LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES PÊCHES ET DES OCÉANS
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le mardi 1er mars 2022
Le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans se réunit aujourd’hui, avec vidéoconférence, à 9 heures (HE), pour étudier la mise en œuvre des pêches fondées sur les droits autochtones au Canada.
Le sénateur Fabian Manning (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Honorables sénateurs, bonjour. Je m’appelle Fabian Manning. Je suis un sénateur de Terre-Neuve-et-Labrador, et j’ai l’honneur de présider cette réunion. Nous tenons aujourd’hui une séance hybride du Comité sénatorial permanent des pêches et des océans.
Je rappelle aux sénateurs et aux témoins qu’ils doivent garder leur micro désactivé en tout temps, sauf si la présidence leur accorde la parole. En cas de problèmes techniques, surtout en ce qui a trait à l’interprétation, veuillez en aviser le président ou le greffier, et nous tâcherons de régler le problème. Si vous éprouvez d’autres difficultés techniques, veuillez communiquer avec le centre de services de la DSI en utilisant le numéro d’assistance technique qui vous a été fourni.
Enfin, je rappelle à tous les participants qu’il est interdit de copier, d’enregistrer ou de photographier les écrans Zoom. Vous pouvez utiliser et diffuser les délibérations officielles, qui sont disponibles à ces fins sur le site SenVu.
J’aimerais prendre quelques instants pour présenter les membres du comité qui participent à la réunion d’aujourd’hui. J’ai l’habitude de leur demander de se présenter eux-mêmes, mais étant donné les contraintes de temps auxquelles nous sommes soumis, nous procéderons ainsi. J’espère que je n’oublierai personne. Aujourd’hui, nous avons avec nous la vice-présidente du comité, la sénatrice Busson, de la Colombie-Britannique; la sénatrice Ataullahjan, de l’Ontario; le sénateur Campbell, de la Colombie-Britannique; le sénateur Christmas, de la Nouvelle-Écosse; la sénatrice Cordy, de la Nouvelle-Écosse; le sénateur Cormier, du Nouveau-Brunswick; le sénateur Francis, de l’Île-du-Prince-Édouard; le sénateur Kutcher, de la Nouvelle-Écosse; le sénateur Quinn, du Nouveau-Brunswick; et le sénateur Ravalia, de Terre-Neuve-et-Labrador. La sénatrice McCallum vient également de se joindre à nous.
Aujourd’hui, nous recevons des fonctionnaires de Pêches et Océans Canada dans le cadre de notre étude sur les pêches fondées sur les droits autochtones. Nous sommes ravis d’accueillir Jean-Guy Forgeron, sous-ministre adjoint principal, Gestion des pêches et des ports, ainsi que Doug Wentzell, directeur général régional, Région des Maritimes, et Gorazd Ruseski, directeur général, Affaires autochtones.
Au nom des membres du comité, je vous remercie d’être là aujourd’hui. Je crois comprendre que vous avez des observations préliminaires à faire. Après votre exposé, les membres du comité auront des questions à vous poser.
À titre d’information, chers collègues, nous essaierons de terminer la partie publique de notre réunion à 10 h 45, au plus tard, afin de tenir par la suite une brève discussion à huis clos.
Monsieur Forgeron, vous avez la parole.
Jean-Guy Forgeron, sous-ministre adjoint principal, Gestion des pêches et des ports, Pêches et Océans Canada : Merci et bonjour, monsieur le président, mesdames et messieurs les sénateurs et chers invités. Je vous remercie de m’avoir invité à prendre la parole devant le comité. Aujourd’hui, je serai rejoint sous peu par Doug Wentzell et Gorazd Ruseski, qui ont tous deux déjà été aimablement présentés par le président.
Après mes brèves observations, mes collègues et moi serons heureux de répondre à toutes vos questions.
[Français]
Pêches et Océans Canada est le ministère chargé d’assurer la gestion de la vitalité à long terme des ressources halieutiques et océaniques au Canada. Il a pour objectif de veiller à la sécurité, à la productivité et à la durabilité de toutes les pêches pour tous les pêcheurs.
[Difficultés techniques]
[Traduction]
En ce qui concerne les droits de pêche des Premières Nations, des Inuits et des Métis, le ministère s’est engagé à les mettre en œuvre et à les faire respecter partout au pays, d’un océan à l’autre, en collaboration avec ses partenaires détenteurs de droits. Aujourd’hui, mes observations préliminaires porteront sur la côte Est du Canada en ce qui a trait au droit issu de traités pour la pêche à des fins de subsistance convenable.
[Français]
Monsieur le président, comme vous et les membres de ce comité le savez, l’arrêt Marshall, rendu en 1999 par la Cour suprême du Canada, a confirmé le droit de pêche visant à assurer une subsistance convenable conféré par les traités de paix et d’amitié de 1760-1761. La Couronne a signé des traités distincts mais semblables avec les Premières Nations Mi’kmaq, Maliseet et Passamaquoddy.
[Difficultés techniques]
[Traduction]
Lorsqu’il s’agit de mettre en œuvre ce droit issu de traités, nous nous appuyons sur trois grands principes : la conservation et la durabilité; une gestion transparente et prévisible; et notre devoir de respecter l’engagement du Canada en matière de réconciliation.
Je crois qu’il est important de souligner ce que le ministère a déjà fait depuis la décision Marshall de 1999 pour mettre en œuvre ce qui, selon la cour, est un droit communautaire de tirer une subsistance convenable de la chasse, de la cueillette et de la pêche. Il importe aussi de parler des mesures que nous continuons à prendre. En dehors des négociations actuelles, plus de 550 millions de dollars ont été accordés dans le cadre de divers programmes, dont l’Initiative de l’après-Marshall, immédiatement après la décision Marshall, et le programme qui lui a succédé, c’est-à-dire l’Initiative des pêches commerciales intégrées de l’Atlantique, pour la délivrance de permis de pêche visant plusieurs espèces, l’acquisition de bateaux et d’engins, ainsi que pour la gouvernance, le renforcement des capacités et la formation, afin d’accroître et de diversifier la participation des nations signataires de traités aux activités de pêche commerciale et de contribuer à l’obtention d’un revenu décent pour leurs membres. Résultat : la valeur annuelle des débarquements pour les nations signataires de traités a été multipliée par 55, passant de 3 millions de dollars en 1999 à environ 170 millions de dollars en 2019, ce qui représente environ 6,4 % de la valeur totale des débarquements dans les Maritimes et en Gaspésie, au Québec.
[Français]
Malgré ces progrès, certaines nations signataires de traités ont indiqué que leurs droits n’étaient pas respectés et le ministère a reconnu qu’il restait du travail à faire pour tirer parti de ces progrès.
Dans cette optique, en 2017, le ministère a élaboré, conjointement avec des nations signataires de traités partenaires, une approche visant à se pencher sur le droit au moyen d’ententes sur la réconciliation des droits.
[Traduction]
C’est ce qu’on appelle des ententes de réconciliation et de reconnaissance des droits.
[Français]
Ces ententes juridiquement contraignantes à durée limitée donnent aux nations signataires des traités les ressources financières leur permettant d’acquérir l’accès aux pêches, à des bateaux et des engins, à du financement pour renforcer les capacités et la gouvernance, ainsi que des options pour des approches de cogestion des pêches.
[Traduction]
Au total, trois ententes de réconciliation et de reconnaissance des droits ont été signées avec quatre nations signataires de traités : Elsipogtog, Esgenoopetitj, Wolastoqiyik Wahsipekuk et Listuguj. Cela représente environ 25 % de la population des 35 communautés.
[Français]
Les discussions de nation à nation se poursuivent avec d’autres nations signataires des traités pendant que nous travaillons à la mise en œuvre de ce droit dans les Maritimes, en Gaspésie et dans la région du Bas-Saint-Laurent, au Québec.
[Traduction]
Toutefois, même si les nations signataires de traités en Nouvelle-Écosse ont participé à l’élaboration initiale de ces ententes, elles ont désormais rejeté cette approche. Par conséquent, en mars 2021, l’ancienne ministre a instauré une approche provisoire souple dans le cadre de laquelle nous travaillons en collaboration avec les nations signataires de traités qui le souhaitent pour conclure des ententes qui permettent aux communautés de pêcher selon un plan de pêche visant à assurer une subsistance convenable, plan qui est d’ailleurs adapté à leur vision du droit issu de traités. Cette approche permet aux nations signataires de traités de désigner des pêcheurs qui seront autorisés à pêcher pour assurer une subsistance convenable pendant les saisons de pêche commerciale établies.
[Français]
L’année dernière, nous avons travaillé avec les collectivités mi’kmaqs intéressées en Nouvelle-Écosse et nous avons réussi à conclure deux ententes relatives à ces plans de pêche visant à assurer une subsistance convenable.
La première a été conclue en juin 2021 et a donné aux pêcheurs désignés dans le plan de pêche visant à assurer une subsistance convenable de Potlotek la possibilité d’être autorisés à pêcher le homard en vertu d’un permis délivré par le ministère pendant la saison commerciale.
La seconde entente, semblable, a débouché sur le Plan de gestion des pêches de subsistance de Kespukwitk Netukulimk, qui permet aux pêcheurs des Premières Nations d’Acadia, de Bear River et de la vallée de l’Annapolis de participer à la pêche au homard établie dans le sud-ouest de la Nouvelle-Écosse.
Nous sommes également en discussion avec d’autres collectivités qui ont manifesté leur intérêt pour cette approche d’un plan de pêche visant à assurer une subsistance convenable.
[Traduction]
Tout en poursuivant les négociations de nation à nation et l’engagement auprès des nations signataires de traités, le ministère des Pêches et des Océans maintiendra un dialogue constant avec l’industrie de la pêche de l’Atlantique au sujet de la mise en œuvre des droits autochtones et de la réconciliation, en plus d’organiser des tribunes pour entendre les points de vue de l’industrie.
[Français]
Monsieur le président, notre objectif en tant que ministère est d’avoir une pêche paisible, productive et prospère qui respecte l’arrêt Marshall et les droits issus des traités.
[Traduction]
Le ministère a la responsabilité de reconnaître et de mettre en œuvre les droits autochtones et issus de traités, mais il a aussi un rôle fondamental à jouer dans la gestion et la réglementation des pêches dans l’intérêt de tous les Canadiens.
[Français]
La saison de pêche de 2022 est l’occasion pour nous tous de travailler ensemble, même si la voie à suivre peut parfois être difficile. Nous poursuivons tous le même objectif : l’utilisation durable de nos pêches en mettant en œuvre le droit des nations signataires de traités à une pêche visant à assurer une subsistance convenable.
[Traduction]
Sur ce, monsieur le président, mes collègues et moi serons heureux de répondre à vos questions.
Le président : Merci, monsieur Forgeron.
Le sénateur Francis : Je tiens d’abord à souligner que je vous parle depuis le territoire anishinabe, à Ottawa. Bonjour à tous.
De nombreux témoins nous ont dit que le ministère des Pêches et des Océans n’a pas vraiment le mandat de mettre en œuvre le droit de pêcher à des fins de subsistance convenable. Ainsi, les fonctionnaires continuent de se présenter les mains vides à la table des négociations avec les Premières Nations, au lieu de se concentrer sur des mesures à long terme en vue d’une mise en œuvre permanente. Le ministère a choisi de prendre des mesures provisoires qui ne visent qu’à tenir compte, de façon temporaire, des activités de pêche procurant un moyen de subsistance convenable dans le cadre juridique et réglementaire actuel créé pour les pêches commerciales fondées sur des privilèges.
Est-il prévu de confier la responsabilité de ce dossier au ministre Miller et à Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada, dont le mandat consiste justement à engager des négociations de nation à nation? Sinon, envisage-t-on de continuer à prendre des mesures provisoires, même si elles n’ont guère contribué à régler ce conflit de longue date et à réduire les tensions ou la violence sur les eaux?
M. Forgeron : Merci, monsieur le président. Je vais d’abord répondre à la question sur le rôle des ministres. Comme le sénateur l’a souligné à juste titre, le ministre Miller est chargé de l’ensemble des négociations avec nos partenaires des Premières Nations et nos autres partenaires autochtones au Canada. Chaque fois qu’il y a une entente sur les pêches, le processus est dirigé par la ministre des Pêches et des Océans et ses fonctionnaires, même dans le contexte d’une entente plus vaste.
À l’heure actuelle, lorsqu’il s’agit de faire avancer les ententes ou les accords conclus dans le cadre de plans de pêche à des fins de subsistance convenable auprès des Premières Nations, c’est le ministère des Pêches et des Océans qui en assume la responsabilité.
Pour ce qui est des négociations plus exhaustives, par exemple avec la Première Nation Sipekne’katik en Nouvelle-Écosse, les négociations de l’entente générale, qui est une entente de réconciliation plus complète, sont dirigées par le ministre Miller et son ministère, sauf en ce qui concerne les dispositions relatives à la pêche, qui relèvent du ministère des Pêches et des Océans.
Le ministère des Pêches et des Océans a pour mandat d’essayer de faire avancer la pêche de subsistance convenable, comme l’a indiqué la ministre dans sa déclaration du 3 mars 2021. D’après notre mandat actuel, nous pouvons nous y prendre de deux façons. Il y a d’abord le processus des ententes de réconciliation et de reconnaissance des droits, qui sont des ententes provisoires à court terme. Quatre Premières Nations ont conclu de telles ententes, qui sont aussi signées par les deux ministres. En effet, lorsque nous concluons une entente de réconciliation et de reconnaissance des droits, il faut la signature du ministre de Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada et celle de la ministre des Pêches et des Océans.
Pour l’heure, nous avons des ententes de réconciliation et de reconnaissance des droits avec quatre Premières Nations, qui représentent environ 25 % de la population des nations signataires de traités. De plus, nous négocions actuellement avec un certain nombre de Premières Nations, séparément ou par l’entremise de leurs organismes regroupés, dans certains cas, selon la préférence de la nation visée par un traité. C’est leur droit de décider de négocier par l’intermédiaire d’un regroupement ou en tant que nation distincte. Parmi les processus en vigueur, les ententes de réconciliation et de reconnaissance des droits constituent, en ce moment, le processus préféré pour faire avancer le droit. D’autres préfèrent le processus des plans de pêche à des fins de subsistance convenable.
Notre mandat lié aux ententes de réconciliation et de reconnaissance des droits prendra fin dans un avenir assez rapproché. Rendus là, nous chercherons à adopter un autre mandat. À notre avis, nous avons clairement un mandat qui préconise plusieurs moyens de faire avancer le droit à l’heure actuelle, mais ce mandat arrivera bientôt à échéance. L’été dernier, nous avons entamé des discussions et des consultations avec les nations signataires de traités en prévision de la possibilité de trouver un autre moyen ou un autre mandat pour faire avancer le droit issu de traités.
J’aimerais ajouter qu’au-delà des ententes de réconciliation et de reconnaissance des droits et des plans de pêche à des fins de subsistance convenable dans le cadre de l’Initiative des pêches commerciales intégrées de l’Atlantique, nous menons continuellement des activités pour renforcer les capacités des Premières Nations du Canada atlantique et du Québec afin qu’elles puissent participer à la pêche commerciale, non seulement grâce à des choses comme l’accès et l’acquisition d’engins, mais aussi grâce à la formation et au développement des entreprises. Ainsi, les droits de pêche commerciale communautaire de ces Premières Nations sont appliqués de manière efficace. C’est un programme permanent à long terme — sans doute l’un des programmes de développement les plus réussis du gouvernement —, même s’il est en quelque sorte passé inaperçu pendant des années.
Le sénateur Francis : Puis-je poser une question supplémentaire, monsieur le président?
Le président : Oui, mais j’ai une observation à faire auparavant, sénateur Francis. Comme il y a une longue liste d’intervenants, je vais permettre à chaque sénateur de poser une question, suivie d’une question complémentaire, pour voir si nous pouvons faire un tour. Si nous avons le temps pour une autre série de questions, je vous le signalerai à l’avance.
Le sénateur Francis : Pour que les choses soient claires, ces ententes provisoires sont signées par les Premières Nations sans porter préjudice à leurs droits. Il n’est pas juste de dire que le ministère des Pêches et des Océans a déjà tenté de mettre en œuvre ce droit. J’aimerais savoir quelles mesures votre ministère a prises depuis le début de la 44e législature. Envisagez-vous d’apporter des modifications législatives ou réglementaires pour mettre en œuvre la pêche de subsistance convenable, non seulement de façon temporaire, mais de façon permanente?
M. Forgeron : Nous n’envisageons pas de modifications réglementaires ou législatives au cours de cette législature. Nous croyons avoir les outils législatifs et réglementaires nécessaires pour faire avancer les droits de pêche commerciale communautaire partout au Canada, y compris pour la pêche à des fins de subsistance convenable.
Le président : Je vous remercie.
La sénatrice Busson : Monsieur Forgeron, j’ai une question à vous poser. Vous avez parlé des ententes de réconciliation et de reconnaissance des droits, qui sont entrées en vigueur en juin 2021. Vous espérez que ces ententes serviront à tracer la voie à suivre pour la pêche à des fins de subsistance convenable.
Pouvez-vous me dire à quel point les Premières Nations ont participé à l’élaboration, à la création et à la conception des ententes de réconciliation et de reconnaissance des droits en guise de plan? Vous avez dit que c’était provisoire. À l’avenir, y aura-t-il beaucoup de consultations pour faire en sorte que les Premières Nations participent à l’élaboration de ces ententes?
M. Forgeron : Monsieur le président, si je peux me le permettre, j’aimerais obtenir une précision. Je crois que la sénatrice faisait allusion aux plans de pêche à des fins de subsistance convenable, qui sont les nouveaux plans adoptés en juin, plutôt que les ententes de réconciliation et de reconnaissance des droits, qui...
La sénatrice Busson : Oui, pardon.
M. Forgeron : Les plans de pêche à des fins de subsistance convenable sont, en fait, élaborés par les communautés elles-mêmes. Jusqu’ici, les seuls plans que nous avons obtenus viennent de la province de la Nouvelle-Écosse. Ils ont été élaborés par la Première Nation en collaboration avec, en l’occurrence, le KMK, qui est le regroupement de négociation de l’Assemblée des chefs mi’kmaq de la Nouvelle-Écosse, lequel a fourni des conseils et un soutien à la Première Nation. Ainsi, la nation Potlotek a discuté avec nous de son plan de pêche à des fins de subsistance convenable, mais son plan lui appartient.
Lorsque nous avons compris qu’il s’agissait d’un plan pouvant être exécuté comme moyen de subsistance convenable, nous avons octroyé les permis par l’entremise de notre processus de délivrance de permis de pêche commerciale communautaire pour autoriser cette pêche. Tout était fondé sur le plan qui avait été élaboré à l’interne, en collaboration avec le KMK et en consultation avec l’Assemblée des chefs mi’kmaq de la Nouvelle-Écosse et le ministère des Pêches et des Océans, qui est, bien entendu, l’autorité réglementaire chargée de gérer les pêches. La Première Nation nous a consultés, mais au bout du compte, elle était la seule à approuver ses plans. Nous avons autorisé ces plans lorsque nous avons jugé qu’ils pouvaient être exécutés conformément à la déclaration ministérielle du 3 mars 2021.
La sénatrice Busson : Je vous remercie. Permettez-moi de vous poser une petite question supplémentaire. Je tiens pour acquis que ces plans visent la pêche au homard. S’appliquent-ils également à d’autres espèces?
M. Forgeron : Le droit s’applique aussi à d’autres espèces. Le plan de pêche à des fins de subsistance convenable et l’entente que nous avons avec Potlotek concernaient simplement le homard. Le deuxième plan que nous avons reçu, celui de trois Premières Nations du sud-ouest de la Nouvelle-Écosse, portait également sur le homard. Toutefois, ce mécanisme peut s’appliquer à d’autres espèces.
En ce moment, dans le sud-ouest de la Nouvelle-Écosse, les Premières Nations d’Annapolis Valley, d’Acadia et de Bear River étudient la possibilité d’un plan de pêche à des fins de subsistance convenable pour la civelle, par exemple. Le concept, tout comme le droit, ne s’applique pas seulement au homard. Il se trouve que le homard est une espèce privilégiée en ce moment, car il s’agit d’une pêche particulièrement lucrative et assez facile.
La sénatrice Busson : Je vous remercie.
Le sénateur Christmas : J’aimerais souhaiter la bienvenue à M. Forgeron et à ses collègues. C’est la première fois que nous avons l’occasion de discuter de la pêche à des fins de subsistance convenable depuis que le Sénat a adopté une motion en mai dernier, si je ne m’abuse. Je rappelle brièvement que le Sénat a non seulement confirmé la décision Marshall et le maintien de la pêche à des fins de subsistance convenable, mais il a aussi exhorté le Canada à faire de même. Le Sénat a également condamné les actes de violence. Bref, c’est la première occasion que nous avons de discuter de ces questions avec les fonctionnaires du ministère des Pêches et des Océans.
Monsieur Forgeron, j’essaie de remettre les choses dans leur contexte. La décision Marshall a été adoptée en septembre 1999. C’était il y a près de 22 ans. D’après ce que vous avez dit jusqu’à maintenant, nous avons trois ententes de réconciliation et de reconnaissance des droits et deux accords, n’est-ce pas? Est-ce bien ce que nous avons accompli en 22 ans?
M. Forgeron : C’est ce que nous avons accompli au cours des dernières années en utilisant les outils dont nous disposons actuellement pour faire avancer le droit. À l’époque de la décision Marshall, l’accès des Premières Nations — parmi les nations signataires de traités — représentait des débarquements de 3 millions de dollars. Grâce à l’Initiative de l’après-Marshall et à l’Initiative des pêches commerciales intégrées de l’Atlantique, nous avons augmenté la participation des Premières Nations, si bien que les débarquements sont maintenant évalués à environ 170 millions de dollars. C’est donc 20 fois plus élevé. Les débarquements commerciaux des nations signataires de traités représentent maintenant plus de 6 % de la valeur des débarquements dans les régions maritimes et en Gaspésie. On y est parvenu grâce à l’Initiative de l’après-Marshall, qui a été le premier ajout en matière de programme, et grâce à l’Initiative des pêches commerciales intégrées de l’Atlantique, qui a également permis d’accroître l’accès, les activités de pêche et le nombre d’engins. Plus important encore, je dirais que ces initiatives ont permis d’offrir de la formation sur la pêche commerciale afin de créer des entreprises de pêche commerciale et de former les membres des Premières Nations qui font partie des nations signataires de traités et qui vont participer à la pêche, de sorte qu’ils soient en mesure de pêcher efficacement et en toute sécurité.
Au cours de cette période, nous avons dépensé, dans le cadre de ces programmes, environ 550 millions de dollars pour atteindre ces résultats. Depuis la création de ces deux programmes — et l’Initiative des pêches commerciales intégrées de l’Atlantique se poursuit toujours, surtout en ce qui concerne le développement et la formation des entreprises de pêche commerciale — et à la suite d’une affaire judiciaire mettant en cause l’Assemblée des Premières Nations de la Nouvelle-Écosse, nous avons fini par élaborer conjointement un programme visant à faire avancer les droits de pêche au-delà des progrès que nous avions réalisés jusque-là. C’est ainsi que nous avons reçu le mandat lié aux ententes de réconciliation et de reconnaissance des droits pour faire avancer la mise en œuvre des droits issus de traités et pour aller au-delà des résultats obtenus jusque-là par l’entremise de nos programmes.
Dans le cadre de ce processus, vous avez raison, quatre Premières Nations, représentant 25 % de la population des nations signataires de traités, ont signé des ententes. Nous pourrions éventuellement en voir beaucoup d’autres dans les mois à venir.
Enfin, compte tenu du manque d’intérêt en Nouvelle-Écosse à l’égard des ententes de réconciliation et de reconnaissances des droits après un certain temps de discussions à ce sujet, nous avons trouvé une autre solution, à savoir les plans de pêche à des fins de subsistance convenable. Il s’agit d’un concept venant des nations signataires de traités de la Nouvelle-Écosse, l’objectif étant, encore une fois, de continuer à faire avancer ce droit.
Je crois donc, monsieur le président, pour répondre à la question du sénateur, que nous avons, à différents moments depuis 1999, utilisé différents instruments pour faire avancer ce droit : en grande partie, des programmes — l’Initiative de l’après-Marshall et l’Initiative des pêches commerciales intégrées de l’Atlantique au début — et, plus récemment, le processus des ententes de réconciliation et de reconnaissance des droits et, l’an dernier, le processus des plans de pêche à des fins de subsistance convenable. Voilà autant de moyens privilégiés par nos partenaires pour faire avancer ce droit.
Le sénateur Christmas : J’ai une question supplémentaire, monsieur le président. Nous avons trois ententes de réconciliation et de reconnaissance des droits et deux accords, et cela concerne 35 communautés des Premières Nations. Vous avez parlé des programmes d’une valeur de 550 millions de dollars, et ce montant s’échelonne sur une période de 22 ans. Or, d’après ce que j’ai compris, tout cet argent lié aux programmes n’a rien à voir avec les droits issus de traités. C’est sans préjudice des droits autochtones issus de traités.
J’aimerais attirer votre attention, monsieur Forgeron, sur le rapport d’Allister Surette. Il a été nommé représentant spécial fédéral pour examiner les moyens de subsistance convenable. Dans son rapport final, il dit :
[...] la source du conflit dans le secteur de la pêche est le refus du MPO de reconnaître les droits et l’autodétermination des Autochtones, et de partager avec les collectivités autochtones la compétence du MPO en matière de pêche.
Il ajoute :
[...] les Autochtones estiment que le gouvernement du Canada continue d’adopter une approche coloniale dans ce domaine, en ne tenant pas compte de la gouvernance et du leadership des collectivités autochtones dans le cadre de l’engagement de « nation à nation », et qu’il continue donc d’imposer et de dicter ses règles sur les pêches, ce qui ne relève pas de sa compétence et de son mandat.
Alors, monsieur Forgeron, pourquoi le ministère des Pêches et des Océans ne reconnaît-il pas l’article 35, le droit des Autochtones à l’autonomie gouvernementale à des fins de subsistance convenable?
M. Forgeron : Merci, monsieur le président. Je vais d’abord revenir sur l’une des observations faites par le sénateur : dire que quelque chose portera préjudice au droit ne veut pas dire que cela n’est pas pertinent pour la mise en œuvre du droit ou que cela ne l’appuie pas. Selon le ministère des Pêches et des Océans, les programmes lancés depuis 1999 ont effectivement été entrepris pour favoriser la mise en œuvre du droit de pêche issu de traités visant à assurer une subsistance convenable.
Monsieur Ruseski, voulez-vous parler du rapport publié par le représentant spécial fédéral?
Gorazd Ruseski, directeur général, Affaires autochtones, Pêches et Océans Canada : Bonjour à tous. Puisque c’est la première fois que je prends la parole, je tiens à reconnaître que j’ai le privilège de m’adresser à vous à partir de chez moi, sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinabe.
En effet, j’ai eu l’honneur de travailler avec Allister Surette, le représentant spécial fédéral, et de l’appuyer dans le cadre de ses consultations auprès des partenaires autochtones, de l’industrie et d’autres intervenants du secteur des pêches de l’Atlantique à l’étape de la rédaction de son rapport et de ses recommandations.
Ce que j’ai retenu du rapport et du processus en question, ce sont non seulement les points de vue exprimés par les nations signataires de traités sur l’étendue des mesures prises par le gouvernement pour mettre en œuvre le droit à une subsistance convenable, mais aussi des préoccupations particulières concernant l’établissement de relations entre les pêcheurs autochtones et non autochtones dans le secteur. En fait, bon nombre des recommandations du rapport du représentant spécial fédéral portaient précisément sur cette question et sur la façon dont nous pourrions surmonter certaines de ces difficultés relationnelles.
Le représentant spécial fédéral a recommandé, entre autres, la mise en place d’un centre d’échange de renseignements sur le droit de pêche à des fins de subsistance convenable et sur les efforts que le gouvernement a déployés et continue de déployer pour mettre en œuvre ce droit.
Le représentant spécial fédéral a fait des recommandations sur l’établissement de tables rondes locales ou régionales pour l’échange de renseignements et le dialogue entre le ministère des Pêches et des Océans, entre les nations autochtones et entre les pêcheurs non autochtones et leurs associations. Il a également recommandé des projets de collaboration qui pourraient aider à établir ou à rétablir des relations dans des régions où l’industrie et les Autochtones pourraient faire cause commune.
Il s’est concentré sur quelques domaines précis ayant trait aux collaborations scientifiques : la collecte, la diffusion et l’interprétation de renseignements pouvant aider à mieux tenir compte de la viabilité des ressources halieutiques, en particulier le homard, mais pas exclusivement. D’ailleurs, depuis la recommandation du représentant spécial fédéral, le ministère a mis en place certains processus dans ce domaine pour permettre cela.
De plus, parallèlement aux consultations menées par le représentant spécial fédéral et à la préparation de son rapport, notre équipe a lancé une table ronde pour l’échange de renseignements avec l’industrie, chose que nous avons maintenue depuis, pour fournir des explications et des réponses plus détaillées à certaines des questions de l’industrie sur la nature du droit et la façon dont le ministère s’y prend pour le mettre en œuvre. Nous espérons qu’avec le temps — et en collaboration avec l’industrie —, nous serons en mesure de faire participer également les partenaires autochtones à cette conservation afin qu’ils puissent y ajouter leurs points de vue.
Le sénateur Christmas : Merci, monsieur le président. On n’a pas répondu à ma question, mais je vais attendre le troisième tour.
Le président : Avant de céder la parole au sénateur Ravalia, j’aurais moi-même une question à poser. Je voudrais intervenir ici. Excusez-moi, chers collègues.
Monsieur Forgeron, lorsque vous avez répondu à l’une des questions — et j’ai peut-être mal compris — du sénateur Christmas, vous avez parlé des « outils » dont nous disposons actuellement pour faire avancer les droits. Je me demande simplement si vous avez besoin d’outils supplémentaires à cet égard et, dans l’affirmative, quels efforts sont déployés pour y avoir accès ou pour en créer.
M. Forgeron : Pour l’instant, nous estimons que les outils dont nous disposons semblent donner de bons résultats et qu’ils nous permettent de faire avancer la mise en œuvre des droits auprès d’un certain nombre de Premières Nations. Certaines d’entre elles préfèrent, en fait, le processus des ententes de réconciliation et de reconnaissance des droits — ou des ententes de mise en œuvre des droits, comme on les appelle dans certaines parties du Nouveau-Brunswick — ou, encore, les plans de pêche à des fins de subsistance convenable. D’autres nations signataires de traités souhaitent, je dirais, une refonte complète du système, et notre ministère a déjà commencé à réfléchir à la meilleure façon d’aller de l’avant. Toutefois, ce n’est pas une question à laquelle nous devrions réfléchir seuls.
En fait, nous avons entamé un processus de consultation au cours de l’été afin d’obtenir des renseignements auprès de nos partenaires des Premières Nations signataires de traités sur ce qui constitue, selon eux, le meilleur moyen de faire valoir ce droit. Nous ne sommes pas encore prêts à nous engager dans une nouvelle direction, mais nous continuons à promouvoir les droits au moyen des outils dont nous disposons actuellement. Nous sommes convaincus que les outils actuels nous donnent une excellente occasion de faire avancer ce droit à court terme pour certaines Premières Nations.
Toutefois, comme je l’ai mentionné, l’entente de réconciliation et de reconnaissance des droits prendra bientôt fin et l’approche qui lui succédera reste à définir. Elle sera étayée par notre analyse de la façon dont les choses se sont déroulées jusqu’ici et par ce que nos collègues et partenaires des nations signataires de traités voudront faire. Comme je l’ai dit plus tôt, le processus de l’entente a été élaboré de façon conjointe par le Bureau de négociation du KMK et les nations signataires de traités de la Nouvelle-Écosse. L’approche du plan de pêche à des fins de subsistance convenable est aussi issue en grande partie de la Nouvelle-Écosse, et nous nous tournerons vers nos partenaires des nations signataires de traités pour savoir quelle est la meilleure approche à adopter pour la suite des choses. Je n’ai pas de réponse précise à vous donner pour l’instant, monsieur le président.
Le président : Merci. Nous allons maintenant passer aux membres du comité qui sont sur place.
Le sénateur Ravalia : Ma question renvoie à ce qui a été mentionné plus tôt dans la période de questions. L’entente sur la pêche à des fins de subsistance convenable conclue entre les Premières Nations et le ministère des Pêches et des Océans me semble provisoire et à court terme. Son application connaît des ratés et il n’y a aucun plan ferme pour l’avenir. Monsieur Forgeron, quelles mesures à long terme Pêches et Océans Canada prévoit-il prendre pour mettre en œuvre des pêches à des fins de subsistance convenable de façon plus permanente? Avez-vous l’impression qu’il y a une certaine résistance au sein de votre ministère à cet égard?
M. Forgeron : Merci, monsieur le président. Nous croyons que tous les programmes et toutes les ententes que nous pilotons font partie de notre réponse à la nécessité de respecter le droit issu du traité à long terme — de façon progressive. Je crois que la question est la suivante : « Quand savez-vous que la mise en œuvre est complète? » La réponse est que nous ne le savons pas et que nos partenaires des traités des Premières Nations n’ont pas défini ce à quoi devrait ressembler, selon eux, une mise en œuvre complète. Nous en discutons avec eux, mais chaque programme — qu’il s’agisse de l’Initiative de l’après-Marshall, de l’Initiative des pêches commerciales intégrées de l’Atlantique, des ententes de réconciliation et de reconnaissance des droits ou des plans de pêche à des fins de subsistance convenable — est un élément constitutif de la mise en œuvre complète du droit.
Ces initiatives et ententes ne sont pas provisoires par nature, mais elles sont des blocs qui concrétisent progressivement la réalisation de ce droit, laquelle n’a jamais été définie comme ayant un point d’arrivée. Pour être clair, lorsque je parle de « point final », il n’y a pas de point final absolu à la mise en œuvre de ce droit issu de traités, car ce droit évoluera au fil du temps, au fur et à mesure que les communautés des Premières Nations évolueront et que les besoins changeront. Il s’agira d’un processus qui, d’une façon ou d’une autre, sera en perpétuelle transformation, d’un processus que le ministère accepte de reconnaître comme n’étant jamais terminé, même si un jour les gens pourraient dire : « Aujourd’hui, nous jouissons pleinement de nos droits à une subsistance convenable; ils sont complètement satisfaits. » Ce ne sera peut-être plus le cas dans cinq ans. Nous reconnaissons que le traité est un traité vivant et que, par conséquent, la mise en œuvre du droit sera une responsabilité permanente et vivante du ministère des Pêches et des Océans.
[Français]
Le sénateur Cormier : Je prends la parole aujourd’hui à partir du territoire de la nation algonquine anishinabeg. Ma question s’adresse tant à M. Forgeron qu’à M. Ruseski.
Les enjeux sont complexes. Pour nous permettre de bien saisir ceux qui sont en cause, pouvez-vous nous rappeler la différence qui existe entre les pêches commerciales et les pêches commerciales communautaires? En quoi les pêches commerciales communautaires diffèrent-elles des pêches de subsistance convenable?
[Traduction]
M. Forgeron : Merci de cette question. La pêche commerciale telle que vous avez l’habitude de la percevoir est constituée de personnes qui sont des pêcheurs individuels, qui pêchent pour gagner leur vie. Habituellement, ces pêcheurs reçoivent des permis commerciaux en vertu de la Loi sur les pêches. La pêche à des fins de subsistance convenable est une autre forme de pêche commerciale, car vous pêchez pour assurer votre subsistance.
Cependant, ces permis sont délivrés différemment, car dans ce cas, le droit de pêcher est un droit communautaire détenu par le gouvernement de la Première Nation et non par ses membres individuels. Les permis communautaires ne sont pas délivrés aux pêcheurs sur une base individuelle, comme c’est le cas pour les propriétaires-exploitants qui ont reçu des permis année après année pour pêcher commercialement, qui possèdent leur propre navire et leur propre équipement, qui peuvent avoir un équipage qui les soutient dans cette activité et qui en tirent un moyen de gagner leur vie. Ces gens disposent d’un permis commercial individuel. Dans le cas des droits de pêche communautaires, nous disposons de règlements qui nous permettent de fournir un permis commercial communautaire à un organisme autochtone.
La pêche à des fins de subsistance convenable qui s’est développée grâce à nos programmes au fil des ans est pratiquée en vertu de ces permis commerciaux communautaires qui sont délivrés à la Première Nation elle-même en tant que communauté. Ensuite, c’est elle qui décide de ceux et celles qui exploiteront lesdits permis au nom de la communauté.
Les plans de pêche à des fins de subsistance convenable dont nous avons parlé plus tôt s’inscrivent dans ce régime.
[Français]
Le sénateur Cormier : Sur le plan de la législation, quelles dispositions de la Loi sur les pêches ou d’autres lois ou règlements fédéraux devrait-on modifier pour reconnaître les pêches fondées sur les droits comme les pêches de subsistance convenable? C’est une vaste question, peut-être, mais avez-vous des indications sur le plan législatif?
[Traduction]
M. Forgeron : Le ministère reconnaît le droit de pêcher pour assurer une subsistance convenable, comme l’a affirmé la Cour suprême du Canada, et nous savons que ce droit est protégé aux termes de l’article 35 de la Constitution. Nous n’avons jamais envisagé d’inscrire dans la loi une reconnaissance explicite à cet égard. Je pense qu’il n’y a aucun problème à reconnaître ce fait.
Pour ce qui est de la mise en œuvre de ce droit, la loi nous fournit les outils réglementaires nécessaires pour le faire. Les règlements sur la pêche commerciale communautaire autochtone que nous utilisons pour délivrer les permis communautaires de pêche commerciale sont de bons exemples des outils disponibles aux termes des lois actuelles. Ces outils sont suffisamment souples pour aborder le droit sans le nommer spécifiquement, mais il ne fait aucun doute pour le ministère ou pour le gouvernement que ce droit est un droit reconnu, comme l’a affirmé la Cour suprême du Canada. Le ministère estime qu’il est de son devoir et de sa responsabilité de mettre en œuvre tous les éléments de la décision.
[Français]
Le sénateur Cormier : Merci beaucoup.
[Traduction]
Le sénateur Kutcher : Merci à tous les témoins d’être ici aujourd’hui. Je confirme que je vis dans le territoire non cédé des Mi’kmaqs dans ce qui est actuellement la Nouvelle-Écosse.
Au cours de notre dernière séance — il y a maintenant six ou huit mois — de nombreux témoins ont soulevé des préoccupations importantes au sujet du racisme systémique au sein du ministère des Pêches et des Océans et ont souligné la nécessité d’y remédier efficacement. Nous avons également pris connaissance des mesures qui pourraient être prises pour s’attaquer à ce problème de racisme systémique.
Pourriez-vous nous faire part des initiatives particulières que le ministère a mises en œuvre au cours des six derniers mois pour s’attaquer à ce problème? Merci.
M. Ruseski : Merci de votre question, sénateur. Pour y répondre adéquatement, je dois revenir quelques années en arrière, puis remonter jusqu’à aujourd’hui. Il y a quelques années, en réponse au programme pangouvernemental sur les droits et la réconciliation qui était mis de l’avant à l’époque, notre ministère a entrepris l’élaboration d’une stratégie de réconciliation qui devait s’appliquer à l’ensemble de son organisation.
Cette stratégie avait pour but d’initier les employés de Pêches et Océans Canada et de la Garde côtière canadienne à une meilleure compréhension de la façon dont les droits et la réconciliation des Autochtones sont pris en compte dans le portefeuille et les activités du ministère, et de sensibiliser l’effectif à cet égard. La mise en œuvre de la stratégie devait en outre permettre de cerner les possibilités de faire avancer les droits et la réconciliation dans pratiquement tous les secteurs d’activité du ministère, non seulement dans la gestion des ressources et les activités opérationnelles, mais aussi dans le secteur des sciences, dans celui de l’habitat, au sein de la Garde côtière et même dans les fonctions administratives du ministère.
Quelques années plus tard — je pense que c’était en septembre 2019, si ma mémoire est bonne — la stratégie a été rendue publique et, depuis ce temps, le ministère travaille à sa mise en œuvre.
Entre autres éléments de cette stratégie, il y avait, comme je l’ai dit, des initiatives et des actions qui visaient les secteurs administratifs du ministère, notamment ceux des RH et des services ministériels. Par exemple, le ministère a entrepris d’élaborer une stratégie de recrutement, de maintien en poste et de perfectionnement à l’intention des employés autochtones. Le ministère a également entrepris de promouvoir la formation des employés — que ce soit sur l’histoire des Autochtones au Canada ou sur l’acquisition de compétences relationnelles pour les employés des secteurs de programme qui commencent tout juste à travailler avec des partenaires autochtones de tout le pays dans leurs domaines respectifs — ou, plus généralement, de promouvoir la formation sur la diversité et l’inclusion auprès de tous nos employés, y compris la formation obligatoire s’adressant aux cadres du ministère et de la Garde côtière. Cela comprenait une formation sur la diversité et l’inclusion, une formation sur les préjugés inconscients et des ateliers liés à ces sujets. Ces formations ont été données de façon continue, y compris au cours des derniers mois, et les gens les ont suivies.
En outre, il y a quelques années, nous avons nommé des co-champions de la réconciliation qui ont pour fonction de promouvoir la stratégie du ministère et les mesures prises en faveur des employés autochtones, et de soutenir l’éducation et la sensibilisation des employés non autochtones. Il y a actuellement trois co-champions, et M. Forgeron est de ce nombre. Ils sont à la tête de ce changement de culture plus global qui s’opère au sein de notre ministère, ce qui, encore une fois, contribue vraiment à faire avancer la stratégie de l’organisation.
Étant donné que j’ai joué un rôle assez important dans l’élaboration de cette stratégie il y a quelques années, je tiens à ajouter que je n’ai pas encore vu de stratégie comparable dans d’autres ministères ou organismes à Ottawa. Cependant, je sais que certains ministères et organismes travaillent sur des stratégies similaires et prennent des mesures légèrement différentes des nôtres à cet égard.
Nous prenons des mesures pour établir des réseaux d’employés autochtones dans notre ministère. Il existe un réseau d’employés autochtones dans notre région du Pacifique. Il y a un réseau informel qui a été mis en place dans notre région du golfe. Un autre réseau a été mis en place pour les employés autochtones travaillant dans le domaine de la conservation et de la protection dans les régions des Maritimes et du Golfe. Une réunion nationale du réseau des employés autochtones de Pêches et Océans Canada et de la Garde côtière canadienne aura d’ailleurs lieu à Ottawa la semaine prochaine, réunion qui regroupera des employés en présentiel et en mode virtuel.
Je devrais terminer en mentionnant qu’en janvier de cette année, le ministère a organisé une réunion interministérielle, un atelier sur la réconciliation auquel ont participé de nombreux autres ministères et organismes. Cet atelier était axé sur les expériences vécues par les employés autochtones de la fonction publique fédérale. On y a en outre parlé des outils et des approches que notre ministère et d’autres ministères pourraient s’échanger afin d’améliorer l’expérience vécue, le recrutement, le maintien en poste et le perfectionnement des Autochtones dans la fonction publique.
Le sénateur Kutcher : Merci beaucoup.
M. Forgeron : Monsieur le président, j’aimerais également ajouter, comme l’a dit M. Ruseski, que je suis l’un des co-champions de cette stratégie. Je ne dirais toutefois pas que je la dirige. Nous avons mis sur pied un groupe de travail auquel participent un certain nombre de nos collègues autochtones qui sont de vrais champions pour ce qui est de diriger le plan de réconciliation au sein du ministère ainsi que des champions de la réconciliation de tout le ministère. Ils sont en train de mettre au point un plan de travail pour la réconciliation auquel participeront nos collègues autochtones de Pêches et Océans Canada.
Ils m’ont donné le titre de « champion », mais je me décrirais plutôt comme un partisan de ceux qui sont les vrais champions de cet exercice.
Le sénateur Kutcher : Merci de cette explication. Je pense que nous devons tous être des champions dans cet exercice — des partisans, des champions et des alliés en même temps. Je vous remercie de nous avoir donné cette information.
J’avais cru — et on dirait bien que le ministère fait du bon travail — que, dans le cadre de ce travail, vous auriez été en mesure de nous fournir des données montrant comment le racisme s’est transformé au sein du ministère. Seriez-vous en mesure de communiquer les données que vous avez au comité? Je présume que vous avez pris des mesures avant de mettre ces programmes en place et que vous les avez reprises ultérieurement afin de jauger l’efficacité de vos interventions. J’ai hâte de recevoir certaines de ces données de vous. Je vous remercie.
Le sénateur Quinn : Monsieur Forgeron, merci à vous et à vos collègues d’être ici ce matin.
Je suis un nouveau sénateur et c’est la première fois que je siège à ce comité. Je reviens sur la question de la subsistance convenable. Pouvez-vous nous parler un peu des paramètres contenus dans le concept de subsistance convenable? Comment définissez-vous cette « subsistance convenable »?
M. Forgeron : Le tribunal a défini la « subsistance convenable » comme un revenu qui permet de payer pour les nécessités de la vie et pour un peu de luxe, mais pas de s’enrichir. C’est une définition très large. Je ne crois pas que quiconque ait proposé une définition plus précise. Les nécessités de la vie étant la nourriture, le logement et quelques autres choses.
La cour a précisé qu’il ne s’agissait pas d’un droit permettant l’accumulation illimitée de richesses. La nourriture, les vêtements et le logement seraient, bien sûr, les nécessités de base, nous le supposons. Dans la hiérarchie des droits de pêche, il y a le droit de pêcher à des fins alimentaires, sociales et rituelles dont jouissent nos communautés autochtones à la grandeur du pays, et qui n’est pas un droit de pêche commerciale.
Parmi les 35 nations signataires d’un traité dans les Maritimes et en Gaspésie, il existe un droit de pêcher à des fins de subsistance convenable, ce qui est un droit de pêche commerciale qui viendrait s’ajouter à cela. Du point de vue de la gestion de la ressource, notre plus grande priorité au ministère est le droit alimentaire, social, rituel et autochtone, puis le droit commercial issu de traités. S’il l’on définissait une limite à ce droit issu de traités de pêcher à des fins de subsistance convenable, les Premières Nations continueraient bien sûr à pêcher au-delà de cette limite. Or, jusqu’à présent, aucune mesure n’a été proposée pour définir les limites de ce droit.
Le sénateur Quinn : Je pense que ce serait très difficile à faire étant donné les circonstances variables des Premières Nations et les circonstances particulières de chaque nation à travers le pays. Je vous remercie de votre réponse.
J’ai une question complémentaire. Vous avez dit que les ententes de réconciliation et de reconnaissance des droits appartiennent aux Premières Nations. Est-ce la planification des Premières Nations qui définit ce que sont ces ententes?
M. Forgeron : Les plans de pêche à des fins de subsistance convenable sont élaborés par les Premières Nations — « stylo à la main » comme nous, les fonctionnaires, dirions à propos de ces plans. Les ententes de réconciliation et de reconnaissance des droits ou les ententes de mise en œuvre des droits, selon le terme que nos partenaires des nations signataires de traités aiment utiliser, sont des ententes négociées.
Le sénateur Quinn : Comment le premier se rattache-t-il aux discussions avec les autres pêcheurs des régions concernées? Comment cela se rattache-t-il à l’autre enjeu que vous avez, qui est la durabilité? Je pense que la communauté des pêcheurs dans son ensemble a une responsabilité en ce qui concerne la durabilité. Quelle est l’interaction entre les Premières Nations, les autres pêcheurs et la durabilité?
M. Forgeron : La durabilité devrait être la priorité de tous dans le domaine de la pêche, et c’est la priorité numéro un du ministère des Pêches et des Océans. L’un des éléments de la décision Marshall était clair : le gouvernement du Canada et, par le biais de la Loi sur les pêches, le MPO ont le pouvoir de réglementer l’exercice de droits issus de traités pour des raisons de conservation ou pour d’autres raisons impérieuses, mais principalement pour la conservation.
Le ministère est toujours responsable de la conservation dans son ensemble. C’est l’une des raisons pour lesquelles, dans la déclaration du 3 mars de l’ancien ministre Jordan, l’un des points était qu’en faisant progresser les droits issus de traités, nous ne créons pas de nouvel accès. Nous ne voulons pas créer une nouvelle pression sur la ressource, qui viendrait mettre en péril nos objectifs de conservation.
Nos partenaires des nations visées par des traités et l’industrie partagent nos objectifs de conservation. Lorsqu’il s’agit de discuter des plans de pêche à des fins de subsistance convenable ou des ERRD, le gouvernement du Canada entretien une relation de nation à nation avec la nation visée par le traité ou l’organisation que cette nation souhaite utiliser à des fins de négociation. L’industrie ne peut pas et ne doit pas jouer un rôle dans ce processus. Nous n’invitons pas l’industrie à participer à ce processus, à moins qu’une nation visée par un traité ne le souhaite. En fait, j’ai récemment envoyé en mon nom une lettre aux principales associations de pêche côtière de la côte Est, afin de leur expliquer cet enjeu. Si le comité le souhaite, je serais heureux de lui faire parvenir cette lettre à titre d’information. Dans la lettre, j’explique la teneur de la relation de nation à nation et la raison pour laquelle l’industrie ne participe pas à ces négociations.
L’industrie et les Premières Nations peuvent discuter d’une question particulière si les deux parties souhaitent le faire. Rien ne les empêche de le faire, comme rien n’empêche les Premières Nations de communiquer des renseignements à ce sujet. Certaines Premières Nations publient des renseignements sur les ententes qu’elles ont conclues, qu’il s’agisse de plans de pêche à des fins de subsistance convenable ou d’ERRD, et les rendent ainsi très publiques. Par exemple, le gouvernement mi’kmaq de Listuguj a publié son ERRD sur son site Web en omettant les détails financiers. Il a décidé d’omettre ces renseignements pour des raisons de confidentialité commerciale, ce qui est raisonnable. Le plan de pêche à des fins de subsistance convenable relatif au homard, qui a été négocié avec la Première Nation Acadia, est affiché sur le site Web de la Première Nation, par exemple. Toutefois, les Autochtones ont pris eux-mêmes la décision d’afficher ces documents. Pendant la négociation de l’entente, nous nous sommes mis d’accord à ce sujet, mais ce sont eux qui ont décidé de rendre ces renseignements publics, afin que l’industrie commerciale ait l’occasion de voir à quoi ressemblent ces plans si elle est curieuse de les examiner.
À part cela, des employés à divers échelons de l’organisation parlent constamment avec l’industrie, et ils abordent toutes les questions de gestion des pêches, y compris les questions relatives à la mise en œuvre des droits. Nous avons organisé une série d’ateliers sur la mise en œuvre des droits, et nous prévoyons de réaliser un travail continu pour améliorer la compréhension de l’industrie à l’égard des droits des Autochtones et de leur mise en œuvre. Toutefois, les négociations proprement dites se déroulent entre la Couronne et la Première Nation concernée.
Le sénateur Quinn : Merci. Je suis impatient de voir votre lettre. Votre réponse était excellente.
Le président : Merci. Monsieur Forgeron, vous pouvez acheminer la lettre au greffier, qui la transmettra à tous les membres du comité.
La sénatrice Cordy : Monsieur Forgeron, je vous remercie, vous et vos collègues, de vous être joints à nous aujourd’hui. Je souligne que je prends la parole depuis le territoire non cédé des nations algonquine et anishinabe.
Des témoins, qui ont comparu antérieurement devant notre comité, ont expliqué que, puisque le MPO n’est pas réellement chargé de mettre en œuvre l’autodétermination et les droits de pêche des peuples Mi’kmaq, Malécite et Passamaquoddy, le ministère s’est efforcé depuis 1999 d’amener les Premières Nations à signer des accords temporaires visant à accroître leur accès et à renforcer leurs capacités dans le domaine de la pêche commerciale. Les accords temporaires comprennent des ententes de réconciliation et de reconnaissance des droits, d’une durée de 5 à 10 ans, et des plans de pêche de subsistance Netukulimk saisonniers que quelques Premières Nations de la Nouvelle-Écosse cherchent à négocier, comme vous l’avez dit plus tôt ce matin dans le cadre de la formulation de vos observations.
Le ministère est-il d’avis que les communautés qui ont signé ces accords provisoires l’ont fait sans porter atteinte à leurs droits? En d’autres termes, le ministère est-il d’avis que ces accords provisoires n’équivalent pas à la mise en œuvre de leur autodétermination en matière de droits de pêche et qu’il reste du travail à faire?
M. Forgeron : Comme je l’ai mentionné précédemment, oui, ils l’ont fait « sans préjudice à leurs droits ». Cependant, le fait de dire que cela a été fait « sans préjudice à leurs droits » n’est pas la même chose que le fait de dire que « cela n’est pas pertinent à la mise en œuvre de leurs droits ou n’appuie pas cette mise en œuvre ». Chacun de ces accords... et ces types d’accords sont récents. Nous avons utilisé des programmes pour faire avancer les choses depuis 1999, mais ce n’est qu’au cours des quatre ou cinq dernières années que nous avons utilisé ces accords. Nous pensons qu’ils constituent une étape progressive, un pas vers la mise en œuvre de leurs droits. Ces accords ne concluent pas la mise en œuvre de leurs droits. Dans un accord, nous négocions les ressources qui seront fournies pendant une période donnée pour faire avancer la mise en œuvre de leurs droits, et l’accord donne à la Première Nation la possibilité d’utiliser — s’il s’agit d’une ERRD par exemple — des ressources pour échelonner sur un certain nombre d’années l’acquisition de l’équipement d’accès, et la possibilité de continuer à faire avancer ses droits en utilisant les ressources de l’accord.
La gouvernance collaborative est un autre élément des ERRD dont on n’a pas beaucoup discuté, du moins aujourd’hui, quant à la façon dont nous gérons notre relation avec cette Première Nation pour faire avancer ses droits de pêche. Techniquement parlant, les ERRD peuvent prendre trois formes. Elles peuvent consister à financer l’accès à des permis, à des quotas et à des engins et des bateaux de pêche. Voilà un des types de financement. En théorie, un autre type de financement est lié à la gouvernance collaborative. Il consiste à financer l’établissement d’une gouvernance collaborative entre la Première Nation, les regroupements et le ministère des Pêches et des Océans, ainsi qu’à établir les règles de fonctionnement. Il peut aussi s’agir d’une approche globale, qui réunit les deux formes présentées. Par exemple, l’ERRD au Nouveau-Brunswick ne concerne que l’accès aux engins de pêche, mais nous sommes en train de négocier l’élément de gouvernance collaborative et l’élément de gestion. L’entente à Listuguj, c’est-à-dire l’ERRD la plus publique qui soit, est exhaustive, par exemple. Elle comporte les deux volets du système d’entente, à savoir la gestion collaborative et l’accès à des permis, des quotas et des engins et des navires de pêche.
Selon la Couronne, toutes ses mesures contribuent à la mise en œuvre des droits, mais elles ne définissent pas les droits, et personne ne soutient que « tout est dit ». Cependant, comme je l’ai mentionné, il s’agit d’une étape progressive en vue d’atteindre l’objectif de mise en œuvre des droits.
La sénatrice Cordy : Je vous remercie de votre réponse.
M. Forgeron : J’espère que cela a répondu à votre question.
La sénatrice Cordy : Votre réponse était très détaillée, et je vous en remercie. Comme je suis une nouvelle membre du comité, ces renseignements sont très utiles.
Je crois comprendre que le mandat du ministère expirera ce mois-ci. Pouvons-nous nous attendre à prendre connaissance du nouveau mandat avant l’expiration de l’ancien? Et à quels engagements pouvons-nous nous attendre en ce qui concerne la mise en œuvre de l’autodétermination en matière de pêche des Mi’kmaq, des Malécites et des Passamaquoddy?
J’ajouterai à cela l’enveloppe de financement qui accompagnera ce mandat. Le ministère se concentrera-t-il sur la mise en œuvre de l’autodétermination en matière de droits de pêche des Mi’kmaq, des Malécites et des Passamaquoddy?
M. Forgeron : Je ne pense pas être en mesure de parler des nouveaux mandats qui pourraient être proposés, car ces informations figurent dans des documents confidentiels du Cabinet. Mais comme je l’ai mentionné plus tôt, nous avons commencé à dialoguer avec nos partenaires des nations visées par des traités, car ce sont d’importants partenaires en ce qui concerne la prise de décisions sur la teneur des futurs mandats ou sur les mesures que nous prendrons pour nous préparer à un nouveau mandat. À l’heure actuelle, nous nous occupons des plans modernes de pêche à des fins de subsistance et, entretemps, nous continuerons de négocier des ERRD.
La sénatrice Cordy : Merci beaucoup. Cependant, nous pouvons toujours tenter d’en savoir davantage en posant ces questions.
M. Forgeron : Oui, mais j’aurais pu m’attirer des ennuis.
Le sénateur Campbell : J’essaie de comprendre comment la pêche de la côte Est se compare à celle de la côte Ouest. Nous n’avons pas vu, sur la côte Ouest, la prise des mesures que nous avons observées sur la côte Est. Pourquoi ne vois-je pas la prise de telles mesures sur la côte Ouest? Y a-t-il une différence entre les engagements pris à l’égard des droits de pêche des peuples autochtones? Cela me déroute vraiment. Je vis dans une collectivité située sur le territoire non cédé de la nation Penelakut, et les membres de cette nation pêchent, apparemment sans qu’aucun trouble ne survienne. Ma question est donc la suivante : quelle est la différence?
M. Forgeron : Quelle est la différence? Il faut réfléchir à cette question; si vous examinez la côte Est, vous constaterez que la grande majorité des nations visées par des traités n’ont pas nécessairement connu les terribles événements qui se sont produits dans le sud-ouest de la Nouvelle-Écosse, et qu’ils pêchent en parfaite collaboration avec l’industrie commerciale voisine.
Je ne peux pas parler de ce qui pousse des personnes à mal agir, comme nous l’avons vu quand des établissements ont été incendiés et d’autres méfaits ont été commis, mais d’après ce que j’ai compris, ceux qui ont participé à ces méfaits étaient essentiellement mécontents de ce qu’ils considéraient comme une pêche non autorisée que certaines Premières Nations avaient entreprise, et ils ont réagi vivement.
Je rappelle à tous que ces événements ont eu lieu il y a deux étés, et que nous n’avons pas observé ce même niveau de tension l’été dernier. Notre objectif, en tant que ministère, est que tout le monde pêche ensemble dans le cadre d’une pêche commerciale intégrée et autorisée par le ministère des Pêches et des Océans, que ce soit par l’intermédiaire d’un accès fourni par des ERRD ou des plans de pêche à des fins de subsistance convenable, ou, dans le cas des pêcheurs commerciaux, par le respect des conditions de leur permis.
Le sénateur Campbell : Je suis désolé, monsieur, mais cela ne répond pas à ma question. Ce que j’aimerais comprendre, c’est la différence entre la pêche sur la côte Est et la pêche sur la côte Ouest en ce qui concerne les peuples autochtones. Cet enjeu m’échappe.
M. Forgeron : L’une des différences les plus importantes, c’est qu’il existe un type de pêche qui se pratique sur les deux côtes, à savoir la pêche alimentaire, sociale et rituelle, une pêche qui est un droit autochtone établi par les tribunaux de la Colombie-Britannique. Et nous avons reconnu que ce droit devrait exister dans l’ensemble du pays, que les groupes autochtones devraient pouvoir pêcher pour satisfaire leurs besoins alimentaires, sociaux et rituels et qu’il s’agit d’un droit commercial communautaire. Ce droit existe sur toutes les côtes.
L’autre grande différence, c’est que sur la côte Est, c’est-à-dire dans les provinces maritimes et en Gaspésie, des traités donnent à des peuples autochtones le droit de pratiquer la pêche commerciale pour assurer leur subsistance de façon convenable. Ce droit n’existe pas sur la côte du Pacifique parce que, bien entendu, aucune des nations du Pacifique n’est une nation successeur des Traités de 1760-1761 qui ont été conclus entre la Couronne et les Premières Nations des Maritimes. Il existe donc un droit commercial issu de traités qui ont été signés par 35 nations. La situation sur la côte Est diffère considérablement de celle sur la côte Ouest. Des traités ont été négociés sur la côte Ouest, et des accords de réconciliation ont conféré à des Premières Nations de la côte Ouest un accès économique à des pêches, mais la situation est très différente.
L’une des autres différences qui existent — et nous l’avons constaté sur la côte Est —, c’est que, comme je l’ai indiqué, la pêche à des fins de subsistance convenable est une pêche commerciale. Comme la ministre de l’époque l’a mentionné dans sa déclaration du 3 mars, nous nous attendons à ce que la pêche à des fins de subsistance convenable ait lieu pendant la saison commerciale, bien que certaines communautés des Premières Nations du Canada atlantique résistent à l’idée de pêcher à des fins de subsistance convenable uniquement pendant la saison commerciale.
La question de la pêche hors saison ne semble pas être un problème aussi important sur la côte Ouest, où la pêche à des fins alimentaires, sociales et rituelles et la pêche commerciale ont lieu pendant les périodes où elles sont autorisées, comme c’est le cas pour la grande majorité des activités de pêche du Canada atlantique, qu’elles soient exercées par des Premières Nations ou, bien sûr, par des pêcheurs commerciaux. Elles ont lieu pendant la saison commerciale. Des plans de pêche à des fins de subsistance convenable, par exemple, ont accordé les mêmes droits à un certain nombre de Premières Nations au cours de l’année dernière.
Le sénateur Campbell : Merci, monsieur. Vous avez répondu à ma question la deuxième fois. Je comprends mieux la situation maintenant. J’étais simplement dérouté auparavant. Je vous remercie infiniment de vos réponses, et je vous suis reconnaissant de vos explications.
La sénatrice McCallum : Je remplace la sénatrice McPhedran, et je fais savoir à tous que c’est la première fois que je participe à une séance du comité.
Je vous remercie, monsieur Forgeron, de votre exposé. Je voulais revenir sur l’un des principes clés dont vous avez parlé, à savoir la conservation et la durabilité, et les défis relationnels qui en découleront. Je pense que ces principes sont à l’origine d’une grande partie des tensions observées, qui continueront de se manifester si ces questions ne sont pas réglées.
Darlene Bernard, qui est membre de la Première Nation de Lennox Island, a fait remarquer que si des problèmes relatifs à la conservation devaient survenir, on devrait envisager premièrement d’imposer des limites à la pêche commerciale fondée sur des privilèges, et non la pêche à des fins de subsistance fondée sur les droits.
Quelle a été la plus grande cause d’inquiétude concernant la durabilité et la conservation, et comment ces inquiétudes nuisent-elles à la mise en œuvre complète de la pêche basée sur les droits, si vous tenez compte de la Loi sur les pêches et aussi de la violence qui s’est produite et qui peut certainement éclater à nouveau si les problèmes ne sont pas résolus?
M. Forgeron : La conservation est notre objectif principal en tout temps. Je dois d’abord mentionner que la pêche fondée sur les droits prime sur la pêche non fondée sur les droits. Par exemple, le MPO accorde la priorité à la pêche à des fins alimentaires, sociales et rituelles, qui est un droit autochtone reconnu, par rapport à toute forme de pêche commerciale, car elle est fondée sur des droits et non sur des privilèges.
Les différentes pêches sont gérées de différentes manières, et bon nombre d’entre elles sont fondées sur le total autorisé des captures, qui repose sur nos recherches scientifiques ou sur des quotas établis en fonction du total autorisé des captures fondé sur nos recherches scientifiques. Nos recherches nous permettent de déterminer la biomasse et permettent aux pêcheurs de pêcher à un niveau durable.
Là où les choses se compliquent un peu, c’est lorsqu’une pêche, comme celle du homard, n’est pas fondée sur le total autorisé des captures, mais plutôt sur ce que nous appelons l’effort, c’est-à-dire que vous êtes autorisé à pêcher un certain nombre de casiers pendant un certain nombre de jours au cours d’une certaine partie de l’année. La plupart de nos données scientifiques dépendent des pêches en raison de la manière dont elles sont structurées. Nous savons que, pour le moment, les stocks sont en santé. En fait, ils sont probablement en train de devenir encore plus sains, car les débarquements sont bons depuis des années.
Cependant, toute modification de la pêche doit être effectuée de manière exceptionnellement prudente, car il s’agit d’une pêche fondée principalement sur le niveau d’effort et sur des informations dépendantes de la pêche, bien que nous disposions de résultats obtenus à l’aide de différents types d’arpentage hydrographique pour étayer nos données scientifiques.
L’une des raisons pour lesquelles nous avons établi la Table ronde du partenariat scientifique sur le homard, une table ronde multilatérale composée du MPO, de l’industrie commerciale, des groupes des Premières Nations, des gouvernements provinciaux et d’universitaires, c’était pour faire en sorte que tout le monde comprenne clairement la science entourant la pêche au homard.
L’une des questions posées précédemment par l’un des sénateurs concernait le fait que nous semblons toujours parler du homard, mais ce cas s’applique-t-il à tout le reste? Oui. Dans le cas du homard, la situation est assez compliquée. C’est l’une des raisons pour lesquelles, nous partons du principe général de la conservation, en raison de la nature saine de cette pêche, et nous évitons de créer un nouvel accès et d’exercer de nouvelles pressions sur la pêche en augmentant l’accès.
C’est pourquoi, dans la déclaration du 3 mars, la ministre a affirmé que nous chercherons à faire progresser les droits de pêche à des fins de subsistance convenable en accordant un nouvel accès à nos partenaires des nations visés par des traités, mais que nous obtiendrons ce nouvel accès en réduisant l’accès détenu actuellement par l’industrie commerciale.
C’est aussi l’une des raisons pour lesquelles les saisons sont particulièrement importantes, car nous devons comprendre les données dans le temps. Nous devons comparer, pour utiliser une analogie qui n’appartient certainement pas au domaine des pêches, des pommes avec des pommes et des oranges avec des oranges.
Ce qui est pêché dans l’océan en se servant des mêmes moyens, du même nombre de casiers pendant le même nombre de jours et la même période de l’année dans le cycle de vie du homard, nous donne une série de données pour comprendre l’état du stock.
J’espère que cela répond à votre question sur la conservation. La conservation est toujours notre priorité, et en ce qui a trait aux droits et à l’accès aux possibilités de pêche, la pêche à des fins alimentaires, sociales et rituelles, par exemple — une pêche fondée sur des droits, le homard et d’autres espèces —, l’emporte sur les intérêts commerciaux.
La sénatrice McCallum : Avez-vous bon espoir que nous verrons le jour où la pêche fondée sur des droits sera entièrement autorisée?
M. Forgeron : Je vais répondre de deux façons.
Je pense qu’une autorisation complète est tout à fait possible.
Ce ne sera toutefois jamais toujours le cas, car, comme je l’ai dit plus tôt, puisque c’est une pêche fondée sur des droits qui fait partie d’un traité en vigueur, même si nous en venons à une situation où nous avons une entente ou une décision qui dit qu’en ce moment, le droit de pêcher pour en tirer une subsistance convenable est parfaitement respecté, ce ne sera que pour une période donnée.
C’est la responsabilité de la Couronne de faire en sorte que le droit est totalement respecté au fil du temps, ce qui signifie que même si nous en arrivons là à l’avenir — j’espère que ce sera le cas —, il faudrait que nous nous penchions de nouveau là-dessus de temps à autre pour nous assurer que le droit est totalement respecté en fonction des besoins des nations signataires d’un traité, des changements dans leurs communautés.
Comme je l’ai mentionné plus tôt, le ministère et le gouvernement reconnaissent que nous pouvons respecter totalement le droit pendant un moment, mais il y aura toujours un exercice à faire pour s’assurer qu’il continue de l’être au fil du temps et que cela ne cesse pas.
Le président : Merci, madame McCallum.
Nous passons maintenant à notre deuxième tour.
Le sénateur Francis : Monsieur Forgeron, l’ancienne ministre, Mme Bernadette Jordan, qui a comparu devant le comité le 15 juin 2021, s’était engagée à nous remettre tous les renseignements factuels et scientifiques utilisés par votre ministère pour continuer d’empiéter sur l’autodétermination et les droits de pêche des Mi’kmaqs, des Malécites et des Passamaquoddy. Nous n’avons malheureusement jamais reçu de réponse. J’aimerais donner suite à cette demande aujourd’hui.
De nombreuses communautés soutiennent qu’il manque de preuves et de consultations officielles depuis la décision Marshall de 1999. On craint aussi sérieusement que des justifications ne reposent pas sur la science ou des faits, mais plutôt sur des suppositions coloniales ou racistes.
Pour aider notre comité à évaluer le bien-fondé de mesures gouvernementales passées et actuelles, pourriez-vous nous fournir toutes les preuves factuelles et scientifiques utilisées par votre ministère pour empiéter sur l’autodétermination et les droits de pêche des Mi’kmaqs, des Malécites et des Passamaquoddy à des fins de conservation et ainsi de suite?
J’aimerais les obtenir le plus rapidement possible, s’il vous plaît.
M. Forgeron : Monsieur le président, puis-je demander des précisions?
Le président : Allez-y, monsieur Forgeron.
M. Forgeron : Parlez-vous des données scientifiques sur les anciennes pêches, ou y a-t-il une pêche précise pour laquelle vous aimeriez recevoir nos données scientifiques?
Le sénateur Francis : Pour toutes les pêches, s’il vous plaît. Merci.
Le président : Avez-vous une question complémentaire, monsieur Francis?
Le sénateur Francis : Oui, j’en ai une.
Pourriez-vous remettre au comité une liste de toutes les consultations officielles auprès des Mi’kmaqs, des Malécites et des Passamaquoddy que votre ministère a dirigées depuis 1999 et qui portaient précisément sur l’autorisation de la pêche pour en tirer une subsistance convenable?
M. Forgeron : Je suis certain que nous pourrons fournir une liste pour les dernières années.
Je ne sais pas si l’information que nous avons remonte aussi loin. Nous essaierons de dresser une liste aussi complète que possible.
Le sénateur Francis : Merci.
Le président : Je vous en suis reconnaissant.
Monsieur Forgeron, si je peux me permettre, nous aimerions recevoir cette information le plus tôt possible. Nous espérons déposer un rapport au Sénat d’ici le 1er juin. Plus vite nous aurons l’information, plus vite nous pourrons commencer à compiler les données, tout ce qui pourrait provenir de l’information que vous fournissez. Merci beaucoup.
M. Forgeron : Monsieur le président, je vais ajouter qu’il s’agira probablement d’une liste des discussions officielles. J’aimerais souligner que des discussions officieuses entre des nations signataires d’un traité et des membres de l’équipe du MPO ont lieu presque tous les jours.
Je vois ici mon directeur général de la région des Maritimes, Doug Wentzell, qui rend compte d’appels presque quotidiens avec des membres du KMK — si nous prenons un exemple en Nouvelle-Écosse, car c’est surtout aux gens de cette province qu’il parle — ou avec le chef des Passamaquoddy, ou d’autres chefs en Nouvelle-Écosse. Il y a également notre engagement auprès de nos partenaires des Premières Nations dans le cadre de l’Initiative des pêches commerciales intégrées de l’Atlantique, qui procure différentes sortes de soutiens, du Programme autochtone de gestion des ressources aquatiques et océaniques et des ententes de la Stratégie relative aux pêches autochtones. La liste comprendra peut-être les négociations officielles, et nous aurons besoin d’un peu de temps pour la dresser, mais nous tenterons de le faire rapidement, monsieur le président, compte tenu de votre échéancier.
Il ne s’agira toutefois que de la pointe de l’iceberg des discussions et des consultations en cours pour faire progresser les activités de pêche commerciale et de la pêche à des fins alimentaires, sociales et rituelles des Premières Nations de la côte Est.
Le président : Merci, monsieur Forgeron. Je suis impatient de recevoir ces renseignements.
Le sénateur Christmas : Avant de poser ma question, je veux faire part d’une préoccupation.
Selon la réponse précédente de M. Forgeron, les programmes de financement du MPO sont liés au droit issu d’un traité. À ma connaissance, ces ententes sont sans préjudice. On dirait toutefois que sa réponse frôle le préjudice.
Monsieur Forgeron, comme vous le savez, la Première Nation Sipekne’katik a déposé l’année dernière une plainte auprès du comité pour l’élimination de la discrimination raciale des Nations unies.
Je crois comprendre que le comité des Nations unies veut une réponse du Canada au sujet de la violence et du racisme que les pêcheurs de homard mi’kmaqs ont subis lorsqu’ils ont tenté de faire respecter leur droit de pêche issu d’un traité.
Si je ne m’abuse, le Canada a répondu au comité des Nations unies, mais la réponse n’a pas été rendue publique. Pouvez-vous expliquer pourquoi on ne l’a pas montrée aux Canadiens?
M. Forgeron : Je vais devoir céder la parole à M. Ruseki pendant un moment.
À ma connaissance, le comité n’a pas encore reçu la réponse et on ne sait pas encore si elle sera rendue publique. C’est ce que j’ai cru comprendre il y a quelques jours.
Je fais remarquer que selon la convention du gouvernement du Canada, les rapports présentés à ce comité des Nations unies en guise de réponse ne sont pas rendus publics. Je vais demander à M. Ruseski s’il a de plus amples détails.
M. Ruseski : Merci de poser la question, monsieur le sénateur. Je peux confirmer qu’une réponse au comité des Nations unies a été préparée et que, à vrai dire, elle est terminée. À ma connaissance, les dirigeants de tous les ministères qui ont contribué à la réponse l’ont approuvée. De nombreux ministères et organismes ont participé à l’élaboration de la réponse.
Le responsable général de la rédaction de cette réponse est Patrimoine canadien. Je crois comprendre que nous attendons son dernier feu vert. La réponse sera ensuite envoyée à Affaires mondiales Canada qui la fera parvenir au comité.
Je peux aussi confirmer ce que M. Forgeron a dit, à savoir qu’on n’a pas encore décidé si cette réponse sera rendue publique ou non, et la convention consiste à ne pas rendre publiques ce genre de réponses.
Le sénateur Christmas : Je n’ai pas d’autre question, monsieur le président, mais je serais très reconnaissant si le comité envisageait une demande d’accès à la réponse présentée aux Nations unies.
Le président : Nous pouvons en discuter, monsieur Christmas, et faire un suivi.
Les sénateurs ne semblent pas avoir d’autres questions. Je tiens à remercier chacun de nos témoins d’avoir pris le temps de comparaître devant nous aujourd’hui. C’était une discussion intéressante et une séance fructueuse. Je suis certain que notre réunion de ce matin se traduira par d’autres questions. J’invite les sénateurs à communiquer avec les fonctionnaires et à faire un suivi s’ils ont d’autres questions après les discussions que nous venons d’avoir.
Honorables sénateurs, j’aimerais régler une question d’ordre administratif. J’aimerais qu’un sénateur propose la motion suivante :
Que chaque membre du comité soit autorisé à être accompagné d’un membre de son personnel aux séances à huis clos, à moins que le comité en décide autrement.
Le sénateur Cormier : Je le propose.
Le président : C’est proposé par le sénateur Cormier et appuyé par le sénateur Quinn. Si vous vous opposez à la motion, veuillez dire « non ».
La motion est adoptée.
Je remercie encore une fois les témoins du temps qu’ils nous ont donné ce matin. À moins que quelqu’un s’y oppose, nous allons poursuivre à huis clos.
(La séance se poursuit à huis clos.)