Pacifique annoncée récemment est un très bon exemple du mariage entre la diplomatie canadienne et le commerce international. La réunion d’aujourd’hui tombe donc à point.
À ce sujet, je me demande comment font nos délégations diplomatiques et commerciales pour trouver un équilibre entre les priorités du Canada à l’égard des droits de la personne et nos objectifs ambitieux en matière de commerce. Dans certains pays de l’Indo-Pacifique, la situation relative aux droits des femmes, par exemple, ou le respect des normes démocratiques telles que nous les définissons ne sont peut-être pas considérés comme satisfaisants par la population canadienne.
Ainsi, sous la direction de votre bureau, comment Affaires mondiales Canada fait-il pour trouver un équilibre entre, d’un côté, exercer de la pression sur ces pays pour qu’ils respectent les droits de la personne, et de l’autre, montrer que le Canada est ouvert et prêt à faire des affaires et enthousiaste d’échanger avec eux? Comment ces compromis sont-ils faits?
Mme Ng : C’est une excellente question. C’est ce à quoi je travaille quotidiennement avec mes collègues du ministère, ainsi que les équipes des ministres Joly et Sajjan.
Permettez-moi de prendre un peu de recul. Comme vous l’avez entendu d’entrée de jeu lorsque le président a lu mon titre, je suis la ministre non seulement du Commerce international, mais aussi de la Petite Entreprise et du Développement économique. S’il en est ainsi, c’est parce que le commerce international est tellement important pour l’économie canadienne. Un emploi sur six au Canada est lié au commerce, et deux tiers de notre économie dépendent du commerce. C’est une partie intégrante de notre histoire.
Par ailleurs, les entreprises émergentes sont extrêmement novatrices, qu’elles œuvrent dans les secteurs des technologies propres, de l’agroalimentaire, des agrotechnologies ou autres. De nouvelles entreprises diverses, surtout de petite taille, travaillent dans des domaines novateurs comme l’intelligence artificielle. Ce sont de petites et moyennes entreprises émergentes.
Le premier ministre a délibérément regroupé ces deux dossiers dans le but d’accroître les possibilités tout en soutenant les petites entreprises et celles appartenant à des groupes généralement sous-représentés au sein de notre économie, comme les femmes, les Autochtones et les immigrants.
Vous vous demandez peut-être où je veux en venir. Le commerce international ne concerne pas uniquement les marchés où nous échangeons et les biens que nous échangeons, mais aussi les groupes qui participent aux échanges. Nous consacrons beaucoup de temps à l’élaboration et à la négociation d’accords commerciaux solides. Je suis fière d’affirmer que nous sommes les meilleurs au monde. Nous négocions l’intégration de conditions que je dirais axées sur l’avenir aux accords commerciaux. Certains se souviennent peut-être que le PTP, le Partenariat transpacifique, est devenu le PTPGP, l’Accord de Partenariat transpacifique global et progressiste. Récemment, j’ai évoqué cet accord dans le cadre d’une discussion avec mes collègues sur l’importance que nous accordons aux accords fondés sur des normes élevées, mais quelles sont ces normes? Ce sont des normes relatives à l’environnement et à la protection des droits des travailleurs. De plus, nous veillons à ce que nos accords comprennent des dispositions sur les parties au commerce, comme les petites et moyennes entreprises, et qu’ils incluent les entreprises appartenant à des femmes, par exemple.
Lorsque nous négocions des accords commerciaux, comme nous le faisons en ce moment avec l’Indonésie et les pays de l’ANASE dans le cadre de la stratégie pour l’Indo-Pacifique, ces caractéristiques des accords commerciaux canadiens font partie des discussions. Les parties réunies autour de la table de négociation sont des partenaires égaux, et ensemble, nous parvenons à des ententes sur les questions qui tiennent à cœur à la population canadienne, comme nos valeurs et les valeurs démocratiques. Nous arrivons à collaborer avec nos partenaires et à nous entendre avec eux sur le cadre commercial et les règles applicables...
Le président : Je vous remercie, madame la ministre. Je dois vous interrompre parce que nous avons largement dépassé les quatre minutes allouées.
Le sénateur Woo : Je vous souhaite la bienvenue, madame la ministre, à vous et à vos collaborateurs. Je vous remercie de prendre le temps de vous joindre à nous.
Ma question concerne la pensée de groupe au sein du service extérieur. Votre ministère emploie des personnes de grand talent. Je ne saurais croire qu’elles ont toutes les mêmes opinions, mais la fonction publique a tendance à obliger les personnes à se conformer, ce qui est très risqué, surtout dans le domaine de la politique étrangère et commerciale.
Pouvez-vous nous dire par quelles mesures le ministère permet, voire encourage et favorise, la présentation de nouvelles idées jusqu’à un échelon assez élevé pour qu’elles soient prises au sérieux — sans gêner qui que ce soit — et qu’elles reçoivent l’attention voulue pour que nous puissions trouver de nouvelles façons d’atteindre nos objectifs en matière de politique étrangère et commerciale?
Mme Ng : Comment puis-je répondre à cela en quatre minutes ou même en deux minutes? C’est une très bonne question.
Je vais vous donner un exemple concret lié à la question précédente sur la Stratégie pour l’Indo-Pacifique. Cette stratégie établit un lien entre le travail diplomatique du Canada dans la région et le commerce et le développement, ce qui nous offre la possibilité de renforcer la capacité de nos partenaires commerciaux actuels et futurs. Vous constaterez que nous nous associons aussi à des groupes de la société civile et de gens d’affaires qui nous appuieront et qui collaboreront avec nous. Ainsi, nous aurons accès à divers points de vue, ce qui nous permettra de respecter et de défendre les valeurs d’une grande importance aux yeux de la population canadienne, tout en alimentant nos réflexions grâce aux perspectives extérieures.
Je vais vous expliquer ce que j’entends par là. La Stratégie pour l’Indo-Pacifique comprend un investissement d’un peu plus de 25 millions de dollars, je crois, dans la Fondation Asie Pacifique du Canada. La fondation ouvrira un bureau dans la région et elle mettra à contribution divers acteurs de la société civile, du monde des affaires et du milieu universitaire. Leurs réflexions guideront les discussions dans la région. Voilà un exemple.
Je vais aussi créer une porte commerciale pour la région, en étroite collaboration avec la Fondation Asie Pacifique du Canada. Cette porte tirera parti de la force de nos équipes diplomatiques et de nos missions sur le terrain. Nous allons commencer à faire des affaires dans la région et, ce faisant, nous allons renforcer les capacités, entre autres, de nos services de délégués commerciaux.
C’est un travail continu. Nous savons que nous devons faire appel à nos plus grands experts dans les différentes régions et que nous ne faisons pas cavalier seul; nous travaillons avec des partenaires. Nous devons travailler avec des partenaires, car selon moi, les points de vue extérieurs sont indispensables à une vaste réflexion.
La sénatrice Coyle : Je remercie la ministre Ng et tous ses collaborateurs d’être parmi nous. Comme vous le savez, nous procédons à un examen très approfondi de l’effectif du gouvernement du Canada à l’échelle mondiale. Nous sommes très heureux de vous avoir tous ici aujourd’hui pour mieux comprendre la situation actuelle de nos délégués commerciaux et des autres personnes qui s’occupent de commerce, ainsi que nos besoins futurs dans ce domaine.
Nous sommes récemment allés à Washington D.C. Nous avons notamment discuté avec nos homologues du département d’État de l’idée d’un Canada tourné vers l’extérieur, plutôt que vers l’intérieur et vers les États-Unis, en fait. Cela nous a amenés à réfléchir à notre propre effectif. Comme nous le savons, notre pays fait du commerce avec d’autres pays, et nous vendons ce que nous produisons ici, au Canada, à l’étranger.
J’aimerais connaître l’expertise orientée vers l’extérieur que vous recherchez actuellement et les types d’expertise que vous pourriez rechercher et que vous n’avez peut-être pas encore à profusion pour répondre à nos besoins commerciaux croissants et changeants. Mais je veux aussi savoir si notre effectif en commerce connaît bien les produits et les régions d’où proviennent ces produits ici au Canada, et je veux savoir comment nous assurons cet équilibre.
Mme Ng : Je vais faire quelques liens, étant donné que j’ai commencé à répondre à l’autre question concernant mon portefeuille et les raisons pour lesquelles il est tel qu’il est. Je vais laisser les sénateurs sur cette réflexion. L’horizontalité de notre travail au sein de la fonction publique canadienne est extrêmement importante. Ici, nous disposons d’une expertise en matière de commerce et d’analyse sur les façons de pénétrer les marchés, et ainsi de suite, mais il faut être en mesure de soutenir le système, de le développer et de collaborer à l’échelle du système. Il faut absolument qu’il y ait de la collaboration à l’intérieur du pays pour qu’il y en ait à l’étranger. Voici ce que je veux dire par là.
Je dois collaborer avec ISDE — Innovation, Sciences et Développement économique Canada — et avec tous les services du développement régional; pensez à toutes les merveilleuses entreprises qui se développent ainsi dans tout le pays. Je travaille avec Ressources naturelles Canada. Pourquoi? Parce que nous sommes tournés vers l’extérieur en ce qui concerne le développement durable des minéraux critiques, et je dois donc travailler avec le ministre de Ressources naturelles Canada. Je dois également travailler avec ISDE, qui se consacre à l’innovation.
Je préconise donc que nous mettions l’accent sur l’horizontalité afin de nous assurer que nous disposons des compétences et de la main-d’œuvre nécessaires à cette fin. C’est cette horizontalité qui va nous donner la capacité de développer ce qu’il y a de mieux à l’intérieur et de voir quelles sont ces capacités pour l’exportation et pour le soutien de leur préparation à l’exportation. Il y a donc une gamme de programmes, et il s’agit de faire les liens. Il y a CanExport, l’accélération du commerce et la collaboration avec les agences de développement régional, ou ADR, ainsi que l’Accélérateur net zéro, et les projets que nous finançons par l’entremise de cet organisme ou du groupe de développement durable de Technologies du développement durable Canada, ou TDDC, car ils soutiennent certaines des plus merveilleuses entreprises de technologie propre.
Je dirais donc que c’est l’horizontalité, et que cette horizontalité doit se retrouver dans notre effectif commercial. Il doit avoir la capacité de fonctionner horizontalement avec notre effectif au pays, avec nos merveilleux collègues de l’ensemble du système.
Nous le faisons à l’échelon ministériel. Je pense que mon portefeuille en dit long, car c’est mon mandat. J’ai deux sous-ministres : un pour le développement économique et un pour le commerce international. C’est ce lien qui nous aide à développer et à diriger l’effectif, qui est en fait l’équipe de l’avenir.
Le président : Merci, madame la ministre.
Tout le monde voit les lumières qui s’allument. Cela signifie que nous allons avoir un vote à 14 h 2, mais nous pouvons poursuivre quelque temps.
Mme Ng : Je comprends cela, comme vous le savez.
[Français]
La sénatrice Gerba : Bienvenue, madame la ministre. Votre rôle vous place à l’avant-garde des efforts du gouvernement pour diversifier les exportations canadiennes. Votre lettre de mandat mentionne d’ailleurs que vous allez développer une stratégie pour la coopération économique avec l’Afrique, notamment en soutenant la zone de libre-échange continentale africaine (AfCFTA) qui permet l’accès à 1,3 milliard de consommateurs et à un marché de plus de 3 500 milliards de dollars.
Cette semaine, justement, la représentante américaine au commerce Katherine Tai a déclaré lundi que son organisme se préparait à signer un protocole d’entente avec la zone de libre-échange continentale africaine pour explorer les prochaines étapes des relations commerciales américano-africaines.
Ma question est en deux volets. Tout d’abord, en tant que ministre du Commerce international, de quelle manière votre ministère, à l’intérieur d’Affaires mondiales Canada, travaille-t-il au rapprochement économique entre le Canada et l’Afrique? Deuxièmement, envisagez-vous également la signature — comme les États-Unis — d’un éventuel accord de libre-échange avec l’AfCFTA? Merci.
[Traduction]
Mme Ng : Je vous remercie. Les possibilités qu’offre l’Afrique sont très stimulantes. Juste avant la pandémie, je me souviens avoir accompagné le premier ministre lors d’un voyage en Afrique où il rencontrait l’Union africaine. Juste avant ce voyage, j’avais participé à une mission commerciale au Kenya et en Éthiopie. J’ai également fait un voyage en Afrique du Sud pour la conférence annuelle d’Indaba sur l’investissement dans le secteur minier africain, une conférence majeure, d’une grande importance pour les industries canadiennes.
Pendant mon séjour, j’ai travaillé à établir, par l’intermédiaire de la Chambre de commerce Canada-Afrique, le genre de relations interentreprises qui permettent de mettre en contact très directement les gens qui font des affaires.
Au préalable, pendant notre séjour, nous avons décidé de travailler à un projet qui, selon nous, pourrait être très complémentaire pour le Canada et l’Afrique, soit la lutte contre les changements climatiques. Le Canada a été un partenaire et un participant important de la Conférence sur l’économie bleue durable qui a eu lieu au Kenya. Nous avons organisé quelques sommets sur les technologies propres, au cours desquels nous avons invité des entrepreneurs et des entreprises, tant d’Afrique que du Canada, à examiner les possibilités de collaboration dans les domaines de l’agriculture verte ou des énergies renouvelables vertes, entre autres.
Je dirais que nous faisons le travail en permettant aux entreprises de faire cela. En même temps, le lien entre le développement et le commerce s’exprime probablement le mieux par le travail du Canada en matière de développement des capacités, et par sa collaboration avec l’Afrique dans ce qui est devenu l’accord relatif à la Zone de libre-échange continentale africaine, ou ZLECAf, dans l’Union africaine.
Nous souhaitons ardemment approfondir nos relations, notamment nos relations commerciales avec l’Afrique, afin de tirer parti des relations historiques entre le Canada et l’Afrique. Ce travail est tout à fait passionnant. Nous avons eu des discussions avec quelques pays, notamment sur les APIE, les accords sur la promotion et la protection des investissements étrangers. Les travaux visant à approfondir le sujet sont assurément en cours; c’est la meilleure façon de le dire.
Le sénateur Harder : Merci, madame la ministre.
J’ai quelques questions de base à vous poser, si vous le permettez. Le Service des délégués commerciaux a rejoint l’ancien ministère des Affaires étrangères il y a une quarantaine d’années, et certains de vos prédécesseurs pensaient qu’il fallait le dissocier et le doter d’un ministre et d’un ministère autonomes. Heureusement, cette idée n’a pas fait long feu.
J’aimerais que vous confirmiez pour ce groupe qu’il est vraiment très avantageux pour le Canada d’avoir sous le même parapluie les capacités et les responsabilités du commerce, des affaires étrangères et maintenant du développement international, dans la mesure où elles sont plus importantes que la somme de leurs parties.
Mme Ng : Je suis d’accord. Nous sommes plus forts parce que nous sommes ensemble.
Je peux témoigner de ce que je constate. Je voyage beaucoup, maintenant que nous pouvons le faire, après la COVID. J’ai l’impression d’être toutes les trois semaines en Asie et dans différentes parties du monde pour visiter nos opérations. La somme de ces parties est incroyablement importante. Je pense que le volet commercial, qui mise énormément sur l’expertise et la compréhension de la géographie sur le terrain, mais aussi ici à l’administration centrale, est un véritable complément au commerce, car lorsque nous disons que nous voulons faire du commerce inclusif, ou que nous voulons nous assurer que nos entreprises canadiennes respectent les normes élevées de ce que l’on attend d’elles en matière de conduite responsable des affaires, nous sommes informés par le travail et l’expertise sur le plan géographique.
Le sénateur Harder : Merci beaucoup. Si vous me permettez, j’aurais une question complémentaire à ce sujet. Il me semble que nous ne sommes pas présents dans certaines des zones géographiques où nous devrions l’être. Il ne s’agit peut-être pas de mener de vastes missions, mais nous venons de parler de l’Afrique. Ma collègue a parlé de ce que font les États-Unis. Ils ont 51 missions en Afrique. Bien sûr, nous ne sommes pas les États-Unis, mais nous en avons 17.
Ne pensez-vous pas que nous pourrions être un peu plus créatifs dans nos efforts pour trouver des moyens d’assurer notre présence, d’accroître ainsi notre réseau et de l’orienter principalement vers le commerce ou le développement, selon l’endroit? Pouvons-nous être un peu plus créatifs?
Mme Ng : Je pense que le travail de votre comité est extrêmement important, car je pense qu’il va enrichir le travail et la réflexion qui sont déjà en cours à Affaires mondiales Canada.
Bien sûr, parallèlement aux travaux de ce comité, d’autres travaux sont en cours, qui portent sur l’avenir de la diplomatie et sur le capital humain dont nous avons besoin dans le monde entier, de même qu’ici. Est-ce qu’il est adapté à notre objectif de travailler de manière horizontale ici au Canada et d’avoir une présence suffisante dans les parties du monde où le Canada doit être présent, non seulement du point de vue géopolitique, mais aussi du point de vue de l’appui au commerce?
Le meilleur exemple serait ce que vous avez vu ressortir de la Stratégie pour l’Indo-Pacifique. Il s’agit d’une stratégie très complète qui couvre tout un éventail de domaines allant de la diplomatie au commerce, en passant par le développement et la défense. Je pense que vous pouvez y voir le mode pangouvernemental de fonctionnement.
À mon avis, le Canada doit avoir les ressources appropriées pour être présent comme il se doit sur la scène mondiale et dans le domaine du commerce, et à cette fin, le travail que vous faites ici, au comité, ainsi que le travail qui se fait en ce moment même, sera très important.
Le sénateur Harder : Merci.
La sénatrice Boniface : Merci de votre présence, madame la ministre. J’ai une question de suivi concernant la Stratégie pour l’Indo-Pacifique. En particulier, vous allez nommer un nouveau représentant au commerce dans la région.
Compte tenu des exemples généraux que vous avez donnés, pouvez-vous me dire comment vous allez bâtir les capacités du point de vue des compétences? Aurez-vous du soutien ici, à Ottawa? De quel type de présence sur le terrain, par exemple, aurez-vous besoin là-bas? Aidez-moi à comprendre cela.
Mme Ng : Absolument. Il s’agit d’une formidable stratégie, très ambitieuse, qui aidera le Canada à être bien placé pour saisir les occasions qui se présentent dans l’une des régions du monde qui connaît la croissance la plus rapide. Je crois que vous constaterez dans la stratégie que les ressources nécessaires sont prévues.
Le travail de planification de l’exécution est en cours. Le développement des capacités qui fait partie de la stratégie concerne en fait les personnes et le type de ressources dont nous aurons besoin dans la région. La présence d’un représentant au commerce dans l’Indo-Pacifique constitue une force de coordination et de leadership, notamment pour aider à créer ce lien pour le Canada, cette porte d’entrée, si vous voulez, dans la région. Cela contribuera également à faire connaître beaucoup mieux le Canada dans la région, ce qui manque à l’heure actuelle.
La Fondation Asie-Pacifique du Canada, dont j’ai parlé un peu plus tôt, et le leadership exercé par le représentant au commerce pour l’Indo-Pacifique sont au cœur de cette démarche. Pour renforcer les capacités, il faut vraiment miser sur les gens et sur la bonne répartition des personnes, et sur ce qui existe dans la région pour que ce soit très complémentaire, puis trouver les bons partenaires dans nos provinces et territoires, ainsi que dans les organisations commerciales. Il faut que ce soit réalisable et pratique, et c’est certainement ma façon de voir — notre façon de voir — la démarche de mise en œuvre de l’aspect commercial de la Stratégie pour l’Indo-Pacifique.
La sénatrice Boniface : Merci.
Le président : Merci, madame la ministre.
Je vais un peu poursuivre dans la même veine que la sénatrice Boniface et revenir sur le commentaire de la sénatrice Coyle concernant notre voyage à Washington la semaine dernière. Nous avons eu de très bonnes séances là-bas, et il est évident que le Département d’État américain est engagé dans un exercice de modernisation majeur, pour lequel ils ont le soutien du Congrès. Nous avons également rencontré des membres du Comité des relations étrangères du Sénat américain, et nous avons entendu tout cela.
L’une des choses qu’ils veulent faire est d’intégrer de nouvelles recrues à l’intérieur d’une période de six mois. Ils savent que ce sera difficile à réaliser. C’est certainement très difficile ici, à Affaires mondiales Canada, car il faut parfois des années pour que quelqu’un se joigne à nous. Entretemps, l’âge moyen des agents du service extérieur est de 47 ans, comme nous l’avons découvert dans les données que nous avons demandées à votre ministère.
Lorsque vous envisagez de prendre de l’expansion dans la région de l’Asie-Pacifique et, bien sûr, d’avoir des délégués commerciaux sur le terrain et aussi davantage de négociateurs, alors que nous envisageons de futurs accords de libre-échange, comment faites-vous pour dynamiser le travail afin que cela soit possible et, en particulier, pour recruter des personnes qui ne sont peut-être pas parmi les premières à un examen cognitif, mais qui peuvent avoir des compétences en langues étrangères et d’autres aptitudes qui seraient très utiles?
Mme Ng : Les gens sont notre principal atout, et je crois que c’est là le cœur de votre question.
J’attirerais votre attention sur les atouts dont nous disposons à l’heure actuelle. Notre approche de l’aspect commercial, en particulier de la Stratégie pour l’Indo-Pacifique, consiste réellement à renforcer la coordination. Permettez-moi d’expliquer ce que cela signifie.
Dans le cadre de mes responsabilités, j’ai des organismes d’État comme Exportation et développement Canada, la Corporation commerciale canadienne, Investir au Canada et, bien sûr, le Service des délégués commerciaux. Dans le cadre de la Stratégie pour l’Indo-Pacifique, nous disposons de cet incroyable réseau d’expatriés dans la région qui ont également formé des chambres de commerce canadiennes locales dans le pays.
Dans le cadre de cette stratégie, nous allons augmenter le soutien à ceux qui sont sur le terrain et aux expatriés dans le milieu des affaires, et nous tirons parti des capacités très solides de ces organisations, les organismes d’État, qui travaillent déjà précisément à percer le marché.
Il ne fait aucun doute que nous devrons travailler à nous assurer que nous affectons les bonnes personnes et que nous en ajoutons d’autres aux diverses missions sur le terrain, mais nous ne sommes pas à la case départ. Nous faisons déjà cela dans une grande mesure. L’acronyme REÉC signifie « Relance des entreprises, de l’économie et du commerce ». J’ai créé l’Équipe REÉC pendant la pandémie. Mais de quoi s’agit-il? C’est une équipe qui réunit le Service des délégués commerciaux, Exportation et développement Canada, la Corporation commerciale canadienne et Investir au Canada. Sur qui se concentre cette équipe? Sur les exportateurs, les petites et moyennes entreprises et les grandes entreprises. En fait, elle travaille en mode « Équipe Canada ».
J’ai bien l’intention de réunir ces entreprises incroyables lorsque je pourrai à nouveau mener des missions d’Équipe Canada à l’étranger. D’ailleurs, pendant la pandémie, nous les faisions virtuellement, et la semaine dernière, j’étais au Japon. Nous allons réaliser le volet commercial grâce à un plan de mise en œuvre portant sur les gens de la région, en collaboration et en coordination avec ces éléments très solides.
J’ai une dernière chose à dire à ce sujet. Je le dis souvent : le Canada est le meilleur endroit où faire du commerce dans le monde parce que nous venons de partout dans le monde. Comment veiller à ce que ces grands Canadiens — ce capital humain —, qu’ils soient à l’étranger ou ici au Canada, se perçoivent comme faisant partie de l’Équipe Canada, ici au Canada, et soient prêts à faire également partie de l’équipe commerciale à l’étranger?
Le président : Merci, madame la ministre.
Le sénateur Woo : Madame la ministre, j’aimerais revenir sur votre référence aux Canadiens qui sont à l’étranger. Je viens de terminer une consultation avec toutes les chambres canadiennes de l’Asie-Pacifique et, en général, elles ont l’impression d’être sous-utilisées par le Service des délégués commerciaux et, plus généralement, par le service extérieur. Ma question est de savoir si le gouvernement a réfléchi à la possibilité de tirer parti des Canadiens à l’étranger dans un sens plus global et plus large : j’entends par cela, ne pas seulement les utiliser comme des délégués commerciaux de remplacement — si je peux m’exprimer ainsi —, mais les traiter comme des personnes faisant partie de la population canadienne et ayant des préoccupations, des besoins et des défis particuliers qui doivent être abordés dans le cadre d’une série de questions de politique publique. Encore une fois, il ne s’agit pas seulement de leur demander d’aider à faire des démarches pour exporter un produit vers leur marché. Je parle de questions comme la fiscalité, la réinstallation, le maintien du contact avec le Canada, la reconnaissance de leurs contributions et de leurs pensions. Il y a toute une série de questions auxquelles les Canadiens à l’étranger estiment que le gouvernement ne répond pas correctement, ce qui nuit à leur capacité d’être le genre d’ambassadeurs ou de représentants du Canada que nous voudrions voir.
Je conclurai simplement en soulignant — et vous aurez vu cette statistique de Statistique Canada — que la nouvelle estimation du nombre de Canadiens à l’étranger est actuellement de 4,4 millions. Si les Canadiens à l’étranger formaient une province, celle-ci serait la cinquième en importance.
Mme Ng : J’aime cette question. C’est ce à quoi nous aspirons. Nous voulons précisément investir de façon à accroître la capacité des chambres de commerce canadiennes et des réseaux dans les pays concernés et à mieux les arrimer avec nos missions sur le terrain.
Je vais vous donner un exemple. Je suis allée aux Philippines très récemment. Il y a dans ce pays une chambre de commerce canadienne très dynamique composée d’expatriés qui traversent le Pacifique régulièrement. Ce sont exactement ce genre d’occasions qui nous sont signalées, à moi et au gouvernement. Voilà précisément pourquoi cet investissement a été fait dans la Stratégie du Canada pour l’Indo-Pacifique en particulier.
Toutefois, comme vous l’avez dit, le but n’est pas seulement de connaître ces réseaux. Il faut développer des relations, d’où la participation là-bas de la Fondation Asie-Pacifique et la mise sur pied d’une porte commerciale. Nous comptons aussi investir dans les chambres de commerce et nous efforcer de transposer au niveau international l’excellent travail que nous avons accompli au Canada dans l’écosystème de l’entrepreneuriat féminin. Le gouvernement a nommé trois excellents représentants au Conseil consultatif des gens d’affaires de la Coopération économique Asie-Pacifique. Ce sont des personnes extraordinaires, car elles travaillent au volet commercial de ce forum multilatéral.
Nous constatons de visu des occasions de développer ces relations et la manière de les maximiser. À mon avis, un des traits caractéristiques des Canadiens — un domaine parmi tant d’autres où nous sommes particulièrement doués —, c’est notre formidable capacité de rassembler. Dans la région, il y a de merveilleuses occasions d’exploiter ce savoir-faire.
J’admets qu’il y a du travail à faire. Si la Stratégie pour l’Indo-Pacifique renferme ces éléments, c’est justement en raison des observations que nous avons entendues et de la manière dont nous voulons faire nos investissements. Il faut à présent faire preuve de ténacité et mettre les choses en œuvre.
Le sénateur Woo : Pouvez-vous me dire si quelqu’un au ministère est responsable des Canadiens se trouvant à l’étranger? Je ne parle pas des affaires consulaires comme le soutien lorsque des Canadiens se font arrêter, mais plutôt des activités que vous venez de décrire, c’est-à-dire du développement et de l’entretien des relations. Qui est responsable de ce volet?
Mme Ng : Je ne pense pas que ce soit l’affaire d’une personne en particulier. Par exemple, pour les échanges commerciaux, je me tourne souvent vers la déléguée commerciale en chef, tandis que pour les négociations, je me tourne vers quelqu’un d’autre.
Pour le volet commercial, je pense que quelqu’un a mentionné le classement alphabétique des ministères, par exemple les secteurs T et B. J’ai appris dans ma formation que dans le commerce et les affaires, une personne doit s’occuper des négociations, et une autre...
Bref, il y a plus d’une personne.
Le président : Je peux vous donner un exemple. Dans mon ancienne vie, lorsque j’étais en poste à Washington, il y a eu, évidemment, l’attaque du 11 septembre. Nous nous sommes efforcés de mettre sur pied un réseau d’expatriés canadiens aux États-Unis pour qu’ils nous aident à transmettre l’information, car il y avait beaucoup de désinformation qui circulait sur la provenance des terroristes. La tâche n’était pas simple.
Là où je veux en venir, c’est que les ambassades peuvent faire beaucoup de ce genre de travail sur le terrain, et pas nécessairement par les voies consulaires. Dans le passé, les sections des affaires publiques des missions s’en chargeaient. Elles avaient beaucoup de ressources et de leviers.
[Français]
La sénatrice Gerba : Je profite de l’occasion qui nous est offerte aujourd’hui pour saluer le travail des délégués commerciaux. Dans mon ancienne vie, j’ai fait affaire avec beaucoup de délégués commerciaux et souvent, on ne les apprécie pas assez ou on ne les remercie pas assez. Ils sont plus de 1 400, je crois, en poste partout dans le monde. C’est l’occasion de saluer leur travail auprès des entrepreneurs, dans mon ancienne vie.
Le Bureau du Conseil privé a lancé un appel à l’action en faveur de la lutte contre le racisme et pour l’équité et l’inclusion dans la fonction publique. J’aimerais savoir ce que votre ministère fait pour assurer et favoriser la meilleure représentation des minorités parmi les délégués commerciaux qui sont en poste partout dans le monde. Merci.
[Traduction]
Mme Ng : Permettez-moi, sénatrice, de couvrir d’éloges à mon tour le Service des délégués commerciaux. J’entends des commentaires de cette teneur de la part d’entreprises partout au pays. De fait, dans les sondages, le service obtient invariablement une note de plus de 90 % pour la satisfaction de la clientèle. De fait, lorsque quelqu’un me dit qu’il ne connaît pas le service, je me demande toujours comment cela est possible. L’aspect de mon travail lié à la promotion des exportations consiste à faire savoir au plus grand nombre de personnes possible que le Service des délégués commerciaux est le mieux placé pour les aider à entrer dans le marché et les guider une fois qu’elles y seront.
Nous avons une occasion extraordinaire de faire en sorte que notre effectif, nos délégués commerciaux et notre équipe soient représentatifs de la population canadienne. Je reviens à ma déclaration selon laquelle les Canadiens sont les meilleurs négociateurs meilleurs en matière d’échanges commerciaux parce qu’ils proviennent d’un peu partout dans le monde. C’est un atout immense.
Nous voulons mettre en place une équipe et un effectif diversifiés, et nous y travaillons en ce moment. La diversité est une force pour les Canadiens, car elle va de pair avec une remarquable compréhension des cultures et des langues. Nous devons être particulièrement soucieux d’obtenir cette représentation et cette diversité au sein de la nouvelle cohorte qui fait son entrée dans le système.
Nous devons soutenir les personnes qui, à l’heure actuelle, ne sont pas bilingues. Nous devons les soutenir dans leur apprentissage du français tout au long de leur carrière. Le processus est déjà entamé pour notre déléguée commerciale en chef, qui prend l’apprentissage de sa seconde langue très à cœur. Notre diversité est un outil précieux lors de la négociation d’échanges commerciaux partout dans le monde. Nous ne voulons pas que quelque chose entrave la mise en place d’un effectif diversifié. Nous devons soutenir les gens, non seulement dans l’acquisition d’une deuxième langue officielle, mais aussi dans l’acquisition d’une des nombreuses langues parlées par les Canadiens, que ce soit une troisième, une quatrième ou une cinquième langue. Voilà le travail qui nous attend.
Le président : Merci, madame la ministre, particulièrement pour la dernière partie de votre réponse. Vous avez soulevé quelque chose de vraiment important.
La sénatrice M. Deacon : Je vais vous poser une question assez simple, mais que j’essaie d’élucider pour bien comprendre l’étude que nous faisons en ce moment. J’aimerais avoir une meilleure idée de votre relation avec Exportation et développement Canada.
Existe-t-il une forme de coopération officielle entre EDC, qui est une société d’État, et Affaires mondiales Canada? Cet organisme doit-il se financer par ses propres moyens?
Mme Ng : À titre de ministre responsable de cet organisme, je transmets chaque année à EDC un énoncé des priorités, qui est en quelque sorte l’équivalent de la lettre de mandat que je reçois du premier ministre. Ce document d’orientation énumère les priorités établies par le gouvernement pour EDC. Je fais le point régulièrement avec le président et premier dirigeant et le président du conseil.
La sénatrice M. Deacon : Merci de votre réponse. Le comité essaie de réunir le maximum d’informations afin de formuler les meilleures recommandations possible.
J’ai une dernière question à vous poser. Y a-t-il des aspects des services étrangers et du commerce international dont nous n’avons pas parlé? Dans le travail que vous faites, quels éléments seraient à modifier ou à améliorer, selon vous?
Mme Ng : J’encouragerais le comité à se pencher sur l’approche horizontale. Le gouvernement est un système imposant comportant de gros ministères dotés de mandats robustes. De mon côté, ce travail va de soi vu le mandat et le portefeuille qui m’ont été confiés, qui comprend à la fois les petites entreprises, le développement économique et le commerce international. Une part des compétences demandées est l’expertise en géographie mondiale et en diplomatie. Il est également essentiel de posséder une connaissance approfondie des échanges commerciaux pour pouvoir aider les exportateurs canadiens à comprendre les marchés auxquels ils veulent accéder et à favoriser leur réussite une fois qu’ils sont dans ces marchés. Toutefois, avant même d’arriver à ce stade, il faut travailler le plus possible horizontalement — de façon systématique — pour tirer le maximum des nombreuses forces que nous avons.
Dans le cadre de mon portefeuille, comme je l’ai déjà dit, je travaille avec mes collègues ministres responsables des agences de développement régional. Je porte aussi le chapeau de ministre du Développement économique. J’assume donc en partie un rôle de coordination. Nous travaillons horizontalement avec les sociétés d’État qui relèvent de moi, et j’encourage l’ensemble du système à exercer ce genre de collaboration. Il est essentiel de suivre ce principe pour exécuter le meilleur travail possible. Par exemple, comment faire pour mettre en place un réseau de brillants entrepreneurs autochtones répartis dans les marchés partout dans le monde? Pour y arriver, nous devons travailler horizontalement ici, puis prendre les mesures nécessaires pour les aider à faire leur place dans ces marchés. Cette sorte de va-et-vient entre nous exige une approche horizontale.
Le président : Merci. Je voulais demander à la sénatrice Coyle et à la sénatrice Boniface si elles avaient des questions de suivi. Comme la sénatrice Gerba, le sénateur Woo et moi-même avons aussi des questions, nous allons manquer de temps. Sénatrice Coyle, vous avez la parole.
La sénatrice Coyle : Cette discussion est vraiment fascinante. À propos du principe d’horizontalité que vous avez décrit dans votre réponse à ma première question — et que vous avez réitéré lors de la discussion —, je voulais revenir aux petites entreprises et au développement économique.
Je sais que vous comparaissez aujourd’hui surtout pour discuter du commerce international. Comment se traduit sur le terrain l’approche horizontale que vous encouragez et que vous préconisez? De quoi avez-vous besoin pour mieux préparer votre effectif qui travaille, par exemple, dans les domaines des petites entreprises et du développement économique à adopter une approche horizontale qui permettrait de réaliser nos ambitions en matière de commerce international?
Mme Ng : C’est une question formidable. J’ai une sous-ministre du Développement économique et un sous-ministre du Commerce international. Je suis ravie de la façon dont ces deux personnes travaillent ensemble. Une part du travail accompli jusqu’à présent l’a été en maintenant une multiplicité de portes ouvertes, tous secteurs confondus, c’est-à-dire en voyant notre travail du point de vue du client, peu importe où nous nous trouvons au gouvernement. Les grandes organisations ont les ressources et se débrouillent assez bien. Par contre, comment faites-vous pour expliquer aux petites et moyennes entreprises, qui représentent 99 % des entreprises au pays, comment renforcer cette capacité qui leur permettrait de participer aux échanges commerciaux à l’échelle internationale? Le Programme d’accélération du commerce du Canada, par exemple, est un investissement issu de l’industrie, en l’occurrence d’Innovation, Sciences et Développement économique Canada, et non pas du commerce. Ce programme permet au gouvernement de travailler avec les entreprises et avec les organismes mondiaux du commerce. Un partenariat a aussi été établi avec un programme en Colombie-Britannique précisément pour développer la capacité des multiples portes ouvertes. Nous préconisons une approche centrée sur l’entrepreneur, que ce soit une femme, une personne noire, un Autochtone ou une petite entreprise novatrice qui se concentre sur sa croissance sans penser peut-être à protéger sa propriété intellectuelle. Ces entreprises ont-elles un bon plan de croissance ou de commercialisation? À l’échelle internationale, dans quel secteur et dans quelle région peuvent-elles s’insérer dans une chaîne de valeur ou une chaîne d’approvisionnement?
Quelqu’un va peut-être me demander quelle est l’importance du système commercial basé sur des règles. C’est l’autre partie de mon travail. Je dois défendre le système commercial multilatéral basé sur des règles auprès de l’Organisation mondiale du commerce et dans le cadre de nos accords multilatéraux. Nous avons abattu beaucoup travail sur ce front également. La capacité du Canada concernant l’établissement de règles est ahurissante.
Le président : Merci. Mes deux collègues m’ont indiqué que je pouvais poser ma question — en vertu de la prérogative de la présidence —, mais elles n’auront pas la chance de poser les leurs. Je suis certain que nous nous rattraperons lors des prochaines séances.
Le Canada s’en tire très bien dans la négociation d’accords de libre-échange. Le hic, c’est de convaincre ensuite les entreprises de se servir de ces accords pour la vente de produits et de services à l’étranger. Selon mon expérience, les entreprises sont réticentes à sortir un peu du cadre de l’ACEUM et de la portion de 75 % que représentent nos échanges commerciaux avec les États-Unis. L’Allemagne vient de ratifier l’Accord économique et commercial global entre le Canada et l’Union européenne, ce qui constitue un pas de géant.
Une des choses que nous étudions au comité est la mobilité des personnes, pas seulement au sein du gouvernement, mais dans d’autres organisations.
Les Américains font la même chose. Un parfait exemple de mobilité est l’ambassadrice et représentante permanente du Canada auprès de l’Organisation mondiale du commerce à Genève, qui a travaillé comme consule générale après un parcours au gouvernement, et qui a fait ensuite un passage dans une grande entreprise avant d’occuper son poste actuel.
Parlons de la progression de carrière. Serait-il possible de permettre aux personnes de changer d’organisation sans que leur carrière en souffre? Des mesures incitatives pourraient-elles être offertes aux entreprises, malgré le merveilleux travail du Service des délégués commerciaux, pour ramener ces personnes au bercail et accroître l’influence du Canada?
Mme Ng : C’est une excellente question.
Lorsque je pense aux possibilités de collaboration entre le secteur privé et le gouvernement, je me demande comment cette collaboration pourrait se concrétiser de façon efficace. C’est une question de synergie. Comment transposer les possibilités de mobilité dans le système gouvernemental pour qu’elles deviennent des détachements ou des échanges? Un programme de ce genre permettrait d’attirer des personnes qui ont hissé leur entreprise au niveau international et qui pourraient avoir quelque chose d’intéressant à apporter au gouvernement, puisqu’elles auraient mis en pratique les règles que nous avons établies pour le Canada et qu’elles auraient travaillé avec nos partenaires et multilatéralement. Nous pourrions intégrer ces personnes dans le système et profiter de leur expérience. J’aime beaucoup cette suggestion.
Je répondrais peut-être en disant que je suis impatiente de lire la recommandation du comité. Y a-t-il des façons vraiment novatrices de concevoir la mobilité? Au sujet de ce que nous avons fait pour la stratégie indopacifique, ce sont en quelque sorte des efforts à multiples facettes pour mettre en œuvre des échanges commerciaux en créant des relations, en mettant à profit des connaissances vraiment solides et approfondies sur le plan diplomatique, en établissant des règles grâce à des accords commerciaux et en nouant des partenariats solides avec la communauté d’affaires qui travaille déjà avec des sociétés d’État, que ce soit Exportation et développement Canada ou la Corporation commerciale canadienne, dans le cadre de contrats. Je pense que ma demande serait de consulter en temps et lieu vos travaux et vos recommandations à ce sujet.
Le président : Eh bien, c’est consigné au compte rendu. Alors, merci.
Madame la ministre, au nom du comité, j’aimerais vous remercier infiniment de votre présence parmi nous aujourd’hui. La discussion s’est avérée très fructueuse. Nous allons certainement vous réinviter. Merci de ne pas surcharger vos hauts fonctionnaires, qui sont très talentueux et qui ont pu vous accompagner.
Je voudrais reconnaître publiquement le travail de la greffière du comité, Gaëtane Lemay. C’était sa dernière séance, car elle part à la retraite. Je tiens à vous remercier chaleureusement de vos années au service du comité, du Sénat du Canada et du pays. Merci beaucoup.
J’aimerais souhaiter à tous de joyeuses Fêtes en toute sécurité. Ne pelletez pas trop. Merci beaucoup.
(La séance est levée.)