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RPRD - Comité permanent

Règlement, procédure et droits du Parlement


LE COMITÉ PERMANENT DU RÈGLEMENT, DE LA PROCÉDURE ET DES DROITS DU PARLEMENT

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le mardi 29 octobre 2024

Le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement se réunit aujourd’hui, à 9 h 34 (HE), avec vidéoconférence, conformément à l’article 12-7(2)a) du Règlement, pour étudier des amendements possibles au Règlement.

La sénatrice Michèle Audette (présidente) occupe le fauteuil.

[Français]

La présidente : Bonjour. Kuei. Je voudrais vous dire que j’ai besoin de vos enseignements, puisque c’est ma première expérience à titre de présidente du comité. Je vais essayer de le faire en douceur, mais avec des apprentissages. Je tiens à saluer tous ceux et celles qui nous écoutent. D’autres collègues se joindront à nous.

Je m’appelle Michèle Audette, sénatrice du Québec et nouvelle présidente du Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement. J’aimerais maintenant demander à mes collègues de se présenter, en commençant par ma droite.

La sénatrice Mégie : Bonjour. Marie-Françoise Mégie, du Québec.

La sénatrice Saint-Germain : Kuei. Raymonde Saint-Germain, du Québec.

Le sénateur Kutcher : Stan Kutcher, de la Nouvelle-Écosse.

La sénatrice Ringuette : Pierrette Ringuette, du Nouveau-Brunswick.

[Traduction]

Le sénateur Woo : Yuen Pau Woo, de la Colombie-Britannique.

Le sénateur Black : Kuei. Rob Black, de l’Ontario.

La sénatrice Osler : Tansi. Gigi Osler, du Manitoba.

La sénatrice Ataullahjan : Salma Ataullahjan, de l’Ontario.

Le sénateur MacDonald : Michael MacDonald, du Cap‑Breton, en Nouvelle-Écosse.

La présidente : Merci. Honorables sénateurs, nous reprenons aujourd’hui notre étude sur le rôle des sénateurs non affiliés. Nous sommes ravis d’accueillir, par vidéoconférence, Lord Gardiner de Kimble de la Chambre des lords du Royaume-Uni.

[Français]

Je vous cède la parole.

[Traduction]

John Eric Gardiner, Lord Gardiner de Kimble, Chambre des lords, à titre personnel : Bonjour. Il fait plutôt gris cet après-midi à Londres, mais je suis ravi de pouvoir vous présenter quelques observations qui aideront à répondre à vos questions.

Mon rôle de vice-président principal est une charge publique non politique axée sur l’administration interne de la Chambre des lords. Le poste de vice-président principal a été établi en 2016, tandis que l’on parlait auparavant du président des comités. Le vice-président principal préside toujours un certain nombre de comités, dont le Comité de liaison, qui gère la portée et les ressources des comités d’enquête spéciaux des lords; le Comité des procédures et des privilèges, qui examine les changements proposés aux procédures de la chambre; et le Comité de sélection, qui examine les nominations aux comités spéciaux.

Le vice-président principal siège — et il en est le porte-parole à la chambre — à la Commission de la Chambre des lords, qui établit les orientations stratégiques et politiques de l’administration de la Chambre des lords. Il doit donc répondre aux questions écrites et orales sur les sujets relatifs à l’administration. Le vice-président principal est un interlocuteur clé entre les membres et l’administration, et il a souvent des réunions avec les chefs et les whips en chef des principaux partis, ainsi que des cadres supérieurs.

Ce rôle exige que le titulaire de charge devienne un membre non affilié de la Chambre des lords durant son mandat. De même, le président de la Chambre des lords est aussi désigné comme un pair non affilié.

Actuellement, il y a 43 pairs non affiliés éligibles à la Chambre des lords et 7 autres qui ont pris congé de la chambre. Le vice-président principal joue un rôle pastoral informel envers les membres non affiliés et les membres des petits partis, comme le Parti unioniste démocrate de l’Irlande du Nord, le Parti unioniste d’Ulster, le Plaid Cymru et le Parti vert.

Les pairs non affiliés sont invités à rencontrer le vice-président principal lorsqu’ils font leur entrée à la Chambre des lords ou après le changement d’affiliation d’un pair qui quitte un parti politique ou le groupe des membres non inscrits pour devenir un pair non affilié. Le vice-président principal rencontre aussi des membres non affiliés régulièrement pour discuter de leurs préoccupations ou autre.

Les pairs ne sont pas tenus officiellement de m’informer de leur décision de devenir des membres non affiliés, et il est important de souligner que les pairs non affiliés ne forment pas un groupe; il s’agit de membres indépendants qui décident de devenir non affiliés pour des raisons qui leur sont propres. Les membres peuvent décider de se joindre aux non-affiliés à la chambre pour des raisons diverses. Cela comprend des membres qui ont des emplois précis en dehors de la Chambre des lords et qui ont été nommés à des charges publiques ou qui occupent des fonctions dans des organisations caritatives. Il se peut que des membres aient demandé au whip de leur parti politique de démissionner ou même l’aient congédié.

Même si c’est inhabituel, on peut directement nommer des membres comme pairs non affiliés. Fait notable, un certain nombre de pairs non affiliés vont retourner à leur groupe politique à la fin de leur mandat public ou quand leurs circonstances personnelles auront changé.

Le vice-président principal fournit aux membres non affiliés des informations sur l’administration de la Chambre des lords, la santé et sécurité dans la cité parlementaire, les mesures de sécurité et d’autres messages importants sur les affaires de la Chambre. Son cabinet gère les billets pour les cérémonies d’État pour les membres non affiliés. Je dois mentionner que le bureau des membres non inscrits donne un aperçu factuel de toute dissidence anticipée, et les membres non affiliés peuvent recevoir cette information.

Concernant certains éléments de la discussion d’aujourd’hui, les membres non affiliés ont les mêmes droits et privilèges que tous les autres membres de la Chambre des lords pour voter, déposer des questions et s’inscrire pour participer aux débats comme on le fait habituellement. Ils peuvent aussi soumettre des projets de loi au tirage au sort sur les projets de loi d’initiative parlementaire et faire des propositions pour les comités d’enquête spéciaux.

Pour ce qui est des procédures de la Chambre, la Chambre des lords établit ses propres règles. Elle doit accepter toutes les recommandations du Comité des procédures et des privilèges. Tous les rapports peuvent faire l’objet d’un débat et, à l’occasion, de dissidence, comme il y a quelques années concernant les heures de séance de la Chambre, par exemple.

Concernant les sièges aux comités, par convention, les deux principaux partis politiques obtiennent quatre sièges à chaque comité, les démocrates libéraux deux et les membres non inscrits en reçoivent deux aussi. Les pairs non affiliés, en plus des évêques et des membres des petits partis, peuvent m’écrire directement pour être considérés pour un comité précis. Le Comité de sélection va alors examiner ces demandes et les propositions des partis politiques et des membres non inscrits.

La chambre observe une règle de roulement de trois ans. Je devrais peut-être expliquer aussi que les membres non affiliés sont distincts du groupe des membres non inscrits. Ils forment présentement un bloc de 184 membres qui siègent comme pairs indépendants. Les membres non inscrits ont un représentant aux organismes de gouvernance de la Chambre des lords. Contrairement aux membres affiliés, les membres non inscrits reçoivent par défaut un certain nombre de sièges aux comités, que leur représentant gère pour eux, et se réunissent couramment pour discuter des sujets qui les touchent.

Je devrais peut-être conclure en insistant simplement sur le point que j’ai déjà mentionné : les membres non affiliés ne font pas partie d’un groupe. C’est pourquoi selon le fonctionnement de la chambre, je suis responsable de l’accompagnement pastoral des membres qui décident de devenir non affiliés.

Merci beaucoup, sénateurs, de m’avoir invité à témoigner.

[Français]

La présidente : Merci beaucoup pour votre déclaration.

Maintenant, nous allons procéder à la période des questions.

[Traduction]

La sénatrice Ataullahjan : Je suis ravie de vous voir, Lord Gardiner de Kimble. Vous avez parlé d’un certain nombre de sièges par défaut dans les comités. Pourriez-vous m’en dire un peu plus concernant les lords non affiliés?

Lord Gardiner : Parce que nous sommes plus de 700 membres, par défaut, les deux principaux partis politiques ont quatre sièges chacun, comme je l’ai dit, les démocrates libéraux en reçoivent deux et les membres non inscrits, deux aussi. Concernant tout membre non affilié qui veut siéger à un comité, n’oublions pas que bien des membres non affiliés sont devenus non affiliés parce qu’ils avaient été nommés à une charge publique, peut-être à la maison royale ou dans des organisations caritatives. Il n’y a pas de sièges attribués par défaut aux pairs non affiliés. Les nombres par défaut que j’ai cités concernent les groupes principaux. Toutefois, si un membre non affilié veut siéger à un comité en particulier — ou un évêque ou un membre d’un petit parti —, il doit prendre contact avec moi, puis comme je l’ai dit, je soumettrai cette demande au Comité de sélection.

La sénatrice Ataullahjan : Juste pour préciser les choses, si l’on est nommé à un organisme caritatif ou à une autre organisation, est-ce qu’on devient automatiquement non affilié?

Lord Gardiner : Pas nécessairement, mais c’est possible, surtout si l’on fait partie d’un groupe politique. Par exemple, j’ai des pairs non affiliés qui occupent une charge publique ou qui sont maintenant membres de la maison royale et qui étaient membres d’un groupe politique. Ils deviennent en effet des pairs non affiliés. Puis à l’échéance de leur mandat public, ils peuvent revenir à leur groupe politique, rester non affiliés ou même chercher à se joindre au groupe des non-inscrits.

Cela dépend vraiment de chaque membre. Mais comme je l’ai dit, si bon nombre de pairs deviennent non affiliés, c’est peut‑être qu’en raison de leur poste dans un organisme caritatif ou public, il n’est pas idéal pour eux de faire partie d’un groupe politique. C’est pourquoi le président de la chambre et moi, qui avons été membres de groupes politiques durant notre mandat, sommes devenus non affiliés. C’était pour non seulement montrer, mais dire très clairement que nous sommes là pour servir toute la chambre.

La sénatrice Ataullahjan : Merci.

Le sénateur Black : Lord Gardiner de Kimble, merci de vous joindre à nous. Comment le nombre de pairs non affiliés a-t-il fluctué au cours des années, et comment cela influence-t-il la dynamique à votre avis?

Lord Gardiner : Ce nombre fluctue beaucoup, parce que si l’on demande à un pair d’occuper une charge publique ou autre, il y aura des hausses et des baisses. Par exemple, un pair était modérateur de l’Église d’Écosse. Durant un an, il est devenu non affilié, puis il est revenu à son groupe politique à la fin de son mandat.

Il y a toutes sortes de raisons qui expliquent pourquoi ce nombre augmente et diminue et peut être plus élevé durant une année, puis plus faible l’année suivante. J’insiste sur le fait que le groupe indépendant des non-inscrits à la chambre diffère des non-affiliés qui ne sont pas un groupe, mais un ensemble de pairs qui, pour toutes sortes de raisons, veulent devenir non affiliés ou de ne plus avoir à suivre un whip de parti. Sinon, comme je l’ai dit, ils se sont brouillés avec leur parti et veulent peut-être devenir non affiliés si l’on a remercié le whip.

Le sénateur Black : Pendant une année où il y a beaucoup de non-affiliés, est-ce que cela nuit à la dynamique au quotidien?

Lord Gardiner : Pas au quotidien, non, parce que je travaille avec un groupe de membres, qui ont chacun un lien direct avec moi s’ils le souhaitent. Il y a certains pairs non affiliés que je vois rarement, parce qu’ils estiment qu’ils fonctionnent et qu’ils travaillent bien par eux-mêmes. Il se peut que je vois certains membres plus souvent.

En matière de dynamique, tous les pairs ont des privilèges et des droits égaux. Ils peuvent donc prendre la parole. D’ailleurs, on peut siéger où l’on veut dans la Chambre des lords. On peut siéger sur divers bancs si l’on est non affilié.

La sénatrice Batters : Merci, lord Gardiner, d’être parmi nous aujourd’hui. Nous vous en sommes très reconnaissants. Est‑ce bien ainsi qu’il faut s’adresser à vous?

Lord Gardiner : Oui.

La sénatrice Batters : Je me suis couchée un peu tard la nuit dernière. Les élections dans ma province se sont terminées très tard. Le résultat est bon, et la Saskatchewan est verte aujourd’hui.

Est-il courant, lord Gardiner, que des membres de la Chambre des lords changent de groupes, entre les groupes affiliés, les non‑inscrits et les non-affiliés?

Lord Gardiner : Cela arrive. Parfois, un membre peut choisir de quitter son parti parce qu’il a été nommé à un poste, qu’il a des engagements professionnels ou qu’il ne veut pas travailler avec le whip du parti. Il se peut alors qu’il préfère se joindre au groupe indépendant des membres non inscrits.

Il y a ce que j’appellerais des hausses et des baisses, selon les circonstances de chaque membre. Sans trop me répéter, je mettrais l’accent sur le fait que chaque pair non affilié a une raison qui lui est propre pour avoir décidé de devenir non affilié. Les circonstances de chacune de ces dynamiques changent à la fin d’un mandat public, comme je l’ai dit. Ces pairs non affiliés peuvent ensuite décider de revenir à leur groupe politique, ou demander de se joindre au groupe des non-inscrits — et c’est le groupe des non-inscrits qui décidera de les accepter ou non. Il n’y a pas de schéma prédéfini. Chacun a sa propre histoire; c’est ainsi que je le décrirais.

On dit : « lord Gardiner ». Si l’on dit « de Kimble », c’est parce qu’il y a déjà eu un pair Gardiner. C’est très mêlant, tout cela. Lord Gardiner est une appellation correcte, même si officiellement, je m’appelle lord Gardiner de Kimble. Merci beaucoup.

La sénatrice Batters : Merci. D’où viennent la plupart des membres non affiliés de la Chambre des lords? Habituellement, est-ce parce qu’ils ont quitté d’autres groupes? Est-ce possible qu’un membre commence comme non-affilié? Est-ce ce qui se produit habituellement?

Lord Gardiner : En général, les pairs sont nommés dans un groupe politique ou le groupe des non-inscrits, mais à l’heure actuelle, il y a deux pairs non affiliés qui sont arrivés à la Chambre en tant que pairs non affiliés. C’est donc un exemple de la décision qu’ils ont prise. On leur a accordé la pairie, et c’était la décision à prendre selon eux. Un d’eux travaille dans le monde du journalisme, et l’autre a été no 10 dans la fonction publique. Ils ont pris cette décision, parce que c’était le meilleur groupe pour eux pour avoir une certaine indépendance.

Je répète que tout dépend de chaque pair, qui voit ce qui lui convient le mieux pour apporter une contribution à la Chambre des lords.

La sénatrice Batters : Merci. Je pense que vous venez de dire à mon collègue que les temps de parole ne sont pas différents et que chaque membre de la Chambre des lords a droit, si je comprends bien, au même temps de parole, qu’il soit affilié ou non à un groupe. Corrigez-moi si je me trompe.

J’ai remarqué dans la note d’information que nous avons reçue qu’on dit ce qui suit sous « Questions orales et d’actualité »:

Dans le cadre d’un tirage, les députés soumettent leurs questions à l’avance et une sélection aléatoire... est effectuée pour déterminer celles qui seront posées...

Qui reçoit les questions d’avance? Si cela fonctionnait ainsi ici, je pense que le sénateur Gold voudrait que je lui remette mes questions d’avance, mais je ne pense pas que j’aimerais cela beaucoup. Comment fonctionnez-vous?

Lord Gardiner : Nous tenons des tirages au sort. Nous avons quatre questions orales par jour à la période de questions, qui est sur le point de commencer à 14 h 30 aujourd’hui. On soumet des questions en continu des mois d’avance pour les trois premières, puis — et c’est peut-être trop de détail — la quatrième est une question d’actualité, qui n’est donc pas soumise des jours à l’avance, parce que c’est une question sur l’actualité. Ces questions sont envoyées au Bureau des greffiers, et il y aura un tirage au sort. Les pairs ne prennent pas de décision à cet égard. Les questions sont pigées au hasard, donc le processus est tout à fait équitable.

Évidemment, nous recevons les feuilletons des travaux et connaissons les questions un mois d’avance pour que les ministères préparent leurs réponses. Puis, nous avons 10 minutes de questions supplémentaires, ce qui ramène les pairs non affiliés. Puisque nous gérons nos travaux nous-mêmes, les membres vont se lever. Parfois, si la question est très populaire, ce ne sont pas tous les membres qui veulent poser une question qui pourront le faire dans les 10 minutes. Le temps s’arrête à 10 minutes, sauf pour la réponse du ministre.

Comme je l’ai dit, j’insiste sur le fait que tout le monde est sur un pied d’égalité, qu’on soit dans un groupe ou non. Tous ont la même possibilité de prendre la parole, de déposer des questions, de participer aux débats.

La sénatrice Batters : Je vous remercie. Je vois que vous avez été nommé à la Chambre des lords en 2010, puis que vous en avez été nommé vice-président principal en 2021 et que depuis, vous êtes non affilié. Dans quel groupe étiez-vous au départ?

Lord Gardiner : J’ai été nommé en tant que pair conservateur, puis je suis passé aux premières banquettes de la Chambre des lords, où j’ai été ministre des lords de l’Environnement, de l’Alimentation et des Affaires rurales de 2015 à 2021. La Chambre me nomme chaque année. La première chose à faire à l’ouverture du Parlement est de nommer le vice‑président principal, car cela signifie que j’ai la responsabilité de mettre toutes les commissions en place et de leur permettre de fonctionner. Rien qu’à la Chambre des lords, il y a 26 commissions d’enquête spécialisées, entre autres choses, et après la dernière élection, nous nous sommes mis immédiatement au travail. Comme je l’ai dit, ma nomination est la première chose inscrite au Feuilleton après le discours du Roi.

La sénatrice Batters : Êtes-vous en train de dire qu’il y a des ministres des lords? Ai-je bien compris? Comment cela fonctionne-t-il?

Lord Gardiner : Oui. Il y en a parfois deux, mais il y a généralement un ministre ou un porte-parole pour chaque ministère. Par conséquent, le gouvernement en place et ses ministres doivent comparaître devant la Chambre des lords, puis le ministre répond aux questions, ouvre le débat, répond aux commentaires. Le ministre a la responsabilité, comme je l’ai eue, de veiller à l’adoption du projet de loi sur l’agriculture et du projet de loi sur les pêches. J’ai été ministre du ministère de l’Environnement, de l’Alimentation et des Affaires rurales, soit du DEFRA. Comme vous pouvez l’imaginer, les ministres des lords jouent un rôle essentiel dans l’adoption des projets de loi du gouvernement.

Par exemple, d’après mon expérience, le projet de loi sur les pêches était une initiative des lords. Il a donc d’abord été déposé à la Chambre des lords, où il a franchi toutes les étapes avant d’être renvoyé à la Chambre des communes. À peine a-t-il été renvoyé à la Chambre des communes que j’ai reçu le projet de loi sur l’agriculture de la Chambre des communes, qui a dû à son tour franchir toutes les étapes nécessaires.

Comme vous le savez, les deux Chambres sont étroitement interconnectées, et lorsqu’il y a des désaccords à la fin de l’étude d’un projet de loi, il y a ce que l’on appelle une partie de ping‑pong, où le projet de loi va et vient entre les deux Chambres. Évidemment, la tradition veut que la Chambre des lords reconnaisse toujours la suprématie de la Chambre élue.

La sénatrice Batters : Merci beaucoup.

Le sénateur Kutcher : Merci, lord Gardiner de Kimble, d’être parmi nous pour nous aider dans nos délibérations sur ces thèmes. Avant de vous poser quelques questions, je vous demanderais de bien vouloir transmettre mes plus chaleureuses salutations à la baronne Hayman, que j’ai eu la chance de côtoyer grâce à son travail au sein des Peers for the Planet.

Lord Gardiner : Très bien.

Le sénateur Kutcher : Je vous remercie. Je tiens à m’assurer que j’ai bien compris comment les gens choisissent de ne pas s’affilier. Il semble y avoir de nombreuses raisons pour lesquelles une personne peut choisir de devenir non affiliée, mais l’essentiel est qu’il s’agit toujours de son propre choix. Personne n’est forcé d’être non affilié. Je tiens à m’assurer que j’ai bien compris. Est-ce exact?

Lord Gardiner : Dans la plupart des cas, je dirais que c’est une question entièrement à la discrétion du pair. En cas de désaccord avec le parti d’affiliation, il peut arriver que le whip lui retire son appui, auquel cas le pair sera considéré comme non affilié parce qu’il a perdu l’appui du whip de son parti, mais, évidemment, cela concerne les trois groupes affiliés aux partis.

Cela arrive très rarement, je dois dire, et cela correspond plutôt à votre description générale, c’est-à-dire qu’il appartient à chaque pair de décider s’il veut au départ être affilié ou non, pour diverses raisons que j’ai exposées, ou se désaffilier, sous réserve de la situation que j’ai décrite, dans laquelle un pair pourrait perdre l’appui du whip de son parti et devenir non affilié à un groupe.

Le sénateur Kutcher : Merci beaucoup. C’est une nuance très importante, et je suis heureux que vous l’ayez apportée pour moi.

La deuxième chose que je veux m’assurer de bien comprendre est la suivante : si un lord n’est pas affilié, peut-il présenter une demande d’affiliation à un groupe ou l’autre? Existe-t-il des limites concernant le groupe auquel il peut présenter une demande? Ensuite, deuxièmement, s’il demande de joindre un groupe, devient-il automatiquement membre de ce groupe ou ce groupe doit-il décider s’il souhaite l’accueillir en ses rangs?

Lord Gardiner : Eh bien, j’ai déjà souligné que les pairs non affiliés ne constituent pas un groupe, mais ils ont le droit, le pouvoir... par exemple, s’ils décident de joindre un groupe politique, l’un des trois, ou de devenir membre d’un parti mineur, ou encore de devenir non-inscrits — Crossbenchers —, je suis d’avis que, premièrement, pour devenir Crossbencher, il devrait y avoir une discussion avec le rassembleur des non‑inscrits pour déterminer s’il est absolument clair que la demande émane d’une personne qui n’est pas liée d’une manière ou d’une autre à un groupe politique, qui n’en est pas un grand donateur, entre autres, pour garantir l’intégrité du Crossbench, qui est un groupe indépendant.

Si une personne non affiliée, qui est arrivée à la Chambre comme pair non affilié, manifestait ensuite le désir de joindre l’un des trois groupes politiques, je pense qu’il y aurait une discussion entre le pair et le whip en chef du groupe en question pour en discuter. Ce ne serait donc pas automatique, il ne suffirait pas de dire : « Je me joins à l’un des trois groupes politiques. » Il y aurait une discussion avec les membres du parti concerné, selon moi.

En fait, il est beaucoup plus probable que quelqu’un revienne vers son groupe après avoir occupé un poste particulier.

Le sénateur Kutcher : Je vous remercie. Il est très important pour nous de saisir ces nuances, et je vous remercie de nous les expliquer.

La dernière partie de ma question — j’ai toujours des questions en trois parties — n’a rien à voir avec les deux premières. Au sein du groupe des pairs non affiliés — pas le groupe, mais l’ensemble des personnes — y en a-t-il qui ont communiqué avec vous, vous ou d’autres personnes ayant un rôle administratif, pour vous faire part de leurs préoccupations ou doléances concernant leur rôle de lords non affiliés et, dans l’affirmative, quel genre de préoccupations ou de doléances ont‑ils exprimées au cours des deux dernières années?

Lord Gardiner : En général, le genre de choses pour lesquelles les pairs non affiliés viennent me voir, surtout lorsqu’ils viennent d’arriver à la Chambre des lords, c’est pour s’assurer qu’ils reçoivent tous les renseignements voulus, qu’ils savent où tout se trouve. Ainsi, lorsque quelqu’un arrive, les partis politiques et le groupe du Crossbench désignent un mentor, de sorte que chaque pair ait un mentor pour comprendre comment les choses se font, quelles sont les procédures, etc. Je joue un rôle à ce chapitre, comme d’autres pairs qui font partie de ces groupes. Ainsi un nouveau pair viendrait nous voir, moi, l’huissier du bâton noir, le greffier des Parlements, pour recevoir des conseils sur diverses questions.

L’une des choses sur lesquelles bon nombre des pairs non affiliés viendront probablement me voir, c’est vraiment la procédure, surtout au début, en fait, et les appellations. Je conseillerai vivement aux gens d’utiliser les appellations correctes afin d’éviter de s’engager dans un échange personnel potentiellement acrimonieux à la Chambre. C’est pourquoi nous utilisons des appellations comme « noble lord » et « mon noble ami », entre autres choses, qui peuvent sembler assez étranges à certains, mais qui sont conçues pour empêcher le discours de prendre une tournure trop personnelle et parfois hostile.

C’est donc surtout sur ce genre de choses que les pairs viennent me voir, surtout les nouveaux fraîchement arrivés à la Chambre des lords, comme je l’ai dit — parce que beaucoup de pairs non affiliés sont ici depuis assez longtemps, en fait, et sont désaffiliés soit temporairement, pendant qu’ils occupent un poste particulier, soit parce que cela leur convient mieux, parce qu’ils ne veulent pas se soumettre à une ligne de parti. J’ai rarement vu des personnes issues du Crossbench devenir non affiliées. Je vois plutôt des membres de partis politiques qui se joignent au groupe des pairs non affiliés, puis qui, après un certain temps, décident, après discussion avec le rassembleur des non-inscrits, qu’ils préféreraient devenir membres du Crossbench à la Chambre des lords.

Ainsi, comme je l’ai dit, les mouvements varient en fonction de chaque pair. Il est difficile de catégoriser tout cela, mais mon travail, tel que je le conçois, consiste à jouer un rôle de guide auprès des pairs non affiliés.

Le sénateur Kutcher : Merci beaucoup pour ces éclaircissements. C’est très apprécié.

Lord Gardiner : Ce n’est rien. Je transmettrai vos salutations à Lady Hayman.

La sénatrice Ringuette : Merci beaucoup d’être parmi nous, lord Gardiner. Il y a quelques questions qui me taraudent et qui, je crois, ont besoin d’être clarifiées pour mes collègues et moi . La Chambre des lords dispose d’une Commission des nominations qui a été créée en 2000. C’était il y a 24 ans. Cette commission émane-t-elle d’une loi au Royaume-Uni?

Lord Gardiner : Je m’excuse, je n’ai pas bien compris.

La sénatrice Ringuette : A-t-elle été constituée par la voie législative?

Lord Gardiner : Eh bien, je dois vous dire que cela date d’avant mon arrivée à la Chambre des lords, mais je ne pense pas... il faut dire qu’il y a beaucoup de discussions en ce moment sur les nominations à la Chambre des lords, évidemment. Le prochain gouvernement pourrait décider de se pencher sur la question, car il est question d’inscrire certaines choses dans la loi et de conférer une certaine force aux recommandations de la commission, parce qu’à l’heure actuelle, bien sûr, il y a des moments où ces recommandations ne sont pas nécessairement prises en compte, le premier ministre ne tient pas nécessairement compte des points de vue exprimés. Je présume que, n’étant pas affilié, comme je l’ai dit, ce n’est pas vraiment à moi d’exprimer des opinions sur la façon d’améliorer le processus de nomination.

La sénatrice Ringuette : Dois-je comprendre qu’au cours des 24 dernières années, différents partis politiques ont dirigé votre pays, mais qu’ils ont tous maintenu cette commission?

Lord Gardiner : Oui, effectivement. Elle existe toujours.

La sénatrice Ringuette : Je remarque que la proportion des Crossbenchers à la Chambre des lords est actuellement d’environ 18 %. Existe-t-il une règle officielle ou officieuse pour maintenir leur proportion à 18 %, ou à un autre pourcentage? Comment s’assurer qu’il y a toujours un certain nombre de pairs non inscrits pour exprimer leur accord ou leur désaccord avec les projets de loi du gouvernement?

Lord Gardiner : Pour autant que je sache, il n’y a pas de pourcentage fixe à respecter. En fait, il y a eu une période, récemment, où le groupe des Crossbenchers était le deuxième groupe le plus important. Je crains bien que les chiffres puissent varier à la hausse et à la baisse, avec les départs à la retraite et tout, mais il n’y a pas de pourcentage fixe, de 18 % ou je ne sais trop combien. Comme je l’ai dit, il y a 184 pairs non inscrits, et ils constituent un groupe très actif, mais il n’est écrit nulle part qu’ils doivent représenter 18 % de la Chambre.

La sénatrice Ringuette : Très bien. Encore une fois, pour m’assurer d’avoir bien compris, cette commission est restée en place sous le règne de différents gouvernements depuis 24 ans, et il y a maintenant des discussions en vue de l’inscrire dans la loi de façon permanente, n’est-ce pas?

Lord Gardiner : Tout cela fait partie des changements envisagés à la Chambre des lords, oui.

La sénatrice Ringuette : Merci.

Le sénateur Woo : Merci, lord Gardiner. J’aimerais vous poser une question sur le processus de nomination des pairs au sein des commissions spécialisées. Ma première question est de savoir s’il y a un nombre fixe de sièges à ces commissions.

Lord Gardiner : Oui, elles comptent généralement 12 membres. Comme je l’ai dit, le comité de sélection peut accepter un plus grand nombre de sièges, mais les deux principaux partis politiques en ont quatre; les libéraux-démocrates, deux, et les membres du Crossbench, deux. Mais en ce qui concerne le comité de sélection, je lui soumettrais la demande si j’en recevais une. Je soumettrais la question à l’examen du comité de sélection.

Le sénateur Woo : D’accord. Il y a des quotas pour les trois principaux partis — 4, 4 et 2 — ce qui donne 10, bien sûr. Il reste donc deux sièges à pourvoir. En l’absence de demande de pairs non affiliés pour être membres de cette commission spécialisée, qui occupera les deux sièges restants?

Lord Gardiner : Ce sont les membres du Crossbench qui ont les deux autres. C’est donc quatre, quatre, deux et deux. Ce sont des non-inscrits qui occupent ces deux sièges, généralement. Comme je l’ai déjà dit, il n’est pas hors norme qu’une demande spéciale soit présentée, notamment si quelqu’un a des compétences spécialisées. Évidemment, l’objectif est de faire en sorte que les membres des commissions spécialisées aient une expérience et une expertise pertinentes, ce qui est souvent le cas chez les membres de la Chambre des lords.

Si un candidat se présente, le comité de sélection examinera attentivement sa candidature, surtout s’il possède des compétences qui, selon nous, seraient un atout précieux pour le travail de la commission.

Le sénateur Woo : Oui, c’est logique. Pour qu’un pair non affilié obtienne un siège au sein d’une commission spécialisée, il faudrait lui attribuer l’un des sièges normalement attribués aux quatre groupes principaux, c’est bien cela?

Lord Gardiner : Non. Comme je l’ai dit, il y aurait alors un siège en plus. Certaines commissions comptent plus de 12 membres si le comité de sélection estime, comme il l’a déjà fait, qu’une compétence particulière de quelqu’un représenterait un atout précieux.

Le sénateur Woo : C’est donc le comité de sélection qui a le pouvoir d’augmenter le nombre de sièges à une commission spécialisée? Jouit-il du plein pouvoir discrétionnaire d’augmenter le nombre de sièges comme il l’entend?

Lord Gardiner : Il dispose effectivement de ce pouvoir discrétionnaire, sous réserve de l’approbation de la Chambre des lords. Selon la procédure aux commissions que je préside, s’il y a un rapport qui est préparé, il est soumis à la Chambre des lords, et je présenterai une motion pour son adoption. N’importe quel pair peut se lever et faire un commentaire à ce moment-là.

Le sénateur Woo : Merci. Est-il fréquent qu’un pair non affilié demande un siège à une commission spécialisée et l’obtienne?

Lord Gardiner : Je dirais que ce n’est pas très fréquent de recevoir des demandes et que c’est très souvent pour les raisons pour lesquelles ces pairs ne sont pas affiliés. Ils occupent souvent des fonctions assez exigeantes, et c’est pourquoi ils se sont désaffiliés. Comme je l’ai déjà dit, il arrive tout de même parfois que le comité de sélection reçoive des demandes. Certaines sont acceptées, et pour d’autres, on estimera que la commission dispose déjà de la robustesse requise.

Le sénateur Woo : Merci. Permettez-moi maintenant de vous poser une question sur les membres des commissions qui choisissent de quitter leur siège pour une raison ou une autre. Peut-être ont-ils quitté le caucus ou le groupe auquel un certain nombre de sièges était attribué au sein de la commission. Ce pair peut-il continuer de siéger à la commission avec sa nouvelle affiliation? Ou bien le siège est-il rendu, pour ainsi dire, au groupe auquel il était destiné au départ?

Lord Gardiner : C’est intéressant. J’essaie de me rappeler si j’ai déjà vécu ce genre de situation, et je ne pense pas l’avoir rencontrée jusqu’à présent, au cours de mes trois années à ce poste. Si quelqu’un voulait prendre sa retraite ou se retirer de la commission en cours d’année, il serait remplacé. Cela causerait une vacance si la personne se retirait parce qu’évidemment, elle se trouverait à occuper un des sièges attribués à l’un des groupes, en théorie. Cela dit, je ne me souviens pas que cela se soit jamais produit.

Ce qui se passe habituellement, c’est que si quelqu’un, pour quelque raison que ce soit, souhaite cesser d’être membre de la commission avant la fin de son mandat de trois ans, nous procédons à une rotation en janvier. La procédure habituelle serait que quelqu’un décide de ne pas continuer, qu’il informe le whip de son parti ou le whip en chef que non, il ne veut pas continuer de siéger à cette commission, ou qu’il quitte le groupe conservateur, travailliste, libéral-démocrate, ou peu importe, et que la place soit pourvue à ce moment-là.

Le sénateur Woo : C’est vrai. Le scénario que vous décrivez est tout à fait raisonnable. Je pense à un scénario légèrement différent dans lequel un pair ne prend pas sa retraite, ne quitte pas la chambre haute, mais change en fait de statut en passant, par exemple, du groupe des non-inscrits au rang d’indépendant. J’estime qu’il s’agit d’un scénario plausible. Ce pair serait-il autorisé à conserver son siège au sein du comité en question après avoir ainsi quitté un groupe pour ne plus appartenir à aucun groupe?

Lord Gardiner : Oui. Parce que cela ne s’est jamais produit depuis le début de mon mandat, je serais surpris que ledit pair s’attende à pouvoir continuer, étant donné que la répartition des membres du comité est basée sur la convention établie relativement à sa composition. Mais comme je l’ai dit, je n’ai jamais vu rien de tel. Je pense que l’on s’attendrait vraiment à ce qu’un pair qui souhaite quitter son parti ne puisse pas espérer continuer à siéger au sein du comité. Sinon, on pourrait en arriver à une situation absurde si, par exemple, tout le monde commençait à quitter un certain groupe. Il y aurait alors déséquilibre dans la représentation. Dans la plupart de nos comités, tout se fait de façon très consensuelle bien que nous ayons cette répartition. Les comités de la Chambre des Lords essaient toujours de travailler sur une base collégiale et consensuelle. C’est dans cette optique que les calculs ont été faits. Ainsi, les deux principaux partis ont quatre membres chacun et les deux autres groupes se partagent les quatre autres sièges.

Mais nous avons cet organe que nous appelons les « voies habituelles », où les leaders, les whips en chef des groupes et l’organisateur des non-inscrits ont différents échanges qui portent notamment sur la façon d’obtenir la bonne combinaison de membres pour les comités en misant sur les pairs qui sont les mieux à même de les faire bénéficier d’une expérience particulière.

Le sénateur Woo : Merci, lord Gardiner. Ces précisions sont très utiles.

La sénatrice Mégie : Merci, lord Gardiner, d’être des nôtres aujourd’hui.

[Français]

Vous avez parlé des pairs indépendants, qui sont tous sur un pied d’égalité. Si j’ai bien compris, ils doivent communiquer avec vous pour faire partie d’un comité restreint. Au cours des travaux du comité, comment peuvent-ils influencer les discussions? Est-ce par leurs opinions ou leurs expertises personnelles? Ont-ils le droit de vote lors des discussions au sein des comités restreints?

[Traduction]

Lord Gardiner : Les comités d’enquête votent rarement. Comme je l’ai dit, ce n’est pas le rôle de ces comités. Je ne parle pas du processus législatif. Je parle des comités sessionnels, qui sont au nombre de 26. Il est très rare qu’il y ait des votes au sein de ces comités. Il faut bien sûr considérer la composition de chaque comité. Si un comité demande à un pair affilié à un groupe ou un autre ou à un pair indépendant de se présenter devant lui, rien n’empêche les autres pairs qui le souhaitent d’être présents. Les comités siègent tous, ou pour la plupart, en séance publique. Il y a évidemment des séances à huis clos, mais ce sont surtout des séances publiques avec des témoins. Rien n’empêche un pair indépendant d’y assister de cette manière.

Si nous parlons du travail en comité, je dois dire que c’est très rare. Ce n’est pas du tout courant pour les motifs que j’ai exposés, compte tenu de la raison d’être de la non-affiliation. Il est évident que l’on me présenterait alors une demande et que je ferais le nécessaire.

En ce qui concerne le travail principal de la Chambre des Lords, un pair indépendant dans la chambre ou dans notre chambre de débat parallèle peut déposer des amendements, intervenir au sujet d’un projet de loi et faire tout ce que n’importe quel autre pair peut faire. Les activités des pairs indépendants ne sont absolument pas entravées du fait qu’ils sont isolés. Très souvent, si vous avez un amendement à un projet de loi, vous verrez un pair indépendant inscrire son nom sur l’amendement avec d’autres pairs affiliés. Cette dynamique de pairs indépendants travaillant avec d’autres pairs sur des choses telles que des amendements à des textes législatifs à l’étape du comité ou du rapport est tout à fait normale et attendue.

La sénatrice Mégie : Merci.

La sénatrice Osler : Je vous remercie de votre présence aujourd’hui, lord Gardiner. Vous avez mentionné les voies habituelles, c’est-à-dire la manière dont les travaux de la Chambre des Lords sont planifiés en accord avec les leaders et les whips des trois principaux partis politiques. Les pairs indépendants ont-ils accès aux voies habituelles ou y apportent‑ils une contribution?

Lord Gardiner : Je tiens simplement à préciser que les voies habituelles comprennent également l’organisateur du groupe des non-inscrits. Je pense que s’il y avait quoi que ce soit de particulier — si un pair indépendant souhaitait soulever quelque chose —, on s’adresserait à moi à ce sujet, et j’assurerais bien évidemment le suivi. Mais je dois dire que cela ne s’est pas produit parce que les voies habituelles consistent pour ainsi dire à dégager le point de vue de la chambre, à planifier les travaux et ainsi de suite. Non, un pair indépendant ne fait pas partie des voies habituelles.

La sénatrice Osler : Merci. Je pense que vous l’avez mentionné, mais existe-t-il un processus formel de rétroaction ou de communication régulière entre les pairs indépendants et le premier vice-président, et êtes-vous en mesure de dire si les pairs indépendants sont généralement satisfaits des dispositions actuelles, ou s’ils ont exprimé des préoccupations au sujet de possibles iniquités?

Lord Gardiner : Je n’ai pas eu vent de préoccupations à cet égard parce que presque tous les pairs indépendants ont décidé d’eux-mêmes de devenir non affiliés pour les raisons que j’ai évoquées. Ils peuvent rester non affiliés pendant un an, deux ans, trois ans, retourner dans leur groupe, etc. Ils peuvent aussi demeurer non affiliés parce que cela leur convient. Je n’ai pas reçu ce que j’appellerais une demande de la part d’un pair indépendant qui m’aurait dit qu’il se sent traité injustement ou m’aurait fait part de récriminations dans le même sens. Il est évident qu’il peut arriver qu’un pair indépendant veuille, en théorie, devenir membre d’un comité, mais que celui-ci considère avoir déjà accès aux compétences qu’il pourrait apporter. Il peut y avoir des cas individuels de ce genre.

D’une manière générale, j’ai l’impression que les pairs indépendants sont souvent des gens très occupés à prendre la parole dans des débats, à étudier des projets de loi et tout le reste. Si vous voulez savoir si, de mon point de vue, je crains que les pairs indépendants ne soient pas en mesure de s’acquitter de leurs tâches, je vous dirai que je n’ai pas de craintes à ce sujet et que, bien entendu, si j’avais l’impression que c’était le cas, je m’efforcerais d’y remédier. Je pense que tous les membres de la Chambre des Lords sont sur le même pied quant aux possibilités qui s’offrent à eux, notamment pour prendre la parole à la Chambre.

La sénatrice Osler : Merci, lord Gardiner.

Le sénateur MacDonald : Merci, lord Gardiner, d’être parmi nous ce matin. Il y a quelques questions qui m’intriguent et que nous n’avons pas abordées.

Quel est le nombre minimum de lords nécessaire pour être reconnu comme un groupe? Il doit y avoir en quelque sorte un seuil. En dehors de l’appartenance à un groupe organisé, les non‑inscrits et les pairs indépendants m’apparaissent assez semblables. S’agit-il d’une analyse simpliste ou pouvez-vous nous en dire plus?

Lord Gardiner : Oui. Je pense que je vais revenir à mon principe suivant lequel si vous souhaitez être un pair sans affiliation comme le sont 184 membres de la Chambre des Lords, le groupe des non-inscrits vous offre une structure, avec un organisateur et une partie des fonctions de gouvernance de la Chambre. En ce qui concerne la distinction que j’ai cherché à établir dans mes remarques préliminaires entre un pair indépendant et un membre du groupe des non-inscrits, il s’agit avant tout d’une décision que prend individuellement chaque pair non affilié. De nombreux pairs indépendants sont venus me voir pour me dire que cela leur convenait et correspondait à leur manière de travailler ou à leurs engagements d’être non affiliés, plutôt que membres d’un groupe. J’ai le sentiment que c’est à chacun de décider s’il souhaite travailler individuellement ou au sein d’un groupe.

En ce qui concerne la question du nombre minimum, nous avons par exemple deux membres du Parti vert à la Chambre des Lords qui considèrent qu’ils forment un groupe. J’ai pu discuter avec eux et les membres des autres partis mineurs — et je dis « mineurs » dans le sens du nombre. Ils peuvent se qualifier de groupe. Ils ne sont pas intégrés aux voies habituelles, mais ils font partie de la Chambre et sont respectés en tant que tels. S’ils souhaitent faire des observations, c’est à moi qu’ils s’adressent. Si un problème se pose, j’en parle au comité concerné ou j’essaie de régler le tout par l’entremise des voies habituelles, selon le cas.

Mais comme je l’ai déjà indiqué, je ne pense pas avoir été saisi d’un grand nombre de préoccupations de la part de pairs individuels qui ne sont pas affiliés depuis que j’ai accédé à ce poste il y a trois ans. À titre d’exemple, personne ne m’a dit qu’il souhaitait former un groupe non affilié.

Le sénateur MacDonald : Je m’intéresse aux relations entre la Chambre des Lords et la Chambre des Communes. Les pairs travaillistes, conservateurs et libéraux-démocrates siègent-ils au sein du même caucus que leurs homologues de la Chambre des communes? Existe-t-il quelque chose de semblable à ce que l’on voit aux États-Unis où, par exemple, un sénateur comme Angus King siège en tant qu’indépendant, mais fait partie d’un groupe? Quelqu’un qui n’est pas membre d’un parti peut-il participer d’une manière ou d’une autre aux réunions d’un groupe parlementaire élu?

Lord Gardiner : Eh bien, pour répondre à la première partie de votre question, il y a évidemment des liens et des relations de travail. J’ai indiqué qu’il y a des ministres à la Chambre des Lords qui sont membres du gouvernement de Sa Majesté. Il y a donc une interconnexion entre les membres des deux chambres à l’intérieur de l’exécutif, mais également au sein des groupes d’arrière-ban. Par exemple, j’étais conservateur et nous avions ce que l’on appelait l’Association des pairs conservateurs. Un ministre ou quelqu’un d’autre venait régulièrement prendre la parole lors de notre caucus hebdomadaire. Le groupe des non‑inscrits a une réunion hebdomadaire, tout comme le groupe travailliste, le groupe d’arrière-ban et les libéraux-démocrates, au cours de laquelle il est très probable que des députés à la Chambre des communes interviennent souvent. En fait, je peux vous confirmer d’expérience qu’il arrive que des députés du parti à la Chambre des communes se réunissent et que nous, en tant que pairs conservateurs, soyons présents également.

Il existe une dynamique de travail. Il est évident que le gouvernement au pouvoir cherche, comme c’est toujours le cas, à faire adopter des projets de loi par les deux chambres. Dans cette chambre-ci, le gouvernement actuel — tout comme celui qui l’a précédé — n’a pas la majorité. Il y a donc aussi cette considération à prendre en compte.

En ce qui concerne la participation à des caucus, soit on fait partie d’un groupe, soit on n’en fait pas partie. Cela ne veut pas dire qu’il ne peut pas y avoir de bonnes et solides relations entre un pair indépendant et un groupe particulier, mais c’est une question qui les concerne, et je n’en ai pas connaissance. Si vous me demandiez si je sais si l’un des pairs indépendants a des allégeances particulières, je vous répondrais que je l’ignore. En fait, l’un des avantages de la non-affiliation est de ne pas être soumis à un whip. Il va en outre de soi que si vous choisissez de travailler sous la direction d’un whip, on s’attendra à ce que vous vous présentiez et à ce que vous votiez à toute heure du jour et de la nuit. Je pense donc que c’est un choix peu envisageable. Il est évident qu’il peut y avoir des accords ou des discussions au sein du groupe, mais cela demeure l’affaire de chaque pair.

Pour résumer la discussion d’aujourd’hui, que j’ai trouvée fascinante, je vous dirais que je m’occupe d’un ensemble de pairs individuels qui ont tant de raisons différentes de ne pas être affiliés.

Le sénateur MacDonald : Merci, lord Gardiner.

Le sénateur Woo : Nous avons également trouvé cette discussion passionnante. Merci, lord Gardiner.

J’ai été frappé par votre observation selon laquelle il n’y a pas eu de cas où un sous-ensemble de pairs indépendants a cherché à former un groupe au sein de la Chambre des Lords. Une telle chose serait-elle même possible? Un nombre X de pairs indépendants pourraient-ils se réunir, s’organiser et chercher à être reconnus comme étant un groupe officiel utilisant le nom ou la raison d’être de leur choix? Quelles seraient les conditions minimales à mettre en place pour qu’une telle chose se produise?

Lord Gardiner : Comme je l’ai indiqué en réponse à une question précédente, je ne suis pas au courant d’un nombre qui servirait de seuil, mais les pairs indépendants, qui ne font donc pas partie des trois autres groupes politiques, ont accès au groupe des non-inscrits qui accueille l’écrasante majorité de ceux et celles qui ne souhaitent pas être ou n’ont jamais été membres d’un parti politique ou n’ont jamais eu d’affiliation. Comme je l’ai dit, l’indépendance est la caractéristique principale du groupe des non-inscrits qui se distingue notamment par l’absence d’un whip. Historiquement, c’est le groupe qui a toujours coalisé les gens à l’esprit indépendant. La chambre haute a d’ailleurs été aménagée pour permettre aux membres de ce groupe d’y siéger.

Si je devais parcourir la liste des pairs indépendants, chacun a une histoire qui explique pourquoi il en est rendu là dans son parcours politique. Je n’ai encore jamais vu quelqu’un venir me voir et me dire: « Pourquoi ne pas nous réunir en tant que groupe », parce qu’il n’existe pas de sentiment d’appartenance chez cet ensemble de pairs. C’est précisément dans le but d’être indépendants qu’ils ont choisi de ne s’affilier à aucun groupe.

Laissez-moi vous présenter les choses autrement. Si l’on pense à tous ceux qui sont actuellement non affiliés, qui le sont devenus parce qu’ils sont titulaires d’une charge publique, mais qui ont l’intention de retourner ensuite dans leur parti politique, cela va totalement à l’encontre du concept de groupe indépendant, alors qu’il en va tout autrement des non-inscrits.

Comme je l’ai dit, je n’ai pas examiné les statistiques, mais il y a en quelque sorte un va-et-vient. Lorsque l’on demande aux gens de s’acquitter de certaines fonctions, ils deviennent non affiliés parce qu’il est préférable pour l’instance qui les emploie qu’au moment où ils occupent le poste en question, ils soient indépendants, plutôt que membres d’un parti politique. À la fin de leur mandat, c’est à eux, et non à moi ou à leur ancien parti politique, de décider s’ils reprennent ou non leur place au sein de ce parti. C’est à chacun de prendre cette décision.

Le sénateur Woo : Votre explication est très utile. Vous serez toutefois intéressé de savoir qu’au Sénat canadien, nous avons trois variétés de non-inscrits, si je puis dire, tous indépendants. Nous avons également des sénateurs non affiliés, mais ils sont très peu nombreux.

En ce qui concerne les sénateurs indépendants, nous avons choisi de nous répartir en trois groupes pouvant s’apparenter à celui de vos non-inscrits. C’est d’ailleurs pour cette raison que je voulais savoir si cela pourrait être une possibilité à la Chambre des Lords, même si cela ne s’est pas encore produit.

Lord Gardiner : Eh bien, je suppose que tout est possible. J’essaie de me rappeler, mais je ne pense pas que nous en ayons eu. Les pairs passent généralement de l’appartenance à une formation politique au statut d’indépendant, pour le demeurer ou éventuellement se joindre au groupe des non-inscrits. Je n’ai jamais eu connaissance, par exemple, d’un sous-groupe qui aurait voulu se séparer de ce groupe des non-inscrits qui fait partie de la structure de gouvernance et peut compter sur un organisateur qui a pour tâche de siéger à la Commission de la Chambre des Lords et aux comités de la Chambre des Lords, des mécanismes cruciaux pour l’administration de la Chambre.

Pour en revenir au sujet, je dirais que je n’ai pas connaissance d’un mouvement parmi les non-inscrits où l’on estimerait que le groupe est trop grand et que l’on pourrait former des sous-groupes plus cohésifs en le scindant.

Je dois revenir à mon mantra suivant lequel chacun des 43 pairs indépendants actuels est une entité fonctionnant individuellement que rien ne pourrait empêcher de parler à ses semblables pour leur dire qu’il veut que l’on forme le groupe X ou Y. Quant à savoir si de tels groupes seraient reconnus, je ne saurais le dire. Mais cela ne s’est pas produit, et je suppose qu’il s’agit d’une possibilité théorique qui aurait plus de chances de se concrétiser s’il y avait des problèmes au sein du groupe des non‑inscrits. Comme je l’ai dit, un grand nombre de pairs non affiliés se joignent au groupe des non-inscrits à un moment ou à un autre, généralement après avoir passé un peu de temps dans la catégorie des pairs indépendants.

Le sénateur Woo : Si ce scénario hypothétique devient plus probable, vous voudrez peut-être inviter certains d’entre nous à témoigner lors de vos audiences.

Lord Gardiner : Si tel était le cas, je vous contacterais très rapidement, bien entendu. En fait, dans le cadre de ce processus de compréhension mutuelle et d’apprentissage réciproque, j’ai été fasciné par la composition de la chambre haute au Canada et par le changement qui s’est opéré alors que nous avons ici des ministres à la Chambre des Lords par l’intermédiaire desquels le gouvernement de Sa Majesté doit faire progresser ses dossiers dans les deux chambres, et que l’expédition des affaires du gouvernement est entièrement confiée à des politiciens du parti travailliste. C’est une dynamique très intéressante. Je pourrais peut-être vous poser des questions une autre fois, mais ce n’est pas l’objet de la séance d’aujourd’hui.

[Français]

La présidente : Merci beaucoup. Nous n’avons plus de sénateurs ou de sénatrices sur la liste.

J’aimerais vous dire un grand merci, lord Gardiner. Votre témoignage et vos échanges avec les sénateurs et sénatrices étaient très intéressants. Il est sûr que votre expertise et votre savoir — et, bien sûr, la sagesse de mes collègues — contribueront à notre étude. Je vous remercie.

Merci à vous, chers collègues; vous avez été très gentils avec moi pour ma première expérience. Je remercie aussi tous ceux et celles qui nous entourent — notamment notre équipe — et qui font en sorte que le Canada nous écoute et que le message vibre partout.

Nous sommes à la fin de l’ordre du jour, donc nous allons conclure cette réunion.

(La séance est levée.)

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