LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES AFFAIRES SOCIALES, DES SCIENCES ET DE LA TECHNOLOGIE
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le jeudi 28 novembre 2024
Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit aujourd’hui, à 11 h 30 (HE), pour examiner le projet de loi S-253, Loi concernant un cadre national sur l’ensemble des troubles causés par l’alcoolisation fœtale.
La sénatrice Rosemary Moodie (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente : Bonjour à tous. Je m’appelle Rosemary Moodie. Je suis sénatrice de l’Ontario et présidente du comité. Avant de commencer, j’inviterais les sénateurs autour de la table à se présenter.
[Français]
Le sénateur Boudreau : Bonjour. Victor Boudreau, du Nouveau-Brunswick.
[Traduction]
La sénatrice Senior : Sénatrice Paulette Senior, de l’Ontario.
La sénatrice Osler : Sénatrice Gigi Osler, du Manitoba.
[Français]
Le sénateur Cormier : Bonjour. René Cormier, du Nouveau-Brunswick.
[Traduction]
La sénatrice Burey : Bonjour et bienvenue. Sénatrice Sharon Burey, de l’Ontario.
[Français]
La sénatrice Petitclerc : Bonjour. Chantal Petitclerc, division sénatoriale de Grandville, au Québec.
Le sénateur Brazeau : Bonjour. Patrick Brazeau, division sénatoriale de Repentigny, au Québec.
[Traduction]
La sénatrice Seidman : Bonjour. Sénatrice Judith Seidman, de Montréal, au Québec.
[Français]
La sénatrice Mégie : Bonjour. Marie-Françoise Mégie, division sénatoriale de Rougemont, au Québec.
[Traduction]
La sénatrice Muggli : Bonjour. Sénatrice Tracy Muggli, de la Saskatchewan, territoire visé par le Traité no 6.
La présidente : Aujourd’hui, nous poursuivons notre étude sur le projet de loi S-253, Loi concernant un cadre national sur l’ensemble des troubles causés par l’alcoolisation fœtale. Dans le cadre du premier groupe de témoins qui se joint à nous aujourd’hui, nous recevons l’honorable sénateur Ravalia, qui est le parrain du projet de loi.
Merci de vous joindre à nous aujourd’hui. Sénateur Ravalia, vous aurez cinq minutes pour présenter votre déclaration liminaire, qui sera suivie par les questions des membres du comité. La parole est à vous.
L’hon. Mohamed-Iqbal Ravalia, parrain du projet de loi : Merci, madame la présidente et mesdames et messieurs, et bienvenue au personnel.
Honorables sénateurs et sénatrices, je vous remercie de me permettre de m’adresser au comité pour discuter du projet de loi S-253, qui exhorte le gouvernement fédéral à élaborer un cadre national sur l’ensemble des troubles causés par l’alcoolisation fœtale, que l’on appelle ETCAF.
L’ETCAF est la principale cause de déficience neurodéveloppementale au Canada, qui touche environ 4 % de la population. En guise de contexte, c’est plus que l’autisme, la paralysie cérébrale, le syndrome de Down et le syndrome de la Tourette combinés. Or, l’ETCAF demeure sous-diagnostiqué, sous-financé et sous-reconnu.
Cette invalidité permanente découle de l’exposition prénatale à l’alcool et présente un vaste éventail de problèmes, allant des difficultés d’apprentissage et des difficultés physiques aux problèmes d’attention, de mémoire et de régulation des émotions. Les personnes atteintes de l’ETCAF ont besoin d’un soutien tout au long de leur vie, mais l’accès à des services diagnostiques et à des services d’intervention n’est pas uniforme dans l’ensemble du pays.
Chers collègues, l’ETCAF comporte deux distinctions principales. Premièrement, c’est un diagnostic difficile à poser. Le diagnostic approprié doit être posé par une équipe multidisciplinaire et nécessite des évaluations complexes, ce qui crée des obstacles importants pour la plus grande partie du pays, surtout pour les familles et les personnes atteintes de l’ETCAF qui vivent dans des collectivités rurales et éloignées sous-desservies. Le deuxième élément crucial est que l’on peut le prévenir. En sensibilisant la population et en renseignant les fournisseurs de soins de santé et le public au sujet des risques de la consommation d’alcool pendant la grossesse, nous pouvons réduire sa prévalence et ses répercussions à long terme.
Actuellement, l’approche du Canada à l’égard de l’ETCAF est fragmentée. L’absence d’un cadre national cohésif entraîne des lacunes dans la prévention, le diagnostic, le traitement et la recherche. L’accès aux services dépend fortement de l’endroit où vous vivez, ce qui laisse de nombreuses familles sans le soutien dont elles ont besoin, et mon projet de loi vise à changer cette situation.
Le projet de loi ne prétend pas réinventer la roue; il fait actuellement fond sur les efforts existants aux échelons provincial, fédéral et communautaire ainsi que territorial. Le projet de loi exhorte le ministre de la Santé à diriger l’élaboration d’un cadre national en collaboration avec les provinces, les territoires, les collectivités autochtones et les parties prenantes.
Les cinq principales priorités sont décrites dans le projet de loi. La première est de renforcer la capacité des professionnels; la deuxième, de promouvoir la recherche et la collaboration; la troisième, d’établir des normes nationales; la quatrième, de mieux sensibiliser le public et de lutter contre la stigmatisation; et enfin, la cinquième, d’accroître la prévention, le diagnostic et le soutien.
Les objectifs généraux du cadre sont de réduire la prévalence de l’ETCAF au moyen de la prévention et de l’éducation; d’améliorer la qualité et l’accessibilité des services de diagnostic et de soutien; de renforcer l’équité en s’assurant que tous les Canadiens, peu importe l’endroit où ils se trouvent ou leurs antécédents, ont accès à des normes de soin constantes; et de bâtir un environnement de soutien qui réduit la stigmatisation et fait mieux connaître au public l’ETCAF et ses complexités.
Le projet de loi insiste également sur l’inclusion des voix autochtones. Les recherches montrent que les collectivités autochtones sont touchées de manière disproportionnée par l’ETCAF. Leur leadership est essentiel à l’élaboration de solutions appropriées sur le plan culturel et axées sur les traumatismes qui reflètent leurs contextes et forces uniques.
Sur le plan économique, on estime que l’ETCAF coûte plusieurs milliards de dollars au Canada chaque année. Les chiffres varient en fonction de la source. Ces coûts sont attribués aux soins de santé, aux services sociaux et aux dépenses connexes. L’élaboration d’un cadre national axé sur la prévention, le diagnostic précoce et le soutien permanent peut permettre de réduire de manière importante ces coûts tout en améliorant les vies.
Honorables collègues, le projet de loi porte sur la collaboration, la responsabilisation et l’action. Il permettra d’améliorer la vie des personnes atteintes de l’ETCAF, de leur famille et de leurs soignants. Je vous remercie de votre temps et de votre attention, et je suis prêt à répondre à vos questions.
La présidente : Merci, sénateur Ravalia.
Nous allons maintenant passer aux questions des membres du comité. Pour ce groupe de témoins, les membres auront quatre minutes pour chaque question, et cela comprend la réponse.
La sénatrice Seidman : Merci beaucoup, sénateur Ravalia, de nous avoir présenté ce projet de loi. Il ne fait aucun doute que les troubles causés par l’alcoolisation fœtale sont complexes, et ce, pour beaucoup de raisons. Étant donné que je suis épidémiologiste, vous anticiperez probablement ma question. Je m’intéresse aux chiffres, et particulièrement à la prévalence.
Toute la littérature scientifique tend à démontrer des diagnostics complexes, ce qui signifie qu’il n’y a pas un seul facteur responsable de ce trouble. C’est multifactoriel.
Le sénateur Ravalia : Oui.
La sénatrice Seidman : En soi, cela crée des complexités pour ce qui est d’estimer la prévalence. Si vous regardez les estimations aux États-Unis et au Canada, la plupart d’entre elles concernent 1 % de la population, et cela varie à moins que vous regardiez les sous-ensembles de population ou des populations très spécifiques. Mais, de manière générale, aux États-Unis et au Canada, le taux de prévalence est d’environ 1 %. Je sais que dans le préambule de votre projet de loi, vous utilisez le chiffre de 4 %.
Pourquoi utilisez-vous le chiffre de 4 %? Comment justifiez-vous cette estimation?
Le sénateur Ravalia : Je vous remercie de votre question. Il s’agit d’un aspect particulièrement important. L’un des dilemmes auxquels nous sommes confrontés à l’échelle nationale est l’absence d’un module sur les données. Nous ne savons pas exactement combien de personnes sont touchées par ce problème. La stigmatisation est un élément connexe; les personnes peuvent se sentir stigmatisées lorsqu’elles reconnaissent avoir consommé de l’alcool pendant la grossesse.
Beaucoup des données sur lesquelles je me suis concentré ont été citées par la détermination active des cas, appelée ACA, par l’intermédiaire du Réseau canadien de recherche sur le trouble du spectre de l’alcoolisation fœtale, ou CanFASD. Il a utilisé ce critère de référence pour mesurer la prévalence de l’ETCAF. L’ACA évalue de manière systématique de grandes populations à l’aide de critères diagnostiques standardisés. Ceux-ci produisent généralement des taux de prévalence plus élevés et plus fiables.
Ce chiffre est confirmé par l’alliance avec des études mondiales et canadiennes qui utilisent cette technique particulière. Mais je suis tout à fait d’accord avec vous pour dire que, si nous regardons le contexte, les sous-groupes, d’autres facteurs dont la malnutrition, la génétique, les populations marginales, nous voyons que ces facteurs sont également intégrés dans la prévalence.
Si je propose un chiffre de 4 % fondé sur le fait que le groupe CanFASD est probablement celui qui a effectué le plus de recherches dans le pays, je suis prêt à admettre que les cas peuvent peut-être être moins nombreux ou, à mesure que mon projet de loi évolue et que nous constituons une plus grande base de données, nous pourrions être surpris par une prévalence plus grande.
La sénatrice Seidman : Je le comprends et je reconnais toute l’incertitude liée à la prévalence. La raison pour laquelle je pose la question, mis à part l’incertitude qui existe, c’est que le paragraphe du préambule utilise l’estimation de 4 %, puis dit : « ce qui en fait la première cause de déficience neurodéveloppementale au Canada ». Je ne suis pas certaine que ce soit vrai. C’est pourquoi je vous ai posé la question.
Le sénateur Ravalia : Je suis prêt à l’admettre. C’est dans le cadre du travail que nous avons effectué avec le CanFASD que nous avons souligné que, malheureusement, cette affection particulière est relativement sous-déclarée et ne fait pas partie de la conscience publique autant qu’elle le devrait. Mais j’ai bien noté vos remarques.
La sénatrice Osler : Merci, cher collègue, d’avoir proposé ce projet de loi ici aujourd’hui. J’ai deux questions. La première porte sur l’accès et la deuxième sur la prévention.
Plusieurs mesures sont exposées dans le cadre national, mais l’accès en particulier n’est pas mentionné. Nous connaissons les limites de compétence pour ce qui est des services de soins de santé et les frontières entre la compétence fédérale et la compétence provinciale-territoriale. Comment un cadre national peut-il améliorer les services aux Canadiens atteints de l’ETCAF?
La deuxième partie de ma question porte sur la prévention. Les données de l’Agence de la santé publique du Canada montrent que la consommation d’alcool chez les femmes âgées de 25 ans et plus a légèrement augmenté de 2008 à 2017. Comment un cadre national ciblerait-il les efforts de prévention sans augmenter la stigmatisation?
Le sénateur Ravalia : Merci beaucoup.
En réponse à votre première question, une bonne partie de cette responsabilité appartiendra au ministre, qui devra mobiliser les principaux intervenants et leur offrir cette possibilité. Nous reconnaissons que, actuellement, les services diagnostiques et les mécanismes redditionnels au pays sont, au mieux, inégaux.
Les meilleurs exemples de travaux réalisés qui se rapprochent des normes auxquelles nous nous attendrions viennent probablement de l’Alberta, du Manitoba et du Yukon. Ce sont des provinces où il n’y a même pas de mécanisme redditionnel.
Le pays compte plus de 70 cliniques. Seulement 26 font rapport au Réseau canadien de recherche sur le trouble du spectre de l’alcoolisation fœtale. Les données que nous obtenons actuellement sont extrêmement inégales et anémiques, au mieux.
Par rapport à votre point sur l’accès, en ce moment, la grande majorité des gens qui vivent dans les collectivités rurales et éloignées et sur les réserves ont un accès limité aux diagnostics, voire aucun. Ceux qui se trouvent dans un environnement tertiaire plus rapproché pourraient réussir à obtenir un accès, mais les délais d’attente, dans ma propre province par exemple, sont de plus de deux ans. Ces cliniques apparaissent puis disparaissent.
L’essentiel, c’est que si le ministre est en mesure de réunir les parties prenantes et d’obtenir l’adhésion des provinces, des territoires et des autres partenaires, y compris des chefs autochtones et des personnes qui ont une expérience vécue, nous pourrions disposer d’un cadre national et d’une stratégie qui obligent les provinces et les territoires à commencer à travailler sur ce domaine clé.
La sénatrice Osler : Merci. S’il y a du temps, ma deuxième question visait à savoir comment cibler les efforts de prévention sans augmenter la stigmatisation.
Le sénateur Ravalia : Comme vous le savez, des programmes antérieurs ont été mis en place dans l’ensemble du pays par l’entremise de l’Agence de la santé publique du Canada et de ses conseils, mais bon nombre d’entre eux n’ont pas fait l’objet d’un suivi à long terme. Encore une fois, je pense que l’essentiel est d’être à la table du ministre pour pouvoir nous assurer de présenter cette information de manière compréhensible et non menaçante aux collectivités les plus touchées.
Je pense qu’on peut le faire à l’aide de la technologie, des médias sociaux et de la numérisation.
Le sénateur Brazeau : Merci, sénateur Ravalia, de nous avoir présenté ce projet de loi. Comme vous le savez, je suis un fervent défenseur et promoteur de l’amélioration des politiques au sujet de l’alcool au Canada. Je vous remercie, vous et votre équipe, de faire ce travail.
Vous avez mentionné que l’ETCAF n’a pas été reconnu. Pourriez-vous nous dire pourquoi vous pensez que cela a été laissé en arrière-plan, pour ainsi dire?
Le sénateur Ravalia : Premièrement, permettez-moi d’abord de souligner le travail que vous faites. Je pense qu’il s’intègre joliment avec ce que nous essayons de faire, et je reconnais sincèrement le travail acharné que vous avez accompli relativement à votre projet de loi.
La première est la stigmatisation. Il est certain que, pendant mes années de pratique en tant que médecin de famille en région rurale, alors que j’étudiais de plus près les cas de nourrissons, d’enfants et de jeunes adultes atteints de déficiences neurodéveloppementales indifférenciées, il m’a fallu pas mal de temps pour reconnaître qu’il y avait eu une consommation d’alcool. Les personnes sont extrêmement nerveuses, et, dans les petites collectivités en particulier, la stigmatisation peut entraîner l’aliénation et l’isolement social.
Nos tentatives pour soulever cette question et réduire au minimum les risques de stigmatisation, et la volonté de travailler avec les campagnes et les autorités responsables, y compris l’Agence de la santé publique du Canada, visent à réduire la stigmatisation.
Deuxièmement, le Canada vit actuellement une crise de santé. Les délais d’attente, ne serait-ce que pour accéder à des soins spécialisés, sont absolument incroyables. Le fait de s’attaquer à un problème aussi complexe que celui-là nécessite donc une équipe formée d’un psychologue pour enfants, de psychiatres, d’ergothérapeutes, d’un coordonnateur communautaire et de membres de la famille, ce qui est très difficile.
Dans ma province, le regretté Teddy Rosales, qui travaillait à St. John’s, a visité des cliniques et amené son équipe au Labrador et dans d’autres régions vulnérables, mais cela s’est révélé extrêmement difficile de le faire pour ce qui est du temps et du coût. D’ici à ce que nous puissions imaginer un mécanisme qui rendrait l’accès à ces services plus propice, cela continuera d’être un énorme défi.
Le sénateur Brazeau : Évidemment, c’est un dur combat parce que, selon les statistiques, environ 80 % des Canadiens consomment de l’alcool. La consommation d’alcool est même la cause de sept cancers mortels, et seulement 25 % des Canadiens le savent.
À votre avis, quel pourcentage des Canadiens connaissent les effets et les conséquences négatives de l’ETCAF sur la population?
Le sénateur Ravalia : En ratissant large, on constate malheureusement que les gens ne sont pas au courant. La prise de conscience n’a lieu que chez les personnes qui ont dû faire face aux conséquences de l’ETCAF. Il y a toujours une certaine ambivalence à ce sujet, et c’est déconcertant.
Bien sûr, il arrive aussi que vous ayez peut-être pris quelques verres de vin avec vos amis, et puis, six semaines plus tard, vous apprenez que vous êtes enceinte, alors cela aurait pu être entièrement involontaire. Mais les publicités et les rapports de la santé publique, qui se veulent amicaux, sans jugement et non hostiles, sont vraiment les moyens d’éduquer le public au sujet des risques de l’alcool, non seulement dans les domaines que vous abordez, mais dans ce domaine très critique.
Le sénateur Brazeau : Merci.
La sénatrice Petitclerc : Merci beaucoup, sénateur Ravalia, d’être ici avec nous. J’ai une question, mais avant de la poser, je veux poursuivre sur la question du sénateur Brazeau.
Pouvons-nous renseigner les femmes sur... avons-nous vraiment les données pour... lorsque nous parlons de prise de conscience liée au fait de, disons, prendre même un verre… Je sais que, lorsque j’étais enceinte, le message des médecins était très clair. C’est pourquoi je suis un peu surprise de vous entendre dire que les gens ne sont pas au courant; cela me surprend vraiment. Y a-t-il quelque chose que nous ne faisons pas assez ou est-ce qu’il n’y a pas assez de ressources, comme vous l’avez dit, de sorte que le suivi auprès de ces femmes n’est pas approprié?
Le sénateur Ravalia : C’est bisectoriel. Cela dépend beaucoup, de manière indépendante, de votre médecin ou de votre praticien. Je connais des personnes qui suivent tous leurs soins prénatals sans entendre le mot « alcool », et il y a d’autres cas où on met l’accent là-dessus.
De manière générale, il est difficile d’accéder aux données à cause du fait que les personnes ne sont pas prêtes à parler de ce sujet.
Cependant, nous avons souligné, certainement dans le programme de la faculté de médecine, l’importance des troubles causés par l’alcoolisation fœtale. Mais je pense que ce n’est toujours pas assez enseigné et qu’on n’insiste toujours pas assez là-dessus même dans les programmes médicaux.
La sénatrice Petitclerc : Merci. J’aimerais savoir comment vous imaginez... parce que le projet de loi mentionne l’importance de la recherche et de la collecte de données, mais, bien sûr, il s’agit d’un cadre, qui ne définit pas la façon dont ce sera fait. J’aimerais savoir ce que vous pensez de la façon dont la recherche et la collecte de données continues... comment vous imaginez le financement, l’organisation, l’utilisation, un peu l’architecture de tout cela, selon votre meilleur scénario.
Le sénateur Ravalia : Ce qui importe — et c’est une discussion que nous avons eue avec le CanFASD — c’est que, à cause du manque de ressources, il n’y a pas assez de possibilités de comptabiliser les données de recherche dans une base de données nationale et de communiquer les résultats. Si vous avez 70 cliniques — et c’est très inadéquat pour un pays de notre taille — et que seulement 26 d’entre elles rendent des comptes dans une base de données nationales, cela vous dit à quel point les écarts sont grands.
Nous souhaitons et espérons que ce cadre mette l’accent, pendant son évolution à la table ministérielle, sur l’importance du financement nécessaire pour créer une base de données nationale facilement déclarable à l’aide des outils numériques améliorés, y compris l’utilisation de l’intelligence artificielle, qui devient un sujet pertinent, comme nous avons entendu la sénatrice Moodie le dire hier.
Nous pouvons également suivre les modules élaborés dans d’autres pays, et en particulier, l’Australie, la Nouvelle-Zélande, l’Écosse et les États-Unis sont des chefs de file dans la collecte de données. Nous n’avons pas besoin de réinventer la roue. Ce qui importe, c’est de pouvoir accéder aux données, de les compiler et de les traiter, puis de les utiliser pour réagir et dire : « Voici ce que nous montrons, voici ce dont nous avons besoin et voici comment nous allons de l’avant. »
Le sénateur Cormier : Merci d’être ici, sénateur Ravalia. Je vais poser mes questions en français, si vous voulez simplement vous assurer d’avoir votre appareil avec vous. Bien sûr, votre projet de loi couvre un large éventail de questions.
[Français]
Vous parlez de sensibilisation, de prévention, de traitement et de soutien à long terme. Donc, les défis entourant cette réalité sont multifactoriels. Dans votre projet de loi, vous dites que le cadre prévoit des mesures pour répondre aux besoins des professionnels de la santé et d’autres professionnels en matière de formation sur la prévention et le diagnostic et en matière de soutien aux personnes concernées. Je voudrais mieux comprendre. À votre avis, quelles sont les mesures qui devraient être incluses? Comment est-ce lié à la réalité en milieu rural? Ce qui m’intéresse principalement, c’est la réalité de médecins comme vous, qui œuvrent en milieu rural et qui doivent travailler à l’amélioration de la santé des citoyens.
[Traduction]
Le sénateur Ravalia : Merci beaucoup de poser cette question, sénateur Cormier. Je vais vous répondre de mon point de vue personnel. Dans ma collectivité rurale, nous avons constaté qu’il était très difficile d’accéder aux services diagnostiques dont nous avions besoin, alors nous avons concentré notre travail principalement sur l’utilisation d’une approche axée sur les équipes locales. J’ai eu la chance de travailler dans un milieu et un environnement où il y avait des infirmières praticiennes, du personnel infirmier enseignant, un physiothérapeute, un ergothérapeute et un pharmacien, et il était essentiel pour moi de travailler avec le conseiller pédagogique de l’école et le psychologue scolaire.
Finalement, nous avons été en mesure d’utiliser la technologie pour communiquer avec les centres de soins tertiaires, et nous avons même eu le privilège de recevoir la visite de spécialistes, mais nous avons dû concevoir notre propre modèle. Ce qui est ressorti, premièrement, c’est le volet d’éducation; renseigner les jeunes dès un jeune âge, et particulièrement au moment où ils suivent leur formation en santé sexuelle, sur les dangers de l’alcool. C’était impressionnant. Mon conseiller pédagogique à Twillingate a assumé cette responsabilité, et j’ai ensuite trouvé intéressant, lorsque j’ai visité l’école et que j’ai donné des séances, de constater soudainement une bien plus grande sensibilisation aux dangers de l’alcool pendant la grossesse. J’ai trouvé cela particulièrement rafraîchissant.
La deuxième chose, c’est qu’il est important, dans tout modèle de soins primaires et dans les collectivités rurales, d’essayer d’élaborer le type de modèle que nous avions établi. Ce qui m’a surpris, au bout du compte, c’est que nous avons pu composer avec beaucoup des critères diagnostiques complexes sans nécessairement avoir à nous retrouver dans un environnement extérieur de l’environnement d’origine, en devant traiter avec de nombreux spécialistes, quelque chose qui aurait été intimidant.
Donc, l’éducation dès le début, au niveau primaire, l’élaboration de modules dans votre collectivité à l’aide de la technologie pour accéder aux besoins de niveau élevé et, troisièmement, l’utilisation de votre communauté au sens large. Par exemple, nous tenions des séances à l’institut local des femmes, au Club des lions, au Club Kiwanis. Nous passions la journée à renseigner les gens sur l’autisme, l’ETCAF et d’autres spectres. Il est intéressant de voir à quel point la collectivité était réceptive à ce sujet. Une partie de cela tient aux initiatives communautaires sur le terrain également.
La sénatrice Muggli : Merci, sénateur Ravalia, d’apporter votre énergie à ce sujet important. J’ai travaillé pendant de nombreuses années dans le domaine de la santé mentale et des dépendances et assumé la responsabilité des activités d’un programme axé sur l’ETCAF, donc je comprends tout ce que vous dites. Notre psychologue s’envolait pour le Nord tous les deux mois pour rencontrer peut-être trois personnes. Les évaluations prennent beaucoup de temps, ce sont des heures et des heures. C’est très difficile.
Ma question porte sur les mesures à prendre en matière de formation. Puisqu’il nous manque un très grand nombre de psychiatres et de psychologues pour enfants, jeunes et adultes et de personnes qui sont même en mesure de fournir un diagnostic initial, y a-t-il un rôle à jouer pour un institut de formation national ou peut-être le gouvernement fédéral afin de soutenir les chaires de recherche dans ce domaine? J’aimerais entendre vos réflexions à ce sujet.
Le sénateur Ravalia : Certainement, et merci beaucoup du travail que vous avez réalisé dans ce domaine. C’est très impressionnant et très instructif pour moi également.
Ce dont je me suis rendu compte, non seulement du point de vue d’une affection comme le trouble causé par l’alcoolisation fœtale, mais des limites plus larges en matière de soins primaires qui existent dans notre pays, c’est que, depuis beaucoup trop longtemps, nous nous sommes beaucoup trop concentrés sur le modèle des médecins, alors que, en fait, nous avons des personnes comme des psychologues, des travailleurs sociaux, des infirmières praticiennes, des ergothérapeutes et des pharmaciens qui peuvent eux-mêmes relever ces défis.
Dans ma collectivité, nous avions trois infirmières praticiennes. L’une d’entre elles se focalisait sur les problèmes de santé mentale, et l’ETCAF faisait donc partie de son portefeuille. S’il y avait une conférence nationale, un module de formation ou des cliniques de développement qui se déroulaient dans des centres de soins tertiaires, nous l’aidions à s’y rendre, et elle revenait avec les connaissances et devenait une experte locale. Elle a fait la même chose pour, par exemple, la maladie pulmonaire obstructive chronique, ou MPOC, le diabète ou la ménopause, etc.
Les universités peuvent envisager des modules de formation de rechange qui ne sont pas nécessairement fondés ou orientés sur les médecins pour effectuer l’évaluation préliminaire, puis pour que les exigences subséquentes plus détaillées passent au niveau tertiaire.
La sénatrice Muggli : L’un des problèmes liés à l’ETCAF tient certainement aux coûts incroyables de l’incarcération et de l’itinérance. L’évaluation même des coûts réels est presque impossible à faire, parce que, en tant qu’épidémiologiste, il faudrait établir une approximation des coûts de l’itinérance ou des économies liées à l’absence d’itinérance. Je m’interroge sur le lien entre l’itinérance et l’ETCAF.
Le sénateur Ravalia : Je pense que les preuves sont très claires. Ce qui m’a particulièrement touché, ce sont les conversations que j’ai eues avec certains de nos collègues du Sénat, et je m’arrête un instant pour réfléchir à mon lien profond avec le sénateur Murray Sinclair. Dieu ait son âme.
Je pense aux nombreuses discussions que nous avons eues sur ce domaine. Dans le cadre de son travail, il a reconnu que l’ETCAF était un élément très critique pour ce qui est de nos populations incarcérées; d’où les appels à l’action 33 et 34 du rapport de la Commission de vérité et réconciliation.
De plus, la sénatrice Pate et le sénateur Arnot en ont aussi parlé en détail.
Nous nous retrouvons dans des situations où les personnes vulnérables atteintes de l’ETCAF sont incarcérées. Elles sont extrêmement vulnérables et étiquetées comme étant perturbatrices, anxieuses, instables mentalement, etc. Elles sont souvent jetées en isolement cellulaire et maltraitées par d’autres membres de la population carcérale. C’est une partie critique. Le diagnostic précoce, la prévention et la capacité d’adaptation permettraient, espérons-le, de réduire cette lente spirale vers l’itinérance et l’incarcération.
La sénatrice Senior : Merci.
J’aimerais comprendre ce sur quoi vous venez de terminer, soit la capacité d’adaptation. À quoi cela ressemble-t-il à l’échelon communautaire? Comment aide-t-on les personnes qui font l’objet d’une évaluation, d’un diagnostic et, faute de meilleur mot, d’un traitement ou d’un soutien dans la communauté?
Le sénateur Ravalia : Merci beaucoup de poser la question.
Encore une fois, je vais revenir à ma propre expérience pratique dans ce domaine. Je pense à un jeune homme de ma collectivité qui avait reçu un diagnostic de trouble neurodéveloppemental. Il a fini par recevoir un diagnostic de l’ETCAF, mais on l’a repéré rapidement. Nous avons créé un programme scolaire spécialisé pour lui. Il a pu rester dans la salle de classe régulière, mais il était en tout temps accompagné d’un étudiant-assistant. Il se présentait donc aux évaluations ou aux examens, et il se voyait accorder tout le temps supplémentaire dont il avait besoin.
Il a fini par terminer sa 12e année. Le plus touchant, c’est que ses camarades l’ont choisi cette année-là pour prononcer le discours d’adieu, afin qu’il s’adresse à la communauté. S’il y a une chose que Terre-Neuve-et-Labrador m’a enseignée, c’est que l’esprit altruiste et la spiritualité ont de profondes racines dans la communauté.
Il a ensuite poursuivi une formation professionnelle, mais comme nous avions le cadre concernant ses difficultés, il est allé dans une petite collectivité où il a appris à manipuler de l’équipement lourd. Ensuite, il est allé travailler en Alberta, à Fort McMurray. C’est une histoire de réussite.
Cependant, à l’autre bout du spectre, il y a aussi des personnes qui ont eu des diagnostics tardifs, qui se sont retrouvées sous une pile d’évaluations de santé mentale différentes, de médicaments, qui ont connu une lente spirale vers la consommation de drogues, y compris la cocaïne et la méthamphétamine. Elles ont fini par être incarcérées.
Le diagnostic précoce, la reconnaissance et la mise en place de ce qui pourrait être des solutions relativement rentables peuvent déboucher sur un résultat très positif.
[Français]
Le sénateur Boudreau : Merci à notre collègue de s’être joint à nous aujourd’hui sur ce sujet très important. Je vous félicite pour cette initiative. Évidemment, l’objectif du projet de loi, c’est de confier au gouvernement fédéral le mandat de développer une stratégie nationale pour traiter cette maladie.
En faisant la lecture de la documentation qui nous a été fournie pour préparer cette rencontre, on se rend compte que, au début des années 2000, l’Agence de la santé publique du Canada avait développé une stratégie nationale.
Évidemment, si nous sommes ici 20 ans plus tard, c’est un signe que la première stratégie n’a pas très bien fonctionné. J’aimerais vous entendre là-dessus. Où avons-nous échoué? Quels sont les erreurs, les oublis ou les omissions qui ont été faits lors de la première stratégie, et comment pourrait-on se reprendre cette fois-ci?
[Traduction]
Le sénateur Ravalia : Merci beaucoup d’avoir posé cette question, sénateur Boudreau.
Je pense que le cadre de 2025 était un élément fondamental important. Ce cadre a assurément permis d’augmenter la sensibilisation, et il a présenté et facilité certains programmes communautaires. Il a commencé à contribuer aux fondements d’une recherche fondamentale, et on a encouragé le diagnostic précoce.
Le défi que nous avons dû relever — et c’est l’une des raisons pour lesquelles j’ai décidé d’aller de l’avant avec mon projet de loi — c’est que le cadre de 2005 ne nous a pas offert des résultats mesurables. De plus, sa mise en œuvre a été inconstante. La mise en œuvre s’est faite dans des domaines où les grandes collectivités avaient des capacités, mais si vous alliez dans le Nord du Labrador ou jusqu’aux territoires, il n’y avait peut-être pas la même sensibilisation que ce que l’on voyait à Toronto ou à Montréal.
Un élément particulièrement essentiel de l’initiative de 2005, c’est que l’on s’est peu concentré sur le soutien sur toute la durée de vie. Nous nous sommes beaucoup concentrés sur les diagnostics et l’avenue pédiatrique, mais nous oublions que les personnes atteintes de l’ETCAF éprouvent des défis tout au long de leur vie. Si nous ne sommes pas en mesure de mettre cela en œuvre dans le cadre de notre stratégie plus large, nous laissons de côté un très grand nombre de personnes susceptibles de perdre le contrôle.
J’ai aussi l’impression que cette initiative particulière en 2005 n’a pas suffisamment mis l’accent sur la stigmatisation et la sensibilisation. J’espère que mon projet de loi présentera cet élément, à savoir que nous n’avons pas besoin de stigmatiser les personnes qui ont peut-être été exposées à l’alcool pendant la période prénatale ni de les pointer du doigt.
De plus, je pense que cette initiative particulière n’avait pas fait l’objet de consultations autochtones, et, à mesure que nous avançons et avons des champions, comme la sénatrice Muggli, qui en parlent, la consultation des Autochtones, les partenariats, le leadership et la capacité de renseigner, d’éduquer et de fournir des renseignements à nos frères et sœurs autochtones sont un élément essentiel à côté duquel nous étions passés en 2005.
En outre, même s’il s’agissait d’une initiative de santé publique, il n’y a pas eu suffisamment de consultation intersectorielle, à mon avis. Nous n’avons pas suffisamment engagé le dialogue avec les ministères de l’Éducation ou les autorités responsables de l’éducation sur le terrain. Les services sociaux n’ont pas été inclus. Toute l’avenue de la justice a également été laissée de côté.
L’initiative de 2005 constitue donc une belle base sur laquelle nous pouvons nous appuyer pour inclure ces éléments. J’espère qu’elle sera évolutive. Si elle se trouve à la table du ministre et que de nouvelles initiatives et de nouveaux critères diagnostiques sont proposés, et que nous pouvons obtenir d’autres renseignements de nos partenaires internationaux, cela nous permettra d’aller de l’avant.
[Français]
La sénatrice Mégie : Merci à notre collègue d’être avec nous ce matin. L’Agence de la santé publique du Canada est en train de travailler sur un cadre pour les troubles du spectre de l’autisme depuis que le projet de loi a reçu la sanction royale.
Quels enseignements peut-on appliquer au cadre national sur les troubles du spectre de l’alcoolisation fœtale, ou TSAF?
La raison pour laquelle je vous pose la question, c’est que j’ai participé à une activité que vous avez organisée, et il y a des personnes qui nous ont dit que les gens ont peur et qu’ils préfèrent dire que leur enfant est autiste pour qu’il soit moins stigmatisé. Certains disent que quand un enfant reçoit un diagnostic de TSAF, on va dire que la mère était alcoolique et que ce n’est pas grave. Donc, c’est comme si c’était sa faute.
Est-ce qu’il y a un lien qui pourrait être fait avec ce qui est en train de se développer pour les troubles du spectre de l’autisme? Est-ce qu’on pourrait se servir de cela pour le TSAF?
[Traduction]
Le sénateur Ravalia : Les cadres nationaux antérieurs, y compris pour l’autisme, le diabète et les soins palliatifs, ont établi une base de référence importante à partir de laquelle nous pouvons croître.
Vous avez évoqué la question cruciale de la stigmatisation. De façon générale, il s’agit probablement de notre plus grand défi si nous devons aller de l’avant avec ce projet de loi. La perspective de l’utilisation appropriée des outils d’enseignement et de la déstigmatisation peut prendre un certain temps. Cela peut prendre une génération. Mais il y a de nombreux points positifs à l’issue de la stratégie sur l’autisme à transposer dans mon projet de loi pour ce qui est des aspects dont nous avons déjà parlé : accroître la sensibilisation, les programmes communautaires, les contributions de la recherche fondamentale et l’encouragement d’un diagnostic précoce.
On peut poser des diagnostics en toute confidentialité. Lorsque nous dirigions nos cliniques locales, nous avons éliminé la stigmatisation dès le début. Ce qui nous intéressait, c’était le fait d’avoir devant nous une personne, un jeune garçon, une jeune fille ou un bébé, qui présentait des caractéristiques évidentes de difficultés neurodéveloppementales. Concentrons-nous sur la façon de corriger les dommages plutôt que sur l’aspect lié à l’alcool.
Je pense qu’il y a des leçons à tirer. Et il y a des leçons à appliquer. Mais, en tant que société, nous avons tendance à juger, à stigmatiser, à rabaisser et, malheureusement, à marginaliser ces types de personnes, et lorsque nous le faisons, nous les jetons encore plus loin dans un profond puits d’obscurité, et c’est ce sur quoi nous devons travailler. Si nous commençons rapidement ce processus d’éducation — l’éducation à l’enfance, à l’école secondaire — alors nous réduisons au minimum les insultes et l’étiquetage.
[Français]
La sénatrice Mégie : Dans le système carcéral, dans les prisons, y a-t-il eu, à un certain moment, un effort pour dire que c’est ce syndrome qui explique pourquoi une personne a commis des délits et s’est retrouvée en prison? Savez-vous s’il y a des gens qui ont pensé à mener cette recherche?
[Traduction]
Le sénateur Ravalia : Oui, je pense que ces données sont assez claires. Je pense que le travail réalisé par les dirigeants à cet égard, y compris les personnes que j’ai mentionnées auparavant… mais c’est le manque de ressources et de mesures de soutien qui nous a amenés à cet endroit. Je vous remercie.
La sénatrice Burey : Sénateur Ravalia, merci d’avoir réalisé cet effort, et je remercie le sénateur Brazeau d’avoir fait équipe avec vous. C’est fantastique. Bien sûr, cela faisait et fait partie de mon travail en tant que pédiatre. Je suis aussi très heureuse que vous vous appuyiez sur les cadres existants antérieurs et élargissiez certains des domaines qui n’ont pas été abordés. Merci beaucoup.
Ma question est la suivante : vous avez parlé de soutenir les personnes pendant toute leur vie, ce qui est exceptionnel. Mais ce que j’ai trouvé… et c’est très important. Je veux revenir au soutien familial, parce que je pense que cela va vraiment contribuer à la réussite d’une initiative. Les soignants ont été cruellement négligés.
Nous avons parlé du cadre relatif au trouble du spectre de l’autisme. Quels types de mesures de soutien pour les soignants — du point de vue financier, des prestations fiscales pour personnes handicapées — pensez-vous que le projet de loi pourrait apporter?
Le sénateur Ravalia : Merci beaucoup, sénatrice Burey, et merci du travail que vous faites dans ce domaine, lequel, encore une fois, a été très utile et très important.
Vous soulevez un point crucial. Je sais que, encore une fois, dans le cadre de ma pratique, lorsque je travaillais auprès de membres de la famille, en particulier des soignants, l’incidence d’épuisement professionnel était très élevée. J’espère que ce cadre explorera les mesures de soutien offertes aux soignants, y compris les programmes de répit, qu’on a élaborés dans ma collectivité, qui étaient utiles lorsque maman et papa pouvaient prendre deux semaines de congé et aller en Floride, sachant que l’on s’occupait de leur enfant pendant leur absence.
Les programmes de répit sont en quelque sorte devenus une importante solution provisoire. Nous pourrions également envisager une formation pour gérer les difficultés propres à l’ETCAF parce que, surtout en présence de labilité émotionnelle et de crises physiques et à mesure que l’enfant vieillit, cela peut être très difficile à gérer pour un parent. Il est très utile d’avoir des programmes de formation particuliers et de pouvoir réduire au minimum ces risques.
L’accès à des mesures de soutien en santé mentale est un autre élément crucial, et une chose qui a bien fonctionné dans ma collectivité était un programme de soutien destiné aux familles, qui créait en quelque sorte un programme de sensibilisation au sein des familles dont les membres étaient touchés par l’ETCAF.
De plus, j’espère que le ministre se penchera sur des éléments comme des allégements pour les personnes handicapées, des allégements fiscaux et d’autres incitatifs financiers, mais c’est cette responsabilité permanente des soignants et les énormes conséquences négatives que vous avez constatées chez les principaux fournisseurs de soins auxquels on doit vraiment répondre, je pense, et il s’agit d’un élément essentiel du projet de loi.
La sénatrice Burey : J’allais juste souligner l’importance de l’éducation et de la sensibilisation, car près de 40 % des grossesses ne sont pas planifiées, alors vous ne pouvez pas attendre que… pourriez-vous simplement en dire plus sur l’aspect qui concerne l’éducation?
Le sénateur Ravalia : C’est vraiment essentiel. Même avec l’accès d’aujourd’hui aux médias sociaux et à de nombreuses plateformes éducatives, c’est un domaine qui, malheureusement, semble manquer, qui est dans l’ombre et, comme je l’ai dit plus tôt, il est crucial de commencer par l’éducation principalement et par des programmes éducatifs, en insistant sur cet aspect à la faculté de médecine et auprès des résidents et en continuant de le souligner tout particulièrement pour les personnes qui fournissent des soins prénatals.
La présidente : Nous allons maintenant passer au deuxième tour. Nous avons probablement le temps d’entendre les trois personnes que j’ai sur ma liste, soit la sénatrice Seidman, le sénateur Brazeau et le sénateur Cormier. Veuillez être concis et vous en tenir au temps prévu. Merci.
La sénatrice Seidman : Merci, sénateur Ravalia, d’avoir si bien continué de répondre à nos questions.
Je veux revenir au programme sur le trouble du spectre de l’alcoolisation fœtale de l’Agence de la santé publique du Canada dont nous avons parlé, et nous avons posé plusieurs questions à ce sujet. L’agence a préparé un rapport qu’elle a publié en 2023, il s’agit donc d’un programme actif et en cours. Elle ne s’est pas contentée de publier un cadre en 2005 qui a maintenant stagné. C’est un programme actif. En fait, si je regarde ses recommandations, l’une d’entre elles est de continuer de renforcer les efforts de surveillance en mettant l’accent sur l’établissement d’éléments constitutifs pour la surveillance, et l’une porte sur le renforcement de l’approche de mesures du rendement du programme en mettant l’accent sur les répercussions. Avez-vous rencontré les responsables et avez-vous essayé de savoir comment votre projet de loi pourrait s’imbriquer dans le programme existant?
Le sénateur Ravalia : Merci beaucoup d’avoir posé cette question, sénatrice Seidman. Nous ne les avons pas directement rencontrés, mais nous avons évidemment utilisé ces données dans le cadre de notre travail en amont. Le travail que fait l’agence et le type d’éléments fondateurs préemptifs sont essentiels, et cela s’imbriquerait très bien dans notre évolution à long terme de ce programme. Ce serait une voie d’accès critique. La communication avec la santé publique, qu’il s’agisse de la vaccination ou d’une foule d’autres questions, y compris la résistance antimicrobienne... je pense que cela s’inscrira magnifiquement dans ce domaine également, et ce partenariat est essentiel. Nous espérons que, dans l’avenir… Je sais que CanFASD a travaillé en étroite collaboration avec elle également.
Le sénateur Brazeau : Lorsque nous parlons de stigmatisation, que pensez-vous du rôle que les médecins, les experts de la santé et autres spécialistes ont à jouer pour réduire la stigmatisation? Contrairement à la sénatrice Petitclerc, je me souviens d’une période où les médecins disaient aux femmes que boire même des petites quantités de vin rouge était bon pour elles et, même plus près de leur accouchement, que boire du vin rouge était une bonne chose, et je me rappelle que cela se passait dans les années 1990 et les années 2000. Quel rôle ont-ils à jouer pour ce qui est de, je ne sais pas, produire une campagne afin de sensibiliser la population?
Le sénateur Ravalia : Encore une fois, merci beaucoup, sénateur Brazeau. Votre travail à ce sujet a été essentiel. J’ai l’impression que, depuis que votre projet de loi a commencé à germer et à aller de l’avant, je lis de plus en plus de choses au sujet de la sensibilisation à l’alcool. Des gens sont en fait venus me dire qu’ils n’avaient aucune idée que l’alcool pouvait causer le cancer. Je vous en suis donc reconnaissant.
Je pense que nous pouvons travailler conjointement pour renforcer cette éducation. Lorsque j’ai suivi ma formation en Rhodésie, qui est maintenant le Zimbabwe, dans les années 1980, nous avions des conférences matinales, puis tout le monde allait au pub de la faculté de médecine, où les gens buvaient deux, trois ou quatre chopines de bière avant de retourner à leur clinique d’après-midi. C’était la chose cool à faire, en fumant des cigarettes au battement des tambours.
Heureusement, nous avons fait beaucoup de chemin depuis, mais il n’y a toujours pas assez d’accent. Je pense qu’il y a encore beaucoup de pression sociale pour boire occasionnellement, une lampée de whisky à l’heure du coucher ou n’importe quoi fera l’affaire. Il nous faudra beaucoup de temps pour faire passer ce message.
Mais je pense que ce type d’évolution du projet de loi et, fait encore plus important, le travail que vous faites seront les catalyseurs qui nous permettront de changer.
Le sénateur Brazeau : Espérons-le. À ce sujet, il y a des avertissements aux États-Unis concernant la grossesse, mais nous n’avons rien ici au Canada. Merci de votre travail.
Le sénateur Ravalia : Le dilemme est toujours que le gouvernement fédéral est responsable de la production, de l’imposition et de l’étiquetage, et les provinces sont responsables de la distribution au détail, de l’établissement des prix et des limites d’âge. Il y a toujours ce fossé, et c’est là où le bât blesse avec une fédération et 13 fiefs qui essaient de trouver un terrain d’entente.
Le sénateur Brazeau : Je suis autochtone. Je le sais.
Le sénateur Cormier : Ma question fera suite à la dernière déclaration que vous avez formulée — c’est un excellent cadre national, il est bien intentionné — mais, bien sûr, la réussite de ce cadre dépend de la façon dont les provinces et les territoires vont l’appliquer et y accorder la priorité. Nous savons que le gouvernement fédéral a des ententes avec les provinces et les territoires.
Si vous étiez le ministre responsable de ce cadre, comment convaincriez-vous les provinces et les territoires que, parmi toutes les questions et toutes les mesures — c’est multifactoriel — comment les convaincriez-vous d’accorder la priorité à cette question?
Le sénateur Ravalia : Selon moi, cela revient à la manière dont nous avons toujours géré les transferts fédéraux. L’argent est envoyé à la province, qui l’utilise à sa convenance. L’argent sert pour des choses comme les soins cardiologiques et les prothèses articulaires.
Si j’étais ministre, je voudrais instaurer une obligation redditionnelle, et mon enveloppe de financement pour chaque province et territoire inclurait des fonds réservés pour ce type de domaine, et pas seulement pour le TCAF, mais aussi, par exemple, pour les troubles neurodéveloppementaux chez l’enfant. Ainsi, chaque province recevrait, chaque année, un financement spécial pour ce domaine précis.
C’est purement hypothétique, et peut-être même que c’est irréaliste. Mais, tant et aussi longtemps qu’il n’y a pas d’obligation redditionnelle liée à l’argent versé, les fonds continueront d’être utilisés pour toutes sortes de choses différentes. Lorsque je travaillais de près avec les services de santé de Terre-Neuve-et-Labrador, lorsque j’ai rencontré des sous-ministres, c’était stupéfiant de voir de quelle manière l’argent était dépensé et combien de domaines, qui n’avaient pas les problèmes les plus criants, ne recevaient rien du tout. Malheureusement, comme vous le savez, la pédiatrie a historiquement été sous-financée. Elle coûte vraiment très cher au système.
Le sénateur Cormier : Je tiens à vous remercier de votre travail incroyable, et je tiens à remercier le sénateur Brazeau pour le travail qu’il fait à ce chapitre, qui lui tient très à cœur. Merci.
La présidente : C’est tout pour le premier groupe de témoins. J’aimerais remercier le sénateur Ravalia de son témoignage d’aujourd’hui, de ses excellentes réponses et de son approche méticuleuse, qui nous a permis de bien comprendre de quoi il est question.
Nous accueillons maintenant, en personne, M. Michael Collins, vice-président, Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques, de l’Agence de la santé publique du Canada; Mme Sally Scott, directrice exécutive, Division de l’enfance, de l’Agence de la santé publique du Canada; Mme Jennifer Novak, directrice générale, Direction du bien-être mental et de la promotion de la santé, Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits, des Services aux Autochtones Canada; et Mme Maria Sterniczuk, directrice exécutive, Bureau des initiatives stratégiques et de la mobilisation, de Santé Canada. Merci de vous joindre à nous aujourd’hui. Nous allons écouter d’abord la déclaration préliminaire de M. Collins, puis celle de Mme Novak. Vous avez chacun cinq minutes, puis nous passerons aux questions des membres du comité.
Monsieur Collins, allez-y.
Michael Collins, vice-président, Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques, Agence de la santé publique du Canada : Merci beaucoup. Comme madame la présidente vient de le dire, je m’appelle Michael Collins. Je suis vice-président de la Direction générale de la promotion de la santé et de la prévention des maladies chroniques de l’Agence de la santé publique du Canada, l’ASPC. Je suis très content d’avoir ici le soutien de mes collègues de l’Agence de la santé publique du Canada, Mme Sally Scott, de la Division de l’enfance, et Mme Maria Sterniczuk, directrice exécutive du Bureau des initiatives stratégiques et de la mobilisation, le BISM. Je crois également que Mme Danielle Bryan, de la Direction générale des substances contrôlées et du cannabis à Santé Canada, s’est jointe à nous; ainsi que, bien sûr, Mme Jennifer Novak, qui fera sa déclaration préliminaire sous peu, de Service aux Autochtones Canada.
[Français]
Avant de commencer, j’aimerais souligner que nous sommes réunis aujourd’hui sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinabe.
Je vous remercie toutes et tous de nous accueillir aujourd’hui dans le cadre de l’examen du projet de loi S-253. Comme vous le savez, l’ensemble des troubles causés par l’alcoolisation fœtale (ETCAF) sont des troubles à vie causés par l’exposition prénatale à l’alcool. Les troubles causés par l’alcoolisation fœtale constituent un grave problème de santé publique, mais ils peuvent être évités grâce à un soutien adéquat.
[Traduction]
Dans le cadre de son rôle visant à promouvoir la santé et la prévenir et contrôler les maladies, l’Agence de la santé publique contribue principalement à la lutte contre le TCAF, principalement dans une perspective de prévention ainsi que d’élaboration et de connaissances et d’échange de données. J’aimerais attirer votre attention sur deux ou trois choses, sur des exemples concrets : nous finançons des projets à durée limitée visant à élaborer des outils, à développer des ressources et des connaissances applicables à l’échelle nationale dans le Fonds national d’aide aux projets stratégiques sur le TCAF; nous finançons des programmes communautaires visant à soutenir des facteurs de protection plus larges pour la santé des enfants et la prévention de méfaits associés aux substances, y compris le TCAF; nous dirigeons également l’élaboration d’options pour faire progresser et mettre en œuvre une surveillance nationale continue du TCAF et faire le suivi des données relatives au TCAF et à l’exposition à la consommation d’alcool chez les femmes enceintes; et, pour finir, nous collaborons avec d’autres ministères et des intervenants clés sur le TCAF et l’exposition prénatale à l’alcool pour échanger des informations et des pratiques exemplaires.
Nous avons une longue histoire, puisque depuis 1999, le Fonds national d’aide aux projets stratégiques sur le TCAF a permis à l’ASPC de collaborer avec de nombreux partenaires et intervenants clés partout au Canada. Je vais vous donner rapidement quelques exemples récents : nous avons financé le Réseau canadien de recherche sur l’ensemble des troubles causés par l’alcoolisation fœtale, de 2024 à 2026, pour concevoir et mettre à l’essai un cours en ligne afin de mieux outiller le personnel de première ligne des programmes pour l’enfance afin qu’il puisse soutenir les enfants et les familles aux prises avec des difficultés liées au TCAF.
Un deuxième exemple — et nous allons peut-être en parler plus tard — est le financement que nous versons à l’Académie canadienne des sciences de la santé, un projet lancé en 2023 qui prendra fin en 2025, pour réaliser une évaluation scientifique complète sur le TCAF, qui comprend un examen des données, de la littérature, des politiques, des programmes et des pratiques liés au TCAF, ainsi qu’une collaboration avec des partenaires clés afin de cerner les défis et les possibilités de renforcer l’approche du Canada à l’égard de la lutte contre le TCAF. Nous prévoyons recevoir le rapport de l’Académie canadienne des sciences de la santé au début de 2025.
Même si le rôle de l’agence consiste principalement à promouvoir des grossesses en santé et à prévenir le TCAF, nous savons que la lutte contre ce problème et ses conséquences nécessite la participation de partenaires de partout au pays et de divers secteurs de compétence, comme cela a été dit par le premier groupe de témoins, et de divers secteurs de la société, que ce soit la santé, l’éducation, les services sociaux, le système juridique et ainsi de suite.
Comme plusieurs personnes ici présentes le savent peut-être, dès 2003, le gouvernement fédéral a répondu à l’appel à l’action pour un leadership relatif au TCAF en organisant des consultations nationales pour élaborer le document Ensemble des TCAF : Un Cadre d’action. Ce cadre complet a présenté une vision de la façon dont les administrations pourraient travailler ensemble pour parler de la prévention du TCAF et améliorer les résultats pour les personnes touchées.
Toutefois — et cela nous amène là où nous en sommes aujourd’hui —, malgré ces efforts, des défis majeurs persistent vu la complexité de la résolution des enjeux à tous les niveaux du gouvernement et dans tous les secteurs. Comme vous le savez probablement, les personnes atteintes du TCAF peuvent faire face à de nombreux défis et, dans de nombreux cas, elles ont besoin d’aide toute leur vie. Elles sont soutenues par une vaste gamme de services dans des domaines de compétence principalement provinciale et territoriale, comme la santé et l’éducation. D’autres domaines, comme la surveillance et la collecte de données, sont une responsabilité partagée du gouvernement fédéral et des gouvernements provinciaux et territoriaux.
En conclusion, je crois que nous savons que, pour régler le problème du TCAF, au Canada, nous devons adopter une approche globale et concertée. Nous pouvons nous fonder sur beaucoup de choses. Vous pensez que je me suis un peu laissé emporter, mais je crois que nous sommes sur la bonne voie. Le rapport de l’Académie canadienne des sciences de la santé, dont j’ai parlé plus tôt, nous fournira plus d’informations, fondées sur des données probantes, sur les efforts supplémentaires nécessaires. Cela aidera à éclairer les mesures à prendre à l’échelle nationale, dans plusieurs secteurs et plusieurs administrations. Le rapport nous aidera également à prioriser les secteurs clés du leadership fédéral dans l’ensemble du gouvernement du Canada.
C’est tout ce que j’avais à dire, et je vous remercie de m’avoir écouté.
La présidente : Merci. Madame Novak, s’il vous plaît, allez-y.
Jennifer Novak, directrice générale, Direction du bien-être mental et de la promotion de la santé, Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits, Services aux Autochtones Canada : Je vous remercie de m’avoir invitée à comparaître devant vous, aujourd’hui. Je suis privilégiée d’être ici.
Avant de commencer, j’aimerais souligner que nous nous trouvons sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin Anishinaabeg.
Même si les Services aux Autochtones du Canada ont un rôle limité dans votre étude du projet de loi S-253, je vais essayer de vous fournir un certain contexte en ce qui concerne les expériences des populations autochtones relatives au trouble du spectre de l’alcoolisation fœtale ainsi que les services actuellement soutenus par le ministère.
Je crois qu’il est devenu très clair dans la dernière heure qu’il est largement admis que les taux du TCAF au Canada ne sont pas bien surveillés ou voire même signalés. C’est encore plus évident dans les populations autochtones en raison d’un certain nombre de facteurs interdépendants. Premièrement, la stigmatisation et la honte associées au TCAF restent considérables, puisque ce trouble est une conséquence directe de la consommation d’alcool pendant la grossesse. C’est pourquoi les parents ou les soignants évitent à demander un diagnostic et du soutien.
Deuxièmement, pour les populations autochtones en particulier, le racisme et la discrimination dans le système de la santé continuent d’aggraver les difficultés liées à la recherche et à l’obtention d’un diagnostic ainsi qu’à l’accès au soutien. Le décès de Joyce Echaquan nous rappelle tous que, pour de nombreux Autochtones, le racisme dans le système de santé du Canada reste une réalité qui peut avoir des répercussions négatives sur les soins et peut même, parfois, avoir des conséquences désastreuses.
Mais, pour ceux qui cherchent, au bout du compte, à obtenir un traitement, le TCAF peut se présenter de la même manière que d’autres conditions, comme nous l’avons entendu précédemment, ayant une incidence sur le développement neurologique. Ainsi, à moins d’une consommation notoire d’alcool pendant la grossesse, le TCAF peut ne pas être identifié ou, en fait, à l’autre extrémité du spectre, peut être faussement diagnostiqué.
Par exemple, au Canada, les enfants autochtones autistes sont plus susceptibles que les enfants allochtones de recevoir un diagnostic de TCAF, en raison des préjugés et des idées reçues des fournisseurs de soins de santé sur les peuples autochtones et la consommation d’alcool.
De même, les pratiques discriminatoires largement répandues en matière de protection de l’enfance font qu’il est moins probable que la consommation d’alcool avant la naissance soit révélée par crainte de la perte de l’enfant.
Malheureusement, ces facteurs ont influencé non seulement les taux de diagnostic, mais aussi la manière dont les gens cherchent à se faire soigner. Malgré cela, de plus en plus de recherches indiquent que l’hypothèse d’une prévalence plus élevée du TCAF chez les Autochtones est erronée et que, en fait, il est probable qu’elle soit identique ou inférieure à celle dans la population canadienne en général.
Pour ce qui est des soins pour le TCAF, l’accès aux services de diagnostic est généralement limité dans le système de santé de l’ensemble du Canada. L’attente peut prendre des années. C’est le cas pour la population générale, mais c’est encore pire pour les populations autochtones du Canada. Le diagnostic et le traitement du TCAF sont accessibles dans les systèmes de santé provinciaux et territoriaux, y compris pour les personnes vivant dans les communautés des Premières Nations et des Inuits. La Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits, là où je travaille, verse 17,9 millions de dollars par année pour financer des programmes de prévention et d’intervention en matière de TCAF dans les communautés, afin d’aider les familles et les soignants à communiquer avec les services provinciaux, y compris les équipes multidisciplinaires de diagnostic et d’autres formes de soutien.
Cela dit, la Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits soutient également l’élaboration, la prestation et la gestion de programmes, de services et d’initiatives adaptés à la culture des Premières Nations vivant en communautés. On espère que la mise en place de programmes adaptés à la culture améliorera les résultats en matière de santé pour les personnes qui cherchent à se faire soigner.
Toutefois, les partenaires autochtones de tout le pays ont exprimé des avis partagés sur les programmes ciblés de prévention ou d’intervention en matière de TCAF. De plus en plus, les communautés hésitent à fournir des services sous l’étiquette de TCAF en raison de la stigmatisation mentionnée précédemment, préférant se concentrer sur la santé globale de la mère et de l’enfant, en traitant la personne dans son ensemble plutôt qu’une condition. Ce soutien communautaire de santé maternelle et infantile aide les femmes et les familles à s’orienter dans un système de santé complexe et à traiter toute une série de conditions. Pour répondre à ce changement de cap et atténuer les craintes de discrimination, certaines communautés ont choisi de combiner les investissements liés au TCAF et ceux liés à la santé maternelle et infantile, permettant ainsi aux personnes qui ont besoin d’un éventail de services d’y accéder sans crainte d’être stigmatisées.
Services aux Autochtones Canada continue de travailler avec les communautés pour soutenir la prévention, l’intervention et les services d’orientation culturellement appropriés, selon les modalités choisies par les communautés, et pour améliorer les soins dans tout le spectre, que ce soit à l’échelon communautaire, provincial ou fédéral.
Madame la présidente, merci de m’avoir donné l’occasion de vous parler de cette question. J’ai hâte de répondre à vos questions.
La présidente : Merci, madame Novak.
Sénatrices et sénateurs, pour ce groupe de témoins, vous disposez chacun de quatre minutes pour poser vos questions et entendre les réponses. S’il vous plaît, précisez à qui s’adresse la question.
La sénatrice Osler : Merci aux témoins d’être parmi nous aujourd’hui. Ma question porte sur les données, sur le fait que les données sont insuffisantes. Elle s’adresse donc à tous les témoins.
Est-ce que vous avez des données sur la proportion de personnes atteintes d’un trouble causé par l’alcoolisation fœtale dans le système canadien de justice criminelle? Également, est-ce qu’un nouveau cadre national pourrait offrir davantage de soutiens aux personnes atteintes du TCAF, qui sont présentement dans le système de justice criminelle?
M. Collins : Désolé, cela me semblait être une question ouverte, et je vous remercie de la question. Je ne suis vraiment pas content de vous dire que la réponse n’est pas claire. Comme on l’a dit précédemment, c’est très difficile de recueillir des données pour l’ensemble de la population. Nous entendons parler de 0,1 % à 3 %; ce sont les statistiques données pour différentes populations.
Donc, non, je ne le sais pas. L’Agence de la santé publique du Canada n’a pas l’information, du moins à ma connaissance. Nous allons y revenir et y réfléchir pour être sûr à 100 % de notre réponse, mais nous n’avons pas de données précises sur le pourcentage de personnes atteintes de TSAF dans le système de justice criminelle.
En ce qui concerne la deuxième partie de la question — le projet de loi S-253 peut-il —, je crois que oui, c’est possible. Lorsque nous regardons ce qui est proposé, nous tenons compte, d’abord et avant tout, de ce qui relève de la compétence fédérale. Sur quoi pouvons-nous nous appuyer et que pouvons-nous faire pour que cela soit fait également à l’échelon provincial et territorial?
La surveillance — je répète qu’il faut trouver un meilleur terme —, mais la collecte de données et le travail faits par l’Agence de la santé publique est l’un des endroits où il est possible d’en faire plus. Nous avons des idées et des projets pour l’avenir, donc nous pourrions explorer l’idée de tenir compte davantage du système de justice criminelle en cherchant à savoir s’il existe des ensembles de données et des moyens d’obtenir des données pour combler les lacunes potentielles. Merci.
La sénatrice Osler : J’invite tous les témoins à fournir tout...
Mme Novak : Je n’ai pas de chiffres exacts sur la représentation dans le système correctionnel. Vous devriez peut-être inviter le Service correctionnel du Canada. Il fournit des services de santé. Je sais qu’il recueille et surveille les données.
Je peux vous dire que le Centre de gouvernance de l’information des Premières Nations a mené des enquêtes. Selon notre enquête sanitaire régionale, la prévalence du TSAF chez les enfants des Premières Nations était de 0,5 %, en 2016. Lorsque nous pensons au système correctionnel, je crois que ce n’est pas un secret que les Autochtones sont surreprésentés. Je pense que nous pouvons deviner la suite.
Maria Sterniczuk, directrice exécutive, Bureau des initiatives stratégiques et de la mobilisation, Santé Canada : Malheureusement, je n’ai rien à ajouter. Je n’ai pas vu ces données à Santé Canada. Nous menons des enquêtes, certes, dans le cadre de la Stratégie canadienne sur les drogues et autres substances, sur la consommation de drogues et d’alcool des Canadiens. Mais je ne crois pas avoir vu de données précises sur le TSAF dans le système correctionnel.
La sénatrice Osler : Merci à tous les témoins.
[Français]
Le sénateur Cormier : Ma question s’adresse à Mme Novak, mais aussi à tous.
Y a-t-il un risque que les mesures prévues dans ce projet de loi ne suffisent pas à répondre à la complexité des causes structurelles qui sont sous-jacentes?
Les déterminants sociaux de la santé, la pauvreté, les traumatismes liés au colonialisme, la vie en situation d’itinérance... Il n’y a rien dans le préambule qui précise que l’enjeu associé à ce projet de loi puisse être lié à d’autres facteurs. Est-ce que le cadre national sera moins efficace si la prise en compte de tout cela n’est pas intégrée dans le projet de loi?
Mme Novak : Notre ministère et notre ministre n’ont pas encore pris position sur le projet de loi. Ce que je peux dire, c’est que même dans notre ministère, lorsqu’on regarde les enveloppes d’investissement, on a encore de grands silos.
Si on regarde l’investissement spécifique pour le TSAF, il est de 17,9 millions de dollars. Par contre, on sait que même au sein de notre ministère, il y a des investissements pour les soins maternels, les soins à la petite enfance et les ressources en éducation. Il y a même le programme du Principe de Jordan qui compte des investissements de 55 millions de dollars pour le TSAF.
Lorsqu’on commence à examiner un projet, un programme ou une stratégie, on doit regarder ce qui existe déjà et à quel endroit il y a des silos.
Nous prenons bien note de votre suggestion selon laquelle il faut adopter une approche un peu plus large et étudier nos points d’investissement, mais il faut aussi avoir une approche particulière aux interventions qui sont liées au cycle complet d’une vie.
Le sénateur Cormier : Êtes-vous d’avis que cela pourrait se faire en fonction du libellé actuel du projet de loi? C’est cela ma question, en fait.
Mme Novak : Je ne peux pas faire de commentaires sur le projet de loi, mais je peux parler de l’approche que le ministère utilise actuellement, qui est de regarder une personne dans son ensemble; cela commence dès le moment où le bébé est encore dans le ventre de sa mère jusqu’à la fin de sa vie. Nos partenaires autochtones regardent vraiment un aspect complet.
Sally Scott, directrice exécutive, Division de l’enfance, Agence de la santé publique du Canada : J’aimerais remercier le sénateur Cormier pour la question.
[Traduction]
L’Agence de la santé publique du Canada se préoccupe du sujet que vous avez abordé, à savoir une approche plus large des déterminants sociaux de la santé et des répercussions sur le TSAF. Nous travaillons sur la question en collaboration avec l’Académie canadienne des sciences de la santé.
Par rapport aux cadres de 2023 pour le TSAF, la science et les connaissances ont continué d’évoluer depuis ce temps. Nous savons maintenant qu’il y a un plus grand nombre de facteurs qui influencent le TSAF. C’est assurément quelque chose que nous allons étudier, sachant que l’on ne peut pas tenir compte seulement de la consommation d’alcool pendant la grossesse. Nous devons tenir compte des conditions de pauvreté, de la situation de la famille, des normes sociales élargies sur la consommation d’alcool, qui, je crois, ont été mentionnées plus tôt pendant la séance. Nous allons assurément en tenir compte pour la suite des choses.
Le sénateur Cormier : On dirait que la stratégie — je ne sais pas comment elle s’appelait en 2003 — avait des failles. En avez-vous tenu compte? Parce que j’ai l’impression que la stratégie fonctionnait, mais pas autant qu’elle aurait dû. Est-ce que c’est une des raisons pour lesquelles elle n’a pas fonctionné?
[Français]
Mme Scott : Je vous remercie pour la question, sénateur Cormier.
[Traduction]
Le cadre de 2003 était idéaliste. Il a été conçu dans la foulée de longues consultations nationales, et il était idéaliste. Il ne prévoyait pas de responsabilités précises. Il n’avait pas déterminé une stratégie précise, mais il a jeté les bases du changement. Certaines provinces et certains territoires sont passés à l’action et ont mis en œuvre des plans ou des stratégies sur le TSAF, par exemple le Manitoba, l’Alberta, la Colombie-Britannique et les territoires.
Nous avons également prévu des investissements axés sur des projets spécifiques pour élaborer des lignes directrices. Et le CanFASD, un intervenant clé, a élaboré des lignes directrices canadiennes pour le diagnostic et l’évaluation du TSAF. Elles ont d’ailleurs été mises à jour en 2016.
Nous avons travaillé avec la Société des obstétriciens et gynécologues pour élaborer des lignes directrices en matière de dépistage pour les professionnels de la santé. Nous avons financé des ressources et des outils précis pour les communautés à risque. Nous avons travaillé avec des partenaires autochtones comme Pauktuutit. Donc, depuis 2003, un grand nombre d’investissements ont été faits en concordance avec le cadre de 2003.
Ce que nous voyons présentement, pour la suite des choses, c’est que le moment est venu de mettre en place plus de mesures redditionnelles. Je crois que quelqu’un a parlé tout à l’heure de l’évaluation de nos investissements pour le TSAF, du besoin d’indicateurs de performance, de paramètres et de données de référence, et également du besoin de renforcer la surveillance et la coordination intergouvernementale et interministérielle. Donc, les choses évoluent. Évidemment, nous pouvons faire plus, mais je crois que nous sommes sur la bonne voie, si je peux dire les choses ainsi.
Le sénateur Cormier : Merci.
Le sénateur Brazeau : Bon après-midi à tous. Évidemment, nous parlons aujourd’hui du trouble causé par l’alcoolisation fœtale, le TSAF. Pouvez-vous nous dire ce que vous faites, chacun, pour sensibiliser et éduquer les gens sur les conséquences négatives générales de l’alcool? C’est ma première question.
Deuxième question; lorsque nous élaborons un cadre, il pourrait être le meilleur cadre au monde, mais il revient au ministre ou au gouvernement d’aujourd’hui ou de demain d’agir en conséquence.
Dans le même ordre d’idées, qu’est-ce qui devrait être inclus dans le projet de loi pour lui donner un peu plus de mordant et pour que les politiciens élus, au Canada, commencent à prendre au sérieux la consommation d’alcool?
Mme Sterniczuk : Je vous remercie de la question. Vous nous avez demandé ce que chacun d’entre nous fait pour éduquer les gens sur les méfaits de l’alcool.
Le travail sur l’alcool, à Santé Canada, se fonde sur la Stratégie canadienne sur les drogues et autres substances. La stratégie a été lancée en 2016. Elle englobe toutes les substances et fournit un cadre pour l’adoption d’une approche pangouvernementale pour l’étude de la consommation de substances et pour des politiques en matière de consommation de substances. La stratégie est soutenue par 15 ministères fédéraux.
La stratégie englobe toutes les substances parce qu’elle reconnaît la complexité de la consommation de substances. Beaucoup de gens ne consomment pas une seule substance.
La stratégie se concentre sur quatre piliers. La prévention et l’éducation sont l’un des piliers clés de la stratégie. La stratégie finance un certain nombre d’activités par l’entremise d’un programme connexe, le Programme sur l’usage et les dépendances aux substances. L’objectif est de financer des activités visant à faire mieux connaître et comprendre les effets de la consommation de substances et les risques associés et à montrer comment nous pouvons prévenir, réduire et retarder les méfaits associés à la consommation de substances.
Ces activités visent aussi la réduction de la stigmatisation. Donc, beaucoup de financement est fourni à différents organismes et instituts de recherche pour créer des programmes de prévention et d’éducation. Le travail de Santé Canada est pour cela un soutien clé.
M. Collins : J’aimerais dire quelque chose, et puis je crois que ma collègue, Mme Novak, aura quelque chose à ajouter.
Pour ce qui est de la dernière partie de la question, à savoir ce qui manque, je ne dirais pas que ce qui manque est le plus important. Selon ce que nous lisons et selon nos plans, l’Agence de la santé publique du Canada met l’accent sur l’amélioration de la collecte des données, la surveillance et les faits, dans le but, pour revenir à la question précédente, d’établir la prévalence de la chose. Ce n’est pas seulement un segment de la société, de la population, qui peut être isolé dans son coin. En fait, c’est un peu plus répandu dans la société en général qu’on veut bien le reconnaître.
Il y a des travaux sur le sujet. Mais je crois qu’il y a une occasion qui se cache sous ce qui a été proposé, ici, et qui pourrait doubler les bénéfices de ce qui peut être fait dans ce dossier. Et je dis cela en partie par commodité, parce que, une fois encore, c’est le gouvernement fédéral qui a le plus de leviers pour le faire et qu’il est un peu moins dépendant des provinces et des territoires.
Le seul autre commentaire que je ferais — et là je m’égare un peu —, d’après notre expérience d’autres cadres et plans d’action de l’Agence de la santé publique du Canada, c’est que, d’un point de vue méthodologique, certaines provinces et certains territoires devaient être harmonisés et se faire des champions dans ce domaine. Nous ne pouvons pas dire tout simplement que c’est notre priorité et nous attendre que la province du Manitoba fasse un virage à 180 degrés.
Nous devons travailler davantage en nous fondant sur ce qui existe déjà pour mettre en place cela de manière méthodique. Madame Novak, allez-y.
Mme Novak : Au bout du compte, surtout pour Services aux Autochtones Canada, nous cherchons à faire le transfert aux communautés pour qu’elles fournissent leurs propres services.
Essentiellement, nous avons travaillé avec nos partenaires, spécifiquement des Premières Nations, pour faire la promotion du Cadre du continuum du mieux-être mental des Premières Nations. Ce cadre existe pour porter un regard et présenter une réflexion sur l’équilibre de la santé mentale, physique, spirituelle et émotionnelle. Nous voulons que les gens voient cet équilibre et enrichir les vies des gens en leur donnant un but au quotidien, de l’espoir en l’avenir, un sentiment d’appartenance et d’attachement à leurs familles, à leurs communautés et à leur culture, et en donnant un sens à leur vie. Ceci est fondamental, tout le travail qui se fait, que ce soit sur le TCAF, le bien-être mental ou simplement le bien-être général dans le continuum de soins; cela doit être ancré dans tous ces éléments ainsi que dans l’élément de la culture.
Pour nous, il y a la formation, évidemment, qui assure que notre personnel est conscient des traumatismes et tient compte de la culture. Il s’agit de permettre à nos partenaires de réellement transmettre de façon authentique ce que le bien-être signifie pour eux.
Si vous cherchez des façons d’améliorer le projet de loi, pour répondre à votre question, j’essayerais d’utiliser ce que nos partenaires des Premières Nations nous ont donné comme éléments fondamentaux, l’espoir, le sens, l’appartenance et la raison d’être, et la manière dont nous envisageons ces éléments dans le continuum de soins.
La présidente : Chers collègues, vous remarquerez que je suis assez généreuse avec le temps.
La sénatrice Petitclerc : Merci à tous d’être là. Ma question est pour vous, madame Novak.
J’ai trouvé intéressante la manière dont vous avez présenté la situation des populations et des mères en devenir autochtones, et elle est très complexe. Je pense à la prévention, car elle est essentielle dans tout ce qui est lié à la santé. Dans ce cas-ci, ma collègue a parlé de la sensibilisation, et je crois que la sensibilisation est importante et que le cadre a aussi le potentiel d’être très important.
Je vous écoute, et ma question est : lorsqu’il y a une peur fondamentale de la stigmatisation — ce que nous voyons partout — lorsqu’il est question de mères, de mères en devenir et de nouvelles mères autochtones, en plus de la peur liée à la stigmatisation, il y a la peur légitime de se faire enlever son enfant. Si cet espace sécuritaire et cette confiance ne sont pas établis, comment vont fonctionner la sensibilisation et le projet de loi? Comment établissez-vous cet espace sécuritaire? Voilà ma question difficile.
Mme Novak : C’est une très bonne question. C’est une question importante. Dans ma déclaration liminaire, j’ai parlé de la tragédie de Joyce Echaquan, qui a entraîné des investissements pour lutter contre le racisme anti-autochtone dans notre système de santé. À partir de là, nous avons investi dans des services de sages-femmes autochtones, au sein de la communauté, afin qu’une femme n’ait pas à être évacuée d’urgence de sa communauté pour donner naissance à ses enfants. Les sages-femmes suivent les mères, sont présentes dans la communauté et peuvent tisser des liens plus étroits avec les mères et instaurer la confiance dont vous parlez afin d’avoir des conversations éclairées au sujet de la prévention et de la promotion.
Si les femmes doivent être retirées de leur communauté pour vivre leur grossesse ou leur accouchement, cette confiance disparaît. Comment pouvons-nous soutenir les communautés dans leur autodétermination, mais aussi dans leur autonomie et leur infrastructure? Je crois que les sages-femmes dans les communautés font partie du continuum de soins, et cela peut également être lié au développement de la petite enfance et au système d’éducation.
La solution ne peut jamais être de retirer les personnes et les enfants de la communauté. Voilà pourquoi nous cherchons, par le biais de nos services de protection de l’enfance, à réinvestir dans la communauté et à laisser les communautés établir comment elles souhaitent soutenir leurs enfants.
La sénatrice Petitclerc : Comment pouvons-nous quantifier le travail qu’il reste à faire en ce qui concerne l’éducation du secteur médical? Surtout en ce qui concerne la quantification.
Mme Novak : Je crois que, si j’avais la réponse à cette question, je gagnerais un prix Nobel ou quelque chose du genre. Quantifier est important. Je crois que cela tient à une participation significative. Dans la dernière heure, vous avez tous parlé de la nécessité d’avoir un meilleur engagement avec les partenaires dès le début. Pour faire avancer un cadre ou une stratégie, il faut du temps, de la confiance et des conversations honnêtes avec nos partenaires autochtones de tout le pays pour obtenir leur appui. Vous pouvez ensuite intégrer vos données et la souveraineté de vos données, mais il est important de laisser la souveraineté des données aux partenaires autochtones et de ne pas nécessairement la dissocier dans tout le pays. Il faut d’abord établir la confiance dans l’engagement avant de pouvoir obtenir des chiffres réels.
La sénatrice Muggli : Merci. Le programme des sages-femmes est une très bonne chose. Je crois qu’il s’agit vraiment d’une approche en matière de prévention incroyable. Un jour, j’espère que la prévention suffira pour que nous n’ayons plus besoin de ces interventions intenses.
Ma question vise à savoir si l’Académie des sciences de la santé prévoit une formation ciblée sur le diagnostic de TCAF. Je sais que les lignes directrices sont excellentes, mais la manière dont nous obtenons la formation spécialisée nécessaire à ce stade du diagnostic joue un rôle important. Je sais que les provinces sont responsables de l’éducation postsecondaire, mais il s’agit d’un sujet d’intérêt et d’une crise nationale, je dirais, où il y a peut-être une possibilité de leadership ou de parrainage de la formation dans ce domaine.
Mme Scott : Merci de la question. L’Académie canadienne des sciences de la santé s’intéresse au diagnostic. Le rapport sur lequel nous travaillons comporte un chapitre sur le dépistage et le diagnostic. On a réalisé, je crois, que le défi du diagnostic de TCAF tient au fait qu’il repose sur une foule de choses différentes, que différentes normes sont utilisées à l’international et même dans le DSM-5, le manuel des diagnostics, qui n’inclut même pas un sous-ensemble lié au TCAF. C’est une autre question qui a été posée. Il y a un sous-ensemble pour l’autisme, mais pas pour le TCAF. Cela affecte-t-il le diagnostic? Les défis liés aux normes de diagnostic ont une incidence sur la facturation, car les professionnels de la santé peuvent facturer les diagnostics. Cela pose donc un défi supplémentaire.
Dans le cas du TCAF, je crois que l’un des problèmes liés à la nécessité de prouver l’exposition prénatale à l’alcool, contrairement à d’autres troubles du développement neurologique, est d’avoir des preuves. S’il n’y a pas d’indice visuel, une caractéristique faciale indicatrice ou un autre point, comment pouvez-vous obtenir cette information pour confirmer l’exposition prénatale à l’alcool? C’est là qu’interviennent la stigmatisation et les nombreux problèmes connexes. L’Académie canadienne des sciences de la santé fait encore beaucoup de travaux pour décortiquer certaines de ces questions et trouver une voie à suivre. Il sera essentiel de trouver une approche plus harmonisée touchant le diagnostic et la manière dont il est posé cliniquement, et de travailler avec les professionnels de la santé, les provinces et les territoires pour y arriver. J’espère que cela répond à la question.
La sénatrice Muggli : Bien. Merci.
Mon autre question était pour Mme Sterniczuk et porte sur la Stratégie canadienne sur les drogues et les autres substances. J’ai eu l’occasion de remplir ces demandes. Voici une petite suggestion : elles pourraient être plus courtes.
Est-ce qu’un financement a été alloué sur le thème du TCAF, particulièrement en réponse à l’appel à l’action numéro 24?
Mme Sterniczuk : Je devrai vous revenir sur cette question spécifique du TCAF et sur la question de savoir si du financement a été alloué à des projets spécifiques pour le TCAF.
Je sais que des fonds sont alloués pour des projets relatifs à l’alcool et aux autres substances, mais je ne peux malheureusement pas parler de la composante de TCAF.
La sénatrice Muggli : Il serait utile d’avoir la réponse. Cela nous aidera peut-être pendant nos délibérations.
Autre commentaire, je comprends l’ampleur de la consommation de plusieurs substances. J’ai longtemps travaillé dans le domaine de la santé mentale et des dépendances, mais j’ajouterais que l’acceptation sociale de l’alcool n’est pas la même. Il est donc important de pouvoir aborder cette question dans le contexte du TCAF. Merci.
La présidente : J’aimerais poser ou soulever une question. En tant que néonatologiste et pédiatre, j’ai eu à poser des diagnostics précoces en me fondant sur les caractéristiques faciales ou sur d’autres stigmates. Même le mot « stigmate » pose problème ici. Mais, à mesure que nous avançons, nous travaillons dans un système de santé fracturé, et la transition de la jeunesse à l’âge adulte, avec de multiples soins complexes qui doivent souvent être prodigués dès l’enfance, parce qu’il peut y avoir des anomalies congénitales, des problèmes cardiaques, voire des problèmes de développement neurologique... Si nous pensons à cette transition et à la perte potentielle de soins, parce que les soins sont dirigés et que l’argent est lié au diagnostic, si nous pensons à cela, comment ce cadre facilitera-t-il certaines de ces transitions et comment garantira-t-il que, si nous abandonnons l’approche diagnostique au profit de l’accès aux soins, nous accéderons aux soins? Comment allons-nous garantir que les soins sont accessibles? Ce cadre pourra-t-il aider? Ce sont des questions difficiles.
Mme Novak : Nous avons de la difficulté à choisir qui répondra en premier. C’est une excellente question.
La ministre de la Santé mentale et des dépendances, Mme Ya’ara Saks, vient tout juste d’annoncer, la semaine dernière, la création d’un fonds pour la santé mentale des jeunes et, lorsque Services aux Autochtones Canada a examiné ce qu’un « jeune » est, nous avons consulté nos partenaires. Leur définition va de 12 à 30 ans. La raison pour laquelle Services aux Autochtones Canada a adopté ces chiffres, de 12 à 30 ans, est exactement celle que vous avez mentionnée : il n’y a pas nécessairement de transfert en douceur entre la période de 0 à 18 ans et le système pour adultes.
Donc, quand on examine le transfert — et tout ne doit pas s’arrêter à 18 ans — et que l’on envisage le spectre complet de la jeunesse, particulièrement lorsque l’on examine le développement cognitif jusqu’à 25 ans, selon la personne à qui l’on s’adresse... C’est un élément vraiment important. C’est la manière dont on choisit de définir la « jeunesse ». Les termes sont très importants dans la manière dont on les présente et dont on les représente.
Ce passage du relais explique aussi pourquoi de nombreux investissements ciblent les services intégrés à la jeunesse. Là encore, il s’agit de considérer la personne dans sa globalité, et non comme un état ou un diagnostic, et d’examiner ce dont elle a besoin. Avez-vous besoin de services de santé, de services éducatifs ou de services sociaux? Il s’agit de considérer la personne dans sa globalité. Il ne faut pas seulement dire que ce n’est pas la bonne porte, il faut proposer une autre porte.
Les services à la jeunesse intégrés à travers le pays ou dans les communautés, sont là pour vous mettre en contact avec les bons services de la bonne manière et ont une compréhension plus large de ce paysage pour aider les gens à naviguer dans ces systèmes très complexes, car ils agissent au niveau régional, mais aussi aux niveaux provincial et fédéral.
La présidente : Merci. Excellente réponse.
La sénatrice Burey : J’essaie de savoir à quel point vous soutenez à ce projet de loi. J’essaie de lire entre les lignes ce que les différentes personnes ont dit et le potentiel de ce projet de loi.
J’ai entendu parler de la collecte de données à l’échelle nationale; c’est une possibilité qu’un projet de loi comme celui-ci pourrait élargir. Toutefois, j’ai également entendu des commentaires nuancés concernant le fait de recevoir un diagnostic spécifique et de ne pas vouloir être encore plus stigmatisé en étant lié à une clinique spécialisée dans le TCAF ou quelque chose du genre.
Ma question est la suivante : soutenez-vous ce projet de loi? Deuxièmement, que pensez-vous, en dehors des données — ou pourriez-vous nous en dire plus sur le sujet de l’amélioration et de la collecte de données —, et y a-t-il des choses qui pourraient améliorer le projet de loi en ce qui concerne, disons, les nuances concernant le fait de ne pas vouloir recevoir un diagnostic de TCAF et d’avoir simplement accès à un continuum de soins de santé prénataux, maternels et de la petite enfance, ce genre de chose, pour améliorer le projet de loi?
M. Collins : Je vais commencer, et je laisserai ensuite les autres offrir des perspectives supplémentaires. C’est la question à un million de dollars, n’est-ce pas? Vous avez, en quelque sorte, laissé le meilleur pour la fin.
Vous ne serez pas surprise, vu l’orientation du projet de loi, mais aussi le travail collectif effectué par Santé Canada, Services aux Autochtones Canada et au sein de l’Agence de la santé publique du Canada, de constater qu’il y a une symétrie, ici. Cela ne sort pas de nulle part, et nous avons des atouts à faire valoir.
Bien sûr, cela n’a pas été discuté avec les ministres. Le gouvernement n’a pas de position à ce sujet. Je me dois d’être clair là-dessus.
À ce stade, notre analyse de ce qui est proposé et je ne veux pas exagérer sur l’étendue de ce que nous avons fait... Bien sûr, certains des principes du projet de loi concernant la sensibilisation et certains des efforts qui ont été déployés sur ce front particulier sont assurément logiques. Nous nous reconnaissons là-dedans. Nous pouvons voir certains des travaux que nous avons réalisés et les risques liés à la consommation d’alcool. C’est un domaine qui nous intéresse et dans lequel nous nous reconnaissons.
Dans ma déclaration liminaire, je crois que j’ai parlé des outils et des ressources. C’est une grande partie de ce que nous avons essayé de faire sans cadre formel ni élément catalyseur en place. Comme on le voit souvent dans la sphère fédérale, il s’agit parfois de petits investissements aléatoires. Les outils et les ressources, pour les praticiens du monde de l’éducation, seraient une fois de plus un autre élément qui susciterait de l’intérêt.
En ce qui concerne la promotion de la recherche; nous avons fait référence à l’Académie canadienne des sciences de la santé et au rapport attendu sur ce sujet particulier. L’échange intergouvernemental d’information, un autre élément du projet de loi, est proposé pour cibler la surveillance, la collecte de données et l’exploration de ce dossier particulier. Voilà d’autres éléments.
Les seuls domaines pour lesquels nous hésiterions, à ce stade précoce, à donner notre appui complet seraient les domaines où nous constatons une certaine complexité. Cela nous ramène à ce que j’ai dit plus tôt à propos des espaces interjuridictionnels. Plus on s’intéresse aux diagnostics, du moins, du point de vue de la santé publique, plus l’on s’éloigne de la voie principale; cela dépasse un peu plus les sphères de compétence.
Nous ne devons pas l’oublier à mesure que nous avançons. Lorsque vous faites référence aux normes nationales, je crois que nous devons également nous demander, au regard du libellé actuel du projet de loi, qui a quel rôle et quels sont les leviers dont nous disposons pour officialiser, catalyser et mettre en œuvre ces normes nationales.
Je ferai une dernière remarque, purement éditoriale. Je suis désolé, mais je suis obligé de le dire. Il ne s’agit pas tant du contenu que d’une réaction instinctive de la fonction publique : en raison de la complexité de ceci, lorsque je vois l’obligation de faire rapport au Parlement dans un délai d’un an, je dirais toujours que, si nous devons le faire, nous devons le faire correctement. Alors, réfléchissez au délai que vous donnez à l’appareil gouvernemental pour répondre. Assurons-nous de bien faire les choses.
La sénatrice Burey : Je crois que Mme Novak...
La présidente : Nous n’avons plus de temps pour cette question. Une autre sénatrice n’a pas eu l’occasion de poser une question, alors j’aimerais lui donner la possibilité de poser la dernière question.
La sénatrice Senior : Désolée pour cela, sénatrice Burey. Je ne sais pas si je peux intégrer votre question à la mienne.
Je suis curieuse. Dans un autre comité, nous nous intéressons aux enfants qui sortent du système, et j’entends ce que vous dites à propos d’une approche beaucoup plus holistique de la manière dont nous travaillons avec les jeunes, en particulier, du diagnostic au traitement, disons.
En raison du nombre d’institutions qui touchent la vie des gens, et je pense particulièrement aux jeunes du système, je me demandais s’il ne manquerait pas quelque chose dans une approche plus holistique lorsqu’il est question du TCAF, et donc du traitement, des divers soutiens ou de tout le reste.
Mme Novak : C’est une très bonne question. En ce qui concerne les services de soutien en santé, évidemment, mon titre de poste dit littéralement « bien-être mental et promotion de la santé », alors, j’ai un certain parti pris sur la question. Il vaut mieux prévenir que guérir.
Comme on l’a dit plus tôt, c’est celui qui se plaint qui en reçoit le plus, et nous avons tendance à investir beaucoup dans les réponses aux crises, car, une fois qu’elles se sont produites, il faut y faire face. L’argent va là, et nous ne faisons pas beaucoup de travail en amont. Les problèmes commencent alors à s’accumuler.
En ce qui concerne le point que vous avez soulevé au sujet des jeunes qui sortent du système, si une personne a bénéficié de soutiens de 0 à 18 ans, elle possédera les outils et la résilience nécessaires pour continuer à avancer et pour maintenir le lien avec le système de santé ou les services sociaux, dans certains cas, s’ils existent. Toutefois, si une personne a été laissée à l’abandon pendant les 18 premières années de sa vie, il est très difficile de la rattraper une fois qu’elle est trop vieille pour relever d’un système plus large. En ce qui concerne les soins primaires, puisque de nombreuses personnes n’ont pas de médecin de famille ni accès à des soins spécialisés, il sera très important d’avoir une vision holistique de la personne tout au long de sa vie, mais nous devons nous tourner vers nos systèmes.
Plus tôt, nous parlions des services correctionnels. Il existe différents moments où il nous est possible d’aider certaines personnes. Quand une personne relève du service correctionnel, il est possible de lui fournir un système de soins, car il s’agit d’un environnement très contrôlé et parce qu’elle ne peut aller nulle part. Nous parlions, plus tôt, de l’itinérance et de problèmes de santé plus généraux. Il devient très difficile de mettre les gens en contact avec un système de soins tard dans leur vie. L’accent mis sur la prévention et sur l’intervention précoce entre les âges de 0 à 18 ans porte véritablement fruit lorsque les jeunes sont sortis du système et que l’on réussit à les garder dans ces systèmes plus larges. Ce n’est pas une méthode parfaite, mais c’est mieux que ce que nous avons présentement.
Mme Scott : Il y a le débat entre le modèle médical d’évaluation et le modèle social. C’est un sujet très actuel, et il y a des avantages à avoir un diagnostic médical au chapitre des avantages fiscaux. Si l’on considère les nombreuses prestations d’Emploi et Développement social Canada et de l’Agence du revenu du Canada, la prestation canadienne pour les personnes handicapées, beaucoup de prestations sont basées sur un diagnostic médical. Pour certaines familles et certains enfants en particulier, avoir ce diagnostic leur donne accès à différents services et soutiens, et il existe également des liens avec le système d’éducation. En même temps, dans le modèle médical, il y a des problèmes liés à la stigmatisation et, encore une fois, à la difficulté d’obtenir un diagnostic. Si vous vivez dans une région éloignée, vous n’avez pas accès à des cliniques spécialisées dans le TCAF, situées en majorité dans des zones urbaines, d’où l’idée que nous devrions passer à un modèle plus social.
Cela étant dit, une approche holistique et ce qui est observé, c’est que, en essayant d’amener les gens, comme l’a dit ma collègue, Mme Novak, dans un cadre communautaire où l’on peut établir la confiance et les relations, en plus de fournir des services et des soutiens tout au long de la vie à des personnes neuroatypiques, en élargissant les champs d’action au-delà du TCAF pour englober davantage de problèmes neuroatypiques, on soulagera une partie de la pression liée à la stigmatisation et on aidera les gens à suivre ce continuum de soins en passant de l’enfance à la jeunesse et à l’âge adulte.
Cela veut dire qu’il y a une personne, un travailleur social, qui travaille avec un individu et des intervenants du système, pour aider cet individu à poursuivre son chemin. Il y a quelques avantages à ce modèle holistique et à l’approche fondée sur le parcours de vie, mais il est nécessaire de voir le modèle médical par rapport au modèle social. Chaque modèle a ses avantages et ses inconvénients, selon l’endroit où l’on se trouve sur le spectre.
La présidente : Merci.
Chères sénatrices, c’est tout pour ce groupe de témoins. J’aimerais remercier tous les témoins pour leur témoignage intéressant aujourd’hui. Puisqu’il n’y a pas d’autres affaires à régler, la séance est maintenant levée.
(La séance est levée.)