LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DE L’AGRICULTURE ET DES FORÊTS
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le jeudi 20 novembre 2025
Le Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts se réunit aujourd’hui, à 8 h 01 [HE], pour examiner, afin d’en faire rapport, le rôle du secteur de l’agriculture et de l’agroalimentaire dans la sécurité alimentaire au Canada.
Le sénateur John McNair (vice-président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le vice-président : Honorables sénatrices et sénateur, je déclare ouverte la séance du Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts. Je m’appelle John McNair, et je suis le vice-président du comité. Bienvenue aux membres du comité, aux témoins d’aujourd’hui et à tous ceux qui regardent cette séance en ligne.
J’aimerais commencer par reconnaître que nous nous réunissons aujourd’hui sur le territoire traditionnel non cédé de la Nation algonquine Anishinaabe.
Avant d’entendre les témoins d’aujourd’hui, j’aimerais demander aux sénatrices et au sénateur ici présents de se présenter.
La sénatrice Burey : Bonjour. Sharon Burey, de l’Ontario.
Le sénateur Varone : Toni Varone, de l’Ontario.
La sénatrice Robinson : Bonjour. Mary Robinson, de l’Île-du-Prince-Édouard.
La sénatrice Sorensen : Karen Sorensen, de l’Alberta.
La sénatrice Muggli : Tracy Muggli, territoire du Traité no 6, de la Saskatchewan.
Le vice-président : J’aimerais rappeler certaines pratiques exemplaires pour éviter les incidents acoustiques. Je demanderais aux sénatrices et au sénateur de consulter les cartes placées sur la table, elles fournissent des lignes directrices pour éviter les incidents liés à la rétroaction acoustique. J’aimerais également rappeler à tous ceux qui participent d’éviter de changer de langue au milieu d’une phrase et de ne pas parler trop vite. Un son de qualité facilite l’interprétation, la transcription et le sous-titrage exacts de nos réunions.
Aujourd’hui, le comité poursuit son étude sur le rôle du secteur de l’agriculture et de l’agroalimentaire dans la sécurité alimentaire au Canada.
Dans le premier groupe de témoins, nous avons le plaisir d’accueillir M. Corey Ellis, chef de la direction et cofondateur de Growcer. L’autre témoin n’a pas pu se joindre à nous aujourd’hui.
Merci, monsieur Ellis, d’avoir accepté l’invitation et de comparaître devant le comité. Vous aurez cinq minutes pour présenter votre déclaration préliminaire. Ce sera suivi des questions des sénateurs.
Corey Ellis, chef de la direction et cofondateur, Growcer : Merci, sénateur. Merci à vous tous de me donner l’occasion de prendre la parole aujourd’hui.
[Français]
Je tiens à remercier tous les membres de ce comité de me donner l’occasion de leur adresser la parole.
[Traduction]
Le travail que vous faites pour examiner le rôle de l’agriculture dans la sécurité alimentaire au Canada est très important, et je suis heureux que votre comité examine ce dossier et fasse cette étude.
Nous avons lancé notre entreprise ici, à Ottawa, il y a 10 ans, dans le seul but de lutter contre l’insécurité alimentaire aiguë dans le Nord canadien. Nous avons commencé par lancer environ une dizaine d’exploitations agricoles dans l’Arctique canadien, qui fonctionnent encore aujourd’hui, la première étant celle de Churchill, au Manitoba. Aujourd’hui, nous avons 1 000 fermes dans le monde, dans 35 pays, dont 125 au Canada.
Nous fabriquons des solutions alimentaires modulaires sur mesure, et nous sommes surtout connus pour notre ferme verticale modulaire intérieure. Elle a la taille de quatre espaces de stationnement, et, dans cet espace, nous cultivons suffisamment de légumes tout au long de l’année pour nourrir 500 personnes par jour.
Même en hiver — et bien sûr, à Churchill, au Manitoba, où nous avons commencé, l’hiver est certainement rude —, nous consommons autant d’énergie que quatre ménages pour nourrir de 200 à 300 ménages. La ferme peut être installée sur place, dans un centre communautaire ou un petit établissement, ce qui réduit les coûts de transport et les émissions, tout en créant des emplois à l’échelle locale. Nous utilisons également 90 % moins d’eau que l’agriculture traditionnelle.
Depuis, nous nous sommes également tournés vers d’autres types de solutions alimentaires à température contrôlée, y compris des entrepôts d’aliments, des caves à légumes et des congélateurs communautaires. Toutes ces solutions sont toujours modulaires; nous réalisons ainsi des économies dont nous faisons bénéficier nos clients.
À l’heure où on se parle, les systèmes de Growcer permettent de nourrir environ 50 000 Canadiens tous les jours et quelque 500 000 personnes dans le monde.
Comme je l’ai dit, nous avons d’abord mis l’accent sur la sécurité alimentaire dans le Nord canadien, mais nous voyons aujourd’hui que l’insécurité alimentaire atteint des niveaux sans précédent dans toutes les régions du pays. Entre la COVID, les droits de douane et les défis liés à la chaîne d’approvisionnement, nous constatons que la demande pour ce type de produits augmente tous les jours.
La sécurité alimentaire touche toutes les régions du pays, des centres urbains aux petites collectivités rurales, et même les communautés militaires sur les bases de tout le pays. Un Canadien sur quatre — plus de 11 millions de personnes — vit aujourd’hui dans un ménage en situation d’insécurité alimentaire. Entretemps, les ingrédients des repas du Canadien moyen parcourent plus de 2 000 kilomètres pour arriver ici, et nous dépendons de plus en plus de partenaires commerciaux peu fiables pour la plupart des aliments que les Canadiens consomment. Cela nous rend très vulnérables aux chocs climatiques, aux aléas de l’approvisionnement, aux longues voies d’expédition et à l’inflation. Nous devons réfléchir davantage et plus sérieusement à la nécessité de remplacer les solutions provisoires par des investissements structurels afin de réduire ainsi la dépendance du Canada.
La bonne nouvelle, c’est que le modèle de Growcer a prouvé qu’il est prêt et fonctionnel, et je dirais que le secteur de l’agriculture et de l’agroalimentaire du Canada est prêt à aider le gouvernement à régler ce problème.
Aujourd’hui, les nations autochtones, les banques alimentaires et les institutions locales de tout le Canada établissent une véritable souveraineté alimentaire, et réduisent la dépendance du Canada aux produits importés. Je vais vous donner quelques exemples.
L’école Altario, à Altario, en Alberta, est une petite école rurale. On y enseigne l’agriculture; elle a une ferme et vend des aliments à l’ensemble de la collectivité. La Première Nation de Witset, en Colombie-Britannique, cultive aujourd’hui des aliments pour son garde-manger communautaire, ce qui crée des emplois dans la région et met en valeur l’innovation. Ici, à Ottawa, la Mission d’Ottawa utilise nos fermes pour fournir chaque année un million de repas supplémentaires à ses clients dans le besoin. Nous avons pu cultiver des aliments afin de supprimer totalement ses besoins en aliments importés.
Le gouvernement peut intervenir pour continuer d’accélérer le travail que nous faisons. Nous sommes déjà bien avancés, mais certains obstacles empêchent le secteur de l’agroalimentaire de régler ce problème à grande échelle. À l’échelon municipal, le zonage municipal ne considère pas l’agriculture dans les limites urbaines comme un type de zonage, alors, dans de nombreuses villes du Canada, les défis liés au zonage ralentissent nos projets et limitent les investissements. À l’échelon provincial, certaines politiques relatives à l’hydroélectricité empêchent les installations de ce type d’être reliées au réseau; de telles politiques pourraient toutefois accélérer les déploiements et faciliter les investissements. À l’échelon fédéral, bien sûr, poursuivre les investissements dans les infrastructures de production alimentaire et s’assurer que le climat d’investissement est favorable à ce type de technologie doit rester une priorité.
Je mentionnerais des programmes comme le Fonds des infrastructures alimentaires locales d’Agriculture et Agroalimentaire Canada, qui a fait ses preuves au cours des cinq dernières années, avec des investissements importants, des fonds de contrepartie considérables et un bon rendement de l’investissement du gouvernement.
J’aimerais également ajouter que, alors que nous investissons massivement dans les infrastructures militaires, nous devrions envisager une infrastructure à double usage pour nourrir aussi les soldats sur nos bases de tout le pays.
Un dernier point au sujet de l’armée, et peut-être du nouveau budget fédéral qui a été annoncé il y a quelques semaines, que j’aimerais également souligner est celui-ci : dans le budget de 2025, on a annoncé qu’environ 280 milliards de dollars seraient destinés à de nouvelles infrastructures pour le Canada. J’espère que votre comité peut également, dans le cadre de son étude, examiner la part des infrastructures qui peuvent être des infrastructures alimentaires qui aideraient le Canada à être plus résilient et sûr sur le plan alimentaire.
En cette période de perturbations de la chaîne d’approvisionnement alimentaire, de catastrophes climatiques et d’augmentation des coûts qui menacent sans cesse l’accès du Canada aux aliments, il est essentiel que nous fassions des investissements historiques dans l’agriculture pour nous protéger davantage. Nous espérons que les modalités des programmes qui découlent du budget de 2025 incluront les infrastructures alimentaires parmi les considérations clés. Nous voyons bien, à l’échelle de la collectivité, que ces solutions sont en demande, et il nous faut une politique gouvernementale pour répondre à cette demande et la soutenir, mais certainement pas la limiter.
L’agriculture locale en environnement contrôlé crée des emplois, baisse le prix des aliments, renforce la durabilité et améliore la sécurité alimentaire de tout le monde.
J’espère que mon témoignage devant votre comité, aujourd’hui, vous aidera à établir le cadre de votre étude, et je me ferai un plaisir de répondre à vos questions ou de faire un suivi.
Le vice-président : Merci, monsieur Ellis, de votre déclaration préliminaire. Sénateurs, nous allons passer à vos questions. Vous savez que vous avez cinq minutes pour votre question, et cela comprend la réponse.
La sénatrice Sorensen : Comme je l’ai dit quand vous êtes arrivé, j’ai vraiment apprécié lire que vos partenariats avec les collectivités rurales en Alberta ont été couronnés de succès, y compris dans les collectivités éloignées et les communautés autochtones.
Parmi vos partenariats avec les organisations locales des Premières Nations, quels modèles ou quelles approches ont été les plus efficaces pour améliorer l’accès local aux aliments? En fait, je vous donne l’occasion de raconter davantage d’histoires de réussite. De plus, si nous avons le temps, pourriez-vous nous dire dans quelle mesure notre modèle est concurrentiel sur le plan des coûts par rapport aux chaînes d’approvisionnement alimentaire traditionnelles dans les régions éloignées, surtout au chapitre du transport et du gaspillage?
M. Ellis : Je répondrai d’abord à votre deuxième question. En ce qui a trait à la compétitivité des coûts dans une région urbaine, nous sommes aujourd’hui concurrentiels. Dans des endroits comme Ottawa, nous cultivons des aliments au même prix que les aliments importés; c’est simplement plus stable, et il n’y a pas d’augmentation chaque année comme pour les aliments importés. Dans une collectivité éloignée, nous réduisons considérablement le prix des aliments.
À Churchill, au Manitoba, l’année où la voie ferrée a été inondée, on a installé une ferme Growcer, et cela a permis de réduire immédiatement le prix des aliments de 40 % du jour au lendemain. L’épicerie a commencé à acheter de la ferme locale, parce qu’elle pouvait obtenir des produits moins chers de la ferme du Centre d’études nordiques de Churchill, que de les faire venir d’ailleurs par avion. C’est un petit exemple. Dans les collectivités éloignées, les chiffres sont clairs. Dans les centres urbains, ils sont à égalité, et je suppose que, au cours des 5 à 10 prochaines années, la situation économique s’améliorera à mesure que notre technologie et la technologie de notre industrie s’amélioreront.
Pour ce qui est d’autres exemples de modèles, je dirai que je les mettrais dans trois grandes catégories. L’école Altario est un exemple. Je parlerai de l’école KLO Middle de Kelowna également. Elle a une ferme. Elle l’a intégrée dans son programme d’études. La ferme approvisionne le programme des repas scolaires et fait partie du tronc commun; à chaque niveau, de la maternelle à la 12e année, on propose un programme scolaire entièrement intégré qui englobe la ferme, et on peut ainsi enseigner aux jeunes d’où viennent leurs aliments. Les jeunes qui cultivent des aliments mangent également sainement et mangent les légumes qu’ils cultivent. Nous avons des services alimentaires dans les écoles. Nous voulons que les entreprises alimentaires, comme les épiceries et les cafétérias et les grands services de restauration s’approvisionnent davantage à l’échelle nationale et locale. Certaines des plus grandes entreprises mondiales de restauration utilisent nos fermes. Par exemple, les cafétérias des collèges universitaires, en Nouvelle-Écosse... tout le buffet à salade de la cafétéria de l’Université Acadia est approvisionné par nos fermes, grâce à un partenariat avec Chartwells. Je pourrais également inclure la Mission d’Ottawa, comme je l’ai dit, et les coopératives de vente de détail. Par exemple, la coopérative New Horizon en Alberta a installé notre ferme dans le parc de stationnement. Elle transporte ensuite les produits à pied, sur une distance de 50 pieds, jusqu’aux étagères de fruits et légumes, et les produits restent frais pendant un mois. Non seulement le prix est concurrentiel, mais la qualité est inégalable.
Et la troisième catégorie, ce sont les agriculteurs et les producteurs commerciaux, pour lesquels nous constatons une demande croissante. Bien sûr, la catégorie institutionnelle comprend également environ 50 Premières Nations avec lesquelles Growcer travaille aujourd’hui.
La sénatrice Sorensen : C’est fantastique. Je sais que vous l’avez dit au début, mais quand avez-vous démarré cela?
M. Ellis : Il y a près de10 ans. Nous étions à quelques rues d’ici.
La sénatrice Sorensen : Félicitations. C’est tellement intéressant.
M. Ellis : Merci.
La sénatrice Sorensen : Vous pourriez peut-être nous donner un peu plus de détails. Vous avez très bien parlé du budget de 2025. En ce qui concerne la partie sur l’infrastructure, je suis d’accord pour dire que ce serait excellent. À part cela, comment le gouvernement fédéral vous soutient-il, aujourd’hui?
M. Ellis : Le gouvernement fédéral aide nos clients des Premières Nations et les banques alimentaires, par exemple, à investir dans la technologie. Il s’agit donc en grande partie de projets visant à réduire les risques, comme le financement d’études de faisabilité ou de travaux préparatoires. La préparation d’un site pour accueillir une ferme comme celle-ci est un élément clé à prendre en considération. Ensuite, quand le conseil d’administration d’une banque alimentaire, comme nous le faisons dans la région de Canmore, dit « cela nous intéresse », le gouvernement peut fournir un petit montant de capital initial pour réduire les risques de l’ensemble du projet.
La sénatrice Sorensen : Grâce à une demande de subvention?
M. Ellis : Nous aimerions que le financement du programme du Fonds des infrastructures alimentaires locales, qui est financé jusqu’au prochain exercice, soit augmenté ou devienne permanent. Ce n’est pas un programme permanent, présentement. Donc, il dépend de chaque cycle budgétaire, mais le rendement du capital investi que nous avons pu montrer, pas seulement au chapitre de la création d’emploi, et ainsi de suite, mais nous avons généré le triple de l’investissement du gouvernement au cours des cinq premières années suivant l’investissement, car nous créons des emplois nationaux, nous permettons aux entreprises locales d’augmenter leurs revenus, et ainsi de suite, et, bien sûr, nous réduisons la dépendance. Donc, une banque alimentaire réduira ses coûts d’exploitation en investissant dans cela.
La sénatrice Sorensen : Et croyez-vous que le gouvernement est au courant du rendement du capital investi?
Le vice-président : Madame Sorensen, puis-je vous ajouter sur la liste pour la deuxième série de questions? Merci.
La sénatrice Burey : Monsieur Ellis, merci beaucoup. J’aime les histoires. Je suis du même avis que Mme Sorensen. Je suis pédiatre, et ce qui m’a amenée — ou devrais-je dire peut-être « poussée » — à intervenir dans ce dossier, ce sont bien entendu mes patients qui vivaient dans la pauvreté et les chaînes d’approvisionnement. Évidemment, la COVID a aggravé la situation. Lorsque je suis arrivée, j’ai dit que nous devons régler la totalité du problème de la sécurité alimentaire, puisque la sécurité alimentaire, comme vous le savez, est un impératif de sécurité nationale pas seulement pour le Canada, mais aussi partout dans le monde. Je veux connaître votre histoire. Je veux savoir pourquoi un jeune homme comme vous, monsieur Ellis, a décidé de s’impliquer.
M. Ellis : Merci de tous ces compliments. J’ai étudié dans un programme de commerce à l’Université d’Ottawa, et le type d’entreprise spécifique qui m’intéressait c’était les entreprises sociales. Donc, pendant mes études, je cherchais une façon de tirer profit du capitalisme et des entreprises à but lucratif pour accélérer les changements sociaux et avoir un impact environnemental. Parce que je crois que notre système économique est le meilleur moyen d’amplifier cet impact, et, si votre entreprise fait les deux, fait le bien tout en allant bien, c’est la meilleure façon d’avoir l’impact le plus important dans le monde. Je crois que la situation actuelle de notre entreprise en témoigne. Il a suffi de deux ou trois voyages au Nunavut, quand j’étais à l’université, pour donner un élan à l’entreprise. D’ailleurs, j’ai passé toutes mes semaines de lecture là-bas, pendant mes deuxième, troisième et quatrième années d’université, à faire du bénévolat. Il s’agissait de rencontrer les membres des collectivités et de comprendre leurs défis structurels. Pourquoi y a-t-il un taux d’insécurité alimentaire de 70 % dans le Nord? Pourquoi est-ce que c’était jugé acceptable dans un pays du G7? J’ai posé beaucoup de questions et j’étais curieux, ce qui a abouti à la création de cette entreprise, qui était au départ un projet estival et qui est rapidement devenu une entreprise dont je devais gérer les employés à temps plein en même temps que j’essayais de terminer mes études. J’ai été scandalisé par le coût élevé des aliments et de voir que tant de gens ne mangeait pas à leur faim. Cela m’a poussé — pour utiliser vos mots — à faire quelque chose.
La sénatrice Burey : Vous avez parlé de la distance parcourue par les aliments, surtout les aliments provenant de l’étranger. J’ai entendu qu’ils parcourent 2 000 kilomètres. Comment croyez-vous que cela aide le Canada à mettre en œuvre ses solutions climatiques et à atteindre ces objectifs climatiques? Avez-vous des chiffres?
M. Ellis : Cela se divise en deux parties. Les produits agricoles qui génèrent les émissions les plus importantes sont en fait ceux qui ne se rendent jamais jusqu’à nos réfrigérateurs, ceux qui ne sont jamais consommés. Oui, retirer les camions des routes réduirait les émissions de CO2, c’est une partie des efforts de réduction des émissions, mais, je commencerais avec un chiffre que je connais : nous, ensemble, réduisons les équivalents de GES de 75 % par rapport aux produits agricoles conventionnels importés. C’est en partie possible grâce à, comme je l’ai dit, la réduction du nombre de camions sur les routes. La réduction du méthane a le plus d’incidence, puisque ses effets sont beaucoup plus importants que ceux du CO2. Le méthane est libéré lorsque les aliments se décomposent. Puisque nos produits agricoles restent frais pendant quatre semaines dans le réfrigérateur, il est beaucoup plus probable qu’ils soient consommés avant d’être gâtés. Mondialement, nous produisons plus qu’assez de nourriture pour nourrir tous les habitants de la planète. Personne ne devrait souffrir de la faim. Nous n’avons pas un problème de production; nous avons un problème de distribution. Les aliments ne se rendent pas aux assiettes des gens ou ne sont pas consommés à temps, et les coupables sont ces longues chaînes d’approvisionnement. En moyenne, les aliments qui se retrouvent dans les rayons des épiceries ont déjà 11 jours, parce qu’ils doivent passer par trois étapes; ils sont transportés dans différents camions, regroupés en palettes et mis sur les tablettes des épiceries. Quand nous achetons un produit, il est déjà vieux de 11 jours. Donc, sa durée de conservation à partir de là est très limitée. C’est pourquoi votre sac d’épinards dans votre frigo ne sera plus bon dans cinq jours. Toutes les ressources utilisées pour produire ces fruits et légumes frais sont perdues et gaspillées.
La sénatrice Muggli : Votre histoire est très intéressante. Nous avons une pédiatre. Je suis travailleuse sociale, et pendant toute ma carrière, j’ai côtoyé des gens souvent aux prises avec l’insécurité alimentaire. J’ai réalisé quand vous avez dit « Churchill », que j’avais vu votre ferme, à Churchill, cet été, avec le sénateur McNair.
Est-ce que d’autres personnes ici présentes l’ont également vue? Seulement nous deux. C’était fascinant.
J’ai deux ou trois questions à poser. Aux fins du compte rendu, pourriez-vous nous parler des variétés de fruits et légumes cultivés dans vos fermes?
M. Ellis : Nous cultivons près de 150 types de végétaux et de fruits, et les collectivités font également pousser leurs propres cultures. Certaines Premières Nations cultivent même des produits utilisés dans la médecine traditionnelle sur leurs fermes. La seule chose que nous ne pouvons pas faire pousser, ce sont les aliments qui poussent dans le sol, donc je crois que les légumes racines ne sont ni possibles ni viables sur le plan économique pour nos fermes. Notre solution à ce problème est une cave à légumes.
La sénatrice Muggli : Pourriez-vous nous en dire plus sur cette cave à légumes?
M. Ellis : Bien sûr. Les collectivités peuvent faire pousser énormément de légumes racines. La production n’est pas un problème; le problème, c’est de les garder au frais tout l’hiver pour nourrir la collectivité. Nous donnons aux collectivités la capacité d’avoir une infrastructure abordable pour entreposer ces produits agricoles.
Nous proposons aussi des congélateurs communautaires pour la viande et le poisson. Nous organisons des cuisines communautaires et tout ce genre de choses. Le plus important, c’est de bien préparer les collectivités et de leur fournir l’infrastructure nécessaire pour entreposer et traiter les aliments et nourrir leur population locale.
La sénatrice Muggli : Aux fins du compte rendu, puisque notre rapport contiendra des recommandations, pourriez-vous nous en dire plus sur les obstacles réglementaires pour que, lorsque le moment sera venu de formuler les recommandations, nous puissions indiquer précisément les changements à apporter pour traiter des problèmes liés à la réglementation?
M. Ellis : L’interprétation du Code national du bâtiment en ce qui concerne les structures de ce genre est limitée. Le code ne prévoit pas la possibilité qu’une structure agricole soit installée sur un territoire non agricole. Le Code national de construction des bâtiments agricoles s’applique, normalement. Puisque notre situation est unique, nous sommes régis par le Code national du bâtiment. Donc, celui-ci doit tenir compte des situations comme la nôtre.
À une certaine époque, il fallait attendre deux ans pour obtenir un permis de construction. Il s’agit d’un bâtiment préfabriqué déjà certifié. Il doit y avoir des dispositions dans le code. Par exemple, nous avons une norme CSA — je vais entrer un peu dans les détails —, la norme CSA A277. Il s’agit d’une précertification. Cela devrait permettre une approbation rapide. Selon moi, le Code national du bâtiment doit être plus prescriptif et faire en sorte qu’une chose qui a cette certification soit traitée par la voie rapide plutôt que retardée. Ces retards refroidissent l’appétit des investisseurs pour les fermes comme la nôtre.
La deuxième chose est le Fonds des infrastructures alimentaires locales, dont j’ai parlé, qui devrait être un programme permanent, voire même bonifié compte tenu du rendement considérable des capitaux investis que nous avons déjà obtenu.
La troisième chose serait l’approvisionnement, c’est-à-dire d’exiger que les institutions publiques s’approvisionnent en priorité en légumes locaux. Les États-Unis ont déjà de solides programmes d’approvisionnement auprès de fermes locales que nous n’avons pas ici, dans toutes les institutions, des hôpitaux au Parlement, et ainsi de suite. Quiconque utilise un service de traiteur et commande de la nourriture devrait soutenir les fermiers locaux le plus possible, puisqu’il est beaucoup plus avantageux que cet argent reste dans les collectivités locales plutôt que d’être utilisé pour des importations.
Ce sont les trois principales recommandations que j’ai en tête.
La sénatrice Muggli : Avez-vous parlé de l’accès à l’électricité?
M. Ellis : Oui. Au palier provincial, l’électricité est un enjeu. Par exemple, le Québec et l’Ontario ont des programmes incitatifs pour l’installation de systèmes d’éclairages à DEL. Ces programmes devraient être repris dans toutes les provinces du pays.
Pour finir, j’ajouterai le régime fiscal actuel. Des investisseurs achètent nos fermes modulaires et les rendent accessibles aux collectivités locales. Le taux d’imposition est deux fois plus élevé que celui du secteur immobilier, donc, en ce qui concerne le régime fiscal, il faudrait des choses comme des actions accréditives ou l’amortissement accéléré. C’était d’ailleurs dans le budget de 2025.
D’après ce que j’ai compris, cela ne s’appliquerait pas à un bâtiment agricole, seulement à une machine, mais ce dont nous parlons s’approche plus d’un bâtiment que d’une machine. Il faut réfléchir à des choses comme celles-là, pour que, lorsqu’un particulier investit des capitaux privés dans un projet comme celui-ci, il ne soit pas pénalisé parce qu’il s’agit d’un bâtiment agricole; il faut traiter le projet comme un impératif.
Des politiques de ce genre sont très peu coûteuses pour le gouvernement et attirent énormément de capital privé vers ce genre d’investissements.
La sénatrice Muggli : Merci. J’apprécie votre réponse.
Le sénateur Varone : Ce secteur me fascine. En guise de préambule pour mes collègues, j’aimerais dire que j’ai été introduit dans ce secteur il y a plus ou moins 15 ans. Mon neveu a étudié à l’Université de Guelph et est architecte du paysage. J’ai été, dans une certaine mesure, constructeur et promoteur immobilier; j’ai acheté un bâtiment abandonné dans Etobicoke Sud. Mon neveu l’a visité, et il est venu me voir une fin de semaine et m’a dit : « Oh, j’ai une idée. » Et il a écrit sa thèse sur les fermes verticales en se fondant sur le livre de Dickson Despommier sur les fermes urbaines, et cela m’a totalement fasciné.
Je vais revenir sur un commentaire que vous avez fait, à savoir que les municipalités ne comprennent pas les codes de zonage et qu’Hydro Toronto ne comprend pas les exigences en matière d’énergie.
J’ai tout lu. Sa thèse était phénoménale. Il a écrit une thèse entière sur les fermes verticales. J’ai failli me lancer là-dedans, mais les choses ont changé quand Toronto m’a dit que j’avais besoin d’un plan officiel pour la modification du zonage et d’un plan d’aménagement, et que le réseau n’est pas assez puissant pour soutenir le projet.
Je comprends vos recommandations. Il n’existe aucune rubrique ou catégorie de zonage pour les fermes urbaines. Lorsque vous regardez tous ces bâtiments abandonnés qui intéressent les promoteurs, qui veulent les repositionner, les réaménager, ou les démolir pour reconstruire, et qu’il y a un objectif comme une ferme verticale dans un centre urbain, oui, nous avons besoin de changements et de définir quels seront ces changements.
Avez-vous d’autres expériences en ce qui concerne la modification du zonage dans les municipalités ou la faiblesse du réseau électrique qui ne peut pas prendre en charge ce genre d’entreprises?
M. Ellis : Je vais vous donner un exemple où les choses ont été bien faites et d’autres exemples où il y a encore du travail à faire.
Un excellent exemple est le conseil municipal de Vancouver qui exige que trois actifs alimentaires soient ajoutés à tout projet de construction d’immeuble en hauteur. Cette mesure encourage directement les promoteurs et leur dit qu’ils doivent investir dans une banque alimentaire, une ferme verticale ou quelque chose d’autre, comme un jardin sur le toit, pour que leur zonage soit approuvé. Pendant les négociations sur les droits d’aménagement, ils doivent montrer qu’ils ont trois actifs alimentaires par propriété. Je crois que les autres villes pourraient reprendre cette politique.
À Ottawa, ils ont ajouté l’agriculture urbaine dans chaque catégorie de zonage. Cela a été fait dans le cadre d’un examen des règlements de zonage. Ils ont dit : « Assurons-nous que l’agriculture urbaine est partout. Nous ne devons pas la restreindre. C’est une bonne chose. » Elle est rassembleuse et bonne pour l’environnement. L’agriculture urbaine n’est pas bruyante et n’est pas dérangeante pour les voisins. Ils veulent que ce soit permis absolument partout, dans tous les quartiers de la ville.
Nous travaillons avec le maire, M. Sutcliffe, pour ajouter 20 fermes dans la ville d’Ottawa, parce que nous voyons que l’environnement politique est favorable aux fermes verticales. Cela permettra de soutenir principalement les banques alimentaires et les organismes de bienfaisance de toute la ville.
Le sénateur Varone : Pouvez-vous reproduire ce modèle à Toronto et à Montréal?
M. Ellis : Malheureusement, c’est un travail fastidieux, car il faut aller d’une ville à l’autre pour diffuser le message ou à s’adresser à des organisations comme la Fédération canadienne des municipalités, où se réunissent les conseillers et les maires, afin de leur faire comprendre l’importance d’un tel changement de politique. C’est très simple. Cela fait partie de l’examen du règlement de zonage. D’un simple trait de crayon, ils peuvent autoriser l’agriculture urbaine partout dans leur ville.
Le sénateur Varone : Qu’en est-il du réseau électrique?
M. Ellis : Nous n’avons pas eu de problèmes liés pour nous raccorder au réseau électrique en raison de la petite taille de nos fermes. Notre consommation électrique équivaut à celle de deux ménages et nous permet de nourrir de 300 à 400 ménages.
Le sénateur Varone : Alors, un service de 400 ampères.
M. Ellis : Oui, moins : 150. C’est assez petit. Là où nous avons eu des difficultés avec l’hydroélectricité, c’est plutôt au plan du processus d’inspection. Encore une fois, c’est comme pour le Code national du bâtiment, le Code national de l’électricité ne contient aucune disposition pour une serre qui n’en est pas une, mais est un bâtiment. Certains inspecteurs ne considèrent pas qu’il s’agit d’une serre et traitent notre installation comme s’il s’agissait d’un immeuble de bureaux avec toutes les restrictions que cela implique.
Le sénateur Varone : Ce sont les définitions?
M. Ellis : Ce sont les définitions, oui. Bien sûr, personne n’a prévu qu’un immeuble de bureaux produise des plantes mur à mur.
Le sénateur Varone : Pas des plantes comestibles.
M. Ellis : Des plantes comestibles, exactement. Et la quantité d’eau que nous utilisons et tout cela, c’est déroutant pour un inspecteur, avec les politiques en vigueur.
Au Québec et en Ontario, les remises sur les produits d’éclairage à DEL encouragent les producteurs, y compris les agriculteurs conventionnels, à investir dans cette technologie, car ils obtiennent une remise pour chaque luminaire DEL à haute efficacité qu’ils installent. Un agriculteur peut ainsi économiser 5 % sur ses coûts d’investissement. Ce n’est pas rien. Chaque petit geste compte.
Dans certaines villes que nous ne nommerons pas, la politique en matière de zonage dit qu’il s’agit d’une opération de fabrication industrielle, qui ne peut donc pas être implantée dans le stationnement d’une épicerie.
Le sénateur Varone : Donc, plus d’espaces de stationnement, mais pas de serre.
M. Ellis : C’est le genre de politiques que nous devons modifier.
La sénatrice Robinson : C’est vraiment fascinant, et je vous ai bien compris quand vous disiez que nous n’avons pas un problème de production, mais un problème de distribution. C’est tellement vrai. Et j’adore voir sur votre site les petites feuilles dans le Nord et dans les régions éloignées.
Quand vous allez à l’épicerie, vous regardez vos légumes-feuilles qui viennent de la Californie, et vous vous demandez quelle histoire pourrait raconter ce petit contenant en plastique rempli d’épinards.
Le problème du gaspillage alimentaire est énorme et, lorsque nous examinons les GES et la manière dont nous pouvons les réduire dans la production alimentaire, je crois qu’il est important de souligner la valeur de ce que vous faites pour réduire le gaspillage alimentaire, car le méthane est sans aucun doute nocif. Ce que vous faites est un complément incroyable à l’agriculture conventionnelle. J’aimerais comprendre; la sénatrice Muggli vous a demandé ce que vous produisez, et je comprends que ce n’est qu’un outil parmi d’autres servant à nourrir la population et que vous produisez principalement des légumes-feuilles. J’ai fait quelques recherches et j’ai vu que vous produisez des fraises et que vous envisagez de produire des concombres. Qu’avez-vous produit, en fait, du côté des fruits et légumes?
M. Ellis : Nous avons produit beaucoup de tomates; elles poussent très bien, en particulier les tomates cerises, qui sont très prolifiques. Les fraises s’en viennent. Je dirais que, dans 5 ou 10 ans, à mesure que Growcer continuera à se développer, de plus en plus de types de cultures trouveront leur place dans l’agriculture intérieure, d’autant plus que l’agriculture extérieure devient de plus en plus risquée. La plupart de nos fruits et légumes viennent de régions touchées par la sécheresse et fortement menacées par le changement climatique, et nous serons inévitablement contraints de cultiver davantage nos propres aliments ici, au Canada. Le contexte politique ne peut que précipiter ce changement.
La sénatrice Robinson : Vous n’allez donc pas mettre en faillite la province de la sénatrice Muggli, le grenier du Canada. Vous n’allez pas produire des hectares et des hectares de blé, de canola ou de pommes de terre — vous avez déjà parlé des légumes racines. Pourriez-vous nous parler un peu de la manière dont vous emballez vos produits et de vos communications avec l’Agence canadienne d’inspection des aliments à ce sujet?
M. Ellis : La bonne nouvelle, c’est que comme nous ne traversons pas les frontières provinciales; nous suivons les normes de CanadaGAP, mais nous ne sommes pas soumis aux contrôles de l’Agence canadienne d’inspection des aliments, l’ACIA.
La sénatrice Robinson : Pourriez-vous expliquer ce qu’est le programme CanadaGAP?
M. Ellis : GAP se traduit par « bonnes pratiques agricoles ». C’est un programme de certification destiné aux exploitations agricoles qui ont principalement des activités interprovinciales et internationales. Il les oblige à se soumettre à des inspections, ce qui représente un coût important pour les petites exploitations agricoles. Selon les directives de l’ACIA, un bureau de santé publique, par exemple Santé publique Ottawa, inspecte ces exploitations comme il le ferait pour un restaurant. Il s’assure que les employés se lavent les mains, que les toilettes sont propres, que le système est en bon état et que les employés sont formés à la manipulation sécuritaire des aliments. C’est le régime de réglementation auquel nous nous conformons afin de garantir que les aliments répondent aux normes les plus élevées possible en matière de sécurité et de salubrité.
Je suis désolé, pourriez-vous répéter la première partie de votre question, madame la sénatrice?
La sénatrice Robinson : Je parlais des installations d’emballage.
M. Ellis : Nous encourageons nos clients à utiliser des emballages entièrement compostables dans la mesure du possible, et nous savons qu’ils sont de plus en plus nombreux à utiliser des emballages entièrement réutilisables. Dans les petites collectivités, comme Prince Rupert, en Colombie-Britannique, il y a maintenant deux fermes. Elles ont une organisation membre qui compte 50 abonnés, et ces abonnés reçoivent chaque semaine un petit sac à fermeture éclair rempli de produits frais, un sac qui porte leur nom. Ils rapportent le sac la semaine suivante et le sac est désinfecté. Ainsi, les produits ne sont emballés dans aucun plastique ni aucun autre type d’emballage. C’est un usage unique. Et nous constatons que cette pratique est de plus en plus populaire au pays.
La sénatrice Robinson : Avez-vous eu des problèmes au chapitre de la traçabilité alimentaire? Quelle est votre traçabilité alimentaire?
M. Ellis : Nous suivons chaque produit, de la semence à l’emballage, grâce à notre logiciel qui automatise nos fermes.
La sénatrice Robinson : Donc, si vous utilisez des emballages réutilisables, comment êtes-vous en mesure de tracer cela jusqu’à la table?
M. Ellis : Si vous êtes abonné, votre nom est inscrit sur le paquet et ce paquet vous est destiné. Les produits qui y sont mis sont tracés jusqu’à ce paquet, ce qui nous permet de savoir, par exemple, quand une laitue est remise à une famille, à quel moment elle a été mise dans le paquet et d’où viennent les semences, tout au long de la chaîne d’approvisionnement.
La sénatrice Robinson : Alors, lorsqu’un client revient avec un contenant réutilisable et que vous le remplissez, cela provient toujours d’un seul lot et il n’y a aucun risque que des lots supplémentaires compliquent la traçabilité alimentaire?
M. Ellis : Exactement.
La sénatrice Robinson : Et en ce qui concerne l’emballage proprement dit, j’ai vu vos modules de culture, alors où se trouve votre module d’emballage?
M. Ellis : Il y a une station d’emballage, si vous avez uniquement un module de culture, juste à l’entrée. Vous placez les produits dans des barquettes, comme j’ai dit, des emballages compostables à base de maïs. Nous avons également ce que nous appelons une unité centrale, qui est un environnement de cuisine commercial — comme des blocs LEGO, ils se connectent tous les uns avec les autres —, de sorte qu’une unité centrale peut être connectée avec quatre unités de culture, des caves à légumes, des congélateurs, etc. C’est là que vous trouvez un lavabo pour le lavage des mains, un évier de désinfection commercial en trois parties, etc. C’est destiné aux grandes installations qui ont plus de personnel et où l’emballage prend plus de temps.
Le vice-président : Il est clair, chers collègues, que nous n’avons pas assez de temps aujourd’hui pour ce témoin. Nous pourrions passer toute la journée à discuter de ce sujet, qui est fascinant. Nous en sommes au deuxième tour.
La sénatrice Burey : Je voudrais parler des obstacles, et vous en avez déjà évoqué quelques-uns avec éloquence. Y a-t-il autre chose dont vous n’avez pas parlé? Nous avons parlé des infrastructures, du zonage, de l’eau et de l’électricité. Y a-t-il d’autres obstacles — comme se présenter devant un conseil municipal, etc. — que vous avez rencontrés?
M. Ellis : Je reviendrai peut-être sur la question fiscale, car j’en ai brièvement parlé à la fin de mon intervention précédente. Précisément, si vous êtes un investisseur, que vous achetez une ferme modulaire et que vous n’êtes pas agriculteur, vous paierez de l’impôt comme s’il s’agissait d’un revenu passif. Si vous achetez une maison pour la louer à quelqu’un, vous paierez de l’impôt comme une entreprise active. C’est deux fois plus d’impôt sur le revenu dans le premier cas. Cela veut dire que, si je suis un investisseur qui doit décider où placer son capital, je me demanderai si je dois acheter une ferme modulaire et aider ma communauté à produire plus d’aliments ou simplement acheter une autre maison pour la louer à autrui. La plupart du temps, à moins de vouloir prendre une décision charitable, d’un point de vue purement économique, l’achat d’une maison serait un bien meilleur investissement.
Je voudrais donc simplement dire, dans le cadre de l’examen de la Loi de l’impôt sur le revenu, qu’il faudrait veiller à ce que les personnes qui investissent dans un bâtiment agricole ou une technologie agricole comme celle-ci ne soient pas pénalisées et qu’elles soient au moins traitées sur un pied d’égalité. Certaines des solutions proposées dans le dernier budget concernaient l’amortissement accéléré ou la dépréciation des équipements. D’après ce que nous comprenons, cela ne s’applique qu’à l’équipement, et non au bâtiment dans son ensemble. Étant donné la configuration de notre installation agricole, où tout vient en bloc, nous croyons que nous ne pourrions pas bénéficier de cette mesure.
C’est un aspect que nous voulons examiner. Par exemple, aux États-Unis, quand nos clients achètent une ferme modulaire pour 180 000 $ américains, ils bénéficient immédiatement d’une déduction fiscale de 60 000 $ sur leur revenu, la première année, ce qui rend les investisseurs américains très intéressés à investir dans la production alimentaire nationale aux États-Unis, et c’est compréhensible. Nous avons besoin d’une politique similaire au Canada.
La sénatrice Burey : Je vais passer à la sécurité alimentaire. À Toronto, par exemple, il y a des communautés marginalisées et des communautés noires. Vous en savez peut-être davantage au sujet de la Black Food Security Initiative, une initiative visant la sécurité alimentaire des populations noires, mais comment votre organisation interagit-elle avec ce genre d’organisation?
M. Ellis : Le plus souvent, nous nous associons à une organisation communautaire existante qui offre des services à ces communautés, et nous augmentons ses capacités. Je prendrai l’exemple de la Mission d’Ottawa, que je connais bien. Elle dépensait 12 000 $ par mois en légumes pour nourrir les membres marginalisés de sa communauté. Pour une organisation caritative, c’est beaucoup d’argent à dépenser seulement pour acheter des légumes. En investissant dans la ferme, elle a réduit ce budget considérablement.
Par exemple, nous pourrions travailler avec l’une des organisations communautaires locales sur le terrain. Nous pourrions fournir des paniers alimentaires ou offrir une formation en alimentation, ou encore organiser une soupe populaire ou une cuisine communautaire. Nous les aiderions à lever des fonds, qu’il s’agisse de subventions, de dons ou d’investissements, pour qu’elles puissent acquérir l’un de ces actifs et produire leurs propres aliments, et ainsi réduire leur dépendance et éliminer leur budget d’approvisionnement alimentaire.
La sénatrice Burey : Qu’en est-il du Programme national d’alimentation scolaire? Je dois féliciter le gouvernement là-dessus, puisque ce programme est désormais permanent; il continuera à le financer. Comment interagissez-vous avec cela? Pourriez-vous nous en dire un peu plus?
M. Ellis : Cela rejoint mon commentaire précédent sur la priorité à accorder à l’approvisionnement local, de sorte qu’à l’heure actuelle, il n’y a pas beaucoup de différence quant à la manière dont le Programme national d’alimentation scolaire est rédigé.
Nous aimerions que les écoles qui reçoivent ce financement soient davantage encouragées à en allouer un certain pourcentage aux agriculteurs locaux, à acheter auprès des fermes locales et à se sentir obligées d’acheter aux fermes locales, car chaque dollar qui revient aux agriculteurs a un effet multiplicateur économique, cet argent étant recyclé plusieurs fois dans la communauté.
Notre interaction avec le Programme national d’alimentation scolaire consisterait à ce que nos clients vendent localement à la commission scolaire ou à chaque école individuellement, afin que les écoles puissent proposer des repas scolaires composés de produits locaux. Nous aimerions que ce soit inscrit dans le programme et renforcé au fil du temps. Le ministère américain de l’Agriculture, l’USDA, avait, jusqu’à récemment, un programme de longue date qui faisait exactement cela.
La sénatrice Burey : Pour les agriculteurs locaux, comme l’a dit la sénatrice Robinson, c’est complémentaire aux exploitations agricoles traditionnelles, donc l’argent demeure dans le pays et dans la collectivité.
M. Ellis : Exactement. Dans l’ensemble, le programme devrait soutenir n’importe quel agriculteur local qui produit des aliments sains pour les enfants, mais il est dit précisément que, si votre école reçoit de l’argent du fédéral pour acheter de la nourriture, un certain pourcentage de ces produits devrait provenir d’exploitations agricoles locales. Un pourcentage de votre budget devrait servir à l’achat de produits locaux.
La sénatrice Burey : Merci.
La sénatrice Sorensen : Peut-être que les réponses varient, mais j’aimerais savoir combien de temps il faut à une collectivité pour devenir autonome sur le plan opérationnel? J’aimerais aussi en connaître davantage sur l’entretien des installations. Que se passe-t-il après quelques années? Y a-t-il une mise au point?
M. Ellis : Construire la ferme prend environ un mois et, de là, il faut attendre six semaines avant la première récolte. En tout et partout, cela prend moins de trois mois.
La sénatrice Sorensen : Épatant.
M. Ellis : En pratique, les collectivités ont besoin de six mois pour se préparer et préparer le projet; elles commencent lentement et, une fois que tout va bien, elles augmentent leur production. Je serais conservateur et je dirais six mois.
Votre deuxième question concerne l’entretien, n’est-ce pas?
La sénatrice Sorensen : Vous ne faites pas cela depuis très longtemps, mais comment cela se passe-t-il quand il faut entretenir l’infrastructure?
M. Ellis : La structure devrait durer 30 ans, et nous avons une garantie qui le confirme. On fait une mise à jour de l’équipement à l’intérieur à la fin de la garantie. Nous avons des garanties assez longues pour l’équipement. Ce sont des pièces d’équipement assez solides.
Nous offrons maintenant aussi aux collectivités l’option de demander ce que nous appelons financement de Growcer. Contrairement à une ferme traditionnelle, qui demande un quart de millions de dollars en amont, nous offrons maintenant une option à 4 000 $ par mois sans frais en amont. C’est un modèle de location avec option d’achat, et l’on s’occupe d’absolument tout l’entretien.
Les frais d’entretien sont payés à même un fonds d’urgence représentant environ 5 % des frais d’exploitation, et cela a été bien plus que suffisant pour toutes nos fermes. Celle de Churchill a maintenant 9 ou 10 ans, environ, et ses frais d’entretien ne dépassent pas quelques milliers de dollars. Pour une ferme d’une valeur d’un quart de millions de dollars, c’est très bien.
La sénatrice Sorensen : Vous n’avez pas de réponses négatives. Ce sont toutes des réponses positives.
Je ne pense pas vous avoir entendu parler de collaboration avec les collèges ou les programmes de formation en agriculture. Avez-vous des partenariats avec des universités ou des collègues dans le pays?
M. Ellis : Il y en a. Environ 12 universités et collèges agricoles ont adopté nos fermes; ils mènent des recherches et forment les étudiants.
La sénatrice Sorensen : Encore une fois, c’est une réponse positive.
M. Ellis : Nous travaillons beaucoup avec le CRSNG, le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, et avec MTax pour former des étudiants à la maîtrise et des étudiants du premier cycle qui veulent connaître ce domaine. Nous leur faisons vivre une expérience pratique. De plus en plus de collèges et d’universités font cet investissement parce qu’ils veulent acquérir de nouvelles capacités; je pense par exemple au Collège d’Olds, en Alberta.
La sénatrice Sorensen : Je veux m’y rendre; je partirais de Banff. Ce n’est pas si loin, mais ce l’est quand même un peu.
Pourriez-vous nous envoyer une liste des lieux où se trouvent toutes les fermes, au Canada? Comme vous l’avez dit, nous pourrions en voir une et ne pas le savoir. Comme je l’ai dit, je vais me rendre à Olds. Récemment, j’étais à l’Université de Guelph. J’aimerais savoir où vous vous trouvez, de façon que, si nous avons affaire dans cette région, nous pourrons les voir.
M. Ellis : Très bien. Si cela intéresse le comité, nous avons deux fermes à Ottawa. Vous pourriez toujours visiter celle qui nourrit la Mission d’Ottawa.
La sénatrice Sorensen : Oui, nous pourrions nous y rendre. Merci.
Le vice-président : À ce sujet, monsieur Ellis, vous avez des fermes dans toutes les provinces et tous les territoires, sauf au Nouveau-Brunswick.
M. Ellis : C’est exact. Nous devons travailler là-dessus.
Le vice-président : Vous travaillez sur les deux dossiers.
M. Ellis : Oui.
La sénatrice Robinson : J’aimerais parler un peu plus de vos clients, les entités qui achètent vos fermes modulaires. Plus précisément, j’aimerais savoir si l’un de vos clients a investi, agrandi ses installations, récupéré son investissement, vu que c’était rentable et a voulu prendre de l’expansion.
M. Ellis : Il y en a beaucoup. Des clients reviennent nous voir chaque mois. Je vais vous donner deux exemples. La Première Nation Montana, qui vit à Maskacis, en Alberta, a commencé avec quelques fermes. Elle a maintenant huit modules liés les uns avec les autres et peut nourrir le district scolaire de la Première Nation ainsi que les collectivités et les épiceries des environs.
C’est possible si les collectivités sont ambitieuses et veulent agrandir leurs installations. Ce ne sont pas toutes les collectivités qui le souhaitent ou en ont besoin, mais, pour celles qui veulent faire de ces fermes un véritable débouché commercial et qui ont le courage de mettre un plan en œuvre et de le mener à terme, c’est une occasion de croissance.
Un autre exemple, c’est celui d’une région de villégiature, Huntsville, en Ontario. Là-bas, nous travaillons avec l’épicerie locale, une coopérative nommée Muskoka North Good Food Co-op. Elle a commencé avec une ferme, puis elle en a ajouté une autre ainsi qu’une cuisine centrale avec l’aide de l’Agence fédérale de développement économique pour le Sud de l’Ontario, FedDev ou de l’Agence fédérale de développement économique pour le Nord de l’Ontario, FedNor, je ne me souviens plus exactement. L’agence de développement local et régional et la Société de gestion du Fonds du patrimoine du Nord de l’Ontario, ou SGFPNO, a aidé l’épicerie à obtenir l’investissement nécessaire pour agrandir ses installations.
Beaucoup de nos clients commencent à petite échelle et prennent de l’expansion au fil du temps.
La sénatrice Robinson : Vous avez dit « nourrir toute une communauté », et j’aimerais que ce soit clair. Je dois toujours me rappeler que nous leur offrons des légumes-feuilles et quelques fruits et légumes, mais il leur manque certaines choses. Quand je circule dans l’épicerie, je me dis à moi-même que vous pouvez remplacer ceci ou cela, mais que j’ai tout de même besoin du reste des produits de l’épicerie.
M. Ellis : Sauf quand nous avons des caves à légumes, un congélateur à viande, un congélateur à poisson et des réfrigérateurs. Dans les collectivités éloignées, où il est difficile d’entreposer de la nourriture, il semble logique de se faire livrer en gros par les routes de glace ou les chalands, l’hiver, surtout pour les collectivités uniquement accessibles par avion, qui peuvent acheter en gros et économiser de l’argent sur la livre de viande. Elles peuvent acheter du bœuf haché en gros et le congeler.
La sénatrice Robinson : Mais elles ne peuvent pas en produire.
M. Ellis : Non, mais elles peuvent économiser de l’argent et réduire le prix.
La sénatrice Robinson : Encore une fois, c’est une question d’entreposage et de distribution.
Je ne vois aucune main levée au bout de la table. Quand je pense à la production de légumes-feuilles et d’autres aliments, je pense à l’E. coli et aux rappels. Dans vos modèles de production, avez-vous rencontré des problèmes liés aux maladies, aux parasites ou à l’agronomie? En répondant à la sénatrice Sorensen, vous avez parlé du Collège d’Olds; vous travaillez manifestement avec nombre de personnes intelligentes sur la production, mais quels défis pourriez-vous rencontrer dans ce domaine?
M. Ellis : Nous en avons rencontré, au tout début, mais nous avons trouvé des solutions. Nous avons maintenant un programme intégré de gestion des parasites. Nous nous assurons pour cela de la bonne qualité de l’eau utilisée dans la ferme. Nous gérons et analysons ensuite la qualité de l’eau pendant qu’elle circule dans la ferme, et nous nous servons de bactéries bénéfiques pour protéger les racines des plantes contre des maladies que l’humain pourrait introduire par erreur. Mais le niveau de salubrité de la ferme est le même que celui d’un laboratoire et des installations de production alimentaire. Vous nettoyez chaque fois que vous y entrez et vous vous assurez que tout est très propre. Les résultats sont éloquents. Quand vous gardez votre ferme en bon état, vos cultures sont incroyables.
Nous avons effectivement eu des problèmes avec des maladies d’origine végétale, au début de notre parcours, mais nous avons pu régler tout cela.
La sénatrice Robinson : Pourriez-vous expliquer le fonctionnement de vos caves à légumes?
M. Ellis : La clé du succès des caves à légumes repose sur des températures fraîches et sèches. Une de nos compétences fondamentales, c’est quand il fait -40 degrés; vous essayez de faire pousser des plantes et vous devenez très bon pour gérer la température et l’environnement de façon efficace sur le plan énergétique. Nous nous servons de cette capacité fondamentale pour maintenir un certain environnement et créer cet environnement sans dépenser beaucoup pour l’énergie. Essentiellement, nous avons un système de contrôle de la température. Il assure un bon échange d’air, et cet air est sec et frais pour que les produits comme les pommes de terre, les oignons et les carottes soient à l’aise et contents tout au long de l’hiver.
La sénatrice Robinson : Si j’en crois mon expérience avec les pommes de terre, les oignons et les carottes, je dirais que les carottes aiment quand c’est sec, et les pommes de terre quand c’est humide.
M. Ellis : Oui. Quand vous les mettez sur des palettes ou des patins, vous pouvez aussi les emballer. Je ne connais pas tous les détails, mais je sais que certains produits sont emballés dans différentes boîtes et différents matériaux. Certains permettent un échange d’air, et d’autres, non. Dans la cave à légumes, l’environnement à l’intérieur de la boîte est différent pour chaque patin. L’environnement et l’air sont les mêmes.
Le sénateur Varone : Quand je suis fasciné par un sujet, je deviens hyperactif avec déficit de l’attention, et je commence à m’intéresser à tous les aspects. J’ai trouvé un article. Nonobstant votre succès, à quel rang se classe le Canada dans ce domaine dans le paysage du G7? L’un des articles que j’ai lus concernait la production hydroponique de pommes de terre dans de la fibre de bois en lien avec la sécurité alimentaire. L’article était fascinant, donc je l’ai lu dans son intégralité. Il s’agissait d’une étude menée par l’institut de recherche bioéconomique norvégien et parrainée par le fonds de Beijing.
Donc, cela vous dit quel est l’objectif des gens, et cela remplace les fermes de légumes racines dont vous avez parlé, parce que l’on cultive ce produit. Investissons-nous assez en recherche et développement pour faire avancer ce que vous avez commencé il y a 10 ans?
M. Ellis : Je dirais que nous investissons suffisamment dans la recherche et développement. Nous sommes excellents en recherche au Canada, mais nous le sommes moins dans la commercialisation de la recherche. Si vous me demandiez où se trouve le Canada dans le paysage, je dirais que nous sommes le grenier du monde, l’un des producteurs alimentaires les plus importants, mais nous produisons des aliments surtout en vue de les exporter. Nous avions beaucoup de produits maraîchers, mais, depuis deux générations, on s’est plutôt tourné vers la production en masse d’aliments que nous exportons ensuite mondialement. Donc, le volume d’aliments que nous produisons pour nous-mêmes à l’échelle nationale n’est pas très important, outre certains produits, comme les pommes de terre et la viande de l’Alberta...
Le sénateur Varone : C’est ce que j’allais dire, parce que l’article mentionnait les réussites de la culture hydroponique de légumes racines et de pommes de terre. Sommes-nous rendus là?
M. Ellis : Je ne crois pas. Notre secteur en est encore à ses tout débuts, et, selon moi, la rentabilité de la pomme de terre, disons, n’est pas encore au rendez-vous. Il est important de savoir quelles recherches sont intéressantes et où il y aura des progrès, mais il faut toujours du temps avant que le prix à la livre soit intéressant pour un consommateur et qu’il décide d’acheter cette pomme de terre là, disons. Selon moi, nous ne sommes pas encore tout à fait rendus là. Nous y sommes arrivés pour la laitue, les légumes-feuilles et les épinards. Nous y sommes presque pour les fraises et les tomates; actuellement, elles sont un peu plus dispendieuses, mais nous tentons de ramener le prix au prix moyen que les Canadiens ont l’habitude de payer; et nous avons de plus en plus de cultures.
Si, à partir de maintenant, nous investissons, non seulement dans la recherche, mais aussi dans sa commercialisation, nous pourrons dans 10 ou 20 ans produire beaucoup d’aliments dans un environnement contrôlé.
Le sénateur Varone : J’ai une dernière question. Si vous pouviez soumettre trois recommandations au gouvernement fédéral, quelles seraient-elles?
M. Ellis : Encore une fois, je demanderais un environnement fiscal favorable, pour augmenter l’investissement; je demanderais à ce que des programmes comme le Fonds des infrastructures alimentaires locales, le FIAL, deviennent permanents; et je demanderais au gouvernement fédéral de collaborer avec les gouvernements provinciaux et de demander aux municipalités d’aider au moyen de politiques sur l’électricité et sur le zonage. Ce sont les trois éléments importants qui accéléreraient grandement la production alimentaire nationale.
Le sénateur Varone : Merci.
La sénatrice McBean : Monsieur Ellis, excusez-moi de mon retard aujourd’hui. J’avais hâte de vous recevoir ici. Je m’appelle Marnie McBean, je suis une sénatrice de l’Ontario. Quelle est la taille idéale d’une collectivité qui aimerait avoir une ferme Growcer?
M. Ellis : Tout ce qui comprend plus de 400 personnes, à savoir des résidents permanents à l’année. Nous concentrons nos énergies sur tout ce qui est supérieur à 400. Churchill en est un excellent exemple, avec une population d’environ 800 ou 900 habitants. Nous avons une ferme qui répond à tous les besoins en légumes de la collectivité.
La sénatrice McBean : Je vous ai entendu dire qu’une collectivité est rendue à huit de vos véhicules. Y a-t-il un moment où cela devient trop gros? Je viens de Toronto. Est-ce plutôt une possibilité éducative à Toronto, ou comment est-ce qu’on arrive à un point où, dans les grandes régions urbaines…
M. Ellis : Nous sommes d’avis que, dans les régions urbaines, il peut s’agir d’un projet de production par quartiers. Un bon exemple est le Collège Durham, à Ajax. Il possède une ferme qui nourrit la collectivité d’Ajax. Nous avons dans la région la Fondation Reena, qui cultive des produits pour sa population. Il s’agit d’un projet qui se développe dans un contexte urbain. La Fondation Reena possède depuis maintenant trois ans une ferme, qui est soutenue par le Fonds des infrastructures alimentaires locales. Elle a mis en place environ la moitié du capital avec l’aide de donateurs, et la moitié a été financée par le FIAL en 2020. Ce sont des exemples d’investissements réalisés il y a cinq ans qui rapportent encore des dividendes à ce jour. Nous le considérons comme un projet davantage axé sur le code postal. J’ai mentionné l’exemple de la Mission d’Ottawa. Nous réduisons son budget alimentaire en cultivant localement. C’est une façon concurrentielle de le faire dans un contexte urbain. Selon nous, l’évolution du paysage agricole passe non pas par de grandes fermes en monoculture, mais par de petites exploitations détenues par les collectivités et réparties par milliers à l’échelle du pays.
La sénatrice McBean : Vous avez dit que la Mission d’Ottawa dépensait à l’origine 12 000 $ par mois en légumes frais. Savez-vous à combien s’élèvent maintenant ces dépenses?
M. Ellis : Je ne le sais pas précisément. C’est un projet relativement nouveau, dans lequel nous avons investi il y a environ six mois, mais j’estime qu’elles sont de 10 à 20 % de ce qu’elles étaient. Toutefois, l’essentiel ici, c’est que les dépenses n’augmenteront pas au cours des dix prochaines années, même si l’inflation alimentaire surpasse généralement l’inflation générale. Cela va bloquer le prix de leurs légumes de façon permanente.
La sénatrice McBean : C’est assez incroyable. Quelle est votre vision quinquennale ou décennale pour ce projet? Il s’agit manifestement d’un projet qui vous passionne, et vous voyez ses retombées. Comme ma collègue l’a dit, vous n’avez pas de mauvaises réponses. Qu’envisagez-vous pour les cinq à dix prochaines années?
M. Ellis : La domination mondiale. Non, je blague.
La sénatrice McBean : Je vous entends.
M. Ellis : Nous nourrissons environ 500 000 personnes par jour à l’échelle de la planète, dans environ 35 pays. Nous avons comme objectif de pouvoir servir 10 millions de personnes à partir de nos fermes chaque jour. Cela constituerait une avancée appréciable, bien que modeste, pour la sécurité alimentaire mondiale, et permettrait à un plus grand nombre de pays d’adopter la production alimentaire à l’échelle nationale. La deuxième chose, c’est ce dont nous parlions à l’instant : augmenter le panier de produits qu’il est logique de cultiver. Nous voulons investir massivement dans la recherche. C’est pourquoi nous avons des partenariats avec 12 collèges et universités. Nous voulons que plus de types d’aliments fassent concurrence aux importations et puissent simplement fournir une meilleure alimentation.
La sénatrice McBean : Je suis arrivée tard à la période de questions. Vous avez mentionné quelque chose à l’une de mes collègues : vous avez dit « […] pour en faire un véritable débouché commercial ». Comment définiriez-vous cela?
M. Ellis : C’est lorsque cela ne dépend d’aucun financement extérieur, génère des retombées et crée des emplois locaux au sein d’une collectivité. C’est lorsque l’objectif est d’avoir un projet qui génère un profit, un point c’est tout. Nous avons quelques projets… de nombreux chefs et conseils nous font venir dans la collectivité et disent que leur objectif est d’atteindre le seuil de rentabilité. Ils ont pour but d’augmenter la souveraineté alimentaire et d’avoir les moyens de production leur permettant de nourrir leur population, un point c’est tout.
C’est notre priorité; faire de l’argent ne l’est pas. Tout excédent sera redonné à la maison des aînés ou au centre jeunesse. Nous n’avons pas l’ambition ni le projet de faire de l’argent. Pour moi, c’est tout à fait normal. Si c’est l’objectif pur et dur, c’est ainsi que je définis un projet non commercial par rapport à un projet où une coopérative comme New Horizon dit : « Nous devons obtenir un rendement nous permettant de récupérer notre argent dans un nombre d’années donné. »
La sénatrice McBean : Merci beaucoup.
M. Ellis : Je vous remercie d’avoir posé vos questions.
La sénatrice Muggli : Avez-vous une relation avec le Global Institute for Food Security à Saskatoon — le CNRC?
M. Ellis : Oui. Il a une exploitation agricole à Saskatoon.
La sénatrice Muggli : Oui. Je pensais bien y avoir vu une ferme.
M. Ellis : C’est une nouvelle ferme installée à Sask Poly, qui appartient au CNRC. C’était un programme qu’ils appelaient le Programme d’innovation Construire au Canada. Il s’agissait d’un véhicule d’approvisionnement qui a permis l’achat d’une ferme Growcer.
La sénatrice Muggli : Quel est l’objectif de cette ferme?
M. Ellis : La recherche sur les cultures. C’est lié à la manière de cultiver à moindre coût, avec plusieurs types de cultures, et cetera.
La sénatrice Muggli : C’est bon à savoir. Avez-vous des histoires à nous raconter concernant les possibilités éducatives pour les élèves du primaire ou du secondaire? Des histoires d’impact intéressantes que vous aimeriez nous raconter?
M. Ellis : Bien sûr. Je vais vous en raconter deux rapidement. Avec la Fondation RBC, nous avons cherché à réunir environ deux dizaines d’aînés et de gardiens du savoir dans les Prairies, il y a environ quatre ans. Nous avons alors travaillé avec eux pour rédiger un programme complet de la maternelle à la douzième année qui est axé sur la terre, fait intervenir les connaissances traditionnelles et intègre ce que la ferme Growcer produit avec les savoirs traditionnels, les façons de faire et les processus ancrés dans le territoire. Il s’agit maintenant d’un programme tout à fait mûri et accrédité qui fait partie du système scolaire. Je sais qu’il y a au moins une dizaine d’écoles sur les réserves qui l’ont mis en place avec leurs enseignants.
J’ai déjà parlé un peu de l’école Altario. C’est une petite école rurale, mais elle s’associe avec son organisation des 4-H localement, et se concentre sur l’enseignement des compétences dont ses jeunes ont besoin pour produire des aliments avec toutes sortes de nouvelles technologies.
Je dirais que, en général, l’idée que les jeunes utilisent un iPad pour diriger la ferme, pour ensuite manger les légumes… C’est ce qui les anime. Le fait que la ferme Growcer soit dirigée à l’aide d’un iPad est absolument un plus pour intéresser les enfants.
J’essaie de penser à d’autres exemples. Nous avons travaillé avec la Fondation pour les enfants le Choix du Président, par exemple. Nous avons maintenant installé trois fermes dans des cours d’école financées par des dons que les Canadiens font tous les jours à la caisse des épiceries. Des projets comme celui-là sont incroyables. Et ce sont des projets qui ont maintenant près de dix ans et qui produisent un impact vraiment énorme.
La sénatrice Muggli : Merci.
Le vice-président : Si j’ai bien compris, sénatrice Robinson, vous avez une question que vous aimeriez poser et à laquelle vous aimeriez obtenir une réponse écrite.
La sénatrice Robinson : Si notre collègue Patricia Duncan, qui est sénatrice de Whitehorse, était ici, elle vous demanderait si vous êtes au courant de la Circumpolar Agricultural Conference. La douzième édition vient de se tenir en Norvège. C’est une organisation non gouvernementale qui se préoccupe des pratiques et des politiques en matière de sciences agricoles dans le Nord. Je veux m’assurer que vous la connaissez, parce que je pense qu’elle s’intéresserait à ce que vous faites.
M. Ellis : Nous ne la connaissons pas; merci de la porter à notre connaissance.
Le vice-président : Une image vaut mille mots. Une que vous avez évoquée est de franchir 15 mètres à partir du stationnement pour aller placer des produits sur les tablettes de l’épicerie. Elle m’est restée en tête. À propos de Churchill, songez à un paysage qui évoque davantage la lune qu’une terre arable, puis vous entrez dans l’une de ces fermes qui constituent, à proprement parler, une oasis.
Je tiens à vous remercier de votre participation aujourd’hui. Nous vous sommes très reconnaissants de votre témoignage et de vos réflexions.
M. Ellis : Merci.
Le vice-président : Chers collègues, pour notre deuxième groupe de témoins aujourd’hui, nous accueillons Mme Jacqueline Thorne, directrice générale, Direction générale de la sécurité du revenu et du développement social, Programme national d’alimentation scolaire; et M. Hugues Vaillancourt, directeur général, Direction de la politique sociale, Direction générale des politiques stratégiques et de service, d’Emploi et Développement social Canada. Nous recevons Mme Georgina Lloyd, sous-ministre adjointe, Affaires du Nord; et M. Wayne Walsh, directeur général, Direction générale des politiques stratégiques du Nord, des Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada. Enfin, nous accueillons Mme Karen Campbell, directrice générale, Direction générale de l’éducation, de Services aux Autochtones Canada. Nous vous remercions d’être ici aujourd’hui. Après vos commentaires, nous passerons aux questions des sénateurs.
Jacqueline Thorne, directrice générale, Direction générale de la sécurité du revenu et du développement social, Programme national d’alimentation scolaire, Emploi et Développement social Canada : Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs.
[Français]
Je tiens tout d’abord à souligner que nous nous trouvons sur les territoires traditionnels non cédés de la nation algonquine anishinabe.
[Traduction]
Merci de me donner l’occasion de discuter du Programme national d’alimentation scolaire. Je traiterai de certaines initiatives élargies qui font partie du travail du gouvernement fédéral pour aider à lutter contre l’insécurité alimentaire en rendant la vie plus abordable pour les Canadiens.
Jusqu’à l’an dernier, le Canada était le seul pays du G7 sans programme alimentaire scolaire à l’échelle du pays. Avant l’investissement fédéral en 2024, les programmes d’alimentation scolaire financés par les gouvernements provinciaux et territoriaux n’atteignaient qu’un enfant d’âge scolaire sur quatre au cours de l’année scolaire 2023-2024.
[Français]
Les avantages des programmes d’alimentation en milieu scolaire sont largement reconnus. Des études montrent que chaque dollar investi dans ces programmes génère un retour sur investissement de 2 à 6 $ en termes d’avantages éducatifs, sanitaires, sociaux, économiques et environnementaux.
[Traduction]
Annoncé dans le budget 2024 et lancé au cours de l’exercice 2024-2025 avec un investissement de 1 milliard de dollars sur cinq ans, le Programme national d’alimentation scolaire est assuré par trois ministères fédéraux : Emploi et Développement social Canada, Services aux Autochtones Canada et Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada. Emploi et Développement social Canada est responsable d’exécuter le programme dans le cadre d’accords de transferts bilatéraux avec les provinces et les territoires. En mars 2025, nous avons conclu des accords de financement bilatéraux sur trois ans avec les 13 provinces et territoires. Le financement fédéral dans le cadre du programme vise à soutenir les programmes d’alimentation scolaire de toutes les administrations du pays pour cette année scolaire. Comme vous le savez, l’éducation relève de la compétence provinciale et territoriale, et toutes les provinces et tous les territoires financent actuellement par eux-mêmes les repas en milieu scolaire.
[Français]
Le financement fédéral accordé dans le cadre du Programme national d’alimentation scolaire du Canada s’appuie sur les efforts déjà déployés par les provinces et les territoires tout en offrant à chaque instant la souplesse nécessaire pour investir en fonction de ses priorités et de ses besoins.
[Traduction]
Le programme vise à fournir à jusqu’à 400 000 enfants l’accès à des aliments nutritifs à l’école chaque année. Pour une famille participante qui a deux enfants à l’école, le programme peut générer des économies annuelles de 800 $. Peu après l’annonce du budget 2024, on a publié la Politique nationale d’alimentation scolaire, qui s’est appuyée sur une mobilisation à grande échelle, notamment auprès d’enfants et de jeunes. La politique énonce une vision à long terme, ainsi que des principes et des objectifs visant à orienter la mise en œuvre du Programme national d’alimentation scolaire.
Dans le cadre de la politique, nous reconnaissons l’importance de soutenir les systèmes alimentaires locaux. Cela se reflète dans le principe de flexibilité de la politique visant à garantir que les aliments sont d’origine locale, dans la mesure du possible, et qu’ils tiennent compte des réalités locales et régionales. Plusieurs administrations s’efforcent déjà d’augmenter l’approvisionnement en aliments locaux. À titre d’exemple, le gouvernement de la Colombie-Britannique cherche à augmenter l’utilisation d’aliments provenant de la Colombie-Britannique dans les établissements publics, y compris les écoles, dans le cadre de son initiative Feed BC.
[Français]
De la même façon, le gouvernement du Nouveau-Brunswick a prévu 19 millions de dollars dans son budget de 2025 pour mettre en place un nouveau programme de dîners dans les écoles qui utilisera autant que possible des aliments locaux.
[Traduction]
Dans le cadre des accords bilatéraux, les provinces et les territoires ont convenu d’utiliser le financement fédéral pour faire avancer leurs priorités communes conformément à la Politique nationale d’alimentation scolaire. En vertu des accords bilatéraux, les provinces et les territoires ont la flexibilité de décider comment ils veulent affecter les fonds fédéraux pour le milieu scolaire, en reconnaissant la compétence provinciale et territoriale et l’importance de tenir compte des besoins locaux et territoriaux. De plus, cela signifie que les provinces et les territoires sont responsables de l’exécution des programmes d’alimentation en milieu scolaire, en travaillant avec les fournisseurs et les transformateurs alimentaires et en mobilisant les communautés scolaires locales.
Pour l’avenir, le budget 2025 propose un financement continu de 216,6 millions de dollars par année pour rendre le programme permanent. Pour ce faire, on a mis en œuvre une loi sur le programme national de préparation alimentaire en milieu scolaire dans le cadre de la Loi d’exécution du budget 2025, qui est maintenant à l’étude au Parlement.
[Français]
En rendant permanent le Programme national d’alimentation scolaire, nous continuerons de collaborer avec les provinces et les territoires pour améliorer et élargir à long terme les programmes d’alimentation en milieu scolaire de partout au pays.
[Traduction]
Le Programme national d’alimentation scolaire fait partie des efforts élargis du gouvernement fédéral pour bâtir un Canada plus abordable et complète un éventail de mesures visant à lutter directement contre l’insécurité alimentaire.
En plus du programme, EDSC est le responsable stratégique des principaux programmes sociaux et des soutiens au revenu, comme le système pancanadien d’apprentissage et de garde d’enfants, l’Allocation canadienne pour enfants, l’Allocation canadienne pour les travailleurs, la pension de la Sécurité de la vieillesse et le Supplément de revenu garanti, et récemment, la Prestation canadienne pour les personnes handicapées.
Il s’agit d’initiatives fédérales visant à améliorer l’abordabilité en diminuant les coûts et en augmentant le revenu disponible des ménages. Elles contribuent à la sécurité alimentaire en aidant les personnes et les familles à acheter des biens essentiels, y compris des aliments sains. Elles jouent également un rôle important dans la réduction de la pauvreté.
[Français]
Emploi et Développement social Canada s’occupe également de la mise en œuvre de la stratégie Une chance pour tous : la première Stratégie canadienne de réduction de la pauvreté, qui reconnaît que la pauvreté et la sécurité alimentaire sont étroitement liées.
[Traduction]
La stratégie vise à réduire et à éliminer les obstacles systémiques, y compris pour les personnes qui font face à des obstacles uniques qui peuvent les rendre plus vulnérables à la pauvreté et à l’insécurité alimentaire, comme les familles monoparentales avec des enfants, les adultes célibataires, les personnes handicapées, les Autochtones et les communautés racisées.
L’insécurité alimentaire fait l’objet d’un suivi, en tant qu’indicateur multidimensionnel de la pauvreté s’inscrivant dans les indicateurs du tableau de bord de la stratégie et faisant l’objet d’un rapport annuel. Le Conseil consultatif national sur la pauvreté rend des comptes sur cet indicateur dans son rapport annuel également.
Sur ce, je termine notre déclaration liminaire d’aujourd’hui. J’espère que cela a apporté un contexte utile. Merci.
Le vice-président : Merci.
Madame Lloyd, vous avez maintenant cinq minutes pour présenter votre déclaration liminaire.
Georgina Lloyd, sous-ministre adjointe, Affaires du Nord, Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada : Merci de l’invitation. Bonjour. Ulaakut.
Je me sens privilégiée de me trouver et d’avoir des conversations comme celle-ci sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin.
Merci à vous tous de me donner la possibilité de parler aujourd’hui d’une question qui est très importante pour la santé et le bien-être des Canadiens : la sécurité alimentaire.
La sécurité alimentaire signifie d’avoir un accès fiable à suffisamment d’aliments abordables et nutritifs. Dans les régions nordiques et isolées du Canada, cela représente un grand défi. Comme bon nombre d’entre vous le savent, le fait de vivre dans des régions isolées et nordiques s’assortit de défis uniques, y compris de coûts de transport élevés, d’une météo inclémente, de lieux et d’une géographie éloignés, de courtes saisons de culture et d’infrastructures limitées. Pour bon nombre des gens qui vivent dans les collectivités éloignées, l’achat de fruits, de légumes, de lait et de viande frais serait impossible sans un certain cadre de soutien.
L’expérience et les nombreuses études montrent que la sécurité alimentaire dans le Nord canadien ne peut être atteinte qu’au moyen d’un effort concerté et d’une collaboration entre les gouvernements de différents échelons, des partenaires autochtones et des collectivités à l’échelle locale.
Le programme Nutrition Nord Canada est un des moyens par lesquels le gouvernement du Canada aide à augmenter la sécurité alimentaire dans les collectivités nordiques et isolées. J’aimerais vous fournir quelques renseignements au sujet de ce programme, de la manière dont il s’adapte suivant différents types de partenariats et de la manière dont nous cherchons à mieux soutenir la sécurité alimentaire et la souveraineté alimentaire dans le Nord.
Nutrition Nord Canada, ou NNC, constitue la principale réponse à la sécurité alimentaire dans le Nord du gouvernement du Canada. Ce qui a commencé comme un programme de subvention au transport en 2011 a évolué pour devenir un ensemble de programmes beaucoup plus large.
Aujourd’hui, les programmes de la Subvention pour le soutien aux chasseurs-cueilleurs et de la Subvention pour les programmes alimentaires de communautés, élaborés conjointement, ainsi que la Subvention de recherche sur la sécurité alimentaire s’associent tous au programme de subvention actualisé et, ensemble, cherchent à réduire le coût des articles essentiels tout en augmentant l’accès aux aliments au détail, à la nourriture traditionnelle et aux aliments d’origine locale.
Depuis le début du programme Nutrition Nord Canada, le nombre de collectivités qui bénéficient de sa subvention a augmenté, passant de 79 à 124 au Yukon, aux Territoires du Nord-Ouest, au Nunavut et dans des régions nordiques de l’Alberta, de la Saskatchewan, du Manitoba, de l’Ontario, du Québec et du Labrador. Un élément essentiel de l’admissibilité au programme est une collectivité qui ne bénéficie pas d’un accès aux routes, au système ferroviaire ou aux voies maritimes pendant toute l’année.
L’adoption et l’utilisation du programme de subvention atteignent maintenant des niveaux sans précédent. Les taux de subvention ont augmenté de plus de 50 % depuis 2011, et bien que le programme fasse diminuer le coût de certaines denrées alimentaires d’une proportion allant jusqu’à 76 %, l’abordabilité alimentaire globale continue de présenter un réel défi.
Si l’on regarde les prix de l’été dernier, à Igloolik par exemple, une douzaine d’œufs aurait coûté 9,36 $ sans la subvention, comparativement à 4,69 $ avec la subvention, ce qui fait économiser 50 % aux consommateurs pour un article essentiel. À Kinngait, au Nunavut, quatre litres de lait coûtent 36,29 $ sans la subvention, contre 8,89 $ avec la subvention. Les détaillants, les fournisseurs, les producteurs locaux, les producteurs alimentaires et les organismes de bienfaisance participent tous à la subvention et doivent démontrer ces économies dans les factures d’épicerie des consommateurs.
Pour soutenir les efforts locaux et régionaux, la Subvention pour le soutien aux chasseurs-cueilleurs de Nutrition Nord Canada est un autre moyen pour le Canada de travailler avec ses partenaires afin de favoriser la sécurité et la souveraineté alimentaires tout en maintenant les valeurs traditionnelles. Actuellement, la subvention permet à 112 collectivités de réaliser des activités de chasse traditionnelle, de récolte et de partage d’aliments dans les collectivités isolées, ce qui aide à réduire l’insécurité alimentaire et à renforcer les pratiques et la culture traditionnelles. Le Canada a affecté à ce programme 120 millions de dollars sur trois ans à compter de 2024-2025. Les fonds sont attribués directement aux gouvernements autochtones afin qu’ils puissent gérer les priorités en matière de récolte sous une forme d’autogestion.
Ces investissements portent leurs fruits. Associée à la Subvention pour les programmes alimentaires des communautés, la subvention a permis d’aider plus de 15 000 chasseurs-cueilleurs traditionnels, contribué à plus de 700 nouvelles initiatives de partage des aliments et favorisé plus de 400 chasses et cueillettes communautaires.
À mesure que la mise en œuvre se déploie à plus grande échelle, on voit apparaître d’excellents exemples tirés de la Subvention pour le soutien aux chasseurs-cueilleurs.
Malgré les progrès constatés, il faut en faire davantage. Nous sommes déterminés à apporter des améliorations continues. Nos équipes travaillent avec diligence avec les partenaires autochtones, les détaillants, les fournisseurs et les organismes de bienfaisance pour trouver des moyens d’améliorer l’efficacité du programme dans le Nord.
Un représentant ministériel spécial a été nommé pour proposer des recommandations d’amélioration de l’efficacité et de l’efficience de l’étude, qui s’inspireront d’un examen interne, déboucheront sur un sommet sur la sécurité alimentaire, à l’hiver, et permettront d’orienter les recommandations futures d’avancement stratégique du programme.
Comme il en est question dans le budget de 2025, cet examen sera pris au sérieux, et l’engagement subsiste d’élaborer conjointement des approches à la sécurité alimentaire axées sur des données probantes, qui permettent de mieux répondre au coût élevé de la vie et aux défis d’abordabilité auxquels de nombreux habitants du Nord font face.
Merci. Nous serons heureux de répondre aux questions du comité.
Le vice-président : Merci.
Madame Campbell, la parole est à vous.
Karen Campbell, directrice générale, Direction générale de l’éducation, Services aux Autochtones Canada : Merci à vous tous de m’avoir invitée et de me donner l’occasion de m’exprimer depuis le territoire traditionnel non cédé de la nation algonquine anishinabe. À Services aux Autochtones Canada, nous avons pour mandat d’aider les populations et les collectivités autochtones à accéder aux services, de tenir compte des conditions socioéconomiques et de promouvoir l’autodétermination en ce qui concerne les services.
Bien que les provinces et les territoires soient responsables de l’éducation sur leur territoire respectif, garantir l’accès à l’éducation primaire et secondaire aux étudiants des Premières Nations qui résident sur les réserves, dont ceux qui fréquentent des écoles hors réserve, est la responsabilité du gouvernement du Canada.
L’accès à des aliments nutritifs et adaptés à la culture est fondamental pour soutenir l’apprentissage des enfants, leur bien-être et leur réussite continue. Les programmes d’alimentation scolaire ont démontré de manière constante des répercussions positives sur les résultats en matière de santé et d’éducation, aidant les enfants à atteindre leur plein potentiel et renforçant les collectivités dans leur ensemble.
Comme vous l’avez entendu, Emploi et Développement social Canada dirige les travaux du gouvernement fédéral dans le cadre du Programme national d’alimentation scolaire, et Services aux Autochtones Canada a pour rôle de gérer le financement pour aider les collectivités des Premières Nations à mener à bien les initiatives d’alimentation scolaire destinées aux élèves qui vivent sur les réserves.
Conformément à l’engagement du gouvernement du Canada à l’égard d’un contrôle par les Premières Nations de l’éducation des Premières Nations, les fonds sont versés en fonction de formules de financement élaborées conjointement. Cela visa à garantir la comparabilité provinciale en tant que base pouvant faire l’objet de rajustements en fonction de facteurs uniques, comme la petite taille des écoles et l’éloignement, ainsi que des investissements communs nationaux. Les Premières Nations ont la flexibilité de dépenser ces fonds en fonction de leurs priorités éducatives uniques et conformément aux réalités locales de leurs systèmes alimentaires.
En 2024-2025, 38 millions de dollars de fonds destinés à l’alimentation en milieu scolaire ont été fournis à près de 117 000 élèves des Premières Nations. En 2025-2026 — et pour les prochaines années —, cette somme s’élève à 47,5 millions de dollars. Cette année, le financement a permis d’aider plus de 120 000 élèves. Nous accueillons la proposition de rendre permanents le Programme d’alimentation en milieu scolaire et le financement aux Premières Nations afin que ces investissements puissent se poursuivre dans l’avenir.
Mes commentaires ont été assez brefs, mais je vous remercie une fois de plus de m’avoir permis d’être ici. Je serai heureuse de répondre à vos questions.
Le vice-président : Merci, madame Campbell.
Chers collègues, compte tenu du temps dont nous disposons, je propose d’attribuer cinq minutes à chaque sénateur, et cela comprend la question et la réponse.
La sénatrice Burey : Bonjour et merci d’être ici. Je suis très heureuse de vous voir. Je pense que vous étiez présents lors de la première séance, alors je ne referai pas tout mon discours.
En ce qui concerne l’orientation stratégique générale du gouvernement, le gouvernement comprend-il, dans le cadre de ses délibérations stratégiques, les enjeux liés à l’abordabilité et reconnaît-il que le Programme national d’alimentation scolaire — que je salue, ayant visité des écoles dans ma propre collectivité — touche aux fondements mêmes de notre démocratie au Canada? Ceux qui participent à ces discussions autour de la table comprennent-ils qu’il est essentiel de bien faire les choses?
Mme Thorne : Merci de poser la question. Le Programme national d’alimentation scolaire du Canada est guidé par la vision à long terme de la Politique nationale d’alimentation scolaire, qui vise à garantir que chaque enfant a accès à des aliments nutritifs à l’école, ainsi que par les principes et les objectifs qui sous-tendent l’objectif à long terme de l’accès universel.
L’un de ces principes, bien sûr, est l’accessibilité. Les enfants peuvent fréquenter les écoles sans s’exposer à la stigmatisation ou à des obstacles. Cela fait la promotion de pratiques saines et de liens avec l’environnement, la culture et les systèmes alimentaires locaux.
Le Programme national d’alimentation scolaire n’est pas le seul investissement ni la seule mesure directe destinés à soutenir la sécurité alimentaire. Il existe aussi d’autres initiatives, comme l’Allocation canadienne pour enfants, des programmes sociaux ciblés et d’autres suppléments de revenu. Le programme en est à ses balbutiements. Nous n’avons pas encore de rapports complets de la part des provinces et des territoires. Les ententes viennent d’être parachevées et signées cette année, en mars, et c’est pourquoi nous n’avons pas encore de rapports pour une année complète.
La sénatrice Burey : J’aimerais juste souligner que nous disons « insécurité alimentaire », mais je pense que la sécurité alimentaire est un impératif de sécurité nationale pour nous en tant que pays. Je vais passer à la prochaine question.
Vous avez également entendu M. Corey Ellis, qui a parlé de l’autre travail et des obstacles. Il est possible d’accomplir certaines choses à l’échelle fédérale, ce dont il a parlé, qui permettent la flexibilité que vous avez évoquée concernant l’approvisionnement en aliments d’origine locale. Pouvez-vous préciser les exigences relatives au programme d’alimentation scolaire, qui doit non seulement être flexible, mais aussi comporter un pourcentage obligatoire d’aliments de source locale, qu’il s’agisse de cultures traditionnelles ou de ce type d’agriculture modulaire?
Mme Thorne : En ce moment, nous n’avons pas de pourcentage obligatoire. Comme je l’ai mentionné dans ma déclaration liminaire, les provinces et les territoires détiennent la compétence en matière de santé et d’éducation et sont responsables de mener à bien les programmes d’alimentation scolaire dans leurs administrations. Essentiellement, le gouvernement du Canada est un bailleur de fonds. Nous fournissons des fonds directement à ces administrations, qui travaillent ensuite avec les districts scolaires, les organismes scolaires et les conseils scolaires pour déterminer les priorités et les besoins à l’échelle locale.
J’ai trouvé très intéressantes les recommandations du témoin précédent, et j’en prends bonne note. Je retire donc cette remarque.
Dans les premières discussions que nous avons eues lors de la signature des ententes, certaines administrations menaient déjà des travaux dans ce domaine. La Colombie-Britannique a une initiative d’approvisionnement en aliments locaux, y compris dans les établissements, ce que j’ai également mentionné dans ma déclaration liminaire.
Je suppose que la réponse courte est que nous n’avons rien d’obligatoire en ce moment, mais j’en prends bonne note.
La sénatrice Burey : Je sais que le sénateur Varone va approfondir le sujet, alors je vais m’arrêter ici.
Le sénateur Varone : Ma première question s’adresse à vous, madame Thorne, et je vous remercie d’être ici. Tout cela n’est qu’une grande courbe d’apprentissage pour moi, et je vous demanderais donc de m’expliquer à quoi ressemble le Programme national d’alimentation scolaire au quotidien. Que fournissons-nous? Est-ce le déjeuner? Est-ce le dîner? Est-ce que ce sont des collations entre les deux repas? Qui est responsable de définir la valeur nutritive des aliments proposés aux enfants?
Mme Thorne : C’est une excellente question. Il n’y a pas d’approche universelle. Ce qui est proposé peut varier selon les administrations.
Le sénateur Varone : Leur donnons-nous des croustilles et des barres de chocolat, ou bien…
Mme Thorne : Non.
Le sénateur Varone : Parce que c’est ce que je voudrais si j’étais un enfant.
Mme Thorne : Oui, exactement. Un des principes du Programme national d’alimentation scolaire est de promouvoir la santé et de respecter les recommandations en matière d’alimentation saine du Guide alimentaire canadien. On encourage les enfants à acquérir de saines habitudes alimentaires, une littéracie alimentaire et des attitudes alimentaires, ainsi que des connaissances, un langage et des compétences en matière d’alimentation.
Le sénateur Varone : Ce sont des personnes locales qui s’occupent du programme?
Mme Thorne : C’est exact. Elles font partie du conseil scolaire des écoles.
Le sénateur Varone : Sont-elles soumises à des lignes directrices nationales?
Mme Thorne : Notre Politique nationale d’alimentation scolaire guide le Programme national d’alimentation scolaire. Nous venons de commencer à déployer les fonds cette année, et nous disposerons d’un portrait plus complet lorsque nous recevrons les rapports annuels des provinces et des territoires à l’automne ou au début de l’année prochaine.
Le sénateur Varone : Merci.
Mme Thorne : Je vous en prie.
Le sénateur Varone : Ma deuxième question s’adresse à Mme Lloyd. Nutrition Nord Canada pique beaucoup ma curiosité. Il est question d’accéder à des collectivités très éloignées. Pour le comité, pouvez-vous décrire la taille de la plus petite collectivité, et celle d’une grande? De combien de personnes parlons-nous? Dépendamment de ce chiffre, le mode d’exécution devient de plus en plus important, donc décrivez-nous ces collectivités, les petites et les grandes.
Mme Lloyd : Bien sûr. Le programme Nutrition Nord Canada est accessible à 134 collectivités, et leur admissibilité dépend de leur niveau d’isolement. Il faut qu’il soit impossible d’accéder à la collectivité par voie terrestre, ferroviaire ou maritime tout au long de l’année. Ce sont les critères d’admissibilité au programme Nutrition Nord Canada. Il y a quatre composantes différentes. L’une des composantes les plus importantes à l’échelle de la collectivité, c’est la subvention, qui représente environ 75 % de l’investissement que nous réalisons tout au long du programme. Le programme offre une subvention à des niveaux haut, moyen et bas, à l’égard d’une diversité d’aliments et d’autres produits, et la subvention est accordée aux détaillants en fonction du poids des produits qui sont expédiés par avion. Une fois que ces produits sont validés, la subvention est accordée aux détaillants. Les détaillants doivent fournir cette subvention aux consommateurs, et elle doit être reflétée sur la facture des consommateurs.
Pour illustrer la question ayant trait à la taille des collectivités, je vais prendre l’exemple d’une collectivité comme Arctic Bay, au Nunavut, une très petite communauté composée d’environ 400 personnes, et qui n’est accessible que par avion. Elle reçoit peut-être des marchandises par voie maritime une fois par année, mais tout le reste est expédié par avion. C’est le plus souvent ce genre de collectivité qui a besoin des produits assortis d’une subvention plus élevée. C’est pourquoi le lait, par exemple, qui coûte 38 $ sans subvention, coûte à présent 8 $. Et, c’est la même chose pour les collectivités qui se situent dans les Territoires du Nord-Ouest, par exemple, où parfois il y a des routes d’hiver, et parfois il n’y en a pas. Donc, il se peut que l’importance de la subvention varie tout au long de l’année.
Le sénateur Varone : Merci.
La sénatrice Muggli : Ma première question s’adresse à Mme Thorne. Vous avez parlé du fait que les provinces disposaient de beaucoup de marge de manœuvre en ce qui concerne l’exécution du programme. Y a-t-il des conditions non négociables en ce qui concerne le financement?
Mme Thorne : Que voulez-vous dire par là?
La sénatrice Muggli : Y a-t-il des conditions quelconques associées au financement, que les provinces doivent respecter?
Mme Thorne : Elles sont libres de dépenser l’argent dans tout ce qui concerne l’alimentation en milieu scolaire, ce qui signifie qu’elles peuvent dépenser pour couvrir les coûts de l’alimentation scolaire, et bien sûr, la dotation en personnel, la logistique, les équipements — par exemple, des réfrigérateurs pour stocker les aliments, s’ils n’en avaient pas avant — ou l’infrastructure, s’ils n’avaient pas de cuisine ou d’aire de préparation des aliments, afin qu’ils puissent mettre sur pied des programmes d’alimentation scolaire.
La sénatrice Muggli : Donc, vous avez pour unique obligation de mettre sur pied un programme d’alimentation?
Mme Thorne : Ou de faciliter le programme, c’est bien cela. Nous sommes un bailleur de fonds qui fournit un financement pour élargir ou améliorer les programmes existants.
La sénatrice Muggli : Donc, vous n’êtes pas tenu d’offrir un programme qui respecte les critères du Guide alimentaire canadien, par exemple.
Mme Thorne : L’un des principes, c’est que la nourriture que l’on sert respecte les prescriptions du Guide alimentaire canadien. Certaines provinces et certains territoires disposent également de leur propre guide alimentaire pour ce qui est de l’exécution de programmes d’alimentation scolaire.
La sénatrice Muggli : C’est très intéressant.
Mon autre question s’adresse à Mme Campbell ou à Mme Lloyd. Au fil des ans, des programmes alimentaires ont vu le jour dans les écoles. Avez-vous remarqué un quelconque lien avec l’état de santé? Y a-t-il des indicateurs que vous examinez? Les interventions dans le système de santé sont-elles moins nombreuses chez les enfants? La liste de consultation des pédiatres est-elle plus courte?
Mme Campbell : Ma réponse courte est non, mais je m’explique. Dans le cadre de notre relation avec les Premières Nations et leur programme scolaire, ce sont elles qui déterminent les priorités quant au financement et au soutien scolaire de leurs élèves. Autant que possible, nous travaillons de concert avec elles concernant le cadre de rendement élaboré conjointement. Nous recueillons donc des données différentes concernant l’assiduité scolaire, par exemple, et les taux d’obtention de diplôme. Récemment, nous avons commencé à investir dans l’alimentation scolaire, et nous travaillons, à l’heure actuelle, avec des partenaires pour connaître le nombre d’élèves qui en tirent parti.
Nous ne leur avons pas demandé de nous fournir des données supplémentaires, ou des chiffres additionnels concernant la distribution d’aliments dans les écoles. Cela ne signifie pas que les collectivités ne vont pas recueillir ces données, ou nous les communiquer, mais ce n’est pas quelque chose que le gouvernement du Canada exige.
La sénatrice Muggli : Les indicateurs de santé sont essentiels lorsqu’il est question de sécurité alimentaire. Je conçois qu’établir un point de référence lorsqu’on recueille des données auprès des organisations sanitaires et au sujet des interventions n’est pas chose aisée. Ce n’est pas facile, mais ce sont là des données importantes. Madame Lloyd, vouliez-vous répondre à la question?
Mme Lloyd : Nous ne travaillons pas avec le système éducatif dans le cadre de notre programme, mais les programmes que nous avons s’appliquent à l’échelle communautaire, et donc, ils s’alignent sur les priorités des gouvernements autochtones lorsqu’il est question de la Subvention pour le soutien aux chasseurs-cueilleurs et la Subvention pour les programmes alimentaires des communautés par les producteurs locaux. Nous avons tenu des discussions avec des partenaires autochtones qui souhaitent augmenter la participation à la cueillette d’aliments traditionnels et aux services alimentaires au sein de leurs collectivités, et c’est donc un très bon exemple qui montre la façon dont les collectivités souhaitent renforcer la santé de leurs membres.
La sénatrice Muggli : Peut-être que nous aurons des témoins à une échelle plus locale qui pourront nous aider à comprendre les différences qu’ils ont constatées. Merci.
La sénatrice McBean : Madame Lloyd, avez-vous entendu l’exposé précédent? Une partie était consacrée aux constructions modulaires, et à la question de savoir quelle quantité d’énergie l’une de ces exploitations agricoles modulaires consommerait, la réponse était l’équivalent de ce que consomment deux maisons. C’est peut-être une question très naïve, mais qu’en est-il de l’accès à l’électricité dans certaines des collectivités qui bénéficient des programmes de Nutrition Nord Canada? Je suppose qu’un endroit comme Arctic Bay n’est même pas relié au réseau. Je n’essaie pas d’être naïve ici; je veux simplement que cette information soit consignée au compte rendu. Qu’est-ce que cela signifie pour nous de dire, « C’est simplement comme le coût de l’électricité que deux maisons consomment? De quoi est-ce que cela a l’air dans une collectivité du Nord? »
Mme Lloyd : C’est une excellente question. Dans le cadre de mon mandat, je m’occupe également de ce qui a trait à l’approvisionnement en énergie dans tout le Nord. Ce n’est pas tant une question d’isolement, qu’une question d’emplacement dans le Nord. Il y a 74 réseaux énergétiques individuels qui servent le Nord du Canada. Aucun d’eux n’est relié au réseau du Sud, et donc ils sont tous instables, très peu redondants, et fonctionnent, pour l’essentiel, au diésel. Il coûte extrêmement cher de faire expédier uniquement par avion du diésel dans une collectivité comme Arctic Bay.
La sénatrice McBean : Ces réseaux sont-ils fiables? Les résidants sont-ils en mesure d’anticiper les coupures de courant lorsqu’ils cultivent des légumes? Peut-être qu’en hiver les choses ne sont pas si catastrophiques si le congélateur tombe en panne, car il suffit d’ouvrir la porte, à cause de la température plus froide, mais si l’on fait pousser des cultures et qu’une panne de courant se produit, on perd la récolte dans ces environnements.
Mme Lloyd : Le système, en particulier au Nunavut, est très peu redondant. Vous avez sans doute vu l’annonce concernant le projet d’investissement dans le projet hydroélectrique à Iqualuit ces quelques dernières semaines, car ce genre d’investissement dans les besoins fondamentaux en énergie à l’échelle du Nord est fondamental pour garantir le développement de tout le reste. Donc, vous avez entièrement raison lorsque vous dites que le système énergétique n’est pas très fiable, et qu’il n’est pas redondant.
La sénatrice McBean : Je voulais que ce soit consigné dans le rapport, pour qu’on ne dise pas simplement « Allez brancher ça là-bas, et tous les problèmes seront réglés. » Merci, madame Campbell.
Comment SAC soutient-il les infrastructures, comme celles de l’énergie, de l’eau, et du transport, lesquelles sont essentielles pour la production alimentaire locale?
Mme Campbell : Cela dépasse mes compétences, mais je vous fournirai volontiers quelque chose par écrit.
La sénatrice McBean : Merci beaucoup.
Le sénateur Varone : J’ai lu dans nos notes que la ministre des Affaires du Nord avait annoncé qu’une représentante spéciale de la ministre allait effectuer une évaluation externe du programme. Ma question s’adresse à vous, madame Lloyd. J’ignore si l’évaluation aura lieu parce qu’il y a eu un problème, ou parce qu’ils répondent à un appel à l’aide. Pouvez-vous nous en dire plus concernant cette évaluation?
Mme Lloyd : Bien sûr. Nous avons le plaisir d’avoir Mme Aluki Kotierk du Nunavut, comme représentante spéciale de la ministre, qui sera chargée de l’évaluation externe, et nous prévoyons recevoir son rapport d’ici la fin de cet exercice, soit mars 2026. Cette évaluation donne suite à une évaluation interne en cours. Il y a également un cycle d’évaluation de cinq ans, et une évaluation interne a été lancée. De ce que nous avons entendu dans le discours public concernant la sécurité alimentaire, les taux d’insécurité alimentaire augmentent malgré une augmentation des investissements. Donc, y a-t-il une façon d’améliorer l’efficacité des investissements…
Le sénateur Varone : Donc, c’est davantage pour répondre à un appel à l’aide, et non parce qu’il y a eu un problème et qu’il faut enquêter.
Mme Lloyd : Les gens cherchent surtout à comprendre la façon dont la subvention fonctionne, et s’il y a moyen de la redéfinir ou de la réformer afin de mieux garantir l’efficience du programme.
L’évaluation de l’efficience de l’ensemble des programmes est en cours, mais le public et le conseil consultatif, entre autres, ont affirmé qu’il se pourrait qu’une évaluation interne ne suffise peut-être pas, et qu’il faudrait trouver d’autres solutions. C’est pourquoi nous avons également fait venir une évaluatrice externe.
Le sénateur Varone : Merci. Pour en revenir à ce que la sénatrice McBean a évoqué concernant le réseau... Arctic Bay, cette petite collectivité, combien d’heures d’ensoleillement connaît-elle en hiver, et combien d’heures en été?
Mme Lloyd : Ce pourrait être une bonne question dans un jeu-questionnaire.
M. Walsh : Je dirais probablement de 0 % à 100 %.
Le sénateur Varone : Donc, en hiver, vous êtes plongés dans l’obscurité.
M. Walsh : C’est exact.
Le sénateur Varone : Donc, un système photovoltaïque ne fonctionnerait pas.
M. Walsh : Effectivement.
Mme Lloyd : Pas de manière constante, en tout cas.
M. Walsh : Ce système fonctionne parfaitement bien en été. Les éoliennes fonctionneraient également très bien, si nous nous tournions vers les sources d’énergie renouvelable.
Le sénateur Varone : Avez-vous suffisamment de fonds pour effectuer ces recherches concernant cette énergie renouvelable? Évidemment, il faut effectuer des études avant de mettre en place ce genre d’installations. Pouvez-vous avoir accès à ce genre de financement pour effectuer cette étude?
Mme Lloyd : Je suis également responsable de l’énergie dans le Nord. Nous disposons d’un ensemble de cinq programmes qui investissent dans les sources d’énergie, et qui améliorent l’énergie et les programmes climatiques à l’échelle du Nord et pour la totalité des collectivités autochtones à l’échelle du Canada. Je vais mentionner le programme ARDEC Nord en guise d’exemple; il s’agit d’un programme qui a financé plus de 140 programmes axés sur l’énergie et dirigés à l’échelle locale pour évaluer la faisabilité. Donc, tout dépend de l’intérêt que les collectivités ont à rechercher différents types de sources d’énergie, et de la manière dont elles pourraient les adopter. Elles pourraient effectuer des études de faisabilité. Elles pourraient effectuer un certain nombre d’études de recherche. C’est vraiment aux collectivités de décider du chemin qu’elles souhaitent emprunter. Il s’agit d’un programme qui offre du financement en vue d’aider à faire naître ce genre d’idées, et en ce qui concerne la mise en œuvre en tant que telle, c’est un autre programme qui s’en occupe.
La sénatrice Robinson : Il y a quelques années, j’ai eu le plaisir de siéger au sein du Conseil consultatif de la politique alimentaire du Canada. Le conseil a, par la suite, mis sur pied le Programme national d’alimentation scolaire du Canada. C’était la recommandation la plus importante du conseil. En plus de soutenir le programme national d’alimentation scolaire et tous les programmes connexes, le conseil a ensuite recommandé des cibles et des points de référence de base pour faciliter la surveillance, les rapports liés à l’ensemble des politiques alimentaires, et pour assurer la reddition de comptes.
De ce que je comprends, le programme dépend plutôt de bénévoles, lorsqu’on regarde la façon dont il est exécuté dans les écoles. Je me demande quels mécanismes vous avez en place pour recueillir la rétroaction des bénévoles concernant les limites et les contraintes budgétaires avec lesquels ils composent en vue d’aviser votre ministère et vos décideurs. Les discussions vont-elles dans un sens comme dans l’autre? Est-ce qu’il s’agit d’une expérience dynamique, où si nous demandions l’avis des bénévoles, ils nous diraient qu’ils se sentent entendus?
Mme Thorne : Nos accords de trois ans avec les provinces et les territoires exigent que ceux-ci soumettent des plans d’action.
La sénatrice Robinson : Qui est tenu de le faire?
Mme Thorne : Les provinces et territoires.
La sénatrice Robinson : D’accord, donc les provinces et les territoires doivent eux-mêmes vous soumettre des plans d’action.
Mme Thorne : C’est exact. Et cela comprend des informations sur la manière dont l’investissement fédéral est distribué, ainsi que sur les données et les rapports recueillis.
En ce moment, nous avons des indicateurs communs : le nombre d’enfants et le nombre d’écoles par type de programme. Les provinces et les territoires nous fournissent ces informations dans le cadre de rapports annuels et d’états financiers vérifiés pour que nous puissions voir où des progrès sont accomplis et quels sont les impacts des investissements fédéraux.
La sénatrice Robinson : Je crois avoir entendu récemment dans les médias que quelques bénévoles étaient frustrés quant au délai de distribution du financement. À quel moment dans l’ensemble de cette chaîne de communication pensez-vous qu’il serait raisonnable que des bénévoles donnent une rétroaction à quelqu’un en mesure de poser des gestes concrets pour changer les choses, compte tenu du fait qu’il n’y a qu’une quantité limitée d’informations sur lesquelles nous pouvons nous pencher? Y a-t-il une quelconque sorte de mécanisme que vous pourriez mettre en place qui inciterait les provinces et les territoires à garantir qu’ils sont véritablement à l’écoute des bénévoles et qu’ils prennent leur rétroaction en considération?
J’ai fait du bénévolat au sein du programme alimentaire de mes enfants, et, assurément, à ce point-là, la majeure partie du programme n’était pas subventionnée, mais nous avons fini par réussir à obtenir du financement. Dans notre province de l’Île-du-Prince-Édouard, nous étions dans les premiers, sinon les premiers, à nourrir les enfants à l’école, et à faire cela à l’échelle provinciale, grâce à du financement de la part d’autres entreprises au sein de la collectivité. Alors j’ai senti la frustration, et je me demande ce qui peut être fait pour s’assurer que nous ne décourageons pas ces bénévoles de participer à ces programmes et que nous acheminons réellement la nourriture aux enfants, ce qui est incroyablement important, puisqu’une bonne alimentation est essentielle à l’apprentissage.
Mme Thorne : Il s’agit d’un excellent point. Comme je l’ai dit plus tôt, les provinces et les territoires s’occupent de ces programmes directement. Nous n’avons pas de contact direct, sur le terrain, avec les commissions scolaires et les bénévoles.
La sénatrice Robinson : Leur demandez-vous d’être responsables de garantir un mécanisme de communication bidirectionnel avec les fournisseurs alimentaires?
Mme Thorne : Nous n’avons pas de lien direct avec eux, mais nous demandons aux provinces et aux territoires de nous rendre des comptes sous forme de données.
La sénatrice Robinson : À votre avis, comment se déroule la collecte de données? Obtenez-vous des informations de valeur? Y a-t-il des écarts que vous avez cernés? Est-ce que les choses changent?
Mme Thorne : Nous n’avons pas encore reçu de données. Nous les obtiendrons à la fin de l’automne et au début de l’an prochain, mais cela n’est pas encore terminé.
La sénatrice Robinson : Merci.
La sénatrice Burey : Encore une fois, merci beaucoup. Je crois que ce que nous entendons, c’est qu’il n’existe pas de solution universelle, et je crois que si la sénatrice Duncan était parmi nous, elle dirait la même chose.
Pour revenir à la question sur laquelle je souhaitais me pencher, M. Ellis, qui faisait partie du dernier groupe de témoins a parlé de ce que le gouvernement fédéral peut faire à propos du Code national du bâtiment et de ces éléments modulaires. Est-ce quelque chose que vous prendrez en considération lors de vos discussions? Parce qu’il s’agit de quelque chose que le gouvernement fédéral peut faire.
Mme Thorne : J’estime que lorsque nous aurons reçu les rapports annuels de la part des provinces et des territoires, nous aurons une meilleure idée de la manière dont le Programme national d’alimentation dans les écoles se déroule partout au pays.
Nous savons également qu’il y a des écarts dans les données dans tout le pays, en ce qui concerne les programmes. Nous avons des partenariats. Par exemple, nous avons formé un partenariat avec les Instituts de recherche en santé au Canada pour les secteurs prioritaires. Il s’agit d’un partenariat tout neuf. Alors tandis que ce travail-là avance, nous serons en mesure de combler certains de ces écarts, y compris l’information que les provinces et les territoires nous fournissent également.
Mais, comme je l’ai dit, c’est très embryonnaire. Nous n’avons pas beaucoup de données. Nous savons que les choses sont différentes d’un bout à l’autre du pays. L’objectif à long terme est d’essayer de faire bouger les choses pour pouvoir faire part de cette histoire.
La sénatrice Burey : Comment les comptes rendus se dérouleraient-ils? À quoi devrions-nous nous attendre? Ces comptes rendus prendront-ils la forme d’un rapport annuel ou quelque chose du genre?
Mme Thorne : Oui, exactement. Les provinces et les territoires doivent présenter des rapports annuels ainsi que des états financiers vérifiés à l’automne de chaque année. Les signataires qui ont conclu des accords un peu plus tard dans l’exercice financier ont un peu plus de temps pour présenter ces rapports, en raison du moment de la signature. Mais cela se situerait vers la fin de l’automne. Nous serions donc alors en mesure de compiler ces rapports et d’avoir une meilleure idée des impacts des investissements.
La sénatrice Burey : Merci.
Mme Thorne : De rien.
La sénatrice Sorensen : Merci. C’est bien de voir les trois différents ministères représentés ici. Il s’agit simplement d’une conversation que j’ai — constamment, il me semble — avec l’ensemble du gouvernement. Alors c’est bien de voir cela.
Ma question est la suivante : Est-ce que l’ensemble du gouvernement fédéral a une stratégie interministérielle à long terme quant à la sécurité alimentaire? Est-ce que la main droite et la main gauche sont toujours au courant de ce que l’autre fait? Si je me fie à mon expérience et à certaines des autres conversations que j’ai eues, je dirais que non. J’imagine que je vous demande si vous sentez qu’il y a une approche pangouvernementale quant à cet enjeu.
Il s’agit d’une question ouverte. Y a-t-il quiconque qui souhaite y répondre?
Hugues Vaillancourt, directeur général, Direction de la politique sociale, Direction générale des politiques stratégiques et de service, Emploi et Développement social Canada : Il me semble que la semaine prochaine, vous allez vous entretenir avec nos collègues d’Agriculture et Agroalimentaire Canada, qui dirigent la politique alimentaire pour le Canada, et ils seront mieux placés pour vous répondre. Je soupçonne que, pour répondre partiellement à votre question, on vous dira que des structures de comité soutiennent la mise en place de la politique alimentaire, qui englobent non seulement ces ministères aujourd’hui, mais aussi d’autres ministères qui ont un rôle à jouer dans la politique alimentaire au sens large.
La sénatrice Sorensen : Il s’agit un peu d’une question de haut niveau pour la conversation d’aujourd’hui, mais nous entendons constamment dire que l’immigration, le logement, tout cela est — et vous avez raison — lié à l’agriculture, dont nous parlons présentement. Je me retrouve à avoir cette conversation à maintes reprises... chaque ministre devrait être responsable de tout et être au courant de ce qui se passe dans tous les domaines, mais je vous remercie; je vais poser cette question.
La sénatrice Muggli : Madame Thorne, je vous ai entendu faire mention des IRSC. Comme nous le savons, aucune mesure ou étude ne mène à des améliorations qui ne sont pas fondées sur des données probantes. Y a-t-il d’autres subventions de recherche qui sont associées au Programme national d’alimentation dans les écoles ou y a-t-il des plans pour s’assurer qu’il y a de la recherche solide et concrète qui est menée sur le programme?
Mme Thorne : J’ai mentionné un partenariat avec les Instituts de recherche en santé du Canada pour financer la recherche sur l’alimentation dans les écoles qui soit axée prioritairement sur ces enjeux ayant trait à l’alimentation dans les écoles, notamment sur la façon dont les programmes affectent le bien-être et la santé des enfants et des jeunes. Cela bénéficie également de la mobilisation du public.
Je n’ai pas beaucoup plus de détails quant aux subventions, mais je peux certainement soumettre quelque chose et fournir davantage d’informations.
La sénatrice Muggli : Cela serait excellent. Merci.
Mme Thorne : De rien.
Mme Lloyd : Dans le cadre du programme Nutrition Nord Canada, nous avons un service de recherche. Nous finançons directement la recherche menée par des partenaires locaux et autochtones, alors...
La sénatrice Muggli : Est-ce lié aux trois conseils ou non?
Mme Lloyd : La recherche est directement financée par notre modèle de programme et notre ministère, alors elle n’est pas nécessairement menée par le monde de la recherche universitaire. Elle est plutôt dirigée à l’échelle locale. Nos partenaires locaux et autochtones peuvent collaborer avec des établissements universitaires, mais nous cherchons plutôt à donner plus de pouvoir aux partenaires sur le terrain qui gèrent les enjeux liés à l’insécurité alimentaire pour que ceux-ci mènent des recherches au sujet des problèmes qui leur tiennent à cœur.
Nous avons complété la première ronde, et nous avons organisé un colloque sur la sécurité alimentaire l’année dernière. Nous venons tout juste de lancer un appel de propositions pour la deuxième phase, qui se terminera bientôt. Nous attendons des annonces quant à savoir quels projets seront sélectionnés en janvier.
La sénatrice Muggli : Le comité devrait probablement obtenir cette information pour toute recherche qui a été menée, si c’est possible.
Mme Lloyd : Bien sûr.
La sénatrice Muggli : Merci.
Hugues Vaillancourt, directeur général, Direction de la politique sociale, Direction générale des politiques stratégiques et de service, Emploi et Développement social Canada : Mon collègue a abordé la dimension de la recherche, et j’allais vous parler des données... je crois que Mme Thorne — je l’appelle habituellement Jackie; nous travaillons ensemble. À coup sûr, cette conversation met en lumière des écarts significatifs au chapitre des données. Une des manières dont nous pallions cet écart, c’est grâce à l’élaboration de ce que je décrirais comme un module qui est une série de questions axées sur l’alimentation dans les écoles que nous avons inséré dans l’Enquête canadienne sur le revenu, un sondage annuel de Statistique Canada. Il s’agit du sondage même qui est utilisé pour récolter des informations statistiques sur la pauvreté, l’insécurité alimentaire et les besoins médicaux non comblés, alors nous aurons des données annuelles qui nous permettront de mener des analyses axées sur les impacts et établissant des liens entre la sécurité alimentaire, d’un côté, et l’alimentation dans les écoles, de l’autre, ainsi que la façon dont tout cela est lié à la pauvreté. Il nous faudra un peu de temps pour obtenir ce riche ensemble de données. Ce ne sont pas des choses qui arrivent du jour au lendemain.
Statistique Canada est allé sur le terrain l’année dernière pour la première fois, alors cela devrait être fait annuellement. Nous commencerons à fournir davantage de détails concernant la compréhension de ce que...
La sénatrice Muggli : Êtes-vous en relation avec le Global Institute for Food Security?
M. Vaillancourt : J’ai l’impression que je devrais.
La sénatrice Muggli : Oui. D’accord, merci.
Le sénateur Varone : Cela est rare. Il s’agit d’une question que l’on pose habituellement au cours du troisième tour; on ne se rend jamais là.
Dans notre documentation, que j’ai consultée pour me préparer, il y avait un tableau intéressant sur l’insécurité alimentaire ventilé selon les provinces et territoires canadiens. Le Nunavut était l’endroit le plus gravement affecté avec 58,1 %, et le Québec était celui le moins affecté, avec 19 %. Le Yukon venait au deuxième rang des meilleurs. Quiconque n’en sait pas beaucoup sur le Nord du pays, met le Yukon, le Nunavut et les Territoires du Nord-Ouest dans le même panier des zones isolées, mais qu’est-ce que le Yukon fait de mieux que les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut en ce qui concerne l’insécurité alimentaire?
Mme Lloyd : Je ne suis pas certaine si je décrirais cela comme étant quelque chose de bien ou de mal que les territoires font, car le Yukon a des routes, des routes qui ne sont pas toujours présentes dans les Territoires du Nord-Ouest ou dans le Nunavut, où il n’y en a tout simplement pas. À nos yeux, il s’agit plutôt d’un problème lié à l’accessibilité et à l’isolement.
Le sénateur Varone : Cela a trait à la distribution.
Mme Lloyd : Cela a une grande incidence sur la disponibilité et l’accès à la nourriture. Je crois qu’il s’agit d’une grande composante du problème; le manque d’infrastructures fondamentales, et...
Le sénateur Varone : Mais nous ne disposions pas de cette réponse, et je suis ravi que nous en ayons une qui soit consignée au compte rendu — que la distribution est un problème. Merci.
Le vice-président : C’est un message qui a été transmis également par le premier groupe de témoins, alors celui-ci est cohérent dans les deux groupes d’aujourd’hui. Merci, monsieur le sénateur Varone.
Chers témoins, je souhaite vous remercier d’avoir pris le temps de comparaître devant nous aujourd’hui. La séance a été très informative, et nous apprécions vos contributions à notre étude. Je souhaite vous remercier de vos efforts de collaboration dans l’élaboration de solutions aux problèmes d’insécurité alimentaire. Il est évident que vous travaillez main dans la main.
Je souhaite remercier les membres du comité de leur participation active et de leurs questions réfléchies aujourd’hui, et je souhaite prendre un moment pour remercier tout le personnel qui appuie les travaux du comité : notre greffier, notre analyste de la bibliothèque du Parlement, nos interprètes, l’équipe des débats qui retranscrit et met en forme cette séance, le préposé à la salle du comité, le technicien des services multimédias, l’équipe de diffusion, le centre d’enregistrement, la Direction des services d’information, ou la DSI, ainsi que notre page.
(La séance est levée.)