LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES FINANCES NATIONALES
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le mardi 29 novembre 2022
Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd’hui, à 8 h 32 (HE), avec vidéoconférence, pour étudier la teneur du projet de loi C-32, Loi portant exécution de certaines dispositions de l’énoncé économique de l’automne déposé au Parlement le 3 novembre 2022 et de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 7 avril 2022.
Le sénateur Percy Mockler (président) occupe le fauteuil.
[Français]
Le président : Bienvenue à tous les sénateurs et sénatrices ainsi qu’à tous les Canadiens qui nous regardent sur sencanada.ca.
[Traduction]
Je m’appelle Percy Mockler; je suis un sénateur du Nouveau-Brunswick, et le président du Comité sénatorial permanent des finances nationales. J’aimerais maintenant faire un tour de table et demander à mes collègues de se présenter.
[Français]
Le sénateur Gignac : Clément Gignac, sénateur du Québec.
La sénatrice Moncion : Lucie Moncion, de l’Ontario.
[Traduction]
La sénatrice Omidvar : Ratna Omidvar, sénatrice indépendante de l’Ontario.
Le sénateur Loffreda : Tony Loffreda, du Québec.
La sénatrice Duncan : Pat Duncan, du Yukon.
La sénatrice Marshall : Elizabeth Marshall, de Terre-Neuve-et-Labrador.
Le sénateur Smith : Larry Smith, du Québec.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Jean-Guy Dagenais, du Québec.
[Traduction]
La sénatrice Bovey : Patricia Bovey, du Manitoba.
Le président : Merci, honorables sénatrices et sénateurs. Aujourd’hui, nous continuons notre étude de la teneur du projet de loi C-32, Loi portant exécution de certaines dispositions de l’énoncé économique de l’automne déposé au Parlement le 3 novembre 2022 et de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 7 avril 2022, envoyé à notre comité le 17 novembre 2022, par le Sénat du Canada.
[Français]
Aujourd’hui, nous recevons deux panels de témoins. Nous accueillons d’abord, de la Chambre de commerce du Canada, M. Alex Gray, directeur principal, Politique des services fiscaux et financiers.
[Traduction]
Nous accueillons aussi le représentant de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante : M. Dan Kelly, président et chef de la direction, qui est aussi avec nous par vidéoconférence.
Bienvenue à vous deux et merci d’avoir accepté notre invitation à témoigner devant le Comité sénatorial permanent des finances nationales au sujet du projet de loi C-32.
[Français]
Nous allons maintenant écouter les remarques préliminaires en commençant par M. Gray, suivi de M. Kelly.
[Traduction]
Nous passerons ensuite à la période de questions des sénateurs.
Alex Gray, directeur principal, Politique des services fiscaux et financiers, Chambre de commerce du Canada : Je vous remercie de l’invitation à témoigner aujourd’hui. Le gouvernement du Canada a eu l’occasion, dans l’énoncé économique de l’automne, d’établir sa vision pour la création et le maintien des conditions nécessaires à notre croissance économique et à l’amélioration du niveau de vie des générations futures. Nous avons été heureux de constater que le gouvernement s’est engagé à favoriser l’équilibre budgétaire. Toutefois, nous estimons que le gouvernement a raté une occasion de se doter d’une stratégie décisive pour attirer les investissements qui sont nécessaires à une croissance forte et durable, à un moment où le monde a besoin plus que jamais du Canada.
Même si, de notre point de vue, l’énoncé économique de l’automne est essentiellement un énoncé provisoire en attendant le budget de 2023 à cet égard, la Chambre de commerce du Canada s’est réjouie de l’annonce des mesures visant à accroître l’offre des compétences dont nous avons besoin dans la population active pour atteindre la carboneutralité. Nous saluons aussi l’engagement de réduire des obstacles réglementaires aux investissements dans des projets d’envergure. Nous attendons avec impatience plus de détails sur ces initiatives.
En attendant, le projet de loi C-32 contient tout de même des mesures méritoires. Le crédit d’impôt pour l’exploration de minéraux critiques aidera au démarrage des projets miniers qui sont essentiels si nous voulons nous diriger vers un avenir à faibles émissions de carbone. Le fait d’accroître l’accès des petites entreprises au taux d’imposition préférentiel permet d’éliminer un obstacle à la croissance de ces petites entreprises. Nous croyons aussi que c’est une solution canadienne avisée d’encourager les gens à investir dans une thermopompe à air efficace, qui peut extraire de la chaleur de l’air à des températures aussi froides que -30 °C.
Malgré tout, au bout du compte, ces mesures ne sont pas à la hauteur du défi auquel nous sommes confrontés aujourd’hui. Les conditions géopolitiques sont difficiles, et l’inflation dans tous les pays du monde entier atteint des niveaux que nous n’avons pas vus depuis une génération. L’économie mondiale va presque certainement stagner ou se contracter. La guerre de la Russie contre l’Ukraine crée aussi des pressions sur les chaînes d’approvisionnement mondiales : le grenier du monde n’a plus d’accès sécuritaire aux voies maritimes internationales, ce qui a pour conséquence des pénuries alimentaires même dans les pays qui sont très éloignés du conflit.
Le Canada n’est pas à l’abri de ces difficultés. Pourtant, nous sommes dans une position unique parmi le monde libre, parce que nous avons le potentiel de soutenir la sécurité économique mondiale grâce aux ressources naturelles dont nous avons hérité, c’est-à-dire la nourriture, le combustible et l’engrais dont le monde a désespérément besoin. Le Canada a maintenant l’occasion de montrer au monde que nous pouvons, très littéralement, livrer la marchandise. En effet, nous traversons une époque très agitée, et nous devons en faire davantage. La vice-première ministre Freeland a d’ailleurs fait une déclaration en ce sens lors de son récent discours à Washington; elle a souligné que le Canada pouvait faire preuve de la même générosité que l’Europe, qui a honoré ses contrats de vaccin avec les pays non membres de l’Union européenne, en accélérant le développement des projets énergétiques et miniers dont le monde a besoin.
La Chambre de commerce du Canada espère que le gouvernement collaborera avec l’industrie afin d’élaborer une stratégie claire et cohérente qui sera à la hauteur du défi du moment. Cependant, une stratégie est inutile si elle n’est pas exécutée, et il y a de nombreux obstacles que les entreprises canadiennes devront surmonter.
Premièrement, nous devons réduire les coûts d’exploitation pour les entreprises au Canada : nous pouvons faire cela en réduisant le fardeau réglementaire, en évitant d’imposer de nouveaux impôts et en éliminant les obstacles interprovinciaux au commerce. Nous devons tout particulièrement réévaluer la façon dont on autorise et approuve les projets d’infrastructure d’envergure. Nous devons aussi repenser la réglementation qui restreint l’utilisation d’engrais et d’autres intrants agricoles, puisque cela limite nos efforts pour renforcer la sécurité alimentaire mondiale.
Soulignons également le rôle important de l’énergie canadienne dans les marchés mondiaux. Nos projets énergétiques peuvent remplacer ceux des nations antidémocratiques et aider à remplacer le charbon qui est utilisé dans la production d’électricité à l’étranger. Cela permettra de renforcer la sécurité mondiale et contribuera à nos efforts pour atteindre la carboneutralité.
Nous espérions que l’énoncé économique de l’automne allait contenir plusieurs de ces mesures à coût très faible ou nul. Les entreprises canadiennes désirent collaborer avec le gouvernement afin d’élaborer une stratégie qui sera à la hauteur du défi du moment, et compte tenu des vents contraires auxquels nous sommes confrontés, cela est clairement plus nécessaire que jamais. Merci.
Dan Kelly, président et chef de la direction, Fédération canadienne de l’entreprise indépendante : Je vous remercie, honorables sénatrices et sénateurs. C’est toujours un plaisir d’être parmi vous.
Les petites et moyennes entreprises — les PME — continuent d’être très préoccupées par la direction actuelle du Canada. À l’instar de la Chambre de commerce, nous croyons que bon nombre des mesures annoncées dans l’énoncé économique de l’automne sont une occasion manquée d’essayer d’atténuer certaines des préoccupations importantes avec lesquelles sont aux prises les petites et moyennes entreprises du Canada.
Nous représentons 95 000 petites et moyennes entreprises, et nous effectuons régulièrement des sondages auprès d’elles pour connaître leurs principales préoccupations. Pour situer le contexte actuellement, seulement la moitié des petites entreprises ont retrouvé un niveau de vente habituel, d’avant la pandémie. Cela veut dire que la moitié du milieu des affaires canadien ne réalise pas les ventes auxquelles il s’attend habituellement à ce temps-ci de l’année. Cela est particulièrement inquiétant, vu qu’arrive le temps des fêtes.
Deux petites entreprises canadiennes sur trois ont toujours des dettes supplémentaires liées à la COVID, des dettes qu’elles n’avaient pas avant la pandémie et qu’elles ont contractées pour traverser la pandémie. En moyenne, les entrepreneurs ont à présent une dette additionnelle de 110 000 $, dont une partie est attribuable au prêt gouvernemental offert au titre du Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes, le CUEC. De plus, 17 % des petites entreprises — près d’une sur cinq — risquent de fermer définitivement en raison des dommages qu’elles ont subis au cours des deux ou trois dernières années.
Donc, l’économie ne s’est pas rétablie; nous sommes encore loin d’être revenus aux niveaux d’avant la pandémie. Ajoutez à cela les nouvelles pressions que subissent les entreprises, les dettes qu’elles ont accumulées et leurs coûts qui augmentent... nous avons beaucoup parlé des conséquences de l’inflation sur les consommateurs, mais nous n’avons pas autant parlé des conséquences de l’inflation sur les entreprises elles-mêmes, qui en subissent les pressions pour ainsi dire à chaque poste budgétaire.
Cela tient en partie aux hausses d’impôt auxquelles le gouvernement a décidé de ne pas renoncer. Cette année, à compter du 1er janvier, les cotisations d’assurance-emploi vont augmenter pour la première fois depuis trois ans, en plus de la hausse importante des cotisations au Régime de pensions du Canada. Donc, on augmente deux fois les cotisations sociales, en plus d’ajouter une autre hausse de la taxe sur le carbone au printemps ainsi qu’une taxe d’accise sur l’alcool au printemps également.
Nous sommes tout de même en faveur de certaines des mesures annoncées dans l’énoncé économique de l’automne. La première, que le représentant de la Chambre de commerce a justement citée, est de permettre à un plus grand nombre de petites entreprises de bénéficier d’un faible taux d’imposition, avec un capital imposable d’un maximum de 50 millions de dollars, de façon progressive. C’est une excellente mesure, et elle avait été annoncée dans le budget et réitérée dans l’énoncé.
Ensuite, il a été question dans l’énoncé économique de l’automne d’enfin réduire les frais de traitement des cartes de crédit. Ces frais — souvent 1,5 à 2,5 % du prix de la vente — sont très difficiles à assumer. Beaucoup de petites entreprises familiales nous disent que leurs dépenses en frais de traitement de cartes de crédit dépassent leurs profits. Nous avons besoin d’aide à ce chapitre, et Ottawa a laissé entendre dans l’énoncé économique de l’automne qu’il y aura du soutien, mais nous avons besoin de cette aide maintenant, et nous redoutons que ces mesures ne soient pas mises en place très rapidement.
À notre avis, c’est une occasion manquée. Une autre chose que nous espérions voir dans l’énoncé économique de l’automne, c’était d’autres mesures d’allégement en ce qui concerne les prêts du CUEC, dont on vient de parler. Le gouvernement a annoncé une remise de la dette jusqu’à concurrence de 10 000 $ pour un prêt de 40 000 $, et de 20 000 $ pour un prêt de 60 000 $. Nous recommandons d’augmenter la remise de la dette jusqu’à concurrence de 50 % du prêt du CUEC.
Environ 50 000 petites entreprises doivent rembourser leurs prêts du CUEC. C’est maintenant, deux ans plus tard, que les entreprises découvrent qu’elles n’étaient pas admissibles au prêt en premier lieu et qu’on leur demande de rembourser l’intégralité du montant, sans la remise. Nous croyons que cette politique doit être repensée; cela n’a pas changé.
En outre, nous avons réclamé un gel de certains des taux clés applicables aux charges sociales, comme l’assurance-emploi et le Régime de pensions du Canada. Le gouvernement peut décider d’aller de l’avant avec ses plans — et nous savons que beaucoup sont des promesses électorales —, mais cela serait étrange, compte tenu des pressions inflationnistes actuelles, d’aller de l’avant avec une hausse d’impôt alors que les entreprises ne pourront pas le supporter.
J’ai beaucoup d’autres commentaires à faire, mais peut-être que ce sera pour la période de questions. Merci beaucoup de votre temps, honorables sénatrices et sénateurs.
Le président : Merci, messieurs Gray et Kelly.
[Français]
Nous allons maintenant passer à la période des questions.
[Traduction]
Les sénateurs auront cinq minutes chacun, et nous ne ferons qu’un tour de questions. D’autres témoins sont prévus pour 9 h 45. Je vous demanderais donc de poser vos questions directement, et je demanderais aux témoins de répondre avec concision. La greffière me fera signe quand le temps sera écoulé.
La sénatrice Marshall : Merci, messieurs Gray et Kelly, d’être avec nous aujourd’hui.
Je vais m’adresser d’abord à M. Gray. Vous avez dit quelque chose dans votre déclaration — je ne me souviens pas des mots exacts, alors j’espère ne pas déformer ce que vous avez dit —, mais vous avez dit que, selon vous, le budget n’encourageait pas les investissements. Le gouvernement va, de fait, mettre en œuvre un programme de rachat d’actions, dont l’objectif est d’encourager les investissements au Canada. Avez-vous des commentaires à formuler là-dessus?
M. Gray : Merci, sénatrice. Vous n’avez pas déformé du tout ce que j’ai dit.
En effet, l’intention déclarée du gouvernement, par rapport à la taxation du rachat d’actions est, de son point de vue, d’encourager les investissements. Je ne vois pas vraiment comment cela aurait pour effet de dissuader une entreprise de décourager les investissements. La taxation n’est pas très élevée, et, pour être honnête, si une entreprise veut racheter des actions, cela ne va pas vraiment la dissuader d’aucune façon que ce soit. La principale raison pour laquelle les entreprises rachètent des actions au Canada, c’est parce qu’elles ne voient aucun autre moyen efficace de tirer un meilleur rendement de leurs capitaux. À cause de l’incertitude réglementaire, elles ne voient pas d’autres moyens d’obtenir un meilleur rendement.
Je crois que la plupart des entreprises canadiennes qui rachètent des actions auraient, dans les faits, d’autres projets si elles avaient d’autres options qui leur permettraient d’obtenir un meilleur rendement, mais compte tenu de l’environnement réglementaire dans lequel nous sommes, avec ses obstacles importants au commerce interprovincial, il y a relativement peu d’autres options pour tirer parti du capital.
La sénatrice Marshall : Quand j’ai entendu cette annonce, j’ai trouvé cela plutôt ironique. Essentiellement, le gouvernement dit : « Pour que vous investissiez davantage, nous allons vous imposer davantage. »
Le gouvernement prévoit des recettes de 2 milliards de dollars grâce à cette taxation. Croyez-vous qu’il réalisera autant de recettes? Le gouvernement compte sur ces recettes pour aider à équilibrer le budget d’ici quelques années. Voulez-vous faire des commentaires là-dessus?
M. Gray : La Chambre de commerce a réalisé une analyse sur les recettes pouvant être obtenues grâce à la taxation du rachat d’actions, mais les résultats sont très peu concluants. J’aimerais bien voir les données et les chiffres qui ont donné ce montant, parce que je n’ai pas été capable de reproduire ce résultat.
La sénatrice Marshall : Merci beaucoup.
Monsieur Kelly, merci beaucoup d’être avec nous. Seriez-vous en mesure de nous dire combien de petites et moyennes entreprises ont fermé leurs portes?
J’ai plusieurs questions pour vous, mais ce serait la première.
M. Kelly : Bien sûr. À dire vrai, Statistique Canada collecte des données sur les fermetures d’entreprise. En 2020, 60 000 entreprises ont fermé leurs portes, en tout.
Ce qui est intéressant, c’est que pendant la pandémie proprement dite, les faillites — l’une des mesures de la défaillance d’entreprise — étaient en fait moins élevées qu’en temps normal. Cela est dû en partie au fait que le processus pour faire faillite était interrompu; la plupart des bureaux auxquels vous devez vous adresser pour déclarer faillite étaient fermés.
Depuis, cependant, nous avons constaté une augmentation des faillites d’entreprise, au-delà des niveaux habituels. Malheureusement, je n’ai pas les chiffres sous les yeux, sénatrice, mais je peux affirmer avec certitude que les faillites d’après la pandémie, en 2022, sont plus élevées qu’en temps normal. Ce qui m’inquiète, c’est que nous avons constaté que 17 % des entreprises pensent qu’elles vont devoir fermer leurs portes pour toujours. Il ne s’agit pas dans tous les cas de faillites. Beaucoup d’entreprises, comme vous le savez, ferment leurs portes lorsqu’il y a un ralentissement progressif et ordonné de leurs activités, parce qu’elles ne peuvent plus voir un avenir économique. Il y aurait une hausse marquée de ce genre de situation, par rapport à la normale.
Nous croyons que beaucoup des défaillances d’entreprise vont survenir à retardement, durant la période après la pandémie, lorsque les entreprises vont comprendre qu’elles n’ont aucune façon d’être à nouveau rentables. Je pense que cela commence maintenant.
La sénatrice Marshall : Il y a un certain nombre d’entreprises où je magasinais qui sont fermées. Le magasin est fermé, mais vous pouvez toujours magasiner sur Internet. Selon vous, est-ce que cela compense dans une certaine mesure les chiffres que vous voyez?
M. Kelly : Jusqu’à un certain point. Les entreprises ont dû faire des changements importants. Environ 150 000 entreprises qui n’étaient pas sur Internet avant la pandémie ont mis en ligne des sites de commerce électronique au cours des deux ou trois dernières années. Les petites entreprises ont été prises de court. Le gouvernement a mis en place des programmes pour soutenir les petites entreprises dans leur transition numérique, mais d’après nous, ces programmes n’ont pas donné de résultats spectaculaires pour l’instant. Un montant de 4 milliards de dollars a été mis de côté pour un programme de transformation numérique.
Je dirais cependant que les ventes en ligne n’ont malheureusement pas remplacé les ventes en personne. Cela est d’autant plus difficile pour les petites entreprises. Comme vous le savez, la raison pour laquelle les gens vont vers les petites entreprises, c’est pour obtenir un service de qualité supérieure, qu’ils ne pourraient pas obtenir dans une plus grande entreprise. Tout cela a aussi déclenché une tendance où les consommateurs vont dans une petite entreprise, essayent une paire de souliers ou font l’essai d’un nouveau produit, puis vont en ligne pour l’acheter sur Amazon ou à une grande entreprise à un prix réduit.
La sénatrice Marshall : Merci, monsieur.
La sénatrice Moncion : Ma première question s’adresse à M. Gray. Pouvez-vous nous parler du fardeau réglementaire? Vous avez parlé du fardeau réglementaire dans votre déclaration. Quel est l’effet de ce projet de loi sur le fardeau réglementaire pour votre groupe?
M. Gray : Il était mentionné, dans l'énoncé économique de l’automne, que des mesures allaient être prises afin d’alléger le fardeau de la réglementation.
Le projet de loi, d’après de ce que nous voyons du contenu du projet de loi C-32, ne va pas aussi loin que nous l’aurions espéré. Pour être honnête, il n’y a pas grand-chose dans le libellé qui va alléger le fardeau réglementaire, par rapport à la teneur du projet de loi.
Je serai heureux de vous parler de certains des fardeaux réglementaires que nous aurions aimé voir allégés, cependant.
La sénatrice Moncion : Allez-y.
M. Gray : Les obstacles au commerce interprovincial... c’est frustrant que, dans un pays prospère comme le nôtre, il y ait tout de même des centaines d’obstacles différents au commerce interprovincial qui continuent de freiner notre développement économique.
Je pourrais donner l’exemple du secteur des transports, où certaines configurations de camion doivent circuler la nuit dans une province, mais le jour dans une autre, ce qui a pour effet de restreindre le temps où on peut passer de la Colombie-Britannique en Alberta.
Il y aurait aussi la mobilité de la main-d’œuvre. Certaines provinces ont des fardeaux administratifs très lourds, par exemple en ce qui concerne l’assurance préalable à certaines professions, ou alors les différents critères d’éducation pour le personnel infirmier et les travailleurs sociaux.
Un exemple très efficace que je pourrais donner est le Programme du Sceau rouge, qui établit plus ou moins une norme nationale, ou une accréditation nationale.
Il ne devrait vraiment pas y avoir autant de fardeaux.
La sénatrice Moncion : Merci. Vous avez dit que certains de ces obstacles étaient des obstacles provinciaux. Est-ce exact?
M. Gray : Oui.
La sénatrice Moncion : Quelles interventions gouvernementales permettraient de corriger certains de ces obstacles? J’ajouterais que c’est intéressant pour nous d’en savoir plus à propos de ces obstacles, et peut-être que nous pourrons, à un moment donné, collaborer avec vous là-dessus à certains égards.
M. Gray : Je pense que le rôle principal du gouvernement serait évidemment de collaborer avec les provinces et d’établir un registre des obstacles au commerce interprovincial. Essentiellement, nous nous attendons du gouvernement qu’il fasse preuve de leadership afin de diminuer les plus de 100 obstacles et exemptions qui se trouvent dans l’Accord de libre-échange canadien.
Nous voudrions un registre public des exemptions réglementaires, qui met en relief les obstacles existants, afin de donner de l’information aux Canadiens à propos de ces obstacles et d’exiger des gouvernements qu’ils justifient l’existence de ces obstacles dans notre économie nationale.
La sénatrice Moncion : Ma prochaine question est pour M. Kelly. Vous avez parlé des taxes d’accise. Quelles sont les répercussions des taxes d’accise sur vos PME?
M. Kelly : Eh bien, la taxe d’accise dont j’ai parlé concernait surtout l’alcool. Il y a bien sûr de petites entreprises qui produisent de la bière et du vin qui sont très imposées. Dans le secteur de la restauration, il y a beaucoup d’entreprises indépendantes, surtout des entreprises indépendantes, et elles doivent elles aussi refiler la facture à leurs clients. Quand on augmente leurs coûts d’exploitation — une augmentation qu’elles doivent refiler aux consommateurs —, cela n’aide évidemment pas les petites entreprises à faire des profits.
La sénatrice Moncion : D’accord. Mon autre question concerne le cannabis. J’ai constaté au cours des derniers mois une prolifération... il y a tant de boutiques qui ouvrent partout. Comment cela aide-t-il vos producteurs ou les entreprises qui existent déjà, ou est-ce que cela les aide?
M. Kelly : Chaque fois qu’il y a un nouveau secteur économique, chaque fois qu’il y a cette précipitation d’entrer dans un secteur d’activité, il y a souvent une abondance d’entrepreneurs qui veulent sauter à pieds joints dans le secteur, parce qu’ils pensent que cela va leur permettre de gagner un revenu.
Souvent, quand cela arrive, il y a trop d’entrepreneurs qui arrivent dans le secteur, les activités sont au point mort, et les entrepreneurs comprennent qu’ils ne vont pas réussir. Ensuite, il y a une certaine consolidation. C’est le genre de choses qui arrivent habituellement dans un contexte de franchise, et même dans n’importe quel secteur économique, en particulier les nouveaux secteurs. Donc, ce n’est pas vraiment surprenant. Je ne sais pas si le gouvernement a un rôle à jouer. C’est le secteur privé qui s’autorégule.
Malgré tout, les gouvernements ont évidemment un rôle à jouer en s’assurant que les fardeaux réglementaires pour accéder à un secteur en particulier ne sont pas trop élevés, que les taux d’imposition des entrepreneurs ne sont pas trop élevés et que tous les producteurs sont sur un pied d’égalité.
Il y a certaines difficultés dans l’industrie du cannabis à cet égard, parce qu’il y a dans cette industrie un mélange d’acteurs très, très imposants, et d’autres acteurs plus petits. Du côté de la vente au détail, je peux dire franchement que, en tant qu’observateur, je pense sincèrement qu’il va probablement y avoir une crise et que beaucoup de ces petites boutiques de vente au détail ne vont pas trouver des façons d’être rentables et vont fermer leurs portes.
[Français]
Le sénateur Gignac : Ma question s’adresse aux deux témoins. Je les remercie de leur présence aujourd’hui.
Dans l'Énoncé économique de l’automne 2022, le gouvernement a annoncé des dépenses de 81 milliards de dollars pour de nouvelles mesures, dont 50 milliards de dollars pour de nouveaux programmes. Le gouvernement prétend que c’est pour stimuler la croissance et accélérer la transition énergétique.
J’aimerais entendre vos commentaires, à savoir si c’est la bonne orientation ou si le gouvernement aurait dû réduire son déficit beaucoup plus rapidement pour atteindre l’équilibre budgétaire.
M. Gray pourrait peut-être commencer à répondre à ma question.
[Traduction]
M. Kelly : Je peux répondre. Nous sommes préoccupés par le niveau de dépenses globales du gouvernement. Nous comprenions, bien sûr, que les gouvernements devaient dépenser beaucoup plus pendant la pandémie. Mon organisation a réclamé des programmes de soutien pour les petites et moyennes entreprises, par exemple les subventions salariales et pour le loyer. Nous ne critiquons pas le gouvernement d’être intervenu et d’avoir fourni ce genre de mesures d’allégement pour les consommateurs et les entreprises. Nous savions que les déficits étaient nécessaires pour réagir à la COVID.
Mais il y avait beaucoup de dépenses qui augmentaient rapidement avant la pandémie, et cela a certainement continué après la pandémie, pour pratiquement tous les postes budgétaires du gouvernement, et cela n’avait rien à voir avec des préoccupations liées à la pandémie.
Ottawa a tardé à demander aux fonctionnaires de revenir au bureau, et cela a gravement miné le rendement, en particulier pour les nouveaux employés.
Nous avons constaté que le gouvernement a de la difficulté à offrir certains services gouvernementaux essentiels. Je pense que c’est dû, en partie, au fait que l’argent n’a pas été transféré d’un ministère à l’autre correctement et que le gouvernement, toujours selon moi, a tardé à demander aux fonctionnaires de revenir au bureau, où ils ont un meilleur rendement. Cela est particulièrement vrai pour certains ministères clés, comme Passeport Canada.
Nous avons tout de même été contents de voir que le gouvernement a enfin proposé une façon de revenir à l’équilibre budgétaire. Cela va prendre des années, mais c’est la première fois que nous voyons ce gouvernement au moins reconnaître qu’il peut être important d’équilibrer le budget. C’est une bonne nouvelle, mais est-ce que le gouvernement compte y parvenir assez rapidement? Non.
Nous recommanderions certainement au gouvernement de chercher à accroître l’efficacité de la fonction publique. Si vous pensez que les choses vont mal actuellement à cause des hausses d’impôt, de l’augmentation de certaines charges sociales, attendez de voir ce qui va arriver avec certaines conventions collectives de la fonction publique.
Nous savons qu’il y a énormément de pressions, et nous conseillons au gouvernement, présentement, de rester ferme en ce qui concerne les conventions avec la fonction publique, parce qu’il y a beaucoup de syndicats qui vont réclamer des augmentations encore plus élevées, et c’est quelque chose qui nous préoccupe beaucoup présentement.
Le sénateur Gignac : J’ai une autre question, mais je ne sais pas si M. Gray voudrait ajouter quelque chose.
M. Gray : J’ajouterais que, hier, le directeur parlementaire du budget a déclaré devant le Comité permanent des finances de la Chambre des communes que le budget n’était pas tout à fait prudent, sur le plan économique, même si, comme nous l’avons dit — comme M. Kelly et moi-même l’avons dit — nous sommes heureux du retour à l’équilibre budgétaire, même si ce sera dans bon nombre d’années. Beaucoup de choses peuvent arriver entretemps. Je suis sûr qu’il y a cinq ans, la projection du budget de 2022 était très différente de la réalité d’aujourd’hui.
Une préoccupation que je voudrais soulever par rapport à cela, et qui est d’ailleurs mentionnée dans le rapport du directeur parlementaire du budget, c’est que les 14 milliards de dollars environ en dépenses ne sont pas vraiment détaillés; et cela fait que nous sommes préoccupés par rapport à la qualité, à la nature, à l’ampleur et à la portée des investissements.
[Français]
Le sénateur Gignac : Ma deuxième question s’adresse à M. Kelly.
Vous avez mentionné, à juste titre, que les entreprises font face à une augmentation du fardeau fiscal, en raison de l’augmentation des primes d’assurance-emploi et du Régime de pensions du Canada. Vous avez parlé également de la taxe sur le carbone.
Quelle est la position de votre organisation à ce sujet? Êtes-vous pour ou contre la taxe sur le carbone?
[Traduction]
M. Kelly : Oui. Nous avons réalisé plusieurs sondages auprès de nos membres au sujet de la taxe sur le carbone et sur les autres mesures environnementales. À l’instar des Canadiens, les petites entreprises sont divisées à ce sujet.
Il y a une chose qui unifie toutes les petites entreprises, et c’est leur dédain quant à la façon dont le gouvernement fédéral a administré la taxe sur le carbone au Canada.
À présent, le filet de sécurité sur la tarification du carbone va être élargi. Il ne s’agira plus seulement de l’Alberta, de la Saskatchewan, du Manitoba et de l’Ontario, mais trois des quatre provinces atlantiques vont être comprises dans le filet de sécurité pour la tarification du carbone. La taxe offre aux consommateurs un remboursement sur les taxes qu’ils paient.
Un fait méconnu, par rapport à cela, si on croit que c’est bien ce qui arrive, c’est que la raison pour laquelle on permet cela, c’est que les contribuables paient beaucoup plus que ce qu’ils peuvent récupérer. Si vous pouvez le croire, quand le gouvernement a annoncé pour la première fois le filet de sécurité pour la tarification du carbone, près de la moitié des recettes de la taxe sur le carbone venait des petites et moyennes entreprises, ainsi que des municipalités, des hôpitaux et des écoles, etc. Ils paient près de la moitié de la taxe sur le carbone, et pourtant, ils ne bénéficient que de 7 % du programme de remboursement.
Pire encore, de ce 7 % des remboursements qui étaient censés revenir aux petites et moyennes entreprises, les petites et moyennes entreprises n’ont pour ainsi dire rien obtenu, parce que le gouvernement a tergiversé et n’a pas mis en place un programme de remboursement fonctionnel pour redonner leur argent aux petites entreprises qui ont payé.
Donc, même si, parmi les membres de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante et les petits entrepreneurs d’un bout à l’autre du Canada, les opinions sont partagées quant à savoir si la tarification du carbone est une bonne chose. La façon dont le gouvernement fédéral l’administre est profondément injuste et devrait être repensée, à tout le moins, selon nous.
Même ceux qui défendent ardemment la taxe sur le carbone pensent que ce serait une bonne idée de mettre tout cela sur pause pendant un an, compte tenu de l’augmentation énorme des coûts d’exploitation des entreprises, du moins jusqu’à ce que l’inflation soit sous contrôle.
Le sénateur Gignac : Merci.
La sénatrice Duncan : Merci, encore une fois, à nos témoins d’aujourd’hui. Ma question s’adresse à M. Gray et à M. Kelly. Nous sommes heureux de vous revoir, monsieur Kelly.
Plusieurs déclarations ont aussi été faites dans l’énoncé économique de l’automne selon lesquelles la prestation des services ainsi que le système d’immigration allaient être améliorés. Il y avait un plan concernant les niveaux d’immigration ainsi que des fonds réservés à des mesures pour améliorer les délais du système d’immigration.
Beaucoup de petites entreprises me disent qu’elles ont un problème de pénurie de main-d’œuvre et qu’elles ont besoin de l’immigration. Ma question est la suivante : avez-vous des recommandations à faire directement au gouvernement, quant aux endroits où nous pourrions encourager l’immigration? Par exemple, quand mes parents ont immigré ici, l’agent d’immigration leur a recommandé d’aller à Edmonton, d’aller en Alberta. Vos organisations ont-elles des conseils à donner, par rapport à l’immigration au Canada?
M. Kelly : Merci de la question, sénatrice. Nous sommes certainement d’accord pour dire que l’immigration est l’une — pas la seule, mais l’une — des solutions clés à la pénurie de compétences et de main-d’œuvre au Canada. Comme vous le savez très bien, le problème n’est plus seulement qu’il y a une pénurie de compétences; ce n’est plus seulement que nous manquons de médecins, de soudeurs ou de membres d’une profession en particulier. Il y a de plus en plus une pénurie de main-d’œuvre généralisée, et cela est particulièrement difficile pour les petites et moyennes entreprises dans le secteur de la vente au détail et le secteur de l’hôtellerie.
L’une des difficultés du système d’immigration canadien est qu’il favorise énormément les compétences les plus spécialisées au Canada, et même si nous avons effectivement besoin de gens avec des compétences hautement spécialisées, des gens qui ont des doctorats, des médecins et d’autres qui ont une formation spécialisée, il faut aussi veiller à ce que le bassin de main-d’œuvre au Canada soit rempli de gens qui veulent venir au Canada pour y occuper des postes dans des catégories moins spécialisées, où le niveau salarial est moins élevé.
Effectivement, nous conseillons le gouvernement quant à ses politiques, et je félicite le gouvernement d’avoir augmenté, dans l’ensemble, les niveaux d’immigration. Cela fait partie de la solution.
Le gouvernement commence également à donner un plus grand rôle aux provinces, et je pense que cela rejoint ce que vous avez dit, essentiellement. Ce serait difficile pour le gouvernement fédéral de déterminer tout le bassin de compétences qui sont nécessaires et d’établir où elles doivent aller dans les diverses régions du Canada, où on a besoin de l’immigration, mais les programmes des candidats des provinces se sont avérés très efficaces pour cela, et il serait donc important de donner de l’expansion à ces programmes et peut-être aussi de repenser le système de points pour faire en sorte d’accueillir les immigrants, temporaires et permanents, de toutes les catégories de compétences.
Ce sont certaines des recommandations que nous avons faites au gouvernement. Je dirais qu’il nous écoute en partie, et que certaines choses ont avancé, mais qu’il reste encore beaucoup de chemin à faire.
La sénatrice Duncan : Merci.
Vous avez dit que vous communiquez vos commentaires au gouvernement. Quelle est votre position quant à l’amélioration des normes de service? Il y a aussi des commentaires dans l’énoncé économique de l’automne concernant des initiatives gouvernementales pour l’amélioration des normes de service. Quelle est la position de votre organisation à ce sujet, précisément?
M. Kelly : C’est quelque chose qui est nécessaire dans une foule de secteurs gouvernementaux; il faut de meilleures normes de service qui soient axées sur le consommateur et, dans le cas de l’immigration, sur les immigrants potentiels ou les entreprises qui veulent les faire venir au Canada et qui les parrainent. Nous constatons qu’il y a des lacunes partout. Nous croyons que le travail à la maison a empiré les choses. Je pense que c’est absolument nécessaire, maintenant, de ramener les fonctionnaires dans les bureaux pour qu’ils puissent travailler avec leurs collègues, avec toutes les mesures de sécurité nécessaires. Je pense que cela contribue aux difficultés actuelles.
Nous devons nous assurer que, dans le système d’immigration, des entreprises peuvent recevoir des réponses rapidement — ce qui n’est pas le cas présentement — et que les immigrants peuvent s’attendre à obtenir une réponse dans certains délais, ce qui n’arrive pas non plus. Il y a un arriéré monstre que nous devons éliminer. Nous sommes bien sûr heureux des nouveaux investissements que le gouvernement a faits pour augmenter l’effectif et les compétences afin que les décisions puissent être rendues plus rapidement, mais il y a encore beaucoup d’efforts à faire avant d’en arriver là.
La sénatrice Duncan : Merci.
Le sénateur Smith : J’ai une question pour M. Gray.
Dans votre déclaration, vous avez souligné qu’il y a d’importants débouchés pour le secteur énergétique canadien, en raison du contexte géopolitique. Cependant, les politiques du gouvernement fédéral au cours des dernières années semblent délaisser le secteur énergétique. Prenez les projets de loi C-48 et C-69, par exemple.
Êtes-vous certain que le gouvernement fédéral va favoriser la croissance des secteurs énergétiques, afin que nous puissions répondre à la demande extraordinaire venant de l’Europe et d’ailleurs?
M. Gray : J’ose espérer que le discours que la vice-première ministre Freeland a prononcé à Washington reflète une nouvelle approche que le gouvernement doit et devrait prendre pour faire preuve de la même générosité que les Européens, en leur fournissant le gaz dont ils ont besoin pour se chauffer et aussi les minéraux critiques dont ils ont besoin pour les batteries de leurs véhicules électriques et pour créer un avenir à faibles émissions carboniques.
En résumé, je dois dire que nous attendons que ce dossier avance, mais nous espérons que cela va effectivement marquer un changement dans son attitude.
Le sénateur Smith : Si vous étiez en position d’autorité, que feriez-vous? Quelles seraient vos deux premières priorités?
M. Gray : Je m’assurerais qu’il y ait l’infrastructure pour que l’énergie canadienne puisse être acheminée aux marchés et aux ports, pour qu’elle soit prête à être exportée, en allégeant le fardeau réglementaire, par rapport... disons, aux chemins de fer ou à la construction d’installations d’exportation, et à la construction de terrains à usage industriel autour des aéroports. Il y a beaucoup de mesures qui, dans le détail, pourraient améliorer extraordinairement la robustesse de la capacité du secteur énergétique, d’un point de vue logistique.
Le sénateur Smith : Merci. Rapidement, j’ai une question pour M. Kelly.
Monsieur Kelly, quelles sont vos deux ou trois premières priorités? Selon vous, qu’est-ce qui serait le plus urgent que le gouvernement améliore, ou du moins sur quoi devrait-il prendre position?
M. Kelly : Il y a beaucoup de choses, mais si je dois en choisir deux, je dirais que, premièrement, nous devons poser un regard neuf sur le problème de la pénurie de compétences et de main-d’œuvre, de façon plus globale. Nous venons de parler des volets d’immigration, mais nous nous dirigeons aussi vers d’énormes difficultés du point de vue démographique, et nous devons pouvoir y réagir correctement. Si le Canada tombe en récession au cours des prochaines semaines, cela pourra peut-être atténuer le problème de la pénurie de main-d’œuvre, si les taux de chômage montent, mais même si cela arrive, ce qui m’inquiète vraiment, c’est de savoir qui va fournir des services, gouvernementaux et privés, au cours des années à venir, à notre population vieillissante.
Nous devons nous assurer de revoir toutes les politiques gouvernementales, afin de déterminer comment nous pouvons essayer d’encourager un plus grand nombre de gens à participer au marché du travail. Je pense que les personnes âgées pourraient contribuer énormément. Je suggérerais de réfléchir à certaines mesures que nous pourrions mettre en place pour encourager les gens à participer plus longtemps et à travailler plus longtemps, au lieu de moins longtemps; donc, essentiellement de faire marche arrière sur certaines des politiques que le gouvernement au pouvoir a mises en place au tout début de son mandat. Quelles mesures pourrait-on prendre? Par exemple, on pourrait éliminer certaines des charges sociales que paient les personnes âgées et leurs employeurs, pour les encourager à rester au travail. Une priorité serait de s’attaquer aux défis démographiques, et une autre serait d’essayer de s’attaquer à la pénurie de main-d’œuvre.
Deuxièmement, je dirais que nous avons besoin de faire un examen exhaustif de notre régime fiscal, pour nous assurer qu’il fonctionne pour tous les Canadiens et toutes les entreprises canadiennes. Nous devons faire en sorte d’alléger certaines des pressions que les entreprises sont en train de subir. Présentement, l’une des choses qui me préoccupent le plus est l’augmentation dramatique des coûts d’exploitation des entreprises, et le régime fiscal y est pour quelque chose. Ce serait une excellente chose de mettre cela sur pause, le temps de réaliser un examen exhaustif.
Le sénateur Loffreda : Merci, messieurs Kelly et Gray d’être avec nous ce matin. Ma première question s’adresse à M. Gray, de la Chambre de commerce du Canada. Vous avez dit que vous espériez voir dans le projet de loi C-32 davantage de mesures pour alléger les fardeaux réglementaires; vous avez aussi dit que les obstacles au commerce interprovincial constituaient un obstacle important à notre croissance économique.
Quel rôle le gouvernement devrait-il jouer pour aider à éliminer ces obstacles au commerce entre les provinces? Certaines personnes ont recommandé au gouvernement fédéral de fournir d’importants incitatifs financiers pour que les provinces éliminent ces obstacles au commerce. Êtes-vous d’accord? Selon vous, est-ce que ce serait une possibilité? Dans quelle mesure croyez-vous que les premiers ministres vont travailler ensemble pour atténuer les obstacles au commerce? Est-ce que cela est un dossier important pour eux?
M. Gray : Pour commencer par la fin de votre question, le fait de savoir si c’est un dossier important, je pense que les chiffres montrent jusqu’à quel point les obstacles au commerce interprovincial nuisent aux économies provinciales et que cela devrait donc alerter les premiers ministres et leur faire voir qu’il s’agit d’une préoccupation majeure, et je suis convaincu qu’ils le savent déjà très bien.
Pour répondre à votre question sur les incitatifs financiers, je ne suis pas certain que ce soit nécessaire, pour être honnête. Comme je l’ai dit, nous avons proposé la création d’un registre public des obstacles au commerce interprovincial qui existent toujours, et cela pour deux raisons : premièrement, pour que les Canadiennes et Canadiens puissent savoir clairement ce qui nuit au commerce interprovincial; et deuxièmement, pour encourager — espérons-le — les gouvernements provinciaux à justifier ces obstacles. Comme je l’ai mentionné plus tôt, avec mes exemples, des provinces voisines peuvent avoir des normes complètement différentes en matière d’éducation pour des professions essentielles pour la société, comme le personnel infirmier et les travailleurs sociaux, et cela continue d’être un boulet pour l’économie et sur la mobilité des Canadiennes et des Canadiens. Cela mine aussi notre PIB.
Le sénateur Loffreda : Merci. Mis à part ce que vous avez déjà dit, quelle serait la question la plus épineuse, et qui s’opposerait le plus fermement à l’élimination de ces obstacles interprovinciaux, même si, comme nous l’entendons souvent dire, ils nuisent énormément à notre prospérité économique?
M. Gray : Je ne sais pas qui s’y opposerait avec le plus de véhémence. Cela reste à voir, parce que cela dépend du gouvernement du jour dans chaque province. Il y a des industries qui sont particulièrement délicates dans certaines provinces, et l’élimination des obstacles au commerce interprovincial pourrait entraîner un certain nombre de problèmes importants. Pour être honnête, il y a énormément de travail à faire. C’est quelque chose dont on parle depuis longtemps, en politique canadienne. Vous le verrez, si vous consultez des rapports du Sénat datant des années 2010 ou des années 2000. Je pense que le rôle du gouvernement fédéral devrait en être un de leadership. Il n’est pas nécessaire de fournir des incitatifs financiers. Je pense que cela pourrait être fait à faible coût ou à coût nul. Le plus important, c’est que ce problème soit soulevé et priorisé, dans le discours politique canadien, et que cela soit vu comme un problème qui aurait déjà dû être réglé.
Le sénateur Loffreda : Merci.
Monsieur Kelly, vous avez dit que 60 000 entreprises avaient fermé leurs portes depuis la pandémie, et que 17 % risquent de fermer de façon définitive, à cause des risques accrus. Beaucoup ne voient aucune façon d’être à nouveau rentables. Vous avez parlé des dettes élevées et de l’augmentation des coûts. Y a-t-il d’autres raisons? Comment pouvons-nous les aider?
Vous avez dit que vous étiez préoccupé à l’égard des niveaux de dépenses globales du gouvernement. Nous avons des marchés libres. Vous comptez 95 000 membres. Environ 8 000 sociétés canadiennes privées bénéficieront des modifications du taux d’imposition préférentiel prévu dans le projet de loi C-32. Que voudriez-vous de plus?
Je sais, après avoir écouté vos commentaires, que vous avez été consulté, et que vous effectuez régulièrement des sondages auprès de vos membres, ce qui veut dire qu’ils ont été consultés par votre intermédiaire. Que voudriez-vous de plus, ou que feriez-vous? Comment pouvons-nous sauver ces entreprises?
M. Kelly : Dans le plus immédiat, l’une des choses que le gouvernement peut faire pour diminuer le nombre de défaillances d’entreprises et pour augmenter le nombre d’entreprises qui vont survivre aux dommages serait de voir ce qui pourrait être fait par rapport aux prêts du Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes. Ce programme a donné d’excellents résultats. Je dois admettre que, quand le gouvernement l’a d’abord annoncé, j’avais quelques préoccupations, mais le gouvernement a été à l’écoute et il a modifié le programme au fil de la pandémie. Finalement, cela s’est avéré l’une des plus importantes mesures salvatrices pour bon nombre d’entreprises. Elles ont emprunté de 40 000 $ à 60 000 $ de leur banque, et elles ont obtenu l’argent rapidement.
Beaucoup d’entreprises n’étaient pas admissibles, mais près d’un million d’entre elles ont obtenu des prêts du CUEC. Pratiquement toutes les entreprises ayant des employés rémunérés au Canada ont obtenu un prêt du CUEC de 40 000 $ ou de 60 000 $. Peut-être que vous vous dites que ce n’est pas tant d’argent, mais si on regarde le total, c’est évidemment beaucoup d’argent. Cependant, il s’agit d’un prêt. La majeure partie de cet argent doit être remboursée. Le gouvernement a offert une dispense pour un certain pourcentage, soit 25 %, soit le tiers. À mon avis, si le gouvernement faisait passer la dispense à 50 % du prêt, alors il y aurait davantage d’entreprises qui parviendraient à la ligne d’arrivée. Ce serait la première étape. Je serai heureux d’en dire davantage, si nous avons plus de temps. J’ai quelques autres commentaires à faire, sénateur.
Le sénateur Loffreda : J’ai quelques autres questions, alors nous devrions poursuivre au deuxième tour.
Le sénateur Boehm : Ma première question s’adresse à M. Gray, de la Chambre de commerce du Canada. Le 3 novembre, dans un communiqué de presse sur l'énoncé économique de l’automne, votre organisation a déclaré que le gouvernement devait produire un plan intégré pour acheminer vers les marchés internationaux les aliments, le carburant et les engrais dont le monde a désespérément besoin. Vous avez déjà parlé du carburant, et il s’agit évidemment davantage d’un enjeu à long terme. Au sujet des aliments et des engrais, je serais curieux de savoir ce que le gouvernement, selon vous, pourrait faire à cet égard, puisque c’est un enjeu qui touche, dans l’ensemble, les chaînes d’approvisionnement mondiales, les blocus et le petit problème de la guerre en Ukraine, qui font qu’il est difficile d’acheminer les produits canadiens aux clients des quatre coins du monde.
M. Gray : Vous avez tout à fait raison, sénateur. Je crois que le gaz naturel compte pour quelque chose comme 80 % du prix des intrants des engrais et des autres intrants agricoles. C’est quelque chose de vraiment problématique, et cela ne tombe pas entièrement sous la responsabilité de chaque gouvernement. Nous savons cependant qu’il existe des restrictions réglementaires concernant l’utilisation d’engrais et d’autres intrants agricoles au Canada. Nous comprenons que c’est dans l’objectif tout à fait louable de lutter contre les changements climatiques, mais compte tenu de la précarité relative de la situation économique et géopolitique, nous espérerions que le gouvernement accepterait de revoir ces restrictions pour renforcer la sécurité alimentaire mondiale.
Le sénateur Boehm : Merci. Je voulais approfondir un peu les questions que mes collègues, la sénatrice Moncion et le sénateur Loffreda, avaient posées à propos des obstacles au commerce interprovincial, et je voulais surtout savoir si vous pensiez qu’il faudrait une sorte d’événement catalyseur pour sortir de l’impasse. À l’époque du gouvernement Harper, j’ai participé un peu aux négociations de l’Accord de libre-échange Canada-Europe. Les provinces étaient aussi à la table. Même chose pour l’ALENA 2.0. On pensait que ces gros accords commerciaux allaient servir en quelque sorte de catalyseur et allaient aplanir les obstacles au commerce interprovincial, mais cela n’est pas arrivé. Vous avez mentionné d’anciens rapports du Sénat, et il y a même des rapports datant de la fin du XIXe siècle sur les difficultés entre les provinces. Croyez-vous qu’il y a quoi que ce soit qui pourrait vraiment réunir les gens du fédéral et des provinces autour de la table, pour qu’ils s’efforcent de trouver des solutions?
M. Gray : Ce que nous voudrions, c’est un examen complet de l’Accord de libre-échange canadien dans l’objectif d’éliminer les obstacles au commerce, à l’investissement et à la mobilité de la main-d’œuvre, afin de nous assurer que l’accord s’applique à tous les secteurs de l’économie et à toutes les organisations gouvernementales, y compris les ministères, les sociétés de la Couronne, et cetera. Il faudrait aussi créer un mécanisme de règlement des différends, ce qui manque cruellement dans l’Accord de libre-échange canadien, parce que cela permettrait aux provinces de se réunir et de mieux comprendre pourquoi il y a ces obstacles.
Fait tout aussi important, nous recommanderions de veiller à ce que le gouvernement prévoie l’élimination de tous les obstacles non tarifaires au commerce, afin de favoriser la concurrence et de faire en sorte que tous les signataires soient sur un pied d’égalité.
C’est plus ou moins ce que nous espérerions, en résumé : qu’un examen général serait l’événement catalyseur qui fasse monter les enjeux et mette en relief les dangers que posent les obstacles au commerce provincial.
Le sénateur Boehm : Monsieur Kelly, je voulais vous poser une question sur la dotation en personnel pour les petites entreprises. Certains de mes collègues vous ont questionné à propos de la pénurie de main-d’œuvre. Nous savons que les petites entreprises paient beaucoup d’impôt et qu’elles ont de la difficulté à embaucher des gens, mais je pense qu’on peut affirmer qu’il y a certains facteurs sociaux autant qu’il y a des facteurs économiques. Nous avons parlé des immigrants qui arrivent ici.
Y a-t-il une façon de convaincre les gens qu’on voudrait les embaucher en premier lieu? Que feriez-vous pour vous attaquer aux causes profondes de cette composante de la pénurie de main-d’œuvre en particulier?
M. Kelly : Parlez-vous des immigrants en particulier, ou de la population en général?
Le sénateur Boehm : En général, oui.
M. Kelly : Nous nous préoccupons effectivement du fait que nous continuons d’axer de plus en plus l’économie canadienne sur les compétences, pour toutes sortes de bonnes raisons qui sont justifiées, mais ce qu’il nous manque, ce sont bien sûr de nouveaux arrivants dans le marché du travail, qui occupent habituellement les emplois dans des catégories professionnelles moins spécialisées. Je parle des secteurs de la vente au détail, de l’hôtellerie et des services, où la pénurie de main-d’œuvre se fait le plus sentir présentement, de façon générale. Souvent, ce genre d’emploi était considéré comme le premier échelon du marché du travail, puis vous poursuiviez l’ascension. Moi-même, j’ai commencé comme plongeur dans une pizzeria à Winnipeg.
On dirait toutefois, premièrement, qu’il y a moins de nouveaux arrivants dans l’économie, moins d’adolescents qui prennent ces emplois pour remplir ces postes. Deuxièmement, puisque nous poussons de plus en plus les gens à faire des études universitaires, il y a de moins en moins de gens qui songent à occuper des emplois dans des catégories professionnelles moins spécialisées, où on n’a pas besoin d’un diplôme universitaire pour avoir accès immédiatement à ces emplois.
Nous devons faire en sorte de tirer parti d’absolument toutes les ressources disponibles au Canada. Dans le milieu des affaires, nous avons fait quelques efforts pour essayer d’améliorer la situation, mais nous voulons aussi nous assurer que notre système d’éducation ne décourage pas les gens de participer à cette partie du marché du travail et qu’il ne force pas les gens — qu’ils aient les talents nécessaires pour cela ou non — à faire des études universitaires.
Certaines provinces mettent l’accent actuellement sur les métiers, et c’est génial. L’Ontario fait quand même assez d’efforts de ce côté-là, et nous trouvons que c’est encourageant. Il faut en faire beaucoup plus.
Le sénateur Boehm : Merci. Je pense que les programmes d’apprenti sont aussi intéressants.
La sénatrice Omidvar : Merci aux témoins. Je vais poursuivre sur le sujet des travailleurs peu spécialisés. À un autre comité sénatorial, nous étudions l’interaction entre les travailleurs étrangers temporaires dans les catégories d’emploi peu spécialisées et la demande sur le marché du travail. Nous avons entendu de la part des employeurs et de l’industrie — comme nous le faisons aujourd’hui avec vous — qu’il est essentiel de continuer de construire une réserve de talents, vu les besoins du marché du travail qui ne sont pas comblés.
Cependant, les économistes n’ont pas la même vision des choses. Ils croient que l’arrivée de travailleurs temporaires — surtout des agriculteurs et des cuisiniers, les deux principales catégories — représente de facto une subvention salariale pour les employeurs, parce que cela leur donne une solution facile et qu’ils n’ont pas à respecter le processus habituel de l’offre et la demande, c’est-à-dire, dans ce cas-ci, de simplement augmenter les salaires de ces emplois pour que les Canadiens au chômage veuillent les prendre. Que répondez-vous à cette opinion?
M. Kelly : On dit que certains universitaires devraient aller voir la pizzeria à Olds, en Alberta, qui augmente rapidement les salaires, mais qui n’arrive pourtant à trouver aucun candidat canadien. Il y a des annonces aux quatre coins du pays, tous les efforts sont faits pour trouver de nouveaux employés, de nouveaux employés canadiens, quelqu’un qui est déjà ici, et les convaincre de déménager dans des endroits ruraux et éloignés, où la pénurie de main-d’œuvre est particulièrement grave, surtout dans les centres de villégiature.
Les salaires jouent à coup sûr un rôle, et les employeurs font ce qu’ils peuvent — malgré les circonstances complètement différentes, après les deux années qui viennent de s’écouler — pour augmenter les salaires et les avantages sociaux afin d’attirer les travailleurs. Les petites entreprises ont du travail à faire à certains endroits.
Ce que je peux vous dire, toutefois, c’est qu’il y a des millions de personnes dans le monde qui adoreraient pouvoir venir au Canada pour prendre certains emplois dont les Canadiens ne semblent absolument pas vouloir et travailler dans des régions du Canada où les Canadiens ne semblent pas pressés de mettre les pieds. Certains programmes, en particulier les programmes des candidats des provinces, qui ont été utilisés pour combler certaines de ces lacunes, ont donné des résultats incroyables.
C’est merveilleux que les avantages de l’immigration au Canada ne soient plus seulement visibles pour les gens de Toronto, de Vancouver et de Montréal; les gens dans les petites villes, et même maintenant dans les petites régions rurales et locales, reçoivent davantage d’immigrants. Effectivement, il arrive souvent que les immigrants finissent par partir s’installer dans les grands centres urbains, mais cela commence à être moins fréquent également. Nous voyons de plus en plus d’indices qui montrent que les gens décident de s’établir, et le Programme des travailleurs étrangers temporaires peut être utilisé efficacement.
Notre principale recommandation à cet égard — et le gouvernement a agi en ce sens jusqu’à un certain point — tient au fait qu’avant, le Programme des travailleurs étrangers temporaires était entièrement temporaire. À la fin de votre temps, vous étiez renvoyé chez vous que vous le vouliez ou non ou peu importe si votre employeur voulait vous garder. Nous avons changé un peu d’orientation, mais nous devons en faire davantage. Cela permettra aux travailleurs étrangers temporaires de s’établir dans la collectivité locale, puis d’avoir une mobilité complète de la main-d’œuvre, peut-être dans un an ou deux, mais peut-être que cela augmentera aussi la probabilité qu’ils décident de rester où ils sont.
La sénatrice Omidvar : Merci beaucoup.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Ma première question s’adresse à M. Gray. Il y a deux semaines, certains observateurs entrevoyaient un réchauffement des relations entre les États-Unis et la Chine. Évidemment, à voir les récentes sorties du premier ministre Trudeau, on comprend tous que c’est loin d’être le cas pour le Canada. Comment entrevoyez-vous, pour les entreprises canadiennes, la nouvelle politique du Canada favorisant le commerce avec les pays de l’Indo-Pacifique, évidemment sans inclure la Chine?
[Traduction]
M. Gray : Je pense que la meilleure façon de renforcer nos liens avec nos alliés internationaux et les pays aux vues similaires — sur le plan non seulement économique, mais aussi politique —, c’est le libre-échange. Donc, toute stratégie, tout engagement ou accord commercial qui renforce l’engagement entre « pays alliés », pour travailler avec nos alliés internationaux aux valeurs similaires — des valeurs similaires quant aux marchés, ce qui est peut-être tout aussi important — est un pas dans la bonne direction, aux yeux de l’entrepreneuriat canadien.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Monsieur Kelly, l’argent comptant, vous le savez, est de moins en moins utilisé au profit des cartes de crédit, surtout, comme on l’a mentionné, lorsqu’il s’agit du commerce électronique. Vous avez aussi parlé des frais que les entreprises doivent assumer pour les paiements par cartes de crédit. Est-ce une situation unique au Canada? Comment le gouvernement pourrait-il intervenir pour réduire ce fardeau? C’est un fardeau quand même. Si cela arrivait, est-ce que les consommateurs pourraient eux aussi en profiter?
[Traduction]
M. Kelly : Merci, sénateur. C’est une question très importante, et nous y avons d’ailleurs consacré beaucoup de temps. C’est encourageant que le gouvernement ait parlé de réduire davantage les frais de traitement des cartes de crédit dans l'énoncé économique de l’automne.
Pour situer un peu plus le contexte de votre question, les Canadiens paient entre 5 milliards et 10 milliards de dollars en frais de traitement de cartes de crédit imposés aux commerçants, même s’ils n’en sont pas conscients. Ces coûts font partie du prix de tout ce que nous achetons, mais il s’agit de frais imposés aux commerçants. Cela représente entre 1,5 et 2,5 % du prix de la vente, mais le commerçant est obligé de payer pour le traitement par carte de crédit.
Vous avez tout à fait raison de dire que, pendant la pandémie, le volume de transactions par carte de crédit a explosé. Au début, les consommateurs évitaient l’argent, parce que nous pensions attraper la COVID en touchant les billets. Nous avons commencé à utiliser davantage les cartes de crédit, parce que nous achetions en ligne et parce que nous avions peur de transmettre la maladie. Cela veut donc dire qu’il y a encore plus des ventes d’une entreprise qui font l’objet de frais de cartes de crédit imposés au commerçant.
Les Canadiens paient ce qui est généralement considéré comme le deuxième taux en importance dans le monde. Dans beaucoup d’autres pays industrialisés, les taux d’interchange sont le tiers ou même le quart de celui au Canada, si vous pouvez le croire. Je pense qu’il n’y a qu’aux États-Unis que le taux est plus élevé.
Je dois dire en toute équité que le gouvernement conservateur et le gouvernement libéral actuel ont négocié une réduction de ces frais pour les petites entreprises — une très faible réduction — au cours de la dernière décennie. Une troisième réduction est maintenant promise. Il faudrait que cela se fasse rapidement. Comme je l’indiquais, les sommes dépensées par les entreprises à ce titre grimpent du simple fait que les taux pour le commerce électronique sont supérieurs à ceux pour le commerce en magasin, et que de plus en plus de clients se présentant en personne se servent de leur carte de crédit, plutôt que de payer par carte de débit ou en argent comptant.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Monsieur Kelly, je veux revenir à la question de la pénurie de main-d’œuvre.
Dans quelle mesure peut-on attribuer la fermeture ou les faillites des petites entreprises à la pénurie de main-d’œuvre, depuis la pandémie?
[Traduction]
M. Kelly : Des entrepreneurs nous disent voir leurs coûts grimper en flèche en raison d’un ensemble de facteurs — des ventes inférieures au niveau atteint pendant la pandémie, les répercussions directes de la COVID et une dette contractée pendant la pandémie qu’ils ne sont pas en mesure de rembourser. Ils se disent en outre incapables de trouver la main-d’œuvre dont ils ont besoin. Voilà donc une partie des facteurs pouvant inciter un propriétaire à fermer les portes de son entreprise.
Il est difficile de discerner lequel parmi tous ces éléments a été la goutte qui a fait déborder le vase. Reste quand même que la pénurie de main-d’œuvre est un facteur significatif à deux points de vue. Premièrement, peu importe le produit ou le service que vous offrez, si vous n’avez personne pour servir votre clientèle, vous ne pourrez jamais en tirer des bénéfices. Deuxièmement, l’obligation d’augmenter les salaires mène à de nouvelles pressions inflationnistes que l’entreprise doit assumer, ce qui allonge d’autant son parcours vers la rentabilité.
Dans l’état actuel des choses, de nombreux propriétaires d’entreprise doivent composer avec le fait qu’ils n’ont réalisé aucun profit depuis le début de la pandémie tout en constatant qu’il faudra bien des mois encore avant que leur entreprise retrouve le chemin de la rentabilité. Avec la menace d’une récession qui pèse sur eux, ils se demandent s’ils sont bien avisés d’emprunter davantage pour maintenir leur entreprise à flot ou s’ils ne feraient pas mieux de mettre dès maintenant fin à leurs activités. Les considérations de cet ordre sont au cœur des discussions dans le milieu des petites et moyennes entreprises ces jours-ci.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Merci.
[Traduction]
La sénatrice Bovey : Merci à nos témoins. Je fais appel à votre indulgence, car j’aurais besoin de quelques éclaircissements pour m’assurer de bien comprendre.
Monsieur Kelly, vous avez parlé de l’importance des études universitaires et du fait qu’il nous faudrait davantage de détenteurs de doctorat et d’autres diplômes d’études supérieures. Vous avez toutefois également dit que l’éducation constituait un problème étant donné que trop de gens vont à l’université et tournent ainsi le dos aux emplois moins bien rémunérés.
Où se situe votre point d’équilibre entre ces deux extrêmes? J’y vois pour ma part une contradiction.
M. Kelly : Vous m’excuserez, sénatrice, mais je me suis sans doute mal exprimé.
Voici ce que j’essayais de dire. L’économie canadienne a effectivement besoin d’un plus grand nombre de travailleurs possédant différents niveaux de compétence, mais le programme d’immigration actuellement en place produit d’assez bons résultats pour ce qui est des échelons les plus élevés de la population active. Il y a déjà des critères en place pour s’assurer d’attirer les gens les plus instruits. Nous devons simplement améliorer le processus afin de pouvoir accueillir ces immigrants plus rapidement, car nous en avons également besoin au Canada.
Le problème se manifeste cependant surtout aux échelons inférieurs de la population active pour lesquels le système d’immigration ne produit pas les résultats escomptés, sauf dans le cadre du Programme des candidats des provinces.
Je voulais dire que nous avons bel et bien besoin de travailleurs parmi les plus spécialisés, mais que les lacunes se situent surtout, pour les membres de notre fédération tout particulièrement, aux niveaux inférieurs des catégories d’emploi comme dans les métiers, les opérations agricoles et les postes peu spécialisés ou de spécialisation moyenne. C’est à ce titre que notre système d’immigration actuel n’est pas particulièrement efficace.
La sénatrice Bovey : J’aurais besoin d’un autre éclaircissement afin de pouvoir aller vraiment au fond des choses. Je reviens à la problématique de la réglementation provinciale. J’adresse en fait ma question à M. Gray, mais j’aimerais bien connaître l’avis de nos deux témoins à ce sujet.
Monsieur Gray, vous avez indiqué que l’un des problèmes vient du fait qu’il existe, pour certains programmes de formation et d’études, des normes et des critères différents selon la région du pays où l’on se trouve. Comme je viens moi-même du milieu de l’éducation, je sais à quel point les provinces peuvent protéger jalousement leurs attributions en la matière.
Pouvez-vous me dire comment le gouvernement fédéral pourrait s’y prendre pour aplanir ces différences qui affectent le marché du travail partout au pays?
M. Gray : Comme je l’ai mentionné précédemment, le rôle principal du gouvernement fédéral à ce chapitre consiste à passer en revue l’Accord canadien de libre-échange en s’intéressant tout particulièrement, par exemple, aux enjeux liés à la mobilité de la main-d’œuvre pour obliger les provinces à expliquer les raisons pour lesquelles ces divergences sont aussi prononcées.
La sénatrice Bovey : Est-ce que les provinces vont vouloir se prêter à cet exercice?
M. Gray : Je l’ignore, mais je l’espère assurément.
La sénatrice Bovey : Dans mon coin de pays, les autorités ne sont aucunement disposées à laisser le gouvernement fédéral leur dicter quoi que ce soit.
M. Gray : C’est fort possible.
La sénatrice Bovey : Je crois que c’est une réalité que nous devons accepter.
M. Kelly : Sénatrice, si vous permettez, je conviens, comme vous l’avez reconnu avec justesse, qu’il ne sera pas facile d’y arriver, mais je vous dirais qu’il existe, que vous le croyiez ou non, une solution miracle. Cette solution réside dans l’acceptation mutuelle des différents régimes de réglementation et d’accréditation à la grandeur du Canada. S’il y avait une chose à faire, ce serait de désigner un maître d’œuvre à l’échelon fédéral qui aurait pour mission d’encourager les provinces à adopter un régime d’adhésion par défaut avec une liste d’exceptions, de préférence à la façon de procéder actuelle qui oblige les dix provinces et les trois territoires à assurer l’harmonisation de chaque règle et de chaque norme.
Il faut en arriver à pouvoir affirmer que, si une mesure de réglementation ou d’accréditation fait l’affaire au Manitoba, elle est automatiquement acceptée en Saskatchewan et à l’Île-du-Prince-Édouard, par exemple, à moins que le gouvernement local n’indique que la mesure en question ne peut pas être appliquée en raison de circonstances particulières dans sa province.
Je ne pense pas que cela serait aussi controversé qu’on pourrait le croire. Il y a certes des gouvernements qui tiennent mordicus à protéger leur chasse gardée dans certains domaines clés, mais nous avons instauré un régime qui fait en sorte que ces rares exemples de résistance nous empêchent de réaliser des progrès à l’égard de milliers d’autres règles, règlements et accréditations dans l’ensemble du pays. Il faudrait renverser cette perspective en nous limitant à dresser une liste des accréditations et des normes qui ne font pas l’unanimité dans ces domaines clés.
Des progrès intéressants ont été réalisés à ce chapitre dans l’Atlantique et dans l’Ouest, mais il y a encore beaucoup à faire à la grandeur du Canada.
La sénatrice Bovey : J’ai une brève question pour vous. Vous avez dit que 60 000 petites entreprises ont fermé leurs portes en 2020. Est-ce que le nombre de ces fermetures était réparti proportionnellement entre les différentes régions du pays?
M. Kelly : Pour une raison quelconque, le Québec enregistre toujours un plus grand nombre de faillites que le reste du pays, et c’est ce qu’indiquent à nouveau ces données. Je vous ai communiqué seulement les données de 2020, mais le Québec accuse généralement un nombre disproportionné de ces recours à la Loi sur la faillite.
Pour ce qui est des restructurations d’entreprise, les chiffres sont cependant plutôt équivalents dans les différentes régions du Canada.
Le président : Honorables sénateurs, nous allons essayer d’optimiser le temps que nous consacre ce premier groupe de témoins, et nous en ferons autant avec le second. Pour ce deuxième tour, j’inviterais donc les sénateurs à bien vouloir se limiter à une question chacun. Si jamais nous manquons de temps, je demanderai aux témoins de transmettre une réponse écrite à notre greffière.
La sénatrice Marshall : Ma question est pour M. Kelly.
Dans plusieurs de vos réponses, vous avez parlé des prêts que les entreprises devront rembourser un jour ou l’autre. J’essaie de voir les choses dans la perspective du gouvernement. Si cet argent n’est pas récupéré, le déficit va augmenter d’autant. Selon vous, quelles sont les probabilités que ces prêts soient remboursés? Je comprends qu’une partie de ces prêts peut être radiée. Pouvez-vous nous dire ce que vous en pensez?
M. Kelly : Merci, sénatrice, pour cette question très importante. Le programme du Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes exigeait au départ le remboursement des prêts avant la fin de 2022.
Il faut souligner qu’à la suite d’une requête que nous lui avons adressée, la vice-première ministre a accepté de reporter l’échéance à la fin de 2023. Les entreprises disposent donc d’une année additionnelle pour rembourser ces prêts.
Le gouvernement fédéral a eu la bonne idée d’intégrer à la structure de ce programme de prêts une composante prévoyant une radiation partielle à hauteur de 10 000 $ ou 20 000 $ si le solde du prêt est remboursé avant la nouvelle échéance établie à la fin de 2023. Les entreprises seront ainsi fortement incitées à rembourser leur prêt afin de profiter de cette radiation partielle.
Je crains qu’une trop grande rigueur dans l’application de ces règles fasse perdre au gouvernement le remboursement de 30 000 $ — en supposant qu’il s’agit du prêt de 40 000 $ — du fait que l’entreprise sera incapable de respecter l’échéancier. Nous avons d’ailleurs formulé quelques recommandations à cet égard en proposant notamment d’accorder une année de plus aux entreprises pour le remboursement de ces prêts.
Vous vous souviendrez qu’au tout début de la pandémie, on parlait d’un effort de deux semaines pour aplatir la courbe, et on a accordé un délai de deux ans aux entreprises pour rembourser ces prêts. Comme la pandémie s’est poursuivie pendant deux années complètes, je pense bien qu’on peut leur laisser deux ans de plus pour éponger cette dette.
[Français]
La sénatrice Moncion : J’avais compris, monsieur le président, qu’on posait nos questions et que les témoins répondraient par écrit.
Le président : Ils peuvent faire ça, oui.
La sénatrice Moncion : Je pensais que c’était ce que vous aviez dit, c’est pour ça qu’on était quatre, parce que j’aurais renoncé à ma question. Si c’est le cas, je n’ai pas besoin d’une réponse verbale.
Monsieur Kelly, vous avez parlé de l’augmentation des salaires des employés du secteur public. Je crois que c’était votre commentaire. Puis, vous nous avez parlé de prudence par rapport à ce secteur. Je crois que vous faisiez allusion à l’inflation. J’aimerais que vous en parliez en ajoutant l’aspect de productivité du personnel.
Le président : On peut avoir la réponse par écrit.
[Traduction]
Je demanderais à nos témoins de bien vouloir répondre à cette question par écrit.
M. Kelly : Avec plaisir.
[Français]
Le sénateur Gignac : J’aimerais offrir mon temps d’intervention au parrain du projet de loi, le sénateur Loffreda.
[Traduction]
Le sénateur Loffreda : Ma question est pour MM. Kelly et Gray.
Depuis le début de la pandémie, nous avons entendu bien des gens affirmer que le gouvernement devrait et pourrait en faire davantage. J’ai moi-même entendu de nombreux sénateurs de toutes allégeances y aller de telles affirmations. Le projet de loi C-32 ne fait pas exception.
Cependant, comme quelqu’un l’a mentionné ce matin, il y a souvent des gens qui se préoccupent de l’ampleur globale des dépenses gouvernementales. Voulons-nous vraiment le beurre et l’argent du beurre? Le gouvernement n’en fait jamais assez, mais on s’inquiète des pressions inflationnistes et des dépenses excessives. Nous convenons tous que la solution peut résider dans une plus grande souplesse nous permettant d’offrir un soutien ciblé et temporaire.
Que serait-il possible de faire de plus avec le projet de loi C-32, si vous aviez des recommandations de dernière minute à nous soumettre? J’ai l’impression que vous aviez tous les deux de nombreuses recommandations à présenter au comité ce matin.
Il y a tout lieu de s’inquiéter du fait que 17 % de nos entreprises ne voient pas comment elles vont retrouver le chemin de la rentabilité et risquent de devoir fermer leurs portes pour de bon. Est-il encore possible de les aider? Les difficultés qu’elles connaissent ne sont-elles pas principalement dues à des facteurs comme les habitudes, les besoins et les préférences des consommateurs?
Lorsque j’étais banquier, il nous arrivait de devoir faire le constat que certaines entreprises ne pouvaient plus bénéficier de notre aide parce qu’elles étaient victimes d’un changement qui était permanent. Il y a des clients qui m’ont dit qu’ils ne pouvaient pas accepter un prêt, car cela ne leur serait d’aucune utilité étant donné que le monde des affaires n’était plus le même. Vous avez parlé de la radiation partielle des prêts dans le cadre du Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes. C’est une forme de soutien, mais ce n’est pas suffisant.
J’ai une dernière question pour vous. Est-ce que la situation est attribuable à des considérations démographiques? Constatons-nous avec nos propriétaires d’entreprise la même problématique qu’au sein de la population générale? Il arrive qu’un propriétaire d’entreprise — une personne d’âge mûr qui a tout vu et tout fait — ne souhaite plus consentir l’effort nécessaire. Serait-il possible que certaines de ces entreprises soient vendues? Y a-t-il des fonds d’investissement providentiels qui pourraient nous aider?
Il y a beaucoup d’éléments à décortiquer dans ces questions si l’on veut vraiment savoir ce que l’avenir nous réserve. J’attendrai avec impatience vos réponses. Merci.
Le président : Je demande à nouveau à nos témoins de bien vouloir répondre par écrit. Merci.
Avant de conclure cette première portion de notre séance, j’aimerais rappeler très respectueusement à nos collègues parlementaires de l’autre Chambre et de partout au pays qu’une lettre de mandat a été reçue par le ministre Dominic Leblanc qui a toute ma confiance.
Je veux porter cette lettre de mandat à l’attention de nos témoins. Si vous souhaitez nous communiquer ultérieurement vos observations à ce sujet, je vous en serai reconnaissant à titre de président de ce comité. Voici ce qu’on peut lire dans la lettre de mandat du ministre Leblanc :
Collaborer avec les provinces, les territoires et les partenaires de l’industrie pour accélérer l’élimination des obstacles au commerce intérieur et pour renforcer les capacités à produire des données pancanadiennes ouvertes et accessibles sur les obstacles au commerce intérieur.
C’est écrit noir sur blanc dans sa lettre de mandat. Par conséquent, si vous avez des renseignements additionnels à ce propos, si vous avez été consulté ou si vous avez contribué à la réalisation de cet engagement prévu dans sa lettre de mandat, n’hésitez surtout pas à nous communiquer tout complément d’information pertinent.
Honorables sénateurs, c’est tout le temps que nous avions à consacrer à ces premiers témoins.
Je tiens à remercier vivement MM. Gray et Kelly de leur participation.
Honorables sénateurs, nous poursuivons maintenant avec notre second groupe de témoins. Nous accueillons par vidéoconférence Mme Ivette Vera-Perez, présidente et cheffe de la direction de l’Association canadienne de l’hydrogène et des piles à combustible. Nous recevons également par vidéoconférence M. Justin Wahid Rangooni, directeur général de l’organisation Energy Storage Canada.
Je veux prendre le temps de dire à mes collègues sénateurs que l’Association nucléaire canadienne, dont le nom a été ajouté hier à l’avis de convocation, a dû annuler ce matin sa participation à notre séance. On m’indique que l’Association soumettra un mémoire écrit au cours des prochains jours. Nous avons donc seulement deux témoins qui représenteront respectivement l’Association canadienne de l’hydrogène et des piles à combustible et Energy Storage Canada.
Bienvenue à nos témoins et merci d’avoir accepté notre invitation. Nous entendrons d’abord Mme Vera-Perez, puis M. Rangooni, avant de passer aux questions des sénateurs.
Mme Ivette Vera-Perez, présidente et cheffe de la direction, Association canadienne de l’hydrogène et des piles à combustible : Bonjour, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité. Merci de m’avoir invitée à être des vôtres aujourd’hui pour la poursuite de cette importante étude sur le projet de loi C-32. Je m’appelle Ivette Vera-Perez et je suis présidente et cheffe de la direction de l’Association canadienne de l’hydrogène et des piles à combustible. Nous représentons plus de 160 entreprises à toutes les étapes de la chaîne d’approvisionnement de l’hydrogène. Nos membres exportent des technologies propres dans plus de 42 pays qui comptent pour 65 % de la population mondiale.
Selon un récent rapport d’Ernst and Young, l’hydrogène canadien pourrait avoir un potentiel de marché annuel totalisant 100 milliards de dollars et créer jusqu’à 350 000 emplois d’ici 2050. Il faut ajouter à cela le fait que le gouvernement du Canada estime que le secteur contribuera à réduire les émissions canadiennes à raison de 45 millions de tonnes métriques par année.
Fort d’un héritage de 100 ans d’expertise industrielle et de recherche, le secteur canadien de l’hydrogène et des piles à combustible figurait, jusqu’à tout récemment, parmi les chefs de file mondiaux dans ce domaine. Mais la situation n’est plus ce qu’elle était il y a 100 ans. Nous avons maintenant de la concurrence au sommet. Partout dans le monde, des pays ont multiplié les politiques et les investissements pour favoriser l’avancement de leur industrie nationale de l’hydrogène et des piles à combustible. L’une des politiques ainsi adoptées, la loi américaine sur la réduction de l’inflation, a incité notre gouvernement à annoncer différentes mesures dans le cadre de son plus récent énoncé économique de l’automne et nous réunit tous aujourd’hui pour discuter du projet de loi C-32.
Deux mesures importantes touchant l’hydrogène ont été mises de l’avant dans l’énoncé économique de l’automne. Il y a d’abord des crédits d’impôt à l’investissement dans les technologies propres et l’hydrogène propre. On ne saurait trop insister sur les possibilités qu’offre un tel crédit d’impôt pour l’hydrogène propre. Ainsi, un crédit d’impôt à l’investissement de 30 % pour les technologies propres et de 40 % pour l’hydrogène propre contribuera à encourager la production d’hydrogène à faible teneur en carbone au pays. Nos membres et nous-mêmes espérons que ces crédits d’impôt à l’investissement pourront entrer en vigueur sans tarder dès que le budget de 2023 aura été déposé. Nous devrions nous employer en priorité à assurer le déploiement rapide et complet de crédits d’impôt à l’investissement assortis de lignes directrices claires quant aux limites, aux critères d’admissibilité, au temps de traitement et à l’interaction entre ces crédits et d’autres programmes. Les investisseurs et les promoteurs disposeront ainsi de toute la clarté dont ils ont tant besoin pour mettre au point leurs projets et en assurer le financement.
Deuxièmement, et c’est peut-être l’élément le plus pertinent dans la discussion d’aujourd’hui sur le projet de loi C-32, il y a le Fonds de croissance du Canada. Nous avons été heureux de découvrir les détails du Fonds de croissance du Canada, qui prévoit des contrats de couverture des fluctuations et d’autres mesures incitatives, et de constater que le gouvernement s’est fixé un échéancier serré pour la création de l’organe d’investissement. Le soutien financier et l’aide à l’investissement sont essentiels dans les industries en plein essor, où l’innovation est constante, comme l’industrie de l’hydrogène. Comme pour les crédits d’impôt à l’investissement, le temps compte beaucoup. Il faut veiller à ce que le Fonds de croissance du Canada, le mécanisme de contrats de couverture des fluctuations et les autres mécanismes qui le composent soient conçus efficacement et soient opérationnels le plus rapidement possible afin d’éviter que les investissements ne fuient vers d’autres pays. Nous nous réjouissons de travailler avec le gouvernement et ce comité à la mise en œuvre efficace des crédits d’impôt à l’investissement au Canada, du Fonds de croissance du Canada et de toute autre initiative future.
En conclusion, le Canada a toujours été à l’avant-garde de l’industrie mondiale de l’hydrogène, mais en raison du développement rapide du secteur et de l’immobilisme du pays, le Canada prend du retard. L'énoncé économique de l’automne et la mise en œuvre des éléments du projet de loi C-32 relatifs à l’hydrogène constituent une bonne première étape pour nous aider à reprendre notre position de chef de file mondial. Cependant, tout sera dans les détails. Nous devons investir intelligemment, massivement et rapidement pour retrouver notre position de chef de file du secteur de l’hydrogène. Je vous remercie. J’ai hâte de répondre à vos questions.
Le président : Merci. Nous accueillons deux représentants d’Energy Storage Canada, M. Rangooni et M. Jim Fonger.
Justin Wahid Rangooni, directeur général, Energy Storage Canada : Je vous remercie de l’invitation. Je suis Justin Rangooni, directeur général d’Energy Storage Canada, ou ESC, et je suis ici avec notre ancien président, qui est aujourd’hui vice-président du développement canadien pour Ameresco Canada, Jim Fonger.
Energy Storage Canada est la voix du secteur du stockage d’énergie au Canada. Nous représentons toutes les technologies de stockage d’énergie de toutes durées. Actuellement, les installations canadiennes permettent de stocker environ un gigawatt d’énergie, mais à la lumière des annonces faites récemment en Ontario et en Nouvelle-Écosse ainsi que des projets qui se préparent en Alberta, ce nombre est sur le point d’augmenter considérablement.
L’un des principaux moteurs du développement accru du secteur du stockage de l’énergie est sa capacité de contribuer à l’atteinte des objectifs fédéraux et provinciaux de carboneutralité. En octobre, nous avons publié un rapport qui, pour la première fois, quantifiait le stockage d’énergie nécessaire pour nous doter d’un réseau électrique carboneutre d’ici 2035 : de 8 GW à 12 GW, la plupart des activités se déroulant en Ontario et en Alberta. Les programmes fédéraux, notamment le programme ERITE, soit le Programme des énergies renouvelables intelligentes et de trajectoires d’électrification, ont stimulé le développement du stockage d’énergie et joueront un rôle encore plus grand avec les projets en préparation. C’est formidable de voir l’engagement à égaler ce qui se fait aux États-Unis et à faire en sorte que les politiques canadiennes continuent de favoriser le développement du stockage de l’énergie et d’autres technologies propres, qui a été pris dans l'énoncé économique de l’automne avec la création d’un crédit d’impôt à l’investissement pour le stockage de l’énergie.
Le crédit d’impôt à l’investissement qu’on trouve dans la loi sur la réduction de l’inflation, aux États-Unis, pour le stockage de l’énergie, a beaucoup stimulé la croissance dans le secteur. Nous craignons que si le Canada n’agit pas assez rapidement pour suivre le rythme des autres concepteurs de stockage, le pays perdra sa place de choix dans la chaîne d’approvisionnement et les investissements pour répondre à la demande future de stockage de l’énergie. Notre organisation est heureuse de voir dans l'énoncé économique de l’automne que le crédit d’impôt à l’investissement est remboursable et couvre toutes les technologies de stockage d’énergie, et pas seulement les batteries au lithium.
Les détails seront maintenant déterminants pour que nous puissions suivre le rythme des États-Unis, de sorte qu’il faudra qu’il y ait des « ajouts » propres au Canada. Le crédit d’impôt à l’investissement au Canada pour le stockage de l’énergie devrait lui aussi comprendre des ajouts pour favoriser l’atteinte de nos objectifs de carboneutralité et une diversité de modèles de propriété/partenariat, ainsi que les projets de stockage de l’énergie de plus longue durée. Nous demandons à la ministre des Finances de lancer les consultations le plus tôt possible.
Jim Fonger, vice-président canadien, Développement d’actif et technologie avancée, Ameresco, Energy Storage Canada : Bonjour, sénateurs. Ce matin, je vous parle de Richmond Hill, en Ontario, qui se situe sur le territoire traditionnel autochtone des Hurons-Wendat, des Haudenosaunee et des Anishinabes. Les terres de Richmond Hill sont visées par le Traité no 13 et les Traités Williams.
L’une des choses que je voulais mentionner ce matin, c’est que le caractère remboursable du crédit d’impôt à l’investissement est une excellente caractéristique des mesures proposées dans le cadre de la loi. Nous espérons qu’il sera rétroactif à la date de l’annonce initiale de l'énoncé économique de l’automne. Essentiellement, il y a beaucoup de projets qui se préparent actuellement. Ameresco et les autres travaillent avec de nombreuses entreprises qui cherchent des moyens de décarboniser et d’électrifier leurs activités. Le crédit d’impôt à l’investissement fera bien avancer ces projets. La dernière chose que nous souhaitons, en tant qu’entreprise, serait que la mise en œuvre de ces projets soit retardée parce que nous ne savons pas quand ce crédit d’impôt sera mis en place. Nous voulons nous assurer que ces projets continuent sur leur lancée.
Le Canada en fait déjà beaucoup dans le domaine du climat et pour la réduction des émissions de carbone. Nous devons nous assurer qu’il maintienne le cap. Ce projet de loi nous permettra de continuer et d’accélérer les choses, notamment grâce à la tarification du carbone, à des programmes comme le Programme des énergies renouvelables intelligentes et de trajectoires d’électrification (ERITE), au règlement sur l’électricité propre, qui sont tous importants pour aller de l’avant. Outre le crédit d’impôt à l’investissement, nous aimerions également voir dans le prochain budget une recapitalisation de programmes comme le programme ERITE, ainsi que le financement de projets de démonstration.
Enfin, nous aimerions vous remercier de nous offrir l’occasion de nous exprimer aujourd’hui. M. Rangooni et moi-même nous ferons un plaisir de répondre à vos questions.
Le président : Merci beaucoup de vos observations. Je voudrais rappeler aux sénateurs que vous disposerez d’un maximum de cinq minutes chacun pour la première série de questions.
La sénatrice Marshall : Je m’adresserai d’abord aux gens d’Energy Storage Canada. De quel type de stockage parlez-vous? S’agit-il seulement de batteries, ou travaillez-vous à d’autres choses?
M. Rangooni : C’est une très bonne question. Nous touchons à toutes les technologies de stockage de l’énergie. Nous nous intéressons à bien plus que les batteries au lithium. Il y a en fait des formules chimiques très différentes en développement pour les batteries, à base de zinc, de cobalt, entre autres. Nous travaillons également, comme nos membres, à l’avancement d’autres technologies de stockage de l’énergie, comme l’air comprimé et le stockage thermique, qui utilise la géographie. Il y a aussi le stockage par pompage, qui existe déjà depuis des décennies. Il y a aussi les volants d’inertie et d’autres technologies mécaniques. De nombreuses autres technologies sont en cours de développement, en plus des batteries au lithium. Lorsque nous parlons de technologies de stockage de l’énergie, nous parlons de toute la gamme des technologies qui existent ou qui sont en développement.
La sénatrice Marshall : À quoi travaillez-vous en ce moment? Avez-vous un groupe d’entreprises ou de personnes qui travaillent à différents projets? Qui rassemblera tous les efforts? Quel est l’objectif? Quel est l’objectif à court terme? Quelle est la date butoir? S’agit-il simplement de chercheurs qui étudient les différentes options? Parce que ces nouvelles dispositions fiscales représentent une somme d’argent considérable. Comment saurons-nous si nous avons fait des progrès dans deux ou trois ans? Quel est l’objectif ultime? Quel est le plan?
M. Rangooni : La vision d’Energy Storage Canada, c’est que le stockage d’énergie soit considéré comme une ressource ou un outil courant dans les offres de systèmes. Nous constatons qu’il y a actuellement un déficit de capacité d’environ quatre gigawatts en Ontario, que la province devra combler d’ici le milieu de la décennie. L’Ontario a annoncé un appel d’offres pour des technologies de stockage de l’énergie d’un maximum de 2 500 MW afin de combler ce manque à gagner, et la solution passera par les batteries au lithium à court terme. Les fonds rendus accessibles par le crédit d’impôt à l’investissement, le programme ERITE et d’autres programmes contribueront à réduire les coûts et rendre les projets de stockage d’énergie encore plus rentables en Ontario.
En Nouvelle-Écosse, nous venons d’apprendre que Nova Scotia Power va lancer quatre projets de stockage par batterie de 50 MW chacun, qui verront le jour au cours des dix prochaines années. C’est sans compter le projet de 200 MW de stockage derrière le compteur, dont M. Fonger pourra vous parler, qui est déjà en branle en Ontario.
Pour les technologies de stockage de l’énergie, nous avons dépassé le stade de la démonstration ou du projet pilote. Nous sommes prêts maintenant, et vous pourrez voir que bien des projets se concrétiseront cette année et l’année prochaine, à court terme.
La sénatrice Marshall : J’ai lu une grande partie du contenu de votre site Web. Vous dites que l’écart entre la quantité d’énergie qu’on voudrait pouvoir stocker et la capacité actuelle est assez grand. Mais vous donnez l’impression, dans ce que vous dites ici, que nous sommes sur la voie de combler cet écart. Je n’en suis pas convaincue, le fossé est tellement grand. Vous parlez de tous vos projets sont en cours, mais ce ne sont que des projets, n’est-ce pas? Ils peuvent porter fruit ou pas, n’est-ce pas?
M. Rangooni : Vous avez tout à fait raison. Je parlais en réalité du manque de capacité en Ontario. Selon notre document, il représente de 8 à 12 GW; nous avons encore bien du pain sur la planche. Mais les mesures qu’a prises l’Ontario pour bonifier sa capacité actuelle de 2 500 MW sont un excellent premier pas vers l’objectif de de 8 à 12 GW que nous fixons dans notre rapport.
La sénatrice Marshall : Pour l’Association canadienne de l’hydrogène et des piles à combustible, le crédit d’impôt à l’investissement pour l’hydrogène propre s’appliquerait-il à l’hydrogène vert? Pouvez-vous nous parler de l’hydrogène vert et de l’hydrogène bleu? Est-ce ce qu’on entend par hydrogène propre? Pourriez-vous faire la distinction entre ces formes d’hydrogène? Je m’interroge sur le coût de production de l’hydrogène vert par rapport au coût de production de l’hydrogène bleu.
Mme Vera-Perez : Je vous remercie de cette question.
Avant que je ne réponde à la question, M. Rangooni a oublié de dire que l’hydrogène est un excellent vecteur de stockage.
Je vous remercie de cette question, sénatrice Marshall. La meilleure façon d’évaluer l’hydrogène, c’est selon son intensité de carbone. Le crédit d’impôt à l’investissement pour l’hydrogène propre permettrait de mettre au point une échelle et une méthodologie pour mesurer l’intensité de carbone. Nous souhaitons vivement participer à ces consultations également. Les meilleurs rendements seront ceux des formes d’hydrogène à la plus faible intensité de carbone.
Il existe de nombreuses couleurs (rose, turquoise et d’autres), mais je dois avouer que je suis un peu daltonienne. L’idéal est vraiment de mesurer l’intensité de carbone de chacune. En général, les couleurs les plus courantes sont le bleu, qui vient des combustibles fossiles — ce qui inclut la séquestration du carbone — et le vert, qui est l’hydrogène produit par électrolyse à partir de sources comme le vent et le soleil.
Vous posez ensuite une question sur les prix. Avec l’adoption de la loi américaine, le prix de l’hydrogène vert — concentrons-nous un instant sur l’hydrogène produit par électrolyse — est appelé à baisser considérablement parce qu’il dépend de deux choses : le prix de l’électrolyseur et le prix de l’électricité.
La sénatrice Marshall : Vous dites qu’il est appelé à baisser, mais où se situe-t-il actuellement? Quand les gens commencent à me parler de plans et de projections, je suis comptable et j’aime avoir des chiffres.
Mme Vera-Perez : C’est une très bonne question. En fait, c’est vraiment propre à chaque site. McKinsey estime que d’ici 2050 — et ce n’est pas le cas aujourd’hui —, les pays exportateurs vendront leurs produits 1,2 € le kilogramme. J’ai des membres qui ont fait des estimations pour leurs projets selon les chiffres actuels.
La sénatrice Marshall : Je pense que mon temps est écoulé. Peut-être pourriez-vous m’envoyer l’information par écrit.
Mme Vera-Perez : Absolument.
La sénatrice Marshall : Le président m’a dit que mon temps était écoulé. Je vous remercie.
Mme Vera-Perez : Je vous enverrai tout cela. Merci.
Le président : Sénateurs, nous avons des problèmes technologiques touchant l’interprétation.
Pour votre information, sénateurs, nous sommes à la merci de la technologie. Nous demanderons à M. Fonger de répondre aux questions au nom d’Energy Storage Canada. Nous avons dû laisser tomber M. Rangooni à cause de difficultés techniques.
Madame Vera-Perez, nous vous entendons bien.
Poursuivons les questions.
[Français]
La sénatrice Moncion : Ma première question s’adresse à la représentante de l’Association canadienne de l’hydrogène et des piles à combustible.
[Traduction]
J’aimerais que vous nous parliez du crédit d’impôt et du Fonds de croissance du Canada. Vous avez dit dans votre exposé que tout sera dans les détails. Pourriez-vous simplement mentionner certains de ces détails afin que nous ayons une meilleure idée des réserves de votre entreprise à l’égard de ces deux programmes?
Mme Vera-Perez : Absolument, je vais vous donner quelques exemples. Quelles sont les limites? Dans un grand projet, qu’est-ce qui peut être considéré comme admissible au crédit d’impôt pour les technologies propres? Qu’est-ce qui pourrait être admis au titre du crédit d’impôt pour l’hydrogène, en particulier?
Comme de nombreux projets peuvent comprendre un volet énergie renouvelable, un volet hydrogène (pensons à un projet de transport), là encore, quelles sont les limites? Est-ce que cela s’arrête au robinet ou à la pompe? Tous ces éléments sont-ils admissibles?
En quoi consistent les dépenses en capital? L’achat d’un électrolyseur ou d’autres pièces d’équipement en ferait-il partie?
Il y a aussi le processus de réclamation et le temps de traitement de la demande. Par exemple, la demande est-elle présentée à la fin de l’année financière? Le cas échéant, y aura-t-il, par exemple, une période d’attente de six mois? Il se pourrait alors qu’une entreprise doive attendre 18 mois. Le cas échéant, y aura-t-il des mécanismes pour l’aider pendant cette attente de 18 mois, par exemple?
Il y a aussi, par exemple, des questions entourant le cumul des programmes. Le crédit d’impôt s’appliquera-t-il à 100 % du projet ou à sa valeur après les subventions ou contributions remboursables?
Il sera aussi important de savoir quand le crédit d’impôt entrera en vigueur. Par exemple, nous ne voudrions pas que les premiers à aller de l’avant soient pénalisés. Y aurait-il moyen de rendre le crédit d’impôt applicable rétroactivement, à partir de 12 mois après la date de l’annonce, par exemple? C’est également une question.
Le fait est que les membres de notre association aimeraient vraiment participer à la conversation pour que le crédit d’impôt soit le mieux conçu possible pour être le plus efficace possible.
Un dernier point : comment sera-t-il coordonné avec les autres programmes comme ceux de la Banque de l’infrastructure du Canada, le Fonds Investir dans le Canada, le financement de Ressources naturelles Canada? Le plus grand besoin dans ce secteur concerne la réduction des risques. Comment toutes les différentes initiatives qu’il y a au Canada s’emboîtent-elles, comme les pièces d’un casse-tête?
La sénatrice Moncion : Merci. Monsieur Fonger, vous avez parlé du caractère remboursable du crédit d’impôt. Parliez-vous bien du crédit d’impôt ou bien parliez-vous d’un autre programme lorsque vous avez demandé que ce soit rétroactif à l'énoncé économique de l’automne?
M. Fonger : Je vous remercie de cette question. Je disais que le fait que le crédit d’impôt à l’investissement soit remboursable est un élément important du programme. Cela le rend également plus simple que d’autres programmes. L’une des choses que nous constatons à la lecture ce projet de loi, c’est que non seulement il nous permet d’emboîter le pas aux États-Unis, mais il va plus loin à certains égards, en ce sens qu’il est plus simple que le régime mis en place au sud de la frontière.
La sénatrice Moncion : Merci.
Le sénateur Gignac : Je remercie nos témoins.
Les gouvernements vont investir beaucoup, parce que le crédit d’impôt remboursable proposé devrait coûter 2,6 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années. De plus, vous avez mentionné le Fonds de croissance du Canada. Il s’agit d’une mesure qui a été présentée dans le dernier budget du printemps.
L’été dernier, le président Biden a fait adopter sa loi sur la réduction de l’inflation, qui s’accompagne d’une enveloppe de 369 milliards de dollars américains pour lutter contre le changement climatique. L’effort du gouvernement canadien pour lutter contre le changement climatique est un pas dans la bonne direction, mais il me semble famélique par rapport à l’initiative américaine.
Pour assurer notre compétitivité, pensez-vous que le Canada doit faire beaucoup plus dans le prochain budget pour égaler ce qui se passe du côté américain? Comment réagissez-vous à cela?
Mme Vera-Perez : Je vous remercie de la question. Dans le cas du crédit d’impôt à l’investissement pour les technologies propres, par exemple, on parle de 6,7 milliards de dollars. Le montant de 6,7 milliards de dollars pour les énergies renouvelables s’envolera très vite. C’est un point qu’un certain nombre de membres ont signalé. Oui, c’est un excellent début, et il faudra en faire davantage.
Toutefois, il est vrai que notre marché n’est pas de la même taille que celui des États-Unis et que nous ne pouvons peut-être pas égaler les mesures qui y sont prises au dollar près. Il s’agit de faire preuve d’intelligence et de penser à tout ce que contient notre boîte à outils.
Ce qui constituerait peut-être un bon exercice pour le gouvernement fédéral serait d’examiner les deux côtés et de dire qu’au Canada, nous offrons un crédit d’impôt à l’investissement de 30 % pour les technologies propres et de 40 % pour l’hydrogène. Nous avons des contrats sur différence et des accords d’écoulement. Cela nous amène à un coût de l’hydrogène de tel montant par rapport au crédit d’impôt à l’investissement et au MPTC, ou à l’Advanced Manufacturing Production Tax Credit, aux États-Unis, ce qui nous amène à tel montant. Nous pourrons alors dire si c’est comparable, si nous sommes compétitifs. Encore une fois, nous avons des initiatives différentes et la taille de nos marchés respectifs est différente. C’est à cet égard que je parle d’élaborer des mécanismes de crédit d’impôt à l’investissement et de contrat sur différence les plus efficaces.
Le sénateur Gignac : M. Fonger souhaite-t-il intervenir?
M. Fonger : Merci. Je pense que Mme Vera-Perez a mis le doigt sur bon nombre des principaux points. Quant à ce qui doit se passer maintenant concernant le crédit d’impôt à l’investissement, nous devons commencer. Il est possible de définir la norme sur l’électricité propre que le gouvernement fédéral a établie en fonction de ce qui sera nécessaire pour y parvenir.
Il y a aussi la direction que prend le gouvernement canadien pour le pays sur le plan des objectifs de réduction des émissions de carbone. Nous devons faire certaines choses pour nous passer des combustibles fossiles. Les technologies qui nous permettent de le faire à ce stade-ci nécessitent plus de financement qu’elles n’en nécessiteront à un moment donné, lorsqu’elles deviendront plus efficaces.
Je pense que c’est un très bon début. Nous devrions commencer avec ce que nous avons, et ensuite le budget doit suivre la demande à mesure que nous atteignons nos objectifs.
Plus tôt, la sénatrice Marshall a parlé de la façon dont nous pouvons évaluer ce qui se passe. Il s’agira des projets qui seront mis en œuvre, de la réduction des émissions de carbone et de l’électrification. Le gouvernement doit suivre de près les progrès.
Le sénateur Smith : Pour poursuivre dans la même veine que le sénateur Gignac, je dirais que les États-Unis ont fait un grand pas en avant avec l’adoption de la loi sur la réduction de l’inflation. Ma question s’adresse aux deux témoins. Où vous situez-vous à l’heure actuelle? On parle de concevoir des projets et d’essayer de se positionner. Quels autres pays dans le monde ont des politiques similaires et où se situe le Canada, à votre avis? N’est-il qu’un acteur mineur ou n’en est-il qu’au premier stade? Où en sommes-nous actuellement et que pouvons-nous faire, selon vous? Que pouvons-nous réaliser si l’on se projette dans 5 à 10 ans? C’est que tout évolue rapidement.
M. Fonger : Concernant ce que nous pouvons réaliser, il s’agit d’atteindre les objectifs qui ont été fixés pour notre pays. Le stockage d’énergie contribue à améliorer l’efficacité de tous les actifs dans le réseau électrique pour leur permettre de fournir davantage d’électricité dans le système. Cela inclut la production, la transmission et la distribution. Il favorise également une plus grande prolifération de l’énergie solaire et éolienne, ainsi que de l’énergie nucléaire. Il rend tous les dispositifs de production dont nous avons besoin dans le système, pour l’électrification, plus efficaces et plus rentables sur l’ensemble de la chaîne.
Pour ce qui est des autres pays, je peux parler de ce qui se passe aux États-Unis, puisque je travaille pour une entreprise qui est présente à la fois au Canada et aux États-Unis. Notre principal objectif, à l’heure actuelle, en ce qui concerne les chaînes d’approvisionnement et la main-d’œuvre, est de nous assurer que nous sommes sur un pied d’égalité avec les États-Unis, afin que les possibilités de déployer des projets de décarbonisation ici au Canada soient au moins les mêmes qu’aux États-Unis.
Le sénateur Smith : Pensez-vous que dans le contexte actuel, les États-Unis ou d’autres pays ont de meilleures politiques que les nôtres en matière d’énergie propre et de stockage? Si oui, comment cela nous positionne-t-il pour l’avenir?
M. Fonger : Je pense que Mme Vera-Perez a dit plus tôt que tout est dans les détails. En principe, ce que le Canada considère comme son crédit d’impôt à l’investissement, à un haut niveau, nous mettra sur le même pied que nos amis américains, voire peut-être en meilleure posture, pour faire avancer les projets ici au Canada. Cela s’aligne sur la manière dont tout va se mettre en place et dont le programme va être structuré. Il est important que nous ayons l’occasion de travailler avec le gouvernement pour nous assurer que les détails du programme sont tels que nous pouvons nous assurer qu’il fonctionne.
Peut-être voulez-vous ajouter quelque chose, Mme Vera-Perez.
Mme Vera-Perez : Je suis tout à fait d’accord avec M. Fonger. Je ne vais pas répéter tout ce qu’il a dit, mais j’ajouterais simplement un petit quelque chose.
Vous avez demandé ce que font d’autres pays. Il va sans dire que nous avons tous très bien examiné la loi sur la réduction de l’inflation, mais d’autres initiatives ont été prises en Europe également. Par exemple, la France investit 1,2 milliard de dollars pour construire une « giga-usine » d’électrolyseurs. La Chine est à un autre niveau d’investissement. Elle investit également massivement dans les électrolyseurs, car on a signalé qu’ils constituent l’un des plus importants goulots d’étranglement dans les chaînes d’approvisionnement.
Encore une fois, nous pouvons procéder très intelligemment. Notre marché n’est pas de la même taille, et nous n’avons pas le même budget, mais l’hydrogène est un élément qui peut assurer la résilience de l’ensemble du réseau, du réseau électrique ou du réseau de gaz. M. Fonger l’a mentionné : le nucléaire plus le stockage d’énergie et l’hydrogène, le nucléaire plus les sources d’énergie renouvelable plus l’hydrogène et le stockage de l’énergie... C’est une proposition gagnante. Le Canada est béni sur le plan géographique, qu’on pense, par exemple, aux cavernes de sel, de gaz naturel, non seulement en Ontario, mais dans d’autres provinces.
Il s’agit de faire preuve de créativité avec ce que nous avons et de maximiser la valeur ou l’efficacité des outils dont nous disposons actuellement et qui sont proposés dans l'énoncé économique de l'automne. Ce serait très important.
Le sénateur Smith : Merci beaucoup.
Le sénateur Boehm : Ma première question s’adresse à Mme Vera-Perez.
Dans un communiqué de presse du 7 novembre portant sur l'énoncé économique de l’automne, votre association a déclaré être ravie que « plusieurs » de ses recommandations relatives à l’hydrogène propre aient été prises en compte dans l’énoncé.
Je me demande alors quelles recommandations n’ont pas été prises en compte.
Mme Vera-Perez : Merci beaucoup pour cette question, sénateur.
Oui, nous sommes ravis. Nous préconisions un crédit d’impôt à l’investissement remboursable. Nous avons été très heureux de constater qu’il se trouvait dans l’énoncé. Nous préconisions également un crédit d’impôt à la production qui puisse couvrir les coûts opérationnels des projets d’hydrogène et le coût variable de l’électricité. Il n’y était pas. Il y a le contrat sur différence, et j’ai donc bien hâte de voir comment les contrats sur différence et les contrats d’écoulement, entre autres, pourraient combler cette lacune.
Nous continuons de croire que le crédit d’impôt à la production pourrait être une proposition gagnante, mais nous sommes prêts à travailler en fonction de ce que nous avons.
Enfin, nous recommandons la création d’un bureau de l’hydrogène. J’aimerais vraiment que cette idée se concrétise. On l’a fait aux États-Unis et dans un certain nombre de pays européens. La Colombie-Britannique a également déjà créé son propre bureau de l’hydrogène. Il s’agirait de tout examiner, y compris des projets liés au stockage, au nucléaire et aux énergies renouvelables, et d’analyser la situation sur le plan de la réglementation et de la délivrance de permis, ainsi que sur le plan des codes et des normes.
Nous essayons d’avoir une personne au bout de la ligne, si l’on veut, qui aiderait à ce que ces initiatives et ces projets très complexes puissent se concrétiser.
Le sénateur Boehm : Merci.
Ma deuxième question s’adresse à M. Fonger. Sur le site Web de votre organisation, on présente une vue d’ensemble du stockage d’énergie et on y indique ce qui suit :
Le stockage d’énergie peut également servir de renfort en cas d’interruption de la production d’énergie électrique, ce qui renforce la fiabilité et la résilience du système [...]
C’est ce que nous constatons en Ukraine. La Russie a attaqué l’infrastructure électrique du pays. L’Ukraine est largement privée d’électricité et de chauffage avec l’arrivée du temps froid, et les pays européens qui dépendent du pétrole russe vont passer un hiver difficile, malgré la quantité de GNL qu’ils ont réussi à obtenir. Il y aura d’autres hivers après celui-ci, bien sûr.
De quelle façon les technologies de stockage d’énergie peuvent-elles être utilisées efficacement dans de telles situations d’urgence à long terme? Travaillez-vous avec le gouvernement fédéral et des partenaires internationaux en Ukraine ou dans d’autres zones de conflit dans le monde? De même, cette technologie peut-elle être utilisée dans des contextes humanitaires et de développement? Et ici, au Canada, le stockage d’énergie peut-il être utilisé efficacement à la suite d’une violente tempête hivernale ou d’un ouragan comme celui qui est survenu sur la côte Est?
M. Fonger : Ce sont d’excellentes questions, sénateur. J’espère pouvoir répondre à chacune d’entre elles.
La première était de savoir si le stockage d’énergie peut nous servir pendant de longues pannes. L’une des choses auxquelles nous aimerions travailler avec le gouvernement, ce serait une mesure qui viendrait s’ajouter au crédit d’impôt à l’investissement pour les projets de stockage d’énergie de longue durée, dont l’hydrogène peut faire partie.
De nombreuses technologies sont sur le point d’être développées. Certaines d’entre elles, et M. Rangooni en a parlé plus tôt, comme l’hydroélectricité par pompage, existent depuis de nombreuses années. Dans le cas de l’hydroélectricité par pompage, les formations géologiques nécessaires au déploiement de cette technologie sont limitées. Il existe de nombreuses autres technologies de stockage de longue durée qui peuvent aider à fournir une capacité au réseau pendant de longues périodes, mais elles sont en cours de développement et ont besoin d’un incitatif supplémentaire pour qu’elles puissent être déployées afin d’aider les régions du Canada qui ont besoin de ce service particulier.
Pour ce qui est d’échanger avec d’autres pays pour trouver des moyens de les aider afin qu’ils puissent avoir un stockage de longue durée pour leurs réseaux de services publics, ce n’est pas quelque chose que notre organisation a beaucoup fait jusqu’à présent. Cependant, je peux peut-être demander à M. Rangooni de fournir au comité des renseignements supplémentaires à cet égard.
Je crois qu’une autre question portait sur la façon de procéder pour que cela ait du sens sur le marché canadien. Partout au Canada, les services publics envisagent maintenant d’ajouter le stockage d’énergie à leur réseau afin d’en assurer la résilience pendant les pannes d’électricité, à la fois à grande échelle sur les réseaux de transmission, et à petite échelle avec les technologies de stockage d’énergie derrière le compteur qui peuvent être placées dans le réseau de distribution directement chez le client afin d’assurer la durabilité.
En ce qui concerne les technologies en tant que telles, qu’il s’agisse de stockage d’énergie à court terme et à petite échelle ou de stockage à très long terme à l’échelle du réseau, elles sont toutes en cours de développement, mais elles ont toutes besoin des mesures qui figurent dans l'énoncé économique de l’automne en ce qui concerne le crédit d’impôt à l’investissement.
Le sénateur Boehm : Vous avez répondu aux quatre questions. Merci beaucoup.
M. Fonger : Merci.
Le président : Le parrain du projet de loi, le sénateur Loffreda, posera maintenant ses questions.
Le sénateur Loffreda : Je remercie les témoins de leur présence.
Ma question s’adresse aux deux témoins, mais Mme Vera-Perez, présidente de l’Association canadienne de l’hydrogène et des piles à combustible, a parlé du Fonds de croissance du Canada, et le temps compte beaucoup. L’un des objectifs du Fonds de croissance du Canada est d’inciter les entreprises à prendre des risques et à investir dans des technologies de pointe au pays. Pensez-vous tous les deux que les entreprises canadiennes disposent des outils et du soutien qu’il faut pour remplir une telle mission? Dans quelle mesure le Fonds de croissance du Canada les aidera-t-il à atteindre cet objectif, à votre avis?
Où nous situons-nous par rapport à nos concurrents mondiaux? Il a été question du soutien offert dans d’autres pays et chez notre principal partenaire commercial, les États-Unis, où les montants investis sont nettement supérieurs à ceux au Canada.
Les capitaux privés sont toujours un élément clé du succès. Dans quelle mesure les investissements visant à contrecarrer les risques, dans le cadre du Fonds de croissance du Canada, permettront-ils de débloquer des capitaux privés, à votre avis? Pourquoi et comment?
Peut-être que Mme Vera-Perez pourrait commencer.
Mme Vera-Perez : Oui, merci. Ce sont de très bonnes questions. Je les ai prises en note et j’espère pouvoir répondre à chacune d’entre elles.
Ce qui est préoccupant au sujet du Fonds de croissance du Canada, entre autres, c’est de savoir à quel rythme il sera lancé. Le lancement va commencer dans le cadre de la Corporation de développement des investissements du Canada, et il est donc à espérer que les choses seront mises en marche. Certains de nos membres se demandent s’il faudra autant de temps pour le lancer qu’il en a fallu dans le cas du fonds sur l’infrastructure, par exemple. Nous ne pouvons pas nous permettre d’attendre aussi longtemps.
Avons-nous les outils nécessaires? Pas pour l’instant, mais encore une fois, des crédits d’impôt à l’investissement bien conçus et efficaces et un fonds de croissance bien conçu seront utiles. Une partie de ce que je vois dans le fonds de croissance canadien où les détails comptent, ce sont les contrats sur différence. Ils doivent être simples et faciles à comprendre pour que les promoteurs de projets puissent communiquer les renseignements aux financiers et aux investisseurs afin qu’ils voient clairement que leur investissement produira un rendement et prennent la décision d’investir.
Il existe d’autres initiatives, comme vous l’avez dit, pour les projets qui procurent des rendements inférieurs à ceux du marché. Cela concerne le Fonds de croissance du Canada en tant qu’investisseur. Ce qui m’inquiète, c’est de savoir comment les décisions seront prises. Nous sommes tous des humains. Notre subjectivité intervient dans les processus décisionnels. Je voudrais simplement vous signaler que nous ne voulons pas être dans une position où nous choisissons les gagnants. Nous ne sommes pratiquement jamais en mesure de choisir des gagnants efficacement.
Alors, allons-nous choisir les gagnants en fonction des seuils d’intensité carbonique ou des coûts liés aux gaz à effet de serre réduits, par exemple, pour un projet, ou allons-nous privilégier la technologie? Ce serait là une question qui se pose.
Encore une fois, j’ai parlé du contrat sur différence et de la façon dont il sera conçu. Idéalement, on devrait également tenir compte de l’évolution des prix de l’électricité, donc pas d’un chiffre fixe, mais, pour la durée des accords, de la fluctuation des prix de l’électricité et de la fluctuation de l’intensité carbonique pour cette électricité, ce qui arrive parfois également.
Ensuite, il y a les contrats d’écoulement, qui sont très intéressants. Comment le Canada, le gouvernement fédéral, peut-il devenir un acteur dans l’approvisionnement en hydrogène propre, par exemple?
Une mise en œuvre efficace du crédit d’impôt à l’investissement et du Fonds de croissance du Canada permettrait aux financiers d’avoir une vision à long terme des rendements d’un projet, ce qui permettrait de débloquer des capitaux privés. Je pense que c’était votre troisième question, mais dites-moi si j’ai oublié quelque chose.
Le sénateur Loffreda : Non, vous avez fait le tour de mes questions. Je vous remercie. Monsieur Fonger, voulez-vous ajouter quelque chose?
M. Fonger : Je pense que Mme Vera-Perez a abordé la plupart des points dont nous aurions traité. Je ne suis pas prêt à répondre avec force détail à la question sur le Fonds de croissance du Canada ce matin, mais je demanderais au comité d’accepter une réponse d’Energy Storage Canada à ce sujet. Nous pourrions probablement entrer plus dans les détails de l’affaire, si vous jugez cela acceptable.
En ce qui concerne les outils nécessaires, je pense qu’il faut s’assurer d’aller de l’avant avec la tarification du carbone prévue au Canada. Il est essentiel d’intégrer le prix du carbone dans les états financiers des projets qui sont entrepris pour réellement stimuler les projets de décarbonisation qui utilisent ces technologies. La tarification du carbone en conjonction avec le crédit d’impôt à l’investissement débloquera un grand nombre de projets et nous permettra d’en arriver au point où nous pourrons vraiment les faire progresser.
Je pense qu’il y a en outre des programmes initiaux encore en place qui ont besoin de financement pour aller de l’avant. Le Programme des énergies renouvelables intelligentes et de trajectoires d’électrification mis en œuvre par Ressources naturelles Canada doit être refinancé pour aider les projets qui ont besoin d’un coup de pouce supplémentaire pour progresser.
Le président : Je vous remercie. Les témoins peuvent ajouter quelque chose par écrit à leur réponse et envoyer le tout à la greffière du comité.
La sénatrice Bovey : Je voudrais remercier nos témoins. Vous avez tous les deux parlé du facteur temps, du leadership international et du fait que le Canada doit garder le cap vers les objectifs d’énergie propre et de stockage.
Je reviens de la COP 27. De nombreux groupes de témoins nous ont parlé du besoin d’ajouter des capacités de stockage dans les divers réseaux hydroélectriques du pays, et la question de l’énergie nucléaire a été soulevée. À cela s’ajoute la question du caractère vert de l’hydrogène vert et, pour faire suite aux questions de la sénatrice Marshall, de la relation entre l’hydrogène vert et l’hydrogène propre. De toute évidence, cela ne fait pas partie de mon champ de compétences. Vos deux organisations s’adonnent-elles à la recherche technique dans ces domaines?
Madame Vera-Perez, vous avez indiqué que le stockage du carbone fait partie de toute cette question. Cela concerne-t-il certains travaux que vous effectuez sur le stockage du carbone sous les fonds marins, ou suis-je sur une tangente?
Mme Vera-Perez : Je vous remercie beaucoup de cette question.
La sénatrice Bovey : Je suis impatiente de connaître vos deux points de vue.
Mme Vera-Perez : Je suis enchantée que vous ayez assisté à la COP 27. J’ai entendu dire que la conférence portait sur la mise en œuvre, c’est-à-dire là où nous devrions en être rendus actuellement.
Nous effectuons certainement de la recherche sur la technologie. Nous comptons parmi nos membres un certain nombre d’universités et de collèges, ce qui est fort important. Le Canada a été, pendant un certain nombre d’années, un chef de file de la recherche sur l’hydrogène, et nous n’avons pas perdu ce leadership dans le secteur universitaire. En fait, plus tard cette semaine, je serai à l’Université du Québec à Trois-Rivières, ou UQTR, qui est un centre de recherche sur l’hydrogène de calibre mondial dont nous sommes extrêmement fiers. Voilà ce qu’il en est de la recherche dans ce domaine.
Permettez-moi de vous répondre ultérieurement au sujet du captage et du stockage du carbone sous le niveau de la mer, car je n’ai entendu parler d’aucun projet de recherche portant sur la question. Je devrai vous répondre par écrit.
La sénatrice Bovey : Le Canada participe à des projets de stockage du carbone sous les fonds marins dans l’Atlantique Nord, et j’aimerais poser des questions — à eux, pas à vous — sur la sécurité du stockage sous la mer dans les zones sismiques importantes du Pacifique. C’est un autre problème.
Mme Vera-Perez : En effet.
La sénatrice Bovey : Je reçois des messages contradictoires des divers groupes auxquels je parle quand vient le temps de savoir où en est le Canada. Je sais parfaitement ce que font les universités. Peut-être pouvez-vous répondre à ma question sur le caractère vert et la propreté de l’hydrogène propre, qui fait suite à celles de la sénatrice Marshall.
Mme Vera-Perez : C’est une excellente question. La propreté et le caractère vert dépendent d’un certain nombre de facteurs. Si on produit l’hydrogène à partir de sources de carburant fossile et qu’on veut faire en sorte que l’intensité en carbone de cet hydrogène soit la plus faible possible, on doit absolument capter le carbone, le CO2 émis au cours du processus et le stocker à long terme, pendant des années. Il faut employer une méthode pour capter ce carbone et en empêcher la libération.
De façon générale, l’hydrogène électrolytique, par exemple, est considéré comme de l’hydrogène vert quand il est produit à partir de sources d’énergie renouvelable; présumons qu’on le produit par électrolyse au moyen d’un réseau électrique relativement propre. Quand on effectue l’analyse du cycle de vie, on doit également tenir compte de la source d’électricité.
Dans diverses provinces, le réseau électrique est propre à 80 ou 90 %. Comment peut-on alors remonter — virtuellement, bien entendu — jusqu’aux électrons et à la source d’électricité qui a été utilisée? C’est un des facteurs pris en compte dans la méthode de calcul de l’intensité en carbone.
Il en va de même pour les autres couleurs d’hydrogène. Si on veut effectuer une analyse adéquate de l’intensité du carbone du cycle de vie, il faut remonter jusqu’aux électrons utilisés dans les divers éléments du processus.
La sénatrice Bovey : Je vous remercie de cette réponse. Je sais que mon temps est écoulé. Si vous avez des informations à ajouter à ce sujet, vous pouvez nous les communiquer par écrit. Je vous remercie.
Mme Vera-Perez : Je vous remercie.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Ma question s’adresse à M. Fonger.
Sur le plan économique, je comprends que l’abandon des énergies fossiles au profit de l’hydroélectricité, des éoliennes et de l’énergie solaire entraîne une obligation d’entreposage. En Californie, l’entreposage d’un kilowatt coûte 1 290 $.
Combien cet entreposage va-t-il coûter au Canada? Quelle sera la différence entre le prix d’un kilowatt en libre accès comparativement à un kilowatt qui passe par l’entreposage? Quelles seront les répercussions du prix sur les consommateurs?
[Traduction]
M. Fonger : Je vous remercie de cette excellente question. Je pense que nous devrons vous transmettre une réponse par écrit à ce sujet.
Le stockage d’énergie est certainement un des éléments clés qui tire parti de toutes les autres sources d’énergie. Pour que le stockage ait réellement de la valeur, il faut pouvoir exploiter efficacement toutes ces ressources individuelles.
Chose certaine, du point de vue des demandes de propositions et des occasions qui s’offrent aux promoteurs de lancer de nouveaux projets, le concept ferme du stockage des énergies solaire, éolienne et nucléaire ou la production d’autres énergies sans émissions de gaz à effet de serre combinée au stockage peut certainement rendre le réseau électrique beaucoup plus efficace quand on cherche à assurer l’alimentation en énergie, de la production à la consommation. L’efficacité du stockage d’énergie dépend en grande partie de la fonctionnalité et de l’évolutivité du système de transmission et de distribution.
C’est une excellente question. Nous cherchons tous à déterminer ce qu’il nous en coûtera d’aller de l’avant. Nous formulerons une réponse à ce sujet à l’intention du comité.
[Français]
Le sénateur Dagenais : On sait que les batteries au lithium sont le moyen le plus efficace pour entreposer l’énergie, mais les batteries se détériorent quand même assez rapidement.
Pour qu’on puisse apprécier le coût de ce genre de projet, quel sera le prix d’une batterie et quel sera le prix pour en disposer de façon écologique?
[Traduction]
M. Fonger : Je vous remercie de cette question. L’industrie s’intéresse certainement à la fonctionnalité et à la dégradation des batteries au lithium-ion au fil du temps. Les taux de dégradation et le cycle de vie s’améliorent. Tous les principaux acteurs de l’industrie des batteries lithium-ion travaillent à des programmes de recyclage pour qu’on puisse recycler cette technologie et lui conférer une seconde vie.
Par exemple, l’industrie de l’automobile utilise la technologie du lithium-ion dans les véhicules électriques et travaille déjà à des programmes lorsque les batteries ne peuvent plus servir dans les automobiles, il leur reste encore beaucoup de vie pour être redéployées à l’intérieur du réseau.
Ce n’est que pour les batteries à lithium-ion. Je pense qu’en ce moment, vous avez raison : la technologie à lithium-ion est un moyen très économique de stocker l’énergie à court terme. Cependant, certaines technologies émergentes, comme l’air comprimé, le stockage d’énergie, le stockage thermique et le stockage saisonnier à long terme deviendront très économiques dans l’avenir. Ici encore, les crédits fiscaux à l’investissement encourageront réellement les avancées dans ce domaine. Le coût diminuera à mesure que s’élargira d’éventail de solutions de stockage à long terme.
[Français]
Le sénateur Dagenais : En terminant, j’aimerais ajouter que le coût de 1 290 $, en Californie, ne tient pas compte des investissements liés à l’équipement. Merci.
[Traduction]
La sénatrice Duncan : Je remercie les témoins qui comparaissent devant nous. En ce qui concerne le stockage d’énergie, dans ma province d’origine, le Yukon, Énergie Yukon a entrepris de stocker l’énergie. Elle y est obligée, car la demande en électricité est de loin supérieure à l’offre, et elle veut cesser d’utiliser des génératrices au diésel comme source d’énergie d’appoint à l’hydroélectricité. Elle se lance donc dans le stockage en batterie.
J’aimerais voir une carte montrant où on s’oriente vers le stockage en batterie, d’est en ouest, du sud au nord. L’information se trouve peut-être sur votre site Web, mais pourrions-nous l’obtenir par écrit?
Je voudrais également dire que je regrette que personne ne traite des petits réacteurs nucléaires modulaires. J’espérais fort que nous en parlions. Je regrette que nous n’en entendions pas parler aujourd’hui. Je crois comprendre que nous nous sommes efforcés de convoquer des témoins à ce sujet.
Le dernier point que je voudrais aborder, c’est le fait que toute la question de l’approvisionnement en énergie dépend du réseau de transmission. Peut-être les témoins voudront-ils traiter de la question. J’aimerais que les témoins de l’industrie parlent des progrès du réseau électrique dans l’axe est-ouest. Je crois comprendre que le réseau est excellent dans l’axe est-nord-sud, mais l’axe est-ouest et l’élargissement du réseau dans le Nord posent un problème de taille.
Nous savons tous fort bien qu’en cas de tempêtes majeures, les monteurs de ligne interviennent pour rétablir le courant. Le réseau électrique et les lignes de transmission doivent être évalués et assurer l’alimentation en électricité. Je suis déçue que nous n’entendions pas de témoins à ce sujet non plus. Les témoins voudront peut-être traiter de la question du réseau au Canada, particulièrement des progrès dans l’axe est-ouest, dans l’axe nord-sud et dans les régions rurales du Canada.
M. Fonger : Sénatrice, je vous remercie de cette question. Je ne suis pas en mesure de dire quelles activités sont entreprises dans l’axe de transmission est-ouest au Canada. Il ne fait aucun doute que des provinces comme le Québec, le Manitoba et la Colombie-Britannique disposent d’importantes quantités d’hydroélectricité et qu’il serait avantageux de pouvoir transmettre cette énergie dans le reste du pays.
Je dirais toutefois que le stockage d’énergie dépend de la manière dont il est placé dans les diverses régions des provinces. Le stockage d’énergie peut renforcer la fiabilité des réseaux à court et à long terme dans chacune des provinces.
Madame Vera-Perez, souhaitez-vous ajouter quelque chose à ce sujet?
Mme Vera-Perez : Oui. Je vous remercie, monsieur Fonger.
Un grand nombre de nos membres affirment que nous avons besoin de beaucoup plus d’énergie, particulièrement au chapitre de l’hydrogène produit à partir de ressources énergétiques renouvelables ou de l’hydrogène électrolytique produit au moyen d’un réseau vert et propre. Par exemple, l’Ontario entend tripler sa production d’ici 2035. L’avantage de l’hydrogène, c’est qu’on peut également en produire plus près de l’endroit où on en a besoin; on n’a donc peut-être pas besoin de très longues lignes de transmission. On peut fournir l’énergie; en ce sens, on n’a donc pas besoin de plus de transmission d’électricité. On peut décentraliser la production ou la faire plus près de la source. Je tenais à le souligner.
La transmission d’est en ouest et l’interconnexion entre les provinces présentent un autre défi. La qualité des lignes de transmission est un problème bien connu qu’il faut résoudre, certainement en Ontario et au Manitoba.
Pour ce qui est de l’augmentation de la production, sachez que c’est peut-être une question à laquelle nous devrions nous attaquer. Cela ne répond pas directement à votre question, mais les États-Unis progressent beaucoup plus rapidement que nous au chapitre de la production d’énergie renouvelable. Sur le plan de la production, on peut réfléchir à la possibilité d’utiliser cette énergie pour produire de l’hydrogène et l’utiliser pour alimenter le réseau au besoin, car l’hydrogène est un outil de stockage d’énergie.
J’aborderai un dernier sujet, sénatrice Duncan. Vous avez posé des questions à propos de l’immigration plus tôt. Je suis immigrante au Canada et j’ai été candidate provinciale. Si vous m’interrogez à ce sujet à un moment donné, je me ferais un plaisir de vous répondre aujourd’hui ou en un autre temps. Je tenais à le préciser.
Le président : Sénatrice Duncan, sachez que l’Association nucléaire du Canada remettra un mémoire écrit au comité par l’entremise de la greffière. Espérons que ses membres nous écoutent. La greffière les informera qu’ils peuvent formuler des observations sur les petits réacteurs nucléaires.
La sénatrice Duncan : Je vous remercie beaucoup, monsieur le président. Je suis ravie de l’entendre.
Le président : Honorables sénateurs, nous avons le temps de poser trois questions auxquelles les témoins répondront par écrit.
La sénatrice Marshall : Monsieur Fonger, vous avez parlé des services publics au pays, disant qu’ils cherchent à stocker de l’énergie. Ce sont d’importants producteurs d’énergie. Pourriez-vous nous indiquer par écrit ce qu’ils ont accompli jusqu’à maintenant et quels progrès ils ont réalisés?
M. Fonger : Certainement.
Le sénateur Gignac : Ma question s’adresse à M. Fonger. Récemment, le comité des banques a reçu notre champion national et expert international en action climatique, M. Mark Carney. Il a fait remarquer qu’un grand nombre d’acteurs financiers, comme peut-être des régimes de retraite, ont emprunté la voie facile pour réduire leur empreinte carbone en vendant leurs avoirs dans les industries pétrolières et gazières et d’autres industries à l’empreinte carbone élevée au lieu de contribuer à décarboniser l’économie. Ils investissent à l’étranger plutôt que de contribuer à décarboniser l’économie canadienne.
Comme vous avez un vaste réseau — et j’ai vérifié qui en fait partie —, voudriez-vous réagir à cette situation, traiter du rôle des régimes de retraite et nous indiquer ce que les décideurs pourraient faire pour encourager les régimes de retraite et les acteurs financiers à contribuer à décarboniser l’économie canadienne? Je vous remercie.
M. Fonger : Je vous remercie.
Le président : Sénateur Loffreda, c’est vous qui poserez la dernière question à titre de parrain du projet de loi.
Le sénateur Loffreda : Ma question s’adresse à Mme Vera-Perez. Monsieur Fonger, si vous souhaitez formuler des commentaires par écrit, sentez-vous libre de le faire.
Madame Vera-Perez, en ce qui concerne le Fonds de croissance du Canada, vous vous êtes dite préoccupée par la manière dont on prendra des décisions et choisira les gagnants. Vous avez ajouté que le temps joue un rôle crucial. Cela me porte à croire que vous approuvez le lancement immédiat du Fonds de croissance du Canada afin d’effectuer des investissements essentiels, malgré le fait que la structure permanente et indépendante ne sera instaurée que pendant la première moitié de 2023. Je dis cela parce que c’est la structure permanente — le président et le conseil d’administration — qui prendra ces décisions et choisira les gagnants.
Dans une perspective d’avenir, avez-vous des suggestions ou des recommandations pour étayer ce solide premier pas et peut-être atténuer vos préoccupations quant au choix des gagnants? Comme cette structure permanente sera bientôt instaurée, vous pouvez peut-être l’influencer afin d’atténuer vos préoccupations à cet égard.
Monsieur Fonger, sentez-vous libre d’ajouter quelque chose par écrit également.
M. Fonger : Je vous remercie.
Le président : Honorables sénateurs, notre temps est écoulé. À titre de président, je veux indiquer aux témoins du premier et du second groupe que leurs témoignages nous permettront de mettre l’accent, au nom de tous les Canadiens, sur nos quatre grands principes, soit ceux de la transparence, de la reddition de comptes, de la fiabilité et de la prévisibilité.
En ce qui concerne les réponses écrites, je rappelle aux témoins de les transmettre à la greffière d’ici le mardi 6 décembre 2022 avant la fin de la journée. J’espère que nous nous comprenons à cet égard.
M. Fonger : Absolument.
Mme Vera-Perez : Oui.
Le président : Je vous remercie.
Je voudrais informer les honorables sénateurs que notre prochaine séance a lieu demain soir, le 30 novembre, à 18 h 45. Nous entamerons alors notre étude sur le Budget supplémentaire des dépenses (B).
Avant de lever la séance, je voudrais remercier toute l’équipe de soutien du comité, tant ceux qui se tiennent à l’avant-plan que ceux qui travaillent en coulisses et ne sont pas visibles. Je remercie toutes ces personnes et la greffière de leur dur travail, qui contribue énormément à la réussite du travail que nous accomplissons pour la population canadienne en qualité de sénateurs.
(La séance est levée.)