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OLLO - Comité permanent

Langues officielles


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES LANGUES OFFICIELLES

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le lundi 18 mars 2024

Le Comité sénatorial permanent des langues officielles se réunit aujourd’hui, à 17 heures (HE), avec vidéoconférence, pour étudier les services de santé dans la langue de la minorité, pour étudier l’application de la Loi sur les langues officielles ainsi que des règlements et instructions en découlant, au sein des institutions assujetties à la loi, ainsi que pour étudier les services de santé dans la langue de la minorité; et à huis clos, pour les travaux du comité.

Le sénateur René Cormier (président) occupe le fauteuil.

Le président : Bienvenue à tous. Je m’appelle René Cormier, sénateur du Nouveau-Brunswick, et je suis président du Comité sénatorial permanent des langues officielles.

[Traduction]

Avant de commencer, j’inviterais les membres du comité présents aujourd’hui à se présenter.

La sénatrice Poirier : Sénatrice Rose-May Poirier, du Nouveau-Brunswick.

[Français]

La sénatrice Mégie : Bonjour. Marie-Françoise Mégie, du Québec.

La sénatrice Moncion : Bonjour. Lucie Moncion, de l’Ontario.

[Traduction]

Le président : Je souhaite la bienvenue à tous, ainsi qu’aux téléspectateurs qui nous regardent dans l’ensemble du pays. Je tiens à souligner que les terres à partir desquelles je vous parle font partie du territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinabe.

Ce soir, nous commençons la réunion avec l’étude des questions sur les services de santé dans la langue de la minorité. Pour le premier groupe de témoins, nous accueillons Mme Kim Barro, cheffe de la Stratégie de la performance et des partenariats au ministère de la Santé et du Mieux-être de la Nouvelle-Écosse ainsi que Mme Kim Simmonds, sous-ministre adjointe de Planification stratégique et de la performance au sein d’Alberta Health du gouvernement de l’Alberta.

Je vous remercie toutes deux d’être présentes ce soir et je vous souhaite la bienvenue au comité. Nous allons maintenant entendre vos remarques préliminaires, qui seront suivies par les questions des sénateurs et des sénatrices.

La parole est à vous, madame Barro.

Kim Barro, cheffe, Stratégie de la performance et des partenariats, ministère de la Santé et du Mieux-être, gouvernement de la Nouvelle-Écosse : Je vous remercie de m’avoir donné l’occasion de représenter le ministère de la Santé et du Mieux-être de la Nouvelle-Écosse dans ce dossier important.

Le gouvernement de la Nouvelle-Écosse s’est engagé à améliorer le système de santé de la province.

Action for Health est une feuille de route pour parvenir à un changement durable et générationnel du système de santé. Elle couvre les principaux aspects d’un système de santé interconnecté dont l’objectif principal est d’offrir davantage de soins à tous les Néo-Écossais dans de plus brefs délais.

Grâce à ce plan, le ministère a fait des investissements historiques dans les infrastructures, les technologies et les travailleurs de la santé.

Nous travaillons avec nos partenaires dans l’ensemble du gouvernement et dans le secteur de la santé pour élaborer des solutions innovantes à des problèmes qui persistent.

Grâce à de nouvelles technologies comme Virtual Care, chaque jour, les Néo-Écossais ont davantage d’options pour accéder plus rapidement et efficacement aux soins dont ils ont besoin auprès du bon prestataire de soins de santé.

Cela dit, toutes ces innovations et tous ces nouveaux outils ne sont efficaces que si les Néo-Écossais en connaissent l’existence, qu’ils peuvent trouver le bon service et qu’ils peuvent constater les avantages de ces nouveaux programmes et services pour leur propre santé et celle de leurs proches.

Le système de santé est complexe, et la pression exercée sur un patient et sa famille pour s’y retrouver peut ajouter davantage de stress à une situation déjà éprouvante.

La Nouvelle-Écosse a une histoire riche et diversifiée qui s’insère dans le présent. Elle souligne l’importance de servir équitablement les communautés linguistiques en situation minoritaire. Elle se reflète dans la Loi sur les services en français et dans la réglementation qui guident la façon dont on offre les services de santé.

Alors que nous nous appuyons sur cette histoire, que nous accueillons dans la province de nouveaux Néo-Écossais et leurs familles de partout dans le monde, et que nous travaillons encore pour rejoindre les communautés historiquement marginalisées afin de fournir des services et des renseignements importants, nous devons continuer de progresser pour nous assurer d’offrir à chaque Néo-Écossais un accès équitable aux services, aux programmes et aux renseignements relatifs à la santé.

Par exemple, en 2022-2023, après une vaste consultation publique, le ministère de la Santé et du Mieux-être a signalé que de nombreuses communautés mal desservies ou sous-représentées, dont les communautés acadiennes et francophones, avaient besoin de plus d’équité en matière de santé et d’un meilleur accès aux services de santé. Cela a mené à l’élaboration du tout premier cadre d’équité en matière de santé de la province.

Ce cadre jette les bases pour améliorer la pertinence et l’efficacité du système de santé néo-écossais, tout en éliminant les obstacles et la discrimination. Il garantira l’accès des membres des communautés francophones et acadiennes ainsi que d’autres communautés en quête d’équité, comme les Afro-Néo-Écossais et les communautés autochtones.

Ce cadre s’inscrit également dans la stratégie globale de la province en matière d’équité et de lutte contre le racisme, qu’il soutient.

Le fait d’identifier les obstacles systémiques pour les communautés marginalisées, qui sont souvent liés à la langue, et de collaborer avec nos partenaires afin d’éliminer ces obstacles contribuera à améliorer non seulement les résultats pour la santé de ces personnes et de ces groupes, mais également l’efficience et l’efficacité de tout le système de santé.

Je sais que la ministre Thompson aurait souhaité être présente aujourd’hui pour participer à cette importante discussion, mais ce fut pour moi un privilège de m’exprimer au nom du ministère.

En conclusion, au fur et à mesure que nous mettons en œuvre la stratégie provinciale Action for Health, nous réalisons de grands progrès. Nous savons cependant qu’il y a encore du travail à faire.

Nous continuerons d’être à l’écoute de toutes les communautés afin de mieux comprendre leurs besoins en matière de santé et de travailler avec elles pour leur fournir les soins de santé auxquels elles ont droit.

Chaque jour, nous leur fournissons davantage de renseignements afin qu’elles puissent prendre des décisions éclairées sur leurs soins de santé et davantage de moyens d’accéder plus rapidement aux soins.

Grâce à ces efforts continus et à notre collaboration permanente avec tous nos partenaires de tous les paliers de gouvernement et dans toutes les communautés, d’un bout à l’autre de la province, nous construisons un système de santé de classe mondiale pour tous les Néo-Écossais.

Je vous remercie.

Le président : Merci, madame Barro. Je donne maintenant la parole à Mme Simmonds.

[Français]

Kim Simmonds, sous-ministre adjointe, Planification stratégique et de la performance, Alberta Health, gouvernement de l’Alberta : Merci. Au nom du gouvernement de l’Alberta et de la ministre de la Santé, je suis heureuse d’être ici aujourd’hui pour présenter de l’information au sujet des efforts déployés par l’Alberta en vue d’améliorer les programmes et les services de santé en français.

Depuis l’adoption de la Politique en matière de francophonie par le gouvernement de l’Alberta en 2017, les services de santé de l’Alberta continuent d’améliorer les services et les mesures de soutien fournis à la francophonie en Alberta.

La Politique en matière de francophonie guide le gouvernement de l’Alberta dans l’établissement d’une relation significative et productive qui se traduit par le développement et la vitalité continus de cette importante population. Nous sommes fiers des efforts déployés en vue d’améliorer les services et les mesures de soutien en matière de santé que nous offrons en français. En tant qu’ordre de gouvernement égal, le gouvernement de l’Alberta a une compétence exclusive pour ce qui est de planifier, organiser et gérer son système de santé. Il reconnaît la concordance entre les objectifs provinciaux et fédéraux en matière de services à la population francophone.

Par exemple, l’accord conclu entre le Canada et l’Alberta afin de soutenir le plan Travailler ensemble pour améliorer les soins de santé pour les Canadiens contient une disposition d’engagement envers l’égalité d’accès pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire. Bien que cet alignement existe, le gouvernement investit dans des initiatives en langue française parce qu’il reconnaît et valorise les contributions importantes des francophones en Alberta, et il veillera à ce que leur accès aux services de santé reste une priorité.

Dans le cadre de l’ancien plan d’action de la Politique en matière de francophonie de 2020-2023, les services de santé de l’Alberta ont réalisé plusieurs initiatives. Par exemple, nous avons fait traduire en français de nombreuses ressources sur la santé publique. Ces ressources comprennent du matériel éducatif, des affiches, du contenu Web, le sous-titrage ou la narration de vidéos ou la traduction de dossiers de patients de l’anglais au français, ou inversement.

Le plan d’action de la Politique en matière de francophonie de 2024-2028 à venir du gouvernement de l’Alberta définit les initiatives clés et fournit des détails sur les façons dont nous continuerons d’améliorer les services en français. Les Services de santé de l’Alberta continueront de traduire certaines ressources concernant les soins continus, la santé publique, les régimes de prestation de maladie, le contenu et les lois du gouvernement.

Un financement accru continuera d’être accordé au Centre de santé Saint-Thomas, à Edmonton, dans le cadre d’un plan de relations alternatives. Le financement permettra à ce centre de soutien construit par la communauté francophone d’élargir ses services de santé primaires aux Albertains francophones, y compris la médecine familiale et la psychiatrie. Il continuera en outre de soutenir les besoins d’une population francophone vieillissante en mettant l’accent sur le vieillissement chez soi.

De plus, le poste de coordonnateur des services en français sera conservé. Ce poste est particulièrement important, car il appuie la population franco-albertaine en coordonnant les services de traduction, en aidant les clients à se retrouver dans le système de santé, en mettant à jour des documents d’information sur la santé, en recrutant des fournisseurs de soins de santé d’expression française et en établissant des partenariats avec des groupes et des organismes communautaires dans le but d’offrir du soutien à la population francophone.

Au cours des cinq prochaines années, les Services de santé de l’Alberta poursuivront l’inventaire exhaustif des services offerts en français et la promotion de ceux-ci. Nous continuerons également de mettre à jour et de traduire en français des ressources clés du gouvernement.

L’accent sur ces initiatives prioritaires améliorera la sensibilisation et l’accès des Albertains francophones aux services et aux mesures de soutien en santé qui sont les plus importants pour eux.

Le gouvernement de l’Alberta reçoit un financement continu qui appuie les initiatives en français dans le secteur de la santé dans le cadre de divers accords. Par exemple, dans le cadre de l’accord conclu entre le Canada et l’Alberta afin de soutenir le plan Travailler ensemble pour améliorer les soins de santé pour les Canadiens, signé et annoncé officiellement en décembre 2023, l’Alberta affectera des fonds pour améliorer la prestation de programmes et de services de santé en français dans la province.

Ces initiatives comprennent la formation d’un comité multipartite sur la santé en français, la détermination des lacunes en matière de professionnels de la santé, la création de services de santé mentale en français afin de combler les lacunes que la francophonie albertaine a identifiées dans ce secteur et le lancement d’un projet « Café de Paris », dans le cadre duquel des employés peuvent acquérir ou conserver des compétences de base en français dans un espace informel.

Nous travaillons de près avec nos parties prenantes pour veiller à ce que la mise en œuvre de ces initiatives à plusieurs volets réponde aux besoins de la communauté francophone de l’Alberta et exerce l’incidence la plus grande possible sur l’amélioration des résultats pour la santé.

En conclusion, chaque membre de la population albertaine mérite d’avoir accès aux soins dont il a besoin. Bien que l’Alberta ne soit pas liée par les exigences de la Loi sur les langues officielles, elle possède sa propre Politique en matière de francophonie, et mes remarques ont illustré la façon dont notre politique a guidé avec succès le travail important qui est en cours dans le but d’améliorer les services de santé en français dans l’ensemble de la province. Merci.

Le président : Merci beaucoup, madame Simmonds. Nous passons maintenant à la période des questions. J’aimerais demander aux membres du comité présents dans la salle de s’abstenir de se pencher trop près de leur microphone ou de retirer leur oreillette lorsqu’ils le font. Cela permettra d’éviter tout retour sonore qui pourrait avoir un impact négatif sur le personnel du comité qui est dans la salle.

[Traduction]

Chers collègues, étant donné que je suis conscient du temps qui est à notre disposition, je propose que cinq minutes soient accordées à chacun pour un premier tour de table, y compris la question et la réponse des témoins. Si le temps le permet, nous aurons un deuxième tour.

Nous allons débuter par la vice-présidente du comité, la sénatrice Poirier.

La sénatrice Poirier : Je vous remercie toutes les deux pour votre présence de ce soir.

Lors de sa comparution devant le comité en avril dernier, le ministre de la Santé a déclaré qu’on accorderait un financement de 64,2 milliards de dollars sur une période de 10 ans pour les transferts en santé aux territoires et aux provinces. Il a également déclaré que les provinces et les territoires s’étaient engagés à respecter les principes fondamentaux des transferts en santé, notamment l’égalité d’accès pour les personnes et les groupes en quête d’équité.

Cette question s’adresse à vous deux ou à quiconque souhaiterait y répondre : avez-vous reçu ces transferts en santé? Comment votre gouvernement a-t-il respecté l’égalité d’accès à ces fonds pour les communautés francophones de votre province ou territoire?

Mme Simmonds : Si vous êtes d’accord, je vais répondre en anglais.

Nous avons reçu les fonds et nous collaborons de près avec la communauté francophone pour veiller à ce qu’elle bénéficie d’un accès égal et respectueux. En Alberta, nous travaillons principalement avec le Réseau santé Alberta et l’Association canadienne-française de l’Alberta et leurs chapitres régionaux pour veiller à ce que les fonds soient alloués directement aux communautés qui en ont le plus besoin. Nous travaillons également en étroite collaboration avec eux pour veiller à ce qu’on atteigne tous les objectifs du financement.

La sénatrice Poirier : Je vous remercie.

Le président : Madame Barro, souhaitez-vous répondre?

Mme Barro : Merci. De la même façon, nous travaillons avec le Réseau Santé-Nouvelle-Écosse. Nous travaillons avec eux pour mieux comprendre quels seront les besoins des populations francophones et acadiennes et nous assurer que nous y répondons. Tout cela s’inscrit dans le cadre d’équité en matière de santé, de sorte que les considérations relatives aux besoins spécifiques des populations francophones et acadiennes y sont incluses, avec les premiers porte-parole de ces communautés.

La sénatrice Poirier : D’après ce que vous ont dit ces organisations, pourriez-vous me nommer certaines des principales difficultés auxquelles les communautés francophones en situation minoritaire sont confrontées lors de l’accès aux soins de santé dans les provinces et parler de la façon de composer avec les difficultés qui affectent la répartition des transferts en santé?

Mme Barro : Je dirais que nous essayons de nous assurer que nous avons suffisamment de professionnels de la santé francophones. Nous formons et donnons la priorité de manière à ce que les gens puissent bénéficier de services de santé dans la langue de leur choix. Dans ce cas, ce serait le français.

Je pense que nous faisons un excellent travail en ce qui concerne la traduction du site Web et des documents auxquels les gens ont accès, mais nous avons certaines difficultés avec les ressources humaines dans le domaine de la santé, un point c’est tout. Nous avons de la difficulté à avoir suffisamment de ressources humaines pour les services de santé. Je pense que dans le cas des prestataires francophones, il s’agit d’un domaine où il y a des difficultés similaires à celles que vivent les prestataires qui parlent le micmac, par exemple.

La sénatrice Poirier : Madame Simmonds, avez-vous quelque chose à ajouter?

Mme Simmonds : Par ailleurs, l’Alberta a une grande population rurale. Parmi les choses que nous avons identifiées, il y a l’orientation au sein du système pour les Albertains francophones qui vivent en milieu rural, afin qu’ils puissent comprendre comment maximiser leur accès au système. Depuis peu, de concert avec nos collègues de la communauté francophone et les nouveaux Canadiens, nous allons travailler en étroite collaboration avec eux au cours des années à venir sur les différences culturelles qui existent au sein de la francophonie, qui n’est pas un groupe homogène.

La sénatrice Poirier : Qu’est-ce que le gouvernement fédéral pourrait faire de plus ou différemment pour aider les provinces à mieux servir les communautés francophones en situation minoritaire afin qu’elles obtiennent les services de santé dont elles ont besoin dans la langue de leur choix? Que pourrait-il faire de plus?

Mme Simmonds : Le financement accordé par le gouvernement fédéral a été une ressource merveilleuse qui nous a permis de mettre en place des programmes dans les communautés de toute la province.

Mme Barro : Je suis d’accord pour dire que les fonds ciblés pour la francophonie sont un atout très important sur lequel on devrait miser. Nous sommes très reconnaissants de ce que nous avons reçu, mais il est vrai qu’il serait utile d’avoir un financement plus important dans ce domaine.

La sénatrice Poirier : Merci.

[Français]

La sénatrice Mégie : Ma question s’adresse à Mme Simmonds, du gouvernement de l’Alberta. Vous avez dit que vous aviez recours au recrutement de professionnels de la santé francophones. Où les recrutez-vous, et par quels moyens? Avez-vous eu du succès?

[Traduction]

Mme Simmonds : Rien n’est aussi réussi qu’on le souhaiterait. Les ressources humaines en santé vivent une crise terrible dans toutes les provinces, et trouver des professionnels de la santé qui parlent français représente évidemment une difficulté supplémentaire.

En Alberta, nous avons la chance d’avoir le Campus Saint-Jean de l’Université de l’Alberta, qui offre beaucoup de formations en français non seulement à des professionnels de la santé, mais aussi à d’autres professionnels comme les enseignants. C’est une véritable bénédiction pour nous. Dans certaines des communautés qui comptent davantage de francophones, nous essayons de recruter des médecins et des professionnels de la santé qui parlent français. Toutefois, cela est évidemment difficile. Cependant, le principal avantage de l’Alberta, c’est d’avoir le Campus Saint-Jean de l’Université de l’Alberta.

J’espère que cela répond à votre question.

[Français]

La sénatrice Mégie : Merci. Ma prochaine question s’adresse à Mme Barro. Lors de son témoignage le 24 avril 2023, le Réseau Santé Nouvelle-Écosse a souligné un manque préoccupant de professionnels capables de s’exprimer en français. Évidemment, cela compromet l’accès aux soins de santé pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire, surtout pour les aînés qui forment des populations vulnérables. Y a-t-il chez vous une université ou un centre qui peut former des professionnels, ou allez-vous les chercher aussi dans d’autres provinces?

[Traduction]

Mme Barro : Nous n’avons pas une université précise pour la formation. Dans notre province, il y a l’Université Sainte-Anne qui nous offre un soutien en français. Elle n’a pas d’établissement d’enseignement en soins de santé à proprement parler, mais nous collaborons avec elle pour nous assurer que nous pouvons développer des compétences, en particulier dans les domaines qui sont présentement en sous-effectif, comme l’aide aux soins de longue durée, afin de nous assurer d’aider le secteur des soins de longue durée et d’avoir davantage de compétences et de capacités en français pour que les gens puissent être servis dans leur langue. Voilà un exemple de ce que nous pourrions faire, mais il n’y a pas d’université francophone pour les professionnels de la santé en Nouvelle-Écosse.

J’espère que cela répond à votre question.

[Français]

La sénatrice Mégie : D’accord. Merci.

[Traduction]

La sénatrice Moncion : Ma question s’adresse à vous deux. Comment vos ministères mesurent-ils la qualité et l’efficacité des services de santé fournis aux minorités linguistiques dans vos provinces? Comment mesurez-vous cela et quel type de résultats obtenez-vous?

Mme Barro : Je pourrais intervenir ici. Toutes les institutions désignées dans le secteur de la santé — le ministère de la Santé et du Mieux-être, l’Office of Healthcare Professionals Recruitment, l’Office of Addictions and Mental Health et le Department of Seniors and Long-term Care, ainsi que les deux autorités sanitaires, Nova Scotia Health et IWK Health — doivent publier un plan annuel de services en français qui décrit les mesures qu’elles vont prendre pour soutenir le développement des services et des soins en français et leurs réalisations au cours du dernier exercice financier. Ce plan est exigé par la Loi sur les services en français de la Nouvelle-Écosse. Nous veillons à ce que ces plans soient tous réalisés, à mesurer les progrès accomplis et à comprendre s’ils portent fruit.

La sénatrice Moncion : Je vous remercie. Qu’en est-il en Alberta?

Mme Simmonds : En Alberta, nous avons des mesures qualitatives et quantitatives, mais nous nous sommes principalement concentrés sur les mesures qualitatives par le biais de sondages, de résultats signalés par les patients et d’expériences vécues dans le système de santé rapportées par des patients. Nous sommes donc en mesure de comparer la communauté francophone à l’ensemble de la population albertaine et de tenir compte d’éléments comme le lieu de résidence en milieu rural ou urbain, etc.

En ce qui concerne les mesures quantitatives, nous ne publions rien de spécifique. Nous avons travaillé avec des mesures spécifiques qui visent à garantir que les documents axés sur la santé publique et la promotion de la santé soient traduits, afin que ces derniers soient disponibles en français pour les membres de cette communauté.

La sénatrice Moncion : Je vous remercie. Pourriez-vous toutes les deux nous parler de l’accès aux soins de santé dans votre province respective? A-t-on besoin de plus de médecins? Comment assure-t-on le service?

Mme Simmonds : Puisque mon micro est ouvert, je vais répondre en premier.

Je pense que toutes les provinces sont dans la même situation, c’est-à-dire qu’il y a une crise des ressources humaines en santé. Nous aimerions particulièrement réussir à nous concentrer sur l’augmentation des ressources humaines francophones en santé, mais il est évident que l’objectif principal, c’est que tous les Albertains aient accès à un fournisseur de soins primaires, un objectif que nous tentons d’atteindre d’ici un an, et que les mesures d’accès soient équivalentes à celles des autres provinces.

Je dirais qu’à l’heure actuelle, toutes les provinces manquent de ressources humaines en santé.

Mme Barro : Oui, je suis d’accord avec cette affirmation. La seule chose que j’ajouterais, c’est que si on ne peut pas fournir un service en français, il y a des coordonnateurs de services en français au sein des autorités sanitaires. Ceux-ci servent d’intermédiaires pour veiller à ce qu’il y ait au moins de l’interprétation et quelqu’un qui peut offrir de l’aide relativement à l’orientation. Nous avons donc des coordonnateurs et des personnes responsables de l’orientation. Les coordonnateurs en soins infirmiers des autorités sanitaires doivent également être bilingues.

Si on ne peut pas offrir cela, et parfois ce n’est pas possible parce que nous avons des difficultés avec tout, nous veillons à ce qu’il y ait de l’orientation, de la coordination et de la traduction qui soutiennent le patient.

La sénatrice Moncion : Merci.

Pourriez-vous nous parler des listes d’attente dans vos provinces? Par exemple, si j’ai bien entendu Mme Simmonds, êtes-vous en train de dire que l’Alberta souhaite être en mesure, d’ici un an, d’offrir l’accès aux soins à tous? Ai-je bien entendu?

Mme Simmonds : Tous les Albertains devraient avoir accès à un fournisseur de soins primaires. C’est l’objectif.

La sénatrice Moncion : Sans oublier que cela sera fait en moins d’un an. Je pense que c’est une grande réussite. Qu’en est-il de la Nouvelle-Écosse?

Mme Barro : La Nouvelle-Écosse veut vraiment travailler sur la stratégie quant à la façon dont on connecte les gens avec les fournisseurs de soins primaires. Nous cherchons des idées de soins en collaboration, comme les maisons de santé et les complexes de santé, afin d’avoir une approche collaborative. Nous ne pensons pas que nous réussirons à avoir un professionnel de la santé pour chaque résidant, mais nous devrions être en mesure de fournir des soins en collaboration.

Nous avons également ouvert un grand nombre de centres d’accès en Nouvelle-Écosse afin d’optimiser le champ d’action de nombreux professionnels de la santé, comme les pharmaciens. Dans certaines communautés francophones, il y a plusieurs pharmaciens communautaires qui offrent des services de soins primaires en français. Il y a Virtual Care NS et nous travaillons à faire en sorte qu’on ait accès à certains soins virtuels en français. En envisageant des pratiques collaboratives, nous essayons de faire en sorte que les gens obtiennent les services dont ils ont besoin quand ils en ont besoin, et qu’ils bénéficient d’une continuité des soins dans le cadre d’une démarche de soins de santé primaires.

J’espère que cela vous aide à comprendre la situation.

La sénatrice Moncion : Je vous remercie. J’ai une petite question. Y a-t-il un aspect identitaire sur les cartes de santé pour identifier qui est francophone, qui est anglophone, qui reçoit le service et quel type de service il reçoit? Ou est-ce une option qui n’existe pas dans vos provinces?

Mme Barro : Non. En Nouvelle-Écosse, nous venons de mettre en place un moyen d’indiquer ses préférences linguistiques, ses antécédents culturels, etc., afin que l’on puisse commencer à vérifier de manière plus rigoureuse et raisonnée les services dont les communautés ont besoin, dans le but de cibler ces besoins en nous fondant sur ces données. Oui, avec la carte de santé, on peut établir un lien.

La sénatrice Moncion : Merci.

Mme Barro : C’est facultatif. Les gens s’identifient ou non, alors c’est selon leur préférence.

La sénatrice Moncion : Qu’en est-il en Alberta?

Mme Simmonds : Nous n’avons pas cela sur la carte de santé. Il y a un processus d’auto-identification qui permet aux individus, une fois qu’ils sont dans le système, d’indiquer s’ils ont besoin de services d’interprétation ou s’ils souhaitent recevoir les services dans une autre langue. Chaque fois qu’ils reviennent pour recevoir des soins, c’est indiqué. Ainsi, il y aura soit un interprète, soit un service de traduction, soit un fournisseur qui parle français ou une autre langue, mais cela n’apparaît pas sur les cartes de santé.

Mme Barro : La Nouvelle-Écosse fournirait également un service similaire, en veillant à ce qu’on identifie ces personnes comme ayant besoin d’un soutien supplémentaire relativement à la langue.

Le président : Merci pour cette réponse, madame Barro.

La sénatrice Clement : Bonjour et bienvenue aux deux témoins. Les fenêtres derrière vous offrent de belles vues. Vous vivez dans de belles collectivités.

Je voudrais revenir sur la question de l’évolution démographique des populations francophones. Je suppose que vous constatez une augmentation du nombre de néo-Canadiens. Conservez-vous des données sur cette évolution démographique? Qui sont vos partenaires pour offrir des services à ces communautés en évolution? Avez-vous des partenaires? Comment adaptez-vous vos services pour répondre à leurs besoins spécifiques?

Je crois que Mme Barro a parlé des nouveaux Canadiens, et je crois que Mme Simmonds a parlé d’un cadre axé sur l’équité. Pourriez-vous vous pencher sur la manière dont vous offrez des services à ces nouveaux Canadiens?

Mme Barro : Je peux parler du contexte de la Nouvelle-Écosse. Nous suivons les progrès de tous les nouveaux immigrants et nous nous assurons de comprendre d’où ils viennent. Nous travaillons avec plusieurs organismes communautaires, des organisations d’aide à l’établissement des immigrants, etc., afin de comprendre qui arrive dans la province et quels sont leurs besoins. Parfois, c’est une question de langue, mais ces personnes sont très vulnérables et viennent de régions du monde qui nécessitent des services spéciaux, des soins en traumatologie, en santé mentale et en toxicomanie, etc. Nous travaillons en étroite collaboration pour essayer de comprendre, car nous avons un afflux important de nouveaux immigrants francophones. Honnêtement, d’après ce que nous avons compris jusqu’à présent, ils ont besoin d’un type de soins différent à bien des égards de celui dont les communautés autochtones, acadiennes et francophones ont besoin.

Par l’intermédiaire des services d’immigration, des organismes communautaires et de nos partenariats, nous essayons, bien sûr, de rester à l’affût. Nous identifions également des personnes par le biais des programmes de santé mentale et de lutte contre la toxicomanie.

Mme Simmonds : L’Alberta dispose d’un plan d’action pour la politique en matière de francophonie qui vient d’être mis à jour pour 2024-2028, ce qui lui permet d’adopter une approche holistique. Comme en Nouvelle-Écosse, nous travaillons en étroite collaboration avec nos collègues de l’emploi et de l’immigration. En ce qui concerne les soins de santé, dans le cadre du nouveau financement que nous avons reçu au titre des priorités partagées en santé, nous avons une approche décisionnelle beaucoup plus locale afin de veiller à ce qu’on offre les bons services de soutien aux néo-Canadiens et aux Canadiens francophones. En fait, nous travaillons en étroite collaboration avec les communautés pour identifier, avec les coordonnateurs qui ont d’autres rôles, les services supplémentaires dont elles pourraient avoir besoin.

On n’a pas encore terminé d’élaborer cela. La communauté avec laquelle nous allons travailler en étroite collaboration a identifié les services de soutien en santé mentale et en toxicomanie comme l’un de ces services, afin que la communauté y ait accès en français et qu’elle sache comment naviguer dans le système, ce qui peut s’avérer extrêmement compliqué pour n’importe quel néo-Canadien.

La sénatrice Clement : Puis-je revenir sur ce point avec vous? Lorsque vous parlez d’une approche plus locale, parlez-vous des partenaires avec lesquels vous travaillez? Qu’entendez-vous par « locale »?

Mme Simmonds : On parle de partenariats communautaires locaux. Nous travaillons avec le Réseau santé Alberta comme grand groupe, mais en fait, il y a des différences locales et communautaires entre, par exemple, Edmonton et des collectivités rurales qui pourraient accueillir de nouveaux arrivants, alors l’aide disponible varie.

Dans le cadre de notre approche en matière de soins de santé, nous prenons des décisions qui sont davantage axées sur la proximité et nous apportons un soutien plus local.

La sénatrice Clement : Passons à la Nouvelle-Écosse. Je voudrais vous interroger sur les ententes interprovinciales que vous avez conclues avec le Québec. Je pense que vous en avez en ce qui concerne la prestation de services en français. En quoi le fait d’avoir ce type d’accord a-t-il été utile, si ce l’a été? Est-ce que cela concerne les soins de santé?

Mme Barro : En fait, je ne suis pas au courant d’ententes spécifiques avec le Québec en ce qui concerne des services destinés à nous aider dans le domaine des soins de santé. Désolée, mais je ne suis pas au courant. Je suis désolée.

La sénatrice Clement : Peut-être pas spécifiquement dans le domaine des soins de santé, mais de manière générale. Avez-vous des ententes interprovinciales avec le Québec sur les questions francophones?

Mme Barro : Pas à ma connaissance. Je suis désolée.

La sénatrice Clement : Je vous remercie.

Le président : Nous menons cette étude afin de comprendre comment le gouvernement fédéral peut aider davantage les provinces et les territoires à fournir les services. L’un des défis qui se posent, c’est la coopération entre le gouvernement fédéral, vos gouvernements, les municipalités, les communautés, les réseaux de santé francophones et les établissements d’enseignement postsecondaire francophones. J’aimerais savoir ce que vous pensez des efforts que votre gouvernement pourrait déployer afin d’améliorer sa coopération avec le gouvernement fédéral. Que pourriez-vous nous dire à ce sujet?

Mme Barro : Il y a de nombreux comités fédéraux, provinciaux, territoriaux, etc., qui travaillent avec le gouvernement fédéral pour établir des relations et comprendre les besoins et les intérêts mutuels. Il y a toujours les enjeux de compétence, en particulier dans le domaine des soins de santé.

Le président : Nous voulons en entendre parler afin de comprendre ce que le gouvernement fédéral pourrait faire différemment en cas de problème.

Mme Barro : Cette année, la sous-ministre et la ministre sont coprésidentes avec le gouvernement fédéral, alors je peux seulement parler du point de vue de la santé. Ce que nous voulons vraiment mieux comprendre, c’est comment avoir une plus grande collaboration et une meilleure compréhension mutuelle des problèmes auxquels on est confrontés relativement à la prestation des soins de santé dans les provinces, leur très grande complexité, et comment avoir davantage d’occasions pour mieux se comprendre. Nous comprenons bien le fonctionnement des choses sur le terrain et nous comprenons que le gouvernement fédéral doit assumer des fonds et a des attentes à notre égard en tant que pays et en tant que provinces. Je pense qu’il pourrait faire plus de consultations et être davantage axé sur le partenariat. Si je peux me permettre, on le trouve parfois davantage paternel qu’égalitaire.

Le président : Je vous remercie. Madame Simmonds?

Mme Simmonds : Tout en respectant le rôle de la province vis-à-vis du gouvernement fédéral, si je comprends bien tout ce qu’a dit Mme Barro, je dirais que nous sommes du même avis. Il faut qu’il y ait de l’uniformité dans la prestation des soins de santé d’une province à l’autre, nous comprenons cela, mais il y a aussi une approche universelle.

Si l’on compare, par exemple, l’importance et la superficie de l’Alberta à celles d’une province comme la Nouvelle-Écosse ou l’Île-du-Prince-Édouard, la façon dont on fournit les soins de santé doit être légèrement différente. Il faut donc comprendre qu’une manière universelle de faire les choses risque de ne pas fonctionner, tout en étant conscients que nous devons obtenir des résultats comparables et que tous les Canadiens s’attendent à recevoir un certain niveau de soins de santé. Bien entendu, nous soutenons nos collègues en Nouvelle-Écosse qui dirigent le travail fédéral-territorial-provincial au nom des provinces.

La dernière chose que je nommerais, et que j’ai découverte au cours de la dernière année, c’est sans aucun doute l’intersection entre les gouvernements fédéral et provinciaux en ce qui concerne les néo-Canadiens, les réfugiés et les Canadiens plus vulnérables. Je pense qu’il serait avantageux de comprendre les rôles spécifiques et les domaines de soutien que le gouvernement fédéral pourrait apporter à cette population. Cependant, c’est quelque chose que je n’ai pas encore terminé de fouiller. Les services locaux de soutien communautaires francophones ont indiqué que cela représente un problème croissant pour eux.

Le président : Merci. J’ai une question spécifique sur la Loi canadienne sur la santé. Devrait-on revoir cette loi pour inclure des engagements précis pour les langues officielles ou un engagement financier à long terme pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire, à l’instar de la Loi sur l’apprentissage et la garde des jeunes enfants au Canada? Pensez-vous que cela vous aiderait?

Mme Simmonds : En Alberta, nous apprécions toujours le financement constant et à long terme. L’Alberta fournit essentiellement cet argent directement aux différents groupes communautaires qui doivent faire le travail. Dans leur cas, pour leur permettre de planifier et de développer leurs programmes, de croître, de prendre de l’expansion et de conserver leur personnel, des accords de financement à long terme seraient extrêmement bénéfiques pour la province.

Mme Barro : Oui, je dirais que la Nouvelle-Écosse serait en accord avec une telle approche. Il serait très important pour notre province de pouvoir compter sur des mesures durables. Le Transfert canadien en matière de santé serait un moyen durable pour nous d’espérer un financement dans notre province. Les accords bilatéraux ou autres actuels permettent d’atteindre certains objectifs, mais ils nous rendent un peu plus vulnérables dans le domaine de la santé.

Pour ce qui est de la question de savoir si nous devrions ouvrir la Loi canadienne sur la santé, je ne sais pas. Nous recevons beaucoup de conseils juridiques, etc., mais, de notre point de vue, plusieurs éléments de la Loi canadienne sur la santé sont désuets et mériteraient d’être mis à jour. Je n’ai pas examiné la question du point de vue des langues officielles pour savoir ce que cela donnerait. Je sais que l’inclusion d’un plus grand nombre de ces éléments, mais aussi de la santé mentale et de la toxicomanie, des soins à domicile et communautaires, et d’autres aspects similaires, constituerait une approche beaucoup plus complète d’envisager notre façon de travailler ensemble comme fédération.

Le président : J’ai une dernière question rapide à poser avant de céder la parole à mes collègues. Les soignants ont toujours besoin de soutien. Seriez-vous favorable à une stratégie nationale pour les soignants? Pensez-vous que vos gouvernements pourraient être ouverts à cette idée?

Mme Barro : Une partie de notre stratégie consisterait à privilégier les soins à domicile et à veiller à ce que les gens puissent vieillir chez eux, comme l’a dit Mme Simmonds de l’Alberta, et à mettre en place des stratégies visant à maintenir les gens dans leur propre communauté, entourés de leurs proches, etc. Pour ce faire, nous devons soutenir les soignants et leur offrir des mesures de soutien et des prestations afin qu’ils puissent s’occuper de leurs proches dans leur ville et nous engager dans cette voie. Il me semble que cela serait forcément utile.

Mme Simmonds : Bien entendu, l’Alberta soutient le vieillissement chez soi et la prestation locale de soins afin que les gens puissent vivre longtemps et en bonne santé sans être placés dans un établissement, et nous soutiendrions donc une telle démarche. Évidemment, en ce qui concerne les moyens précis par lesquels nous pourrions offrir cela aux Albertains et à tous les Canadiens... Il faudrait régler les détails, mais nous appuyons les activités qui permettent aux gens de vieillir chez eux ainsi que le soutien aux soignants.

Le président : Merci.

[Français]

La sénatrice Mégie : Ma question s’adresse à Mme Barro. Nous avons pu trouver sur Internet un article en anglais qui mentionnait que la Nouvelle-Écosse dispose d’un cadre d’équité en matière de santé qui assure un accès équitable aux communautés de langue officielle en situation minoritaire, mais on n’a pas pu trouver de version en français. Est-ce que cette version française existe?

[Traduction]

Mme Barro : Il existe une version française, qui vient d’être publiée il y a deux semaines. À vrai dire, elle n’a pas été publiée en même temps que la version anglaise, mais nous disposons désormais d’une version française.

[Français]

La sénatrice Mégie : Lorsqu’elle sera publiée, vous sera-t-il possible d’en faire parvenir une copie au comité, s’il vous plaît?

J’ai une question qui s’adresse principalement à Mme Simmonds, mais à laquelle pourra également répondre Mme Barro. Je reviens en arrière, au moment de la pandémie. Je me suis demandé ceci : comment le transfert d’information sur le plan de la santé publique s’est-il fait, pour les personnes vivant dans une communauté de langue officielle en situation minoritaire, pour qu’on leur donne des informations relatives à la vaccination et aux nouvelles mesures sanitaires, entre autres?

Avez-vous eu de la rétroaction de la part de gens bien informés? Pourriez-vous nous parler de cette période difficile?

[Traduction]

Mme Simmonds : Je vous remercie de me donner l’occasion de répondre à cette question. Si j’ai mentionné le Réseau santé Alberta, avec lequel nous avons collaboré pour diffuser des renseignements en français, c’est notamment en raison de la pandémie et parce qu’il fallait s’assurer que les documents soient traduits en français. Il est évident que, pendant la pandémie, il a été difficile pour tout le monde de traduire et de diffuser les renseignements rapidement et en temps voulu. Nous avons eu la chance de pouvoir nous appuyer sur l’Agence de la santé publique du Canada, qui fournit des informations en français pouvant être communiquées aux Albertains et, à vrai dire, à l’ensemble de la population canadienne. Quoi qu’il en soit, c’est certainement l’une des raisons pour lesquelles nous nous sommes efforcés de veiller à ce que nos collègues francophones de l’Alberta disposent de renseignements de qualité en français.

[Français]

La sénatrice Mégie : Merci. Madame Barro, voulez-vous également réagir à cela?

[Traduction]

Mme Barro : Un peu comme en Nouvelle-Écosse, en raison de l’urgence et de la rapidité avec lesquelles nous avons dû gérer la pandémie, de nombreuses communautés ont probablement estimé qu’elles ne disposaient pas de suffisamment d’informations dans leur propre langue y compris les communautés francophones, je crois.

Encore une fois, en veillant à ce que cet aspect soit considéré comme une pierre angulaire du cadre d’équité en matière de santé et à ce que nous fassions un meilleur travail pour garantir la traduction des documents, entre autres, nous aiderons les gens à mieux comprendre et à prendre les décisions par eux-mêmes en disposant des bonnes informations.

[Français]

La sénatrice Mégie : Merci.

[Traduction]

La sénatrice Poirier : Au début, je vous ai demandé toutes les deux ce que le gouvernement fédéral pourrait faire de plus pour aider les provinces à mieux servir leurs communautés francophones en situation minoritaire ou la communauté anglophone du Québec, qui est en situation minoritaire. Si je me souviens bien, la réponse que j’ai obtenue était qu’une augmentation du financement serait assurément utile.

En même temps, j’ai également entendu dire que le problème qui se pose actuellement est peut-être davantage lié à la main-d’œuvre ou au fait de recruter des gens pour venir faire le travail, et que chaque province est exactement dans la même situation. Si chaque province est exactement dans la même situation et si les fonds qu’elles reçoivent actuellement ne leur apportent pas la solution, je me demande ce que des fonds supplémentaires pourraient accomplir et si c’est la voie que nous devrions emprunter. Devrions-nous chercher à déterminer si le gouvernement fédéral pourrait aider à faciliter le processus de recrutement d’une autre manière? Sinon, est-ce un rôle que les provinces devraient jouer? Je pense, par exemple, à un programme de sensibilisation pour veiller à ce que les élèves qui terminent leurs études secondaires comprennent l’importance du manque de main-d’œuvre dans les systèmes de santé, en particulier, et dans les communautés linguistiques en situation minoritaire. Le gouvernement fédéral peut-il faire quelque chose pour encourager les élèves à se tourner vers ce type d’études? Devrions-nous envisager autre chose si le financement ne permet pas de résoudre le problème à l’heure actuelle et si le même problème se pose dans toutes les provinces, en particulier en ce qui concerne les communautés minoritaires? J’aimerais savoir ce que vous en pensez, s’il n’y a pas un moyen ou une autre façon d’aider à inciter plus de gens à étudier pour devenir des professionnels de la santé.

Mme Barro : Je peux répondre à cette question. Nous avons un comité mixte fédéral-territorial-provincial qui travaille sur les ressources humaines dans le domaine de la santé. En collaboration avec le gouvernement fédéral, nous avons élaboré un plan d’action dans ce domaine.

Nous réalisons ensemble plusieurs travaux dans le domaine des ressources humaines dans le domaine de la santé. Dans le cadre de ce plan, le gouvernement fédéral a déterminé ce que nous pourrions faire pour nous soutenir mutuellement. Je ne connais pas les détails du plan pour l’instant — ils ne me viennent pas à l’esprit —, mais nous travaillons collectivement sur un plan de ressources humaines dans le domaine de la santé.

La sénatrice Poirier : La situation est-elle meilleure aujourd’hui qu’avant la mise en place du plan?

Mme Barro : C’est un travail en cours. Le plan a été élaboré de façon collaborative et il sera maintenant mis en œuvre. Chacune des provinces fait beaucoup d’efforts pour comprendre le phénomène du recrutement.

Je peux vous parler de la Nouvelle-Écosse. Nous avons effectué plusieurs missions dans d’autres pays pour tenter de recruter des professionnels de la santé et étudier toutes les possibilités. Nous avons adopté une loi sur l’accès aux soins qui raccourcirait la durée de l’accréditation, et nous nous tournons donc vers les pays qui ont des normes de formation et d’accréditation similaires à celles de la Nouvelle-Écosse. Nous acceptons ces personnes beaucoup plus rapidement. En outre, nous avons la possibilité d’accepter des prestataires de soins de santé de n’importe quelle province ou n’importe quel territoire canadiens.

Cela pourrait donner lieu à une certaine concurrence entre nous tous, mais nous en faisons beaucoup en matière de recrutement. Je dirais que nous avons connu un certain succès dans ce domaine, mais que la demande dépasse encore probablement les ressources disponibles. Le recrutement de professionnels de la santé est une bonne chose, mais nous avons encore des problèmes.

Mme Simmonds : En Alberta, nous ne considérons pas cela uniquement dans le contexte du système de santé. C’est une excellente question.

Les ressources humaines dans le domaine de la santé sont un problème, c’est certain. Si l’on s’intéresse aux 5 millions de dollars que nous avons consacrés aux services en français, ils servent en grande partie à la sensibilisation, à la coordination, à la liaison et à des services qui peuvent être assurés par quelqu’un qui n’est pas nécessairement un professionnel de la santé. Nous essayons de faire en sorte que même les services informels, comme le Café de Paris, aident les professionnels de la santé qui, comme moi, ne pratiquent pas beaucoup leur français, à se perfectionner dans cette langue afin qu’ils puissent servir les Albertains francophones lorsqu’ils viennent se faire soigner.

Bien que le problème des ressources humaines dans le secteur de la santé soit évident, il existe d’autres mécanismes qui nous permettent d’aider les membres de notre communauté francophone à s’informer sur le système de santé et à s’y retrouver dans la langue de leur choix.

La sénatrice Poirier : Merci.

Le président : Madame Simmonds, je connais très bien l’Alberta. Vous avez beaucoup de très bonnes organisations culturelles francophones qui pourraient aider toute votre population à parler français, notamment ces Cafés de Paris. Je vous remercie.

[Français]

La sénatrice Moncion : Je vais donner l’occasion à Mme Simmonds de pratiquer son français, puisque vous avez dit que vous n’aviez pas souvent l’occasion de le faire.

L’ACFA a demandé à la firme KPMG de réaliser une étude pour mieux comprendre les besoins des francophones en matière de services sociaux et de santé mentale. Cette étude semble révéler une offre quasi inexistante de services en français. Est-ce que vous pourriez commenter cette information que nous avons?

[Traduction]

Mme Simmonds : Je ne suis pas au courant d’une étude réalisée par KPMG, mais je peux certainement m’informer. Pour répondre à votre question, il a été constaté qu’il y avait une énorme lacune sur le plan de la connaissance et de la compréhension des services offerts en français et, en réalité, qu’il n’y avait pas d’offre complète de services en français.

Dans le cadre du travail que nous effectuons, un répertoire des professionnels de la santé et des services de santé offerts en français sera mis au point au cours des deux prochaines années afin que les gens puissent trouver ces services plus facilement.

Je pense que les services existent, mais que, de toute évidence, ils ne sont pas faciles à trouver pour une personne qui ne sait pas très bien où chercher. Voilà ce qu’il nous faut vraiment améliorer : l’accès.

La sénatrice Moncion : Merci. Pourrais-je avoir un commentaire de votre part, madame Barro, sur cette question dans le cas de la Nouvelle-Écosse?

Mme Barro : Je n’ai pas non plus connaissance de l’étude de KPMG. Pourriez-vous reposer la question?

La sénatrice Moncion : La disponibilité des ressources en français pour les patients en santé mentale.

Mme Barro : Nous en avons fait beaucoup en ce qui concerne l’offre de services de santé mentale en ligne en français en Nouvelle-Écosse. Un grand nombre de nos services de santé mentale en ligne sont disponibles en français, comme Therapy Assistance Online, Tranquility, Togetherall, Jeunesse, J’écoute et le Programme d’aide aux pompiers et aux bénévoles en recherche et sauvetage terrestre de la Nouvelle-Écosse.

Je dirais que nous nous sommes efforcés, dans le domaine de la santé mentale en ligne, de faire en sorte que ces services soient disponibles en français.

Le président : Mesdames Barro et Simmonds, je tiens à vous remercier chaleureusement de votre contribution à cette étude. Elle nous aidera certainement à mieux comprendre les problèmes que vous éprouvez dans vos provinces et la manière dont le gouvernement fédéral peut aider ces dernières.

[Français]

Merci pour votre contribution et votre participation.

Chers collègues, nous allons faire une brève pause, mais j’aimerais passer à huis clos pour vous transmettre quelques informations avant le deuxième groupe de témoins, avec votre accord.

Merci de votre participation.

(La séance se poursuit à huis clos.)

(La séance publique reprend.)

Le président : Chers collègues, pour notre deuxième groupe de témoins, nous entendrons des membres de l’Administration du Sénat et du Bureau de la traduction sur des questions de traduction et d’interprétation.

Nous accueillons Mme Shaila Anwar, greffière adjointe de la Direction des comités, que je veux féliciter pour sa nomination au poste de greffière du Sénat et greffière des Parlements. Félicitations, madame Anwar. Nous accueillons également Mme Maxime Fortin, greffière principale à la Direction des comités.

Du Bureau de la traduction, nous accueillons M. Jean-François Lymburner, président-directeur général, M. Matthew Ball, vice-président, Services au Parlement et interprétation, ainsi que Mme Annie Trépanier, vice-présidente, Politiques et services intégrés.

Bienvenue à tous et merci d’être ici. Nous allons commencer par vos remarques préliminaires.

Madame Anwar, la parole est à vous.

Shaila Anwar, greffière adjointe, Direction des comités, Sénat du Canada : Merci beaucoup, honorables sénateurs et sénatrices.

Je comparais ce soir à titre de greffière adjointe à la Direction des comités, surtout parce que vos comités sont les plus grands consommateurs des services d’interprétation et de traduction au Sénat.

Je suis accompagnée de Mme Maxime Fortin

Maxime Fortin, greffière principale, Direction des comités, Sénat du Canada : Bonsoir. Comme l’a indiqué le sénateur Cormier, je suis greffière principale à la Direction des comités et je comparais à titre de représentante de l’Administration du Sénat responsable de l’entente de partenariat entre le Sénat et le Bureau de la traduction.

[Traduction]

Pour vous donner un peu de contexte, le Sénat a une entente de partenariat avec le Bureau de la traduction qui énonce les rôles et responsabilités de chacun en ce qui concerne la prestation des services linguistiques, donc pour les services de traduction et d’interprétation. L’entente actuelle couvre la période du 1er avril 2022 au 31 mars 2027.

[Français]

Pour ce qui est du dossier de l’interprétation, nous avons expérimenté certaines limitations pendant la pandémie. Cependant, depuis septembre 2022, nous sommes revenus à un horaire normal pour les comités et pour la Chambre.

Comme vous le savez, depuis l’automne 2022, le Sénat a fait le choix de revenir à des activités en personne. Donc, les sénateurs participent aux réunions de comité et aux séances de la Chambre en personne. La décision de mettre fin aux séances hybrides a eu un impact direct et positif sur les enjeux de capacité. Depuis lors, les comités du Sénat sont retournés à un horaire complet et nous n’avons plus les mêmes problèmes de capacité que lorsque nous tenions des réunions hybrides.

En guise de rappel, avant la pandémie, les témoins des réunions de comité pouvaient comparaître par vidéoconférence. Puisque nous n’utilisions pas la plateforme Zoom, nous étions limités pour ce qui est du nombre de témoins qui pouvaient comparaître par vidéoconférence au même moment, ce qui fait que le nombre de témoins virtuels était moins important.

Mme Anwar : Nous avons de bonnes nouvelles à cet égard. Selon nos dernières statistiques qui couvrent la période de septembre à décembre 2023, environ 70 % des témoins comparaissent en personne et moins de 30 % le font de façon virtuelle. Donc, la majorité des participants comparaissent en personne, surtout si on inclut les sénateurs.

Du côté du Sénat, le nombre d’incidents liés à l’interprétation et causant des retards ou des annulations de réunions est également très bas, soit environ 5 % des réunions. C’est une diminution d’à peu près 50 % par rapport à la même période en 2022.

La majorité des problèmes sont identifiés avant la réunion, soit pendant les tests techniques obligatoires qui sont faits quelques jours avant une réunion, ou lors du test de son qui se fait dans les 30 minutes qui précèdent le début de chaque rencontre.

Le principal enjeu auquel le Sénat fait face actuellement est la flexibilité en vue d’ajouter des réunions additionnelles en concurrence avec d’autres réunions de comité, surtout durant les périodes où le Sénat siège en même temps ou s’il siège pendant de plus longues heures. Il faut mentionner que ce ne sont pas seulement les services d’interprétation qui ne peuvent pas soutenir des réunions supplémentaires à l’occasion, mais il y a aussi un enjeu du côté du service responsable de la transcription, des greffiers et des services multimédias.

Il y a aussi parfois une réduction des services disponibles pour les activités non parlementaires. Afin d’essayer de combler cette lacune, le Sénat procède en ce moment à des tests en utilisant des formats différents, comme l’interprétation à distance.

Mme Fortin : Évidemment, la pandémie a eu moins d’impacts visibles en ce qui concerne les services de traduction.

Du côté du Sénat, les enjeux sont les mêmes qu’avant, soit les enjeux liés à la qualité ainsi qu’aux délais de livraison, surtout avec les progrès et l’accès en matière de logiciels de traduction automatisée.

Je vais m’arrêter ici, mais nous serons heureuses de répondre à vos questions après l’intervention de nos collègues du Bureau de la traduction.

Le président : Merci, madame Fortin et madame Anwar. Je donne maintenant la parole à M. Lymburner.

Jean-François Lymburner, président-directeur général, Bureau de la traduction, Services publics et Approvisionnement Canada : Bonjour et merci, monsieur le président. J’aimerais tout d’abord souligner la présence de mes collègues Mme Annie Trépanier, vice-présidente, Politiques et services intégrés, et M. Matthew Ball, vice-président, Services au Parlement et interprétation. Je salue également nos partenaires de l’Administration du Sénat qui sont avec nous.

Monsieur le président, honorables sénatrices et sénateurs, merci de cette invitation. Je suis heureux de me présenter devant le Comité sénatorial permanent des langues officielles en cette année spéciale où le Bureau de la traduction fête les 90 ans de sa création, en 1934.

Par le fait même, nous célébrons un double anniversaire, puisqu’il y a maintenant 65 ans que l’interprétation simultanée a fait son entrée au Parlement canadien. Permettez-moi d’ailleurs de saluer Patricia Leguen, Claudette Branchard et Ronald Hoffman, qui sont en cabine aujourd’hui pour faire l’interprétation de la réunion.

[Traduction]

Monsieur le président, les services d’interprétation ont été mis à l’avant-plan ces dernières années, alors que des enjeux ont compliqué leur prestation. Les incidents de santé et sécurité parmi les interprètes ont eu un grand impact, autant sur le plan opérationnel que sur le plan humain. Nous avons travaillé d’arrache-pied afin de comprendre et prévenir ces incidents. Plusieurs facteurs ont contribué depuis à améliorer la situation.

Entre autres, les études que nous avons menées et que nous continuons à mener, avec nos partenaires parlementaires et divers spécialistes, nous ont permis d’améliorer la protection des interprètes.

La hausse appréciable du nombre de personnes qui choisissent le présentiel plutôt que le virtuel diminue également le risque de problèmes. Je tiens d’ailleurs à saluer votre décision, honorables sénateurs, de tenir vos rencontres en présentiel. J’invite les témoins à suivre votre exemple dans la mesure du possible.

Cela étant dit, des incidents continuent à se produire, y compris en présentiel. C’est pourquoi nous avons mis en place un protocole d’intervention et de suivi, en collaboration avec une audiologiste. Ce protocole nous aide à préserver la santé auditive de nos interprètes lorsqu’un incident survient.

[Français]

Parallèlement, nous poursuivons nos efforts pour stimuler la relève à travers le pays et renforcer notre capacité en interprétation. Ces efforts nous ont permis de couvrir tous les événements interprétés prévus au programme ordinaire établi par l’Administration du Sénat.

Nous améliorons également notre souplesse afin de répondre aux demandes de dernière minute et aux imprévus. Par exemple, nous maintenons une équipe d’interprètes en attente, prête à remplacer rapidement des collègues au besoin.

De plus, nous venons d’instaurer, avec nos partenaires parlementaires, un processus d’approbation ponctuelle des microphones. Ainsi, lorsqu’un témoin nous avise qu’il compte utiliser un microphone ne figurant pas sur notre liste, nous pouvons confirmer que le microphone est suffisamment sécuritaire pour que le témoignage soit interprété.

Nous continuons, par ailleurs, à rencontrer régulièrement nos homologues parlementaires afin de faire le point sur les priorités, de discuter des processus et d’optimiser l’affectation de nos ressources.

[Traduction]

Monsieur le président, à titre de fournisseur unique pour les besoins linguistiques du Parlement depuis 1934, et fournisseur optionnel depuis 1995 choisi par bon nombre des ministères et organismes fédéraux, le Bureau de la traduction a à cœur de favoriser l’usage égal du français et de l’anglais.

Nous sommes fiers d’avoir développé une expertise de la traduction en situation d’urgence. Par exemple, nous traduisons les alertes de tornade en moins de deux minutes.

L’expérience de la pandémie et un rapport du commissaire aux langues officielles nous ont montré que le gouvernement devait améliorer sa capacité de communiquer rapidement dans les deux langues officielles. À cet effet, le Secrétariat du Conseil du Trésor a fait appel à nous et à divers ministères pour créer une banque de messages bilingues pouvant être diffusés rapidement dans différentes situations.

Une version pilote de la banque sera rendue publique prochainement, et nous espérons qu’elle sera adoptée et enrichie par l’ensemble des institutions gouvernementales et parlementaires.

[Français]

Monsieur le président, en situation d’urgence comme à tout autre moment, la qualité demeure le mot d’ordre du Bureau de la traduction. Nous tenons à être dignes de la confiance que placent en nous le Parlement ainsi que tous les ministères et organismes qui choisissent de faire affaire avec nous.

Nos interprètes sont dûment accrédités et offrent une interprétation d’une grande fidélité.

Nos traducteurs et traductrices appliquent des normes de qualité rigoureuses.

Nos terminologues ne laissent rien au hasard dans leurs recherches.

Nous utilisons évidemment les technologies comme la traduction automatique, mais avec doigté, et toujours sous la supervision de notre personnel hautement qualifié.

[Traduction]

Merci encore de cette occasion de présenter nos efforts pour bien servir les parlementaires, les fonctionnaires et l’ensemble de la population canadienne. Mme Trépanier, M. Ball, moi-même et nos collègues sommes à votre disposition pour répondre à vos questions. Merci.

[Français]

Le président : Merci, monsieur Lymburner.

Nous passons maintenant à la période de questions. Chers collègues, je vous rappelle que nous accordons cinq minutes pour vos questions et pour la réponse. Si le temps le permet, nous ferons un deuxième tour de table.

La sénatrice Moncion : Je pensais être la dernière, puisque je vous ai déjà questionnés à plusieurs reprises. Dans les notes qui nous ont été fournies, on revient à 2016, mais je sais que la situation du Bureau de la traduction a été affectée avant cette période.

Pouvez-vous parler des coupes budgétaires auxquelles le Bureau de la traduction a dû faire face depuis quelques années, et qui ont causé certains problèmes concernant notamment l’accessibilité aux programmes d’éducation dans les universités, ce qui a eu un effet sur le nombre de personnes qui ont reçu un diplôme en interprétation?

M. Lymburner : Merci de votre question, sénatrice. Je me tournerai vers Mme Trépanier pour ce qui touche la période qui précède 2016, puisque je suis arrivé assez récemment au Bureau de la traduction.

Cependant, en ce qui concerne le budget, sa réduction a, bien évidemment, eu bien des impacts.

Je vais commencer par parler des subventions. Le Bureau de la traduction est vraiment un moteur pour l’industrie langagière au Canada. La capacité qu’on y développe nous permet d’embaucher des étudiants et de soutenir certains programmes.

Étant donné le fait que le Bureau de la traduction fête son 90e anniversaire, j’ai eu la chance d’assister à plusieurs événements. Il y avait des bourses par le passé. Évidemment, certaines situations budgétaires nous empêchent de soutenir des programmes de bourses comme à l’époque.

Le Bureau de la traduction embauche tout de même presque tous les traducteurs qui graduent des quelques programmes qui existent dans les universités canadiennes. Je vais être honnête avec vous; avec l’intelligence artificielle et les incidents dont j’ai parlé dans mes notes d’ouverture, cette profession ne sera pas toujours aussi attrayante pour les jeunes qui veulent faire carrière dans le domaine langagier.

On tente fortement de changer cette tendance, de viser des gens encore plus jeunes, des gens qui sont intéressés à la lecture, au français, aux langues et qui désirent une carrière excitante.

En ce qui concerne les interprètes, il n’y a plus que deux programmes dans les universités au Canada, soit à l’Université York et à l’Université d’Ottawa.

Le Bureau de la traduction fait tout ce qu’il peut pour soutenir ces programmes en fournissant du soutien technique ou des professeurs.

Madame la sénatrice, on travaille aussi présentement avec deux universités pour développer deux autres programmes ailleurs au pays afin d’augmenter le nombre d’interprètes. Encore une fois, on embauche quasiment tous les finissants dans notre programme.

J’approche de la fin de ma réponse, car il y avait plusieurs éléments dans votre question.

Le statut optionnel du Bureau de la traduction depuis 1995 date un peu. Vous avez parlé de 2016, donc on doit être prudent. Si on ne peut pas toujours maintenir une force de travail, il faut être prudent, étant donné que certains ministères ont l’option de faire affaire avec nous ou non. À ce moment-là, on doit être judicieux et s’assurer de faire une bonne vente ou un bon marketing de nos services et leur faire comprendre que le Bureau de la traduction offre du travail de grande qualité et une excellente révision. Oui, on utilise la technologie, mais à bon escient. On doit être prudent de ce côté-là. Le fait que plusieurs ministères peuvent développer leur propre force de travail limite et morcelle le marché langagier au Canada. Je m’arrête ici.

La sénatrice Moncion : Je pense que certains choisissent même de ne pas faire traduire leurs documents ou de ne pas utiliser vos services?

M. Lymburner : C’est un bon point. Ne pas le faire... Je pense qu’on n’a pas vraiment le choix de traduire certains documents. Effectivement, certains documents de moindre valeur qui étaient traduits par le passé, comme les courriels ou différents documents ayant moins de visibilité, seront moins traduits.

Annie Trépanier, vice-présidente, Politiques et services intégrés, Bureau de la traduction, Services publics et Approvisionnement Canada : Merci pour la question. Effectivement, on voit certaines tendances. Le Bureau de la traduction reçoit de plus en plus de gros volumes de traduction plutôt que des courriels ou des choses comme ça. Ce sont les tendances que l’on voit. On reçoit de gros volumes de traduction plutôt que des éléments à la pièce.

Le président : Pouvez-vous m’expliquer... À ma grande surprise, je ne savais pas que c’était optionnel. Évidemment, on l’a lu et constaté quand on a étudié le projet de loi sur les langues officielles. On a d’ailleurs fait des recommandations dans notre rapport qui visaient à codifier le rôle du Bureau de la traduction. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi, historiquement, les ministères ont l’option de faire appel à vos services ou pas?

M. Lymburner : Comme je l’ai mentionné, depuis 1995, le Bureau de la traduction a le statut d’organisme à fonds renouvelables. Cela nous permet de réclamer des frais pour nos services. Il faut rester compétitif. Évidemment, cela peut sembler une bonne option pour plusieurs ministères de faire affaire avec le Bureau de la traduction, mais dans une situation de compressions, les gens vont tenter de réduire les coûts et iront peut-être directement au secteur privé.

Somme toute, le Bureau de la traduction demeure quand même un centre d’expertise reconnu au pays et un des plus gros dans le monde. Cela devient de plus en plus difficile pour nous de maintenir ce centre d’expertise si les ressources sont divisées et si des personnes qui pourraient éventuellement venir travailler au Bureau de la traduction, dans un cadre impressionnant de rigueur, se font offrir des postes un peu partout. Cela limite notre possibilité d’offrir d’autres services que la traduction. C’est la même chose pour la technologie. Si on vend le plus de technologie possible au plus grand nombre possible d’organismes, notre pouvoir d’achat s’étiole un peu.

Cela n’empêche pas d’offrir des services. Je vous dirais qu’au-delà de 70 % des agences et ministères font encore affaire avec nous. Certains ont même essayé de faire les choses seuls. Parfois, avec des classifications — je ne veux pas entrer dans les détails pour ce qui est des ressources humaines, mais le Bureau de la traduction est le seul organisme au pays à pouvoir engager des traducteurs. La classification de traducteur est ici. Il est possible que dans d’autres groupes et à d’autres endroits, des gens bilingues comme nous, qui n’ont peut-être pas tout à fait la formation requise, soient capables de traduire un peu. Cela ne veut pas dire qu’ils ne font pas un travail de qualité, mais cela peut se produire dans des logiques de réduction de coûts, par exemple.

Le président : Merci. J’ai des sous-questions, mais je vais céder la parole.

La sénatrice Poirier : Je tiens à remercier les interprètes pour le travail exceptionnel et essentiel qu’ils font pour les langues officielles au sein du Parlement.

Ma première question s’adresse au Bureau de la traduction. Avez-vous fait une soumission pour un nouveau financement dans le prochain budget? Si oui, combien d’argent avez-vous demandé et comment cet argent viendrait-il assurer la continuité essentielle du Bureau de la traduction? Sinon, pourquoi n’avez-vous pas fait la demande?

M. Lymburner : C’est une excellente question, monsieur le président. Encore une fois, je vais donner une première réponse, mais Annie pourra la compléter.

Oui, nous avons évidemment fait une demande pour un nouveau financement dans le prochain budget qu’on attend tous impatiemment. Il y a environ trois ou quatre catégories de fonds, dont les fonds pour le soutien aux parlementaires. Nous leur offrons un service et notre financement est fixe. Vos demandes augmentent un peu ici et du côté parlementaire, donc on a une demande fixée pour les services parlementaires. On demande des fonds pour établir des programmes de bourses afin d’aider les universités.

On demande aussi des fonds pour le développement des langues autochtones. On a de plus en plus de demandes pour ce qui est des langues autochtones, mais pour garantir un certain volume, on aimerait être en mesure de bâtir et de trouver des personnes qui connaissent les différentes langues, car il y en a plusieurs. On a une demande en ce sens dans le prochain budget. On sait que nos demandes seront en concurrence avec celles de plusieurs collègues de la région de la capitale nationale et celles des autres ministères. En gros, c’est ce que nous avons demandé. Annie, ai-je oublié une partie?

Mme Trépanier : En ce moment, on examine toutes nos options et le processus est encore en cours. On est en train de regarder tout cela par rapport aux montants.

M. Lymburner : Pour simplifier, comme toutes les industries au cours des dernières années, les salaires... On fait affaire avec les gens du Bureau de la traduction pour la majeure partie de vos travaux, mais lorsque c’est possible, on peut aussi faire affaire avec le secteur privé. Comme un peu partout, les coûts ont augmenté. Comme je le disais, notre enveloppe pour soutenir les parlementaires est fixe. On demande de l’argent pour ajuster les montants et refléter le coût de la vie à l’heure actuelle.

La sénatrice Poirier : Avez-vous rencontré Jean-Yves Duclos depuis qu’il a été nommé ministre des Services publics et de l’Approvisionnement? Si oui, a-t-il été à l’écoute et ouvert à vos demandes et à vos inquiétudes?

M. Lymburner : Personnellement, je suis en poste depuis le 22 janvier et je n’ai pas rencontré le ministre Duclos, mais je sais que Services publics et Approvisionnement Canada est très sensible à la situation du Bureau de la traduction. Nous sommes extrêmement bien appuyés.

La sénatrice Poirier : Le rencontrerez-vous bientôt ou avez-vous fait une demande pour le rencontrer?

M. Lymburner : Lorsque c’est requis, je soumets tous les enjeux et tous les dossiers du Bureau de la traduction par l’intermédiaire de ma sous-ministre. Je sais que M. Duclos est très au fait du travail du Bureau de la traduction, mais il a peut-être rencontré mes prédécesseurs. Je vais me tourner vers Matthew Ball, qui a été président-directeur général, et Annie.

Matthew Ball, vice-président, Services au Parlement et interprétation, Bureau de la traduction, Services publics et Approvisionnement Canada : Je suis au Bureau de la traduction depuis plusieurs décennies. Normalement, je rencontre mon patron qui rencontre son patron. C’est rare que je rencontre le ministre à mon niveau, mais comme l’a dit M. Lymburner, nous breffons régulièrement nos supérieurs sur tous les enjeux et questions auxquels nous faisons face.

La sénatrice Poirier : Nous savons que le manque d’interprètes qualifiés est un problème qui n’est toujours pas réglé. Quelles sont les démarches entreprises par le Bureau de la traduction pour recruter de nouveaux interprètes? Que peut faire le gouvernement fédéral pour aider dans cette situation de pénurie?

M. Lymburner : C’est une excellente question, monsieur le président. Comme je l’ai dit, les interprètes sont des traducteurs à la base; c’est la base commune. On doit les recruter et intéresser les jeunes à la traduction. C’est souvent après qu’ils vont se spécialiser dans des domaines comme l’interprétation. Il faut vraiment aller dans les universités, augmenter notre présence et s’assurer qu’il y a plus de programmes que les deux ou les quelques programmes qui existent toujours au Canada. C’est une première étape. Le Bureau de la traduction s’implique aussi beaucoup dans l’accréditation des interprètes. J’ai des collègues ici avec moi et on s’assure... C’est un métier extrêmement exigeant sur le plan cognitif : les gens écoutent en même temps qu’ils parlent et qu’ils regardent.

On a donc augmenté la fréquence des tests pour essayer d’attirer les gens. Je sais aussi que mes prédécesseurs ont essayé de recruter à l’international. Le Canada a une très bonne réputation en ce qui touche ses interprètes, ce qui est très bien. Encore là, être en mesure de recruter et de faire venir des gens qui voudraient travailler, c’est un enjeu qui n’est pas si évident, mais on met tout en notre pouvoir pour augmenter le nombre d’interprètes pour servir les parlementaires.

La sénatrice Poirier : Merci.

La sénatrice Mégie : Merci à nos témoins qui sont venus aujourd’hui nous éclairer sur la traduction et l’interprétation. Je voulais savoir ceci : dans le contexte d’une institution bilingue, disposez-vous de données linguistiques concernant le personnel qui travaille au Sénat? Si oui, quels sont les constats que vous avez faits sur ces données et sinon, pensez-vous que la collecte de données serait nécessaire pour garantir la bonne application de la Loi sur les langues officielles?

M. Lymburner : Monsieur le président, je ne suis pas sûr d’avoir bien compris la question sur les données linguistiques.

La sénatrice Mégie : Je parle du personnel qui travaille au Sénat et qu’on engage, de la proportion de francophones, d’anglophones, d’allophones; avez-vous ces données?

Mme Anwar : Pas actuellement, sénatrice, mais on peut certainement poser la question aux ressources humaines; il y a des postes au sein de l’Administration du Sénat où il y a un certain niveau de bilinguisme requis, par exemple les greffiers des comités doivent être complètement bilingues dans les deux langues officielles. On a aussi des postes où ce n’est peut-être pas requis d’avoir le même niveau de compétence dans les deux langues officielles. Du côté du personnel du Sénat, je ne suis pas certaine si on a ces données. Probablement qu’il y a des données, mais on peut certainement poser la question aux ressources humaines pour en savoir plus pour ce qui est des postes du personnel de l’Administration du Sénat.

M. Lymburner : Du côté du Bureau de la traduction, on a une centaine de traducteurs affectés à la traduction des parlementaires. On fait majoritairement de la traduction de l’anglais vers le français, mais on a une partie des employés qui traduisent du français vers l’anglais, donc l’inverse. Pour ce qui touche les interprètes, on en a environ 150 avec qui on fait affaire et qui sont forcément bilingues.

La sénatrice Mégie : Les critères de sélection sont équitables, qu’ils soient anglophones ou francophones?

M. Lymburner : De notre côté, souvent, ça vient avec le travail.

M. Ball : Il y a un processus d’accréditation, tant pour les traducteurs qui font les textes que pour les interprètes qui font le discours oral. Tous les interprètes sont accrédités dans les deux sens, donc un interprète en cabine anglaise peut travailler vers le français et un interprète en cabine française peut travailler vers l’anglais, mais généralement, au Parlement du Canada, les employés dans les cabines font la traduction vers leur langue maternelle et du côté de la traduction, on embauche selon les besoins. La majorité du travail au Parlement canadien se fait donc de l’anglais vers le français; il y a quand même beaucoup de français vers l’anglais, et on s’assure d’avoir les effectifs en place pour répondre aux besoins du Parlement.

La sénatrice Mégie : J’ai une autre question que j’ai déjà posée à Mme Anwar et j’aimerais avoir votre opinion, car il y a longtemps qu’on travaille ensemble là-dessus. Je constate que lorsqu’on nous donne les rapports du comité pour travailler, c’est toujours une pile en anglais et une pile en français. Quand on fait le travail d’étude au comité, c’est souvent compliqué et c’est encore plus compliqué pour les francophones, parce qu’on a tendance à lire le rapport en français, mais quand on sent qu’il y a quelque chose qui accroche en matière de traduction, on se rabat sur la version anglaise. Donc, cela nous fait une double tâche.

On s’est demandé, pour les projets de loi ou d’autres documents, si on pouvait mettre les traductions côte à côte sur deux colonnes. On en a discuté, et il paraît que c’est difficile de le faire logistiquement. Pourtant, dans certains documents, on le fait. C’est plus facile d’aller de l’un à l’autre. Il y a une solution que Mme Anwar nous a proposée pour nous dépanner en attendant : dans les comités, on met maintenant des paragraphes au lieu de mettre des pages, comme ça on arrête de chercher des pages qui ne concordent pas. Je dois vous dire merci, parce que ça fonctionne bien jusqu’ici avec la numérotation sous forme de paragraphes. J’aimerais vous entendre sur la possibilité d’avoir les textes côte à côte un jour, pour que ce soit facile à suivre.

M. Lymburner : Merci pour la question. Pour ce qui touche le format, je suis certain que le Bureau de la traduction est en mesure de produire des documents avec du texte côte à côte. Pour avoir vu comment les documents sont traduits, il y a déjà une façon de regarder pour être certain que chaque paragraphe est bien traduit. Pour la sortie, ce n’est pas toujours le travail des traducteurs. Le traducteur se concentre à respecter l’esprit du texte à traduire; on a aussi des gens qui font de la mise en page — on peut penser aux présentations et aux tableaux dans les présentations. L’une de mes premières constatations en arrivant au Bureau de la traduction, c’est que c’est l’équipe qui permet, à la sortie, d’avoir le document dans le format requis. Ce n’est peut-être pas nécessairement toujours la tâche du traducteur, mais cela peut se faire à l’étape de l’édition, car on a des équipes d’éditeurs qui sont capables de faire de la mise en page. Madame Trépanier ou monsieur Ball?

M. Ball : La plupart de nos langagiers travaillent sur le fond et non sur la forme, donc un traducteur au bureau travaille dans des plateformes où la mise en page n’est même pas vue. Par exemple pour la publication du hansard du Sénat et la publication des délibérations des comités, les traducteurs travaillent avec des colonnes. Cependant, pour ce qui est de la publication, ces choix sont faits par l’Administration du Sénat. Le Bureau de la traduction vous sert, dans le fond, mais pas sur le plan de la forme.

La sénatrice Mégie : Merci.

La sénatrice Clement : Premièrement, aux interprètes, quel travail remarquable vous faites! Vous êtes derrière dans ces cabines, votre travail est essentiel, mais on ne vous voit pas; c’est un peu mystérieux. Quand je rentre ici avec des étudiants pour faire la tournée du Sénat et des salles de comité, ils me demandent souvent ce qui se passe dans ces cabines.

On a du travail à faire pour éclairer les choses, mettre l’accent sur cette profession et engager les jeunes. Je pense qu’il y a quand même un intérêt, mais il s’agit de bien parler de la profession et de bien la présenter. J’aimerais revenir sur les accidents du travail pour mieux comprendre. Pour attirer une relève, il faut s’assurer que les gens sont confortables, sinon c’est un désastre. En situation hybride, il y a plus de dangers. J’aimerais comprendre pourquoi il y a moins de dangers quand on est en présentiel. Ensuite, j’ai une question sur le recrutement à l’international.

M. Lymburner : En ce qui a trait à la santé et la sécurité, monsieur le président, c’est une très bonne question. Cela fera bientôt quatre ans depuis le début de la pandémie; on va tous se rappeler qu’en 2020, nos connaissances sur Teams, Zoom et tous ces outils étaient, somme toute, assez limitées. On a commencé à travailler, pour la plupart des gens, 100 % du temps à la maison — je vous vois avec votre ordinateur ici, on n’avait pas de micro et on faisait des rencontres.

Tout l’environnement sonore était assez chaotique et en 2024, mes collègues l’ont mentionné, la réduction des incidents est attribuée à la maîtrise de la technologie. Ici, je peux garantir que le micro est de qualité, mes collègues ont tous fait des tests de son et on peut même vous dire que les incidents — parce qu’il y en a encore, je l’ai mentionné au début de mon allocution — que l’on perçoit maintenant sont des incidents qui sont, pour la majorité, causés par l’erreur humaine. Je crois qu’on maîtrise beaucoup mieux les outils, même dans nos familles. Maintenant, les gens sont habitués à Zoom et aux rencontres en virtuel; on a tous de petits écouteurs, mais nous, on garantit la qualité sonore.

Au départ, la qualité était si médiocre — c’est une chaîne. C’est une chaîne de son.

Si un témoin est à Vancouver, il y a plusieurs facteurs qui entrent en jeu, dont la bande passante et la qualité des micros. Pour remédier à cela, les interprètes qui sont derrière avaient tendance à augmenter le volume pour être bien certains d’entendre. Donc, il y a une question de volume.

La qualité fait la maîtrise. Lorsqu’on dit « en personne », c’est parce que nous connaissons bien la technologie ici, et nos collègues du Parlement aussi. Il y a beaucoup de rénovation en cours, mais on est déjà à la table pour s’assurer que les besoins techniques seront au rendez-vous, et une bonne visibilité aussi. Les gens vous regardent beaucoup lorsque vous êtes en plein débat.

C’est bien, parce que c’est maîtrisé. Cependant, si quelqu’un apparaît sur un petit coin de l’écran avec un son plutôt mauvais, les interprètes ne vont pas inventer des mots s’ils ne peuvent pas être certains de leur précision.

Donc, j’espère que cela répond à la question, monsieur le président. Il y a encore des erreurs techniques. Vous voyez ici le micro. Les derniers incidents que nous avons vécus étaient causés par une erreur humaine. Les gens parlent et s’approchent trop près du micro ou le laissent tomber.

Je sais qu’il y a des mises en garde qui se font au début des réunions de comité. Honnêtement, d’après tout ce que j’ai lu au sujet des incidents qui se sont produits au cours des deux dernières années, la qualité du son devient de moins en moins un enjeu. Je pense même que pour ce qui est des mises en garde, il faudra peut-être dire aux gens de ne pas lancer leur oreillette ou de faire attention s’ils sont à la maison et s’ils participent à une autre réunion ou allument un appareil radio.

Cela ne veut pas dire que c’est impossible.

La sénatrice Clement : Donc, en personne, on contrôle mieux l’environnement. Étant donné qu’à l’autre endroit il y a encore des réunions hybrides, est-ce qu’il y a davantage d’incidents, comparativement au Sénat?

M. Lymburner : Au sujet des incidents, je vais demander les statistiques à M. Ball, mais je sais qu’il y en a encore chez certains de nos clients. Lors d’une récente réunion du Comité de la régie interne, j’ai parlé des casques d’écoute et j’ai eu l’occasion de préciser le fait que notre intérêt n’est pas vraiment lié au casque, mais plutôt au microphone. Nous avons reçu des recommandations et des règlements à suivre de la part d’Emploi et Développement social Canada pour nous assurer que le micro est de qualité ISO.

Sur les listes auxquelles vous avez accès, on sait que ces microphones sont de qualité. On est aussi en mesure de les envoyer un peu partout dans le monde. Dans certains cas, il arrive qu’on n’ait pas la confirmation, mais on peut maintenant faire des tests 48 heures à l’avance. On fait un test avec un nouveau témoin et à ce moment-là, on est certain que le microphone est de qualité. Cela ne veut pas dire qu’il n’y aura pas d’incidents. Il y a des endroits dans le monde où, à cause des zones de conflit, les bandes passantes et les réseaux cellulaires sont sous tension, et il est possible que le son soit affecté aussi.

M. Ball : Je pourrais simplement ajouter que les enjeux dans les deux Chambres sont les mêmes. Le nombre d’incidents varie selon l’année et selon toutes les circonstances dont M. Lymburner vient de vous parler. Je dirais que les enjeux sont les mêmes : la bande passante, le microphone et l’environnement sonore dans lequel sont les témoins. Je voudrais éviter de faire des comparaisons, car les enjeux sont les mêmes. Quand les parlementaires parlent et travaillent au Parlement, c’est sûr que cela simplifie le travail quand on fournit un son de qualité pour les interprètes, et cela réduit aussi les incidents en principe.

Cependant, il y a eu quand même eu des incidents en personne. C’est quand même une situation qui demeure très complexe.

La sénatrice Clement : On parlait de la relève, du fait que deux universités offrent des programmes et du recrutement à l’international. Est-ce que vous reconnaissez les compétences à l’international des gens qui sont formés ailleurs et qui voudraient peut-être travailler au Canada? Est-ce que c’est un enjeu que vous considérez?

M. Lymburner : C’est une très bonne question. Il y aurait peut-être deux volets à la réponse. J’arrive de la relâche scolaire avec les enfants, et je pense que lorsqu’on est certain d’avoir quelques jours de vacances, on ne travaille pas avec nos ordinateurs et nos outils à l’étranger. Pour ce qui est de la possibilité de travailler à distance, il y a peut-être de l’intérêt international, mais les gens aimeraient peut-être rester à l’extérieur du Canada. Donc, pour nous, c’est un enjeu, parce qu’on a besoin d’avoir les interprètes parmi nous. À ce moment-là, il faut des candidats qui souhaitent venir s’établir au Canada, et cela peut augmenter les délais.

En ce qui concerne les niveaux de certification — et M. Ball a déjà travaillé sur des examens qui sont reconnus mondialement —, les interprètes canadiens doivent respecter certaines normes. On travaille sur les normes afin d’avoir des gens de niveau plus junior et de les développer pour en attirer un peu plus. J’aurais tendance à laisser M. Ball vous parler de l’examen et du niveau de certification.

M. Ball : Si je peux répondre à la question de la sénatrice Clement, effectivement, nous avons parmi notre effectif des diplômés d’universités de l’étranger. Alors oui, on embauche des interprètes qui ont étudié à l’étranger.

La sénatrice Clement : Le nombre va continuer d’augmenter. C’est bien cela?

M. Ball : Le Bureau de la traduction cherche à embaucher des interprètes qualifiés, peu importe leur provenance, et on travaille toujours dans cette optique.

La sénatrice Clement : J’aimerais terminer en disant que je vais promettre aux interprètes de faire une annonce dans les médias sociaux pour parler de cette profession essentielle, parce qu’il faut en parler un peu plus publiquement. Je le dis devant Emma Meldrum de mon bureau, qui est une experte en communications.

Le président : Merci, madame la sénatrice. Vous m’ouvrez bien la porte pour que je dise à mon tour à quel point les services d’interprétation et de traduction sont essentiels. Je voudrais vous lire un passage du rapport de notre comité de juin 2023. Nous avons fait l’observation suivante :

Que ce soit par ses activités de traduction, d’interprétation et de terminologie, votre comité constate le rôle indispensable que joue le Bureau de la traduction envers l’épanouissement des communautés francophones et anglophones du Canada ainsi qu’à la protection de la promotion de nos deux langues officielles. Votre comité encourage le gouvernement fédéral à renforcer le rôle des fonctions de traduction et d’interprétation au sein de l’appareil administratif fédéral, notamment celui du Bureau de la traduction.

On aurait dû écrire que le comité « oblige »... En fait, je pense que pour plusieurs d’entre nous, il y a un constat selon lequel le Bureau de la traduction joue un rôle absolument essentiel. J’ai lu la chronologie de tous les événements depuis 2016 et malgré certaines améliorations, le constat est quand même assez déprimant, à mon point de vue, par rapport au réel engagement du gouvernement fédéral envers le Bureau de la traduction et le service d’interprétation. Après ce commentaire, ma question est la suivante.

D’abord, est-ce qu’il existe une coordination entre le Bureau de la traduction, l’Administration du Sénat, l’Administration de la Chambre des communes et la Bibliothèque du Parlement pour répondre efficacement et adéquatement aux enjeux de traduction et d’interprétation?

J’aimerais vous entendre à ce sujet pour bien comprendre comment fonctionne cette coopération.

Mme Fortin : Effectivement, il y a une coopération en deux volets sur le plan de la traduction. De façon hebdomadaire, les trois organisations se coordonnent pour expliquer quels seront les besoins en matière de traduction pour la semaine à venir. Cela aide tout le monde à avoir une meilleure idée. Si on sait que la Chambre des communes, par exemple, aura un très grand volume, de notre côté, cela peut expliquer certains retards pour des documents moins prioritaires, par exemple.

Pour le volet de l’interprétation, on a mis en place, depuis presque un an, un comité de gouvernance avec des représentants de la Chambre des communes et du Sénat, parce que la Bibliothèque du Parlement n’utilise pas directement les services d’interprétation, pour essayer justement de travailler ensemble à réduire le nombre d’incidents, évidemment, mais aussi pour faire une planification stratégique commune. Nous essayons de travailler ensemble pour non seulement régler des problèmes, mais pour les voir venir et faire en sorte de les éviter.

M. Lymburner : C’est vraiment un comité qui travaille sur l’aspect opérationnel, donc c’est impressionnant de voir que tout le monde peut s’asseoir à la même table. Il y a beaucoup de réunions, des réunions qui sont allongées et des journées qui sont annulées. On est donc en continuel ordonnancement du travail. C’est très rassurant de voir que tout le monde travaille à la même table. Comme on l’a mentionné, il y a aussi une table plus stratégique où l’on discute de certains enjeux dans le but de limiter les incidents. Je peux comprendre que vous fassiez un constat lorsque vous voyez les chiffres.

La question a aussi été posée plus tôt. En 2022, il y avait un incident toutes les 500 heures de réunions de comité; en 2023, il y a un incident toutes les 1 200 heures. Les volumes entre les deux Chambres, au prorata, c’est la même chose. C’est un peu moindre en volume pour le Sénat, mais la tendance et les proportions sont à peu près les mêmes. On voit vraiment une amélioration — d’où l’importance de renforcer les messages. J’ai vu les mêmes choses partout sur les tables; on devrait peut-être même commencer à délaisser la technologie et reparler aux gens. Parfois, je les vois à la télévision : ils sont avec leur oreillette, ils parlent et l’oreillette bouge beaucoup.

Le président : On comprend qu’il y a des problèmes techniques, de ressources humaines et d’équipement. Voici ma question directe : disposez-vous du financement et des ressources dont vous avez besoin pour livrer les services que vous devez livrer pour les parlementaires et les Canadiens?

Je suis encore étonné que des ministères ne fassent pas appel aux services du Bureau de la traduction. Soit je suis mal informé, soit je comprends mal comment cela fonctionne, mais je ne comprends pas que, au Canada, dans un pays qui a deux langues officielles et des langues autochtones, on ait un service aussi spécialisé et que le gouvernement fédéral et les ministères ne fassent pas systématiquement appel à vous. Est-ce une question de qualité, de manque de ressources, de volonté politique ou de manque de vision? J’aimerais vous entendre là-dessus.

M. Lymburner : C’est une très bonne question. Merci, monsieur le président.

Comme je l’ai mentionné dans mon allocution, il y a des ressources techniques et technologiques qui ne sont pas nécessairement liées au Bureau de la traduction, mais qui ont une grande influence sur la qualité de nos services. On travaille avec tous les partenaires, comme le Conseil du Trésor, le Secrétariat du Conseil du Trésor et les autres, pour s’assurer que toutes les plateformes peuvent nous aider dans notre travail.

On ne se met pas la tête dans le sable non plus : l’intelligence artificielle est à nos portes. Cela a un impact majeur pour tous les Canadiens et Canadiennes, mais la contrepartie dont on entend moins parler, c’est que cela génère aussi beaucoup plus de contenu. Donc oui, on est financé...

Je regardais les 10 dernières années. Il y a énormément de production de documents. L’intelligence artificielle nous aide à traduire un peu plus rapidement, mais cela vous aide tous à générer plus de contenu. On court toujours un peu plus après cela. Nos demandes de financement dans le budget visent à rétablir le fait qu’il y a une croissance de volume pour ce qui est des parlementaires. Vous avez certainement entendu toutes les motions qui sortent; ce sont d’immenses motions. Ce sont des vidéos, des textes et des médias sociaux. On parle d’un volume très impressionnant. Vous avez sûrement lu certains articles de journaux tape-à-l’œil qui rapportent que cela va coûter cher, mais quand on regarde le volume de pages qui est généré, il est clair que le seul outil, pour nous, c’est le délai. Avec notre budget, c’est sûr qu’on ne peut peut-être pas toujours respecter des délais très courts. Peut-être que certains de nos clients voudront trouver une façon de faire les choses plus rapidement.

Mme Anwar : Au sujet des ressources, un des problèmes est le volume, mais aussi la rapidité des demandes. Les délais sont plus courts. Pour les réunions de comité, ce n’est pas nécessairement une question de capacité, si on parlait d’une semaine du lundi au vendredi, mais le problème, c’est que tous les comités veulent siéger de mardi matin à jeudi midi et on ne peut pas faire cinq ou six réunions en même temps. On a quand même les ressources : les services d’interprétation nous ont offert des services les lundis et les vendredis, mais on a très peu de réunions ces deux jours-là. Parfois, c’est aussi le problème : on a des ressources du lundi au vendredi, mais peut-être pas autant pour produire le volume et tenir les réunions simultanément avec les séances du Sénat pendant les périodes de pointe.

Le président : Merci.

La sénatrice Moncion : Sur cette dernière question, j’aimerais parler d’efficacité opérationnelle. Je sais que dans le travail qui se fait aussi avec le Comité de la régie interne, on a commencé à réfléchir au besoin de production continuellement écrite. Par exemple, pour un comité comme celui-ci, normalement, on a la transcription de tout ce qui s’est dit dès le lendemain. On pose la question sur l’efficacité et la demande qui est associée à la transcription : est-ce absolument nécessaire? On a déjà commencé à faire cette modification. Est-ce que vous avez eu de la rétroaction là-dessus?

Mme Anwar : Un peu, et cela va nous forcer à changer. C’est aussi une question de gérer les attentes des sénateurs, parce qu’il y a des choses qu’on peut toujours faire, mais peut-être pas du jour au lendemain. Cela va prendre un peu plus de temps. Par exemple, pour les réunions à huis clos sans transcription, on a maintenant un enregistrement audio, mais on est habitué à travailler avec la version écrite de la transcription. Il faut s’habituer à une nouvelle façon de travailler. Il est possible que cela prenne un peu plus de temps. Nous sommes au début du processus, alors il est difficile de dire qu’on a eu de la rétroaction précise jusqu’à maintenant.

La sénatrice Moncion : Pourriez-vous me parler du projet pilote pour l’interprétation autre? Vous avez dit que le projet était presque terminé.

Mme Anwar : C’est quelque chose qu’on avait essayé à quelques reprises avec nos collègues du Bureau de la traduction et nos collègues de la Chambre des communes. Je pense que présentement — je ne suis pas certaine, mais il y a quelques modifications techniques qui doivent se faire dans les pièces elles-mêmes pour accommoder ce genre de traduction. Aussi, je pense que le bassin d’interprètes disponibles pour travailler à distance est beaucoup moins grand. On a une capacité de faire deux réunions par jour et c’est dans les deux Chambres.

Le Sénat et la Chambre ne peuvent pas tenir deux réunions en même temps. Je pense que la Chambre utilise ce service beaucoup plus que nous, principalement parce que, juste depuis l’année dernière, on n’a pas vraiment de problème de capacité pour les activités parlementaires. Ce sont plutôt les activités non parlementaires des réunions organisées par les sénateurs où le service d’interprétation n’est peut-être pas au même niveau qu’avant la pandémie. On n’a vraiment pas eu de problème pour ce qui est de la capacité pour les réunions de comité, ni les caucus, ni les séances du Sénat, donc on n’a pas vraiment eu besoin d’utiliser ce service. Par contre, cela a bien fonctionné quand on a fait des tests avec des caucus qui se sont portés volontaires pour l’utiliser. Il faut faire des tests de son. Si les sénateurs sont à distance, ils doivent utiliser leur équipement. Puisqu’on est en personne, les sénateurs n’utilisent pas aussi souvent leur ordinateur et leur casque. Tout le monde est ici, donc on utilise les services sur place.

La sénatrice Moncion : Cela fait quand même partie de la brochette d’alternatives qui peuvent fonctionner en cas d’urgence, en cas de besoin ou en cas de bris quelconque. Cela fait partie de toutes les solutions que vous avez cherchées au cours des deux dernières années pour améliorer le service et la qualité.

Mme Anwar : Absolument. Je pense que du côté des clients, c’est imperceptible. Il est évident que les cabines seront noires quand il y a des services d’interprétation à distance, mais c’est la même chose : vous portez une oreillette et vous entendez l’interprétation dans votre oreille, comme on le fait présentement.

La sénatrice Moncion : J’ai le privilège de ne jamais avoir besoin d’interprétation.

Le président : J’ai le privilège d’en avoir besoin et je trouve que c’est un grand privilège de pouvoir avoir accès à un service de qualité comme ce qu’on a ici. Je n’applaudirai pas, car je pourrais causer des problèmes avec les micros, mais je crois qu’on peut tous applaudir les interprètes qui sont ici ce soir et tous ceux qui nous aident. Je vous remercie beaucoup d’être venus nous rencontrer. Cela nous permet de mieux comprendre les défis, d’abord, mais aussi les bons coups que vous réalisez.

J’espère que tant le Bureau de la traduction que tous les services que vous nous offrez continueront d’être à la fine pointe, avec la rigueur qu’on vous connaît et qui est utile non seulement pour les parlementaires, mais pour tous les Canadiens et les Canadiennes. Merci beaucoup. Nous allons suspendre la réunion, le temps de recevoir nos prochains témoins. Merci à vous. Au revoir!

[Traduction]

Chers collègues, pour notre troisième groupe de témoins, nous reprenons notre étude sur les services de santé dans la langue de la minorité. Nous avons le plaisir d’accueillir en personne l’honorable John Main, ministre de la Santé du Nunavut — je lui souhaite la bienvenue —, et l’honorable John Streicker, ministre responsable de la Direction des services en français au gouvernement du Yukon. Bienvenue. De même, nous accueillons Mme Jo-Anne Cecchetto, sous-ministre de la Santé et des Services sociaux des Territoires du Nord-Ouest.

Bonsoir à tous. Merci d’être parmi nous. Nous allons maintenant entendre vos remarques préliminaires. Nous commencerons par M. Main. Vous avez la parole.

L’honorable John Main, député, ministre de la Santé, gouvernement du Nunavut : Bonsoir. Je tiens à remercier le Comité permanent des langues officielles de me donner l’occasion de prendre la parole aujourd’hui. La relation du Canada avec le multilinguisme remonte à la naissance du pays, et les modifications proposées à la Loi sur les langues officielles mettent en évidence la façon dont cette relation évolue constamment.

Mon ministère est chargé de fournir des services de soins de santé essentiels aux résidants du Nunavut dans nos 25 collectivités accessibles par avion situées sur un vaste territoire qui représente un cinquième de la masse terrestre du Canada. J’aimerais profiter de l’occasion pour parler des efforts déployés par le Nunavut pour préserver la langue inuite, l’inuktitut, et offrir des services de santé adaptés à sa culture.

À l’instar de nombreux aspects de notre système de santé, notre approche linguistique est unique et adaptée aux besoins des résidants inuits. De nombreux résidants du Nunavut sont unilingues ou préfèrent parler en inuktitut, et notre gouvernement encourage les résidants à utiliser leur langue maternelle lorsqu’ils ont accès à des soins de santé.

Pour ce faire, nous employons des commis-interprètes dans nos établissements de santé dans les 25 collectivités du Nunavut. Nous avons aussi mis en place un service d’interprétation par téléphone qui est accessible en tout temps. De plus, lorsque les résidants du Nunavut quittent le territoire pour des raisons médicales afin d’avoir accès à des soins de santé spécialisés, ils bénéficient de la présence d’un accompagnateur qui peut les aider au niveau linguistique et comme interprète.

L’objectif de tels programmes est de nous assurer que nous pouvons combler tous les écarts linguistiques entre le patient et le prestataire de soins. Nous voulons assurer un niveau de soins constant, quelles que soient les différences de langues parlées entre les deux parties.

Le plus grand défi que nous ayons à relever pour soutenir l’utilisation de l’inuktitut dans les soins de santé est, de loin, la dotation en personnel. Nos équipes incluent des professionnels de la santé du Nunavut qui parlent l’inuktitut, mais, à l’heure actuelle, ils ne représentent qu’une minorité de cette main-d’œuvre essentielle. Pour ce qui est des postes de commis-interprète, il est également difficile de trouver des personnes qualifiées et disponibles pour effectuer ce travail d’interprétation spécialisé. C’est pourquoi notre gouvernement collabore avec le Collège de l’Arctique du Nunavut pour donner plus de vigueur aux programmes de formation en santé du territoire. Le Collège de l’Arctique du Nunavut offre un programme d’interprétation en inuktitut d’une durée de deux ans qui comprend des modules axés sur le vocabulaire de l’anatomie, de la maladie et de la santé mentale. Le ministère de la Santé et le Collège permettent aux membres du personnel de suivre ces cours particuliers sur la santé dans le cadre de leur emploi, et nous étudions la possibilité de rendre ces cours accessibles virtuellement. En rendant cette formation plus accessible, nous espérons faire découvrir à la population la beauté de l’inuktitut en tant que langue et améliorer notre capacité à servir les résidants.

Dans la Loi sur les langues officielles du Nunavut, l’inuktitut, l’inuinnaqtun, le français et l’anglais sont reconnus comme les langues officielles du Nunavut. Cette loi est un élément essentiel de notre stratégie de promotion de l’inuktitut, de l’inuinnaqtun et du français dans tout le territoire. Je constate d’ailleurs de nombreuses similitudes entre l’approche du Nunavut en matière de protection des langues minoritaires et les objectifs de la présente étude. La préservation des langues menacées nécessite des outils juridiques qui obligent le gouvernement à rendre des comptes et qui permettent à ce même gouvernement d’apporter des changements efficaces. À ce titre, nous estimons que l’octroi de pouvoirs accrus au commissaire aux langues officielles fédéral est un pas dans la bonne direction. Le fait d’accorder aux locuteurs de langues minoritaires le droit d’obtenir des services dans leur langue maternelle est un autre changement qui rejoint l’approche du Nunavut. De plus, la promotion du bilinguisme chez les membres dirigeants de la fonction publique favorisera un changement culturel qui, dans le meilleur des cas, aidera les Canadiens à se sentir plus en sécurité en demandant un service dans leur langue maternelle.

J’applaudis les efforts déployés par le gouvernement du Canada pour renforcer la diversité linguistique au pays. Je sais d’expérience à quel point il est difficile — et important — de soutenir l’utilisation des langues comme l’inuktitut pour qu’elles continuent d’être parlées. Dans le contexte des soins de santé, la langue a des effets immédiats : si je ne peux pas communiquer avec mon prestataire de soins de santé, je ne recevrai pas des soins équitables par rapport à ceux qui peuvent le faire. Cette inégalité signifie que les gouvernements doivent intervenir en prenant des mesures pour éviter que ces lacunes linguistiques n’aient un impact sur l’accès aux services. Nous pensons que ces interventions doivent s’inscrire dans le cadre d’une stratégie plus large de promotion de la diversité linguistique.

Je suis reconnaissant de l’occasion qu’il m’est donnée de m’exprimer aujourd’hui et je me réjouis de participer aux discussions avec les membres du comité.

[Mots prononcés en langue autochtone], merci.

Le président : Merci, monsieur le ministre.

Monsieur Streicker, c’est maintenant à vous de faire vos observations préliminaires. La parole est à vous.

[Français]

L’honorable John Streicker, député, ministre responsable de la Direction des services en français, gouvernement du Yukon : Je suis heureux d’être ici avec vous aujourd’hui pour cette importante discussion sur les services de santé dans la langue de la minorité.

Je m’appelle John Streicker et je suis ministre de l’Énergie, des Mines et des Ressources, ministre du Tourisme et de la Culture, ministre responsable de la Société d’énergie du Yukon et ministre responsable de la Direction des services en français du gouvernement du Yukon.

Ma collègue Tracy McPhee, ministre de la Santé et des Affaires sociales, m’a demandé de la représenter ici aujourd’hui.

Je tiens tout d’abord à préciser que je travaille sur le territoire ancestral de la Première Nation des Kwanlin Dün et du Conseil des Ta’an Kwäch’än.

Honorables sénateurs, bon nombre des questions abordées dans le cadre de la discussion d’aujourd’hui illustrent bien la réalité de la communauté francophone du Yukon et les défis que nous devons relever pour offrir des services en français.

Nous avons consulté la communauté francophone pour guider l’élaboration du nouveau Cadre stratégique sur les services en français, que nous avons publié en novembre 2023.

Ce cadre orientera notre travail en vue de répondre au mieux aux besoins changeants de la communauté francophone grandissante du Yukon de 2023 à 2025. Il s’articule autour de quatre priorités : miser sur la technologie; veiller à la sécurité de la population; recruter et soutenir du personnel bilingue; promouvoir une communauté francophone dynamique.

De nombreux travaux prometteurs sont déjà en cours. Nous avons aussi célébré le premier anniversaire du centre de santé Constellation Health Centre en novembre dernier. Ce centre est une réussite remarquable qui découle de notre engagement à améliorer l’accès aux services gouvernementaux en français et en anglais.

Il offre de nombreux services de santé primaires et de bien-être en français et en anglais, comme des soins externes, de l’aiguillage vers des spécialistes, des tests diagnostiques, des produits pharmaceutiques, des visites virtuelles, des examens de routine, la gestion des maladies chroniques, de l’éducation en santé, des consultations en travail social et un accès rapide à des conseils en santé mentale.

La fonction publique yukonnaise compte 73 postes désignés bilingues par opposition à 58 au printemps dernier, en plus des postes à la Direction des services en français. Cette augmentation se constate principalement au ministère de la Santé et des Affaires sociales, qui compte maintenant 32 postes désignés bilingues. Lorsqu’il n’y a pas d’employés bilingues sur place, nous recourons à des services d’interprétation pour aider le personnel à communiquer avec la clientèle et les patients et à leur fournir le meilleur service possible.

Nous disposons d’une douzaine d’outils d’interprétation vidéo qui sont intégrés au système de santé, y compris dans tous les hôpitaux du Yukon. Le personnel peut également communiquer par téléphone avec un interprète professionnel en quelques secondes, 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. L’équipe des Services médicaux d’urgence, qui fournit un large éventail de soins préhospitaliers, peut aussi accéder aux services d’interprétation vidéo dans les ambulances.

Nous n’aurions pas pu accomplir autant de choses ces dernières années sans notre collaboration avec le gouvernement du Canada. Merci beaucoup.

Je me réjouis que la nouvelle Loi sur les langues officielles reconnaisse l’importance de la coopération entre nos gouvernements et la diversité des régimes linguistiques provinciaux et territoriaux. Même si les régimes linguistiques du Canada et du Yukon sont différents, nous souhaitons tous que nos investissements favorisent l’épanouissement de la communauté francophone yukonnaise.

Miser sur une approche concertée entre les ministères fédéraux et territoriaux pourrait augmenter nos chances de réussite. Il est essentiel que nos ententes reposent non seulement sur la Loi sur les langues officielles, mais aussi sur la Loi sur les langues du Yukon et les orientations définies par notre gouvernement pour la prestation des services et les communications en français.

Je me réjouis à l’idée de continuer à travailler avec nos partenaires fédéraux, les parties intéressées et toute la population du Yukon pour contribuer à la croissance de la communauté francophone du Yukon pour les générations à venir. Merci.

Le président : Merci, monsieur le ministre, pour votre présentation.

[Traduction]

Enfin, nous entendrons les observations préliminaires de Mme Cecchetto. La parole est à vous.

Jo-Anne Cecchetto, sous-ministre, ministère de la Santé et des Services sociaux, gouvernement des Territoires du Nord-Ouest) : Bonjour. J’aimerais remercier le comité de m’avoir donné l’occasion de contribuer à son étude sur les services de santé dans la langue de la minorité. Je vous appelle depuis Yellowknife, la capitale des Territoires du Nord-Ouest et la terre ancestrale de la Première Nation des Dénés Yellowknives et des Métis du Slave Nord.

Je commencerai par vous présenter notre territoire et sa structure du point de vue des services de santé et des services sociaux. Nous formons un système intégré de santé et de services sociaux, avec un ministère et trois administrations des services de santé et des services sociaux. Environ 44 000 personnes vivent dans 33 collectivités réparties sur plus d’un million de kilomètres carrés. Les peuples autochtones représentent environ 50 % de la population totale des Territoires du Nord-Ouest, notamment les Dénés, les Inuvialuits et les Métis.

La Loi sur les langues officielles des TNO est le fondement législatif de la reconnaissance des 11 langues officielles des Territoires du Nord-Ouest, qui incluent l’anglais, le français et neuf langues autochtones. La loi engage le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, ou GTNO, à fournir des services territoriaux dans toutes nos langues officielles, ce qui présente des défis uniques pour que les locuteurs des dix langues minoritaires soient en mesure d’accéder aux services en temps réel.

J’aimerais vous faire part de certaines des mesures importantes que notre système de santé et de services sociaux a prises pour offrir des services et de l’information au public conformément à la Loi sur les langues officielles des Territoires du Nord-Ouest. Notre système de santé et de services sociaux compte 9,5 postes bilingues pour francophones dans les collectivités où la demande en français est importante, notamment Yellowknife, Hay River, Inuvik et Fort Smith. De ce nombre, nous avons cinq coordonnateurs de services en français qui sont disponibles pour fournir de l’information, offrir des services de navigation dans le système, faciliter la prise de rendez-vous et fournir des services de facilitation linguistique ou d’interprétation pendant les rendez-vous.

En plus des postes bilingues pour francophones, il y a 33 employés du système de santé et de services sociaux qui reçoivent une prime au bilinguisme pour les services en français. En outre, 37 reçoivent une prime au bilinguisme pour les langues autochtones. Ces employés ont la capacité de parler une langue officielle en plus de l’anglais et ils peuvent à l’occasion fournir des services au public dans une autre langue officielle.

Notre administration a récemment mis en place un outil de centralisation des données pour suivre le nombre d’employés bilingues dans son système dans le but de faciliter la planification appropriée des services et des effectifs. Nous offrons une formation régulière pour veiller à ce que le personnel soit conscient de ses responsabilités en matière d’offre active et de services en français au public. Nous avons établi un partenariat avec le Collège Nordique pour offrir des cours de compétence et de maintien des connaissances en français au personnel de l’ensemble du système, y compris la terminologie médicale.

Notre système utilise un service électronique de traduction technique ou d’interprétation appelé CanTalk, qui se spécialise dans les langues immédiatement disponibles. Actuellement, ces langues sont le chipewyan, le cri, le tlicho, l’inuinnaqtun, l’inuktitut, l’esclave du nord, l’esclave du sud et le français, ainsi que 200 autres langues, dont des langues africaines, asiatiques, moyen-orientales et européennes, qui sont également parlées sur l’ensemble de notre territoire.

Basé à l’Hôpital territorial Stanton, le Programme de mieux-être autochtone est conçu pour améliorer l’expérience des patients autochtones en améliorant la communication et la collaboration avec les professionnels de la santé. En outre, quatre défenseurs principaux des patients autochtones peuvent aider les usagers à s’orienter dans le système et à trouver des liens vers des services de soutien culturel, y compris les services linguistiques. Notre hôpital territorial dispose de services d’interprétation dans sept langues officielles.

En tant que sous-ministre de la Santé et des Services sociaux et en tant qu’infirmière praticienne, je suis consciente des difficultés rencontrées par nos minorités linguistiques et je comprends l’importance des langues pour la qualité des soins. L’amélioration de notre offre linguistique ne peut qu’améliorer les soins reçus par nos patients.

Nous sommes tous d’accord pour dire que, quand ils interagissent avec le système de santé, les patients sont dans une situation de grande vulnérabilité. Cette vulnérabilité est d’autant plus grande pour nos patients francophones et autochtones qu’ils se heurtent souvent à des obstacles qui les empêchent d’accéder aux soins dans leur propre langue officielle. Je reconnais que, malgré les nombreuses initiatives mises en œuvre pour améliorer l’accès aux services de santé dans une langue minoritaire, l’accès aux services dans la langue souhaitée reste un obstacle pour un grand nombre de nos patients.

La pénurie nationale de main-d’œuvre dans le secteur de la santé nuit considérablement à la capacité du système de santé d’attirer et de retenir des professionnels de la santé bilingues. Notre administration continue de travailler et d’établir des partenariats avec des organisations communautaires afin de trouver des moyens novateurs de réduire ces obstacles dans les limites des capacités de notre système actuel.

J’espère que cela vous donnera une idée des services que nous avons mis en place. J’ai hâte de participer à la discussion d’aujourd’hui.

Merci.

Le président : Merci beaucoup. J’invite maintenant les membres à poser leurs questions.

[Français]

La sénatrice Mégie : Merci d’être avec nous. Je vous ai tous entendus et je me suis rendu compte que vous aviez un défi majeur : vous prenez tous beaucoup d’initiatives pour les soins de santé de vos communautés. Cependant, je me pose une question : sur le plan de la communication, dans une langue ou une autre — l’anglais, le français ou une langue autochtone —, comment pourrait fonctionner ou comment fonctionne la ligne téléphonique 911? En situation d’urgence, la première langue que vous parlez est primordiale. Comment est-ce que cela fonctionne? Avez-vous de la rétroaction de votre population à ce sujet?

Vous pouvez tous les trois répondre l’un après l’autre. J’aimerais savoir chez vous, pour chacun de vous, comment fonctionne le 911.

[Traduction]

M. Main : Voilà une très bonne question.

En ce qui concerne la disponibilité des services de santé d’urgence, comme je l’ai mentionné dans mes observations préliminaires, le Nunavut compte 25 collectivités. En ce qui concerne la disponibilité de certains services que vous tenez sans doute pour acquis dans certaines régions du Sud du Canada, comme les ambulances, il faut savoir que nous n’avons pas de services d’ambulance dans toutes les collectivités. Ces services sont limités aux plus grandes agglomérations du Nunavut; deux ou trois, je crois, disposent de ce que l’on pourrait considérer comme un service d’ambulance. Cependant, elles disposent toutes de numéros de téléphone que l’on peut appeler après les heures normales de travail pour joindre un professionnel de la santé.

Lorsqu’il y a des barrières linguistiques dans ces conversations téléphoniques, nous comptons beaucoup sur les membres de la famille pour interpréter, ce qui, nous le reconnaissons, n’est pas idéal. Dans la mesure du possible, nous faisons appel à des employés bilingues pour assurer la couverture téléphonique en dehors des heures de bureau. Dans le contexte du Nunavut, le bilinguisme signifie parler l’anglais et l’inuktitut, le cas échéant.

En bref, c’est ainsi que nous traitons la question. Nous reconnaissons qu’il y a un manque. Il y a des obstacles linguistiques. Les commis-interprètes que j’ai mentionnés dans mon discours préliminaire travaillent normalement de jour, mais nous avons la possibilité, dans nos établissements de santé, de les appeler pour qu’ils interprètent sur demande en dehors des heures normales de travail, afin de combler cette lacune dans les situations d’urgence.

M. Streicker : Il faudrait que je vérifie si on offre le 911 en français. Je sais qu’au cours des dernières années, en raison des situations d’urgence qui sont survenues au Yukon, en particulier les incendies et les inondations, nous nous sommes efforcés d’améliorer notre capacité à communiquer et à répondre en français. Je sais qu’au Yukon, il y a différents niveaux de services 911. Vous devriez probablement vérifier auprès de nous aussi, car le service 911 est offert dans tous les territoires, mais pas partout. Certaines régions du Yukon, par exemple, n’ont pas de couverture cellulaire et, par conséquent, n’ont pas de service 911.

Les services 911 de prochaine génération, ou 911PG, seront bientôt mis en place. Grâce à ce système, les gens pourront envoyer des textos. Il sera ainsi plus facile d’accéder au 911, notamment pour les personnes sourdes, et de communiquer.

Il faudrait que je vérifie, sénatrice Mégie, si on a du personnel bilingue pour répondre aux appels 911. Les gens appellent lorsqu’ils ont besoin d’une ambulance, de pompiers ou de la police, et nous sommes en mesure de les localiser, mais s’ils donnent des détails, cela risque d’être plus difficile. Nous essayons toujours de communiquer avec les gens dans leur langue.

Chose certaine, le service 911 n’est pas offert dans les langues autochtones ici. Il s’agit d’un service plus spécialisé que nous aurons dans certaines régions, mais pas pour le 911.

Mme Cecchetto : Je vais répéter certains commentaires formulés par mes collègues de l’Est et de l’Ouest du Canada.

Dans les Territoires du Nord-Ouest, dans les plus petites communautés où il n’y a pas de médecins, par exemple, nous avons ce que nous appelons des centres de santé communautaires. Il existe un processus semblable où les gens peuvent appeler directement au centre de santé. Évidemment, comme vous pouvez vous en douter, on ne peut pas répondre aux appels dans les 11 langues officielles.

Ce que je peux vous dire, c’est que le service 911 est maintenant offert sur l’ensemble de notre territoire. Il est en fait géré par un autre ministère territorial, soit le ministère des Affaires municipales et communautaires. Les opérateurs au 911 sont tenus de maîtriser l’anglais et le français, et il existe un mécanisme permettant, par exemple, à un résidant unilingue francophone d’appeler le 911 et d’être mis en contact avec le service de garde, après les heures normales de travail, dans 28 de nos 33 communautés. Par exemple, dans une petite communauté où il y a une infirmière de garde, on peut également offrir un service d’interprétation.

Là où je veux en venir, c’est que nous avons deux points d’entrée différents pour les urgences, mais les personnes qui reçoivent les appels 911 sont bilingues.

[Français]

La sénatrice Mégie : Merci.

[Traduction]

La sénatrice Poirier : Je vous remercie tous les trois d’être ici aujourd’hui. J’ai quelques questions à vous poser.

Quel mécanisme utilisez-vous actuellement pour verser les fonds au titre du Transfert canadien en matière de santé aux minorités francophones de vos provinces ou territoires, et comment veillez-vous à ce que les minorités francophones aient accès à des soins de santé dans leur langue?

M. Main : Je vous remercie de votre question. Au Nunavut, des services seront offerts en français s’il y a une demande importante. Actuellement, cette demande n’existe que dans une seule communauté, Iqaluit, qui est aussi la plus grande du territoire. À Iqaluit, nous avons des interprètes à l’hôpital. Nous travaillons également à élargir ces services afin d’établir un lien avec les patients et de communiquer avec eux en français. C’est ce qui nous pousse à vouloir offrir ces services en français.

Grâce au service CanTalk, nous avons la possibilité, tout comme nos voisins des Territoires du Nord-Ouest, de fournir des services d’interprétation par téléphone au besoin. Ce service est offert à l’échelle du territoire, mais pour l’instant, la demande est importante dans une seule communauté. Partout ailleurs au Nunavut, le défi principal consiste à fournir davantage de services en inuktitut, ce que nous nous sommes engagés à faire.

Mat’na, merci.

[Français]

M. Streicker : Merci pour la question.

[Traduction]

Il y a plusieurs façons de répondre à cette question, mais je tiens également à dire que ce n’est pas quelque chose qui est défini.

Tout d’abord, en ce qui concerne nos priorités en matière de soins de santé, sachez que nous avons plusieurs moyens de communiquer avec la communauté francophone. Il y a notamment un groupe ou un organisme à but non lucratif qui s’occupe précisément des soins de santé et de la manière dont nous pouvons répondre aux besoins de la communauté francophone dans l’ensemble du territoire.

J’ai parlé d’un centre de santé bilingue. C’est d’ailleurs la communauté francophone qui nous a demandé de mettre sur pied une clinique sans rendez-vous. C’est également dans le cadre de l’initiative Vieillir chez soi du gouvernement que nous l’avons créée.

Au sein de mon ministère, la Direction des services en français, nous consultons toujours la communauté francophone pour connaître ses besoins. C’est pourquoi nous avons besoin de souplesse. Le financement vient du gouvernement du Canada — et nous en sommes très heureux —, mais il faut qu’il y ait une certaine collaboration entre notre ministère de la Santé et des Services sociaux et notre communauté francophone afin de déterminer comment investir ces fonds de manière stratégique. Nous consacrons notamment des fonds à des études sur ce sujet précis, et cette réponse s’applique à la question précédente.

Nous avons mis en place un système qui offre non seulement l’interprétation en français mais aussi dans d’autres langues au moyen d’un iPad. Comme l’a fait remarquer Mme Cecchetto, la population du Nord est de plus en plus diversifiée. Ce n’était pas le cas auparavant, mais la population est aujourd’hui très diversifiée.

Ce que nous avons constaté, lorsque nous avons utilisé cet appareil pour traduire les échanges, par exemple à l’hôpital, c’est que nos propres prestataires de soins de santé avaient une certaine connaissance du français, mais ils n’osaient pas le dire ni même l’utiliser, parce qu’ils étaient soucieux d’offrir les meilleurs soins de santé possible à leurs patients. Or, grâce à cet appareil, ils se sont sentis beaucoup plus à l’aise de parler français. Ce n’est donc pas seulement le fait d’avoir l’interprétation simultanée au moyen du iPad; nos prestataires de soins de santé ont aussi davantage parlé en français. Cela a été très révélateur.

Je pense que la manière dont les fonds sont affectés ou dont les priorités sont établies n’est pas encore définie étant donné la nouvelle Loi sur les langues officielles, mais nous aimerions disposer de la plus grande souplesse possible pour travailler avec vous.

Mme Cecchetto : Je vous remercie de votre question. Dans les Territoires du Nord-Ouest, comme je l’ai dit, et comme M. Main l’a également mentionné, nous utilisons CanTalk. Il y a une grande demande dans cinq de nos communautés. Nous avons conclu des accords et un accord de contribution avec nos trois autorités de santé et de services sociaux, qui desservent ces cinq communautés.

Il est important que je souligne la relation que le ministère de la Santé et des Services sociaux entretient avec deux organismes clés de notre territoire. Il s’agit de la Fédération franco-ténoise et du Réseau TNO Santé. Ces organismes sans but lucratif se réunissent régulièrement. La ministre, Mme Semmler, et moi-même avons justement rencontré les représentants la semaine dernière. Nous cherchons constamment à améliorer la façon dont nous communiquons avec nos citoyens et à veiller, dans la mesure du possible, à ce qu’ils aient accès aux services dont ils ont besoin dans la langue de leur choix.

L’une des choses qu’ils ont remarquées, c’est que notre matériel audiovisuel, qu’on parle d’affiches, de médias sociaux ou de radio, par exemple, était très bien fait. Toutefois, notre plus grande difficulté, et de loin, réside dans les services en personne, en face à face. C’est donc un domaine sur lequel nous devons travailler, et c’est la raison pour laquelle nous utilisons CanTalk.

Pour répondre à votre question sur le transfert de fonds fédéraux, ces fonds sont utilisés directement par nos administrations des services de santé et des services sociaux pour le personnel de première ligne qui fournit ces services à nos clients. Ces fonds servent à financer la formation et le matériel, afin que nos clients sachent, dans la langue de leur choix, ce qui est à leur disposition et comment ils peuvent accéder à nos services dans les Territoires du Nord-Ouest.

J’espère que cela a été utile

La sénatrice Poirier : Selon vous, à part vous donner plus d’argent, qu’est-ce que pourrait faire le gouvernement fédéral pour vous aider dans les Territoires du Nord-Ouest, au Yukon et au Nunavut?

Mme Cecchetto : Je m’en voudrais de ne pas dire que le recrutement et le maintien en poste sont un gros problème. L’argent a ses limites; il faut trouver les ressources nécessaires. Nous ne demandons pas mieux que d’avoir davantage de personnel bilingue dans les Territoires du Nord-Ouest. Je ne parlerai pas au nom de mes collègues des autres territoires, mais tout ce que vous pouvez faire pour promouvoir les possibilités qui existent dans les Territoires du Nord-Ouest, que ce soit pour dire aux gens qu’ils peuvent parler leur langue et travailler dans leur langue ici — et dans les deux autres territoires, d’ailleurs —, serait vraiment utile.

La sénatrice Poirier : C’est un problème que nous avons partout au pays. C’est donc difficile. Tout le monde demande la même chose.

M. Streicker : Je suis d’accord avec Mme Cecchetto pour dire que les problèmes de ressources humaines et de main-d’œuvre sont des problèmes très difficiles avec lesquels nous devons composer. Notre premier ministre a convenu avec d’autres premiers ministres qu’il ne fallait pas essayer d’aller chercher des ressources dans d’autres régions du pays. Nous avons cherché des solutions à l’étranger. Si nous regardons en amont, par exemple, si nous pouvions former des personnes issues des communautés, qui ont déjà des liens avec elles et qui sont déjà logées ici, ce serait bien. Il s’agit toutefois de solutions à long terme.

Au cours des deux prochaines années, nous allons mener des études sur la technologie et voir comment nous pouvons en tirer parti pour offrir de meilleurs services de santé en français et dans d’autres langues. Cela nous donnera une idée des domaines dans lesquels nous devons investir. Nous allons examiner la question plus en profondeur pour essayer d’établir les priorités en matière de financement. Évidemment, nous avons toujours besoin de plus de financement. Merci.

M. Main : Plus d’argent, c’est toujours utile; cela fait partie de la solution. Plus tôt aujourd’hui, j’ai eu une réunion avec mon homologue fédéral concernant justement l’argent et la nécessité d’en avoir davantage.

Au-delà de l’aspect financier, pour nous, au Nunavut, si nous voulons offrir plus de services de santé en inuktitut, nous devons former un plus grand nombre d’Inuits dans le secteur de la santé. Nous travaillons fort dans ce sens, mais pour ce qui est du nombre de professionnels de la santé dont nous avons besoin, nous sommes encore loin de notre objectif.

Lors d’une rencontre fédérale-provinciale-territoriale, j’ai parlé de la nécessité de mettre en place une stratégie nationale visant à former davantage de professionnels de la santé inuits, métis et des Premières Nations. Je dis cela en tant qu’homme de race blanche. Je ne veux pas parler au nom des Inuits du Nunavut. Cependant, du point de vue du ministère de la Santé, nous avons besoin de ces professionnels de la santé qui parlent l’inuktitut, et nous pensons qu’une stratégie nationale pourrait contribuer à faire avancer les choses à l’échelle du pays, y compris au Nunavut. Merci.

La sénatrice Moncion : Pour revenir à ce que vous disiez au sujet de l’adoption d’une stratégie nationale, je tiens à dire que dans le Nord de l’Ontario, à l’école de médecine de l’Université Lakehead à Thunder Bay, il y a des places réservées aux étudiants en médecine issus des communautés autochtones. Je sais que c’est en Ontario, mais c’est l’une des stratégies qui ont été mises en place. Ces places ne peuvent pas être prises par d’autres étudiants; elles s’adressent aux étudiants autochtones, ce que je trouve important. Cela fait peut-être 10 ans que cette stratégie est en place dans cette province, et c’est une stratégie parmi d’autres.

Je tiens à vous féliciter pour la brillante solution que vous avez mise en œuvre pour aider vos communautés. Vous parliez des communautés qui ne sont accessibles que par voie aérienne. Je pense que c’est extrêmement important de pouvoir servir les communautés isolées. C’est la même chose pour les trois territoires. Je pense que vous avez des solutions adaptées à la réalité de votre population. Elles ne sont peut-être pas optimales, mais je les trouve ingénieuses.

Les personnes qui utilisent CanTalk et qui peuvent ainsi être comprises et recevoir des services sont-elles satisfaites? Je pense que c’est important, car lorsqu’il y a 11 langues différentes, comme c’est le cas dans les territoires du Nord, et encore une fois, à cause des communautés autochtones, est-ce réellement efficace et dans quelle mesure les patients sont-ils satisfaits?

Le président : Je tiens à rappeler à nos témoins que le temps file. Nous voulons vous donner suffisamment de temps pour répondre, bien sûr, mais si vous pouviez être concis dans vos réponses, nous vous en saurions très reconnaissants. Monsieur Streicker, je pense que vous étiez prêt à prendre la parole.

M. Streicker : Bien sûr, je vais tenter d’être plus bref, monsieur le président.

La première chose que je dirai, c’est que nous avons connu un certain succès, notamment avec notre centre de santé bilingue. C’est une grande réussite, mais il reste toutefois encore beaucoup de chemin à faire, et lorsqu’il s’agit de nos langues autochtones, je m’inquiète de leur capacité à résister aux répercussions du colonialisme. C’est pourquoi je m’efforce de considérer le français comme un allié des langues minoritaires, mais la situation est très difficile pour les petites communautés ou les enclaves linguistiques. Dans l’Est de l’Arctique, je pense que la situation est différente parce qu’il n’y a qu’une seule langue. Ici, il y a plusieurs langues, et certaines d’entre elles se trouvent dans de très petites enclaves.

Mais nous nous engageons à essayer de soutenir toutes ces langues. En ce qui concerne le français, j’estime que la situation s’est améliorée.

[Français]

Ici au Yukon — après le Québec et le Nouveau-Brunswick —, le français vient en troisième pour ce qui est du pourcentage.

[Traduction]

Il existe une importante communauté francophone ici, et je pense que nous avons réalisé des progrès. Je ne dirais jamais que les services de santé sont aussi bons en français qu’ils le sont en anglais, mais notre objectif est que ce soit équivalent, c’est-à-dire que notre formidable système de santé fonctionne aussi bien dans une langue comme dans l’autre.

Nous avançons dans la bonne direction, mais il reste encore beaucoup à faire.

Mme Cecchetto : Je pense qu’en ce qui concerne CanTalk — je ne peux parler qu’en tant que praticienne —, lorsque j’ai dû utiliser CanTalk avec un client, c’est parce qu’il n’y avait pas d’autre option. Je suis heureuse qu’un tel service soit offert et je crois que les clients le sont aussi. Je peux dire honnêtement qu’avec CanTalk, il y a toujours un interprète francophone disponible, mais ce n’est pas le cas pour nos neuf langues officielles autres que l’anglais et le français.

Personnellement, je n’ai pas entendu ou reçu de plaintes, mais du point de vue de l’évaluation, je devrai vous revenir là-dessus. Toutefois, dans l’ensemble, je pense que lorsqu’il n’y a pas d’autre option, nous sommes reconnaissants de pouvoir utiliser CanTalk. Autrement, les personnes qui veulent recevoir des soins dans une autre langue se heurtent à un énorme obstacle.

M. Main : À l’instar de nos collègues des Territoires du Nord-Ouest, le service CanTalk fonctionne généralement bien pour ce qui est des rendez-vous et des urgences, mais il y a eu quelques difficultés concernant les interprètes ou la disponibilité du service en inuktitut et en inuinnaqtun. Il peut donc y avoir des problèmes, et je crois comprendre qu’ils concernent la disponibilité des interprètes qui peuvent offrir le service.

La sénatrice Moncion : Lorsque les patients voyagent en avion, je suppose qu’il faut un interprète, étant donné que les médecins ne parlent pas nécessairement l’inuktitut.

M. Main : C’est exact, et c’est la raison pour laquelle nous avons des interprètes qui travaillent à temps plein dans chacun des centres de santé du Nunavut. Les professionnels de la santé se déplacent en fonction des besoins, mais notre personnel en poste dans chaque communauté est là en permanence. Merci.

La sénatrice Clement : Je remercie tous les témoins. J’étais à Yellowknife la semaine dernière et je pense que le plus grand atout du Nord, ce sont ses habitants. Si vous vous rendez là-bas, vous allez tomber en amour avec ce coin de pays et constater la différence entre le Nord et le Sud.

Je voudrais juste revenir sur un point soulevé par M. Streicker. Lorsque nous étions à Dettah la semaine dernière, nous avons entendu dire que l’extinction d’une langue est en fait un obstacle à la santé. Cela crée toutes sortes de problèmes de santé mentale, et il s’agit donc d’un grave problème. Je voudrais interroger Mme Cecchetto au sujet des partenariats. Vous avez mentionné le Collège Nordique et d’autres partenaires, et je me demande si vous pourriez parler — et je vais parler d’argent ici — des modèles de financement. Lorsque nous avons rencontré les partenaires dont vous avez parlé, ils nous ont dit qu’ils cherchaient des sources de financement pour leurs projets. Eux-mêmes n’ont pas de financement stable. Vous comptez donc sur des partenaires qui sont eux-mêmes aux prises avec des difficultés. Selon vous, comment le gouvernement fédéral pourrait-il aider ces partenaires qui sont essentiels pour fournir du soutien et des services aux minorités linguistiques?

Mme Cecchetto : Je vous remercie. Tout d’abord, je suis heureuse que vous soyez venue à Yellowknife et que vous ayez eu l’occasion de visiter cette magnifique ville et ce magnifique territoire.

Je dirais que la même réponse s’applique à la pérennité des services de santé, et probablement à tout autre type de service que vous essayez de fournir dans une petite région éloignée. Ces organismes à but non lucratif comptent beaucoup sur le financement d’une autre entité, comme nous dépendons fortement du financement du gouvernement du Canada. La meilleure réponse que je pourrais vous donner est qu’il faut un financement stable et à long terme. Lorsque nous avons rencontré ces deux organismes la semaine dernière, ils nous ont parlé d’une initiative pour laquelle nous leur fournissons un financement annuel. Nous leur fournissons un financement annuel parce que c’est ce que nous recevons également, et nous aimerions pouvoir leur accorder un financement stable et à long terme, que ce soit pour trois, cinq ou dix ans. Je vous laisse imaginer à quel point il peut être difficile d’essayer de maintenir une organisation — petite ou grande — lorsqu’on ignore si on obtiendra du financement l’année prochaine. Il est donc très difficile de planifier et même d’assurer la relève.

Bref, un financement stable et pluriannuel serait l’idéal.

La sénatrice Clement : J’aimerais poser une question à M. Main. Si je ne me trompe pas, vous avez quatre langues officielles, n’est-ce pas? C’est remarquable. Qu’est-ce que le reste du Canada peut apprendre sur la coexistence de ces langues officielles et sur la façon de gérer les tensions qui pourrait en découler? Premièrement, y a-t-il des tensions entourant ces langues?

M. Main : C’est une très bonne question. Je ne suis pas Inuit. Mes parents ont déménagé au Nunavut, qui faisait partie à l’époque des Territoires du Nord-Ouest, lorsque j’étais bébé. Je pense qu’il est important pour les personnes qui ne sont pas autochtones, comme moi, de comprendre les avantages qu’il y a à soutenir l’utilisation des langues autochtones dans la prestation des soins de santé, et de se mettre à la place d’un enfant dont la première langue est l’inuktitut, qui grandit en voyant des professionnels de la santé parler une autre langue.

C’est une question difficile, mais il est vraiment important que les Canadiens non autochtones comprennent les besoins criants en matière de soins de santé qui existent depuis longtemps, en particulier pour les Inuits du Nunavut, et qu’ils s’engagent à améliorer la situation. Dans le contexte du Nunavut, pour améliorer notre système de santé, il faut plus de professionnels de la santé, plus de services et plus de soutien en matière de santé mentale dans la langue de la population. Pour nous, c’est l’inuktitut. Nous avons encore beaucoup de chemin à parcourir pour améliorer la situation au Nunavut, mais nous nous engageons pleinement, par l’éducation, la formation, les services et l’innovation technologique dans une certaine mesure, à combler cet écart parce que nous savons que cela va améliorer les services de santé.

Le président : Je vous remercie. Je n’aime pas devoir vous interrompre, mais en raison de l’heure, nous devons nous arrêter ici. Je vous remercie tous les trois pour votre grande contribution au comité. Nous avons certainement beaucoup appris ce soir, et je pense que cela nous aidera dans le cadre de notre étude. Je vous remercie infiniment.

[Français]

Merci beaucoup, chers collègues, de votre présence ce soir. Cela met fin à notre réunion.

(La séance est levée.)

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