Aller au contenu
LCJC - Comité permanent

Affaires juridiques et constitutionnelles


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES AFFAIRES JURIDIQUES ET CONSTITUTIONNELLES

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le jeudi 30 mai 2024

Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles se réunit aujourd’hui, à 11 h 47 (HE), avec vidéoconférence, pour examiner la teneur des éléments des sections 29, 30, 35, 36, 43 et 44 de la partie 4, et des sous-sections B et C de la section 34 de la partie 4 du projet de loi C-69, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 16 avril 2024.

La sénatrice Mobina S. B. Jaffer (présidente ) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente : Sénateurs, pour commencer, je vous présente mes excuses les plus sincères pour la confusion causée par l’annulation de l’étude article par article du projet de loi S-15 qui était prévue à l’ordre du jour de la réunion d’aujourd’hui. Le comité directeur avait initialement l’intention de profiter de la réunion d’aujourd’hui pour poursuivre le travail sur le projet de loi S-15; cependant, après une discussion approfondie, nous avons constaté qu’il serait plus avisé de reprendre l’étude article par article du projet de loi S-15 après l’étude préliminaire du projet de loi C-69.

Sénateurs, je sais que cela vous a contrariés. Vous avez travaillé sur cette mesure législative, et je m’excuse de cette modification de l’ordre du jour. Je vous remercie de votre coopération et de votre compréhension. Merci, chers collègues.

[Français]

Bonjour, honorables sénateurs et sénatrices. Bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.

[Traduction]

Je m’appelle Mobina Jaffer et je suis sénatrice de la Colombie-Britannique. J’invite mes collègues à se présenter, en commençant par la vice-présidente.

La sénatrice Batters : Denise Batters, de la Saskatchewan.

[Français]

Le sénateur Forest : Éric Forest, de la division du Golfe, au Québec.

Le sénateur Dalphond : Pierre Dalphond, de la division De Lorimier, au Québec.

[Traduction]

Le sénateur Klyne : Marty Klyne, de la Saskatchewan, territoire visé par le Traité no 4.

Le sénateur Prosper : Paul Prosper, de la Nouvelle-Écosse, territoire mi’kma’ki.

Le sénateur Cotter : Brent Cotter, de la Saskatchewan, territoire visé par le Traité no 6.

Le sénateur Tannas : Scott Tannas, de l’Alberta.

La sénatrice Pate : Kim Pate, de l’Ontario, territoire non cédé des Algonquins Anishinaabe.

[Français]

La sénatrice Clement : Bernadette Clement, de l’Ontario.

[Traduction]

La sénatrice Simons : Paula Simons, de l’Alberta, territoire visé par le Traité no 6.

La présidente : Avant de commencer, je demanderais à tous les sénateurs et aux autres participants dans la salle de bien vouloir consulter les fiches disposées sur la table. Vous y trouverez les consignes à suivre pour prévenir tout incident de rétroaction acoustique. Le respect de ces consignes facilitera le travail de tous, notamment des interprètes. Je vous remercie de votre collaboration.

Chers collègues, comme vous le savez, nous nous réunissons pour poursuivre notre étude de la teneur des éléments des sections 29, 30, 35, 36, 43 et 44 de la partie 4 et des sous-sections B et C de la section 34 de la partie 4 du projet de loi C-69, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 16 avril 2024.

Nous avons le plaisir d’accueillir des témoins aujourd’hui pour discuter de la section 35 du projet de loi, qui modifie le Code criminel pour créer de nouvelles infractions en ce qui a trait aux vols de véhicules à moteur. Nous recevons Scott Wade, inspecteur-détective, Bureau de la lutte contre le crime organisé, Police provinciale de l’Ontario.

Monsieur Wade, je suis très reconnaissante de votre présence aujourd’hui, d’autant plus que vous étiez en Saskatchewan. Cela signifie beaucoup pour nous que vous vous soyez libéré. Merci d’être parmi nous.

Nous accueillons également, par vidéoconférence, de l’Association canadienne des chefs de police, Philip Heard, membre, Comité sur les amendements législatifs, et Simon Authier, membre, Comité sur les amendements législatifs.

Bienvenue et merci de votre présence.

La parole est d’abord à vous, inspecteur-détective. Vous disposez de cinq minutes.

Scott Wade, inspecteur-détective, Bureau de la lutte contre le crime organisé, Police provinciale de l’Ontario : Merci beaucoup.

Bonjour. Good morning.

Je m’appelle Scott Wade. Je suis inspecteur-détective à la Police provinciale de l’Ontario. Je suis affecté au Bureau de la lutte contre le crime organisé. J’y coordonne la stratégie provinciale contre le vol de véhicules, ainsi que l’équipe provinciale contre le vol de véhicules et le vol dans l’industrie du remorquage.

Nous avons constaté une hausse importante de la valeur des véhicules d’occasion dans l’économie post-COVID-19. Les réseaux du crime organisé ont saisi l’occasion d’exploiter l’offre et la demande mondiales de véhicules et de pièces automobiles. Ils utilisent les profits de ces vols pour financer d’autres activités criminelles, comme le narcotrafic, le trafic d’armes à feu, la traite de personnes, la contrebande et le terrorisme international.

Les groupes du crime organisé se déplacent d’une province à l’autre pour sévir dans les grandes régions métropolitaines. Des guetteurs repèrent les véhicules, des voleurs les volent et des coursiers les transportent jusqu’aux lieux d’exportation. Bien des délinquants ont déjà été condamnés pour des infractions graves et utilisent la violence et les violations de domicile pour mettre la main sur les véhicules ciblés. Nous savons que les voleurs vont souvent placer ces véhicules dans des conteneurs qui vont atteindre le Port de Montréal et d’autres ports dans l’Ouest et dans l’Est du Canada, avant de poursuivre leur chemin jusqu’en Europe, en Afrique et au Moyen-Orient.

Les voleurs conduisent ces véhicules volés de façon erratique sur nos routes ontariennes, menaçant la sécurité de la population et des policiers. Lorsque nous effectuons une arrestation, le suspect est souvent en possession de drogues, d’armes — notamment d’armes à feu — et d’outils technologiques, comme des porte-clés reprogrammés pour faciliter le vol de véhicules. Ce crime contre la propriété est très complexe et est loin de ne faire aucune victime.

À la Police provinciale de l’Ontario, la PPO, nous continuons de travailler avec nos partenaires policiers des villes, des provinces et du pays pour nous assurer que ces délinquants ne passent pas inaperçus. Nous nous communiquons notamment des renseignements et nous prenons conjointement des mesures actives de lutte contre le crime.

En Ontario, le ministère du Procureur général a affecté des procureurs de la Couronne et du personnel de soutien à l’Équipe d’aide aux poursuites importantes relatives au vol d’automobiles, et nous continuons de travailler de près avec eux pour garantir l’excellence de nos enquêtes.

Collectivement et grâce à notre collaboration, nous luttons contre cette crise nationale qui menace la population et nos policiers en perturbant le marché criminel transnational contrôlé par les réseaux du crime organisé. Nous travaillons de pair avec les assureurs, les constructeurs automobiles et tous les ordres de gouvernement pour élaborer des solutions à long terme visant à réduire considérablement le nombre de véhicules volés, et nous obtenons des résultats fantastiques.

La PPO travaille au Port de Montréal avec ses partenaires policiers fédéraux, québécois et ontariens au projet Vector. Ce travail nous a permis de récupérer des véhicules volés avant leur exportation illégale.

Nous continuons de nous appuyer sur le succès du projet Volcano, grâce auquel nous avons réussi à arrêter 34 suspects à Montréal. Ce projet a permis de démontrer que des voleurs de voitures ne peuvent pas venir en Ontario y voler des véhicules et éviter les conséquences judiciaires.

En collaborant avec INTERPOL, nous avons réussi à repérer des centaines de véhicules volés en Ontario et ailleurs au Canada, et notre partenariat avec Équité Association facilite le rapatriement au Canada des véhicules volés. Les renseignements recueillis par le biais de ces mesures de lutte contre le crime et de ces partenariats avec des organismes d’application de la loi alimentent le projet Émissions, mis en œuvre par la PPO dans le cadre de la stratégie du renseignement pour lutter contre la crise du vol de véhicules.

Nous mettons en priorité le besoin de sécurité dans nos collectivités et pour nos policiers, car nous reconnaissons le niveau de violence associé aux vols de véhicules commandés par le crime organisé.

Nous appuyons la teneur du plan national de lutte contre le vol de véhicules. Nos mesures collectives de lutte contre le crime visent à perturber, à démanteler et à poursuivre en justice les groupes criminels organisés qui sont à l’origine des vols de véhicules.

Comme nous le faisons pour toutes nos enquêtes, nous mettons en place un système d’examen continu afin de nous adapter à l’évolution constante des techniques qu’utilisent les groupes criminels organisés pour accroître leurs activités criminelles.

Merci. Meegwetch.

La présidente : Inspecteur Wade, disposez-vous de recherches pour appuyer vos propos concernant la mesure dans laquelle tout ce travail contribue à la lutte contre le crime organisé, entre autres choses?

M. Wade : Oui, nous avons les résultats des mesures de lutte contre le crime et des enquêtes pour appuyer nos propos.

La présidente : Êtes-vous en mesure de les fournir au comité?

M. Wade : Tout à fait. Je pourrai les transmettre par écrit au comité après la réunion, et je peux certes répondre à toute question à ce sujet.

La présidente : Je vous saurais gré de bien vouloir les transmettre au greffier. Ce serait très utile. Merci.

La parole est maintenant à l’Association canadienne des chefs de police.

Simon Authier, membre, Comité sur les amendements législatifs, Association canadienne des chefs de police : Distingués membres du comité, nous vous remercions de nous donner l’occasion de nous adresser à vous aujourd’hui au sujet de la partie 4 du projet de loi C-69 au nom de l’Association canadienne des chefs de police. Aujourd’hui, nous aimerions nous concentrer sur la sous-section C de la section 34, ainsi que sur les sections 35, 36 et 44.

Le vol de voitures est en augmentation au Canada et constitue une priorité pour les dirigeants de la police. Les groupes criminels organisés exploitent les lacunes en matière de sécurité pour exporter des véhicules volés et utiliser les fonds pour financer leurs diverses entreprises criminelles.

L’ACCP soutient fermement la section 35 qui propose de créer une infraction relative à la possession ou à la distribution d’un dispositif électronique pouvant servir à commettre un vol de véhicule à moteur.

Nous soutenons également la section 36 qui propose d’interdire la fabrication, l’importation, la distribution, la location, la mise en vente, la vente ou la possession de certains dispositifs permettant d’intercepter, d’utiliser ou de communiquer toute radiocommunication. Bien qu’il soit important de priver les criminels d’outils, le projet de loi C-69 ne contient pas de dispositions explicites qui soutiennent l’utilisation de la technologie par la police pour désactiver, suivre et récupérer les véhicules volés. Nous invitons le comité à envisager l’ajout de telles dispositions dans ce projet de loi.

En ce qui concerne les vols de véhicules, la police et le public sont très préoccupés par l’augmentation de la violence associée à ces délits. Des délinquants irresponsables, dont plusieurs ont déjà été condamnés pour des crimes, ou sont en liberté sous caution pour des délits semblables, commettent des pirateries routières et des invasions de domicile violentes afin d’avoir accès à certains véhicules recherchés.

L’ACCP réclame depuis un certain temps des peines minimales plus sévères pour les récidivistes et la création de nouvelles infractions liées aux actes de violence perpétrés lors de la commission d’infractions criminelles.

En décembre 2023, l’ACCP a félicité le gouvernement fédéral d’avoir adopté le projet de loi C-48 sur la réforme de la mise en liberté sous caution. Il s’agissait d’une reconnaissance du besoin urgent d’empêcher les délinquants violents et récidivistes qui représentent la plus grande menace pour la sécurité du public et des policiers d’être libérés dans la communauté en attendant leur procès.

Nous sommes heureux de constater que la section 35 propose des peines plus sévères aux paragraphes 333.1(3) et (4) du Code criminel pour les vols de véhicules à moteur lorsqu’il y a usage, menace ou tentative de violence et que ces actes sont commis au profit ou sous la direction d’une organisation criminelle ou bien en association avec elle.

L’ACCP est également heureuse de constater que ce projet de loi reconnaît non seulement le rôle important du crime organisé dans le marché du vol de voitures, mais aussi la façon dont ces organisations exploitent des personnes âgées de moins de 18 ans pour commettre des infractions. Ces jeunes personnes vulnérables sont souvent engagées comme guetteurs, voleurs ou coursiers. Nous félicitons le gouvernement fédéral d’avoir proposé l’ajout de circonstances aggravantes légales concernant l’exploitation des jeunes par le crime organisé et espérons que ceci contribuera à perturber le fonctionnement des organisations criminelles organisées.

Le marché transnational illicite et lucratif des véhicules canadiens volés est contrôlé par des réseaux criminels organisés, dont les profits financent souvent d’autres activités criminelles, telles que le trafic de drogue, le trafic d’armes, le trafic d’êtres humains et le terrorisme international.

C’est pourquoi l’ACCP soutient la sous-section C de la section 34, qui prévoit une ordonnance visant à ce qu’un compte bancaire soit maintenu ouvert ou actif pour contribuer à l’enquête sur une infraction pénale et une ordonnance de production exigeant la communication de documents ou de données aux dates précisées. Ces dispositions sont importantes, car elles fourniront aux services d’application de la loi des outils supplémentaires pour recueillir des renseignements et des preuves au cours des enquêtes liées au blanchiment d’argent et aux infractions terroristes.

Philip Heard, membre, Comité sur les amendements législatifs, Association canadienne des chefs de police : En ce qui concerne la section 44 relative aux sites de consommation supervisée, l’ACCP continue de plaider en faveur d’une réponse multidimensionnelle axée sur la santé, comprenant la prévention, la réduction des méfaits, le traitement, le rétablissement et la réinsertion, ainsi que d’efforts visant à réduire l’offre de drogues illicites toxiques.

L’ACCP soutient un éventail de principes, de politiques et de pratiques qui ne sont pas isolés les uns des autres. Les sites de consommation supervisée ne sont que l’un des éléments essentiels d’une approche centrée sur la santé, au même titre que l’approvisionnement sûr et les programmes de détournement. La section 44 propose des règlements concernant les autorisations de consommation supervisée et les services de vérification des drogues afin de les soustraire à l’application de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances. L’ACCP tient à s’assurer que les sites de consommation supervisée demeurent une option pour les communautés. Il est essentiel que la loi soutienne les efforts visant à orienter les personnes ayant des troubles de toxicomanie vers des services de santé et des services sociaux.

Dans l’ensemble, l’ACCP appuie les dispositions incluses dans la partie 4 du projet de loi C-69 qui abordent des questions clés liées au vol de véhicules, au crime organisé et à la crise des opioïdes. Nous croyons que les modifications législatives proposées amélioreront la sécurité des Canadiens et des policiers, mais que des dispositions supplémentaires et explicites sont nécessaires pour soutenir les opérations policières. Merci.

La présidente : Merci beaucoup pour vos exposés. Je vais vous poser la même question que j’ai posée à l’inspecteur Wade : disposez-vous de recherches ou de preuves pour étayer vos propos?

M. Heard : Oui, je crois que nous pouvons transmettre au greffier de l’information de haut niveau. Les renseignements que nous échangeons avec d’autres organisations policières au Canada indiquent qu’actuellement le vol organisé de voitures constitue la troisième plus importante source de revenus pour les groupes criminels organisés.

La présidente : Cette information serait très utile. Merci. La parole est maintenant à la vice-présidente du comité, la sénatrice Batters.

La sénatrice Batters : Je vous remercie tous pour votre présence. Inspecteur Wade, je vous remercie d’avoir pris l’avion depuis la Saskatchewan. Je suis originaire de cette province et je sais que les liaisons aériennes ne sont pas très bonnes. Il n’y a pas beaucoup de vols disponibles, alors merci.

Je commencerai par vous. Lundi, la police régionale de Peel a annoncé les résultats du projet Odyssey. Elle a révélé que 14 des 26 personnes arrêtées avaient déjà fait l’objet d’accusations de vol de voiture et d’une mise en liberté sous caution, et que 8 des personnes qu’elle vient d’arrêter ont été libérées cette semaine, alors que les faits viennent de se produire.

Quel impact cela a-t-il sur les ressources policières et la sécurité publique? Pensez-vous que la législation et les politiques actuelles du gouvernement fédéral, comme celles proposées dans le projet de loi C-75 concernant le principe de modération dans la mise en liberté sous caution, aggravent le problème?

Durant vos remarques préliminaires, vous avez dit que ces types de problèmes ne sont plus simplement une nuisance en ce qui concerne la criminalité, car ils ont désormais un impact majeur sur la sécurité publique.

M. Wade : C’est une très bonne question. Le projet Odyssey est un très bel exemple d’une enquête policière collaborative qui a donné d’excellents résultats et qui a eu une incidence sur le crime organisé et le vol de voitures dans la région du Grand Toronto, dans le reste de l’Ontario et, éventuellement, dans l’ensemble du Canada.

Il est vrai que nous observons un pourcentage accru d’individus accusés de délits similaires et libérés sous caution. Diverses entités le constatent, notamment notre groupe de travail conjoint chargé de lutter contre les actes de piraterie routière et nos policiers qui enquêtent sur les vols de voitures. C’est certainement un aspect qui nous préoccupe et sur lequel nous nous penchons.

Nous faisons appel à des équipes chargées de l’application des conditions de mise en liberté sous caution pour faire un suivi concernant les enquêtes et les individus arrêtés dans le cadre d’enquêtes sur des actes de piraterie routière et des vols de voitures. C’est l’une des tactiques que nous utilisons. Nous disposons d’études qui montrent que les pourcentages dans l’ensemble de l’Ontario correspondent à ceux de Peel, en particulier en ce qui concerne les actes de piraterie routière.

Il est certain que la réforme de la mise en liberté sous caution et les enjeux qui y sont liés ont une incidence. Si les criminels sont maintenus en détention, c’est un facteur de dissuasion. S’il s’agit de récidivistes, ils ne peuvent pas commettre d’autres infractions pendant qu’ils sont en détention pour purger leur peine ou en attendant leur audience sur le cautionnement. Je pense que c’est une question multidimensionnelle.

La sénatrice Batters : Je vous remercie d’avoir mentionné les actes de piraterie routière, car ils peuvent bien sûr impliquer de la violence et poser un risque réel pour la sécurité publique.

Inspecteur Wade, les dispositions proposées à la section 35 du projet de loi C-69, la Loi d’exécution du budget, créent de nouvelles infractions relatives à la possession et à la distribution de dispositifs électroniques utilisés pour commettre des vols de véhicules. Pensez-vous que ces mesures seront suffisantes pour dissuader les criminels d’utiliser ces technologies? Pouvez-vous également nous donner un exemple concret de la façon dont les dispositifs électroniques sont utilisés pour commettre des vols de véhicules, et nous expliquer comment ces mesures pourraient contribuer à améliorer les choses?

M. Wade : Oui. Les dispositions législatives actuellement en vigueur ne rendent pas illégale la possession de dispositifs pouvant servir à commettre un vol de voitures. L’ajout de ces mesures nous fournira les outils nécessaires à l’application de la loi et aura un effet dissuasif sur les personnes qui vendent actuellement ces dispositifs.

À l’heure actuelle, il est possible d’en acheter sur Amazon. Ils peuvent être livrés à votre porte en un ou deux jours. Ces produits ne proviennent pas de l’étranger. Ils se trouvent dans des entrepôts ici même au Canada. Il y a eu des discussions hors ligne avec des détaillants — je ne veux pas nommer de détaillants en particulier — qui en offrent. Actuellement, comme ces dispositifs ne sont pas illégaux, ils peuvent en vendre. Les gens peuvent avoir ces dispositifs en leur possession en l’espace de quelques jours. Ils peuvent apprendre dans Internet comment s’en servir et ensuite les utiliser pour capter des signaux.

La sénatrice Batters : Pourriez-vous nous donner quelques exemples de ces types de dispositifs dont vous parlez?

M. Wade : Il existe plusieurs façons de réaliser le vol électronique sophistiqué d’un véhicule, l’une d’entre elles étant d’entrer dans le système de diagnostic embarqué de la voiture. Essentiellement, il faut trouver un point d’infiltration sur le véhicule, parfois le pare-chocs, parfois le panneau latéral avant. Ces dispositifs sont capables de se connecter au cerveau de l’ordinateur d’un véhicule. Nous aimons les commodités de nos véhicules, comme le démarrage automatique et le réglage de la température depuis la maison, mais elles donnent la possibilité aux groupes criminels organisés de voler votre véhicule à l’aide de ces dispositifs, qui offrent un autre moyen d’entrer dans le cerveau du véhicule.

Une autre façon de procéder consiste à intercepter un signal passif ou actif émis par le porte-clés. Lorsque votre porte-clés est dans votre poche, il émet un signal passif. Les voleurs peuvent utiliser ces dispositifs pour capter ce signal et le reproduire. La voiture pense alors que le voleur détient le porte-clés, mais ce n’est pas le cas, il dispose d’un dispositif électronique qui imite le signal. Une autre chose que les voleurs peuvent faire, c’est capter le signal actif. Lorsque vous descendez de votre véhicule, ils voient votre véhicule haut de gamme et captent le signal au moment où vous verrouillez votre voiture.

Ce ne sont là que quelques-uns des moyens utilisés. Malheureusement, les groupes criminels organisés sont ingénieux et ils savent s’adapter et ils trouvent de nouvelles façons de voler des véhicules. Certaines des commodités dont nous profitons sont utilisées par les criminels pour commettre des vols.

La sénatrice Batters : Merci beaucoup.

Le sénateur Dalphond : Bienvenue aux témoins. Vos propos sont très intéressants.

J’ai deux séries de questions. La première concerne les membres du crime organisé. Vous avez dit que le vol de véhicules constitue la troisième source de revenus pour le crime organisé et qu’il fait donc partie de leurs activités principales.

Vous dites qu’ils ont recours à des guetteurs, à des voleurs et à des coursiers. Connaissez-vous le profil de ces individus auxquels ils ont recours? S’agit-il des mêmes personnes? S’agit-il uniquement de jeunes? Savez-vous à quels types de groupes ils appartiennent? Font-ils partie de groupes spécifiques que vous pouvez facilement identifier afin de comprendre exactement l’infrastructure du système?

M. Wade : C’est une excellente question. Je voudrais résumer la façon dont les voitures sont volées par l’intermédiaire d’un guetteur. En ce qui a trait au profil, les guetteurs sont généralement des personnes âgées de 15 à 22 ans. Environ 30 à 35 % des guetteurs — il faudrait que je confirme ces chiffres — sont des jeunes ou des jeunes délinquants selon la définition, mais j’inclus également les jeunes de 19 et 20 ans, sans égard à la définition légale.

Souvent, ces guetteurs sont payés entre 50 et 100 $ pour repérer un véhicule dans une ruelle ou une rue en vue d’un vol. Ils ciblent un véhicule sur lequel on leur a demandé de recueillir des informations, qu’ils transmettent ensuite à un responsable de niveau intermédiaire au sein d’un groupe criminel organisé, qui chargera alors un groupe de voleurs de se rendre sur place et de voler le véhicule. Parfois, les guetteurs sont aussi les voleurs, mais souvent ce n’est pas le cas. Certains d’entre eux ne font que repérer les voitures, puis un voleur ou un groupe de voleurs se rendra sur place pour voler les véhicules.

Les véhicules sont ensuite amenés à un lieu et les coursiers les transportent ensuite vers de nombreux endroits, comme des entrepôts, ou parfois directement à Montréal ou directement vers un endroit appartenant au crime organisé.

Ensuite, si les véhicules sont expédiés à l’étranger, il y a plusieurs intervenants. Il y a des expéditeurs et des transporteurs internationaux. Certains d’entre eux sont directement impliqués dans le crime organisé et d’autres sont, je dirais, des victimes innocentes de ce commerce.

Au fur et à mesure que les véhicules avancent dans la chaîne, les profits deviennent de plus en plus élevés. Au terme de l’opération, un véhicule qui a une valeur de 50 000 $ en Ontario peut valoir jusqu’à 100 000 $ à l’étranger. Les profits sont énormes.

Le sénateur Dalphond : Vous avez dit que le tiers des guetteurs sont des jeunes; ils sont très jeunes, environ 15 ans. Ceux qui sont impliqués dans les vols sont-ils aussi principalement des jeunes?

M. Wade : Leur profil démographique est très semblable, même chez les coursiers. Quant à ceux qui expédient les marchandises à l’étranger, aux affréteurs et aux coordonnateurs, ils sont souvent plus âgés. C’est là qu’on commence à entrer dans la sophistication du crime organisé.

Le sénateur Dalphond : Je suppose que les voleurs et les coursiers ont un permis de conduire.

M. Wade : Parfois, mais dans bien des cas, ils n’en ont pas, parce qu’ils ont déjà été accusés ou reconnus coupables de conduite dangereuse, d’avoir fui la police ou d’autres infractions.

Le sénateur Dalphond : Vous avez dit que vous réussissez très bien simplement en coordonnant tous les services de police du Québec et de l’Ontario, ainsi que la GRC. Est-ce que ces dispositions vous aideront à avoir encore plus de succès, ou pouvez-vous vous en passer?

M. Wade : Non, je crois qu’elles sont essentielles pour poursuivre nos progrès. Nous avons accompli des progrès considérables. Il y a quelques années, le vol d’automobiles n’était pas au centre de l’attention, car le crime organisé avait d’autres priorités. Vu l’augmentation rapide de la valeur des vols et le danger pour le public et les policiers, la police a changé d’approche.

Nous collaborons mieux que nous ne l’avons fait pendant des années au chapitre du vol d’automobiles, mais ce n’est que le début. Nous commençons. Nous avons beaucoup de projets et d’enquêtes qui donnent de bons résultats, mais les dispositions du projet de loi dans la section que nous examinons seront essentielles pour que nous continuions à progresser.

Le sénateur Dalphond : Me reste-t-il du temps?

La présidente : Je vais vous inscrire pour une deuxième intervention.

Le sénateur Dalphond : Je vous remercie.

Le sénateur Prosper : Je remercie les témoins que nous recevons.

J’ai quelques questions à vous poser, monsieur Wade. Merci de votre témoignage. Il est très instructif de connaître les différents acteurs impliqués dans le vol d’automobiles.

J’ai deux questions, dont l’une porte sur le profil des jeunes impliqués. Vous avez mentionné les coursiers et les observateurs, soulignant qu’ils ont un certain profil en ce qui concerne l’âge. À cet égard, j’ai entendu dans des témoignages précédents que ces jeunes sont souvent issus de populations marginalisées. Pouvez-vous nous dire ce qu’il en est?

Ma deuxième question concerne les dispositifs électroniques eux-mêmes. Est-ce que certains d’entre eux peuvent être utilisés à des fins légales, mais aussi illégales? Comment gère-t-on cet aspect? Comment trace-t-on la ligne entre les deux? Comment procède-t-on pour les accusations, par exemple?

Je vous prierais de répondre à ces questions. J’aimerais entendre votre son de cloche.

M. Wade : Volontiers. Je commencerai par la première question sur les communautés marginalisées.

Je ne dispose pas des statistiques ou des recherches nécessaires pour en parler, mais on se préoccupe notamment du fait que le crime organisé utilise des jeunes pour commettre des crimes. Ils victimisent de nouveau des jeunes qui sont souvent marginalisés. Je suis désolé, mais je ne peux pas vous fournir de statistiques ou de données de recherche précises. Nous constatons toutefois que le crime organisé exploite vraiment ceux qui s’adonnent à la criminalité de rue et les membres de gangs de rue en raison de la nature lucrative du vol d’automobiles. La rétribution des coursiers, des repéreurs et des voleurs rend ces activités lucratives.

Je ne sais pas si cela répond entièrement à votre question.

Le sénateur Prosper : En partie, oui.

M. Wade : C’est tout ce que je peux vous dire pour le moment.

En ce qui concerne les dispositifs, vous avez raison de dire que certains peuvent être utilisés à plusieurs fins. Certains d’entre eux ont une utilisation très précise dans le vol d’automobiles. Mes amis pourront peut-être traiter du sujet du point de vue de leur travail, avec les modifications législatives et tout cela. Dans certains cas, nous devrons prouver l’intention d’utiliser le dispositif de cette façon. Certains dispositifs dont nous parlons n’ont qu’un seul usage : le vol d’automobiles.

Le sénateur Prosper : Je vous remercie.

La présidente : Je vais poser une question complémentaire. Vous avez dit que vous savez ce que gagnent les repéreurs et les divers voleurs. Pouvez-vous nous le dire?

M. Wade : Je vais inscrire cette question sur ma liste, puisque cette information nous vient de la collecte d’information, des discussions avec les acteurs du crime organisé et des enquêtes. Je vous fournirai l’information.

La présidente : Je vous remercie.

Le sénateur Klyne : Ma question s’adresse à l’inspecteur Wade.

J’aimerais poser quelques questions sur les modifications au Code criminel que prévoit la section 25. J’essaierai d’être bref. Comme j’aimerais pouvoir poser trois ou quatre questions, je vous demanderais d’essayer de répondre brièvement.

Comment ces modifications renforceront-elles la collaboration entre les organismes pour contrer le crime organisé? Plus précisément, les nouvelles modifications législatives favoriseront-elles une meilleure coordination entre les organismes locaux, provinciaux et fédéraux d’application de la loi? Feront-elles complément au Plan d’action national sur la lutte contre le vol de véhicules?

M. Wade : Je répondrais brièvement que oui. Elles appuieront et aideront considérablement la coordination actuelle, et cadrent avec la plupart des recommandations des associations ontarienne et canadienne des chefs de police et de la stratégie nationale.

Le sénateur Klyne : C’est bon à entendre.

Quel rôle prévoyez-vous que les technologies des fabricants d’automobiles pourraient jouer en ce qui concerne la capacité de désactiver les dispositifs électroniques?

M. Wade : Elles doivent jouer un rôle de premier plan. Certains fabricants d’automobiles se sont montrés très proactifs en demandant de l’information à la police. Nous leur fournissons ainsi les informations glanées lors de nos enquêtes afin qu’ils puissent améliorer leurs technologies.

En ce qui concerne la désactivation proprement dite, il faut en discuter et parler de la sécurité et de la mise en œuvre.

Le sénateur Klyne : Ma dernière question comporte deux parties. Pensez-vous que d’autres modifications législatives ou ressources sont nécessaires pour renforcer davantage la lutte contre le vol de véhicules à moteur et le crime organisé? Avez-vous consulté à l’avance les représentants du gouvernement qui ont rédigé les modifications?

M. Wade : Je crois que oui. J’ai témoigné devant le Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes, ou SECU, et formulé de nombreuses recommandations. Nous les avons présentées au ministre de la Sécurité publique et mené des consultations continues. Je suis désolé, mais j’ai oublié l’autre partie de la question.

Le sénateur Klyne : Pensez-vous que des mesures législatives supplémentaires seront nécessaires?

M. Wade : Nous avions initialement envisagé l’idée d’imposer des peines minimales, mais je ne vois rien de tel dans le projet de loi. Je crois qu’il y a là matière à discussion pour au moins commencer à en parler.

Le sénateur Klyne : Je vous remercie.

Le sénateur Cotter : Merci, messieurs, d’être venus témoigner. Nous obtenons toujours un aperçu du monde dans lequel vous travaillez, le dessus du panier, si on peut dire.

J’ai une question d’ordre général. Inspecteur Wade, vous avez fait référence à d’autres initiatives qui pourraient être intéressantes dans un cadre législatif. Voici en quoi tient généralement ma question : de vos points de vue respectifs, êtes-vous tous les trois en faveur des modifications et des mesures législatives qui figurent dans cette partie du projet de loi d’exécution du budget?

M. Wade : Je représente la PPO, et nous appuyons les modifications qui figurent dans le projet de loi.

Le sénateur Cotter : Je vous remercie.

M. Heard : Au nom du Comité sur les amendements législatifs de l’Association canadienne des chefs de police, je peux dire que nous appuyons les modifications et que nous croyons qu’elles seront utiles pour lutter contre le vol d’automobiles et le crime organisé.

M. Authier : Je suis du même avis que mes collègues.

Le sénateur Cotter : C’est tout. Je vous remercie.

La sénatrice Simons : Je conduis une Honda 2014 cabossée, que j’ouvre à l’aide d’une clé en métal. Je ne serai probablement pas la cible de ce genre de réseaux. J’habite aussi à Edmonton, loin d’un port de mer. Mais un collègue du Sénat a récemment été victime d’une invasion de domicile pour voler sa Mercedes personnalisée haut de gamme. Selon lui, ceux qui ont pénétré chez lui étaient jeunes, très jeunes.

J’ai deux questions dans la foulée de son expérience. Il était fâché parce qu’il avait posé un dispositif de suivi électronique sur la voiture et savait où elle se trouvait, mais quand il a appelé la police, il était furieux qu’elle n’ait fait aucun effort pour la récupérer. Il me semble qu’il soit juste de dire que très peu de grands services de police métropolitains auraient les ressources ou la capacité nécessaires pour récupérer une voiture, même si on sait où elle se trouve avec un GPS. Une fois la voiture volée, à quelle fréquence pouvez-vous arrêter le voleur?

M. Wade : Je sais que c’est une question importante. Je pense avoir parlé à votre collègue dans le couloir plus tôt.

La sénatrice Simons : Cette affaire le fâche un peu.

M. Wade : Oui. Sur le plan de l’application de la loi, je peux vous dire que si la police a reçu des renseignements sur l’emplacement d’un véhicule, nous ferons tout ce que nous pouvons pour le localiser. Nous travaillons actuellement au sein d’un groupe de travail doté d’une stratégie nationale et d’un protocole pour localiser et suivre les véhicules volés. Ce que nous essayons de faire, c’est officialiser la réaction de la police. Que le vol survienne à Sarnia, en Ontario, à Toronto ou à Québec, chaque policier sait à qui il peut s’adresser pour obtenir de l’aide et retracer le véhicule. Dans le cadre de cette stratégie, nous travaillons avec les ports et l’ASFC pour faire un suivi avancé, ainsi qu’avec les fabricants d’automobiles et les entreprises privées qui utilisent des stratégies ou des dispositifs de suivi.

C’est vraiment le fer de lance de nos démarches et des stratégies de lutte contre le vol de véhicules. Je dirai que nous ne récupérons pas tous les véhicules. Nombre d’entre eux quittent le port, mais avec le travail qui se fait, il y a eu énormément d’amélioration.

La sénatrice Simons : Je voudrais poser la question suivante à vous tous. Le renforcement des peines n’est efficace que s’il y a quelqu’un à qui les imposer. Si un grand nombre des personnes qui commettent des vols sont de jeunes contrevenants auxquels les modifications proposées pour la détermination de la peine ne s’appliqueront pas, dans quelle mesure sont-elles utiles et pertinentes pour atténuer le problème?

M. Heard : Je pense que la réponse comporte deux volets. En termes d’activités policières, il s’agit évidemment de comprendre l’ampleur du problème, l’impact qu’il a sur notre communauté, y compris pour un cas comme celui vécu par l’honorable sénateur auquel vous avez fait allusion. Une réponse policière plus coordonnée et plus robuste, comme l’a souligné l’inspecteur-détective Wade, constitue le premier volet.

En ce qui concerne tous les appels auxquels la police est confrontée quotidiennement, tous les membres du public qui attendent une intervention, il y a toujours un ordre de priorité en place. Le fait que ces crimes soient considérés plus graves signifie qu’ils seront placés en haut de la liste afin d’assurer une réponse plus rapide, pour desservir la communauté et également augmenter nos chances d’appréhender les délinquants et de les traduire en justice.

La sénatrice Simons : J’avais une question, si vous le permettez, sur un point de la section 34, à laquelle j’espère que les chefs de police pourront répondre. La sénatrice Batters a soulevé hier, à la fin de notre réunion, la question du maintien des comptes. La formulation du projet de loi est particulière, elle parle de « comptes » mais ne précise pas de quel type de comptes il s’agit. S’agit-il de comptes bancaires? S’agit-il de comptes personnels de médias sociaux? Cette question ne s’adresse pas à tous, mais n’importe qui peut y répondre. Que pensez-vous de ces nouvelles règles pour garder les comptes ouverts et comment croyez-vous qu’elles pourraient être utiles pour les enquêtes criminelles?

M. Heard : En lisant le texte du projet de loi, j’ai également pensé qu’il y avait matière à interprétation. J’ai cru comprendre que l’utilisation générale du terme « comptes » pouvait s’appliquer aussi bien aux institutions financières qu’aux médias sociaux. Dans les deux cas, je peux dire que, dans la pratique, les enquêtes policières peuvent être contrecarrées lorsque des comptes bancaires ou de médias sociaux sont fermés, en ce qui concerne notre capacité à identifier que ces comptes existent, qu’ils sont des sources potentielles de preuves et que nous cherchons à obtenir les autorisations judiciaires requises pour recueillir des informations.

L’allongement de ce délai serait utile. Mon interprétation personnelle du projet de loi est qu’il s’appliquerait aux deux types, mais je comprends évidemment qu’il puisse y avoir une certaine ambiguïté.

La sénatrice Simons : Il existe toutes sortes de comptes. Nous utilisons ce mot pour décrire beaucoup de choses différentes. Êtes-vous satisfait de l’imprécision volontaire de ce libellé ou préféreriez-vous qu’il soit mieux défini?

M. Heard : Je comprends votre question. Je pense qu’il pourrait être mieux défini. La carte de fidélité à l’épicerie locale n’a probablement pas besoin d’être conservée pendant 60 jours, mais je pense vraiment que les comptes bancaires et ceux des médias sociaux sont les plus utiles pour les policiers et l’application de la loi. Ce sont les plus utiles d’un point de vue pratique, je pense.

La sénatrice Simons : Parfait. Merci beaucoup à tous.

[Français]

Le sénateur Carignan : Vous avez parlé plus tôt de la question des peines minimales qui a été discutée, mais elle semble avoir été laissée de côté. Savez-vous pourquoi?

[Traduction]

M. Wade : Je suis désolé, j’ai entendu « peines minimales obligatoires », mais je n’ai pas saisi…

Le sénateur Carignan : J’ai entendu dire qu’on en avait discuté avec le groupe, et il semble que cette amélioration ait été mise de côté pour discussion future. Savez-vous pourquoi elle ne figure pas dans le projet de loi?

M. Wade : Je m’excuse, je ne sais pas pourquoi elle n’y figure pas. Nous en avons discuté. Elle fait partie de certaines de nos recommandations de l’Association des chefs de police de l’Ontario, ou ACPO, et de l’Association canadienne des chefs de police, ou ACCP, et elle a fait l’objet de discussion, mais je ne sais pas pourquoi.

[Français]

Le sénateur Carignan : D’accord.

Il semble que ce sont des défectuosités par rapport aux clés. Je sais qu’il y a un recours collectif en cours contre les fabricants automobiles, au Québec du moins. Avez-vous eu des discussions avec les fabricants automobiles pour qu’ils corrigent la situation? C’est un enjeu de sécurité. Si j’ai plusieurs accidents parce que les freins ne fonctionnent pas, cela peut devenir criminel, jusqu’à un certain point. C’est un enjeu de sécurité. Plusieurs vols d’autos se produisent, car les codes des clés sont capturés. Cela semble être un enjeu de sécurité. Avez-vous eu des discussions avec les fabricants automobiles pour qu’ils corrigent la situation?

[Traduction]

M. Wade : Je suis heureux que vous posiez cette question. Nous nous sommes engagés avec les constructeurs automobiles à trouver des solutions et à partager nos informations. Lorsque nous menons une enquête et retrouvons un véhicule volé, toutes les informations dont nous disposons sur la manière dont ce véhicule a été volé, sur ce qui a été utilisé ou sur les éventuelles failles du système qui pourraient être corrigées, sont transmises aux constructeurs automobiles du Canada par l’intermédiaire de nos partenaires d’Équité. Nous partageons donc ces informations avec eux. Je sais qu’ils s’efforcent de corriger les failles.

Je ne suis pas au courant du recours collectif, mais lorsque nous parlons de collaborer avec les constructeurs automobiles en ce qui concerne les dispositifs d’immobilisation automatique et les formes avancées de cette technologie, il faut discuter de sécurité. Les choses doivent être faites de façon sécuritaire. Nous ne pouvons pas faire immobiliser un véhicule sur une autoroute à grande vitesse, mais il serait très utile de pouvoir faire ralentir un véhicule lors d’une poursuite ou d’une arrestation par la police.

[Français]

Le sénateur Carignan : Avez-vous des statistiques sur le mode d’emploi utilisé par les voleurs? Par exemple, on pourrait dire que 35 % des vols sont effectués en utilisant une captation des zones des clés. Casser la vitre et toucher aux fils, je crois que cela ne se fait plus; ils sont plus subtils. Avez-vous des statistiques sur le modus operandi utilisé?

[Traduction]

M. Wade : En ce qui concerne les statistiques sur la façon dont les véhicules sont volés, je ne les ai pas avec moi. Je ne peux pas répondre immédiatement, mais je vais demander à nos partenaires d’Équité de nous fournir cette information, et je pourrai la communiquer par écrit au greffier.

Ce que je peux dire, c’est que cela évolue constamment. Vous parlez de briser des vitres et de pénétrer dans des voitures de cette manière, et cela se produit encore. Pour l’une des méthodes de vol, les voleurs ont besoin d’accéder à l’habitacle du véhicule, c’est pourquoi ils percent parfois un petit trou dans la fenêtre. Les méthodes de vol sont propres au véhicule et à sa vulnérabilité.

[Français]

Le sénateur Carignan : On utilise des jeunes pour commettre des vols d’autos. C’est un constat. Il me semble qu’on entend de plus de plus parler de voleurs qui font des accidents et on réalise que ce sont des jeunes. Je ne veux pas généraliser, mais ça semble être une façon de faire : on se sert des jeunes pour éviter les condamnations. Est-ce ce que vous constatez dans le cadre des vols de véhicules? On utilise des personnes de moins de 18 ans pour s’assurer de ne pas avoir des peines plus lourdes? Est-ce que cela fait partie du modus operandi du crime organisé?

[Traduction]

M. Wade : Je pense qu’il s’agit d’une tactique qu’ils emploient, ils utilisent des jeunes pour commettre des vols et d’autres délits, pour un certain nombre de raisons. La police ne connaît pas ces jeunes. Nous connaissons les acteurs au niveau intermédiaire du crime organisé et qui dirigent les vols. Nous ne connaissons pas ceux qui se situent au bas de l’échelle. Il s’agit d’une lacune en matière de renseignement, car ils sont jeunes et nouveaux dans le domaine de la criminalité. Par ailleurs, je pense qu’ils savent que les peines ne seront pas aussi sévères et qu’ils ne seront pas placés en détention.

[Français]

Le sénateur Carignan : Merci.

[Traduction]

La sénatrice Clement : Merci aux trois témoins pour leur travail et leur carrière. J’ai beaucoup de reconnaissance envers vous.

J’ai une question sur la communication avec le public canadien. Lorsque j’étais maire de Cornwall, je siégeais au conseil d’administration du service de police de Cornwall. Le service de police de Cornwall veillait à échanger régulièrement avec la communauté au sujet des enjeux qui la concernait.

Je me demande si l’un d’entre vous pourrait nous expliquer ce que vos organisations vont dire au sujet de ces amendements. Vous avez dit au sénateur Cotter que vous les approuviez, mais sont-ils rassurants pour vous? Qu’y ajouteriez-vous du point de vue de la sécurité publique? Car, comme l’a indiqué la sénatrice Simons, le public canadien est frustré et contrarié. Cette mesure est-elle utile? Selon vous, que devrions-nous dire de plus pour rassurer la population?

M. Wade : En ce moment, nous élaborons notre stratégie provinciale de lutte contre le vol d’automobiles. L’un des piliers de notre stratégie est l’éducation, les médias et la diffusion d’informations au public. Lorsque l’enquête aboutit à un résultat substantiel ou qu’il y a des changements dans l’environnement dont nous voulons informer le public, nous utilisons les médias pour cela. La stratégie médiatique fait partie de nos stratégies provinciales.

Nous parlons, dans le cadre d’une stratégie nationale, d’harmoniser nos messages, par exemple pour le protocole national de suivi des véhicules volés. Nous discutons de la manière de transmettre ces informations au public pour qu’il sache ce que nous faisons, mais aussi pour qu’il sache ce qu’il faut faire en cas de vol de voitures et comment nous y répondons.

C’est inclus dans nos plans. Je ne pense pas que nous ayons intégré les informations relatives au nouveau projet de loi dans un plan médiatique ou dans une discussion, mais nous le ferons certainement à l’avenir.

La sénatrice Clement : Je vous remercie. Y a-t-il autre chose?

M. Heard : Je suis heureux de me faire l’écho des commentaires de l’inspecteur-détective Wade.

Je suis d’accord avec votre commentaire selon lequel il est d’une importance vitale pour nous, en tant que responsables de la police, de disposer d’une solide stratégie de communication publique pour éduquer le public sur ce nouveau type de criminalité qui a émergé au cours des dernières années, ainsi que pour le rassurer quant à l’existence d’une action coordonnée. Le sommet national qui s’est tenu en février et le plan d’action national de lutte contre le vol d’automobiles qui a été élaboré ont bénéficié d’une grande couverture médiatique. De toute évidence, les changements législatifs seraient la concrétisation de tout ce travail accompli collectivement — les dirigeants de la police, du gouvernement et de l’industrie s’unissant pour tenter de lutter contre ce nouveau type de criminalité.

La sénatrice Clement : Merci.

La sénatrice Pate : Ma question s’adresse à vous deux, mais plus particulièrement à l’Association canadienne des chefs de police.

Votre association a récemment attribué la diminution des vols de voitures après 2007 à l’obligation de Transports Canada pour les constructeurs automobiles d’équiper les voitures de dispositifs antivol d’immobilisation du moteur et a recommandé l’utilisation de mesures réglementaires supplémentaires en matière de technologie antivol afin de s’attaquer au problème du vol de voitures.

Nombre d’entre nous, y compris moi, craignent que ces mesures n’aient pour effet de pénaliser les personnes les plus faciles à attraper et pas nécessairement — comme vous l’avez dit, inspecteur-détective Wade — celles qui sont les plus impliquées dans ces crimes et qui en tirent le plus grand profit.

Je suis curieuse de connaître votre réaction au fait que ces mesures ne figurent pas dans cette section et que le fait que les constructeurs automobiles pourraient s’attaquer directement à ce problème n’a pas été pris en compte lors de la prise de décision. Au lieu de cela, nous envisageons une modification au Code criminel.

L’ACCP pourrait-elle préciser sa position?

Monsieur Wade, la PPO a-t-elle une position sur l’orientation à prendre face à ce type d’entreprises commerciales?

M. Heard : Je pense que la diminution des vols de voitures est due aux progrès technologiques. Le passage à l’entrée sans clé et à la technologie « pousser pour démarrer » a grandement contribué à réduire les vols de voitures dans tout le pays.

En particulier en 2022-2023, avec l’émergence du crime organisé qui tire parti de ces moyens de contournement et de la technologie à des fins malveillantes pour déjouer les mécanismes de sécurité, nous avons constaté une augmentation des vols d’automobiles organisés et misant sur la technologie. Il s’agit d’une composante du crime organisé.

La classification du vol de voitures a inexplicablement changé au Canada. Avant, au cours de ma carrière de policier, il s’agissait essentiellement d’un crime contre les biens, des personnes se baladant en voiture volée ou volant un véhicule pour commettre d’autres délits contre les biens. Alors qu’aujourd’hui, nous constatons que plus d’un sixième de tous les véhicules volés ne sont jamais retrouvés. Très souvent, ils sont exportés vers d’autres pays, comme l’a souligné l’inspecteur Wade.

J’apprécie vos commentaires. Il est clair que les deux approches sont nécessaires. Les amendements augmentent la gravité et les sanctions pénales pour le crime organisé, ce qui est utile du point de vue de l’application de la loi. Bien sûr, on pourrait faire plus en travaillant avec l’industrie pour essayer de lutter encore plus contre le vol de voitures, en ne se contentant pas de compter sur les sanctions pénales.

M. Wade : Ce sont d’excellents commentaires. Je vous remercie, inspecteur Heard. Je suis d’accord avec tout ce que vous avez dit.

J’ajouterai que nous assistons à une évolution de la crise du vol de véhicules au Canada. À mesure que les voitures deviennent plus difficiles à voler, les groupes criminels organisés s’adaptent. Ce que nous voyons actuellement dans la région du Grand Toronto, c’est l’évolution vers le vol de voitures avec violence — des cambriolages dans les maisons, des détournements de voitures dans les rues et des introductions par effraction. Nous sommes prêts à réagir à cette évolution. Lorsque nous voyons un tel phénomène, c’est le signe que nous avons un effet.

Les amendements proposés dans le projet de loi, qui mettent en lumière l’implication du crime organisé, la violence et le recours à des jeunes pour ces crimes, permettent d’atteindre le palier suivant du vol de voitures. Comme l’a dit mon confrère, il y a 20 ans, nous considérions que c’était un crime contre les biens. Nous ne voyons plus les choses ainsi. Ce n’en est pas un, et nous ne pouvons pas agir de la sorte. C’est ainsi que ces amendements aideront à composer avec l’évolution du crime organisé.

La sénatrice Pate : Si j’insiste sur ce point, c’est bien sûr parce qu’une grande partie de mon travail s’est déroulée dans les prisons et leurs environs. Nous constatons que ce sont surtout les personnes les plus faciles à attraper qui finissent là, et souvent des jeunes défavorisés et de différentes origines raciales, très franchement, ou de jeunes adultes, comme vous l’avez indiqué.

Trop souvent, d’après mon expérience de travail avec la police, celle-ci ne dispose pas des ressources nécessaires pour mener les enquêtes plus complexes qui sont requises pour s’attaquer au crime organisé et aux liens internationaux.

Ce problème persiste-t-il ou est-il abordé? En ce qui concerne les vols de voitures, je pense au fait que des noms figurent dans les Pandora Papers et les Panama Papers, mais qu’aucune poursuite n’a été engagée contre ces personnes, alors que nous savons qu’elles commettent des fraudes et des évasions fiscales. Je ne suis pas convaincue que ces mesures nous permettront de mettre la main sur les gros bonnets, pour ainsi dire.

M. Wade : C’est un bon point. Nous parlons d’une approche à l’échelle de la société. Nous ne pouvons pas l’envisager sous un seul angle. Bien sûr, nous avons besoin d’agents de première ligne, d’actions sociales, et nous devons examiner ce qui est à l’origine de ce problème, en amont. Je peux vous dire qu’avec notre équipe provinciale de lutte contre le crime organisé dans l’industrie du remorquage des véhicules et le vol d’automobiles, notre stratégie — notre mandat principal — se rapporte aux groupes criminels organisés responsables et à l’origine des vols d’automobiles. Je pense pouvoir dire, au nom de mes partenaires de la région du Grand Toronto et de l’Ontario, que nous nous attardons à la criminalité organisée. Nous ne voulons pas arrêter 30 voleurs de voitures. Nous voulons attraper ceux qui sont à l’origine de ces vols et restreindre leurs gains financiers, vous savez, en utilisant des outils comme le blanchiment d’argent et les enquêtes financières. Nous cherchons vraiment à cibler la conspiration aux échelons supérieurs, les enquêtes sur le crime organisé et les inculpations.

Il y a beaucoup de réussites à ce chapitre. Il a été question plus tôt du projet Odyssey, par le service régional de police de Peel; du projet Fairfield, par la Police provinciale de l’Ontario; et du projet Vector. Il s’agit d’examiner la question non pas du point de vue de la récupération, mais plutôt de la criminalité organisée. Il y a le projet Emissions, je veux dire. Je pourrais en dire plus, mais j’espère avoir répondu à votre question.

La présidente : Je vous remercie. Est-ce que c’est tout?

La sénatrice Pate : Je ne sais pas si l’Association canadienne des chefs de police, ou ACCP, veut ajouter quelque chose.

M. Authier : En ce qui concerne les outils fournis, je pourrais peut-être ajouter que ce projet de loi crée également une nouvelle infraction pour le recyclage des produits de la criminalité, ce qui donne à la police une nouvelle option pour s’attaquer aux hautes sphères de l’organisation. Il y a aussi un outil qui permet de garder les comptes ouverts afin que nous puissions recueillir les renseignements et les preuves afin d’intenter des poursuites pour ces infractions, ce qui fait parfois défaut à l’heure actuelle. Il est difficile de mettre la main au collet des personnes les plus haut placées parce que nous ne pouvons pas rassembler toutes les preuves.

Ce sont deux outils que l’ACCP soutient fortement parce qu’ils aideront la police à enquêter sur les hauts responsables de l’organisation.

La sénatrice Pate : Je vous remercie.

La présidente : Je vous remercie.

[Français]

Bienvenue, sénateur Forest. Nous sommes heureux que vous soyez avec nous.

Le sénateur Forest : Merci, madame la présidente. Ma question s’adresse à M. Authier, qui est membre du Comité sur les amendements législatifs.

Il faut un mandat pour que la police fouille un conteneur scellé. De plus, pour l’obtenir en bonne et due forme, cela prend des motifs raisonnables de croire que l’on contrevient à une loi. Est-ce qu’il n’y aurait pas lieu d’assouplir la démonstration qui doit être faite pour obtenir ce mandat afin de faciliter l’inspection, particulièrement celle des conteneurs?

[Traduction]

M. Authier : La question vise à savoir si la norme pour obtenir l’ordonnance de communication ou le maintien du compte ouvert en vertu de ces dispositions devrait être assouplie d’un point de vue judiciaire, n’est-ce pas?

[Français]

Le sénateur Forest : Il vous faut un mandat, par exemple, pour fouiller un conteneur. Est-ce qu’il n’y aurait pas lieu d’assouplir les exigences pour obtenir ce mandat afin de faciliter le travail des autorités policières?

[Traduction]

M. Authier : Du point de vue de la police, nous serions probablement favorables à un assouplissement de ces règles, mais je suis conscient que les individus ont des droits constitutionnels, et que nous devons donc trouver un équilibre entre les besoins de l’enquête policière et le droit de la population à la vie privée. Je pense que pour l’instant, l’examen de ces principes par le juge et une tierce partie constitue un bon équilibre. C’est probablement adéquat, et il y a, selon la disposition... Actuellement, il faut avoir des motifs raisonnables de croire ou de soupçonner que cela aidera une enquête.

Peut-être que mon collègue aura plus de choses à dire, mais je doute que nous cherchions à demander un assouplissement de ces règles à ce stade-ci.

M. Heard : Je peux compléter avec plaisir. En pratique, voici comment nous abordons la question des soupçons par opposition aux motifs raisonnables ou des motifs de demander un mandat. En fait, nous renforçons et améliorons la collaboration avec nos partenaires de l’Agence des services frontaliers du Canada, ou ASFC, qui disposent de pouvoirs beaucoup plus vastes leur permettant de fouiller et d’inspecter les marchandises, que ce soit dans les gares de triage ou les ports. Ce qui compte vraiment, c’est cette intensification de l’échange d’information et de la coordination, qui sont au cœur du plan d’action national pour lutter contre le vol de véhicules.

[Français]

Le sénateur Forest : Toujours en ce qui concerne les conteneurs, est-il exact que les compagnies maritimes, qui transportent d’immenses quantités de conteneurs et qui servent souvent à distribuer les véhicules volés, n’ont aucune responsabilité quant à ce qu’elles transportent comme marchandise?

[Traduction]

M. Authier : C’est une très bonne question. Je crois que vous avez raison de dire que ces compagnies se déchargent de leur responsabilité, et qu’ils ne sont pas responsables de ce qu’ils transportent. Les personnes qui sont réellement responsables... Les personnes qui expédient ne sont pas responsables de ce qui se trouve dans les conteneurs.

Il y a probablement quelqu’un de mieux placé que moi pour étudier l’aspect responsabilité du transport. Malheureusement, je n’ai pas la loi sous la main, mais je pense que vous avez raison.

M. Wade : Je pourrais ajouter un commentaire à ce sujet, si j’ai le temps. Très rapidement, à l’Association des chefs de police de l’Ontario, nous avions recommandé qu’il y ait une discussion afin d’accroître la responsabilité des compagnies de transport maritime. À l’heure actuelle, elles peuvent modifier un connaissement 72 heures après le départ du pays et changer les détails de l’expédition. C’est un enjeu. C’est un problème.

En outre, à moins que les compagnies ne soient tenues financièrement responsables, c’est souvent ce qui favorise la responsabilité. Elles participent donc aux discussions. Nous avons eu des échanges indépendants entre la police et nos partenaires autres que les forces policières dans l’industrie du transport maritime, et les compagnies ont fait des progrès, mais il y a encore du travail à faire. Quoi qu’il en soit, c’est un très bon point.

[Français]

Le sénateur Forest : Merci.

[Traduction]

Le sénateur Dalphond : J’ai une question rapide à l’intention de notre groupe de témoins. Ces dispositifs électroniques sont-ils interdits aux États-Unis?

M. Wade : Mes amis pourront peut-être répondre. Je l’ignore. Veuillez m’excuser. Si vous le souhaitez, je peux me renseigner et vous revenir, et voir si je trouve une législation américaine. Mes partenaires ont peut-être des informations là-dessus.

Le sénateur Dalphond : Vous dites que les dispositifs sont dans un entrepôt chez certains des principaux fournisseurs ici au Canada, mais si nous les rendons illégaux, et qu’il est facile de les acheter de l’autre côté de la frontière, cela pourrait rester une option pour ceux qui veulent y avoir accès.

Êtes-vous au courant, messieurs Heard ou Authier?

M. Heard : Non, c’est une très bonne question. Je sais que ces dispositifs sont disponibles en ligne, comme l’a dit l’inspecteur Wade, mais la façon dont ils sont réglementés et contrôlés aux États-Unis est une très bonne question. C’est un point sur lequel nous devrons faire des recherches pour vous répondre.

Le sénateur Dalphond : Je vous remercie.

[Français]

Le sénateur Carignan : Ma question porte sur le paragraphe 333.1(1) sur les peines minimales. On prévoit une peine minimale de six mois pour vol de véhicule à la troisième récidive. Cependant, pour un vol commis avec violence et pour les nouvelles infractions, qui sont des infractions beaucoup plus graves, on ne prévoit pas de peine minimale. J’ai de la difficulté à voir quelle est la raison qu’on vous a donnée pour qu’il y ait une peine minimale pour un vol de voiture simple après trois récidives, mais pas de peine minimale pour une infraction plus grave de vol de voiture avec violence, de vol commis pour le crime organisé, etc. Comment expliquez-vous cela? J’ai de la difficulté à comprendre.

[Traduction]

M. Wade : Je peux faire un commentaire rapide, et je suis sûr que mes partenaires de l’ACCP auront quelque chose à dire à ce sujet.

La peine minimale obligatoire pour une troisième récidive viserait un voleur de voitures en série, qui n’est pas violent. En ce qui concerne les délits avec violence, il est évident qu’un éventail de peines plus large peut être appliqué. Je crois qu’il y a également un débat sur les peines minimales pour les vols de voitures avec violence. Cette question n’est pas abordée pour l’instant dans le projet de loi.

[Français]

Le sénateur Carignan : Par contre, on ne vous a pas justifié cela. C’est ce que vous croyez, mais on ne vous a pas donné de justification pour ne pas imposer une peine minimale dans ces situations aussi.

[Traduction]

M. Wade : Je suis désolé, mais j’ignore pourquoi il n’en est pas question. Il y a un endroit pour en discuter, et c’est peut-être dans le cadre de l’examen plus poussé. Ces projets de loi sont introduits, et ils sont constamment réexaminés. L’examen constant est un bon moyen de procéder.

[Français]

Le sénateur Carignan : Je pose la question aux autres témoins. Vous a-t-on donné une justification pour imposer une peine minimale pour un vol simple de voiture après une troisième récidive, mais pas de peine minimale pour un vol commis avec violence ou pour une organisation criminelle?

[Traduction]

M. Authier : Je ne sais pas personnellement si une justification a été donnée pour ne pas inclure une peine minimale lors d’une troisième récidive ou d’infractions subséquentes. Ce que je peux dire, c’est que même s’il n’y a pas de peine minimale, cela ne veut pas dire qu’un délinquant ayant commis un troisième crime violent ne va pas recevoir une peine plus sévère. Fort probablement, le procureur demandera plus que la peine minimale de six mois en cas de troisième infraction violente. Le fait que ce délit soit désormais passible d’une peine maximale de 14 ans incitera le juge à le prendre plus au sérieux; par conséquent, la peine devrait être plus lourde que pour le premier crime.

Or, l’ACCP préconise des peines minimales plus sévères pour les récidives avec violence. Nous y serions favorables. Toutefois, je sais que la peine de 14 ans au lieu de 10 pour l’infraction indique au tribunal qu’il s’agit de gestes plus graves. Le procureur dispose ainsi d’outils pour faire valoir ce point de vue.

Inclure des peines minimales à cette disposition aussi serait un amendement valable.

Le sénateur Carignan : Je vous remercie.

Le sénateur Klyne : Merci beaucoup, inspecteur-détective Wade. Il fut un temps où il était suffisamment dissuasif de graver la vitre d’un véhicule haut de gamme. Les voleurs s’en éloignaient tout simplement. De même, dans une moindre mesure, il suffisait de voir la barre verrouillée au volant. Que pouvez-vous proposer aux propriétaires de voitures d’aujourd’hui?

M. Wade : C’est une excellente question. Avec une technologie de pointe, il faut une réponse de pointe. La gravure de la vitre était donc le moyen technique le moins avancé pour prévenir le vol.

Il existe aujourd’hui des dispositifs de repérage; vous pouvez en installer sept différents dans votre voiture. Les voleurs ne peuvent pas les trouver, parce qu’ils sont difficiles à localiser. Ces dispositifs sont très efficaces, parce qu’il est impossible de trouver un seul dispositif — comme un AirTag d’Apple — et de s’en débarrasser, étant donné qu’il y en a plusieurs cachés. C’est une façon de procéder.

Le problème avec la technologie, c’est qu’à la minute où nous mettons en place une prévention technologique, les malfaiteurs travaillent déjà à une solution. Cela ne veut pas dire que nous nous arrêtons; nous continuons, nous progressons, nous développons des outils, puis nous nous ajustons et réagissons.

Le sénateur Klyne : Existe-t-il une page Web que je peux consulter?

M. Wade : Oui. Je ne veux pas faire de publicité à une entreprise en particulier. Il y en a beaucoup. Ce n’est pas à moi de faire de la publicité, mais vous pouvez les trouver en faisant une recherche sur Internet.

La présidente : Inspecteur-détective, merci beaucoup d’avoir fait le voyage depuis la Saskatchewan. Certains d’entre nous le font chaque semaine, mais c’est quand même très gentil à vous d’être venu, parce que vous êtes de l’Ontario.

Messieurs Heard et Authier, je vous remercie beaucoup d’être venus. Nous vous en sommes très reconnaissants.

(La séance est levée.)

Haut de page