LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES PÊCHES ET DES OCÉANS
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le jeudi 20 octobre 2022
Le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans se réunit aujourd’hui, à 9 h 4 (HE), avec vidéoconférence, pour examiner pour en faire rapport les populations de phoques au Canada ainsi que leurs impacts sur les pêches au Canada.
Le sénateur Fabian Manning (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Honorables sénateurs, je suis Fabian Manning, sénateur de Terre-Neuve-et-Labrador, et j’ai le plaisir de présider cette réunion ce matin.
Aujourd’hui, nous tenons une réunion du Comité sénatorial permanent des pêches et des océans.
Au cas où des difficultés techniques se présenteraient, notamment en ce qui concerne l’interprétation, veuillez en informer le président ou la greffière, et nous nous efforcerons de résoudre le problème.
J’aimerais prendre quelques instants pour demander aux membres du comité qui sont ici avec moi ce matin de se présenter.
Le sénateur Ravalia : Mohamed-Iqbal Ravalia, de Terre-Neuve-et-Labrador.
Le sénateur Kutcher : Stan Kutcher, de la Nouvelle-Écosse.
La sénatrice Cordy : Jane Cordy, de la Nouvelle-Écosse.
Le sénateur Francis : Brian Francis, de l’Île-du-Prince-Édouard.
La sénatrice Busson : Bev Busson, de la Colombie-Britannique.
Le sénateur Quinn : Jim Quinn, du Nouveau-Brunswick.
Le président : Merci, sénateurs.
Le 4 octobre 2022, le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans a été autorisé à examiner, pour en faire rapport, les populations de phoques au Canada ainsi que leurs impacts sur les pêches au Canada. Aujourd’hui, dans le cadre de ce mandat, le comité entendra les membres du Groupe de travail sur la science des phoques de l’Atlantique.
Nous avons le plaisir d’accueillir Robert Hardy, consultant en pêche; Kris Vascotto, directeur général, Atlantic Groundfish Council; Ginny Boudreau, directrice générale, Guysborough County Inshore Fishermen’s Association; et Laura Ramsay, agente de recherche et de liaison, Prince Edward Island Fishermen’s Association.
Au nom des membres du comité, je vous remercie de vous joindre à nous aujourd’hui. Je sais que les témoins ont des déclarations liminaires. Après vos exposés, je suis certain que les membres du comité auront de nombreuses questions pour vous.
Kris Vascotto, directeur général, Atlantic Groundfish Council :
Merci de l’invitation à assister à cette séance importante.
Comme vous le savez sans doute, la population de phoques dans le Canada atlantique fait l’objet de nombreux débats. Les pêcheurs et les intervenants ont souvent une perspective radicalement différente du rôle des troupeaux de phoques de celle présentée par les responsables scientifiques du ministère. C’est en raison de ces différences que le Groupe de travail sur la science des phoques de l’Atlantique a été mis sur pied.
Le mandat de l’équipe était clair : discuter des priorités et des activités du programme des sciences concernant les phoques du ministère des Pêches et des Océans, ou MPO, commenter la façon dont l’industrie peut être incluse dans la collecte de données pour appuyer la science des phoques et explorer comment les résultats du MPO pourraient être mieux communiqués à l’industrie de la pêche. Ces objectifs ont été atteints dans le rapport final fourni par l’équipe.
Nous devons maintenant demander quelle sera la suite des choses. Des mesures ont été prises en lien avec une recommandation, mais il y a une longue liste d’autres mesures tout aussi importantes — voire plus importantes — qui exigent qu’on y porte attention.
Je voudrais souligner un élément que j’ai relevé comme étant incroyablement important pour assurer une compréhension exhaustive de l’incidence des phoques du Groenland et des phoques gris dans l’écosystème marin.
Les estimations de la consommation mondiale pour le troupeau de phoques du Groenland sont fondées sur des données relatives au régime alimentaire obtenues à partir d’échantillons d’estomac prélevés généralement dans des zones côtières situées bien au-delà de la distribution centrale du troupeau en mer. En fait, les seules données sur le régime alimentaire de la partie située en mer du stock proviennent d’échantillons prélevés au milieu des années 2000, lorsque la structure de la communauté de poissons dans ces zones extracôtières était extrêmement différente de celle d’aujourd’hui. L’extrapolation de données sur le régime alimentaire non représentatives pour représenter l’ensemble de la série chronologique et du troupeau est inappropriée et potentiellement trompeuse. Lorsque des incohérences aussi flagrantes sont relevées, les représentants du ministère devraient exprimer cette incertitude plutôt que de tirer des conclusions fermes qui ne sont pas fondées sur les informations et les données fournies.
De même, nous devons accepter que les espèces marines existent en quantités très différentes, ce qui signifie que l’ampleur de l’incidence sur une espèce doit être considérée sur une base individuelle. Si le saumon de l’Atlantique est consommé par une poignée de phoques résidant dans une rivière, cela ne sera jamais détecté dans les études actuelles sur le régime alimentaire, ce qui sous-estime l’incidence de cette consommation, qui peut avoir de profondes répercussions sur cette population locale de saumon. Ce facteur doit être pris en considération dans la collecte et l’interprétation des données.
De meilleures données sur la répartition, le régime alimentaire et la consommation aideront à déterminer la productivité actuelle de nos stocks de poissons en fonction du régime actuel de prédation, ce qui est nécessaire pour assurer la durabilité des dispositions relatives aux stocks de poissons et pour comprendre avec confiance les cibles de reconstitution de nos stocks de poissons marins. Ainsi, nos cibles en matière de population resteront réalistes et réalisables et refléteront la productivité de l’environnement marin actuel.
Nos membres sont très préoccupés par les effets des phoques sur la productivité de base de nos populations de poissons et de fruits de mer, et il y a toujours un décalage entre les données présentées par les scientifiques du MPO et les convictions de l’industrie à ce sujet. Il est extrêmement important de remédier à ce décalage pour préserver la confiance à l’égard des sciences et du système de gestion des pêches du Canada.
Je vous remercie encore une fois de m’avoir donné l’occasion de m’exprimer sur ce sujet.
Le président : Merci.
Ginny Boudreau, directrice générale, Guysborough County Inshore Fishermen’s Association : Bonjour à tous. Je suis très reconnaissante de l’occasion qui m’est donnée de prendre la parole aujourd’hui.
J’aimerais parler brièvement des activités scientifiques du MPO, plus précisément des priorités en matière de recherche scientifique. Dans l’annexe 4 du Rapport du groupe de travail sur la science des phoques de l’Atlantique — où sont résumées les soumissions reçues par écrit —, on peut lire comme message clé numéro un, qui est aussi l’une des neuf recommandations :
Le MPO devrait axer ses recherches sur les phoques afin de déterminer les habitudes d’alimentation et les taux de consommation des phoques et d’intégrer ces résultats aux évaluations scientifiques des stocks [...]
Et j’ajouterai que les résultats devraient être intégrés aux plans de rétablissement des espèces et aux plans de gestion intégrée des pêches.
L’absence d’ensembles cohérents de données recueillies en temps réel sur place dans l’ensemble de l’aire de répartition des phoques gris et des phoques du Groenland et l’absence d’échantillonnage tout au long de l’année se sont soldées par des pertes économiques plus importantes pour nos pêcheurs et nos communautés, ainsi que par des réductions plus importantes de nos populations d’espèces de poissons, en particulier celles qui sont en mode de rétablissement.
Le biologiste des phoques n’a pas fait de déclaration sur le régime alimentaire, la prédation, la concurrence dans le réseau alimentaire et les autres effets sur l’écosystème de l’explosion des populations de phoques dans tout le Canada atlantique. Par conséquent, les évaluations des stocks ne tiennent pas compte de leurs effets et les plans de rétablissement de l’espèce ne tiennent pas compte de leurs facteurs de mortalité.
Les biologistes spécialistes des phoques devraient disposer de toutes les ressources possibles, en partenariat avec nos collectivités et notre industrie de la pêche, pour mener une étude complète sur le régime alimentaire des phoques tout au long de l’année, et pas seulement lorsqu’ils mettent bas ou se trouvent sur la glace ou sur l’île de Sable.
Le phoque gris et le phoque du Groenland ne sont pas menacés, en danger ou en voie de disparition. Nous observons ici, dans l’est du plateau néo-écossais, et ce, jusqu’aux côtes de la Nouvelle-Écosse, le nombre sans cesse croissant de grands requins blancs qui se nourrissent de plus en plus de ces phoques. Ce n’était pas le cas par le passé.
Les gouvernements fédéral et provinciaux ont un rôle énorme à jouer dans la protection d’une ressource culturelle et économique canadienne exploitée de manière durable et sans cruauté. Il faut agir, soutenir et promouvoir cette abondante ressource.
Sur plus de 30 ans, nous avons accompli deux choses : nous sommes devenus des experts du dénombrement des phoques, et nous sommes devenus des experts quand il s’agit de parler des phoques.
Ce groupe de travail avait neuf recommandations qui nécessitaient la prise de mesures. J’ai le sentiment que le Sommet sur les phoques ne débouchera pas assez rapidement sur les mesures dont nous avons besoin et que nous continuerons simplement de parler des phoques et, bien sûr, de les dénombrer.
Je me réjouis à l’idée de poursuivre les discussions sur ces sujets et je vous remercie encore une fois de votre temps aujourd’hui.
Le président : Merci, madame Boudreau.
Laura Ramsay, agente de recherche et de liaison, Prince Edward Island Fishermen’s Association : Je vous remercie de nous avoir invités et de me permettre d’intervenir ce matin, un peu à la dernière minute. Je n’ai rien d’aussi bien préparé que M. Vascotto ou Mme Boudreau. Je pense qu’ils ont très bien formulé leurs messages.
Le rapport reprend une grande partie de ce que notre groupe de travail évoque depuis deux ou trois ans. J’ajouterai à ce que Mme Boudreau a dit au sujet du passage à l’action que bon nombre de nos membres discutent de cette question depuis des années au sein de divers comités consultatifs du MPO, notamment, le Comité consultatif du poisson de fond, le Comité consultatif des petits pélagiques, le Comité consultatif du maquereau de l’Atlantique et ainsi de suite. On soulève souvent la question des incidences sur ces espèces. Où va l’information à partir de là? Où vont ces observations? Essentiellement, elles disparaissent. Il n’y a aucune suite à cela. En ce qui concerne le sud du golfe, en particulier — et nous parlons de la morue de l’Atlantique —, il est important de souligner que nous faisons des progrès en ce qui concerne les effets des phoques. Mais que se passe-t-il ensuite?
Depuis 2019, des preuves scientifiques ont été publiées sur la nécessité de réduire de 65 % la population de phoques pour maintenir les niveaux de morue que nous connaissons actuellement. Il faudrait une réduction supérieure à 65 % pour constater une quelconque amélioration. Pourtant, nous en sommes toujours au rétablissement de ce stock et nous n’avons pas encore établi de plan définitif pour régler le problème de ce poisson de fond dans le sud du golfe.
Pour un petit nombre d’espèces de poissons, nous avons fourni certaines de ces données probantes, mais où allons-nous à partir de là? Comment les gestionnaires traitent-ils ces données? Comment les intégrer à la science sur les phoques et aux priorités scientifiques qui sont mises de l’avant? Nous devons nous assurer que l’information que nous recueillons subsiste, qu’elle est utile et qu’elle est utilisée judicieusement.
Merci beaucoup. Je me réjouis à l’idée de la discussion d’aujourd’hui.
Le président : Merci, madame Ramsay.
Robert Hardy, consultant en pêche, à titre personnel : Bonjour, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité sénatorial permanent des pêches et des océans et autres témoins. Je suis heureux d’avoir l’occasion de parler des sujets les plus importants en matière de sciences halieutiques : la prédation par les phoques et son incidence sur les pêches de l’Est, de l’Ouest et de l’Arctique du Canada.
Cette année marque le 30e anniversaire de la fermeture de la pêche à la morue dans le Nord. Autrefois la plus grande pêche du monde, elle a été fermée en juillet 1992, ce qui a causé le plus important licenciement de l’histoire du Canada. Après trois décennies de moratoire, de règlements de pêche imposés et de recherche scientifique continuelle, la morue du Nord et les autres pêches ne représentent plus qu’une fraction de ce qu’elles étaient auparavant. Les dernières recherches du MPO indiquent que les stocks de morue et d’autres pêches demeurent critiques et ne se rétablissent pas vraiment.
Depuis de nombreuses années, l’industrie de la pêche et le public estiment que cette situation pourrait être attribuable aux populations record de phoques et à la prédation, alors que les scientifiques du MPO sont réticents à admettre les effets des phoques sur les stocks de poissons, par exemple la morue de l’Atlantique, le capelan, le maquereau de l’Atlantique ou le saumon des côtes Ouest et Est. Au lieu de cela, le MPO continue de mépriser et d’ignorer les preuves fournies par les pêcheurs, les associations de l’industrie et la science des phoques d’autres nations de pêche de l’Atlantique Nord, des pays dont les populations de phoques et de poissons sont les mêmes que les nôtres.
Les répercussions des pinnipèdes sur les pêcheries font l’objet de nombreux commentaires à l’échelle internationale. Des pays comme la Norvège, l’Islande, les États-Unis, les pays baltes et la Scandinavie reconnaissent les effets des phoques. Tous ces pays comptent moins d’espèces de phoques que le Canada et la plupart d’entre eux ne comptent que quelques centaines de milliers d’animaux par rapport à notre population combinée qui est estimée à 10 millions.
En janvier 2022, le MPO a fourni des données sur les taux de consommation quotidienne des phoques du Groenland, soit 3 % du poids corporel — environ 3 kilogrammes par jour — alors que les données des scientifiques norvégiens indiquent des taux plus élevés qui peuvent se situer entre 7 et 9 kilogrammes par jour. On ne peut ignorer l’énorme différence qu’on obtient pour 7 600 000 phoques du Groenland.
En 1986 et en 1995, la Norvège a connu un déclin important de toutes ses ressources halieutiques. Les scientifiques ont parlé d’une invasion de phoques du Groenland. Les gestionnaires des pêches du Canada n’ont pas procédé à un examen similaire de l’épuisement de nos pêches jusqu’en 1992.
J’ai inclus quelques graphiques que vous avez tous, je crois. Ils illustrent la façon dont les stocks de poissons en Norvège se sont appauvris. En plus de cela, les scientifiques norvégiens parlent d’une invasion de phoques. Un autre graphique montre notre propre production de morue de l’Atlantique. Vous pouvez voir qu’elle a chuté au début des années 1990 et qu’elle n’a pas changé à ce jour. Pourtant, personne ne conclut aux effets que peuvent avoir les phoques.
Plus récemment, après le dépôt du Rapport du groupe de travail sur la science des phoques de l’Atlantique, il a été question d’un sommet ou d’un forum sur les phoques. Il y a eu beaucoup trop d’études, de comités et de forums sur les phoques, mais aucune action réelle. Il existe de nombreuses autres recommandations du Groupe de travail sur la science des phoques de l’Atlantique qui concernent l’amélioration de l’échantillonnage du régime alimentaire, l’analyse de la répartition spatiale de l’ensemble de l’habitat du phoque, une plus grande participation des pêcheurs aux programmes scientifiques et l’importante analyse des phoques de rivière. Ces activités scientifiques recommandées devraient être mises en œuvre immédiatement.
Je vous citerai, en guise de conclusion, les propos d’un scientifique chevronné du MPO :
Depuis des années, on dit aux pêcheurs que c’est la pêche qui fait fluctuer les populations [...] Le MPO gère les pêcheurs, et non les poissons; il est donc tout à fait normal que les pêcheurs considèrent les phoques comme une pêche compétitive.
Il a poursuivi en parlant de l’envie du prédateur. De mon point de vue, la situation actuelle des pêches ou du programme scientifique du Canada ne suscite aucune envie.
Je vous remercie de votre temps précieux. J’ai hâte de répondre aux questions et de vous faire part de toute information utile.
Le président : Je remercie nos témoins pour leurs déclarations liminaires. Il ne fait aucun doute dans mon esprit que vous avez suscité quelques questions chez les sénateurs.
La sénatrice Busson : Ma question s’adresse à M. Hardy, s’il le veut bien, et n’importe qui d’autre est invité à intervenir.
Vous avez déclaré, monsieur Hardy, au sujet du Sommet sur les phoques et d’un certain nombre d’autres initiatives, qu’il y a eu beaucoup d’études, mais pas d’action. Nous espérons ne pas figurer sur cette liste avec l’étude que nous menons.
Je trouve surprenante et troublante votre affirmation selon laquelle le MPO semble manifester du mépris concernant les effets des pinnipèdes. Aujourd’hui, nous parlons tout particulièrement des effets du phoque gris et du phoque du Groenland sur les stocks de poissons. Vous parlez de la côte Est. Je viens de la Colombie-Britannique, et nous sommes préoccupés par le saumon et d’autres stocks sur la côte Ouest également.
Avez-vous une opinion sur ce qui est à l’origine de cette divergence de données ou d’opinions quant aux effets de la population de phoques? Vous avez déclaré que des pays comme la Norvège ont des données qui vont dans une direction complètement différente, et vous dites que le MPO n’en tient pas compte. Pourriez-vous nous donner plus de détails à ce sujet, en fonction de votre opinion professionnelle?
M. Hardy : Je vais essayer de répondre, et les autres témoins pourront intervenir ensuite.
Pendant nos discussions au sein du Groupe de travail sur la science des phoques de l’Atlantique, c’est le terme « méprisant » qui revenait. C’est ce que chaque membre du groupe de travail a vécu, je pense, lors des réunions et des diverses interactions avec le MPO au fil des ans.
En ce qui concerne Terre-Neuve, lors des réunions des divers comités mis sur pied pour les différentes espèces pêchées à Terre-Neuve — qu’il s’agisse du capelan, du maquereau ou du crabe —, les pêcheurs soulèvent souvent la question des effets des phoques. Il est arrivé que les commentaires en ce sens soient si nombreux que le gestionnaire du MPO responsable de la réunion en question a menacé de mettre fin à la réunion s’ils n’arrêtaient pas de parler des phoques, étant donné qu’il ne s’agissait pas d’une réunion sur les phoques.
Personnellement, j’ai assisté à une séance d’information technique sur la morue du Nord, en 2019, à St. John’s, et la salle était remplie de personnes de l’industrie et du MPO. Je pense que M. Vascotto était peut-être présent à cette réunion. Au moins six personnes avaient de nombreuses années d’expérience, dont certaines avaient plus de 30 ans d’expérience dans l’industrie.
Je vais vous donner quelques exemples. Le syndicat des pêcheurs a pris la parole. Trois des plus grandes entreprises de pêche ont pris la parole. Le conseil de la pêche côtière du poisson de fond a pris la parole. Des représentants de la pêche du Nord ont aussi pris la parole. Ils ont tous dit qu’ils croyaient que le MPO devait examiner de plus près les effets des phoques, et particulièrement des phoques du Groenland, sur la morue du Nord. Je vous le dis ici même, et M. Vascotto peut hocher la tête si j’ai raison. La réponse des scientifiques du MPO après ces exposés a été la suivante : « D’après nos constatations, les phoques n’ont pas d’effets sur la morue du Nord. »
Cela n’a rien d’imaginaire; c’est bien réel. Le problème existe depuis des années. Si vous examinez tous les rapports du MPO dans le Canada atlantique, sauf celui de Doug Swain sur le phoque gris et ses effets sur la morue du golfe, ceux qui établissent une corrélation directe entre la prédation des phoques et les stocks actuels de poissons sont rares, voire inexistants.
Je vais laisser les autres intervenir s’ils le souhaitent.
M. Vascotto : Je vous remercie de votre question. Elle est intéressante.
Il existe également des différences régionales au sein du ministère. Dans le sud du golfe, on a beaucoup parlé de M. Doug Swain, qui s’est penché sur le stock de morue du Sud du golfe et qui l’a examiné de très près. Il a déclaré que nous assistions à une augmentation incroyable de la mortalité naturelle, laquelle ne peut être liée à rien d’autre qu’au troupeau de phoques en pleine expansion. Si vous allez, disons, autour de la pointe, jusqu’au sud-ouest de la Nouvelle-Écosse, nous parlons de quelque chose comme la morue de 4X ou de 5Y, et nous constatons des hausses très comparables de la mortalité naturelle dans la production de poissons avant même qu’ils puissent arriver quelque part. Et ce n’est pas la pêche qui a fait cela, c’est un autre facteur. On a émis l’hypothèse qu’il s’agit probablement d’un effet de prédation et que les phoques pourraient être en cause. Puis, dans d’autres régions du ministère, on refuse d’envisager la possibilité de tels effets et on se fie à certains éléments de preuve qui ne soutiennent pas nécessairement les conclusions soulevées.
Il y a donc apparemment une différence régionale dans la façon dont cela est examiné. Ce qui est clair, c’est que chacune des évaluations de stocks dont nous parlons démontre une augmentation significative de la mortalité naturelle qui n’est pas attribuable à la pêche et qui empêche les stocks de se reconstituer. Cela semble souvent coïncider avec l’expansion des troupeaux de phoques.
Certaines personnes sont prêtes à établir fermement ce lien, et d’autres essaient de trouver des raisons pour lesquelles ce n’est pas le cas. C’est ce qui crée cette divergence.
Par exemple, M. Hardy a mentionné le troupeau de phoques du Groenland. En hiver, la plus grande partie du troupeau de phoques du Groenland se trouve principalement dans les zones extracôtières qui se trouvent être également l’aire d’hivernage de plusieurs des autres stocks. La zone de Mme Boudreau est l’endroit où les phoques croisent certaines de leurs pêches pélagiques, ce qui empêche ces animaux de passer. Il ne s’agit donc pas d’un effet de la pêche, mais on semble ne pas vouloir essayer de créer un lien avec ce qui pourrait être une autre cause. En regardant autour de nous, nous constatons que la plupart des preuves irréfutables sont liées aux populations de pinnipèdes.
Comme je l’ai dit, il y a une grande différence entre les régions. Il y a une différence sur le plan scientifique, et il s’agit simplement d’avoir la volonté d’établir ce lien et de considérer ce lien entre les deux.
Merci de m’avoir donné l’occasion de répondre.
Le sénateur Quinn : Je remercie nos témoins de leur participation. J’aimerais poursuivre dans la même veine que la sénatrice Busson.
Des représentants du ministère sont venus témoigner la semaine dernière. Ils ont parlé de divers autres facteurs qui influent sur la population de poissons, d’autres prédateurs, si vous voulez, comme les oiseaux et les baleines, etc. Ils ont semblé souligner l’effet des 7,6 millions de phoques en fonction de la quantité de poisson qu’ils consomment, de sorte que je trouve très intéressant votre commentaire de ce matin.
Je vais dire que les scientifiques du ministère des Pêches et des Océans sont excellents et qu’ils travaillent au sein de ce ministère. Je me demande cependant si leur travail est souvent pris en compte par ceux qui se chargent de l’application, lorsqu’ils entament des discussions plus approfondies sur les phoques et sur les effets qu’ils peuvent avoir ou ne pas avoir, et si le bon travail des scientifiques est considéré d’une manière différente : il n’est pas nécessairement ignoré, mais il est peut‑être moins considéré dans la prise de décisions et les discussions.
J’aimerais avoir votre avis à ce sujet. Dans quelle mesure les diverses associations de la communauté de la pêche font-elles de la recherche? Serait-il préférable que le ministère des Pêches et des Océans affecte une partie de son budget scientifique à ces entités du secteur privé, que ces travaux soient soumis au ministre et que ce dernier demande à ses fonctionnaires d’en tenir compte afin d’avoir une vision plus équilibrée?
J’essaie d’être modéré ici en disant cela. J’aimerais savoir si vous avez des commentaires ou des observations à ce sujet. La question s’adresse à n’importe lequel des témoins, mais j’aimerais commencer par Mme Boudreau.
Mme Boudreau : Comme je représente une association de pêcheurs, je vais tenter de répondre à la question pour vous, sénateur. Je vous remercie de la poser. Il n’est pas facile, en fait, pour nous de participer. Il semble que, politiquement, il soit difficile de discuter des populations de phoques et de leur incidence sur nos espèces de poissons. Il est difficile pour nos politiciens d’avoir cette discussion, et il semble que cela se répercute sur les biologistes spécialistes des phoques. Il est impossible à l’industrie de même entreprendre une discussion avec nos biologistes spécialistes de ces espèces sur l’incidence qu’a cette population en pleine croissance sur elles.
Pourquoi en est-il ainsi? Pourquoi personne ne veut-il en parler? Pourquoi les biologistes spécialistes des phoques ne souhaitent-ils pas obtenir plus d’information sur ce mammifère et son incidence sur la chaîne alimentaire et les déséquilibres qu’il provoque? Vous demandez si les associations de pêcheurs pourraient prendre part à la recherche. Nous demandons depuis de nombreuses années qu’on nous permette de prendre part à la recherche sur la prédation exercée par les phoques — et même à en prendre l’initiative —, en particulier pour ce qui est des poissons de fond et des espèces pélagiques qu’on trouve ici dans l’Est de la Nouvelle-Écosse, où un moratoire sur la pêche à la morue a été imposé. Cela a déjà été reconnu par mon homologue, M. Hardy. C’est un échec. Cela fait 30 ans, et nous n’avons constaté aucune amélioration. Ce qu’on voit, c’est une population de phoques qui ne cesse de croître et à qui on a laissé déséquilibrer complètement la chaîne alimentaire et l’écosystème.
De quoi aurions-nous besoin pour participer à la recherche? Nous aurions besoin tout d’abord de la capacité de le faire, car notre capacité scientifique est très limitée. Nous faisons équipe principalement avec les biologistes de Pêches et Océans ou les universités. Nous sommes très ouverts à ces partenariats, mais on ne nous en a jamais donné la possibilité. Avant de pouvoir participer, donc, nous devrons avoir la capacité de le faire. J’ai l’impression que Pêches et Océans, en mettant sur pied le groupe de travail sur les phoques, nous a même encore fait reculer. Je ne pense pas que tout était clair entre le ministère et les biologistes à propos du mandat. Je sais fort bien qu’ils n’étaient pas contents et étaient insultés de voir des gens qui ne sont pas des scientifiques à la table — je parle pour moi; je ne suis pas une spécialiste des phoques —, mais nous avons beaucoup de connaissances et d’expérience à apporter dans ces discussions. Pensez-vous qu’ils veulent travailler avec nous maintenant, après qu’on a dit que nous dénigrions leurs recherches? Ce n’était pas l’intention. Les associations aimeraient qu’on effectue de vraies recherches sur les régimes alimentaires, et non pas du dénombrement.
Le sénateur Quinn : Je vous remercie de toute cette information. Vous pouvez facilement trouver mes antécédents sur le site Web du Sénat. J’ai travaillé de nombreuses années à Pêches et Océans. Je veux simplement que ce soit clair.
Serions-nous mieux servis si le service de la recherche scientifique au ministère devenait un organisme gouvernemental indépendant qui effectue des recherches et est probablement un peu plus libre de s’exprimer? Ils pourraient ainsi laisser les décideurs se pencher sur des données scientifiques sans qu’il y ait de lien avec le processus décisionnel.
Mme Boudreau : Je pense que le ministère et le service des sciences se sont efforcés d’y parvenir —, soit de présenter leurs données comme ne portant pas la marque d’une influence extérieure, mais c’est très difficile de le faire quand on parle d’une ressource économique qui assure la survie de nombreuses collectivités au Canada, et qui constitue l’une des principales sources alimentaires des Canadiens.
Je vois de nombreux avantages à les séparer, mais aussi de nombreux défis. Mes collègues voudront peut-être donner leur avis. Je vous remercie de la question.
Mme Ramsay : Oui, mais pas précisément au sujet de la deuxième question qui porte sur l’organisme indépendant. C’est une question très intéressante, toutefois. Je vais laisser cela aux autres membres du groupe de travail.
La première question portait sur la quantité de travail réalisé par les associations. Je tenais à mentionner que nous participons à de nombreux partenariats de recherche avec le ministère, et nous avons réussi à créer une vraie possibilité de collectes de données. Les populations de homards sont l’une auxquelles nous avons participé activement.
Pour ce qui est des phoques, je travaille à la Prince Edward Island Fishermen’s Association depuis 14 ans. Au début, nous parlions des phoques et essayions de documenter le problème. Nous avons 1 200 membres, 1 200 pêcheurs qui sont sur l’eau. Ils observent ce qui se passe tous les jours. Ils voient les changements dans le comportement, l’aire de répartition et la taille des troupeaux de phoques, de même que les répercussions sur les autres pêches. En travaillant avec le ministère, nous avons fait une tentative en ajoutant ces données sur les fiches techniques de Pêches et Océans. Nous nous sommes dit qu’il serait bon d’ajouter ces observations. Alors pendant une dizaine d’années, nous avons ajouté des observations, par exemple, les phoques ont mangé les appâts, les phoques sont arrivés, etc.
Aujourd’hui, quand on regarde ces observations, comme il ne s’agissait que de commentaires, on se rend compte qu’elles ont été en quelque sorte mises de côté. Je pense donc que les possibilités sont là. Nous avons eu d’autres projets et d’autres collaborations qui ont très bien fonctionné. Nous voulons travailler ensemble, mais il y a de toute évidence un fossé entre, d’une part, la science, la gestion et tous les enjeux qui entourent les phoques, et d’autre part, la communauté des pêcheurs. Il faut qu’on s’emploie à réunir les deux et à trouver des façons de travailler ensemble. Nous devons passer à la prochaine étape.
Le président : Je vous remercie, madame Ramsay.
Le sénateur Kutcher : Je vais mettre mon vieux chapeau de scientifique ici. Il existe diverses techniques statistiques et modélisations complexes qui peuvent nous aider à établir les répercussions proportionnelles et les multiples facteurs sur une question précise. Elles sont constamment utilisées en climatologie, alors elles doivent pouvoir servir pour les populations de phoques.
Je vais poser une question plutôt difficile à tous les témoins. Selon vous, le ministère de Pêches et Océans possède-t-il la capacité scientifique et les compétences requises pour effectuer le type de recherches qui s’impose? Dans la négative, que peut‑on faire pour y remédier? Dans l’affirmative, pourquoi croyez‑vous que les problèmes que vous avez soulevés n’ont pas été entendus?
M. Hardy : Pour ajouter à ce que Mme Ramsay et Mme Boudreau ont dit, oui, il y a un fossé entre la communauté scientifique et l’industrie. Une des recommandations dans notre rapport consistait à accroître la participation de l’industrie. Comme Mme Boudreau l’a mentionné, ses membres peuvent recueillir rapidement beaucoup plus d’information qu’un petit groupe de scientifiques. L’information peut être recueillie sur une base quotidienne quand les pêcheurs sont sur l’eau.
Dans le cadre des délibérations du groupe de travail, nous avons eu des exposés de représentants de la Norvège, et nous avons pu constater qu’il y a différentes approches en matière scientifique. Monsieur Vascotto, vous êtes sans doute en mesure de répondre à la question. Voulez-vous vous lancer?
M. Vascotto : Je vous remercie de me donner l’occasion d’ajouter mon grain de sel sur cette question. Ce n’est jamais facile. J’ai séparé cela en deux parties en prenant des notes pendant que M. Hardy répondait.
Pour être en mesure de faire des suppositions et des liens et de parler de multiples facteurs, on a besoin de données solides pour appuyer le tout. C’est l’un des éléments dont nous parlons qui semble faire défaut. Prenons les phoques du Groenland. Nous savons qu’ils effectuent leur migration saisonnière habituelle du nord au sud. Toutefois, nous constatons que cela change. Ils utilisent davantage les eaux douces et y résident plus longtemps, ce qui vient modifier notre façon d’estimer la consommation.
Parallèlement, nous avons une idée brute de ce que ces animaux mangent d’un côté de leur habitat, mais pas de l’autre côté. Il en va de même pour les phoques gris. Selon certaines preuves qui ont été présentées, ils utiliseraient peu la baie de Fundy. J’étais à l’île Brier en fin de semaine dernière et j’ai compté 40 gros phoques mâles adultes sur la plage de Pond Cove. Nous n’avons pas cette information dans le monde scientifique — et c’est le point soulevé par Mme Boudreau et Mme Ramsay —, mais l’information est recueillie. Il faut simplement l’inclure dans l’évaluation des répercussions générales de la bête.
Au sujet des compétences de la communauté scientifique au sein de Pêches et Océans, des investissements importants ont été faits au cours des 5 à 10 dernières années. Beaucoup de nouveaux employés ont été embauchés, mais comme vous le savez fort bien, ce ne sont pas des compétences que l’on acquiert du jour au lendemain. Il faut du temps pour devenir compétents dans la préparation de ces évaluations, et la volonté de trouver des réponses aux questions qui sont posées.
Nous devons composer en quelque sorte avec une insuffisance de renseignements et des conclusions qui vont un peu au-delà de l’information disponible pour les appuyer, mais le ministère possède assurément l’expertise pour le faire, à condition que les investissements nécessaires soient faits pour recueillir les données manquantes pour tirer les bonnes conclusions.
N’hésitez pas à demander plus d’information si vous le souhaitez, mais je vous remercie de m’avoir donné l’occasion de vous donner mon avis.
Le sénateur Kutcher : Je vous remercie beaucoup. Ces renseignements sont très utiles. Si je vous ai bien compris, nous savons que vous n’êtes pas en mesure de procéder à des modélisations sophistiquées si vous n’avez pas les intrants dont vous avez besoin pour le faire. Si j’ai bien compris ce que vous dites, une des pièces manquantes, c’est le degré et la diversité des intrants qui sont nécessaires pour faire ce travail, car les données qui sont recueillies à l’heure actuelle par les pêcheurs ne semblent pas avoir d’incidence sur le travail qui est fait. Ai-je bien compris?
M. Vascotto : C’est exact. Si la communauté des pêcheurs doit fournir de l’information pour appuyer les travaux de Pêches et Océans, nous devons savoir que l’information fournie est suffisamment rigoureuse et qu’elle sera utilisée.
Le fait que Mme Ramsay demande à ses membres de recueillir de l’information et de l’ajouter en commentaire n’est pas très productif. Nous devons connaître les questions qui se posent et comment les données s’y rapportent pour faire un bon travail. Je pense que vous avez bien cerné le problème.
Le sénateur Francis : Je remercie les témoins de leur présence. La question s’adresse à qui veut bien y répondre.
À votre avis, les connaissances scientifiques et les savoirs autochtones sont-ils utilisés par Pêches et Océans pour guider leurs décisions au sujet de la gestion des phoques et de l’évolution de la situation? De plus, comment les Autochtones ont-ils participé à votre groupe de travail, et comment ont-ils contribué à l’élaboration de votre rapport?
M. Hardy : L’équipe comprenait un membre autochtone, Jamie Snook, de Goose Bay, de la communauté du Nunatsiavut. M. Snook a joué un rôle important pour fournir l’information au sujet des gens qu’il représente. Je suis moi aussi Autochtone. Je suis membre de la communauté de NunatuKavut dans le Sud du Labrador.
Au cours des 10 dernières années, je pense que Pêches et Océans, tout comme d’autres organismes gouvernementaux, interagit davantage avec la communauté autochtone et leur donne plus d’occasions d’avoir voix au chapitre, et dans ce cas, dans la gestion des pêches. Peut-on faire plus? Bien sûr.
Au sujet des dernières questions, il s’agit d’une chose que l’on voulait voir — pas seulement de la part de la communauté autochtone, mais aussi de celle des pêcheurs — soit mettre à profit les ressources présentes pour obtenir plus d’information et plus de données, et recueillir plus d’échantillons à différentes périodes de l’année, et non pas à des périodes et à des lieux préétablis, comme c’est le cas.
Mme Boudreau : Culturellement et historiquement, nos communautés autochtones ont utilisé les différentes espèces de phoque pour tout — se vêtir, s’alimenter, assurer leur durabilité et viabilité économiques, etc. D’autres communautés côtières dans tout le Canada atlantique, et même sur les côtes de la Colombie-Britannique, ont utilisé ces espèces.
Je ne pense pas que le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux aient exploré ou été conscients de ces aspects culturel et historique, qui devraient être célébrés et encouragés. C’est une ressource importante qui pourrait assurer la subsistance de nombreuses communautés, autochtones ou non. Historiquement, les communautés autochtones ont assurément développé des outils et des plans pour la pêche.
Je ne comprends pas pourquoi le gouvernement fédéral et plus précisément Pêches et Océans n’ont pas contacté ces communautés pour mieux comprendre les populations de phoques, leurs régimes alimentaires, leurs déplacements, leur aire de répartition, et les utilisations que nous pouvons faire de ces espèces.
Je pense en outre que certaines politiques et ententes actuelles du gouvernement fédéral, comme le Règlement sur les mammifères marins, nous ont fait régresser sur la scène internationale. On croit que tous les mammifères marins doivent être protégés quand il s’agit d’une ressource. Certaines espèces marines sont une ressource que, culturellement et historiquement, nos communautés autochtones ont toujours pêchée de manière très durable.
Il faut se pencher sérieusement sur l’idée que nous nous faisons au Canada du phoque et de l’industrie du phoque et commencer à le promouvoir pour ce qu’il est, une ressource d’une grande richesse. Je vous remercie.
Le sénateur Francis : Je vous remercie de vos commentaires. Auriez-vous une liste des communautés autochtones que le groupe de travail a consultées ou avec qui il a communiqué?
Mme Boudreau : Je n’en ai pas personnellement, mais je pense qu’elles sont énumérées dans le rapport — dans les annexes. De plus, nos communautés et organismes autochtones ont fait parvenir leurs commentaires par écrit et par courriel au comité.
Je dirais que d’autres pourraient vous répondre mieux que moi. Je suis désolée de ne pas avoir cette information sous la main.
Le président : Nous allons faire du suivi auprès du groupe de travail pour obtenir l’information.
La sénatrice Cordy : Je remercie tous nos témoins. Je suis une nouvelle membre du comité des pêches, et vous nous avez fourni assurément une quantité colossale de renseignements. Vous avez aussi été très francs dans vos réponses aux questions qui ont été posées.
Monsieur Hardy, j’ai trouvé intéressant que vous souligniez que c’était le 30e anniversaire du moratoire sur la pêche à la morue et que les stocks ont à peine augmenté, voire pas du tout. Ils sont assurément restés bas, alors que la population de phoques a, à n’en pas douter, augmenté. Nous sommes nombreux à nous rappeler le discours prononcé à St. John’s, Terre-Neuve, par John Crosbie. Je n’aurais pas voulu être ministre des Pêches à cette époque, mais il avait une façon très colorée de dire les choses. Toutefois, nous sommes en 2022, et la situation n’a pas changé. La population de phoques augmente beaucoup.
L’un de vous a mentionné que les données recueillies par les pêcheurs n’ont pas d’incidence. Avons-nous les bonnes données? Madame Boudreau, vous avez dit que l’on consacrait beaucoup de temps à dénombrer les phoques, et qu’on le faisait depuis longtemps, et pourtant la population de morues n’augmente pas contrairement à celle des phoques. Obtenons-nous les bonnes données? Sont-elles complètes? J’ai entendu dire que nous n’utilisons pas les données de ceux qui sont les mieux informés sur ce qui se passe sur l’eau, les pêcheurs du Canada atlantique, et de tout le Canada d’ailleurs.
Pourriez-vous nous dire si les données que nous avons sont complètes et si nous recueillons et utilisons les bonnes données pour prendre les décisions?
Mme Boudreau : Je vous remercie de la question. Je pense que pour recueillir des ensembles de données crédibles, défendables, en particulier sur le régime alimentaire et l’aire de répartition des deux espèces de phoques, il faudrait améliorer la communication et la compréhension entre les pêcheurs qui sont sur l’eau et les scientifiques qui vont utiliser les données. Nous n’avons pas encore réussi à faire asseoir à la même table les scientifiques et l’industrie pour discuter des données dont ils ont besoin. Quelle méthodologie aimeraient-ils que nous utilisions? Peut-on en discuter?
Nous avons des suggestions à faire, mais il faut entreprendre ce dialogue. Il semble que ce soit l’obstacle le plus important. Les données qui sont recueillies jusqu’à maintenant sont celles de nos biologistes ou nos scientifiques lorsqu’ils peuvent avoir accès à la population de phoques quand elle se pointe sur l’île de Sable ou quand elle se trouve sur la glace. Nos pêcheurs sont sur l’eau à longueur d’année et dans tout le Canada atlantique. Nous voyons l’ensemble de l’aire de répartition des phoques tous les jours. Nous voyons les changements. Les phoques se pointent maintenant aux limites forestières, car il n’y a plus de place sur l’île de Sable. Ils descendent la chaîne alimentaire.
Le déplacement du troupeau de phoques gris de l’est du plateau néo-écossais vers le golfe du Saint-Laurent et le golfe du Maine est probablement le résultat direct du fait que nous n’avons rien à leur donner à manger. Ils ont mangé tout ce qu’ils pouvaient. Mais cela n’a pas été documenté. C’est donc la discussion qui doit avoir lieu avant que nous puissions nous fonder sur des ensembles de données précises et crédibles.
J’espère que cela répond à votre question.
La sénatrice Cordy : Quelqu’un d’autre aimerait-il faire des commentaires à ce sujet?
M. Hardy : Le plan d’échantillonnage du régime alimentaire des phoques du Groenland est très répétitif depuis le moratoire. On a recours aux mêmes pêcheurs aux mêmes endroits et à la même période de l’année. Dans la plupart des cas, cela se passe à la fin de l’automne et au début de l’hiver, sur la côte Est de Terre-Neuve. Les estomacs des phoques sont prélevés sur les phoques du Groenland et les pêcheurs les ramènent à terre. Dans certains cas, ces estomacs restent dans leurs bateaux ou sur les quais pendant deux mois avant d’être ramassés par le ministère des Pêches et des Océans. À cette période de l’année, on ne peut pas s’attendre à trouver beaucoup de morues ou de capelans, par exemple, et le capelan est l’une des principales espèces consommées par les phoques, mais on n’en trouve pas dans la région pendant cette période. Il s’ensuit qu’un échantillonnage côtier fait à cette époque de l’année ne révélera pas de capelans dans le régime alimentaire des phoques. Nous n’avons donc pas assez de données.
De plus, j’ai récemment vu un rapport qui décrit tous les échantillonnages d’estomacs qui ont été effectués au cours des 20 dernières années. Certains des échantillons prélevés en 2017 n’ont pas encore été analysés. Compte tenu des problèmes qui touchent nos pêches et de toutes les discussions que nous avons eues sur les phoques au fil des ans, il n’y a absolument aucune façon de justifier que des échantillons récoltés en 2017 ne soient pas encore analysés.
M. Vascotto : Quelle question posons-nous et comment pouvons-nous obtenir les bonnes données pour répondre à cette question? En ce moment, on tire des conclusions sans nécessairement avoir les renseignements appropriés pour les soutenir. M. Hardy a donné un excellent exemple de cette situation.
La majeure partie du troupeau de phoques vit ici et la même chose se produit dans l’Est du plateau néo-écossais. C’est seulement l’une de ces situations où nous tentons de veiller à ce que les bonnes questions soient posées et que les bons renseignements soient accessibles pour générer les réponses dont nous avons besoin.
La sénatrice Cordy : Je vous remercie des réponses détaillées que vous avez fournies. La semaine dernière, lorsque nous avons rencontré des représentants du ministère, ils nous ont dit qu’ils se penchaient notamment sur la question des marchés pour les produits du phoque. Quels sont les marchés pour les produits du phoque? De nombreuses personnes très en vue se sont certainement retrouvées sur la banquise, alors qu’elles n’auraient pas dû y être, et elles ont touché des phoques, ce qu’elles n’auraient pas dû faire, et elles ont ensuite prétendu que des blanchons étaient tués alors que c’est illégal. Comment se portent les marchés des produits du phoque à l’échelle mondiale? Déploie-t-on suffisamment d’efforts dans ce domaine?
M. Vascotto : Je vous remercie de votre question. Pour être tout à fait honnête, je n’ai qu’une compréhension limitée du marché des produits du phoque. Je m’en remets donc à M. Hardy à cet égard. Il est très bien informé sur le sujet, et je lui demanderais donc de répondre à cette question.
M. Hardy : La commercialisation des produits du phoque est très difficile, comme on peut l’imaginer, et je tire donc mon chapeau aux quelques personnes qui restent dans l’industrie et qui tentent d’utiliser le phoque. Je pense qu’à ce moment-ci, l’industrie et notre pays tentent de promouvoir l’utilisation complète des phoques capturés. Cela signifie qu’on tire des produits de la peau, de la graisse et de la viande.
Le commerce des peaux existe depuis environ 100 ans et il demeure viable. De nombreux pays ont toutefois imposé d’importantes restrictions commerciales à cet égard. Mme Boudreau a fait allusion à la loi sur la protection des mammifères marins des États-Unis et à d’autres mesures législatives qui empêchent l’importation de tout type de produits du phoque dans certains pays.
J’ai participé plus tôt à une conférence téléphonique au cours de laquelle les représentants de l’industrie ont affirmé que c’était l’une des choses importantes qu’il fallait faire. Non seulement le ministère des Pêches et des Océans, mais tous les ministères du gouvernement fédéral, y compris Affaires mondiales Canada, doivent soutenir et, par l’entremise de leurs partenaires commerciaux, développer et ouvrir des marchés pour le phoque. La viande de phoque est probablement la viande la plus nutritive que l’on puisse consommer. De plus, tout le monde sait que les acides gras oméga-3 produits à partir de l’huile de phoque sont les meilleurs oméga-3 possible. En effet, cette huile contient un acide gras oméga-3 supplémentaire et son pourcentage est naturellement élevé. Il n’est donc pas nécessaire de la concentrer comme les autres huiles. De plus, les vêtements fabriqués en phoque sont naturels. Ils ne sont pas en plastique, ils sont durables et probablement plus écologiques qu’un grand nombre de vêtements que nous portons aujourd’hui. Nos gouvernements, tant d’ordre provincial que fédéral, doivent discuter avec les représentants de l’industrie et trouver des marchés.
Au cours des dernières années, j’ai concentré mes efforts sur la production d’un produit alimentaire naturel qui pourrait être exporté dans les pays où les gens souffrent de la faim. Chaque année, des centaines de millions de personnes meurent de faim dans le monde, et nous avons une énorme ressource au large des deux côtes. Nous pourrions utiliser le phoque sous la forme d’une poudre de protéines nutritives sèches. Si nous faisions cela, nous aiderions la population mondiale tout en permettant à nos stocks de poissons en difficulté de se reconstituer.
La sénatrice Cordy : Lorsque John Efford était sur la Colline du Parlement, il portait sa veste en peau de phoque avec une grande fierté à chaque événement qui se tenait en hiver. Et il la portait certainement lorsqu’il allait en Europe. Je remercie tous les témoins de leurs réponses.
Le sénateur Ravalia : Je remercie nos témoins. Je suis curieux de savoir ce que vous pensez tous du Sommet sur les phoques qui se tiendra prochainement. Nous avons reçu quelques vagues renseignements sur les sujets qui seront abordés et sur les conférenciers qui prendront la parole. Un récent communiqué de presse de SaltWire indique que le gouvernement fédéral :
[...] s’engage à explorer les possibilités de développement de marchés pour les produits canadiens du phoque, tout en respectant les avis scientifiques les plus récents et en veillant à ce que la chasse aux phoques soit pratiquée de façon durable et sans cruauté.
Cela ressemble à un commentaire répétitif.
À votre avis, un sommet comme celui-ci pourrait-il aider grandement à résoudre certains des enjeux déterminants que vous avez soulevés? Dans ma collectivité, la chasse aux phoques est un élément important de notre culture. Nous avons donc subi des répercussions très réelles. Comment, selon vous, le Sommet sur les phoques pourrait-il changer la donne? S’agira-t-il seulement d’une autre inconvenance pour les gens avec le recul?
M. Hardy : Nous avons inclus le Sommet ou le forum sur les phoques, mais avec le recul, je pense que nous sommes tous d’accord pour dire que le rapport contenait des recommandations beaucoup plus importantes. Cela dit, il faut bien commencer quelque part, et je présume que le MPO se penche sur la question du sommet en ce moment. J’ai envoyé des renseignements qui rappellent qu’au cours des 30 dernières années, le gouvernement fédéral a organisé de nombreux sommets à maintes reprises, et que même si des recommandations ont été formulées lors de ces événements, aucune mesure concrète n’a été prise. Espérons que ce sera différent cette fois-ci. Nous veillerons à ce que les recommandations qui sont formulées dans le cadre du sommet soient mises en œuvre et qu’elles ne restent pas sur les tablettes.
Mme Ramsay : Je viens de recevoir une partie des renseignements sur le sommet. J’aimerais aussi en savoir davantage sur l’ordre du jour, les participants et les personnes qui prendront la parole.
J’aimerais peut-être revenir sur la recommandation no 7 de notre plan de travail, dans laquelle nous parlons d’organiser un forum. Nous en avons discuté à plusieurs reprises au sein du groupe de travail, mais l’idée générale du forum était de favoriser un environnement convivial où des discussions respectueuses et orientées vers l’action auraient lieu entre des experts de l’industrie, des chercheurs et des parties intéressées. À l’époque, l’objectif du forum était de combler les lacunes dans les données scientifiques sur les phoques. Il s’agit de toutes les choses dont nous avons parlé aujourd’hui, par exemple les espèces commerciales importantes et les stocks importants sur le plan écologique, l’amélioration de l’utilisation des renseignements de l’industrie et le recours aux évaluations et à la gestion découlant de la recherche scientifique sur les phoques.
La discussion au cours de laquelle nous avons évoqué la possibilité de nous réunir était axée sur ce type de forum et sur la nomination d’une personne indépendante à la présidence en raison de la dissension qui règne actuellement au sein du milieu scientifique. Il y a beaucoup plus de niveaux dans le sommet. Encore une fois, je ne connais pas tous les détails, mais je pense que nous avons eu une discussion initiale sur la question de nous réunir et d’avoir ces discussions, et sur la question de savoir si le sommet permettra de poursuivre les collaborations et les débats sur toutes ces questions sur une base annuelle.
J’ai parlé plus tôt des différents comités consultatifs et du fait que ces enjeux reviennent sans cesse — il y a un certain problème ou on a déterminé que les phoques avaient certaines répercussions —, mais les discussions ne dépassaient pas le cadre du comité consultatif. Nous avons donc formulé l’idée d’organiser quelque chose de différent sur une base annuelle pour veiller à ce que ces renseignements continuent d’être diffusés et que divers groupes puissent contribuer à la collecte de ces données.
Je souligne tous ces points tout en ne connaissant pas suffisamment le programme du sommet pour être en mesure de parler de la conclusion qui sera atteinte lors de cet événement.
Mme Boudreau : Il est très difficile pour l’un ou l’autre des témoins de répondre à votre question, sénateur Ravalia, car on nous a tenu à l’écart des discussions sur l’organisation du Sommet sur les phoques. À ma connaissance, aucun représentant de l’industrie, y compris les membres du groupe de travail sur les phoques, n’a été — et je déteste ce mot — consulté ou invité à donner son avis sur l’organisation du Sommet sur les phoques. Quels sont les objectifs? Quelle est la vision? Quel est le but du Sommet sur les phoques? C’était l’une de nos recommandations, mais personne, au ministère, ne nous a dit quoi que ce soit qui nous permettrait de croire que le sommet est réalisé de la manière recommandée.
Je suis désolée de ne pas pouvoir répondre à votre question de manière plus détaillée, mais nous n’avons vraiment aucun détail sur le Sommet sur les phoques. Je considère qu’il s’agit seulement du prolongement de la relation qui existait déjà entre le ministère et l’industrie au sujet de la question des phoques. Je vous remercie de votre question, car c’est une très bonne question.
Le président : Je vous remercie, madame Boudreau.
Le sénateur Ravalia : J’aimerais faire un suivi en adoptant un angle légèrement différent. J’aimerais savoir si votre organisme a établi un dialogue avec des pays qui semblent avoir particulièrement bien géré leur population de phoques, comme la Norvège et l’Islande, par exemple. Avez-vous eu des discussions avec ces pays et leurs scientifiques sur la manière dont ils gèrent leur population de phoques? Dans le cas contraire, envisageriez‑vous d’explorer cette possibilité? Je vous remercie.
M. Hardy : Je vous remercie de votre question. Lors de l’une des réunions du groupe, nous avons eu droit à une présentation d’un scientifique norvégien. Les conclusions de la communauté scientifique de ce pays étaient légèrement différentes des nôtres. Nous en avons parlé et nous avons abordé les questions de l’impact des phoques et des volumes consommés. Une chose qu’il ne faut pas oublier en ce qui concerne la Norvège, c’est que ce pays n’a pas de problème avec les phoques en ce moment. Il y a quelque deux millions de phoques du Groenland dans la mer de Barents, mais ils s’approchent rarement de la Norvège. Lors de sa présentation, nous avons eu l’occasion de poser des questions à ce scientifique. Je me souviens de lui avoir demandé si on pouvait voir des phoques depuis les côtes de la Norvège. Il a secoué la tête en disant que les Norvégiens voyaient rarement des phoques.
Lorsque le pays a connu une invasion de phoques, je lui ai demandé combien de phoques, selon lui, étaient présents après l’épuisement des stocks de poissons. Il a répondu qu’il y avait peut-être deux millions de phoques à ce moment-là.
Toutefois, dans notre cas, ici au Canada atlantique, à la fois en ce qui concerne les phoques gris et les phoques du Groenland, comme l’ont dit certains des autres témoins, il faut regarder où l’on met les pieds. Il faut faire attention à l’endroit où l’on monte sa tente dans les bois, car on pourrait la monter là où se trouvent des phoques. Personnellement, je sais que, n’importe où le long de la côte, on peut voir des phoques toute l’année. Il y a donc beaucoup plus de phoques au Canada atlantique.
Sénateur, vous avez mentionné l’Islande. La population totale combinée de phoques dans les eaux islandaises et dans les environs est inférieure à 25 000 animaux, toutes espèces confondues. L’Islande n’a donc pas de problème avec sa population de phoques.
Il y a quelques semaines, un groupe des pays baltes a organisé une conférence ou un forum sur les phoques. Plusieurs pays ont déclaré avoir un problème avec les phoques gris avec une population inférieure à 80 000 animaux. Je crois qu’à l’heure actuelle, notre population de phoques gris est de 360 000 à 400 000 animaux.
Ces pays, bien qu’ils reconnaissent l’impact des phoques et les problèmes liés à d’autres espèces de poissons, n’ont pas la même population de phoques que nous avons ici. Le Canada est un pays très calme. Nous ne nous rendons pas dans ces autres régions, par exemple sur la côte Ouest des États-Unis, qui a un gros problème avec les otaries, et de plus en plus maintenant avec les phoques gris sur la côte Est. Nous devons pourtant former des alliances avec ces autres pays et leur dire que nous avons la plus grande population de phoques et que nous avons donc un plus gros problème à cet égard ici, au Canada atlantique. Je vous remercie de votre question.
La sénatrice McPhedran : Je tiens à remercier les témoins qui sont ici aujourd’hui. J’aimerais poser une brève question de suivi sur des points qui ont été soulevés plus tôt au sujet du Sommet sur les phoques. Si je ne me trompe pas, le sommet aura lieu les 8 et 9 novembre. Je sais qu’un certain nombre de membres de notre comité aimeraient beaucoup y participer. J’aimerais poser à tous les témoins une question sur leurs communications avec le ministère des Pêches et des Océans. À votre connaissance, vos communications ont-elles atteint la ministre ou le personnel de la ministre, comme la cheffe de cabinet? Le savez-vous? Ou avez-vous surtout communiqué avec les fonctionnaires du ministère?
M. Vascotto : Je vous remercie de votre question. À bien y penser, nous avons effectivement présenté le rapport à la ministre. Il lui a été présenté lors d’une courte séance peu de temps avant d’être rendu public. Depuis, du moins de mon point de vue personnel, il n’y a eu aucune communication à ce sujet avec la ministre ou avec son personnel. Toutefois, pour le moment, je ne peux pas parler pour les autres témoins. Je crois qu’il y a eu des communications avec l’un des coprésidents du Groupe de travail sur la science des phoques de l’Atlantique — le coprésident de l’industrie, comme je l’appelle —, c’est-à-dire Glenn Blackwood. Je crois qu’il a récemment communiqué avec la ministre au sujet de sa participation au Sommet sur les phoques. Mis à part cela, à ma connaissance, il y a eu très peu d’interactions. Je vous remercie.
La sénatrice McPhedran : J’aimerais revenir aux questions qui vous ont été posées sur le déclin de la pêche à la morue et le rôle des phoques à cet égard. Est-ce que c’est parce que les phoques mangent les poissons? Dans un rapport, on expliquait que les poissons mouraient à la suite de blessures à l’abdomen; ils n’étaient pas mangés, mais mouraient quand même.
Étant donné le nombre élevé de phoques dont vous nous avez parlé ce matin, je me demande s’il y a aussi un déplacement de l’habitat des poissons. Est-ce qu’on étudie l’impact des déjections de phoque, par exemple? Quelle est la différence entre la migration et ce qui se passe actuellement avec le stock de poissons? Est-ce que la reproduction des poissons est touchée? Pourriez-vous nous parler de tout cela un peu plus en détail?
M. Hardy : Vous avez parlé de morsures à l’abdomen. Les phoques sont des animaux très intelligents. Ils ne mangent pas la partie osseuse du poisson. Ils mordent l’abdomen parce que le foie et la rogue offrent le plus de calories et de gras. Dans le cadre des analyses du contenu stomacal, le ministère des Pêches et des Océans cherche les structures dures des proies, c’est-à-dire les oreilles du poisson, qui se trouvent dans sa tête, que l’on retrouve rarement dans l’estomac des phoques. Comme je vous l’ai montré sur plusieurs photos, nous savons que les phoques n’attaquent pas la tête des poissons. Ils mangent de nombreux ventres de poisson, mais mangent rarement tout le poisson, à moins qu’il ne soit très petit. Merci.
M. Vascotto : Je vous remercie pour votre question. Comme vous pouvez le constater, nous avons largement discuté de ce sujet, et nous l’avons approfondi. J’aimerais décortiquer la question en quelques volets. Vous avez raison de dire que le phoque a une incidence directe sur le déclin de la pêche puisqu’il mange la morue, l’aiglefin, la goberge et la merluche blanche. Nous savons que c’est une possibilité; nous le constatons. Il faut toutefois aussi tenir compte des conséquences indirectes. La morue mange le hareng, le capelan et le maquereau. Si ces populations sont touchées par la prédation accrue du phoque, cela nuit au rétablissement des stocks de morue ou du hareng, parce que ces poissons n’ont tout simplement plus de quoi se nourrir.
C’est l’une des tendances que l’on semble observer sur le plateau néo-écossais. La morue grossit jusqu’à un certain point, puis cesse de croître parce que les aliments plus gros qu’elle avait l’habitude de manger ne se retrouvent plus en quantité suffisante dans l’écosystème pour permettre sa croissance.
Il y a aussi un autre effet indirect, que vous avez mentionné : le déplacement. Les poissons qui se retrouvent dans une zone qui appartient à d’autres populations ou à la limite de cette zone sont plus à risque d’être la proie des prédateurs du phoque. Ils évitent donc ces zones, mais se retrouvent alors dans un milieu défavorable où ils ne peuvent croître ou se reproduire. Les conditions du poisson vont alors se détériorer et la productivité diminuera.
Lorsqu’on parle de l’incidence des phoques sur le déclin de la pêche, on ne parle pas seulement des conséquences directes, mais bien des conséquences générales sur l’écosystème. C’est pourquoi il faut de meilleures données pour mieux comprendre la situation.
On ne parle pas seulement d’un aliment... L’histoire que nous voulons raconter, ce n’est pas : « Nous avons ouvert l’estomac et avons vu 32 crabes des neiges, quelques morues polaires et c’est tout. » Nous voulons pouvoir dire : « Le capelan a connu une très bonne année, puis une très mauvaise année. » Le phoque est un prédateur opportuniste. Il mange tout ce qu’il trouve. Son incidence sur la morue peut être très importante une année, mais elle peut être encore plus grande sur le capelan l’année suivante, ce qui aura des conséquences directes sur la productivité de la morue et qui empêchera les populations de morue ou d’autres poissons de fond — comme le merlu blanc et d’autres — de croître.
Je serai heureux de répondre à d’autres questions. Je pourrais vous en dire long.
La sénatrice McPhedran : Merci.
Mme Boudreau : Je vous remercie pour votre question, qui m’est très chère... je ne parle pas de la morue, mais bien de nos pélagiques, surtout le maquereau.
Vous avez parlé des mouvements migratoires; c’est ce que je vais aborder dans ma réponse. Au printemps, le maquereau migre à partir du golfe du Maine. C’est la saison de fraie; les maquereaux sont pleins d’œufs. Ils se rendent dans le littoral est le long de la côte de la Nouvelle-Écosse et tentent de se rendre au golfe du Saint-Laurent pour frayer et s’engraisser. Ils se rendent ensuite à Terre-Neuve et reviennent par le littoral est à l’automne.
Or, au cours des 10 dernières années, le maquereau ne s’est pas déplacé du littoral est jusqu’aux côtes de la Nouvelle-Écosse. Depuis 10 ou 15 ans, lorsque les maquereaux arrivent du golfe du Maine, ils se font attraper par un large troupeau de phoques gris, qui se nourrissent continuellement de ces poissons pendant leur période de reproduction. Les maquereaux font face à un mur de phoques. Si j’étais un chat et que je voyais une pièce remplie de chiens, je n’y entrerais pas.
Le maquereau a choisi cette route pour une raison précise. C’est peut-être pour se reposer le long de la côte ou bien c’est une question de climat. L’écosystème présent le long de la côte de la Nouvelle-Écosse permet peut-être au maquereau de se revitaliser ou de faire le plein d’énergie. La zone est près de la rive; l’eau est un peu plus chaude. Le maquereau n’a pas à maintenir une certaine température.
Or, aujourd’hui, le maquereau est repoussé de plus en plus loin au large des côtes par ce grand troupeau de phoques. Quelle est l’incidence de cette situation sur la population de maquereaux? Nous aimerions en discuter avec les biologistes qui étudient le phoque et le maquereau. Ces biologistes ne peuvent toutefois pas confirmer que le maquereau fait partie de l’alimentation des phoques, parce que nous les étudions uniquement au cours de la période de mise bas à l’île de Sable, et qu’ils ne mangent pas de maquereau à ce moment-là.
C’est donc très frustrant, comme vous pouvez le constater. On aurait dû avoir cette conversation il y a bien longtemps. Si nous ne pouvons pas voir le phoque en tant que composante qui a une incidence sur l’ensemble de l’écosystème et de la chaîne alimentaire, alors nous passons à côté de quelque chose d’énorme.
Tous les pêcheurs sont sur la terre ferme : personne n’a le droit de pêcher le maquereau, mais nous ne connaissons toujours pas les effets des autres prédateurs sur cette espèce, parce que personne ne les étudie. Nous avons été désignés à titre d’uniques responsables de la mortalité du maquereau. La situation ressemble beaucoup à ce qui se passe avec la morue. Je vous remercie pour votre question.
Le président : Merci.
Le sénateur Kutcher : Je remercie une fois de plus les témoins pour leur présence. Bien que nous soyons au début de notre étude, je suis très préoccupé par ce que j’entends aujourd’hui. En plus du rapport du Groupe de travail sur la science des phoques de l’Atlantique, j’ai entendu de nombreuses préoccupations au sujet de la transparence et du caractère approprié des données probantes utilisées pour orienter la prise de décisions et l’élaboration des politiques. Ce sont deux éléments très importants.
À votre avis, est-ce qu’il serait utile que nous recommandions qu’à un moment précis — peut-être dans quelques années — des experts internationaux réalisent un examen scientifique indépendant pour évaluer le plan des études scientifiques sur le phoque du ministère des Pêches et des Océans, afin de vérifier le type, la nature et la qualité des données recueillies, les méthodes utilisées et les analyses qui sont réalisées?
Je crains que certaines de ces bonnes recommandations qui ont été faites sur la nécessité d’améliorer la science... à mon avis, ce sont de bonnes recommandations, mais il y en a sûrement d’autres. Je crains aussi que sans une échéance et un examen scientifique indépendant sur ce qui s’est passé, ces recommandations ne soient peut-être pas appliquées.
M. Hardy : C’est une très bonne question. Je crois qu’il est fait mention de la participation de scientifiques externes dans le rapport.
Donc oui, je crois que ce serait une excellente idée d’examiner le rapport et les recommandations, pour la science et pour l’avenir. Je crois aussi qu’on devrait faire la même chose pour d’autres espèces, et non seulement pour le phoque.
Vous avez parlé de transparence. C’est l’une des plus importantes critiques que nous ayons formulées — en plus de la communication — en tant qu’équipe de travail. Elle a été évoquée à maintes reprises dans le cadre de nos discussions internes.
Permettez-moi de vous donner un exemple. Alors que nous étions à la mi-étape avec le rapport et les réunions, nous avons été très surpris d’apprendre qu’une séance d’information technique sur le phoque du Groenland se tenait à St. John’s. Nous n’avions reçu aucune communication à cet effet. La boîte de courriels et le téléphone des membres de l’équipe de travail n’ont pas dérougi par la suite, parce que nous nous attendions à être bien informés. Nous pensions que, puisque nous étions en train de rédiger des recommandations sur les phoques, nous allions être tenus au courant. Cela n’a pas été le cas.
C’est donc un autre exemple du manque de transparence. Nous avons entendu les témoins parler du Sommet sur les phoques. Le gouvernement ne leur a pas demandé — et n’a pas non plus demandé aux membres de l’industrie — de participer à la mise sur pied de ce sommet. C’est problématique.
Je dois dire que j’ai reçu l’appel d’une personne. Notre conversation fut brève. Ce fut tout. Merci.
Le sénateur Kutcher : Avez-vous d’autres commentaires sur les suggestions utiles que pourrait faire le comité?
M. Vascotto : Lorsqu’on demande un examen externe de ce qui a été fait, c’est habituellement une bonne chose. Cela nous permet d’ouvrir les livres, de voir ce qui se passe sous le capot.
Je proposerais aussi que nous ajoutions certaines des conclusions tirées de ces renseignements à la liste.
Il ne faut pas uniquement tenir compte des données probantes et des analyses qui sont réalisées, mais aussi de la façon dont les données sont interprétées et utilisées. Je crois que ce volet serait très utile.
C’était une excellente question. Merci.
Mme Boudreau : En ce qui a trait à la recommandation ou à la question au sujet d’un examen indépendant, je crois qu’il serait très utile, mais je dirais qu’il ne doit pas uniquement tenir compte de l’information existante. Le groupe de travail a été mis sur pied pour cibler les lacunes relatives à l’information. Je crois que le travail qui a été fait jusqu’à maintenant est de très bonne qualité. Nous sommes très doués pour compter au pays. Nous en savons beaucoup au sujet de la reproduction des populations de phoques. Nous en savons beaucoup au sujet de la biologie du phoque, mais nous ne savons rien de son alimentation, de la portée des pinnipèdes ou de leur incidence sur l’écosystème. Ces ensembles de données sont inexistants. Nous ne pouvons pas les examiner.
Je crois que c’est une excellente idée de demander un examen, mais je crois surtout qu’il faut aller chercher l’information et l’intégrer à celle que nous avons déjà. Je vous remercie pour votre question.
Le sénateur Kutcher : Je remercie tous les témoins pour leurs réponses. C’est exactement ce que je voulais dire lorsque je parlais d’une évaluation critique de l’étude scientifique révisée à la suite d’un rapport. Vous avez bien ciblé ce qui devait être fait. Merci.
Le président : Dans sa recommandation no 9, le Groupe de travail sur la science des phoques de l’Atlantique fait valoir que le ministère des Pêches et des Océans devrait chercher à améliorer la recherche sur la déprédation par les phoques. De quoi s’agit-il exactement?
M. Hardy : De plus en plus de pêcheurs de partout au pays font état de l’incidence des phoques sur les prises à l’aide des engins de pêche. Comme l’a fait valoir M. Vascotto, le phoque est un animal opportuniste. Il mange toutes sortes de poissons. S’il y a du poisson dans les filets ou sur les palangres, alors l’incidence du phoque risque d’être plus grande.
Je vais vous parler de mon expérience sur la côte du Labrador, où l’on pratique la pêche vivrière du saumon l’été. De temps à autre, les pêcheurs ne trouvent qu’une tête de poisson dans leurs filets. Ils perdent des poissons et leur équipement est endommagé.
Pour ce qui est de la pêche commerciale, les pêcheurs hésitent à déclarer ce genre d’incident, parce que si une quantité importante de poissons est détruite, le ministère des Pêches et des Océans risque de prendre des mesures pour fermer la pêche, entre autres. La déprédation n’est pas souvent déclarée.
Je recommanderais de réaliser des études plus approfondies sur le sujet et d’obtenir plus de rétroaction de la part des pêcheurs. Je vous remercie pour votre question.
La sénatrice Busson : J’aimerais poser deux questions, rapidement. La première s’adresse à M. Hardy, je crois.
Monsieur Hardy, vous avez évoqué des statistiques sur les populations de phoques en Islande et en Norvège. Vous avez dit qu’elles étaient un peu plus faibles que celles du Canada. Savez‑vous si c’est attribuable en partie à la gestion des phoques? Est‑ce que c’est seulement le hasard qui fait que l’écosystème est différent là-bas? Est-ce que le pays assure une gestion en ce sens ou est-ce seulement de la chance?
M. Hardy : Je crois que c’est de la chance, et peut-être une question d’habitat. Le monde entier connaît des changements climatiques. Il n’y a pas eu de glaces flottantes sur les côtes de la Norvège. De façon particulière, le phoque du Groenland — qui représente la plus importante population de phoques du pays — ne va pas sur la côte ou près de la Norvège. Les conséquences ne sont donc pas aussi importantes qu’ici.
La glace fond de plus en plus au fil des années. Les phoques du Groenland sont présents dans le golfe et dans la région du front. Ils sont de moins en moins nombreux à migrer vers le golfe au printemps. À Terre-Neuve-et-Labrador, il y a moins de glace, mais elle est encore présente. Je vous ai fourni une copie des séquences vidéo du survol en hélicoptère. Au printemps dernier, il y avait une bonne couverture de glace à quelques milles de la rive seulement. Tout ce que nous pouvions voir, sur des dizaines de milles, c’était des phoques.
C’est un peu une question de chance, comme vous l’avez dit plus tôt. Il n’y a pas de chasse commerciale du phoque en Islande. Quelques phoques sont chassés pour leur viande, mais le pays n’a pas le même problème que nous. De plus en plus de pays où les phoques sont bien installés ont des problèmes avec les phoques, en raison de leur incidence sur les stocks de poissons. Merci.
La sénatrice Busson : Vous avez aussi parlé des données sur les otaries de la côte Ouest. Je comprends qu’étant donné votre expérience, vous êtes tous des experts de la côte Est. Est-ce que l’un d’entre vous dispose de données ou de renseignements sur la prédation dans l’une des régions de la côte Ouest?
M. Hardy : Bien qu’ils n’aient pas fait partie de notre équipe de travail, j’ai beaucoup communiqué avec les experts de la côte Ouest. La Pacific Balance Pinniped Society se préoccupe grandement de l’incidence des phoques et des otaries sur les stocks de saumon. Dans certains cas, les groupes autochtones et leurs biologistes ont réalisé des études sur le sujet. Ils disposent de renseignements très détaillés qui montrent l’incidence des pinnipèdes sur les stocks de saumon et d’autres ressources.
Il y a eu une présentation sur le saumon ici, dans le Canada atlantique. Il s’agissait d’une seule étude, qui était très limitée. L’échantillon de phoques était très petit. Or, dans leur rapport, les scientifiques faisaient valoir que les phoques n’avaient pas une grande incidence sur les stocks de saumon de l’Atlantique.
Depuis plusieurs années, je demande à ce qu’on se rende sur la rivière Grand Codroy, sur la côte Ouest, qui était jadis l’une des plus importantes rivières à saumon de l’Atlantique au Canada. Elle compte maintenant une population de plus de 100 phoques communs, qui passent 9 ou 10 mois en eau douce, à 8 ou 10 kilomètres du littoral. Je pourrais vous envoyer des centaines de photos de ces phoques. Ils sont là toute l’année. Je veux que quelqu’un se rende là-bas et qu’il prenne un échantillon de ces phoques pour voir ce qu’ils mangent, parce qu’il est impossible qu’ils restent là si longtemps sans manger. Cette rivière, comme beaucoup d’autres, n’a presque plus de poisson.
Le président : J’aimerais, comme la sénatrice Cordy, réitérer ce qu’avait dit l’ancien ministre John Efford : on ne sait pas trop ce que mangent ces phoques, mais ce n’est certainement pas du poulet.
Je tiens à remercier nos témoins pour leur participation à la réunion d’aujourd’hui. Vous nous avez transmis des renseignements importants. Vous nous avez aussi transmis votre passion pour cette industrie et j’espère qu’elle pourra se refléter dans notre étude. Nous vous remercions pour votre contribution au groupe de travail. J’espère que le sommet de St. John’s sera l’occasion d’aborder certaines de vos recommandations.
S’il y a des renseignements que vous auriez aimé nous transmettre aujourd’hui, mais n’avez pas eu l’occasion de le faire, n’hésitez pas à en faire part à la greffière. Il se pourrait que nous vous invitions à témoigner devant nous à nouveau selon l’évolution de notre étude.
Au nom des membres du comité, je tiens à vous remercier pour votre présence aujourd’hui et pour toute l’information que vous nous avez transmise. Nous vous en sommes très reconnaissants.
Mesdames et messieurs, avant de frapper le maillet, j’aimerais rappeler aux membres du comité directeur de rester connectés quelques minutes, afin que nous puissions avoir une brève discussion avec les analystes.
Je rappelle aux honorables sénateurs que, s’ils ont des suggestions de témoins pour les prochaines réunions, ils doivent en faire part à la greffière et aux analystes au plus tard mardi prochain, puisque nous tentons d’organiser le prochain groupe de réunions. Je constate que certains d’entre vous ont fourni des noms. Je sais que nous avions pris quelques suggestions des témoins en note, en vue de recevoir des experts de la côte Ouest. Nous allons faire un suivi à cet égard, mais si vous avez d’autres suggestions, veuillez les transmettre à la greffière d’ici mardi prochain.
Merci beaucoup.
(La séance est levée.)