LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DE LA SÉCURITÉ NATIONALE, DE LA DÉFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le mercredi 1er novembre 2023
Le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale, de la défense et des anciens combattants se réunit aujourd’hui, à 11 h 30 (HE), avec vidéoconférence, pour poursuivre l’étude du projet de loi C-21, Loi modifiant certaines lois et d’autres textes en conséquence (armes à feu).
Le sénateur Tony Dean (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Bienvenue à cette séance du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale, de la défense et des anciens combattants. Je m’appelle Tony Dean. Je représente l’Ontario et je suis président du comité. Je suis accompagné aujourd’hui d’autres membres du comité, que je vais inviter à se présenter, en commençant par la sénatrice Dasko.
La sénatrice Dasko : Sénatrice Donna Dasko. Je représente l’Ontario.
Le sénateur Oh : Sénateur Oh, de l’Ontario.
La sénatrice Pate : Kim Pate. J’habite ici, sur le territoire non cédé du peuple algonquin Anishinaabe. Soyez les bienvenus.
Le sénateur Kutcher : Stan Kutcher, de la Nouvelle-Écosse.
Le sénateur Cardozo : Andrew Cardozo, de l’Ontario.
La sénatrice R. Patterson : Rebecca Patterson, de l’Ontario.
La sénatrice M. Deacon : Marty Deacon, de l’Ontario.
Le président : Merci. À ma gauche se trouve la greffière du comité, Ericka Dupont.
J’informe ceux qui regardent la séance que nous poursuivons l’étude du projet de loi C-21, Loi modifiant certaines lois et d’autres textes en conséquence (armes à feu).
D’abord, je tiens à préciser qu’il sera question de sujets liés à la violence armée, ce qui pourrait être troublant tant pour certaines personnes dans la salle que pour d’autres qui nous regardent et nous écoutent à la maison. Si quelqu’un a besoin de soutien, des services sont offerts en tout temps, sans frais, par l’intermédiaire d’Espace mieux-être Canada, au 1-866-585-0445. Je rappelle aux sénateurs et aux employés du Parlement que le Programme d’aide aux employés et à la famille du Sénat est à leur disposition et qu’il offre des services de counselling à court terme pour les problèmes personnels ou liés au travail ainsi que des services de counselling en situation de crise.
Nous recevons aujourd’hui deux groupes de témoins issus d’organisations de femmes et de lutte contre la violence. Nous avons le plaisir d’accueillir le premier groupe, soit Suzanne Zaccour, directrice, Affaires juridiques, de l’Association nationale Femmes et Droit, qui se joint à nous par vidéoconférence; Heidi Rathjen, coordonnatrice, et Nathalie Provost, porte-parole, toutes les deux de PolySeSouvient, qui sont parmi nous; de même que Boufeldja Benabdallah, porte-parole de la mosquée de Québec, au Centre culturel islamique de Québec.
Merci à vous tous d’être des nôtres. Nous vous invitons à faire votre déclaration liminaire, après quoi les membres du comité vous poseront des questions. Je vous rappelle que vous avez chacun cinq minutes pour faire votre déclaration. Nous commençons par Me Zaccour. Maître Zaccour, vous pouvez commencer dès que vous serez prête.
Me Suzanne Zaccour, directrice, Affaires juridiques, Association nationale Femmes et Droit : Merci. Je représente l’Association nationale Femmes et Droit et je suis ici aujourd’hui pour parler au nom des victimes qui sont menacées, intimidées, contrôlées, terrorisées, voire assassinées à l’aide d’une arme à feu.
Je suis ici aujourd’hui au nom des femmes qui pourront accéder à une certaine sécurité grâce au projet de loi C-21. Depuis un demi-siècle, nous demandons des lois qui protègent davantage les droits des femmes. Nous avons étudié le projet de loi avec attention, fourni de la rétroaction au comité de la Chambre des communes et collaboré avec d’autres organisations de défense des droits des femmes. Nous remercions donc les honorables membres du comité de nous donner l’occasion de leur exprimer notre point de vue.
Grâce à ce projet de loi, les contrôleurs des armes à feu devront rapidement révoquer le permis dans des cas de violence familiale, et les particuliers qui sont visés par une ordonnance de protection seront immédiatement déclarés inadmissibles au permis d’armes à feu pour toute la durée de l’ordonnance. Nous sommes heureuses de signaler que le comité de la Chambre des communes a adopté la quasi-totalité de toutes les propositions fournies dans notre mémoire pour améliorer les dispositions du projet de loi en matière de violence familiale. Pourtant, certains commentateurs veulent vous faire croire que ce projet de loi ne protège pas les femmes parce qu’il met l’accent sur les « honnêtes citoyens ».
On entend beaucoup dire qu’une personne dont on a vérifié les antécédents n’est pas une menace, qu’une personne qui possède légalement une arme à feu n’est pas violente, que le problème vient des gangs, de la violence dans les rues et des contrôles laxistes à la frontière. Ce discours est dangereux. La violence familiale n’a rien d’exceptionnel. Malheureusement, « Je suis violent » n’est pas écrit sur le front des agresseurs. L’idée que des personnes qui semblent honnêtes, dont les antécédents ne posent pas de problème ou qui s’adonnent à certains types de loisirs ne peuvent pas être des agresseurs est l’un des mythes entourant la violence familiale.
J’espère que les honorables sénateurs ne se laisseront pas influencer par les mythes sexistes et qu’ils baseront plutôt leur analyse sur les propos des spécialistes en matière de violence envers les femmes.
Plus de 30 organisations féministes avalisent nos mémoires ou notre coalition #FemmesContreLesViolencesArmées. Nous croyons en ce projet de loi et nous souhaitons son adoption. Nous craignons toutefois qu’il succombe à un discours trompeur qui tente de minimiser les préoccupations des femmes en matière de sécurité en laissant entendre qu’elles sont toutes aussi importantes, voire moins importantes, que la capacité de participer à une reconstitution historique avec une véritable arme à feu, que la capacité de modifier une arme de collection, que la perte de popularité de certains loisirs ou encore que la perte de profits des clubs de tir.
Devant la Chambre, nous avons appuyé la délivrance d’un permis conditionnel à des fins de substances à certaines personnes, même si elles ont pris part à un acte de violence familiale. La subsistance là où il y a la faim et la sécurité là où il y a de la violence sont deux préoccupations importantes. On ne peut toutefois pas dire la même chose des conséquences supposément dramatiques dont vous avez entendu parler. Les loisirs et le divertissement sont importants, mais ils ne peuvent pas l’emporter sur la sécurité.
Jusqu’à maintenant, les conversations sur le projet de loi n’ont pas assez porté sur les femmes. Les groupes de femmes étaient sous-représentés au sein des témoins convoqués à la Chambre des communes. Heureusement, ce comité a jugé bon d’inviter davantage de spécialistes pour parler de la violence envers les femmes, et certains honorables sénateurs ont choisi d’attirer l’attention des témoins sur cette question quand ils en faisaient fi.
C’est votre travail d’entendre tous les points de vue, mais vous n’avez pas à tous leur accorder le même poids. L’enjeu est de taille pour la population que je représente ici aujourd’hui; ses intérêts sont importants et légitimes, et il est temps d’agir. Je vous prie donc de ne pas laisser les femmes devenir une considération secondaire. Merci.
Le président : Merci beaucoup, maître Zaccour.
Nous allons maintenant entendre les représentantes de PolySeSouvient, et je crois comprendre que c’est Mme Provost qui fera la déclaration liminaire. Je vous prie de commencer dès que vous êtes prête.
[Français]
Nathalie Provost, porte-parole, PolySeSouvient : Bonjour. Je vous remercie, monsieur le président, ainsi que tous les membres du comité, de nous inviter à témoigner devant vous aujourd’hui.
[Traduction]
En raison des contraintes de temps, je vais m’exprimer en français et répéter le tout en anglais après, à l’extérieur de la salle.
Depuis la fusillade à l’École polytechnique le 16 décembre 1989, où 14 femmes ont été assassinées et 14 autres personnes blessées, je me suis rendue un nombre incalculable de fois à Ottawa pour rencontrer des ministres, des députés, des sénateurs et des fonctionnaires, ainsi que pour témoigner devant des comités comme celui d’aujourd’hui. Je l’ai fait à titre de porte-parole de PolySeSouvient, un groupe bénévole qui milite pour un meilleur contrôle des armes et qui a été fondé par des témoins, des survivants et des familles de victimes du féminicide commis à mon école. J’ai reçu quatre balles ce soir-là, ce qui fait de moi une survivante de cette fusillade.
Je suis persuadée que tous les sénateurs dans cette salle partagent nos objectifs. Nous voulons prévenir les homicides, les suicides, les menaces, les féminicides et les blessures dus à des armes à feu. Nous voulons plus particulièrement veiller à ce que personne d’autre n’ait à vivre le meurtre violent de sa mère, de son père, de sa sœur, de son frère, de son fils, de sa fille, de son mari, de son épouse, de son camarade de classe ou de son collègue. Il s’est écoulé 34 ans depuis que mon sang s’est mêlé à celui de mes camarades de classe agonisant à mes côtés et, au cours de cette période, il y a eu bien d’autres fusillades.
À Moncton, en 2014, trois agents de la GRC ont été assassinés et deux, blessés; à Penticton, en Colombie-Britannique, en 2015, quatre personnes ont été assassinées; à Fredericton, en 2018, deux policiers et deux civils ont été assassinés; à Vaughan, en Ontario, en 2022, cinq personnes ont été assassinées et une autre a été blessée dans une copropriété. Ce ne sont là que quelques exemples qui s’ajoutent à celui de la mosquée de Québec et à ceux mentionnés par les témoins précédents relativement à la fusillade de Danforth, au massacre de Portapique et à la fusillade au Collège Dawson. En fait, rien n’a concrètement changé quant à l’accès légal aux armes et aux accessoires conçus pour maximiser le nombre de victimes, ce qui devrait être interdit. Rien n’a vraiment changé.
Cette triste réalité laisse présager d’autres fusillades, à moins que l’on agisse. Nous vous exhortons aujourd’hui d’adopter le projet de loi C-21 sans amendement et le plus rapidement possible. C’est un bon projet de loi. Il n’est pas parfait ni complet, mais il gèle la vente des armes de poing et contribue à la protection des femmes contre les meurtres liés à la violence familiale. Il sauvera des vies.
Toutefois, nous vous exhortons à faire valoir au gouvernement d’adopter rapidement de nouveaux règlements pour interdire les armes d’assaut existantes, à savoir les centaines de modèles qui ont été arbitrairement exemptés des interdictions de 2020. Troisièmement, nous vous exhortons à faire valoir le renforcement de la réglementation sur les chargeurs afin d’éliminer toutes les échappatoires et les exemptions qui permettent plus de cinq cartouches.
Finalement, pendant que vous œuvrez à l’une de vos plus grandes responsabilités, soit assurer la sécurité des citoyens que vous êtes nommés pour représenter, nous espérons que vous tiendrez compte de ceci : d’abord, que d’innombrables sondages montrent que la majorité des Canadiens appuient les principales mesures du projet de loi C-21; ensuite, que la Commission sur les pertes massives en Nouvelle-Écosse a recommandé l’interdiction de toutes les armes de poing semi-automatiques qui tirent des munitions à percussion centrale et qui sont conçues pour accepter des chargeurs amovibles d’une capacité de plus de cinq cartouches, pas seulement celles qui pourraient venir, et de limiter la capacité des chargeurs à cinq cartouches pour toutes les armes à feu; enfin, que les affirmations et les statistiques des groupes proarmes devraient toujours être validées. Ils déforment les faits, ce qui vient fausser le débat, et leur désinformation a permis de contrer une interdiction renouvelable à perpétuité des armes d’assaut dans le projet de loi. Je vous en prie, fouillez la question un peu plus à fond. La plupart du temps, vous constaterez que les faits sont fort différents.
Voyez votre travail aujourd’hui et celui que vous ferez dans les semaines à venir comme rien de moins qu’une tentative de sauver des vies. Je vous en prie, pensez à Angie Sweeney et à ses trois jeunes enfants, âgés de six, sept et douze ans, qui sont tous morts par balle la semaine dernière à Sault Ste. Marie dans un cas de violence entre partenaires intimes. Voilà entre autres ce que le projet de loi C-21 cherche à prévenir. Merci.
Le président : Merci, madame Provost. Le troisième témoin de ce groupe aujourd’hui est Boufeldja Benabdallah, cofondateur et porte-parole du Centre culturel islamique de Québec.
[Français]
Boufeldja Benabdallah, cofondateur et porte-parole, Centre culturel islamique de Québec : Merci, monsieur le président.
Mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs et tous les invités, c’est toujours avec fébrilité et avec un peu d’amertume, ou plutôt de crainte, que nous nous sommes présentés une dizaine de fois devant des comités parlementaires pour faire valoir nos arguments afin de vous convaincre tous que ces armes qui circulent dans la population devraient être bannies pour toujours, et ce, afin que notre société puisse vivre dans la sécurité et la joie. C’est la vie de nos enfants qui est en jeu. Nous voyons un peu partout des balles qui fusent et des tirs soi-disant ratés qui touchent des enfants d’âge scolaire.
Je suis un enfant de la guerre. Je suis Algérien d’origine, et quand j’étais jeune, j’ai vu des militaires qui entraient chez nous et frappaient nos parents. Les militaires n’entraient pas avec de petits bâtons. Ils entraient avec des armes. J’ai vu ce que représente une arme entre les mains d’un militaire. Il a cette force de titan, parce qu’il se sent absolument fort avec une arme dans les mains. C’est exactement ce que souhaitent les lobbyistes des armes, des armes de guerre et des armes de poing. Quand des gens prennent une arme, ils se sentent forts. Nous leur disons : « Ne vous sentez pas forts, parce que ces armes enlèvent des vies. »
L’étude de ce projet de loi suscite beaucoup l’attention de notre communauté. Nous souhaitons que ce projet de loi soit adopté.
Je suis aussi commissaire à la Ville de Québec, à la Commission consultative pour une ville inclusive, et je discute avec les gens. Je leur dis que nous, le gouvernement et les sénateurs sont en train d’examiner un projet de loi. Tous les gens sont contents de cette démarche. Il n’y a personne qui dit : « Laissons-les faire. » Cela fera bientôt sept ans qu’a eu lieu la tragédie à la mosquée de Québec, mais les plaies ne sont pas encore fermées. Aujourd’hui, c’est un cri du cœur positif que je vous lance; ce n’est pas une lamentation.
Je suis content de vous dire, monsieur le président, que nous sommes encore une fois devant vous, et que nous sommes contents de voir que le projet de loi C-21 contient des dispositions visant le gel des armes de poing. C’est déjà un pas. Nous souhaitons que ces armes soient bannies, mais nous pouvons accepter le contenu du projet de loi. Nous sommes contents de cette avancée. Nous souhaitons que ce projet de loi empêche la prolifération des armes.
Ne décevons pas cette société qui attend cette loi. Aujourd’hui, je ne vais pas parler d’un point de vue technique. Mes amis ici peuvent le faire. Je lance un cri du cœur. Ne décevons pas les citoyens de notre société qui attendent cette loi afin de sentir qu’ils vivent dans un pays unique, un pays où la sécurité existe, où les enfants, les adultes, les travailleurs peuvent se promener sans devoir craindre pour leur vie.
Ne renvoyez pas le projet de loi C-21 à la Chambre des communes pour tenir encore des discussions. S’il vous plaît, adoptez-le. Vous n’avez qu’un petit pas à faire.
Nous savons que ce projet de loi n’inclut pas les armes d’assaut. Nous avons milité en faveur du bannissement des armes d’assaut, mais nous avons aussi appris qu’il y aura des règlements qui pourront baliser l’utilisation de ces armes. Nous ne sommes pas contre ces règlements. Nous attendons que le ministre puisse passer à l’action pour mettre en place des règlements qui resserreront la réglementation des armes d’assaut comme il se doit.
En conclusion, monsieur le président, il s’agit aujourd’hui de lancer un cri du cœur, et non pas de discuter des aspects techniques ou des statistiques, car je pense que vous en avez déjà des tonnes.
Tout ce que je voudrais vous dire, mesdames les sénatrices et messieurs les sénateurs, c’est que vous incarnez notre espoir. Vous incarnez l’espoir de la population, pour plusieurs millions de Canadiennes et de Canadiens. Vous savez, il faut être aussi philosophe dans la vie; il faut être sage. Nous faisons appel à votre sagesse, à votre reconnaissance, car nous savons vous avez ce pays à cœur. Je vous dirais même que vous êtes en train d’écrire une belle page de l’histoire sur le plan de la sécurité au Canada en adoptant cette loi. Je le souhaite. Les générations à venir se souviendront toujours de vous et vous remercieront. Toutefois, je suis un peu égoïste et je veux être le premier à vous remercier. Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Le président : Merci beaucoup, monsieur Benabdallah.
Chers collègues, nous allons faire notre possible pour que tous les membres puissent poser une question. Nous allons accorder quatre minutes par question, ce qui comprend la réponse, et je vais montrer ce carton pour indiquer qu’il vous reste 30 secondes. Je vous demande de garder vos questions courtes et de nommer le témoin à qui vous vous adressez.
Le sénateur Kutcher : Merci d’être des nôtres et de partager avec nous ces histoires bouleversantes. Ce n’est pas facile.
J’ai deux questions, une pour PolySeSouvient et une autre pour Me Zaccour, et je vais les poser une à la suite de l’autre. Maître Zaccour, si nous n’avons pas le temps de vous entendre, une réponse écrite serait appréciée.
Voici ma première question : un autre témoin nous a dit qu’une désinformation imposante est diffusée sur la violence armée et la possession d’armes à feu, un discours qui semble en grande partie calqué sur celui en vigueur aux États-Unis. J’ai récemment reçu de nombreuses lettres et beaucoup de courriels m’exhortant à regarder la vidéo de la Coalition canadienne pour les droits des armes à feu, ce que j’ai fait, et je n’ai pas pu m’empêcher de remarquer les images qui évoquent le mythe de la frontière américaine. Avez-vous vu cette vidéo? Si oui, qu’en pensez-vous?
Maître Zaccour, merci d’attirer notre attention sur le raisonnement fallacieux derrière les fausses équivalences morales qui émaillent le discours sur ce projet de loi. Une étude vient d’être publiée dans la revue Epidemiology où l’on confirme une fois de plus la validité de vos remarques :
Nous constatons qu’il y a des preuves solides et soutenues qui confirment l’hypothèse que les politiques restrictives en matière d’autorisation et d’achat d’armes à feu adoptées par les États réduisent le nombre total de décès, ainsi que d’homicides et de suicides commis au moyen d’une arme à feu.
Pourriez-vous parler de la désinformation que vous avez vue pour contrer cet argument, s’il vous plaît?
Heidi Rathjen, coordonnatrice, PolySeSouvient : Merci, sénateur. J’ai vu la vidéo, et elle comporte, je crois, trois éléments majeurs pour ce qui est de la désinformation ou de la divergence d’opinions.
Le représentant de la Coalition canadienne pour les droits des armes à feu affirme, par exemple, qu’un gel de la vente des armes de poing vient enlever toute valeur à celles en circulation parce que, à son décès, un propriétaire ne peut pas les léguer à ses enfants, ce qui vient donc éliminer la valeur monétaire de toutes ces armes. Nous sommes d’avis que la valeur accordée aux armes de poing par les personnes qui les achètent ne réside pas dans leur valeur de revente, mais bien dans leur utilisation. Pour le constater, il suffit de regarder le nombre d’armes de poing qui ont été achetées dans les trois mois qui ont suivi l’annonce du gel. Environ 200 000 armes de poing ont été vendues en 3 mois, malgré l’entrée en vigueur d’un gel. Les gens n’auraient pas acheté ces armes s’ils étaient d’avis qu’elles perdraient toute valeur avec le gel de la vente.
Un autre élément portait sur l’effet qu’un gel pourrait avoir sur le marché légal sans pour autant avoir la moindre incidence sur les crimes et les homicides commis avec une arme de poing. C’est tout simplement faux. On a vu des propriétaires légitimes d’armes de poing s’en servir pour tirer sur des gens et les abattre, y compris dans le cadre de fusillades, et les membres de clubs de tir n’y font pas exception. Alexandre Bissonnette, auteur de la fusillade de la mosquée, était membre d’un club de tir et s’est servi d’un Glock dûment enregistré ainsi que de cinq chargeurs de dix cartouches pour commettre son crime. Il y a bien d’autres exemples, y compris le tireur de Dawson et celui de l’Université Concordia.
Le troisième élément qui revient dans toutes ces vidéos reprend des propos de représentants de la police sur les sources des armes à feu utilisées pour commettre des crimes. Le lobby des armes à feu affirme que 99 % ou 90 % — c’est toujours un pourcentage élevé — des armes à feu utilisées pour commettre des crimes sont d’origine illégale et introduites au Canada en contrebande à partir des États-Unis. C’est tout simplement faux. Ce que bon nombre de ces chefs de police disent, c’est que beaucoup des armes utilisées pour commettre des crimes sont volées, donc qu’elles sont obtenues de façon illégale. Par exemple, dans les Prairies, la majorité des armes utilisées pour commettre des crimes sont des armes d’épaule, et la majorité est volée aux propriétaires légitimes d’armes à feu. Nous n’avons pas de...
Le président : Je suis désolé de vous interrompre, madame Rathjen. Nous devons passer à une autre question. Plusieurs sénateurs attendent leur tour, et nous avons dépassé le temps alloué.
La sénatrice M. Deacon : J’ai une question qui s’adresse à Me Zaccour, mais si vous voulez finir votre dernière phrase en réponse à la question du sénateur Kutcher, c’est possible, madame Rathjen. Souhaitez-vous le faire?
Mme Rathjen : Bien sûr. Merci. Le lobby des armes à feu déclare souvent que de 90 % ou 86 % des armes utilisées pour commettre des crimes sont passées en contrebande des États-Unis. C’est vrai pour les armes de poing à Toronto, mais pas pour l’ensemble du pays. Nous n’avons pas de données détaillées pour l’ensemble du Canada, mais nous disposons des chiffres de la GRC. Ses représentants ont répondu à une question du genre devant le comité de la Chambre des communes et ont déclaré qu’environ 70 % des armes utilisées pour commettre des crimes sont d’origine nationale et que, dans le cas des armes de poing, c’est 60 %.
La sénatrice M. Deacon : Merci pour ces précisions.
Bienvenue à tous. Tout le monde autour de la table comprend très bien votre lassitude à cet égard et apprécie grandement votre travail soutenu pour tenter de nous mener à bon port. Nous vous remercions tous d’être ici aujourd’hui.
Maître Zaccour, dans votre document, dans le mémoire que vous avez déposé, vous mentionnez que vous n’êtes pas d’accord avec les lois « drapeau rouge », parce que, selon vous, les armes deviennent la responsabilité de la victime. Toutefois, dans votre document, vous dites également que le projet de loi doit être adopté dès que possible. Ma question est la suivante : ai-je raison de croire que vous ne voulez pas le retrait ni la modification de dispositions de type drapeau rouge dans ce projet de loi si cela signifie qu’on en repousse l’adoption, puisque nous devrions le renvoyer à la Chambre? Allons-y avec cette question d’abord, puis je reviendrai à vous ensuite.
Me Zaccour : Merci pour votre question. C’est exact. Nous estimons que, pour la plupart des femmes, il sera beaucoup plus facile d’obtenir une ordonnance de protection entraînant la révocation du permis plutôt que de s’adresser à un tribunal pour se prévaloir de cette mesure ex parte appelée « drapeau rouge », ce qui serait une mesure exceptionnelle et difficile à mettre en œuvre. Toutefois, après 16 mois d’étude et vu la façon dont elle s’est déroulée à la Chambre des communes, nous recommandons l’adoption du projet de loi sans amendement même si nous estimons que cette mesure sera moins efficace que le régime de type drapeau jaune, un changement que nous avons proposé à la Chambre des communes.
La sénatrice M. Deacon : Merci. Partant de là, vous avez aussi dit qu’un époux violent peut faire une nouvelle demande de permis peu de temps après l’avoir perdu et, en somme, se venger contre sa partenaire ou son ancienne partenaire. Par exemple, une personne pourrait ne plus être admissible à un permis pendant un mois en raison d’une ordonnance de protection de 30 jours, puis faire une nouvelle demande de permis le 31e jour. S’agit-il d’une référence au délai de 30 jours prévu dans la loi « drapeau rouge » qui est proposée? Comment fonctionne actuellement le système si la police ou le contrôleur des armes à feu fait la demande? Quels sont les délais?
Me Zaccour : La remarque à laquelle vous faites référence portait plutôt sur le régime de type drapeau jaune. L’inadmissibilité correspond à la durée de l’ordre de protection. Dans certaines provinces, il est courant d’avoir des ordres de protection de 30 jours, ce qui signifie qu’après leur expiration, la personne peut faire une nouvelle demande de permis d’armes à feu. Nous espérons que les contrôleurs des armes à feu en tiendront compte et prendront cela au sérieux de sorte à ne pas forcément approuver une nouvelle demande si la personne est dangereuse. C’est le problème auquel nous faisons allusion.
La sénatrice M. Deacon : Je vous remercie.
Le sénateur Oh : Je remercie les témoins d’être avec nous. Je veux, tout d’abord, vous dire que je vous suis reconnaissant de venir témoigner et aussi vous exprimer ma compassion pour les terribles événements que vous avez vécus. J’ai été très honoré de me rendre à la mosquée l’année dernière avec le Comité sénatorial permanent des droits de la personne, et je tiens à remercier [difficultés techniques] de m’avoir fait visiter les lieux et de m’avoir raconté ce qui s’est passé dans la mosquée.
Ma question est la suivante : nous ne sommes sans doute pas d’accord sur les effets du projet de loi C-21, mais j’aimerais savoir ce que vous pensez de ce qui est arrivé à l’individu qui a assassiné six personnes innocentes et en a blessé gravement cinq autres dans la ville de Québec. À l’origine, cet individu avait été condamné à une peine d’emprisonnement à vie, sans possibilité de libération conditionnelle avant 40 ans, pour son horrible attaque. Cependant, la Cour suprême a injustement statué que l’individu devait être admissible à une libération conditionnelle. Elle a donc annulé cette peine, qui était déjà plutôt clémente compte tenu des gestes qu’il avait posés. À mon avis, cette décision envoie vraiment le mauvais message quant au sérieux avec lequel notre société devrait prendre un crime de cette nature, qui concerne non seulement le meurtre de six personnes, mais aussi une attaque contre un lieu de culte. J’aimerais demander à nos témoins dans quelle mesure cette décision les inquiète et montre clairement, à mon avis, à quel point notre système judiciaire est défaillant.
Le projet de loi C-21 ne mettra pas fin à la contrebande d’armes illégales à la frontière. Nous devons faire quelque chose, car autrement les mesures qu’il contient ne suffiront pas. Pouvez-vous nous dire ce que vous en pensez?
[Français]
M. Benabdallah : Sénateur, merci pour votre question qui reprend le vaste débat que nous avons au sein de notre communauté et de la population canadienne.
Il est vrai que le Canada donne la chance au coureur, dans le sens où toute personne peut être réhabilitée et recommencer sa vie.
Nous avons dit qu’une justice doit être une justice uniforme et qu’elle doit aussi être exemplaire. Lorsque M. Bissonnette a été condamné à vie sans possible libération pendant au moins 40 ans, comme l’avait décidé le premier juge, on s’est dit qu’au moins, c’était équitable. Cependant, tout a été renversé par la Cour suprême; nous n’étions pas contents — il faut vous le dire —, et pas uniquement pour notre communauté. Nous n’étions pas contents, parce que cela envoie un autre son de cloche à d’autres qui risqueraient de poser des gestes et qui se diraient que la justice se préoccupe de la réhabilitation des gens.
Nous avons été très déçus qu’aucun mot dans ce jugement ne soit adressé aux familles qui ont été touchées, aux enfants, aux 17 orphelins et aux blessés. Il y a encore un blessé en fauteuil roulant; il ne sent pas son corps du sternum jusqu’en bas et un seul de ses bras fonctionne. En raison de tout cela, nous souhaitons qu’en mettant de côté toutes ces armes, il n’y aura plus de drame qui touchera encore la société. Nous souhaitons que ces armes sortent du pays et que la population puisse être tranquille. Nous ne souhaitons pas que cet exemple continue dans la durée.
[Traduction]
Le président : Je vous remercie beaucoup, monsieur Benabdallah. Le temps est malheureusement écoulé. Nous pourrons, espérons-le, y revenir plus tard.
La sénatrice Anderson : Je remercie les témoins d’être venus témoigner. Ma question s’adresse à Me Zaccour.
Je constate que votre association est classée comme une association nationale. En consultant votre site Internet, j’ai remarqué qu’il n’y a aucune représentation directe des trois territoires, les Territoires du Nord-Ouest, le Nunavut et le Yukon. J’ai remarqué aussi que la lettre que vous avez soumise au comité en octobre a reçu l’appui de 17 organisations, dont aucune n’est située dans l’un des trois territoires.
Étant donné l’absence d’une représentation claire des trois territoires, pouvez-vous nous dire comment vos conclusions représentent les réalités de ces trois territoires et en tiennent compte? Je vous remercie.
Me Zaccour : Je vous remercie de votre question, sénatrice.
Nous ne représentons pas le point de vue des territoires; ils sont, comme vous l’avez dit, sous-représentés au sein de notre organisation. Nous avons travaillé pour établir des partenariats avec le Yukon, en particulier. Nous ne sommes pas une organisation basée sur la participation de membres. Nous collaborons avec diverses organisations d’envergure nationale ou régionale, selon les enjeux.
La sénatrice Anderson : Très bien. Je vous remercie.
Vous avez parlé des armes à feu qui sont utilisées pour les loisirs et le divertissement. Je viens de l’Arctique. Je viens de Tuktoyaktuk, dans les Territoires du Nord-Ouest. J’aimerais préciser que la chasse est un mode de vie pour nous. C’est une chasse de subsistance. Elle assure la sécurité alimentaire, elle nous permet de faire face au coût élevé de la vie et de survivre dans un environnement difficile.
Quand vous avez parlé des armes à feu qui sont utilisées pour les loisirs et le divertissement, pouvez-vous préciser votre pensée à ce sujet?
Me Zaccour : Je vous remercie de me donner l’occasion de clarifier mes propos.
Ce que j’ai dit, en fait, c’est qu’il y a deux types d’intérêt. Dans certains cas, les armes à feu sont utilisées comme moyen de subsistance, en particulier dans les collectivités autochtones. Nous avons appuyé l’exemption conditionnelle, ce qui veut dire permettre aux Autochtones, ou à d’autres personnes, de conserver leur permis de port d’arme, même dans les cas de violence conjugale, lorsqu’ils en ont besoin pour subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille. C’est une mesure que nous appuyons.
J’ai invité les sénateurs à considérer le fait qu’il s’agit de facteurs importants à prendre en compte, et à les soupeser par rapport à d’autres arguments entendus lors de témoignages précédents devant le Sénat comme la perte de rentabilité des clubs de tir, ou le fait pour des personnes d’avoir des armes de collection de grande valeur ou d’aimer participer à des reconstitutions historiques et de ne pas pouvoir les conserver ou de devoir les modifier pour pouvoir le faire.
J’invite les sénateurs à considérer la hiérarchie ou l’importance des facteurs et des besoins. Quelqu’un qui a besoin d’une arme à feu pour survivre a un besoin important. Quelqu’un qui fait face à des violences conjugales et dont la vie est en jeu a un besoin important et légitime de sécurité. Par contre, quelqu’un qui vient témoigner devant le Sénat et dit qu’il utilise des armes à feu pour se divertir, que c’est son loisir, c’est quelqu’un qui a des intérêts, certes, mais d’une importance moindre.
C’est à ce type de témoignages que je faisais référence.
La sénatrice Anderson : Nakurmiik.
Le sénateur Boehm : Je veux remercier les témoins d’être avec nous. Ma question s’adresse à Mme Provost et porte sur l’interdiction des armes de poing et ses effets sur les amateurs de tirs sportifs.
Divers groupes pour le contrôle des armes à feu, notamment PolySeSouvient, se sont dits inquiets que l’exception pour les athlètes olympiques soit utilisée comme échappatoire par des gens malveillants. Des témoins que nous avons entendus lundi ont dit que, selon eux, cela revient à opposer loisir et sécurité des collectivités.
Comment prendriez-vous en considération les préoccupations valables des tireurs sportifs — il existe de nombreux groupes et clubs dans tout le pays — par rapport aux craintes valables des victimes et des groupes de femmes?
[Français]
Mme Provost : Je vais demander à ma collègue Heidi de vous répondre, car elle a plus de détails que moi pour vous donner des précisions.
[Traduction]
Mme Rathjen : Monsieur le sénateur, 70 % des Canadiens veulent interdire toutes les armes de poing; ils veulent une interdiction totale de toutes les armes de poing. On parle d’un gel des armes de poing avec une exception pour les compétitions olympiques, ce qui inclut les entraîneurs, les athlètes, etc. pour les Jeux olympiques.
À l’heure actuelle, la plupart des propriétaires d’armes de poing sont des tireurs sur cible. C’est la raison pour laquelle ils peuvent posséder des armes de poing. Nous voulons interdire les armes de poing, ce qui aura évidemment des effets sur les sports qui utilisent ces armes. Comme on ne précise pas les armes ou les types d’armes et qu’on exige seulement dans le projet de loi qu’une fédération de tir fournisse une lettre au contrôleur des armes à feu, nous craignons que l’exception olympique ne soit exploitée par cette communauté pour permettre à des personnes qui ne sont pas de véritables athlètes olympiques de prétendre qu’elles veulent le devenir. Je souhaite bonne chance à qui veut prouver la différence entre quelqu’un qui aspire vraiment à devenir un tireur olympique et quelqu’un qui prétend vouloir le devenir. On ne peut pas faire la différence.
L’un des groupes en faveur des armes à feu, la section britanno-colombienne de l’International Practical Shooting Confederation — qui souhaitait également une exception, mais ne l’a pas obtenue de la Chambre — a écrit dans l’un de ses bulletins que si elle obtenait une telle exception, cela deviendrait la voie d’accès à la possession d’armes de poing au Canada et qu’elle pouvait alors s’attendre à une augmentation considérable du nombre de ses membres.
La crainte est que cette exception soit exploitée. C’est pourquoi nous espérons que la réglementation imposera des restrictions strictes aux personnes qui en bénéficieront.
Je pense que des témoins précédents ont dit qu’il y avait très peu d’athlètes utilisant des armes de poing aux Jeux olympiques; il y en a eu en moyenne 5 par an sur une période de 30 ans. À notre avis, cela ne vaut pas la peine de compromettre le gel des armes de poing pour maintenir ce sport particulier.
Le sénateur Boehm : Je vous remercie.
Pensez-vous que nous pourrions apprendre quelque chose des autres pays où les lois sont plus strictes, mais où on permet toujours le tir sportif?
Mme Rathjen : Je ne suis pas vraiment au courant. Je sais qu’au Royaume-Uni, il existe une poignée de permis pour les tireurs olympiques d’élite qui utilisent des armes de poing. Je ne pense pas que ce soit comparable aux risques auxquels nous expose cette exception dans le projet de loi.
Le sénateur Boehm : Je vous remercie beaucoup.
La sénatrice Dasko : Je remercie nos témoins d’être avec nous aujourd’hui. Vous avez mentionné les voix des femmes; cela a été dit plus tôt. Je suis ravie que des femmes extraordinaires aient témoigné devant notre comité jusqu’à présent, et aujourd’hui ne fait pas exception.
J’ai deux questions à poser. La première s’adresse à Mme Provost. M. Leblanc était ici la semaine dernière. Ma question porte sur l’enjeu des armes d’assaut qui sont toujours en circulation. Il a parlé de ses intentions pour s’attaquer à ce problème, notamment la création d’un conseil, etc. J’aimerais savoir ce que vous attendez de ce processus. Que voulez-vous voir dans ce processus? Qu’espérez-vous accomplir?
Deuxièmement, maître Zaccour, je me demande si vous pourriez nous donner votre avis. Lundi dernier, une décision de justice a été rendue concernant les armes d’assaut. Je me demande si vous pourriez nous donner votre analyse de l’importance de cette décision et des effets qu’elle pourrait avoir sur le projet de loi C-21. Je vous remercie.
[Français]
Mme Provost : Assez rapidement, nous avons été très heureux d’entendre le discours que M. LeBlanc a fait devant vous la semaine dernière.
Pour nous, c’était une réponse à la déception que nous avons eue en mai, c’est-à-dire de ne pas voir une définition plus forte. Notre première attente, c’est qu’on vienne compléter et renforcer la définition actuelle dans le projet de loi par voie réglementaire. Toutefois, on considère qu’il faut absolument adopter le projet de loi afin de pouvoir aller de l’avant. Pour nous, le projet de loi a beaucoup de valeur. Nous sommes contents de sentir qu’il y a une compréhension et un appui de la part du ministre dans les revendications historiques de PolySeSouvient .
Nous réclamons une définition complète qui viendra corriger les lacunes pour certaines armes. En ce moment, dans la décision de l’arrêté en conseil de 2020, une série d’armes ne sont pas reconnues alors qu’elles sont des armes de style d’assaut qui sont sur le marché en ce moment. C’est malheureux. On n’a pas complètement réglé la question.
Il y a aussi toute la question des chargeurs de haute capacité, qui est fondamentale. Comme on le disait dans notre témoignage, il y a encore trop de trous. L’impossibilité d’avoir accès à un chargeur de grande capacité pour tous les types d’armes est quelque chose de très important. Cela ne retire pas de possibilités pour les chasseurs. Ce serait donc une avancée importante.
[Traduction]
Mme Rathjen : Le ministre a exprimé l’intention de prendre un deuxième décret en conseil en guise de complément à ceux de 2020, ce dont nous sommes en faveur. Il faut bien sûr que cela se concrétise. Toutefois, ce qui est pertinent au sujet du projet de loi C-21, c’est qu’il annulera les mesures antérieures mises en œuvre sous le gouvernement Harper, qui permettent au cabinet ou au ministre d’annuler des interdictions. Ainsi, le projet de loi C-21, une fois adopté, protégera les décrets, en ce sens qu’un gouvernement à moins de faire adopter une mesure législative — donc votée par la Chambre et le Sénat — ne pourra pas, du jour au lendemain, déclassifier toutes les armes qui ont été interdites. C’est pourquoi nous soutenons le décret en conseil, qui sera renforcé par ce qui se trouvera dans le projet de loi une fois qu’il aura été adopté.
La sénatrice Dasko : Je vous remercie.
Le président : Je vous remercie.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Bienvenue à nos invités. Tout le monde autour de la table est d’accord pour dire que ce genre d’événement avec des armes à feu — ou toute autre forme de violence — est inacceptable dans notre société. Il faut l’enrayer. Depuis 1976, ce sera le neuvième projet de loi en matière de contrôle des armes à feu à être adopté par des gouvernements successifs.
Madame Provost, n’avez-vous pas décoléré depuis le mois de mai dernier en ce qui a trait au projet de loi? Je lisais l’article paru dans La Presse en mai dernier, et vous étiez très en colère contre le gouvernement. N’avez-vous pas décoléré depuis ce temps?
Mme Provost : Nous avons entendu — comme vous, puisque ça s’est passé devant vous — le ministre LeBlanc exprimer avec clarté sa volonté d’aller plus loin et d’obtenir une interdiction complète et totale des armes de style d’assaut. Dans la lettre que j’ai adressée à M. Trudeau en mai dernier, je n’ai pas dit que le projet de loi était mauvais; j’ai dit qu’il était incomplet. J’étais déçue au nom de PolySeSouvient , mais on comprend que...
Le sénateur Boisvenu : Lorsqu’on dit qu’on est « trahi » par un gouvernement, c’est un mot assez lourd. Globalement, est-ce que votre philosophie d’action, que je suis depuis des années, est de faire en sorte qu’il n’y ait plus de vente d’armes au Canada, qu’il y ait une abolition complète des armes à feu?
Mme Provost : PolySeSouvient s’est toujours battu pour l’interdiction des armes de style d’assaut. À ce que je sache, une arme de chasse n’est pas une arme d’assaut. Une arme de poing n’est pas une arme de chasse non plus.
Le sénateur Boisvenu : Si on interdisait toutes les armes légales répertoriées actuellement, croyez-vous que le projet de loi aurait un impact sur les armes illégales qui entrent au Canada et qui tombent entre les mains des gangs de rue?
Mme Provost : Globalement, si on réduit la masse d’armes qui sont légalement en circulation — j’imagine; je ne suis pas membre des forces policières —, on va rendre plus évidentes les armes qui sont illégales, puisque le volume sera réduit. Comme le disait Mme Rathjen, il y a énormément de désinformation sur la criminalité liée aux armes illégales. Ce qui m’est arrivé, ce qui est arrivé à la mosquée de Québec, ce sont de nombreuses tueries de masse qui ont été commises avec des armes légales.
Le sénateur Boisvenu : Depuis 1979, les homicides au Canada sont en chute constante, sauf pour deux catégories : les crimes à caractère familial, les féminicides, qui ont augmenté de près de 50 % depuis quatre ans, et les crimes liés aux gangs de rue, surtout chez les jeunes. Sinon, les homicides ont baissé d’environ 40 % depuis 1979, qu’il y ait eu un registre ou non, puisqu’il n’y a pas de distinction dans nos données.
Les homicides commis avec des armes à feu sont surtout liés aux gangs de rue. C’est rare que des armes à feu soient utilisées dans les féminicides, qui sont souvent commis par étranglement ou par arme blanche. Comment va-t-on réussir à endiguer les armes qui sont dans les mains des jeunes, des jeunes qui souvent ont 17 ou 18 ans? Comment le projet de loi va-t-il réussir à endiguer ces crimes?
Mme Rathjen : C’est faux de dire que le projet de loi ne s’attaque pas au marché illégal. Il contient des mesures...
Le sénateur Boisvenu : Il l’a dit la semaine dernière.
Mme Rathjen : Ce n’est pas le principal objectif. Il y a des mesures qui touchent le marché illégal dans le projet de loi. Il y a des pénalités maximales qui sont augmentées. Il y a des armes fantômes. Il y a des parties d’armes qui sont utilisées...
Le sénateur Boisvenu : En même temps, le gouvernement adopte le projet de loi C-5, où l’on retourne les gens à la maison...
[Traduction]
Le président : Désolé, cher collègue. Je m’excuse de vous interrompre, sénateur Boisvenu, ainsi que nos témoins, mais nous avons dépassé le temps prévu. Nous passons maintenant au sénateur Cardozo.
[Français]
Le sénateur Cardozo : Madame Provost, je vous remercie beaucoup de votre présence ici. Je sais que de tels témoignages sont très difficiles pour vous, surtout en tant que survivante, et je vous en remercie.
Monsieur Benabdallah, je vous remercie également de votre présence ici. Les événements à la mosquée de Québec ont été tragiques. Je vous remercie de nous aider à améliorer les politiques du gouvernement du Canada.
[Traduction]
Maître Zaccour, je tiens à vous remercier de votre exposé. J’ai remarqué le large éventail de gens qui ont appuyé votre mémoire. J’ai remarqué aussi qu’on ne trouvait pas parmi eux d’organisations du Nord, comme l’a mentionné ma collègue, la sénatrice Anderson. Je vous encourage vivement à contacter des gens là-bas, même si je sais qu’en tant qu’organisation à but non lucratif, vous avez peu de ressources. C’est une région importante au pays.
Je suis impressionné, car je connais l’Association nationale Femmes et Droit, avec qui j’ai eu la chance de travailler pendant de nombreuses années. Je ne mentionnerai pas combien, mais c’est une organisation respectée qui a défendu et fait progresser les droits des femmes et pour laquelle j’ai beaucoup de respect. Je vous remercie pour le travail que vous avez accompli.
J’ai aussi remarqué que les gens que vous avez consultés et qui appuient votre mémoire viennent d’un peu partout au pays. Il y a la Calgary Legal Guidance, ou CLG, la Fédération des femmes du Québec, le Network of Women with Disabilities, ou NWD, la South Asian Legal Clinic of Ontario, ou SALCO, et la Women’s Centre for Social Justice, aussi appelée WomenatthecentrE.
Je tiens à vous remercier de nous faire part des points de vue que tant d’organisations ont appuyés.
Madame Provost et madame Rathjen, j’aimerais que vous nous disiez, brièvement, si vous en avez la chance, comment vous procédez pour rester en contact avec vos membres ou les gens que vous représentez. Dans quelle mesure les consultez-vous? Je veux vous donner l’occasion de nous parler de votre légitimité à les représenter, car c’est parfois remis en question. Je veux vous donner l’occasion de nous rassurer au sujet de votre approche. J’aimerais commencer par Mme Provost et enchaîner avec Me Zaccour.
[Français]
Mme Provost : Je suis très étonnée qu’on me pose des questions sur ma légitimité de parler au nom des victimes de Polytechnique.
Vous savez, monsieur, le 8 décembre 1989, j’étais sur mon lit d’hôpital en train de parler non seulement comme victime, parce que j’étais blessée, mais au nom de toute la communauté de Polytechnique, afin qu’on se lève et qu’on aille de l’avant.
Encore hier, j’étais en communication avec ma consœur de classe Josée Martin, qui a été blessée avec moi. Les familles sont des amis, nous sommes tous très liés. Nos anciens collègues étudiants nous appuient et nous restons en contact au moyen des réseaux sociaux. Nous sommes une organisation libre et ouverte. Nous sommes une association et nous sommes en communication avec nos consœurs et confrères. Ils nous parlent et nous écrivent, nous soutiennent et appuient nos demandes. Je suis impliquée dans ma communauté comme professionnelle et c’est par ces moyens que je parle aujourd’hui. De plus, je reçois régulièrement des messages d’appui de leur part.
[Traduction]
Le sénateur Cardozo : Je vous remercie de l’avoir mentionné publiquement. Maître Zaccour?
Le président : Je suis désolé, mais nous devons poursuivre.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Merci à nos témoins. Monsieur Benabdallah, ce projet de loi nous place devant des positions particulièrement irréconciliables. D’un côté, il y a les chasseurs, les tireurs, les fermiers et aussi les droits ancestraux des Autochtones. D’un autre côté, on retrouve des organisations qui voudraient que le gouvernement interdise, sans restriction ou discernement, le commerce et la possession d’armes à feu. Ce n’est pas facile, surtout lorsqu’on veut éviter de politiser le débat, parce qu’il y a quand même un fond politique derrière le projet de loi C-21. Existe-t-il une voie par laquelle on pourrait rehausser la sécurité de la population sans pénaliser les Canadiens qui ont des armes à feu, qu’ils ont achetées et enregistrées et qu’ils utilisent de façon sécuritaire?
M. Benabdallah : Il n’y a aucune façon sécuritaire. Nous voudrions que ces armes sortent du marché. Par contre, en ce qui concerne les chasseurs, nous ne sommes pas contre. Nous sommes contre certains chasseurs qui achèteraient des armes prohibées et qui ne figurent pas dans la classification, qui sont des armes à feu qui tuent et ne sont pas des armes à feu pour la chasse.
Le SKS en est une. C’est une arme d’assaut russe qui a été déclassifiée en Russie et qui est vendue ici. Cela reste une arme d’assaut. C’est vraiment dommage qu’il y ait des chasseurs qui l’utilisent pour chasser le gibier. Par contre, dans le cas des autres armes de chasse qui sont utilisées depuis longtemps, on ne s’y oppose pas. Je ne suis pas la classification, sénateur. Vous avez vu mes collègues qui épluchent tous les registres depuis 30 ans. Dans la situation actuelle, on dit qu’il y a des armes qui doivent sortir du territoire canadien. On ne s’oppose pas aux droits ancestraux de chasse avec des armes reconnues pour les chasseurs. Il n’y a aucun problème et on ne s’oppose pas à ce qu’ils continuent à les utiliser. On n’est pas dans l’opposition.
Le sénateur Dagenais : Le Canada est un grand pays qui compte beaucoup de territoires non habités. Dans ce débat, y a-t-il une différence sociale et de sécurité qu’on pourrait faire entre le milieu urbain et le milieu rural? En effet, dans le milieu rural, certains Canadiens veulent posséder une arme à feu pour chasser et pour se protéger des animaux dangereux, comme les ours, mais ce ne sont pas des criminels. Faut-il faire une différence entre le milieu urbain et le milieu rural?
Mme Rathjen : Les homicides par arme à feu sont plus élevés dans les régions rurales comparativement aux grandes villes. Ce sont surtout des armes d’épaule dans les régions rurales alors que dans les villes, ce sont plutôt les armes de poing. Regina est la ville qui a le plus haut taux d’homicides par arme à feu. L’autre chose, c’est que les armes de poing et les armes d’assaut qui ne sont pas utilisées pour la chasse ne sont pas du tout pertinentes aux régions rurales ou urbaines. Les clubs de tir où l’on peut utiliser ces armes existent partout.
Le sénateur Dagenais : Merci.
[Traduction]
La sénatrice Pate : Je remercie nos témoins d’être avec nous. Mes questions s’adressent à Mme Provost et Me Zaccour, mais les autres peuvent aussi intervenir. Je trouve extrêmement frustrant d’entendre le genre de commentaires que l’on entend actuellement à propos de ce projet de loi, au même moment où l’on fait fi, en particulier, de la violence contre les femmes, ou que l’on s’en sert pour appuyer l’élaboration d’autres types de mesures législatives, que ce soit l’attribution de peines plus longues, plus punitives ou d’autres modifications au Code criminel.
Je me demande si vous avez vu les divers gouvernements faire preuve de volonté, depuis 1989 en particulier et même avant, pour mettre en œuvre les recommandations — qu’il s’agisse de l’enquête sur les femmes et les filles autochtones disparues ou assassinées ou de la Commission sur les pertes massives — dans lesquelles on ne cesse d’en appeler à la nécessité de mettre en place des ressources pour remédier, à la base, à la violence contre les femmes, en particulier. Bien sûr, cela s’applique aussi aux autres personnes également. Je dis en particulier, parce que c’est un problème dont on ne s’est pas occupé.
Auriez-vous des observations ou des recommandations dont vous aimeriez faire part au comité?
Mme Rathjen : Nous appuyons assurément tous les efforts qui visent à réduire la violence contre un partenaire intime. La tuerie à l’École polytechnique était une attaque contre les femmes. C’était un féminicide.
Pour ce qui est de la violence liée aux armes à feu, il a toujours été difficile de faire en sorte que les meurtres familiaux, les meurtres de femmes par armes à feu et les menaces soient pris au sérieux. Quand je pense à toutes ces années passées à travailler sur ce dossier, je crois que lors des discussions que nous avons eues avec le ministre Marco Mendicino, c’était la première fois qu’on nous écoutait à propos de cet aspect du contrôle des armes à feu. Les mesures solides contre la violence conjugale qu’on trouve dans le projet de loi C-21 en témoignent.
L’un des graves problèmes, par ailleurs, c’est l’application de la loi. Les agents de police et les contrôleurs des armes à feu ont un pouvoir discrétionnaire beaucoup trop grand. C’est la raison pour laquelle le projet de loi le resserre et rend certaines mesures de prévention obligatoires. Il faut remédier à ce problème persistant. Nous demandons à ce qu’on augmente le financement et la sensibilisation afin qu’on apporte plus d’attention aux questions entourant la violence contre un partenaire intime dans l’application de la loi.
Les agents de police doivent prendre les signaux d’alarme et les plaintes des femmes beaucoup plus au sérieux. Je pense que la tragédie en Nouvelle-Écosse et dernièrement celle à Sault Ste. Marie nous montrent clairement que les facteurs de risque liés à la violence contre un partenaire intime ne sont pas considérés au moment de prendre des décisions concernant la révocation d’un permis, le retrait rapide des armes, etc.
La sénatrice Pate : Je vous remercie. Maître Zaccour, aimeriez-vous nous parler des mesures qui doivent être... Je suis désolée, je ne sais pas où regarder.
Me Zaccour : Oui, tout à fait. Je vous remercie de la question. Notre liste de priorités est très longue. Nous voulons un revenu minimum garanti. Nous voulons des services d’avocat gratuits pour les femmes. Nous voulons une réforme du droit de la famille pour que les femmes puissent quitter un agresseur.
La liste est très longue. Il nous faudra sans doute continuer à militer pendant de nombreuses années en faveur de ces changements. Nous nous efforcerons, chaque fois qu’un projet de loi est présenté, de faire un pas de plus, en sachant qu’on ne réglera pas tout.
Nous pensons qu’il est difficile pour une femme menacée de violence par arme à feu de fuir cet environnement. Nous croyons que les mesures prévues dans le projet de loi C-21 aideront concrètement les femmes à être plus en sécurité, mais on peut toujours tellement en faire plus. C’est pourquoi nous intervenons dans tant de projets de loi de cette nature, et nous allons continuer à le faire. Il est indispensable que notre réponse face à la violence contre un partenaire intime soit globale.
Le président : Je vous remercie, chers collègues. Je crains que ce ne soit tout le temps que nous avions à consacrer à ce groupe de témoins. Le temps passe très vite. Je tiens à remercier chaleureusement Me Zaccour, Mme Rathjen, Mme Provost et M. Benabdallah.
Nous vous sommes reconnaissants du temps que vous nous avez consacré aujourd’hui, et de vos contributions en nous faisant part de vos expériences. Certaines ont été douloureuses, tragiques, mais il était important pour nous d’entendre cela. Au nom de tous les membres du comité et du Sénat du Canada dans son ensemble, je vous remercie pour le travail que vous accomplissez chaque jour. Ce travail est difficile, mais important. Vous le faites depuis longtemps. C’est un travail de longue haleine, et vous ne baissez pas les bras. Nous vous en sommes reconnaissants. Nous vous encourageons à poursuivre votre travail au nom de nos collègues et de nos collectivités, et vous en remercions sincèrement.
Nous allons passer maintenant à notre deuxième groupe de témoins. Nous avons le plaisir d’accueillir ici dans la salle, pendant la deuxième heure, Lise Martin, directrice générale, Hébergement femmes Canada; et Louise Riendeau, coresponsable, Dossiers politiques, du Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale.
Merci d’être des nôtres aujourd’hui. Nous vous invitons maintenant à présenter vos observations préliminaires, après quoi les membres du comité vous poseront des questions. Je vous rappelle que vous disposez chacune de cinq minutes pour faire votre déclaration. Nous allons commencer par Mme Lise Martin. La parole est à vous.
Lise Martin, directrice générale, Hébergement femmes Canada : Je vous remercie de m’avoir invitée à comparaître devant le comité. Hébergement femmes Canada est une organisation nationale sans but lucratif qui représente 16 associations provinciales et territoriales de refuges ainsi que plus de 600 refuges et maisons de transition pour femmes victimes de violence dans tout le pays. Le projet de loi C-21 est important pour ceux et celles d’entre nous qui se préoccupent de la violence fondée sur le sexe. Bon nombre des mesures qu’il contient sont réclamées depuis longtemps par les organisations de femmes. Bien qu’il ne soit pas parfait, nous appuyons ce projet de loi et nous croyons qu’il devrait être mis en œuvre rapidement.
Le projet de loi C-21 contient de nombreuses recommandations de la Commission des pertes massives, qui a demandé au gouvernement du Canada de renforcer les mesures de contrôle des armes à feu, d’améliorer les protections pour les survivantes de la violence fondée sur sexe et d’assurer un meilleur suivi et un meilleur signalement des armes d’assaut.
La violence faite aux femmes est une crise de santé publique. Les armes à feu augmentent le risque et la probabilité de décès pour les femmes et les enfants qui subissent de la violence. On utilise des armes à feu pour terroriser, blesser et tuer des femmes et leurs enfants, tant dans les villes que dans les régions rurales. Nous savons que les risques sont plus élevés dans les collectivités rurales, où il y a plus d’armes à feu, plus d’opposition au contrôle des armes à feu et moins de ressources pour les femmes victimes de violence. Entre 2009 et 2020, 25 % des femmes victimes de crimes violents commis à l’aide d’une arme à feu ont été agressées par un partenaire intime, actuel ou ancien. En outre, la présence d’armes à feu à la maison fait que les femmes craignent davantage pour leur sécurité et sont moins portées à demander de l’aide pour les mauvais traitements qu’elles subissent.
Au Canada, la plupart des femmes tuées par armes à feu le sont par des propriétaires légitimes d’armes à feu. L’enquête menée en 2022 dans le comté de Renfrew portait précisément sur les risques accrus de féminicide et de suicide attribuables aux lacunes dans l’application des évaluations de risques et des lois et règlements sur les permis d’armes à feu dans le contexte rural. Les modifications exigeant la remise d’une arme à feu à un agent de la paix et la révocation du permis d’une personne qui a participé à un acte de violence familiale, qui a traqué quelqu’un ou qui est visée par une ordonnance de protection, répondent aux préoccupations soulevées par l’enquête et la Commission des pertes massives.
Nous avons déjà exprimé des inquiétudes quant à l’absence de mesures permettant le retrait rapide des armes à feu et des permis. Il a été démontré à maintes reprises que les femmes sont le plus en danger de mort lorsqu’elles informent la personne qui les maltraite qu’elles vont partir. L’ajout d’un délai de 24 heures pour la révocation des armes à feu et des permis est important pour garantir la sécurité des victimes.
Nous nous réjouissons certes de cette modification, mais nous tenons également à souligner que les révocations doivent être appliquées et dotées de ressources pour qu’elles soient menées à bien.
Dans notre dernier mémoire sur le projet de loi, nous avons fait part de nos préoccupations concernant l’absence d’une définition de la violence conjugale et familiale dans le projet de loi.
Sans une définition claire et globale de la violence, les contrôleurs des armes à feu ont peut-être dû envisager des définitions plus limitées qui ne tiennent compte que des blessures directes. L’adoption de la définition de violence familiale récemment prévue aux termes de la Loi sur le divorce, dans le cadre du projet de loi C-21, fait en sorte qu’un large éventail d’actes de violence soient pris en considération, notamment le contrôle coercitif.
Enfin, le projet de loi autorisait auparavant, dans certaines circonstances, la délivrance d’un permis conditionnel à des fins de subsistance ou d’emploi. Même si nous saluons la décision de supprimer cette disposition, nous demeurons préoccupés par l’exemption qui subsiste pour les policiers.
Bien qu’il y ait peu d’études à ce sujet au Canada, les recherches effectuées aux États-Unis donnent à penser que les agents de police sont en fait plus susceptibles de maltraiter leur partenaire intime en comparaison de la population en général. Rien qu’en Nouvelle-Écosse, comme le révèle le rapport de 2020, 14 policiers de l’ensemble de la province ont été accusés de crimes liés à la violence familiale depuis 2012.
Pour conclure, j’aimerais insister sur l’importance d’améliorer les processus d’évaluation des propriétaires d’armes à feu et d’enlever les armes à feu aux personnes qui présentent un risque pour elles-mêmes ou pour autrui.
Le gouvernement fédéral a compétence pour décider de qui peut posséder un permis d’arme à feu. Des mesures importantes, telles que l’obligation de donner un avis au conjoint, la vérification des références et la vérification continue de l’admissibilité, ont été instaurées pour garantir que ce pouvoir soit utilisé pour refuser certains demandeurs et retirer des permis aux personnes qui, selon les préposés aux armes à feu, constituent une menace pour elles-mêmes ou pour autrui. Or, de multiples enquêtes, investigations et incidents de violence familiale montrent que ce n’est pas le cas.
Il faut accroître les ressources, les engagements et les mesures de reddition de comptes pour garantir l’exercice de cette responsabilité. Le besoin d’un plus grand nombre de ressources, d’engagements et de mesures de reddition de comptes va bien au-delà du projet de loi. C’est l’une des nombreuses raisons pour lesquelles Hébergement femmes Canada plaide depuis plus d’une décennie en faveur d’un plan d’action national sur la violence fondée sur le sexe.
Un autre élément important pour lequel nous réclamons un plan d’action national est la nécessité d’uniformiser, entre les différents ordres de gouvernement et au sein de ces derniers, les politiques et les lois relatives à la violence fondée sur le sexe et à la violence faite aux femmes. Il est important que cela fasse partie intégrante de la mise en œuvre du projet de loi. Je vous remercie.
Le président : Merci, madame Martin.
Chers collègues, notre dernière témoin d’aujourd’hui est Mme Louise Riendeau.
[Français]
Louise Riendeau, coresponsable, Dossiers politiques, Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale : Bonjour.
Merci aux membres du comité sénatorial de nous permettre d’apporter notre éclairage et notre expérience auprès de milliers de femmes victimes de violence conjugale sur la question des armes à feu.
Le regroupement compte 46 maisons d’aide et d’hébergement pour femmes victimes de violence conjugale réparties dans toutes les régions du Québec. Elles hébergent plus de 2 000 femmes par année et autant d’enfants, et elles offrent plus de 25 000 services à des femmes et à des enfants qui ne sont pas hébergés.
Le regroupement a pris position sur le projet de loi C-21 il y a un an, devant le Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes. Il a également appuyé le mémoire de l’Association nationale Femmes et Droit qui vous a été adressé.
Pour le regroupement, le projet de loi C-21 améliorera la sécurité des Canadiens et des Canadiennes. Notre témoignage portera spécifiquement sur la sécurité des femmes et des enfants victimes de violence conjugale, puisque c’est là notre expertise.
Selon nous, le projet de loi C-21 contient des mesures importantes concernant la violence conjugale. Pour les femmes et les enfants, la violence se produit souvent à la maison. Il n’y a pas de profil spécifique pour un agresseur; les agresseurs semblent souvent normaux, bien adaptés et respectueux de la loi. La violence conjugale peut être commise par des détenteurs d’armes à feu légales et la présence d’armes à feu au domicile augmente considérablement la probabilité qu’un agresseur tue sa conjointe.
En effet, les femmes violentées sont cinq fois plus susceptibles d’être tuées par leur agresseur lorsqu’il possède une arme à feu, et les agressions commises avec des armes à feu risquent beaucoup plus d’être létales que celles qui sont commises avec d’autres armes. On le constate : les femmes qui demandent l’aide de maisons d’hébergement en milieu rural ont peur d’être tuées avec les armes à feu qui se trouvent dans leur maison.
Le Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes a adopté un grand nombre d’amendements qui ont permis de renforcer les dispositions du projet de loi C-21 qui sont relatives à la violence conjugale. C’est pourquoi nous soutenons l’adoption rapide du projet de loi par le Sénat.
Le projet de loi contient désormais d’importantes dispositions visant à protéger les victimes de la violence conjugale, dont les suivantes : la prohibition automatique de posséder des armes à feu pour toute personne qui fait l’objet d’une ordonnance de protection liée à la violence conjugale ou au harcèlement; l’obligation pour un contrôleur des armes à feu de révoquer le permis dans les 24 heures lorsque le contrôleur a des motifs raisonnables de soupçonner qu’un individu a participé à un acte de violence familiale ou a traqué quelqu’un; l’ajout d’une définition élargie de la « violence familiale », de manière à comprendre toute la violence conjugale et familiale ainsi que les formes non physiques de violence, comme le contrôle coercitif qui est présent dans un très grand nombre d’homicides intrafamiliaux; l’ajout d’une définition élargie d’une « ordonnance de protection », afin de couvrir toutes les formes pertinentes d’ordonnances de protection qui peuvent être différentes selon les juridictions; la possibilité que des ordonnances d’interdiction soient prises contre des personnes qui cohabitent avec une personne à qui il est interdit de posséder des armes à feu; l’exclusion de l’emploi comme justification pour exempter une personne de la révocation d’un permis liée à une ordonnance de protection. Bien qu’elle ne couvre pas les policiers, c’est quand même un pas en avant.
Enfin, on retrouve aussi l’élimination de la disposition qui aurait permis aux personnes visées par une ordonnance d’interdiction de se départir de leurs armes à feu de la façon qui leur convient.
Bien sûr, le projet de loi contient des mesures qui continuent de nous inquiéter. Nous restons opposées à la mesure ex parte appelée « drapeau rouge », qui permet à une personne de s’adresser au tribunal pour faire révoquer un permis. Puisque les victimes ou d’autres personnes inquiètes peuvent déjà s’adresser aux services de police ou au contrôleur des armes, nous trouvons cette mesure non seulement inutile, mais contre-productive. Nous craignons que les services de police ne s’acquittent pas des démarches pour obtenir la révocation des permis et demandent plutôt aux victimes de le faire elles-mêmes, ce qui nous semble beaucoup plus lourd que de s’adresser à la police.
Nous allons surveiller l’application de cette mesure et si nous constatons que les services de police ou le contrôleur des armes se déchargent de leur responsabilité au détriment des victimes, nous allons intervenir auprès du législateur.
Une autre lacune réside dans le fait que le projet de loi n’interdit pas les armes d’assaut qui se trouvent actuellement sur le marché. Nous invitons les sénateurs et les sénatrices à appuyer une réglementation forte visant à interdire toutes les armes de type militaire qui ne sont pas raisonnablement utilisées pour la chasse et qui circulent actuellement.
En conclusion, bien que le projet de loi C-21 ne soit pas parfait, il offre d’importantes protections aux victimes de violence conjugale. Nous considérons que les débats sur le projet de loi C-21, qui durent depuis plusieurs mois, ne permettront pas d’améliorer le projet de loi davantage s’il devait être renvoyé à la Chambre des communes avec des amendements. C’est pourquoi nous demandons au Sénat d’adopter le projet de loi sans amendements pour que ces mesures puissent enfin entrer en vigueur.
Le président : Merci beaucoup, madame Riendeau.
[Traduction]
Chers collègues, nous allons maintenant passer aux questions.
La séance d’aujourd’hui se terminera à 13 h 30. Comme pour le dernier groupe de témoins, je limiterai à quatre minutes la durée de chaque intervention, ce qui comprend les réponses. Je vais montrer ce carton pour indiquer qu’il vous reste 30 secondes.
Tâchez d’être concis dans vos questions, et veuillez préciser à qui elles s’adressent.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Ma question s’adresse à Mme Riendeau. J’aimerais vous entendre sur un point en particulier, à savoir les sentences imposées dans les causes de possession illégale et d’usage d’armes à feu au pays.
Selon vous, les peines prévues sont-elles assez sévères pour être dissuasives, ou le gouvernement devrait-il faire en sorte que les délinquants restent plus longtemps derrière les barreaux?
Mme Riendeau : On pourrait parler longtemps des peines; effectivement, dans certains cas, on peut juger que les peines sont insuffisantes. Cependant, nous croyons qu’il faut miser davantage sur la prévention. C’est pour cette raison que nous étions satisfaites de constater dans le projet de loi des mesures permettant de mieux protéger les victimes et de faire en sorte que la possession des armes à feu soit interdite lorsque des ordonnances de protection sont en vigueur et lorsqu’on soupçonne la présence de violence conjugale. N’importe quelle prévention est toujours plus importante pour les victimes qui ont peur que les sentences, bien que cela puisse effectivement être une attente de la part des victimes, c’est-à-dire qu’il y a des conséquences aux contraventions que certaines personnes peuvent commettre face aux lois.
Le sénateur Dagenais : Quand il y a des actes de violence conjugale, cela peut souvent être signalé à la police; les gens iront en cour et il y aura souvent un ordre de la cour pour interdire les armes à feu. Les policiers vont saisir les armes à feu chez le délinquant. Qu’est-ce qui vous fait craindre que les corps policiers puissent se décharger de leurs responsabilités, étant donné qu’ils ont souvent des ordres de la cour et qu’ils doivent les exécuter?
Mme Riendeau : Quand il y a un ordre de la cour, c’est une chose, mais à l’heure actuelle, une victime qui craint pour sa sécurité ou qui a des craintes parce qu’un proche a des problèmes de santé mentale peut s’adresser aux services de police ou au contrôleur des armes — sans qu’il y ait déjà eu un ordre de la cour — pour demander que ceux-ci fassent enquête et fassent une demande pour qu’on saisisse les armes. Cela nous semble une mesure beaucoup plus facile et moins lourde que l’obligation d’aller devant la cour et de faire une dénonciation.
Bien sûr, quand ces dénonciations se font, nous sommes très heureuses de voir qu’il y a des ordonnances de saisie des armes, mais nous croyons qu’il est important que les femmes, même si elles n’ont pas porté plainte, puissent confier leurs craintes à ces instances et que celles-ci agissent. De plus, puisqu’avec le projet de loi les victimes pourront elles-mêmes s’adresser directement à la cour... Les services de police sont bien occupés, ils ont beaucoup de choses à faire, et on craint que des gens qui seraient moins sensibles à la question de la violence et à toutes les difficultés que vivent les victimes de violence conjugale se déchargent un peu de leurs responsabilités en disant : « Madame, allez à la cour, vous pourrez obtenir une telle ordonnance. »
Le sénateur Dagenais : Merci, madame.
[Traduction]
Le sénateur Oh : Je remercie les témoins de leur présence. Nous avons reçu le Dr Caillin Langmann, professeur clinicien adjoint à l’Université McMaster, qui a déclaré que ce serait un gaspillage d’argent. Voici ce qu’il a dit à notre comité :
Je pense que ce milliard de dollars serait mieux dépensé dans des programmes qui auront des effets positifs [...] Je vois des patients ayant des idées suicidaires à cause de problèmes de dépression, et il est extrêmement difficile de leur apporter de l’aide. Les délais d’attente sont de plus de six mois pour certaines personnes. Il y a une pénurie de médecins qui travaillent dans ce domaine.
En réalité, le gouvernement dispose de fonds très limités et, dans les années à venir, les sommes disponibles seront encore plus restreintes. Ne craignez-vous pas qu’on gaspille 750 millions de dollars ou plus pour un projet de loi qui, selon de nombreuses personnes, ne fonctionnera pas et ne contribuera pas à résoudre le problème de financement pour des initiatives importantes comme les refuges pour femmes?
Mme Martin : Je ne pense absolument pas qu’il s’agisse d’un gaspillage de ressources. Je crois qu’en général, notre société a besoin d’investir davantage dans la justice sociale, tout comme dans le système de santé, mais les deux ne sont pas mutuellement exclusifs. Nous parlons de sauver des vies humaines, plus particulièrement dans le contexte de la violence familiale. Je pense donc que le retrait des armes à feu du système réduira le nombre de féminicides à l’échelle du pays, diminuant ainsi la crainte des femmes et de leurs enfants.
[Français]
Mme Riendeau : J’ajouterais que le fait que des femmes et des enfants soient terrorisés par la présence d’armes dans leur maison — des armes légales, dirais-je, de façon générale quand on parle de violence conjugale — a aussi des coûts sociaux très importants. Au fond, cela occasionne différents problèmes de santé physique ou de santé mentale, à cause de cette terreur vécue au quotidien. Elles doivent faire appel à la justice. Comme ma collègue, je crois qu’il faut penser à investir à plusieurs endroits si on veut effectivement éliminer ou réduire notablement le problème de la violence à l’égard des femmes.
Mme Martin parlait d’un plan d’action national contre la violence à l’égard des femmes qui a été présenté. Cela comprend à la fois des mesures de prévention, des mesures de contrôle comme celles-là et des mesures de soutien aux victimes. Si le Canada est une société qui, comme il le clame, lutte contre la violence à l’égard des femmes, je pense que les mesures nécessaires doivent être prises.
[Traduction]
La sénatrice M. Deacon : Je vais céder le reste de mon temps de parole.
Le sénateur Cardozo : Je vous remercie. J’aimerais vous demander de nous aider — ou, du moins, de m’aider — à comprendre une question. Vous avez parlé du taux élevé de violence familiale en milieu rural. Vous avez également parlé du manque de soutien offert aux femmes et du fait qu’il y a parfois un plus grand nombre d’armes à feu dans certaines régions. Pourtant, dans l’ensemble de notre débat, cette réalité est en quelque sorte dépeinte comme une question qui oppose les régions rurales aux régions urbaines, le Nord au Sud et même l’Ouest à l’Est. Aidez-moi à mieux comprendre la présence de violence dans les régions rurales et le fait qu’il ne s’agit pas seulement d’un problème au centre-ville de Toronto ou de Montréal. De quoi n’entendons-nous pas suffisamment parler?
J’ai une autre question à vous poser. Il y a un certain argument sur l’utilisation des armes à feu pour les chasseurs et les agriculteurs, et parfois pour la chasse dans le Grand Nord comme moyen de subsistance. Comment pouvez-vous concilier le tout? Comment pouvez-vous présenter l’argument plus clairement? Comment pouvons-nous tous rendre l’argument plus clair?
[Français]
Mme Riendeau : Nous ne demandons pas de restreindre les droits des chasseurs ni de restreindre les droits des gens qui ont besoin des armes pour leur subsistance, mais ce sont des mesures de contrôle qu’il faut imposer quand les personnes deviennent menaçantes. Notre association a quelques maisons dans de grandes villes comme Montréal et Québec, mais la plupart sont dans des régions où, effectivement, la chasse se pratique couramment et où il y a beaucoup d’armes.
Quand les femmes qui vivent dans ces milieux font appel à nos membres, on voit qu’elles craignent pour leur vie, pour leurs animaux, pour leurs enfants. C’est pour cela que nous disons qu’il faut des mesures pour assurer que des armes qui ne sont pas nécessairement destinées à la chasse, quand on parle des armes d’assaut ou des armes militaires... J’ai des neveux qui vont à la chasse et ce n’est certainement pas avec ce type d’armes qu’ils vont à la chasse au chevreuil. Les mesures que l’on réclame sont des mesures spécifiques en matière de protection. Le projet de loi C-21 contient des mesures qui nous permettent de mieux protéger les femmes et les enfants qui sont aux prises avec ce problème, et c’est pourquoi nous souhaitons qu’il soit adopté.
Le sénateur Cardozo : Merci.
[Traduction]
Avez-vous le temps de faire une brève observation, madame Martin?
Mme Martin : Je pense que le problème tient au fait que l’on a souvent l’impression que les armes à feu sont plus présentes dans les régions urbaines, alors qu’elles sont plus nombreuses dans les régions rurales. Ensuite, pour ce qui est des services, il y a moins de ressources disponibles pour les femmes dans ces régions. Nous avons parlé des interventions policières, à titre d’exemple. Dans beaucoup de régions rurales, les services sont peu nombreux. Par exemple, dans les territoires, de nombreuses collectivités ne disposent pas de refuges ou de ressources de ce genre. Je crois que c’est ce que nous soulignons lorsque nous parlons de problèmes propres aux régions rurales, compte tenu des particularités du projet de loi et de la présence d’armes à feu dans ces régions.
Le président : Je vous remercie.
La sénatrice Dasko : Merci à nos témoins d’aujourd’hui. J’aimerais revenir sur ce que nos deux témoins ont dit au sujet de l’importance et de la nécessité d’une définition de la violence familiale. Je connais bien la Loi sur le divorce; c’est l’une des premières lois sur lesquelles j’ai travaillé lorsque j’ai été nommée au Sénat. Je ne suis pas juriste, alors j’ai dû me plonger dans ce dossier. Pouvez-vous me dire, à tour de rôle, pourquoi cette mesure législative est nécessaire ou pourquoi elle est importante? Quel est le problème des dispositions actuelles?
Mme Martin : Je crois comprendre que le projet de loi utilisera la définition contenue dans la Loi sur le divorce — qui définit de façon détaillée la violence familiale — afin d’indiquer clairement à tous les intervenants concernés, des policiers aux prestataires de services, que la violence familiale va bien au-delà des bleus et de ce que l’on peut voir. Le contrôle coercitif en est un élément important; il y a aussi la peur et, en l’occurrence, l’utilisation ou même la présence d’armes à feu dans la maison déclenche la crainte de se faire tuer. C’est pourquoi il est important que nous ayons tous une interprétation et une compréhension plus larges de la violence familiale.
La sénatrice Dasko : Pensez-vous que le projet de loi est bien tel qu’il est? Ou cherchez-vous quelque chose...
Mme Martin : Je pense que oui.
La sénatrice Dasko : Le libellé est donc satisfaisant.
Mme Martin : Oui.
La sénatrice Dasko : Je vais poser la même question à Mme Riendeau. Si vous pouviez nous donner plus de détails, ce serait formidable.
[Français]
Mme Riendeau : Absolument, et même des acteurs judiciaires font cette erreur. Quand on ne connaît pas bien ce qu’est la violence conjugale, tout ce que cela veut dire au jour le jour pour les femmes, on pense souvent que ce sont des incidents de violence physique et on ne voit pas tout le continuum de violence que les femmes vivent et tout le contrôle coercitif qu’elles voient au quotidien. C’est pourquoi il est important d’avoir une définition large.
Des études faites aux États-Unis ont montré que, dans un tiers des homicides qui avaient été étudiés, il n’y avait jamais eu de violence physique avant l’homicide ou le féminicide. Par ailleurs, il y a une autre étude qui a été réalisée en Angleterre et qui montrait que, dans 97 % des cas d’homicides intrafamiliaux étudiés, il y avait du contrôle coercitif. On a besoin d’instruire l’ensemble des acteurs sur ce qu’est la violence conjugale, sur les craintes que cela pose pour soi ou pour un autre membre de sa famille. La définition qui se trouvait dans la Loi sur le divorce à l’origine nous permet d’avoir une vision assez large de ce qu’est la violence conjugale.
[Traduction]
La sénatrice Pate : Je remercie nos témoins de leur travail dévoué et de leur présence aujourd’hui.
J’aimerais vous donner l’occasion d’expliquer certaines des autres approches stratégiques qui doivent être mises en œuvre, en plus de ce projet de loi. Je pense en particulier aux questions que vous avez toutes deux abordées, à savoir le fait que les femmes ne sont pas crues lorsqu’elles portent plainte. C’est attribuable, en partie, à la définition, mais ce qui est en cause beaucoup plus souvent, me semble-t-il, c’est la crédibilité des femmes. Je pense souvent à l’exemple des hommes qui ont commencé à dénoncer les sévices commis par des ordres religieux. C’était dû à l’homophobie; les hommes ont été crus, mais quand les femmes ont raconté leur vécu, on ne les a pas crues. Je suis curieuse de savoir si vous pensez qu’il y a d’autres mesures que nous devrions ajouter, ou si vous avez des observations ou des suggestions auxquelles le gouvernement devrait donner suite.
Mme Martin : Il existe un certain nombre de mesures. Mentionnons, par exemple, le récent Plan d’action national pour mettre fin à la violence fondée sur le sexe. Dans toutes ces mesures — et il existe beaucoup de bonnes lois —, c’est la mise en œuvre qui fait souvent défaut. De notre point de vue, c’est aussi lié aux ressources en matière de reddition de comptes. Nous estimons qu’il est de notre responsabilité d’assurer le suivi et de veiller à ce que ces lois permettent réellement de fournir les services ou la protection qu’elles prévoient. Songeons, par exemple, à l’adoption récente de la loi de Keira. Dans un an, comment allons-nous mesurer les répercussions réelles de cette loi sur la vie des femmes? C’est ce que nous voulons vraiment.
À notre avis, il est important que cette reddition de comptes ne se fasse pas seulement à l’interne et que les intervenants externes et les organisations qui œuvrent dans ce domaine depuis des décennies y participent également.
[Français]
Mme Riendeau : J’ajouterais que, parmi les éléments que nous avons nommés, la formation est un élément essentiel. Ma collègue parlait de redevabilité. Je prends l’exemple du Québec : dans la Loi visant la création d’un tribunal spécialisé en matière de violence sexuelle et de violence conjugale, il est indiqué qu’il doit y avoir chaque année un rapport au sujet de la formation donnée à tous les acteurs qui seront associés à ce tribunal. Pour nous, c’est important.
Il doit y avoir aussi une volonté politique. On trouve normal que des policiers passent plusieurs heures à documenter une situation d’alcool au volant, alors que 30 minutes passées avec une victime de violence conjugale, pour qu’elle fasse sa déclaration et explique tout ce qu’elle a vécu, semblent longues, particulièrement dans les régions où les services de police ont peu d’effectifs. Si on veut lutter contre cette violence, il faut donner aux acteurs les conditions qui leur permettront de bien travailler avec les victimes, de prendre le temps de comprendre tout ce qu’elles ont vécu et de bien traiter cette information.
[Traduction]
Le président : Merci beaucoup.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Bienvenue à nos témoins. Bonjour, madame Riendeau. Cela me fait plaisir de vous revoir.
J’épluchais les statistiques sur la criminalité liée aux armes à feu qui touche les femmes, et j’ai été surpris de voir que, entre 1974 et 2004, donc en 30 ans, 87 femmes avaient été assassinées au Canada avec une arme à feu en 1974 et 32 avaient été assassinées en 2004. Si je regarde les statistiques récentes, on est en deçà de 20 femmes assassinées. Si on compare les statistiques en ville, cinq femmes sur six vont être assassinées en milieu urbain avec un autre moyen comme étrangement, arme blanche, des coups portés, comparativement à la campagne où deux femmes sur trois vont être assassinées avec d’autres moyens qu’une arme à feu.
Toute la publicité autour de ce projet de loi va-t-elle laisser un faux sentiment de sécurité pour les femmes, de croire que parce qu’on adopte ce projet de loi, on vient de régler le problème des homicides avec les armes à feu?
Mme Riendeau : À elle seule, aucune mesure ne peut régler l’ensemble du problème. Évidemment, quand il y a une volonté de tuer quelqu’un, quand il y a une tentative de meurtre et qu’on utilise une arme à feu, il y a beaucoup plus de chances que ce soit létal que si, par exemple, on utilise une arme à blanche ou une autre arme. C’est un moyen pour régler, prévenir une partie des morts qu’on a. Bien sûr, il faut mettre en place toute une série de mesures pour endiguer ce problème.
Le sénateur Boisvenu : Lorsqu’on regarde les statistiques, surtout en milieu urbain, cinq femmes sur six sont assassinées au moyen de coups portés avec des armes blanches; c’est très létal. Inversement, les meurtres avec les armes de poing ont presque doublé durant la même période au Canada.
Dans le fond, on va interdire l’achat d’armes de poing. Toutefois, aucune mesure n’est appliquée pour toutes les armes de poing en circulation. Je me demande si ce projet de loi aura un réel impact sur les meurtres de femmes commis avec des armes à feu.
Mme Riendeau : On peut prendre en compte le nombre de meurtres, mais on peut aussi — et c’est ce qu’on voit dans les maisons — regarder la terreur que les femmes vivent. Le fait qu’il y ait des armes dans la maison permet de les menacer ou de les tuer. Cela signifie aussi que cette menace est très réelle pour les femmes et les garde dans un état de terreur. Je pense qu’il ne faut pas non plus négliger cet aspect.
Le sénateur Boisvenu : Au Canada, si on compare les années 1974 et 2004, en 1974, il y a eu environ 100 saisies d’armes à feu après que des plaintes ont été déposées par des policiers. En 2004, selon des statistiques récentes, près de 20 000 armes ont été saisies au Canada après que des plaintes ont été déposées, soit à cause de la violence conjugale ou de la maladie mentale. Ce sont les deux causes principales. Une femme qui a une grande crainte pour sa sécurité peut quand même avoir un soutien policier pour que ces armes soient saisies, n’est-ce pas?
Mme Riendeau : Bien sûr. Vous comparez avec l’année 1974, quand il n’y avait pratiquement aucune mesure pour combattre la violence à l’égard des femmes. On voyait la violence conjugale comme un problème privé. Le fait qu’il n’y ait plus d’interventions et plus d’actions nous prouve que notre pays a eu raison de prendre différentes mesures, certaines législatives, d’autres préventives, d’autres de soutien aux victimes. Je pense que le projet de loi C-21 est un pas de plus pour offrir une meilleure sécurité aux femmes et aux enfants.
Le sénateur Boisvenu : Merci, madame Riendeau.
[Traduction]
Le président : Merci beaucoup.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Ma question s’adresse à Mme Martin.
Le projet de loi C-21 prévoit la reconnaissance des droits ancestraux des peuples autochtones pour ce qui est de la possession d’armes à feu. Il existe au Canada des maisons d’accueil réservées aux femmes autochtones, dont certaines sont victimes de violence. On en compte même 12 ou 13 dans la seule province de Québec. Vous venez de le dire, la violence envers les femmes est très souvent liée à un conjoint.
Comme il y a des actes de violence à l’endroit des femmes qui sont commis à l’intérieur même des communautés, j’aimerais connaître votre point de vue sur la présence constitutionnellement acceptée des armes à feu dans ces communautés.
[Traduction]
Mme Martin : Nous sommes d’accord sur les droits inhérents des Autochtones en matière de chasse. Je crois que c’est ce que vous voulez savoir.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Oui, mais il reste que des crimes de violence sont aussi commis avec des armes à feu.
Quelle est l’acceptabilité par rapport aux armes à feu quand on sait qu’il peut y avoir des actes de violence dans les communautés?
Mme Martin : En effet, il faut avoir des services adéquats et des mesures de prévention adéquates. Lorsque le service est adéquat, si les femmes se sentent en danger, elles sauront qu’il y a une possibilité qu’elles soient accueillies dans des maisons d’hébergement pour les aider dans ces situations.
Le sénateur Dagenais : D’accord. Merci, madame Martin.
[Traduction]
Le président : Voilà qui met fin à nos questions, mais je vais en poser une, moi aussi. C’est inhabituel de ma part, mais il est rare que nous terminions une réunion plus tôt que prévu.
Je voudrais demander rapidement à nos deux témoins si elles ont quelque chose à dire en guise de conclusion sur un point qui n’a pas encore été abordé dans la discussion. Y a-t-il un dernier conseil que vous aimeriez nous donner aujourd’hui?
Commençons par Mme Riendeau.
[Français]
Mme Riendeau : Comme je l’ai déjà dit, on espère vraiment que le projet de loi sera adopté rapidement. On espère que, le jour où il y aura une réglementation pour mieux encadrer les armes d’assaut, le Sénat l’appuiera, parce que, selon nous, ce sont des mesures de protection pour les femmes. Je pense que ces choses ont déjà été dites.
J’ajouterais peut-être un élément. Quand il faut mettre différents droits en équilibre, il faut voir ce qui est le plus important. Je vais faire un parallèle. Au Québec, il y a une vingtaine d’années, on a eu des débats sur la question de la protection du droit à la vie privée. Notre Parlement a jugé que quand il fallait choisir entre le droit à la sécurité et le droit à la vie privée, qui est pourtant très important, il fallait choisir le droit à la sécurité. C’est ce genre de principe qui gouverne les demandes que l’on vous adresse aujourd’hui et que l’on adresse aux différents parlementaires.
Le président : Merci beaucoup, madame Riendeau.
[Traduction]
Je vois que la sénatrice Pate souhaite poser une autre question, mais allez-y en premier, madame Martin.
Mme Martin : J’aimerais souligner l’importance de reconnaître que la violence faite aux femmes est une épidémie. C’est un problème social. La société dans son ensemble doit s’en occuper. Il n’y a pas que les gouvernements. Tous les acteurs de la société ont la responsabilité d’agir.
Je pense que nous devons reconnaître ce fait. Nous devons appeler les choses par leur nom. Il s’agit d’une mesure qui contribuera à lutter contre la violence faite aux femmes — cette épidémie qui sévit dans notre société. C’est pourquoi nous demandons aux sénateurs d’approuver le projet de loi.
Le président : Merci, madame Martin. Sénatrice Pate, c’est vous qui poserez la dernière question.
La sénatrice Pate : Merci beaucoup. En effet, madame Riendeau, cela m’a interpellée lorsque vous avez parlé des règlements. Nous ne sommes pas saisis de règlements, à moins que ce soit dans le cadre d’un autre projet de loi ou d’une autre étude portant sur les règlements qui ont été promulgués en la matière. C’est pourquoi j’aimerais vous donner, à toutes deux, l’occasion de parler des types de règlements qui, selon vous, sont nécessaires. Le comité pourrait peut-être formuler des observations à ce sujet.
Dans le prolongement de votre dernier commentaire, madame Martin, on peut bien parler d’épidémie. Je suis frappée de constater que nous continuons à trouver de nouvelles façons d’essayer de dire qu’il s’agit d’un enjeu de grande importance, alors qu’en réalité, cette question n’est pas encore prise au sérieux. Nous continuons d’être témoins de l’inégalité sociale, sanitaire et économique que subissent les femmes. J’ai d’ailleurs été étonnée d’apprendre la semaine dernière que les femmes en Islande — un pays qui est, depuis longtemps, le chef de file en matière d’égalité — ont déclenché une grève parce qu’elles ne sont toujours pas traitées de façon égale en raison des écarts salariaux et de la violence dont elles sont victimes. Nous avons encore bien du chemin à faire.
Je ne veux en aucun cas minimiser la situation en refusant de la qualifier d’épidémie, mais il me semble que nous devons en faire beaucoup plus pour que les dispositions sur l’égalité entre les sexes que nous avons adoptées... Ces dispositions ne sont entrées en vigueur qu’en 1985 parce que nous avons reconnu en 1982, lors du rapatriement de la Constitution, que nous n’étions pas encore égaux. Il a fallu trois ans. Toutefois, c’est presque comme si nous ne remettions pas encore en question le fait que l’égalité juridique n’a pas été accompagnée d’une égalité financière, sanitaire et raciale, et, certainement, d’une égalité entre les sexes.
Je tiens à vous donner une dernière occasion d’ajouter quelque chose, en particulier sur les règlements d’application de ce projet de loi, mais je vous prie d’ajouter toute autre observation qui, selon vous, doit figurer au compte rendu alors que nous examinons cette question, qui découle de la violence faite aux femmes.
Mme Martin : Laissez Mme Riendeau parler de la partie sur les règlements.
Le président : Nous allons accorder à chacune de vous une minute pour répondre à la question. Madame Riendeau, la parole est à vous.
[Français]
Mme Riendeau : En ce qui concerne le règlement, on parlait spécifiquement des règlements que le ministre a promis, qui visent à interdire des armes de type militaire, des armes d’assaut qui ne sont pas utiles pour la chasse. Toutefois, j’aimerais parler de la question de l’égalité.
Vous avez raison, sénatrice Pate. Nous avons pris différentes mesures, mais il n’y a pas eu, à ce jour, de mesures globales qui permettent de lutter contre la violence à l’égard des femmes. En raison de cette violence, l’égalité n’est toujours pas atteinte et vice-versa, le fait que l’égalité ne soit toujours pas atteinte signifie que des femmes continuent d’être violentées. Je pense que Mme Martin pourra en parler mieux que moi. Quand on parle d’un plan d’action national contre la violence à l’égard des femmes, c’est une façon de dire qu’il faut travailler sur cette question de toutes les façons possibles et qu’il faut arrêter de morceler des mesures qui ne sont pas toujours cohérentes les unes par rapport aux autres.
[Traduction]
Mme Martin : Vous dites entre autres que, pour certaines personnes, certains termes, comme « épidémie », ont été galvaudés, mais, la réalité, c’est qu’il y a eu beaucoup de réactions négatives. En ce qui concerne la violence faite aux femmes, le nombre de féminicides a augmenté de façon spectaculaire au fil des ans. C’est pourquoi nous continuons à venir témoigner pour tenter de faire comprendre à quel point ce problème est omniprésent dans la société.
La violence faite aux femmes ne fait pas de discrimination. N’importe qui peut en être victime de la part de son partenaire intime, même si certains groupes de femmes sont plus susceptibles de l’être : les femmes racisées, handicapées ou autochtones.
C’est pourquoi je ne saurais trop insister sur l’importance d’en tenir compte. Une femme victime de violence est incapable d’obtenir l’égalité. Comme la violence faite aux femmes est omniprésente dans notre société, nous ne parviendrons jamais à l’égalité, que nous visons tous.
Encore une fois, j’ai toujours dit que la violence faite aux femmes était une question non partisane. Il est vraiment important de s’en souvenir. Je le répète, le cadre du plan d’action national ne concerne pas les ordres de gouvernement. Nous devons tous collaborer pour résoudre ce problème.
Le président : Merci.
Chers collègues, cela nous amène à la fin de la réunion d’aujourd’hui. Au nom du comité et de l’ensemble du Sénat du Canada, j’exprime notre profonde gratitude à Mmes Martin et Riendeau pour avoir partagé leur expertise et leur expérience avec nous. Je vous remercie également pour le travail essentiel que vous accomplissez. Je sais que vous travaillez tous les jours, de nombreux soirs, ainsi que les fins de semaine. Il est important qu’on vous le dise. Je suis sûr qu’on vous le dit, mais probablement pas assez souvent. Au nom de nous tous, nous voulons que vous sachiez que nous nous joignons aux nombreuses personnes qui vous sont reconnaissantes et qui vous remercient de votre travail. Merci.
Chers collègues, nous poursuivrons l’examen du projet de loi demain, le jeudi 2 novembre, à 9 heures, heure de l’Est, dans la salle 128. Je vous remercie de votre participation d’aujourd’hui et vous souhaite à tous un bon après-midi. Merci.
(La séance est levée.)