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ENEV - Comité permanent

Énergie, environnement et ressources naturelles


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DE L’ÉNERGIE, DE L’ENVIRONNEMENT ET DES RESSOURCES NATURELLES

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le jeudi 5 décembre 2024

Le Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd’hui, à 9 h 1 (HE), avec vidéoconférence, pour étudier de nouvelles questions concernant le mandat du comité.

Le sénateur Paul J. Massicotte (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Bonjour, honorables sénateurs. Je m’appelle Paul J. Massicotte, je suis un sénateur du Québec et je suis président du Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles. Je vais demander à mes collègues du comité de se présenter, en commençant par ma gauche.

La sénatrice Verner : Josée Verner, du Québec.

[Traduction]

Le sénateur D. M. Wells : David Wells, Terre-Neuve-et-Labrador.

Le sénateur Fridhandler : Daryl Fridhandler, Alberta.

La sénatrice Anderson : Margaret Dawn Anderson, Territoires du Nord-Ouest.

Le sénateur Arnot : David Arnot, Saskatchewan.

[Français]

La sénatrice Miville-Dechêne : Julie Miville-Dechêne, du Québec.

La sénatrice Youance : Suze Youance, du Québec.

Le président : Aujourd’hui, le comité a invité des témoins à comparaître dans le cadre de son étude spéciale sur le changement climatique, particulièrement sur l’industrie canadienne du pétrole et du gaz.

[Traduction]

Pour la première partie de la réunion, nous accueillons Bob Espey, président et chef de la direction de Parkland Corporation. Bienvenue et merci d’être parmi nous.

Vous avez cinq minutes pour faire votre déclaration préliminaire. La parole est à vous, monsieur Espey.

Bob Espey, président et chef de la direction, Parkland Corporation : Bonjour, monsieur le président. Je suis heureux de me joindre à vous aujourd’hui.

Dans un esprit de réconciliation, je reconnais que je m’adresse à vous depuis les territoires traditionnels de la Confédération des Pieds-Noirs, des Tsuut’ina, des nations Stoney Nakoda, des districts métis 5 et 6, et de tous les gens qui vivent dans la région du Traité no 7 du Sud de l’Alberta.

Je m’appelle Bob Espey. Je suis président et chef de la direction de Parkland Corporation, une chaîne de stations-service et dépanneurs établie à Calgary, qui exerce ses activités dans 26 pays, y compris aux États-Unis. Même si nous ne faisons pas de forage pétrolier ou gazier, nous fournissons chaque jour de l’énergie, des biens de consommation courante et de la nourriture à un Canadien sur cinq.

Si vous avez fait le plein chez Pioneer, Ultramar ou Chevron, si vous avez chargé votre véhicule électrique, ou VE, si vous avez fait des achats chez On the Run, ou si vous avez acheté de la nourriture chez Les Aliments M&M, vous êtes l’un de nos clients.

Grâce à ces interactions quotidiennes, nous obtenons de précieux renseignements sur les besoins des Canadiens. Aujourd’hui, je vous exhorte à aborder notre dialogue non pas dans l’optique de l’industrie énergétique, mais du point de vue des 39 millions de Canadiens qui dépendent de nous pour une énergie fiable et abordable.

Je vais commencer par la pertinence de l’industrie pour le Canada. Chaque jour, nous fournissons l’énergie pour les avions, les navires, les flottes de camionnage et environ 28 millions de véhicules personnels sur la route au Canada. Lorsque les Canadiens s’arrêtent à une station-service, ce n’est pas seulement pour faire le plein. C’est pour qu’ils puissent se rendre au travail et que leurs enfants puissent aller à l’école ou participer à des activités sportives. Les carburants que nous fournissons rassemblent les familles et les collectivités.

De la tête de puits canadienne au consommateur, nous disposons d’une chaîne de valeur intérieure enviable. Nous devons en prendre soin et la protéger. Sinon, nous devrons acheter à d’autres pays et dépendre d’eux. Cela nuirait à notre sécurité énergétique, minerait les possibilités économiques et aurait des répercussions inutiles sur l’environnement.

Permettez-moi d’aborder trois façons dont Parkland aide à réduire l’intensité en carbone des transports au Canada. Premièrement, pour les industries comme le camionnage, le transport maritime et l’aviation, qui ont peu de solutions de rechange au carburant liquide, la réduction de l’intensité en carbone est essentielle. En 2017, nous avons ouvert la voie en mélangeant des matières renouvelables avec du pétrole brut au moyen de l’infrastructure existante à notre raffinerie de Burnaby. Ce carburant renouvelable a environ un huitième de l’intensité en carbone du carburant classique et fonctionne dans les véhicules existants sans modification.

Deuxièmement, l’électrification de l’aviation représente un défi, et c’est pourquoi nous mettons à l’essai la production du premier carburéacteur canadien à faible teneur en carbone. C’est ce qu’on appelle couramment le carburant durable d’aviation, ou CDA. À l’heure actuelle, tout le CDA est importé au Canada. Une fois cette étape importante franchie, nous présenterons une réussite canadienne sur laquelle nous devrons nous appuyer.

Troisièmement, le Canada a besoin de carburants à plus faible teneur en carbone et d’électrification, et nous voyons des opportunités extraordinaires dans la transition énergétique. Nous avons construit un réseau de bornes de recharge pour VE de premier plan dans l’Ouest, et nous sommes en train de le développer dans l’Est. Cependant, il y a un décalage. Les gouvernements veulent imposer des changements que tous les Canadiens ne sont pas prêts à accepter ou qu’ils ne peuvent se permettre.

Comment le Canada peut-il mieux soutenir la concurrence, et comment le gouvernement peut-il offrir des choix aux Canadiens tout en encourageant la décarbonisation et en stimulant la croissance économique?

Premièrement, il faut donner aux Canadiens un choix abordable. Une entreprise en contact direct avec la clientèle comme la nôtre doit répondre aux besoins de ses clients; sinon, nous les perdons. Il en va de même pour les politiques et la réglementation. Le gouvernement devrait se concentrer sur les besoins actuels et changeants des Canadiens et adopter une politique énergétique qui veille à ce qu’aucun Canadien ne soit laissé pour compte.

Deuxièmement, nous devons renforcer notre chaîne de valeur canadienne et laisser l’industrie soutenir la concurrence. Par exemple, en ce qui concerne le carburant d’aviation durable, la loi américaine sur la réduction de l’inflation encourage le mélange, la production et l’utilisation du CDA, tandis que le Canada dépend entièrement des importations. Il est insensé d’acheter un carburant à faible teneur en carbone et de le transporter à l’autre bout du monde avant qu’il ne puisse être utilisé. L’incitation à la production canadienne dans le cadre du Fonds d’action pour le développement durable appuierait les objectifs de durabilité et exploiterait les possibilités économiques.

Troisièmement, les dirigeants politiques doivent être fiers de l’industrie énergétique canadienne. J’ai passé du temps en Norvège pour m’entretenir avec les dirigeants et les citoyens qui appuient fièrement leur industrie énergétique. Nous avons besoin que les dirigeants politiques canadiens expriment la même fierté à l’égard de notre industrie tout en encourageant la réduction des émissions. Nous avons les ressources naturelles dont le monde a besoin, ainsi que certaines des normes environnementales les plus élevées au monde.

Merci de me donner l’occasion de m’adresser à vous aujourd’hui. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.

Le président : Merci beaucoup, monsieur Espey. Nous allons passer à notre période de questions.

[Français]

La sénatrice Verner : Je remercie le témoin. Le quatrième objectif de notre étude est d’évaluer le positionnement stratégique de l’industrie pour mieux répondre aux risques et aux tendances mondiales, dont l’électricité du parc automobile. En début de semaine, un ministre du Québec a affirmé que des stations-service fermaient déjà leurs portes au Québec à cause de la hausse des ventes de véhicules électriques et qu’il sera plus difficile de trouver de l’essence à mesure qu’on s’approchera de l’échéancier de 2035 pour interdire la vente de véhicules à essence.

Puisque votre entreprise possède 4 000 points de vente d’essence au Canada et aux États-Unis, premièrement, observez-vous une telle situation sur le terrain à ce moment-ci? Deuxièmement, les automobilistes doivent-ils véritablement craindre de ne pas être en mesure de trouver de l’essence, plus on s’approchera de 2035?

[Traduction]

M. Espey : Merci, sénatrice. C’est une question intéressante. Nous constatons certainement un changement dans la façon dont cela influe sur la demande des consommateurs.

Je dirais qu’au cours de la transition — et, encore une fois, du point de vue de Parkland, il est important que nous répondions aux besoins en énergie de nos clients. Ce que nous avons constaté, et c’est une tendance qui se poursuit dans l’industrie depuis des décennies, c’est que les points de vente plus petits et plus faibles finissent par disparaître du marché parce qu’ils n’ont tout simplement pas la rentabilité nécessaire pour survivre.

L’une des choses que nous devons garder à l’esprit, c’est qu’au fur et à mesure de la transition énergétique, nous devons veiller à ce que l’infrastructure demeure en place. Comment cela se fait-il?

D’abord et avant tout, nous commençons à offrir une bonne solution de rechange pour la recharge des véhicules électriques, ou VE, ce qui contribue à la rentabilité de ces sites. Comme je l’ai indiqué dans ma déclaration préliminaire, Parkland est un chef de file dans le domaine de la recharge ultra-rapide, ce qui plaît aux consommateurs, et nous constatons une bonne utilisation de cette technologie dans les collectivités où le taux de pénétration des VE est élevé.

La deuxième chose, c’est que les applications du diésel ou ce que nous appelons les « applications à haute puissance » sont difficiles à électrifier, et la meilleure façon de réduire les émissions de carbone consiste à recourir aux énergies renouvelables et à s’assurer d’avoir une solide chaîne de valeur des énergies renouvelables au Canada. L’une de nos préoccupations, c’est que si nous n’avons pas les bons incitatifs en place, une grande partie de cette production ira aux États-Unis en particulier, et nous deviendrons un importateur dans le pays où nous fabriquons actuellement ces carburants.

[Français]

La sénatrice Verner : Merci.

[Traduction]

Le sénateur D. M. Wells : Merci, monsieur Espey, de comparaître aujourd’hui. J’aimerais vous poser une question sur l’empreinte économique de Parkland, dans la mesure où vous pourrez y répondre. Combien de personnes employez-vous et combien d’entreprises dérivées sont associées aux activités de Parkland et à ce genre de choses? Pourriez-vous nous donner une idée de votre empreinte économique dans la région où vous opérez?

M. Espey : Oui. Nous employons environ 6 500 personnes à Parkland, et c’est pour l’ensemble des régions où nous opérons, soit le Canada, la partie nord des États-Unis, les Caraïbes, l’Amérique du Sud et l’Amérique centrale.

Au Canada, nous avons environ 2 000 employés, et c’est dans nos activités directes. Si vous ajoutez à ce nombre les stations-service que nous fournissons ou dont nous sommes propriétaires, environ 20 000 autres personnes travaillent directement pour Parkland ou en dépendent. L’industrie canadienne emploie environ 200 000 personnes.

Le sénateur D. M. Wells : Je vous remercie.

Compte tenu de la transition qui s’opère entre le pétrole et les sources d’énergie renouvelable ou autres que le pétrole, quels sont certains des aspects positifs que vous constatez dans le secteur, et quels sont certains des défis auxquels vous faites face?

M. Espey : Oui, nous fournissons de l’énergie aux gens pour qu’ils puissent se déplacer. Les gens vont continuer à se déplacer, indépendamment du carburant qu’ils utilisent. Nous voyons un avenir où la commodité et l’énergie sont liées.

Nous avons la chance d’avoir, dans les collectivités que nous desservons, des sites avec des schémas de circulation bien établis, qui sont exploités localement et qui resteront pertinents pendant la transition, parce que les gens devront toujours recharger leurs véhicules ou acheter des carburants renouvelables dans nos stations-service. Nous considérons que c’est un aspect positif.

Encore une fois, nous nous préoccupons surtout de la chaîne de valeur qui soutient l’écosystème, et de veiller à ce que nous puissions continuer à fabriquer et à fournir ces carburants aux consommateurs canadiens avec les ressources naturelles canadiennes, et que nous ne finissions pas par importer ces ressources, ce qui entraînerait un important mouvement d’emplois vers l’extérieur du pays.

Le sénateur D. M. Wells : Je vous en remercie.

J’ai une autre question. Avec cette transition, je suppose — et je ne devrais peut-être pas le supposer — y a-t-il plus d’utilisateurs pour les énergies renouvelables? Est-ce que la tendance va dans le sens de vos prévisions?

M. Espey : Les énergies renouvelables seront adoptées dans le cadre des mandats gouvernementaux, de sorte que lorsque ceux-ci seront en place, les énergies renouvelables commenceront à prendre de l’ampleur.

Au bout du compte, un carburant renouvelable coûte environ cinq fois plus cher, si vous comparez un litre de diésel purement renouvelable avec un litre de diésel classique. C’est le défi permanent de la transition énergétique. Vous passez d’une énergie bon marché et facilement disponible à des sources d’énergie plus coûteuses, et au bout du compte, c’est le consommateur qui devra payer pour cela.

Si nous regardons ce qui se passe aux États-Unis, le gouvernement intervient en accordant des subventions directes aux fabricants et il n’y a pas de coût supplémentaire pour le consommateur. Alors qu’au Canada, en particulier, nous voyons une bonne partie du coût se répercuter sur le consommateur et, au bout du compte, c’est l’utilisateur qui doit payer.

Le sénateur D. M. Wells : Merci beaucoup.

Le sénateur Fridhandler : Merci de partager votre temps avec nous aujourd’hui, monsieur Espey. J’aimerais en savoir un peu plus sur vos réseaux de recharge et sur les obstacles qui, selon vous, freinent un déploiement plus vaste au Canada, surtout dans les régions éloignées, et qui font que les gens à l’extérieur des grands centres urbains soient moins susceptibles de se tourner vers les VE.

Pouvez-vous nous parler de façon générale de cette situation?

M. Espey : Oui, le plus grand obstacle à la mise en place d’une infrastructure de recharge est lié à l’adoption des véhicules électriques.

Je crois que le gouvernement a réussi à créer des incitatifs par l’entremise de trois mécanismes, dont l’un consiste à accorder parfois des subventions dans les collectivités où la demande est insuffisante et où il est difficile de justifier l’investissement de capitaux.

Deuxièmement, nous avons eu la chance de recevoir un certain financement de la Banque de l’infrastructure du Canada, qui réduit le coût de nos investissements et comporte aussi des caractéristiques qui lient le remboursement à l’utilisation. Cela contribue à réduire le risque et nous aide également à déployer rapidement nos bornes de recharge dans les collectivités où la demande pourrait ne pas se faire sentir dès le départ.

Troisièmement, nous pouvons monétiser les crédits de carbone pour faciliter l’investissement. Cela dit, l’investissement dans un réseau de recharge pour VE n’en est encore qu’à ses débuts, et nous reconnaissons que nous ne verrons pas de rendement avant l’avenir.

Le sénateur Fridhandler : Dans un autre ordre d’idées, il était intéressant de voir sur votre site Web — et je crois que vous l’avez aussi mentionné aujourd’hui — que Parkland est un chef de file en matière de carburants à faible teneur en carbone.

J’aimerais que vous nous en disiez un peu plus sur ce qui existe déjà et sur ce qui se passera à l’avenir dans le cadre de votre rôle dans ce domaine.

M. Espey : Oui, nous avons une raffinerie à Burnaby, en Colombie-Britannique, et nous avons été l’une des premières entreprises en Amérique du Nord — et peut-être dans le monde — à utiliser une technologie appelée « co-traitement ». C’est là que nous utilisons l’infrastructure existante, notre raffinerie actuelle, et essentiellement, nous avons commencé à utiliser des charges d’alimentation renouvelables. Nous remplaçons le pétrole brut par du suif ou de l’huile de tall, qui est un déchet de l’industrie forestière, ainsi que du canola. Nous commençons à remplacer le pétrole brut et, essentiellement, nous réduisons la teneur en carbone du carburant.

Comme je l’ai dit dans ma déclaration préliminaire, nous pouvons la réduire d’environ sept huitièmes. C’est une réduction vraiment remarquable.

L’avantage, c’est que la conversion de l’équipement exige très peu de capitaux. Nous dépensons entre 50 et 70 millions de dollars pour produire 3 500 barils par jour. Une nouvelle usine de diésel renouvelable coûterait entre 600 et 800 millions de dollars, ce qui vous donne une idée de la façon dont nous avons pu utiliser l’infrastructure existante pour réduire les émissions de carbone.

Ensuite, du point de vue du consommateur, ce n’est pas un coût supplémentaire pour lui, et il achète donc l’essence au même prix que chez nos concurrents, mais la nôtre a un composant renouvelable. C’est compensé par les crédits de carbone que nous obtenons et que nous pouvons vendre sur le marché. C’est une méthode très efficace pour nous aider à réduire les émissions.

Dans d’autres administrations, nous sommes un importateur, et nous importons des énergies renouvelables au Canada, parce que la capacité de production n’existe pas encore.

Le sénateur Fridhandler : Voyez-vous la possibilité, au-delà de Burnaby, de moderniser d’autres raffineries afin que les consommateurs brûlent des carburants plus efficaces et moins polluants?

M. Espey : Oui, nous n’avons qu’une seule raffinerie, et nous avons la chance que sa configuration se soit prêtée à cela. Cela nous a permis de le faire de façon très économique.

Je ne peux pas parler des autres raffineurs et de leur capacité à le faire de façon aussi économique, mais c’est certainement une possibilité que nous voyons dans d’autres pays, en particulier aux États-Unis et dans les États occidentaux où les mandats sont assez ambitieux.

La sénatrice Miville-Dechêne : Pour revenir à cette raffinerie de Burnaby, pouvez-vous me donner une idée du pourcentage de charge d’alimentation renouvelable par rapport à vos ventes globales de carburant? Est-ce une faible proportion? Est-ce une proportion moyenne? Quel pourcentage de votre commerce cela représente-t-il?

M. Espey : Cela dépend du carburant, mais si vous y réfléchissez bien, dans un litre d’essence, il y a environ 10 à 15 % d’éthanol, donc c’est mélangé à l’essence, et en plus, nous avons 10 à 20 % de composants renouvelables. En règle générale, environ le quart du carburant est maintenant constitué de composants renouvelables pour le consommateur.

La sénatrice Miville-Dechêne : Vous n’avez pas de plans pour pousser cela plus loin?

M. Espey : Nous avons des plans. C’est une technologie de pointe, et cela exige donc certaines expérimentations. Nous faisons beaucoup d’expériences dans les installations existantes, de sorte que nous faisons très attention à la façon dont nous allons pousser cela plus loin.

À l’heure actuelle, comme je l’ai dit, nous produisons environ 3 500 barils par jour. Notre objectif est de porter ce chiffre à 7 500 barils par jour d’ici la fin de la décennie.

La sénatrice Miville-Dechêne : Pouvez-vous approfondir un peu plus le problème du carburant durable pour les avions? Pouvez-vous m’expliquer pourquoi nous sommes en retard, si je comprends bien, au Canada, à cause de nos lois?

Soyez un peu plus précis. Je suis désolée; je ne connais pas très bien ce dossier.

M. Espey : Le carburéacteur est essentiellement du diésel, et il s’agit d’un diésel plus raffiné qui a des spécifications de qualité supérieure, en raison des exigences en matière de sécurité. L’industrie, à juste titre, est très prudente au sujet de sa conversion en carburant durable d’aviation, ou CDA, et elle doit travailler avec les fabricants de moteurs pour ce faire.

Ces fabricants de moteurs sont maintenant à l’aise avec le carburant durable d’aviation, qui a les mêmes propriétés chimiques que le carburéacteur ordinaire. Le problème, au départ, c’est que les compagnies aériennes ne sont pas tenues d’utiliser du carburant durable d’aviation. Pourquoi? C’est parce qu’elles doivent être concurrentielles à l’échelle mondiale, et sans mandat mondial, il est difficile pour un pays comme le Canada d’émettre son propre mandat, car nos compagnies aériennes perdraient leur compétitivité sur le marché mondial. C’est toujours là que se situe le problème.

D’un autre côté, il y a les incitatifs. Il n’y en a pas, du côté de la production, pour atténuer les coûts supplémentaires pour les compagnies aériennes. Si le gouvernement voulait apporter une aide à cet égard, il nous faudrait des capitaux et aussi des subventions à court terme jusqu’à ce qu’un mandat global soit en place afin que nous puissions justifier un tel investissement.

Cela dit, dans notre raffinerie de Burnaby, encore une fois, avec l’équipement existant, nous pouvons fabriquer du carburant durable d’aviation. Nous dirigeons un projet pilote avec l’une de nos plus grandes compagnies aériennes au Canada. Nous serons en mesure de lui livrer un mélange de carburant durable d’aviation à l’aéroport de Vancouver, et elle va commencer à faire des vols d’essai, ce qui est très dynamisant pour l’industrie.

La sénatrice Miville-Dechêne : Il devrait y avoir plus d’une raffinerie à Burnaby. Je pense que c’est la conclusion...

M. Espey : Pardon?

La sénatrice Miville-Dechêne : Vous devriez avoir plus d’une raffinerie à Burnaby, ce qui vous permettrait d’aller plus vite sur la voie de la durabilité.

M. Espey : Ce serait effectivement le cas. Nous sommes chanceux que la configuration de la raffinerie que nous avons se prête à ce genre de production.

Encore une fois, cependant, l’absence d’incitatifs appropriés ne stimulera pas le développement d’une capacité au Canada, que ce soit à Parkland ou dans d’autres raffineries.

Le sénateur Arnot : Merci, monsieur Espey. De toute évidence, sous votre direction, Parkland a fait preuve d’une grande diversification de ses sources de revenus et d’un leadership en matière de durabilité. C’est connu, et votre innovation en matière d’énergie à faibles émissions de carbone est remarquable. Cependant, j’ai une question à ce sujet.

Compte tenu des racines de Parkland dans les produits pétroliers traditionnels, comment réagissez-vous aux critiques selon lesquelles les initiatives d’énergie renouvelable de votre entreprise ne sont pas suffisantes pour atteindre les objectifs à long terme d’ici 2035, et peut-être même pas 2050?

M. Espey : Encore une fois, nous sommes là pour répondre aux besoins de nos clients, au bout du compte, et ce sont nos clients qui conduiront le changement et notre capacité à investir.

Je suis très fier de ce que l’équipe de Parkland a fait pour mettre en place un réseau de recharge pour VE. En un temps record, nous avons mis sur pied le deuxième réseau de recharge ultrarapide en importance en Colombie-Britannique. Nous déployons maintenant ce système dans d’autres administrations. Sans la demande, il nous est très difficile de justifier cet investissement.

Nous sommes évalués en fonction du rendement par nos investisseurs. Nous sommes une société cotée en bourse, et les investisseurs s’attendent à ce que nous déployions des capitaux qui donneront le meilleur rendement.

Le sénateur Arnot : Pour ce qui est de la recharge des véhicules électriques, je crois comprendre que les consommateurs ne sont pas aussi friands des véhicules électriques aujourd’hui qu’ils l’étaient il y a quelques années. Avez-vous quelque chose à dire à ce sujet? Autrement dit, la demande n’est pas là parce que les consommateurs réagissent. Pour une raison ou une autre, ils n’ont pas confiance dans les véhicules électriques.

M. Espey : Je pense que cela dépend de la région. Je pense que ce que vous voyez dans les marchés urbains, où les gens ont accès à des bornes de recharge et où ils ne conduisent pas sur d’aussi longues distances, c’est qu’un VE remplace bien un véhicule à essence.

Le Canada est un grand pays avec de grandes distances, et il y a beaucoup de gens qui ont besoin de conduire pour vivre. Nous avons aussi un climat froid et rigoureux pour lequel la technologie n’est pas bien adaptée, dans bien des cas. C’est la partie dont nous devons tous être conscients, et nous devons, encore une fois, donner le choix aux Canadiens afin qu’ils puissent vivre leur vie et contribuer à l’économie.

Le sénateur Arnot : Avez-vous quelque chose à dire sur le rôle du gouvernement pour ce qui est de sensibiliser la population aux raisons pour lesquelles elle devrait exiger davantage de technologies vertes? Autrement dit, le gouvernement dirige-t-il ce dossier de façon à obtenir un bon résultat en moins de temps?

M. Espey : Je ne peux pas me prononcer précisément sur l’efficacité de l’éducation. Ce que nous constatons dans notre secteur, c’est que les consommateurs sont très sensibilisés à l’environnement et à la nécessité de le protéger. Là où il y a une demande, nous y répondons et mettons l’infrastructure en place. Avec l’aide du gouvernement, nous avons été en mesure de déployer des capitaux dans des régions où la demande est moins forte pour, espérons-le, stimuler la demande.

Je dirais qu’il y a des défis ou des aspects pratiques liés à l’électrification par rapport aux combustibles classiques. Si vous prenez les grandes régions de notre pays, qui sont froides, et où les gens parcourent de longues distances, la faisabilité d’un VE peut être remise en question simplement sur le plan de l’autonomie, du temps pour recharger, puis d’une diminution de l’autonomie à mesure que les températures deviennent plus froides.

Le sénateur Arnot : Merci.

[Français]

La sénatrice Youance : Monsieur Espey, ma question porte sur votre production. J’aimerais savoir quel est le pourcentage de vos produits vendus qui sont raffinés au Canada. Je voulais comprendre la proportion entre les exportations et l’importation de produits raffinés.

[Traduction]

M. Espey : Encore une fois, nous ne produisons pas de pétrole brut. Nous sommes surtout un distributeur et, en Colombie-Britannique, nous avons une raffinerie.

En ce qui concerne le marché de l’essence, nous occupons environ 17 à 18 % de ce marché, et sur le marché du diésel, notre part est un peu plus faible; elle se situe entre 15 et 16 %.

Nous détenons une part importante du marché. Nous revendons surtout des produits d’autres raffineurs — sauf en Colombie-Britannique, où nous nous approvisionnons par l’entremise de notre propre raffinerie.

[Français]

La sénatrice Youance : Dans un autre ordre d’idées, vous avez parlé de la commodité et du temps de recharge. Seriez-vous obligés de mettre en place des activités ou des incitatifs pour que les gens puissent utiliser vos bornes de recharge? Dans vos espaces, y aura-t-il d’autres activités, ou serez-vous obligés de le faire pour assurer la durabilité de vos installations pour la recharge électrique?

[Traduction]

M. Espey : Lorsque nous parlons à nos clients, leur crainte à l’égard des VE — ou leur hésitation —, porte d’abord sur la puissance. Puis-je obtenir la puissance que j’obtiendrais d’un véhicule thermique? La deuxième crainte concerne l’autonomie, et les gens parlent souvent de l’anxiété liée à l’autonomie.

Notre stratégie a été d’aller sur les marchés et de faire en sorte de donner le choix aux gens le long des grandes artères. En Colombie-Britannique, nous avons mis en place un réseau qui permet aux consommateurs de compter sur nous tous les 100 à 150 kilomètres le long des grandes autoroutes.

La troisième chose, c’est le temps. Pour vous donner un exemple, nous avons un véhicule électrique. Si nous allons de Calgary à Vancouver dans ma voiture à moteur thermique, je m’arrête une fois pour acheter de l’essence, ce qui me prend environ trois minutes. Lorsque je conduis un VE, je m’arrête quatre ou cinq fois, et ce trajet prend en moyenne — si vous additionnez le tout — deux heures et demie. Les gens veulent de l’énergie rapide, et notre réponse à cela est d’investir dans la recharge ultra-rapide.

Nous pensons que la recharge la plus rapide est ce que veulent les consommateurs. Encore une fois, la deuxième chose est la densité du réseau, et nous avons réussi à le densifier de façon à ce que vous puissiez conduire votre voiture de Vancouver à Calgary ou de Calgary à Vancouver en vous arrêtant aux bornes de recharge de Parkland en cours de route. En comprenant le consommateur, nous construisons notre réseau de façon à faire en sorte qu’il lui convienne.

L’une des restrictions de la rapidité de charge est due aux véhicules. Même si la technologie permet de recharger les batteries plus rapidement, beaucoup de véhicules ne peuvent pas le faire en raison des répercussions sur les batteries. En règle générale, nous pouvons fournir en 20 minutes une recharge de 80 % pour une batterie de taille moyenne. L’avantage que nous avons, c’est que nous sommes sur des routes importantes et que nous avons de bons sites avec de bonnes commodités et des itinéraires de circulation éprouvés. Ce que nous constatons, c’est que si nous y incluons des bornes de recharge pour les véhicules électriques, les gens s’en servent.

La sénatrice Anderson : Je vous remercie de votre témoignage.

J’ai une question qui porte précisément sur... on parle beaucoup des VE. L’électricité la plus chère au Canada se trouve dans les Territoires du Nord-Ouest. Nos coûts sont de 41 cents le kilowatt. Le Nunavut se situe à 35,4 cents le kilowatt et le Yukon, à 18,7 cents le kilowatt. Le prix le plus bas est au Québec à 7,8 cents le kilowatt. Les coûts dans les Territoires du Nord-Ouest sont presque cinq fois plus élevés qu’au Québec.

Les Territoires du Nord-Ouest augmenteront également leurs coûts d’électricité. Le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, ou GTNO, subventionnera l’électricité à hauteur de 48 millions de dollars au cours des quatre prochaines années, soit 12 millions de dollars par année. Cette subvention va réduire l’augmentation moyenne des tarifs — et nous avons toujours une hausse de tarif en plus — dans tous les Territoires du Nord-Ouest, qui se situe entre 28,4 et 15 %.

Maintenant, quand vous parlez de l’utilisation des VE et des facteurs de coût, comment ces facteurs de coût sont-ils pris en compte dans la réalité dans les Territoires du Nord-Ouest alors qu’une grande partie de ce qui se passe dans les provinces du Sud nous nuit dans le Nord, où nos coûts sont beaucoup plus élevés? Pour l’électricité, c’est cinq fois plus. Il y a aussi le fait que nous avons des températures plus froides et que les VE ne sont pas aussi efficaces. Il y a aussi d’autres facteurs en jeu dans le Nord.

Comment tiendriez-vous compte des décisions prises à l’échelle nationale qui touchent le Nord?

M. Espey : Je ne peux pas me prononcer précisément sur la façon dont le gouvernement appuie les gens qui vivent dans le Nord.

Ce que je sais, c’est que nous avons une chaîne de valeur ou d’approvisionnement qui dessert les collectivités du Nord. Nous le faisons de la façon la plus efficace possible en nous assurant d’avoir des entrepôts locaux dans les marchés locaux afin que nous puissions transporter des chargements de carburant vers le marché et ensuite les redistribuer.

Je dirais qu’en ce qui concerne les VE, l’un des défis auxquels font face beaucoup de collectivités du Nord, c’est qu’elles produisent leur électricité à partir du diésel et que, si la source de production d’énergie ne change pas, cela remet en question la volonté de passer aux VE.

Encore une fois, je pense qu’il s’agit d’un problème plus vaste lié à la façon dont l’électricité est produite et, malheureusement, c’est très coûteux, parce que cette énergie est générée localement et principalement au moyen de carburant diésel, sauf dans certaines grandes collectivités urbaines.

C’est un défi. Nous sommes là pour servir. Nous desservons des clients dans ces marchés. Il est certain que nous n’avons pas centré nos efforts sur cette région en ce qui concerne les bornes de recharge pour VE en raison du défi que représentent les coûts.

La sénatrice Anderson : Oui, juste une petite question de suivi pour vous dire que ces collectivités ont utilisé l’hydroélectricité; cependant, compte tenu des effets du changement climatique, les niveaux d’eau sont trop bas et elles ont dû revenir au diésel. Je ne crois pas que ces facteurs entrent en ligne de compte lorsque des décisions sont prises.

Pour que ce soit bien clair, je pense que lorsque les entreprises prennent des décisions, et que le Canada prend des décisions, il faut qu’ils comprennent certaines réalités qui se produisent dans le Nord et qu’ils ne prennent pas leurs décisions en fonction du Sud.

Merci beaucoup.

M. Espey : Bien sûr. C’est une excellente remarque et, encore une fois, nous sommes fiers de fournir actuellement de l’énergie à un bon nombre de ces collectivités.

La sénatrice McCallum : Je suis désolée d’avoir manqué votre exposé. Je suis arrivée en retard, alors veuillez m’excuser.

Je voudrais faire un commentaire et poser une question sur les véhicules électriques. J’ai envisagé d’acheter une nouvelle voiture, il y a environ un mois, et j’ai parlé au vendeur. Il m’a dit qu’en ce qui concerne la recharge à la maison, le réseau ne sera pas capable de l’accommoder, et que seulement quatre maisons dans sa rue auront accès à la recharge rapide.

Dans quelle mesure la transition aux véhicules électriques est‑elle durable pour l’ensemble du pays? Je regarde l’empreinte environnementale, parce que je crois comprendre que vos batteries sont faites de lithium et qu’il en coûte entre 5 000 et 16 000 $ pour une nouvelle batterie. Dans quelle mesure ces batteries sont-elles disponibles à l’heure actuelle? L’exploitation minière du lithium et la production d’hydroélectricité dans les collectivités des Premières Nations ont une empreinte environnementale importante en raison de la contamination de l’air, de l’eau et du sol. Cela comprend maintenant la pénurie d’eau. Que pouvez-vous nous dire à ce sujet?

M. Espey : Notre entreprise ne participe pas à la production ou à la fabrication de batteries, et ce n’est pas un domaine dans lequel j’ai beaucoup d’expertise.

Encore une fois, le problème tient au fait que les batteries ont une densité énergétique beaucoup plus faible que les combustibles traditionnels et qu’elles sont donc plus coûteuses, ce qui entraîne en fin de compte un coût plus élevé pour un VE. Au bout du compte, c’est là le défi. Pour les consommateurs, le système énergétique classique est tout simplement plus abordable. Cela nous ramène à la question suivante : comment le gouvernement veut-il encourager les changements? Franchement, pour la plupart des Canadiens, la seule façon d’y arriver est de subventionner directement les VE.

Je ne peux pas parler précisément des répercussions environnementales du lithium et de la façon dont cela touche les collectivités locales. Ce n’est pas un domaine auquel nous participons activement.

La sénatrice McCallum : Vous y participez parce que vous achetez des batteries au lithium. Vous contribuez indirectement aux dommages environnementaux, surtout dans les communautés des Premières Nations.

Dans quelle mesure les batteries sont-elles disponibles?

M. Espey : Encore une fois, en ce qui concerne les véhicules électriques, je ne peux pas me prononcer sur la disponibilité des batteries. Je dirais que Parkland, en tant qu’entreprise, s’efforce de répondre aux besoins des consommateurs et des clients. Si nos clients se tournent vers les véhicules électriques, nous serons là pour les soutenir.

Le sénateur Massicotte : J’aimerais vous poser quelques questions, monsieur Espey. Cela ne s’adresse pas à votre entreprise, mais vous êtes un participant ou un témoin de grande importance. Vous voyez évidemment ce qui se passe dans l’industrie, et vous êtes une personne intelligente. Vous vous êtes forgé une opinion. Nous sommes confrontés à un dilemme, si vous voulez, où le gouvernement essaie de trouver une façon d’harmoniser les intérêts, mais en ce moment, cela ne fonctionne pas.

Certains producteurs ont dit : « Je me fiche des subventions. Je veux seulement produire du pétrole et du gaz. Je veux simplement le produire au complet. C’est mon travail. » Mais cela ne fonctionne pas. Nous n’atteignons pas les objectifs environnementaux. Nous n’atteignons pas les objectifs de nombreux producteurs. Nous sommes au point mort. Nous parlons d’un plafond sur les prix, et beaucoup de gens n’aiment pas cela. Pour le moment, nous n’allons nulle part. Puisque vous êtes un observateur et que vous connaissez très bien l’industrie, pourriez-vous nous dire ce qui ne va pas et comment nous pouvons corriger la situation?

M. Espey : Comme vous l’avez dit, nous sommes un distributeur, et nous ne fabriquons qu’une très petite partie de nos produits pour notre propre usage. Comme nous ne sommes pas une société pétrolière intégrée, nous ne participons pas aux activités en amont.

En tant que personne qui travaille dans l’industrie de l’énergie et qui est convaincue, à titre d’entrepreneur et personnellement, que le changement climatique pose un sérieux problème et que nous devons changer notre façon de faire, je dirais qu’au Canada, nous avons la chance d’avoir une ressource extraordinaire. À l’extérieur du Canada où nous pouvons contrôler nos comportements et la façon dont nous utilisons l’énergie, il y a un marché mondial que nous avons une excellente occasion de continuer d’approvisionner. Cette industrie contribue grandement à la productivité et à la richesse du pays, et nous donne les moyens d’apporter un bon nombre des changements qui s’imposent, que ce soit dans notre système de soins de santé ou dans la façon dont nous utilisons l’énergie.

Je pense que nous devons laisser l’industrie de l’énergie prospérer afin qu’elle puisse exporter et fournir de l’énergie au marché mondial, mais en même temps, en tant que Canadiens, nous devons démontrer que nous faisons ce qu’il faut pour la protéger. Au bout du compte, la seule chose que nous pouvons contrôler, c’est ce qui se passe à l’intérieur de nos frontières.

Le sénateur Massicotte : Si vous examinez le commerce mondial du pétrole, en fait, les prix ont essentiellement fléchi du côté de la demande et l’Organisation des pays exportateurs de pétrole, ou OPEP, retarde d’autres réductions. Dans cinq ou six ans, il y aura une offre excédentaire et les prix pourraient donc baisser. Comment gérez-vous cela? Si vous étiez le conseiller du ministre de l’Environnement, comment traiteriez-vous ces questions?

M. Espey : Du point de vue de la demande, le prix s’est stabilisé. Je pense qu’il y a là un certain nombre de facteurs. En premier lieu, nous voyons les VE faire une différence. Deuxièmement, nous constatons que l’efficacité énergétique fait une différence, et c’est probablement ce qui contribue le plus à la demande. Le troisième facteur est l’activité économique, particulièrement en Asie — et en Chine plus précisément —, où l’activité économique n’a pas été là pour stimuler une croissance continue de la demande de pétrole.

Encore une fois, il est difficile de déterminer dans quelle mesure chacun de ces facteurs a un impact. Le prix de l’énergie diminuera si l’offre dépasse la demande. Je dirais qu’il y a eu un sous-investissement du côté de l’offre au cours de la dernière décennie, et chaque année, il y a une certaine diminution de l’offre. À l’instar de l’OPEP, d’autres pays veilleront à ce que le marché soit équilibré afin qu’ils puissent investir les capitaux nécessaires pour continuer à approvisionner leurs clients, que ce soit au Canada ou ailleurs dans le monde.

Le sénateur D. M. Wells : Non seulement en tant qu’observateur de l’industrie, mais aussi en tant qu’initié de l’industrie, je reconnais que la plupart des clients de Parkland se trouvent au Canada. Quelles possibilités ou quels défis entrevoyez-vous avec la nouvelle administration américaine?

M. Espey : Nous sommes également une grande entreprise aux États-Unis. La chaîne de valeur, ou la chaîne d’approvisionnement, dans notre secteur est très intérieure, en tout cas au Canada et aux États-Unis. Nous faisons un peu d’import-export de l’autre côté de la frontière, mais ce n’est pas vraiment important pour notre entreprise.

Dans d’autres pays comme les Caraïbes, l’Amérique du Sud et l’Amérique centrale, il n’y a pas d’approvisionnement local ou de fabrication locale, et nous transportons des produits principalement des raffineries américaines vers ces marchés pour approvisionner les collectivités locales.

C’est difficile à dire. D’une part, si la nouvelle administration stimule la croissance économique, nous en verrons les avantages. Il est certain que les droits de douane nuiraient au Canada, au pétrole canadien et à l’activité économique canadienne, ce qui aurait un effet négatif sur nos affaires.

Le sénateur D. M. Wells : Les activités de Parkland se déroulent-elles principalement dans l’Ouest canadien ou sont-elles pancanadiennes?

M. Espey : Nous sommes partout au pays. Comme je l’ai dit dans ma déclaration préliminaire, un Canadien sur cinq visite nos installations tous les jours, et nous sommes très fiers de les desservir dans toutes les régions du pays.

Le sénateur Fridhandler : Merci, monsieur Espey. Nous avons encerclé la question de ce que vous appelez « répondre aux besoins des clients », autrement dit, quand la demande existe, vous y répondez. Mais je me demande si vous pourriez me faire part de certaines préoccupations précises, ou me dire sur quel plan vous auriez besoin d’un plus grand soutien, ou sur quel plan les consommateurs devraient, selon vous, recevoir davantage d’aide du gouvernement pour atteindre l’objectif de la carboneutralité.

M. Espey : Je dirais deux choses.

La première concerne le prix pour les consommateurs. La transition énergétique coûtera de l’argent, et la question est de savoir si cet argent doit venir du consommateur, de l’industrie ou du gouvernement.

Au bout du compte, surtout dans un contexte inflationniste, les consommateurs canadiens ont été poussés à la limite. Nous l’avons constaté dans notre réseau. Nous l’avons constaté dans la demande. Nous l’avons vu dans le montant qu’ils dépensent. La hausse des coûts de l’énergie, qui pourraient augmenter en raison des taxes sur le carbone ou des redevances sur le carbone, exercera une pression supplémentaire sur les consommateurs. L’autre défi, c’est que les véhicules de remplacement, les VE, coûtent cher.

Encore une fois, le rôle que peut jouer le gouvernement consiste à faire en sorte qu’il y ait des subventions ou que le coût de la transition ne soit pas assumé par le consommateur, car au bout du compte, cela fait mal. Les gens qui en souffrent le plus sont ceux qui n’ont pas le revenu disponible dont jouit une partie des Canadiens. Il s’agit de nous assurer d’aider ceux qui n’en ont pas les moyens à avoir accès à une énergie fiable et bon marché afin qu’ils puissent vivre leur vie.

D’un autre côté, en ce qui concerne la production de carburants, le secteur du raffinage s’assure de favoriser une capacité solide de fabrication d’énergies renouvelables dans tout le pays — pas seulement en Alberta — pour faire en sorte, encore une fois, que nous puissions donner aux Canadiens des emplois bien rémunérés dans le secteur, et que nous n’exportions pas ces emplois à l’étranger. C’est là que nous courons un risque, dirais-je, en tout cas à court terme. Nous devenons un importateur de ces produits, ce qui est avantageux pour le Canada parce que nous réduisons nos émissions de carbone, mais cela coûte cher à l’économie et aux travailleurs canadiens.

Le sénateur Fridhandler : Juste une brève question concernant le point de vue de Parkland sur l’énergie nucléaire, et la façon dont elle pourrait s’intégrer dans votre tableau.

M. Espey : Encore une fois, nous ne sommes pas un producteur d’énergie. Je dirais que le nucléaire me semble être une bonne étape de transition, pendant que d’autres technologies potentiellement plus abordables rattrapent leur retard. Cela aiderait certainement à électrifier le réseau de transport là où la demande va augmenter.

La production est l’un des aspects, mais un des autres sénateurs a également posé une question au sujet des réseaux de distribution. De toute évidence, des capitaux doivent être investis pour que nous puissions fournir de l’énergie aux Canadiens afin qu’ils ne subissent aucune perturbation.

Le président : Monsieur Espey, merci beaucoup de vous être joint à nous ce matin. Nous vous en sommes très reconnaissants. De toute évidence, vous êtes très bien informés, et nous avons obtenu de bons renseignements qui nous rendent un peu plus intelligents. Je vous remercie de vous être joints à nous ce matin.

Pour la prochaine partie de la réunion, nous accueillons par vidéoconférence Lisa Baiton, présidente et chef de la direction de l’Association canadienne des producteurs pétroliers. De Cenovus Energy, Jon McKenzie, président et chef de la direction, aussi par vidéoconférence.

Bienvenue et merci d’être parmi nous ce matin. Tôt le matin, surtout pour vous. Vous avez cinq minutes pour faire votre déclaration préliminaire. Vous avez la parole, madame Baiton, et ce sera ensuite au tour de M. McKenzie.

Lisa Baiton, présidente et chef de la direction, Association canadienne des producteurs pétroliers : Merci, monsieur le président, et bonjour, honorables sénateurs. Merci de me donner l’occasion de m’adresser à vous aujourd’hui. Je m’appelle Lisa Baiton et je suis présidente et chef de la direction de l’Association canadienne des producteurs pétroliers, ou ACPP.

L’ACPP représente les sociétés pétrolières et gazières en amont, d’un océan à l’autre. Nos membres produisent près des trois quarts du pétrole et du gaz naturel au Canada et ils exercent leurs activités partout au pays dans les secteurs des sables bitumineux, des ressources classiques et de l’exploitation extracôtière. L’ACPP est un partenaire non partisan, axé sur la recherche et les solutions, qui travaille avec tous les ordres de gouvernement pour assurer la prospérité de l’industrie pétrolière et gazière du Canada, ainsi que celle de l’économie canadienne. Parce que l’économie du Canada repose sur les ressources naturelles, en exploitant ces ressources, nous contribuons à fournir les éléments essentiels de la vie moderne. Mais aujourd’hui, nous ne tirons pas vraiment parti de notre avantage en matière de ressources pour améliorer le niveau de vie des Canadiens. C’est pourquoi l’étude du Sénat sur les avantages de l’industrie canadienne du pétrole et du gaz naturel est extrêmement importante.

Permettez-moi de vous donner plus d’information sur ce que nous voyons. Des sondages menés un peu partout au pays montrent que les Canadiens s’inquiètent de la hausse du coût de l’épicerie et de l’essence pour leur voiture et se demandent s’ils auront un emploi le mois prochain. Ils se demandent s’ils pourront rembourser leur hypothèque ou s’ils auront un jour les moyens d’acheter une maison. Ils se demandent si notre système de soins de santé sera en mesure de les aider au moment où ils en auront le plus besoin.

À l’extérieur du Canada, notre monde est de plus en plus imprévisible. Les conflits violents au Moyen-Orient et la guerre continue de la Russie contre l’Ukraine constituent une menace croissante pour la sécurité mondiale, et modifient les relations commerciales historiques.

À la suite de la récente élection présidentielle américaine, le Canada fait face à des défis considérables. Si l’on fait abstraction du financement de l’OTAN, des frontières et de l’immigration, on s’attend à ce que la nouvelle administration Trump veille à ce que le régime d’imposition des sociétés aux États-Unis et les processus américains de délivrance de permis soient les meilleurs au monde.

En tant que Canadiens, nous devons ouvrir les yeux sur la promesse très réelle du président élu d’imposer des droits de douane universels de 25 %, y compris sur le pétrole et le gaz. L’industrie canadienne des ressources naturelles joue un rôle essentiel dans la résolution des importants problèmes de productivité et de compétitivité du pays, mais seulement si elle est bien soutenue et mise à profit.

Voici comment l’industrie canadienne du pétrole et du gaz contribue à soutenir le niveau de vie des Canadiens aujourd’hui : les revenus que l’industrie a versés aux gouvernements du Canada au cours des deux derniers exercices financiers ont totalisé plus de 75 milliards de dollars, ce qui aide à payer nos médecins, nos infirmières et nos enseignants, ainsi que le soutien aux arts et la prestation des programmes sociaux sur lesquels comptent de nombreux Canadiens.

La chaîne d’approvisionnement de l’industrie s’étend dans tout le pays, touchant des milliers d’entreprises et soutenant directement et indirectement près de 450 000 emplois dans chaque province, d’un océan à l’autre. Si l’on considère les emplois indirects, ce chiffre passe à environ 900 000 emplois au Canada.

Ces emplois sont de grande qualité et bien rémunérés. Le salaire moyen dans le secteur énergétique classique est d’environ 47 $ de plus l’heure que la moyenne nationale. Notre industrie est également l’un des plus importants employeurs d’Autochtones au pays, employant près de 11 000 personnes d’origine autochtone.

De plus, des centaines d’entreprises appartenant à des Autochtones constituent une partie importante de notre chaîne d’approvisionnement. Les investissements en capital que l’industrie pétrolière et gazière a faits au cours des deux dernières années, dans l’ensemble du pays, devraient se chiffrer à environ 40 milliards de dollars par année. Cela s’ajoute à ce que les producteurs canadiens dépensent en coûts d’exploitation, soit environ 70 milliards de dollars par année.

Le secteur du pétrole et du gaz naturel et les secteurs pétroliers connexes, comme le raffinage et les pipelines, représentent ensemble plus de 200 milliards de dollars du produit intérieur brut ou PIB nominal du Canada, et l’industrie pétrolière et gazière représente la majeure partie — ou environ 25 % — des exportations canadiennes, en exportant pour environ 177 milliards de dollars de produits l’an dernier.

Compte tenu des défis importants que le Canada doit relever sur les plans de la productivité et de l’économie, ainsi que des relations bilatérales entre le Canada et les États-Unis, pouvez-vous imaginer où nous en serions sans l’industrie canadienne du pétrole et du gaz naturel?

Je sais qu’il ne me reste probablement plus beaucoup de temps, mais si vous m’accordez encore une minute, je voudrais parler brièvement du bilan de notre industrie en matière de réduction des émissions. Les données de l’inventaire national du gouvernement fédéral montrent que notre industrie a une feuille de route de plusieurs décennies en matière de réduction significative des émissions de gaz à effet de serre.

Tout en atteignant des niveaux de production records, les émissions provenant des sables bitumineux ont plafonné de 2021 à 2022. De 2013 à 2022, les émissions provenant de la production et du traitement du gaz naturel ont diminué de 17 %, tandis que celles provenant de la production de pétrole classique ont diminué de 27 %. Aujourd’hui, la production canadienne de pétrole et de gaz naturel atteint des niveaux records, tandis que les émissions ont plafonné en 2015.

En terminant, permettez-moi de dire que l’industrie canadienne du pétrole et du gaz naturel peut continuer d’être un élément essentiel de la solution aux problèmes de productivité, d’abordabilité et de sécurité au Canada, et que le pétrole et le gaz naturel canadiens seront essentiels à la préservation de notre relation binationale avec les États-Unis.

Si nous tirons pleinement parti de nos ressources énergétiques, nous pourrons créer plus de prospérité pour les Canadiens tout en augmentant l’influence de notre pays sur la scène mondiale.

Je vous remercie de me donner l’occasion de participer à cette importante étude.

Le président : Merci beaucoup. C’était très intéressant.

Monsieur McKenzie, c’est à vous.

Jon McKenzie, président et chef de la direction, Cenovus Energy : Merci beaucoup et bonjour.

Je m’appelle Jon McKenzie et je suis président et chef de la direction de Cenovus Energy.

J’aimerais d’abord souligner que je suis à Calgary, dans le territoire visé par le Traité no 7, où se trouvent également les districts 5 et 6 de la Métis Nation of Alberta. Je reconnais que ces nations sont les gardiennes actuelles et originales des terres.

Monsieur le président, je suis heureux d’avoir l’occasion de m’adresser au comité. Cenovus Energy est une société d’énergie intégrée dont le siège social se trouve à Calgary et qui produit du pétrole et du gaz dans l’Ouest canadien, au large de Terre-Neuve-et-Labrador, et dans la région de l’Asie-Pacifique. Nous avons aussi des activités de valorisation et de raffinage au Canada et aux États-Unis.

Nous sommes un membre fondateur de la Pathways Alliance, et membre de l’Association canadienne des producteurs pétroliers.

Dans votre lettre d’invitation, vous avez soulevé des questions au sujet de notre industrie que je vais aborder. Vous avez posé une question sur la pertinence de l’industrie pétrolière et gazière pour l’économie canadienne. Le secteur pétrolier et gazier contribue à l’économie canadienne dans son ensemble. Nos produits représentent environ le quart des exportations du pays. Sans eux, nous aurions un déficit commercial d’environ 120 milliards de dollars.

Un déficit de cette ampleur se traduirait par une dépréciation du dollar canadien et augmenterait le coût de tous les biens importés, notamment les fruits et légumes frais, les vêtements, les matériaux de construction, l’électronique et presque tout ce dont nous dépendons dans notre vie quotidienne.

Nous sommes un employeur important qui fournit environ 450 000 emplois directs et indirects dans l’ensemble du pays, et nous sommes fiers qu’un grand nombre d’entre eux soient pour les Canadiens autochtones.

Cenovus et l’industrie pétrolière et gazière paient des milliards de dollars chaque année en redevances et en impôts. En général, environ la moitié de ce que nous gagnons va aux gouvernements. Au cours des deux dernières années seulement, cela a totalisé plus de 76 milliards de dollars. Notre contribution annuelle équivaut à peu près au budget total du ministère de la Défense nationale, ou à la moitié de la masse salariale totale du gouvernement fédéral.

Vous vouliez connaître notre bilan en matière de réduction de notre empreinte carbone, ainsi que la façon dont nous prévoyons faire la transition vers un avenir plus durable. Au cours des 20 dernières années, les producteurs de sables bitumineux de l’Alberta ont réduit d’environ 23 % l’intensité en carbone, ou la quantité de carbone émise par baril. Nous continuons de réduire les émissions, et nous avons fondé la Pathways Alliance pour innover davantage, en collaboration, dans l’industrie des sables bitumineux.

Vous avez posé une question sur la réaction de l’industrie au risque et aux tendances mondiales, ainsi que sur notre positionnement par rapport à la concurrence internationale. Alors que le monde s’efforce de se tourner vers un avenir à faibles émissions de carbone, les gens continueront d’avoir besoin d’une combinaison fiable et abondante d’énergie abordable. Les hydrocarbures représentent environ 80 % de l’approvisionnement mondial en énergie depuis quelques décennies et continueront d’alimenter la croissance économique mondiale, notre qualité de vie et notre niveau de vie pendant de nombreuses années.

Tous les organismes de prévisions crédibles prévoient que la demande mondiale de pétrole et de gaz se poursuivra bien au‑delà de 2050. Nous croyons fermement que le monde aura besoin de toutes les formes d’énergie en quantités croissantes à l’avenir. La croissance et la diversification de notre offre d’énergie comprendront une demande continue de pétrole et de gaz canadiens produits de façon responsable dans un avenir prévisible.

C’est pourquoi nous devons maintenir la compétitivité de l’industrie pétrolière et gazière canadienne. Si nous créons un environnement politique qui nuit à la production, la demande mondiale ne disparaîtra pas. Elle ne fera que pousser les acheteurs vers d’autres fournisseurs, dont la majorité se trouve dans des pays qui n’ont pas les mêmes normes environnementales ni les mêmes droits de la personne.

Le plafond d’émissions proposé menace de réduire la production de pétrole et de gaz naturel et de restreindre nos exportations, surtout s’il s’accompagne d’une taxe sur le carbone de plus en plus rigoureuse dans l’industrie, à des cibles ambitieuses de réduction du méthane, et à de longs processus d’approbation réglementaire pour les grands projets énergétiques.

J’aimerais également prendre un moment pour souligner un élément essentiel de notre industrie qui, selon nous, doit être maintenu, à savoir le libre marché continental. Cenovus se trouve dans une position unique, car elle dispose, en amont, d’une entreprise solide produisant du pétrole et du gaz naturel au Canada, qui est directement liée à une entreprise de raffinage, en aval, aux États-Unis. Toute barrière commerciale qui pourrait être imposée à cette libre circulation des échanges pourrait avoir de graves répercussions négatives des deux côtés de nos frontières. Une réduction des exportations entraînera inévitablement une diminution des revenus pour l’industrie et les gouvernements, et elle fera également augmenter le prix que paient les Américains pour des produits finis comme l’essence, le diésel, le carburant d’aviation et l’asphalte, dont Cenovus est l’un des principaux producteurs.

En résumé, le Canada fournit près de 5 % de la production mondiale de pétrole. À lui seul, Cenovus en fournit près de 1 %. Cela permet à notre industrie de contribuer, dans une très large mesure, à la prospérité du pays.

Nous faisons face à des pressions extraordinaires pour demeurer concurrentiels, et nous sommes prêts à relever le défi. Nous espérons que le gouvernement non seulement le reconnaîtra, mais qu’il nous aidera à le relever au nom de tous les Canadiens.

Sur ce, monsieur le président, je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.

Le président : Nous allons passer aux questions. Étant donné que nous n’avons pas été présentés à nos témoins, chers collègues, lorsque vous parlez, mentionnez votre nom et d’où vous venez. Merci.

[Français]

La sénatrice Verner : Josée Verner, du Québec. Merci d’être avec nous ce matin.

Le cinquième objectif de notre étude consiste à voir de quelle manière votre industrie peut affronter ses concurrents étrangers qui, eux, bénéficient d’une fiscalité et de niveaux de subvention qui sont différents. Nous avons entendu différentes opinions sur la pertinence d’avoir des subventions pour appuyer votre industrie, vous aider à réduire les émissions de carbone et maintenir notre compétitivité. Avez-vous des données récentes sur le montant des subventions fédérales qui vous sont octroyées?

[Traduction]

Madame Baiton : Jon McKenzie est le mieux placé pour répondre aux questions sur les subventions.

Monsieur McKenzie : Oui, d’accord.

Cette question m’a souvent été posée et je n’ai jamais vraiment compris à quelles subventions fédérales exactement on faisait référence. Les 10 principaux producteurs mondiaux de pétrole — le Canada est au quatrième rang — produisent du pétrole et du gaz mondialement et le font très bien. Le Canada est le seul pays de cette liste qui impose une taxe sur le carbone, et il est le seul pays à envisager un plafonnement des émissions de carbone. Cela représente des taxes et des coûts qu’aucun de nos concurrents n’a à assumer.

Donc, lorsqu’on parle de subventions, je ne sais pas exactement à quoi l’on fait référence ni ce qu’on inclut dans la catégorie générale de « subventions ». Ce que je peux affirmer, c’est que nous versons un montant important d’impôts et de redevances aux gouvernements fédéral et provinciaux, ainsi qu’aux administrations locales où nous faisons des affaires.

Je n’ai jamais réussi à déterminer de façon précise ce à quoi les gens font référence quand ils parlent de subventions pour l’industrie pétrolière et gazière.

[Français]

La sénatrice Verner : L’année dernière, le gouvernement a annoncé qu’il entamerait un processus visant à éliminer les subventions dites « inefficaces » en 2025. Avez-vous été consultés au sujet de ce processus que le gouvernement veut mettre en place? Le cas échéant, quelle est votre position sur cette initiative?

Je comprends qu’actuellement, ce n’est pas clair dans votre esprit ce que constitue une subvention; j’imagine qu’une subvention dite « inefficace », ce n’est probablement pas très clair non plus pour vous.

Je me demandais si vous aviez été consultés sur cette initiative.

[Traduction]

Monsieur McKenzie : À ma connaissance, il n’y a eu aucune consultation avec le gouvernement fédéral au sujet de l’élimination des subventions inefficaces.

Le sénateur D. M. Wells : Merci, madame Baiton et monsieur McKenzie, de comparaître aujourd’hui. Je tiens en particulier à remercier M. McKenzie. Nous avons eu un peu de mal à faire comparaître la haute direction des grandes sociétés pétrolières et gazières. Nous avons bien reçu des mémoires écrits, mais il est rare qu’un dirigeant comparaisse directement devant nous et nous en sommes ravis.

Monsieur McKenzie, vous avez mentionné le plafond des émissions de carbone et le long processus d’approbation dans le contexte d’un libre marché continental robuste. Quelles sont les deux ou trois politiques ou mesures réglementaires que vous aimeriez voir adopter pour permettre à Cenovus, et peut-être à l’industrie en général, de prospérer et d’être concurrentiel sur le marché mondial des produits de base, tout en fournissant du carburant à faible coût aux Canadiens?

Monsieur McKenzie : Notre position à ce sujet est claire. Nous sommes d’avis que l’énergie produite au Canada est l’une des sources d’énergie les plus responsables au monde, dans la mesure où nos règlements sont parmi les plus stricts en ce qui concerne le torchage, les émissions de carbone, l’utilisation des terres, de l’eau et ainsi de suite.

Nous croyons que certains d’entre eux sont appropriés, mais il faut aussi reconnaître que nous sommes un producteur mondial important et que nos activités contribuent au niveau de vie et à la qualité de vie au pays. Un fardeau réglementaire accru et de plus en plus complexe ne sert qu’à faire fuir les investissements dans cette industrie, au détriment de l’économie canadienne.

Pour assurer notre compétitivité, nous demandons simplement aux décideurs fédéraux d’examiner l’ensemble de l’industrie au sein de laquelle nous devons livrer concurrence et de voir à ce que nous puissions être concurrentiels. Nous avons clairement affirmé que nous devons faire partie de la solution en ce qui a trait aux préoccupations environnementales, et nous ferons notre part, mais il faut garder à l’esprit l’industrie au sein de laquelle nous avons à défendre notre place.

Le sénateur D. M. Wells : Merci beaucoup.

Madame Baiton, selon vous, qu’est-ce qui serait utile pour réduire le long processus d’approbation, qui constitue parfois une entrave pour l’industrie, particulièrement au moment de l’analyse de rentabilité? Quel genre d’améliorations souhaitez-vous voir quant au processus d’approbation des grands projets?

Madame Baiton : Si vous me le permettez, j’aimerais ajouter quelque chose aux observations de M. McKenzie au sujet du plafond d’émissions. C’est une mauvaise politique au mauvais moment, surtout au regard de la croissance de la demande mondiale de pétrole et de gaz et des défis posés par nos relations binationales avec les États-Unis, notre plus important partenaire commercial. Les Canadiens doivent se dessiller les yeux et croire la promesse très ferme du président élu d’imposer des droits de douane transfrontaliers de 25 %. Le plafond des émissions s’ajoute inutilement à un ensemble déjà complexe de règlements sur l’énergie et le climat partout au pays. L’introduction de ce projet de règlement s’accompagnera, c’est hautement probable, de répercussions négatives sur l’économie canadienne et d’interruptions de production, sans pour autant garantir la réduction des émissions.

Avant de passer aux grands projets dont il est question dans votre question, je recommanderais simplement au comité sénatorial d’examiner le document que Peter Tertzakian a publié dans The Hub le mois dernier. M. Tertzakian est l’un des chefs de file en matière d’énergie et de politique énergétique, et il a mené un examen réfléchi et détaillé, où il cite les raisons pour lesquelles l’ajout d’un plafond d’émissions à la complexité actuelle en matière de politiques et de règlements sur le carbone du Canada découragera les investissements dans notre industrie pétrolière et gazière.

En ce qui concerne votre question sur l’accès aux marchés, nous approuvons la récente contestation constitutionnelle de la Loi sur l’évaluation d’impact par le gouvernement de l’Alberta. Nous sommes intervenus dans le différend juridique précédent, et sommes d’accord avec la décision de 2023 de la Cour suprême du Canada selon laquelle les provinces sont les mieux placées pour analyser et réglementer l’exploitation des ressources à l’intérieur de leurs propres frontières, et qu’il faut un fédéralisme plus coopératif pour que les projets d’intérêt national soient mis en œuvre en temps opportun.

Les récentes modifications apportées à la suite du jugement de la Cour suprême de l’an dernier ne vont pas assez loin pour régler certains des principaux problèmes. Le Canada doit vraiment modifier sa position à l’égard des grands projets. La forme actuelle de la Loi sur l’évaluation d’impact constitue, encore une fois, un obstacle majeur pour attirer des investissements au pays. Nous devrions nous inspirer de la décision de la Cour suprême du Canada, qui exhorte les gouvernements à adopter une approche fédéraliste de coopération. Nous conseillons vivement au gouvernement de mettre en place un processus concurrentiel, rapide et axé sur un seul projet et une seule évaluation à la fois. À plus forte raison, comme je l’ai mentionné dans ma déclaration préliminaire, vu le projet des États-Unis de modifier leur structure fiscale et leurs processus de délivrance de permis pour les grands projets, afin de devenir les meilleurs au monde.

Il est temps de construire, et plus vite nous corrigerons le processus d’examen et d’approbation, plus tôt nous pourrons réaliser les projets d’intérêt national et les grands projets énergétiques d’exportation et de décarbonation dont le Canada a besoin.

Le sénateur D. M. Wells : Merci beaucoup.

[Français]

La sénatrice Miville-Dechêne : Julie Miville-Dechêne, du Québec. Je vais poser ma question en français, puisque vous avez la traduction.

La présente étude porte sur les changements climatiques et l’industrie du pétrole et du gaz. Or, dans vos déclarations préliminaires, vous avez parlé d’émissions qui n’augmentent pas, alors que vos émissions de CO² issues de l’industrie constituent 31 % des émissions nationales du Canada, ce qui fait que vous êtes le plus gros pollueur, le plus gros émetteur de CO².

Cela dit, il faut penser non seulement à ne pas augmenter les émissions, mais à les diminuer. À ce sujet, j’aimerais savoir où vous en êtes dans les efforts de capture du carbone. Lors de nos dernières séances, j’ai essayé d’avoir une idée claire pour savoir où en était l’industrie pétrolière sur la capture de carbone. Je n’ai toujours pas reçu les informations du gouvernement à cet effet.

Cependant, il semblerait qu’il y ait une seule compagnie pétrolière, Shell, qui ait signé un contrat pour une raffinerie qui est liée au processus d’extraction des sables bitumineux, mais qui n’est pas exactement de l’extraction. Dans toute l’industrie, il y aurait une seule compagnie qui serait rendue là. Or, pour atteindre le plafond et continuer, comme vous le faites, à vendre plus de pétrole, il faudra diminuer les émissions, car autrement, c’est notre planète, qui va déjà mal, qui va continuer d’aller mal.

J’aimerais savoir quelle est la solution que vous proposez. Je comprends que vous n’aimez pas la réglementation, mais il me semble que, à tout le moins, la captation du carbone devrait commencer à se faire de manière plus répandue. Même si ce n’est pas très profitable, vous faites tout de même des profits. Y a-t-il moyen de diminuer votre marge de profit et d’augmenter le nombre d’installations de capture de carbone?

Le président : À qui s’adresse votre question?

La sénatrice Miville-Dechêne : D’abord à Mme Baiton, la représentante de l’Association canadienne des producteurs pétroliers, qui connaît l’industrie dans son ensemble, mais M. McKenzie voudra peut-être y répondre aussi.

[Traduction]

Madame Baiton : Je vous remercie de cette question. Je vais parler un peu du bilan en matière de réduction des émissions, et je pense que M. McKenzie est mieux placé pour répondre à votre question sur le captage du carbone.

Permettez-moi de commencer par dire que, depuis plus d’une décennie, les producteurs canadiens de pétrole et de gaz naturel investissent dans des technologies visant à réduire les émissions et les mettent en œuvre avec des résultats concrets et significatifs.

Je vais citer les données du gouvernement fédéral, celles de l’Alberta, celles de Terre-Neuve et celles de Statistique Canada.

Selon la base de données collectées au niveau national du gouvernement fédéral, les émissions provenant de la production de pétrole et de gaz naturel ont atteint un sommet en 2015. Au cours de la dernière décennie, de 2013 à 2022, la production totale du secteur conventionnel a augmenté de 20 %, tandis que les émissions d’équivalent dioxyde de carbone diminuaient de 27 % et les émissions de méthane de 30 %. Le secteur conventionnel en amont est en bonne voie d’atteindre l’objectif actuel du gouvernement fédéral, qui est de réduire les émissions de méthane de 40 à 45 % d’ici 2025. Il s’agit là de données tirées de la base de données collectées au niveau national du gouvernement fédéral.

[Français]

La sénatrice Miville-Dechêne : Étant donné que vous produisez davantage, vous continuez à polluer. Donc, votre production augmente et vos émissions ne baissent pas du tout.

[Traduction]

Madame Baiton : En fait, ce n’est pas exact. Nous avons prouvé — et les propres données du gouvernement fédéral le confirment — que nous sommes en mesure d’accroître la production tout en réduisant considérablement les émissions de GES et de méthane.

Permettez-moi maintenant de passer aux données du gouvernement de l’Alberta. On vient d’y annoncer que les émissions de méthane provenant de la production de pétrole et de gaz naturel ont été réduites de 52 % depuis 2014, ce qui dépasse l’objectif établi de 45 %, et ce, bien avant l’échéance de 2025. Si l’on se tourne maintenant vers les données du gouvernement de Terre-Neuve, l’industrie extracôtière du Canada produit un pétrole dont les émissions sont parmi les plus faibles au monde.

Les plus grandes sociétés d’exploitation des sables bitumineux ont uni leurs forces à celles de la Pathways Alliance pour investir dans la plus importante installation de captage et de stockage du carbone, et M. McKenzie vous en parlera dans un instant. Les données de Statistique Canada indiquent que le secteur du pétrole et du gaz naturel dépense, en amont, plus que toute autre industrie au Canada pour la protection de l’environnement, soit 3,2 milliards de dollars en 2021, ce qui représente un tiers de toutes les dépenses de protection de l’environnement effectuées par les entreprises partout au Canada. Cela comprend l’assainissement des sols, la gestion de l’eau ainsi que la protection de la biodiversité et des habitats, entre autres dépenses.

Loin d’être à la traîne, l’industrie canadienne du pétrole et du gaz naturel, ainsi que le prouvent ces statistiques des divers gouvernements, devrait être reconnue pour son leadership et son potentiel à aider les autres pays du monde à réduire leurs émissions. Créer un cadre favorisant la croissance en encourageant les investissements à grande échelle dans la réduction des émissions tout en augmentant la capacité du Canada à exporter son énergie à faibles émissions permettra au pays de jouer un rôle capital dans la course à la réduction des émissions mondiales.

Je vais céder la parole à M. McKenzie.

Monsieur McKenzie : Merci. Je tiens d’abord à reconnaître que notre industrie est vraisemblablement la plus grande émettrice de CO2au pays. À ce titre, elle rivalise avec le transport. Si nous sommes les plus grands émetteurs, c’est en raison de l’ampleur de notre industrie. Nous exportons la presque totalité de ce que nous produisons. Nous produisons environ 5 millions de barils par jour, dont 4 à 4,5 millions sont destinés à l’exportation. C’est donc l’ampleur même de l’industrie qui détermine son profil d’émissions.

Je suis d’accord avec Mme Baiton pour dire que nous avons fait des progrès importants dans la réduction de nos émissions. Si l’on examine son bilan en matière de méthane, d’intensité des émissions et de réductions globales, l’industrie a fait ce qu’elle pouvait faire et continue de le faire, compte tenu de son profil.

En ce qui concerne le captage et la séquestration du carbone, nous avons deux projets en cours en Alberta. Le projet Shell, que vous avez mentionné, en fait partie. J’aimerais souligner, en ce qui concerne le captage et la séquestration du carbone, que notre industrie est venue vers le gouvernement et a reconnu qu’elle pouvait faire partie de la solution en atteignant ses objectifs climatiques.

Nous avons saisi cette occasion unique, car aucun d’entre nous ne pouvait seul atteindre les cibles, mais collectivement, l’industrie des sables bitumineux pouvait faire des progrès importants. C’est ce qui a permis la création de la Pathways Alliance, où les six plus grandes sociétés d’exploitation des sables bitumineux se sont réunies — responsables d’environ 95 % de la production des sables bitumineux — et ont laissé entendre que notre géographie et notre géologie favorisaient le captage et la séquestration du carbone à grande échelle. Cet investissement ou cette dépense représente des dizaines de milliards de dollars qu’aucun pays, aucune entreprise, ni aucune industrie ne peut assumer seuls tout en demeurant concurrentiel. Ce que nous avons proposé, c’est un partenariat avec les gouvernements fédéral et provincial, auquel nous participerions financièrement, pour construire un réseau de captage du carbone à grande échelle qui s’étendrait de Fort McMurray jusqu’à Lloydminster.

Je pense qu’il y a eu un...

La sénatrice Miville-Dechêne : Quel pourcentage du coût global du projet proposez-vous de payer?

Monsieur McKenzie : Oui, notre industrie a proposé un taux d’environ 25 %, auquel s’ajouterait une partie importante des coûts de fonctionnement. Nous avons demandé des crédits d’impôt à l’investissement et une certaine assurance quant aux coûts de fonctionnement. Il est certain que nous paierons un pourcentage proportionnel.

Nous continuons de collaborer avec les gouvernements fédéral et provincial pour faire avancer ce dossier. À ce jour, nous avons consacré beaucoup d’argent à la concrétisation de ce projet, comme regroupement de l’industrie et au nom de Cenovus Energy. Nous croyons que cela demeure une occasion considérable pour le Canada.

Je tiens à souligner que nous sommes les seuls à le faire. Nous sommes le seul pays qui soit un grand producteur de pétrole à proposer un projet de captage et de séquestration du carbone de cette ampleur pour décarboniser sa production.

La sénatrice Miville-Dechêne : En guise de sous-question, pourquoi le gouvernement devrait-il accorder plus de subventions ou des exemptions fiscales à l’industrie, alors même que ses ventes augmentent et qu’elle fait plus de profits? C’est une proposition que les Canadiens trouveront difficile à comprendre.

Monsieur McKenzie : Oui, vous avez probablement raison. Ce que je répondrais à cela — et je l’ai mentionné dans ma déclaration préliminaire —, c’est qu’environ la moitié des profits que nous réalisons sont remboursés aux différents ordres de gouvernement, sous forme d’impôts ou de redevances. Lorsque l’industrie améliore sa performance, les Canadiens et les différents ordres de gouvernement s’en trouvent également avantagés.

J’aimerais également faire valoir qu’il s’agit d’une industrie très cyclique. Bien que nous ayons enregistré de meilleurs profits pendant trois ou quatre ans, de 2021 à 2024, la période de 2015 à 2021 a été caractérisée par des fluctuations généralement négatives du cours des produits de base.

Nos profits servent à payer un certain nombre de choses. Premièrement, nous payons des impôts sur nos profits. Deuxièmement, nous assurons la viabilité de nos entreprises en remboursant la dette sur notre bilan. Troisièmement, nous investissons dans notre entreprise à même ces profits. Chez Cenovus, nous investissons environ 5 milliards de dollars par année. Enfin, nous devons payer nos actionnaires. Personne n’investirait dans une entreprise qui ne génère pas de rendement pour ses actionnaires.

Nos profits sont sollicités de diverses façons, dont celle-ci. Je pense que nous avons dit clairement que nous pouvons en payer une partie, mais nous avons également besoin de l’aide des gouvernements fédéral et provinciaux pour le concrétiser, en raison de l’ampleur du projet.

Le sénateur Arnot : Merci à nos témoins. J’ai deux questions, et j’aimerais que les deux témoins y répondent. Je viens de la Saskatchewan, une province productrice de pétrole.

Madame Baiton : Je viens moi aussi de la Saskatchewan.

Le sénateur Arnot : Nous sommes tous dans le même bateau. J’ai une question à laquelle j’aimerais que les deux témoins répondent, si possible.

Madame Baiton, vous avez parlé de fédéralisme coopératif. Je l’interprète comme une façon de favoriser la collaboration, le compromis et les solutions constructives dans l’intérêt de tous les Canadiens de la meilleure façon possible.

Croyez-vous que les conflits publics entre la province de l’Alberta, la province de la Saskatchewan et le gouvernement fédéral créent une incertitude sur le marché et constituent vraiment un obstacle à l’investissement? Est-ce un problème important actuellement dans votre industrie?

Deuxièmement, en ce qui concerne le captage et la séquestration du carbone, je me demande si l’ACPP croit que ces stratégies sont suffisamment bien établies pour avoir un effet décisif sur la prochaine génération. Je reconnais que Cenovus a une politique très dynamique qui vise à réduire ses émissions de 3 % d’ici 2035. J’aimerais que vous commentiez ces deux questions, s’il vous plaît.

Madame Baiton : Eh bien, je vais tenter de répondre à votre question sur le fédéralisme coopératif, et peut-être que M. McKenzie est mieux placé pour répondre à votre question sur la capture du carbone, si cela vous convient.

En ce qui concerne votre question sur le fédéralisme coopératif et certaines des mesures prises par les gouvernements provinciaux, je crois que vous avez cité l’Alberta et la Saskatchewan. J’ai parlé de la Loi sur l’évaluation d’impact et de la cause du gouvernement de l’Alberta devant la Cour suprême du Canada. Nous sommes intervenus dans cette cause. C’était une poursuite très importante pour le gouvernement de l’Alberta. Notre industrie était très heureuse d’intervenir dans cette cause, car, comme je l’ai dit dans ma déclaration préliminaire, l’industrie pétrolière et gazière canadienne est absolument essentielle pour l’économie canadienne. Le quart, ou 25 %, de tout ce que nous exportons provient du pétrole et du gaz naturel canadiens. Avec l’arrivée d’un nouveau président élu, ils seront essentiels tant à notre puissance douce qu’à notre puissance dure sur la scène mondiale.

La Loi sur l’évaluation d’impact, la décision de la Cour suprême du Canada et le jugement final émis par la Cour suprême ont vraiment mis en évidence le fait que les poursuites intentées par les provinces étaient importantes et je crois qu’elles améliorent la situation au Canada.

L’Alberta a récemment lancé une autre initiative la semaine dernière sur des questions comme le plafond d’émissions. Comme je l’ai dit publiquement, l’ACPP apprécie vraiment le soutien continu que les gouvernements de l’Alberta, de la Colombie-Britannique et de Terre-Neuve apportent à l’industrie pétrolière et gazière. L’initiative la plus récente de l’Alberta contre l’imposition d’un plafond d’émissions est importante parce qu’il menace de réduire la production de pétrole et de gaz naturel au Canada et qu’il limitera le commerce transfrontalier de nos produits à hauteur de 25 % de toutes nos exportations.

De façon générale, nous avons besoin d’un fédéralisme coopératif qui tienne compte non seulement de la voix des provinces, mais aussi de celle des industries comme la nôtre. Notre industrie apporte l’une des plus importantes contributions au PIB. Au début de mon intervention, j’ai cité des chiffres sur les emplois indirects, directs et induits. À elle seule, mon industrie est responsable de 900 000 emplois dans chaque province d’un océan à l’autre.

Je pense qu’il faut être beaucoup plus inclusif, non seulement envers les provinces, mais aussi envers les industries importantes comme la nôtre, qui sont essentielles non seulement pour l’économie canadienne, mais aussi pour assurer aux Canadiens des emplois de qualité bien rémunérés. Nous soutenons, avec ces 25 % de toutes nos exportations, une part vraiment significative du niveau de vie des Canadiens.

Le sénateur Arnot : Monsieur McKenzie, j’aimerais que vous répondiez à la même question que j’ai posée à Mme Baiton.

Estimez-vous que l’industrie pétrolière et gazière n’est pas suffisamment entendue ou qu’elle a assez d’influence sur les politiques du gouvernement fédéral au Canada? Est-ce un gros obstacle pour votre industrie? Êtes-vous d’accord avec cela?

Monsieur McKenzie : Globalement, je suis d’accord. Au regard de la demande croissante de pétrole et de gaz à l’échelle mondiale et au regard du fait que nous détenons au Canada la troisième ou la quatrième réserve de pétrole et de gaz en importance dans le monde, nous devons nous demander si nous en tirons la pleine valeur et dans quelle mesure la superposition des paliers national et provincial affecte le développement de cette industrie.

L’un des aspects que nous examinons est, à titre d’exemple concret, notre capacité à construire des pipelines au pays. Ce qui nous empêche de faire croître cette industrie et de fournir une plus grande part de l’approvisionnement mondial, c’est notre capacité à construire des pipelines. C’est le point de convergence de la politique fédérale-provinciale.

Vous devez savoir qu’au cours de la dernière décennie, nous avons annulé l’oléoduc Énergie Est, le pipeline Northern Gateway et le pipeline Keystone XL. Il est vrai que, dans le cas du pipeline Keystone XL, il s’agissait surtout d’un enjeu américain et pas nécessairement canadien. Ces pipelines auraient permis à notre pétrole et à notre gaz d’atteindre les marchés mondiaux au large de la côte Ouest, de la côte Est et des États-Unis. L’une des questions que nous devons nous poser, comme Canadiens, est la suivante : qu’avons-nous obtenu pour l’annulation de ces projets de pipelines? Quels ont été les avantages pour le Canada? Il est évident que le Canada a essuyé des pertes économiques et que les États-Unis en ont tiré un avantage économique. La presque totalité de la croissance dans le domaine du pétrole et du gaz à l’échelle mondiale a été comblée par les États-Unis au cours des dernières années, en partie parce que nous avons un pays qui défend ce profil de croissance.

Le sénateur Arnot : Êtes-vous d’accord pour dire que ce genre d’inconstance ou de non-coopération entre les provinces, les territoires et le gouvernement fédéral crée une incertitude délétère et constitue un véritable obstacle à la qualité des investissements qui devraient être faits dans l’industrie pétrolière et gazière au Canada?

Monsieur McKenzie : Oui. Je pense que si l’on regarde le montant des investissements étrangers qui ont été consentis à notre industrie au cours d’un certain nombre d’années, on voit qu’il diminue. Le nombre d’entreprises pétrolières et gazières étrangères qui investissent au Canada est en baisse. Ce qui nous reste, en réalité, c’est une industrie canadienne, les grandes pétrolières et gazières canadiennes et les entreprises indépendantes. Les autres sociétés étrangères ont habituellement d’autres options et peuvent investir à l’extérieur du Canada. Elles examinent les rendements, et les rendements ne sont vraisemblablement pas aussi concurrentiels au Canada qu’ailleurs.

Le sénateur Arnot : Vous avez parlé plus tôt, en réponse à d’autres questions, monsieur McKenzie, du captage et de la séquestration du carbone. Je sais que votre industrie et votre société participent à ce projet. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur les stratégies précises que vous utilisez ou sur l’avantage que l’industrie aurait à explorer le captage et la séquestration du carbone?

Monsieur McKenzie : Notre entreprise et notre industrie se préoccupent de leur contribution à la réduction des émissions de carbone. Le captage et la séquestration du carbone constituent une occasion exceptionnelle, que notre géographie et notre géologie rendent possible.

Prenons l’industrie des sables bitumineux : un certain nombre d’installations se trouvent toutes dans une zone géographique très circonscrite, et les émissions de CO2 proviennent de sources élevées qui sont beaucoup plus propices à la capture. Dans le même ordre d’idées, nous bénéficions d’une géologie avec suffisamment d’espace souterrain pour enfouir le CO2 et le maintenir séquestré pendant une longue période. Le fait que l’empreinte géographique de l’industrie soit aussi circonscrite qu’elle l’est, tout comme sa géologie sous-jacente, nous procure une occasion unique, celle de réaliser ce qu’aucun autre pays producteur de pétrole ne peut réaliser.

Le problème, c’est que tout cela ne se réalise pas à coût nul. Les coûts doivent être assumés équitablement par les différents paliers de gouvernement et par l’industrie.

Le sénateur Arnot : Merci beaucoup de ces réponses. Cela a été très utile.

Le sénateur Fridhandler : Bonjour, je m’appelle Daryl Fridhandler. Je viens de Calgary, en Alberta. J’aimerais faire une observation et peut-être obtenir la réaction de nos deux témoins sur la question des mesures incitatives, qui a été soulevée plus tôt dans notre discussion.

Depuis ma récente arrivée à Ottawa, j’entends que l’on conteste les incitatifs reçus par l’industrie sans que l’on en considère également les avantages. Nous devons bien comprendre tout cela. On nous a parlé d’impôts payés, de redevances payées et de création d’emplois, mais du point de vue de l’industrie, il faut mieux comprendre dans leur globalité les subventions et les crédits d’impôt et voir leurs retombées.

Le lien est parfois difficile à établir, mais pouvez-vous nous donner votre opinion? Est-ce que je dois m’en remettre aux fonctionnaires fédéraux pour obtenir un portrait de la situation, ou l’industrie en a-t-elle déjà brossé un tableau complet?

Monsieur McKenzie : Notre industrie produit un rapport annuel sur ses prévisions budgétaires dans lequel elle soumet à RNCan le montant exact des paiements versés à tous les ordres de gouvernement, aux Premières Nations et ainsi de suite. Nous le faisons sur une base annuelle. Cela figure sur nos sites Web, et cette information est accessible au public.

Bien honnêtement, j’ignore à quoi on fait référence quand on parle d’incitatifs pour le secteur pétrolier et gazier. Si l’on parle de crédits d’impôt à l’investissement... [Difficultés techniques]

Le président : Nous avons un problème de son.

Monsieur McKenzie : En ce qui concerne les subventions, je ne suis au courant d’aucune subvention particulière à l’industrie pétrolière et gazière. Il est souvent question de crédits d’impôt à l’investissement pour le captage et la séquestration du carbone, qui sont offerts à n’importe quelle industrie au Canada. L’amortissement fiscal accéléré est offert à n’importe quelle industrie au Canada. Les paiements de la PCU, qui faisaient partie du soutien lié à la COVID-19, étaient offerts à tout secteur d’activité au Canada. Je n’ai encore jamais vu de rapport qui détaille les subventions en question. Je ne suis au courant d’aucune subvention. Je suis dans le domaine des finances au sein de l’industrie pétrolière et gazière depuis 30 ans, et je n’ai vu aucune forme de subvention ou de soutien venant d’un ordre de gouvernement de l’ampleur dont on parle.

Le sénateur Fridhandler : Passons maintenant au règlement sur les plafonds d’émissions annoncé récemment. J’en ai parlé brièvement et il est relativement complexe. Dans la formule proposée, a) représente les émissions, et b) représente le captage du carbone en général en fonction de l’installation — c’est une définition large — responsable de ces émissions.

Cela permet d’inclure le captage, l’utilisation et le stockage du carbone, ou CUSC, et d’autres méthodes de réduction et d’utilisation dans la liste des émissions. Je reconnais que toute réglementation coûte cher, mais je pense qu’il y a certainement une façon de se prévaloir des mesures du point b) de cette formule, y compris une façon de se prévaloir du CUSC et peut-être d’autres méthodes de réduction ou d’utilisation du carbone émis par vos installations. Êtes-vous en mesure de nous dire comment vous comptez vous prévaloir des mesures du point b) dans cette formule?

Monsieur McKenzie : Excusez-moi, pour que ce soit bien clair, le b) représente les crédits de carbone.

Le sénateur Fridhandler : La lettre b) de la formule correspond à la quantité de CO2 injectée dans un site géologique ou dans un réservoir ou stockée à d’autres fins. Le calcul des émissions n’est pas établi en fonction des émissions brutes : il y a un crédit pour l’aspect capture. Tous ces éléments sont étroitement liés. Qui veut ajouter une couche de complexité? Je vous entends. Je vois bien que l’industrie s’insurge contre le règlement sur les plafonds d’émissions. Mais il pourrait y avoir un crédit de type « un pour un » pour le CUSC ou d’autres méthodes de réduction, de captage et d’utilisation du carbone. On pourrait intégrer un super crédit accéléré à cette formule pour encourager certains types d’activités... Je pense qu’il y a des façons constructives de régler ce problème et d’atteindre l’objectif fixé par le gouvernement — l’industrie cherche peut-être elle aussi à réduire ses émissions.

Monsieur McKenzie : Monsieur le sénateur, je crois qu’au fond, vous faites allusion aux coûts associés à la capture du carbone. Dans le cas qui nous occupe, il s’agit de captage et de séquestration du carbone, et le « U » ne fait pas partie de l’équation, en ce sens que les crédits d’impôt à l’investissement, les CII, ne sont offerts que pour le captage du carbone.

Je pense que la question que vous posez est la suivante : à quelle contrepartie sur le marché du carbone un crédit donne-t-il droit et comment tirer de la valeur de ce crédit? C’est un domaine qui suscite nombre de débats et de discussions. Il faut générer un nombre de crédits bien supérieur à ce que prévoit tout marché du carbone en place actuellement. Je pense que l’une des principales questions que nous avons est de savoir comment garantir que ce marché du carbone génère de la valeur, de sorte que des acheteurs s’y intéressent.

Si nous nous dirigeons vers un monde où l’on séquestre de 30 à 75 mégatonnes, ce marché réduira en poussière tout ce qui se fait aujourd’hui. Pour l’industrie, il faut un marché solide qui garantisse la valeur des crédits générés, afin qu’elle soit incitée à y participer.

Le président : Il nous reste huit minutes. Des questions courtes et des réponses encore plus courtes, si vous le pouvez.

La sénatrice McCallum : Je suis la sénatrice McCallum, du Manitoba. Je voulais parler de l’amélioration du niveau de vie et du fait qu’elle entraîne des coûts pour la société. Je songe à l’empreinte environnementale sur la vie et les terres des Premières Nations. Dans le livre intitulé Engraved on Our Nations, on peut lire :

Il ne fait aucun doute que le capitalisme est le système économique dominant et peut-être la principale menace pour la santé des collectivités autochtones.

L’auteur ajoute ensuite ceci :

Les Premières Nations cherchent à assurer la durabilité des formes de vie et une bonne qualité de vie sur la planète.

L’auteur poursuit :

Les économies capitalistes exigent une croissance incessante et la maximisation des profits, ce qui épuise les ressources limitées. Dans les économies axées sur les ressources comme le Canada, cela nuit aux écosystèmes.

Je vois l’empreinte environnementale. Je suis allée à Fort McMurray cet été. On y a détruit la culture des Premières Nations et leur mode de vie traditionnel, et il y a encore des toxines dans l’eau. Il y a une augmentation de la consommation d’eau causée par l’utilisation de véhicules actionnés par l’intelligence artificielle là-bas. Je sais que, chez Suncor, on utilise l’hydroélectricité, le gaz et le pétrole. Le nombre de cancers est en hausse. Il me semble que les actionnaires sont beaucoup plus importants que les Premières Nations. Vous avez dit qu’il s’agit d’une industrie cyclique, mais les effets sur la vie, les terres et l’eau des Premières Nations demeurent, année après année.

Mardi, le chef de la Première Nation Athabasca Chipewyan était à Ottawa pour parler de la pollution qui vient d’être révélée. Elle est présente depuis deux ans, cette pollution par l’arsenic, le nickel, les hydrocarbures et d’autres produits chimiques. Il a comparu devant le ministère des Transports, et ces substances proviennent des sables bitumineux.

J’ai affirmé à maintes reprises que les Premières Nations appuieraient l’industrie pétrolière si elles n’avaient pas à en porter le fardeau constamment. Comment pouvez-vous faire partie de la solution à ce problème, qui existe depuis très longtemps?

Madame Baiton : Vous avez mentionné quelques entreprises, et je ne peux pas m’exprimer sur les enjeux propres à une entreprise en particulier, mais je peux dire que les membres du secteur canadien du pétrole et du gaz respectent des normes environnementales qui comptent parmi les plus strictes au monde.

Si vous voulez entendre d’autres points de vue sur la façon dont les collectivités autochtones travaillent avec notre industrie et en tirent profit, si ce n’est pas déjà fait, je vous invite à appeler John Desjarlais, de la Coalition de Premières Nations pour les grands projets, la cheffe Crystal Smith de la nation Haisla et de Cedar LNG, Stephen Buffalo du Conseil des ressources indiennes ou Karen Ogen de la First Nations LNG Alliance.

Ce que je peux vous dire, c’est que la participation significative des peuples autochtones aux décisions qui ont une incidence sur eux, leurs droits et leurs collectivités s’inscrit dans une pratique qui a évolué au Canada au cours des 40 dernières années. Elle est conforme aux responsabilités de la Couronne en vertu de l’article 35 de la Loi constitutionnelle. Pour notre industrie, il est tout simplement logique sur le plan des affaires d’entretenir d’excellentes relations avec nos voisins, ce qui suppose de consulter les titulaires de droits autochtones et de chercher à créer des entreprises communes avec des partenaires autochtones et à les faire grandir.

Je peux vous fournir quelques statistiques. De plus en plus, les peuples autochtones sont les propriétaires privés d’actifs énergétiques importants. Cela permet non seulement une véritable réconciliation économique, mais cela leur donne également voix au chapitre en qualité de propriétaires. Depuis 2017, plus de 5 milliards de dollars de capitaux propres autochtones ont été investis dans des projets pétroliers et gaziers, dans des pipelines, des parcs de stockage, des centrales électriques et des terminaux de GNL, et ce chiffre augmente très rapidement. À titre d’exemple, mentionnons une participation de 10 % dans le Coastal GasLink, qui a été acheté par les collectivités autochtones le long du corridor du projet. Les installations d’exportation de GNL Cedar et Ksi Lisims sont toutes deux dirigées par des propriétaires autochtones. La nation nisga’a a joué un rôle de premier plan dans l’achat du projet de transport de gaz naturel de Prince Rupert, qui pourrait fournir certaines des installations de GNL proposées sur la côte Ouest. Il y a eu des programmes de garanties de prêts — d’excellents modèles — avec les gouvernements de la Colombie-Britannique, de la Saskatchewan et de l’Alberta, qui multiplient les possibilités pour les propriétaires autochtones.

Je peux vous fournir d’autres statistiques fondées sur les données de Statistique Canada. Les secteurs de l’extraction de pétrole et de gaz naturel et de transport par pipeline offrent les salaires les plus élevés au Canada pour les Autochtones. En fait, les Autochtones gagnent près de trois fois plus dans le secteur de l’extraction pétrolière et gazière que la moyenne canadienne, soit environ 140 000 $ par année. Notre secteur consent également des efforts considérables pour offrir des possibilités de carrière aux femmes autochtones. Les trois secteurs les mieux rémunérés pour les femmes autochtones au Canada sont tous associés au pétrole et au gaz. Dans une étude que l’ACPP a réalisée avec...

Le président : Puis-je vous demander de résumer? Une réponse courte.

Madame Baiton : Ma réponse courte est que nous pensons que les communautés autochtones sont des titulaires de droits et des partenaires importants, et nous continuerons à respecter cela. Nous invitons d’autres représentants de la grande communauté autochtone à venir en parler.

Le président : Nous allons manquer de temps, mais deux sénateurs n’ont pas eu l’occasion de poser leur question. Si je pouvais avoir la coopération de vos témoins, je demanderais aux deux sénateurs de citer leurs questions, et si nous pouvions obtenir une réponse écrite de votre part, adressée à notre greffier, ce serait très apprécié.

[Français]

La sénatrice Youance : Suze Youance, du Québec. Ma question sera très brève et vous pourrez nous faire parvenir une réponse par écrit.

Je fais référence au fonds souverain norvégien, qui est alimenté à même les revenus gaziers et pétroliers. Selon vous, si le Canada avait adopté cette approche, aurions-nous aujourd’hui un déficit public? Est-ce raisonnable de penser qu’on pourrait mettre un tel fonds en place?

[Traduction]

La sénatrice Anderson : J’ai une question très ciblée pour Cenovus. J’ai devant moi le rapport d’une inspection environnementale du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, effectuée sur un site situé sur les terres des Premières Nations du Sahtu. Vous avez vanté l’importance de l’impact environnemental et de l’empreinte géographique. J’aimerais vous lire ceci et demander une réponse par écrit :

La condition 66 du permis d’utilisation des terres S20X-006 indique : « Le titulaire doit soumettre par écrit à l’Office et à l’inspecteur, pour approbation, un rapport d’étape annuel sur le suivi et l’entretien postrestauration faisant état de tous les cycles de suivi, de restauration progressive ou de suivi hivernal, le premier devant être présenté le 15 novembre 2021. »

Ce rapport a été rédigé le 5 juillet 2023.

À la connaissance de l’inspecteur actuel, les rapports demandés par l’Office n’ont pas été reçus. Par conséquent, l’inspecteur a jugé que les conditions relatives à la restauration des terrains de la carrière B n’étaient pas satisfaites, conformément aux modalités énoncées dans le permis d’utilisation des terres existant. Jusqu’à ce que Cenovus Energy Inc. puisse produire les rapports d’étape annuels demandés par l’Office et les renseignements qu’elle s’est engagée à fournir dans le plan de restauration de la carrière B, ce projet demeurera non conforme aux fins de la section sur la restauration des terrains du permis S20X-006.

J’aimerais savoir si cette lettre a déjà fait l’objet d’un suivi et ce que Cenovus entend faire à l’avenir pour assurer le respect en temps opportun de demandes de sites situés dans les Territoires du Nord-Ouest. Merci.

Le président : Merci beaucoup.

Je remercie nos deux témoins, Lisa Baiton et Jon McKenzie. Vos témoignages ont été très utiles. Nous avons beaucoup appris. Nous avons encore beaucoup à apprendre, mais vous avez apporté une contribution importante. Nous vous avons entendus très clairement. Nous ne sommes peut-être pas d’accord, mais je pense que nous faisons des progrès.

Je vous laisse avec ma propre question qui demande une réponse écrite : vous avez parlé des projets de CSC où la subvention serait telle que vous contribueriez à hauteur de 25 % de la propriété. À qui appartiennent les 75 % restants et comment cela serait-il réparti? Si vous pouviez y jeter un coup d’œil et nous revenir là-dessus, ce serait apprécié.

Merci encore de votre participation aujourd’hui.

Chers collègues, notre prochaine réunion est prévue pour le jeudi 12 décembre. Nous recevrons alors une séance d’information scientifique sur les conditions météorologiques extrêmes au Canada de la part de scientifiques et de fonctionnaires du gouvernement. Premièrement, nous parlerons des changements climatiques et de l’évolution des phénomènes extrêmes. Deuxièmement, nous verrons des exemples d’événements extrêmes et examinerons notre façon de fournir des avertissements. Troisièmement, nous parlerons des répercussions pour les intervenants comme les banques, l’assurance et d’autres.

Merci beaucoup à tous.

(La séance est levée.)

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