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RPRD - Comité permanent

Règlement, procédure et droits du Parlement


LE COMITÉ PERMANENT DU RÈGLEMENT, DE LA PROCÉDURE ET DES DROITS DU PARLEMENT

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le mardi 1er octobre 2024

Le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement se réunit aujourd’hui, à 9 h 31 (HE), conformément à l’article 12-7(2)a) du Règlement, pour étudier des amendements possibles au Règlement et pour étudier un projet d’ordre du jour (travaux futurs).

La sénatrice Diane Bellemare (présidente) occupe le fauteuil.

La présidente : Bonjour à tous. Nous allons commencer la première réunion de l’automne. Nous avons eu une rencontre du Sous-comité du programme et de la procédure la semaine dernière. Je suis Diane Bellemare, présidente de ce comité. Avant de commencer, nous allons faire un tour de table pour que tout le monde puisse se présenter, en commençant par ma droite.

La sénatrice Mégie : Marie-Françoise Mégie, du Québec.

La sénatrice Saint-Germain : Raymonde Saint-Germain, du Québec.

[Traduction]

La sénatrice Busson : Bev Busson, de la Colombie-Britannique.

[Français]

La sénatrice Audette : [mots prononcés en innu-aimun] Michèle Audette, du Québec.

[Traduction]

Le sénateur Woo : Yuen Pau Woo, de la Colombie-Britannique.

Le sénateur Kutcher : Stan Kutcher, de la Nouvelle-Écosse.

La sénatrice Lankin : Frances Lankin, de l’Ontario.

Le sénateur D. M. Wells : David Wells, de Terre-Neuve-et-Labrador.

Le sénateur McNair : John McNair, du Nouveau-Brunswick.

Le sénateur MacDonald : Michael MacDonald, de la Nouvelle-Écosse.

La sénatrice Ataullahjan : Salma Ataullahjan, de l’Ontario.

[Français]

La présidente : Bonjour et bienvenue à tout le monde. Nous allons poursuivre ce matin les travaux entamés en juin dernier concernant les sénateurs non affiliés, mais juste avant, je vais faire un bref rappel par rapport aux écouteurs en vous demandant de toujours les éloigner du micro pour éviter les accidents.

Sur ce, rappelons que, lors de notre dernière séance en juin dernier, nous avons entendu les témoignages de trois sénateurs indépendants — c’est-à-dire non affiliés, trois sénateurs non affiliés. On les appelait « indépendants » dans l’ancien temps, mais en ces temps modernes où il y a plusieurs sénateurs indépendants et regroupés, nous avons maintenant des sénateurs qui ne sont affiliés à aucun groupe ni à aucun caucus. Nous avons décidé de revoir le statut de ces sénateurs.

Rappelons également qu’en mai ou juin dernier, la sénatrice Lankin a déposé au Sénat une proposition d’amendement — elle fait partie du groupe des représentants du gouvernement —, qui proposait que le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement revoie toutes les règles et les pratiques qui concernent les sénateurs non affiliés. La proposition demandait que cette revue soit terminée en décembre 2024.

Évidemment, cette motion n’a pas encore été adoptée, mais nous avions déjà décidé de faire cette étude. Nous allons la poursuivre. Comme vous le savez, c’est ma dernière réunion avec vous, puisque le Sénat m’abandonne le 13 octobre prochain. Nous aurons donc le loisir d’adopter aujourd’hui une motion portant sur mon remplacement. La semaine prochaine, nous allons consacrer la réunion non pas à un comité plénier, mais plutôt à une réunion du comité directeur, pour décider de la suite des choses.

Sur ce, commençons la première partie de notre réunion aujourd’hui. Nous avons deux témoins. Ce sont des greffiers de la Chambre des communes. Il s’agit de Jeffrey LeBlanc, sous-greffier, Procédure, et Jean-Philippe Brochu, greffier adjoint, Service de la séance. Nous les avons invités pour analyser et comprendre un peu mieux comment sont traités les députés non affiliés à l’autre endroit.

Dans un deuxième temps, nous allons étudier des données concernant les sénateurs non affiliés. Cette analyse vient d’une analyse effectuée par la Bibliothèque du Parlement à la suite d’une motion présentée par le sénateur Kutcher visant à examiner ces statistiques. Cela a été très long, vous allez le voir, mais ce sera pour la deuxième partie.

Commençons sans plus tarder avec le témoignage de nos greffiers, qui auront quelques minutes chacun, puis nous procéderons avec la période des questions.

Jeffrey LeBlanc, sous-greffier, Procédure, Chambre des communes : Merci beaucoup, madame la présidente. Nous voudrions tout d’abord remercier les membres du comité de nous avoir invités à comparaître. Nous partagerons avec vous des observations sur les occasions offertes aux députés indépendants et à ceux qui appartiennent à des partis non reconnus de participer aux travaux de la Chambre. Nous serons heureux de répondre à vos questions par la suite.

[Traduction]

Du point de vue de la procédure parlementaire, vous serez sans doute surpris d’apprendre qu’il n’y a pas de définition dans le Règlement de la Chambre des communes de ce qu’est un parti reconnu. Les Présidents ont dû s’en remettre à la pratique récente et aux décisions passées qui prévoient qu’un parti reconnu est un parti qui compte 12 députés ou plus.

La Loi sur le Parlement du Canada prévoit des avantages pécuniaires sous forme d’indemnités pour certains postes au sein des partis qui comptent au moins 12 députés à la Chambre des communes et, de plus, les règlements administratifs du Bureau de régie interne accordent un soutien financier aux parties qui comptent plus de 12 députés.

[Français]

Le Règlement et la pratique confèrent aussi certains avantages aux partis reconnus et à leurs députés, comme l’ordre des interventions pendant les débats, l’attribution des journées de l’opposition dans le cadre des travaux sur les subsides, le droit de demander un vote par appel nominal, ou alors la composition des comités permanents et législatifs, pour en identifier quelques-uns.

Malgré tout, les députés indépendants et de partis non reconnus peuvent prendre part aux travaux de la Chambre et de ses comités de diverses façons.

Jean-Philippe Brochu, greffier adjoint, Service de la séance, Chambre des communes : Actuellement, à la Chambre, il y a deux députés du Parti vert, soit Mme May et M. Morrice. Comme ce parti n’a pas un minimum de 12 députés, il n’a pas le statut de parti reconnu. La Chambre a aussi quatre députés indépendants, soit M. Dong, M. Rayes, M. Rodriguez depuis quelques jours et M. Vuong, qui ne sont pas affiliés à un parti. Ensemble, ces six députés représentent 1,8 % de la députation. Je devrais dire qu’ils représentent quant à eux 3,28 % de l’opposition, donc, 6 députés sur 183. Le nombre d’indépendants varie évidemment d’une législature à l’autre, et même au cours d’une législature. Par exemple, pendant la 42e législature, ce nombre total est passé de 11 députés au début à 22 députés à la dissolution.

[Traduction]

Comme leurs collègues, les députés indépendants et les députés d’un parti non reconnu peuvent prendre part au processus législatif de diverses façons. Ils peuvent participer aux initiatives parlementaires et peuvent présenter des avis de motion et des motions d’amendements à l’étape du rapport.

L’ordre des intervenants que suivent les Présidents lors des débats est normalement négocié au début d’une législature dans le cadre d’une entente entre les partis reconnus. Le Président assigne le 49e temps de parole aux députés indépendants et aux députés des partis non reconnus sur la base du premier arrivé, premier servi. Si on leur donne la parole pendant un débat, ces députés peuvent alors présenter des amendements et des sous-amendements, comme tout autre député. Au besoin, les députés peuvent négocier entre eux, et il arrive qu’un parti reconnu cède un de ses temps de parole à des députés indépendants.

Cependant, ces députés ont rarement l’occasion de participer à certains types de débats, comme ceux sur les motions de l’opposition, les débats d’urgence, et les débats sur les initiatives parlementaires, car les travaux sont habituellement interrompus avant d’en arriver à leur temps de parole. Par conséquent, ils se concentrent plutôt sur la période des questions et observations qui suit les discours de leurs collègues.

[Français]

Au cours des dernières années, nous avons pu également constater qu’à l’occasion les dispositions d’ordres spéciaux adoptés par la Chambre prévoyaient la participation de députés de partis non reconnus. On le voit dans le cadre de certains hommages, lors de débats spéciaux ou même pour des projets de loi dont on veut régir les délibérations. Dans ces cas, le libellé de la motion va alors inclure pour les discours quelque chose comme, « qu’un député de chaque parti reconnu et un député du Parti vert puissent prendre la parole ».

Soulignons qu’habituellement, les députés indépendants ne sont pas ajoutés à la liste des membres des comités, bien que des contre-exemples existent. Malgré cela, le Règlement prévoit qu’à moins que la Chambre ou le comité en ordonne autrement, tout député qui n’est pas membre du comité peut prendre part aux délibérations publiques, mais il ne peut pas voter, ni proposer de motion, ni faire partie du quorum. Ainsi, il arrive que les députés indépendants et de partis non reconnus assistent aux réunions. Il est même déjà arrivé que les comités leur permettent de poser des questions aux témoins.

[Traduction]

Depuis la 41e législature, les comités permanents adoptent des motions de régie interne au début de chaque session pour permettre aux députés indépendants de participer à l’étude article par article des projets de loi même s’ils ne sont pas membres du comité. Ils peuvent présenter des amendements et faire une brève déclaration à leur sujet. Ces amendements sont alors considérés comme ayant été présentés pendant l’étude article par article afin que le comité puisse prendre une décision à l’égard de chacun d’eux.

[Français]

M. LeBlanc : Cela nous amène à aborder avec vous la participation lors de la période des questions. Au cours des dernières années, les Présidents se sont efforcés d’inviter les députés indépendants à poser des questions selon une relative proportion des sièges qu’ils occupent à la Chambre. Il s’agit probablement de l’un des enjeux les plus discutés à la Chambre en ce qui concerne les députés indépendants et les partis non reconnus. Ce fut le cas notamment le 23 octobre 2018 dans une décision rendue par le Président Regan concernant le nombre de questions attribuées aux indépendants. Il a alors déclaré ceci :

En fait, les Présidents qui se sont succédé récemment ont déployé des efforts considérables pour trouver un équilibre délicat dans la répartition des questions entre les partis politiques reconnus et les députés indépendants.

[Traduction]

Le Président Rota s’est également penché sur les questions de cette nature le 23 février 2021 et le 27 avril 021. Dans leurs décisions, les Présidents ont réaffirmé leur rôle dans la protection des droits des députés indépendants en tenant compte de trois facteurs importants : la pratique établie, le temps prévu dans le Règlement et la possibilité de poser des questions au gouvernement.

Ainsi, en fonction de leur nombre de sièges au Parlement, les députés indépendants et les députés des partis non reconnus se partagent actuellement quatre questions orales par semaine, ou une par jour de séance, sauf les mardis. Ces questions sont toujours posées à la fin de la période des questions, après celles des partis reconnus. De plus, en posant des questions orales, les députés peuvent ensuite poser leurs questions à nouveau en prenant part au débat d’ajournement, qu’on appelle affectueusement le « late show ».

[Français]

Pour ce qui est des déclarations des députés, en ce moment, chaque député indépendant et de parti non reconnu peut faire une seule déclaration par période de quatre semaines, et une seule de leur déclaration, la première, est permise par séance.

[Traduction]

Comme vous pouvez le constater, l’approche utilisée par la Chambre est souvent basée sur un calcul de la taille relative des partis politiques, mais certains mécanismes permettent aux députés indépendants de faire entendre leurs voix. Comme le président est le gardien des droits et privilèges de la Chambre des communes, en tant qu’institution, et des députés qui la composent, le président s’acquitte ainsi de sa responsabilité de protéger les droits des députés indépendants.

C’est ce qui met fin à notre exposé. Nous vous remercions encore de votre invitation à comparaître. Nous serons heureux de répondre à vos questions.

[Français]

La présidente : Merci, monsieur le greffier.

La sénatrice Saint-Germain : Bienvenue, monsieur LeBlanc et monsieur Brochu. J’ai deux questions rapides. La première est opérationnelle. Vous avez dit que, pour les périodes des questions, il y a quatre questions qui sont allouées, c’est-à-dire qu’il y a des questions qui sont allouées aux indépendants et il y a aussi les déclarations. Si je comprends bien, vous avez dit qu’il y a quatre déclarations qui sont allouées chaque mois aux indépendants. Comment cela se négocie-t-il? Si vous accordez aux indépendants un certain nombre de questions, qui négocie avec eux? Est-ce la table? Est-ce la présidence? Qui décide de ces quatre personnes, et à partir de quels critères?

M. LeBlanc : C’est une très bonne question. Le nombre est fixé à la suite des négociations avec les partis reconnus, qui établissent la répartition des questions et des déclarations entre eux. Essentiellement, c’est un calcul mathématique pour arriver aux chiffres attribués aux députés indépendants. Ensuite, pour la répartition des questions et des déclarations entre eux, ils le négocient eux-mêmes. Donc, ils arrivent à une entente entre eux. Ces ententes sont communiquées à mon bureau. Il y a une personne qui travaille à mon bureau, une greffière à la procédure, qui est responsable d’être la liaison avec les députés indépendants. Elle est informée régulièrement de leur part de ceux qui poseront les questions et prononceront les déclarations chaque jour.

La sénatrice Saint-Germain : Ma deuxième question s’adresse à vous, monsieur Brochu. Elle porte sur le privilège parlementaire relativement aux comités. Les députés non affiliés, dits indépendants, n’ont pas de comité, mais ils peuvent participer à un comité et on peut leur donner l’occasion de poser une question. Comment cela respecte-t-il le privilège parlementaire de ces députés? Quel est l’argument que vous avez retenu pour considérer que cette approche permettait néanmoins de respecter le privilège parlementaire et les droits du Parlement?

M. Brochu : C’est une grande question.

La sénatrice Saint-Germain : Vous pouvez donner une petite réponse.

M. Brochu : Je vais tenter d’y aller succinctement. À la Chambre, la composition des comités est établie par les whips des partis eux-mêmes. Donc, le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre délègue cette autorité aux whips des partis reconnus. C’est la première chose. C’est reconnu dans le Règlement.

Ce ne sont pas tous les députés, de toute façon, qui peuvent participer à tous les comités, voter et être membres. Ils peuvent toujours être amenés à remplacer un de leurs collègues lorsqu’ils font partie d’un même comité. Même s’ils ne peuvent pas être membres, comme je l’ai indiqué plus tôt, ils peuvent tout de même assister aux réunions. Toutefois, pour prendre la parole en comité, ils doivent avoir la permission des membres du comité.

En quoi cela correspond-il au privilège? En fait, on ne restreint pas leur accès, à l’exception des réunions à huis clos, évidemment. Autrement, s’ils souhaitent prendre la parole, comme leurs collègues qui ne font pas partie ou qui ne sont pas membres des comités, ils doivent avoir la permission de chacun des comités pour le faire.

Je pourrais mentionner un élément. Vous avez parlé de privilège. Je l’ai mentionné tout à l’heure dans la présentation. Un des grands changements qui ont affecté les députés indépendants et leur participation en comité est la possibilité de proposer des amendements. Il y a eu des étapes du rapport à la Chambre particulièrement complexes à la Chambre il y a un peu plus d’une dizaine d’années, une douzaine d’années maintenant, où certains députés indépendants ont participé en proposant des centaines d’amendements. À l’époque, une des décisions qui avaient été prises par la présidence était d’inviter les comités à offrir une plus grande tribune aux députés indépendants, donc que le travail se fasse en comité plutôt qu’à l’étape du rapport. La plupart des comités, sinon tous les comités ont maintenant ce type de motion de régie interne qui favorise la participation des députés indépendants pour qu’ils puissent proposer des amendements à l’étape du comité plutôt que de le faire à la Chambre.

La sénatrice Saint-Germain : Merci.

La présidente : Merci. C’est un problème très important dans le cas des sénateurs non affiliés.

[Traduction]

La sénatrice Batters : Je vous remercie d’être avec nous aujourd’hui et de nous aider dans ce dossier.

À l’heure actuelle, il n’y a que quatre députés indépendants, comme vous l’avez mentionné. Dans les documents que vous nous avez fournis, et dans votre déclaration liminaire, vous avez parlé de ces quatre députés indépendants. Ils peuvent poser en tout quatre questions à la période des questions par semaine, et c’est une décision de la présidence. Est-ce une question chacun, ou cela varie-t-il en fonction des négociations entre ces quatre députés indépendants, et cela inclut-il les deux députés du Parti vert? En fait, cela veut-il dire que six députés sont en concurrence pour poser ces quatre questions? Est-ce que cela varie, et comment cela a-t-il fonctionné lors des dernières législatures, lorsqu’il pouvait y avoir plus de députés indépendants?

M. LeBlanc : Ce sont de très bonnes questions.

Je confirme que oui, en effet, les six députés, c’est-à-dire les quatre députés indépendants et les deux députés du Parti vert, se partagent les quatre questions. Le sixième, M. Rodriguez, n’est venu s’ajouter que depuis quelques jours. Il arrive assez souvent que les députés indépendants ne participent pas beaucoup. M. Dong, par exemple, pose rarement des questions. Je ne suis pas certain qu’il en ait déjà posé une à la période des questions. De façon générale, donc, les quatre autres députés arrivent à poser une question par semaine, et cela fonctionne bien.

Dans le passé, par exemple, lors de la 42e législature, de 2015 à 2019, le Bloc québécois avait, je pense, 10 sièges, soit tout juste un peu moins que le nombre requis pour être un parti reconnu, alors ses députés étaient considérés comme des députés indépendants. Je ne crois pas que nous ayons déjà eu une situation où les députés indépendants pouvaient poser plus d’une question à la période des questions. Je pense que c’est relativement la norme. Depuis que je suis ici, je ne pense pas qu’il y en ait eu plus d’une.

La sénatrice Batters : Je vous remercie. Oui, M. Rodriguez est passé du jour au lendemain de ministre du Cabinet à député indépendant.

Au sujet de l’article 31 du Règlement, les déclarations des députés, avez-vous dit qu’il y en avait quatre par mois?

M. LeBlanc : Tous les députés indépendants ou d’un parti non reconnu peuvent faire une déclaration par période de quatre semaines. C’est ainsi que ce temps est partagé.

La sénatrice Batters : Au sujet des éléments désignés à la Chambre des communes pour les discours, comme les projets de loi, etc., vous avez dit dans votre déclaration — et corrigez-moi si je me trompe — que les députés indépendants n’ont pas normalement la chance de faire ce genre de discours parce que les temps de parole sont limités. Le temps qu’on y consacre est déjà terminé lorsque c’est à leur tour, alors ils se concentrent plutôt sur les questions et les observations.

Au Sénat, c’est en fait un avantage pour les sénateurs non affiliés, car il n’y a pas de limite de temps qui les prive de la possibilité de prononcer un discours. On ne dit pas que le débat sur tel projet de loi va durer une heure et qu’on passera ensuite à autre chose. Il n’y a pas de limites de temps de cette nature, si bien qu’un sénateur non affilié pourrait potentiellement prononcer un discours comme tout autre sénateur pendant une période de 15 minutes à moins, bien entendu, que le gouvernement impose une attribution de temps sur un projet de loi. Autrement, ils pourraient le faire. Est-ce que j’interprète cela correctement? Convenez-vous, quand on compare les deux, que cela présente tout un avantage pour les sénateurs non affiliés au Sénat?

M. LeBlanc : Il est juste de dire que nos débats... comme M. Brochu l’a mentionné, c’est le 49e créneau que l’on accorde à des membres de partis indépendants ou non reconnus, et très souvent, on ne se rend pas à 49 discours sur un sujet particulier. C’est très rare. Parfois, d’autres partis leur donneront leur place pour leur permettre de participer, mais dans le cadre de débats courts d’une durée limitée, notamment durant les journées de l’opposition, où c’est une seule journée de débat, ou durant l’étude d’un projet de loi d’initiative parlementaire, qui ne dure que deux heures sur un point donné, il est très rare qu’ils aient l’occasion d’intervenir. Si vous n’avez pas ces mêmes débats d’une durée limitée, il y aura probablement plus d’occasions.

Votre institution est également plus petite. Elle compte 105 sénateurs, n’est-ce pas? Je me suis senti gêné pendant une seconde. C’est une institution plus petite, si bien que le pourcentage que ses membres représentent est plus important qu’à la Chambre.

La sénatrice Batters : Pour les projets de loi d’initiative ministérielle, y a-t-il souvent des créneaux horaires limités sur la durée des débats, et quels sont ces créneaux?

M. LeBlanc : Encore une fois, il est assez rare qu’on se rende au 49e créneau. Lorsque cela arrive, c’est sur des projets de loi controversés ou des projets de loi d’exécution du budget qui feront parfois l’objet de plusieurs jours de débat, mais la plupart du temps, le débat se termine naturellement parce qu’il n’y a plus d’intervenants ou parce que l’attribution du temps met fin au débat. Pour les députés indépendants qui veulent participer, leur meilleure chance est d’obtenir une place auprès de l’un des partis reconnus, ce qu’ils parviennent habituellement à faire, je pense, avec un certain succès. Le Parti vert, plus particulièrement, entretient de bonnes relations de travail et réussit parfois à obtenir des créneaux d’autres partis.

La sénatrice Batters : C’est toute une différence s’ils doivent attendre le 49e créneau.

Il ne semble pas que les députés indépendants aient un rôle à jouer dans les négociations générales pour obtenir des temps d’intervention, notamment. Il n’y a que les partis reconnus à la Chambre des communes qui ont un rôle à jouer dans ce processus de négociation, n’est-ce pas?

M. LeBlanc : C’est exact. Les rotations sont négociées par les whips au début de chaque législature, et c’est un exercice très mathématique. Nous avons un pourcentage de sièges, et nous obtenons un pourcentage donné de sièges. Les députés indépendants et non reconnus ne participent pas à ces négociations. Lorsque ces négociations sont terminées, on leur offre ce qui reste par après.

La sénatrice Ataullahjan : Je vous remercie de comparaître devant nous ce matin.

Je ne veux pas vous mettre sur la sellette, et vous ne voudrez peut-être pas répondre à cette question. En écoutant les témoignages et les questions, on s’aperçoit que lorsqu’on est élu, on est là pour représenter un groupe de personnes. On a l’impression que ces députés indépendants n’ont pas vraiment voix au chapitre au Parlement. Je parle plus précisément des quatre députés indépendants. Est-ce une représentation équitable de leur groupe d’électeurs?

M. LeBlanc : Le défi à surmonter dans une institution qui compte 338 députés, c’est qu’il n’est pas toujours possible que les 338 députés puissent s’exprimer sur chaque point à l’ordre du jour. Ce serait impossible. Ils trouvent des moyens d’intervenir et de se faire entendre sur des sujets précis. On leur en donne l’occasion pendant la période des questions, les déclarations de députés et les questions et observations, qui sont les trois façons les plus courantes pour eux de s’exprimer et de faire connaître leurs points de vue. L’autre façon est de présenter des amendements aux projets de loi en comité, qui est probablement l’autre moyen par lequel ils sont le plus souvent actifs.

M. Brochu : Ils ont également la possibilité, comme tout autre député, de prendre part aux affaires émanant des députés en présentant des projets de loi et des motions. Ils font partie du tirage au sort que nous effectuons au début de chaque législature et bénéficient donc des mêmes chances.

Ce que l’on ne sait probablement pas, c’est qu’il y a des députés indépendants ou des députés de partis non reconnus qui sont très actifs. Certains participent en fait bien plus que de nombreux autres députés qui appartiennent à des partis reconnus à la Chambre.

[Français]

La présidente : Ma première question est la suivante. Si j’ai bien entendu, il pourrait arriver, par exemple, qu’un groupe reconnu perde cette reconnaissance, parce qu’il est sous le seuil prévu par le Règlement, mais qu’au total, le nombre de députés indépendants ou non affiliés en plus du nombre de députés qui ont perdu leur reconnaissance forme un groupe important — j’ai entendu 22 à un moment donné. Dans ce cas-là, est-ce que le Règlement prévoit la possibilité, pour ce nombre total de députés, de faire entendre leur voix autrement?

M. LeBlanc : C’est une bonne question. Il n’est jamais jamais arrivé qu’un parti qui était reconnu au début de la législature tombe à moins de 12 députés pendant la législature. On n’a pas d’exemples de cela. On est passé bien près une fois, mais les partis ont toujours maintenu leur statut de parti reconnu. Ils ne sont jamais tombés sous le chiffre 12. Oui, il y a des situations où le nombre total de députés non affiliés, pour utiliser votre terme, est au-dessus de 12. On s’est déjà demandé s’ils pourraient se regrouper et former un parti. Ils n’ont jamais essayé. Je pourrais faire une analogie : au début des années 2000, il y a un groupe de députés qui ont quitté l’opposition officielle; ils étaient 8, puis ils se sont joints au Parti progressiste-conservateur, qui avait 12 députés à cette époque, pour former une alliance dite entre ces deux groupes, qui comprenait donc 20 députés au total.

Il y a eu une décision du Président Milliken à l’époque qui avait tenté de dresser les paramètres de ce qu’est un parti politique; il avait dit qu’on n’était pas vraiment devant un groupe, mais devant deux groupes qui s’étaient unis et qui travaillaient ensemble. Il s’agissait d’une fusion, mais ils ne formaient pas vraiment un groupe de 20; c’était un groupe de 12 et un groupe de 8. Pour ce qu’un groupe se présente comme un parti politique, ce n’est pas seulement un calcul mathématique. Il faut se demander s’ils ont des responsables, un chef, un whip, un leader. Est-ce qu’ils présentent des prises de position ensemble? Ce n’est peut-être pas nécessairement juste un calcul mathématique, mais le degré de cohésion à l’intérieur de ce groupe.

[Traduction]

La présidente : Ma question suivante porte sur le principe du consentement unanime que nous avons dans notre Règlement au Sénat. Avez-vous un principe semblable dans votre enceinte?

M. LeBlanc : Oui. C’est très populaire, et les députés indépendants sont très conscients de leur rôle pour ce qui est d’accorder le consentement unanime. C’est ce à quoi M. Brochu a fait référence. Lorsqu’il y a des accords spéciaux pour accélérer l’examen d’un point, par exemple, il faut le consentement unanime, du Parti vert plus particulièrement, et pas tant des quatre autres députés indépendants, car le Parti vert fait généralement partie de ces discussions et a généralement l’occasion de participer en échange de son consentement. Le parti utilise parfois cette occasion à bon escient.

[Français]

La présidente : Avez-vous d’autres questions concernant les pratiques? J’aimerais, si possible, revenir sur les comités. Je comprends que ce sont les groupes, les whips qui ont le contrôle de la formation des comités. Conséquemment, un député qui quitte son parti va perdre son siège en comité?

M. LeBlanc : En général, oui.

La présidente : En général. Donc, c’est possible qu’il puisse le conserver?

M. LeBlanc : J’ai rarement vu de telles circonstances. Ils l’ont parfois conservé quelques semaines, le temps d’obtenir un accord pour les remplacer, mais c’est relativement rare. Est-ce qu’il y a eu des occasions où il y avait des présidents ou des vice-présidents de comités qui ont quitté leur caucus et qui ont été remplacés? C’est relativement rare. Il y a eu, par contre, une occasion où un député indépendant a été membre d’un comité, et c’est André Arthur après l’élection de 2006. Les conservateurs avaient accepté de lui donner un siège au Comité permanent de l’industrie, des sciences et de la technologie. C’était un peu une façon de travailler avec lui. Ils ont retiré un de leur membre et M. Arthur était, en fin de compte, le remplaçant d’un député conservateur à ce comité.

[Traduction]

La sénatrice Ataullahjan : Vous avez peut-être déjà répondu à ma question sur le fait qu’un parti cède ce créneau à un député indépendant. Cela arrive-t-il très souvent à la Chambre? Si ces députés indépendants assistent à des réunions de comités — en tant que députés, je suppose qu’ils peuvent comme nous assister à n’importe quelle réunion de comité —, lorsqu’ils posent une question, y sont-ils autorisés ou les membres des autres partis sont-ils privilégiés? J’aimerais clarifier le processus. Je sais ce qui se passe ici, mais il serait bon de savoir ce qui se passe là-bas.

M. LeBlanc : Pour répondre à votre première question, c’est assez rare. Si je me souviens bien, M. Arthur est le seul député indépendant qui est devenu membre à part entière d’un comité. Je ne me souviens d’aucun autre cas dans les 30 années que j’ai passées ici. Dans les années 1980, Tony Roman a été élu député indépendant. Il a peut-être siégé à un comité, mais c’est le seul autre exemple.

Les députés indépendants, à l’instar de n’importe quel autre député, sont autorisés à assister à une réunion publique d’un comité. Le fonctionnement de nos comités et même la rotation des questions posées à nos comités font l’objet de négociations. Il y a un ordre à suivre, et ce parti a droit à tant de minutes. Pour que ces députés puissent intervenir, c’est souvent à la fin de la réunion s’il reste un peu de temps et si l’un des partis reconnus accepte de céder une partie de son temps pour leur permettre de participer.

Le sénateur Woo : Vous avez dit au début de votre déclaration qu’il n’y a pas de définition officielle de « parti reconnu ». Pouvez-vous nous parler de la définition pratique et de l’évolution de la réflexion entourant cette expression?

M. LeBlanc : C’est une question intéressante car il n’est écrit nulle part que c’est 12, mais on a fini par reconnaître que c’est 12. Je ne pense pas que cela ait toujours été le cas. Même la définition de 12 dans la Loi sur le Parlement du Canada ne remonte qu’aux années 1960, mais il est désormais admis que c’est 12.

Il y a probablement eu des périodes, dans d’autres législatures il y a 50 ou 60 ans, où cette définition n’était pas aussi stricte et où un plus petit groupe aurait peut-être participé davantage. À mesure que l’emploi du temps de la Chambre s’est rempli et que les partis politiques, à mon avis, en sont venus à assumer un rôle plus important dans l’organisation des travaux de la Chambre, le rôle des députés indépendants s’est amenuisé.

Le sénateur Woo : Si l’on met de côté le nombre minimal de 12, les partis politiques définissent-ils cela autrement, en fonction de l’enregistrement du parti, de la participation aux élections, de la présence de candidats, de l’absence de candidats ou de quelque chose en lien avec la Loi électorale du Canada?

M. LeBlanc : Oui. Je me trompe peut-être, mais je crois que l’Assemblée nationale du Québec utilise un nombre de sièges ou un pourcentage de votes dans la façon de calculer le statut du parti. Est-ce que je me trompe? Je crois que c’est exact.

M. Brochu : Vingt pour cent.

M. LeBlanc : Si un parti reçoit un certain pourcentage des votes, même s’il n’obtient pas le nombre de sièges requis, il est considéré comme étant un parti reconnu.

Le sénateur Woo : Que faudrait-il pour changer la définition du nombre minimal de 12 membres pour être un parti politique reconnu?

M. LeBlanc : Comme je l’ai dit, cette définition n’existe pas dans nos règles. C’est une pratique établie. C’est une pratique si bien établie à l’heure actuelle que la Chambre doit prendre une décision. La Chambre pourrait soit changer son Règlement, soit adopter une nouvelle définition.

Le sénateur Woo : Comment cela se produirait-il? Quelqu’un le contesterait?

M. LeBlanc : Je crois qu’il faudrait changer les règles. Quelqu’un devrait proposer une motion pour définir dans le Règlement que, à ces fins, un parti reconnu est composé de tant de personnes.

Le sénateur Woo : D’accord, merci.

M. LeBlanc : En l’absence d’une définition, nous nous en tenons à ce qui se fait dans la pratique.

La présidente : J’ai une autre question pour vous. Savez-vous s’il y a des règles particulières dans d’autres instances, pays ou parlements pour les députés indépendants?

M. LeBlanc : Je me rappelle que l’exemple du Québec était intéressant, mais il n’y a aucune autre instance qui me vient à l’esprit. Ce n’est pas un sujet que j’ai étudié. Le calcul se fait avec les résultats électoraux, et non avec le nombre de sièges. La plupart des autres instances utilisent un nombre déterminé et la façon dont elles parviennent à ce nombre varie grandement d’une instance à l’autre, et je ne pourrais pas vous dire comment elles le définissent ni s’il est défini dans les règles ou autrement. Ce n’est pas un sujet que j’ai étudié attentivement dans d’autres instances.

Le sénateur Woo : Pour revenir à la question de la définition, si une coalition de sénateurs indépendants — 12 d’entre eux — se réunissait dans un condominium et pouvait trouver un objectif commun sans pour autant faire partie d’un parti politique enregistré, et que cette coalition avait même une structure où elle a un coordonnateur et peut-être un whip en quelque sorte, serait-elle reconnue?

M. LeBlanc : C’est une question hypothétique?

Le sénateur Woo : Très hypothétique.

M. LeBlanc : Si l’on examine la décision que M. Milliken a rendue en 2001, il a essayé d’exposer les caractéristiques d’un parti. Dans cette décision, il a déclaré : « Ce que j’ai sous les yeux aujourd’hui n’est pas cela; c’est deux groupes différents qui essaient de travailler ensemble. » Si un groupe répondait à sa définition d’un parti politique — qui accepte de travailler ensemble, d’élire une liste d’agents et de fonctionner comme une unité cohésive —, je crois que le président lui donnerait son autorisation, mais c’est hypothétique.

Le sénateur Woo : Même si les membres n’appartiennent pas au même parti politique qui s’est présenté aux élections qui les ont amenés au Parlement?

M. LeBlanc : Nous n’avons jamais été confrontés à cette situation, si bien que je fais des suppositions, mais si un groupe répond aux caractéristiques d’un parti reconnu, j’ai la décision devant moi :

[...] le groupe compte au moins 12 députés; ces députés désignent un groupe d’agents pour être leurs représentants officiels à la Chambre; ils exercent leur activité d’une façon cohérente; ils œuvrent sous la même bannière.

Le sénateur Woo : C’est possible sans faire partie d’un parti politique.

M. LeBlanc : Vraisemblablement. C’est une décision du 24 septembre 2001, si quelqu’un veut la consulter.

La sénatrice Batters : Cette discussion m’a amenée à m’interroger sur ce qui s’est produit au début de 2004 quand le Parti progressiste-conservateur du Canada et l’Alliance canadienne ont fusionné en décembre 2003, puis il n’y a pas eu d’élections avant juin 2004. Je m’en rappelle très bien. Mon époux a été élu lors de ces élections. Avant cela, ils se présentaient sous l’égide du Parti conservateur du Canada, mais ce n’était pas un parti qui s’était présenté à des élections depuis un bon moment avant les élections de juin 2004. Comment fonctionnait-on à la Chambre à l’époque?

M. LeBlanc : M. Milliken a fait une autre déclaration au début de la troisième session de cette législature après la prorogation lorsque M. Martin est devenu premier ministre. M. Milliken a dit ceci: « J’ai reçu une communication d’anciens agents de l’Alliance canadienne et du Parti progressiste-conservateur pour m’informer qu’ils travaillaient désormais ensemble et formaient un seul parti, soit le Parti conservateur du Canada. Ce sont leurs agents, et c’est leur chef. » M. Milliken a accepté, à ces fins, que ces deux partis n’existent plus et qu’ils forment désormais un seul et même parti. En appliquant probablement les critères que j’ai décrits dans sa décision précédente, ils avaient une liste d’agents élus, travaillaient en tant qu’unité et servaient sous la même bannière. Ils répondaient à tous les critères de ce que l’on pourrait considérer comme un parti politique.

Cela me rappelle que certaines personnes ont décidé de ne pas adhérer à ce parti, de rester en marge et de continuer d’être reconnues comme des progressistes-conservateurs, par exemple. Ils étaient très peu nombreux.

La sénatrice Lankin : C’est intéressant. Ce que j’en retiens, c’est que tout cela se fait en tenant compte de précédents, de négociations, d’accords et de décisions du Président, et que cela ne figure pas dans le Règlement, mais qu’à tout moment, une motion quelconque peut être présentée pour l’établir dans le Règlement. J’ai été une députée élue d’un parti politique à l’Assemblée législative de l’Ontario. Après des élections, ce groupe a perdu le statut de parti officiel et l’assemblée a gentiment — c’était intéressant — décidé qu’elle allait réduire le nombre pour que ce parti politique puisse continuer d’exister et d’être reconnu. Cela a été fait dans le cadre d’un processus réglementaire. Par ailleurs, s’il y avait un litige plus important ou si des élections donnaient lieu à un plus grand nombre de députés indépendants à un moment donné, c’est quelque chose que la Chambre des communes pourrait entreprendre, et elle pourrait décider de modifier le Règlement.

M. LeBlanc : Absolument. Cependant, comme je l’ai mentionné, il y a de cela deux législatures, le Bloc comptait 10 et non 12 députés, et ils ont été traités comme 10 députés indépendants. On n’a pas discuté de réduire le nombre, mais la Chambre a certainement le pouvoir de le changer si elle le souhaite.

[Français]

La présidente : Il me reste à vous remercier de votre participation à ce comité. C’était très intéressant. On a appris beaucoup de choses qui pourront nous être utiles à l’avenir. Messieurs LeBlanc et Brochu, bonne fin de journée et merci encore.

M. Brochu : Merci.

[Traduction]

La présidente : Pour la seconde partie de notre réunion, nous entendrons le témoignage de François Delisle, qui est responsable de recueillir toutes les données, conjointement avec d’autres à la Bibliothèque. Il vous dira comment cela s’est passé. Il n’a pas été facile de trouver tous les renseignements pertinents à mesure qu’on les demandait.

Avant de lui céder la parole, je tiens simplement à remercier Adam Thompson du travail qu’il a fait dans le passé et souhaiter la bienvenue à Maxime Fortin. Elle est désormais la greffière de ce comité. Nous lui souhaitons la bienvenue.

[Français]

La parole est à vous, monsieur Delisle.

François Delisle, analyste, Bibliothèque du Parlement : Merci, madame la présidente.

[Traduction]

Premièrement, comme vous vous en souvenez sans doute, sénateurs, le 4 juin, une motion a été adoptée concernant la collecte de statistiques par la Bibliothèque du Parlement. Durant l’été, nous avons passé en revue ces différents chiffres. La motion à l’époque nous demandait de préparer des données sur le nombre de déclarations, le nombre de questions durant la période des questions et aussi le nombre d’interventions pendant l’étude des projets de loi à la Chambre.

Nous avons travaillé avec deux ensembles de données concernant les questions posées sur les projets de loi à la Chambre. Le Bureau de la procédure et des travaux de la Chambre nous a fourni un document Excel qui renfermait un ensemble de chiffres, non seulement sur les discours mais aussi parfois sur les interventions pour ajournement, par exemple, et nous avons travaillé avec un outil qui se trouve sur le site Web du Sénat pour recueillir le nombre de déclarations et de discours.

D’emblée, dans le document que vous avez reçu, il est important de prendre en considération que le statut des membres non affiliés change régulièrement. J’ai un document ici que je n’ai pas distribué mais, régulièrement, presque chaque mois, le nombre de sénateurs change parce que des gens partent et qu’il y a des changements d’affiliation pour diverses raisons.

Je dirais qu’il y a trois catégories de sénateurs non affiliés. La première est celle des sénateurs non affiliés qui occupent des rôles officiels, c’est-à-dire ceux qui siègent au Bureau du représentant du gouvernement, et le Président. Ce sont des sénateurs non affiliés. Ils se sont désignés eux-mêmes comme étant non affiliés. Pour le calcul de ces statistiques, nous ne les avons pas pris en considération parce qu’ils n’étaient pas dans la situation du sénateur Brazeau, par exemple, ou de la sénatrice McPhedran, qui sont venus témoigner devant nous.

Il y a ensuite les sénateurs nouvellement élus, des personnes qui ont récemment été nommées et qui siègent à titre de sénateurs non affiliés pendant une courte période, habituellement moins de six mois. Dans le cas du sénateur Richards, on a un sénateur qui était auparavant membre d’un groupe et qui a décidé de changer d’affiliation. Il y avait une deuxième catégorie de sénateurs pour ces calculs.

Ensuite, il y a ce que je considère comme la catégorie fondée sur le nombre de mois pendant lesquels les sénateurs n’ont pas été affiliés. Les sénateurs McCallum, McPhedran et Brazeau font partie de ce groupe depuis plus d’un an. Dans ces statistiques, nous constatons qu’à titre de sénateurs non affiliés, ils ont été plus actifs que les sénateurs qui ont été nommés récemment. Voilà pourquoi, dans les tableaux qui nous ont été fournis, il y a un tableau où nous ne prenons en compte que ces trois sénateurs, car ils font partie de ce groupe depuis plus longtemps et qu’ils sont parfois un peu plus actifs que les sénateurs non affiliés depuis moins longtemps, c’est-à-dire moins d’un an — et je dirais même six mois. Ils sont considérés un peu séparément à des fins de calcul, et ce, simplement pour catégoriser ces chiffres.

Maintenant, pour citer quelques noms de sénateurs récemment nommés, nous avons basé nos données sur le 20 juin. Toutes nos données sont basées sur cette date particulière, car c’est à cette date que nous avons reçu le document Excel, ou qu’il a été intégré dans les informations calculées. À cette date, les sénateurs Richards et Senior faisaient partie des sénateurs récemment nommés, alors que les sénateurs McCallum, McPhedran et Brazeau étaient non affiliés de façon permanente, c’est-à-dire depuis plus d’un an. Puis il y avait les sénateurs qui jouaient un rôle officiel à l’époque, c’est-à-dire la sénatrice LaBoucane-Benson, la sénatrice Gagné, Présidente du Sénat, et le sénateur Gold, membre du BRG. Habituellement, le BRG compte quatre membres, mais à l’époque, il n’y avait que deux membres du BRG.

En ce qui concerne la période des questions, nous avons examiné les périodes de questions dans leur ensemble, y compris les périodes de questions auxquelles les ministres prennent part, puis nous avons examiné uniquement les périodes de questions auxquelles les ministres prennent part. En ce qui concerne l’ensemble des périodes de questions, nous constatons qu’en 2018-2019, très peu de questions ont été posées par des sénateurs non affiliés, à l’exclusion toujours de ceux qui exercent des fonctions. En 2024, 26 questions ont été posées par des sénateurs non affiliés pendant la période des questions. Cela représentait 2,4 % du nombre total des — toutes mes excuses. Je veux passer aux interventions, qui se trouvent à la page 2.

En ce qui concerne les interventions, le tableau de la page 3 indique qu’en 2024, 1 079 interventions ont été faites. Vingt-six de ces interventions ou, je dirais, pardon, de ces questions ont été posées pendant la période des questions, ce qui représente 2,4 % de l’ensemble des questions. Vingt-six de ces questions ont été posées par des sénateurs non affiliés de façon permanente.

En 2023, le nombre d’interventions faites par tous les sénateurs non affiliés pendant la période des questions s’est élevé à 32, et toutes ces interventions sauf une ont été faites par les sénatrices McPhedran et MacAdam.

Vous pouvez donc constater que les sénateurs non affiliés depuis longtemps, c’est-à-dire ceux qui n’ont pas été nommés récemment, ont fait la majorité des interventions ou posé la majorité des questions pendant la période de questions.

Le nombre de questions posées en 2024, 2023 et 2022 se situe toujours autour de 26, 32 ou 36, et le pourcentage reste relativement le même. Nous devons prendre en considération le fait qu’avant ces périodes, les années 2019 et 2020 pourraient ne pas représenter de bons échantillons en raison de la COVID.

Ensuite, il y a eu les interventions faites pendant les périodes de questions auxquelles les ministres ont pris part. Il s’agit uniquement des périodes de questions au cours desquelles les ministres sont intervenus. Vous voyez dans le tableau 3 que le sénateur Brazeau a posé deux questions en 2024, entre le début de l’année et le mois de juin, et cela représente la totalité des sénateurs non affiliés de façon permanente qui ont posé des questions. Nous avons découvert qu’en 2023, seul le sénateur Cardozo a posé une question pendant les périodes de questions avec les ministres. Cela confirme ce que la sénatrice MacAdam a fait valoir pendant son témoignage. Elle a mentionné que les sénateurs non affiliés avaient plus de difficulté à poser des questions, surtout pendant les périodes de questions avec les ministres.

Bien entendu, vous pouvez remarquer que le nombre total de questions posées s’élevait à 129 en 2024, et à 267 en 2023. Mais avant l’année 2020, c’est-à-dire en 2019, le nombre de questions posées était un peu moins élevé, et il n’y a pas eu de période de questions en 2021 et en 2020.

Pour calculer les interventions qui figurent à la page 4, nous avons à nouveau utilisé l’outil de Recherche dans les Débats et les délibérations des comités. Comme je l’ai mentionné au début de mon exposé, cet outil nous a permis de rassembler toutes les données, que nous avons ensuite filtrées. En ce qui concerne le nombre total d’interventions en général, il se situe entre 325 et 466 par année, mais le nombre d’interventions effectuées par des sénateurs non affiliés est encore une fois relativement faible. Il représentait 1,8 % en 2024 et 3,3 % en 2023. Les données de 2024 ne sont peut-être pas représentatives, car elles ne s’étalent que sur une demi-année. Là encore, les interventions sont surtout le fait de sénateurs non affiliés qui siègent depuis plus d’un an, à savoir les sénateurs MacAdam, McPhedran et Brazeau.

Nous avons également examiné les discours sur des projets de loi, et l’information à cet égard se trouve dans le tableau qui figure à la page 6. En ce qui concerne le nombre de discours sur des projets de loi, nous en avons trouvé 6 entre le début ou la fin du mois de janvier et le mois de juin, et il y en a eu 28 en 2023 et 18 en 2022. Cela représente 2,3 % ou 4 % des discours sur des projets de loi. Les discours des sénateurs non affiliés depuis plus d’un an représentent la majorité de ces chiffres.

Cette information est peut-être légèrement aride, alors si vous avez des questions, n’hésitez pas à les poser.

[Français]

Toutefois, le principal défi, c’était d’aller chercher les données disponibles.

[Traduction]

Comme je l’ai mentionné au début de mon exposé, le nombre de sénateurs non affiliés fluctue régulièrement. Il était donc difficile de savoir s’il s’agissait exactement du nombre moyen de questions posées annuellement par chaque sénateur non affilié. Voilà pourquoi le pourcentage est fondé sur les sénateurs non affiliés en tant que groupe, et c’est l’une des difficultés que nous avons rencontrées.

Je vais m’arrêter ici.

La présidente : Je vous remercie de votre exposé.

La sénatrice Batters : Je vous remercie infiniment, monsieur Delisle, d’avoir produit, avec l’aide de vos collègues, ce document à notre intention.

D’emblée, j’ai deux ou trois observations à formuler. Premièrement, je précise, au profit de nos collègues assis à la table, qu’il aurait été utile que ce point soit inscrit à l’ordre du jour de la réunion afin que tout le monde sache qu’il allait être discuté pendant la deuxième partie de la réunion. L’ordre du jour mentionne les deux témoins de la Chambre des communes, et il s’agit certainement du sujet abordé en général, mais l’ordre du jour indique simplement le point suivant : « Étude d’un projet d’ordre du jour (travaux futurs). » Voilà ce que je suggérerai à l’avenir.

Avant d’entrer dans le vif de mes questions, j’aimerais faire une autre petite suggestion concernant le fait que vous avez qualifié de « permanents » les sénateurs qui siègent à titre de sénateurs non affiliés depuis plus d’un an. Je vous ferais remarquer que l’expression « à long terme » ou quelque chose de ce genre serait plus approprié, parce que ce statut n’est pas vraiment permanent. Bien entendu, les sénateurs peuvent toujours choisir de modifier leur statut, et il s’agit simplement d’une mesure de la durée pendant laquelle ils ont fait partie de cette affiliation particulière.

Vous avez noté comment ils ont été catégorisés ici depuis 2016. Vous avez noté les sénateurs ayant un rôle officiel, lesquels comprennent le Président du Sénat et le représentant du gouvernement, comme le leader du gouvernement, le leader adjoint du gouvernement ou le whip du gouvernement. Le Président était-il considéré comme non affilié avant 2016, ou est-ce aussi le cas depuis 2016?

M. Delisle : C’est une bonne question. Je vais devoir vérifier ce qu’il en est. Je préférerais effectuer cette vérification avant de répondre à votre question. Il est vrai qu’avant le changement de structure... depuis l’organisation de cette nouvelle structure, c’est-à-dire du BRG, ils sont devenus non affiliés, mais je dois effectuer une vérification pour être sûr d’obtenir la bonne information.

La sénatrice Batters : D’accord. Je suppose que c’est au début de 2016 que les sénateurs affiliés au gouvernement, c’est-à-dire le leader, le leader adjoint et le whip, ont été définis, et lorsque vous regardez les débats du Sénat sur CPAC ou sur ParlVu, il est indiqué « non affilié » sous les titres de ces personnes. Comment en est-on arrivé là? Est-ce le représentant du gouvernement qui a demandé qu’ils soient désignés comme non affiliés? Avant cela, ils auraient toujours été désignés comme appartenant au parti auquel ils étaient affiliés. J’ai toujours déclaré qu’on ne pouvait pas être plus affilié que lorsqu’on obtient de l’argent, un poste et un titre pour être affilié à un groupe particulier. Comment en est-on arrivé là?

M. Delisle : Lors de l’annonce de la création du BRG, le sénateur Harder a prononcé un discours. Je vais devoir relire ce discours, mais je ne crois pas qu’il ait fait précisément allusion au fait que lui et ses collègues ne seraient pas affiliés. Cependant, chaque sénateur a le privilège d’informer les autorités du Sénat de son affiliation. C’est tout ce que je peux dire à ce sujet pour le moment.

La sénatrice Batters : Pourriez-vous examiner la question, s’il vous plaît?

M. Delisle : Certainement.

La sénatrice Batters : Avez-vous quelque chose à dire?

La présidente : J’ai quelque chose à ajouter. À l’époque où le BRG a été créé, la situation était totalement nouvelle. Je faisais partie de cette nouvelle organisation. Je pense qu’en tant que membres du BRG, nous trouvions important d’affirmer que nous ne faisions pas partie du gouvernement. Il a donc été décidé que ces postes ne seraient pas affiliés.

La sénatrice Batters : Qui a pris cette décision, et comment avez-vous procédé à ce changement? Vous étiez la leader adjointe du gouvernement.

La présidente : Je ne me souviens pas exactement de la manière dont cela s’est passé, mais nous ne faisions partie d’aucun groupe. Comme nous ne faisions partie d’aucun caucus, nous avons adopté la désignation qui était utilisée à l’époque par d’autres sénateurs.

Cependant, je ne me souviens pas de la façon dont les sénatrices Anne Cools et Elaine McCoy étaient désignées, mais elles ont longtemps siégé en tant que sénatrices indépendantes. Étaient-elles indépendantes ou non affiliées? Lorsque les sénatrices Cools et McCoy sont devenues indépendantes, elles faisaient partie du Parti progressiste-conservateur du Canada, ou c’était le cas pour l’une d’entre elles. Elles sont devenues indépendantes et ont toujours été considérées comme non affiliées.

Je pense que cette coutume est une pratique qui s’est développée, mais nous l’examinerons peut-être plus en détail.

La sénatrice Batters : Je vous remercie.

En parcourant les statistiques que vous avez compilées pour nous, j’ai remarqué autre chose, en particulier en tenant compte de ce que les représentants de la Chambre des communes viennent de nous dire, et cela m’a été très utile. Ce qui m’est apparu, c’est l’énorme avantage qu’ont les sénateurs non affiliés de prononcer de longs discours sur le sujet de leur choix. Ils peuvent lancer une enquête, comme n’importe quel autre sénateur. Ils peuvent présenter une motion, et ils peuvent s’exprimer au sujet des projets de loi du gouvernement. Ils n’ont pas besoin d’attendre que le 49e tour soit venu pour prononcer un discours.

Lorsque j’ai examiné ces statistiques, je m’attendais en fait à ce que les sénateurs non affiliés prononcent un nombre considérablement plus élevé de discours au Sénat, car cela correspond à la manière dont le Sénat est censé fonctionner. Il est censé assurer l’égalité des sénateurs. Ce que j’ai remarqué, cependant, compte tenu de ces statistiques, c’est que le pourcentage de discours prononcés par des sénateurs non affiliés n’est pas beaucoup plus élevé. Quand je regarde les questions posées pendant la période des questions, je constate que ce pourcentage est peut-être demeuré dans l’ordre de deux points pendant un grand nombre d’années. Puis, le nombre de discours prononcés en 2024, c’est-à-dire le nombre total de discours par rapport au nombre total de sénateurs, s’élève à 2,3 % jusqu’à maintenant. L’année dernière, le pourcentage était plus élevé, soit 4,63 %, mais la différence entre les pourcentages n’est pas énorme. Il en va de même pour les interventions des sénateurs et les autres statistiques que vous avez produites. C’est simplement un fait que je remarque, car je me serais attendue à voir un plus grand nombre de discours prononcés, parce qu’ils ne sont pas assujettis aux mêmes limites qui existent pour la période des questions, pour les interventions des sénateurs, et cetera. Ces sénateurs ont le champ libre en ce qui concerne les discours. Ils peuvent prendre la parole à propos de tous les sujets qu’ils souhaitent.

M. Delisle : Oui. Je ne peux pas nécessairement formuler des observations à ce sujet. Il faut savoir que, pendant un certain nombre d’années, le nombre de sénateurs qui siégeaient était inférieur à 105. Leur nombre a atteint 101 tout récemment, c’est-à-dire il y a à peine quelques jours. Cela a-t-il provoqué une augmentation du nombre d’interventions des sénateurs que nous observons? Je ne saurais le dire. Je ne sais pas si je peux en dire plus à ce sujet.

La présidente : Si je peux me permettre d’ajouter quelque chose, je pense qu’en examinant les données, on constate que le pourcentage est inférieur à leur moyenne en ce qui concerne... si vous utilisez le chiffre 100, le pourcentage s’élève à 3,3 pour les sénateurs non affiliés de façon permanente. Mais la différence est-elle significative? Telle est la question.

La sénatrice Batters : Oui. Ce que je veux dire, c’est que nous avons beaucoup entendu parler de certaines restrictions imposées aux sénateurs non affiliés, mais les discours qu’ils peuvent prononcer sont un avantage certain par rapport à ce qui se passe à la Chambre des communes où les députés n’ont presque jamais l’occasion d’en prononcer. Ces discours peuvent évidemment être très détaillés et très longs. Nous ne sommes pas assujettis à ces limites au Sénat. Ils bénéficient peut-être de quelques avantages dans l’autre chambre en ce qui concerne l’utilisation d’autres moyens de communication plus courts, mais nous jouissons d’un avantage considérable. Je suppose que j’ai été un peu étonnée de constater que le nombre de discours prononcés par des sénateurs non affiliés n’était pas plus élevé.

[Français]

La présidente : Peut-être devrions-nous aussi considérer les comités.

[Traduction]

Le sénateur Kutcher : Je vous remercie d’avoir réalisé ce travail. Je comprends que cela ait été plus difficile que... mais c’est la raison pour laquelle nous disposons d’une merveilleuse bibliothèque du Parlement, n’est-ce pas? Je tiens à vous féliciter d’avoir pris le temps de définir ce que j’appellerais la catégorie des sénateurs non affiliés « de façon persistante », car c’est ce groupe qui a attiré notre attention sur cet enjeu.

Si je peux me rafraîchir la mémoire en ce moment, je dirais que nous avons demandé ces données parce que nous avions l’impression que des gens craignaient que les sénateurs non affiliés de façon persistante aient été tenus à l’écart du fonctionnement réel du Sénat et qu’ils n’aient pas eu la possibilité raisonnable ou proportionnelle de participer aux activités du Sénat. Voilà pourquoi nous avions besoin de ces données, et je vous remercie de nous les avoir fournies.

L’examen de ces données fait ressortir un certain nombre de faits. Il y a un problème de dénombrement et de dénominateur — et je tiens à attirer l’attention du Comité sur ce problème — auquel vous ne pouvez pas répondre avec ces données, mais auquel nous devons réfléchir, le dénombrement correspondant à 36 discours et le dénominateur correspondant au nombre de fois où ils ont demandé de prononcer un discours et se sont vus refuser cette occasion. Trente-deux questions ont été posées au cours de l’année, mais ce que nous ignorons, c’est combien de fois on a dit aux sénateurs : « Non, vous ne pouvez pas poser cette question. » Cela constituerait un problème d’accès, mais nous ne disposons pas de ces données. Je soutiens simplement que nous ne pouvons pas répondre à cette question parce que nous ne disposons pas de ces données. Lorsque nous essayons de discuter de cette possibilité, nous devons faire très attention de ne pas nous engager dans cette voie parce que nous ne disposons pas de ces données.

La deuxième chose que j’ai trouvée très utile, c’est que nous avons été en mesure d’examiner une période de fonctionnement relativement stable du Sénat — si je peux utiliser ce terme — au cours des trois dernières années, une période pendant laquelle le processus au Sénat a été relativement cohérent, par opposition à ce qui s’est passé pendant la pandémie de COVID ou avant la pandémie, quand les données étaient un peu moins rigoureuses. Lorsque nous examinons ces données, j’insiste pour que nous gardions cela à l’esprit, ainsi que le fait que nous observons trois années de fonctionnement relativement stable.

Lorsque je regarde les données, je pense que les chiffres sont relativement cohérents. L’écart d’une année à l’autre n’est pas énorme, et en tant que personne qui travaille avec de grands ensembles de données, lorsque j’examine ces données, je suis rassuré et je me dis : « Ces chiffres sont probablement raisonnables, parce que l’écart n’est pas énorme ». Nous devons déterminer quelle part de l’ensemble des sénateurs représentent les sénateurs constamment non affiliés. Comme l’a dit la sénatrice Bellemare, cette part s’élève à environ X pour cent. Ils représentent environ 3 % des sénateurs, car, une fois encore, le dénominateur varie. Lorsque l’on examine les chiffres, on constate que les données sont stables. On ne connaît pas le numérateur et le dénominateur, mais si on laisse ce problème de côté, on constate une participation relativement constante à la période des questions, aux déclarations des sénateurs et aux discours.

Ce que j’essayais de comprendre à partir des données était l’une des préoccupations soulevées à cette table. Certains sénateurs non affiliés disent qu’ils n’ont pas l’occasion de participer aux activités du Sénat. Je pense que ces données nous ont aidés à comprendre ce problème. Elles ne nous ont pas permis d’établir un tableau complet, et je n’ai jamais vu un ensemble de données qui parvienne à le faire, mais je tiens à vous remercier sincèrement d’avoir accompli ce travail difficile pour nous.

M. Delisle : Je l’ai fait avec mon collègue. Merci.

Le sénateur Woo : Je voulais m’appuyer sur les commentaires du sénateur Kutcher et aller un peu plus loin pour tenter de formuler une généralisation.

Je pense que nous pouvons généraliser et dire que la part des déclarations des sénateurs et de la période de questions qu’ont obtenue les sénateurs non affiliés sur le long terme — sans compter la période de questions ministérielles — est supérieure à la part des sièges qu’ils occupent au Sénat. Il s’agit d’un problème de dénominateur, mais nous savons tous que, jusqu’à récemment, nous fonctionnions en sous-capacité. Nous sommes environ 100 aujourd’hui, mais nous étions plus proches de 80 il y a quelques années.

Pour extrapoler et pour en venir au problème que nous essayons de résoudre ici, à savoir comment traiter nos collègues de manière équitable, je pense que l’on peut dire qu’un système de laissez-faire n’offre en fait pas de structure permettant de créer des espaces pour ces sénateurs. Le système de laissez-faire les a raisonnablement bien servis en matière de proportionnalité. On a même dépassé la proportionnalité. On pourrait dire qu’ils ont dépassé la proportionnalité au-delà de ce qu’ils auraient pu espérer, parce que beaucoup de sénateurs de ce groupe ne souhaitent pas participer à la période des questions, à la période des questions ministérielles et aux déclarations des sénateurs et devraient techniquement être retirés du dénominateur, mais nous ne savons pas de combien de personnes il s’agit et nous ne pouvons donc pas tirer de conclusion.

Alors que le comité réfléchit à la manière de modifier ses pratiques, il doit déterminer s’il doit aller au-delà d’un système de laissez-faire et adopter une approche plus structurée qui garantisse le maintien de la proportionnalité ou son application aux sénateurs non affiliés à long terme. Il semble que le système fonctionne en fait déjà très bien, mieux qu’ils ne l’espéraient, mais souhaitons-nous changer le système pour qu’il corresponde plus précisément à leur part des sièges au Sénat? Merci.

[Français]

La sénatrice Saint-Germain : D’abord, j’apprécie, sur le plan des statistiques, les nuances que vous avez faites en ce qui concerne les diverses sous-catégories de sénateurs non affiliés.

Cela dit, je pense qu’il y a encore quelques nuances qui devraient être faites. Premièrement, j’aimerais que vous ajoutiez les proportions pour les sénateurs affiliés en ce qui concerne leur possibilité de faire des déclarations et de poser des questions. Je crois que c’est important d’avoir cela au complet, parce que cela laisse entendre, en donnant le nombre total seulement pour les sénateurs affiliés, qu’ils en ont plus, mais il faut aussi diviser par le nombre de sénateurs. Je serais curieuse de voir la comparaison.

De plus, en ce qui a trait à la composition des comités, par rapport à la Chambre des communes, je crois que nous sommes beaucoup plus équitables envers les sénateurs non affiliés et, à ce que je sache, chacun des quatre sénateurs non affiliés à long terme siège à au moins un comité actuellement. C’est le cas de deux d’entre eux qui, lorsqu’ils ont quitté leur groupe, ont eu un siège qui vient du Groupe des sénateurs indépendants (GSI); je pense que c’est une dimension importante.

Sur les déclarations de sénateurs, je pense qu’il faudrait isoler les déclarations que j’appelle « protocolaires obligées » des leaders et facilitateurs en ce qui concerne l’accueil des nouveaux sénateurs et les hommages aux sénateurs qui quittent le Sénat. C’est quand même quelque chose d’obligé qui devrait être mis à part.

Enfin, mon dernier point concerne la législation. Il est clair que les sénateurs non affiliés ont le même traitement que tout autre sénateur; ils peuvent déposer des projets de loi, et chaque fois qu’ils veulent faire des commentaires à l’étape de la deuxième lecture et de la troisième lecture, ils peuvent le faire. C’est vraiment un traitement équitable.

En conclusion, je dirais que, selon ce que nous avons entendu sur la pratique à la Chambre des communes, les sénateurs non affiliés à long terme ont quand même, et de loin, un traitement plus équitable au Sénat que les députés qui sont dans la même situation à la Chambre des communes.

La présidente : J’aimerais ajouter un petit élément sur l’équité dans la prise de parole à la Chambre, et c’est l’accès à l’information. Je pense que certains sénateurs non affiliés nous ont dit : « Oui, on a accès au plumitif, mais l’accès à d’autres genres d’information n’est pas aussi précis. » L’information n’arrive pas nécessairement au bon moment pour eux. Je voulais simplement le mentionner.

La sénatrice Mégie : À partir de ce que vous venez de dire, madame la présidente, je poserai la question suivante : à quel genre d’information n’ont-ils pas accès en dehors du plumitif?

Ma vraie question, c’est que j’ai trois personnes qui ont déjà fourni des notes par rapport à la proportion, comme le sénateur Kutcher et la sénatrice Saint-Germain. Il y a quatre sénateurs non affiliés à long terme, comme le disait notre collègue, mais si on regardait la proportion, on verrait qu’ils ne sont pas si désavantagés. Je pensais que le chiffre allait être encore plus faible que ce qu’on a entendu aujourd’hui. Après l’analyse de la sénatrice Saint-Germain, je vois que c’est vrai.

Cependant, si on le fait comme on le pense, par gentillesse et par esprit d’équité, et si on pouvait, comme le sénateur Woo l’a dit, le codifier un peu, comme ils l’ont fait à la Chambre des communes... Il ne s’agit pas de faire un copier-coller exact de ce qu’ils ont fait à la Chambre des communes, mais de le codifier. On pourrait dire qu’il y a tant de déclarations, tant de fois par semaine ou tant de fois par mois, en le codifiant, parce que tout cela laisse l’impression — même si c’est en apparence —, que les gens croient qu’ils sont vraiment désavantagés.

Si on codifiait certaines pratiques, ce serait peut-être plus clair quand on parlerait de cela, mais vous pourriez dire : « Non, c’est codifié. »

La présidente : Je ne veux pas répondre pour les sénateurs non affiliés actuels. Vous pourriez peut-être les inviter après réflexion pour leur poser des questions. Certains avaient l’impression de devoir quêter pour participer aux déclarations des sénateurs et aux périodes des questions. Ce sera à revoir en fonction des données et il faudra peut-être discuter avec eux. Il y a beaucoup de différences dans les perceptions. Les choses ne sont pas perçues de la même façon.

La sénatrice Audette : Merci beaucoup pour la présentation et le travail qui a été fait. Bien sûr, j’avais les mêmes préoccupations, à savoir combien de « non » nous avons reçus lorsque nous avons demandé de prendre la parole dans ce qui a été énuméré, non seulement pour les sénateurs au sujet desquels on a fait cet exercice ou pour les gens qui représentent ces espaces, mais pour chaque groupe aussi. Ce sera important lorsqu’on va se rencontrer à nouveau; ce sera au comité de décider, mais ils voudront savoir ce qui se passe et ils voudront nous écouter et lire les débats.

Dans chaque groupe aussi on négocie pour décider qui va prendre la parole dans le temps qui est alloué. J’ai eu des « non » très polis et il m’a fallu plusieurs semaines pour parler de quelque chose qui était déjà passé. On vit ces réalités au sein même de nos groupes, de nos familles et de nos organisations. Les gens doivent le voir et le comprendre. Bien sûr, on reçoit aujourd’hui des statistiques, mais il faut également imaginer ce qui se serait passé si on s’était rencontré et si les leaders s’étaient entendus au sujet d’une motion qui doit être présentée. Parfois, par manque de communication, une personne va s’y opposer et cela fera tomber une motion importante. Cet aspect ne doit pas être négligé. Il faudrait peut-être trouver un juste milieu équitable qui fait que les gens sont informés, et non sur place, lorsqu’on débat d’une question sur laquelle nos leaders se sont déjà entendus. Merci.

[Traduction]

La sénatrice Lankin : Je vous remercie de me permettre de comparaître et de m’exprimer.

Je pense que j’entends un souhait de définir ce qui doit être codifié et de déterminer comment effectuer cette codification. J’espère que si le comité suit cette voie, il tiendra compte des principes que nous avons établis dans le cadre de nos discussions sur la réforme, notamment en ce qui concerne la proportionnalité.

Si je parle de codification, c’est parce que certaines personnes ont exprimé leur soulagement ou leur surprise en constatant que les pourcentages semblent bien représenter la proportionnalité des sénateurs non affiliés de longue date et que l’idée selon laquelle ils doivent quémander tout ce qu’ils obtiennent est fausse. Je pense que c’est en fait vrai. C’est ainsi qu’ils obtiennent ces créneaux. Ils font preuve de persistance et travaillent avec des groupes, en particulier lorsque les effectifs des groupes organisés changent et qu’il y a peut-être plus de possibilités au sein d’un groupe que d’un autre. À mesure que leur nombre diminue, ils ont la possibilité d’accéder à plus de créneaux.

Dans les domaines dont nous parlons liés aux périodes de questions et aux déclarations, ce n’est pas une question de droit. Ils doivent quémander pour obtenir du temps de parole. Je pense que ce fait témoigne de la façon collégiale, pour l’essentiel, dont ces questions sont réglées, maintenant que nous disposons de principes de proportionnalité absolue et d’autres mesures qui existent pour notre référence. Mais ils doivent toujours quémander, et j’insiste sur le fait que ce n’est pas, je l’espère, la façon dont nous envisageons de procéder à l’avenir.

En ce qui concerne l’accès à l’information, il y a une évolution. Lorsque je suis arrivée, nous ne recevions pas de notes sur le plumitif. Seuls les sénateurs qui assistaient à la réunion de préparation du plumitif les recevaient. Le Feuilleton était indéchiffrable. Nous avons apporté des modifications au fur et à mesure. Je pense qu’il est regrettable qu’en ayant accès aux notes sur le plumitif, chaque groupe ait dû recréer les notes avec les différents renseignements. Je pense que nous devrions déterminer ce qui est nécessaire et le produire une seule fois. Il a fallu un certain temps pour que les sénateurs non affiliés y aient accès.

Lorsque des réunions de dirigeants ont lieu et que des accords sont conclus et présentés aux groupes en vue d’un débat, d’une consultation ou, en fin de compte, pour les informer, ils n’ont pas accès à ces renseignements, à moins que quelqu’un ne les leur communique. On a tenté d’établir une liaison plus formelle avec le Bureau du représentant du gouvernement afin d’assurer un partage volontaire de ces renseignements, mais, encore une fois, ces choses ne sont pas codifiées.

Je ne participe à cette séance qu’en raison de l’intérêt particulier que je porte à ce sujet. Je tiens à indiquer que j’espère que nous garderons à l’esprit qu’il ne suffit pas de dire « Ils s’en sortent plutôt bien jusqu’à présent. Il semble que tout aille bien dans la plupart des domaines. Ils sont mieux lotis dans ce domaine qu’à la Chambre ». Ce n’est pas suffisant. Il s’agit de notre institution, de nos structures et de nos règles. Nous devons garantir les droits et l’égalité des droits de chaque sénateur et trouver comment les préserver au sein d’une institution qui est largement gouvernée par une structure de groupe.

Merci, madame la présidente.

La présidente : Merci pour ces excellents commentaires, auxquels je souscris.

La sénatrice Batters : En entendant les sénatrices Audette et Lankin s’exprimer, je me suis interrogée sur un point qu’elles ont toutes deux souligné. Je voudrais les interroger à ce sujet et m’assurer que j’ai bien entendu.

Sénatrice Audette, j’ai écouté la traduction et elle n’était peut-être pas très claire, mais j’ai cru vous entendre dire qu’à un moment donné, il fallait attendre cinq semaines avant de pouvoir parler d’un sujet. Avez-vous dit que c’était dû à un problème avec le Sénat ou avec votre propre groupe, parce qu’ils ne voulaient pas vous donner de temps de parole pendant cinq semaines?

La sénatrice Audette : Je voulais faire une déclaration de trois minutes sur quelque chose qui s’était passé. Bien sûr, le groupe m’aurait laissé le faire si j’avais voulu intervenir à l’occasion la Journée du chandail orange, mais c’était autre chose. Nous avons négocié, et certains de mes collègues avaient présenté leur nom avant moi, et c’était le moment idéal pour prendre la parole, parce que l’intervention était liée à une journée nationale ou à un événement. Parce que nous avons peu de créneaux, je n’ai pas contesté cette décision, mais c’est la réalité à laquelle je suis confrontée. Parfois, je n’ai pas proposé mon nom, et quelqu’un est plus rapide et obtient le créneau. Nous négocions entre nous.

La sénatrice Batters : Au sein de votre groupe?

La sénatrice Audette : Oui, j’espère que c’est ce que j’ai dit en français, mais c’était au sein de notre groupe.

La sénatrice Batters : D’accord. Je vous remercie. Je voulais juste m’assurer que j’avais bien compris.

Sénatrice Lankin, je crois vous avoir entendue dire qu’il existe désormais un « rôle de liaison plus formel avec le Bureau du représentant du gouvernement ». Qu’entendez-vous par là, et comment ce rôle est-il devenu plus formel?

La sénatrice Lankin : Si j’ai dit « formel », je me suis mal exprimée. Il s’agit en fait d’une pratique qui a été développée. La sénatrice Audette pourrait peut-être parler du temps qu’elle a passé à assurer le rôle de liaison. Comme vous le savez, je n’ai participé que pendant une courte période pour faire avancer l’ensemble des règles de la Chambre, mais pendant cette période, j’ai régulièrement essayé de communiquer aux sénateurs non affiliés des renseignements sur des sujets à venir ou des choses dont ils n’étaient pas au courant. Encore une fois, ces choses ne sont pas codifiées, et un nouveau sénateur a assumé ce rôle, qu’il l’ait fait dans le cadre de ses obligations ou non. Si j’ai dit « formel », je vous prie de m’excuser, sénatrice Batters. C’est inexact.

La sénatrice Batters : Oui. J’aimerais entendre le commentaire de la sénatrice Audette à ce sujet, car lorsque nous étions au gouvernement, notre leader adjointe, la sénatrice Martin, travaillait souvent avec les sénateurs non affiliés ou indépendants et leur faisait part de différentes choses. Ce n’est assurément pas quelque chose de nouveau pour ce poste ou ces postes affiliés au gouvernement. Je suis curieuse d’entendre ce que la sénatrice Audette a à dire à ce sujet. Assumiez-vous également ce type de rôle?

[Français]

La sénatrice Audette : L’exemple que j’ai donné au sujet d’un manque de communication vient de mon expérience personnelle. Je venais d’être nommée au Sénat, j’arrivais ici et je n’en avais pas connaissance, parce qu’il n’y a pas de règle écrite ou évidente qui dit que je dois communiquer avec tel groupe ou tel représentant tous les jours. Lorsque j’ai vu une personne se lever et intervenir à la Chambre, mon réflexe a été de demander tout de suite : « Est-ce que vous me permettez de communiquer tous les jours? » Oui, c’est évident pour des gens qui sont là depuis longtemps; c’est normal. Cependant, ça ne l’est pas pour une nouvelle sénatrice qui n’avait pas compris que c’était la façon de faire pour échanger et remettre des documents.

Sénatrice Batters, dans mon monde et dans ces postes-là, pour des questions de communication, d’adhésion et de collaboration, il devrait y avoir quelque chose de plus précis sur les façons de remettre des documents et sur les échanges requis quand on ramène cela au bureau du représentant du gouvernement. C’est dans mon monde à moi : quand on a un débat, il faut que tout le monde comprenne où nous en sommes dans ce débat.

[Traduction]

Le sénateur Woo : Je pense que le fait que les sénateurs non affiliés de longue date aient bénéficié d’un temps de parole assez décent pour leur nombre témoigne d’une certaine collégialité et de bonnes relations de travail. Nous pourrions très bien choisir de codifier ces pratiques afin qu’ils en obtiennent régulièrement. Ils seront peut-être moins bien lotis, mais c’est une décision que nous devons prendre collectivement.

Je ne pense pas qu’ils doivent quémander pour obtenir des créneaux. Nous devons tous négocier notre temps. Le problème est le manque de temps. Je fais partie d’un groupe de plus de 40 sénateurs. Il y a une énorme demande pour les déclarations et une énorme demande pour la période de questions. J’ai presque renoncé à essayer d’obtenir un créneau parce que certains sénateurs sont bien avant moi dans la file d’attente.

La présidente : N’abandonnez jamais.

Le sénateur Woo : Je n’abandonnerai pas. Il faut négocier. Il faut le faire. Certains sénateurs du groupe non affilié sont meilleurs ou plus persévérants que d’autres en négociation. Certains membres de mon groupe sont meilleurs ou plus persévérants que moi en matière de négociation et de planification. Nous devons l’envisager dans ce contexte au lieu de créer de faux privilèges qui, en fait, pourraient saper les privilèges d’autres sénateurs qui appartiennent à des groupes et qui n’ont jamais ou rarement l’occasion de poser des questions ou de faire des déclarations parce qu’ils font partie d’une minorité. Nous devons créer un système qui soit équitable pour tous, plutôt que de créer des privilèges spéciaux pour des intérêts particuliers.

Encore une fois, je ne m’oppose pas à la codification et je pense que c’est une bonne idée, mais nous devons être conscients que les résultats pourraient être pires que ceux que nous avons obtenus ces dernières années avec le groupe actuel de sénateurs non affiliés à long terme.

Le sénateur Kutcher : Mon commentaire a en fait été en partie soulevé par le sénateur Woo. Je voulais dire que nous devrions faire preuve de prudence. Le groupe actuel de sénateurs constamment non affiliés est composé de trois personnes. Si ce groupe s’élargit à six ou sept personnes, ce qui pourrait arriver, la dynamique sera complètement différente. Si le système est codifié, le problème pourrait s’aggraver. Nous devons donc faire preuve de prudence, réfléchir aux conséquences de cette mesure et mener une discussion approfondie à ce sujet.

Cela m’a aidé, en tout cas en tant que membre de ce comité, à comprendre les préoccupations. J’ai eu l’impression que les sénateurs non affiliés n’étaient pas traités de façon équitable parce qu’ils n’étaient pas affiliés. C’est pourquoi nous avons demandé des données. Les données ne vont pas dans ce sens.

La remarque de la sénatrice Lankin est excellente. Nous devons déterminer si nous souhaitons ou non codifier les choses. En tant que groupe, nous devons réfléchir attentivement aux conséquences de cette codification. Est-ce qu’elle désavantagerait les sénateurs plus qu’ils ne le sont actuellement, s’ils sont désavantagés? Je pense que nous devons garder ce point à l’esprit.

La sénatrice Lankin : Pour ajouter à ce qui vient d’être dit, j’aimerais demander au comité de penser à l’avenir. Les chiffres que les gens regardent... et ce n’est pas le cas pour tous les enjeux puisque les gens se concentrent plus particulièrement sur la période des questions et les déclarations dans la discussion que nous avons eue et les données qui ont été examinées proviennent d’une fenêtre de temps que nous sommes capables d’extrapoler et d’expliquer. Les chiffres proviennent d’une fenêtre de temps au cours de laquelle le nombre de sénateurs nommés au Sénat était toujours inférieur au nombre de places qui étaient disponibles. À mesure que ces sièges seront occupés et que de nouveaux sénateurs commenceront à rejoindre différents groupes, la demande augmentera au sein de ces groupes. Mon collègue, le sénateur Woo, a soulevé ce point lorsqu’il a parlé de la concurrence qui existe en raison du manque de temps au sein des groupes. Cependant, le groupe auquel vous avez choisi d’adhérer a accès à la proportionnalité et, au fil du temps, il y a des changements dans la proportionnalité de l’attribution de ces créneaux en fonction de la façon dont nous structurons les choses avec le gouvernement et l’opposition. Le fait est que les chiffres qui semblent bons aujourd’hui ne le seront peut-être pas dans un an, lorsque tous les sièges du Sénat seront occupés.

[Français]

La présidente : Merci, sénatrice. J’aimerais ajouter quelques éléments de réflexion pour l’avenir en ce qui concerne cette étude et les recommandations qui, je l’espère, pourront être faites au Sénat pour ce qui est des changements que nous ferons ou non au Règlement.

En ce qui concerne ce dont on vient de parler, est-ce qu’il faut codifier ou non? Personnellement, selon mon expérience, je suis d’avis qu’il faut être assez prudent dans la codification. Il faut avoir de la souplesse afin de s’adapter à différentes circonstances.

Toutefois, j’espère que vous pourrez étudier la possibilité non pas de codifier, mais de trouver des mécanismes qui feront en sorte que les sénateurs non affiliés — et peut-être qu’il y en aura plus qu’on le pense à l’avenir — pourront exercer leur responsabilité constitutionnelle comme ils le souhaitent.

À cet effet, il existe des dispositions, notamment au Sénat français, où les sénateurs non affiliés peuvent être rattachés administrativement à un groupe avec lequel ils ont quelques affinités. Ce rattachement administratif fait en sorte que ces sénateurs, sans faire partie du groupe, sont néanmoins comptabilisés dans le groupe pour des fonds, des travaux, des comités, des questions, etc.

Il serait intéressant d’explorer une telle avenue qui permet non pas de codifier les pourcentages pour des groupes qui peuvent varier tout au long d’une session, mais d’explorer des canaux, des liens.

On a essayé d’avoir des sénateurs français comme témoins, mais ils commencent leurs travaux bientôt. Je sais qu’il sera possible d’avoir des témoignages sur cette dynamique dans l’avenir.

L’autre point que je voulais soulever sur le dossier qui nous concerne, c’est le plan de travail. Je voulais remercier les analystes et les greffiers qui ont travaillé sur le plan de travail que vous avez reçu et qui présente les questions sur lesquelles doit se pencher le comité.

[Traduction]

Ces questions sont liées au travail que nous effectuons à la Chambre, mais aussi au travail important que nous effectuons en comité. Nous voulons que les sénateurs soient traités sur un pied d’égalité, car nous savons que la proportionnalité est très importante. C’est l’un des principes qui régissent l’organisation des groupes et des caucus. En fin de compte, chaque sénateur est maître de ses responsabilités. L’équité entre les sénateurs est très importante pour qu’ils puissent faire leur travail correctement. Je suggère que nous poursuivions la discussion sur les sénateurs affiliés lors d’une prochaine réunion.

Ce fut un privilège pour moi de présider ce comité. Nous allons maintenant entendre une motion en vue de mon remplacement après mon départ.

Le sénateur Kutcher : Avant de passer au vote sur le remplacement, je tiens à vous remercier sincèrement pour le travail exceptionnel que vous avez accompli en tant que présidente de ce comité. Présider n’est pas chose facile, je le comprends, et je tiens à vous remercier pour votre dévouement et votre travail acharné. Je vous souhaite bonne chance pour la suite.

[Français]

La présidente : Merci beaucoup.

[Traduction]

Le sénateur MacDonald : J’aimerais juste ajouter que nous avons été collègues pendant longtemps au sein du caucus conservateur, et j’ai toujours regretté votre absence au sein du caucus. Je suis heureux de travailler à nouveau avec vous. Je suis désolé de vous voir partir et je vous souhaite le meilleur dans votre nouvelle vie après le Sénat.

La présidente : Merci.

[Français]

Sur ce, je vais présenter la motion suivante — et je sais que vous serez très choyés.

Je propose que l’honorable sénatrice Audette assume la présidence du Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement à partir du 13 octobre 2024. Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

La présidente : Félicitations, sénatrice Audette.

Pour la suite, nous allons tenir un comité directeur la semaine prochaine.

Nous avons une liste de témoins qui pourraient venir nous parler de travaux qui se font dans d’autres législations, dans d’autres parlements.

[Traduction]

La sénatrice Batters : Tout d’abord, je tiens à vous remercier pour tout le travail que vous accomplissez au sein de ce comité depuis un certain temps, sénatrice Bellemare, et je félicite la sénatrice Audette pour son accession à la présidence.

J’aimerais faire un petit rappel au Règlement, puisqu’il s’agit du Comité du Règlement, à savoir que lorsque nous avons une motion comme celle-là, qui est connue à l’avance, elle devrait probablement figurer à l’ordre du jour afin que tout le monde sache que l’on abordera ce point. J’étais au courant, mais ce point ne figure pas à l’ordre du jour du comité. Je dis simplement que le Comité du Règlement devrait probablement faire les choses dans les règles.

La présidente : Cela figurait à l’ordre du jour. C’est le dernier point.

La sénatrice Batters : Où?

Maxime Fortin, greffier du comité, Sénat du Canada : J’aimerais clarifier les choses : cela ne figure pas dans l’avis de convocation public qui se trouve sur le site Web, mais ce point a été diffusé dans un courriel. Si le comité souhaite qu’il figure dans l’avis de convocation pour les réunions futures, nous pourrons nous en assurer.

La sénatrice Batters : Oui. Il ne devrait pas y avoir deux ordres du jour différents. Il devrait y avoir un seul ordre du jour public.

[Français]

La présidente : Sur ce, je vous remercie. À la prochaine fois.

(La séance est levée.)

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