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RPRD - Comité permanent

Règlement, procédure et droits du Parlement


LE COMITÉ PERMANENT DU RÈGLEMENT, DE LA PROCÉDURE ET DES DROITS DU PARLEMENT

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le mardi 24 octobre 2023

Le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement se réunit aujourd’hui, à 9 h 32 (HE) pour faire l’étude des amendements possibles au Règlement conformément à l’article 12-7(2)a) du Règlement.

La sénatrice Diane Bellemare (présidente) occupe le fauteuil.

[Français]

La présidente : Bienvenue à tous au Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement. Mon nom est Diane Bellemare, je suis une sénatrice du Québec et je suis présidente du comité. Aujourd’hui, nous allons continuer notre étude sur les mandats et la structure des comités. Avant de présenter notre invitée, nous allons présenter les sénateurs qui sont présents. Je commence par la droite.

Le sénateur Woo : Bonjour, je suis Yuen Pau Woo, de la Colombie-Britannique.

La sénatrice Mégie : Marie-Françoise Mégie, du Québec.

[Traduction]

La sénatrice Cordy : Jane Cordy, de la Nouvelle-Écosse.

La sénatrice Busson : Bev Busson, de la Colombie-Britannique.

Le sénateur Greene : Steve Greene, de la Nouvelle-Écosse.

[Français]

La sénatrice Ringuette : Pierrette Ringuette, du Nouveau-Brunswick.

[Traduction]

La sénatrice Omidvar : Ratna Omidvar, Ontario.

Le sénateur Black : Rob Black, Ontario.

Le sénateur Wells : David Wells, Terre-Neuve-et-Labrador.

Le sénateur MacDonald : Michael MacDonald, Nouvelle-Écosse.

[Français]

La présidente : Merci, tout le monde, de votre présence.

Nous recevons aujourd’hui l’honorable Pamela Wallin, présidente du Comité sénatorial permanent des banques, du commerce et de l’économie. Elle va nous présenter ses réflexions sur les mandats et les structures, et sur les questions concernant notre étude que nous lui avons transmises.

On pourra ensuite passer aux questions. Nous accorderons quatre à cinq minutes par personne pour les questions et des remarques liminaires pas trop longues, comme d’habitude. La parole est à vous sénatrice.

[Traduction]

L’honorable Pamela Wallin : Merci, madame la présidente. Je n’ai pas préparé de déclaration d’ouverture. J’ai pensé que j’allais plutôt fournir des renseignements dans mes réponses aux questions. Je vais toutefois formuler quelques commentaires sur le thème qui vous occupe, à savoir la structure des comités et la façon dont ils ont changé avec l’évolution actuelle de l’atmosphère du Sénat.

J’ai quelques réflexions à formuler dans le cadre de cette discussion. Le temps reste un enjeu important, le fait que les comités aient suffisamment de temps pour faire leur travail. Nous sommes confrontés à de réels problèmes en ce qui concerne le nombre d’heures dont nous disposons pour une semaine donnée. En outre, les contraintes croissantes en matière de déplacements font qu’il devient plus difficile d’intervertir les jeudis et les vendredis tout en maintenant le calendrier. Je pense que c’est un problème que nous devons gérer. Dans le cadre de mes réflexions à ce sujet, j’aimerais suggérer que nos comités comptent peut-être trop de membres et que nous pourrions en réduire la taille. Le temps nécessaire pour faire le tour de la table et donner à chacun la possibilité de s’exprimer prend la majeure partie des séances des comités. Il ne reste ensuite pas beaucoup de temps pour approfondir les choses.

Si les comités comptaient moins de membres, les séances pourraient être plus courtes. Nous pourrions organiser une séance de deux heures et une séance d’une heure chaque semaine, ou encore trois séances d’une heure chacune. Nous pourrions essayer de contourner certains problèmes de cette façon.

Je pense que nous devons changer fondamentalement les choses. Les questions que nous traitons sont très complexes de nos jours. Je pense également que nous devons davantage tenir compte du temps et faire preuve de plus de pertinence par rapport aux questions du jour, et que nous avons donc besoin d’un peu plus de souplesse.

Cela dit, je pense que nous devons également équilibrer les choses en rappelant la procédure d’information et en en discutant. Nous avons toujours cette discussion lorsque de nouveaux sénateurs entrent en fonction. Comment parler aux gens de ce qu’est réellement le Sénat et comment rappeler son véritable objectif à tous les intervenants, y compris à celles et ceux d’entre nous qui sont ici depuis plus longtemps? Nous sommes la deuxième chambre du Parlement. Il y en a deux. Nous ne sommes ni moins importants, ni plus importants, mais nous sommes une chambre du Parlement, et nous sommes la chambre du second examen objectif. Notre travail est d’effectuer un deuxième, un troisième et un quatrième examen des projets de loi déposés par le gouvernement du jour.

Nous connaissons la réalité de ce qui se passe à la Chambre des communes. Il s’agit d’un processus très politique. C’est le travail des députés. Ils veulent se faire élire ou vaincre le gouvernement en place, et les textes de loi qu’ils proposent en subissent parfois les conséquences. Il est de plus en plus important, de nos jours, d’effectuer ce second examen objectif.

L’autre objectif du Sénat, qui est tout aussi important, sinon plus — et nous l’entendons depuis de nombreuses années — est que nous sommes le groupe de réflexion le plus puissant et le plus persuasif du pays. Nous devons prendre ce rôle au sérieux. On cite depuis longtemps l’exemple des travaux de Michael Kirby sur les maladies mentales. Il ne s’agissait pas d’une question politique dominante à l’époque ou d’un projet de loi à l’étude. Cette question sous-tendait toutefois de nombreux autres enjeux qui devaient être examinés. Nous devons parfois nous pencher sur ces questions importantes et les approfondir, parce qu’une chambre élue n’a pas le temps de le faire. C’est l’autre avantage que nous avons.

Nous devons composer avec certaines forces externes et internes qui modifient la nature du Sénat. Je pense que nous devons gérer ces deux forces. Nous savons que la présence de caméras de télévision à la Chambre des communes a fondamentalement changé le comportement des gens et la façon dont ils réagissent les uns aux autres. Je ne pense pas que ce changement ait été particulièrement positif. D’un autre côté, une partie de notre travail consiste à éduquer le public pour qu’il comprenne les enjeux que nous étudions. Il est donc important que ces caméras soient présentes. Elles ont toutefois modifié notre comportement, et nous devons en être conscients. Nous devons également assumer nos responsabilités individuelles, afin de limiter nos tentatives d’utiliser les caméras de télévision ou d’en abuser.

Les projets de loi omnibus ont eu un réel effet sur notre travail. Lorsque nous recevons des projets de loi d’exécution du budget qui contiennent tout le reste, nous devons déterminer quels comités sont concernés et combien de comités doivent traiter ces questions. Il s’agit là d’une force nouvelle. Nous nous demandons si le gouvernement prend notre processus d’amendement au sérieux lorsque nous proposons des modifications aux projets de loi. Je l’ai remarqué au fil du temps, et je me base non seulement sur mes années de journalisme dans ce domaine, mais aussi sur mon expérience au sein du Sénat. Lorsque nous proposons des amendements, ils sont généralement justifiés.

Je pense à la récente décision de la Cour suprême sur le projet de loi C-69. Plus de 200 amendements ont été déposés relativement à ce projet de loi. Ceux-ci portaient sur des questions très précises que la Cour elle-même a dû étudier. Nous avons besoin de la coopération de nos partenaires élus.

En ce qui concerne les pressions internes, il est encore une fois important de comprendre notre objectif et notre rôle. Les sénateurs se sentent obligés de soutenir les personnes qui les ont nommés, de « danser avec ceux qui les ont amenés ». C’est un problème qui se pose depuis longtemps au Sénat, et je pense que nous devons travailler chaque jour à le limiter.

Nous devons constamment nous efforcer d’être pertinents et de faire une différence. Parfois, les études prennent beaucoup de temps, et c’est très bien, et c’est parfois nécessaire. Parfois, nous devons traiter les questions du jour.

Je vais m’arrêter là. Lorsque j’en aurai l’occasion, je me vanterai un peu du Comité des banques. Je parlerai de notre réponse, de la réaction du public aux rapports de notre comité, du nombre de fois qu’ils sont téléchargés et consultés, etc., mais je le ferai à mesure que nous avancerons.

Le sénateur Kutcher : Merci, sénatrice Wallin, de nous avoir fait part de votre perspective, en vous fondant non seulement sur votre rôle de présidente d’un comité, mais aussi sur votre vaste expérience en tant que membre de différents comités.

J’ai deux questions à poser. La première concerne la vérification des faits au sein des comités. Il arrive que nous entendions des témoins. Il peut y avoir 12 études qui montrent X et une étude qui montre Y, mais le témoin ne parle que de Y. Il arrive également que nous entendions des commentaires hyperboliques à propos des données. Il ne semble pas exister de mécanisme permettant à un comité de vérifier ce que nous disent les témoins, et je pense qu’il s’agit là d’un véritable problème. Nous acceptons les témoins prima facie, c’est-à-dire que nous estimons que ce qu’ils nous disent reflète réellement ce que disent les preuves. J’ai vu certains sénateurs demander au président d’un comité de vérifier des renseignements, mais la Bibliothèque du Parlement pourrait le faire. Que pensez-vous de l’idée de créer un mécanisme auquel les comités pourraient avoir recours pour confirmer la véracité des renseignements fournis par les témoins?

La sénatrice Wallin : Encore une fois, ce problème se pose généralement moins au sein d’un comité comme le Comité des banques, mais j’ai effectivement siégé à des comités où ce problème se posait. Il est difficile de faire la distinction entre les faits et les opinions quand les personnes utilisent parfois certains faits pour présenter leur opinion comme s’il s’agissait d’une preuve. Je pense que c’est un problème, surtout dans le cas des questions complexes et à dimension émotionnelle, qui touchent à des convictions personnelles très profondes.

J’aimerais que les employés de la Bibliothèque du Parlement disposent d’une plus grande marge de manœuvre, mais pour qu’ils puissent vérifier les faits, ils doivent disposer des ressources nécessaires. J’envie beaucoup le système américain dans lequel les comités sénatoriaux ont du personnel et les comités eux-mêmes ont beaucoup d’employés qui peuvent effectuer non seulement la recherche initiale, mais aussi la vérification des faits. Ils ont bien sûr évolué, et ils utilisent la vidéo et autre.

Nous devons faire la même chose. Tant qu’ils n’auront pas plus de ressources, il leur sera difficile de le faire. Nous devons toutefois faire cette demande et prendre cette décision en tant qu’organe. Pour l’instant, nous savons ce qui se passe. Nous venons tous à nos comités après avoir fait notre propre travail avec l’aide de notre personnel, et c’est à peu près tout ce que nous pouvons faire pour obtenir les ressources dont nous avons besoin. J’aimerais qu’il y en ait beaucoup plus, pour que nous ayons cette capacité.

Le sénateur Kutcher : J’ai une question similaire, mais légèrement différente, concernant la sélection des témoins. Nous voulons nous assurer de parvenir à un équilibre. Nous voulons être sûrs d’entendre des opinions et des points de vue variés provenant de tout le pays, mais nous voulons aussi être sûrs d’obtenir des opinions éclairées — parfois — et qui soient basées sur les meilleurs témoins disponibles. Parfois, des témoins se présentent avec des opinions très fortes, mais celles-ci ne sont pas nécessairement fondées sur les meilleures preuves disponibles. Je remarque également que nous revenons parfois à des témoins qui ont comparu à la Chambre ou, sur le plan thématique, nous revenons simplement à eux.

Il y a des organismes au Canada qui ont accès à des témoins indépendants, relativement impartiaux, qui font une évaluation critique. Nous n’utilisons toutefois pas ce type d’organisme. Dans le domaine de la santé, on peut par exemple citer l’Académie canadienne des sciences de la santé ou la Société royale. Je ne suis pas sûr que nous fassions toujours appel aux meilleurs experts du pays parce que je ne sais pas si notre sélection de témoins est organisée de façon à communiquer avec les organisations qui pourraient fournir ce genre de témoins. Qu’en pensez-vous?

La sénatrice Wallin : Oui, il est important d’élargir ce champ. L’un des avantages de l’expérience de la COVID au Sénat est que nous pouvons maintenant utiliser la technologie pour obtenir d’autres témoins provenant d’autres endroits. Tout le monde n’est pas obligé de se rendre à Ottawa, car la situation antérieure limitait réellement le bassin de témoins et avait préparé le terrain pour certaines des préoccupations que vous avez soulignées. C’est en quelque sorte le bassin auquel nous revenons sans cesse, mais je pense que nous l’avons maintenant ouvert et élargi.

En tant que chambre représentant les provinces et en tant que sénateurs, nous devons nous assurer que nous présentons les noms d’experts et de personnes réputées dont les faits ont été vérifiés par d’autres moyens. Nous pouvons proposer ces noms pour allonger cette liste. Encore une fois, la charge de travail est plus importante pour le bureau de chaque sénateur, mais c’est une façon de commencer à ajuster le système et d’allonger la liste à partir de laquelle nous travaillons tous, afin d’obtenir un point de vue plus large et plus représentatif.

En tant qu’habitante de l’Ouest du Canada, je lutte constamment contre ce problème, car les enjeux liés à la santé et à l’économie, ou les effets des taux d’intérêt sont différents selon l’endroit où l’on vit. Ce fait doit être reflété au sein de nos comités. Cela fait partie de notre travail, et nous devons également demander au système de garder cela à l’esprit.

[Français]

La présidente : Je me permets d’ajouter qu’on vient de soulever un point très intéressant qui n’a pas souvent été soulevé, c’est-à-dire de faire appel à des associations pour nous aider à diversifier les témoins.

[Traduction]

Le sénateur Wells : Merci, sénatrice Wallin, pour le bon travail que vous accomplissez en tant que présidente du Comité des banques.

J’aimerais vous poser des questions sur le degré de priorité à accorder aux projets de loi étudiés en comité, notamment par le Comité des banques, mais aussi par les comités en général. Il y a les lois gouvernementales, les projets de loi d’initiative parlementaire, les projets de loi d’intérêt public du Sénat et les rapports. Ils ont tous leur degré d’importance, et nous savons que les comités sont maîtres de leur propre domaine. Dans votre réponse, pourriez-vous parler des discussions en cours des dirigeants sur l’établissement d’un ordre de priorité des projets de loi qui ne pourraient pas être présentés avant d’autres projets de loi et sur la manière dont cela fonctionne? Je pense honnêtement qu’il faudrait donner la priorité à tous les projets de loi présentés, qu’ils soient déposés à la Chambre ou au Sénat. Pourriez-vous nous parler de l’ordre de priorité de ces projets?

La sénatrice Wallin : Je vous remercie. Je pense effectivement qu’il s’agit d’un enjeu à l’importance croissante. Je ne sais pas si mes chiffres sont tout à fait exacts, mais je pense que la chambre étudie actuellement quelque 79 projets de loi d’intérêts privés émanant du Sénat. Ce phénomène est nouveau et prend de l’importance. Je suis l’auteure de l’un de ces projets de loi; il est basé sur une loi gouvernementale, un amendement qui a été proposé, approuvé par le Sénat et rejeté par le gouvernement. Nous y sommes donc revenus d’une autre manière.

Comme je l’ai dit plus tôt, les comités sont confrontés à des problèmes, notamment le temps limité dont ils disposent, leur taille et la complexité des questions qu’ils étudient. Nous devons commencer à réorganiser nos activités et à établir des priorités.

J’estime que les projets de loi du gouvernement doivent conserver la préséance. C’est là le cœur de notre travail, qui consiste à effectuer un second examen objectif, d’examiner les projets de loi du gouvernement. C’est notre travail, mais nous ne pouvons pas toujours le faire dans l’urgence. De plus en plus, nous voyons ce genre de calendrier dans lesquels les documents budgétaires doivent être examinés le plus vite possible. Cela nuit à notre responsabilité en tant que sénateurs d’effectuer un second examen objectif.

Si les gouvernements ont des contraintes de calendrier, nous devrions recevoir les projets de loi plus tôt. Une partie de cette responsabilité doit leur revenir; ne nous envoyez pas les documents le 29 juin en nous disant que nous devons avoir terminé le 28 juin. Les choses ne peuvent tout simplement pas fonctionner de cette manière.

Comme vous l’avez dit à juste titre, les comités sont maîtres de leur propre domaine. Les gens siègent à ces comités en raison de leurs centres d’intérêt et de leur expertise. Si vous siégez au Comité des banques ou au Comité des transports et des communications, vous apportez des questions et des idées qui sont pertinentes dans ce domaine et qui doivent être étudiées parce que vous savez, en tant que personne que ces enjeux intéressent, ce que l’on étudie et ce qui est en jeu. C’est pourquoi nous estimons que les comités devraient choisir les sujets qu’ils étudient.

Nous constatons également une tendance plus récente à essayer de diriger les comités depuis le Sénat, en disant « Je voudrais que le Comité des banques ou le Comité des finances étudie X », et je ne pense pas que nous puissions raisonnablement gérer ce niveau de contribution. Les personnes qui ont des problèmes particuliers peuvent ne pas siéger au comité. Si vous vous intéressez réellement aux enjeux qui figure au mandat d’un comité, alors rejoignez-le et expliquez à vos collègues pourquoi certains sujets devraient être étudiés en priorité.

Par ailleurs, et ce problème ne concerne pas la structure des comités, je pense que le Sénat lui-même devra s’attaquer au problème du nombre croissant de projets de loi d’intérêts privés émanant du Sénat, car nous n’avons tout simplement pas la capacité nécessaire pour tous les étudier. Lorsque ces projets de loi sont placés en bas de la liste, parce que nous devons étudier des projets de loi du gouvernement et que nous avons les décisions et les choix des membres des comités eux-mêmes, les comités informés, les gens se fâchent si leurs projets de loi ne sont pas étudiés immédiatement. Nous n’avons tout simplement pas assez de temps. Nous avons la responsabilité de faire ce que nous avons dit que nous allions faire. C’est une question plus vaste sur laquelle les dirigeants de cet organe et d’autres comités — peut-être même le vôtre — doivent se pencher et sur laquelle ils doivent formuler des commentaires.

En tant que sénateurs, nous disposons d’autres mécanismes. Vous pouvez mener des enquêtes. Vous pouvez faire toutes sortes d’autres choses. Tout ne doit pas devenir un projet de loi à étudier immédiatement, car cette approche met notre système à rude épreuve.

[Français]

La présidente : Merci beaucoup pour cette réponse et ces commentaires. Je pense que c’est un dossier qu’on devra suivre parce qu’il interagit aussi avec d’autres points de notre étude.

La sénatrice Mégie : Bonjour, sénatrice Wallin. Cela fait plaisir de vous voir à titre de témoin. Ma première question est brève : combien de sénateurs bilingues avez-vous dans votre comité?

[Traduction]

La sénatrice Wallin : Je dirais que plus d’un tiers des membres sont bilingues, peut-être même la moitié, je ne sais pas. Au moins un tiers.

[Français]

La présidente : Il y en a au moins quatre.

La sénatrice Mégie : La raison de ma question, c’est que nous avions, vous et moi, vécu une situation où, dans un comité, on avait des rapports qui étaient très bien faits; nos traducteurs et nos traductrices font du bon travail. Cependant, il y a les subtilités de la langue française qui nous ont obligés d’y aller point par point — vous vous en souvenez.

D’après votre expérience au Sénat, serait-il une bonne chose de revoir aussi les versions françaises avant qu’un comité donne son approbation? Par exemple, pour dire que ce rapport est accepté par tout le monde, c’est-à-dire la version anglaise pour les unilingues anglophones et la version française. Souvent, on regarde la version anglaise et on dit que c’est correct. Avez-vous des conseils à nous donner à ce sujet?

[Traduction]

La sénatrice Wallin : Il s’agit assurément d’un problème récurrent, comme nous l’avons remarqué au sein du comité auquel nous avons siégé. Certaines subtilités avaient été omises dans ce rapport. Ce que j’ai constaté, même au sein du Comité des banques, c’est que les sénateurs francophones ont pris l’initiative d’examiner les deux versions pour relever ces incohérences. Encore une fois, c’est une charge que nous faisons peser sur un sénateur, ce que je trouve injuste. Cet organe est bilingue et doit l’être, et encore une fois, il s’agit de problèmes de personnel et d’accès. Nous l’avons vu au cours de la pandémie. Nous étions en quelque sorte l’équipe B pour ce qui était des ressources du Sénat, et nous avons perdu du personnel à tous les niveaux parce que la Chambre des communes utilisait ces ressources.

La sénatrice Ringuette et moi-même nous sommes déjà penchées sur cette question dans le cadre d’une mini-étude que nous avons menée en parallèle, pour montrer que cet organe avait besoin d’un plus grand nombre de services de traduction de meilleure qualité. Nous comptons sur la bonne volonté de nos collègues lorsque nous n’avons pas accès à ces services.

Le Sénat étant une chambre du Parlement, il devrait disposer des ressources nécessaires pour travailler dans les deux langues officielles et veiller à ce que les études soient cohérentes. Nous avons tendance à opter pour la langue de la majorité au sein d’un comité, lorsqu’il s’agit d’examiner un rapport et de l’étudier article par article, parce que nous comptons sur nos collègues pour faire le travail à l’avance et pour nous signaler tout problème. Je ne pense pas que ce soit suffisant.

[Français]

La sénatrice Mégie : Est-ce possible de mettre mon nom pour le prochain tour de questions?

La présidente : Oui.

[Traduction]

La sénatrice Batters : Merci, sénatrice Wallin. J’aimerais revenir sur le point que vous avez brièvement soulevé dans vos remarques concernant les projets de loi omnibus. Parfois, et vous en avez certainement fait l’expérience, des questions très importantes peuvent se cacher dans les projets de loi omnibus. Avec la quantité très faible de temps qui nous est accordé pour étudier les questions et la pression liées au fait qu’un projet de loi d’exécution du budget doit être adopté rapidement, il est parfois difficile de cerner l’ampleur réelle de certains problèmes. Ensuite, si l’on trouve quelque chose et que l’on trouve un moyen d’amender le texte pour le corriger, il est parfois presque impossible d’amender ce genre de choses, même si c’est absolument nécessaire, parce que c’est lié à un projet de loi d’exécution du budget.

Pouvez-vous nous parler de votre expérience de ce type de problème, peut-être au sein du Comité des banques ou d’autres comités?

La sénatrice Wallin : Oui, le Comité des banques est confronté à ce genre de problème. Nous savons que lorsqu’un projet de loi d’exécution du budget ou un projet de loi omnibus — il s’agit souvent des projets de loi d’exécution du budget — est présenté, aucun comité ne peut l’étudier. Ils sont trop volumineux. Le Comité des finances travaille sur tellement de questions, en plus de ses tâches de base, qu’on divise les projets, de sorte qu’un comité étudie par exemple les articles 43, 49, 51 et 27, qui peuvent ou non être liés les uns aux autres. Il se peut que ces articles ne relèvent pas de notre domaine d’expertise, ce qui signifie que nous devons alors faire appel à d’autres personnes pour examiner des choses comme le droit d’auteur, par exemple. Le Comité des banques a réalisé une étude sur ce sujet dans le passé, mais sa composition a changé depuis.

Cette question touche fondamentalement à la capacité du Sénat de faire son travail. On doit l’envisager comme un problème entre les deux chambres. Je sais que nous disposons d’une procédure pour traiter les situations dans lesquelles des amendements sont proposés, puis rejetés par le gouvernement et renvoyés, mais nous allons très rarement jusqu’à la dernière étape, à savoir la création d’un comité mixte composé de membres des deux chambres pour résoudre le problème et parvenir à un compromis.

Afin de préserver notre rôle, le respect que nous accorde maintenant le public et nos responsabilités envers lui, il est très important que nous commencions à utiliser ce processus ou d’autres mécanismes pour vraiment forcer la discussion avec nos homologues de l’autre Chambre afin de dire que nous devons trouver une façon qui fonctionne mieux ici.

Je ne sais pas comment faire autrement. Nous pouvons former des comités parlementaires mixtes. Nous avons fait partie d’un tel comité dans le dossier de l’aide médicale à mourir, par exemple. Ce sont toujours les députés de la Chambre des communes qui dominent. J’aimerais que ce processus soit plus équitable entre les membres et qu’on s’assoie pour se pencher sur certaines de ces grandes questions.

Je ne pense pas que nous puissions agir unilatéralement. Nous pouvons essayer, mais si les députés, de l’autre côté, ignorent les problèmes et leur incidence sur nous, alors c’est en vain. Prenons donc le taureau par les cornes.

La sénatrice Batters : J’ai quelques brèves questions. Tout d’abord, parlons du calendrier.

Je crois comprendre que le Comité des banques se réunit quelques heures les mercredis, à 16 h 15, et les jeudis, à 11 h 30. Ce sont vos heures de réunion habituelles. Elles sont semblables à celles que j’ai pour le Comité des affaires juridiques.

Je veux simplement votre confirmation. Il est assez rare que ces rencontres soient interrompues par des séances ou des votes du Sénat, n’est-ce pas? Cela arrive parfois, mais c’est assez rare.

La sénatrice Wallin : D’après notre expérience, si nous recevons un témoin clé comme le gouverneur de la Banque du Canada, nous organiserons la rencontre le jeudi matin plutôt que mercredi soir pour essayer de régler la question.

Mais c’est un problème. Nous avons ces deux responsabilités. Il faut être à la Chambre pour participer à ce processus, entendre parler d’autres projets de loi et voter, et pourtant, on ne veut pas perdre le temps du comité. Mais nous avons beaucoup de chance.

La sénatrice Batters : Oui, effectivement.

En ce qui concerne les témoins, d’après mon expérience, en général, les comités directeurs déterminent certainement qui seront les témoins, avec les conseils, bien sûr, d’autres membres du comité ainsi que des analystes et adjoints de la Bibliothèque du Parlement pour les aider à décider qui pourrait être utile pour ces études ou projets de loi.

Est-ce aussi votre expérience? Si vous constatez que vous n’obtenez pas les genres de témoins dont vous avez besoin, ces questions devraient être renvoyées aux comités directeurs pour peut-être convoquer de meilleurs témoins.

La sénatrice Wallin : Je crois à cette pratique. Les décisions ne peuvent être prises par un grand nombre de personnes. On n’arrivera jamais à une résolution. Nous commençons au début de chaque session — et je crois que c’est le cas de la plupart des comités — en réaffirmant la pratique de longue date selon laquelle les comités directeurs établissent des ordres du jour et choisissent les témoins, et nous agissons en collaboration. Donc, oui, ces questions retombent directement sur nos épaules.

Si les gens pensent que nous ne convoquons pas un éventail suffisant de témoins ou de genres de témoins, alors ils doivent certainement le signaler, mais je leur demande toujours de le faire de façon constructive. Si vous pensez que les bons témoins ne sont pas invités, alors proposez trois noms.

Nous avons discuté de la question la semaine dernière au sein du Comité des banques, parce que nous étions en train d’étudier très rapidement le projet de loi C-42, dont nous ferons rapport à la Chambre aujourd’hui. Je vais en faire rapport aujourd’hui. Plusieurs membres du comité ont dit qu’ils avaient l’impression que dans six mois, quelqu’un dira qu’il y a une énorme échappatoire et nous demandera pourquoi nous ne l’avons pas vue. Les sénateurs ont littéralement pris l’initiative de téléphoner aux gens qu’ils connaissaient dans l’industrie pour leur demander de prendre la parole ou de leur envoyer une note pour qu’ils puissent la transmettre à d’autres en disant : « Réfléchissez-y. »

Le Comité des banques a essayé de faire en sorte que les ministres ou les parrains de projets de loi témoignent à la fin plutôt qu’au début de la réunion. Une fois qu’on a entendu les témoignages, été informé et entendu les critiques et les défenseurs, on interroge les ministres ou la personne responsable. On est plus informé à ce moment-là.

Ce sont des exercices d’équipe, et nous voulons tous faire le meilleur travail possible. Nous sommes tous fiers de la réputation du Sénat, et nous sommes heureux de dire en public que nous faisons souvent le gros du travail au Sénat, et nous aimerions que cela soit reconnu et respecté. Pour que ce soit le cas, nous devons faire nos devoirs, comme disait ma mère.

La sénatrice Cordy : Merci, sénatrice Wallin, d’être ici aujourd’hui. Je suis ravie de vous écouter.

Ce que vous dites au sujet des mandats pour les projets de loi d’initiative parlementaire émanant de la Chambre et non du comité est assurément très pertinent et devrait être étudié, peut‑être par notre comité ou un autre, certainement. C’est un bon point.

J’aimerais parler des voyages des comités. Vous avez parlé du comité Kirby — c’était le Comité des affaires sociales — et du rapport sur la santé mentale, la maladie mentale et la toxicomanie.

J’ai eu la chance de faire partie de ce comité. Nous avons sillonné le pays, tenant des rencontres dans des villes de toute taille. Nous avons parlé à des professionnels des soins infirmiers, à des personnes atteintes de maladie mentale et à des familles, et nous avons beaucoup appris. C’est pour cette raison, je crois, que notre rapport a été si bien reçu par le public, car les gens ont adhéré au projet. Ils ont vu le comité parcourir le pays.

Je pense qu’il est important que les voix des régions soient entendues. C’est formidable de siéger à Ottawa — comme nous le faisons la plupart du temps —, mais les voix des régions sont importantes. Bien des gens ne veulent pas venir à Ottawa. Nous devrions donc aller à eux.

Je pense que les gens ont une fausse idée de ce que c’est que de voyager avec un comité. Les journées sont longues. On monte ensuite dans l’autobus, à la fin d’une très longue journée, et on se rend dans une autre communauté. On se lève tôt le matin parce que l’autobus part à 7 h 30 ou 8 heures. Cela n’a rien de voyages d’agrément. Pourtant, j’entends parler de comités qui ont fait énormément de travail sur un sujet, mais lorsque vient le temps pour eux d’effectuer leur seul voyage de l’année, il n’y a pas assez de fonds pour que tous les membres puissent y participer. Je pense que fondamentalement, cela ne va pas. Si on a participé à toutes les discussions à Ottawa et assisté aux réunions, quand le comité va ensuite à la rencontre de la population canadienne pour écouter ce que les gens ont à lui dire, le président ne peut être accompagné que de 5 ou 6 personnes et non de 12 ou 16. Vous comprenez ce que je veux dire. Je pense vous voir hocher la tête.

Je me demande si, aux fins du compte rendu, vous pourriez formuler des observations à ce sujet.

La sénatrice Wallin : Encore une fois, je me considère chanceuse de présider le Comité des banques, car ce comité ne veut pas vraiment faire beaucoup de voyages. Voilà qui nous évite de nous colleter avec ce problème. Avec la technologie actuelle, les gens avec qui nous voulons échanger et faire affaire sont tout aussi satisfaits d’effectuer leur appel Zoom depuis New York ou Washington.

Dans le cas de ce comité, nous nous sommes occasionnellement rendus aux États-Unis. Je dirai simplement que l’avantage avec les voyages, peu importe le comité dont il s’agit, qu’il s’occupe de la santé mentale, de l’état de l’économie, de l’incidence de l’inflation ou des taux d’intérêt ou d’un autre sujet, c’est qu’on a une impression différente quand on voyage.

En tant que journaliste, nous avons fait valoir cet argument toute notre vie. On ne couvre pas le Moyen-Orient en restant à Ottawa et à Toronto. On ne couvre pas la Colline du Parlement assis dans son bureau d’Ottawa. Il faut sortir pour connaître les gens, leur parler, reconnaître leur visage, et avoir des contacts, des sources, des amis ou autre chose. Cela fait tout simplement partie du travail.

Je pense que pour de nombreux comités, les voyages sont un élément clé de leur travail. Nous sommes ici en tant que représentants provinciaux, et nous pouvons nous servir des voyages pour aller aux bons endroits et entendre les bonnes personnes.

Même en Saskatchewan, il est évident qu’on va à Saskatoon et à Regina parce que c’est plus facile, car il y a des hôtels et toutes ces commodités. Je sais que lorsque le Comité de l’agriculture s’est récemment rendu sur place, il avait une base, mais il passait ses journées à se déplacer en autobus et à marcher dans les champs. C’est important. On ne peut pas comprendre l’impact de quoi que ce soit — qu’il s’agisse du climat, de la taxe sur le carbone ou d’autre chose — à moins de le constater.

C’est vraiment important. Mais nous vivons à une époque — et c’est réaliste — où on peut être premier ministre, gouverneur général ou ministre, et tout le monde va vous poser des questions sur le verre de jus d’orange à 16 $ ou sur la raison pour laquelle la chambre d’hôtel était aussi grande qu’elle l’était. C’est la réalité et le monde dans lequel nous vivons. Je pense que cela nous fait faire des économies de bout de chandelle et nous empêche d’accomplir le travail que nous devons faire. Parfois, il faut regarder quelqu’un dans les yeux pour comprendre l’impact des taux d’intérêt sur sa vie, et pas seulement entendre les banquiers à ce sujet. Je pense que c’est une partie importante de notre travail.

La sénatrice Cordy : Je vous remercie de cette réponse. La technologie a changé bien des choses, mais les Canadiens aiment toujours la touche personnelle, particulièrement dans l’Est et dans l’Ouest.

La sénatrice Wallin : Cela mis à part, je pense qu’il est important que les gens comprennent ce que nous faisons. S’ils ne peuvent pas le voir, il leur sera très difficile de le comprendre. Cela est à notre avantage au sein de notre institution.

La sénatrice Cordy : Et si un comité voyage, devrait-il recevoir le montant pour couvrir les dépenses de tous ses membres?

La sénatrice Wallin : Oui, mais je sais pourquoi ce n’est pas le cas. J’ai vu les deux côtés de la médaille, à titre de présidente de comité qui dit qu’un membre ne peut pas voyager et en tant que membre de comité qui demande pourquoi. Peut-être que ce comité est aux prises avec des problèmes plus vastes, car c’est une question de budget. Si on veut que le Sénat accomplisse son travail et ne soit pas un simple groupe de réflexion national, mais aussi une institution qui effectue un second examen objectif, nous devrions être informés.

La sénatrice Busson : Je vous remercie, sénatrice Wallin, d’être ici. Votre expertise, non seulement dans le domaine bancaire, mais aussi au fil du temps, est réellement précieuse.

Je ne veux pas prendre beaucoup de votre temps. Je vais paraphraser votre déclaration : vous avez affirmé que différentes questions sont vues différemment dans différentes régions du pays. Bien entendu, l’un des principes du Sénat est la représentation régionale. Vous et moi venons d’une province qui ne compte que six sénateurs et, lorsque tout le monde est nommé, il arrive qu’il y ait moins de sénateurs de chacune de nos régions.

Je me demande si vous pourriez nous dire à quel point vous pensez que la représentation régionale est importante au sein des comités et, à ce propos, si vous pensez que les petits comités pourraient aider en permettant aux gens des provinces moins représentées d’être davantage représentés au sein de ces comités.

La sénatrice Wallin : Oui, je pense que les petits comités présentent de nombreux avantages. Ils sont plus efficaces, plus efficients. On peut simplement fixer un objectif et tout le monde le connaît dans n’importe quelle situation de travail. J’ai fait partie du conseil d’administration d’une université, qui comptait 50 membres. Le temps qu’on ait compté les votes, la moitié de la réunion était écoulée. Je pense que nous devons nous attaquer à ce problème.

La représentation régionale est cruciale. En général, nous sommes censés faire valoir nos points de vue régionaux, mais même cela dépend de beaucoup d’autres facteurs. Je ne m’attends pas à ce que tout le monde au centre-ville de Toronto comprenne l’incidence de la taxe sur le carbone sur le séchage du grain, mais je pense que nous avons besoin d’une tribune pour discuter de la question afin de nous renseigner, car nous siégeons tous au Sénat et, au bout du compte, nous votons sur tous les projets de loi. On peut être au fait des dossiers des comités dont on fait partie et avoir étudié des parties précises de projets de loi, mais nous votons encore sur des projets de loi que nous n’avons pas examinés en comité. Cela exige énormément de travail.

C’est un vœu pieux, mais nous devrions faire preuve d’un peu plus de souplesse. S’il y a un domaine dans lequel certains sénateurs ont de l’intérêt et de l’expertise et si un comité dispose de six semaines pour vraiment se pencher sur la question avant le dépôt du budget et envoyer des notes au gouvernement, cela serait peut-être beaucoup plus efficace qu’une étude d’un an sur la signification de X, Y ou Z. J’aimerais croire que nous pourrions simplement faire un léger remaniement et repenser notre approche à l’égard des comités en général.

J’aimerais que ce vœu devienne réalité, et je pense aussi que la représentation régionale est importante. Je ne pense pas qu’on puisse avoir un comité qui n’a pas d’expertise. Par ailleurs, il y a les problèmes de conflit, dont nous devons toujours être conscients. On ne peut pas être président d’une banque et faire partie du Comité des banques, mais dans d’autres cas, on peut être informé. Si on comprend assez bien les questions agricoles, on devrait faire partie du Comité de l’agriculture. J’ai fait partie du Comité des communications et des transports. Je m’y connais fort en communications, mais beaucoup moins en transport. Encore une fois, c’est un concept qui date de l’époque où les gares étaient des centres télégraphiques. Nous sommes en 2023, alors séparons certains domaines. Nous avons peut-être besoin d’un comité indépendant pendant un certain temps pour s’occuper de l’intelligence artificielle. Six comités pourraient légitimement s’en charger, mais six personnes réellement intéressées à s’asseoir et à s’attaquer au problème pourraient s’en occuper, puis faire rapport au groupe.

La sénatrice Busson : En outre, les réunions de lundi, à mon avis, nuisent à la représentation régionale. Un comité très important, celui de la Défense nationale, siège les lundis, ce qui exclut à peu près tout le monde des régions éloignées du pays.

La sénatrice Wallin : J’ai déjà fait partie du Comité de la défense nationale à titre de vice-présidente et, de nouveau, en qualité de présidente, et j’ai dû renoncer parce qu’avec les horaires d’avion — je prends l’avion jusqu’en Saskatchewan, puis je conduis —, je rentrais à la maison tard le vendredi soir et partais tôt le dimanche matin. À un moment donné, on ne fait son travail nulle part, car on a également des responsabilités dans nos provinces d’origine, et si je ne m’y rends pas pour faire mon travail ici, comment puis-je trouver un équilibre? C’est donc un gros problème.

La sénatrice Omidvar : Je vous remercie, sénatrice Wallin, d’être parmi nous aujourd’hui. Je vous poserai une question concernant votre expertise dans le domaine des communications.

Nous avons beaucoup parlé du bon travail des sénateurs et des comités. Je pense que nous savons tous que la perception des sénateurs et du Sénat dans la communauté n’est pas aussi optimale qu’elle devrait l’être. Croyez-vous que les comités sénatoriaux — leurs présidents en particulier — devraient jouer un rôle plus actif afin de faire connaître leur travail à la population pour que le public sache ce qu’il en est?

La sénatrice Wallin : J’en suis absolument convaincue. Pour moi, c’est notre travail. Quand nous avons consacré beaucoup d’efforts et de longues heures à la rédaction d’un rapport ou d’une étude — peu importe ce que c’est —, ce document mérite toute l’attention. Au cours de la dernière année, la page Web du Comité des banques a reçu 13 487 visites parce que nous faisions des études pertinentes. Nous parlons de l’inflation et de l’économie, de vivre dans une économie axée sur les données, de la manière d’inspirer les investissements et de logement. Nous parlons de questions qui touchent les gens.

Nos rapports ont été téléchargés 1 670 fois. C’est encourageant parce que je sais que quelqu’un, quelque part, a regardé le titre et s’est dit que cela pourrait être intéressant et pertinent pour son travail. Mais si moi-même et d’autres membres du comité n’attirons pas l’attention sur nos travaux dans l’océan de la surinformation, c’est un peu le contraire qui se produit. Quand les gouvernements veulent camoufler une mauvaise nouvelle, ils l’annoncent le vendredi après-midi à 17 heures; nous les voyons agir ainsi depuis des décennies. Nous devons donc faire le contraire, c’est-à-dire courir partout, être aussi publics et aussi visibles que possible au sujet du travail que nous faisons et joindre les communautés touchées. Le rapport de notre comité a été publié en juin, au beau milieu de la folie, avec tous ces projets lois qui sont adoptés et où il n’est question que de politique toute la journée.

J’ai donc attendu jusqu’à la fin août et j’ai envoyé des copies de ce rapport avec des notes manuscrites aux gens qui, j’en étais pas mal sûre, l’avaient manqué dans la frénésie de juin. C’est une façon d’attirer de nouveau l’attention sur notre travail, puis nous recommençons. Notre rapport le plus téléchargé porte sur le système bancaire ouvert. Il date de plusieurs années, mais il contient de l’information basique de qualité que les gens doivent comprendre dans un monde technologique en évolution.

[Français]

La sénatrice Mégie : Je regardais les temps de réunion, l’horaire des réunions. Nous savons que cela peut entrer en conflit avec les votes et les séances régulières du Sénat. Je regarde les comités qui se réunissent le lundi après-midi. Ils ont toujours des membres absents. J’ai pensé au vendredi matin; on pourrait demander de siéger le vendredi matin pour les réunions, mais on va avoir le même problème que le lundi après-midi.

Ne serait-ce pas une bonne idée de miser sur la possibilité que les comités puissent siéger de façon hybride? Peut-être que cela aiderait beaucoup pour les réunions du lundi et du vendredi. Qu’est-ce que vous en pensez?

[Traduction]

La sénatrice Wallin : Je n’aime pas beaucoup les réunions en ligne. J’adore avoir la possibilité d’inviter des témoins à témoigner en ligne, mais je sens qu’il y a une collégialité supérieure en présentiel. Nous sommes plus allumés et nous rebondissons sur les interventions des autres quand nous siégeons ensemble en comité. Je l’ai constaté moi-même quand nous siégions à distance durant la COVID. Je n’étais simplement pas aussi engagée. C’était plus difficile de garder sa concentration, parce qu’il y avait des distractions, que la technologie plantait toujours, que les microphones restaient en sourdine et que nous voyions et vivions toutes sortes de choses.

Je peux comprendre que nous puissions réaliser quelques travaux en mode hybride. Nous pourrions peut-être travailler ainsi si les comités comptaient moins de membres et ciblaient un enjeu précis dans un temps limité. Je sais que bon nombre d’entre nous sont un peu jaloux de voir les ministres libres de leurs déplacements, voter sur leur téléphone; pour eux, la vie est belle, et ils profitent de toutes sortes d’avantages. Cependant, l’inconvénient, c’est que comme je l’ai vu, des ministres peuvent se trouver à l’aéroport et se faire dire par un adjoint qu’ils doivent voter sans délai. Ils ne savent pas comment voter et doivent demander l’aide de leur personnel, voilà l’inconvénient. Je pense qu’il faut être très prudent et examiner ce genre de questions de près.

Je pense que nous devons intégrer la technologie à nos travaux de manière bien plus directe pour nous et... Nous pouvons accomplir bien des choses. Pour les comités de direction, c’est ce que nous privilégions, car si nous devions tous nous réunir dans une même salle, les réunions n’auraient jamais lieu.

C’est davantage une question de structure. C’est complètement hors sujet, mais je ne suis pas une grande amatrice de la période de questions au Sénat. Je ne pense pas que ce soit à nous de faire ce travail, même si c’est avec le leader du gouvernement à la Chambre ou avec les ministres.

Nous devrions peut-être reconfigurer nos journées de travail pour que les gens n’en manquent pas trop. Nous avons une journée de séance qui déborde d’enjeux administratifs. Nous avons beaucoup de travail à faire alors et nous devons y ajouter le temps passé en comités.

La sénatrice Cordy : J’ai une question brève sur la difficulté à planifier l’horaire des comités. Je sais que nous avons traversé la COVID, qui a été très pénible, mais les choses ne semblent pas être bien mieux de nos jours.

D’autres présidents et d’autres vice-présidents de comités ont suggéré que certains comités se réunissent plus longtemps — vous en avez parlé dans votre exposé plus tôt —, soit trois ou quatre heures, une fois par semaine, ce qui serait assez épuisant. Quoi qu’il en soit, nous pourrions tenir de plus longues réunions sans perdre de temps, parce que ce ne serait qu’une seule plage continue. Je sais que vous en avez parlé, mais pourriez-vous en dire un peu plus là-dessus?

La sénatrice Wallin : Oui, je pense que nous devons repartir de zéro. Il pourrait y avoir une séance de quatre heures par semaine pour un comité, tandis qu’un autre comité se réunirait pendant une heure à trois reprises. Je sais que cela complique la donne, surtout si nous utilisons la technologie, parce que nous devons continuellement nous assurer que tout fonctionne, que les témoins utilisent le bon casque d’écoute, etc. Nous devons devenir un peu plus à l’aise avec ce genre de propositions.

J’ai participé au moyen de Zoom à des activités d’autres organisations où il n’était pas nécessaire de faire tout cela. On ouvre l’appli, on fait la réunion et s’il y a un pépin, on se débrouille pour rétablir le signal. Nous devons simplement devenir plus à l’aise avec la technologie. L’interprétation est bien sûr un enjeu très important, parce que les témoins doivent pouvoir y avoir accès.

Je pense que nous devons repartir de zéro. C’est probablement ce que fait votre comité. Je ne sais pas ce que les autres témoins ont dit, mais il est grand temps de repenser le processus.

La sénatrice Cordy : Je vous remercie.

La sénatrice Omidvar : Il a été question que des comités se réunissent les lundis soirs. Vous avez fait partie du Comité de la défense, et je fais partie du Comité des droits de la personne. Je sais que la participation y est faible et que la représentation régionale y est quasiment nulle. Il devient très difficile d’accomplir nos travaux.

Je me demande ce que vous penseriez d’une solution de rechange qui consisterait en ce que tous les comités se réunissent les mardis, mercredis et jeudis, entre 8 heures et 13 heures. Cette idée entre bien sûr en conflit avec les réunions des caucus et des groupes. Devrions-nous leur demander de se réunir les lundis et les vendredis? Cela nous donnerait du temps, et nous aurions accès aux services d’interprétation et aux ressources nécessaires pour faire nos travaux en comités.

La sénatrice Wallin : Eh bien, tout le monde s’est arrangé pour se réunir en groupes selon l’horaire disponible. Le Groupe des sénateurs canadiens se réunit les mardis. Je ne pense pas que nos réunions ralentissent les travaux, parce que nous devions trouver une plage horaire où nous pouvions nous réunir en groupe sans déranger...

La sénatrice Omidvar : Mais vous utilisez bien les ressources d’interprétation et les salles.

La sénatrice Wallin : Oui, bien sûr.

La sénatrice Omidvar : Nous avons entendu ici que ce ne sont pas seulement les autres enjeux qui interviennent, mais aussi la question des salles disponibles et des ressources d’interprétation.

La sénatrice Wallin : Oui, en effet. Je répète que nous nous réunissions tout le temps avant. Bien des comités se réunissaient dans l’édifice Victoria, où les salles sont bonnes; il y en a des grandes et des petites et elles sont toutes libres, par manque de personnel. C’est totalement parce que nous avons perdu beaucoup de ressources, et c’est pourquoi nous devons repenser notre façon de faire, selon moi.

Concernant l’accès aux installations d’interprétation, nous pourrions embaucher des contractuels dans certains cas. Nous devons simplement tout repenser notre façon de faire nos travaux et de tenir nos réunions. Nous pourrions avoir des séances plus longues, mais prévisibles. Il pourrait y avoir plus de temps pour les séances les mercredis, ce genre de choses.

Nous devons être réalistes. Le même problème se présente les lundis, les jeudis soirs et sans aucun doute les vendredis matins, lorsque nous avons l’obligation d’être dans nos provinces respectives. Encore là, nous ne retournons pas à la maison pour prendre un jour ou deux de congé. J’étais chez moi à l’Action de grâces et j’ai donné deux discours différents en plus de participer à trois événements publics. Nous devons participer à ce genre de rencontres. Nous devons être présents dans nos régions. C’est un aspect important de notre travail.

[Français]

La présidente : Merci beaucoup. J’ai deux questions. J’ai attendu à la fin pour vous les poser.

[Traduction]

Nous avons entendu beaucoup de remarques. Aujourd’hui, il y a une question et quelques enjeux qui n’avaient pas été soulevés par le passé.

Il y a une possibilité qui a déjà été évoquée sur laquelle je veux vous entendre. Serait-ce une bonne idée de répartir nos travaux de comités en groupes? Il pourrait y avoir un comité législatif qui s’occuperait seulement des projets de loi et des comités thématiques qui mèneraient des études en profondeur. Que pensez-vous de cette façon de fonctionner? Cela se fait dans divers pays. Est-ce une bonne suggestion, selon vous?

La sénatrice Wallin : Cela nous ramène au problème que la sénatrice Cordy a souligné, soit que si l’on ne peut pas faire un voyage avec un comité auquel on siège parce que le budget est insuffisant, on ne peut pas faire entendre sa voix.

Vous évoquez la possibilité qu’un groupe de sénateurs s’occupe à lui seul de tous les projets de loi au Canada, puis qu’un autre se charge des grandes réflexions sur toutes sortes de sujets. C’est là un choix difficile que je ne voudrais pas avoir à faire. Moi, je veux faire les deux, donc, je ne pense pas que nous pouvons fonctionner de la sorte.

Vous vous souviendrez, sénatrice Bellemare, que le Comité des banques a entamé la présente session avec quatre grandes priorités : la main-d’œuvre, le logement, la cryptomonnaie et l’état de l’économie. Différents groupes de sénateurs se sont réunis entre eux pour discuter du marché du travail intérieur et des grands enjeux connexes, ainsi que du logement et des grands enjeux connexes. Nous pourrions procéder ainsi pour les comités principaux. Nous pourrions répartir le travail en petits groupes avant de nous réunir tous ensemble. Nous faisons de même quand nous nous renseignons sur les projets de loi que nous n’avons pas l’occasion d’étudier en profondeur parce que nous ne siégeons pas au comité concerné.

La présidente : J’ai une autre question à vous poser. Quelle serait la façon optimale pour qu’un sénateur participe aux comités et que les travaux soient bien faits? Combien d’heures par semaine ou combien de comités cela représenterait-il?

La sénatrice Wallin : Je ne suis pas sûre de comprendre. Me demandez-vous si nous sommes obligés ou non de participer aux travaux des comités?

La présidente : Non, je me demande quel serait le nombre d’heures idéal à consacrer aux comités...

La sénatrice Wallin : Oh! vous parlez de répartition du travail.

La présidente : À combien de comités un sénateur devrait-il participer? Est-ce quatre comités, ou deux comités? Quelle serait l’ampleur idéale de la tâche pour un sénateur?

La sénatrice Wallin : Pour être réaliste, je dirais deux comités. J’ai essayé de siéger à trois comités. Je l’ai fait et j’ai remplacé d’autres sénateurs lorsque les groupes étaient trop petits et ce genre de choses. Je sentais que je ne faisais pas du bon travail dans quelque comité que ce soit quand je devais courir à gauche et à droite. J’étais présente, mais je ne faisais que combler une place. Ce n’est pas le genre de travail que je dois accomplir.

La présidente : Je l’ai fait souvent. Je siège au Sénat depuis longtemps, et j’ai pris part aux travaux de quatre comités, de trois, de deux comités. J’ai siégé en moyenne à deux comités ou à un grand comité et un petit.

La sénatrice Wallin : Nous avons tellement plus de responsabilités et d’enjeux à étudier de nos jours, et tout va tellement vite. Ce n’est pas comme auparavant, où personne n’était au courant de nos activités en temps réel. Nous devons nous adapter à la nouvelle réalité. Nous devons donc porter un regard plus aiguisé sur les choses, être mieux informés et être totalement présents.

La présidente : Merci beaucoup. C’était très intéressant.

La sénatrice Wallin : Je vous remercie tous beaucoup.

[Français]

La présidente : Merci beaucoup pour vos commentaires. Je pense que ça va alimenter nos réflexions futures. La semaine prochaine, nous procéderons à des discussions sur les différents sujets pour voir quels sont nos commentaires et nos observations. Merci et bonne journée.

(La séance est levée.)

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