LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES FINANCES NATIONALES
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le mardi 14 février 2023
Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd’hui, à 9 heures (HE), avec vidéoconférence, pour examiner le Budget principal des dépenses pour l’exercice se terminant le 31 mars 2023.
Le sénateur Éric Forest (vice-président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le vice-président : Bienvenue à tous les sénateurs et sénatrices, ainsi qu’à tous les Canadiens et Canadiennes qui nous regardent sur sencanada.ca.
Vous aurez ce matin une excellente occasion de pratiquer votre français, car nous travaillons davantage en français qu’en anglais. Par ailleurs, je souhaite à toutes et à tous une joyeuse Saint-Valentin.
[Français]
Ce matin, c’est un cadeau, nous recevons les gens de la Banque de l’infrastructure du Canada et d’Infrastructure Canada. C’est très important pour tous les Canadiens. Je m’appelle Éric Forest, je suis un sénateur de la province du Québec, de la région du Golfe et vice-président du Comité des finances nationales. Je compte sur votre amabilité pour m’aider dans cette tâche. J’aimerais maintenant faire un tour de table et demander à mes collègues de se présenter en commençant par ma gauche.
Le sénateur Gignac : Bonjour. Clément Gignac, du Québec.
Le sénateur Loffreda : Tony Loffreda, du Québec.
[Traduction]
La sénatrice Pate : Kim Pate, depuis le territoire non cédé et non abandonné de la nation algonquine anishinabe.
Le sénateur Cardozo : Andrew Cardozo, de l’Ontario.
La sénatrice Bovey : Patricia Bovey, du Manitoba.
[Français]
La sénatrice Moncion : Lucie Moncion, de l’Ontario.
[Traduction]
Le sénateur Smith : Larry Smith, du Québec.
La sénatrice Marshall : Elizabeth Marshall, de Terre-Neuve-et-Labrador.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Jean-Guy Dagenais, du Québec.
Le vice-président : Merci et bienvenue. Nous sommes accompagnés de la greffière, Mireille K. Aubé, ainsi que de Sylvain Fleury et Shaowei Pu, les analystes de la Bibliothèque du Parlement qui nous aident énormément dans notre mandat.
Ce matin, nous reprenons notre étude des dépenses prévues dans le Budget principal des dépenses pour l’exercice se terminant le 31 mars 2023, qui a été renvoyée à ce comité par le Sénat du Canada le 3 mars 2022.
Nous recevons aujourd’hui de hauts fonctionnaires de la Banque de l’infrastructure du Canada, d’Infrastructure Canada et d’Innovation, Sciences et Développement économique Canada.
Plus précisément, nous recevons de la Banque de l’infrastructure du Canada, Ehren Cory, chef de la direction et Evelyn Joerg, dirigeante principale des finances.
D’Infrastructure Canada, nous recevons Nathalie Bertrand, sous-ministre adjointe et dirigeante principale des finances, Services ministériels; Glenn Campbell, sous-ministre adjoint principal, Investissement, partenariats et innovation; Janet Goulding, sous-ministre adjointe, Direction générale des politiques et des programmes destinés aux collectivités; Gerard Peets, sous-ministre adjoint, Politiques et résultats; Erin Lynch, sous-ministre adjointe déléguée, Direction générale des programmes, des collectivités et des infrastructures.
Nous recevons aussi d’Innovation, Sciences et Développement économique Canada, Douglas McConnachie, sous-ministre adjoint et dirigeant principal des finances, Secteur de la gestion intégrée; Colette Kaminsky, sous-ministre adjointe déléguée; Eric Dagenais, sous-ministre adjoint principal, Secteur du spectre et des télécommunications.
Le sénateur Yussuff vient de se joindre à nous.
Bienvenue à vous tous et merci d’avoir accepté notre invitation à témoigner devant le Comité sénatorial des finances nationales. Nous allons maintenant écouter les remarques préliminaires de M. Ehren Cory, Mme Nathalie Bertrand et M. Douglas McConnachie.
Ehren Cory, chef de la direction, Banque de l’infrastructure du Canada : Merci pour l’invitation, honorables sénateurs.
[Traduction]
Je suis ravi de me joindre à vous aujourd’hui. Comme vous le savez déjà, je suis Ehren Cory, chef de la direction de la Banque de l’infrastructure du Canada. Je suis accompagné de Mme Evelyn Joerg, dirigeante principale des finances de la BIC.
Monsieur le président, moi aussi, j’ai dû m’exercer à prononcer son nom.
La Banque de l’infrastructure du Canada, ou la BIC, est une société d’État fédérale qui relève du Parlement par l’entremise du ministre des Affaires intergouvernementales, de l’Infrastructure et des Collectivités. Nous avons pour objectif d’investir dans des projets d’infrastructure générateurs de revenus au Canada qui profitent à la population canadienne.
Pour ce faire, nous collaborons étroitement avec les autres ordres de gouvernement, les communautés autochtones et les investisseurs privés et institutionnels afin d’accélérer les investissements dans des projets qui soutiennent la croissance économique, qui relient les collectivités et qui contribuent à la transition du Canada vers une économie à faibles émissions de carbone. Nous investissons dans des projets qui reflètent nos secteurs prioritaires établis par le gouvernement du Canada. Il s’agit du transport en commun, d’Internet haut débit, des infrastructures vertes, de l’énergie propre, ainsi que du commerce et du transport. Nous investissons dans des projets dans chacun de ces cinq secteurs, notamment pour réduire le déficit en infrastructure dans les communautés autochtones partout au Canada.
Pour faire le point sur nos progrès, je suis fier d’annoncer qu’à la fin de décembre 2022, la BIC avait pris des engagements d’investissement de 8,6 milliards de dollars dans 43 projets, dont 27 ont atteint la clôture financière. La valeur totale en capital de ces projets s’élève à 25 milliards de dollars. Ce sont donc 25 milliards de dollars de nouveaux investissements dans des infrastructures canadiennes qui n’auraient pas été réalisés sans la BIC.
Ces projets d’infrastructure généreront des retombées réelles. Ils permettront de réduire les émissions de gaz à effet de serre de plus de 4,5 millions de tonnes par année; de brancher près de 300 000 foyers de plus à Internet haut débit; d’augmenter d’environ 175 000 le nombre d’usagers du transport en commun chaque jour; d’ajouter plus de 60 millions de dollars par année à la valeur agricole de l’économie; et d’améliorer les infrastructures dans 26 communautés autochtones, et ce n’est pas fini.
Pour vous donner quelques exemples concrets, cela signifie, entre autres, de nouvelles maisons reliées à Internet haut débit dans le Sud du Manitoba; de nouveaux autobus électriques sur les routes d’Edmonton; un nouveau réseau d’énergie de quartier à Richmond, en Colombie-Britannique; de nouvelles méthodes de stockage de l’énergie fiables en Ontario; ainsi que l’expansion du réseau ferroviaire dans le Nord du Québec et au Labrador.
Il est important de distinguer la BIC des autres instruments gouvernementaux. Je suis entouré aujourd’hui de collègues avec lesquels nous travaillons étroitement. La BIC consent des prêts à des projets; ces prêts sont remboursés, avec intérêts, pendant la durée du projet. Une fois engagés, nos emprunts sont prélevés au cours de la construction. Notre argent n’est versé qu’à mesure que le projet avance. Par ailleurs, tous les prêts consentis par la BIC ont des résultats mesurables. Par exemple, lorsque nous prêtons de l’argent à un promoteur pour qu’il effectue des rénovations énergétiques, notre taux d’intérêt est lié au niveau d’efficacité énergétique atteint par le bâtiment. Tous nos emprunteurs doivent nous rendre compte des résultats obtenus.
Notre processus d’investissement commence à l’étape de l’engagement d’investissement, étape à laquelle nous signons une feuille de modalités et un protocole d’entente. Cet engagement donne aux promoteurs la confiance nécessaire pour développer leur projet en sachant qu’ils ont l’appui d’un prêt de la BIC.
Ensuite, nous passons à la clôture du financement, étape à laquelle nous signons une entente de prêt. Le promoteur peut alors puiser dans les fonds, faire des achats et commencer la construction. Nous continuons à verser des fonds tout au long de la construction, fonds qui sont remboursés pendant la durée de vie du bien.
Avant de conclure mes propos, honorables sénateurs, je tiens à prendre un instant pour vous parler de la complexité des projets d’infrastructure au Canada. Ils font intervenir de multiples intervenants — souvent des secteurs public et privé —, et il peut prendre de nombreuses années pour les réaliser, de la conception jusqu’aux négociations, à la structuration des ententes, au financement, aux approbations réglementaires, à l’obtention des permis, et enfin à la construction.
Pour les plus grands projets au Canada — pensez à la Transcanadienne jadis, à la boucle de l’Atlantique aujourd’hui ou au train à grande fréquence —, le processus peut prendre de nombreuses années. Bien que la construction des infrastructures canadiennes soit parfois difficile, elle est essentielle à la capacité du Canada d’atteindre ses objectifs climatiques, d’accroître sa productivité et de protéger sa qualité de vie.
Qu’il s’agisse d’investir dans le réseau électrique du Canada pour soutenir l’énergie propre, de bâtir un meilleur système de transport en commun pour relier les collectivités ou de construire des routes menant aux minéraux essentiels pour l’exportation, nous avons besoin d’infrastructures et nous en avons besoin maintenant. Or le gouvernement n’a pas les moyens de payer à lui seul toutes ces infrastructures. L’argent des contribuables est limité, d’où l’importance pour le secteur privé d’y mettre aussi du sien.
C’est là que la BIC intervient et joue un rôle unique dans l’accélération des investissements dans les infrastructures. Nous rendons l’investissement dans les infrastructures d’intérêt public plus attrayant pour les investisseurs privés et institutionnels en utilisant des outils financiers novateurs pour réduire les risques. La BIC n’est qu’un outil parmi tant d’autres. C’est pourquoi il est tout à fait logique que nous soyons ici aujourd’hui en compagnie de nos collègues du ministère de l’Innovation, des Sciences et du Développement économique, avec lesquels nous collaborons étroitement, ainsi que de nos collègues d’Infrastructure Canada, avec lesquels nous travaillons au quotidien. Les banques comme la BIC contribuent grandement à l’accélération du développement des infrastructures. L’Australie, l’Inde, les États-Unis, la Norvège et l’Afrique du Sud ont tous créé leur propre banque d’investissement dans les infrastructures.
Nous avons déjà pris 43 engagements d’investissement, et plus de 40 autres sont en préparation. Dès lors, je suis convaincu que notre élan se poursuivra, et je suis ravi de constater que cela signifie que nous comblons notre déficit d’infrastructure et nous améliorons la vie des Canadiens et des Canadiennes d’un océan à l’autre.
Merci.
[Français]
Le vice-président : Merci beaucoup, monsieur Cory. J’invite maintenant Mme Nathalie Bertrand à nous faire part de ses remarques.
[Traduction]
Nathalie Bertrand, sous-ministre adjointe et dirigeante principale des finances, Services ministériels, Infrastructure Canada :
Merci. Comme vous le savez déjà, je suis Nathalie Bertrand. Je suis accompagnée de mes collègues Erin Lynch, Gerard Peets, Glenn Campbell et Janet Goulding.
Notre ministère continue de travailler d’arrache-pied pour la population canadienne en investissant dans les infrastructures qui aident à bâtir des collectivités fortes, à lutter contre les changements climatiques et à stimuler l’économie. Je suis heureuse d’avoir l’occasion de discuter de notre travail et de vous informer de ce que nous avons accompli depuis notre dernière rencontre, ainsi que de nos investissements continus à l’appui d’un Canada fort, inclusif et résilient.
Nous travaillons avec tous les ordres de gouvernement, ainsi qu’avec les communautés autochtones et d’autres partenaires. Ces partenaires nous aident à présenter à la population canadienne de grands projets de ponts, des options de transport en commun carboneutre, des logements abordables et des mesures visant à éliminer l’itinérance au Canada. Nous contribuons à la rénovation de bâtiments publics tout en investissant également dans de nouveaux bâtiments communautaires verts et inclusifs. Nous investissons aussi dans les infrastructures durables liées à l’eau et aux eaux usées ainsi que dans les infrastructures naturelles. Nous améliorons la qualité de vie des Canadiens et des Canadiennes.
Je suis fière d’être ici pour vous faire part des détails du Budget principal des dépenses d’Infrastructure Canada pour 2022-2023. Le Budget principal des dépenses 2022-2023 d’Infrastructure Canada prévoit 9,3 milliards de dollars, la majeure partie de ce montant, soit 6,8 milliards de dollars, étant destinée aux subventions et aux contributions. Le montant restant comprend 242,7 millions de dollars pour les dépenses de fonctionnement, 13,8 millions de dollars pour les dépenses en capital et 2,3 milliards de dollars au total pour les postes législatifs, principalement pour le Fonds pour le développement des collectivités du Canada, ou le FDCC.
Le montant demandé dans le Budget principal des dépenses 2022-2023 représente une augmentation nette de 2,5 milliards de dollars par rapport au Budget principal des dépenses 2021-2022 du ministère. La majeure partie de cette augmentation est liée au financement des subventions et des contributions. Environ un quart de l’augmentation des subventions et des contributions est le résultat d’un nombre sans précédent de nouveaux programmes annoncés dans l’Énoncé économique de l’automne 2020 et le budget de 2021.
Parmi les programmes qui seront mis en œuvre dans les quelques années à venir, mentionnons le Programme pour les bâtiments communautaires verts et inclusifs; le programme de financement permanent des transports en commun; le Fonds pour les infrastructures naturelles; le travail avec les provinces et les territoires pour allouer les fonds dans le cadre du Programme d’infrastructure Investir dans le Canada, entre autres, dans des projets d’amélioration de la ventilation dans le cadre du volet Résilience à la COVID-19 du programme; et un supplément au Fonds d’atténuation et d’adaptation en matière de catastrophes.
[Français]
Les trois autres quarts de l’augmentation des subventions et des contributions sont destinés à des programmes existants tels que le Fonds d’infrastructure pour le transport en commun et le programme d’infrastructure Investir dans le Canada, ainsi que le financement de Vers un chez-soi : la stratégie canadienne de lutte contre l’itinérance.
L’augmentation des dépenses de fonctionnement de 86,3 millions de dollars comprend les ressources obtenues pour offrir de nouveaux programmes ainsi que le transfert mandaté au ministère des responsabilités de la Direction des politiques en matière d’itinérance du ministère de l’Emploi et du Développement social, dirigé par le ministre Hussen.
Le financement prévu par la loi a connu une augmentation de 8,4 millions de dollars liée aux exigences du régime d’avantages sociaux des employés, en raison de l’augmentation des ressources de fonctionnement et de l’ajout du salaire du ministre du Logement et de la Diversité et de l’Inclusion et de son allocation automobile.
Les dépenses en capital, quant à elles, représentent une diminution du financement des immobilisations de 52,4 millions de dollars par rapport au budget principal de 2021-2022, surtout en raison de l’arrivée à échéance du financement lié à l’achat de terrains dans le cadre du projet du pont international Gordie-Howe et du projet de corridor du pont Samuel-de Champlain.
Aller de l’avant avec nos programmes pour permettre la réalisation de nouveaux projets a suscité un nouvel enthousiasme à Infrastructure Canada et a été au cœur d’une année chargée et productive pour notre ministère. Nous sommes fiers du travail que nous accomplissons pour les Canadiens et du rôle que nous jouons pour favoriser une reprise solide, durable et inclusive.
Je serai heureuse de répondre à toutes vos questions sur notre travail et notre engagement envers les Canadiens. Merci.
Le vice-président : Merci, madame Bertrand. J’invite maintenant M. McConnachie à nous faire part de ses remarques.
Douglas McConnachie, sous-ministre adjoint et dirigeant principal des finances, Secteur de la gestion intégrée, Innovation, Sciences et Développement économique Canada : Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Honorables sénateurs, mesdames et messieurs, merci de m’avoir invité ici aujourd’hui pour discuter du Budget principal des dépenses 2022-2023 pour Innovation, Sciences et Développement économique, ou ISDE. Je voudrais commencer par reconnaître que nous nous réunissons sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinabe.
Puisque mes collègues ont déjà été présentés, je vais passer directement à ma déclaration.
Monsieur le président, Innovation, Sciences et Développement économique Canada, ou ISDE, joue un rôle central en favorisant l’investissement des entreprises, en encourageant l’innovation canadienne, en soutenant les entrepreneurs et les petites entreprises, et en stimulant la croissance dans des secteurs clés afin de préparer le Canada à relever les nouveaux défis mondiaux grâce à des programmes importants comme le Fonds stratégique pour l’innovation, le Programme canadien d’adoption du numérique et Solutions innovatrices Canada, pour ne nommer que ceux-là. Pour promouvoir une économie verte et durable, ISDE dirige la mise en œuvre de l’initiative Accélérateur net zéro et d’autres programmes visant à soutenir le développement et la commercialisation de nouvelles technologies propres.
En outre, ISDE apporte un soutien essentiel aux scientifiques et aux chercheurs dans des domaines émergents tels que l’intelligence artificielle et la science quantique. Il prépare également le Canada à faire face aux futures menaces pour la santé publique.
[Français]
La poursuite du déploiement du Fonds pour large bande universelle permettra aux Canadiens des régions rurales et éloignées d’avoir accès à l’Internet haute vitesse pour une meilleure participation à l’économie numérique. Le soutien d’Innovation, Sciences et Développement économique Canada (ISDE) à l’industrie du tourisme au moyen du Fonds d’aide au tourisme et de la nouvelle Stratégie fédérale de croissance du tourisme favorise également la croissance économique dans les collectivités d’un océan à l’autre.
[Traduction]
Par ailleurs, ISDE dirige la Stratégie de développement économique rural, qui contribuera à refléter les besoins des Canadiens et des Canadiennes habitant dans les régions rurales afin d’apporter des changements durables et considérables à la façon dont le gouvernement du Canada travaille à créer les conditions propices à la croissance, à la diversification et à la durabilité des régions rurales, comme les solutions de transport en commun, les services de santé mentale et le logement.
[Français]
Monsieur le président, j’aimerais maintenant donner un aperçu des autorisations d’ISDE selon le Budget principal des dépenses 2022-2023, ainsi que des principales augmentations qui ont été demandées dans les budgets supplémentaires.
Le Budget principal des dépenses 2022-2023 comprend 5,8 milliards de dollars en autorisations totales, ce qui représente une augmentation de 2,1 milliards de dollars par rapport à 2021-2022. Cette augmentation du financement est principalement attribuable aux nouvelles priorités qui ont été annoncées dans les budgets fédéraux précédents, car elles concernent les investissements dans le développement de technologies propres, la promotion de l’adoption du numérique par les entreprises, les possibilités d’apprentissage en cours d’emploi pour les étudiants du postsecondaire et le soutien aux entreprises canadiennes afin qu’elles puissent prospérer dans l’économie du savoir.
[Traduction]
Les augmentations les plus notables des autorisations d’ISDE comprennent un investissement de 444,5 millions de dollars pour soutenir l’initiative Accélérateur net zéro. Cet investissement sera fait par le biais du Fonds stratégique pour l’innovation afin de promouvoir les nouvelles technologies qui permettront au Canada de réduire ses émissions de gaz à effet de serre. Elles comprennent aussi la somme de 424 millions de dollars pour lancer le Programme canadien d’adoption du numérique. Ce programme fournira du financement, des outils et des ressources pour aider les entreprises canadiennes à adopter des plateformes de commerce électronique et à mettre en œuvre des plans de transformation numérique. À cela s’ajoutent 340,7 millions de dollars pour l’expansion du Fonds pour la large bande universelle. Ce financement accélérera le déploiement de services Internet haute vitesse dans les collectivités éloignées en vue d’atteindre l’objectif de brancher 98 % des Canadiens et des Canadiennes d’ici 2026. Ensuite, des contributions totalisant 170 millions de dollars seront versées à Mitacs pour élargir les possibilités d’apprentissage en milieu de travail pour les étudiants de niveau postsecondaire, les nouveaux diplômés et les boursiers postdoctoraux, afin de soutenir la reprise économique du Canada.
Monsieur le président, le budget prévoit aussi la somme de 124,2 millions de dollars pour aider Sanofi Canada à construire une installation de fabrication en vrac de vaccins contre la grippe et les pandémies à Toronto. Ces fonds seront versés par l’intermédiaire du Fonds stratégique pour l’innovation.
Enfin, 107,3 millions de dollars serviront à soutenir les entreprises canadiennes novatrices et riches en propriété intellectuelle afin d’assurer leur compétitivité à l’échelle mondiale et de contribuer à la croissance économique dans le cadre de la reprise après la COVID-19.
[Français]
De plus, monsieur le président, l’ISDE a demandé 61,6 millions de dollars supplémentaires dans le Budget supplémentaire des dépenses (B) et 23,5 millions de dollars dans le Budget supplémentaire des dépenses (C) pour améliorer divers programmes de subventions et de contributions de moindre envergure. Grâce à ces augmentations, aux affectations provenant des votes centraux du Conseil du Trésor et à d’autres ajustements techniques, ISDE prévoit terminer l’exercice 2022-2023 avec des autorisations totales de 5,9 milliards de dollars.
[Traduction]
En conclusion, j’aimerais réaffirmer l’engagement d’ISDE de maintenir des contrôles internes et des mécanismes d’établissement de rapports rigoureux pour assurer une saine gestion des fonds qui nous ont été confiés. Nous continuerons à travailler avec les Canadiens et les Canadiennes dans tous les domaines de l’économie et dans toutes les régions du pays afin d’améliorer les conditions d’investissement, d’augmenter le rendement du Canada en matière d’innovation, d’accroître la part du Canada dans le commerce mondial et de construire un marché équitable, efficace et concurrentiel.
[Français]
Monsieur le président, je tiens à remercier le comité de nous donner l’occasion de discuter ce sujet avec vous aujourd’hui.
[Traduction]
Mes collègues et moi répondrons volontiers à vos questions. Merci.
Le vice-président : Merci beaucoup pour vos déclarations.
[Français]
Maintenant, nous allons passer à la période de questions. J’aimerais souligner aux sénateurs qu’ils disposent d’un maximum de cinq minutes pour la première ronde et d’un maximum de trois minutes pour la deuxième ronde. Je vous demande donc de poser vos questions directement aux témoins et aux témoins de répondre de façon succincte puisqu’on est nombreux et que le sujet est très intéressant. La greffière m’avisera quand le temps sera écoulé.
[Traduction]
La sénatrice Marshall : Je remercie les témoins de leur présence. Mes premières questions s’adressent à M. Cory; elles concernent la Banque de l’infrastructure du Canada, ou la BIC. Deux sujets m’intéressent : votre plan de croissance, selon lequel la BIC investira 35 milliards de dollars d’ici 2028; et l’investissement privé.
D’abord, votre rapport annuel montre qu’à ce jour, la BIC a investi 4,9 milliards de dollars, dont 1,4 milliard de dollars en 2022. En lisant votre rapport annuel, on constate que vous vous attendez à ce que votre croissance augmente à un rythme accéléré au cours des prochaines années, mais ce n’est pas convaincant. Cela ne semble pas faisable. J’aimerais que vous nous expliquiez comment vous prévoyez d’atteindre votre objectif d’ici 2028.
Mon autre question porte sur l’investissement privé. J’étais membre du comité quand le ministre Morneau a déposé le projet de loi sur la Banque de l’infrastructure du Canada. Nous avons eu l’occasion de lui poser des questions. Il a répété à maintes reprises que chaque dollar investi par la Banque de l’infrastructure du Canada attirerait un investissement de 4 à 5 $ du secteur privé. M. Morneau insistait sur la participation des investisseurs privés. Or j’ai remarqué dans votre rapport annuel que vous parlez désormais des investisseurs privés et institutionnels. En fait, la majorité des investissements — pas ceux de la Banque de l’infrastructure du Canada, mais ceux qui proviennent des investisseurs institutionnels — comprennent très peu de contributions de la part de ce que je considérerais comme des investisseurs privés. Cela représente un virage important.
On nous avait promis de 4 à 5 $ d’investissements privés pour chaque dollar investi. Or, votre rapport annuel fait maintenant état d’un rapport d’un pour un, et ce n’est plus pour les investissements privés de la Banque de l’infrastructure du Canada. Vous avez regroupé les investissements privés et institutionnels, alors le rapport est d’autant plus réduit.
Pourquoi ne pas commencer par les investissements du secteur privé? Je suis curieuse. Comment votre organisation est-elle passée de l’engagement de l’ancien ministre Morneau, soit 4 ou 5 $ en investissements privés par dollar investi, à un rapport d’un pour un en mettant l’accent sur les investissements institutionnels? Comment en êtes-vous arrivés à ces chiffres?
Je me pose aussi cette question : pourquoi les investissements du secteur privé ne se sont-ils pas concrétisés? Que s’est-il passé? Qu’est-ce qui vous a forcé à changer de cap? Il doit y avoir une raison. Avez-vous analysé la situation? Pouvez-vous commencer par cette prémisse? Pourquoi sommes-nous passés d’un rapport de quatre pour un à un rapport d’un pour un?
M. Cory : Absolument. Je vous remercie beaucoup de la question, madame la sénatrice. Je vais vous répondre en suivant l’ordre de vos commentaires.
Tout d’abord, il importe grandement de préciser ce qu’on entend par capitaux privés et institutionnels, comme vous les avez mentionnés.
Nous croyons qu’il est très important d’attirer des capitaux de sources autres que l’assiette fiscale. Il est important de trouver des moyens de tirer parti du secteur privé. Les « capitaux institutionnels » renvoient aux grands fonds de retraite du Canada : la Caisse de dépôt au Québec, le Régime de retraite des enseignantes et des enseignants de l’Ontario ou l’Office d’investissement du régime de pensions du Canada, qui investissent dans des biens d’infrastructures partout dans le monde et qui, par le passé, n’ont pas investi au Canada. Cette réalité n’a pas changé. Depuis ses débuts, la Banque de l’infrastructure du Canada, ou BIC, a pour objectif d’investir dans des projets d’infrastructures.
Les capitaux privés et institutionnels sont regroupés parce que, bien que la définition des capitaux institutionnels diffère quelque peu, les deux types apportent le même avantage aux Canadiens. Il s’agit de sommes que nous ne soustrayons pas de l’assiette fiscale pour payer des projets d’infrastructures; elles s’ajoutent au total que nous faisons fructifier. À nos yeux, c’est une réussite totale. Nous percevons les capitaux privés et institutionnels en tant que caisse commune.
La sénatrice Marshall : Même si on considère ces deux sources comme une caisse commune, le rapport est tout de même passé de quatre pour un à un pour un. C’est ce qui pose problème.
M. Cory : Permettez-moi d’aborder ce volet de votre question. La question est fort importante, et on nous la pose souvent.
Au début de tout projet, notre mandat consiste à déterminer pourquoi il est bloqué et quelle est la plus petite somme que nous pouvons investir pour le débloquer. Habituellement, un projet est bloqué pour deux raisons : à cause des coûts ou parce qu’il comporte de grands risques. Nous y investissons donc des deniers publics pour le faire avancer.
On peut aborder les capitaux privés de deux façons. On peut penser à la somme investie la journée où nous octroyons notre prêt. Admettons que, pour un projet de 100 $, nous prêtons 50 $ et que les capitaux institutionnels privés atteignent le même montant. On arrive au rapport d’un pour un que vous mentionnez. C’est ce qui se produit au début d’un projet. Or, nous nous faisons rembourser. L’argent que nous avons consenti est un prêt. Contrairement à une subvention, les 50 $ fournis nous sont remboursés. Nous plaçons cet argent dans le projet suivant, puis celui d’après. Par conséquent, le rapport de capitaux privés augmente au fur et à mesure où notre argent est mis à contribution dans des projets.
Ce que l’ancien ministre Morneau vous a décrit — le concept d’une banque d’infrastructure et de ce rapport de 4 $ pour chaque dollar — représente toujours notre objectif à long terme. Alors que nous investissons notre argent, nos capitaux vont continuer de servir à des projets, ce qui attirera de plus en plus de capitaux privés.
La sénatrice Marshall : Mais c’est... mon temps est écoulé?
Le vice-président : Je suis désolé, sénatrice. Il ne vous reste plus de temps.
La sénatrice Marshall : Ajoutez-moi au deuxième tour de questions.
Le vice-président : Oui. Je vais vous ajouter au deuxième tour de questions.
[Français]
Le sénateur Gignac : Bienvenue à nos témoins et merci pour ce que vous faites pour doter le Canada d’infrastructures dignes du XXIe siècle et augmenter le PIB potentiel. Je vais poursuivre dans la foulée de ma collègue la sénatrice Marshall.
Monsieur Cory, vous avez fait le bilan du nombre de projets, d’engagements de 8,6 milliards de dollars, mais vous avez dit que cela représente un total de 25 milliards de dollars d’investissements au Canada qui n’auraient sans doute pas été réalisés sans la Banque de l’infrastructure du Canada. C’est une phrase importante. Donc, on nous ramène à l’idée que si vous n’étiez pas là, ces investissements ne seraient pas faits.
Ma question est la suivante : est-ce que c’est parce que vous acceptez un niveau de risque beaucoup plus élevé que celui que les fonds de pension et les autres institutions ne seraient pas prêts à accepter? Pouvez-vous étayer là-dessus, et donner un complément de réponse à la question de la sénatrice Marshall sur mon temps?
M. Cory : Absolument — merci pour la question. Je vais continuer en anglais pour mieux décrire mes points.
[Traduction]
Je suis vraiment ravi de la question parce que j’ai choisi mes mots à dessein quand j’ai dit : « Ces projets n’auraient pas été réalisés sans nous. »
Permettez-moi de vous donner un exemple parce que vous avez relevé, dans votre question, l’aspect le plus important : le risque.
Les projets d’infrastructures ont une longue durée de vie et sont empreints de beaucoup d’incertitude. Je vais m’appuyer sur un exemple réel : le développement de l’infrastructure de recharge pour les véhicules électriques au Canada en tant qu’investissement privé — je parle de ce qu’on appelle les bornes de niveau 3 — le long des autoroutes et dans les espaces publics, pas dans les entrées de cours des particuliers. Pour une entreprise, l’investissement comporterait beaucoup d’incertitudes : on ne sait pas à quelle vitesse se fera l’adoption des véhicules électriques, à quelle vitesse la chaîne d’approvisionnement des véhicules électriques rattrapera la demande, à quel rythme les consommateurs changeront de comportement et dans quelle mesure les automobilistes sont prêts à payer pour une charge lorsqu’ils se rendent au travail ou au chalet.
Les investisseurs privés aimeraient être actifs dans ce domaine. Or, s’ils entreprenaient un tel projet seuls, ils installeraient peut-être une seule borne, puis ils évalueraient le résultat pendant quelques années. Ils en installeraient ensuite cinq autres pour analyser la situation. C’est un processus qui avance à pas de tortue.
Notre pays s’est doté d’objectifs très ambitieux pour les véhicules électriques. La Banque de l’infrastructure du Canada offre aux promoteurs privés de leur consentir des prêts non pas pour une, cinq ou dix bornes par année, mais pour en installer 1 000 dès l’année suivante. Nul besoin de commencer à nous rembourser avant que l’utilisation des bornes soit suffisante pour réaliser des profits. Qu’importe si les profits commencent à être empochés dans deux, cinq ou sept ans : nos modalités sont très souples.
Bien entendu, les contribuables vont se faire rembourser. Nous prendrons cet argent pour l’investir dans un autre projet; ce pourrait être l’installation de bornes pour véhicules électriques ailleurs au pays, ou peut-être un projet de large bande ou dans un autre de nos secteurs. L’argent servira aux prochains projets d’infrastructures et attirera le prochain cycle de capitaux privés alors que nous nous faisons rembourser. Mais c’est cette prise de risques qui permettra de multiplier le nombre de bornes plus rapidement. La même réalité s’applique à l’énergie de quartier, au stockage dans les batteries, à l’hydrogène ou aux carburants propres. Tous ces secteurs connaissent le même problème et baigneront dans l’incertitude ou les risques pendant environ 10 ans. À long terme, les investissements pour ces projets s’avéreront très rentables. Je crois que le secteur privé en tirera des profits. Quand il commencera à encaisser des profits, il nous remboursera. Notre taux d’intérêt augmentera quand le secteur privé se mettra à faire de l’argent. De plus, nos modalités de paiement accélèrent afin que nous nous fassions rembourser. Nous prendrons cet argent et l’investirons dans un autre projet. J’espère avoir répondu à votre question.
[Français]
Le sénateur Gignac : Oui, merci, cela répond bien à ma question.
Je ne sais pas si vous aviez lu le rapport du directeur parlementaire du budget qui a comparu devant notre comité et qui exprimait des doutes sur votre capacité à remplir votre mandat de déployer 35 milliards de dollars sur une période de 11 ans. Doit-on s’attendre à une accélération marquée au cours des prochaines années? Cela fait déjà quatre ans — depuis le début de votre mandat, à moins que je me trompe — et je serais curieux de connaître vos réactions.
[Traduction]
M. Cory : Cela revient au sujet des 35 milliards de dollars; je vous remercie de me ramener à la question de la sénatrice Marshall.
Nous accélérons grandement le pas. Au cours des premières années de la BIC, nous n’avions que quelques engagements en matière d’investissement. Aujourd’hui, pour le plus récent exercice qui a pris fin le 31 mars dernier, nous avions environ 4 milliards de dollars d’engagements. Si nous continuons à ce rythme, nous atteindrons les 35 milliards de dollars d’ici 2027-2028.
C’est très important parce qu’il y a un décalage associé aux accords de prêts. Nous avons signé les documents de prêts. Nous avons engagé les fonds, mais les projets obtiennent l’argent au fil de la construction. Nous n’effectuons pas de paiements de transfert ou quoi que ce soit du genre. Nous sommes un prêteur. Les emprunteurs doivent fournir des reçus et démontrer la progression de la construction, parce que nous payons pour les infrastructures qui résultent du projet.
Il y a donc un décalage entre le moment où nous signons un engagement en matière d’investissement et le moment où l’argent est dépensé, lorsque les crédits sont octroyés. On parle d’un décalage de trois à cinq ans, parce que — comme le savent les sénateurs — c’est habituellement le temps requis pour réaliser les grands projets d’infrastructures.
Au moment où nous signons un accord, nous transmettons une estimation à nos collègues du ministère des Infrastructures et du ministère des Finances, évidemment. Il est vrai toutefois que l’octroi des fonds se fait souvent plusieurs années plus tard. Le directeur parlementaire du budget a tenu compte de l’argent sortant et a fait valoir que nous n’allions pas octroyer 35 milliards de dollars de crédits — en se fondant sur nos prévisions —, mais nous avons pris des engagements fermes en matière d’investissement; nous avons conclu des accords de prêts.
Le sénateur Smith : Monsieur Cory, la Banque de l’infrastructure du Canada devrait recevoir 1 milliard de dollars supplémentaires pour appuyer les projets d’infrastructures autochtones dans cinq domaines prioritaires, qui ont été désignés en 2021.
J’ai visité le Nunavut et je comprends la nature complexe de la construction et de l’entretien des infrastructures dans les régions éloignées et nordiques du Canada, notamment en raison de la courte saison de construction, du coût plus élevé des matériaux et du manque de main-d’œuvre qualifiée. J’aimerais comprendre comment la Banque compte relever ces défis afin de veiller à ce que les projets soient maintenus et à ce qu’ils répondent aux besoins de la communauté.
M. Cory : Je vous remercie pour votre question, sénateur Smith. Nous sommes fiers des progrès que nous avons réalisés dans le domaine des infrastructures autochtones. Il nous reste encore beaucoup de travail à faire; je comprends donc votre questionnement.
J’ai eu le plaisir de rencontrer le premier ministre du Nunavut la semaine dernière à Ottawa, de même que plusieurs sociétés de développement des territoires. Nous avons pu échanger au sujet de leurs priorités et des façons dont la BIC pouvait les aider.
Notre pays est vaste et les besoins en matière d’infrastructures sont importants, surtout si l’on pense à la route du commerce ouvert dans le passage du Nord-Ouest, à l’exploration et à l’exploitation des minéraux critiques, de même qu’à la façon d’amener l’énergie propre dans les régions nordiques et éloignées et d’assurer leur participation économique à la transition verte. Comme me l’a dit le premier ministre, nous devons abandonner le diésel, mais nous avons aussi une formidable occasion de fournir de l’énergie propre au reste du Canada, à partir du sud. Cela fonctionne dans les deux sens.
Je crois que le Nunavut a de grandes ambitions et qu’il veut assurer de meilleurs liens grâce aux câbles, aux réseaux de transport et à la large bande. Notre objectif est d’investir dans ces projets.
Vous avez posé une question essentielle au sujet de la sélection des projets. La BIC est un prêteur. Nous prêtons de l’argent aux emprunteurs afin qu’ils réalisent leurs priorités. Nous ne dictons rien. Le Canada ne dicte pas les besoins de la Colombie-Britannique, de la Saskatchewan ou du Nunavut en matière d’infrastructures. Nous travaillons avec eux pour comprendre leurs besoins. Chaque communauté autochtone est différente. Pour certaines, le plus grand défi est l’abandon du diésel. Pour d’autres, c’est d’avoir des installations de traitement des eaux usées qui fonctionnent. Notre travail consiste à établir un partenariat avec chacune d’entre elles pour répondre à leurs besoins en infrastructures.
Le sénateur Smith : Lorsque nous avons visité le Nunavut, on parlait de la défense et de ce qui se passait avec la Russie et la Chine, mais les gens disent aussi qu’il est important de nous placer dans une position défendable. Qu’en est-il des infrastructures de base dont nous avons besoin : l’eau, les routes et les autres infrastructures qui tardent à être mises en œuvre?
Une fois les projets complétés, il faut avoir sur place des personnes formées qui pourront les maintenir en marche. Est-ce que le gouvernement fédéral et les ministères discutent avec vous de la façon dont ces projets peuvent être soutenus et mis en œuvre de manière appropriée?
M. Cory : Je vais laisser M. Campbell vous parler du point de vue d’Infrastructure Canada dans un instant.
Pour chacun de nos projets, nous établissons un partenariat; nous sommes là pour appuyer les projets et non pour dicter la façon de les mettre en œuvre ou à qui ils s’adressent. Je dirai toutefois que nous nous faisons un devoir de comprendre quelle est la stratégie associée à la chaîne d’approvisionnement et à la capacité de la main-d’œuvre, parce que nous sommes un investisseur : nous nous attendons à faire un prêt et à ce qu’il nous soit remboursé. Il faut donc notamment comprendre comment entretenir les projets une fois qu’ils sont construits.
J’ai parlé tout à l’heure de la recharge des véhicules électriques. Il faut que ces chargeurs fonctionnent pendant 15 à 20 ans pour assurer un certain rendement. Il faut donc établir un plan d’entretien et que les chargeurs soient fiables, parce que les clients cesseront de les utiliser s’ils sont toujours en panne, ce qui a été un problème auparavant.
J’utilise cet exemple pour démontrer que la BIC se soucie de la construction des infrastructures, mais que le remboursement des prêts dépend du fonctionnement des actifs. Pour répondre à votre question, bien que nous ne dictions pas la stratégie de main-d’œuvre associée à un projet, notre rôle consiste à poser des questions sur l’entretien durable des infrastructures.
M. Campbell : M. Cory a évoqué deux points plus tôt. Il a parlé de la collaboration avec le gouvernement, et a fait valoir que la BIC n’était qu’un outil parmi d’autres.
Comme l’a dit Mme Bertrand, il y a un ensemble de programmes en place... non seulement à Infrastructure Canada, mais dans l’ensemble du portefeuille, notamment au ministère de l’Innovation, des Sciences et du Développement économique, pour la large bande, par exemple. Nous collaborons avec toutes les administrations afin de désigner leurs priorités individuelles et communes. Nous déterminons ensuite si le projet est admissible au financement en matière d’innovation, comme par l’entremise de la Banque de l’infrastructure du Canada, ou s’il sera plutôt visé par un programme de subventions et de contributions avec l’un de nos ministères. Nous misons beaucoup sur de telles collaborations. Nous tentons de jumeler les projets aux bons instruments.
Nous misons aussi beaucoup sur la capacité de la BIC de conseiller, de structurer les projets et de déterminer quel outil sera le plus approprié pour relever le défi.
Le sénateur Loffreda : Je remercie les témoins d’être avec nous ce matin.
Par le passé, le Comité national des finances a questionné la Banque d’infrastructure du Canada au sujet du calendrier de certaines transactions et de certains projets. Dans son plan d’entreprise de 2022-2023 à 2026-2027, la banque établit une cible de 500 millions de dollars pour les efforts d’accélération des projets, ce qui comprend l’accélération de l’examen de la diligence raisonnable de même que des activités de planification et de développement.
Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur l’accélération des projets et la façon dont ces efforts vous permettront d’atteindre votre objectif de raccourcir les chemins critiques menant à la construction et de livrer les infrastructures plus rapidement?
M. Cory : Je vous remercie beaucoup pour votre question; elle est importante.
Comme le savent les sénateurs, à l’automne 2020, la BIC a créé son plan de croissance. Comme l’ont fait valoir le sénateur et d’autres membres du comité dans leurs questions, au cours de ses premières années d’existence, la BIC a fait un grand travail de préparation.
Le développement de grands projets d’infrastructures se fait souvent sur une longue période. Pour vous donner un exemple extrême, j’ai lu des études des années 1970 qui parlaient du projet de train à grande vitesse et à grande fréquence dans le corridor entre Québec et Windsor.
Les projets d’infrastructures restent souvent coincés à la phase de planification et de développement pendant de longues périodes. Au cours des premières années de la BIC, nous avons effectué beaucoup de travail sur le terrain : nous avons parlé aux représentants des municipalités, des provinces, des territoires, des communautés autochtones et du secteur privé de notre ensemble de projets et d’autres.
Nous avons toutefois constaté qu’il y avait un réel problème — comme c’est le cas avec l’exemple extrême que je viens de vous donner — parce que les projets restaient pris à l’étape de la planification et de l’examen de la diligence. On était face à un scénario de l’œuf ou la poule : nous voulions procéder au travail d’approbation réglementaire, mais pour ce faire, il fallait savoir combien de personnes utiliseraient le système, quels seraient les revenus potentiels, quels seraient les coûts réels... On pouvait tourner en rond pendant des années.
À l’automne 2020, la BIC a établi son plan de croissance, qui visait un investissement de 500 millions de dollars dans le but de faire avancer ces projets — habituellement par l’entremise de coinvestissements avec la province, le territoire ou une société privée —, de répondre à ces questions clés et de déterminer le coût réel des projets, pour ensuite passer à l’étape de l’approbation réglementaire. Parfois, les longs délais de livraison sont la cause du blocage.
Je suis heureux de dire que nous avons obtenu des résultats. Par exemple, nous avons travaillé avec plusieurs gouvernements à des projets de transport en commun afin de mieux comprendre quel serait le volume de passagers, par exemple — surtout dans le monde de l’après-pandémie —, quel serait le potentiel de développement dans les alentours, et quels sont les capitaux du secteur privé qui pourraient y être investis. Nous avons effectué ce genre de travail pour faire avancer le plus de projets possible. C’est à cela que servent les fonds d’accélération.
Le sénateur Loffreda : Merci. En ce qui a trait aux progrès et à la transparence, est-ce qu’il serait possible d’intégrer l’évaluation de la progression des projets à la section des rapports consacrée aux résultats, de sorte que les Canadiens aient facilement accès à cette information?
M. Cory : C’est une très bonne question. La BIC est encore toute jeune. La question de la sénatrice Marshall portait sur notre courbe de croissance.
La Banque a été créée en 2017. Nos premiers employés ont commencé à travailler en 2018. Nous en sommes maintenant à un point où les projets débloquent. Par exemple, à Edmonton, tous les autobus que nous avions achetés sont maintenant sur la route; au sud du Manitoba, les 10 000 premièrement maisons de communautés rurales qui n’avaient toujours pas Internet haute vitesse ont été branchées.
Voilà donc où nous en sommes. Nous créons ce que nous appelons nos capacités de gestion des actifs — et c’est notamment l’équipe de Mme Jeorg qui en est responsable — nous permettant de suivre les progrès et les résultats à la suite d’un prêt, et de gérer son remboursement.
Donc oui, sénatrice, nous serons de plus en plus transparents au fil des années.
Le sénateur Loffreda : Merci.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Ma question s’adresse à Mme Bertrand.
Madame Bertrand, j’ai de la difficulté à comprendre pourquoi un projet comme celui de la Banque de l’infrastructure du Canada est un projet à budget variable. Quand on établit un budget, on le réalise, plutôt que de jouer avec les chiffres en cours de route. Comme vous le savez, le gouvernement a de la difficulté à nous soumettre pour approbation un budget complet pour l’année en cours. C’est ce qu’on a compris grâce au directeur du budget. Permettez-moi d’être sceptique quant à la réalité des chiffres qui nous ont été soumis.
Si le projet d’Infrastructure Canada est tel qu’on le mentionne et s’échelonne sur une période de 11 ans, donc jusqu’en 2028, est-ce qu’on doit s’attendre à des ajustements annuels de budget pour chacune des prochaines années?
Mme Bertrand : Merci beaucoup pour la question.
Je crois qu’on peut se référer à notre Programme d’infrastructure Investir dans le Canada qui s’échelonnait sur une période de 11 ans. Infrastructure Canada expérimente des embûches semblables à celles de la Banque du Canada sur —
[Traduction]
Il y a parfois certains retards associés aux projets, ou des projets qui devaient être terminés après un certain nombre d’années et qui ne le sont pas, pour diverses raisons. On parle ici de projets de plusieurs milliards de dollars associés à des stratégies d’approvisionnement complexes. Certains retards sont attribuables au climat canadien et à des enjeux associés à la chaîne d’approvisionnement mondiale.
Il est important de comprendre qu’une fois qu’un projet est approuvé, l’activité économique peut commencer immédiatement et le projet peut être mis en branle. Nous remboursons le bénéficiaire uniquement après avoir reçu leurs demandes. Il y a parfois un écart entre la construction d’un projet et le moment où Infrastructure Canada le rembourse.
Bien sûr, nous voulons financer les projets. Il est important pour les bénéficiaires de comprendre que même si un projet n’est pas terminé à temps, les fonds qui n’ont pas été utilisés au moment prévu sont reportés aux années suivantes, afin qu’ils puissent être octroyés une fois le projet complété.
[Français]
Le sénateur Dagenais : J’aurais maintenant une question pour M. McConnachie.
Les projets de déploiement d’Internet dans les territoires éloignés — notamment en Arctique, où on dirait que les déficiences en matière de sécurité sont devenues évidentes ces derniers jours — semblent avoir de la difficulté à se concrétiser. Est-ce que, dans certains cas, on fait des investissements qui ne seront pas concrétisés et si oui, lesquels? Pourriez-vous nous donner un aperçu des projets en cours et du temps que cela prendra pour que ces projets se réalisent?
M. McConnachie : Merci pour la question. Je vais laisser mon collègue M. Dagenais répondre.
Eric Dagenais, sous-ministre adjoint principal, Secteur du spectre et des télécommunications, Innovation, Sciences et Développement économique Canada : Merci. En ce moment, il y a 250 projets qui ont été annoncés. Ils sont financés par le Fonds pour la large bande universelle. Il y en a quelques-uns qui sont dans les territoires arctiques. Pour l’instant, tous les projets vont de l’avant. Aucun projet, à ma connaissance, n’a été retiré. Notre objectif est que 98 % des foyers canadiens soient branchés à une vitesse 50/10 d’ici 2026. Selon les projets qui ont été identifiés jusqu’à présent, nous sommes certains d’atteindre cet objectif et même de le dépasser un petit peu. Est-ce que ça répond à votre question?
Le sénateur Dagenais : Pourquoi ne sépare-t-on pas dans vos budgets les investissements pour la bande large et l’Internet à haute vitesse, entre autres dans les territoires ruraux et éloignés? Ne serait-il pas plus logique d’avoir tout cela sur la même table de travail quand on sait que les projets informatiques peuvent parfois être compliqués et coûteux?
M. McConnachie : Merci pour la question, monsieur le sénateur.
Je crois que c’est vraiment une question de terminologie quand on parle de projets à haute bande et à large vitesse, et c’est toujours le Fonds pour la large bande universelle, effectivement, dont M. Dagenais vient de parler.
M. Dagenais : Il y a peut-être deux éléments, parce qu’il y a aussi le programme Brancher pour innover.
Donc, on avait au départ le programme Brancher pour innover, qui branche les foyers et se termine en ce moment même, et ensuite, il y a eu le Fonds pour la large bande universelle. Cependant, c’est la même équipe qui gère les deux fonds, donc il y a une intégration sur ce plan.
[Traduction]
La sénatrice Bovey : Je vous remercie tous de vos exposés.
Je voudrais revenir sur quelques idées qui ont été mises de l’avant et que nous n’avons pas encore examinées.
Madame Bertrand, vous avez mentionné l’objectif de lutter contre les changements climatiques, les enjeux liés aux changements climatiques et la nécessité de stimuler l’économie. Vous avez parlé de la qualité de vie. Vous avez mentionné le Fonds pour le développement des collectivités au Canada. Monsieur McConnachie, je crois que c’est vous qui avez évoqué le tourisme et la stratégie de croissance du tourisme. Je soutiens que les infrastructures culturelles sont d’une importance capitale pour atteindre tous ces objectifs, et plus encore, notamment au chapitre de la réconciliation. Quels fonds avez-vous prévus pour les infrastructures culturelles, les musées, les galeries, les théâtres? Je sais qu’un grand nombre de ces organisations ont communiqué avec vous, et je suis bien consciente que certaines d’entre elles n’ont même pas eu de réponse, et encore moins de financement. Je sais aussi qu’Infrastructure Canada a un volet culturel. Je me demande si c’est également le cas pour la Banque de l’infrastructure du Canada, ou le ministère de l’Innovation, des Sciences et du Développement économique, à l’instar de vos programmes, je crois. Le travail qu’accomplissent ces organisations au sein de nos collectivités est absolument essentiel pour la réconciliation et la croissance du tourisme. D’ailleurs, j’ai participé samedi à un groupe d’experts internationaux pour parler de la culture et des changements climatiques. Je pense que les objectifs et les capacités sont importants.
Si vous disposez de fonds à cet égard, quel montant a été investi et quels types de projets ont été financés? Si ce n’est pas le cas, j’aimerais savoir pourquoi. Madame Bertrand, nous pourrions peut-être commencer par vous. S’il reste du temps, M. McConnachie ou M. Cory pourront également répondre.
Mme Bertrand : Je vais céder la parole à ma collègue, Erin Lynch.
Erin Lynch, sous-ministre adjointe déléguée, Direction générale des programmes des collectivités et des infrastructures, Infrastructure Canada : Je vous remercie beaucoup de la question.
Nous avons une série de programmes qui appuient différents objectifs, et l’un d’entre eux est le Programme d’infrastructure Investir dans le Canada. Ce programme comporte cinq volets, dont l’un concerne les infrastructures culturelles, communautaires et récréatives. Ce volet, qui vise à attribuer des fonds aux provinces et aux territoires en vue d’atteindre ces objectifs, a permis de financer une gamme de projets.
Nous avons également le Programme pour les bâtiments communautaires verts et inclusifs, qui vise à financer les infrastructures publiques des bâtiments communautaires, dans le but d’atteindre notre cible d’efficacité énergétique et nos objectifs climatiques en matière de carboneutralité. Ce sont deux de nos principaux programmes qui investissent dans ces domaines.
La sénatrice Bovey : Permettez-moi de creuser encore un peu la question. Je suis bien consciente que les projets que j’ai à l’esprit ont répondu à ces préoccupations. Êtes-vous en contact avec les gens qui ont fait des demandes? Je sais que plusieurs d’entre eux n’ont pas eu de réponse, pas même un « non, merci, vous n’êtes pas admissibles »; il n’y a eu rien de tel. Si nous tenons à améliorer la qualité de vie dans nos collectivités... Je peux vous dire aussi que les projets que j’ai en tête ont plus que respecté leurs engagements pour le financement du secteur privé, et nous avons parlé de projets qui restent bloqués en raison des coûts, par exemple. Ces projets se trouvent dans une impasse parce qu’on ne règle pas le problème de l’œuf et de la poule, même si — et je songe à un cas particulier, survenu il y a trois ans — les exigences de contribution publique sont respectées. Je me demande quels sont vos protocoles lorsque vous recevez ces demandes. Pourquoi est-il difficile pour les gens de vous rencontrer? Ils n’ont pas besoin de venir me voir. Ce n’est pas moi qui tiens les cordons de la bourse. Pouvez-vous me donner des précisions à ce sujet afin que je puisse reprendre contact avec eux et leur dire ce qu’ils doivent faire comme prochaine étape?
Mme Lynch : Je vous remercie beaucoup de la question. Oui, absolument, nous essayons de nouer un dialogue avec les intervenants et les demandeurs, et je suis désolée d’apprendre que certains ont éprouvé des difficultés à cet égard. Par exemple, dans le cadre du Programme pour les bâtiments communautaires verts et inclusifs — il s’agit d’un programme de demande directe —, nous travaillons directement avec les bénéficiaires qui présentent leurs demandes au ministère. Nous avons une équipe qui mène des activités de sensibilisation auprès des intervenants, en plus de rencontrer les candidats potentiels et de les guider tout au long du processus. Nous organisons des webinaires pour fournir des renseignements. D’ailleurs, à cet égard, nous avons lancé il y a quelques mois un appel de demandes jusqu’à la fin du mois de février. Nous avons diffusé de l’information dans le cadre de nos webinaires, qui ont attiré environ un millier de participants, et nous avons rencontré des centaines de personnes pour répondre à leurs questions. Nos coordonnées se trouvent sur notre site Web. Les gens ne devraient pas hésiter à communiquer avec notre personnel à ce sujet.
En ce qui concerne les programmes comme le Programme d’infrastructure Investir dans le Canada, les fonds sont attribués par l’entremise des provinces et des territoires; ce sont donc eux qui nous présentent les projets. Cela dit, nous sommes toujours heureux de rencontrer et de discuter avec tout intervenant ou demandeur potentiel.
La sénatrice Bovey : Avez-vous songé à obtenir les demandes sans passer par les provinces? Il arrive souvent que les provinces — et j’ai dirigé de telles institutions pendant des années — attendent un engagement fédéral avant de débloquer des fonds. C’est là que bon nombre de ces projets se retrouvent coincés dans le scénario de l’œuf et de la poule. Je me demande s’il y a moyen de revoir cela. Je sais que les villes peuvent présenter un ou peut-être deux projets. La demande est énorme. Il y a là quelques nuances qui, selon moi, sont absolument nécessaires.
Mme Lynch : Tout à fait. Je vous remercie de la question.
Nous avons le Programme d’infrastructure Investir dans le Canada, qui, je le répète, est administré par l’entremise des provinces et des territoires. Nous avons également une série de programmes de demande directe dans le cadre desquels les organisations, les municipalités et les communautés autochtones peuvent s’adresser directement à Infrastructure Canada; on peut donc présenter des demandes directement au titre de ces programmes. Il s’agit du Programme des bâtiments communautaires verts et inclusifs, du Fonds d’atténuation et d’adaptation en matière de catastrophes et du Fonds pour les solutions de transport en commun en milieu rural. Voilà des exemples de fonds qui sont offerts en ce moment pour répondre à ce besoin.
La sénatrice Pate : Merci beaucoup, à vous tous, de votre présence.
Je tiens à remercier tout particulièrement Infrastructure Canada d’avoir fourni... Nous avons reçu en octobre dernier 28 réponses aux questions qu’un certain nombre d’entre nous avaient posées, notamment sur l’itinérance — et surtout l’itinérance autochtone — et le lien avec les objectifs de développement durable. Nous en vous remercions donc infiniment.
Comme vous le savez, la vérificatrice générale du Canada a publié en novembre un rapport sur l’itinérance chronique, et l’une des observations formulées était que, malgré l’investissement d’environ 1,36 milliard de dollars par Infrastructure Canada entre 2019 et 2021 pour prévenir et réduire l’itinérance, on ne savait pas si cet investissement avait entraîné une augmentation ou une diminution de l’itinérance. Je comprends le décalage, qui a déjà été expliqué, mais je suis curieuse de savoir ce que fait Infrastructure Canada pour non seulement s’assurer que vous tenez compte des conclusions de cet audit, mais aussi pour voir si d’autres mesures sont prises — notamment par la Banque de l’infrastructure du Canada — pour lutter contre l’itinérance.
J’ai également une question complémentaire afin que vous puissiez fournir une réponse complète. Le budget de 2022 comprenait plusieurs initiatives axées sur l’itinérance, en plus de prévoir des fonds pour effectuer des recherches sur les mesures susceptibles de réduire davantage ou d’éliminer complètement l’itinérance chronique. Je suis curieuse de savoir comment ces recherches ont influé sur le travail que vous allez accomplir, quelle en est l’incidence sur les investissements qui seront faits et quelles recherches supplémentaires doivent être menées, d’après vous, pour favoriser ce processus.
Mme Bertrand : Merci beaucoup de votre question, madame la sénatrice. C’est ma collègue, Janet Goulding, qui pourra vous répondre.
Janet Goulding, sous-ministre adjointe, Direction générale des politiques et des programmes destinés aux collectivités, Infrastructure Canada : Je vous remercie, madame la sénatrice, de votre question.
Oui, en ce qui concerne l’audit réalisé par le Bureau du vérificateur général, la vérificatrice générale a souligné qu’au moment de l’audit, nous n’avions pas recueilli toutes les données concernant les résultats du programme. La collecte des données a été retardée à cause de la pandémie de COVID-19, et nos données proviennent des organisations communautaires qui fournissent des services directement aux sans-abri.
Depuis, nous avons reçu plus de 98 % des données qui manquaient au moment de l’audit, et nous savons que 32 000 personnes ont été placées dans un logement plus stable au cours des deux premières années du programme. Plus de 62 personnes ont bénéficié de mesures de prévention de l’itinérance, comme l’aide au loyer, la médiation auprès des propriétaires ou la médiation familiale. Près de 19 000 personnes ont reçu une aide au revenu, plus de 4 500 personnes ont entamé de nouveaux programmes de formation professionnelle, plus de 7 000 personnes ont commencé un nouvel emploi rémunéré et plus de 4 500 personnes ont commencé un nouveau programme d’éducation grâce à ce financement. La moitié du montant total de 1,36 milliard de dollars a été consacrée aux mesures de lutte contre la COVID-19. Nous savons, par exemple, que ce financement a permis de créer près de 18 500 places d’hébergement temporaire en réponse à la pandémie, et il a eu plus de 136 000 placements dans des logements temporaires pour appuyer les mesures de distanciation sociale et de mise en quarantaine conformément aux directives concernant la COVID-19. Nous disposons de ces données et nous pourrons certainement vous les faire parvenir plus tard.
Pour ce qui est de la question sur les recherches, je crois que vous faisiez allusion aux 18 millions de dollars que nous avons reçus dans le cadre du budget de 2022 pour effectuer ce que nous appelons la « recherche-action ». Il s’agit d’aider à comprendre ce qu’il faut faire de plus pour s’attaquer au problème de l’itinérance chronique et y mettre fin.
Ce que nous savons, à l’échelle fédérale, c’est que la stratégie de lutte contre l’itinérance Vers un chez-soi porte ses fruits, mais cela ne suffit pas à résoudre le problème de l’itinérance chronique. Nous devons travailler en étroite collaboration non seulement avec la Société canadienne d’hypothèque et de logement, mais aussi avec nos homologues provinciaux et territoriaux, ainsi qu’avec les municipalités et les intervenants communautaires. Comme vous pouvez l’imaginer, les causes de l’itinérance sont complexes, et nous devons comprendre les problèmes de santé mentale et de toxicomanie. Le soutien du revenu est d’une grande importance.
Ce que nous avons l’intention de faire avec cet argent pour la recherche-action, c’est de sélectionner jusqu’à 10 endroits dans l’ensemble du pays. Nous voulons comprendre en profondeur ce qu’il faut faire pour rassembler les partenaires communautaires nécessaires pour vraiment résoudre certains des problèmes systémiques. Quand nous parlons de problèmes systémiques, nous pensons aux enfants qui ne sont plus pris en charge en raison de leur âge et aux difficultés liées aux services sociaux, qui relèvent, bien entendu, des provinces et des territoires. Nous tenons également compte de la planification de la transition pour les personnes qui sortent d’un hôpital ou d’un établissement correctionnel. Nous avons l’intention d’effectuer des recherches approfondies pour nous renseigner sur ces questions et pour transmettre l’information à toutes les collectivités du Canada afin qu’elles comprennent ce qu’il faut faire de plus pour mettre fin à l’itinérance chronique.
La sénatrice Pate : Avant la séance, j’ai assisté à une réunion sur la pauvreté chez les enfants, et l’une des questions dont nous avons parlé est celle des enfants qui quittent le foyer et de certains des travaux effectués à l’échelle internationale. Je me demande quel genre d’interaction existe entre... Par exemple, vous venez de mentionner la sécurité du revenu. Le pays de Galles a mis au point un programme pour les jeunes en période de transition vers l’indépendance. En outre, de nombreuses organisations non gouvernementales, ainsi que la société civile, se penchent sur ces questions. Je suis curieuse de savoir quelle est l’interaction avec ces groupes. Soit dit en passant, oui, j’aimerais recevoir les données auxquelles vous faisiez allusion.
Mme Goulding : Je vous remercie beaucoup de la question. Pour ce qui est des exemples internationaux, nous nous inspirons beaucoup du Royaume-Uni et de l’Australie, mais je ne suis pas au courant du travail dont vous venez parler concernant le pays de Galles. Je vais certainement me renseigner là-dessus.
Nous mettons davantage l’accent sur la mobilisation communautaire ici, au Canada. L’itinérance est très tributaire des lieux où elle se manifeste, et les défis qui se posent dans les collectivités varient d’un bout à l’autre du pays. Bon nombre des bénéficiaires de notre financement sont des organisations communautaires sans but lucratif. En Ontario, on compte également quelques municipalités parmi les bénéficiaires, et c’est surtout une façon de coordonner notre financement avec le financement provincial parce que c’est ainsi que cela fonctionne en Ontario.
Cela dépend donc vraiment beaucoup du contexte, madame la sénatrice, mais nous cherchons absolument à faire participer la société civile, les municipalités, les provinces et territoires et les partenaires autochtones à toutes ces discussions, car il faut que tous ces acteurs communautaires soient présents à la table pour comprendre ce qu’il faut faire en vue d’enrayer l’itinérance chronique.
[Français]
La sénatrice Moncion : Ma question s’adresse à M. McConnachie et porte sur la reddition de comptes. Vous avez parlé du Fonds stratégique pour l’innovation. Je voudrais savoir quel genre de reddition de comptes vous demandez des groupes en science avec qui vous investissez pour vérifier l’atteinte des objectifs.
M. McConnachie : Merci pour la question. Je me tourne vers ma collègue Mme Kaminsky, qui est responsable du programme.
Mme Kaminsky : Merci pour la question. Le fonds stratégique est un grand fonds avec plusieurs objectifs. Il y a les programmes pour le changement climatique, le fonds pour aider les PME et des fonds plus généraux pour l’attraction des mandats internationaux.
[Traduction]
À mesure que nous gérons notre programme et que nous évaluons les projets en fonction d’un large éventail d’objectifs, nous continuons de recevoir des demandes, mais en coulisses, nous réorientons en quelque sorte le tout. Il y a, derrière nous, un tas de comités et de mécanismes qui évaluent les différents types de projets, le niveau de financement et les types de financement qui peuvent être nécessaires.
J’ai pris note des questions posées plus tôt sur la collaboration entre les projets. Cela fait également partie de notre stratégie : nous servons de tremplin vers tout programme gouvernemental, car nous faisons partie d’Innovation Canada. Nous essayons de travailler avec les entreprises qui ont besoin de programmes, qu’il s’agisse d’infrastructures ou d’un programme de recherche et développement à petite échelle du Conseil national de recherches, à titre d’exemple. Nous examinons chaque projet dans son intégralité et nous déterminons la place qu’il occupe dans notre écosystème. Lorsque nous évaluons un projet et que nous concluons qu’il s’agit d’un bon projet pour, disons, le Fonds stratégique pour l’innovation parce qu’il répond à nos objectifs et parce que le client propose quelque chose de raisonnable, nous devons alors tenir compte des objectifs de notre programme : accélérer l’innovation économique et les avantages publics pour le Canada. Nous examinons l’entreprise concernée et nous évaluons les ressources dont elle dispose et celles dont elle a besoin. Le projet fait-il intervenir une province? L’entreprise bénéficie-t-elle de mesures fiscales comme les crédits d’impôt pour la recherche scientifique et le développement expérimental? Ce n’est qu’ensuite que nous proposons un montant de financement au demandeur.
On regarde donc l’ensemble des objectifs du Fonds stratégique pour l’innovation, et pour passer des grands objectifs généraux au projet particulier, nous examinons tous ces aspects et nous nous efforçons de faire en sorte que le projet du client réussisse.
La sénatrice Moncion : Je comprends cela. Donc, la seule façon pour vous d’évaluer l’argent versé, c’est à la fin lorsque vous approuvez le projet? Vous dites que vous leur donnez, disons, un demi-million de dollars, et c’est comme cela que vous allez évaluer...
[Français]
— l’atteinte de vos objectifs. Ce que je vous demande, c’est le contraire. Quelle sorte de reddition de comptes vous fait cette entreprise qui a reçu de l’argent pour assurer que le travail a été accompli et que l’argent a bel et bien été utilisé pour ce projet?
[Traduction]
Mme Kaminsky : J’aimerais vous donner une réponse simple au sujet du calcul, mais il n’y en a pas, parce que nous nous efforçons d’être souples avec l’entreprise afin de maximiser les retombées des fonds dont nous disposons pour financer autant de projets que possible, mais aussi afin de placer chaque projet sur la voie de la réussite. C’est pour cette raison que nous gérons le programme en passant par de multiples étapes et que nous accompagnons l’entreprise ou le bénéficiaire étape par étape dans le projet.
Par exemple, le montant maximal que nous accordons par projet est de 50 %. Quand les dirigeants d’une entreprise viennent nous voir au début, beaucoup demandent automatiquement le 50 %. Pourquoi pas? Ensuite, nous examinons le projet et nous procédons à une évaluation. Nous examinons leurs bilans financiers, le financement obtenu jusqu’ici, le fond de fonctionnement disponible qu’ils peuvent recycler, puis nous négocions avec eux. Nous allons discuter avec la province pour savoir si elle veut participer au projet, qu’il s’agisse d’Investissements Ontario ou d’un autre programme au pays, afin de pouvoir accorder le minimum de fonds publics, mais suffisamment pour mettre l’entreprise sur la voie de la réussite et de pouvoir produire les résultats possibles.
Notre participation dans l’ensemble d’un projet peut varier grandement. Les investissements vont de milliards de dollars... et je pense ici à l’investissement de plus de 7 milliards de dollars de BHP dans la mine de potasse en Saskatchewan. Nous avons versé 100 millions de dollars à ce projet. Dans d’autres cas, par exemple une petite entreprise ou une entreprise où il se fait beaucoup de R-D, nous pouvons aller jusqu’à 50 % d’un projet de moindre envergure. Nous pouvons leur verser 10 millions ou 20 millions de dollars, mais cela équivaut à 50 % du montant total des investissements.
Le sénateur Boehm : Je m’excuse d’être arrivé en retard.
Je pose la question suivante à titre de sénateur établi à Ottawa. Le 19 janvier, la ministre Mona Fortier et le maire d’Ottawa Mark Sutcliffe ont annoncé une contribution de 350 millions de dollars en fonds fédéraux pour l’achat de 350 autobus zéro émission afin de remplacer ceux fonctionnant actuellement au diésel qu’utilise OC Transpo et pour installer l’infrastructure de recharge nécessaire.
Le service de transport en commun d’Ottawa, OC Transpo, veut se doter d’une flotte complète d’autobus zéro émission d’ici 2036. L’investissement d’Infrastructure Canada vient s’ajouter au prêt de 380 millions de dollars de la Banque de l’infrastructure du Canada accordé en août 2022 pour contribuer au financement d’un nombre d’autobus zéro émission d’OC Transpo pouvant atteindre 446 d’ici 2027.
Comme le financement d’Infrastructure Canada est plus récent, ma question s’adresse d’abord à ses représentants, mais les représentants de la Banque de l’infrastructure du Canada pourraient aussi vouloir répondre. Je suis conscient qu’il peut y avoir des problèmes de compétences, mais pour dire les choses franchement, l’achat et le fonctionnement du train léger sur rail ont été pour la Ville d’Ottawa et ses habitants un fiasco important.
Le gouvernement fédéral a-t-il attaché des conditions particulières à son investissement pour s’assurer que ces centaines de millions de dollars vont servir à financer une flotte d’autobus zéro émission fiable qui est adaptée au climat d’Ottawa et à ses différentes saisons? J’ai lu quelque part que les batteries perdent de leur puissance quand le thermomètre descend sous zéro. À combien s’élèvent les investissements d’Infrastructure Canada dans des autobus zéro émission dans d’autres municipalités?
Mme Lynch : Je vous remercie de la question, sénateur. C’est le cas, en effet. Lorsque nous investissons dans un projet, nous avons un accord de contribution dans lequel sont établies les conditions que doivent respecter les promoteurs qui sont responsables de la gestion du projet.
Pour ce qui est du financement que nous offrons pour les autobus zéro émission, nous avons le Fonds pour le transport en commun à zéro émission de 2,75 milliards de dollars qui vise à faciliter l’achat d’autobus pour le transport en commun ou le transport scolaire partout au pays. Je crois que nos investissements dans le cadre de ce fonds jusqu’à maintenant s’élèvent à environ 500 millions de dollars, et cela continue. Il y a un volet planification et un volet capitaux, et nous encourageons les intéressés à bien planifier pour avoir des projets solides et une bonne gestion de projet. Nous coordonnons le tout avec la Banque de l’infrastructure du Canada.
M. Cory : Si je peux me permettre, sénateur, j’aimerais ajouter quelque chose.
Je pense que les autobus zéro émission sont, en fait, un bon exemple de la complémentarité de différentes composantes de la boîte à outils. Nous travaillons en étroite collaboration pour ce qui est de nos prêts et des subventions du Fonds pour le transport en commun à zéro émission. Ottawa en est un bon exemple.
Quand une municipalité — accordez-moi un instant — veut passer à une flotte électrique, elle doit faire, comme vous l’avez mentionné, trois choses. Elle doit acheter une foule de nouveaux autobus électriques, elle doit installer l’infrastructure de recharge nécessaire, et elle doit procéder aussi à toutes sortes de ce que j’appellerais des investissements dans l’infrastructure de base, c’est-à-dire de nouveaux garages, de nouvelles installations d’entretien, car l’entretien d’un autobus électrique ne se fait pas de la même chose qu’un autobus au diésel. On ne fait plus de changements d’huile, mais on doit procéder à des vérifications électriques presque quotidiennement. Il faut donc réaménager un peu le garage. Les investissements servent, bien sûr, à l’achat des autobus, mais aussi à mettre en place toute l’infrastructure nécessaire à leur fonctionnement.
Quand une municipalité songe à faire la transition, elle ira d’abord frapper à la porte de la Banque de l’infrastructure du Canada. Nous allons leur accorder un prêt, et le calcul est très facile à faire. Nous déterminons combien d’argent elle va épargner au cours des 10 ou 12 prochaines années en utilisant ces autobus sans avoir à acheter de diésel et à faire des changements d’huile, alors les coûts d’entretien chutent, tout comme, bien sûr, les coûts du carburant. Nous pouvons déterminer le montant d’un prêt pour la Ville d’Ottawa, par exemple, en nous basant sur ces économies.
Dans le cas d’Ottawa, nous avons conclu une entente de prêt pour qu’elle procède à l’achat des autobus et installe les stations de recharge. Notre prêt fait en sorte qu’Ottawa n’aura pas à dépenser plus qu’elle ne l’aurait fait pour sa flotte au diésel, mais elle consacrera toutes les économies réalisées au remboursement de notre prêt. Il s’agit d’un type de prêt qui se rembourse à partir des économies réalisées pendant la durée de vie des autobus.
Toutefois, ce prêt n’est sans doute pas suffisant. Il est suffisant pour couvrir le coût des autobus et de l’infrastructure de recharge, mais il ne l’est habituellement pas pour couvrir le coût des réaménagements nécessaires, comme la construction d’un nouveau garage ou d’une installation d’entretien ou d’entreposage. C’est pourquoi la Ville d’Ottawa a présenté aussi une demande à Infrastructure Canada et à ce qu’on appelle le Fonds pour le transport en commun à zéro émission.
Donc, le fait d’obtenir des fonds de nous deux, et le fait qu’il y ait eu une première annonce et une autre plus tard, ce n’est pas le fruit du hasard. Ce n’est pas une erreur. C’est prévu ainsi.
Pour répondre à votre question au sujet des résultats, oui, nous faisons preuve de diligence raisonnable au moment d’accorder un prêt. Nous sommes remboursés à même les économies, alors nous voulons que ces autobus remplacent les autobus au diésel et qu’elles roulent pour réaliser des économies de carburant. Nous examinons donc leurs plans d’achat et d’entretien des autobus, car c’est la source de revenus qui permettra de nous rembourser en tant que prêteur. C’est ainsi que nous exerçons une diligence raisonnable.
Le sénateur Boehm : Je vais aller un peu plus loin sur la question de la diligence raisonnable. La technologie évolue aussi rapidement. On parle ici d’un investissement à long terme qui aura des coûts fixes en capital, pour l’investissement comme tel. Prévoyez-vous aussi que, sans doute dans deux ou trois ans, les batteries seront complètement différentes?
M. Cory : Oui.
Le sénateur Boehm : Très bien. J’ai une autre question au sujet de la diligence raisonnable. Avez-vous examiné l’expérience d’autres pays qui ont un climat très froid et où on utilise des véhicules électriques? Je pense à la Norvège, par exemple, où on se dirige essentiellement vers le tout électrique, même s’il s’agit d’un grand producteur de pétrole et de gaz. Pouvons-nous tirer des leçons de leur expérience?
M. Cory : C’est une excellente question. J’aime beaucoup les autobus et la transition à laquelle nous procédons.
Pour répondre à chacune de vos questions, je dirai premièrement que nous voyons deux stratégies sur le marché, et nous consentons des prêts dans les deux cas. Certaines municipalités achètent des garanties prolongées sur les batteries, ce qui veut dire que c’est le fabricant des autobus qui remplacera les batteries à quelques reprises pendant la durée de vie de quelque 12 ans des autobus. C’est sans doute la moyenne. Différentes municipalités ont différentes stratégies, mais la durée de vie des autobus varie de 10 à 15 ans.
Les municipalités achètent des garanties prolongées, ce qui leur permet essentiellement d’obtenir plusieurs remplacements de batterie au fur et à mesure que la technologie évolue, alors nous considérons qu’il s’agit là pour nous d’une de nos mesures de sécurité, si on veut. Quand les municipalités n’achètent pas de garantie prolongée, nous exigeons qu’elles créent un fonds de réserve et mettent de l’argent de côté pour le remplacement des batteries, soit à une ou deux reprises au cours de leur vie utile. Donc, oui, cela fait entièrement partie de notre diligence raisonnable, et dans un cas comme dans l’autre, nous prêtons pour le remplacement des batteries, car il y en aura un et parfois deux au cours de la durée de vie des autobus.
Deuxièmement, oui, nous embauchons des firmes d’ingénieurs pour procéder à nos analyses techniques sur la durée de vie des autobus et la fréquence des remplacements. On pense à des firmes comme Hatch, si vous en avez entendu parler, ou WSP. Nous avons recours à ces firmes et nous leur demandons de faire des comparaisons avec les pays qui ont une expérience plus longue que la nôtre. Elles nous fournissent de bons points de référence, alors c’est une des raisons pour lesquelles nous embauchons une tierce partie.
Le sénateur Yussuff : Je remercie les témoins de leur présence. Ma question s’adresse à M. Cory.
Mon amie la sénatrice Marshall vous a posé une question au sujet de ce que M. Morneau avait laissé entendre, à savoir que le ratio des investissements du secteur privé serait de quatre pour un. Je n’ai pas très bien compris votre réponse, alors je vais vous poser la question différemment. Quand croyez-vous atteindre le ratio de quatre pour un?
M. Cory : Je vais essayer de vous donner une réponse plus claire. Je vous remercie d’y revenir, car c’est un sujet important.
L’effet multiplicateur des capitaux privés est complexe et fonctionne ainsi : si vous achetez une maison aujourd’hui et que votre mise de fond équivaut à la moitié du montant, vous mettez 50 $ et vous prenez une hypothèque pour l’autre 50 $. Au jour un, vous diriez que le ratio est que vous avez payé la moitié de la maison et que la banque a payé l’autre moitié. Lorsque vous aurez remboursé votre hypothèque, vous aurez payé 100 % de votre maison et vous l’aurez financée en entier. La banque n’a pas acheté votre maison, elle vous a prêté l’argent au début.
Il en va de même pour nous. Lorsque nous accordons un prêt, au moment du prêt, il y a notre part et la part en capitaux institutionnels et privés. Comme la sénatrice Marshall l’a souligné, jusqu’à maintenant lorsque nous accordons un prêt, le ratio est d’environ un pour un, et il varie beaucoup d’un projet à l’autre, car comme je l’ai dit plus tôt, notre tâche consiste à investir juste assez d’argent pour que chaque projet se concrétise. Pour l’ensemble de notre programme, les 8,6 milliards de dollars que nous avons en engagements d’investissement jusqu’à maintenant, le ratio est d’environ un pour un. Au fur et à mesure que nous sommes remboursés, le ratio continue de changer.
Pour répondre à votre question, sénateur, actuellement la durée moyenne de nos prêts est assez longue, car les actifs d’infrastructure ont une longue durée de vie.
La durée moyenne de nos prêts — et Mme Joerg vérifie pour moi et cherche la page — est d’environ 17 ou 18 ans. Encore une fois, c’est une moyenne. Dans certains cas, les prêts sont de 5 ans, dans d’autres, de 30 ans.
Au fur et à mesure que ces prêts sont remboursés, l’argent est récupéré et nous le réinvestissons dans le projet suivant. Après plusieurs cycles de ce processus, le ratio continuera à augmenter. Je n’ai jamais fait le calcul, alors je vais devoir vous revenir avec la réponse, mais c’est sur le long terme que l’on atteint le ratio de quatre pour un. C’est un objectif à atteindre au fur et à mesure que les prêts sont remboursés et que nous réinvestissons l’argent dans le projet suivant. Cela prend des décennies.
Le sénateur Yussuff : Quel serait le montant des engagements d’investissement du secteur privé que vous avez pour les projets dont s’occupe la banque actuellement?
M. Cory : Comme je l’ai mentionné, nous avions des engagements d’investissements, au dernier trimestre, de 8,6 milliards de dollars. Le montant est à peu près équivalent pour ce qui est des capitaux institutionnels et privés au moment du prêt. Je dois souligner qu’il est en fait un peu plus élevé, car nous avons commencé à être remboursés — il s’agit de très petites sommes — et à toucher des intérêts. Le rapport commence déjà à changer, et il continuera de le faire de plus en plus chaque trimestre.
Le sénateur Yussuff : Est-ce que la plupart des projets sont des projets municipaux?
M. Cory : Non, et c’est très intéressant en fait. Nous avons constaté que cela dépend beaucoup du secteur. J’ai mentionné que nous sommes actifs dans cinq secteurs. Nous venons de parler des flottes électriques, elles relèvent entièrement des municipalités ou des exploitants d’autobus scolaires. Dans certaines provinces, elles relèvent du secteur privé, mais la majorité des flottes électriques relèvent du secteur public, des municipalités.
Dans le secteur de l’énergie propre, par contre, nous travaillons principalement avec les provinces et leurs entreprises de transport de l’électricité, mais aussi avec des producteurs d’énergie privés, qui s’occupent d’énergie renouvelable, du stockage dans les batteries. Je dirais que c’est davantage réparti entre le secteur privé et le secteur public. Puis pour ce qui est de la large bande — et nous avons travaillé avec M. Dagenais en ce qui concerne le Fonds pour la large bande universelle —, nous prêtons aux fournisseurs de services Internet partout au pays, qui sont en fait les fournisseurs de la large bande. Nous travaillons exclusivement avec le secteur privé et pas avec les municipalités.
Cela dépend vraiment de la catégorie d’actifs et du type d’investissement. Ce sont surtout les municipalités qui s’occupent du transport en commun et du transport, alors que dans le cas de l’énergie, ce sont les provinces. Dans d’autres secteurs, c’est surtout le secteur privé qui est présent.
Le sénateur Yussuff : Puis-je vous poser une question concernant le développement de la large bande, en particulier pour les collectivités des Premières Nations à l’échelle du pays? J’en ai entendu parler et j’aurai le temps de devenir très vieux et probablement de mourir avant que cela ne se réalise concrètement, alors je vais y aller sans détour. Pouvons-nous vraiment dire avec certitude que les collectivités rurales et les collectivités des Premières Nations auront accès à la large bande de mon vivant?
Étant donné le temps que nous avons passé à en discuter, c’est vraiment frustrant de voir où nous en sommes. Certains d’entre nous ont la chance de vivre dans des villes et des zones urbaines. Je ne pense pas que les enfants qui grandissent dans les municipalités rurales devraient avoir une vie différente de celle des autres; ils devraient avoir la même que mes enfants. Malgré les investissements importants dont le gouvernement continue de parler, nous ne semblons pas pouvoir respecter les délais pour y parvenir. Je pense qu’il serait juste pour les Canadiens de savoir quand nous pensons atteindre cet objectif. Plus important encore, étant donné tout l’argent des contribuables que nous investissons, avez-vous quelque échéancier en vue? Pouvons-nous vraiment dire avec certitude quand cela va se produire?
M. McConnachie : Merci, monsieur le président. Je sais que le temps est compté, mais je vais demander à M. Dagenais de répondre à la question.
M. Dagenais : Rapidement, nous avons deux objectifs : atteindre une connectivité de 50/10 Mbps dans 98 % des foyers canadiens d’ici 2026 et dans 100 % des foyers d’ici 2030. Nous sommes convaincus que nous atteindrons l’objectif de 98 % d’ici 2026, voire que nous le dépasserons. Présentement, nous évaluons le nombre de foyers qu’il reste à mettre à niveau et les fonds dont nous disposons pour atteindre l’objectif de 2030.
De nombreux développements technologiques ont également lieu en ce qui a trait aux satellites en orbite basse. Depuis l’année dernière ou le début de cette année, certains satellites en orbite basse couvrent l’ensemble du Canada et sont capables d’offrir des vitesses d’au moins 50/10 Mbps. Grâce à cette technologie, Internet haute vitesse est maintenant accessible dans tout le pays. Ce n’est pas de la fibre optique, et 80 % de ce que nous avons financé jusqu’à présent est de la fibre optique, donc il faut voir cela comme un processus évolutif. Le fait est qu’il y a désormais des technologies qui atteignent des endroits très éloignés. Nous avons quelques projets dans des endroits très éloignés qui utilisent la technologie des satellites en orbite basse, et les résultats sont probants.
Le sénateur Yussuff : Est-ce que le coût de cette technologie est abordable pour les résidants de ces régions? Le tarif est-il le même que celui que peuvent aller chercher ceux d’entre nous qui vivent en milieu urbain?
M. Dagenais : Nous avons financé l’antenne parabolique proprement dite. Je vais parler de Starlink. Si je ne m’abuse, Starlink coûte en ce moment 149 $ par mois, pour des vitesses supérieures à 50/10 Mbps.
Le sénateur Yussuff : Il n’y a pas de concurrent?
Le vice-président : Désolé. Deuxième série de questions.
Le sénateur Cardozo : J’aimerais poursuivre sur la lancée de la question du sénateur Boehm au sujet des autobus électriques, mais aussi vous demander, de façon plus générale, comment les responsables d’un projet savent à qui ils doivent s’adresser, que ce soit à la banque, à Infrastructure Canada ou à Innovation, Sciences et Développement économique Canada. Est-ce que vous parlez entre vous afin de déterminer comment le mélange va se faire?
M. Campbell : Merci, sénateur et monsieur le président. D’une manière générale, en ce qui a trait à Infrastructure Canada et à nos partenariats avec les provinces, les territoires et les municipalités — où il y a le plus grand nombre de projets dans le cadre du plan Investir dans le Canada —, nous contactons régulièrement tous ces ministères afin de voir où en est leur liste de projets. Le premier guichet est celui d’Infrastructure Canada. Souvent, des recommandations sont faites à la Banque de l’infrastructure du Canada. Il y a une douzaine d’autres ministères qui ont des programmes sous ce parapluie aux termes duquel des projets peuvent être recommandés.
Dans certains cas, nous combinons les programmes pour soutenir ces projets. Nous le faisons pour concrétiser l’idée qu’il n’y a pas de mauvaise porte. Je vais laisser mon collègue, M. Dagenais, parler du dossier de la large bande et de ce guichet particulier qui permet aux promoteurs d’être dirigés vers divers programmes.
Tous nos ministères travaillent très fort pour collaborer avec d’autres partenaires gouvernementaux. Comme ma collègue, Mme Lynch, l’a dit, même dans certains cas où la demande est adressée directement à un programme, des efforts sont faits pour interagir avec les promoteurs. Nous pouvons mettre cette responsabilité du côté du gouvernement, plutôt que de laisser les promoteurs et les commanditaires déterminer par quel guichet ils doivent passer.
M. Cory : En ce qui concerne les autobus électriques, en particulier, comme le disait M. Campbell, je crois que nous nous sommes rendu compte assez tôt dans notre programme que nous avions besoin d’une approche mieux coordonnée. Nous avons travaillé en étroite collaboration pour développer « un guichet unique ». Comme l’a dit M. Campbell, lorsque quelqu’un appelle au ministère et dit qu’il aimerait obtenir une subvention, la première question qu’on lui pose est : « Avez-vous d’abord obtenu un prêt de la Banque de l’infrastructure du Canada? » En effet, le fait de prêter d’abord dans la perspective de futures économies d’énergie est une façon pour nous de rentabiliser un peu plus l’argent des impôts. Ensuite, il s’agit de voir le reste qui peut être subventionné.
M. Campbell a mentionné la large bande parce que c’est exactement l’approche que nous avons adoptée dans ce dossier. Lorsque les gens font une demande au Fonds pour la large bande universelle, ils se font poser les questions suivantes : « Avez-vous fait appel à la Banque de l’infrastructure du Canada? Avez-vous envisagé d’emprunter de l’argent? » Parce que, encore une fois, il est préférable pour nous de passer d’abord par un prêt et d’en tirer le maximum avant d’aller dans le sens d’une subvention. Un certain nombre de nos programmes procèdent de la sorte, et c’est certainement le cas avec la filière des autobus.
Le sénateur Cardozo : Qu’est-ce qui détermine ce qui obtient votre soutien plutôt que le leur?
M. Cory : Nous jaugeons ce que nous pouvons assumer comme charge. Nous faisons des calculs sur la valeur des prêts qui peut être endossée.
Le sénateur Cardozo : C’est ce que vous maximisez en premier lieu?
M. Cory : C’est ce que nous maximisons en premier lieu. Ensuite, nous voyons ce qu’il reste. Ils soumettent un plan. Habituellement, comme je l’ai dit, ce qui reste, c’est ce que j’appellerais la construction d’infrastructures plus fondamentales, comme les nouveaux garages et ce genre de choses qui ne peuvent pas être payées dans le cadre du prêt.
Le sénateur Cardozo : Ma prochaine question s’adresse à M. McConnachie.
Vous avez parlé du soutien à Sanofi. Je pense à Medicago, qui a obtenu un financement important — 173 millions de dollars en 2020 — pour le vaccin contre la COVID. Au début du mois, l’entreprise s’est tout simplement retirée du projet. D’abord, avez-vous eu affaire avec ce dossier? Quoi qu’il en soit, pour quelque chose comme Sanofi — je ne veux pas m’en prendre à eux —, comment exercez-vous une diligence raisonnable? Comment faites-vous le suivi s’ils décident de se retirer à mi-chemin? Récupérez-vous l’argent?
M. Dagenais : Merci pour la question, monsieur le président. Je vais laisser Mme Kaminsky y répondre, car elle a touché à cet investissement par l’intermédiaire du Fonds pour l’innovation stratégique.
Mme Kaminsky : Merci beaucoup de cette excellente et très importante question. Je vais y répondre de façon générale, et donner quelques précisions au sujet de Sanofi et de Medicago, si vous le souhaitez.
De manière générale, pour chaque investissement réalisé aux termes du Fonds pour l’innovation stratégique, nous avons un important processus de diligence raisonnable au cours duquel nous examinons les risques techniques, financiers, commerciaux et de propriété intellectuelle auxquels s’expose l’entreprise. À l’instar de n’importe quel grand investisseur stratégique, nous cherchons à tout savoir. Nous avons un portrait très précis de l’entreprise et de l’investissement que nous faisons. Lorsque nous concevons un investissement pour une entreprise donnée, il y a des obligations à la fois générales et personnalisées envers l’État que nous devons respecter pour atténuer les risques de manière appropriée, ainsi que pour mettre ladite entreprise sur la voie du succès.
L’État dispose de mesures d’atténuation générales. Pour toute entente de contribution, nous disposons — je suis certaine que c’est la même chose pour tous les différents programmes — de recours, de processus utilisables en cas de violation ou de défaut, et de processus de renégociation assortis de dispositions raisonnables pour toutes les parties concernées afin de faciliter la collaboration et la résolution de tout problème particulier.
Pour chaque entente, nous prévoirons également des mesures particulières adaptées à l’entité concernée. Par exemple, si une petite entreprise a besoin de lever des fonds pendant la durée de l’entente, nous adopterons une approche par étapes assortie d’objectifs qui devront être atteints pour que le financement se poursuive. D’autres projets, comme les investissements à grande échelle — vous avez fait référence à Sanofi — sont très différents de ceux des petites entreprises. Pour ce qui est de l’interaction dans les cas d’investissements à grande échelle... Sanofi est une grande entreprise, et elle n’a pas nécessairement besoin de lever des fonds sur le marché privé comme le ferait une petite entreprise où la recherche et le développement occupent une grande place. Donc, pour ce qui est de ces investissements à grande échelle, ce que voulons, c’est d’appuyer les intérêts stratégiques du Canada. Par conséquent, tout investissement que nous ferions, qu’il s’agisse d’un grand constructeur automobile ou d’un autre type d’entreprise d’envergure, comporterait des conditions exigeant que l’entité financée mène à bien le projet visé par l’entente. L’entité aurait également des exigences à respecter en matière d’emploi, l’obligation de fournir des possibilités d’apprentissage intégrées au travail et des obligations de bonne tenue en matière de recherche et développement. Toutes ces obligations feraient l’objet de rapports, d’audits et de révisions.
De la même manière que ce qui a été décrit précédemment à propos de la programmation basée sur des réclamations, nous fournissons des paiements d’étape au fur et à mesure que les coûts sont engagés par l’entreprise. Dans ce cas, il y aurait violation de l’entente de contribution. Selon les détails de l’investissement en question et de ce que nous cherchions à réaliser, nous pourrions utiliser les recours dont dispose l’État, y compris la demande de remboursement jusqu’à un certain montant maximum, toujours selon l’entente proprement dite.
Dans certains cas, nous négocierions de façon proactive la résiliation de l’entente, le remboursement et la mise à terme de l’investissement. Dans d’autres cas — je n’ai pas d’expérience en la matière — l’entente de contribution pourrait comporter des dispositions en matière de désaccord, si et quand cela est nécessaire.
[Français]
Le vice-président : Merci beaucoup. Nos témoins suscitent énormément d’intérêt. Pour le deuxième tour, je demanderai aux sénateurs de poser des questions concises et aux témoins de fournir des réponses concises.
Je vais toutefois me permettre une question, avant de passer au deuxième tour.
Nous avons beaucoup parlé des gouvernements et des territoires. Toutefois, les municipalités ont énormément de responsabilités. En effet, 58 % des infrastructures publiques canadiennes sont sous la responsabilité des municipalités; entre 21 % et 22 % sont de responsabilité provinciale et fédérale. En général, nous savons que les projets d’infrastructures sont partagés à un tiers chacun. Bien souvent, les municipalités réalisent les projets et assument le tiers des coûts, comme le font les gouvernements fédéral et provinciaux.
Ayant été longtemps à l’autre bout du pipeline des subventions, j’ai remarqué qu’on demande souvent que les priorités des municipalités soient respectées et établies en collaboration avec le gouvernement fédéral et provincial. Dans l’élaboration des programmes, des conditions et des règlements, consulte-t-on plus régulièrement, aujourd’hui, les municipalités qui sont des partenaires incontournables?
Nous faisons face à de grands défis, qu’il s’agisse de l’intégration sociale en matière d’immigration, de développement durable ou de développement économique — et on parlait plus tôt des sans-abri. Les municipalités sont au cœur de ces défis. A-t-on le réflexe et la volonté de consulter les municipalités et de collaborer avec elles à l’élaboration des programmes?
Gerard Peets, sous-ministre adjoint, Politiques et résultats, Infrastructure Canada : Merci beaucoup pour la question. Mon nom est Gerard Peets. Je suis sous-ministre adjoint des Politiques et résultats.
Si vous le permettez, je répondrai en anglais.
[Traduction]
Je pense que le rôle des municipalités a toujours été reconnu en ce qui concerne le financement des infrastructures et l’établissement des priorités en la matière. Le Fonds pour le développement des collectivités du Canada, anciennement le Fonds de la taxe sur l’essence, fournit du financement aux municipalités depuis près de 20 ans, et il est bancable à 100 %. Les municipalités peuvent mettre ces fonds en réserve et les utiliser pour un très vaste éventail de projets.
Cependant, je pense que vous avez également raison de souligner que dans de nombreux cas, nous avons un tiers, un tiers, un tiers. Lorsque nous parlons d’infrastructure publique dans les collectivités, nous avons affaire à une situation où l’échelle et l’ampleur des projets — l’ampleur même de l’excédent des infrastructures en bon état et de remplacement qui ont été construites dans la période d’après-guerre — ont créé une situation où d’autres sources de financement que l’assiette fiscale locale, c’est-à-dire municipale, sont nécessaires. Ainsi, lorsque la municipalité, la province ou le territoire et le gouvernement fédéral sont tous essentiels, en particulier pour certains des plus grands projets, nous examinons comment nous pouvons définir le rôle approprié de chacun pour la suite des choses.
J’aimerais souligner autre chose. Dans les récents budgets, le gouvernement a mis l’accent sur l’atteinte de résultats en matière de logement dans le cadre des investissements en transport en commun et autres. Pour l’avenir, nous réfléchissons à la façon dont nous pouvons travailler avec les gouvernements locaux pour créer les conditions qui permettront de progresser vers la réalisation de ces objectifs. Cela va nous demander de travailler différemment en partenariat à l’échelle régionale, et c’est une chose à laquelle nous réfléchissons assidûment, en particulier dans le cadre du programme permanent de transport en commun que nous sommes en train d’élaborer.
[Français]
Le vice-président : Merci. Nous vous inviterons de nouveau.
Nous allons maintenant passer à la deuxième ronde. L’intérêt est beaucoup plus important que le temps qu’il nous reste. Je demande par conséquent des questions et des réponses succinctes.
Nous débuterons avec la sénatrice Marshall, suivie du sénateur Gignac.
[Traduction]
La sénatrice Marshall : Je reviens à M. Cory. Pourriez-vous répondre par écrit à une question que j’ai posée plus tôt et que nous n’avons pas vraiment abordée? Pourquoi le secteur privé ne s’est-il pas manifesté comme nous le pensions? Et je ne parle pas des investisseurs institutionnels. Je pense que tout ce que vous pourrez nous dire à ce sujet nous sera utile.
L’autre question que j’ai concerne le fait que la Banque de l’infrastructure du Canada a un problème de crédibilité. L’un des comités permanents de la Chambre des communes l’a étudiée l’an dernier et a recommandé son abolition. Pour vous dire la vérité, je ne me souviens pas d’avoir vu quoi que ce soit de positif à son propos, sauf lors de votre assemblée générale annuelle — votre rapport annuel —, et cela venait du gouvernement.
Cela est-il un problème pour le conseil d’administration ou le comité directeur? Que faites-vous à ce sujet? Lorsque l’on parle de la Banque de l’infrastructure du Canada, les gens lèvent les yeux au ciel et secouent la tête. Ils ne sont pas convaincus que la banque crée de la valeur pour les Canadiens. Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet? Peut-être que le conseil d’administration et le comité directeur disent qu’ils ne se soucient pas de cela. Pouvez-vous nous donner votre opinion à ce sujet?
M. Cory : En ce qui concerne votre question sur le matériel écrit, je suis heureux de soumettre quelque chose sur l’attraction des capitaux privés.
Je pense qu’il est juste de dire que la Banque de l’infrastructure du Canada a été beaucoup critiquée dès les premiers jours de son lancement. C’est en partie le problème que nous avons tous lorsque nous lançons de nouvelles institutions. Le premier employé a été embauché en 2018, et en 2019, la banque avait déjà la réputation d’être un échec. On nous a dit que nous n’avions rien fait. Lorsqu’il est question de projets d’infrastructure, c’est une façon assez irréaliste d’aborder les choses. N’oubliez pas que nous ne cherchions pas des projets prêts à démarrer dans lesquels nous pourrions injecter de l’argent. C’est plutôt le contraire. Nous recherchions des projets prometteurs qui étaient bloqués et qui nécessitaient des investissements ne serait-ce que pour être prêts à être mis en chantier. On me demande parfois de citer un projet que nous avons mené à bien. Je pense que le fondement de la question ne tient pas vraiment compte de la réalité des infrastructures dans notre pays. La construction d’un nouveau barrage hydroélectrique ou d’une nouvelle ligne de transmission reliant plusieurs provinces est un projet qui coûte des milliards de dollars et qui s’étend souvent sur plusieurs années.
Nous n’avions pas établi les bonnes attentes. Je pense aussi que la BIC a tiré beaucoup de leçons sur la façon d’accomplir plus de choses, et c’est vrai si vous regardez la courbe. Vous avez parlé de la crosse de hockey, sénatrice. Il faut dire qu’au cours de notre première année, nous n’avons fait qu’un investissement. Il s’agit du projet de Réseau express métropolitain, ou REM, à Montréal. L’année suivante, nous n’avons fait aucun investissement. J’ai commencé il y a un peu plus de deux ans, et nous avons depuis investi dans 42 projets. Il s’agit de véritables investissements dans des projets qui sont mis en œuvre dans tout le pays. Je ne suis pas du tout d’accord. Si vous parlez au ministre Smith, le ministre de l’Énergie de l’Ontario, à l’ancien premier ministre de l’Alberta, à la mairesse de Calgary, à Enwave, à Markham District Energy Inc. ou à Tshiuetin Rail.
Je pense que le taux de satisfaction par rapport à la BIC est très élevé et je crois que les choses sont en train de changer.
Je terminerai en disant qu’il y avait hier dans le Globe and Mail un article qui disait que nous avons le vent en poupe et que nous réalisons des progrès. Je pense que les choses sont en train de changer. Notre direction et notre conseil d’administration prennent la situation très au sérieux. Il nous incombe de montrer aux Canadiens que la BIC est un élément efficace de notre boîte à outils. Je pense que nous sommes sur la bonne voie.
Le sénateur Gignac : Les Canadiens ont été pris par surprise lorsqu’ils se sont rendu compte que la Gendarmerie royale du Canada permettait la passation de marchés avec des entreprises liées à la Chine. Ma question concerne les infrastructures financées par des investissements privés. Avez-vous une gouvernance à ce sujet? Le monde a changé depuis février de l’an dernier, et la propriété est devenue un enjeu important. Existe-t-il des règles en la matière?
M. Cory : Excellente question. Comme toute institution financière, nous avons des règles qui nous permettent de connaître nos clients. Les membres du secteur bancaire le savent. Nous vérifions les antécédents de tous nos emprunteurs. Nous disposons d’un régime de diligence raisonnable. Nous appliquons les règles fédérales relatives à la propriété étrangère. Nous respectons les directives fédérales, comme toutes les banques. Nous vérifions qui sont nos clients pour tout investissement.
M. Campbell : Je peux parler de l’ensemble du marché de l’infrastructure du Canada. Le secteur privé, tant au pays qu’à l’étranger, investit massivement dans le financement d’une grande partie de nos constructions et de nos activités. Tout cela est régi par la Loi sur Investissement Canada et ses dispositions.
Pour ce qui est des grands projets d’infrastructure qui exigent un financement, ce dernier est souvent octroyé par des intermédiaires canadiens réglementés. Dans certains cas, lorsqu’il y a des doutes relativement à un investissement en capital dans divers projets, le promoteur du projet, le gouvernement ou l’entité responsable travaille avec d’autres acteurs pour s’assurer que les investisseurs qui deviennent propriétaires d’un projet, en particulier s’il s’agit d’une infrastructure publique, font l’objet de vérifications. Nous procédons à différents contrôles. Il s’agit d’une mesure de routine.
M. McConnachie : Les sénateurs savent certainement que le ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie joue également un rôle statutaire dans l’administration de la Loi sur Investissement Canada.
En décembre de l’an dernier, le gouvernement a déposé un projet de loi visant à moderniser la Loi sur Investissement Canada à la lumière des préoccupations soulevées par le sénateur.
Certains changements particuliers intéresseront le comité. Ils visent essentiellement à répondre à l’évolution de l’environnement géopolitique et économique mondial et à cibler des mesures particulières liées aux investissements ayant des liens avec la Russie, et les entités détenues ou influencées par un État, les investissements dans le secteur des minéraux essentiels. Je suis certain que les sénateurs ont eu vent de trois transactions qui ont récemment été bloquées par le ministre en vertu de ces dispositions. Elles vont au-delà des considérations liées aux avantages nets et aux examens de sécurité étrangère des acquisitions étrangères qui figurent depuis longtemps dans la loi. Je pourrais vous parler en détail de la loi, mais je ne pense pas en avoir le temps, sénateur. Je vous remercie.
Le sénateur Smith : J’aimerais demander à Infrastructure Canada de nous parler de cette question? Votre ministère demande une augmentation de 36 % des autorisations votées dans le Budget principal des dépenses 2022-2023 par rapport à l’année précédente. Pourriez-vous nous fournir une explication ou faire le point sur les rapports sur les résultats de votre ministère pour l’année précédente? Quel pourcentage du total des indicateurs a été atteint? Pour ce qui est des paramètres et des indicateurs qui n’ont pas été atteints l’année précédente, pouvez-vous indiquer si votre ministère dispose de mécanismes de responsabilisation?
Je pose la question parce qu’il semble que tout le monde travaille ensemble, mais je m’interroge sur les différends qui pourraient se produire et sur la relation entre ces différents groupes. Vous avez probablement des leaders qui veulent s’affirmer et des gens qui veulent bien faire. Quelles sortes de différends surviennent et quel type de relation ces groupes entretiennent-ils par rapport à cette question?
Mme Bertrand : Merci pour cette question. Je vais commencer par répondre à la première partie de la question sur les résultats. Le rapport sur les résultats ministériels de 2021-2022 indique que nous avons atteint 75 % de nos indicateurs, donc 9 sur 12. Il s’agit d’une énorme amélioration par rapport à l’année précédente, où nous n’avions atteint que 54 % de nos indicateurs. Nous nous efforçons toujours de les atteindre.
Le sénateur Smith : Comment expliquez-vous cette différence? Pourquoi avez-vous obtenu de meilleurs résultats que l’année précédente?
Mme Bertrand : Nous devrons répondre à cette question plus tard.
Le sénateur Smith : Ce serait formidable. Voulez-vous ajouter autre chose? Je ne voulais pas vous déstabiliser. J’essayais de comprendre les mécanismes de responsabilisation.
M. Campbell : Merci pour cette question, sénateur. Je pense que nos rapports publics témoignent de notre ambition globale pour ce qui est des indicateurs en fonction desquels nous voulons nous évaluer.
En ce qui concerne la collaboration et aux frictions qui pourraient se produire, d’après notre expérience, la collaboration règne au sein de notre ministère et avec les ministères. Nous disposons également d’un cadre de gestion du rendement pour tous les cadres et les cadres supérieurs, qui tient compte de nos indicateurs, mais aussi de la collaboration et de la façon dont nous atteignons les résultats et les objectifs. C’est là notre réponse et nous nous ferons un plaisir de vous fournir plus de renseignements par écrit quant aux progrès que nous réalisons, en particulier au sein d’un ministère en pleine croissance qui doit faire face à l’évolution de nombreux programmes et activités.
Le sénateur Smith : Il y a beaucoup d’éléments à prendre en compte. Si vous pouviez nous envoyer un document d’une page, ce serait fantastique. Nous sommes très occupés.
M. Campbell : Pour revenir aux questions sur la Banque de l’infrastructure du Canada du point de vue du gouvernement du Canada, un examen législatif de la loi est en cours et le ministre a l’intention de présenter un rapport à ce sujet au Parlement d’ici la fin juin. Nous consultons actuellement les provinces, les territoires, les municipalités et les groupes autochtones. Nous avons lancé des consultations publiques et nous ferons davantage pour répondre à ces questions sur les progrès réalisés par la Banque de l’infrastructure du Canada.
Compte tenu de la souplesse du financement novateur, je pense que la façon dont l’institution et le gouvernement ont répondu aux besoins de nos administrations provinciales, territoriales et municipales se reflétera dans leur rétroaction. Nous pouvons toujours faire mieux et tirer des leçons, mais nous avons hâte de revenir devant cette assemblée avec ce rapport.
Le sénateur Loffreda : Ma question s’adresse à la Banque de l’infrastructure du Canada.
Près de six ans après sa création, pouvez-vous nous faire part de certaines des leçons tirées et des pratiques exemplaires qui pourraient être utiles au Fonds de croissance du Canada ou à d’autres fonds en cours de création? Que devraient-ils éviter ou mettre en œuvre pour garantir une réussite rapide? Peut-être pourriez-vous nous indiquer quelques leçons clés à retenir?
M. Cory : Merci beaucoup pour cette question. Je vais essayer de faire une version brève. Comme vous pouvez l’imaginer, c’est un sujet auquel nous avons consacré beaucoup de temps ces dernières années.
Premièrement, il convient de reconnaître la nature de notre pays et ses besoins en infrastructure. Je dis parfois que nous avons des projets que nous menons nous-mêmes de bout en bout, des systèmes ferroviaires qui relient notre pays, des lignes de transmission qui relient les parties propres et moins propres de notre réseau électrique. Il s’agit de projets de plusieurs milliards de dollars qui prennent parfois une décennie.
Nous avons également investi six millions de dollars dans une installation de traitement des eaux usées dans une communauté autochtone qui a besoin d’avoir accès à de l’eau potable et à de l’eau traitée propre. Nous avons aussi amené la large bande dans 20 communautés du Nord, grâce à un investissement de 10 millions de dollars.
L’une des leçons que nous avons tirées est qu’il faut jouer sur tous ces plans à la fois. Au début, la BIC était peut-être trop axée sur les mégaprojets qui sont vraiment importants pour faire avancer notre pays, mais il faut trouver le bon équilibre. C’est une chose que nous avons apprise.
Évidemment, dans le cas de la Banque de l’infrastructure du Canada, nous devons être en mesure de travailler partout au Canada à une échelle qui est pertinente pour les Canadiens. Cette approche a l’avantage de favoriser le progrès et la réussite. Pour vous placer sur une trajectoire comme la nôtre, vous devez travailler sur des projets de différentes tailles, tout en continuant de faire avancer les mégaprojets.
Nous avons également appris que, bien que nous soyons une société d’État indépendante — et c’est vraiment important; nous agissons comme des investisseurs et nous soumettons chaque transaction à notre conseil d’administration de façon très commerciale — il était essentiel pour nous de trouver, comme vous l’avez entendu dans le témoignage d’aujourd’hui, un moyen de travailler en coordination avec nos collègues sur le dossier de la large bande — Mme Kaminsky et M. Dagenais font tous deux partie de nos partenaires — à Infrastructure Canada, mais aussi Ressources naturelles Canada et Environnement et Changement climatique Canada. Bien que nous soyons indépendants et que nous puissions agir de façon commerciale en tant qu’investisseurs, nous ne sommes pas coupés des objectifs du gouvernement. Une autre leçon importante est que la coordination doit être assurée tout en maintenant l’indépendance. Il nous a fallu du temps pour trouver cet équilibre parfait.
Le sénateur Loffreda : Merci.
Le sénateur Yussuff : Monsieur Cory, le changement climatique est évidemment un moteur d’innovation au niveau municipal. Les municipalités sont notre première ligne de défense pour tenter de relever certaines des difficultés auxquelles nous sommes confrontés.
Vous parliez des municipalités qui achètent des autobus électriques dans tout le pays. Je sais que nous fabriquons ces autobus ici, au Canada. Bien sûr, les emplois et l’assiette fiscale sont très importants pour ce pays.
La banque est-elle déterminée à soutenir les municipalités pour qu’elles puissent acheter des autobus électriques? Dans quelle mesure font-elles appel à des fournisseurs canadiens? Étant donné que notre pays produit ces autobus, il y a ici une assiette fiscale. Disposez-vous de données sur ce sujet? Je sais que les municipalités n’achètent pas toutes des autobus électriques canadiens.
M. Cory : Pour vous donner un peu de contexte, nous en sommes maintenant à 1,6 milliard de dollars de prêts aux municipalités et aux fournisseurs d’autobus scolaires pour l’achat d’autobus. Plus de 4 000 autobus ont maintenant été commandés.
Nous sommes des prêteurs et nous essayons de ne pas dicter aux municipalités leur approche de l’approvisionnement. Chaque municipalité et chaque administration a ses propres règles en la matière. Nous ne leur imposons pas, dans le cadre de notre financement, d’acheter des autobus canadiens.
La grande majorité de nos prêts ont servi à acheter des autobus auprès de fournisseurs canadiens. Je pense que c’est parce que le Canada a réussi à se tailler une place sur le marché des autobus électriques, et j’espère qu’il en sera de même, de façon plus générale, pour les véhicules électriques. Nous n’imposons pas l’achat d’autobus canadiens, mais c’est là qu’est allée la majeure partie de notre argent.
Mme Kaminsky : Je pense qu’il faut souligner l’importance du tableau d’ensemble de ces types d’investissements dans la chaîne d’approvisionnement canadienne. Le Fonds stratégique pour l’innovation vise directement, via l’initiative Accélérateur net zéro, le renforcement de la capacité du Canada à saisir les opportunités d’un avenir carboneutre. Une révolution mondiale des investissements à grande échelle est en cours pour ancrer les investissements dans les chaînes d’approvisionnement qui seront essentielles à la fabrication et à l’approvisionnement des entreprises canadiennes.
Par exemple, le gouvernement a effectué des investissements dans la fabrication de nouvelles batteries à grande échelle, dans le développement des minéraux essentiels qui serviront à fabriquer ces batteries, dans le traitement et dans le recyclage. On assiste, et nous continuerons à assister, à des changements à grande échelle qui permettront la présence d’un nombre croissant de fournisseurs canadiens dans l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement associée à la production de véhicules électriques. Ce n’est que l’un des domaines d’investissement sur lesquels nous nous concentrons et collaborons.
[Français]
La sénatrice Moncion : Ma question concerne les véhicules électriques, les stations de recharge et les capacités du système électrique canadien. On semble penser qu’au Canada, la capacité électrique et hydroélectrique est illimitée, alors que ce n’est pas le cas. Comment faites-vous dans cette situation?
[Traduction]
M. Cory : Je vous remercie pour cette question. Comme je l’ai mentionné, ce n’est pas une coïncidence si nos secteurs comprennent le transport en commun et les transports, et donc l’infrastructure de recharge et les véhicules électriques, mais aussi, si l’on remonte la chaîne, la transmission. Pour répondre à notre demande, nous allons devoir acheminer l’électricité là où elle est nécessaire, et assurer la production et le stockage d’énergie propre.
Nous réalisons des investissements dans l’ensemble de cette chaîne. Pour établir nos objectifs, nous doublons ou triplons la consommation d’électricité dans ce pays. C’est ce qu’il faut faire pour atteindre la carboneutralité.
Pour ce qui est du portefeuille actuel de la BIC, qui s’élève à 35 milliards de dollars, nous avons alloué des fonds à chaque secteur : 5 milliards de dollars aux transports en commun, 7 milliards de dollars à l’énergie propre et 7 milliards de dollars à l’énergie verte, qui comprend l’hydrogène et les carburants.
La sénatrice Moncion : Dans quelle mesure les provinces adhèrent-elles au réseau électrique?
M. Cory : L’adhésion est très élevée. Chaque province a sa propre stratégie. Pour certaines, cela passe par l’expansion des ressources hydroélectriques. L’Ontario développe le nucléaire, et d’autres administrations investissent massivement dans les énergies renouvelables.
La sénatrice Moncion : Combien de ces provinces travaillent avec vous?
M. Cory : Je tiens à mentionner cela très prudemment, mais nous sommes en train de discuter avec toutes les provinces de ce qu’elles planifient en matière d’électricité.
La sénatrice Moncion : Merci.
La sénatrice Pate : J’adresse ma question au représentant d’ISED. Votre résumé des résultats pour les exercices 2018-2019 et 2021-2022 indique que plusieurs objectifs annuels liés aux responsabilités d’ISED n’ont pas été atteints. L’élément clé, c’est que 4 des 21 responsabilités non atteintes pendant l’exercice 2021-2022 concernent des responsabilités essentielles relatives aux compétences des personnes et aux investissements des communautés et des entreprises dans la croissance.
En outre, le plan ministériel 2022-2023 d’ISED décrit un grand nombre d’initiatives et de programmes visant à aider les femmes, les Autochtones, les jeunes et les groupes racisés.
J’ai deux questions à vous poser. Si le temps qu’il me reste ne vous permet pas de répondre de vive voix, vous pourriez peut-être nous fournir des réponses par écrit.
Premièrement, pourriez-vous expliquer pourquoi les objectifs n’ont pas été atteints, et quelles mesures vous prenez pour y remédier à cet état de choses? Pourriez-vous faire le point sur l’avancement des nouvelles initiatives décrites dans le plan ministériel, puis indiquer si vous pensez joindre les populations visées et comment vous savez que cela fonctionnera?
M. McConnachie : Merci. Je vais peut-être répondre à la dernière question par écrit, car je ne pense pas pouvoir passer en revue l’ensemble des programmes d’ISED qui visent ces communautés, bien que nous ayons des résultats significatifs à communiquer.
Je pourrais peut-être parler de la question plus générale de la communication des résultats. Cet enjeu se rapporte à la question qui a été posée à mon collègue d’Infrastructure Canada.
Depuis des générations, il est difficile pour les ministères et les gouvernements de disposer de sources de données appropriées pour leurs indicateurs à long terme. Aujourd’hui, vous avez entendu tous nos collègues parler fréquemment du fait que nos organisations font des investissements à long terme dans des secteurs industriels, des communautés, des provinces, des territoires et des services publics, entre autres choses, et que, dans bien des cas, il faut du temps pour que ces investissements se concrétisent.
L’une des erreurs que nous commettons — et c’est peut-être une blessure que nous nous infligeons nous-mêmes —, c’est d’examiner les dépenses engagées et les emplois créés, ce qui ne nous permet pas nécessairement de reconnaître l’effet d’impulsion important qui est lié à ces investissements.
Souvent, nos structures de mesure du rendement vous permettront de constater que ces programmes visent des objectifs à long terme qui sont difficiles à démontrer à court terme. Je préfère certainement examiner notre portefeuille d’investissements — les secteurs de mes collègues, en particulier, mais aussi d’autres programmes d’ISED — en étudiant le flux d’affaires, par exemple.
Les secteurs de programme de Mme Kaminsky en sont un bon exemple. Même si seulement un petit pourcentage de l’investissement global dans le Fonds stratégique pour l’innovation a été débloqué, la grande majorité des fonds sont contractuellement engagés, et nous sommes parvenus à un stade où nous manquons d’argent pour pouvoir conclure de nouveaux accords. Il s’agit là d’un indicateur bien plus significatif que le montant des dépenses effectuées au cours du mandat actuel.
J’espère que cela répond à votre question. Merci.
[Français]
Le vice-président : Vous pourrez faire parvenir vos réponses par écrit. Merci beaucoup.
[Traduction]
La sénatrice Bovey : Merci. Je vais maintenant juste vous demander de fournir des documents par écrit, car je suis bien consciente que l’heure avance.
Monsieur McConnachie, pourriez-vous présenter à la greffière les engagements financiers que vous avez pris, par province, et qui sont liés à des projets de tourisme culturel?
M. McConnachie : J’aimerais indiquer brièvement que les industries culturelles ne relèvent pas précisément d’ISED, bien que le tourisme fasse partie des domaines de compétence du ministère. Sous la direction du ministre Boissonnault, certains engagements importants ont été pris par l’intermédiaire du Fonds pour le tourisme, ainsi que du Fonds pour les entreprises touristiques autochtones qui est en cours d’élaboration, mais qui n’a pas encore été lancé.
En réponse à votre question, nous serions heureux de faire le point sur l’état d’avancement de nos initiatives en matière de tourisme.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Ma question sera brève. Le gouvernement du Canada a conclu une entente de 600 millions de dollars avec Télésat pour l’obtention d’une couverture Internet haute vitesse au Canada grâce à des satellites en orbite basse.
Est-ce que la technologie de Télésat est à la hauteur des attentes? Pourra-t-elle rivaliser à coûts raisonnables avec le déploiement satellitaire de SpaceX d’Elon Musk? Croyez-vous que le fait d’investir dans Télésat a été la meilleure option?
Vous pouvez me répondre simplement par oui ou non.
M. McConnachie : Je crois que ce serait une bonne question pour mon collègue M. Dagenais.
M. Dagenais : Je peux commencer en disant qu’on n’a déboursé aucune somme. Le projet de Télésat est encore sur les planches. On est en train de parler à des investisseurs. Selon ce qu’on a vu, la technologie va fonctionner, mais on n’a pas déboursé de sommes encore. Donc, le montant de 600 millions de dollars est encore dans les coffres du gouvernement du Canada.
[Traduction]
Le sénateur Cardozo : J’ai une brève observation à formuler à la suite du dernier commentaire de la sénatrice Marshall. En ce qui concerne la réputation de la banque, il est important que vous y accordiez beaucoup d’attention. Il est toujours difficile de lancer une nouvelle organisation. Toute la population ne pense pas à vous, et cela n’a rien de personnel. Mais parmi ceux qui le font, certains considèrent que c’est une excellente idée et d’autres que c’est un gaspillage d’argent colossal. Je crois que vous devez vous concentrer sur votre capacité à présenter de façon très concise vos résultats, le nombre de projets que vous êtes en mesure d’aider et la quantité de fonds du secteur privé que vous êtes en mesure d’injecter dans le système. Je dirais qu’à mon avis, vous devez passer à la vitesse supérieure.
Même si vous êtes très impliqué dans le travail que vous faites, vous devez intensifier vos activités de relations publiques pour promouvoir ce que vous êtes en mesure de réaliser.
M. McConnachie : Pour raconter cette histoire. Merci.
[Français]
Le vice-président : Merci de vos questions. On a réussi à permettre à tous et toutes de poser une question en deuxième ronde.
[Traduction]
Maintenant que nous avons atteint la fin du temps qui nous était imparti, nous allons conclure la réunion.
[Français]
Un grand merci à nos témoins d’avoir comparu aujourd’hui, c’est grandement apprécié. Avant de lever la séance, je voudrais rappeler aux témoins de bien vouloir envoyer leurs réponses écrites à la greffière avant la fin de la journée du mardi 28 février. C’est un engagement public; on va attendre vos réponses.
Je voudrais également informer les sénateurs que la prochaine réunion se tiendra demain, mercredi, à 18 h 45 pour recevoir la vérificatrice générale du Canada.
(La séance est levée.)