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LCJC - Comité permanent

Affaires juridiques et constitutionnelles


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES AFFAIRES JURIDIQUES ET CONSTITUTIONNELLES

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le mercredi 8 mars 2023

Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles se réunit aujourd’hui, à 16 h 15 (HE), avec vidéoconférence, pour étudier le projet de loi S-212, Loi modifiant la Loi sur le casier judiciaire et d’autres lois en conséquence et abrogeant un règlement.

Le sénateur Brent Cotter (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Bienvenue au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.

Avant de commencer, je demanderais aux sénateurs de se présenter, en commençant à ma gauche.

Le sénateur Boisvenu : Sénateur Pierre-Hugues Boisvenu, du Québec.

[Traduction]

Le sénateur Tannas : Scott Tannas, de l’Alberta.

Le sénateur Klyne : Marty Klyne, de la Saskatchewan, territoire du Traité no 4.

[Français]

La sénatrice Dupuis : Renée Dupuis, sénatrice indépendante, division sénatoriale des Laurentides, au Québec.

La sénatrice Clement : Bernadette Clement, de l’Ontario.

[Traduction]

Le président : Je m’appelle Brent Cotter, sénateur de la Saskatchewan et président du comité.

Chers collègues, nous poursuivons cet après-midi notre étude sur le projet de loi S-212, Loi modifiant la Loi sur le casier judiciaire et d’autres lois en conséquence et abrogeant un règlement.

Nous accueillons aujourd’hui M. Chad Westmacott, directeur général de la sécurité communautaire, des services correctionnels et de la justice pénale au Secteur de la prévention du crime de Sécurité publique Canada. Monsieur Westmacott, vous disposerez d’environ cinq minutes pour faire votre exposé. Les sénateurs vous poseront des questions par la suite.

Chad Westmacott, directeur général, Sécurité communautaire, services correctionnels et justice pénale, Secteur de la prévention du crime, Sécurité publique Canada : Merci, monsieur le président. Honorables sénateurs, je suis heureux d’être ici aujourd’hui pour discuter du projet de loi S-212, Loi modifiant la Loi sur le casier judiciaire et d’autres lois en conséquence et abrogeant un règlement. Merci de m’avoir invité.

Je tiens tout d’abord à souligner que je me trouve sur le territoire traditionnel du peuple algonquin anishinabe.

Je salue la ténacité et le dévouement dont on a fait preuve dans le cadre de ce projet de loi pour aider les personnes les plus touchées par les casiers judiciaires à obtenir une suspension de leur casier en temps opportun. Le projet de loi propose un système automatisé d’expiration des casiers judiciaires, sans frais, pour tous les casiers judiciaires. Ce système s’appliquerait automatiquement aux infractions punissables par procédure sommaire après deux ans et aux infractions punissables par mise en accusation après cinq ans.

Je crois que nous avons pour objectif commun d’accroître l’accessibilité aux pardons grâce à des réformes du programme de suspension du casier. Le gouvernement et la sénatrice conviennent tous les deux que l’élimination de la stigmatisation des personnes ayant un casier judiciaire leur permettrait d’accéder plus facilement à un logement adéquat, à un emploi intéressant et à des possibilités d’éducation, ce qui se traduirait par une réduction de la récidive et une amélioration de la réinsertion sociale.

C’est la raison pour laquelle le gouvernement travaille avec diligence afin d’apporter des modifications au programme de suspension du casier. L’année dernière, le 1er janvier 2022, le gouvernement a réduit les frais pour une demande de suspension du casier, qui sont passés de 657,77 à 50 $. Le gouvernement reconnaît que la demande de suspension du casier est un processus complexe, en particulier pour les membres de communautés marginalisées et racisées, qui sont les plus touchés par les casiers judiciaires.

Afin d’aider les personnes à s’y retrouver dans le processus de demande et de s’assurer qu’elles disposent des renseignements et des ressources nécessaires, le gouvernement verse 18 millions de dollars sur quatre ans à des organisations qui œuvrent dans les domaines du système correctionnel, de la mise en liberté sous condition et de la réinsertion sociale, pour fournir ces services.

Ce n’est pas tout. Le gouvernement étudie activement la possibilité de mettre en place un système de retrait automatisé de casiers judiciaires, ou RACJ, pour les infractions moins graves, pour les personnes qui mènent une vie exempte de criminalité.

Au printemps dernier, le gouvernement a mené des consultations auprès d’intervenants de la justice pénale ainsi qu’auprès des provinces et des territoires afin de comprendre les lacunes et les facteurs à prendre en considération pour qu’un système de RACJ soit réalisable. De plus, des personnes nous ont parlé de leur expérience, des conséquences qui découlent du fait d’avoir un casier judiciaire et de ce qu’offre une suspension du casier.

Il est clair qu’un système automatisé de suspension du casier est une entreprise à plus long terme qui exige que les bases de données fédérales, provinciales, territoriales et municipales soient interopérables, qu’elles contiennent des dossiers numériques associés aux empreintes digitales pour toutes les infractions admissibles et qu’elles comprennent des renseignements démontrant que la peine a été purgée, entre autres aspects complexes sur le plan opérationnel. Un système de RACJ exige que des casiers judiciaires complets soient disponibles et accessibles en temps opportun.

Le gouvernement a l’intention de poursuivre ses efforts en vue de trouver le moyen le plus efficace d’atteindre cet objectif, tout en maintenant les mesures de sécurité publique dans le système. Nous voulons certainement bien faire les choses.

La proposition d’établir un système d’expiration des casiers dans le cadre du projet de loi S-212 ne tient pas compte des considérations opérationnelles importantes qu’un système automatisé entraînerait et ne permet pas de déterminer les répercussions sur les ressources, qui sont importantes et nécessaires pour créer et mettre en œuvre un nouveau système.

Nos homologues des provinces et des territoires ont clairement indiqué que, bien qu’ils soutiennent le but des initiatives du gouvernement, il reste beaucoup de travail à faire.

De plus, le projet de loi S-212 vise à ce que l’on applique les mesures à la plupart des casiers judiciaires sans tenir compte de la gravité du crime avant de permettre son expiration permanente et définitive.

En retirant le casier judiciaire, on élimine la possibilité pour les organismes d’application de la loi d’y accéder et de révoquer ou d’annuler la suspension du casier si une personne récidive, sauf dans des cas précis.

La possibilité de révoquer ou d’annuler la suspension d’un casier est une mesure de protection importante énoncée dans la Loi sur le casier judiciaire qui vise à assurer la sécurité des collectivités.

Cela étant dit, le gouvernement convient que les suspensions du casier devraient être rendues plus accessibles aux personnes respectueuses de la loi qui vivent dans la collectivité sans commettre de crime.

Le RACJ serait semblable au projet de loi S-212 quant à son but, mais il y a des différences fondamentales que je veux souligner.

Premièrement, un système de RACJ ne s’appliquerait probablement qu’aux infractions moins graves, en particulier les condamnations pour infractions punissables par procédure sommaire et non celles pour infractions punissables par mise en accusation. Cette approche s’alignerait avec les approches que d’autres pays aux vues similaires ont adoptées en ce qui concerne le système automatisé de suspension du casier.

Lors de consultations, nous avons appris que les principaux intervenants du système de justice pénale soutiennent l’idée d’adopter un système de RACJ, mais qu’ils veulent que le système soit assorti de mesures de protection.

Les intervenants croient que les infractions plus graves devraient continuer à être examinées par des membres de la Commission des libérations conditionnelles et que la suspension du casier des gens qui récidivent ne devrait pas être maintenue.

En vertu du projet de loi S-212, il n’y a pas d’infractions inadmissibles, ce qui signifie que d’autres infractions graves, comme les voies de fait graves ou le trafic de drogues, pourraient expirer définitivement si la personne n’a pas de démêlés avec le système de justice pénale au moment de son admissibilité, sans examen supplémentaire.

De plus, le projet de loi S-212 vise à mettre définitivement de côté la plupart des casiers judiciaires après la période d’attente désignée, avec des exceptions très limitées. Ces exceptions s’appliquent aux infractions sexuelles énumérées aux annexes 1 et 2, pour lesquelles on continuerait à permettre les vérifications des antécédents en vue d’un travail auprès de personnes vulnérables. En outre, il y a l’annulation et la révocation de la suspension si un membre de la commission est convaincu que la personne a délibérément fait une déclaration inexacte ou trompeuse, a délibérément dissimulé un point important relativement à l’expiration du casier ou n’était pas admissible à l’expiration au moment où l’ordonnance déclarant le casier expiré a été octroyée.

Dans le cadre d’un système de RACJ, les casiers judiciaires pour les infractions moins graves seraient probablement mis de côté et séparés par l’automatisation, tandis que les infractions plus graves nécessiteraient toujours une demande et un examen par un membre de la Commission des libérations conditionnelles.

Le ministre conserverait également le pouvoir de divulguer des casiers judiciaires suspendus, et la Commission des libérations conditionnelles conserverait le pouvoir d’annuler et de révoquer la suspension d’un casier en vertu de certains critères.

Je crois que le travail que nous avons accompli jusqu’à présent tient compte des considérations importantes liées à l’opérationnalisation d’un système de retrait automatisé de casiers judiciaires, tout en maintenant des mesures de protection pour les collectivités.

Nous avons déjà mis en œuvre plusieurs initiatives du programme de suspension du casier et nous continuerons à faire progresser des réformes importantes pour éliminer les obstacles systémiques, promouvoir la réinsertion et veiller à ce que le système soit juste et proportionnel.

Le président : Merci, monsieur Westmacott.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : J’aimerais que vous me rappeliez votre rôle au sein du service correctionnel.

[Traduction]

M. Westmacott : Je travaille pour Sécurité publique Canada. Je suis le directeur général de la Sécurité communautaire des services correctionnels et de la justice pénale.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Avez-vous des contacts quotidiens avec les pénitenciers fédéraux?

[Traduction]

M. Westmacott : Je travaille davantage avec le SCC, le Service correctionnel du Canada, et non pas directement avec les pénitenciers eux-mêmes.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Cependant, quelle est votre fonction?

[Traduction]

M. Westmacott : Notre travail porte sur les politiques liées aux services correctionnels, à la sécurité communautaire et à la justice pénale, et il y a également une division de la recherche au sein de mon équipe.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Donc, vous n’êtes pas en communication constante avec les gens qui sont intervenus; vous faites partie de l’administration.

[Traduction]

M. Westmacott : Notre travail est davantage axé sur les politiques. Nous sommes en communication constante avec le Service correctionnel du Canada. Comme je l’ai mentionné, nous menons également d’importantes consultations sur la meilleure approche à adopter pour toute une série de questions de politiques.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Avez-vous des données sur le nombre de personnes incarcérées dans les pénitenciers fédéraux annuellement, et le nombre de personnes incarcérées dans les prisons provinciales annuellement?

[Traduction]

M. Westmacott : Ces données sont à ma disposition. Je n’y ai pas accès à ce moment-ci, mais je crois savoir qu’il y a environ 12 000 personnes dans le système correctionnel fédéral. Je peux confirmer ces chiffres. Ils font partie de l’enquête que nous publions chaque année.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Chaque fois que quelqu’un, dans un pénitencier, est remis en liberté, que ce soit au tiers ou aux deux tiers de sa peine, est-ce qu’il y a automatiquement une communication qui est envoyée à la Commission des libérations conditionnelles du Canada pour dire que Mme X ou M. Y est remis en liberté?

[Traduction]

M. Westmacott : Des collègues de la Commission des libérations conditionnelles du Canada, ou CLCC, témoigneront plus tard et seront mieux placés pour discuter de la communication entre le SCC et la CLCC.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Une libération d’office, c’est une libération automatique. Souvent, on va libérer d’office des gens qui sont encore à haut risque de récidive. Est-ce qu’il va y avoir un mécanisme particulier au niveau du service correctionnel pour s’assurer que les gens à haut risque de récidive qui sont remis en liberté — parce qu’on est obligé de les remettre en liberté, car ils ont purgé les deux tiers de leur sentence — sont bien encadrés lors de leur retour dans la collectivité?

[Traduction]

M. Westmacott : La plupart des gens sont libérés sous condition et un système complet est en place pour veiller à ce qu’ils bénéficient de l’aide qu’il faut pour leur réinsertion et leur réhabilitation.

Vous avez raison de dire qu’un certain nombre de personnes sont libérées d’office. Je m’en remettrai à mes collègues de la Commission des libérations conditionnelles, qui pourront vous parler plus en détail de l’aide apportée aux délinquants libérés d’office.

La sénatrice Clement : Bienvenue au comité. Lorsque la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents est entrée en vigueur, le système de justice pénale ne disposait d’aucun moyen de séparer le casier d’une personne des casiers judiciaires actifs au dossier. En fait, en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants, les casiers judiciaires des jeunes étaient traités pratiquement de la même manière que ceux des adultes.

Vingt et un ans plus tard, le système des casiers judiciaires des jeunes stockés au Centre d’information de la police canadienne, ou CIPC, de la GRC est un bon système automatisé extrêmement efficace qui permet d’accéder au casier judiciaire d’un jeune pendant un certain temps, après quoi il est retiré. À bien des égards, il est plus compliqué de s’y retrouver dans les différents délais pour la fermeture des casiers par rapport au projet de loi dont nous sommes saisis aujourd’hui. Pouvez-vous nous dire comment cette même séparation d’un casier judiciaire en vertu de la loi pourrait être appliquée aux adultes?

M. Westmacott : Il y a certainement des leçons à tirer de la loi qui s’applique aux adolescents. Il faudrait examiner un certain nombre d’éléments qui entrent en jeu pour mettre en pratique lesdites leçons dans le système dont nous parlons aujourd’hui, ce qui inclut diverses autres lois, dont la Loi sur l’identification des criminels, qui jouent un rôle concernant le fonctionnement d’un système de retrait automatisé de casiers judiciaires, ou système de RACJ, ou ce que propose le projet de loi S-212.

Il faudrait également prendre en compte un certain nombre d’autres lois qui entrent en jeu et examiner toutes les répercussions possibles en ce qui concerne la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents.

La sénatrice Clement : Ce qui est difficile, entre autres, lorsqu’il s’agit des casiers judiciaires et de la criminalité en général, c’est de séparer les faits des mythes. Par exemple, nous entendons souvent dire que les taux de récidive sont très élevés, mais nous ne tenons pas compte du fait qu’au bout d’un certain temps, après des années, ces taux diminuent considérablement et deviennent plutôt faibles. L’idée de doubler la période d’admissibilité du système de pardons accordés pour des infractions criminelles a été fortement critiquée parce que cela a un caractère punitif plutôt que d’être basé sur des faits.

Pouvez-vous nous parler des recherches que mène votre ministère sur la récidive après cinq ans? Disposez-vous de renseignements sur les répercussions liées au fait d’avoir un casier judiciaire et sur les désavantages et les difficultés que cela engendre quant à l’augmentation des taux de récidive?

M. Westmacott : Absolument. Merci beaucoup de la question.

Il est vrai que les taux de récidive diminuent avec le temps. Un certain nombre d’études l’indiquent.

Nos propres travaux et le Cadre fédéral visant à réduire la récidive, qui a été publié en juin dernier, montrent qu’un certain nombre de mesures peuvent contribuer à réduire ce taux de récidive. Nous savons que le taux de récidive diminue considérablement avec le temps, jusqu’à atteindre un seuil où une personne qui mène une vie exempte de criminalité a le même pourcentage de risque de commettre un crime qu’une personne qui n’a jamais commis de crime dans le passé.

Le projet de loi C-31, qui a été présenté il y a un certain temps, visait à ramener les niveaux à trois ans pour les infractions punissables sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire et à cinq ans pour les infractions poursuivies par voie de mise en accusation. Je parle ici de la période d’attente avant de faire une demande de libération conditionnelle, compte tenu de ce que vous avez dit.

La sénatrice Clement : Je voudrais revenir sur votre réponse à ma première question.

Le système de justice pénale pour les adolescents... C’est une grande réussite. J’essaie de comprendre votre réponse. Vous avez parlé de l’identification des criminels. Y a-t-il autre chose? C’est seulement que j’ai l’impression que nous ne parlons pas assez de ce succès et de la manière dont il pourrait être reproduit ici.

M. Westmacott : Le point de départ est différent dans la mesure où, avec la Loi sur le casier judiciaire, ou LCJ, un certain nombre d’éléments, y compris l’intention de commettre un acte criminel, devraient être examinés en profondeur pour déterminer quelles leçons tirées de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents pourraient être appliquées pour appuyer les changements dans la Loi sur le casier judiciaire. Nous nous sommes penchés là-dessus. Nous avons étudié différentes leçons, mais il n’y a pas nécessairement de correspondance exacte.

La sénatrice Clement : Pourquoi?

M. Westmacott : En raison des différents éléments... Je n’ai pas l’information sous la main. Nous pourrions vous fournir de plus amples renseignements sur les différences. Je n’ai pas l’information ici, mais je sais qu’il y a des différences entre ce qui est prévu dans la Loi sur le casier judiciaire en ce moment et d’où cela vient, et les différentes lois qui s’appliquent à cela et ce qui pourrait se faire dans le contexte de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents.

La sénatrice Clement : Si nous pouvions avoir accès à ces renseignements supplémentaires, ce serait formidable. Je vous remercie.

M. Westmacott : Nous allons y travailler.

La sénatrice Clement : J’interviendrai à nouveau au deuxième tour, s’il y en a un.

Le sénateur Dalphond : Merci.

Pour revenir sur la première réponse que vous avez donnée à la sénatrice Clement, vous avez dit que des statistiques indiquent qu’au bout d’un certain temps, les personnes qui ont un casier judiciaire se comportent comme celles qui n’en ont pas. Cela correspond-il aux périodes de trois et de cinq ans que le projet de loi C-31 essayait de rétablir?

M. Westmacott : Merci beaucoup.

Les éléments diffèrent, car tout dépend du type de crime, des antécédents, et cetera. Disons qu’il y a encore du travail à faire pour que l’on dispose d’un ensemble complet de données sur les taux de récidive. Cela dépend en grande partie de la définition de ce qu’est une récidive et de la manière dont tout cela se passe.

Dans la majorité des études que nous avons vues, on indique que pour les infractions punissables par procédure sommaire, dans la plupart des cas, la récidive se produit au cours des trois premières années. Voilà pourquoi on semble parler des trois premières années.

Le sénateur Dalphond : Ma question découle en fait du témoignage que vous avez présenté au Comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes. Vous étiez avec M. Broom ce jour-là. Vous avez fait allusion à la mise en œuvre de la Loi sur la Charte canadienne des droits des victimes. Je vois que vous avez la responsabilité d’en examiner la mise en œuvre.

Pourrais-je avoir votre avis sur la question de savoir si cette loi permettra d’atteindre un juste équilibre entre les droits des victimes d’actes criminels et ceux des délinquants? Le fait que les casiers judiciaires expirent automatiquement sera-t-il perçu par les victimes comme une injustice? Votre groupe s’est-il penché sur la question? Devrait-on, par exemple, informer les victimes du fait qu’un casier judiciaire est sur le point d’expirer automatiquement et leur demander si elles souhaitent s’y opposer?

M. Westmacott : Merci beaucoup de cette question.

Oui, vous avez raison, il y a certaines parties de mes fonctions qui sont liées à la Loi sur la Charte canadienne des droits des victimes, qu’on appelle, en abrégé, la CCDV. Nous essayons, dans toutes les politiques liées au système de justice pénale, de trouver un équilibre entre les droits des délinquants et ceux des victimes, et de prendre en compte les différentes perspectives en jeu.

L’expiration automatique des casiers judiciaires, lorsque des garanties sont prévues, permet d’établir cet équilibre. Nous prenons en compte les droits de la victime et les garanties qui doivent être mises en place.

Comme je l’ai mentionné, nous pensons que le projet de loi S-212, tel qu’il est présenté, n’offre pas nécessairement les mêmes garanties que le système actuel et qu’un système automatisé d’expiration pourrait théoriquement produire les mêmes effets que dans d’autres pays aux vues similaires. Il faudrait, par exemple, qu’on puisse révoquer et mettre fin à la suspension du casier judiciaire si un individu récidive, par exemple. De même, cette automatisation pour les délits les moins graves, comme les infractions sommaires, tend à établir l’équilibre entre les droits des victimes et les droits des délinquants dans un système efficace.

Nous reconnaissons cependant que la réduction des obstacles à l’obtention d’une suspension du casier judiciaire a un effet bénéfique important sur la sécurité des collectivités, car elle réduit la stigmatisation liée au casier judiciaire. Cela permet une meilleure réintégration sociale, réduit le risque de récidive et contribue également à réduire le risque d’une nouvelle victimisation ou de revictimisation.

Le sénateur Dalphond : Merci.

La sénatrice Jaffer : Merci beaucoup d’être ici.

Vous l’avez peut-être mentionné plus tôt, mais je suis arrivée un peu en retard. J’ai quelques questions à vous poser sur la facilité avec laquelle le Centre d’information de la police canadienne de la GRC, ou CIPC, peut intégrer l’expiration automatique des casiers judiciaires, comme le propose le projet de loi S-212.

M. Westmacott : Merci beaucoup pour cette question.

Je crois savoir que des représentants de la GRC seront ici demain. Ils seront mieux placés que moi pour vous fournir une réponse. J’aimerais me concentrer plus globalement sur le système et sur les préoccupations que j’ai soulevées, à savoir comment mettre en œuvre un système automatisé d’expiration des casiers judiciaires, à la lumière du travail en cours ou dans le cadre du projet de loi S-212, étant donné qu’un grand nombre des casiers judiciaires relèvent des systèmes provinciaux, territoriaux et municipaux.

Le fait qu’un certain nombre de casiers judiciaires ne soient pas détenus par le gouvernement fédéral, en particulier les déclarations sommaires de culpabilité pour lesquelles il n’y a pas de prise d’empreintes digitales, pose un problème ou présente un défi opérationnel, si je puis m’exprimer ainsi. Ce n’est pas un frein absolu, mais il faudra du temps pour déterminer comment faire et comprendre l’interopérabilité entre les systèmes de casiers judiciaires des provinces, des territoires, des municipalités et de la GRC.

La sénatrice Jaffer : Il y a beaucoup de petites cloches qui sonnaient dans ma tête pendant que vous parliez. Vous n’avez pas accès à tous les casiers, et la GRC non plus. Certains sont provinciaux. Y a-t-il donc un registre central, finalement?

M. Westmacott : Il est vrai que la GRC n’a pas tous les casiers judiciaires. Les casiers judiciaires relèvent du système provincial; les déclarations sommaires de culpabilité sont généralement conservées dans le système provincial ou territorial. C’est lorsqu’il s’agit d’un acte criminel ou d’une infraction mixte que le casier judiciaire aboutit dans le système fédéral.

La sénatrice Jaffer : Vous l’avez expliqué.

M. Westmacott : Oui.

La sénatrice Jaffer : Mais il n’y a pas de registre central.

M. Westmacott : À l’heure actuelle, il n’y a pas de registre central de toutes les infractions commises. C’est l’une des raisons pour lesquelles il nous faudra un peu de temps pour déterminer comment l’interopérabilité entre les provinces et les territoires sera assurée. Cela fait donc l’objet de conversations entre les provinces et les territoires et nous-mêmes pour bien cerner les défis.

La sénatrice Jaffer : Qu’entendez-vous exactement?

M. Westmacott : Les provinces et les territoires seraient en faveur d’un système automatisé d’expiration des casiers judiciaires, mais ils reconnaissent que le système que nous envisageons comporte des défis.

La sénatrice Jaffer : Puis-je vous interrompre? Je ne veux pas être impolie. Vous parlez de « défis ». Qu’entendez-vous par là?

M. Westmacott : J’ai déjà parlé de certains défis opérationnels. Si vous mettez en place un système automatisé d’expiration des casiers judiciaires, comment vous assurerez‑vous que tous les casiers judiciaires qui figurent dans un système provincial ou territorial sont pris en compte?

Par exemple, s’il y a eu une nouvelle condamnation pendant la période d’attente dans le système provincial, mais que le système automatisé ne prévoit pas d’interopérabilité, on pourrait omettre une condamnation. Inversement, si nous ne sommes pas au courant d’une condamnation figurant dans les registres d’une province ou d’un territoire, il se pourrait qu’un casier judiciaire qui devrait expirer automatiquement n’expire pas. Il faut trouver un moyen d’assurer l’interopérabilité entre les systèmes provinciaux et fédéraux.

La sénatrice Jaffer : Vous m’avez complètement perdue. J’ai travaillé dans les tribunaux pénaux et les procureurs produisaient toujours le dossier, comme ils le disaient. Comment obtiennent‑ils le dossier? Vous dites que les casiers judiciaires se trouvent à deux endroits différents.

M. Westmacott : À l’heure actuelle, lorsqu’une personne fait une demande de pardon, elle doit produire son casier judiciaire. Il lui incombe d’obtenir ses antécédents judiciaires conservés dans le système provincial et dans le système fédéral, le cas échéant, et de les fournir à la Commission des libérations conditionnelles. Dans un système automatisé, ce ne serait plus nécessaire. Il appartiendrait au système lui-même de déterminer à quel moment ces antécédents périment. C’est l’objectif ultime, parce que nous constatons qu’il y a beaucoup d’obstacles qui empêchent les gens d’obtenir l’information complète. Cela s’explique en partie par le fait qu’ils doivent s’adresser à diverses instances, ce qui entraîne des coûts et prend du temps. L’idéal serait d’avoir un système automatisé. Il faut juste nous assurer d’investir le temps et l’énergie nécessaires pour mettre en place un bon système.

La sénatrice Batters : Monsieur Westmacott, ma question s’inscrit à peu près dans la même veine. Ces dernières années, après l’entrée en vigueur de la Loi sur le cannabis, le Parlement a adopté le projet de loi C-93, Loi prévoyant une procédure accélérée et sans frais de suspension de casier judiciaire pour la possession simple de cannabis. Ce projet de loi visait à permettre aux personnes reconnues coupables de possession simple de cannabis de demander une suspension accélérée de casier judiciaire.

À l’époque où notre comité a été saisi de l’étude du projet de loi C-93, Ralph Goodale était le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile. Il a indiqué que le gouvernement du Canada avait choisi une procédure de demande pour la possession simple de cannabis parce qu’il n’y avait aucun moyen de déterminer, à partir des données figurant dans la base de données du Centre d’information de la police canadienne, pour quelle substance une personne avait été condamnée pour possession de drogue. Par conséquent, il fallait :

[...] vérifier les documents connexes des services de police et des tribunaux, et ces documents sont conservés par les services de police et les tribunaux partout au Canada. Chacun a son propre système de tenue des dossiers, et ils ne relèvent pas pour la plupart de la compétence fédérale. Certains de ces systèmes sont technologiquement avancés, mais dans bien des cas, ce sont simplement des papiers dans des classeurs qui se trouvent dans les sous-sols des palais de justice.

Pour identifier de façon proactive les personnes trouvées coupables de possession de cannabis seulement, la Commission des libérations conditionnelles serait obligée de parcourir tous ces dossiers manuellement. Ce serait une entreprise colossale et coûteuse qui prendrait énormément de temps, et les gens finiraient par attendre des années. De l’autre côté, quand la Commission des libérations conditionnelles reçoit une demande, elle peut immédiatement se concentrer sur tous les documents pertinents, et elle devrait pouvoir traiter un dossier en quelques semaines.

Dans ces conditions, pensez-vous que la Commission des libérations conditionnelles sera confrontée à des obstacles similaires dans la mise en œuvre du projet de loi S-212?

M. Westmacott : Oui, c’est ce que j’essayais d’expliquer. Dans le système actuel, les dossiers peuvent être détenus par les provinces, les territoires, les municipalités et non par le CIPC. C’est donc exactement la situation à laquelle nous serions confrontés. Il serait difficile de déterminer exactement à quel moment une personne pourrait bénéficier d’un pardon automatique. Nous devons saisir l’occasion et prendre le temps d’assurer l’interopérabilité, pour atteindre l’objectif commun d’une expiration automatisée des casiers judiciaires, qui tienne compte de l’ensemble des antécédents judiciaires afin d’accorder les suspensions appropriées.

Le sénateur Klyne : Bienvenue parmi nous. On peut être porté à penser qu’il est généralement admis que les casiers judiciaires eux-mêmes ont un effet dissuasif sur la criminalité. Les gens sont moins susceptibles de commettre des actes criminels s’ils les exposent à des conséquences graves. Il existe peu de conséquences plus graves que d’avoir un casier judiciaire.

Si l’on permettait que les casiers judiciaires expirent, pensez‑vous que cela aurait un effet sur le taux de criminalité au Canada?

M. Westmacott : Merci beaucoup pour cette question. Nous pensons qu’un système bien conçu permettant la suspension du casier pourrait contribuer à réduire la criminalité au Canada, parce que cela réduirait les obstacles auxquels sont encore confrontées les personnes qui se sont sorties de la criminalité, dont les obstacles à l’éducation, au logement, à l’emploi, au bénévolat, etc.

Le fait d’avoir un casier judiciaire constitue un obstacle important à la réintégration sociale après qu’une personne ait fait ce qu’il fallait pour se réhabiliter, pour reconnaître le crime qu’elle a commis et pour vivre sans criminalité. Le programme de suspension du casier, tel qu’il existe et tel qu’il pourrait être mis en œuvre dans un système automatisé d’expiration du casier, prévoit une période transitoire pour accompagner la personne et veiller à ce qu’elle ne commette pas de délit. La suspension du casier permet à cette personne, comme je l’ai dit, de ne pas se heurter aux obstacles qui pourraient l’amener à récidiver, parce que quand une personne n’arrive pas à se trouver d’emploi ou de logement, ses possibilités sont bien moindres. Nous estimons important de mettre en place un système de suspension du casier pour réduire la criminalité.

Le sénateur Klyne : Vous avez parlé d’un programme « bien conçu ». Je n’ai pas de question à ce sujet, mais y a-t-il une autre façon d’élaborer un programme que de « bien le concevoir »?

Lorsqu’ils sont incarcérés, les gens doivent purger leur peine. Bénéficient-ils — et je parle probablement ici des pénitenciers fédéraux — de programmes de réinsertion, ou sont-ils simplement laissés pour compte? Je veux dire : peuvent-ils en bénéficier s’ils le souhaitent? Sont-ils tenus de suivre des programmes de réinsertion? Je pense que cela contribuerait à ce que le programme soit bien conçu pour améliorer les chances qu’ils restent loin de la criminalité à l’expiration de leur peine, ou encore on pourrait attendre qu’ils aient réussi à rester loin de la criminalité pendant une certaine période.

M. Westmacott : Chaque personne qui entre dans le système correctionnel fédéral a un plan correctionnel élaboré sur mesure, en collaboration avec des spécialistes du domaine. C’est Service correctionnel Canada qui s’en occupe. Ce plan comprend des programmes de soutien à la réhabilitation et à la réinsertion sociale une fois que la personne est libérée du système fédéral.

Le sénateur Klyne : Je me suis rendu dans quelques pénitenciers fédéraux, où j’ai interrogé des détenus. Beaucoup m’ont dit ne pas avoir accès à des programmes de réhabilitation. Il est inquiétant qu’ils ne suivent pas de programmes de réhabilitation avant leur réinsertion. Il serait logique de leur en offrir pour favoriser une réinsertion sûre pour eux-mêmes et pour la collectivité. Avez-vous accès au dossier indiquant s’ils ont suivi un programme de réinsertion?

M. Westmacott : Lorsqu’une personne demande la libération conditionnelle, une partie du processus consiste à déterminer les programmes qu’elle a suivis pendant son incarcération et à déterminer s’ils contribuent à sa réhabilitation. L’objectif déclaré du système correctionnel est de réhabiliter ces individus, et le plan de correction, par définition, vise à atteindre cet objectif.

Je relaierai votre commentaire selon lequel vous avez entendu qu’ils n’y ont pas accès, et j’en discuterai avec mes collègues.

Le sénateur Tannas : Je vous remercie de votre présence. Je poursuis dans la foulée du sénateur Klyne. Ma question me vient de l’impression que m’a faite votre déclaration préliminaire. Il me semblait presque entendre le parrain du projet de loi, en ce sens que vous aviez beaucoup de bonnes choses à dire et que je n’entendais pas le « mais ». J’attendais le « mais », mais je ne l’entendais pas.

Je viens de vous entendre dire — et peut-être pouvez-vous préciser votre pensée — que dans un monde parfait, s’il n’y avait pas tous ces satanés problèmes avec les dossiers de la police, entre autres choses, dans un monde idéal, vous pensez qu’il serait bon de suspendre automatiquement les casiers judiciaires après un certain temps. Si j’ai mal compris, je vous prie de me corriger. Quand je dis « vous », je parle de vous en votre qualité de responsable du moteur politique de votre ministère.

Si tel est le cas, je voudrais simplement vous demander ceci : pourquoi votre groupe et tous les autres ministères n’ont-ils pas fait de cette question une priorité jusqu’ici? Il semble que la réponse à donner à la sénatrice Pate, c’est que dans un monde idéal, ce serait une excellente idée. C’est la première chose.

Il me semble que quand quelqu’un est sciemment prêt à faire des efforts, à s’atteler à la tâche pour se débarrasser de cette tache sur sa réputation personnelle, c’est bien. C’est une démarche cathartique et positive. Ceux qui ne peuvent pas le faire ou qui refusent de le faire... S’il faut avoir travaillé si dur pour pouvoir déposer une demande, alors il ne devrait pas être si difficile de déposer une demande. Cela fait des dizaines d’années qu’on nous répète à quel point c’est difficile, cela coûte cher et tout et tout. Pourquoi ne faudrait-il pas faire des efforts pour franchir cette dernière étape, qui consiste, pour la personne, à dire : « Je veux me débarrasser de ça, je suis prêt à refaire ma vie sans ça »? Ceux qui ne veulent pas s’en donner la peine mériteraient peut-être d’avoir un casier judiciaire pendant un certain temps encore?

C’est une question que je me pose, mais je dois dire que j’ai eu moi-même le moins possible à faire avec le système judiciaire dont je bénéficie en tant que citoyen.

Ensuite, quelle serait votre position sur l’idée de réduire le délai d’attente de 10 à 5 ans? Quelle était votre position lorsque le dernier gouvernement l’a proposée et que votre prédécesseur a comparu devant un comité comme le nôtre?

M. Westmacott : Je vous remercie de ces questions. Il y en a plusieurs. J’essaierai de répondre à chacune.

Le président : Monsieur Westmacott, prenez un peu plus d’une minute et demie. Le sénateur Tannas a posé trois ou quatre grandes questions, et je pense que vous devriez avoir la possibilité d’y répondre comme il faut.

M. Westmacott : Merci beaucoup, monsieur le président.

Tout d’abord, en ce qui concerne la question du monde idéal, je précise et j’apprécie que l’on reconnaisse que je ne parle pas en mon nom personnel, mais au nom du ministère. On reconnaît que, oui, la suspension du casier après un certain temps est une très bonne chose, sous réserve de certaines restrictions.

Le sénateur Tannas : De façon automatique?

M. Westmacott : L’automatisation est un objectif très admirable que nous cherchons à atteindre, comme je l’ai mentionné. Vous avez parlé de notre préoccupation. Nous nous penchons sur la façon de mettre en place un système de retrait automatisé des casiers judiciaires depuis maintenant un certain nombre d’années, y compris en menant des consultations avec les provinces et les territoires ainsi qu’avec un certain nombre d’intervenants des communautés autochtones, du système de justice pénale, de la police, des forces de l’ordre, des organisations de victimes, etc. Nous avons mené les consultations pour déterminer quelle serait la meilleure façon de procéder, quels sont les lacunes, les obstacles et les défis, et quels sont les meilleurs moyens de relever certains de ces défis.

Je pense que les consultations nous orientent vers un système automatisé pour certaines infractions, les infractions moins graves, tandis que les infractions plus graves, les actes criminels, passeraient encore par la Commission des libérations conditionnelles.

Pour ce qui est des infractions qui ne peuvent pas faire l’objet d’une suspension du casier ou qui ne font pas l’objet d’une demande à cette fin, c’est peut-être effectivement ce qui devrait être fait. Ce que je dirais, c’est que le processus présente un certain nombre d’obstacles pour un certain nombre de personnes. Nous essayons de nous attaquer à la question en adoptant une approche en plusieurs volets. Dans les deux cas, nous avons vu une réduction des coûts de 657 à 50 $ pour tenter d’éliminer l’obstacle financier.

Comme je l’ai dit, le gouvernement a également lancé un nouveau programme de contribution, qui prévoit une somme de 18 millions de dollars sur quatre ans pour soutenir les organisations qui aident les personnes qui demandent la suspension de leur casier. Ce sont des organisations sans but lucratif, des organismes bénévoles et ainsi de suite qui aident des gens à cette fin. Nous avons vu des entreprises à but lucratif qui profitent dans certains cas des personnes qui essaient de faire ces démarches, et nous avons observé beaucoup de problèmes. Le financement de 18 millions de dollars sur quatre ans vise à tenter de régler la question et à aider les gens.

Cela dit, nous reconnaissons également qu’il reste encore un certain nombre de problèmes liés aux gens, qu’il s’agisse de l’analphabétisme ou d’un manque de sensibilisation. Dans certains cas, il est très difficile, comme je l’ai dit, pour les personnes qui sortent de prison de se trouver un emploi ou d’étudier à cause de leur casier judiciaire. Par conséquent, ils ne sont pas en mesure, même s’ils le souhaitent, de trouver le temps ou les ressources nécessaires pour suivre le processus et présenter une demande.

[Français]

La sénatrice Dupuis : Pour continuer dans la même veine que le sénateur Tannas, je ne veux pas être rabat-joie, mais je voudrais que l’on reste dans le monde actuel. Je me méfie du monde parfait et surtout de ceux qui vont le définir.

Ma question est la suivante : je pense que vous avez commencé, et même réussi à cerner assez bien les raisons qui font en sorte que vous êtes arrivé à la conclusion que pour certaines offenses, c’est une bonne chose d’avoir un système automatique de suspension.

Quand allez-vous le mettre en œuvre?

[Traduction]

M. Westmacott : Merci beaucoup de poser la question.

[Français]

La sénatrice Dupuis : Je veux juste expliquer la raison pour laquelle je vous pose la question. Ici, on examine des projets de loi qui sont déposés par le gouvernement, des sénateurs ou des députés. Cependant, si au lieu d’être occupé à traiter des projets de loi qui sont à côté de ce qu’il faudrait faire, mais pas loin, est‑ce qu’on ne serait pas mieux de vous poser la question : vous avez eu la même idée qu’elle, au moins pour une partie de ce qu’il y a dans ce projet de loi, quand allez-vous le faire?

[Traduction]

M. Westmacott : Merci beaucoup de poser la question. Oui, je répète que nous appuyons l’objet du projet de loi S-212, mais pas tous les articles, car des éléments fondamentaux du projet de loi entraîneraient des difficultés qui seraient difficiles à surmonter et ne prévoient pas la mesure de protection dont j’ai parlé plus tôt.

[Français]

La sénatrice Dupuis : Oui, tout à fait. J’ai compris cela. Ma question est pour vous, car on ne veut pas faire la mauvaise chose, autant que possible; on est susceptible, on ne veut pas faire la mauvaise chose.

Vous avez l’air d’avoir une solution qui rejoint en partie ce qui est dans ce projet de loi. Au lieu de faire la mauvaise chose en adoptant le projet de loi S-212, nous voulons savoir quand votre ministère compte mettre en place ce système.

[Traduction]

M. Westmacott : Merci beaucoup. Je ne veux pas parler pour le gouvernement et dire à quel moment nous allons aller de l’avant. Je ne veux pas aborder le programme législatif du gouvernement. Ce n’est pas mon rôle.

Ce que je vais dire, c’est que dans les consultations avec les provinces et les territoires, on a souligné la nécessité de poursuivre le travail pendant quelques années pour pouvoir déterminer l’interopérabilité et certains des défis que nous devons relever.

Comme je l’ai mentionné dans ma déclaration, nous nous attendons à ce que ce soit un projet à long terme, mais je ne peux pas donner de détails pendant que le travail et les consultations se poursuivent avec les provinces et les territoires pour déterminer comment nous allons répondre à certaines de ces préoccupations.

[Français]

La sénatrice Dupuis : Vous avez fait référence à une question très importante, soit la sécurité des communautés. C’est une partie de votre mandat d’assurer la sécurité des communautés, et je veux faire un lien avec le Programme de développement durable à l’horizon 2030 de l’Organisation des Nations unies (ONU). L’un des objectifs de l’ONU est de promouvoir le développement durable dans les communautés.

Quand vous dites que cela pourrait prendre plusieurs années, pouvez-vous être plus précis? On espère sortir de la pandémie, qui a forcé le gouvernement fédéral et les provinces à travailler en collaboration pour trouver des vaccins, pour organiser les systèmes, etc. Pouvez-vous être plus précis quant au nombre d’années? Qui pense que cela va prendre encore des années? Est‑ce que le gouvernement fédéral a des incitatifs pour amener les provinces à être plus précises quant au nombre d’années, parce qu’on pourrait être ici dans 20 ans et se poser la même question? Je comprends très bien que ce sont des raisons techniques.

Qu’arrive-t-il si je quitte le Nouveau-Brunswick pour aller travailler en Ontario et, par la suite, en Alberta, parce que les salaires sont plus élevés, et que chaque fois que je commets des infractions mineures, je reviens dans ma région?

Vous avez parlé des obstacles auxquels sont confrontées les personnes en ce qui a trait à l’élimination de leur casier judiciaire. Quelle est la possibilité que le gouvernement fédéral puisse amener les provinces à s’asseoir autour d’un échéancier à court et à moyen terme plutôt qu’à moyen et à long terme?

[Traduction]

M. Westmacott : Merci de la question. Il y a deux éléments à cela. Le premier, c’est que même s’il écoulera peut-être quelques années avant que nous puissions comprendre tous les détails liés à un système de retrait automatisé des casiers judiciaires, cela ne signifie pas qu’aucune mesure ne sera prise entretemps. Par exemple, le financement de 18 millions de dollars dont j’ai parlé servira à prendre des mesures qui pourront venir en aide.

Nous avons une bonne relation avec les provinces et les territoires, et, comme je l’ai dit, nous les avons consultés au cours de la dernière année et nous poursuivons le travail avec eux pour trouver des solutions aux problèmes non réglés.

Je ne veux pas m’enliser dans un échéancier puisque je n’ai pas la réponse à la question. Je souligne toutefois que nous avons une bonne relation avec les provinces et les territoires, et un soutien est accordé pour le travail d’élaboration du système de retrait automatisé des casiers judiciaires. Ce sur quoi nous devons travailler, c’est une reconnaissance de ces questions, mais nous poursuivons le travail avec les provinces et les territoires pour tenter de faire avancer le dossier le plus rapidement possible.

Le président : Merci. Monsieur Westmacott, j’ai une question avant que nous passions au deuxième tour, et elle s’inspire un peu des questions posées par la sénatrice Jaffer.

J’ai vécu une expérience semblable à la sienne, même si la plupart de mes clients ont été condamnés, ce qui signifie que les poursuivants ont obtenu rapidement et entièrement leurs casiers judiciaires. Les policiers semblent avoir accès aux renseignements dont ils ont besoin lorsqu’ils arrêtent des gens. On ne les entend pas dire que l’information se trouve à différents endroits, qu’ils ne pourront jamais savoir à quoi s’en tenir. Du côté des poursuivants, on semble avoir accès à cette information sans le moindre problème.

Du point de vue de la défense, on semble dire que c’est trop difficile, que l’information se trouve à trop d’endroits différents.

Pouvez-vous me donner une idée de la raison pour laquelle il est si simple pour les poursuivants et les policiers d’obtenir l’information dont ils ont besoin dans les casiers judiciaires alors que le système ne peut pas en faire autant pour radier des condamnations?

M. Westmacott : À mon avis, la principale différence concerne le concept relatif aux demandes par rapport au concept de l’automatisation. Lorsqu’on regarde ce que les policiers ont sous la main, on constate qu’ils demandent et cherchent à obtenir l’information sur la personne. Dans le cadre du système de demandes existant, cela fonctionne puisque nous obtenons l’information nécessaire pour être en mesure d’obtenir l’accès. Dans un système automatisé, on n’a pas tout cela. Les conséquences peuvent également être extrêmement graves en cas d’erreur d’identification. C’est la raison pour laquelle les empreintes digitales sont très importantes, car le nom d’une personne ne suffit pas pour être certain d’avoir le bon casier judiciaire dans une province donnée. Au bout du compte, il est question des processus qui entrent en jeu.

Je ne veux toutefois pas trop parler du système des policiers, car je ne travaille pas avec eux.

Le président : Merci beaucoup. Nous allons maintenant commencer le deuxième tour, en accordant peut-être trois minutes par intervenant, si c’est acceptable.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Dans la mesure où les réponses sont courtes.

Merci beaucoup de votre présence.

Est-ce que toutes les provinces ont un système informatisé pour les gens qui sont incarcérés dans les prisons provinciales?

[Traduction]

M. Westmacott : Pour ce qui est des personnes détenues dans le système fédéral, l’information se trouve au Centre d’information de la police canadienne, car c’est un dépositaire fédéral.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Le Québec gère encore des boîtes de dossiers. Il n’a pas de système informatisé.

Connaissez-vous le pourcentage de délinquants incarcérés pour la première fois au fédéral, mais qui ont écopé d’une peine de prison de moins de deux ans?

[Traduction]

M. Westmacott : Je n’ai pas ces données.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : En 2012, c’était 50 % des délinquants.

Vous êtes au fait que le vérificateur général avait produit un rapport en 2018, dans lequel il reprochait au système carcéral canadien et à Statistique Canada de ne pas avoir calculé le taux de récidive des délinquants incarcérés dans une prison provinciale et de ceux qui sont jugés dans une cour municipale.

Ma question est la suivante : comment allez-vous gérer les 358 000 citoyens qui sont incarcérés dans une prison provinciale annuellement, alors qu’au fédéral, 14 000 citoyens sont incarcérés annuellement dans un pénitencier fédéral? Comment allez-vous gérer ce nombre effarant de personnes qui transitent par les prisons provinciales?

[Traduction]

M. Westmacott : Je pense que je ne comprends pas la question à propos de la façon de les gérer. Parlez-vous des casiers?

[Français]

Le sénateur Boisvenu : L’information concernant l’incarcération des 358 000 Canadiens ayant écopé d’une peine de prison de moins de deux ans ne sera pas transmise à la Commission des libérations conditionnelles du Canada. C’est cette commission qui devra suivre ces délinquants pour s’assurer qu’ils ne commettent pas d’autres crimes.

Sur le plan humain, comment peut-on suivre annuellement 350 000 personnes pour lesquelles nous n’avons aucune information sur le casier judiciaire?

[Traduction]

M. Westmacott : Merci beaucoup pour la question. Je pense que cela se rapporte au point que j’ai soulevé. Nous devons examiner les différences dans les systèmes de casiers provinciaux, territoriaux et fédéraux pour assurer une interopérabilité entre eux avant de pouvoir passer à un système automatisé.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Si je comprends bien, si ce projet de loi entrait en vigueur demain, tel qu’il est rédigé actuellement, ce serait prématuré.

[Traduction]

M. Westmacott : Comme je l’ai indiqué dans mes observations, le projet de loi dans sa forme actuelle comporte un certain nombre de problèmes qui rendront très difficile une éventuelle mise en œuvre immédiate.

Le président : Merci pour vos réponses brèves, monsieur Westmacott.

La sénatrice Clement : Je veux donner suite aux questions de la sénatrice Dupuis. Quel est le sentiment d’urgence ici? On dit qu’on ne peut pas mettre de solutions en œuvre. Nous l’avons déjà entendu avant, et les gens qui l’entendent sont des personnes que j’ai représentées. Au fil des ans, j’ai aidé des clients à présenter une demande de réhabilitation. Il s’agit de personnes noires, de personnes marginalisées, de personnes racisées. Elles ont des problèmes de littératie, toutes sortes de problèmes, et elles abandonnent et partent de mon bureau. Elles ne peuvent pas suivre le processus.

Pourquoi alors ne pas adopter un projet de loi de ce genre qui comporte une disposition de caducité et qui met de la pression? Nous pouvons nous contenter de dire qu’on ne peut pas mettre de solutions en œuvre, mais lorsque je le dis à mes clients, cela s’accompagne d’un énorme manque de respect. Ils ont purgé leur peine conformément à la loi, et ce processus inefficace de demande de réhabilitation ne devrait pas s’ajouter à leur peine. Ce n’est pas l’objectif. Ils ont purgé leur peine. Ils n’ont plus commis de crime et ils ont le droit de présenter une demande. Que répondez-vous à cela? Il devrait y avoir un sentiment d’urgence.

M. Westmacott : Merci beaucoup. Je tiens à préciser qu’il y a un sentiment d’urgence considérable au sein du gouvernement dans le but de régler les derniers problèmes pour qu’un système soit mis en place le plus tôt possible. Mon équipe et moi, dans le cadre du travail que nous faisons avec les provinces et les territoires, sommes vraiment préoccupés par cette question, et nous travaillons très fort pour tenter de régler les problèmes auxquels nous faisons face. Ce que nous voulons éviter, c’est la mise en place d’un système qui ne donnerait pas le résultat escompté.

La sénatrice Jaffer : Vous dites constamment que vous avez des objectifs, que vous allez le faire. Comment un condamné analphabète, qui est en situation de vulnérabilité, peut-il s’en sortir si vous n’arrivez pas à faire le travail? Quel est votre objectif? Combien d’années faudra-t-il attendre?

M. Westmacott : Merci beaucoup de poser la question. Nous reconnaissons sans aucun doute que les gens se heurtent à un certain nombre de difficultés dans le système de suspension du casier, et c’est la raison pour laquelle nous adoptons d’autres approches pour essayer de régler certains des problèmes. Par exemple, le programme de contributions dont j’ai parlé plus tôt, qui prévoit 18 millions de dollars sur quatre ans, est là pour aider les gens à faire suspendre leur casier.

La sénatrice Jaffer : Pourquoi ne pas utiliser plutôt un projet de loi comme celui-ci? On n’aurait plus besoin de cet argent.

M. Westmacott : Comme je l’ai mentionné, ce qui nous préoccupe dans un projet de loi comme celui-ci, c’est qu’il serait très difficile de le mettre en œuvre.

De plus, nous sommes d’avis que le projet de loi devrait prévoir certaines mesures de sécurité, y compris la capacité de révoquer la suspension d’un casier ou, dans ce cas-ci, l’expiration d’un casier, et la notion que cela s’appliquerait à toutes les infractions et que cela ne permettrait pas, en tant que mesure de sécurité, de s’adresser à la Commission des libérations conditionnelles dans le cas des infractions existantes plus graves.

La sénatrice Jaffer : Je trouve vos réponses extrêmement frustrantes. Vous répétez sans cesse que ce n’est pas pour maintenant. Eh bien, c’est pour quand alors?

M. Westmacott : Comme je l’ai mentionné, nous travaillons assidûment avec les provinces et les territoires pour répondre aux préoccupations qui entrent en jeu. Nous aimerions aller de l’avant avec un système de retrait automatisé des casiers judiciaires, le plus tôt possible. Comme je l’ai dit, nous continuons de nous pencher très assidûment sur un certain nombre de problèmes.

La sénatrice Jaffer : Merci.

Le président : Merci.

C’est tout le temps que nous avions pour notre discussion avec vous, monsieur Westmacott. Le comité, tout comme moi, vous remercie pour les échanges que nous avons eus cet après-midi.

Pour la deuxième partie de la réunion, nous accueillons Ian Broom, directeur général, Politiques, planification et opérations, et Lisa Noseworthy, directrice, Clémence et suspension du casier, tous les deux de la Commission des libérations conditionnelles du Canada. Bienvenue. Comme je crois que vous vous y attendiez, vous avez cinq minutes à vous partager pour faire un exposé, qui sera suivi des questions des sénateurs. Allez‑y.

Ian Broom, directeur général, Politiques, planification et opérations, Commission des libérations conditionnelles du Canada : Bonsoir, monsieur le président et honorables membres du comité. Je vous remercie de m’avoir invité à vous parler aujourd’hui du projet de loi S-212. Je voudrais commencer par me présenter et présenter ma collègue. Je m’appelle Ian Broom, et je suis accompagné de Lisa Noseworthy, qui travaille également à la Commission des libérations conditionnelles du Canada, la CLCC. Nous sommes heureux d’être ici aujourd’hui pour vous fournir des renseignements sur le programme de suspension du casier dans le but de vous aider dans votre examen.

La CLCC est un tribunal administratif indépendant qui, faisant partie du système de justice pénale canadien, rend des décisions indépendantes et judicieuses au sujet de la mise en liberté sous condition, de la suspension du casier judiciaire et de la radiation, et formule des recommandations en matière de clémence.

La CLCC contribue à la protection de la société en favorisant, au besoin, la réinsertion sociale en temps opportun des personnes en tant que citoyens respectueux de la loi. La sécurité publique est le critère déterminant de toute décision de la CLCC.

En vertu de la Loi sur le casier judiciaire, la CLCC a toute compétence et latitude pour ordonner, refuser ou révoquer la suspension du casier. La suspension du casier judiciaire est conçue pour favoriser la réinsertion sociale durable d’une personne ayant un casier judiciaire. Elle permet d’éliminer les stigmates liés à un casier judiciaire et d’aider les personnes à accéder, par exemple, au logement, à l’emploi, à l’éducation et au bénévolat.

Pour pouvoir faire une demande, une personne doit avoir purgé sa ou ses peines et démontré qu’elle a respecté la loi depuis un nombre d’années déterminé.

La suspension du casier peut être révoquée ou annulée si la personne est reconnue coupable d’une nouvelle infraction, si elle a cessé de bien se conduire ou si elle a fait une déclaration inexacte ou trompeuse lors de sa demande.

Le 1er janvier 2022, le coût de la demande de suspension du casier a été réduit à 50 $. Il n’y a pas de frais de demande ni de période d’attente pour les suspensions du casier liées au cannabis, qui ont été introduites en août 2019. Ce changement a rendu les suspensions du casier plus abordables pour l’ensemble de la population canadienne, dont les personnes issues de communautés racisées et marginalisées.

En ce qui concerne les volumes de demandes, en 2021-2022, la CLCC a reçu 10 981 demandes de suspension du casier et de pardon, ce qui représente une augmentation de 20 % par rapport à 2020-2021.

Pour l’exercice 2022-2023, nous sommes en voie d’avoir reçu près de 15 500 demandes de suspension du casier, ce qui représentera une nouvelle augmentation de 29 %.

Les personnes peuvent demander directement à la CLCC une suspension de leur casier. Elles n’ont pas besoin de faire appel à un avocat ou à une société tierce. Des renseignements sur le processus de demande sont fournis sur notre site Web, dont le guide et les formulaires de demande officiels, ainsi que diverses ressources, comme une foire aux questions et des conseils pour éviter les erreurs courantes.

La commission met aussi à la disposition des demandeurs une ligne téléphonique 1-800 et une adresse électronique pour les aider concernant leur demande.

La CLCC examine toutes les demandes reçues pour s’assurer qu’elles sont complètes et admissibles, puis mène des enquêtes pour aider les commissaires à prendre des décisions.

En raison des diverses décisions judiciaires et changements législatifs des dernières années, les demandes de suspension du casier judiciaire sont actuellement traitées selon quatre régimes législatifs distincts. Les critères de traitement des demandes diffèrent en fonction de la date de la première infraction commise par la personne et de la version de la Loi sur le casier judiciaire en vigueur à ce moment-là. Cette complexité est un défi à la fois pour la CLCC dans l’administration du programme et pour les demandeurs eux-mêmes.

Les demandes au sujet d’une possession simple de cannabis suivent leur propre régime législatif, qui ne prévoit ni frais ni période d’attente.

Au cours des trois dernières années, depuis 2019-2022, les condamnations au criminel les plus courantes pour lesquelles une suspension du casier ou un pardon a été demandé sont: la conduite avec plus de 80 mg d’alcool par 100 ml de sang; les vols de moins de 50, 200, 1 000 et 5 000 $; les infractions à la Loi réglementant certaines drogues et autres substances; les voies de fait, à l’exclusion des voies de fait simples; et la conduite avec facultés affaiblies.

La CLCC rédige un rapport annuel sur le programme de suspension du casier, qui est présenté au ministre de la Sécurité publique, puis déposé au Parlement.

Depuis 1970, plus de 500 000 Canadiens ont bénéficié d’un pardon ou d’une suspension du casier. Parmi ces personnes, 95 % n’ont pas commis d’autres actes criminels, ce qui témoigne du succès de ce programme.

En conclusion, je tiens à remercier une fois de plus le comité pour son invitation. Nous sommes impatients de répondre à vos questions. Merci.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Bienvenue à notre comité. Merci d’être ici. J’aimerais que vous nous parliez de votre ligne téléphonique pour les gens qui demandent le pardon. Est-ce que vous avez fait une étude sur le niveau de satisfaction des gens qui demandent un pardon, à savoir si cette ligne est efficace ou si les gens doivent attendre 20 ou 30 minutes avant d’avoir une réponse?

[Traduction]

Lisa Noseworthy, directrice, Clémence et suspension du casier, Commission des libérations conditionnelles du Canada : Je vous remercie de votre question.

Pour l’instant, nous n’avons pas mené de sondage. Je vais certainement soumettre la question à la Division des affaires publiques et des partenariats afin de savoir s’il est possible de le faire.

Nous avons des messages préenregistrés qui permettent aux demandeurs d’obtenir aussi rapidement que possible les renseignements dont ils ont besoin s’ils sont brefs, mais il est possible de choisir de parler à un téléphoniste. Des préposés sont là pour répondre aux demandes de 8 heures à 18 heures, heure de l’Est. Les demandeurs peuvent obtenir des renseignements de base auprès du préposé. Nous veillons à ne pas divulguer d’information sans avoir confirmé l’identité de la personne.

Si le préposé n’est pas en mesure de répondre à la question, la personne peut être orientée vers un agent ou vers le superviseur de la réception pour obtenir de plus amples renseignements.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : C’est important de connaître le niveau de satisfaction des gens. Il y a plusieurs critiques émises par des gens qui demandent le pardon; ils disent que le processus est lourd. Je pense que ce serait intéressant d’avoir de la rétroaction de votre part.

Ma prochaine question est très technique. Je disais tout à l’heure à l’autre témoin qu’il y a à peu près 15 000 personnes qui transitent par les pénitenciers fédéraux chaque année, mais il y en a 358 000 qui transitent par les prisons provinciales. Est-ce que vous avez toutes les informations, à la Commission des libérations conditionnelles du Canada, sur les gens qui sont incarcérés dans les prisons provinciales?

[Traduction]

M. Broom : Je vous remercie de cette question.

Je dirais que nous disposons de statistiques sur le nombre de personnes détenues par les autorités provinciales et fédérales. En ce qui concerne les dossiers de toutes les personnes actuellement incarcérées, nous n’y avons pas accès.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Ce qui veut dire qu’une personne qui a transité par une prison provinciale, après deux ou trois ans, reçoit un pardon automatique. Le rôle de la Commission des libérations conditionnelles du Canada est de vérifier le parcours de tous ces gens pour s’assurer qu’ils n’ont pas commis de crime pendant leur période de grâce.

Comment va faire la Commission des libérations conditionnelles du Canada, avec les ressources qu’elle a, pour vous assurer que les 350 000 personnes qui transitent par une prison provinciale et qui sont remises en liberté n’auront pas commis de crime durant leur période de grâce et que le pardon ne sera pas automatique s’ils commentent des crimes? Comment allez-vous faire pour contrôler cette population?

[Traduction]

M. Broom : Je vous remercie de cette question. Je pourrais l’aborder sous plusieurs angles différents.

En ce qui concerne la surveillance des délinquants, nous prenons, à la Commission des libérations conditionnelles du Canada, les décisions de mise en liberté sous condition. Le Service correctionnel du Canada se charge de la surveillance dans la communauté.

Est-ce qu’un système automatisé comporterait un accès à toute l’information à l’échelle des provinces et des territoires en ce qui a trait à l’achèvement de la peine? Par exemple, est-ce qu’on saurait si les amendes ont été payées, et ainsi de suite, ce qui permettrait de savoir quand la période d’admissibilité commencerait?

Un système automatisé, s’il était mis en œuvre aujourd’hui, ne comporterait pas cette information.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Je vais vous poser une question plus terre à terre. Avec le personnel que vous avez à la Commission des libérations conditionnelles du Canada, demain matin, si ce projet de loi est adopté, vous devez suivre la clientèle fédérale et provinciale, donc au-delà de 370 000 dossiers annuellement. Est‑ce que la commission aura la capacité de gérer ces 370 000 dossiers?

[Traduction]

M. Broom : Merci.

La Commission des libérations conditionnelles est effectivement responsable de la prise de décisions en matière de mise en liberté sous condition. Il lui incombe également de prendre des décisions en matière de suspension ou de radiation du casier judiciaire.

Quand nous parlons de la supervision des délinquants, encore une fois, avec la Commission des libérations conditionnelles du Canada...

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Je vous arrête. Ma question n’est pas là. À l’heure actuelle, la Commission des libérations conditionnelles du Canada reçoit du Service correctionnel canadien un avis de remise en liberté pour un criminel qui est dans un pénitencier fédéral, donc vous gérez annuellement à peu près 15 000 remises en liberté annuellement, que ce soit au tiers ou aux deux tiers. Demain matin, on va vous dire que vous avez 300 000 dossiers de plus à gérer. Ma question est simple : avez‑vous la capacité et les ressources pour traiter ces 350 000 dossiers additionnels, en plus des 15 000 que vous traitez actuellement?

[Traduction]

M. Broom : Merci. C’est une question qu’il vaudrait mieux poser aux services correctionnels des provinces, si nous parlons de supervision.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Le projet de loi donne le mandat à la Commission des libérations conditionnelles du Canada de suivre ces gens pour s’assurer qu’ils n’ont pas commis de crime ou de délit. C’est la commission qui a le mandat. Ce ne sont pas les services correctionnels.

Je reprends ma question. Si demain vous devez traiter 350 000 dossiers additionnels, aurez-vous la capacité, sur le plan des ressources humaines, de traiter ces dossiers pour vous assurer que les gens ne reçoivent pas de pardon automatique parce qu’ils ont commis des crimes? Ma question est simple.

[Traduction]

M. Broom : Merci. Si la question est de savoir si nous disposons des ressources nécessaires pour soutenir la mise en application du projet de loi S-212 dans son libellé actuel, je dirais que nous n’avons pas réalisé d’analyse détaillée des incidences financières du point de vue de la dotation en personnel. Par exemple, l’un des éléments du projet de loi est qu’il laisse une plus grande place aux décisions prises par le personnel, par rapport à celles qui sont prises par la commission. En outre, il faut garder à l’esprit qu’avec un système automatisé, la responsabilité incomberait en partie à la GRC plutôt qu’à la Commission des libérations conditionnelles. Mais pour l’instant, nous n’avons pas réalisé d’analyse détaillée des coûts du projet de loi S-212.

Le sénateur Dalphond : Avec le système actuel, comment cela se passe-t-il lorsque quelqu’un fait une demande? Le demandeur doit fournir le rapport qu’il veut faire radier ou effacer, ou qu’il veut faire disparaître, pour obtenir le pardon. Cependant, s’il a été en même temps inculpé pour autre chose, mais qu’il s’agit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, ou s’il a même été accusé et reconnu coupable d’une telle infraction, mais qu’il ne le divulgue pas, comment pouvez-vous le vérifier? Comment pouvez-vous le savoir?

Mme Noseworthy : Je vous remercie de votre question. Dans le cadre de la procédure de demande actuelle, nous demandons divers documents, dont une vérification des dossiers de la police locale, sur laquelle nous nous appuyons pour inclure toute autre information qui n’est pas disponible ou toute autre condamnation qui n’est pas mentionnée dans le casier judiciaire. Ainsi, le demandeur va fournir son casier judiciaire de la GRC, s’il en existe un, à la police locale de la région dans laquelle il vit ou a vécu récemment, ce qui inclut cette information ainsi que l’information sur les infractions n’ayant pas entraîné de condamnation. Cette information aide le commissaire à corroborer l’analyse de la conduite et à déterminer si la personne a respecté la loi et mené ce genre de style de vie.

En outre, nous incluons des documents judiciaires qui contiennent également certaines des condamnations supplémentaires de la personne, afin de nous assurer que nous avons une image complète du casier judiciaire à suspendre ou à séparer, et que nous n’octroyons pas non plus de suspension de casier partielle.

Le sénateur Dalphond : Si la personne habite à Ottawa, par exemple, mais qu’elle choisit de vivre à Montréal, vous allez demander une déclaration des services de police de Montréal et d’Ottawa?

Mme Noseworthy : Oui, selon le temps écoulé. Si la personne vit à Ottawa depuis 10 ans, non. Mais si la personne a récemment déménagé de Montréal à Ottawa, nous demanderons les dossiers des deux polices locales.

Le sénateur Dalphond : Et si le demandeur ment et ne dit pas qu’il était à Montréal pour la fin de semaine, qu’il s’est battu dans un bar, qu’il a été accusé de voies de fait et que l’affaire a été portée devant la cour municipale, vous n’en saurez rien?

Mme Noseworthy : Cette information pourrait figurer dans le casier judiciaire. Dans certains cas, nous la trouverons dans le cadre des vérifications que nous effectuons dans diverses bases de données, car cela fait partie de nos vérifications. Il peut arriver que de l’information nous échappe si c’est seulement un acte punissable par procédure sommaire et que l’information ne se trouve pas dans le répertoire national. C’est rare.

Le sénateur Dalphond : C’est une question de confiance. Vous vous fiez essentiellement à l’autodéclaration?

Mme Noseworthy : Oui. Dans ce cas, le processus de révocation entre en jeu si nous découvrons que la personne a omis cette information dans sa demande.

Le sénateur Dalphond : Êtes-vous équipés pour le système, qui est automatisé dans une certaine mesure? Vous saisissez le nom de la personne dans le système et l’ordinateur va trouver s’il y a quelque chose dans la base de données fédérale et, peut-être, suivre des liens que vous avez avec des cas signalés, ou des choses comme ça, ou des dossiers du palais de justice qui sont parfois accessibles sur le Web. C’est bien cela?

Mme Noseworthy : En ce moment, le système qui nous permettrait d’accéder à toute cette information n’existe pas, comme l’a mentionné notre collègue de la Sécurité publique dans sa déclaration liminaire. Ce que nous avons, c’est l’information et les documents judiciaires que le demandeur doit fournir, l’information que donne la vérification des dossiers de la police locale et l’information du casier judiciaire. Ensuite, dans le cadre de notre travail d’enquête, nous avons un accès limité à certaines bases de données qui peuvent révéler d’autres éléments d’information.

Le sénateur Dalphond : Quel est le pourcentage de cas où vous constatez que l’autodéclaration n’est pas complète et qu’il manque certains éléments?

Mme Noseworthy : S’il manque des éléments, nous nous tournons vers le demandeur, car en réponse à une question de notre processus de demande, il doit dire s’il a été condamné pour une infraction qui ne figure pas dans son casier judiciaire, et en raison des aspects juridiques techniques de cette question, nous lui faisons part de ce que nous avons découvert et lui demandons de bien vouloir confirmer qu’il s’agit bien de sa condamnation. La plupart du temps, le demandeur va répondre qu’il avait oublié la condamnation. Nous avons eu des cas où c’était le frère jumeau, de là l’erreur. Nous revenons au demandeur et lui demandons de s’expliquer. Dans la plupart des cas, nous obtenons la confirmation que c’est bien le cas, et le dossier est ensuite transmis au commissaire pour examen.

Le sénateur Dalphond : Voici ma dernière question. Avez-vous le pourcentage des demandes qui sont rejetées ou celui des demandes qui sont acceptées?

Mme Noseworthy : D’un point de vue statistique, et pour répondre à votre question précédente, si nous découvrons une condamnation qui n’était pas accessible à l’étape de l’examen préliminaire, cela peut avoir une incidence sur l’admissibilité de la personne, et nous mettons fin au traitement de la demande. D’un point de vue statistique, dans l’ensemble, au cours des quatre dernières années, nos résultats positifs sont en fait assez élevés, de l’ordre de 95 % et 96 % au cours des dernières années, pour les octrois et les ordonnances.

Le sénateur Dalphond : Est-ce qu’il est possible que la demande soit rejetée, même si toute l’information a été divulguée?

Mme Noseworthy : Oui. En vertu du régime législatif actuel et du régime précédent, il est possible que le pardon ou la suspension du casier soient refusés ou ne soient pas accordés.

Le sénateur Klyne : J’allais suivre la même veine que le sénateur Boisvenu, mais je vais plutôt aborder un autre sujet.

Dans le témoignage que vous avez livré à la réunion du Comité permanent de la justice et des droits de la personne, le 29 mars 2022, vous avez mentionné le Groupe de travail sur la diversité et le racisme systémique de la Commission des libérations conditionnelles ainsi que le Comité sur les victimes et le cercle autochtone du président. Est-ce que ce comité du groupe de travail et ce cercle autochtone ont un point de vue sur le projet de loi S-212 dont vous pourriez nous faire part?

M. Broom : Nous n’avons pas sondé le cercle autochtone du président en ce qui concerne le projet de loi S-212.

Le sénateur Klyne : D’accord. Merci.

J’ai une question pour Mme Noseworthy. Deux, en fait. L’annexe 1 de la Loi sur le casier judiciaire énumère diverses infractions graves, y compris les infractions sexuelles impliquant des enfants et la traite de personnes. Mes questions sont les suivantes. Premièrement, à votre avis, les délinquants qui ont été condamnés pour de tels crimes devraient-ils avoir droit à la suspension de leur casier judiciaire ou devraient-ils être soumis à un autre processus pour les crimes graves? Deuxièmement, quels sont les facteurs politiques, les recherches, les études, les preuves et les précédents qui éclairent votre point de vue sur cette question?

Mme Noseworthy : Je suis l’administratrice du programme, et la commission est un tribunal indépendant. Je ne pense donc pas pouvoir répondre à cette question.

Le sénateur Klyne : Monsieur Broom?

M. Broom : Je ne m’avancerais pas non plus sur la position stratégique du gouvernement à ce sujet.

Le sénateur Klyne : D’accord, je vais poser une autre question ouverte à tous. La Loi canadienne sur les droits de la personne et de nombreuses lois provinciales sur les droits de la personne, mais pas toutes, interdisent la discrimination à l’égard des personnes ayant un casier judiciaire ou un casier suspendu. À votre avis, est-ce que ces dispositions réussissent à prévenir la discrimination à l’égard de ces personnes? Deuxièmement, est-ce que votre réponse à cette question a un effet sur votre opinion quant à la nécessité des amendements contenus dans ce projet de loi?

M. Broom : Je ne dispose pas de l’information ou de la perspective nécessaire pour évaluer les incidences de la loi. Je dirais que le pardon ou la suspension de casier ont pour effet d’éliminer les obstacles qui entravent l’accès à l’emploi, au logement et à l’éducation. En ce sens, je pense que c’est utile, mais je n’ai pas d’information sur l’efficacité de cet élément précis de ce point de vue.

Le sénateur Klyne : Je vais revenir aux questions du sénateur Boisvenu. Si je comprends bien — et je suppose que je cherche à obtenir une confirmation —, comme on l’a décrit, avec quelque 300 000 dossiers à traiter, la Commission des libérations conditionnelles ne serait pas capable d’avoir accès aux données et autres ressources dont elle aurait besoin pour mettre en application ce projet de loi de façon efficace et avec des résultats rapides. Est-ce exact?

M. Broom : Je vous remercie de cette question.

À l’heure actuelle, le programme que nous administrons est fondé sur les demandes, de sorte que nous avons une très bonne idée du nombre de personnes qui s’adressent à la Commission des libérations conditionnelles pour obtenir une suspension du casier ou un pardon. Si nous devions mettre en œuvre un système où il y aurait un très grand nombre de dossiers à examiner, nous devrions alors examiner nos effectifs et nous assurer d’être prêts et d’avoir tout ce qu’il faut. Cependant, si nous parlons d’un système automatisé, le défi serait légèrement différent, car la GRC jouerait probablement un rôle plus fondamental dans les décisions concernant les dossiers. Comme nous l’avons déjà mentionné, pour qu’un tel système puisse être mis en œuvre, il faudrait résoudre certains problèmes d’interopérabilité.

Le sénateur Klyne : S’il y a un deuxième tour, j’aimerais être sur la liste.

Le sénateur Tannas : Merci de votre présence.

Madame Noseworthy, depuis combien de temps travaillez‑vous au sein du ministère où vous êtes directrice en ce moment?

Mme Noseworthy : Je suis à la commission depuis six ans et demi, dont trois ans à mon poste actuel et trois ans en tant que gestionnaire à la même direction.

Le sénateur Tannas : Depuis six ans et demi, dans quelle mesure le processus de demande a-t-il été amélioré ou simplifié? Est-il radicalement différent et plus efficace qu’il y a 6 ans, ou 10 ans, selon ce que vos collègues vous auraient dit, et ainsi de suite? Pouvez-vous nous donner une idée de l’ampleur de l’amélioration du processus? La réponse pourrait ne pas être très réjouissante.

Mme Noseworthy : Ces dernières années, le guide de demande a été légèrement modifié. Nous avons essayé de réduire le nombre d’étapes. Quand le projet de loi C-93 était à l’étude, nous avons également reformulé le guide en langage clair pour la procédure ordinaire, et nous avons essayé d’éliminer certaines formulations plus lourdes.

Le guide et le processus actuels reposent sur la structure actuelle; ils sont conçus pour aider les commissaires à prendre des décisions et à veiller à ce que les critères d’admissibilité et les critères d’évaluation prévus par la loi puissent être respectés grâce aux vérifications que nous effectuons. Par ailleurs, comme l’a dit notre collègue de la Sécurité publique, le système centralisé qui nous éviterait de devoir demander une partie de l’information n’existe pas à l’heure actuelle.

Nous travaillons avec le système dont nous disposons. Comme certains éléments du guide sont absolument essentiels, nous nous concentrons sur les outils du site Web; nous nous assurons que les gens peuvent trouver, sur notre site Web, les réponses à de nombreuses questions fréquemment posées, ainsi qu’un didacticiel. Étant donné que nous administrons les quatre régimes législatifs, nous avons un diagramme d’admissibilité pour guider les demandeurs dans le processus. Nous avons la ligne 1-800, comme nous l’avons mentionné, et le courrier électronique.

Nous travaillons activement avec les groupes de soutien communautaire que notre collègue de la Sécurité publique a mentionnés précédemment pour faire de la sensibilisation, et nous avons une personne qui répond directement aux questions posées par les groupes qui reçoivent du financement pour aider les demandeurs.

Nous avons également entrepris de développer un portail de demande en ligne. Il faudra encore attendre deux ans, mais nous travaillons activement à la modernisation de notre système de gestion des cas et au développement d’un portail de demande qui devrait simplifier et accélérer le processus. Cela prendra un peu plus de temps.

Le sénateur Tannas : Comment expliquez-vous ce que je viens d’entendre aujourd’hui, pas nécessairement de la part de témoins, mais de la part d’éminents juristes qui ont décrit des circonstances dans lesquelles les gens abandonnent tout simplement, parce qu’il est trop difficile de faire une demande? Est-ce que cela vous préoccupe? Est-ce que cela vous surprend? Si vous êtes surpris, comment pouvons-nous résoudre ce problème? Si cela ne vous surprend pas, qu’est-ce que votre groupe fait pour améliorer la situation? Cette question s’adresse peut-être aussi à M. Broom. Je trouve étrange qu’on puisse dire que le système est à ce point mauvais qu’on va l’abandonner et l’automatiser. Cela pose toute une série d’autres problèmes.

Ne pouvons-nous pas améliorer le système de manière à ce que les personnes de toutes les couches sociales et de tous les niveaux d’éducation puissent faire une demande dans un laps de temps raisonnable?

M. Broom : Merci. Je dirais d’abord qu’il y a eu des progrès dans l’amélioration de l’accès à la possibilité d’obtenir une suspension du casier judiciaire. Je pense que la réduction des frais à 50 $ a été...

Le sénateur Tannas : J’ai bien compris cela.

M. Broom : ... un pas dans la bonne direction. De plus, comme l’a mentionné notre collègue de la Sécurité publique, l’investissement dans les organismes communautaires pour aider les demandeurs est également important.

Des mesures ont été prises. Comme l’a mentionné ma collègue, Mme Noseworthy, nous travaillons également à un système automatisé qui devrait être prêt vers mars 2025 et qui permettra une approche un peu plus simplifiée.

Je pense que nous avons fait des progrès pour ce qui est d’améliorer l’accès et d’aider les gens à faire une demande dans le cadre du programme.

Le sénateur Tannas : Merci.

La sénatrice Jaffer : Je vous remercie tous les deux d’être ici. J’ai trouvé votre déclaration préliminaire très intéressante, et elle m’a inspiré de nombreuses autres questions.

Je mets de côté les questions que j’avais préparées, mais d’après ce que j’ai entendu, vous avez de nombreuses études et toutes sortes de renseignements. Étant donné que vous menez des études, connaissez-vous le profil et les antécédents d’une personne qui a été reconnue coupable? Puisque vous avez tant d’études, il est évident que vous devez avoir une étude sur ce sujet.

M. Broom : Je vous remercie. Nous recueillons pas mal de renseignements sur les candidats, car nous donnons un aperçu de la peine, des renseignements de base, etc. Par contre, nous ne recueillons pas beaucoup de renseignements démographiques que nous analyserions ensuite en fonction du profil du demandeur, si j’ai bien compris la question.

Nous n’avons pas beaucoup d’études dans lesquelles les profils des candidats seraient examinés. La réponse courte, c’est que nous n’avons pas cela.

La sénatrice Jaffer : Je trouve cela très troublant. Vous avez dit que l’aide d’un avocat n’est pas nécessaire. De nombreuses personnes qui s’adressent à nous — et même les avocats — éprouvent des difficultés avec les demandes. Je m’inquiète donc beaucoup de savoir d’où vous tenez cette information selon laquelle une personne n’a pas besoin d’un avocat pour remplir ces demandes.

Mme Noseworthy : Nous nous efforçons de simplifier le processus le plus possible, mais dans les limites de la Loi sur le casier judiciaire actuelle et en l’absence d’un système centralisé, nous devons absolument obtenir certains documents. Nous disons aux gens qu’ils n’ont pas besoin d’un avocat ou d’une tierce partie pour tenter de les dissuader de dépenser beaucoup d’argent auprès d’une société tierce, car ils pourraient plutôt s’adresser aux groupes de soutien communautaires, qui profitent d’un soutien financier de Sécurité publique, pour obtenir de l’aide. Nous essayons de travailler avec eux, car un responsable ou un coordinateur est chargé de les aider.

Je comprends que le processus requiert de nombreux documents, mais nous espérons que les gens commenceront à communiquer avec nous davantage par l’entremise de la ligne sans frais et des [Difficultés techniques].

La sénatrice Jaffer : Vos efforts sont louables et je comprends ce que vous dites, mais de toute évidence, vous n’avez pas encore réussi. Je pense que nous pouvons établir que les gens ont besoin d’un avocat, mais nous allons maintenant aborder un autre sujet. Vous avez dit avoir accordé un pardon à 500 000 personnes. Connaissez-vous le profil de ces personnes? De quelles catégories ou de quels groupes sont-elles issues?

M. Broom : Nous ne disposons pas de renseignements démographiques sur les personnes qui ont demandé ou obtenu une suspension de leur casier, une réhabilitation ou un pardon. Nous ne disposons pas de ce type de renseignements, mais nous avons des renseignements, par exemple, sur les types de déclarations de culpabilité qui se trouvent dans les casiers judiciaires.

La sénatrice Jaffer : Quels sont les principaux types de déclarations de culpabilité? Quel est le pourcentage de déclarations de culpabilité pour l’alcool au volant? Quel est le pourcentage des pardons accordés pour ce type d’infraction?

M. Broom : Ces renseignements se trouvent dans le rapport annuel que j’ai sous les yeux, mais je ne veux pas prendre le temps du comité pour les chercher.

La sénatrice Jaffer : Pouvez-vous envoyer ces renseignements au greffier?

M. Broom : Oui, je peux les lui envoyer.

La sénatrice Jaffer : Combien d’infractions liées à l’alcool au volant et combien d’infractions liées aux drogues sont concernées? Je ne peux pas vraiment vous poser ma question, car j’allais dire que d’après ce que vous avez dit tout à l’heure, j’aurais cru que la majorité concernait ce type d’infractions et non des infractions graves. Ai-je raison?

M. Broom : Je vous remercie. Oui, vous avez raison. J’ai énuméré les cinq principales catégories, c’est-à-dire celles qui forment la majorité des cas.

La sénatrice Jaffer : À titre de parlementaires, nous travaillons avec les gens, et lorsque nous rentrons dans nos circonscriptions, les gens nous disent que c’est un processus impossible et qu’ils abandonnent. Vous nous entendez dire cela. Il est donc évident que nous devons travailler ensemble pour améliorer le processus, car il est impossible à suivre. Êtes-vous d’accord avec cela?

M. Broom : Je suis d’accord pour dire qu’il présente des difficultés. Je suis certainement d’accord pour dire que nous pourrions tenter d’améliorer certains aspects, et j’ajouterais que nous nous efforçons constamment d’améliorer la façon dont nous menons nos activités, qu’il s’agisse de communiquer directement avec les demandeurs ou de fournir des outils ou des vidéos, en plus des investissements du gouvernement. Je dirais donc que la Commission des libérations conditionnelles du Canada s’efforce continuellement d’améliorer la mise en œuvre du programme.

La sénatrice Jaffer : Je vous remercie beaucoup de votre réponse.

La sénatrice Batters : Je vous remercie beaucoup d’être ici aujourd’hui. Lorsque M. Dave Blackburn, un ancien député, a comparu devant notre comité, il nous a dit que l’expiration automatique prévue dans ce projet de loi...

[...] vient contrecarrer deux notions essentielles dans le processus d’une réintégration sociale réussie et durable, c’est-à-dire l’autonomisation et la responsabilisation des personnes.

Croyez-vous également que le processus de demande a une certaine valeur?

M. Broom : Je vous remercie de votre question. Dans le système que nous mettons actuellement en œuvre, nous avons besoin des demandes pour recueillir les renseignements dont nous avons besoin, afin de pouvoir ordonner une suspension de casier ou accorder un pardon. C’est essentiel pour nos activités. Quant à savoir ce que cela signifie pour un demandeur, je ne suis au courant d’aucune recherche qui aurait été menée à ce sujet. Je dirais que pour exécuter ce programme, nous avons besoin, à ce moment-ci, des renseignements fournis par les demandeurs, afin d’établir leur admissibilité, et nous avons surtout besoin de renseignements sur la peine qui a été purgée.

La sénatrice Batters : Puisque vous avez maintenu ce processus de demande, il est évident que la position de principe de la Commission des libérations conditionnelles est qu’il s’agit d’un élément important, sinon vous ne le feriez pas, n’est-ce pas?

M. Broom : Je vous remercie. La Commission des libérations conditionnelles doit absolument pouvoir disposer de ce processus de demandes pour recueillir les renseignements nécessaires. En ce qui concerne la position de principe, je ne me prononcerais pas dans un sens ou dans l’autre. Je ne dirais pas que nous avons adopté une position de principe selon laquelle une demande doit absolument être soumise. Je dirais plutôt que c’est nécessaire à l’exécution du programme.

La sénatrice Batters : Pouvez-vous commenter le système de signalement proposé dans le projet de loi S-212 lorsqu’un délinquant sexuel précédemment déclaré coupable demande à travailler ou à faire du bénévolat auprès d’enfants ou d’adultes vulnérables? À votre avis, le système décrit dans le projet de loi représente-t-il une approche appropriée et suffisante pour traiter avec les individus ayant été reconnus coupables d’agression sexuelle?

M. Broom : Je vous remercie de votre question. Je pense que les signalements ne relèvent pas de la compétence de la Commission des libérations conditionnelles du Canada, mais de la compétence de Sécurité publique et du ministre, car ils s’occupent des décisions relatives à la suspension de casiers judiciaires.

La sénatrice Batters : N’avez-vous aucun commentaire à formuler sur ce type de système ou sur la question de savoir s’il pose des risques, selon vous? Vous pensez que c’est une question qui relève de Sécurité publique.

M. Broom : Oui, pour le signalement des casiers, il faudrait s’adresser à la GRC et à Sécurité publique.

La sénatrice Batters : D’accord. Je vous remercie.

La sénatrice Clement : Je vous remercie d’être ici et d’avoir écouté le premier groupe de témoins. Je vous en suis reconnaissante.

J’aimerais revenir sur certaines questions posées par les sénateurs Tannas et Jaffer. Je suis avocate depuis 31 ans et j’ai représenté de nombreuses personnes dans le cadre de ce processus de demande. Je conviens qu’il y a eu des améliorations au cours de ces 31 années, mais les gens ont toujours besoin d’un avocat. Je sais que vous avez amélioré votre site Web. Je sais aussi que vous avez maintenant une ligne sans frais, mais celle-ci ne vaut que le nombre de minutes dont disposent mes clients sur leur téléphone cellulaire. Les lignes sans frais n’offrent pas nécessairement le type d’assistance dont mes clients ont besoin.

La majorité des détenus n’ont pas de diplôme d’études secondaires et leur taux d’analphabétisme est très élevé. Les sites Web, les guides de 28 pages et les deux formulaires de demande sont autant de raisons d’abandonner. Je sais que vous avez fourni des statistiques. Vous avez fourni un rapport au Parlement sur les suspensions de casiers judiciaires — la demande de 1 786 personnes, soit 16 % des demandeurs de suspension de casier, a été rejetée pour cause d’inadmissibilité parce qu’elle a été jugée incomplète, soit parce que le formulaire n’avait pas été correctement rempli, soit parce qu’il manquait des renseignements, toutes des choses qui pourraient être liées à un manque de capacité. Et c’est sans compter les personnes qui abandonnent. Les personnes que j’ai rencontrées dans mon cabinet me disent simplement que le processus prend trop de temps et qu’elles ne peuvent pas y arriver.

Je présume qu’on peut donc se demander quelle est votre capacité, car dans votre plan ministériel de 2022-2023, vous indiquez ce qui suit :

[...] la CLCC met en œuvre quatre régimes législatifs, dont un pour les suspensions d’un casier lié à la possession de cannabis, ce qui augmente considérablement la complexité du programme puisque les critères d’admissibilité et de prise de décisions pour chaque régime législatif sont différents. L’administration de multiples régimes met en péril l’intégrité du programme.

Nous avons ici le projet de loi S-212, qui pourrait potentiellement contribuer à réduire ce problème si nous mettions en place ce type de système. Pouvez-vous formuler des commentaires à ce sujet? Vous avez beaucoup à faire. Il s’agit d’un plan pour que mes clients se sentent respectés par le gouvernement et le système judiciaire.

M. Broom : Je vous remercie de votre question et de l’examen de nos documents. Je dirais qu’il est effectivement complexe d’administrer quatre régimes en même temps. Cette complexité nous cause des difficultés, et cela affecte aussi les demandeurs. Nous fournissons les meilleurs outils et conseils. Idéalement, les organismes qui ont reçu du financement devraient aider ces gens.

Si vous me posez des questions sur la mise en œuvre du projet de loi S-212, je soulèverais les mêmes préoccupations que celles que j’ai déjà exprimées au sujet de l’absence d’un répertoire national ou d’une certaine interopérabilité. Si vous me demandiez s’il serait plus facile d’administrer un système moins complexe, je ne pourrais qu’être d’accord avec vous.

La sénatrice Clement : Pouvez-vous également me dire comment la Commission des libérations conditionnelles du Canada s’est adaptée à la révision complète dont a fait l’objet le système de justice pénale pour les adolescents? Il s’agissait manifestement d’une amélioration considérable et d’un processus réussi. Comment la Commission des libérations conditionnelles du Canada s’est-elle adaptée avec les ressources dont elle disposait à l’époque?

M. Broom : Je vous remercie de votre question. Je ne travaillais pas pour la commission à l’époque, et je ne peux donc pas parler de l’impact en connaissance de cause.

Il s’agit de casiers judiciaires d’adolescents, et je ne suis donc pas au courant de l’historique de l’élaboration de ce système et des discussions qui ont eu lieu avec les administrations provinciales. Nous ne sommes malheureusement pas les bonnes personnes pour répondre à une question sur la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents et les dispositions de cette loi qui traite des casiers judiciaires des adolescents.

[Français]

La sénatrice Dupuis : Merci à nos deux témoins d’être parmi nous aujourd’hui. Avez-vous des données relatives au fait que le gouvernement subventionne certains organismes communautaires pour aider les gens à faire leur demande de pardon? Avez-vous remarqué une influence sur le nombre de demandes? Avez-vous des données traitant de cette question?

[Traduction]

M. Broom : Je pourrais répondre en premier, et si Mme Noseworthy a quelque chose à ajouter, elle pourra le faire ensuite.

Dans ma déclaration préliminaire, j’ai mentionné que nous recevions un certain nombre de demandes et que nous anticipions en fait une augmentation du nombre de demandes pendant l’année à venir. Plusieurs facteurs expliquent cette augmentation prévue, notamment la réduction des frais exigés. Je pense qu’il n’y a aucun doute que cela en fait partie. Un autre facteur est lié aux affaires judiciaires qui ont entraîné des changements dans la manière dont nous administrons le régime, de sorte que les demandeurs peuvent présenter leur demande sur le fondement du régime qui était en place au moment de leur condamnation. C’est un autre facteur qui explique l’augmentation du nombre de demandes.

Personnellement, je n’ai pas de renseignements sur l’impact des organismes communautaires, mais Mme Noseworthy possède peut-être ce type de renseignements ou des renseignements sur la qualité de la demande.

Mme Noseworthy : Malheureusement, il est un peu tôt pour se prononcer. Les accords de financement mis en place par Sécurité publique ne sont entrés en vigueur qu’en octobre. Nous avons commencé à informer ces groupes en novembre et décembre. Nous poursuivons ces activités la semaine prochaine — ou au cours des deux prochaines semaines — avec une autre séance d’information sur le guide où nous leur montrerons comment répondre aux questions et d’autres choses de ce genre.

[Français]

La sénatrice Dupuis : Ma deuxième question va dans le même sens que celle de la sénatrice Clement. Tout comme moi, vous avez dû lire récemment dans les journaux qu’un nombre faramineux de Canadiens ne réclament pas du ministère du Revenu ce qui leur est dû, et ce, pour toutes sortes de raisons. Soit ils ne savent pas comment le réclamer, soit ils ne savent même pas qu’ils y ont droit.

Vous avez l’air de mettre l’accent sur l’accès à un portail. J’ose espérer que celui-ci sera plus facile d’accès que ceux que les comptables nous suggèrent d’utiliser pour remplir notre déclaration de revenus. De toute façon, on peut dire qu’au Canada, en général, le niveau de littératie technologique est plutôt bas.

Je me demande si cela ne risque pas de constituer un obstacle supplémentaire à l’accès à vos services. C’est peut-être une crainte mal fondée; rassurez-moi.

[Traduction]

M. Broom : Je vous remercie. C’est un excellent point.

Il y a toujours des personnes qui ont des difficultés avec les systèmes automatisés et les systèmes en ligne, car elles n’ont pas des connaissances technologiques poussées ou elles ne sont pas à l’aise avec ces systèmes. Nous en avons tous fait l’expérience.

Je dirais que dans le cadre de la mise au point du système qui est en cours, nous veillerons à ce que le portail soit aussi accessible que possible, car nous voulons nous assurer qu’il n’est pas trop difficile ou complexe et qu’il y aura également de l’aide pour les utilisateurs.

[Français]

La sénatrice Dupuis : Sur votre site Internet, vous expliquez que vous rendez des décisions relatives à la libération conditionnelle de délinquants qui purgent une peine de moins de deux ans dans les provinces et les territoires, sauf au Québec, en Ontario et en Alberta.

Notre témoin précédent a affirmé qu’il y avait un problème lié au fait que les ressources et les données sont réparties aux niveaux local et provincial et qu’il n’existe pas de registre central des condamnations. J’imagine que votre façon de travailler vous donne accès à des données sur les condamnations dans les provinces et les territoires, excluant le Québec, l’Alberta et l’Ontario. Est-ce bien le cas?

[Traduction]

Mme Noseworthy : Les données dont nous disposons nous sont fournies par les demandeurs. Elles se trouvent dans le casier judiciaire et concernent les condamnations dont ces personnes ont fait l’objet et les condamnations supplémentaires notées soit par le tribunal, soit par le service de police local. Nous pouvons aussi consulter certaines bases de données. Je crois que nous n’avons accès qu’à un seul tribunal. Nous ne pouvons pas accéder aux dossiers d’autres tribunaux provinciaux ou à ceux des services de police locaux.

Le président : J’aimerais vous poser une question.

Compte tenu de votre domaine d’activités — qui est très honorable et important, et qui est important pour les Canadiens qui refont leur vie —, j’aurais pensé que vous auriez eu un intérêt particulier pour la clientèle avec qui vous ne faites pas déjà affaire. Vous avez décrit le nombre de demandes, mais il doit y avoir une grande majorité de personnes qui ont été déclarées coupables d’infractions criminelles qui ne sont pas dans votre système, car elles ne font pas de demande. Je pense qu’il s’agit de la grande majorité, si je me fonde sur les chiffres que vous nous avez donnés. Je me disais donc que vous aimeriez sûrement en savoir un peu plus long sur le profil des personnes qui n’ont pas déposé de demande. Pouvez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet? Je ne veux pas vous critiquer, madame Noseworthy, mais lorsqu’on vous a posé cette question, vous avez eu tendance à répondre que votre système répond aux besoins de la Commission des libérations conditionnelles du Canada. C’est très bien, mais j’aurais pensé qu’il y aurait aussi un autre volet à cette question, à savoir ce dont les Canadiens ont besoin pour répondre au profil des personnes qui méritent de voir leur casier effacé, ou autre, mais nous n’arrivons pas à savoir qui sont ces personnes.

Mme Noseworthy : Je vous remercie de votre question. C’est une question intéressante. Nous avons commencé à étudier cela. Nous sommes en train d’élaborer un plan de recherche sur les données que nous pouvons collecter en vertu de la Loi sur le casier judiciaire et de la Loi sur la protection des renseignements personnels. Nous voulons nous assurer que nous pouvons collecter ce type de données, compte tenu des limites du programme en vertu de la Loi sur le casier judiciaire, mais des travaux ont été lancés pour voir si nous pouvons élargir la portée de la collecte de données.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Madame Noseworthy, combien d’employés avez-vous à votre direction?

[Traduction]

Mme Noseworthy : Nous avons actuellement environ 65 employés, dont la plupart sont à temps plein. Nous avons également quelques employés occasionnels.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Lorsque vous dites que vous traitez 15 000 dossiers, est-ce que c’est la charge maximale de votre direction?

[Traduction]

Mme Noseworthy : À ce moment-ci, nous prévoyons de recruter du personnel supplémentaire…

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Donc, si éventuellement vous devez traiter des centaines de milliers de dossiers, vous n’y arriverez pas.

[Traduction]

Mme Noseworthy : Comme mon collègue l’a mentionné…

Le président : Je pense que nous avons déjà eu une réponse à cette question plus tôt.

Le sénateur Klyne : Croyez-vous que le système d’expiration automatique du casier judiciaire permettrait de favoriser la réinsertion sociale des délinquants et profiterait à l’ensemble de la société en facilitant, le cas échéant, la réinsertion rapide d’individus qui deviendraient des citoyens respectueux des lois? Pouvez-vous nous parler d’études ou de précédents d’autres pays sur l’efficacité et les inconvénients d’un système d’expiration automatique du casier judiciaire dans le contexte de la réinsertion sociale des délinquants?

M. Broom : Je dirais que la suspension du casier judiciaire est certainement un outil important pour faciliter la réinsertion sociale et une réhabilitation réussie.

Le sénateur Klyne : À ce moment-ci, je parle de l’expiration automatique du casier judiciaire.

M. Broom : En ce qui concerne la mise en place d’un système d’expiration automatique du casier judiciaire, j’hésiterais à appliquer à notre système les recherches qui ont pu être menées dans des pays qui ont mis en place un régime d’expiration automatique du casier, dans la mesure où ces pays ont un système unitaire et qu’ils ont donc un répertoire central, ce qui élimine un problème auquel nous faisons face, c’est-à-dire que les casiers judiciaires sont gérés par différentes administrations.

Je ne pense pas que nous pourrions aisément établir une comparaison directe. Je ne serais pas surpris s’il existait des preuves que certains régimes d’expiration des casiers judiciaires présentent des avantages, mais je ne suis pas sûr que nous puissions appliquer cela au système canadien.

Le sénateur Klyne : Si nous devions réinventer le processus, mettrions-nous en œuvre un système d’expiration automatique des casiers judiciaires?

M. Broom : L’orientation de la politique du gouvernement est l’orientation de la politique du gouvernement. Plus tôt aujourd’hui, nos collègues de Sécurité publique Canada nous ont dit que le gouvernement étudie la possibilité d’un programme de retrait automatisé de casiers judiciaires.

Le président : Sénateur Klyne, pendant un moment, j’ai cru que vous suggériez d’éliminer le fédéralisme.

Le sénateur Dalphond : Dans votre déclaration préliminaire, vous avez parlé d’une augmentation de 20 % du nombre de demandes que vous avez reçues en 2021-2022, ce qui représente plus ou moins 11 000 demandes, et d’une augmentation de 20 % l’année suivante — soit l’année en cours qui se termine le 31 mars —, ce qui représente plus de 15 000 demandes. Comment expliquez-vous cette augmentation de 40 % en deux ans?

Est-ce parce que vous avez simplifié votre processus? Pouvez‑vous compter sur l’aide d’un plus grand nombre de personnes ou de réseaux communautaires? Ou est-ce parce que les gens commencent à découvrir le système?

Mme Noseworthy : Nous avons connu une baisse perceptible des demandes dans la période juste avant les deux dernières années en raison de la pandémie et une baisse perceptible des demandes avant la pandémie en raison, selon nous, des frais plus élevés.

Si l’on considère les deux dernières années et le moment de l’annonce de la réduction des frais, il est évident que cette réduction des frais a entraîné une augmentation du nombre de demandes. Nous présumons également que la reprise des activités des tribunaux et des services de police a également permis aux demandeurs d’obtenir les renseignements dont ils ont besoin, mais la réduction des frais est le facteur prédominant.

Comme mon collègue l’a mentionné, la décision de la Cour fédérale qui nous a amenés à mettre en œuvre plusieurs régimes législatifs et la réduction des périodes d’attente ont contribué à cette augmentation.

Le sénateur Dalphond : Je vous remercie.

Le président : C’est ce qui met fin au temps dont nous disposions pour cette réunion.

Permettez-moi d’abord de remercier M. Broom et Mme Noseworthy d’avoir comparu, d’avoir fait une déclaration préliminaire et d’avoir répondu à nos questions avec autant de franchise que possible.

Je m’en voudrais de ne pas remercier notre greffier, notre équipe de professionnels, nos interprètes et toutes les personnes qui soutiennent le travail du comité. Votre soutien est toujours exemplaire et j’essaierai de me rappeler de tous vous remercier de temps en temps.

(La séance est levée.)

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