LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES LANGUES OFFICIELLES
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le lundi 5 décembre 2022
Le Comité sénatorial permanent des langues officielles se réunit aujourd’hui, à 16 h 6 (HE), avec vidéoconférence, pour étudier l’immigration francophone en milieu minoritaire.
Le sénateur René Cormier (président) occupe le fauteuil.
[Français]
Le président : Je m’appelle René Cormier, sénateur du Nouveau-Brunswick, et je suis président du Comité sénatorial permanent des langues officielles.
Avant de commencer, j’inviterais les membres du comité présents aujourd’hui à se présenter.
La sénatrice Moncion : Bonjour. Sénatrice Lucie Moncion, de l’Ontario.
La sénatrice Gagné : Raymonde Gagné, du Manitoba.
La sénatrice Mégie : Sénatrice Marie-Françoise Mégie, du Québec.
Le président : Merci et bienvenue à cette séance, chers collègues. Je souhaite également la bienvenue aux téléspectateurs de tout le pays qui nous regardent.
[Traduction]
Je tiens à souligner que les terres à partir desquelles je vous parle font partie du territoire traditionnel non cédé du peuple anishinabe algonquin.
Aujourd’hui, nous poursuivons notre étude sur l’immigration francophone en milieu minoritaire. Notre réunion se divise en trois parties d’environ 45 minutes chacune.
[Français]
Pour la première partie de la réunion, nous sommes heureux d’accueillir Marie-Josée Groulx, directrice, Attraction et intégration de la main-d’œuvre, Équipe de la croissance de la population, Opportunité Nouveau-Brunswick.
Bonsoir, madame Groulx, et merci beaucoup d’avoir accepté notre invitation pour discuter d’immigration francophone. Nous sommes prêts à entendre vos remarques liminaires, qui seront suivies d’une période de questions et de réponses de la part des sénatrices et des sénateurs.
La parole est à vous, madame Groulx.
Marie-Josée Groulx, directrice, Attraction et intégration de la main-d’œuvre, Équipe de la croissance de la population, Opportunité Nouveau-Brunswick : Bonjour à tous. Je vous remercie de l’invitation à comparaître devant vous aujourd’hui et de votre intérêt à l’égard de l’immigration francophone à l’extérieur du Québec.
[Traduction]
Je ferai maintenant un bref exposé en français, mais je pourrai répondre à vos questions dans la langue de votre choix.
[Français]
Comme vous le savez, le Nouveau-Brunswick est la seule province officiellement bilingue du Canada. Bien qu’il s’agisse d’un bilinguisme institutionnel, l’énoncé « seule province officiellement bilingue du Canada » joue un rôle clé dans l’attraction et la rétention des immigrants d’expression française.
Depuis 2015, le Nouveau-Brunswick s’est fixé l’objectif ambitieux de sélectionner annuellement 33 % de ses candidats et candidates qui parlent français d’ici la fin de l’année 2024. En 2015, 13 % de ces candidats sélectionnés par la province parlaient français. En 2021, nous avons émis 28 % de nos certificats de désignation à des candidats parlant le français. Pour 2022, notre objectif est de 30 % et nous sommes très près d’y arriver, avec seulement trois semaines qui restent à l’année civile.
Pour arriver à atteindre ses objectifs, la province travaille étroitement avec des partenaires institutionnels, tant à l’échelon provincial qu’à l’échelon fédéral, afin de maximiser sa visibilité sur les marchés internationaux et faire sa place, tant bien que mal, face à ce géant qu’est le Québec.
Le Nouveau-Brunswick investit annuellement des millions de dollars pour accompagner ses nouveaux arrivants, y compris ceux et celles qui parlent français. Des mesures novatrices sont mises en place régulièrement pour assurer une intégration des nouveaux arrivants qui choisissent de s’établir dans notre province.
Bien que la province soit dotée de régions francophones, une connaissance assez approfondie de l’anglais demeure un prérequis, dans une grande proportion des cas, pour une intégration réussie sur le marché du travail.
Cette réalité peut également être un obstacle à l’intégration et à la rétention d’immigrants francophones au Nouveau-Brunswick, qui comprennent mal ce qu’est une province officiellement bilingue. Un autre obstacle à l’atteinte des objectifs sur le plan de l’immigration francophone demeure les employeurs, qui préfèrent recruter des immigrants qui ont l’anglais comme première langue canadienne, et ce, même si les employeurs sont situés dans des régions majoritairement francophones.
L’un des autres obstacles qui surgissent régulièrement est l’utilisation par le gouvernement fédéral de la disposition de la « double intention » pour refuser un permis d’études aux étudiants étrangers qui souhaitent venir étudier dans une institution postsecondaire francophone ou anglophone et s’établir dans la province par la suite.
Bien qu’il y ait des obstacles à l’attraction d’immigrants d’expression française, il y a également beaucoup d’occasions de faire avancer ou à tout le moins de maintenir le fait français à l’extérieur du Québec.
Sur ce, je vous remercie de votre attention. Je serai heureuse de répondre à vos questions.
Le président : Merci beaucoup pour votre présentation, madame Groulx.
Nous allons débuter la période des questions et des réponses. Je vais donner la parole à la sénatrice Mégie, suivie de la sénatrice Gagné.
La sénatrice Mégie : Merci d’être avec nous aujourd’hui, madame Groulx.
Dans le rôle que vous jouez à Opportunité Nouveau-Brunswick, pour ce qui est de l’attraction et de l’intégration, faites-vous un lien entre les travailleurs et les employeurs, et les étudiants et les universités? Comment procédez-vous en matière d’immigration et comment leur trouvez-vous des visas pour venir au Canada?
Je vous pose également ma deuxième question tout de suite : quel appui recevez-vous du gouvernement fédéral par rapport à ce rôle?
Mme Groulx : Votre première question comptait quand même deux volets. Pour le volet qui a trait aux étudiants, la responsabilité du recrutement des étudiants réside vraiment au sein des institutions postsecondaires elles-mêmes. Le gouvernement n’a aucun rôle à jouer sur le plan de l’attraction des étudiants.
Cependant, si on fait du recrutement ou de la sensibilisation au sein de marchés francophones, on mentionne toujours qu’on a des institutions postsecondaires francophones jusqu’au doctorat. C’est notre rôle, c’est le rôle de mon équipe pour l’éducation.
Pour ce qui est de lier les employeurs aux travailleurs, cela fait bien partie de notre rôle. Au bout du compte, toutefois, c’est l’employeur qui choisit l’employé qu’il veut bien embaucher, bien que nous fassions, tant bien que mal, bien des efforts pour les convaincre d’embaucher de nouveaux arrivants d’expression française, surtout quand l’employeur se situe dans une région majoritairement francophone. L’employeur a cependant le dernier mot à ce sujet.
Pour répondre à votre deuxième question sur l’appui du gouvernement fédéral, les ambassades dans les marchés francophones ou anglophones et dans les marchés internationaux nous appuient toujours dans nos démarches de promotion. Nous avons quand même un partenariat assez bien développé en ce qui a trait au recrutement auprès des ambassades.
Pour ce qui est du soutien d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, on travaille également en collaboration avec le ministère pour trouver des façons novatrices d’accroître le nombre d’immigrants francophones qui viennent au Nouveau-Brunswick.
La sénatrice Mégie : Merci.
La sénatrice Gagné : Bienvenue. J’apprécie énormément votre présence ici aujourd’hui.
Il est clair que, dans tout programme en matière d’immigration francophone dans les provinces où il y a des communautés qui vivent en situation minoritaire, il est toujours important d’essayer d’établir un genre d’équilibre linguistique.
Au Nouveau-Brunswick — dans la belle province du Nouveau-Brunswick, que je connais bien —, il s’agit en somme d’essayer d’atteindre une cible de 33 %, car maintenant, étant donné la diminution du nombre de personnes d’expression française dans la province, je pense qu’on en est à une proportion de 30 %.
La Société de l’Acadie du Nouveau-Brunswick (SANB), lorsqu’elle s’est présentée ici, a mentionné qu’il serait important d’atteindre une cible de 50 %. Je pense que votre plan est d’atteindre la cible de 33 % d’ici 2024, si ma mémoire est bonne. Comment peut-on s’assurer d’avoir des stratégies en place pour essayer de faire du rattrapage, pour mettre fin à cette tendance à la baisse du poids démographique des francophones, comme on le voit un peu partout à l’extérieur du Québec?
Pour ce qui est du Québec, nous en discuterons plus tard aujourd’hui en compagnie d’un autre témoin.
Mme Groulx : C’est une excellente question. On maintient notre cible de 33 % pour l’instant, bien que le poids démographique des francophones ait diminué également au Nouveau-Brunswick. Nous travaillons aussi avec la SANB; nous savons qu’ils préconisent une cible de 50 % pour l’immigration francophone.
Pour ce qui est du rattrapage, je suis fonctionnaire et je dépends de la volonté des élus. En 2024, il y aura une nouvelle stratégie, et il est vraiment important que la communauté fasse pression auprès des élus pour voir s’il n’y aurait pas moyen d’augmenter les cibles en matière d’immigration francophone.
Les fonctionnaires font tout ce qu’ils peuvent. Honnêtement, si on pouvait surpasser les cibles, on le ferait. Il y a un certain nombre de certificats alloués chaque année qui nous permettent de sélectionner des gens; cependant, encore faut-il avoir la masse critique pour augmenter le pourcentage de personnes francophones qui sont sélectionnées.
La sénatrice Gagné : Êtes-vous en mesure de nous faire part des défis liés au recrutement d’employés bilingues pour les employeurs, particulièrement pour ce qui est de choisir plutôt des employés qui ne parlent pas nécessairement le français? Est-ce en raison d’une pénurie de candidats francophones qui se dessine?
Mme Groulx : Non. Honnêtement, je pense que c’est peut-être lié à un manque d’information. Il y a peut-être aussi des notions qui sont véhiculées sur certaines personnes ou certains pays qui seraient plus productifs que d’autres pays. Le mot se passe. Vous savez, pour un entrepreneur, ce qui est important, c’est de trouver une main-d’œuvre productive. Si tout le monde dit que les plus productifs viennent d’un pays X et que, dans ce pays, leur première langue canadienne, c’est l’anglais, les employeurs se passent le mot, et c’est là que cela devient plus difficile.
Cela crée toutefois une embûche quand ces gens se retrouvent dans des régions presque à 100 % francophones et que leurs enfants intègrent l’école francophone; le parent se dit que c’est bien, car son enfant va apprendre le français, sauf que lui ne peut pas aider son enfant à l’école. Cela crée une vraie déconnexion.
C’est difficile d’intégrer quelqu’un s’il ne peut pas fonctionner au sein de la communauté. C’est une bataille quotidienne que notre équipe doit mener, surtout dans les régions rurales francophones du Nouveau-Brunswick, pour faire valoir que c’est important d’aller chercher des gens dont la première langue canadienne est le français.
Le président : Avant de passer la parole à la sénatrice Moncion, j’aimerais poser une question complémentaire.
En ce qui a trait au défi que vous exprimez, quelle est, selon vous, la situation? Les employeurs devraient-ils disposer d’une aide supplémentaire pour accueillir des francophones? C’est quand même ce qu’on cherche à faire ici, dans le contexte de l’immigration francophone — et je pense aux régions du Nouveau-Brunswick que je connais bien. Comment peut-on régler ce problème, selon vous? Quelles mesures pourriez-vous suggérer pour aider?
De plus, quel rôle le gouvernement fédéral pourrait-il jouer en ce sens? On sait que, dans le projet de loi, on propose qu’une politique en matière d’immigration francophone soit articulée clairement. Selon vous, y a-t-il un élément particulier qui devrait être inclus dans cette politique, pour justement faire en sorte que cela aide le gouvernement du Nouveau-Brunswick à inciter les employeurs à embaucher des immigrants francophones?
Mme Groulx : Je pense qu’une plus grande sensibilisation doit être faite, tant par le gouvernement provincial que fédéral. Même au sein de notre équipe, comme un peu tout le monde, nous vivons une pénurie de main-d’œuvre. Nous n’avons donc pas la chance de faire autant de sensibilisation qu’on le souhaiterait. Le gouvernement fédéral doit sensibiliser les employeurs à l’importance d’embaucher de la main-d’œuvre francophone dans les régions francophones ou bilingues.
Pour ce qui est de l’appui sur le terrain, les choses vont plutôt bien du côté du financement. Évidemment, on peut toujours en faire plus. Il faudrait poser la question aux gens qui sont sur le terrain et qui travaillent avec les nouveaux arrivants qui ne sont peut-être pas francophones, mais qui arrivent dans des régions francophones. Ces personnes seraient mieux placées pour vous parler de ces défis.
La sénatrice Moncion : J’aimerais savoir quel rôle joue le racisme dans le choix des candidats, que ce soit pour le travail ou pour les personnes qui sont acceptées.
Mme Groulx : Vous posez une excellente question. Bien sûr, comme je le disais plus tôt, il y a des perceptions par rapport à des gens de certaines cultures et de certains pays; ces perceptions sont fausses, pour la grande majorité. Malheureusement, tout cela joue encore un rôle. Néanmoins, les choses sont beaucoup mieux qu’elles ne l’étaient. Je travaille en immigration depuis 10 ans et j’ai vu une grosse évolution. Le racisme pose toujours un défi. Toutefois, de belles avancées ont été faites. Vous avez raison, le racisme joue un rôle dans la sélection des nouveaux arrivants francophones.
La sénatrice Moncion : Je reviens aux questions posées par mes collègues en ce qui concerne les employeurs. Les récentes données publiées par Statistique Canada au sujet du Nouveau-Brunswick révèlent que la proportion de travailleurs utilisant principalement le français au travail en 2021 était légèrement à la baisse par rapport à 2016, où elle se chiffrait à 20,9 %. On prolongeait ainsi une tendance observée depuis 2021, alors que la proportion était de 22,2 %. Pour aider à renverser cette tendance, quelle stratégie comptez-vous mettre en place afin de faciliter l’intégration des personnes issues de l’immigration au sein de la fonction publique du Nouveau-Brunswick?
Mme Groulx : Je ne me suis jamais penchée sur cette excellente question. Malheureusement, je n’ai pas de réponse à vous donner aujourd’hui sur l’environnement de travail ni sur la langue de travail.
La sénatrice Moncion : D’entrée de jeu, vous avez parlé de la préférence des employeurs pour ce qui est de l’embauche de personnes unilingues anglophones. Je trouve ce commentaire un peu dérangeant, surtout dans une province comme le Nouveau-Brunswick. Cela revient aux questions qui ont été posées par mes collègues. Que fait-on pour changer cette tendance?
Mme Groulx : Nous travaillons avec eux. Nous essayons constamment de les convaincre de recruter des immigrants dans les pays francophones. Nous obtenons tout de même plus de succès qu’auparavant.
Ce n’était qu’une remarque. Il est vrai que ce fait est troublant. Certains employeurs s’entêtent à embaucher des personnes qui viennent de pays où on ne parle pas le français. Je présume que cela engendre une diminution de l’usage du français en milieu de travail. En même temps, je n’ai pas l’autorité requise pour refuser un candidat parce qu’il ne parle pas la langue de la région. Nos programmes ne sont pas conçus ainsi. Nous concevons des programmes qui deviennent beaucoup plus flexibles si on embauche des candidats francophones. Or, certains employeurs choisissent, malgré tout, d’embaucher des candidats dont la première langue est l’anglais.
La sénatrice Moncion : Sans qu’il soit question de cibles, pourriez-vous nous parler de la croissance de l’immigration au Nouveau-Brunswick, si l’on parle des anglophones par rapport aux francophones? Par exemple, en Ontario, entre 2012 et 2016, on a vu une croissance de la population d’environ trois millions de personnes. La période est peut-être plus longue, mais il s’agissait presque uniquement d’anglophones, ce qui a fait diminuer le poids démographique des francophones dans la province, sans toutefois en réduire le nombre. Pouvez-vous nous parler de la tendance au Nouveau-Brunswick?
Mme Groulx : Fait intéressant, notre objectif de 33 % se basait sur le nombre de certificats que l’on avait à ce moment-là. En 2014, nous n’avions accès qu’à 625 certificats par année. Or, 13 % de nos candidats étaient issus de l’immigration francophone. On parle d’un nombre réduit qui se chiffre autour de 100 personnes.
En 2022, nous avons eu la possibilité d’émettre des certificats à plus de 2 300 individus et familles. On parle d’une demande par famille, donc de plus de 3 000 individus. L’objectif de 33 % nous mènerait donc à 1 000 personnes pour ce qui est de la sélection. En termes absolus, le nombre de francophones que nous accueillons au Nouveau-Brunswick depuis 2014 est 10 fois plus élevé qu’auparavant. Toutes proportions gardées, étant donné que le nombre a augmenté, on compte plus de candidats anglophones que francophones. Je pense que cela engendre une dilution de la démographie pour ce qui est des francophones.
Le président : Avant de céder la parole à la sénatrice Gagné, j’aurais un commentaire à faire. Je tiens d’abord à vous remercier, car je précise que vous nous entendez, mais que vous ne nous voyez pas.
Mme Groulx : Non, votre image est gelée.
Le président : J’apprécie beaucoup votre collaboration, madame Groulx. Nous allons donc essayer de bien articuler nos questions.
J’aimerais avoir une précision. J’utilise sans doute le mauvais terme, mais vous venez de dire que vous aviez eu l’autorisation d’avoir 625 candidats. Pourriez-vous expliquer d’où vient cette procédure? Elle relève de quel type de programme?
Mme Groulx : En vertu de l’Accord Canada—Nouveau-Brunswick sur l’immigration, chaque année, le gouvernement fédéral nous octroie un certain nombre d’espaces au Nouveau-Brunswick. Depuis 2014, on a remarqué une croissance. Le nombre est passé de 625 à 3 300 cette année. On s’attend encore une fois à une croissance en 2023 et dans les années qui suivront. Comme vous le savez, le Canada a augmenté ses cibles en immigration. Nous espérons donc que le Nouveau-Brunswick bénéficiera lui aussi d’une augmentation.
De 1999 à 2014, nous n’avions qu’un programme. En 2015, le gouvernement fédéral a mis sur pied un nouveau programme et a ajouté des certificats. En 2016, le projet pilote au Canada atlantique nous a permis d’accueillir encore plus de personnes. Depuis le début de 2022, le projet pilote est devenu un programme permanent d’immigration au Canada atlantique. Bien que le programme porte le nom « atlantique », chaque province a un nombre fixe qui lui est habituellement attribué par le gouvernement fédéral, et ce, en mars de l’année qui suit.
Le président : C’est pour les deux langues confondues, pas uniquement pour l’immigration francophone.
Mme Groulx : C’est pour les deux langues confondues. Il revient vraiment à chaque province d’établir ses cibles. Le Nouveau-Brunswick a une cible ambitieuse, et ce, pour de bonnes raisons. Il n’y a donc pas un nombre précis de francophones et d’anglophones; c’est pour toutes les langues confondues. Comme je l’ai dit, c’est à chaque province d’établir ses objectifs.
Le président : Si je comprends bien, c’est le gouvernement du Nouveau-Brunswick qui détermine la proportion d’immigrants francophones qu’il souhaite accueillir.
Mme Groulx : Oui.
Le président : L’embûche pour atteindre cette cible vient du fait que les employeurs préfèrent souvent embaucher des immigrants anglophones, compte tenu de leurs critères d’embauche.
Mme Groulx : Oui. Je parle des employeurs. En ce qui concerne les provinces, on parle davantage d’immigration économique. Les candidats sélectionnés doivent l’être par un employeur ou avoir des compétences jugées assez élevées pour venir s’établir sans offre d’emploi, car ils œuvrent dans un secteur qui est fortement en demande, comme les technologies de l’information, les sciences de la santé et les centres d’appels au Nouveau-Brunswick. Bien qu’ils ne soient pas liés à un employeur, lorsqu’ils arriveront sur le territoire, ils seront facilement employables.
Au Nouveau-Brunswick, nous favorisons le fait que ces gens qui ne sont pas liés directement au marché du travail avant leur arrivée soient francophones. Leur demande est traitée en priorité.
Le président : En ce qui concerne les secteurs que vous avez énumérés, c’est la province qui les détermine. Comment cette sélection tient-elle compte de l’évolution des besoins du marché et de la situation démographique au Nouveau-Brunswick?
Mme Groulx : Ces trois secteurs sont fixes, mais il y a aussi des secteurs qui évoluent. On se fie sur l’information qui nous provient du marché du travail. Nos collègues du ministère de l’Éducation postsecondaire, Formation et Travail publient chaque mois de l’information sur les postes en demande, les tendances et les secteurs où il y a une grande demande. Nous invitons les gens en fonction de cette demande.
La sénatrice Gagné : Alors, si je comprends bien, vous avez identifié les secteurs où il y aurait des besoins de main-d’œuvre?
Mme Groulx : Oui.
La sénatrice Gagné : Pour ce qui est de la main-d’œuvre francophone et bilingue, êtes-vous en mesure d’identifier les secteurs qui auraient les besoins les plus criants?
Mme Groulx : Oui. Ce sont les secteurs de l’enseignement, de la petite enfance et de la santé. Ce sont des emplois où l’on travaille 100 % en français. Donc, c’est plus facile d’identifier les besoins francophones ou anglophones dans ces secteurs, parce que vous travaillez soit en anglais, soit en français. Ces secteurs sont beaucoup plus faciles à identifier que d’autres secteurs. En ce qui concerne les technologies de l’information, par exemple, c’est plus difficile de savoir si l’employé doit parler anglais ou français, puisque l’on sait que la langue de travail dans le secteur de l’informatique est l’anglais. Si la personne est à Tracadie, par exemple, il faut que je vérifie quel type de travailleur je dois aller chercher.
La sénatrice Gagné : J’ai l’impression que la reconnaissance des titres de compétences étrangers est aussi un défi compte tenu de la pénurie de main-d’œuvre, surtout dans le domaine de l’enseignement et de la santé. Souvent, il faut être reconnu par la province pour obtenir le certificat pour enseigner et ensuite, si ce sont des infirmiers ou des infirmières que l’on veut recruter, ou bien des médecins, il doit y avoir là aussi une reconnaissance des titres de compétences étrangers.
Comment traitez-vous cette question? Êtes-vous en mesure — je ne sais pas si vous avez suffisamment d’information — de nous dire comment vous faites face à ce défi? Devrait-il y avoir une collaboration avec le gouvernement fédéral à ce sujet?
Mme Groulx : Vous avez raison. La reconnaissance des compétences acquises à l’étranger demeure une barrière un peu partout au Canada. Cependant, on travaille très étroitement avec les secteurs où il y a des pénuries pour établir des partenariats et créer une ouverture d’esprit au sein de certaines associations professionnelles qui n’avaient pas encore eu à penser à la reconnaissance des titres acquis à l’étranger, parce qu’on avait un surplus de travailleurs ou qu’on avait assez de travailleurs. Ces associations se trouvent maintenant confrontées au contraire. Donc, évidemment, nous travaillons avec eux, et on voit une évolution; c’est lent, mais il y a tout de même une évolution.
En ce qui concerne le rôle du gouvernement fédéral, c’est une bonne question, parce que la reconnaissance des compétences, dans la plupart des métiers, est de compétence provinciale, et non fédérale. Donc, il faudrait peut-être assurer un appui financier à la recherche. Il y a certains ministères fédéraux, comme Service Canada ou Développement des compétences Canada, qui ont investi dans certains secteurs, notamment dans le secteur de la santé au Nouveau-Brunswick, pour accélérer la reconnaissance des compétences. Puisque cette reconnaissance est de compétence provinciale, c’est un peu plus difficile pour le fédéral de jouer un rôle dans ce domaine.
La sénatrice Gagné : Si je comprends bien, le corridor de l’immigration francophone a ciblé le secteur de l’enseignement comme étant une priorité. Il y a aussi le secteur de la santé à privilégier, mais je ne veux pas mettre de mots dans votre bouche.
Mme Groulx : C’est bien ce que j’ai mentionné : la santé, la petite enfance et l’enseignement.
La sénatrice Moncion : J’ai deux questions pour vous.
Premièrement, on sait que la grande majorité de l’immigration francophone est issue de l’Afrique de l’Ouest. De quels pays est issue l’immigration anglophone?
Mme Groulx : C’est plus vaste, parce que la différence entre l’immigration francophone et l’immigration anglophone, c’est que, dans le cas des immigrants francophones, en général, le français est leur langue maternelle, tandis que pour les immigrants anglophones, souvent, l’anglais n’est pas leur langue maternelle, mais bien leur première langue canadienne apprise ou choisie. Donc, nous avons des candidats de la Chine, du Brésil et des Philippines [Difficultés techniques].
Le président : Je vais donner la parole à la sénatrice Moncion.
La sénatrice Moncion : Mme Groulx mentionnait que l’anglais était la première langue apprise au Canada pour les immigrants anglophones. Elle nous parlait de leur région de provenance.
Mme Groulx : Il ne s’agit pas de la langue apprise une fois au Canada, mais plutôt de la langue qu’ils apprennent avant de venir au pays. Étant donné que certaines compétences linguistiques sont exigées pour faire une demande d’immigration, les gens ont souvent tendance à apprendre l’anglais, et non le français. Ils ont accès à des cours de langue en français, s’ils le veulent, une fois arrivés sur le territoire. Ils viennent d’un peu partout : les Philippines, la Chine, certains pays du Golfe et le Brésil sont des pays sources d’où viennent les candidats dits « anglophones », mais aussi les États-Unis.
La sénatrice Moncion : Vous avez parlé de l’enseignement, de la petite enfance et de la santé, où les besoins sont criants en matière d’immigration. Il y a quelques années, on s’était rendu dans les provinces maritimes et on nous avait mentionné que, surtout dans le secteur de la petite enfance, les salaires qui étaient versés aux francophones étaient inférieurs aux salaires versés aux anglophones.
Jusqu’à quel point cette situation a-t-elle été réglée lorsqu’on parle d’équité du côté des francophones et des anglophones dans les programmes liés à la petite enfance ou même en enseignement?
Mme Groulx : Je sais que, au cours des dernières années, une formation spécifique n’était pas nécessaire pour travailler dans le domaine de la petite enfance au Nouveau-Brunswick, mais on a maintenant besoin d’une formation spécifique. Si les gens ont suivi la formation, les salaires entre les francophones et les anglophones concordent. En ce qui a trait à la petite enfance, ce n’est pas un problème.
Pour ce qui est des enseignants, c’est une question de convention collective et si je ne me trompe pas, il y a deux syndicats différents du côté anglophone et du côté francophone. J’ose croire que les conditions sont semblables, mais il est possible que je me trompe.
La sénatrice Moncion : Dans votre province, combien y a-t-il d’enseignants francophones qui enseignent du côté anglophone et qui pourraient enseigner du côté francophone, ce qui diminuerait le fardeau du problème du côté francophone, si l’on veut?
Mme Groulx : Je pense que l’un des défis, c’est que l’immersion française réside du côté du secteur anglophone de l’éducation, donc il y a une masse critique d’enseignants francophones qui enseignent dans le secteur anglophone, mais qui enseignent en français, parce que l’immersion en français se fait du côté anglophone. Je ne connais pas la répartition entre les enseignants francophones et les enseignants anglophones, mais il y a quand même beaucoup d’enseignants francophones, que ce soit dans le secteur francophone ou dans le secteur anglophone.
La sénatrice Moncion : C’est une bonne piste de solution. Si l’immersion était du côté des écoles francophones, on aurait le problème contraire. Merci beaucoup.
Le sénateur Mockler : J’aimerais brièvement féliciter Mme Groulx de son leadership dans notre province avec son équipe.
J’ai deux questions. La première porte sur le Programme des candidats des provinces. Devrait-il être revu pour favoriser une sélection plus importante du nombre d’immigrants dans notre province?
Cela dit, combien d’immigrants d’expression française se sont-ils installés dans notre province par l’entremise du programme en 2019, en 2020 — et je conviens que, pendant la pandémie, c’était tout un défi — et en 2021?
Mme Groulx : Je vous remercie de la question, sénateur Mockler.
Je ne peux pas vous dire combien d’immigrants se sont établis dans la province; par contre, je peux vous dire combien nous en avons sélectionné, parce que souvent, il y a un décalage entre le moment de la sélection et le moment de l’établissement. Les gens qui sont déjà au Nouveau-Brunswick, par exemple un étudiant étranger qui termine son diplôme à l’Université de Moncton ou au Collège communautaire du Nouveau-Brunswick (CCNB), quand il présente sa demande, est déjà sur place, donc c’est facile. Par contre, un candidat sélectionné de l’étranger ne viendra pas dans les deux prochaines semaines; parfois, cela peut prendre jusqu’à une année avant que ces immigrants arrivent. C’est difficile pour moi de répondre à votre question.
Je ne connais pas le tout par cœur; avoir su, j’aurais fourni le tableau des arrivants au Canada produit par IRCC.
En 2021, on a sélectionné 28 % de candidats francophones, en 2020, 27 % et en 2019, 24 %. Est-ce que cela se traduit automatiquement par des gens qui arrivent sur le territoire au Nouveau-Brunswick? Malheureusement, non.
De plus, dès qu’ils ont leur résidence permanente, les gens peuvent aller où ils veulent au Canada. C’est une résidence permanente au Canada, et non au Nouveau-Brunswick. Cela arrive, à l’occasion, que les gens débarquent à Montréal et restent à Montréal.
Le sénateur Mockler : Si on veut avoir plus de précisions sur cette question, seriez-vous en mesure de nous les transmettre par l’intermédiaire du président ou de la greffière et de nous envoyer des renseignements supplémentaires sur cette question?
Mme Groulx : Oui, sur les arrivées, il n’y a pas de problème, mais je n’y ai pas accès en ce moment.
Le sénateur Mockler : Que pensez-vous des mesures prises jusqu’à maintenant par Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada pour mettre en œuvre la Stratégie en matière d’immigration francophone?
Quelles répercussions cette stratégie a-t-elle dans notre province?
Mme Groulx : C’est une excellente question.
Le Nouveau-Brunswick est différent des autres provinces, car une grande proportion de notre population est francophone. Le gouvernement fédéral a énormément investi en matière d’immigration francophone, surtout en ce qui a trait à l’établissement de nouveaux arrivants francophones. Au Nouveau-Brunswick, il y a 16 points de service pour les nouveaux arrivants, ce qui est énorme pour une petite province. Ils sont, en grande partie, financés par le gouvernement fédéral.
Nous appuyons fortement la Stratégie en matière d’immigration francophone, visant à atteindre la cible de 4 % de l’immigration au total, parce que nous sommes en mesure d’inviter un grand pourcentage de candidats. Il faut comprendre que notre programme de candidats est tout petit si on le compare à celui d’autres provinces, qui encouragent l’immigration depuis un grand nombre d’années.
Je ne sais pas si cela répond à votre question.
Le président : Madame Groulx, nous allons conclure, mais avant de terminer, j’aimerais vous poser une question.
Vous nous avez fait part de certains enjeux. Le Nouveau-Brunswick est une province bilingue et elle a une Loi sur les langues officielles. Le Nouveau-Brunswick sert souvent de point de référence aux autres régions.
Si vous aviez une baguette magique et si vous étiez en mesure d’identifier quelques recommandations qui permettraient de renforcer l’immigration francophone au Nouveau-Brunswick et de faire une grande différence dans cette province, quelles seraient-elles?
Mme Groulx : C’est la question qui tue.
C’est une excellente question. Honnêtement, même si, de l’extérieur, cela ne semble jamais suffisant, nous avons réalisé de grandes avancées en matière d’immigration francophone.
Quand je pense à 2014, nous avions accueilli à peine 100 familles francophones ou francophiles. Maintenant, nous en sommes à 1 000 familles francophones, grâce aux nombreux partenariats que nous avons créés avec les établissements d’enseignement postsecondaire et avec certains employeurs. Ce ne sont pas tous les employeurs qui recrutent des employés en milieu anglophone. Il y a quand même des employeurs qui font de belles démarches pour recruter des francophones.
Malgré les délais de traitement et l’inventaire qui semble plus ou moins diminuer à l’échelon fédéral, il y a quand même une volonté de la part d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada d’être plus flexible à l’égard des francophones. Chaque fois que nous proposons quelque chose de novateur, nous obtenons l’aval du fédéral. Honnêtement, je ne suis pas persuadée que le fait d’investir plus d’argent réglera quoi que ce soit. J’ai besoin que les employeurs réalisent que, pour assurer une bonne intégration et maintenir la vitalité de leur communauté à long terme, il est important d’aller chercher des immigrants qui parlent la langue de la communauté.
Le président : Merci beaucoup, madame Groulx, pour votre témoignage et pour le temps que vous avez passé avec nous. C’est très éclairant pour notre étude. Je vous remercie également pour tout le travail que vous faites au Nouveau-Brunswick en faveur de l’immigration.
Nous sommes heureux d’accueillir, pour le deuxième groupe de témoins, la commissaire aux langues officielles du Nouveau-Brunswick, Mme Shirley MacLean. Bienvenue parmi nous, madame McLean. Merci beaucoup d’avoir accepté notre invitation.
Je vous donne la parole et, ensuite, nous passerons à une période de questions et de réponses avec les sénateurs et les sénatrices.
Shirley MacLean, commissaire aux langues officielles du Nouveau-Brunswick, Commissariat aux langues officielles du Nouveau-Brunswick : Merci beaucoup. Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, bonsoir.
J’aimerais reconnaître que la terre sur laquelle je vous rencontre de façon virtuelle fait partie du territoire traditionnel non cédé des Wolastoqiyik, des Mi’kmaq et des Peskotomuhkati. Les traités de paix et d’amitié que les Wolastoqiyik, les Mi’kmaq et les Peskotomuhkati ont élaborés de façon conjointe et signés avec la Couronne britannique pendant le XVIIIe siècle s’appliquent à ce territoire.
C’est avec plaisir que je me joins à vous virtuellement ce soir pour vous faire part de ma perspective sur l’immigration francophone en milieu minoritaire.
[Traduction]
Comme beaucoup d’entre vous le savent sûrement, les questions d’immigration ne font pas spécialement partie de mon mandat de commissaire aux langues officielles du Nouveau-Brunswick. Toutefois, l’une de mes principales responsabilités est de promouvoir l’avancement du français et de l’anglais dans la province. Ainsi, il faut reconnaître que l’immigration joue un rôle très important dans la vitalité des deux langues officielles au Nouveau-Brunswick.
[Français]
Mes interventions en matière d’immigration s’inscrivent donc dans ce rôle de promotion.
En outre, il faut rappeler que la Charte canadienne des droits et libertés énonce que la communauté linguistique francophone et la communauté linguistique anglophone du Nouveau-Brunswick ont un statut égal.
Par conséquent, je crois fermement que les politiques et programmes gouvernementaux en matière d’immigration doivent bénéficier de manière égale à nos deux communautés linguistiques.
J’aimerais d’abord vous présenter le contexte néo-brunswickois en surface, afin de mieux encadrer mes commentaires.
[Traduction]
Le Programme des candidats de la province du Nouveau-Brunswick est le principal programme d’immigration de la province, comme vous le savez probablement déjà. Il a été établi en vertu d’un accord avec le gouvernement du Canada. Dans le cadre de ce programme, le Nouveau-Brunswick peut sélectionner des gens d’affaires et des travailleurs qualifiés du monde entier qui souhaitent vivre au Nouveau-Brunswick et contribuer à l’économie de la province.
[Français]
Depuis 2017, le gouvernement provincial administre également le Programme d’immigration au Canada atlantique. Ce programme pilote aide les employeurs du Nouveau-Brunswick à embaucher des travailleurs étrangers qualifiés qui souhaitent immigrer dans la province, ainsi que des étudiants étrangers qui veulent rester dans la région après avoir obtenu leur diplôme postsecondaire.
En août 2019, le gouvernement provincial a lancé une nouvelle stratégie de croissance démographique pour la province, qui vise notamment à assurer une augmentation annuelle continue de 2 % des candidats francophones désignés afin d’atteindre la cible de 33 % d’ici 2024.
Chaque année, dans mon rapport annuel, je fais état des résultats provinciaux en matière d’immigration francophone au Nouveau-Brunswick. Il y a certainement eu des progrès au cours des dernières années, mais il reste sans doute beaucoup du travail à faire et nous ne devons pas nous reposer sur nos lauriers.
[Traduction]
Pour vous donner un aperçu, le pourcentage de candidats francophones admis au Nouveau-Brunswick dans le cadre du programme des candidats de la province et du Programme pilote d’immigration au Canada atlantique a été de 19 % en 2018, 24 % en 2019, 27 % en 2020 et 28 % en 2021.
[Français]
Je suis une personne positive, donc je me dois de reconnaître les efforts des gouvernements provincial et fédéral dans ce dossier. Cependant, atteindrons-nous la cible de 33 % d’ici 2024? Cela reste à voir.
Toutefois, la question suivante se pose : devons-nous nous contenter d’une cible de 33 %? Après tant d’années où le pourcentage de candidats francophones était inférieur au poids démographique de la population francophone, devrions-nous plutôt adopter une cible réparatrice, afin de combattre le déclin du poids démographique des francophones au Nouveau-Brunswick?
Selon moi, cette situation serait certainement envisageable si les gouvernements provincial et fédéral tiennent au statut égal de la communauté linguistique française et de la communauté linguistique anglaise du Nouveau-Brunswick, tel qu’il est énoncé dans la Charte.
J’ai d’ailleurs examiné avec grand intérêt le rapport publié l’an dernier par mon homologue fédéral, le commissaire Raymond Théberge, sur la cible de 4,4 % d’immigration au sein des communautés francophones en situation minoritaire à l’extérieur du Québec. Il est clair que nous ne devons pas simplement nous contenter d’une cible qui reflète la composante linguistique de la population francophone en milieu minoritaire. Nous devons en faire plus, et nous devons le faire dès maintenant. Dans le contexte du Nouveau-Brunswick, les plus récentes données du recensement nous le prouvent certainement; entre 2016 et 2021, le poids démographique des personnes qui ont le français comme langue maternelle a chuté de 31,4 % à 29,5 %.
Il s’agit d’une diminution de presque 2 % en cinq ans seulement.
Une immigration francophone qui ne respecte pas le poids démographique de la population néo-brunswickoise a sûrement joué un rôle dans cette diminution.
[Traduction]
En 2021, mon commissariat a publié un rapport intitulé La situation linguistique au Nouveau-Brunswick : des tendances préoccupantes et quelques signes encourageants. Ce rapport, qui présente une analyse approfondie des données linguistiques du recensement de 2016, a été préparé par l’Institut canadien de recherche sur les minorités linguistiques pour le compte du commissariat. Il contient une conclusion sur l’immigration francophone qui m’a frappée : les chiffres sur la rétention des immigrants francophones sont meilleurs que ceux des immigrants anglophones. Il semble que les immigrants francophones qui se sont établis au Nouveau-Brunswick dans les nnées 2000 ont quitté la province dans une moindre mesure que les immigrants anglophones ou de langue maternelle non officielle.
[Français]
C’est assurément une autre raison d’inciter les gouvernements à revoir les cibles en immigration francophone à la hausse. Il faut agir maintenant; nous devons persister et nos actions doivent remédier aux lacunes qui ont persisté dans ce dossier au cours des dernières années.
Merci beaucoup de m’avoir invitée à me joindre à vous aujourd’hui. Je serai heureuse de répondre à vos questions dans la langue officielle de votre choix.
Le président : Merci pour votre témoignage et pour l’éclairage que vous apportez sur les enjeux qui touchent l’immigration francophone.
La Loi sur les langues officielles du Nouveau-Brunswick est en révision actuellement. Le Rapport sur l’apprentissage de la langue seconde était clair : l’immigration francophone, bien qu’il s’agisse d’un enjeu important pour le Nouveau-Brunswick, n’avait pas été intégrée à la Loi sur les langues officielles du Nouveau-Brunswick. Quel est votre point de vue à ce sujet? Je commencerais avec cette première question.
Mme MacLean : Merci pour la question. Ce n’était pas une des recommandations que nous avions faites, car nous n’avons pas cette compétence. L’immigration est un dossier de compétence fédérale. C’est vrai qu’il y a des ententes entre les provinces et le gouvernement fédéral. Je pense que, parce que l’immigration est de compétence fédérale, on n’a pas beaucoup mis l’accent là-dessus jusqu’à maintenant. Lorsque nous avons fait nos recommandations, je venais tout juste d’arriver en poste. Si cela se passait aujourd’hui, j’aurais probablement inclus quelque chose, à tout le moins une recommandation à ce sujet. L’immigration est vraiment un enjeu de compétence fédérale.
Le président : Dans la révision que l’on fait de la loi fédérale par l’intermédiaire du projet de loi C-13, on parle d’une politique en immigration francophone. Y a-t-il quelque chose qui devrait être prévu dans la loi fédérale pour tenir compte de la spécificité du Nouveau-Brunswick en matière d’égalité des deux communautés linguistiques ou en matière de stratégie se rapportant à l’immigration francophone, dans cette notion de rattrapage ou de caractère réparateur? Quel est votre point de vue à ce sujet?
Mme MacLean : C’est important. Nous venons de recevoir les statistiques du recensement de 2021. On constate qu’il y a un déclin du français et du poids démographique des communautés linguistiques francophones, et aussi une augmentation des communautés anglophones. On est un peu en crise.
On sait que le gouvernement provincial a pris position, puisque l’immigration est très importante pour augmenter la population du Nouveau-Brunswick. Cependant, en ce qui concerne la Loi sur les langues officielles, je pense qu’on devrait s’assurer que cette inégalité qui existe actuellement au sein d’une population francophone en situation minoritaire soit corrigée et que l’on augmente l’immigration francophone.
Il faut que cela vienne du gouvernement provincial; celui-ci doit conclure des ententes et insister pour que le pourcentage de la cible soit augmenté. Si on peut inclure quelque chose de ce genre dans la loi fédérale, cela aura certainement mon approbation.
Le président : Merci, madame la commissaire.
La sénatrice Moncion : Le Commissariat aux langues officielles a reconnu l’importance de mettre en place des mesures pour veiller à ce que l’équilibre linguistique du Nouveau-Brunswick soit pris en considération en matière d’immigration. Dans une éventuelle refonte de la Loi sur les langues officielles du Nouveau-Brunswick, croyez-vous que des modifications sont nécessaires pour renforcer cet objectif du maintien de l’équilibre linguistique? Par exemple, dans le projet de loi C-13, on précise l’obligation, pour le ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté, d’adopter une politique en matière d’immigration francophone.
Mme MacLean : Depuis des années, on met de la pression sur le gouvernement provincial afin de s’assurer que la cible soit augmentée. Évidemment, si on avait une telle politique dans la Loi sur les langues officielles — qui est une loi quasi constitutionnelle —, cela aurait pour effet d’assurer une augmentation de l’immigration francophone.
Ils ont déjà fait du progrès. Cependant, en fin de compte, ce sont des décisions gouvernementales. Si le gouvernement prend la décision d’augmenter les cibles, il n’y a aucun règlement qui les y oblige.
La sénatrice Moncion : Avez-vous une idée des besoins en immigration au Nouveau-Brunswick?
Mme MacLean : Oui, car je travaille en immigration.
La sénatrice Moncion : Connaissez-vous le nombre de postes qu’il reste à combler dans votre province?
Mme MacLean : Je ne connais pas ce nombre. On peut recevoir plus d’immigrants. Cependant, il y a des problèmes qui existent sur le terrain quand vient le temps d’appuyer ces gens, comme le logement. De plus, il faut s’assurer qu’il y a des mesures en place pour que les professionnels puissent pratiquer leur métier. Il en existe quelques-unes.
Il y a un programme de soutien au Nouveau-Brunswick pour les infirmières afin qu’elles puissent compléter leur formation obligatoire pour recevoir leur permis d’exercice. Il y a aussi un processus accéléré en place pour les infirmières qui viennent de la France; la même chose existe pour le Québec. Certains immigrants arrivent ici et croient qu’ils auront un emploi et qu’ils travailleront dans un milieu francophone, mais ils sont parfois surpris. Il faut les soutenir.
La sénatrice Moncion : L’immigration est une compétence partagée en vertu de l’article 95 de la Loi constitutionnelle de 1867. Cette disposition législative prévoit expressément la prépondérance du fédéral en cas d’incompatibilité.
Selon vous, quelles conséquences cela peut-il avoir à l’échelle provinciale?
Mme MacLean : Vous voulez parler du contrôle que peut exercer le gouvernement fédéral?
La sénatrice Moncion : Non, c’est le gouvernement fédéral qui a le contrôle, mais quelles sont les conséquences au Nouveau-Brunswick par rapport aux cas qui vous sont référés par le gouvernement fédéral, pour les personnes qui pourraient immigrer dans votre province?
Mme MacLean : Comme je l’ai mentionné, nous avons des programmes pour gérer les dossiers des immigrants qui viennent ici, notamment des projets pilotes qui existent depuis 2019. Le gouvernement fait beaucoup de travail sur le terrain pour s’assurer qu’il y a des programmes en place, pour aller chercher ces gens et les retenir. Il y a du travail qui se fait avec les employeurs potentiels. Les ententes qui existent actuellement entre le fédéral et les provinces, je pense que les provinces seraient capables de les gérer elles-mêmes.
La sénatrice Moncion : D’accord. Merci, madame MacLean.
La sénatrice Mégie : Bonjour, madame la commissaire.
Ma question est très courte. Je vous ai entendue dire que, dans l’avant-dernier recensement, le taux de rétention des francophones était supérieur à celui des anglophones. Ai-je bien compris que le taux de rétention des francophones était supérieur à celui des anglophones et que c’est maintenant l’inverse?
Avez-vous une idée des facteurs qui peuvent expliquer cette situation inverse?
Mme MacLean : Voulez-vous dire en 2021?
La sénatrice Mégie : Oui.
Mme MacLean : C’est difficile à dire. Quand on travaille avec les immigrants, il faut avoir une communauté qui existe et il faut créer une situation où les gens veulent non seulement rester ici, mais où ils peuvent aussi obtenir du soutien. Nous ne savons pas pourquoi la situation s’est inversée. La pandémie de COVID-19 a aussi eu de grandes répercussions sur l’immigration en 2021. J’imagine que des lacunes ont empêché de retenir ces gens au pays. Il faut avoir des emplois et des logements en place, ce qui représente un gros problème au Nouveau-Brunswick. J’ai moi-même été témoin d’une situation récente où une famille d’immigrants voulait déménager. Nous leur avons trouvé un appartement, mais elle n’avait pas le droit d’aller le voir. Il y a une pénurie de logements ici, à Fredericton. Si une personne trouve un appartement, elle n’a même pas le droit d’aller le visiter. Si elle ne prend pas l’appartement tout de suite, elle le perd.
Pour une nouvelle famille qui a besoin de ressources, il faut avoir une communauté qui s’occupe d’elle; il faut avoir beaucoup de soutien. Il est possible qu’il y ait des lacunes de ce côté. Il y a un nouveau Centre d’innovation en immigration francophone à Dieppe. Nous espérons qu’il y aura plus de programmes d’aide et de ressources pour ces gens lorsqu’ils viennent au Nouveau-Brunswick.
La sénatrice Mégie : Merci.
L’Initiative des communautés francophones accueillantes a-t-elle fonctionné? Est-ce que cela fonctionne plus ou moins au Nouveau-Brunswick?
Mme MacLean : Vous parlez des immigrants francophones. Je pense que cette initiative fonctionne bien. Ils ont les ressources nécessaires. Parfois, c’est un peu au hasard, parce que ce sont les centres qui donnent du soutien aux immigrants dans chaque ville et dans chaque région. Ils font ce qu’ils peuvent. S’ils sont dans une région francophone, la possibilité que les immigrants restent dans une communauté dépend de leur capacité de s’exprimer dans la langue, d’aller à école et d’avoir une vie culturelle.
Quelques centres multiculturels sont bilingues. Malgré tout, si on va dans une province bilingue, par exemple, dans la capitale, Fredericton, ce n’est pas tout le monde qui est bilingue au centre multiculturel. Fredericton n’est pas un milieu francophone. Si une personne vient à Fredericton en pensant qu’elle est une province bilingue, même s’il y a deux écoles francophones... Ce n’est pas vraiment un milieu francophone. La communauté est bilingue, mais ce n’est pas une communauté francophone. À ce moment-là, certaines personnes décident d’aller ailleurs pour retrouver une communauté linguistique francophone. Cela dépend également de l’endroit où l’on se trouve à Moncton. Plus le taux d’approbation est élevé, plus le milieu est francophone.
La sénatrice Mégie : Merci beaucoup.
La sénatrice Clement : Bonsoir, madame MacLean. Je vous remercie de votre témoignage.
Vous avez dit que vous travaillez directement avec les immigrants. Est-ce que c’est habituel pour une commissaire de travailler directement avec les immigrants? Pourquoi faites-vous ce genre de bénévolat?
Mme MacLean : J’ai travaillé comme bénévole lorsque les Syriens sont venus au Canada. Nous avons essayé d’agrandir le groupe d’immigrants qui est venu ici, à Fredericton, et ailleurs.
Une fois qu’on commence à faire du bénévolat dans ce système, c’est vraiment un travail agréable. Cela nous apporte beaucoup, en fin de compte. On se dit que c’est nous qui avons gagné en faisant ce travail-là. Une fois qu’on est dans le système et qu’on sait comment il fonctionne, on ne peut pas refuser d’aider ces gens-là. On veut les aider en leur fournissant de la documentation. Dans une autre vie, j’étais avocate. Je peux donc leur fournir la documentation dont ils ont besoin.
La sénatrice Clement : C’est plus agréable de faire ce genre de travail que d’être avocate.
Mme MacLean : Exactement.
Le président : Vous parlez à une avocate, madame MacLean.
La sénatrice Clement : Merci, madame MacLean, de répondre à cette question. Ce travail vous apporte plus de richesse dans votre expertise.
En ce qui concerne les municipalités, je suis toujours intéressée par le rôle que jouent les villes en matière d’immigration. On parle toujours des provinces et du gouvernement fédéral.
Dans le cadre du projet pilote, est-ce que vous êtes au courant du rôle officiel qu’auraient joué la Ville de Fredericton ou la Ville de Moncton à cet égard?
Mme MacLean : Les maires s’intéressent à cette question et ils sont au courant de ce qui se passe. En ce qui concerne le financement, je ne suis pas vraiment au courant, mais je ne pense pas qu’il y ait du financement du côté des municipalités. Je sais qu’elles font tout en leur pouvoir pour s’assurer de mettre en place des initiatives, s’il en manque. On peut toujours interpeller la ville pour voir s’il est possible de faire des choses.
J’ai eu des discussions avec les maires à propos des obligations linguistiques en vertu de la Loi sur les langues officielles du Nouveau-Brunswick. Une fois que la période de confinement a pris fin, j’ai fait le tour de la province pour mener des consultations. Les obligations linguistiques sont ressorties de ces consultations. L’ancienne mairesse de Campbellton, ou plutôt de Bathurst, a fait cela aussi dans son ancien poste. Elle est très impliquée dans l’immigration locale à Bathurst. Elle travaille encore avec les immigrants. Il n’y a pas de programmes fixes. Les programmes sont créés selon les capacités des villes. Les villes ont eu des difficultés avec les sans-abris. Elles subissent beaucoup de pression. Elles ont travaillé aussi avec les centres multiculturels pour offrir du soutien aux immigrants.
La sénatrice Clement : Merci.
La sénatrice Gagné : Bienvenue, madame MacLean. Je suis heureuse de vous accueillir.
À toutes fins utiles, votre Loi sur les langues officielles est actuellement dans un processus de révision. Le projet de loi C-13 est toujours à la Chambre des communes. Nous le recevrons très bientôt, je l’espère. Il contient un article où il est question d’une politique en matière d’immigration francophone. L’immigration est quand même une responsabilité partagée.
Serait-il avantageux, pour le gouvernement fédéral et la province, d’avoir un genre de politique conjointe en immigration francophone? Est-ce que cela pourrait bénéficier à la fois aux Canadiens et aux citoyens et citoyennes du Nouveau-Brunswick?
Mme MacLean : Sans aucun doute. En faisant la promotion de la réalité qui existe dans notre province bilingue du Nouveau-Brunswick et avec une politique conjointe, on pourrait augmenter les ressources consacrées à l’immigration.
Comme je l’ai dit, les programmes qui existent sur le terrain à l’heure actuelle dans le Canada atlantique fonctionnent. Toutefois, avec plus de ressources, les choses iraient mieux. Avec une entente ou une situation juridique qui comporteraient plus d’obligations pour le gouvernement provincial, les ressources suivraient. Évidemment, cela bénéficierait aux Canadiens et aux Néo-Brunswickois, car nous avons besoin d’immigrants et nous avons besoin d’immigrants francophones. La meilleure façon de garder les francophones au Canada est de les amener dans un milieu francophone.
La sénatrice Gagné : Je pose la question, parce qu’il y a eu une recommandation de ne pas inclure quoi que ce soit par rapport à l’immigration francophone dans la Loi sur les langues officielles du Nouveau-Brunswick.
Le fait que ce soit une responsabilité partagée et qu’il y ait une similarité entre les deux renforcerait-il la position du Nouveau-Brunswick si elle est en mesure d’avoir quelque chose?
Mme MacLean : Plus on obtient de choses, mieux ce sera. Plus il y a d’obligations et de liens entre les deux, le mieux ce sera pour le Nouveau-Brunswick.
La sénatrice Gagné : D’accord, merci.
Le président : Merci beaucoup.
[Traduction]
Le sénateur Mockler : Merci beaucoup d’avoir accepté notre invitation. Je vous félicite de votre dévouement dans votre travail.
Mme MacLean : Merci.
[Français]
Le sénateur Mockler : Je me rappelle très bien lorsque le gouvernement de l’époque a créé le poste de commissaire aux langues officielles en 2002.
[Traduction]
Comme vous l’avez dit au début, madame MacLean, il s’agissait de promouvoir le français et l’anglais dans toutes les régions du Nouveau-Brunswick.
[Français]
Le premier commissaire, M. Michel Carrier, a fait un travail gigantesque et sans tache comme rassembleur. Il a réussi à unir les Acadiens et les Acadiennes et même les Brayons, les républicains du Madawaska, et aussi les anglophones, les francophones et les Premières Nations dans le contexte du mandat du commissariat établi en 2002.
Depuis votre nomination, madame MacLean, votre cheminement me laisse croire que vous êtes, comme M. Carrier, une rassembleuse qui est reconnue pour rapprocher les gens.
Dans le contexte de l’après-pandémie, même s’il reste des défis, comment voyez-vous votre engagement et votre rôle, au cours des prochaines années, pour améliorer l’objectif? Je suis très inquiet du fait que les données du recensement de 2021 montrent un recul du poids démographique des francophones du Nouveau-Brunswick. Le chiffre est passé de 33,1 % en 2001 à 30 % en 2021.
Dans votre engagement, quels outils comptez-vous utiliser pour assurer au peuple de l’Acadie que le poids démographique est important?
Mme MacLean : Merci pour vos commentaires. À mon avis, votre question est très importante.
Comme vous l’avez dit, il faut bâtir des ponts et il reste beaucoup à faire.
Comme vous le savez, j’ai un double mandat. Il faut mener des enquêtes sur les plaintes qui sont déposées pour nous assurer que les obligations linguistiques sont respectées en vertu de la Loi sur les langues officielles. Mon deuxième mandat est d’en faire la promotion. Comme vous l’avez dit, Me Michel Carrier a fait beaucoup de promotion. Je suis la première anglophone à être nommée commissaire. Au début, nous avons pensé que c’était l’occasion de bâtir un pont entre les anglophones, les francophones, les Acadiens et Acadiennes et les Brayons. Puis, la COVID a frappé et nous avons fait de notre mieux. J’ai fait de la promotion comme je le pouvais.
Pour l’avenir, il existe une situation problématique au Nouveau-Brunswick pour les francophones, car, selon les données, comme vous l’avez indiqué, nous nous dirigeons vers l’assimilation. Les possibilités existent et il faut faire quelque chose.
Si on me le permet, je ferai le plus de promotion possible. Je ferai non seulement la promotion des deux communautés linguistiques, mais il existe une situation problématique du côté des francophones au Nouveau-Brunswick. On voit un recul de l’usage du français dans les foyers francophones. L’an dernier, on a mené un sondage au Nouveau-Brunswick et on a fait une belle promotion qui a résulté en un taux d’approbation de 81 % pour la législation sur les langues officielles et pour le bilinguisme. Les données ont révélé que 99 % des personnes dont la première langue est l’anglais parlent anglais à la maison, évidemment. Pour ce qui est des personnes dont la première langue est le français, seulement 76 % parlent français à la maison, alors que 17 % parlent anglais et que 7 % parlent une autre langue.
À mon avis, il ne s’agit pas uniquement de promouvoir l’égalité des deux communautés linguistiques. Il faut aussi encourager les francophones à garder leur fierté et à assurer la vitalité de la langue en utilisant le français à la maison. Le côté promotionnel est fort important. Oui, je joue un rôle de rassembleuse et cet aspect est d’autant plus important, étant donné le contexte et ce qu’on entend dire. Je vais continuer de faire de la promotion le plus possible.
Le sénateur Mockler : Monsieur le président, avec l’indulgence des autres sénateurs...
Mme MacLean : Je ne vous entends plus.
[Difficultés techniques]
Le président : Mme MacLean ne nous entend plus; nous avons un problème de son.
Nous allons suspendre la séance quelques instants, le temps de régler notre problème. Nous allons d’ailleurs bientôt conclure avec la commissaire et la remercier, puis passer au prochain groupe de témoins.
Nous allons accueillir notre troisième groupe de témoins de la réunion, mais je voudrais d’abord remercier la commissaire aux langues officielles du Nouveau-Brunswick, Mme Shirley MacLean, de son témoignage et de ses réponses à nos questions.
Malgré les difficultés techniques, nous avons quand même compris l’essentiel de vos propos. Les réponses que vous avez fournies à nos questions nous aideront à rédiger notre rapport sur notre étude portant sur l’immigration francophone.
Chers collègues, nous accueillons maintenant M. Chedly Belkhodja, professeur titulaire à l’École des affaires publiques communautaires et directeur du Centre d’étude de la politique et de l’immigration de l’Université Concordia.
Monsieur Belkhodja, merci beaucoup d’avoir accepté notre invitation et de vous trouver parmi nous ce soir.
[Difficultés techniques]
Il semble bien qu’il ne m’entende pas. Nous allons suspendre la séance encore une fois et tenter de régler nos difficultés techniques. Merci de votre patience, chers collègues, et merci aussi aux témoins de leur patience.
(La séance se poursuit à huis clos.)