LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES FINANCES NATIONALES
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le mercredi 29 mars 2023
Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd’hui, à 18 h 46 (HE), avec vidéoconférence, pour étudier le Budget principal des dépenses pour l’exercice se terminant le 31 mars 2024; et à huis clos, pour étudier le Budget supplémentaire des dépenses (C) pour l’exercice se terminant le 31 mars 2023 (étude d’une ébauche de rapport).
Le sénateur Éric Forest (vice-président) occupe le fauteuil.
[Français]
Le vice-président : Bienvenue à tous les sénateurs et sénatrices, ainsi qu’à tous les Canadiens qui nous regardent sur sencanada.ca.
Je m’appelle Éric Forest, sénateur de la province de Québec et vice-président du Comité sénatorial des finances nationales. J’aimerais maintenant faire un tour de table et demander à mes collègues de se présenter, en commençant par ma gauche.
Le sénateur Gignac : Bonsoir, monsieur le président. Clément Gignac, sénateur du Québec.
Le sénateur Loffreda : Bonsoir à tous et bienvenue. Tony Loffreda, sénateur du Québec.
[Traduction]
La sénatrice Bovey : Patricia Bovey, sénatrice du Manitoba.
Le sénateur Boehm : Peter Boehm, de l’Ontario.
La sénatrice Duncan : Pat Duncan, sénatrice du Yukon. Bienvenue à nouveau. Merci de votre présence.
Le sénateur Smith : Larry Smith, de Montréal, au Québec.
La sénatrice Marshall : Elizabeth Marshall, de Terre-Neuve-et-Labrador.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Jean-Guy Dagenais, du Québec.
Le vice-président : Ce soir, comme toujours d’ailleurs, nous avons parmi nous Mireille Aubé, greffière, et Sylvain Fleury et Shaowei Pu, analystes. Ils nous accompagnent et nous aident dans notre travail. Bienvenue à tous.
Nous continuons notre étude sur les dépenses prévues dans le Budget principal des dépenses pour l’exercice qui se terminera le 31 mars 2024, étude qui a été confiée à ce comité par le Sénat du Canada le 7 mars 2023.
Pour nous aider à mener cette étude, nous avons avec nous des hauts fonctionnaires de Services aux Autochtones Canada et de Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada.
Bienvenue à vous tous et merci d’avoir accepté notre invitation à témoigner devant le Comité sénatorial permanent des finances nationales. Étant donné que vous êtes nombreux et pour gagner du temps, je vais présenter les deux personnes qui feront des déclarations et je demanderais aux autres de se présenter si jamais on leur demande de prendre la parole.
[Traduction]
Nous allons maintenant écouter la déclaration préliminaire de M. Philippe Thompson, dirigeant principal des finances, des résultats et de l’exécution à Services aux Autochtones Canada. Monsieur Thompson, la parole est à vous.
Philippe Thompson, dirigeant principal des finances, des résultats et de l’exécution, Services aux Autochtones Canada : Honorables sénateurs, je vous remercie de m’avoir invité à discuter du Budget principal des dépenses de 2023-2024 de Services aux Autochtones Canada. Tout d’abord, j’aimerais souligner que nous sommes réunis sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin et anishinabe.
Je suis accompagné de mes collaborateurs de Services aux Autochtones Canada : M. Keith Conn, sous-ministre adjoint de la Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits; Mme Kelley Blanchette, sous-ministre adjointe de Terres et développement économique; M. Sylvain Souligny, sous-ministre adjoint par intérim du Secteur des opérations régionales; M. Ian Kenney, sous-ministre adjoint par intérim du Secteur des programmes et des partenariats en matière d’éducation et de développement social; et Mme Lisa Legault, directrice principale de la Direction de l’enfance et de la famille.
[Français]
Au cours de l’année à venir, le ministère se concentrera, en partenariat avec les peuples autochtones, sur des priorités liées aux six secteurs d’activité suivants.
Le premier secteur de services concerne la santé, dont le résultat attendu est que, grâce aux programmes de Services aux Autochtones Canada, les peuples autochtones soient en bonne santé physique et mentale et aient accès à des services de santé de qualité financés par le gouvernement fédéral.
Voici des exemples de ces contributions : un financement communautaire pour la promotion de la santé publique et la prévention des maladies, le Programme des services de santé non assurés, des initiatives de mieux-être mental ainsi que le principe de Jordan et l’Initiative Les enfants inuits d’abord.
Le deuxième secteur de services concerne les enfants et les familles. On vise à ce que les peuples autochtones soient en sécurité sur le plan culturel et heureux sur le plan social grâce à des programmes de Services aux Autochtones Canada, comme les services de sécurité et de prévention, le programme de Services à l’enfance et à la famille et les programmes de soutien au revenu.
Ces initiatives comprennent la réforme immédiate et à long terme des services à l’enfance et à la famille dans les réserves et au Yukon, ainsi que la mise en œuvre en cours de la Loi concernant les enfants, les jeunes et les familles des Premières Nations, des Inuits et des Métis.
Le troisième secteur de services, qui concerne l’éducation, vise à faire en sorte que les élèves autochtones progressent dans leurs études. Services aux Autochtones Canada s’emploie à transformer les programmes d’enseignement primaire et secondaire de façon à appuyer une éducation qui respecte les méthodes d’enseignement et d’apprentissage des Premières Nations. De plus, Services aux Autochtones Canada s’emploie à faire augmenter le nombre d’étudiants autochtones de niveau postsecondaire au moyen de programmes d’enseignement postsecondaire fondés sur les distinctions.
Le quatrième secteur de services concerne les infrastructures et l’environnement. Il permet aux communautés autochtones de bénéficier d’infrastructures et d’une gestion des terres durables. Ce secteur comprend l’accès à de l’eau potable salubre et à des logements, la construction et la rénovation des installations scolaires pour la mise en œuvre d’infrastructures communautaires, la gestion des terres et l’aménagement du territoire, les examens environnementaux et la réponse aux préoccupations liées à la gestion des déchets et aux sites contaminés, ainsi que la gestion des urgences.
Le cinquième secteur de services, celui du développement économique, vise à s’assurer que les communautés autochtones progressent dans leurs affaires et leur croissance économique. Dans le cadre de son financement pour le développement économique, Services aux Autochtones Canada respecte le droit à l’autodétermination des partenaires autochtones et utilise une approche inclusive fondée sur les distinctions. Par exemple, l’initiative pour les femmes autochtones en entrepreneuriat accroît le soutien accessible aux femmes et améliore la sécurité sociale et économique des femmes entrepreneures autochtones.
Le dernier secteur de services concerne la gouvernance. Il vise à permettre aux communautés autochtones de disposer de capacités de gouvernance et d’un soutien pour l’autodétermination. Les initiatives de financement, comme la subvention versée au titre de la nouvelle relation financière, visent à donner de l’autonomie aux Premières Nations dans la conception et la prestation des services.
[Traduction]
Afin de mener à bien ces secteurs de services, le Budget principal des dépenses de 2023-2024 de Services aux Autochtones Canada s’élève à 39,6 milliards de dollars. Il convient de souligner que le Budget principal des dépenses constitue la première étape du cycle financier et ne comprend pas les approbations ni les financements supplémentaires qui découlent du budget de 2023. L’octroi du financement pour les approbations supplémentaires sera fait dans le cadre des budgets des dépenses ultérieurs.
Le Budget principal des dépenses de 2023-2024 fait état d’une augmentation nette de 5,9 millions de dollars, ou de 0,01 %, par rapport à celui de l’exercice précédent. Voici les principaux changements : une augmentation de 981,5 millions de dollars pour les coûts liés aux indemnisations dans le cadre des programmes Services à l’enfance et à la famille des Premières Nations et du Principe de Jordan; une augmentation nette de 454,6 millions de dollars à l’appui de la mise en œuvre de la Loi concernant les enfants, les jeunes et les familles des Premières Nations, des Inuits et des Métis; une augmentation nette de 228 millions de dollars pour les infrastructures des communautés autochtones; une augmentation nette de 162,7 millions de dollars pour les Services à l’enfance et à la famille; une augmentation nette de 123 millions de dollars pour la gestion des urgences dans les réserves; et une augmentation de 113,3 millions de dollars pour la mise en œuvre du cadre fédéral de réparation des torts causés par les pensionnats indiens. Il y a également une diminution d’environ 241,6 millions de dollars en raison du financement prenant fin pour la mise en œuvre de l’Accord-cadre tripartite de la Colombie-Britannique sur la gouvernance de la santé par les Premières Nations; une diminution nette de 374,3 millions de dollars pour les services de santé non assurés pour les Premières Nations et les Inuits; une diminution de 2 milliards de dollars pour les règlements extrajudiciaires; et une augmentation nette de 562 millions de dollars pour un grand nombre d’autres initiatives comportant des changements dans les niveaux de financement approuvés.
Ensemble, ces ressources nous permettent de continuer à travailler avec nos partenaires autochtones pour agir sur les éléments clés de ce mandat et respecter notre engagement à l’égard de la réconciliation.
[Français]
Ce Budget principal des dépenses nous permettra de continuer à collaborer avec nos partenaires autochtones pour remédier aux inégalités et aux disparités systémiques et pour appuyer le transfert des services à ces partenaires.
Je serai heureux de discuter avec vous de tous les aspects de ce budget des dépenses. Je suis à votre disposition, ainsi que mes collègues, pour répondre à vos questions.
Meegwetch. Qujannamiik. Marsee. Merci.
Le vice-président : Merci beaucoup. J’invite maintenant Véronique Côté, directrice générale, Planification et gestion des ressources, Secteur du dirigeant principal des finances, des résultats et de l’exécution, Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada, à prendre la parole.
Véronique Côté, directrice générale, Planification et gestion des ressources, Secteur du dirigeant principal des finances, des résultats et de l’exécution, Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada : Merci, honorables sénateurs, de m’avoir invitée à discuter du Budget principal des dépenses de 2023-2024 pour Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada. Je tiens à souligner que je m’adresse à vous aujourd’hui depuis le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinabe. Je suis accompagnée de hauts fonctionnaires de mon organisation afin de mieux répondre à vos questions et commentaires.
Le financement prévu dans le Budget principal des dépenses permet à Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada de continuer à renouveler la relation avec les peuples autochtones, de poursuivre son travail de modernisation des structures institutionnelles et de la gouvernance pour soutenir l’autodétermination, de progresser dans la réparation des torts du passé en vue d’assurer la réconciliation avec les groupes autochtones et, enfin, de faire progresser son travail de protection de l’environnement et d’assurer la prospérité, la durabilité et la santé dans le Nord.
[Traduction]
Le Budget principal des dépenses de 2023-2024 fournira au ministère 9,2 milliards de dollars, ce qui représente une augmentation nette d’environ 3,4 milliards de dollars par rapport au Budget principal des dépenses de l’année dernière, qui s’élevait à 5,8 milliards de dollars. Les principaux éléments qui contribuent à cette augmentation nette sont le financement de 2,9 milliards de dollars pour la convention de règlement conclue dans le cadre du litige collectif de la bande de Gottfriedson, ainsi que 475,5 millions de dollars pour les revendications territoriales globales et l’autonomie gouvernementale et d’autres ententes visant à respecter les droits de l’article 35.
Le Budget principal des dépenses du ministère pour 2023-224 se compose principalement de paiements de transfert et de dépenses de fonctionnement. Les paiements de transfert représentent 53 % du budget principal, soit 4,9 milliards de dollars, tandis que les dépenses de fonctionnement représentent 47 %, soit 4,3 milliards de dollars.
Monsieur le président, j’aimerais prendre un moment pour souligner certains des travaux que ce budget des dépenses permettra à Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada d’entreprendre en 2023-2024. Grâce à ce financement, le ministère accélère le renouvellement de la relation avec les peuples autochtones. Plus précisément, il augmentera le nombre de traités, d’ententes d’autonomie gouvernementale et d’autres arrangements constructifs conclus, ainsi que de revendications réglées.
Des travaux sont également en cours pour moderniser les structures institutionnelles et la gouvernance afin de soutenir les visions des Autochtones concernant l’autodétermination en collaborant avec nos partenaires pour faire avancer les priorités communes, élaborer conjointement des politiques et suivre les progrès en cours. Le ministère poursuit également la mise en œuvre des appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation concernant les enfants disparus et les lieux de sépulture non marqués.
De plus, Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada fait progresser le travail dans le Nord en établissant des mécanismes de gouvernance régionale et des plans de mise en œuvre du Cadre stratégique pour l’Arctique et le Nord du Canada avec des partenaires autochtones, territoriaux et provinciaux. En outre, le ministère continue d’aider à rendre les aliments nutritifs et les articles essentiels plus abordables et accessibles aux résidants des collectivités isolées admissibles du Nord, soutient les projets de surveillance de l’énergie propre et du climat et poursuit l’assainissement des sites contaminés du Nord.
Nous sommes disposés à discuter de ce budget principal des dépenses avec vous et vos questions sont les bienvenues. Merci.
[Français]
Le vice-président : Merci beaucoup de vos déclarations.
Nous allons maintenant passer à la période des questions. J’aimerais souligner aux sénateurs qu’ils disposent d’un maximum de cinq minutes pour une seule ronde.
Je vous rappelle que le comité va se réunir à huis clos après ce groupe, soit à 20 heures. Je vous demande donc de poser vos questions directement, et aux témoins de répondre de façon succincte. La greffière m’avisera quand le temps sera écoulé.
[Traduction]
La sénatrice Marshall : Je remercie les témoins de leur présence.
Ma première question s’adresse à M. Thompson, comme d’habitude. Pouvez-vous faire le point sur l’argent qui est prévu pour l’indemnisation des enfants et des familles des Premières Nations qui découle du sous-financement du système d’aide à l’enfance? Cet argent figure-t-il toujours dans votre budget ou a-t-il été versé? Où se trouve-t-il exactement? J’aimerais que vous fassiez le point à ce sujet.
M. Thompson : Merci beaucoup pour cette question. Je vous en suis reconnaissant. Brièvement, oui, le financement est toujours dans nos niveaux de référence. Il a été reporté. Vous le voyez dans notre budget principal. Il a augmenté légèrement. Nous avons reçu des fonds supplémentaires pour l’indemnisation. Nous disposons de 981,5 millions de dollars de plus et nous travaillons toujours à une entente de règlement.
Dès que nous serons parvenus à une entente, nous serons en mesure d’entamer un processus de paiement.
La sénatrice Marshall : Où se trouve-t-il. S’agit-il du crédit 1 ou du crédit 10?
M. Thompson : Le crédit 1.
La sénatrice Marshall : Le crédit 1?
M. Thompson : Oui.
La sénatrice Marshall : Merci. Ma prochaine question s’adresse aux deux ministères, mais les représentants de Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada pourraient répondre d’abord.
Il a beaucoup été question des services professionnels et d’autres services dans les médias dernièrement parce que le budget est passé à plus de 20 milliards de dollars. Quel est le montant prévu dans votre budget pour les services professionnels et d’autres services?
Je poserai la même question à Services aux Autochtones Canada.
Mme Côté : Je vous remercie de votre question, sénatrice. En ce qui concerne les services professionnels et spéciaux, nous avons 591 millions de dollars dans le Budget principal des dépenses de 2023-2024.
La sénatrice Marshall : C’est le montant que j’avais. C’est bien.
Pour ce qui est de Services aux Autochtones Canada, il s’agirait de 1,76 milliard de dollars. Ce montant est-il exact?
M. Thompson : En ce qui concerne les contrats pour l’exercice 2022-2023, la valeur totale était de 322 millions de dollars — mais l’exercice n’est pas terminé.
Je suis très heureux d’annoncer que nous avons atteint 16,9 % pour ce qui est de la participation des Autochtones à l’approvisionnement. Comme vous le savez, l’objectif du gouvernement était de 5 %. Le ministère s’est très bien débrouillé.
Votre question portait-elle plus précisément sur les services de gestion?
La sénatrice Marshall : Les services professionnels et d’autres services, qui devraient figurer dans le crédit 1. Je crois comprendre qu’ils font partie du crédit 1. Il s’agirait des services professionnels et autres services. Je me demandais quel était le montant dans votre budget.
M. Thompson : En ce qui concerne les contrats, pour la dernière année, le montant de 2022-2023 était de 322 millions de dollars.
La sénatrice Marshall : D’accord.
M. Thompson : En février.
La sénatrice Marshall : Et quel est le montant dans votre budget de cette année?
M. Thompson : De cette année?
La sénatrice Marshall : Oui, c’était l’année dernière.
M. Thompson : Je n’ai pas le montant ici, mais je peux vous revenir là-dessus. Je devrais l’avoir. Je peux essayer de vous le fournir plus tard.
La sénatrice Marshall : D’accord. Merci.
Je reviens à Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada. Pourquoi y a-t-il une forte augmentation du crédit 1? Dans le Budget principal des dépenses de l’an dernier, le montant était de 972 millions de dollars. Au cours de l’année, il est passé à 5 milliards de dollars. Cette année, il est de 4 milliards de dollars. Que comprend ce montant et pourquoi a-t-il augmenté?
Mme Côté : Une grande partie de nos dépenses au titre du crédit 1 sont des fonds liés au règlement de revendications. Il y a une forte augmentation si l’on compare le Budget principal des dépenses de l’exercice 2022-2023 avec les estimations à ce jour. Si l’on tient compte de tout l’argent que nous avons reçu dans le cadre du Budget supplémentaire des dépenses, nous avons, par exemple, les fonds pour la convention de règlement conclue dans le cadre du litige collectif de la bande de Gottfriedson qui, à eux seuls, s’élèvent à 2,9 milliards de dollars et qui représentent donc la majeure partie de l’augmentation au cours de cette année-là.
La sénatrice Marshall : Me reste-t-il du temps?
Le vice-président : Oui. Il vous reste une minute.
La sénatrice Marshall : J’étais en train d’examiner les différents types de revendications. Comment les suivez-vous au sein du ministère? Quelqu’un nous a donné une longue liste. Existe-t-il une liste définitive de revendications quelque part? Y a-t-il une personne responsable dans votre ministère? Pourriez-vous nous expliquer le fonctionnement? Nous voyons parfois les revendications presque comme quelque chose de général, mais il y a plus que cela. Pouvez-vous nous expliquer comment les choses fonctionnent?
Mme Côté : Bien sûr. Nous avons différents types de revendications au ministère. En ce qui a trait aux litiges, nous travaillons bien entendu en collaboration avec le ministère de la Justice. Il dispose d’un système de suivi pour les revendications qui sont déposées et les détails les concernant.
Dans le secteur de la gestion financière du ministère, des fonctionnaires collaborent avec le ministère de la Justice pour suivre les estimations concernant l’issue de ces revendications. Les litiges constituent un élément important, mais nous avons aussi, par exemple, des revendications particulières. Il y a aussi des revendications territoriales globales. Ces types de revendications, qui ne font pas l’objet de poursuites, mais plutôt de négociations, font l’objet d’un suivi.
Nous avons des programmes spécifiques au sein du ministère. Nous disposons d’une base de données d’inventaire pour les suivre toutes. Il y a un bon nombre de revendications au sein du ministère.
La sénatrice Marshall : Combien de revendications ne sont pas encore réglées? Combien y en a-t-il sur votre liste à l’heure actuelle?
Mme Côté : C’est une bonne question. Pour ce qui est des revendications particulières, plus de 500...
La sénatrice Marshall : Mon temps est maintenant écoulé.
Le vice-président : Oui. Nous pourrons peut-être y revenir au deuxième tour.
La sénatrice Marshall : Oui. Au deuxième tour. Merci.
[Français]
Le sénateur Gignac : Je souhaite la bienvenue aux représentants des deux ministères. Avant de poser une question, je vous remercie de votre travail. Si la qualité de vie et le niveau de vie dans les communautés autochtones se sont améliorés au cours des dernières années, je crois que vous y êtes pour quelque chose. Cela dit, nous sommes ici pour analyser les chiffres et poser des questions un peu plus difficiles.
Je vais commencer par les remarques de la vérificatrice générale. Monsieur Thompson, dans son rapport de 2022, celle-ci parlait de la gestion des urgences dans les collectivités des Premières Nations, et je cite un paragraphe du rapport :
Dans l’ensemble, Services aux Autochtones Canada n’a pas fourni aux collectivités des Premières Nations le soutien dont elles avaient besoin pour gérer les urgences, comme les inondations et les feux de forêt, dont la fréquence et l’intensité ne cessent d’augmenter.
À la lumière des conclusions du Rapport 8 de la vérificatrice générale, que fait Services aux Autochtones Canada pour améliorer le soutien à la gestion des urgences qu’il fournit aux Premières Nations?
M. Thompson : Merci beaucoup pour la question. C’est très apprécié.
Donc, pour l’année en cours qui commencera dans quelques jours, le budget total pour la gestion des urgences a augmenté de 123 millions de dollars pour atteindre 231,8 millions de dollars. Cependant, j’aimerais spécifier que ce n’est pas le seul travail que nous faisons en matière de gestion des urgences. C’est le budget spécifique pour la gestion des urgences. Il y a beaucoup de travail qui se fait sur le plan des infrastructures et des services de santé et d’autres éléments également.
Tous les ans, le ministère dépense la totalité de son budget en gestion des urgences, et même plus. Chaque année, on fait des remboursements pour les dommages qui ont été subis et chaque année, on fait des demandes budgétaires. On ne manque pas d’argent en tant que tel pour la gestion des urgences. Bien sûr, on pourrait toujours en faire plus en matière d’atténuation des catastrophes, mais le ministère est toujours présent quand c’est le temps de rétablir une communauté et de remédier aux urgences.
Je vais céder la parole à Sylvain Souligny, sous-ministre adjoint par intérim, Opérations régionales, qui pourra donner plus de détails à ce sujet.
Sylvain Souligny, sous-ministre adjoint par intérim, Opérations régionales, Services aux Autochtones Canada : Merci, sénateur Gignac. J’aimerais répondre rapidement à votre référence au rapport. Le ministère a totalement pris acte du rapport et a développé un plan d’action très détaillé. On vise à mettre de l’avant les mesures qu’on a présentées par rapport aux différents plans. Cela inclut un investissement de notre part pour la prévention; un effort est fourni, et cela inclut un partenariat avec d’autres organisations et des ententes multilatérales avec les Premières Nations et les gouvernements provinciaux et territoriaux impliqués. Il y a beaucoup de travail qui se fait sur ce plan-là, mais le ministère s’est engagé à s’assurer que là où il y a des besoins pour ce qui est de réponses de recouvrement, il demeure très actif et il est en mesure de fournir du financement. On optimise les fonds alloués.
Le sénateur Gignac : Ma seconde question s’adresse aux deux ministères.
L’idée, c’est qu’il n’y a pas que la vérificatrice générale qui se montre parfois critique par rapport à ce que font les deux ministères, mais également le directeur parlementaire du budget, qui, en mai dernier — le 18 mai —, a publié un rapport indiquant que dans le fond, depuis 2015, donc depuis que le gouvernement est au pouvoir, les budgets ont effectivement augmenté de façon considérable, mais cela n’a pas entraîné une augmentation proportionnelle dans les capacités des organisations à atteindre leurs cibles. J’aimerais que vous preniez une minute chacun pour réagir aux propos du directeur parlementaire du budget et que M. Thompson réponde d’abord.
M. Thompson : Merci pour la question. C’est très apprécié. Évidemment, c’est facile de dire qu’il y a toujours un écart entre l’investissement qui est fait, l’argent investi et les résultats. Certains résultats vont s’étendre sur plusieurs générations. Aussi, dans certains domaines d’intervention, selon notre plan ministériel, il y a des mesures de rendement pour lesquelles il est plus facile de faire de l’étalonnage, alors que pour d’autres, les communautés ne sont pas nécessairement d’accord sur les mesures utilisées. Elles affirment qu’on ne peut pas les mesurer de la même façon en fonction de leurs distinctions et en raison de leurs réalités. Il y a beaucoup de travail qui se fait.
Il y a un financement de 81,5 millions de dollars dans nos budgets pour travailler avec nos collègues autochtones sur les données et la gestion du rendement du travail pour mesurer la performance. Donc, du travail se fait de ce côté.
Le sénateur Gignac : Madame Côté, les remarques du directeur parlementaire du budget s’adressaient également à vous.
Mme Côté : Je vous remercie de la question. Ma réponse se rapproche de celle de mon collègue Philippe Thompson, dans le sens où nous travaillons beaucoup à améliorer la qualité des données dont nous disposons pour pouvoir mesurer les résultats. Pour ce qui est précisément de nos indicateurs de performance, nous avons dû réviser notre cadre de résultats pour essayer de mesurer aussi les bonnes choses.
Donc, à ce moment-là, il y a moins de continuité d’un résultat à l’autre sur le plan de la comparabilité. Cependant, nous améliorons les indicateurs de rendement et les données qui nous permettent de les mesurer.
[Traduction]
Le sénateur Smith : Monsieur Thompson, je pourrais peut-être vous poser la question et vous ou vos collègues pourrez nous répondre.
Dans le plan ministériel de 2023-2024 de votre ministère, on mentionne le risque que la pénurie de fournitures, de main-d’œuvre et d’équipement ait des répercussions sur la mise en œuvre de divers projets d’infrastructure, ce qui pourrait entraîner une augmentation des coûts également.
Disposez-vous de données sur le nombre de projets d’infrastructure qui ont été retardés en raison des variables que je viens de mentionner? Dans quels cas les risques sont-ils plus importants?
M. Thompson : Merci beaucoup de la question. Il est vrai qu’en raison de l’inflation et, surtout, de la pandémie, il y a eu beaucoup de retards. Il était difficile d’acheminer des ressources vers les collectivités. Nous faisons moins avec les fonds dont nous disposons en raison de l’inflation et du coût de la main-d’œuvre.
Je vais demander à mon collègue, M. Souligny, de vous en dire davantage sur le travail que nous accomplissons concernant les infrastructures et sur les retards potentiels dans la mise en œuvre des projets.
Sylvain Souligny, sous-ministre adjoint par intérim, Opérations régionales, Services aux Autochtones Canada : Merci, sénateur Smith. C’est une excellente question.
Pour ce qui est des données précises, il faudra que je vous communique les renseignements dont nous disposons plus tard. Je ne les ai pas sous la main. Il est certain qu’il y a eu des répercussions, qu’il s’agisse de la pandémie, comme l’a mentionné M. Thompson, ou d’autres éléments — l’approvisionnement en matériel dans certains cas, et aussi l’accès à certaines collectivités peuvent avoir des répercussions sur les plans.
Cela dit, nous avons un plan détaillé pour les infrastructures et nous travaillons en étroite collaboration avec nos partenaires. Nous ne manquerons pas de vous communiquer des chiffres.
Le sénateur Smith : Si vous le permettez, j’ai une autre question à ce sujet. Dans quelle mesure ces risques nuisent-ils à l’évaluation des différents paramètres liés à l’infrastructure qui sont définis par le ministère, et comment atténue-t-on ces risques?
M. Souligny : En ce qui concerne les risques, nous avons une bonne compréhension des différentes variables connues et nous sommes en mesure de planifier en conséquence.
Cela dit, il s’agit encore une fois de travailler avec nos partenaires et les collectivités, de veiller à la transparence et de nous assurer que nous sommes en mesure de nous adapter là où c’est nécessaire quant aux plans mis en place. Voilà sur quoi le ministère axe ses efforts.
Parallèlement, nous travaillons à renforcer notre approche dans une perspective fondée sur les risques. Nous examinons les risques et les résultats attendus et, comme vous l’avez dit, les mesures d’atténuation que nous devons mettre en place. Nous sommes en train de renforcer cette approche du point de vue de l’infrastructure, compte tenu des investissements.
Le sénateur Smith : J’essaie de comprendre. Si vous utilisez trois ou quatre paramètres pour vos projets et que vous avez des difficultés à les mettre en œuvre, quels sont ces paramètres? Y a-t-il une liste de contrôle que vous mettez à jour afin de pouvoir vérifier, au fur et à mesure, si vos projets avancent ou non?
M. Souligny : Ce qui est important dans notre cas, c’est que nous fournissions des fonds aux collectivités et aux organisations avec lesquelles elles travaillent afin de pouvoir faire progresser les choses sur le plan de l’infrastructure. Dans ces cas-là, il s’agit de travailler avec elles et d’avoir une idée de la façon dont les choses progressent.
De notre côté, je reviendrais sur le travail d’équipe. Nous avons une expertise pour voir s’il y a des paramètres spécifiques que nous suivons, mais c’est vraiment avec les partenariats que nous avons mis en place et les collectivités qui sont capables d’avancer quant aux travaux qu’elles ont définis dans leurs propres plans.
Le sénateur Smith : Si nous pouvions connaître deux ou trois de ces paramètres, parce qu’ils vous donneront des signaux qui vous seront utiles dans le cadre de vos projets. Si vous pouviez nous les fournir, ce serait formidable.
Le sénateur Loffreda : Bonsoir, et bienvenue à tous nos témoins.
Ma question s’adresse à Services aux Autochtones Canada. Je vais poursuivre au sujet du rapport de la vérificatrice générale du Canada, qui a constaté que les dépenses de Services aux Autochtones Canada liées aux activités d’intervention et de rétablissement en cas d’urgence étaient 3,5 fois plus élevées que celles liées aux activités de préparation et d’atténuation au sein des communautés. Ces données concernent les années 2018 à 2022. Or, selon la vérificatrice générale du Canada, pour chaque dollar investi dans les efforts de préparation et d’atténuation, 6 $ peuvent être économisés en coûts d’intervention et de rétablissement en cas d’urgence.
L’allocation des fonds entre les activités de préparation et d’atténuation et les activités d’intervention et de rétablissement relève-t-elle de la ministre et de la sous-ministre? Quelle est votre réaction à ces observations de la vérificatrice générale? Envisagez-vous d’investir davantage dans la prévention au cours des prochaines années? Que planifiez-vous pour les années à venir?
M. Thompson : Merci pour cette question. Nous reconnaissons l’importance du rapport de la vérificatrice générale parce qu’il nous oriente dans la bonne direction en ce qui concerne les mesures à prendre à l’avenir.
Comme je l’ai mentionné, nous allouons chaque année les fonds que nous recevons pour l’atténuation, et 100 % de ces fonds sont attribués. Ils sont répartis en fonction des risques. Le risque zéro n’existe pas. Le nombre et l’ampleur des catastrophes naturelles augmentent d’année en année. Nous avons un vaste territoire. Il y aura toujours des conséquences. Même si nous les atténuons au maximum, nous ne pouvons malheureusement pas les éliminer complètement. Des interventions seront toujours nécessaires.
Nous espérons pouvoir réduire le montant des fonds que nous devons consacrer aux activités d’intervention et de rétablissement. Parallèlement, nous espérons pouvoir continuer à intensifier les activités d’atténuation. Lorsque nous menons un projet d’infrastructure, nous voulons renforcer les mesures d’atténuation et construire des infrastructures plus solides afin que les gens soient moins touchés en cas de catastrophe.
Mon collègue M. Souligny voudra peut-être ajouter quelque chose.
M. Souligny : Merci, sénateur, pour cette question. Comme je l’ai dit tout à l’heure, nous prenons les recommandations au sérieux. Il est certain que la fonction de préparation et de prévention a été mise en évidence.
Au début de la nouvelle année, il y a eu, dans notre allocation budgétaire, une augmentation des fonds consacrés aux activités de préparation et d’atténuation. En outre, certaines initiatives ont été lancées à la suite de décisions budgétaires antérieures. Par exemple, l’initiative FireSmart vise à renforcer les compétences des communautés des Premières Nations pour prévenir les feux de forêt et s’y préparer. Nous avons aussi le Programme de renforcement des capacités, sur une période de cinq ans, qui s’intéresse à la résilience en cas de catastrophe et qui fournit des fonds aux coordonnateurs de la gestion des urgences dans les communautés pour qu’ils examinent la préparation et les besoins éventuels. Enfin, des investissements continus sont réalisés dans les activités de préparation et les mesures d’atténuation non structurelles, mais il y a aussi un investissement massif sur cinq ans afin de garantir la mise en œuvre de projets qui assurent l’état de préparation lorsque des situations de ce genre se produisent.
Des investissements et des efforts sont donc en cours. Par ailleurs, les partenariats avec d’autres organisations, y compris les provinces et les territoires, mais aussi avec les communautés des Premières Nations, sont importants pour améliorer la fonction.
Le sénateur Loffreda : La vérificatrice générale affirme que la gestion des urgences dans les réserves ne s’est pas améliorée depuis 2013. Cela fait maintenant 10 ans. Prévoyez-vous une amélioration dans les années à venir? Pourquoi n’y a-t-il pas eu d’amélioration? Le financement est là. Vous demandez des fonds, et nous approuvons ces prévisions budgétaires année après année, alors qu’est-ce qui manque?
M. Souligny : Nous prenons les recommandations très au sérieux. Nous avons un plan d’action clair qui tient compte de chacun des points. Comme l’a dit M. Thompson, le ministère optimise les fonds qu’il reçoit. Il y a beaucoup d’efforts au chapitre des activités de rétablissement et du soutien que nous offrons lorsque de telles situations se produisent. Le ministère déploie ses capacités et travaille avec ses partenaires à cet égard. Comme vous l’avez fait valoir, grâce au plan d’action que nous avons mis en place, nous nous attendons sans contredit à des améliorations continues à l’avenir.
Le sénateur Loffreda : J’ai hâte de voir ces améliorations dans les années à venir. Je vous remercie.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Je vais commencer avec vous, monsieur Thompson, afin de faire un suivi sur un échange que nous avons eu au sujet du versement de fonds que le gouvernement devait faire pour indemniser les enfants et les familles autochtones en ce qui concerne le principe de Jordan.
Je vous avais alors mentionné qu’il s’agissait de la somme extraordinaire de 2,1 milliards de dollars, et vous m’aviez quelque peu étonné en affirmant que votre ministère demeurerait celui qui décide à qui va cet argent, mais que vous étiez sur le point de le verser en entier à une tierce partie qui émettrait des chèques à votre demande. Plus étonnant encore, vous aviez refusé de dire qui allait gérer cette importante somme d’argent. Je pense que vous deviez négocier avec un fiduciaire.
Aujourd’hui, neuf mois plus tard, pouvez-vous me dire qui gérera cet argent et dans quelles conditions?
J’imagine que cela va coûter des sous. De plus, cet argent n’a évidemment pas été dépensé. Qui va encaisser les intérêts sur ces 2 milliards de dollars en attendant que les sommes soient décaissées?
M. Thompson : Merci pour la question. Les négociations continuent de progresser. Nous n’avons pas encore conclu d’entente. Pour ce qui est des détails sur la mécanique des versements, je pourrais inviter ma collègue Lisa Legault à venir à la table. Elle pourra vous donner plus de détails sur la façon dont l’argent sera placé une fois l’entente conclue, qui administrera les fonds et qui déterminera comment les paiements seront issus et acquis.
Le sénateur Dagenais : Madame sourit, donc elle va me les donner.
Lisa Legault, directrice principale, Direction de l’enfance et de la famille, Services aux Autochtones Canada : Comme M. Thompson vient de l’expliquer, nous sommes en train de négocier. Nous n’avons pas encore conclu d’entente.
Je vais reculer un peu dans le temps. Nous avons conclu une entente au mois de juillet l’année dernière. Dans l’entente, qui est devenue publique — je vais vous parler en français, mais je passe la plupart de mes journées à parler en anglais, donc je vais peut-être parler en anglais aussi... On a conclu une entente avec les parties au sujet de l’indemnisation au mois de juillet. Dans cette entente, il y avait des conditions pour décider d’une tierce partie afin de mettre en œuvre les paiements pour les bénéficiaires.
Cette entente n’a pas été acceptée par le tribunal. Nous sommes de retour à la table pour négocier afin de répondre aux divergences qui n’ont pas été résolues, selon le tribunal. Pour le moment, je peux simplement vous dire qu’il y aura une tierce partie, comme dans les autres recours collectifs. Par exemple, on a eu, dans les autres recours, des contrats avec des firmes comptables. Cela suivra la même logique dans ce cas-ci, mais je ne peux pas vous expliquer en détail maintenant qui aura le contrat et comment les fonds seront déboursés. J’ai justement passé toute la journée avec les avocats à parler des détails qui doivent être mis au point pour être capable de répondre à cette question.
Le sénateur Dagenais : Vous comprendrez que je trouve cela étonnant. Je considère que les gens du ministère ont les compétences nécessaires. Pourquoi a-t-on besoin d’un tiers pour distribuer ces sommes, alors que vous devriez être capables de le faire, j’imagine?
[Traduction]
Mme Legault : Je ne veux pas insulter mes collègues comptables. La raison pour laquelle nous cherchons à retenir les services d’une autre entreprise, c’est que nous n’avons pas l’expérience nécessaire pour concevoir et fournir des systèmes de paiement aussi complexes, mais d’autres, malheureusement, ont acquis cette expertise dans le cadre de conventions collectives antérieures. Par exemple, je songe à des entreprises comme Deloitte et à celle qui a conçu le Système d’inscription des Indiens.
Ce sont de grandes entreprises qui possèdent l’expertise nécessaire pour nous assurer une bonne gouvernance, une bonne surveillance et une bonne gestion financière. Certes, nous avons une très grande expertise en gestion de fonds ministériels, mais lorsqu’il s’agit de gérer quelque chose d’aussi important — on parle de 20 milliards de dollars qui seront versés à des particuliers —, nous devons nous tourner vers des gens qui ont les compétences nécessaires, et ces entreprises nous apportent ce genre d’expertise.
[Français]
Le sénateur Dagenais : C’est une question du sénateur Gignac : vous venez de dire que vous dépensez 81 millions de dollars pour mesurer vos performances. C’est beaucoup d’argent. Qu’est-ce qui coûte 80 millions de dollars, et à qui donnez-vous cet argent?
M. Thompson : C’est du financement que nous avons reçu sur une période de quelques années pour augmenter la capacité des communautés autochtones à bâtir leur propre institut de statistiques. C’est pour permettre aux communautés autochtones de gérer et de posséder leurs propres données et de mesurer leur performance. Il y a du travail qui doit être fait en ce qui a trait au transfert des données détenues par Statistique Canada. Il y a un plan par groupe distinctif pour que chacun puisse bâtir sa capacité pour que tous possèdent leurs propres données. Le financement est consacré aux communautés autochtones pour qu’elles bâtissent ces capacités statistiques.
[Traduction]
Le sénateur Boehm : J’aimerais remercier les témoins d’être des nôtres en cette soirée sombre et orageuse à Ottawa. Mes questions s’adressent aux deux ministères — à vrai dire, il s’agit d’une seule question —, et je vais poursuivre sur la lancée de mes collègues, les sénateurs Gignac et Smith, pour parler du rendement et des indicateurs de rendement.
Si on remonte un peu dans le temps — et je pense que vous travaillez tous au sein de la fonction publique depuis quelques années —, à l’arrivée au pouvoir du gouvernement actuel, lorsque la philosophie de la « résultologie » prévalait, les ministères devaient établir certains indicateurs de rendement et atteindre les résultats prévus, à défaut de quoi ils devaient se justifier. C’est également cette philosophie qui a mené à la publication des lettres de mandat des ministres. Les sous-ministres ont également été soumis à ce genre de processus inquisitorial. Je m’en souviens très bien.
Je me demande simplement si, au fil du temps — le gouvernement en est maintenant à sa huitième année au pouvoir —, vous avez peaufiné vos méthodes de « résultologie », pour reprendre cette expression. Chaque ministère comptait une personne chargée de veiller à l’atteinte des objectifs en fonction des indicateurs. Dans certains ministères, il s’agissait du directeur financier et, dans d’autres, c’était quelqu’un d’autre au sein de la structure organisationnelle.
Compte tenu de l’ampleur des sommes en jeu, année après année, pour des choses qui sont toutes très importantes, nous le savons, je me demande simplement comment votre utilisation des indicateurs a changé avec le temps, si elle a changé. Comment tenez-vous compte de l’inattendu et des risques, qu’il s’agisse d’un incendie climatique, d’une inondation ou d’autre chose? Ou comment expliquez-vous l’arriéré de 112 projets d’infrastructure, même si l’on sait qu’il y a eu des circonstances atténuantes, la pandémie, etc.
Je serais très curieux de savoir si votre méthodologie a changé pour vous adapter en cours de route, si le tableau général brossé par le Bureau du Conseil privé a changé et si vous êtes en mesure de vous comparer à d’autres ministères.
M. Thompson : Je vous remercie de cette question. Elle me tient à cœur, étant donné que les mots « résultats et exécution » figurent justement dans mon titre, c’est donc très important pour moi. Je suis très fier d’annoncer que notre ministère a accompli un travail remarquable au cours des deux derniers exercices afin de se doter d’un nouveau Cadre ministériel des résultats. À mon arrivée au ministère, je m’interrogeais sur la façon dont nous rendions des comptes, et je sais que vous lisez tous attentivement les plans ministériels et le Rapport sur les résultats ministériels. Vous aurez remarqué que dans le nouveau plan ministériel de cette année, nous avons introduit le nouveau Cadre ministériel des résultats, et j’ai l’impression que cela nous confère un regard beaucoup plus ciblé et stratégique, parce que nous avons maintenant des domaines de service dont nous pouvons vraiment évaluer le rendement sur les plans de la santé, du développement économique, de l’infrastructure, etc. C’était un peu compliqué avant, il était difficile de s’y retrouver.
Le Cadre ministériel des résultats a été adopté. Il s’agit de sa première itération dans le plan ministériel. Nous avons encore du travail à faire pour peaufiner nos mesures du rendement et des résultats. Nous disposons toutefois désormais d’énoncés des résultats.
Ce qui est parfois difficile, c’est de définir cet énoncé des résultats. Qu’essayons-nous de réaliser? Comment définir l’efficacité?
Nous nous sommes arrêtés. Nous avons travaillé avec les organisations autochtones aussi. Nous nous sommes concertés avec l’Assemblée des Premières Nations, l’APN, et l’Inuit Tapiriit Kanatami, l’ITK, afin que notre énoncé et nos définitions représentent réellement la vision du monde autochtone. Nous connaissons les résultats escomptés.
Nous devons maintenant vraiment viser des indicateurs de rendement qui ont du sens pour nos partenaires.
Dans le domaine de la santé, par exemple, je pense que nous sommes un peu plus avancés parce que nous travaillons à établir des indicateurs dans ce domaine depuis longtemps. Mais il y a des sections dans nos plans ministériels où vous verrez que nous sommes encore en discussions. Nous avons essayé, dans les notes, de donner un bon aperçu de l’état d’avancement de nos travaux avec nos partenaires pour convenir d’indicateurs de rendement.
Nous utilisons de nombreux indicateurs de rendement pour gérer nos activités, et nos partenaires les utilisent aussi, mais dans le Cadre ministériel des résultats, nous sommes limités à une série d’indicateurs très publics. Nous nous sommes engagés à travailler avec nos partenaires pour déterminer quels sont les bons indicateurs et quels sont les bons objectifs.
Il faudra également tenir compte des distinctions. Pouvons-nous vraiment utiliser les mêmes indicateurs pour mesurer les résultats dans les différentes communautés? C’est parfois le grand défi auquel nous sommes confrontés. Pouvons-nous nous mettre d’accord sur les indicateurs que nous utiliserons? Voilà où nous en sommes. Nous sommes très investis dans cette démarche.
Le financement que je viens de décrire pour colliger des données autochtones et renforcer les capacités au sein des communautés nous aidera à atteindre nos objectifs. J’aimerais que nous soyons déjà plus avancés, mais nous devons travailler avec nos partenaires.
Notre réalité est assez unique. Les autres ministères n’ont pas nécessairement besoin de négocier leurs indicateurs de rendement. Ils peuvent décider eux-mêmes de la façon dont ils vont mesurer leur rendement. Dans notre cas, je pense que nous devons à nos partenaires d’être plus collaboratifs. Madame Côté, je ne sais pas si vous voulez ajouter quelque chose.
Mme Côté : C’est très semblable pour nous. Comme je l’ai mentionné au sénateur Gignac, nous avons apporté quelques améliorations au fil des ans. Notre Cadre ministériel des résultats a beaucoup changé au fil des ans. Nous sommes encore en train d’élaborer des cibles pour déterminer l’objectif et ce que nous voulons réaliser à partir de ces indicateurs.
Comme l’a mentionné M. Thompson, nous travaillons en partenariat avec les Premières Nations autochtones à l’élaboration d’indicateurs qui ont du sens, et l’objectif actuel est d’assurer la stabilité.
Le sénateur Boehm : Vos interlocuteurs découvrent les résultats escomptés et toute la séquence de la « résultologie », sans nécessairement utiliser ce mot.
Mme Côté : Ils participent à l’établissement des objectifs qu’ils veulent nous voir atteindre.
Le sénateur Boehm : Sur les revendications, par exemple?
Mme Côté : Nous avons justement des indicateurs sur les revendications. C’est une nouveauté dans le cadre de 2023-2024. Nous avons des cibles très précises à cet égard. De mémoire, je crois que l’un des objectifs consiste à conclure 35 règlements des revendications particulières cette année. Donc oui, nos partenaires sont au courant, et c’est un objectif de notoriété publique.
Le sénateur Boehm : Merci beaucoup.
La sénatrice Duncan : Je remercie nos témoins de leur présence ici. J’aimerais adresser ma première question à M. Thompson. Dans le Budget principal des dépenses de 2020-2021, 2021-2022 et 2022-2023, deux postes budgétaires me sautent aux yeux. Il s’agit des subventions visant à fournir un soutien au revenu aux personnes qui vivent dans les réserves et aux Indiens inscrits du territoire du Yukon et des contributions visant à fournir un soutien au revenu aux personnes qui habitent dans les réserves indiennes et aux Indiens inscrits du territoire du Yukon.
Si j’y ajoute les montants figurant dans le budget supplémentaire des dépenses (C) et que je pose la même question concernant les montants totaux, il semble que 1,32 milliard de dollars ont été attribués au territoire du Yukon. Nous avons déjà discuté de la réalité dans les réserves et du manque de réserves au Yukon.
Lorsque j’ai posé ma question, un peu plus tôt, j’ai obtenu une réponse détaillée sur la différence entre les subventions et les contributions. Pouvez-vous préciser à quoi renvoient ces postes dans le budget principal?
M. Thompson : Je vous remercie de cette question. Je voudrais m’excuser auprès du comité parce que cette question m’a été posée à plusieurs reprises et que je pense l’avoir mal comprise au départ. J’aurais dû clarifier les choses plus tôt. Je comprends maintenant exactement d’où vient la confusion.
La façon dont le poste budgétaire est décrit dans le tableau sème la confusion. Je veillerai à ce que mon équipe corrige le problème. Je vérifierai comment nous pourrions changer notre formulation.
Lorsqu’on lit qu’il s’agit de contributions ou de subventions — parce qu’il y a une partie du budget pour les contributions et une autre pour les subventions — visant à fournir un soutien au revenu aux personnes qui vivent dans les réserves et aux Indiens inscrits du territoire du Yukon, tout cet argent semble destiné au Yukon. Si tous les fonds destinés au soutien au revenu sont regroupés, il faudrait peut-être ajouter une virgule dans la phrase.
Il s’agit en fait des contributions au soutien au revenu pour les résidents des réserves, virgule, et les Indiens inscrits du Yukon. Ce montant de 1,3 milliard de dollars est pour l’ensemble du Canada, et la partie de cette somme réservée pour les gens du Yukon est incluse dans le total, mais il n’y a pas 1,3 milliard de dollars exclusivement pour le Yukon. Il s’agit du financement total du soutien au revenu pour l’ensemble du pays.
La sénatrice Duncan : Merci. Auriez-vous l’amabilité de nous fournir par écrit une ventilation de la façon dont cet argent est dépensé dans l’ensemble du Canada?
Je remarque que selon une réponse que vous avez fournie précédemment — et je ne veux pas me substituer à ma collègue, la sénatrice Pate —, Services aux Autochtones Canada s’est engagé en 2018 à réserver 8,5 millions de dollars sur deux ans à la collaboration avec les Premières Nations à un programme d’aide au revenu. Cet engagement du ministère visait à enclencher une réforme du programme.
Dans son rapport intitulé La population d’abord, le gouvernement du Yukon s’est engagé à travailler avec les Premières Nations et, bien sûr, avec le Canada — parce que ces relations sont différentes — afin d’établir un quelconque programme de revenu de base.
Je n’ai pas eu l’occasion d’en discuter avec les fonctionnaires du Yukon ni avec les représentants des Premières Nations du Yukon, mais le Canada a-t-il avancé dans son travail en vue d’un programme de soutien au revenu avec les Premières Nations du pays?
M. Thompson : Merci beaucoup pour cette question. Je vais demander à mon collègue, M. Kenney, d’y répondre.
Ian Kenney, sous-ministre adjoint par intérim, Programmes et partenariats en matière d’éducation et de développement social, Services aux Autochtones Canada : Le programme de soutien au revenu relève de notre secteur. Vous avez raison, 8,5 millions de dollars nous ont été accordés dans le budget de 2018 pour mener des consultations visant à réformer, essentiellement, le programme de soutien au revenu dans l’ensemble du pays. Ces consultations se sont tenues sur deux ans. Elles ont été un peu ralenties par la pandémie, bien sûr, mais nous les avons achevées en 2021, si je ne me trompe pas.
Nous avons ensuite travaillé avec nos partenaires à prendre acte des résultats des consultations, des discussions qui ont eu lieu partout au pays, et à les traduire en orientations stratégiques. Nous travaillons toujours avec nos partenaires à l’élaboration de politiques fondées sur ces discussions.
Nous espérons essentiellement arriver à proposer un nouveau programme. En fait, je ne devrais peut-être pas utiliser le mot « programme », ce serait plutôt une nouvelle façon de concevoir le soutien au revenu, soit l’assistance sociale permettant de donner aux communautés, y compris aux Premières Nations du Yukon, dans un sens, beaucoup plus de pouvoir sur la façon dont elles veulent administrer leur propre système chez elles. Dans certaines communautés, cela pourrait inclure quelque chose qui ressemblerait à un revenu de base.
Je sais que l’idée d’un revenu minimum garanti est revenue dans les discussions entourant l’enquête sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées. C’était vraiment dans le contexte d’un régime qui s’appliquerait à l’échelle du Canada, et cela dépasse un peu la portée de notre seul programme. Mais, là encore, nous essayons d’intégrer au nouveau programme quelque chose qui donnerait aux communautés la souplesse nécessaire pour offrir quelque chose de semblable chez elles ou peut-être en collaboration avec les collectivités voisines.
La sénatrice Duncan : Les résultats de votre rapport sont-ils publics ou pourrions-nous les avoir afin de voir le portrait de la situation dans l’ensemble du pays?
M. Kenney : Le rapport des consultations se trouve sur notre site Web, mais nous pourrons vous le fournir.
La sénatrice Duncan : Merci beaucoup. J’aimerais m’inscrire au deuxième tour.
La sénatrice Bovey : Merci, monsieur le président. Je vous remercie tous d’être parmi nous. Je trouve tout cela fascinant.
Monsieur Thompson, votre troisième point concernait l’éducation. Comme nous le savons tous, le gouvernement fédéral est responsable des budgets de l’éducation pour l’Arctique, qui relèvent peut-être de Mme Côté.
De 2017-2018 jusqu’en 2019, le Sénat avait un comité spécial sur l’Arctique. Nous avons déposé en juin 2019 un rapport intitulé Le Grand Nord : Un appel à l’action pour l’avenir du Canada. Pendant nos audiences, j’ai rencontré deux jeunes femmes qui étaient les deux premières diplômées de 12e année de leur communauté nordique. Elles s’étaient rendues dans un établissement du Sud pour y suivre des études postsecondaires. Au bout de deux semaines, elles se sont rendu compte que quelque chose n’allait pas. Elles avaient toutes deux obtenu un A+ en anglais et en mathématiques en 12e année. Elles ont demandé à repasser l’examen. Leur niveau d’anglais était de 7e année dans le Sud, et leur niveau de mathématiques, de 5e année.
Lorsque nous parlons d’éducation dans le Nord et de la nécessité d’augmenter le nombre de places dans les établissements d’enseignement postsecondaires, pouvez-vous me dire quelle partie des budgets vise à relever les niveaux d’éducation? La plupart des gens, là-bas, vivent dans des logements insalubres, avec des familles multiples, ils n’ont pas d’endroit où faire leurs devoirs et n’ont qu’une connexion Internet médiocre, voire inexistante.
Vous avez également parlé d’infrastructure scolaire et de la construction d’écoles, je présume. Construirez-vous des bibliothèques scolaires? Ces jeunes n’auront aucune chance s’ils n’ont pas les ressources nécessaires pour étudier.
Mme Côté : Je vous remercie de cette question, sénatrice. Nous avons effectivement des fonds au ministère des Relations Couronne-Autochtones et des Affaires du Nord Canada pour améliorer l’éducation postsecondaire dans le Nord. Je peux peut-être céder la parole à mon collègue, M. Walsh, qui pourrait vous en parler davantage.
Wayne Walsh, directeur général, Direction générale des politiques stratégiques du nord, Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada : La réponse courte, c’est que comme dans les provinces, l’enseignement de la maternelle à la 12e année dans les territoires relève de la responsabilité des gouvernements territoriaux. Les gouvernements territoriaux obtiennent des fonds au moyen de transferts annuels du ministère des Finances.
Cela dit, le ministre Vandal a nommé un groupe de travail indépendant sur l’enseignement postsecondaire. Ce groupe a remis son rapport le 31 mars dernier, c’est-à-dire il y a un an vendredi, afin de fournir des recommandations sur l’amélioration de l’enseignement postsecondaire dans le Nord au gouvernement du Canada, mais aussi à tous les partenaires — les gouvernements territoriaux, les gouvernements autochtones et les partenaires du Cadre stratégique pour l’Arctique et le Nord.
Vous ne serez pas surpris d’entendre qu’une grande partie de ce rapport porte justement sur la question que vous venez de soulever et contient des recommandations propres à l’enseignement postsecondaire. Il met en relief l’importance de l’enseignement postsecondaire et de la diversité dans le Nord, mais aussi celle d’améliorer le système de la maternelle à la 12e année afin de préparer les étudiants à poursuivre leurs études ensuite.
Nous examinons ce rapport avec nos partenaires, les gouvernements territoriaux et les gouvernements autochtones et nous comptons élaborer conjointement des initiatives afin de répondre à ce qu’on appelle les appels à l’action dans ce rapport.
La sénatrice Bovey : Quel est le financement réservé à cette fin dans les demandes budgétaires et pouvons-nous consulter ce rapport?
M. Walsh : Oui, ce rapport est public, ce n’est donc pas un problème.
Nous avons du financement au ministère pour la conversion du Collège du Yukon en l’Université du Yukon. Nous finançons Dechinta pour l’apprentissage sur le terrain. Nous finançons également la transition du Collège Aurora en une université polytechnique.
Tout cela est pour l’enseignement postsecondaire. C’est là où nous investissons. Pour ce qui est des investissements dans l’éducation de la maternelle à la 12e année, ils relèvent toujours de la compétence des gouvernements territoriaux.
La sénatrice Bovey : Ma prochaine question est la suivante : nous parlons de développement économique, et Mme Côté a parlé de droits; je pense avoir déjà soulevé la question et c’est un nouveau sujet, donc je ne m’attends pas vraiment à des réponses, mais j’aimerais savoir ce que vous faites pour protéger les droits des créateurs et des artistes autochtones. Ce sont des entreprises à part entière, des petites entreprises.
J’aimerais savoir combien d’argent vous consacrez à la propriété intellectuelle des créateurs autochtones pour les aider à développer leurs entreprises parce qu’ils perdent des centaines de milliers de dollars à cause des réseaux de fraude internationaux.
M. Thompson : La question porte sur le développement économique. Mme Blanchette a peut-être quelque chose à ajouter à ce que je vais dire. Nous n’avons pas vraiment de programmes et de services directement liés à la propriété intellectuelle.
La sénatrice Bovey : Les droits de la personne comprennent le droit à la création, n’est-ce pas? Ils comprennent le droit à l’expression, si bien que je ne comprends pas très bien où ces droits se situent.
M. Thompson : Vous avez absolument raison. Je pense qu’ils relèveraient d’autres autorités, peut-être d’autres ministères. Il y a des éléments d’application de la loi là-dedans. Nous nous concentrons vraiment sur la prestation de services. Je suis sûr que nous avons des programmes pour appuyer les arts et le développement économique, mais les droits d’auteur sont vraiment hors du champ de compétence de notre ministère. Nous n’avons pas de services axés sur ce genre d’activités, à moins que Mme Blanchette ne souhaite ajouter quelque chose, mais, malheureusement, je doute que nous offrions quoi que ce soit à ce chapitre.
Kelley Blanchette, sous-ministre adjointe, Terres et développement économique, Services aux Autochtones Canada : Non, je peux vous parler de nos programmes de développement économique en général, mais si vous vous intéressez à la propriété intellectuelle, en particulier, je pense qu’elle relèverait plutôt du ministère de la Justice.
La sénatrice Bovey : Je pense qu’il y a là une grande lacune.
La sénatrice Pate : Je prie mes collègues et nos témoins de bien vouloir excuser mon retard. J’avais une autre séance de comité qui a duré plus longtemps que prévu. Vous voudrez bien me pardonner également si mes questions ont déjà été posées par des collègues que je tiens d’ailleurs à remercier.
La vérificatrice générale a constaté que les dépenses de Services aux Autochtones Canada liées aux activités d’intervention d’urgence étaient trois fois et demie plus élevées que celles qui vont à la prévention.
Votre signe de tête indique que vous êtes au courant.
Dans le Rapport sur les résultats ministériels de 2021-2022, la proportion de ressources et de fonds consacrés à la prévention de la violence familiale est nettement inférieure à ce qui apparaîtrait nécessaire compte tenu de l’incidence des cas semblables.
Je suis consciente des chevauchements de compétence dont vous venez de faire état, mais dans un contexte d’intensification de différentes problématiques, comme les maladies chroniques, les séquelles des traumatismes passés et la criminalisation — comme Mme Blanchette pourrait certes nous le confirmer —, je me demande comment il se fait que l’on note une diminution des ressources fournies aux différentes communautés pour financer une partie des mesures de prévention nécessaires à ce titre, surtout à la lumière des constats faits par la vérificatrice générale.
Si j’ai mal interprété vos documents, n’hésitez surtout pas à me l’indiquer. Sinon, pourriez-vous me fournir les explications demandées ainsi que les données supplémentaires susceptibles de mieux m’éclairer?
M. Thompson : Merci pour la question. Je crois que nous augmentons notre financement et nos efforts de prévention dans à peu près tous nos secteurs d’activité. Si je prends l’exemple des services à l’enfance et à la famille, nous sommes en train de restructurer le programme en affectant de plus en plus de fonds aux services de prévention. Cela fait partie des éléments qui sont actuellement négociés.
Pour la prévention de la violence familiale, le budget de cette année est supérieur de 55,9 millions de dollars à celui de l’an dernier. Nous avons aussi parlé précédemment du financement additionnel consacré à la prévention dans le contexte de la gestion des urgences. Il y a aussi des augmentations pour les services de soutien en santé mentale. J’ai de plus fait référence à l’exercice du Cadre ministériel des résultats qui nous permet d’examiner de façon plus globale notre ensemble de programmes pour considérer les déterminants sociaux de la santé et comprendre que plus nous investissons à ce niveau, moins nous aurons à le faire dans des mesures correctives.
Dans notre processus de réflexion pour nos différents programmes, nous avons vraiment toujours compris la nécessité d’investir davantage dans la prévention. C’est exactement la discussion que nous avons eue concernant la gestion des urgences. Lorsqu’on peut éviter que certaines situations surviennent, c’est autant d’argent que l’on n’aura pas à dépenser.
C’est ce que je suis à même de constater dans l’ensemble de notre secteur des services. Nous accordons de plus en plus d’importance à la prévention et nous investissons en conséquence.
La sénatrice Pate : Merci pour ces précisions. Est-ce qu’il existe à ce moment-ci des données désagrégées faisant ressortir les résultats obtenus en matière de réduction des dépenses au titre des mesures d’urgence? Y a-t-il d’autres renseignements que vous pourriez nous fournir pour nous permettre de nous faire une meilleure idée de la situation?
M. Thompson : Si l’on passe en revue l’inventaire de nos programmes, il est possible d’entrer davantage dans les détails de nos comptes publics pour cibler les mesures qui sont de nature plus préventive. On peut le voir également dans la description des différents programmes.
Je conviens qu’il peut arriver que les chiffres totaux ne fournissent pas une image vraiment claire, car il s’agit d’un portrait d’ensemble du programme. Dans notre Rapport sur les résultats ministériels ainsi que dans nos plans ministériels, nous nous efforçons de brosser un tableau aussi fidèle que possible des mesures qui sont prises pour éviter que certaines choses se produisent. Ces informations sur nos efforts de prévention font souvent l’objet de descriptions qualitatives.
Nous sommes limités dans le nombre d’indicateurs qu’il nous est possible d’utiliser. Dans les rapports que nous rendons publics, nous mettons ainsi l’accent sur les indicateurs de résultats, plutôt que sur les activités. À titre d’exemple, pour toutes les évaluations de programme dont les résultats sont publiés sur notre site Web, vous pouvez trouver des détails sur les indicateurs, les activités et les ressources affectées à la prévention.
Je vous concède qu’il peut être plus difficile de retracer les activités visant expressément la prévention dans nos rapports publics du fait qu’ils offrent une perspective beaucoup plus générale.
La sénatrice Pate : Si je regarde par exemple une mesure comme le soutien à l’infrastructure de la santé, il semble y avoir une diminution pour le présent exercice. Est-ce bien ce que je dois comprendre?
M. Thompson : Pour l’infrastructure de la santé?
La sénatrice Pate : C’est en partie pour cela que je ne sais plus trop quoi penser pour ce qui est de la prévention.
M. Thompson : Je ne sais pas. Peut-être que mon collègue, M. Conn, pourrait vous répondre brièvement. Non?
La seule diminution en matière de santé dans le Budget principal des dépenses de cet exercice s’applique aux services de santé non assurés, mais il faut préciser qu’il s’agit d’un programme régi par la demande. Le financement des services de santé non assurés devrait figurer dans notre Budget supplémentaire des dépenses.
En outre, l’Accord-cadre tripartite de la Colombie-Britannique est arrivé à échéance et est en cours de renégociation. Ces fonds apparaîtront dans un budget à venir.
Vous avez donc raison : il y a dans le financement un élément d’infrastructure lié à l’Accord-cadre tripartite de la Colombie-Britannique. C’est la raison pour laquelle on pouvait constater une réduction des fonds alloués, mais ceux-ci réapparaîtront plus tard cette année dans notre Budget supplémentaire des dépenses.
[Français]
Le vice-président : Il ne nous reste que huit minutes pour une deuxième ronde. Je vous demande d’être concis dans vos questions et vos réponses et d’éviter les préambules.
[Traduction]
La sénatrice Marshall : J’ai vérifié mes chiffres pour la catégorie Services professionnels et autres à Services aux Autochtones Canada, et j’en arrive à 1,76 milliard de dollars.
Monsieur Thompson, vous avez indiqué que vous alliez nous communiquer le montant exact. Auriez-vous l’obligeance de le transmettre à notre greffière en précisant à quels genres de services professionnels vous comptez avoir recours pendant l’exercice?
Je veux revenir par ailleurs à la question des revendications, et vous pourrez me répondre par écrit. Je ne sais pas si vous auriez des informations pour m’aider à mieux comprendre comment le ministère s’y prend pour faire le suivi des revendications en suspens. J’ai noté qu’il y a un total de 500 revendications. Je ne sais pas si c’est vous qui m’avez fourni ce chiffre. C’est bien vous. Il doit y avoir dans le lot des revendications de plus grande importance, peut-être une vingtaine.
Je voudrais simplement me faire une meilleure idée de la manière donc vous suivez l’évolution de ces dossiers. Je constate que l’on parle sans cesse de « revendications » et de « règlements » dans votre budget comme dans celui de M. Thompson, si bien qu’il est difficile de savoir exactement de quoi il en retourne. Si vous pouviez nous transmettre des précisions sur la façon de suivre le tout, cela nous serait très utile.
M. Thompson : Je peux répondre très brièvement. C’est ma soirée pour présenter des excuses au comité. J’avais mal compris votre question. Il faut croire que j’avais besoin d’un peu d’échauffement.
Vous avez raison concernant le 1,7 milliard de dollars. Je suis désolé, mais je vous ai donné les chiffres pour la passation de marchés. Nous atteignons un montant aussi élevé parce que nous avons désormais beaucoup plus souvent recours à des ressources externes pour les services professionnels en santé. C’est le cas notamment pour les infirmières et les services de santé non assurés. C’est la raison pour laquelle vous pouvez voir ce total de 1,7 milliard de dollars, mais le montant des contrats accordés à des entreprises externes est très faible. C’est celui que je vous ai indiqué tout à l’heure.
La sénatrice Marshall : Si vous aviez une liste des éléments inclus dans ce total de 1,76 milliard de dollars et si vous pouviez la transmettre à notre greffière, cela nous aiderait grandement dans notre travail. Merci.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Monsieur Thompson, vous nous avez parlé d’un montant de 81 millions de dollars pour aider à mettre des systèmes de gestion en place et à les administrer. Pourriez-vous nous envoyer par écrit la liste des comptes à payer avec ces 81 millions de dollars?
M. Thompson : Avec plaisir.
[Traduction]
La sénatrice Duncan : Je vais essayer d’être très concise. En 2000, lors d’une Conférence des premiers ministres de l’Ouest où l’on discutait des transferts en santé, le premier ministre Doer a déclaré que le Canada est le 14e territoire ou province à la table lorsqu’il est question du financement des soins de santé pour les Premières Nations, les Autochtones, les anciens combattants et, dans une certaine mesure, les membres de la GRC. Il n’en demeure pas moins que pendant toutes les discussions sur le financement des soins de santé, personne n’a parlé des sommes octroyées à Services aux Autochtones Canada, Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada ou Santé Canada pour aider les Premières Nations.
Pourriez-vous nous transmettre par écrit une ventilation des fonds qui vont aux services de santé non assurés? Avec qui devrions-nous communiquer pour pouvoir discuter en profondeur de ces questions au Comité des finances nationales? Est-ce avec Services aux Autochtones Canada ou avec Santé Canada? Il semble en effet exister un certain flou. Le Programme des services de santé non assurés n’est pas administré de la même manière partout au pays. Je vous prierais donc d’indiquer dans la réponse détaillée que vous n’allez pas manquer de transmettre par écrit à notre greffière la manière dont chaque province et chaque territoire gère ce programme au bénéfice des membres inscrits des Premières Nations. Merci.
M. Thompson : Ce sera avec plaisir.
La sénatrice Duncan : Merci.
[Français]
Le sénateur Gignac : Ma question s’adresse à Mme Côté.
Dans le Budget principal des dépenses, il y a quand même une augmentation de 57 % par rapport à l’année dernière. Au cours de la dernière année financière, vous nous avez fait une surprise en demandant plus de fonds dans le Budget supplémentaire des dépenses; vous avez demandé 7,9 milliards de dollars l’année dernière, en sus des dépenses principales, qui s’élevaient à 5,8 milliards de dollars. Ce sont de gros montants. Pouvez-vous nous rassurer sur le fait que votre demande de 9 milliards de dollars couvrira le total pour l’année, ou aurons-nous droit à une surprise comme l’année dernière? De plus, pourriez-vous nous expliquer pourquoi cette surprise ne reviendra pas cette année dans votre Budget supplémentaire des dépenses (A)?
Mme Côté : Oui, c’était une grosse augmentation dans les budgets supplémentaires de l’année dernière. Pour la résolution des revendications, on pourrait avoir besoin de reporter les fonds d’une année à l’autre. On voit cela apparaître dans les budgets supplémentaires : parfois, ce sont de gros montants lorsqu’il s’agit de recours collectifs.
Il faut aussi mentionner qu’une grande partie des fonds temporaires proviennent des budgets. Pour l’annonce du budget, par exemple, qui s’est faite hier... Il pourrait y avoir des initiatives pour lesquelles on a reçu des approbations dans le budget, et on devra aller chercher des fonds dans les budgets supplémentaires. Je ne peux rien promettre en ce qui a trait au montant qui sera demandé dans les budgets supplémentaires, mais je sais qu’il y en aura d’autres. L’année dernière, à mon avis, c’était quand même exceptionnel.
Le sénateur Gignac : Donc, c’est un peu en dehors de votre contrôle et cela dépend des recours et des décisions dans le budget. Merci.
[Traduction]
Le vice-président : Merci. Nous en sommes arrivés à la fin du temps alloué pour cette portion de notre séance, et le moment est venu de remercier tous nos témoins d’avoir bien voulu comparaître devant nous aujourd’hui. Nous vous en sommes très reconnaissants.
[Français]
Avant de passer à huis clos, je voudrais rappeler aux témoins de bien vouloir envoyer leurs réponses par écrit à la greffière avant la fin de la journée du jeudi 13 avril 2023. Je voudrais également aviser les sénateurs que notre prochaine réunion aura lieu le mardi 18 avril, à 9 heures — on pourra enfin célébrer le retour de notre président —, pour continuer notre travail sur l’étude du Budget principal des dépenses de 2023-2024.
[Traduction]
Nous allons maintenant poursuivre à huis clos.
(La séance se poursuit à huis clos.)