LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DE LA SÉCURITÉ NATIONALE, DE LA DÉFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le lundi 15 mai 2023
Le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale, de la défense et des anciens combattants se réunit aujourd’hui, à 16 heures (HE), avec vidéoconférence, afin d’examiner, pour en faire rapport, les questions concernant la sécurité nationale et la défense en général; et à huis clos, pour étudier la teneur des éléments contenus dans la section 24 de la partie 4 du projet de loi C-47, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 28 mars 2023.
Le sénateur Tony Dean (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Bienvenue à cette séance du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale, de la défense et des anciens combattants. Je suis Tony Dean, sénateur de l’Ontario et président du comité. J’inviterais mes collègues à se présenter.
La sénatrice Anderson : Je suis Margaret Dawn Anderson, des Territoires du Nord-Ouest.
Le sénateur Yussuff : Hassan Yussuff, de l'Ontario.
Le sénateur Boehm : Peter Boehm, de l'Ontario.
[Français]
Le sénateur Gignac : Sénateur Gignac, du Québec.
[Traduction]
Le sénateur Oh : Victor Oh, de l'Ontario.
La sénatrice R. Patterson : Rebecca Patterson, de l'Ontario.
Le sénateur Ravalia : Bienvenue. Mohamed Ravalia, de Terre-Neuve-et-Labrador.
Le président : Merci, mesdames et messieurs.
Aujourd’hui, nous nous concentrons sur des questions liées au recrutement et au maintien en poste dans les Forces armées canadiennes et dans la Gendarmerie royale du Canada et sur la façon dont ces questions pourraient influer sur les déploiements à long terme.
Dans le cadre de notre premier groupe de témoins, nous sommes ravis d’accueillir la lieutenante-générale Lise Bourgon, commandante par intérim, Commandement du personnel militaire; la lieutenante-générale Jennie Carignan, cheffe, Conduite professionnelle et culture; et la brigadière-générale Krista Brodie, commandante, Groupe de la génération du personnel militaire, du ministère de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes.
Merci de vous joindre à nous. Je vous invite à présenter vos déclarations liminaires, qui seront suivies par les questions des sénateurs. Je crois comprendre que la lieutenante-générale Bourgon prononcera l’allocution d’aujourd’hui. Vous pouvez commencer dès que vous serez prête.
Lieutenante-générale Lise Bourgon, commandante par intérim, Commandement du personnel militaire, ministère de la Défense nationale : Merci beaucoup, monsieur le président. J’aimerais tout d’abord souligner que nous sommes réunis sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinabe.
Au sein du ministère de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes, je suis responsable des gens, soit du recrutement, de la formation, de l’éducation, de la rémunération, des avantages sociaux, des services de santé, de la gestion de carrière et des services de transition, ainsi que d’une foule d’autres mesures de soutien du personnel.
Je suis accompagnée aujourd’hui de la brigadière générale Krista Brodie, commandante du Groupe de la génération du personnel militaire, ou GPMM. Le GPMM fait partie de mon organisation qui est responsable de la gestion de l’enrôlement, du recrutement et de la formation de tous les nouveaux membres des FAC.
[Français]
Je suis également accompagnée aujourd’hui de la lieutenante-générale Jennie Carignan, cheffe de Conduite professionnelle et culture (CCPC), qui travaille à unifier et à intégrer toutes les activités de changement de culture au sein du ministère de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes (FAC).
Je tiens d’abord à remercier le comité d’avoir entrepris cette étude qui touche mon mandat, y compris la formation et la rétention du personnel des FAC.
[Traduction]
Les gens sont ma priorité : ils sont la capacité la plus importante des militaires et sont essentiels à notre disponibilité opérationnelle générale. Mais lorsque je parle des gens qui sont notre capacité, je ne parle pas seulement de la rapidité avec laquelle nous pouvons répondre aux menaces et aux urgences. À mon avis, la disponibilité opérationnelle requiert le bon nombre de personnes en santé et bien soutenues qui, à leur tour, peuvent donner le meilleur d’elles-mêmes au service de leur pays, comme chacun d’entre nous a juré de le faire.
Il s’ensuit donc que, sans le bon nombre de personnes en uniforme, nous ne pouvons pas produire les effets stratégiques que le Canada et les Canadiens veulent et dont ils ont besoin. C’est ce sur quoi je veux que mes remarques portent. Je veux que les Canadiens et résidents permanents voient l’armée canadienne comme un endroit où ils peuvent bâtir leur avenir.
[Français]
Je tiens également à rassurer le comité que les militaires canadiens continuent de faire évoluer la culture de leur milieu de travail, que nous prenons ces problèmes au sérieux et que nous avons accompli beaucoup de choses en relativement peu de temps.
[Traduction]
Je suis heureuse d’annoncer qu’en avril cette année, le Groupe de recrutement des Forces armées canadiennes a reçu près de deux fois et demie plus de demandes au cours de l’année financière courante comparativement au même mois de l’exercice précédent. Nous avons multiplié par plus de cinq le nombre d’offres d’inscriptions en avril 2023 par rapport à avril 2022.
Nous constatons également une augmentation du nombre de femmes, d’Autochtones et de membres des minorités visibles qui présentent une demande d’adhésion.
[Français]
On croit que nos récentes initiatives contribuent à ce solide départ.
[Traduction]
Nous avons commencé à revoir la façon dont nous recrutons et formons les soldats, les marins et les aviateurs à partir de zéro. Pour ce qui est d’attirer de nouvelles recrues, notre nouvelle campagne de sensibilisation générale intitulée « C'est fait pour toi » représente un pas important dans la bonne direction. J’espère que vous avez tous vu la nouvelle vidéo sur Google. Notre campagne aide les membres de notre groupe démographique cible, composé de divers Canadiens et résidents permanents âgés de 18 à 34 ans, à se considérer comme faisant partie de notre organisation.
[Français]
Nous avons également créé une nouvelle équipe qui travaille activement à trouver des solutions pour moderniser le système de recrutement, afin que nous puissions traiter les demandes plus rapidement et cesser de perdre des candidats en raison de notre processus qui prend trop de temps.
[Traduction]
De plus, nous avons remanié la formation de base en mettant l’accent sur la conduite professionnelle en action, la résilience individuelle et d’équipe ainsi que les compétences militaires fondamentales, au lieu de « démanteler et reconstruire » les gens comme nous le faisions.
[Français]
Dans le but d’augmenter les effectifs, nous avons annoncé l’an dernier que les résidents permanents pouvaient maintenant se joindre aux FAC. Ces derniers représentent une main-d’œuvre importante, qualifiée et diversifiée qu’on se doit d’engager.
[Traduction]
À mesure que la dynamique familiale a changé avec chaque génération, les familles des militaires aussi ont changé. Nous continuons de trouver de nouvelles initiatives opportunes pour soutenir et retenir les familles et, ce faisant, nous maintenons en poste les militaires. Comme le recrutement n’est qu’un élément, le maintien en poste est essentiel à notre disponibilité opérationnelle. On fait beaucoup à cet égard, et je pourrai vous en dire plus à ce sujet pendant la période de questions.
Cependant, malgré tous nos efforts, la gravité de la situation nous dépasse. Si nous voulons relever les défis de demain, nous avons besoin de plus de gens.
[Français]
Le monde a radicalement changé, non seulement sur le plan géopolitique, mais aussi sur le plan économique. Les jeunes de la prochaine génération veulent et attendent des choses très différentes de leur carrière et de leurs employeurs.
[Traduction]
Bien que nous ayons certainement notre part de problèmes internes à régler, et sur lesquels nous avons travaillé activement dans le cadre de nos nombreuses initiatives de changement de culture, les Forces armées canadiennes offrent, et offrirons toujours, une carrière très intéressante et enrichissante, avec des possibilités de croissance que peu d’organisations au Canada, à mon avis, peuvent offrir. Nous écoutons ce que les Canadiens veulent, ce dont ils ont besoin et ce qu’ils attendent de nous. Et nous devons faire un meilleur travail de démonstration et de communication auprès des Canadiens.
[Français]
J’aimerais terminer en soulignant que toutes les initiatives sur lesquelles nous travaillons sont essentielles à un effectif sain et diversifié.
[Traduction]
Nous devons former et maintenir en poste les personnes nécessaires et moderniser l’ensemble de l’organisation si nous voulons avoir des forces armées solides et prêtes à intervenir à l’avenir. Nous sommes engagés, et nous espérons que vous le constaterez au cours de la prochaine heure et demie.
Cependant, nous avons besoin de votre voix, de votre soutien et de vous, et du fait que vous continueriez à nous mettre au défi de nous améliorer.
[Français]
Je serais très heureuse de répondre à vos questions et de participer à une discussion franche. Merci beaucoup.
[Traduction]
Le président : Merci, lieutenante-générale Bourgon. C’était un bon exposé équilibré pour partir le bal cet après-midi.
Avant de passer aux questions, j’inviterais les participants présents dans la pièce à éviter de se pencher trop près du microphone ou, ce faisant, d’enlever leur écouteur. Ils préviendront ainsi une réaction acoustique dangereuse pour le personnel du comité qui est sur place.
La lieutenante-générale Bourgon, la lieutenante-générale Carignan et la brigadière-générale Brodie seront avec nous cet après-midi jusqu’à 17 h 15. Pour veiller à ce que chaque membre ait le temps de participer, j’aimerais limiter chaque question, y compris la réponse, à cinq minutes, ce qui semble amplement suffisant. Veuillez garder vos questions succinctes et dire à qui vous adressez votre question.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Bienvenue, mesdames. Je suis très heureux d’entendre que vous êtes sensibilisées au problème de recrutement et que vous faites d’énormes efforts pour revenir au nombre de militaires de 2015. À cette époque, je vous rappelle que nous avions 66 400 militaires dans les forces armées et maintenant, nous sommes presque en dessous de 40 000; c’est énorme comme différence.
On sait qu’on est en concurrence avec la Gendarmerie royale du Canada (GRC), la Sûreté du Québec et le Service de police de la Ville de Montréal. Est-ce que vous envisagez un rehaussement des salaires pour être compétitif sur le marché du travail?
Lgén Bourgon : Merci beaucoup pour la question. Je crois que nos effectifs sont beaucoup plus élevés que cela. Nous sommes environ à 62 500 personnes, donc la situation n’est pas aussi dramatique. Quand on observe la rémunération et les avantages sociaux, les Forces armées canadiennes ont une offre spéciale. Les gens ont tendance à se concentrer sur le salaire déposé au milieu et à la fin du mois du point de vue de la rémunération, mais l’offre des Forces armées canadiennes est beaucoup plus grande que cela.
Nous tentons de nous assurer que nos gens comprennent l’ensemble de ce qu’ils obtiennent lorsqu’ils mettent leur uniforme. C’est plus que le salaire; c’est aussi les soins de santé et de dentisterie pour eux et leur famille, le fonds de pension, les congés, l’éducation, les possibilités...
Le sénateur Boisvenu : Je comprends tout cela. On a les mêmes avantages sociaux à la GRC. Les employés ont les mêmes avantages; on n’est pas mieux. Vous avez perdu, l’an dernier, 10 % des militaires. Le chiffre exact est 5 943. Si on tient compte de la période de pandémie, vous avez perdu beaucoup de femmes dans les Forces armées canadiennes à la suite du rapport — qui a pris beaucoup de temps à être déposé — sur les agressions sexuelles. Pouvez-vous me dire quel est l’état des ressources humaines féminines dans les Forces armées canadiennes et le nombre de femmes que vous avez perdues depuis trois ans?
Lgén Bourgon : Je n’ai pas les chiffres exacts, mais je peux vous dire que le niveau d’attrition des femmes est légèrement sous le taux d’attrition des hommes. Je pense que le taux des hommes est de 9 % et celui des femmes est à environ 8,5 %. Ce n’est pas une question de perte; c’est plutôt que chaque année, on a un déficit entre les gens qu’on est capable de recruter et les gens qui sortent des forces pour une raison ou une autre liée à l’attrition. Pour ce qui est des statistiques concernant les femmes, le taux de personnes qui quittent les forces est un petit peu plus bas que celui des hommes.
Le sénateur Boisvenu : Pouvez-vous déposer au comité un rapport sur l’état du personnel des Forces armées canadiennes par corps : la marine, l’aviation, et les forces terrestres? Selon les données que j’ai, qui viennent des militaires sur le terrain, il y a un problème majeur en matière de recrutement. Vous l’avez dit tantôt : cela prend beaucoup de temps, beaucoup de paperasse. C’est une bureaucratie énorme.
On sait que depuis à peu près 10 ans, le nombre de hauts commandants, de dirigeants dans les forces armées a presque doublé. Il y a beaucoup de gens qui ont eu des promotions à Ottawa, mais ailleurs au Canada, on manque de personnel. C’est ce que me disent les gens sur le terrain. J’aimerais que vous déposiez un bilan assez à jour de l’état des troupes pour les trois secteurs.
Mon autre question est la suivante : je ne sais pas si au Québec, on ne fait pas de promotion des forces armées ou si on en fait plus au Canada anglais. D’autres entreprises privées sont plus agressives sur le plan du recrutement. Je ne vois pas, dans les médias ou dans les écoles, de stratégie pour aller recruter des jeunes. Au Québec, 50 % des garçons ne finiront pas leur secondaire. Avez-vous une stratégie pour recruter ces jeunes qui risquent d’avoir une vie professionnelle relativement pauvre, puisqu’ils sont sans profession? Avez-vous une stratégie particulière pour attirer les jeunes hommes qui, on le sait, sont en majoritaires sur le plan du décrochage?
Lgén Bourgon : C’est une très bonne question. Quant à notre stratégie de recrutement, je peux passer la parole à Krista, qui peut en parler. En fin de compte, on fait beaucoup de ciblage auprès des groupes d’équité, donc auprès des femmes, des minorités visibles et des Autochtones aussi. Je vais passer la parole à Krista qui parlera de ce qu’on fait dans le milieu des écoles secondaires et en matière de publicité.
[Traduction]
Brigadière-générale Krista Brodie, commandante, Groupe de la génération du personnel militaire, ministère de la Défense nationale : Merci, monsieur le président, et sénateurs et sénatrices.
Je vais commencer en disant que nous avons conçu une solide campagne dans le cadre de laquelle nous divisons nos efforts entre interventions immédiates, efforts de modernisation et efforts de transformation à long terme afin de vraiment faire avancer les choses et de sensibiliser l’ensemble du paysage canadien.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : J’ai entendu, il y a à peu près deux mois, un jeune de 20 ans à la radio de Québec. Il venait de finir son cours de recrue et il parlait de la façon dont cela l’avait changé. Je me suis dit qu’il était le meilleur vendeur pour attirer des jeunes dans les Forces armées canadiennes. J’espère que vous allez vous servir de jeunes recrues nouvellement formées. J’ai un beau-fils qui a été recruté dans les Forces armées canadiennes. Il est rendu à Borden, où il est mécanicien de gros avions. Ces jeunes seront vos meilleurs vendeurs.
Le jeune, qui est un décrocheur, a fait son cours de recrue et tout à coup, la lumière est arrivée et les Forces armées canadiennes lui ont offert une possibilité d’avenir. Ce genre de personnes seront vos meilleurs vendeurs. Plutôt que d’aller faire affaire avec les firmes de marketing qui vont nous coûter les yeux de la tête, servez-vous des jeunes qui sont arrivés dans les Forces armées canadiennes et qui ont découvert un lieu positif, et qui vont entreprendre une carrière intéressante. Ils seront vos meilleurs vendeurs.
Lgén Bourgon : Vous avez tout à fait raison, sénateur. Il faut utiliser nos gens. Chaque fois que je parle aux gens, je leur dis que c’est leur rôle, c’est le rôle des Forces armées canadiennes de s’engager dans l’aspect du recrutement. Il ne faut pas oublier que pendant les deux années de COVID, nous ne sommes pas sortis de nos bases. Nous n’avions pas d’engagements auprès de la société. Nous n’avions pas le droit d’aller dans les écoles secondaires, les cégeps ou les universités. Nous avons perdu cette relation avec les Canadiens. Nous sommes en train de regagner cela et nous avons encouragé tout le monde — l’armée, l’aviation et la marine — à faire de plus en plus d’engagements dans les communautés.
Les cadets sont un autre excellent groupe où regarder pour intéresser les Canadiens. Ce sont nos employés en uniforme, qui ont eu des expériences positives, qui sont les meilleurs recruteurs. Nous pouvons les renvoyer dans leurs communautés et leurs écoles secondaires pour dire : « Si moi, j’ai eu du succès dans les Forces armées canadiennes, vous pouvez faire la même chose. » Vous avez tout à fait raison.
[Traduction]
Le président : Merci beaucoup. Je pense que nous commençons à peine la conversation.
Le sénateur Oh : Merci, mesdames, d’être ici. Je suis heureux d’avoir une conversation avec trois générales.
Ma question pour vous est la suivante : vous avez mentionné tout à l’heure que le recrutement avait évolué vers la recherche de résidents permanents. C’est ce que vous avez dit. Pouvez-vous me parler des progrès de cette promotion? Combien en avez-vous? Quel est le pourcentage de résidents permanents — issus de la diversité — que vous avez l’intention d’attirer?
Lgén Bourgon : Merci, monsieur le président. Je vais demander à la brigadière-générale Brodie de répondre à cette question. Elle a tous les chiffres.
Bgén Brodie : Merci, monsieur le président.
Nous comptons actuellement environ 4 500 dossiers actifs de résidents permanents. Ce sont des dossiers qui sont entrés dans le processus de recrutement depuis le début novembre. Ce que nous constatons avec les dossiers des résidents permanents, c’est qu’ils sont motivés à se joindre aux forces. Ils participent activement au processus de recrutement.
Nous examinons leurs dossiers en fonction de trois critères : la détermination des aptitudes, la santé et la sécurité. En ce qui concerne les résidents permanents, nous constatons que le volet sécurité de leurs vérifications est retardé en raison des répercussions à l’étranger de leurs dossiers. À mesure que nous renforçons la capacité du système et de nos partenaires gouvernementaux afin d’accélérer le traitement de ces dossiers, nous espérons être en mesure d’accueillir de plus en plus de résidents permanents.
Ce que nous avons observé depuis novembre, avec l’ouverture des candidatures pour les résidents permanents, c’est une augmentation du nombre de citoyens canadiens qui entament également le processus de demande. Depuis novembre, à la fois pour les citoyens canadiens et les résidents permanents, nous constatons une augmentation régulière du nombre de demandeurs chaque mois, systématiquement, au-dessus des seuils et des normes historiques.
Le sénateur Oh : Les forces armées recherchent-elles un groupe particulier de minorités visibles? Des Asiatiques, des Africains ou des gens d’une région particulière?
Bgén Brodie : Nous avons ouvert grand les portes et, alors que nous menons des activités de recrutement ciblées de plus en plus nombreuses, nous examinons toutes les communautés sous‑eprésentées au sein des Forces armées canadiennes afin de nous assurer véritablement de devenir le reflet de la société que nous servons. Même si je n’ai pas la répartition démographique précise pour le groupe des résidents permanents, nous constatons un intérêt provenant de nombreuses communautés sous‑représentées.
À mesure que nous renforçons nos relations avec ces communautés, les dirigeants, les influenceurs et les familles et que nous faisons appel à des ambassadeurs des Forces armées canadiennes qui sont déjà en service pour renouer avec leurs communautés, nous constatons qu’il y a un intérêt populaire qui commence à se manifester et à prendre de l’ampleur. Nous pouvons désormais faire appel à des membres des Forces armées canadiennes pour jouer le rôle d’ambassadeurs afin d’aider les candidats tout au long du processus et de répondre à toutes les questions qu’ils se posent quant à la nature du travail et à la manière d’aborder le processus lui-même. Nous constatons que le taux de personnes qui suivent le processus est beaucoup plus élevé lorsqu’elles reçoivent ces mesures de soutien. Nous constatons que le taux de conversion de nos résidents permanents est plus élevé lorsque nous comparons les personnes avec les communautés qui peuvent les aider à s’orienter dans le processus.
Le sénateur Oh : C’est très bien. Si vous avez besoin d’un ambassadeur, je suis là.
Bgén Brodie : Merci.
Je dirais que nous avons besoin d’une approche à l’échelle nationale. Nous avons besoin que chaque communauté et chaque groupe participe à une conversation qui suscite réellement la curiosité et la confiance envers les Forces armées canadiennes, et qui accroît leur niveau de sensibilisation afin que nous puissions aborder plus de 100 métiers, de nombreux programmes éducatifs, des programmes d’entrée et les options d’emploi à temps plein et à temps partiel. Il existe une formidable occasion de créer ce partenariat à l’échelle nationale qui renforce la sensibilisation et revitalise les FAC en tant qu’institution nationale vitale et indispensable, en particulier lorsque nous sommes confrontés au climat de sécurité que nous souhaitons pour l’avenir.
Le sénateur Oh : C’est important, parce que le pays recherche la diversité qui s’inscrit dans le multiculturalisme canadien. Je vous remercie.
[Français]
Le sénateur Gignac : Bienvenue à nos témoins. Je tiens tout d’abord à vous remercier et vous saluer pour votre engagement et le travail que vous faites pour la protection et la sécurité des Canadiens et de vos collègues.
Je suis intéressé par les statistiques et les comparaisons internationales. Avec mon collègue le sénateur Boisvenu ainsi que d’autres, on a eu la chance de travailler pendant deux jours, en février, à Bruxelles, où on a entendu dire que ce n’était pas juste au Canada qu’il y avait des problèmes de recrutement.
Je suis juste curieux, avez-vous des statistiques comparatives à l’international? Parce que lorsqu’on parle de taux d’attrition de 8 % ou 9 %, c’est quand même beaucoup, selon moi. Je suis curieux de vous entendre parler de cela, s’il vous plaît.
Lgén Bourgon : C’est une excellente question, monsieur le président.
C’est intéressant parce que j’ai eu une réunion la semaine passée avec les cinq pays des Five Eyes. On a parlé précisément de défis de recrutement et de rétention; donc ce n’est pas seulement nous qui connaissons ces difficultés.
L’an passé, aux États-Unis, dont l’armée constitue une grosse machine dont le système de recrutement est incroyable, le taux de recrutement a été de 25 % sous les chiffres qu’on s’attendait à atteindre. L’aviation, quant à elle, a été capable de recruter, mais probablement plus à cause du film Top Gun qu’autre chose.
Quand on regarde cette année, les trois services américains — l’aviation, la marine et l’armée — ne croient pas qu’ils vont atteindre leurs paramètres de recrutement. Seulement les marines vont en être capables, leur attrition étant autour de 15 %.
Le Royaume-Uni a atteint dans la dernière année 75 % de son objectif pour les trois services. Le pays a connu son taux d’attrition le plus élevé en 20 ans. Quand on regarde l’Australie, c’est 75 % de son objectif de recrutement qui a été atteint et son taux d’attrition est de 11,4 %.
Alors, lorsqu’on regarde notre taux d’attrition au Canada, normalement on se situe entre 7 % et 8 %. On a vu une petite hausse après la pandémie de COVID-19, parce que les gens ne sont pas sortis pendant deux ans et demi, et ensuite certains se sont rattrapés. Notre taux d’attrition est d’environ 9 %, mais on est au plus bas parmi les pays des Five Eyes.
Finalement, le problème est le même partout.
Le sénateur Gignac : Merci.
Vous voyez par la nature des questions de mes collègues et les miennes — et c’est ainsi pour l’ensemble des gens réunis autour de la table —, qu’on agit de façon non partisane pour vous appuyer et réfléchir avec vous à ce qui pourrait être fait pour vous aider. C’est cela la nature de nos questions.
Dans le secteur privé, d’où je viens, on avait des données comparatives avec d’autres entreprises de la même industrie et au fond, pour comparer. Est-ce que vous avez des données comparatives? Je crois que ce sont les sénateurs Boisvenu et Dagenais qui en ont parlé : quand on compare, que ce soit le Service de police de la Ville de Montréal, les corps de police provinciaux ou d’autres corps de la GRC, vous avez dit que ce n’était pas juste en raison de l’argent, mais que l’argent avait quand même un rôle à jouer.
Les jeunes ont une mentalité différente de celle de ma génération, c’est-à-dire que la fidélité est associée à une institution ou à une organisation; ce n’est plus la même que dans notre temps.
Je pense que l’argent joue un rôle et que vous avez toutes ces données comparatives. Êtes-vous en mesure de nous dire, ce soir, que l’argent n’est pas un facteur prédominant? J’aurais tendance à croire que c’est un facteur très important dans la décision d’aller vers la Ville de Montréal plutôt que l’armée.
Lgén Bourgon : Merci, c’est une très bonne question. Je vais répondre à votre question d’une manière un peu différente.
On a publié l’année passée une stratégie de rétention et une partie de celle-ci visait à mieux comprendre les raisons de l’attrition — l’attrition qui n’est pas saine — et les raisons pour lesquelles les gens quittent des Forces armées canadiennes.
Maintenant, on est vraiment en train de se poser les bonnes questions : « Pourquoi sortez-vous des Forces armées canadiennes? » Alors les résultats sont assez semblables à ceux qu’on compilait au cours des cinq dernières années. La raison principale du départ des gens est surtout la qualité de leur emploi et les possibilités. C’est la première raison, alors ce n’est pas la paie, ce n’est pas la rémunération.
C’est sûr que les avantages sociaux et la rémunération deviennent un troisième facteur de départ et, comme de raison, un des facteurs est l’équilibre entre la carrière et la vie familiale, les déménagements, la mobilité et les déploiements, et caetera.
On essaie de comprendre de plus en plus pourquoi les gens quittent les forces pour essayer de prendre des initiatives pour nous aider sur le plan de la rétention.
Quand on se penche en particulier sur les salaires du SPVM par rapport à la police militaire, il faut considérer l’enveloppe complète des avantages et le volet éducation, qui sont un petit peu différents; cependant, nos salaires sont semblables. On n’a pas tout à fait l’agilité nécessaire pour s’adapter aussi rapidement de notre côté, et c’est peut-être une de nos faiblesses. Cependant, on travaille là-dessus avec le Conseil du Trésor.
Le sénateur Gignac : Merci.
[Traduction]
Le sénateur Ravalia : Merci à vous toutes de votre contribution à notre pays.
Je veux me concentrer sur la question du maintien en poste du point de vue des défis en matière de santé mentale auxquels vous êtes confrontés, compte tenu de l’expérience des personnes qui ont vécu des expériences de guerre sur le terrain, le syndrome de stress post-traumatique et la gestion de ses séquelles, ainsi que les longues séparations avec la famille, ce qui crée des tensions potentielles au sein de l’unité familiale. Je pose cette question parce que j’ai travaillé comme médecin de famille en milieu rural et que j’ai pris soin d’anciens combattants qui souffraient de graves problèmes de santé mentale. Avez-vous mis en place un processus qui facilite l’accès à des services de soutien en santé mentale, comme le counseling, les soins médicaux et psychiatriques, surtout en ce qui a trait à la longévité de certains de ces stress liés à la santé mentale, afin de permettre aux personnes de réintégrer les forces armées et de retourner sur le terrain?
Lgén Bourgon : Merci. C’est une très bonne question.
Nous disposons d’un soutien en matière de soins de santé. Cependant, à l’instar du Canada dans son ensemble, nous sommes limités. Nous pourrions avoir davantage de soutien en matière de santé et de santé mentale. C’est l’une des choses dont nous avons le plus besoin, mais il en va de même pour le Canada en tant que société. Nous faisons de notre mieux pour essayer d’offrir de bons soins de santé à nos FAC.
Nous travaillons fort pour éliminer la stigmatisation. Si vous avez un problème de santé mentale, allez chercher du soutien, et vous ne serez pas libéré de l’armée. Nous accordons la souplesse nécessaire pour obtenir les bons soins et revenir, parce que c’est important. Si vous vous cassez un bras, vous allez voir le médecin et vous vous faites soigner; il en va de même pour les problèmes de santé mentale. Pour ce qui est de la chaîne de commandement, nous avons fait de l’excellent travail pour éliminer la stigmatisation et fournir du soutien afin de retenir nos membres.
Lieutenante-générale Carignan, aimeriez-vous ajouter quelque chose du point de vue de la culture?
Lieutenante-générale Jennie Carignan, cheffe, Conduite professionnelle et culture, ministère de la Défense nationale : J’aimerais également souligner la Stratégie de santé globale et de mieux-être, qui a également été déposée. Tous nos commandements interviennent dans cet espace, qui comprend la prévention, la santé mentale et la forme physique, en plus de fournir un climat et un environnement psychologiquement sûrs. Tous ces éléments contribuent à améliorer le maintien en poste de nos membres.
Lgén Bourgon : La résilience est un élément clé de la prévention en ce qui concerne le soutien offert à nos membres.
Le sénateur Ravalia : Dans le cadre du processus d’évaluation de la résilience, est-ce que l’évaluation de la santé mentale fait partie de l’équation, ou est-ce que les lois sur la protection des renseignements personnels ont une incidence sur cette évaluation?
Bgén Brodie : Oui, cela fait partie à la fois du processus de dépistage médical et de la dimension de vérification des aptitudes. Du point de vue médical et diagnostique, cela est évalué dans le cadre du dépistage médical, qui est effectué dans le respect des principes de confidentialité de la relation entre le candidat et le médecin.
Le sénateur Ravalia : La dernière question que je me pose est la suivante : existe-t-il un fossé important entre les soins offerts en milieu urbain et ceux offerts en milieu rural, par exemple, dans votre base de Gander par rapport à ceux offerts à Toronto, à Montréal ou à Vancouver? Voyez-vous des différences et une vulnérabilité accrue pour les membres des forces armées qui passent beaucoup de temps dans des unités plus petites et qui ont peut-être moins accès à une plus vaste gamme de soins?
Lgén Bourgon : Chacune de nos bases offre un soutien médical standard avec des médecins et un accès au soutien. Bien sûr, l’accès à des spécialistes, selon l’endroit où ils se trouvent au Canada, peut être limité. Nous veillerons à ce que nos membres reçoivent le bon soutien. Qu’il s’agisse de les transporter par avion ou de leur fournir d’autres moyens de transport, nous leur donnerons accès au soutien spécialisé dont ils ont besoin. La disponibilité du soutien en ligne réduit le besoin de voyager parce que vous pouvez aller en ligne et obtenir le soutien approprié. Bon nombre de nos services sont disponibles en ligne.
Le sénateur Ravalia : Vous tirez parti de la technologie.
Lgén Bourgon : Bien sûr, oui.
Le sénateur Ravalia : Merci beaucoup.
Le sénateur Yussuff : Merci beaucoup pour votre service.
Je n’envie pas votre responsabilité pour ce qui est du recrutement et du maintien en poste. À l’heure actuelle, le reste de l’économie est aux prises avec des problèmes de recrutement, et vous êtes en concurrence sur le même marché. Il est louable d’utiliser différents moyens pour inciter les gens à s’engager dans l’armée. Nous verrons si cela fonctionne.
Vivre dans les grandes villes est un défi énorme. Le logement est un défi fondamental auquel font face les habitants des grandes villes. Dans un contexte plus large, je sais que le général Eyre a déjà parlé de la pénurie de logements et du nombre d’unités que nous devrions construire. Il a parlé d’environ 6 000 unités. J’aimerais savoir où vous en êtes en ce qui concerne la construction de ces unités. Combien en a-t-on fait? Où en êtes-vous dans la construction de logements supplémentaires?
Lgén Bourgon : Merci beaucoup.
C’est un peu en dehors de mon environnement et de mes responsabilités. Cependant, j’ai pris des notes parce que je savais que cette question serait posée. Nous comprenons que, pour nos soldats, marins et aviateurs, avoir un toit sur la tête est très important. Il n’y a pas de solution unique.
Dans les années 1980 et 1990, nous avions toute une série de logements résidentiels qui étaient vides parce que, bien sûr, le marché ne permettait pas aux gens d’acheter leurs maisons — c’était logique pour les gens — alors nous nous sommes débarrassés d’un grand nombre de nos logements militaires. Aujourd’hui, 30 ans plus tard, nous nous retrouvons dans une situation où le logement est difficile à trouver. Beaucoup de gens veulent retourner dans des logements militaires, mais il n’y en a plus.
Nous cherchons à aider nos membres à se payer un logement. Nous venons d’annoncer notre indemnité différentielle de logement des Forces canadiennes. Cette politique s’adresse à nos membres les plus vulnérables de l’ensemble du Canada, aux échelons inférieurs, mais il ne faut pas oublier non plus notre SMA chargé des infrastructures.
Pour la construction des nouveaux logements, 50 millions de dollars par année ont été approuvés. Il s’agira non pas de logements individuels, mais d’appartements avec une ou deux chambres à coucher pour des familles de deux ou trois personnes. On a commencé à les construire à Borden, et l’année prochaine, on les construira à Comox, à Shilo et à Borden. Chaque année, ils investissent 55 millions de dollars. Ils envisagent également la rénovation. Nous avons un portefeuille de 11 500 unités de logement résidentiel dont l’amélioration et la rénovation sont envisagées. Nous investissons dans nos logements.
Encore une fois, il s’agit non seulement du portefeuille de logements, mais aussi de différentes initiatives visant à soutenir nos membres lorsqu’ils déménagent, achètent une maison, partagent éventuellement une maison avec quelqu’un d’autre ou ont accès à des appartements. Par exemple, si je suis affectée à l’extérieur d’Ottawa et que je veux louer ma maison, nous mettrons les gens en relation pour que quelqu’un qui déménage à Ottawa puisse louer ma maison pendant que je suis à Halifax.
Il y a plus d’une solution. Nous envisageons une stratégie en matière de logement pour les trois prochaines années afin de mettre en place toutes ces initiatives et de commencer à changer les choses. Nous avons commencé par l’indemnité différentielle de logement, et notre SMA chargé des infrastructures continue de construire de nouveaux logements.
Le sénateur Yussuff : Si vous voulez recruter plus de gens, vous devez trouver une façon de les loger. Je tiens à vous féliciter pour l’indemnité différentielle. Elle aidera les membres de rang inférieur à disposer des ressources nécessaires pour se loger, surtout dans les grandes villes. Je suis sûr que cela fait une énorme différence. Pourriez-vous nous en dire plus sur l’efficacité de cette mesure et sur ce que vous disent les officiers de divers rangs quant à la façon dont cela aide? Si vous êtes une personne célibataire plutôt qu’un membre d’une famille, la situation peut être très différente. Nous constatons que les pénuries dans les grandes villes sont incroyables. Vous avez beaucoup de personnel dans les grandes villes. Il doit y avoir des défis à relever pour aider les familles. Les réactions ont-elles été positives? Y a-t-il des choses que vous devez adapter dans l’indemnité pour aider les familles par rapport aux personnes seules dans les grandes villes?
Lgén Bourgon : Merci. C’est une excellente question.
Nous venons juste de présenter notre indemnité différentielle, et elle commencera en juillet. Les avis ont été partagés. Il y a beaucoup de gens, et 28 000 membres recevront cette indemnité différentielle de logement. Il y en a aussi quelques-uns qui perdront leur indemnité de vie chère actuelle. Bien sûr, lorsque vous perdez quelque chose, ça soulève les passions et c’est une mauvaise nouvelle.
Ce nouveau programme envisage l’idée qu’une partie de votre salaire devrait être allouée au logement. Cette part variera en fonction de votre salaire. La différence, c’est ce que nous offrons à nos membres. Nous verrons où cela nous mènera à l’avenir, mais je pense que c’est un très bon programme qui aidera nos membres des échelons inférieurs à se payer un logement dans la ville où nous leur avons demandé de déménager, parce que nous leur avons demandé de le faire.
Nous avons également annoncé avant Noël une mesure appelée « vivres et logement ». Tout au long de votre formation, jusqu’à ce que vous atteigniez votre point fonctionnel professionnel — jusqu’à ce que vous soyez qualifié dans votre emploi —, nous fournissons gratuitement des vivres et un logement à nos soldats, aviateurs et marins afin de les aider à se trouver un logement abordable pour eux-mêmes et leur famille.
Le sénateur Boehm : Merci, générales, d’être avec nous aujourd’hui.
J’ai un certain nombre de questions, mais je veux revenir sur quelque chose que la lieutenante-générale Brodie a mentionné en passant, qui concerne les enquêtes de sécurité pour les nouvelles recrues et peut-être les résidents permanents. De façon générale, les enquêtes de sécurité prennent beaucoup de temps si vous entrez dans la fonction publique, surtout si vous avez été à l’étranger. Bien sûr, les enquêtes de sécurité sont effectuées pour nos nouveaux arrivants, les agents du service extérieur et les membres des Forces armées canadiennes. Constatez-vous des arriérés à cet égard, étant donné que vous devez souvent vous adresser à une autorité étrangère pour obtenir ne serait-ce qu’une vérification policière de base?
Bgén Brodie : Oui, nous constatons des arriérés.
Parmi les demandeurs de la citoyenneté canadienne, pas moins de 85 % d’entre eux passeront par le processus de sécurité dans le délai prévu par notre norme des services, soit environ 21 jours. Les 15 % restants de ces dossiers de citoyens canadiens et la quasi-totalité de nos dossiers de résidents permanents auront des répercussions à l’étranger, puis commenceront le processus beaucoup plus long de vérification de la sécurité auquel participent nos partenaires de sécurité du gouvernement du Canada et d’autres pays, selon le pays d’origine et l’endroit où la sécurité ou les répercussions à l’étranger entrent en ligne de compte. La résorption de ces arriérés peut prendre des semaines, des mois, voire de nombreux mois, en fonction de la nature des répercussions et des pays concernés. À ce stade, chaque dossier devient un dossier de gestion au cas par cas.
Nous avons établi dans l’ensemble de nos ministères des groupes de travail officiels qui font partie de ce processus de vérification, et nous travaillons à renforcer la capacité à l’échelle de l’organisation et au sein d’autres ministères pour être en mesure d’accélérer le traitement de ces dossiers afin de nous assurer que nous maintenons la ligne de qualité, mais que nous le faisons d’une manière qui permette de traiter, du point de vue de la capacité de traitement, un plus grand nombre de dossiers.
Le sénateur Boehm : Merci beaucoup.
Ma prochaine question s’adresse à la lieutenante-générale Bourgon. Vous avez mentionné dans le cadre de votre examen des questions liées au maintien en poste que, à mesure que les gens avancent dans leur carrière, ils sont mobiles. Ils reçoivent leurs affectations et leurs déploiements et se font souvent dire qu’il est temps pour eux de quitter la Lettonie et de revenir ici, ou d’être déployés ailleurs. Certaines personnes vivent également leur vie de famille, ce qui signifie que leurs enfants quittent l’école et tout le reste.
Envisagez-vous des mesures flexibles possibles à ce chapitre où, dans le passé, une affectation a été donnée et le soldat a essentiellement dû dire : « Oui, je vais aller là-bas » et tout était fait? En cas de refus, vous aurez le choix de le faire ou d’aller dans la réserve ou ailleurs. Aujourd’hui, les gens sont plus exigeants, parce que le marché du travail est un peu plus flexible et qu’ils veulent ce qu’il y a de mieux pour eux, leur famille ou leur partenaire. Qu’en pensez-vous?
Lgén Bourgon : Merci. C’est une question très complexe. Nous travaillons sur de nombreuses initiatives.
D’abord, la mobilité de nos membres est très importante, parce que, pour assurer la disponibilité et la capacité opérationnelles, nous devons déployer des gens à Shilo, à Cold Lake, à Gander, etc. Parfois, les gens ne veulent pas y aller, mais nous avons besoin de gens parce que c’est notre travail et que c’est la disponibilité opérationnelle des FAC qui en dépend.
Nous essayons autant que possible de donner une voix au membre, parce que nos gens nous disent qu’ils ne contrôlent pas leur vie et que c’est une des raisons pour lesquelles ils partent. Cet élément de communication est extrêmement important, et il fait partie de ce maintien en poste. Si quelqu’un veut rester sur une base ou dans un endroit, il y a cette discussion. Cela limite leur potentiel d’avancement s’ils n’acquièrent pas l’expérience ailleurs, et c’est correct. Si un pilote de Bagotville veut rester capitaine pour toujours, c’est bien. Il y a cette flexibilité, mais nous devons également tenir compte de la disponibilité et de la capacité opérationnelles des FAC. Il y a toujours la mission « les gens d’abord », et nous devons trouver un juste équilibre.
Nous nous efforçons également de soutenir nos familles lorsqu’elles déménagent. L’une des grandes réussites de ces dernières années a été Canada sans faille, où toutes les provinces et tous les territoires se sont réunis avec les FAC pour examiner les besoins de nos membres et de leur famille afin d’essayer d’atténuer ou de limiter les répercussions que nous devons subir lorsque nous déménageons. L’emploi des conjoints est difficile lorsqu’on déménage, tout comme l’éducation des enfants, l’accès à la santé et l’accès aux services de garde. C’est de cette façon que les provinces et les territoires peuvent collaborer avec nous pour atténuer les répercussions des déménagements d’un bout à l’autre du Canada.
C’est un travail en cours, et je suis sûre que cela ne répond pas à votre question, mais je pourrais probablement parler de ce sujet pendant deux heures.
Le sénateur Boehm : Il est bon de vous entendre en parler et d’y répondre.
Je n’ai pas vu la campagne « C'est fait pour toi » sur Google, mais je vais le faire. Quand j’étais adolescent, je me rappelle qu’il y avait le slogan « Si la vie vous intéresse ». C’était très inspirant. Les annonces publicitaires, avec leur musique entraînante, passaient dans les bars lorsque nous buvions avant d’avoir l’âge légal —, c’est ce qui s’est passé. Elles passaient régulièrement à la télévision et touchaient un très large public. Il n’y avait pas beaucoup de choses à la télévision à l’époque... je ne suis pas si vieux.
Quoi qu’il en soit, envisagez-vous d’autres plateformes? Cherchez-vous à rendre cette activité attrayante pour les jeunes qui décident de ce qu’ils veulent faire? Dans ces vieux films, les parachutistes et les Casques bleus qui aidaient les enfants en Afrique étaient tous là, et c’était un ensemble très attrayant. Avez-vous des commentaires sur la stratégie actuelle?
Lgén Bourgon : Merci beaucoup.
Je vais laisser la parole à la brigadière-générale Brodie, mais j’espère que, si j’allais dans une école secondaire aujourd’hui et demandais aux étudiants s’ils ont vu la vidéo sur YouTube, au cinéma ou sur les médias sociaux, je dirais que la majorité l’ont vue. Le fait que vous ne l’ayez pas vue tient probablement au fait que nous n’essayons pas de vous attirer tous ici.
Je vais laisser la parole à la brigadière-générale Brodie, qui peut parler des médias que nous utilisons et de la façon dont nous faisons nos publicités.
Bgén Brodie : Notre sous-ministre adjointe des affaires publiques, la SMA-AP, est responsable de la campagne de publicité dans les FAC, mais nous avons vraiment élaboré « C'est fait pour toi », la nouvelle campagne de sensibilisation générale, dans le cadre d’un effort conjoint visant à attirer nos principaux groupes démographiques, c’est-à-dire des Canadiens et résidents permanents issus de la diversité âgés de 18 à 34 ans.
Il s’agit non pas d’un exemple classique de « ces armes sont géniales », « cet équipement est génial » ou « cet environnement opérationnel est génial », mais de rencontrer les gens là où ils en sont en ce moment, c’est-à-dire qu’ils ne sont pas au courant des FAC ou n’envisagent pas de s’y engager, mais ils sont vraiment curieux et comprennent ce qui les motive en tant que personnes et les qualités de caractère qui sont importantes pour eux. Il s’agit ensuite de les aider à se reconnaître dans l’organisation. Il s’agit d’une approche fondamentalement différente. Lorsque l’initiative a été lancée en douce au quatrième trimestre du dernier exercice, soit 2022-2023, elle était vraiment axée sur un lancement numérique avec une présence cinématographique pour la première fois depuis de nombreuses années. Nous avons effectivement constaté une présence initiale dans les salles de cinéma.
Reconnaissant que nous avons une campagne de sensibilisation générale et des campagnes spéciales pour les femmes, les Autochtones et les minorités visibles ainsi que nos programmes spéciaux d’études rémunérées et bien d’autres initiatives dans toutes nos professions, j’aimerais que notre campagne devienne omniprésente dans la conscience des Canadiens. Où que vous alliez, que ce soit dans une grande enceinte sportive, un centre commercial, un aéroport ou une gare, partout où il y a un panneau d’affichage numérique, il y a une présence qui semble plus omniprésente.
Nous n’en sommes pas encore là, mais je dirais que nous nous débrouillons très bien compte tenu des autorisations publicitaires limitées accordées aux FAC. Dans le cadre de l’enveloppe publicitaire globale du gouvernement, nous recevons une part, et la SMA-AP fait un très bon travail à l’intérieur de cet ensemble limité de pouvoirs pour diffuser ce message et ces campagnes là où le public que nous recherchons est le plus susceptible de les trouver et de les stimuler avec leurs propres médias sociaux. Nous savons qu’il y a une corrélation directe entre la publicité et le nombre de demandes, et nous savons que cette corrélation augmente de façon exponentielle lorsque nous augmentons notre publicité dans les médias sociaux. Nous avons tous un rôle à jouer dans ce domaine.
Le sénateur Boehm : Merci beaucoup.
Le président : Nous allons tous faire des recherches sur Google ce soir, je peux vous le garantir.
Nous allons maintenant donner la parole à quelqu’un qui a sans doute une position privilégiée, la sénatrice Patterson, qui représente l’Ontario.
La sénatrice R. Patterson : Je vais creuser un peu plus le côté obscur de ce dont nous parlons. Il s’agit de la communication, et cela rejoint très bien les commentaires du sénateur Boehm.
Lieutenante-générale Carignan, ma question s’adresse à vous. Vous avez dit très clairement que le groupe démographique que nous essayons de recruter n’est pas le même que celui qui élabore les politiques, qui nous critique et qui critique les Forces armées canadiennes, ce qui, nous pouvons le supposer, a des effets négatifs sur le recrutement, mais aussi sur le maintien en poste de ceux qui sont déjà ici. Dans le cadre de vos processus, il est certainement reconnu qu’il est essentiel de cibler les personnes qui ne sont pas actuellement représentées dans les Forces armées canadiennes, mais nous savons également que votre plus grande base de recrutement a toujours tendance à provenir de ces groupes traditionnels. Par conséquent, pour combler le fossé, je constate qu’il existe un écart entre le fait de dire pourquoi nous voulons que les Canadiens soient représentés au sein des Forces armées canadiennes et le fait de dire pourquoi nous devons examiner la façon dont nous nous comportons et nous traitons les uns les autres. Essentiellement, quel est l’énoncé de la valeur opérationnelle de cette démarche? En fin de compte, nous voulons tous de bons Canadiens, mais pourquoi avons-nous besoin que les membres des Forces armées canadiennes adoptent et incarnent cette nouvelle vision de la culture?
Lgén Carignan : Merci.
Il est clair et il est vrai que, lorsque nous déployons des expéditions pour conseiller d’autres forces armées, ce que nous demandons à ces forces armées de faire est en fait de représenter les citoyens de leur propre pays. C’est l’essentiel. Si l’on veut que les institutions de sécurité ou de défense soient crédibles et bénéficient de la confiance de leur propre population, elles doivent représenter leurs propres citoyens. C’est un principe de base.
L’autre chose aussi, c’est que, de façon générale, lorsque nous examinons le bassin de recrutement des personnes disponibles au Canada, en ce moment, 70 % des membres des Forces armées canadiennes sont des hommes blancs, et ils ne représentent que 38 % de la main-d’œuvre disponible pour travailler. Faites le calcul. Il y a un potentiel énorme de personnes que nous ne rejoignons pas. C’est clairement la raison pour laquelle nous devons recruter des personnes issues de la diversité.
Ensuite, cela a un impact opérationnel énorme à l’interne sur la façon dont nous fonctionnons et sur l’efficacité avec laquelle nous nous attaquons à des problèmes complexes. L’environnement global devient de plus en plus complexe, et nous avons besoin d’un plus grand nombre de personnes d’origines diverses autour de la table. Nous devons être en mesure d’exploiter le potentiel extrêmement important de notre population au Canada, et un plus grand nombre de personnes d’origines diverses autour de la table créent de meilleures solutions et une meilleure efficacité opérationnelle. De notre point de vue, il est clair que l’avenir passe par des Forces armées canadiennes plus diversifiées.
La sénatrice R. Patterson : Il y a beaucoup d’initiatives extraordinaires en cours ici. Ce que nous entendons de part et d’autre, c’est qu’il n’y a pas assez d’argent pour faire le travail de défense, surtout lorsque nous regardons ce qui se passe avec l’OTAN. Il y a de merveilleuses initiatives ici. Est-ce de l’argent frais ou est-ce financé de l’intérieur? Parce que si c’est financé de l’intérieur, que ce soit pour le logement, les stratégies de recrutement ou l’achat d’équipements adaptés à tous, cela a un coût. Il est coûteux d’accroître la diversité. Je ne vous demanderai pas d’entrer dans les détails de la politique, mais votre stratégie en matière de logement est-elle financée par de l’argent frais, ou est-elle financée par des fonds internes? Ma question concerne certaines de vos autres initiatives.
Lgén Bourgon : C’est un mélange des deux. Au bout du compte, c’est un mélange des deux. Pourrions-nous obtenir plus d’argent pour en faire plus? Bien sûr. Toutefois, c’est aussi une question de ressources et de personnes que nous avons pour apporter ces changements. À l’heure actuelle, quand je regarde mon organisation, ce n’est pas d’argent dont je manque. Je manque de gens pour travailler sur ces initiatives et ces politiques et pour l’analyse et le travail. C’est là où nous manquons un peu d’argent à l’heure actuelle.
La sénatrice R. Patterson : De votre point de vue, y a-t-il une recommandation que nous pourrions faire pour nous occuper des éléments qui n’ont pas nécessairement besoin d’un uniforme pour accomplir leurs tâches? Y a-t-il une recommandation que nous pourrions faire afin de libérer des uniformes pour faire ce que seuls les membres des Forces armées canadiennes peuvent faire?
Lgén Bourgon : C’est une très bonne question.
Encore une fois, nous ne sortirons pas de cet effort pangouvernemental. Il s’agira en fait d’un effort pancanadien. Il y a les militaires — les membres de la Force régulière et de la Réserve — mais il y a aussi les fonctionnaires et les entrepreneurs. Il y a l’industrie, le milieu universitaire et les membres du gouvernement du Canada. Pour réussir, il faudra travailler en équipe.
La sénatrice Dasko : Merci beaucoup d’être ici. Je regrette d’être en retard et j’espère que vous n’avez pas déjà répondu à cette question.
Je voulais simplement faire le suivi sur les questions posées par le sénateur Boehm et la sénatrice Patterson. Vous avez une cible large des Canadiens et des résidents permanents âgés de 18 à 34 ans. Puis vous avez également comme groupes cibles des groupes sous-représentés dans l’armée : les femmes, les Autochtones et les personnes appartenant à des minorités visibles. Pour ce qui est de la campagne, pouvez-vous me dire si vous avez un thème ou un slogan commun dans vos documents de campagne, ou si vous ciblez ces thèmes en fonction des groupes cibles que vous recherchez? En ce qui concerne les campagnes que vous menez, quels sont les arguments?
Lgén Bourgon : Merci pour la question.
Au bout du compte, chaque année, nous avons besoin que de 6 300 à 6 800 nouvelles personnes rejoignent les FAC. Nous recherchons des Canadiens et des résidents permanents qui souhaitent rejoindre les FAC pour cette proposition de valeur et la différence qu’ils peuvent apporter.
Je vais donner la parole à la brigadière-générale Brodie pour qu’elle parle du ciblage, car, bien sûr, comme vous l’avez dit, il y a l’équité en matière d’emploi, les femmes, les Autochtones et les minorités visibles, mais il faut aussi que les hommes blancs se joignent aux forces armées. Brigadière-générale Brodie?
Bgén Brodie : Nous actualisons notre campagne de sensibilisation générale tous les trois ans, et nous venons d’en accélérer la production pour relever certains des défis auxquels nous sommes confrontés dans le domaine de la génération du personnel militaire. Le slogan de la nouvelle campagne de sensibilisation générale est « C'est fait pour toi ». Ce sera le point culminant du plan de campagne en cascade.
Au cours de la prochaine année, nous assisterons à la mise en œuvre de nombreuses campagnes spécialisées : femmes, Autochtones, minorités visibles et programmes spéciaux d’études rémunérées. Elles adopteront, au cours des prochaines années, une présentation commune autour du slogan central « C'est fait pour toi », aidant les personnes qui ne s’imagineraient pas dans les Forces armées canadiennes à faire partie de l’organisation.
La campagne a été conçue compte tenu du public cible, mais aussi grâce à des consultations directes. Il y a eu une longue série de groupes de discussion qui, pendant plus d’un an, ont contribué au processus d’élaboration et ont vraiment éclairé le contenu et la représentation, jusqu’au choix des personnes représentées dans chacun des scénarios, huit scénarios représentant huit personnes différentes. Chacun d’entre eux a trouvé un écho très favorable auprès des publics cibles composés des diverses catégories démographiques que nous cherchons à attirer.
Lgén Bourgon : Lorsque vous regarderez cette vidéo ce soir — il y en a plusieurs; c’est votre devoir à tous —, vous vous rendrez compte qu’il n’y a pas d’avion, pas de char, pas d’arme, pas de navire, car nous voulions attirer les personnes en nous fondant sur les valeurs, l’engagement et le désir de changer les choses. La campagne publicitaire « C’est fait pour toi » se trouve en vous. Intrinsèquement, vous voulez changer les choses, et les FAC, c’est l’endroit qu’il vous faut. Rien que d’en parler, j’ai la chair de poule. Nous avons adopté une approche différente qui porte ses fruits, car elle établit réellement des liens avec les jeunes d’aujourd’hui.
La sénatrice Dasko : Parmi les groupes que vous ciblez, quels sont ceux pour lesquels l’information a été la plus marquante? A-t-elle attiré l’attention de certains groupes plutôt que d’autres? Normalement, c’est le cas. Un groupe n’est pas aussi enthousiaste que d’autres.
Bgén Brodie : Nous pouvons certainement prendre cette question en délibéré et recueillir les données précises des différents groupes de discussion. La sous-ministre adjointe des Affaires publiques sera en mesure de les fournir.
Ce que je peux dire, c’est que grâce aux huit personnes différentes, chacun des domaines cibles a pu être présenté d’une manière à laquelle les gens pouvaient s’identifier. Ils ont participé à la conception de leur représentation à l’écran, dans les situations et les circonstances dans lesquelles ils se trouvaient et dans leur parcours formateur. Nous avons constaté qu’il y avait un grand intérêt. Après que les gens ont participé aux groupes de travail, il y avait une possibilité nettement plus élevée qu’auparavant qu’ils présentent une demande auprès des FAC, selon les sondages réalisés à la fin des groupes de travail.
Il s’agit d’une approche fondamentalement différente. Elle a suscité une conversation dans la cohorte que nous espérions attirer de différentes manières, mais elle nous nous permet d’avoir des conversations détaillées sur ce type de vie.
La sénatrice Dasko : Merci.
Lgén Carignan : D’un point de vue culturel, nous nous heurtons à des centaines d’années de mauvaises habitudes et de préjugés quant à qui fait traditionnellement partie des forces de l’armée. Souvent, pour les hommes, si nous parlons à beaucoup de nos collègues, il s’agit d’une décision normale. Ils rêvent de servir dans l’armée depuis leur plus jeune âge, mais de nombreux groupes sous-représentés n’ont jamais envisagé cette possibilité. C’est la raison pour laquelle nous nous concentrons beaucoup sur les groupes sous-représentés, parce que, tout d’abord, ils ne se reconnaissent pas dans les forces armées et pensent encore moins à s’enrôler. C’est pourquoi nous devons absolument adopter une approche plus réfléchie à leur égard.
La sénatrice Dasko : C’est pourquoi il y a moins d’avions et de chars dans le cadre de la campagne visant les groupes non traditionnels.
Lgén Bourgon : Il s’agit de la personne, d’être soi-même dans les FAC.
La sénatrice Anderson : Quyanainni aux témoins.
Au cours de son étude, notre comité s’est rendu au Nunavut et dans les Territoires du Nord-Ouest. Nous avons entendu les collectivités, en particulier à Iqaluit et à Inuvik, nous parler du rôle vital et intégral que les militaires ont joué dans le passé, en renforçant les collectivités, en s’engageant avec elles et en étant des membres actifs. Au cours des dernières décennies, cette présence militaire a été réduite au minimum. Elle n’est plus là. Les militaires ne sont plus engagés comme ils l’étaient dans ces deux collectivités spécifiques, mais aussi dans d’autres régions de l’Arctique. Cela rappelle les pratiques coloniales passées, où il y a eux et nous, et où il n’y a pas de lien entre les collectivités et les militaires lorsqu’ils arrivent, et où les bases sont éloignées des collectivités et séparées d’elles. Le mélange qui existait auparavant n’existe plus, et les collectivités ne le voient plus. A-t-on pensé à une plus grande mobilisation et à un placement stratégique de l’armée dans le Nord pour rétablir des relations avec les collectivités, et ainsi créer une présence visible et un outil stratégique pour la mobilisation dans les trois territoires du Nord?
Lgén Bourgon : Encore une fois, cela sort un peu de nos domaines de responsabilité.
Nous savons que nous devons nous améliorer. Honnêtement, les Rangers et la communauté du Nord font un excellent travail. J’ai été au COIC pendant quelques années. Je ne connaissais pas les Rangers, mais après avoir participé à une opération, je me suis rendu compte de l’excellent travail qu’ils accomplissent. Nous devons faire mieux. Dans le cadre de la modernisation du NORAD, je pense que c’est une question qui sera examinée; l’endroit où se trouvent les capacités au Canada et dans le Nord, mais c’est à peu près tout ce que je peux dire sur ce point.
Bgén Brodie : Au chapitre de la génération du personnel militaire, je peux dire que nous investissons massivement dans la reconstruction et le rétablissement de certaines de ces relations avec nos conseillers autochtones, en nous adressant aux divers dirigeants communautaires à l’aide de nos relations avec les divers comités, avec l’Assemblée des Premières Nations et des conseils et fédérations des Inuits et des Métis, et en utilisant nos relations avec les membres des collectivités eux-mêmes, que ces relations aient été forgées dans le cadre d’efforts de collaboration pendant la pandémie ou, plus récemment, avec les participants au programme d’été à l’intention des Autochtones, afin de pouvoir utiliser les personnes-ressources dans les communautés comme ambassadrices de nos programmes.
Nous avons récemment terminé une tournée dans le Nord avec l’une de nos équipes de recrutement, ce qui nous a permis d’avoir déjà, dans le cadre des programmes d’été à l’intention des Autochtones, plus de candidats que ce que nous avons obtenu pour l’ensemble de l’année dernière.
Grâce à ces relations, nous avons également pu augmenter le nombre de candidats qualifiés intéressés par notre Programme d’initiation au leadership à l’intention des Autochtones au Collège militaire royal. Pour la première année, nous pensons être sur le point d’atteindre le nombre maximal de participants dans ce programme pour l’année prochaine.
Il est encore tôt, mais nous participons activement à la reconstruction de ces relations et espérons bâtir ce réseau pour soutenir les programmes et avoir une meilleure compréhension de la façon dont nous pouvons adapter nos propres pratiques et modes de vie axés sur nos valeurs pour réellement refléter l’importance de la représentation autochtone.
L’année dernière, 5 % des candidats des Forces armées canadiennes se sont identifiés comme Autochtones, et 4 % d’entre eux se sont inscrits. Nous avons un taux d’inscription élevé. Il va de soi que si nous parvenons à mieux attirer les candidats et que nous continuons à nous améliorer en tant qu’organisation pour vivre et diriger en tenant compte de ces valeurs, nous pourrons effectivement nous améliorer dans ce domaine.
La sénatrice Anderson : Il ne suffit pas d’attirer les Autochtones dans l’armée : la rétention est particulièrement importante pour les Autochtones, car lorsque nos jeunes Autochtones quittent le foyer, c’est souvent la première fois, et ils ont beaucoup de mal à s’adapter à une culture différente. Je dis cela parce que mon fils a passé un an au Collège militaire royal. La capacité de ces jeunes à rester dans ce mode de vie militaire est souvent le plus grand obstacle.
Je vous remercie de cette information. Nous vous en sommes reconnaissants.
Le président : Il nous reste cinq minutes, et quatre sénateurs sont inscrits sur la liste. Je demanderais à ces quatre sénateurs de poser très brièvement leurs questions aux témoins, de façon qu’elles soient au moins consignées au compte rendu. S’il n’est pas possible d’y répondre brièvement ici, ceux qui souhaitent faire un suivi pourront s’adresser à nos témoins par la suite. Les sénateurs sont priés de poser des questions en 20 secondes.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : D’abord, je veux m’excuser si j’ai paru agressif tantôt dans mes questions. J’ai vraiment à cœur les Forces armées canadiennes. J’ai été cadet de l’air et j’ai de la famille dans les forces armées. Les gens sont découragés à l’occasion.
Nous savons qu’actuellement, 23 % des marins sont inaptes à aller travailler en mer. Nous savons qu’il y a une flotte de navires qui s’en vient au Canada pour les 10 prochaines années, au moins. Nous allons devoir doubler le nombre de vaisseaux et cela aura un impact majeur sur le recrutement à faire. Avez-vous une stratégie, en particulier pour les forces de la marine canadienne?
[Traduction]
Le sénateur Yussuff : Très brièvement, je vous félicite pour le changement de stratégie en matière de recrutement. Recruter des personnes différentes signifie qu’il faut changer la culture militaire. L’expérience vécue par des femmes a fait récemment la une de l’actualité; comment cette culture s’adapte-t-elle et évolue-t-elle, compte tenu des statistiques que vous donnez sur les hommes majoritairement blancs? Le plus important est l’expérience que les gens vont vivre dès leur premier jour dans l’armée et chaque jour par la suite, la façon dont ils sont traités et respectés et dont ils sont pris en compte dans le contexte de leurs connaissances, entre autres. La campagne de recrutement a-t-elle également abordé, à l’interne, la question de savoir comment nous allons traiter ces nouvelles recrues que nous essayons de faire entrer dans l’armée, afin de nous assurer qu’elles ne vivent pas une mauvaise expérience, qu’elles ne partent pas et qu’elles ne nuisent pas aux efforts considérables que vous déployez pour essayer d’apporter un recrutement diversifié dans l’armée?
La sénatrice R. Patterson : Vous avez beaucoup parlé des résidents permanents. J’aimerais savoir où en est la progression rapide vers la citoyenneté. Il peut s’agir d’un facteur d’attraction. Où en êtes-vous dans ce processus? Je pense que je vais m’arrêter là.
[Français]
Le sénateur Gignac : Par curiosité, avez-vous déjà fait un projet pilote avec un corps policier municipal ou provincial pour des congés sabbatiques? Au fond, cela pourrait être gagnant‑gagnant, étant donné que c’est pour la protection de la sécurité du public. Merci.
[Traduction]
Le président : Nous pouvons encore prolonger de quatre ou cinq minutes, si vous le pouvez, et nous vous laissons donc la parole. Les questions sont toujours aussi denses.
Lgén Bourgon : Merci pour toutes ces questions. Je répondrai rapidement.
[Français]
Nous avons de nouveaux navires, de nouveaux avions, de nouveaux hélicoptères, de nouveaux équipements qui s’en viennent. Nous savons que nous devons trouver une solution en matière de recrutement et de rétention. C’est absolument essentiel pour notre capacité future en ce qui a trait aux capacités opérationnelles et à la préparation.
Mes priorités, quant aux chiffres relatifs au personnel militaire, c’est le recrutement, la rétention et la modernisation de notre entraînement pour accélérer et pouvoir garder le plus de gens possible. C’est un défi. J’étais à 7 pieds de haut il y a six mois; maintenant, je suis à 5 pieds et 3 pouces en ce qui concerne les responsabilités sur mes épaules. Nous savons que nous devons mieux faire pour recruter et retenir nos gens. Sinon, cela aura un impact à long terme sur les Forces armées canadiennes et notre capacité.
[Traduction]
Pour ce qui est de la culture et de l’évolution, les FAC que j’ai rejointes en 1987 ne sont pas celles d’aujourd’hui. Sont-elles parfaites? Absolument pas. Faisons-nous des progrès incroyables chaque jour? Absolument. Une chose pour laquelle nous nous battons, ce sont les communications. Nous avons beaucoup de mal à faire passer les messages positifs. Je sais que la lieutenante-générale Carignan peut ajouter quelque chose à ce sujet. Chaque fois que l’on voit quelque chose, c’est toujours négatif. Nous n’arrivons pas à communiquer les aspects positifs et les grandes mesures que nous prenons. C’est la raison pour laquelle nous devons continuer à nous battre, mais vous pouvez aussi nous aider à le faire. Notre image a souffert, et nous avons fait du bon travail depuis. Le CCPC a été créé pour favoriser cette évolution culturelle.
Lgén Carignan : Très rapidement, car cette question à elle seule nécessiterait probablement une conversation de deux heures.
Comment la culture évolue-t-elle? Nous sommes en train de mettre sur pied une organisation qui est restée vigilante pour surveiller la culture et établir des principes directeurs et des mesures. Nous recueillons des données et nous nous apprêtons à mettre en place un tableau de bord public. Il s’agit de notre premier produit qui présentera publiquement notre situation actuelle, et nous continuerons à mesurer et à recueillir des données au fil du temps.
Nous travaillons de haut en bas, de bas en haut et horizontalement dans l’ensemble du ministère. Il ne s’agit pas simplement de forcer les gens à changer. Nous devons nous rendre sur le terrain, consulter à l’interne et à l’externe et cerner les meilleures pratiques de diverses entreprises, du secteur privé et public, du monde universitaire, etc. Nous recevons de nombreux conseils et nous donnons également la parole aux gens pour qu’ils prennent connaissance de nos politiques et de nos initiatives.
Nous avons déjà constaté des changements. Au cours des deux dernières années, j’ai rencontré plus de 14 000 personnes, et nous n’avons plus aujourd’hui la même conversation qu’il y a deux ans. Nous constatons donc déjà des changements dans ce domaine. Merci.
Lgén Bourgon : En ce qui concerne la progression de la citoyenneté, nous sommes en pourparlers avec IRCC. Pour l’instant, nous nous concentrons sur le partage d’information sur nos résidents permanents afin d’accélérer les dossiers concernant le transfert d’information, les études, la vérification de sécurité, etc. La prochaine étape consistera à examiner les possibilités d’accès à la citoyenneté canadienne, mais nous n’en sommes pas encore là. Nous travaillons en étroite collaboration avec IRCC. Voilà où nous en sommes.
[Français]
Quant à la question sur le projet pilote de congés sabbatiques, c’est une très bonne question. Je crois que les Australiens prennent des congés sabbatiques assez régulièrement et cela fonctionne pour eux sur le plan de la rétention. En ce moment, il serait difficile, en raison des pressions liées à la livraison, surtout du côté de la police et des enquêtes, et caetera. Nous n’avons pas assez de gens. Si nous les envoyons en congé sabbatique, nous en aurons encore moins.
À long terme, cela pourrait être une solution, parce que c’est une mesure de rétention. C’est quelque chose que nous allons considérer lorsque nous aurons un petit peu plus d’effectifs.
[Traduction]
Bgén Brodie : En ce moment, nous changeons une interaction humaine à la fois. C’est ainsi que nous créons le changement de culture. L’alignement des attitudes, des comportements, des croyances et de la conduite se fait une interaction humaine à la fois. Nous pourrions le faire beaucoup plus rapidement et à bien plus grande échelle si nous disposions de nouveaux processus soutenant la transformation numérique organisationnelle, qui nous permettraient de renforcer les capacités dont nous avons besoin pour mettre en œuvre le changement qui, à l’heure actuelle, est entravé par les dossiers en attente, tout comme les dossiers que nous devons traiter.
Alors que l’état du discours public est parfois démoralisant, l’état de la génération du personnel militaire est porteur d’espoir : 28 % de nos candidats potentiels sont des femmes, et entre 30 et 40 % de nos candidats au cours d’un mois donné sont des membres de minorités visibles.
Nous aurons accompli beaucoup de bonnes choses si nous parvenons à combler le fossé entre notre rhétorique et notre capacité de créer des résultats opérationnels dans cet espace; il est donc logique que nous puissions très bien reconstituer les forces.
Le président : Malheureusement, nous allons devoir clore la discussion. Merci de nous avoir accordé plus de temps.
Au nom du comité, j’aimerais remercier la lieutenante-générale Bourgon, la lieutenante-générale Carignan et la brigadière-générale Brodie d’avoir été des nôtres aujourd’hui; de votre sincérité et d’avoir répondu sans détour à certaines questions plus difficiles. Vos commentaires et votre expertise nous sont très utiles.
Au nom du comité, de mes collègues et des Canadiens et Canadiennes d’un bout à l’autre du pays, merci de servir chaque jour le Canada. Tout particulièrement, nous vous remercions d’avoir entrepris la tâche cruciale de régénérer et de renouveler nos forces armées. Vous nous avez donné une idée de l’esprit dans lequel vous accomplissez cette tâche et de la créativité que vous y mettez. Cela a un impact énorme. Merci beaucoup de votre aide, aujourd’hui.
Pour la deuxième partie de la réunion, nous avons le plaisir d’accueillir des représentants de la Gendarmerie royale du Canada : le surintendant principal Andrew Blackadar, commandant, Nunavut, que nous avons le plaisir de revoir; plus près de nous, Mme Nadine Huggins, dirigeante principale des ressources humaines; et Mme Kathleen Clarking, directrice, Programme national de recrutement.
Avant de commencer, j’aimerais souligner que Mme Huggins a déjà travaillé, il y a de nombreuses années, au bout de cette même table, comme greffière à la procédure. Elle connaît donc parfaitement le déroulement de nos travaux. Elle est bien informée.
Merci à tout le monde d’être avec nous aujourd’hui. Surintendant principal Blackadar, c’est un plaisir pour notre comité de vous accueillir, après le chaleureux accueil que vous nous avez réservé à votre quartier général, au Nunavut, durant notre visite de l’Arctique canadien.
Pour commencer, nous allons vous inviter à présenter votre déclaration préliminaire, puis nous passerons aux questions des membres du comité. Madame Huggins, je crois savoir que c’est vous qui présentez la déclaration aujourd’hui. Allez-y, dès que vous êtes prête. Merci beaucoup d’être ici.
Nadine Huggins, dirigeante principale des ressources humaines, Gendarmerie royale du Canada : Bonjour à vous, monsieur le président, monsieur le vice-président et membres du comité. Je vous remercie de m’avoir invitée à venir poursuivre la discussion sur les considérations en matière de sécurité publique touchant le Nord canadien.
Je tiens à souligner respectueusement que, comme je suis à Ottawa, je m’adresse à vous depuis le territoire traditionnel non cédé de la nation algonquine anishinabe.
Nous sommes tous ravis de pouvoir vous donner un aperçu de notre renouvellement holistique du recrutement et des opérations dans le Nord, ainsi que de répondre à vos questions.
Nous sommes heureux d’avoir l’occasion de vous parler des principales initiatives de la GRC, en cours et prévues, pour moderniser le recrutement dans l’ensemble de notre organisation. En tant que plus importante présence fédérale dans l’Arctique, la GRC contribue à l’affirmation de la souveraineté canadienne dans la région.
En plus de s’acquitter de ses mandats à l’échelle fédérale et internationale, la GRC fournit des services de police contractuels à huit provinces et aux trois territoires. Nous sommes également sous contrat direct avec environ 150 municipalités. Au total, la GRC compte 700 détachements à travers le Canada. Parmi ceux‑ci, 14 se trouvent au Yukon, 22 dans les Territoires du Nord‑Ouest et 26 au Nunavut.
Le mandat de la GRC comporte de multiples facettes. Nous menons des enquêtes criminelles ainsi que des opérations de prévention du crime, maintenons l’ordre, appliquons les lois, contribuons à la sécurité nationale et assurons la sécurité des représentants de l’État, des dignitaires en visite et des missions étrangères. Nous fournissons également des services de soutien vitaux à d’autres organismes d’application de la loi.
La GRC s’est engagée à travailler en partenariat avec les dirigeants et les organisations communautaires afin d’aborder les problèmes critiques et de mettre en œuvre des solutions. Notre approche en matière d’application de la loi dans le Nord requiert la collaboration et le soutien concertés des communautés, ainsi qu’une planification importante pour fournir des ressources aux détachements isolés et se préparer à des conditions extrêmes. Nous comptons sur une équipe qui a acquis des compétences spécialisées en matière d’intervention d’urgence et qui a la résilience nécessaire pour s’adapter aux défis propres aux postes éloignés.
Les services de police, comme d’autres secteurs de l’économie, sont confrontés à des défis sans précédent pour le recrutement d’un nombre suffisant de candidats possédant l’ensemble des compétences nécessaires pour nous permettre de respecter nos engagements en matière de prestation de services. Le renouvellement du recrutement est un pilier essentiel de la modernisation de la GRC. La GRC est en train de transformer et de réimaginer la façon dont elle attire, recrute et maintient en poste les policiers.
Pour déterminer la voie à suivre, nous avons écouté les Canadiens, demandé conseil à des experts externes, examiné nos programmes et nos politiques sous l’angle de l’analyse comparative entre les sexes et de l’équité, de la diversité et de l’inclusion, et pris en compte les recommandations de nos principaux intervenants et du Conseil consultatif de gestion.
Notre programme de modernisation est axé sur la mise en œuvre de solutions à long terme et la conduite de changements réels et durables. Nous avons des objectifs ambitieux.
[Français]
Le recrutement est une priorité organisationnelle clé et nous rationalisons et innovons pour attirer des policiers nouveaux et d’expérience provenant d’autres administrations. La GRC offre des possibilités de carrière vraiment uniques et enrichissantes.
En juin 2020, à la suite d’une évaluation intégrée du programme national de recrutement et d’une évaluation de bout en bout du processus de recrutement, la GRC a fixé des objectifs concrets pour éliminer les obstacles et rationaliser les délais de traitement, sans sacrifier la rigueur de notre évaluation ni la qualité de nos policiers.
Notre approche intégrée du renouvellement du recrutement est conçue pour améliorer le volume, la qualité et la diversité des candidats policiers, tout en augmentant l’efficacité et en améliorant l’expérience des candidats.
[Traduction]
En mai 2021, le Conseil consultatif de gestion, ou CCG, a terminé l’évaluation de l’approche de la GRC en matière de recrutement, de formation, de maintien en poste et de promotion d’agents autochtones. Une équipe est en train d’élaborer une stratégie nationale de recrutement des Autochtones, qui s’inscrit dans le cadre de l’engagement de toute l’organisation en faveur de la réconciliation.
De plus, afin d’atteindre notre objectif d’être plus représentatifs des communautés que nous servons, nous avons établi des objectifs de recrutement nationaux et divisionnaires. Ces objectifs seront révisés en fonction de la publication des nouveaux recensements et des données démographiques connexes.
Pour attirer davantage de candidats, nous avons modifié nos stratégies de recrutement proactives afin de nous assurer que nos recruteurs reflètent de plus en plus la diversité que nous cherchons à attirer et qu’ils sont équipés pour aider les candidats issus de milieux divers à naviguer dans le processus de recrutement. Nous élargissons notre champ d’action au-delà des lieux de recrutement traditionnels et nous établissons des relations avec de nouvelles communautés.
Les recruteurs proactifs jouent un rôle clé en guidant les candidats à chaque étape du processus de candidature. Ils travaillent avec les candidats des régions éloignées qui n’ont pas accès à Internet à la maison et leur fournissent un ordinateur portable connecté afin qu’ils puissent soumettre leur candidature ou passer les examens d’entrée en ligne. Pour les candidats inuits dont la langue maternelle n’est ni l’anglais ni le français, des recruteurs proactifs proposent des séances individuelles pour les aider à se préparer aux entretiens et aux autres étapes du processus. Des présentations obligatoires sur les carrières sont proposées en ligne ou par téléphone. Nous faisons tout en notre pouvoir pour nous assurer qu’aucun candidat intéressé n’est laissé de côté.
Afin d’éliminer les préjugés et les obstacles dès le début du processus de candidature, notre Programme national de recrutement a mis en place une nouvelle évaluation des aptitudes en ligne qui remplace le Test d’aptitude au travail policier de la GRC, ou TATPG, en place depuis 2005. Cette nouvelle évaluation des aptitudes utilise un langage accessible, inclusif et sans obstacle et nous aide à atténuer les préjugés en utilisant des questions qui placent tous les candidats sur un pied d’égalité. L’évaluation ne fait plus appel à des scénarios susceptibles d’avantager les candidats ayant une expérience de travail dans des bureaux traditionnels ou des environnements urbains. La nouvelle évaluation n’est pas surveillée et est accessible en version papier, si nécessaire.
De même, nous avons remplacé notre ancienne évaluation psychologique — qui ne tenait compte que des signes de maladie mentale grave — par une évaluation plus large fondée sur les meilleures pratiques du secteur. L’évaluation POST — c’est‑à‑dire Peace Officer Standards and Training — de la Californie, que nous utilisons depuis l’année dernière, permet de mieux déterminer l’aptitude psychologique globale d’une personne à faire carrière dans la police. Les outils et approches modernisés d’évaluation des candidats sont conçus pour éliminer les obstacles et les préjugés afin de garantir que tous les candidats ont une chance égale de briller par leur ambition de servir dans les services de la police nationale du Canada.
Afin de disposer d’une base de données solide pour ses efforts de recrutement, la GRC a fait appel à des sociétés d’études de marché et de stratégie marketing pour l’aider à élaborer de nouveaux supports médiatiques. Des efforts de recrutement ciblés nous aideront à construire un service de police moderne et diversifié.
Pour attirer des candidats plus jeunes, la GRC lancera le projet pilote du Programme d’expérience précadet diversifié et inclusif, ou ECDI, en septembre 2023. L’ECDI est un nouveau programme de trois semaines à la Division Dépôt qui vise à éliminer les obstacles systémiques auxquels se heurtent les personnes racisées et sous-représentées qui espèrent entrer à la GRC et à faire vivre aux précadets une expérience positive de la culture policière. L’ECDI suit les traces de notre programme de formation des précadets autochtones, qui réussit depuis plus de 30 ans à aider les précadets inuits, métis et des Premières Nations à acquérir les compétences et les informations dont ils ont besoin pour postuler un emploi d’agent de police.
Dans les territoires, la GRC fait des efforts concertés pour atténuer les obstacles culturels locaux et systémiques au processus de recrutement. Prenons par exemple notre travail pour surmonter l’obstacle des permis de conduire avec restrictions et faire en sorte que les candidats des régions nordiques puissent s’entraîner à conduire avec des instructeurs de la Division Dépôt pour être prêts à travailler dans n’importe quel détachement. Pour des candidats qui habitent à des endroits où il n’y a pas de noms de rue ou d’adresses de résidence, nous avons adopté le système de localisation GPS de Google Maps afin que les candidats puissent remplir avec exactitude les formulaires nécessaires. Les exigences en matière de sécurité nous obligent à savoir d’où viennent les candidats. Les candidats qui habitent dans des régions où il n’y a pas d’installations pour tests obligatoires d’acuité visuelle et auditive sont transportés par voie aérienne vers le Sud. À ce moment-là, ils ont aussi l’occasion de passer les autres entrevues, et nous les aidons à remplir tous les autres formulaires qu’ils doivent présenter dans le cadre du processus de recrutement. Tout cela sans frais pour les candidats.
Nous avons également mis en place le Bureau de la collaboration, de l’élaboration conjointe et de la responsabilisation GRC-Autochtones, ou Bureau de la CERGA —, qui collabore à des initiatives de modernisation culturelle pertinentes au sein de la GRC, notamment en favorisant le recrutement, la fidélisation et le perfectionnement professionnel des employés autochtones actuels et futurs de la GRC. Le Bureau de la CERGA renforce la confiance dans les organisations et les communautés autochtones nationales afin de promouvoir la GRC en tant qu’employeur de choix.
Notre regard est tourné vers les 150 prochaines années. Nous continuerons à accomplir des gestes concrets pour que notre organisation soit moderne, inclusive et saine, conformément aux attentes de nos employés et de tous les résidents du Canada. Nous sommes fiers des contributions apportées par nos employés et de notre action de modernisation. Nous utilisons tous les leviers disponibles pour attirer et retenir dans nos rangs les meilleurs.
Merci beaucoup.
Le président : Merci beaucoup, madame Huggins.
Chers collègues, c’est l’heure des questions. Je rappelle aux membres du comité que nous avons jusqu’à 18 h 40. Encore une fois, je vous demande d’être succincts lorsque vous posez vos questions et de préciser à qui vous les posez.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Merci à nos témoins. En 2018-2019, vous aviez 8 000 demandes de candidatures et on connaît la capacité de formation de votre école, c’est environ 2 200 par année; c’est une capacité de former 1 200 policiers. D’où vient la pénurie de policiers dans les rangs de la GRC?
Mme Huggins : Je vous remercie de la question. Notre académie peut former plus de 1 200 candidats. C’est aussi vrai que le nombre de personnes qui veulent entrer dans le secteur policier diminue. C’est un problème que nous avons partout au Canada et je dirais même aussi en Amérique du Nord.
Les mesures que l’on prend actuellement pour améliorer notre processus de recrutement, pour attirer davantage de gens, devraient faire augmenter le nombre de candidats, mais aussi faciliter le nombre de candidats qui peuvent passer vers le dépôt.
Le sénateur Boisvenu : Si vous aviez huit fois plus de candidats que votre capacité de formation, d’où vient la pénurie?
Kathleen Clarkin, directrice, Programme national de recrutement, Gendarmerie royale du Canada : Nous avons des candidats, mais il y a un processus étroit pour s’assurer que les gens que l’on embauche sont vraiment les bons candidats pour travailler avec nous.
Le sénateur Boisvenu : Donc, ce sont directement vos critères — si je regarde les données — qui font en sorte que vous gardez un candidat sur huit, est-ce bien cela?
Mme Clarkin : Le ratio n’est pas aussi élevé. Des fois, les mêmes personnes ont une chance de succès dans le futur, mais cela prend du temps pour se perfectionner ou avoir une plus grande expérience de vie ou même pour pouvoir se former à la rigueur physique.
Le sénateur Boisvenu : Je sais qu’au Québec, on forme dans plusieurs collèges, en techniques policières, des jeunes qui sont prêts à aller suivre le cours. S’ils vont à Nicolet, par exemple, ils vont suivre une formation d’environ 18 semaines. S’ils vont à la GRC, est-ce que la formation est plus longue que la formation en techniques policières?
Mme Huggins : Non, notre processus dure 26 semaines. C’est plus court que le programme du collégial qui est habituellement de deux ans. Alors, c’est plus court pour nous et cela nous donne aussi l’occasion d’attirer des gens qui n’ont peut-être pas le privilège d’aller à l’université ou au cégep.
Le sénateur Boisvenu : Mon autre question concerne la sécurité. À la suite de toutes les fusillades dans les villes, le chef de police de Toronto a indiqué à la Chambre des communes que 86 % des armes saisies dans les gangs de rue étaient introduites de façon illégale au Canada.
On ne se le cachera pas, beaucoup de ces armes transitent par les réserves autochtones, surtout les réserves frontalières. Selon la mentalité de la population, les gens disent que la GRC a peur d’aller vérifier dans ces communautés, parce que c’est trop politique, c’est trop délicat. Est-ce que vous avez un type de policiers qui sont attitrés aux entrées clandestines d’armes au Canada ou est-ce que cela fait partie du travail des patrouilleurs normaux, monsieur Blackadar?
Surintendant principal Andrew Blackadar, commandant, Nunavut, Gendarmerie royale du Canada : Merci pour la question.
[Traduction]
Nous avons différentes unités d’un bout à l’autre du Canada. Par exemple, en Colombie-Britannique, l’Équipe intégrée comprend une équipe spécialisée de lutte contre le trafic des armes à feu. Il y en a une aussi en Ontario, c’est une équipe intégrée multidisciplinaire. Dans toutes les provinces, nous avons ce genre d’équipes travaillant de concert avec les services de police municipale, la GRC et la police provinciale. Elles ont le mandat précis d’enquêter sur les armes à feu, même si ce travail s’appuie aussi sur nos policiers en uniforme.
Dans le Nord, je peux vous dire très pertinemment que le problème ne tient pas au trafic des armes à feu. Il n’y a aucun véritable trafic d’armes à feu, mais il y a une menace réelle pour tous nos membres, puisqu’il y a une arme à feu dans chaque maison que nous visitons.
Le président : Nous devons passer à autre chose, j’en ai bien peur.
[Français]
Le sénateur Gignac : Bienvenue aux témoins. J’aimerais poser une question à M. Blackadar, avec qui nous avons eu la chance de discuter lors de notre voyage en Arctique. Merci pour l’accueil. J’ai le goût de vous poser la même question que j’ai posée à Mme Bourgon, la lieutenante-générale. Quand on est au Nunavut, est-ce qu’il y a une flexibilité en matière d’échanges entre les Forces armées canadiennes et la GRC? Parmi ceux qui sont éloignés d’Ottawa, il y aurait peut-être des gens intéressés à s’engager dans la GRC ou les Forces armées canadiennes s’il y avait des ententes de réciprocité entre les deux organisations. Des prêts de trois ou quatre ans ouvrent beaucoup d’horizons pour pouvoir aller d’une organisation à l’autre. Est-ce que cela a déjà été envisagé, quitte à faire un projet pilote entre les deux organisations? Quelle est votre opinion là-dessus?
[Traduction]
M. Blackadar : C’est une excellente question. Je pourrais en parler pendant des heures, parce que c’est quelque chose qui nous intéresse toujours.
Je peux vous parler de certaines des initiatives que nous avons entreprises au cours des deux ou trois dernières années, en particulier au Nunavut. Essentiellement, nous avons noué des liens très serrés avec la police du Groenland, parce que nous savons tous que nous avons une frontière internationale avec l’île Hans, à présent, mais aussi parce que le Groenland a la même population inuite que nous, au Nunavut. Le Groenland a obtenu d’excellents résultats grâce à sa stratégie de recrutement et de maintien en poste pour les Inuits. Nous avons étudié ses pratiques exemplaires. Nous avons invité la police de Nuuk, au Groenland, à venir à Iqaluit. Nous sommes aussi allés à Nuuk et avons observé comment le Groenland mène ses activités et ce qu’il fait.
Nous avons fait la même chose avec la police du Nunavik dans le Nord du Québec. Nous n’avons pas fait d’échanges, et nous n’avons pas de protocole d’entente officiel. Dans le territoire, nous travaillons en étroite collaboration avec les FAC et la Force opérationnelle interarmées Nord, la FOIN, sur divers fronts. Il y a aussi les Rangers canadiens, avec qui nous travaillons aussi en étroite collaboration.
Au Nunavut, nous sommes le seul service policier du Canada qui n’est pas responsable des activités de recherche et de sauvetage. Cela est habituellement confié à la Gestion des urgences du Nunavut, et c’est souvent cette organisation qui s’occupe des siens, ou alors elle demande l’aide de la FOIN, si celle-ci a la possibilité de l’aider dans ses recherches.
Nous avons établi des partenariats avec la FOIN et les Rangers canadiens, et nous entreposons une grande partie de leur équipement à nos détachements, parce que nous avons réalisé, à la GRC, que, surtout dans l’Arctique, nous ne sommes pas sur une île. Baffin est une île, mais le territoire lui-même n’en est pas une. Nous ne réussirons pas seuls, et eux non plus.
Peut-être que je pourrais céder la parole à la dirigeante principale des ressources humaines, et elle pourra vous parler des détails, de la complexité de conclure des protocoles d’entente, mais je dirai, avant de conclure, que nous n’hésitons pas à accorder des congés d’études non payés à nos membres afin qu’ils puissent se perfectionner, individuellement ou collectivement, afin d’aider l’organisation. À dire vrai, sans vouloir trop entrer dans le détail, je travaille avec l’un de nos membres dans le territoire présentement qui souhaite devenir pilote et, à terme, pilote pour la GRC, mais il devra prendre quelques congés non payés afin d’obtenir les qualifications dont il a besoin, en plus des heures de vol. C’est une excellente occasion, et nous comptons en tirer parti.
Je vais céder la parole à Mme Huggins, qui pourra vous en dire plus sur la relation officielle entre les FAC et la GRC.
Mme Huggins : Merci beaucoup.
Nous travaillons en très étroite collaboration avec nos collègues des FAC pour élaborer des stratégies de recrutement. Pour être honnête, nous n’avons pas encore discuté de partage de ressources, parce que nous subissons tous des contraintes par rapport à l’état actuel des ressources. Je ne dis pas que cela n’arrivera jamais, mais cela ne se fait pas présentement. Est‑ce que cela pourrait apporter de la valeur? Probablement. Devrions‑nous harmoniser un peu nos processus afin de pouvoir placer des membres des FAC aux premières lignes? C’est le cas, alors c’est plutôt un projet que nous pourrions envisager plus tard.
Le sénateur Oh : Merci aux témoins d’être ici.
Dans quelle région ou dans quelle province du pays la pénurie de personnel à la GRC est-elle la plus grave?
Mme Huggins : Merci beaucoup de la question.
Notre organisation s’efforce d’affecter des ressources dans tout le pays et dans tous nos détachements, du mieux qu’elle le peut. Même si nous avons assurément quelques difficultés en matière de personnel, nous essayons de répartir les effectifs sur l’ensemble du pays, afin qu’aucune région n’ait plus de difficulté qu’une autre à répondre aux exigences. De façon générale, nous répondons à toutes les exigences. Il n’y a pas une région précise. Certaines de nos divisions sont plus importantes que d’autres. Nos divisions de l’Ouest sont beaucoup plus importantes que celles de l’Est. Vous verriez probablement un plus grand nombre là-bas, mais en pourcentage, nous essayons de faire en sorte que les choses soient aussi stables que possible dans tout le pays.
Le sénateur Oh : Qu’avez-vous fait pour accroître la diversité dans le recrutement à la GRC? Hier soir, j’ai assisté à un événement où il y avait un nouvel agent de la GRC d’origine asiatique. Pouvez-vous nous parler un peu plus de la diversité dans le recrutement?
Mme Huggins : Je vais répondre en premier, puis je vais laisser la parole à Mme Clarkin, qui est directrice du Programme national de recrutement, pour qu’elle complète la réponse.
La GRC prend des mesures concrètes et globales aux fins de la diversité et de l’inclusion. Nous avons lancé notre première stratégie d’équité, de diversité et d’inclusion afin que l’organisation ait des bases solides, qui lui permettront de s’améliorer durablement pour accroître ses résultats en matière de diversité.
Comme je l’ai mentionné dans ma déclaration, nous avons élaboré le programme ECDI, spécialement conçu pour recruter des candidats potentiels beaucoup plus tôt qu’habituellement, afin de créer de l’intérêt pour l’accroissement de la diversité.
Le plus important, c’est que nous avons établi des cibles bien concrètes, à l’échelon national et à l’échelon des divisions, pour nous assurer de ne pas oublier, lorsque nous déployons des efforts pour accroître le nombre global, le besoin d’accroître la diversité et de veiller à représenter les populations que nous servons.
Madame Clarkin, je vais vous céder la parole, pour que vous puissiez parler de certaines de vos études de marketing.
Mme Clarkin : Merci beaucoup de la question.
Comme mentionné, il est très important de refléter les gens que nous servons et d’être bien intégrés dans les collectivités. C’est pour cette raison que nous avons entrepris des études de marché et des études démographiques : pour mieux comprendre les candidats potentiels, savoir où les trouver et ce qui est important pour eux. Ainsi nous pourrons mieux promouvoir tout ce que nous avons à offrir d’une façon qui les intéresserait.
Nous avons appris certaines choses très intéressantes. Moi‑même, je ne serais pas une candidate idéale, à mon âge. Après avoir entendu la génération Z dire à quel point c’était important pour elle d’avoir une pension, certains de nos collègues ont immédiatement adapté le message cible pour mettre en valeur ce que nous avons à offrir. À partir des éléments de données, nous avons développé une sorte de « carte de densité » pour savoir où sont les gens et ceux qui seraient le plus enthousiastes à l’idée de rejoindre nos rangs, afin de mieux diriger nos efforts au bon endroit et au bon moment et bâtir ces relations.
Nous travaillons aussi pour améliorer nos paramètres afin de mesurer l’efficacité de nos divers événements. Ce n’est pas parce que vous avez 30 000 personnes dans une salle que votre présence à un match des Sénateurs sera une grande victoire, par comparaison avec une relation véritablement authentique, établie dans un centre communautaire ou à d’autres endroits clés.
Par-dessus tout, l’important est que tous ces efforts s’alignent sur le but que nous voulons atteindre. Qui essayons-nous d’approcher? Nous n’avons fermé la porte à personne. Nous devons dire clairement que tout le monde est invité à poser sa candidature. Mais nous avons travaillé très dur pour envoyer un message clair quant à ce que nous cherchons — les caractéristiques et les attributs clés — et pour arriver à mieux les évaluer, comme Mme Huggins l’a expliqué plus tôt, sur un pied d’égalité, pour éviter que certaines personnes soient avantagées et d’autres désavantagées. Ensuite, nous sommes impatients d’intégrer les études de marché dans toutes nos stratégies.
Le sénateur Oh : Très bien. Merci.
La sénatrice Dasko : Merci d’être ici. J’ai deux questions. Je vais les poser toutes les deux, et répondra qui le veut.
Avant tout, en 2019, Sécurité publique Canada a reconnu que « la demande d’agents dépasse la capacité de recrutement et de formation de la GRC », quoique cela concernait spécifiquement les agents contractuels et tous les contrats que vous avez conclus avec les municipalités et les provinces. Êtes-vous vraiment obligés de conclure de tels contrats? Entre parenthèses, j’ai lu toutes les histoires à propos de Surrey. Ce n’est pas votre faute. J’ai l’impression que c’est de la leur, mais quoi qu’il en soit... êtes-vous réellement obligés de conclure ce genre de contrats avec toutes ces municipalités et ces provinces? Si vous avez des difficultés en matière de recrutement, pourquoi ne pas simplement leur dire que vous ne pouvez pas prendre ces contrats? Quelqu’un veut-il répondre?
Mme Huggins : Merci de la question.
Les contrats qui ont été conclus vont expirer en 2032. Nous avons présentement des discussions, par l’intermédiaire du ministère de la Sécurité publique, alors le ministère serait probablement le mieux placé pour répondre à votre question, madame la sénatrice. Nous sommes présentement en train d’examiner la forme que les contrats prendront à l’avenir. Ce sont toutes des questions dont nous discutons présentement. Malgré tout, nous avons effectivement un contrat à respecter, au moins jusqu’en 2032.
La sénatrice Dasko : Donc, vous ne savez pas si vous aurez réellement l’obligation de conclure ce genre de contrat dans l’avenir? C’est le ministère qui va décider?
Mme Huggins : C’est exact.
La sénatrice Dasko : Ma deuxième question concerne le rapport de 2020 de l’honorable Michel Bastarache. Il dit :
[...] la culture de la GRC est toxique et tolère les attitudes misogynes et homophobes de certains de ses dirigeants et de ses membres [...]
J’aimerais que vous formuliez des commentaires là-dessus. Cela remonte à 2020, il n’y a pas si longtemps. Pourriez-vous faire des commentaires là-dessus et nous dire ce que vous allez faire par rapport à cela?
Mme Huggins : Merci de la question.
La GRC est déterminée à instaurer, de manière mûrement réfléchie, un certain nombre de changements au sein de l’organisation pour donner suite aux recommandations du rapport Bastarache. Je vais en souligner trois.
Premièrement, la conduite. Nous avons entrepris un examen global de la conduite au sein de notre organisation et avons adopté un nouveau cadre, élaboré par un expert externe. Des juristes externes sont venus examiner notre processus en matière de conduite, et nous avons une nouvelle approche quant à la façon de réagir lorsqu’un de nos membres a un comportement scandaleux.
Nous avons mis en place un centre indépendant de résolution du harcèlement. Lorsqu’une personne dans notre organisation vit du harcèlement, il y a un processus clair — encore une fois, par l’intermédiaire d’enquêteurs externes — qui permet d’aller au fond des choses.
En ce qui concerne le changement de culture, nous avons mis à jour et révisé nos valeurs fondamentales, afin qu’elles ne soient plus uniquement des mots sur du papier, mais bien des attentes claires en matière de comportement. Grâce à ces changements sur le plan des valeurs fondamentales, au CIRH et à l’examen de la conduite, nous nous attendons non seulement à des changements en matière de comportement, suivant les valeurs fondamentales, mais aussi à des conséquences pour ceux qui ne sont pas à la hauteur de nos attentes en ce qui concerne ces valeurs fondamentales.
Nous travaillons avec diligence pour améliorer notre culture. Y sommes-nous arrivés? Non, pas encore. Nous continuons de poursuivre cet objectif, mais nous avons fait d’importants progrès. Nous rendons compte publiquement de nos progrès. Nous avons un site pour le public où il peut suivre ce qui se passe avec toutes ces recommandations. Nous sommes déterminés à moderniser notre culture.
Le sénateur Yussuff : Évidemment, la GRC a quelque chose d’unique, en ce sens qu’elle a une responsabilité en tant que service policier contractuel. Vous faites partie de la force de police nationale, puis vous avez ces responsabilités secondaires à remplir; de mon point de vue, cela semble vous distraire énormément, parce que, fondamentalement, votre responsabilité est envers la nation. Quelle incidence cela a-t-il sur le recrutement et le maintien en poste? Plus important encore, quel défi cela représente-t-il pour la GRC, au chapitre du recrutement, surtout que vous offrez des services de police contractuels en sachant que cela pourrait prendre fin un jour et que vous devez maintenir en poste les gens dont nous avons besoin pour offrir le service national?
Mme Huggins : Merci de la question. Je vais répondre en premier, puis je vais céder la parole au commandant du Nunavut, qui pourra vous donner son point de vue opérationnel.
Nous exerçons nos activités en nous attendant à devoir fournir des services de police contractuels. Nos initiatives de recrutement reflètent les 150 possibilités d’emploi qui s’offrent aux gens qui veulent travailler pour la GRC, y compris les services policiers de première ligne sous contrat.
Quand nous recrutons, nous disons très clairement à nos recrues qu’ils sont des agents de première ligne d’abord et qu’ils auront la possibilité de travailler dans d’autres domaines fédéraux ou spécialisés auxquels nous avons accès. Pour nous, ce n’est jamais un obstacle ni perçu comme un obstacle à nos stratégies de recrutement, c’est même tout à fait le contraire. La possibilité de travailler partout au pays ou, de plus en plus, vu les modifications apportées aux clauses relatives à la mobilité, de travailler dans sa province natale, offre une flexibilité très attirante pour bien des recrues.
Je ne sais pas si vous voulez ajouter quoi que ce soit, monsieur Blackadar.
M. Blackadar : Merci.
Je suis dans le milieu depuis longtemps; cela fait 33 ans et demi que je suis agent de police. Jusqu’à tout récemment, ce n’était pas une question qui se posait, à la GRC, de savoir si on est un agent de police fédéral, municipal ou contractuel provincial. On était tout simplement un agent de police. Nous avons tous la même formation, nous allons tous à la Division Dépôt, et nous faisons appliquer la loi. Dans le cadre de notre formation à la Division Dépôt, nous apprenons à appliquer le Code criminel et les lois fédérales. Puis, nous allons sur le terrain pour suivre la formation des recrues. De nombreux éléments entrent en ligne de compte, par rapport aux mandats fédéraux, provinciaux et municipaux que nous avons.
Du point de vue organisationnel, nous reconnaissons aussi que nous devons changer. Nous devons moderniser et examiner chacune de nos fonctions à la GRC. Il y a 33 ans, il y avait très peu de fonctionnaires à la GRC; tout le monde était un agent de police en uniforme, même le commis aux finances. Le responsable de la dotation était aussi un agent en uniforme. Aujourd’hui, nous envisageons une transformation à l’échelle fédérale en pensant à la planification de carrière et aux ensembles de compétences dont les gens ont besoin. Pouvons-nous faire appel à des enquêteurs civils qui n’ont pas nécessairement besoin de passer les six mois au complet comme agent de police et apprendre ce que c’est d’être policier provincial? Il faudra du temps pour y arriver, mais nous devons rester souples et pouvoir réagir aux demandes changeantes de la population canadienne, et c’est ce que nous cherchons à faire.
Je n’ai jamais entendu personne se demander si elle manquera de travail ou si elle sera en mesure de faire son travail, parce que, pour chaque porte qui se ferme, nous savons qu’une autre s’ouvre dans l’organisation. Nous sommes tous conscients de cela, et actuellement, les ressources fédérales travaillent en excellente harmonie avec nos ressources territoriales.
Le sénateur Yussuff : Il n’y a pas si longtemps, le mouvement Black Lives Matter et la violence policière ont fait la une des journaux, y compris au Canada. Pour nos communautés autochtones, cela n’avait rien de nouveau. Est-ce que cela vous empêche d’attirer des personnes issues de ces communautés à la GRC? Si je faisais partie de ces communautés, pourquoi voudrais-je rejoindre un service de police qui agit de la sorte? Je suis certain que c’est un défi pour vous. Qu’avez-vous à dire à ce sujet?
Mme Huggins : Merci de la question.
Il ne fait aucun doute que les événements qui se déroulent un peu partout dans le monde — Black Lives Matter, Indigenous Lives Matter, tous ces mouvements qui dénoncent les injustices vécues par les communautés — entrent en ligne de compte et nous donnent de la difficulté à recruter des personnes dans les services de police. Ceci étant dit, notre étude de marché donne à penser que les jeunes hommes et femmes racisés souhaitent vraiment se joindre aux forces policières. De notre point de vue, une partie de nos efforts ciblés de recrutement visent à trouver une manière de les rejoindre et de démontrer que notre organisation cherche à être accueillante et inclusive et à les soutenir non seulement durant notre processus de recrutement et de formation, mais durant toute leur carrière.
En dépit de la mauvaise presse — nous en obtenons notre juste part, bien sûr, et parfois avec raison —, nous acceptons et reconnaissons les défis à relever dans notre organisation. Nous sommes fiers du travail de notre organisation, mais nous ne prétendons pas être infaillibles. Nous souhaitons très certainement nous assurer de représenter la population du Canada ainsi que les collectivités que nous servons. L’étude de marché nous aidera certainement à comprendre comment tirer parti de ces collectivités qui, selon ce que nous avons appris, s’intéressent au métier de policier et à notre organisation.
La sénatrice R. Patterson : C’était merveilleux.
Je souhaite poser une question un peu plus technique. Elle concerne l’outil d’évaluation de la Californie dont vous avez parlé. Nous savons que de nombreuses forces paramilitaires ou militaires ont de la difficulté à établir comment ces outils de prévision peuvent nous permettre de recruter des personnes. La question que je veux vous poser se fonde sur deux raisonnements. Avez-vous adapté ces outils aux populations masculines blanches non traditionnelles de la Californie? Autrement dit, au moyen de l’ACS Plus. Ensuite, disposez-vous d’indicateurs vous permettant de faire un suivi et de voir à quel point ces outils sont prédictifs? Je sais que ces outils sont nouveaux, mais ils suscitent beaucoup d’intérêt.
Mme Huggins : Merci beaucoup d’avoir posé la question. Je vais répondre en premier, puis je céderai la parole à Mme Clarkin.
La décision de passer à l’évaluation POST était fondée sur des données probantes. Nous savons qu’un certain nombre de services policiers aux États-Unis utilisent les évaluations POST. Nous voulions nous assurer d’examiner non seulement la santé mentale des candidats, mais leur aptitude mentale en général à exercer le métier de policier, au regard de la résilience et de la capacité à travailler et à composer avec les gens. Nous souhaitions nous assurer que l’évaluation psychologique renforçait certaines informations que nous avait révélées notre étude au sujet des caractéristiques et des attributs que doivent posséder les candidats, afin de construire un service de police moderne. La décision de passer à l’évaluation POST était fondée sur des données probantes et de nombreuses recherches.
Je vais aborder brièvement la question que vous avez soulevée, à savoir comment nous nous assurons que ce n’est pas discriminatoire pour les autres. Nous surveillons de très près les rapports provenant des psychologues qui font ce travail. Les évaluations en tant que telles ont été élaborées pour être impartiales, et nous les examinons régulièrement pour y déceler tout manque d’objectivité.
Je vais céder la parole à Mme Clarkin pour terminer.
Mme Clarkin : Merci beaucoup.
Comme le disait la dirigeante principale des ressources humaines, il y a beaucoup d’éléments clés à prendre en compte au moment de personnaliser le processus et nous assurer de recruter dans nos services policiers les personnes qui conviennent. Il faut entre autres tenir compte de la manière dont c’est administré.
Il y a divers aspects à la vérification des aptitudes psychologiques. Il y a un examen à choix multiples, et nous avons recueilli à ce stade-là bon nombre d’éléments d’information à l’aide d’une vérification des antécédents et d’un filtrage de sécurité. Toutes ces informations sont transmises à un psychologue, qui procède à une entrevue en personne — ou en ligne dans les régions éloignées — et passe en revue cet ensemble complet d’informations, selon les données probantes sur ce que nous recherchons, pour voir s’il y a des préoccupations ou des éléments clés à prendre en compte.
Comme il a été mentionné, une fois que le psychologue a rédigé son rapport, on procède à un contrôle de la qualité dans une perspective critique — ceux qui comprennent ce que c’est que d’être membre régulier de la GRC —, et, si le psychologue n’était pas au fait de certaines compétences culturelles, nous avons la possibilité de remettre le rapport en question. Les psychologues n’ont pas tous vécu dans des collectivités éloignées ou urbaines. La GRC dispose d’une équipe expérimentée qui peut se prononcer et faire des recommandations plus éclairées en se fondant sur un large éventail de données probantes.
Nous en sommes satisfaits jusqu’à présent, mais, comme vous l’avez signalé, nous avons adopté un nouvel outil. Nous surveillerons de près les gens qui vont entrer à l’École nationale de formation de la Division Dépôt. Nous sommes impatients de revenir ici une fois que nous aurons des résultats. Jusqu’à présent, les résultats ont été très positifs. L’outil a grandement aidé les candidats à mieux se connaître et leur a permis de faire un examen de conscience en se posant des questions comme : « Ai-je ce qu’il faut? Est-ce la façon dont je souhaite servir au mieux ma communauté? » Dans bon nombre de cas, ils ont vécu une expérience d’apprentissage merveilleuse qui leur a permis de savoir à quoi s’attendre tout au long du processus. Mais, oui, il est un peu tôt pour parler d’indicateurs importants.
La sénatrice R. Patterson : C’est merveilleux que vous envisagiez d’emprunter cette voie. Vous avez des agents qui ont servi plus longtemps. Utilisez-vous un type d’outil équivalent pour aller de l’avant? Cela nous ramène aux commentaires du sénateur Yussuff selon lesquels les nouvelles sont mauvaises en ce qui concerne les services policiers aux États-Unis. Nous reconnaissons que c’est ce que les médias rapportent. De nombreux agents veulent servir leurs communautés de manière sécuritaire et respectueuse. Du côté de la GRC, utilisez-vous d’autres outils pour évaluer les personnes qui sont déjà dans le système? Procédez-vous à des évaluations périodiques? Les utilisez-vous dans le cadre des processus disciplinaires pour éviter que les membres se disent « Je peux répondre ce que je veux durant un examen et agir comme bon me semble ensuite »?
M. Blackadar : C’est une question très intéressante et très percutante en ce qui concerne certains changements que nous avons apportés au sein de la GRC.
En tant que membre régulier de la GRC, je passe un examen médical tous les trois ans. Avant d’accomplir certains devoirs, nous devons également subir une évaluation psychologique. Nous devons passer, y compris moi, un examen médical pour évaluer notre aptitude au travail. En tant que commandant, j’ai dû, après mon retour du Nunavut — il y a eu un peu de retard — rencontrer un psychologue à Ottawa durant quelques heures et subir un certain nombre d’évaluations. Comme l’a mentionné Mme Clarkin, c’est très révélateur, et on en apprend beaucoup sur soi durant l’évaluation.
Aussi, après tout incident critique, nous faisons un débreffage avec nos membres. Nous avons parfois recours aux services de télésanté pour ce faire. J’ai vécu un incident au Nunavut, durant le week-end, et nous avons dû en aviser le psychologue; il fallait le faire non seulement pour l’employé, le membre régulier, mais également pour la famille de celui-ci. Nous y allons plus en profondeur. Nous nous sommes rendu compte que, lorsque nous mutons nos employés un peu partout au pays, nous ne mutons pas seulement ce membre régulier, mais toute une famille. La famille entière doit être apte à vivre dans le Nord; je ne dirais pas apte au travail, mais apte à vivre cette vie.
Malheureusement, je ne sais rien au sujet de l’information qui est recueillie en conséquence, mais ce volet de nos services de santé est complètement séparé des opérations. Je peux recevoir un rapport d’un agent des services de santé qui me dira : « Cet employé a des limites et des restrictions. » On me demandera ensuite si je peux prendre des mesures pour répondre aux besoins de cet employé, mais j’ignore ce que le problème peut être. Le processus est solide, et il s’applique du début jusqu’à la fin aux membres de la GRC.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : J’ai assisté il y a quelques semaines au dépôt du rapport sur la tuerie de Portapique. Dans ce rapport, il y a un élément qui est important, c’est le déploiement des policiers de la GRC dans le cadre du travail de police municipale ou provinciale. On sait que la GRC est présente dans beaucoup de provinces.
La courte période du déploiement de certains policiers fait en sorte que lorsque des événements comme ceux de Portapique se produisent, leur connaissance du territoire est minimale. Lors d’une opération policière pour rechercher le criminel, cela est une lacune importante. Est-ce que vous allez entreprendre une réflexion à ce sujet, pour vous assurer que lorsque les policiers vont travailler sur un territoire qu’ils ne connaissent pas — quelqu’un de Montréal qui s’en va à Portapique, il ne connaît pas le territoire —, ils ont une bonne formation géographique et des mandats de travail qui ne soient pas courts au point où le taux de roulement serait trop élevé? Est-ce que la GRC a réfléchi à une stratégie solide pour faire en sorte que la population se sente mieux protégée?
[Traduction]
Mme Huggins : Je vais commencer, puis céder la parole au commandant afin qu’il fasse quelques commentaires.
La durée des affectations varie, dans l’ensemble du pays. Au minimum, nos employés sont généralement en poste durant cinq ans. Selon notre processus, les nouveaux employés sont soutenus au moyen du Programme de formation pratique. Ils ont la possibilité non seulement d’apprendre le métier proprement dit, mais aussi d’en apprendre sur le territoire qu’ils desservent. Durant cette période de cinq ans, nous pouvons nous attendre à ce que nos membres connaissent bien la région qu’ils desservent.
Monsieur Blackadar, aviez-vous quelque chose à ajouter?
M. Blackadar : C’est au Nunavut que nous faisons face à certaines de nos plus grandes difficultés liées aux affectations. Nous avons au Nunavut des affectations de deux et de trois ans. Dans certaines collectivités plus petites, à l’extérieur d’Iqaluit, les affectations ne durent que deux ans. C’est là un reproche que nous font les membres du public, nos partenaires du gouvernement du Nunavut, les organisations inuites et les gens que nous servons. Cependant, cela ne veut pas dire que les affectations ne peuvent pas être prolongées. Un assez bon nombre de nos agents de police passent quelques années dans une collectivité et prolongent leur affectation pour y rester une troisième année, ou vont dans une autre collectivité pour deux ans. Pour faire suite à la question précédente, nous réévaluons la santé psychologique et physique de nos membres pour nous assurer qu’ils sont aptes au travail dans le Nord.
Par ailleurs, au Nunavut, nous avons accès au profil de toutes les collectivités que nous desservons. Nous avons des cartes, dans nos détachements, qui indiquent l’emplacement et le nombre de maisons. De nombreuses collectivités du Nunavut, comme Mme Huggins l’a mentionné, n’ont pas de noms de rue, seulement des numéros de maison. Je dois toujours me battre avec Postes Canada quand j’y fais livrer un colis. On ne semble jamais pouvoir confirmer mon adresse, parce que les gens ne reconnaissent pas l’adresse postale. Au Nunavut, nos adresses sont toutes des cases postales. Par exemple, j’ai vécu à la maison 5208, et tout le monde sait exactement où se trouve cette maison. En général, nous disposons d’un solide système de gestion des dossiers où nous pouvons faire une recherche très rapide grâce à notre Station de transmissions opérationnelles pour savoir qui vit dans une maison en particulier et quel est l’historique de cette habitation.
Certains de nos agents de police travaillent sur le territoire depuis 10 ans ou peut-être même plus. À tous les endroits que nous desservons dans le pays, certains de nos agents de police sont la pierre angulaire de la collectivité, du territoire, et ils ont tendance à encadrer les agents de police débutants qui arrivent.
Nous avons encore des défis à relever, comme le rapport de la Commission des pertes massives l’a démontré. Nous pouvons espérer relever certains de ces défis, mais je crois que les services de police sont en constante évolution. Nous ne pouvons pas toujours être préparés à 100 % à un événement comme celui de Portapique. Tout peut arriver, que vous soyez à Ottawa, à Toronto, à Montréal ou dans une collectivité rurale du Canada.
Le président : Nous arrivons à la fin de nos questions. Je ne vois aucun sénateur lever la main, c’est donc le moment de vous remercier tous d’être venus aujourd’hui et d’avoir donné des réponses de grande qualité à des questions très pointues. Il semble que vous faites un excellent travail. Nous profitons de l’occasion pour vous en remercier. C’est on ne peut plus important. Nous tenons à remercier les policiers de première ligne du travail qu’ils font. Nous savons tous qu’un certain nombre de situations tragiques ont touché des agents et leurs familles dans tout le pays au cours des derniers mois et, bien entendu, des dernières années. À cet égard, nous présentons, au nom de notre comité et du Sénat, nos sincères condoléances pour les pertes que vous avez subies et tenons à vous dire que nous vous soutenons à toutes les étapes de votre travail. Merci beaucoup d’être venus ici aujourd’hui. Nous en sommes, une fois de plus, très reconnaissants.
Chers collègues, nous allons procéder à l’examen du rapport en vue de l’étude préalable de la section 24 de la partie 4 du projet de loi C-47, la Loi d’exécution du budget. Y a-t-il des objections à ce que nous poursuivions la séance à huis clos pour en discuter? Je vois que non.
(La séance se poursuit à huis clos.)