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APPA - Comité permanent

Peuples autochtones


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES PEUPLES AUTOCHTONES

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le mercredi 29 octobre 2025

Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujourd’hui, à 18 h 48 (HE), avec vidéoconférence, pour étudier le projet de loi S-2, Loi modifiant la Loi sur les Indiens (nouveaux droits à l’inscription).

La sénatrice Margo Greenwood (vice-présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La vice-présidente : Honorables sénateurs, je déclare la séance ouverte. Avant de commencer, j’invite tous les sénateurs et les autres personnes sur place à consulter les fiches qui se trouvent sur la table pour connaître les précautions à prendre pour prévenir les incidents de rétroaction acoustique. Assurez-vous de garder votre oreillette loin des microphones en tout temps. Lorsque vous n’utilisez pas votre oreillette, placez-la face vers le bas sur l’autocollant placé sur la table à cette fin. Merci de votre collaboration.

Je tiens d’abord à souligner que nous nous réunissons sur le territoire traditionnel, ancestral et non cédé de la nation algonquine anishinabe, où vivent aujourd’hui plusieurs autres peuples des Premières Nations, Métis et Inuits de l’île de la Tortue.

Je suis la sénatrice Margo Greenwood. Je suis originaire du territoire visé par le Traité no 6, et je suis la vice-présidente du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones.

Je rappelle à mes honorables collègues que, lors de notre première séance publique du 24 septembre, la sénatrice Michèle Audette, la présidente élue du comité et la marraine du projet de loi S-2, s’est récusée à titre de présidente pour la durée de cette étude, afin de préserver la neutralité de la présidence. J’ai l’honneur et le privilège de présider la très importante séance d’aujourd’hui.

J’invite maintenant les membres du comité à se présenter en précisant leur nom et leur province ou territoire.

Le sénateur Prosper : Sénateur Prosper, du territoire Mi’kma’ki, en Nouvelle-Écosse.

La sénatrice Pate : Kim Pate. Soyez les bienvenus. Je vis ici, sur le territoire non cédé, non abandonné et non restitué de la nation algonquine anishinabe.

Le sénateur McNair : Soyez les bienvenus. Je m’appelle John McNair et je viens du Nouveau-Brunswick.

La sénatrice Karetak-Lindell : Bonjour. Nancy Karetak-Lindell, du Nunavut.

La sénatrice McPhedran : Marilou McPhedran, du territoire visé par le Traité no 1, au Manitoba, et patrie de la nation métisse de la rivière Rouge.

La sénatrice McCallum : Mary Jane McCallum, Crie de la région manitobaine visée par le Traité no 10.

La sénatrice Clement : Bernadette Clement, de l’Ontario. Plus précisément, de Cornwall, en territoire traditionnel mohawk Haudenosaunee.

Le sénateur Tannas : Bonjour. Scott Tannas, de l’Alberta.

Le sénateur Francis : Brian Francis, d’Epekwitk, dans l’Île-du-Prince-Édouard.

La sénatrice Sorensen : Karen Sorensen, Alberta, parc national Banff, territoire visé par le Traité no 7.

La sénatrice White : Judy White, Ktaqmkuk, mieux connue sous le nom de Terre-Neuve-et-Labrador, où se trouvent les terres ancestrales des Mi’kmaqs.

La vice-présidente : Merci, chers collègues. Nous poursuivons l’étude du projet de loi S-2, Loi modifiant la Loi sur les Indiens (nouveaux droits à l’inscription). Le texte modifie la Loi sur les Indiens, notamment en accordant de nouveaux droits à l’inscription au registre des Indiens pour donner suite à la contestation de certaines dispositions de cette loi fondée sur la Charte canadienne des droits et libertés dans l’affaire Nicholas c. Canada et en accordant aux personnes visées le droit à ce que leur nom soit consigné dans une liste de bande tenue au ministère des Services aux Autochtones.

Je vais maintenant vous présenter le premier groupe de témoins. Par vidéoconférence, nous accueillons Drew Lafond, membre de l’Association du Barreau autochtone du Canada. Il est accompagné de Suzanne Patles, membre du conseil.

Nous accueillons sur place la cheffe Darlene Misik, de la Première Nation Papaschase Bande 136. De l’International Organization of Indigenous Resource Development, Littlechild Law, nous souhaitons la bienvenue au chef Wilton Littlechild, chef international des traités nos 6, 7 et 8. Il est accompagné de Laurie Buffalo, analyste des politiques intergouvernementales, technicienne des traités et des droits autochtones. Bienvenue à tous. Merci de vous joindre à nous.

Les témoins présenteront un exposé liminaire d’environ cinq minutes, qui sera suivi d’une période d’échange de questions et de réponses avec les sénateurs.

J’invite maintenant Mme Patles à faire l’exposé liminaire de Me Lafond. Nous éprouvons des difficultés techniques, et c’est pourquoi elle doit se charger de cet exposé. Vous avez la parole, madame Patles.

Suzanne Patles, membre du conseil, Association du Barreau autochtone du Canada : [Mots prononcés dans une langue autochtone]

Bonjour, je m’appelle Suzanne Patles. Je viens du territoire mi’kmaq. J’accompagne Drew Lafond, qui représente l’Association du Barreau autochtone.

Premièrement, nous tenons à énoncer notre position sur la règle d’exclusion à partir de la deuxième génération, qui aura de graves conséquences pour les Premières Nations et l’appartenance identitaire. Cette règle est fondée sur une formule coloniale arbitraire du degré de sang. Elle est discriminatoire et sera de plus en plus restrictive au fil des générations.

Nos recommandations au sujet du projet de loi S-2 sont les suivantes. Cette modification législative est nécessaire et urgente. Le projet de loi S-2 doit abolir immédiatement la règle d’exclusion à partir de la deuxième génération et la remplacer par un système inclusif. Tout descendant direct d’un Indien ou toute personne ayant droit au statut devrait pouvoir se faire inscrire. Il faut éliminer le contrôle unilatéral du Canada sur le statut d’Indien et reconnaître les systèmes de citoyenneté relevant des Premières Nations.

Quant à la responsabilité de l’État et au besoin de mesures de redressement, il faut prévoir un mécanisme pour indemniser les personnes lésées par la discrimination découlant de la Loi sur les Indiens. Nous reconnaissons que l’immunité de la Couronne permet à l’État de modifier les lois, mais cela crée des difficultés et vise à rétablir la responsabilité et pourrait mener à un important recours collectif ou à des contestations fondées sur la Charte.

Cela dit, la définition juridique du statut d’Indien continue d’évoluer au fil des litiges et des réactions sous forme de mesures législatives. On s’est attaqué aux dispositions discriminatoires à la pièce, et d’importantes lacunes subsistent en matière d’équité et de reconnaissance du statut. Les décisions des tribunaux et les mesures législatives qu’elles suscitent ne répondent toujours pas aux exigences des communautés autochtones en matière d’autodétermination et de reconnaissance de l’identité. À cause de la progressivité des changements, les Premières Nations et les gouvernements restent dans une gouvernance caractérisée par la réactivité.

Les dispositions clés suivantes qui existent et peuvent être invoquées actuellement découlent précisément de contestations judiciaires. La Couronne doit reconnaître les torts causés et admettre que le statut ne répare pas le préjudice intergénérationnel. Les préjudices sont systématiques et continuent. Il y a une perte d’appartenance à la communauté, un refus de services d’éducation, de soins de santé et de logement, une érosion des droits issus de traités, l’exclusion sociale et une dégradation du bien-être.

Un mécanisme de compensation doit assurer à la fois la justice et la réconciliation, et le Canada doit reconnaître sa responsabilité et prendre des mesures de redressement, à défaut de quoi il violera la Charte et ses obligations internationales en matière de droits de la personne.

Il y a encore des lacunes dans le projet de loi S-2 parce qu’il ne tient pas compte des préjudices résiduels découlant de décennies d’exclusion. Il n’y a pas de dispositions de compensation. Les dispositions de non-responsabilité contenues dans des modifications antérieures de la Loi sur les Indiens protègent toujours la Couronne. Il n’y a pas de véritable recours pour obtenir justice.

Voici ce que nous recommandons au sujet du projet de loi S-2. Il faut prévoir un mécanisme de redressement, une compensation pour la discrimination sexuelle et l’émancipation, prévoir une table de compensation, définir les catégories de personnes touchées et concevoir des modèles de compensation et d’autonomie gouvernementale en matière de citoyenneté. Les Premières Nations ont un droit inhérent à l’autonomie gouvernementale, y compris le pouvoir de définir leurs propres règles de citoyenneté.

Le cadre actuel de la Loi sur les Indiens impose des définitions coloniales de l’identité et de l’appartenance. Le contrôle du Canada sur le statut d’Indien définit la souveraineté et l’autodétermination des Premières Nations. Cependant, le projet de loi S-2 nous donne l’occasion d’affirmer et de rendre applicable ce droit inhérent. La réforme législative doit appuyer les systèmes relevant des Premières Nations qui sont essentiels à la réconciliation et à l’édification des nations.

Quant au cadre d’adhésion volontaire à la compétence exclusive, le projet de loi S-2 doit affirmer que la citoyenneté est une compétence inhérente et reconnaître le pouvoir exclusif des Premières Nations de définir l’appartenance. Cette compétence est fondée sur l’article 35 de la Constitution et la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, soit un texte international et la loi fédérale. Les dispositions d’adhésion volontaire permettant aux Premières Nations de mettre en œuvre des systèmes de citoyenneté indépendants de la Loi sur les Indiens remplacent les conceptions coloniales, comme le degré de sang, le statut aux termes de l’article 6 et l’appartenance à une bande.

Pour ce qui est des exigences en matière de réforme législative, les lois sur la citoyenneté doivent avoir la force de lois fédérales et permettre une transition claire entre la Loi sur les Indiens et les systèmes relevant de la nation. La réforme doit permettre aux Premières Nations de diriger l’élaboration du dispositif, assurer l’accès aux données du registre, prévoir des mesures transitoires pour garantir la continuité des services et fournir des ressources adéquates.

Le projet de loi S-2 doit prévoir un mécanisme législatif de financement pour l’administration de la citoyenneté, le stockage des données, les répercussions sur la croissance personnelle et généalogique de la population, la viabilité à long terme, les pressions administratives accrues et le renforcement des capacités. Il doit s’agir d’un processus de collaboration avec les Premières Nations, et le Canada doit investir dans la participation communautaire, les aînés et les gardiens du savoir. Le Canada doit investir dans l’engagement communautaire, la recherche archivistique et la documentation sur l’histoire orale, l’élaboration de systèmes, la formation du personnel, la technologie et l’infrastructure ainsi que le soutien opérationnel continu. Cet objectif permettra une gouvernance indépendante et efficiente.

Quant à la transition et à la reddition de comptes, l’investissement doit appuyer l’autodétermination, la revitalisation des lois traditionnelles sur la citoyenneté et la continuité des programmes et services fédéraux. Le projet de loi S-2 doit exiger du gouvernement qu’il rende des comptes, qu’il s’engage à collaborer en matière de financement et que le Canada fasse rapport sur les progrès réalisés et les problèmes de financement.

Chose curieuse, la loi de 1850 définit presque le mieux les Indiens, les désignant comme « personnes » de sang indien appartenant à leurs tribus et reconnues par elles et leurs descendants. Si on écarte la notion de « sang », on obtient la définition parfaite du statut. Dire que cette définition remonte à 1850.

Depuis, que ce soit en 1869, en 1879, en 1918 et même encore aujourd’hui, on n’a pas réussi à faire en sorte que les Premières Nations ne soient pas bannies de toute existence par des dispositions législatives.

Ce processus de collaboration, pour peu qu’il soit amorcé, demeure incomplet et nécessite une intervention urgente.

La deuxième phase n’est pas terminée. Le projet de loi S-2 doit prévoir une chronologie intégrée pour la reprise et la conclusion du processus de collaboration, financer et prioriser une mobilisation significative, indépendamment des retards qui peuvent survenir.

Nous avons d’abord examiné les recommandations finales et le rapport de rétroaction du processus consultatif autochtone. Ensuite, nous avons recueilli les commentaires des communautés. Enfin, nous avons soigneusement étudié les conclusions possibles.

Au sujet de la règle d’exclusion, nous estimons qu’elle a eu des répercussions importantes sur les Premières Nations et que le gouvernement doit en faire davantage.

Ce sont là nos observations. Je vous remercie.

La vice-présidente : Merci. J’invite maintenant la cheffe Misik à présenter son exposé liminaire.

Darlene Misik, Cheffe, Première Nation Papaschase Bande 136, Association de la Première Nation Papaschase Bande 136 [Mots prononcés dans une langue autochtone]

Je suis la cheffe Darlene Quinn-Gladu Misik de l’Association de la Première Nation Papaschase Bande 136 et je m’exprime au nom des membres descendant de la bande originale de Papaschase et des Edmonton Stragglers qui figuraient sur nos listes de paiement des annuités.

La bande de Papaschase est une Première Nation visée par le Traité no 6 dont la réserve, située dans l’actuelle ville d’Edmonton, a été cédée illégalement et dont la liste de bande a été dissoute par le gouvernement fédéral vers la fin du XIXe siècle.

En tant que descendants de peuples qui n’ont plus de cadre législatif pour fonctionner comme bande des Premières Nations dans l’entité politique canadienne, nous avons eu notre bonne part de luttes internes et externes pour rendre officiels les processus de gouvernance et de vérification qui identifient correctement nos propres membres.

En 2019, après avoir tenu quatre cérémonies du calumet avec le chef Papaschase, avec le regretté Pipe Carrier et l’arrière-petit-fils du chef Papaschase, Floyd Quinn, nous avons officialisé l’Association de la Première Nation Papaschase Bande 136 de préserver l’intégrité de notre identification généalogique des descendants, non seulement pour notre bien, mais aussi pour celui de la population. Assumer la responsabilité de notre propre gouvernance et de notre appartenance sont des manifestations importantes de l’autonomie gouvernementale.

Nous appuyons le projet de loi S-2, Loi modifiant la Loi sur les Indiens, en principe, car il apporte une réparation importante pour les injustices qui subsistent en matière d’inscription au registre des Indiens.

Le projet de loi étend à juste titre l’admissibilité aux descendants exclus par des dispositions discriminatoires passées et l’émancipation volontaire et involontaire. Pour autant, il ne s’attaque pas à l’injustice structurelle plus profonde qui a effacé des nations entières comme la nation Papaschase et leurs enfants mineurs visés par un traité, qui ont automatiquement été englobés dans l’acceptation de certificats par leurs parents.

L’expérience de la nation Papaschase illustre les limites d’une approche de l’exclusion fondée uniquement sur l’inscription individuelle.

Pour les communautés descendant des signataires du Traité no 6 et qui ont été dispersées, la réconciliation exige une reconnaissance collective — pas seulement personnelle. Dans notre mémoire, nous proposons des amendements détaillés et ciblés au projet de loi S-2. Ils prévoient l’établissement d’un processus législatif permettant de reconstituer des nations dissoutes par le passé; une surveillance exercée par les Autochtones en matière d’inscription et de reconnaissance; l’acceptation, pour l’histoire orale, la continuité et l’intégrité généalogiques, et les éléments de preuve vérifiés par la communauté, d’un poids juridique égal à celui des documents d’archives de la Couronne; la protection des droits collectifs en empêchant les mesures de désinscription qui pourraient nuire à la poursuite de la reconstitution d’une nation.

Bien que la Loi sur les Indiens autorise le ministre à constituer de nouvelles bandes en vertu de l’article 17, il n’existe pas de processus public de demande ni de droit législatif de demander une reconstitution. Les décisions sont discrétionnaires et relèvent entièrement du ministre, sans échéancier, sans mécanisme d’appel ni surveillance autochtone.

Le processus repose presque exclusivement sur des documents d’archives écrits détenus par la Couronne et ne reconnaît pas les récits oraux ou les généalogies communautaires comme éléments de preuve valides. Il n’y a pas de mécanisme officiel de redressement lorsque la dissolution d’une bande résulte d’une coercition, d’une cession ou d’un retrait administratif.

L’absence de mécanisme transparent et fondé sur les droits pour la reconstitution d’une nation est un manquement incompatible avec les engagements de réconciliation du Canada aux termes de la Loi sur la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, la DNUDPA, et plus précisément des articles 8, 9, 13 et 33, qui affirment le droit collectif des peuples autochtones de maintenir et de déterminer leur propre identité, de conserver et de protéger leur propre nom pour les communautés dont ils sont issus et de définir leurs règles d’appartenance.

Les modifications que nous proposons, décrites en détail dans notre mémoire, s’inscrivent collectivement dans le cadre actuel de la Loi sur les Indiens.

Le projet de loi S-2 constitue une étape importante vers le règlement des injustices concernant l’inscription d’individus, mais il ne fait rien pour les désinscriptions collectives plus larges qui touchent les nations dissoutes. L’émancipation involontaire des enfants mineurs visés par un traité de la bande indienne Papaschase lors de la prise de certificats par leurs parents, en 1885 et 1886, par exemple, n’était pas abordée dans les dispositions relatives aux certificats de la Loi sur les Indiens, jusqu’à ce qu’une modification y soit apportée pour préciser que les enfants mineurs seraient concernés par la prise des certificats de leurs parents. Cette modification a été apportée après coup.

En outre, les enfants nés dans la bande n’auraient jamais été admissibles à un certificat de Sang-mêlé puisqu’ils sont nés Indiens au sens de la Loi sur les Indiens, et eux, ainsi que leurs descendants, devraient toujours être reconnus comme faisant partie de cette bande et avoir droit à une compensation importante pour perte d’identité, de mode de vie, de culture, de terres et de ressources.

Pour Papaschase, la réconciliation doit signifier plus que l’inscription individuelle. Elle doit signifier la reconnaissance collective de la bande.

[Mots prononcés dans une langue autochtone.]

Merci.

La vice-présidente : Merci, cheffe Misik. J’invite maintenant le chef Littlechild à présenter son exposé liminaire. Vous avez la parole.

Wilton Littlechild, chef international des Traités nos 6, 7 et 8, International Organization of Indigenous Resource Development, Littlechild Law : [Mots prononcés dans une langue autochtone.]

Bonsoir, je vous apporte mes salutations dans ma langue, le cri. Je suis là pour participer à l’une des études sénatoriales que vous avez mandat de réaliser au sujet des responsabilités constitutionnelles, politiques et juridiques du gouvernement fédéral à l’égard des Premières Nations.

Comme vous le savez, en 2019, le projet de loi S-3 est entré pleinement en vigueur et a éliminé les injustices connues fondées sur le sexe dans les dispositions de la Loi sur les Indiens relatives à l’inscription. Aujourd’hui, à cause des modifications apportées à la loi par le projet de loi S-3, les lignées matrilinéaires et patrilinéaires sont traitées de la même manière, rétroactivement à 1867.

Ces questions comprennent l’émancipation, la désinscription, les droits acquis à l’appartenance à une bande natale, l’exclusion à partir de la deuxième génération, les questions transfrontalières et les défis liés aux seuils de vote.

Nous soutenons respectueusement qu’il faut tenir compte du fait que les effets cumulatifs de ces initiatives législatives constituent une attaque directe contre le traité puisque sont violés à la fois les droits collectifs, individuels, inhérents et issus de traités, sans oublier l’article 19 de la déclaration des Nations unies.

Ces questions ont fait l’objet de recherches approfondies et ont été examinées par le bureau du Samson Cree Nation Treaty Protectorate and Enforcement, ce qui a mené à la position de la Nation crie de Samson fondée sur les traités concernant la compétence en matière d’appartenance et de nationalité, en date du 10 février 2025 et que nous soumettons en texte intégral pour examen et prise en compte.

Nous soutenons qu’une solution bilatérale fondée sur les traités pour les problèmes décrits ci-dessus est nécessaire et opportune, comme le dit notamment la position du traité :

La Nation crie de Samson rejette les définitions coloniales du « statut » et de l’appartenance qui se trouvent dans la Loi sur les Indiens, et la classification des Indiens inscrits, ainsi que les dispositions liées, qui sont des concepts coloniaux sans rapport avec les lois fondées sur les traités de la Nation crie de Samson, les traditions ou la conception que la nation se fait de la parenté et de l’appartenance.

La règle de l’exclusion à partir de la deuxième génération, imposée par la Loi sur les Indiens, est un acte d’assimilation forcée qui mine et érode systématiquement les populations visées par les traités de la Nation crie de Samson et viole les traités et les droits fondamentaux des Autochtones. Les règles fédérales arbitraires qui privent certains de leur appartenance à une bande constituent une dérogation aux relations découlant des traités, aux droits inhérents et aux droits issus des traités de la Nation crie de Samson.

Nous considérons que l’optique restrictive du projet de loi S-2 fait bon marché de notre droit fondamental à l’autodétermination, et aussi de nos droits inhérents collectifs et individuels protégés par le Traité no 6, confirmé en 1876 et 1877, et réaffirmés par les articles 35 et 52 de la Loi constitutionnelle, la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, étayée par la Déclaration américaine sur les peuples autochtones.

Tout récemment, en mai dernier, le Conseil des droits de l’homme des Nations unies a organisé un atelier d’experts sur les approches axées sur la famille. Cela tient compte des perspectives autochtones de la famille et de la parenté, comme le dit en partie le rapport :

Nous reconnaissons que les enfants sont un don du Créateur et notre avenir, les enfants étant notre trésor sacré, avec cette responsabilité [...] Nous avons le droit de protéger notre foyer en maintenant l’unité familiale et sa cohésion, en éduquant nos enfants [...] Par conséquent, nous protégeons notre foyer...

La perspective étroite du projet de loi S-2 offre une occasion de consulter les peuples autochtones concernés et de coopérer de bonne foi avec eux.

Par exemple, notre relation encadrée par le Traité no 6 auquel il y a eu adhésion en 1876 et 1877 affirme la nécessité de tenir pleinement compte des principes du traité en ce qui a trait à l’appartenance et à la nationalité. À titre d’exemple, notre position mentionne expressément la reconnaissance fondée sur l’ascendance et héritée à partir des listes de paiement des annuités originales découlant des traités, qui illustrent notre parenté traditionnelle durable et le droit coutumier international. Le projet de loi S-2 actuel exclut et écarte les deux éléments en violant directement le droit d’appartenance acquis de naissance.

Sans vouloir empiéter sur votre temps, nous soulignons d’autres points préoccupants dans le projet de loi S-2, par exemple la réintroduction du libellé abrogé antérieurement aux articles 111 et 112.

Deuxièmement, il y a les questions tranchées en vertu du droit provincial, les biens hors réserve, les dispositions de non‑responsabilité des articles 9, 10 et 11 et les obstacles administratifs à Services aux Autochtones Canada.

À l’appui de ce que vous avez déjà entendu, il reste un besoin très sérieux de s’attaquer aux formes persistantes de génocide perpétré au moyen de diverses politiques et processus législatifs et administratifs appliqués sans le consentement des peuples, des tribus et des nations signataires de traités. L’étude en cours offre l’occasion d’approfondir l’élaboration constructive et l’adoption de solutions fondées sur les traités.

À cet égard, nous applaudissons le comité sénatorial et ses efforts persévérants. Je songe notamment à l’étude précédente sur les nombreuses formes de dispositions de non-dérogation. En toute déférence, nous recommandons que soit retenue votre disposition de non-dérogation, qui fera en sorte que les articles de la Loi sur les Indiens déjà abrogés demeurent abrogés. Cette disposition inclusive favoriserait la réconciliation et, dans la recherche d’un recours, favoriserait la justice et une issue dans ce cas-ci et de nombreuses autres expériences très difficiles vécues par les peuples autochtones.

Voici un extrait de votre rapport :

Tout texte maintient les droits — ancestraux ou issus de traités — des peuples autochtones reconnus et confirmés par l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982; il n’y porte pas atteinte.

Honorables sénateurs, c’est ce que nous vous demandons respectueusement d’inclure dans le projet de loi.

Enfin, Lord Denning a déclaré ce qui suit devant la Haute Cour du Royaume-Uni le 28 janvier 1982 :

À ma connaissance, rien ne justifie que les Indiens se méfient du gouvernement du Canada. Mais, au cas où il y aurait méfiance, la discussion dans ce cas-ci renforcera leur main afin de leur permettre de résister à toute attaque. Ils pourront dire que leurs droits et libertés leur ont été garantis par la Couronne — à l’origine par la Couronne du chef du Royaume-Uni et maintenant par la Couronne du chef du Canada, mais de toute façon, par la Couronne.

Aucun Parlement ne devrait faire quoi que ce soit pour amoindrir la valeur de ces garanties. La Couronne devrait les honorer à l’égard du Canada « tant que le soleil se lèvera et que la rivière coulera ». Cette promesse ne doit jamais être rompue.

En terminant, je vous le demande : que pouvons-nous faire dans ces domaines essentiels si nous nous soucions de ces petits garçons et de ces petites filles? Où les amenons-nous?

Hiy hiy, merci beaucoup.

La vice-présidente : Merci, chef Littlechild. Nous allons maintenant passer aux questions des sénateurs. Honorables collègues, vous aurez chacun droit à une intervention de quatre minutes, ce qui englobe la question et la réponse, et je vous donnerai un préavis 30 secondes avant la fin. Ainsi, tout le monde aura l’occasion de poser une question.

Le sénateur Francis : Ma question s’adresse au chef Littlechild et à Mme Patles.

Il me semble évident que le gouvernement du Canada contrevient à l’article 15 de la Charte des droits et libertés, à l’article 35 de la Loi constitutionnelle, à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, soit la DNUDPA, et à d’autres textes encore si on laisse subsister la règle de l’exclusion après la deuxième génération et d’autres injustices. Convenez-vous que le gouvernement fédéral, s’il veut pleinement honorer ses obligations tant proprement canadiennes qu’internationales, ne saurait tarder à agir pour éliminer par le projet de loi S-2 toutes les traces connues de discrimination sexuelle et raciale dans les dispositions de la Loi sur les Indiens sur l’inscription?

M. Littlechild : Je suis d’accord avec votre entrée en matière qui énumère ces violations, mais on peut trouver des solutions dans la déclaration des Nations unies, par exemple. C’est pourquoi nous nous référons directement à la disposition de non‑dérogation liée à la déclaration des Nations unies.

Je ne suis pas certain de la période que vous avez évoquée, mais nous nous intéressons à l’effet cumulatif de tous les problèmes des projets de loi S-2 et S-3. On met l’accent en fait uniquement sur la règle d’exclusion. Nous convenons que c’est une violation directe du traité, si nous songeons à la compétence à l’égard de l’appartenance et de la citoyenneté, compétence reconnue dans le Traité no 6, dans notre cas, mais aussi, littéralement, dans tous les traités à numéro.

La vice-présidente : Merci.

Madame Patles, je crois comprendre que vous allez répondre à la question par écrit, n’est-ce pas?

Mme Patles : Oui, en raison de problèmes techniques, nous allons répondre par écrit à toutes les questions. Nous en prenons note. Vous m’excuserez de ne pas pouvoir répondre au pied levé, mais M. Lafond devait répondre aux questions du Sénat. Nous prenons note de vos questions, mais nous répondrons par écrit. Wela’lioq.

La vice-présidente : Merci beaucoup.

La sénatrice White : Merci à tous les témoins. C’était formidable de vous rencontrer et d’entendre ce que vous aviez à dire. Ma question s’adresse à notre estimé aîné, médecin, avocat et chef indien. Je précise qu’il mérite tous ces titres.

Monsieur, pourriez-vous nous parler de façon plus générale des divergences entre la DNUDPA et la Loi sur les Indiens et nous expliquer comment le Canada peut s’y prendre au mieux pour honorer son engagement à appliquer la DNUDPA.

M. Littlechild : Tout d’abord, je dirai que l’incohérence totale de la loi tient à son origine raciste, car aucune autre race n’est régie par une loi en matière de citoyenneté et d’appartenance.

L’exemple que j’utiliserai est celui de l’article 7 de la déclaration des Nations unies, selon lequel toute personne a droit à une nationalité. Dans notre cas, nous disons que nous avons droit à celle de la Nation crie de Samson.

De plus, je vous renvoie aux articles 7, 8 et 9 de la déclaration des Nations unies. Vous y verrez que la loi s’écarte à ce point de la déclaration que, si on suit sa logique jusqu’au bout, on doit conclure que, comme je l’ai dit dans mes observations, on trouve une correspondance stricte avec la définition de « génocide ».

Il s’agit d’une attaque très directe, non seulement contre la Constitution canadienne, en un sens, depuis la naissance de la loi, mais aussi, ce qui est plus important pour nous, contre notre droit inhérent à l’autodétermination, selon les termes du Traité no 6, dans notre cas.

Il y a une très profonde divergence, en un sens, car nous avons là une loi raciste qui viole le droit international et les dispositions législatives sur les droits de la personne. Il faut y mettre bon ordre. Nous disons qu’il faut régler le problème, mais, dans notre cas, il faut mettre l’accent sur la relation définie par traité, car la solution réside dans cette relation.

La vice-présidente : Merci.

La sénatrice Sorensen : Ma question s’adresse à M. Lafond. Par souci de clarté, vous répondrez par écrit tout de suite, ou vous répondrez par écrit à un autre moment, comme demain?

Recevrons-nous une réponse par clavardage ou une réponse écrite tout de suite?

Sébastien Payet, greffier du comité : Dans quelques jours.

La sénatrice Sorensen : C’est regrettable.

Je voudrais avoir une réponse de M. Lafond, mais je vais poser la question aux autres témoins.

Je veux parler du projet de loi S-2 dans sa forme actuelle. À mon avis, il sera adopté tel quel rapidement par le Sénat et la Chambre. C’est ce que je prédis. La conséquence sera que l’erreur qu’ont été la non-inscription ou la désinscription de 3 200 Autochtones, sauf erreur, dans le registre des Indiens sera corrigée.

Sachant que tout amendement risque de retarder l’adoption de la mesure pour ces Autochtones, je vous demande respectueusement si vous acceptez volontiers ces retards.

M. Littlechild : Non sans la prise en considération des deux études sénatoriales précédentes sur la non-dérogation aux droits issus de traités. Nous disons simplement qu’il faut utiliser votre travail précédent et en intégrer les résultats au projet de loi, ce qui réglera beaucoup d’autres problèmes.

La sénatrice Sorensen : Voulez-vous répondre?

Mme Misik : Je suis d’accord avec l’honorable chef Willie Littlechild.

Nous ne pouvons nous permettre d’attendre, et le pays non plus, mais il faut aussi faire les choses correctement.

La sénatrice Sorensen : Merci. Je vous suis reconnaissante de vos réponses.

Le sénateur Tannas : En tant qu’Albertain, je tiens à dire que c’est un honneur pour moi d’être là avec vous, chef Littlechild. Vous êtes un Canadien lumineux et l’Albertain que je suis est très fier du travail que vous avez fait et continuez de faire.

Nous essayons d’y voir clair. Il y a ce sentiment d’urgence au sujet de l’exclusion à partir de la deuxième génération, qu’il faut mettre en regard du discours de la ministre : des consultations sont en cours et, avec un peu plus de temps, il en ressortira une solution au sujet de cette exclusion.

L’Indien le plus âgé inscrit aux termes du paragraphe 6(2) a eu 40 ans cette année. Ceux qui sont dans cette situation, ce groupe de personnes, sont en train d’avoir beaucoup d’enfants, et ces enfants sont privés du statut. D’autres bandes qui sont venues témoigner disent que c’est presque la majorité de leurs membres qui sont inscrits aux termes paragraphe 6(2), de sorte qu’il y a beaucoup d’enfants qui commencent à fréquenter le système scolaire et qui ne reçoivent pas de financement, ce qui fait problème.

Votre communauté a la chance d’être plus riche que beaucoup d’autres. Pouvez-vous, vous ou Mme Buffalo, nous dire si c’est un problème qui est en train de surgir, ces enfants de la communauté qui n’ont pas de statut, même si vous n’êtes pas forcément soumis aux mêmes pressions financières que d’autres bandes?

Je m’inquiète, je le répète, de l’urgence du problème, et je voudrais savoir ce que vous pouvez nous en dire.

Laurie Buffalo, analyste des politiques intergouvernementales, technicienne des traités et des droits autochtones, International Organization of Indigenous Resource Development, Littlechild Law : Je vous remercie de cette question, sénateur.

D’après les chiffres communiqués en 2024 par Services aux Autochtones Canada au sujet des répercussions du projet de loi S-2, 9 566 personnes seraient touchées dans le cas de la Nation crie de Samson. De ce nombre, 21 % sont concernés, soit 2 028. Ces chiffres sont inexacts.

La Nation crie de Samson compte 9 750 membres, et 2 072 d’entre eux sont directement touchés par l’exclusion à partir de la deuxième génération, soit 22 % de notre population. Là‑dessus, 1 220 sont des adultes. Les autres sont tous des enfants, et certaines de ces personnes n’ont pas droit à la mise à niveau du statut. Nous comprenons, car le rapport de la vérificatrice générale vient de le dire, que ce processus subit des retards importants.

Dans la Nation crie de Samson, on peut, avec de la chance, se faire inscrire dans un délai de 18 mois à deux ans. À l’heure actuelle, nous avons des enfants qui attendent depuis un certain nombre d’années. Ils ne sont couverts par l’inscription de leur mère que pendant 18 mois. Après 18 mois et un jour, il nous faut assumer la totalité des frais, ce qui viole directement leur droit d’appartenance en vertu du traité.

Il s’agit d’un problème généralisé, et une partie des problèmes liés au paragraphe 6(2) ne concernent pas seulement la paternité non déclarée. C’est ainsi que le Canada reconnaît l’ascendance autochtone.

Bon nombre de nos membres inscrits aux termes du paragraphe 6(2) ont un parent qui est un Indien des États-Unis. Par conséquent, étant donné que le Canada est incapable de reconnaître leur statut, nos enfants directement admissibles sont touchés et exclus. L’exclusion à partir de la deuxième génération a un impact sur les terres, les testaments et les successions. Nous avons plus de 180 problèmes de testament et de succession qui ne sont toujours pas réglés. Certains remontent à plus de 30 ans, car certains membres sont inscrits aux termes du paragraphe 6(2), ou ont dû reprendre les terres de leur famille sans y avoir droit, faute d’être inscrits.

Ce sont des réalités, et ces choses-là sont très difficiles à gérer. Pas un jour ne passe sans que des membres de la communauté nous demandent pourquoi les choses ne se règlent pas. C’est qu’elles échappent à notre contrôle.

Nous n’avons jamais renoncé à notre capacité de décider qui est membre de notre communauté. C’est inscrit dans nos lois traditionnelles, et c’est décrit dans nos récits de la création : notre conception de la parenté, la reconnaissance de la parenté, notre responsabilité les uns envers les autres.

Le paragraphe 6(2) et les autres dispositions restrictives de la Loi sur les Indiens n’améliorent pas la situation. Elles nous empêchent complètement de faire ce que nous sommes censés faire et de reconnaître notre peuple, surtout nos enfants, et pas seulement aujourd’hui, mais aussi dans l’avenir.

La sénatrice McPhedran : Permettez-moi de remercier tous les témoins, qu’ils participent en ligne ou en personne. Chef Littlechild, je tiens à dire que j’ai été une grande admiratrice de votre travail, non seulement au Canada, mais aussi aux Nations unies, à Genève. Vous avez représenté notre pays de façon très convaincante.

Tout comme le regretté sénateur Murray Sinclair, qui a été l’un des principaux architectes du projet de loi S-3, vous avez souligné dans votre exposé, chef Littlechild, que le projet de loi S-3 devait éliminer — c’était bien le mot — la discrimination sexuelle. Beaucoup d’entre nous autour de cette table ont travaillé à cette mesure, et nous le pensions aussi, à l’époque. De toute évidence, ce n’était pas le cas.

Dans le volume 6 du rapport final de la Commission de vérité et réconciliation, on peut lire à la page 60 :

La commission rejette tout recours à des lois autochtones ou autres qui traitent fondamentalement les hommes ou les femmes de manières qui communiquent ou engendrent la subordination. Toute loi qui crée ou reproduit des liens hiérarchiques fondés sur le sexe qui assujettissent les hommes ou les femmes doit être contestée ou abrogée.

Voici ma question, que j’adresse surtout à vous, mais à laquelle les autres témoins peuvent aussi répondre. Il est largement reconnu que la discrimination sexuelle présente dans la Loi sur les Indiens est toujours un moyen d’assimilation forcée. Plusieurs d’entre vous l’ont déjà dit. Et l’exclusion à partir de la deuxième génération est la version la plus récente de la formule de l’« Indien en voie de disparition ». Le Canada est lié par l’article 8 de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, que le Canada a intégrée à sa législation. Il est donc tenu de modifier ses lois pour s’y conformer et d’offrir une compensation et des réparations.

J’ai deux questions clés. Dans le projet de loi S-2, il est toujours interdit d’accorder une compensation aux femmes autochtones. Qu’en pensez-vous? De toute évidence, dans le projet de loi S-2, nous sommes loin des normes établies par les lois internationales et nationales, loin de ce qui est souligné dans le volume 6 du rapport final de la Commission de vérité et réconciliation.

Je serais très heureuse d’entendre ce que vous avez à dire à ce sujet, si vous le voulez bien.

M. Littlechild : Merci beaucoup.

En fait, dans le mémoire que nous vous soumettrons — je n’en ai utilisé que quelques pages —, nous faisons référence à cette citation très précise du rapport; elle figure dans notre mémoire.

J’essaie d’établir un lien entre notre rapport et le défi que nous pose le projet de loi S-2 en revenant à la déclaration des Nations unies. La commission a cherché non seulement à découvrir la vérité sur ce qui s’est passé dans les pensionnats, mais aussi, à partir de ces récits, à donner un visage à ce que serait la réconciliation. Dans notre exposé, nous évoquons donc ce lien et essayons de voir comment cela s’agence avec le projet de loi S-2, à supposer qu’il soit correctement conçu. Et l’un des moyens d’y arriver, selon nous, est d’intégrer une disposition de non-dérogation au traité. Cela favorisera la réconciliation et réglera, comme je crois l’avoir dit, d’autres problèmes qui découlent de l’injustice historique des pensionnats.

Il y a un lien. Malheureusement, je ne l’ai pas dit dans mon exposé, mais cela se trouve dans mon mémoire. Voilà ma réponse. Je cède la parole à Mme Buffalo.

Mme Buffalo : J’ajouterai ceci. En janvier dernier, nous avons tenu une séance où nous avons discuté directement des impacts de l’exclusion à partir de la deuxième génération. Nous avons déposé notre rapport final aux Nations unies récemment, en juillet. Dans l’une de nos recommandations, nous disons qu’il faut s’intéresser aux dispositions de la Loi sur les Indiens relatives à l’appartenance, en particulier la politique d’exclusion à partir de la deuxième génération, qui a des répercussions négatives et limite les droits inhérents et issus de traités des femmes autochtones et de leurs enfants. Refuser de reconnaître l’appartenance en s’appuyant sur des équations mathématiques non fondées, déficientes et même fausses qui visent à nier la capacité de transmettre une lignée ancestrale sacrée, c’est avoir un impact négatif direct sur le statut de nation autochtone. Les femmes sont un élément central des nations.

Cibler les systèmes matrilinéaires autochtones mine l’importance de nos connaissances traditionnelles sacrées, de nos coutumes, de nos lois et de nos protocoles. Les peuples autochtones et leurs systèmes de gouvernance ont besoin d’un soutien financier pour remédier à ces répercussions financières négatives de longue date des nombreuses modifications non acceptées de la Loi sur les Indiens que subissent les nations signataires de traités et les unités familiales de ces nations, y compris les aînés, les enfants, les femmes, les hommes, les personnes handicapées et les victimes d’émancipation forcée. Tant et aussi longtemps que les mères visées par des traités donneront naissance à des enfants pareillement visés, les peuples signataires seront toujours là aussi longtemps que le soleil brillera, que l’herbe poussera et que les rivières couleront.

Nous félicitons le Sénat. En 2019, le comité a demandé des excuses officielles et l’élimination des interdictions législatives de compensation énoncées dans les articles de non-responsabilité 10 et 11.

Nous avons également réclamé un soutien pour les femmes et les enfants visés par un traité, en plus de réparations et d’indemnisations pour les préjudices qui ont si longtemps duré. Le mécanisme d’experts a déjà recommandé qu’en offrant des réparations aux peuples autochtones pour les répercussions négatives de leurs lois et politiques, les États accordent la priorité à l’opinion des peuples autochtones sur les formes appropriées de redressement. La justice comporte toujours un redressement.

Nous nous opposons aux dispositions de non-responsabilité à l’égard des personnes qui ont été lésées et le sont toujours à cause de modifications apportées à la Loi sur les Indiens concernant l’appartenance. Il faut respecter l’esprit de la réconciliation et prévoir des recours.

Nous recommandons l’inclusion de dispositions juridiquement contraignantes — car il n’y a des dispositions assurant la non‑responsabilité. Mais s’il faut que ces dispositions subsistent, il faudrait alors qu’il y ait des dispositions semblables, contraignantes, relativement à la non-responsabilité et à la compensation, et ayant un poids juridique égal pour protéger les conseils de bande. Ce n’est pas notre loi, mais nous avons été directement touchés. Plus précisément, dans ma nation, nous devons nous défendre contre un recours collectif de plus de 100 personnes à cause du projet de loi C-31.

La vice-présidente : Sénatrice, nous notons votre nom pour le deuxième tour. Il reste des sénateurs qui doivent intervenir au premier tour.

Le sénateur Prosper : Merci beaucoup à tous les témoins. J’ai une question à poser à la cheffe Misik. Merci de votre témoignage.

Je ne peux qu’imaginer les conséquences de l’élimination pure et simple d’une communauté entière. L’absence de mécanisme juridique... D’après ce que je comprends, vous demandez des amendements à propos de dispositions discrétionnaires. Il faut donc que la communauté puisse se reconstituer. Pour que nous sachions à quoi nous en tenir, je voudrais que vous apportiez une précision, si possible. Sauf erreur, deux organisations représentent différents descendants de la Première Nation Papaschase. Pourriez-vous préciser laquelle des deux vous représentez?

Mme Misik : Dans ma déclaration préliminaire, madame la sénatrice, j’ai indiqué que je représente l’Association de la Première Nation Papaschase, bande no 136, rétablie en 2019 après la tenue de quatre cérémonies du calumet avec le calumet de la cheffe Papaschase dans la collectivité d’Ermineskin.

Notre droit à la reconnaissance est fondé sur nos lois culturelles et naturelles, et depuis ce jour, nous avons vécu un certain nombre de difficultés en ce qui a trait à la vérification généalogique de nos descendants, car nous constituons une diaspora et nous sommes dispersés. L’importance d’une identification adéquate de nos descendants est primordiale, car ce sont eux, les titulaires de droits.

Nous avons pris des mesures pour mettre en place une gouvernance transparente, fondée sur la loi de la wahkohtowin et la loi des mères de clan, ce qu’a mentionné Mme Buffalo en soulignant l’importance des femmes dans nos sociétés.

Le processus a été ardu, car il n’y a aucune protection en place pour appuyer notre reconstitution, à l’exception de nos propres lois qui, je le répète, ne sont pas appliquées ou protégées par le Canada. Il n’y a rien dont nous puissions nous prévaloir, ce qui est malheureux. La déclaration des Nations unies est censée nous garantir ces protections.

En ce qui concerne l’utilisation de notre nom, Papaschase est un nom protégé par la propriété intellectuelle, pourtant il peut être utilisé par n’importe qui. Notre position est qu’il ne devrait être utilisé que par un groupe organisé de descendants confirmés. Le rôle du Canada est de nous protéger, car à l’heure actuelle, n’importe qui peut utiliser ce nom. C’est là où nous en sommes.

En somme, nous aimerions recevoir ce type de protection. Je sais que cela dépasse la portée du projet de loi S-2, mais la Loi sur les Indiens a dévasté nos collectivités.

Ce n’est pas seulement l’inscription individuelle des personnes, mais particulièrement le ciblage individuel de nos enfants qui a causé la dispersion importante de notre bande. Nous n’avons jamais oublié qui nous sommes. Je sais depuis que je suis une petite fille qui je suis et d’où je viens. Je viens de Headman Bateau#2 sur la liste des bénéficiaires de traités des Papaschase. Je descends aussi du chef Ermineskin.

Mon parcours ne s’est pas limité à la recherche de mon identité personnelle, il a aussi consisté à donner de l’espoir à d’autres personnes qui sont dans la même situation que moi, celle de vouloir reconstituer une tribu, dont les membres peuvent se trouver jusque dans la nation de Tail Creek, par là, chez les peuples de Beaver Hills.

Je vous remercie de votre question. La Loi sur les Indiens est la seule loi au monde qui régit une race. Il faut que cela cesse. Comme nous l’avons indiqué dans notre mémoire, nos collectivités ont besoin de l’appui du Canada pour restaurer leurs nations conformément à nos lois, à nos processus d’appartenance et de citoyenneté.

La vice-présidente : Deuxième tour.

La sénatrice McCallum : [ La sénatrice s’exprime en langue autochtone. ]

Merci. C’est tellement bon que vous soyez ici pour nous aider à trouver une solution.

Des pressions importantes ont été exercées sur nous afin que nous nous limitions à la portée étroite du projet de loi, afin qu’il puisse être adopté rapidement et avec succès. Mais le mot « succès », dans ce cas, est discutable.

N’oubliez pas que la Chambre des communes a toujours la possibilité d’examiner nos amendements. Cela ne devrait donc pas et cela ne va pas nous empêcher d’apporter des amendements.

Le projet de loi porte sur les personnes et non sur l’aspect collectif. Pourquoi est-il essentiel de traiter du collectif? L’individualisme mènerait-il à la perte d’identité et à l’autodétermination? Quelle incidence cela aurait-il sur le rétablissement? Si on ne se penche pas sur l’exclusion après la deuxième génération dans ce projet de loi, quelles seront les conséquences?

Je sais qu’il y a des problèmes plus généraux, mais 90 % des témoins que nous avons entendus ont surtout parlé de l’exclusion après la deuxième génération. C’est la raison pour laquelle j’en parle. Pourtant, nous devons traiter des enjeux que vous avez soulevés au sujet des traités.

M. Littlechild : Il s’agit d’une observation très importante. Cette question est vraiment importante, parce que, selon notre perspective, il faut trouver un équilibre entre les droits individuels et les droits collectifs. C’est pourquoi nous suggérons d’utiliser le cadre du traité comme un — je n’aime pas le mot « instrument » —, mais plutôt comme une entente sacrée en ce qui a trait aux droits collectifs.

Comme vous le savez, la plupart des lois sur les droits de la personne concernent des particuliers. Les droits de la personne sont individuels et nous sommes d’accord avec cela. Mais dans notre cas, il s’agit de droits de la personne collectifs en vertu d’un traité. Ainsi, chaque fois qu’il y a un conflit entre le droit individuel et le droit collectif, nous essayons de veiller à ce qu’il y ait un équilibre dans la recherche de justice pour les personnes. C’est pourquoi nous voulons attirer l’attention sur la relation découlant d’un traité, en raison de cette notion de droits collectifs.

Je me souviens quand, à l’ONU, c’étaient les femmes qui cherchaient à être reconnues comme des êtres humains, comme des personnes humaines, avec des droits. Nous avons fait le même chemin, car on niait aux femmes leurs droits collectifs, de la même façon qu’on nie leurs droits collectifs aux peuples, aux tribus et aux nations autochtones signataires de traités. C’est une question très importante. Mais je suppose que la solution serait la suivante : pouvons-nous, à l’intérieur de ce cadre, trouver un équilibre qui nous permette d’obtenir justice?

La vice-présidente : Merci. Je vais passer à autre chose. Je sais que le temps file. Je veux donner une chance à tout le monde.

La sénatrice Pate : Merci beaucoup à tous nos témoins. Ma question s’adresse à vous, chef Littlechild. Je vous remercie d’avoir cité les paroles de lord Denning et de nous rappeler l’engagement qui avait été pris alors, non seulement par le Royaume-Uni sur le plan historique et colonial, mais aussi par le Canada, en vertu des traités.

Vous avez entendu parler des pressions exercées pour que ce projet de loi soit adopté sans amendements. Je me souviens d’avoir appris de vous, il y a plusieurs décennies, lorsque nous nous préparions pour les réunions de l’ONU, que ce sont là des décisions politiques du gouvernement canadien. Avec la même facilité avec laquelle ils prennent ces décisions, ils pourraient modifier la loi.

Selon vous, y a-t-il des motifs pour lesquels nous devrions nous abstenir de modifier ce projet de loi pour l’améliorer, en fonction de ce que vous avez décrit?

M. Littlechild : J’aimerais bien en trouver un, mais je ne trouve pas de motif d’empêcher ce projet de loi d’être amélioré et renforcé. L’une des façons de le faire serait d’inclure une disposition de non-dérogation dans les traités. Cette seule mesure renforcerait et améliorerait le projet de loi.

Mais est-ce que cela constitue un amendement? Pour certains d’entre eux, ce serait le cas. C’est pourquoi nous comptons sur le travail que vous avez accompli au Sénat dans le cadre de deux études précédentes. Nous disons simplement : « Utilisons les études antérieures et soumettons-les pour améliorer et renforcer le projet de loi S-2. »

La sénatrice Clement : Je vous remercie tous, non seulement pour vos connaissances juridiques, mais aussi de votre expérience vécue, qui rend ce processus encore plus puissant et douloureux.

Je vais revenir à la pression, dont parlait la sénatrice McCallum, de présenter le projet de loi S-2 tel quel. S’il était adopté tel quel, il donnerait lieu à des changements limités. Des témoins nous ont dit que les changements progressifs entraînaient de la violence latérale au sein des collectivités. Des personnes de généalogie identique sont traitées différemment.

Nous devons garder cela à l’esprit. Cependant, on nous dit que le changement graduel va se poursuivre.

Ma question est donc la suivante : l’un d’entre vous a-t-il été invité à participer aux consultations sur la fin de l’exclusion après la deuxième génération? Avez-vous l’impression que le gouvernement alimente ce projet? Avez-vous confiance qu’il fera avancer ce dossier, sans contestation judiciaire?

M. Littlechild : Je suis heureux que vous ayez soulevé ce point, car selon certains des témoignages que vous avez entendus, nous mettons l’accent sur la consultation avec les collectivités — consultation, consultation, consultation — et ça ne suffit pas. En présence d’un processus progressif, si l’on veut mettre fin à la violence latérale ou à l’injustice continue, il faut faire autre chose qu’examiner l’article 19 — que nous citons dans notre déclaration — et l’article 37 sur les traités. J’essaie de trouver une réponse précise en utilisant ce qui est à notre disposition, pour agir rapidement tout en garantissant justice, guérison et réconciliation.

Je ne peux que revenir à la solution que nous proposons, car, pour illustrer le propos, le traité dont nous parlons est un accord sacré, qui est en fait appuyé par la Déclaration des Nations unies, qui fait partie des appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation. Il doit être adopté et appuyé par tous les gouvernements.

Si l’on examine ces deux éléments — le traité et la Déclaration des Nations unies —, ils sont comme les deux ailes d’un aigle, et il faut deux ailes — la Déclaration des Nations unies et le traité — pour voler, pour que nos droits nous permettent de voler.

J’y reviens sans cesse, parce qu’ils font partie intégrante des solutions, des solutions au scénario que vous venez d’évoquer. Si nous ne le faisons pas, oui, la violence latérale, horizontale ou directe se poursuivra.

Mme Buffalo : Pour ajouter à cela, l’approche progressive ou fragmentaire contribue à la dépossession, au déplacement et aux traumatismes continus des personnes qui ont été directement touchées.

Je tiens à le dire que pour en réintégrer quelques-uns — ma nation a 2 072 personnes en attente, qui ne sont pas incluses dans ce chiffre. Pour en réintégrer quelques-uns, il suffirait de les ajouter à la liste des dizaines de milliers de personnes dont le dossier est en attente. En quoi est-ce que c’est juste? Qui va déterminer lesquels seront approuvés les premiers? Qui obtient justice et reconnaissance, alors que certains attendent depuis des années? Ce sont des questions qui exigent réponse. Il y a longtemps que nous attendons une réponse.

Pour ce qui est de la consultation, on en avait organisé une pour ma nation, une consultation régionale. On nous a donné trois semaines pour répondre. C’était franchement insuffisant. Nous avons donc répondu par lettre que cette demande était complètement inadéquate.

Nous menons des consultations sur cette question depuis plus de 10 ans, et cela remonte à bien avant l’adoption du projet de loi C-31. J’aimerais simplement vous rappeler, pour le compte rendu, que le ministre Crombie avait assisté à l’époque à une réunion publique dans notre nation, dans notre salle de loisirs locale. Il avait déclaré : « Rien dans ce projet de loi n’aura d’incidence financière sur vos nations. » Nous sommes en 2025 et devant une réalité très différente. Merci.

La sénatrice McPhedran : Les experts en ligne et ceux qui nous accompagnent : le comité sénatorial ne laissera pas le projet de loi S-2 partir sans amendements de fond. C’est bien le conseil que vous nous donnez?

M. Littlechild : Oui.

Mme Buffalo : Oui.

La sénatrice McPhedran : Merci beaucoup.

Le sénateur Prosper : J’espère que je serai aussi bref, mais je voulais revenir à votre témoignage, madame Buffalo, sur deux domaines seulement : les testaments et les successions. Vous ne pouvez échanger des terres qu’entre personnes inscrites comme membres d’une bande. Si une personne laisse en héritage une propriété ou un certificat de possession, par exemple, et que la personne qui le reçoit n’a pas de statut, un enfant par exemple, je n’avais pas songé à cet aspect.

L’aspect dont vous avez parlé et qui m’a beaucoup intrigué, c’est le mariage d’une personne autochtone avec une personne d’une autre nation que la sienne, disons. Ils ne sont pas reconnus. C’est l’équivalent d’épouser une personne sans statut, je suppose. Exact? Je vous remercie de cette précision.

La vice-présidente : Voulez-vous répondre?

Mme Buffalo : Certainement. Je voulais simplement ajouter qu’avec les modifications apportées à la Loi sur les Indiens en 1951, puis lors de l’entrée en vigueur des articles 10 et 11 de cette loi, on nous a confié la responsabilité de gérer les listes de bandes, sans pourtant que nous soit octroyé le pouvoir de déterminer qui se retrouve sur ces listes.

Encore aujourd’hui, certaines personnes — et c’est leur droit — présentent une demande dans la région où elles se trouvent. Lors de ces inscriptions, que nous demandons en qualité de nation autonome — nous devrions avoir le droit de savoir qui figure sur notre liste —, mais nous ne recevons aucune information nous permettant de vérifier l’ascendance de ces personnes en fonction des traités. On ne nous remet rien d’autre qu’une liste générale qui dit : « Voici vos gens », sans que nous puissions être certains qu’ils sont vraiment les nôtres.

Quand nous demandons que cette information nous soit renvoyée, nous ne recevons pas de réponse. Merci.

La vice-présidente : Merci. Le temps alloué à ce panel est écoulé. Je remercie nos témoins de leur présence parmi nous aujourd’hui. Maître Lafond et madame Patles, nous avons hâte d’entendre vos réponses. Nous allons les chercher. Malheureusement, nous avons eu des difficultés techniques. Veuillez soumettre d’autres éléments que vous jugez nécessaires.

J’aimerais maintenant présenter notre deuxième groupe de témoins pour ce soir. Je souhaite la bienvenue à Beverley Asmann, membre du conseil d’administration de la Michel Callihoo Nation Society. Soyez la bienvenue.

Elle est accompagnée de Troy Chalifoux, avocat-conseil chez Maurice Law.

Et du Comité de mise en œuvre Giganawenimaanaanaanig FFADA2S+ , Sandra Delaronde, présidente.

Merci à tous d’être ici aujourd’hui. Nos témoins, comme ceux du groupe précédent, feront une déclaration préliminaire d’environ cinq minutes, qui sera suivie d’une période de questions et réponses avec les sénateurs.

J’invite maintenant Mme Asmann à faire sa déclaration préliminaire. La parole est à vous.

Beverley Asmann, membre du conseil d’administration, Michel Callihoo Nation Society : Bonsoir, messieurs et mesdames les dignitaires. Je reconnais que nous sommes sur le territoire traditionnel de la nation algonquine anichinabée.

Tansi. Je m’appelle Beverley Asmann. Je suis l’arrière-arrière-petite-fille du chef Michel Callihoo. Je m’appelle Femme Colibri et je tiens à remercier le comité de me donner l’occasion de prendre la parole aujourd’hui.

Je suis l’une des dix administratrices et administrateurs de la Michel Callihoo Nation Society, la MCNS. À titre de directeurs de la MCNS, nous constituons le collectif moderne des descendants de la bande de Michel, numéro 472, et nous sommes unis pour la cause du rétablissement de notre nation, la nation Michel Callihoo, comme bande reconnue. Les dix administrateurs de la MCNS représentent les groupes suivants :

Les personnes qui ont perdu leur statut en raison de la prétendue émancipation de la bande historique de Michel en 1958 et leurs descendants; les personnes qui ont été inscrites sur la liste générale de l’Alberta en raison de la prétendue émancipation de la bande historique de Michel en 1958 et leurs descendants; les personnes qui ont perdu leur statut à cause de la prétendue émancipation de dix familles de la bande historique de Michel en 1928 et leurs descendants; les personnes qui ont perdu leur statut à cause d’émancipations ou de commutations individuelles entre 1878 et 1957 et leurs descendants.

Certains de nos directeurs sont présents à la tribune aujourd’hui. J’aimerais d’abord présenter ma sœur, Linda Buffalo. Nous avons entrepris ce parcours ensemble, il y a 25 ans. Voici ma sœur.

Je tiens également à saluer Roslyn Callihoo, Dan Godbersen, Kim Beaudin et Dayle Callihoo Campbell. Je tiens à remercier chacun d’entre eux de leur appui. Je tiens également à remercier les membres de notre conseil d’administration qui n’ont pas pu assister à la réunion.

Je remercie le comité d’avoir invité Brandy Callihoo à témoigner il y a quelques semaines. Elle est également membre de notre conseil d’administration. Je dois aussi remercier notre équipe juridique chez Maurice Law, de tout ce qu’elle fait pour nous.

Chacune de nos histoires nous est propre, mais nous partageons la même tragédie, soit l’émancipation des personnes de la bande de Michel et la dissolution de la bande de Michel en vertu de la Loi sur les Indiens, qui a causé la perte de notre pouvoir au sein de nos familles autochtones et de notre communauté. Je suis ici ce soir pour vous raconter mon histoire.

En 1958, l’année où la bande de Michel a été émancipée, ma grand-mère, Louisa Callihoo, et sa fille mineure, Stella — ma tante —, ont été inscrites sur la nouvelle liste générale de l’Alberta, connue sous le nom de liste 838. Ma grand-mère était au deuxième rang sur cette liste, la même liste sur laquelle nous nous trouvons tous encore aujourd’hui.

Ma grand-mère était une personne vulnérable : célibataire, elle ne parlait que le cri, ce qui faisait d’elle un fardeau aux yeux du gouvernement et au regard du projet d’émancipation de la bande de Michel.

Ma grand-mère et ma tante étaient toutes deux étiquetées comme des « Indiens mentalement incapables » en vertu de la Loi sur les Indiens, expression qui est encore utilisée aujourd’hui. Bien qu’elles aient conservé leur statut, on avait fait cela pour que le gouvernement puisse mettre en œuvre son plan d’émancipation de la bande de Michel en vertu de l’article 112 de la Loi sur les Indiens.

Ma grand-mère a été placée en établissement toute sa vie. On l’a stérilisée. J’ai vu les dossiers médicaux et j’ai lu :

Cette Indienne obèse et sale ne devait jamais avoir le droit de se reproduire, car sa progéniture aurait certainement des problèmes mentaux.

Je suis le fruit de la reproduction de cette femme.

Les dossiers la décrivaient assise dans un coin, pleurant et marmonnant de façon incohérente. Elle était seule, elle avait peur et elle ne s’exprimait qu’en cri. J’imagine que cela correspond à la définition d’un « Indien mentalement incapable ».

Ma grand-mère est morte seule dans un établissement psychiatrique et elle est enterrée dans une tombe anonyme à Red Deer, en Alberta, marquée d’un seul numéro.

Ma mère n’a jamais pu faire l’expérience d’être la fille de quelqu’un. Nous n’avons jamais eu la chance d’être des petits‑enfants. C’est ce que l’émancipation a fait subir à notre famille. Ma mère, Rose Evelyn Callihoo, n’a jamais eu la chance d’être tante ou grande sœur. Nous n’avons jamais eu la chance d’être nièce, neveu ou cousin.

On a envoyé ma tante au pensionnat d’Ermineskin, en Alberta, à un très jeune âge. Nous ne l’avons jamais rencontrée. Nous avons appris qu’elle s’était mariée et avait eu des enfants. Ma sœur Linda a embauché un enquêteur privé pour la trouver. Il a perdu sa piste à Prince George, en Colombie-Britannique, dans les années 1970.

Nous avons peut-être des cousins et d’autres membres de la famille élargie, mais nous n’avons aucun moyen de les retracer. À ce jour, elle figure toujours sur la liste canadienne des femmes et des filles autochtones disparues et assassinées, et j’attends le jour où l’on trouvera une correspondance à mon ADN, ce qui nous permettrait de tourner la page. Ce sont là les effets de l’émancipation sur notre famille.

Ma mère a été élevée dans un pensionnat. Elle n’a jamais réintégré la bande de Michel. Elle a été forcée de s’émanciper et d’épouser un non-Autochtone en 1949. À cette époque, elle avait reçu une permission, qui lui donnait le droit de revenir dans la réserve pour une période de 20 ans, si son mariage ne fonctionnait pas.

En raison de l’émancipation de la bande, cette permission spéciale s’est avérée nulle. Elle a perdu sa famille, sa culture, sa langue, son foyer et bien plus encore, à cause de l’émancipation de la bande de Michel. Voilà ce que l’émancipation a fait subir à notre famille.

Mon père était un alcoolique violent. À maintes reprises, il a appuyé des armes à feu et des couteaux contre la tête de ma mère et les a pointés vers nous, ses enfants. Elle a été battue à maintes reprises par son mari. Dans notre enfance, nous avons aussi été victimes de ses mauvais traitements. En raison de l’émancipation, elle n’avait pas de mère vers qui se tourner pour obtenir aide et protection. Elle n’avait pas de sœur avec qui communiquer pendant cette période difficile ni de tantes ni de cousins pour trouver du soutien. Nous avons été forcés de demeurer dans un environnement toxique, toujours en raison de l’émancipation. Voilà ce à quoi l’émancipation a réduit notre famille.

Au fil des ans, nous avons essayé de retrouver les membres de notre famille, mais tristement, ils sont eux aussi brisés et on leur accole la même étiquette qu’on avait autrefois accolée à ma grand-mère, celle d’« Indiens mentalement incapables ». Cela veut dire que nous sommes toujours laissés pour compte, seuls et sans personne sur qui compter. Cela aussi fait partie des conséquences de l’émancipation sur notre famille.

Le projet de loi S-2 aidera à rétablir le droit à l’existence du peuple de Michel et avec lui, notre structure de soutien, notre famille et notre communauté. Nous comptons là-dessus.

Il se trouve des personnes pour affirmer qu’il faut cesser de remanier la Loi sur les Indiens, qu’il faut plutôt attendre un remaniement complet du système ou le remplacement intégral de la Loi sur les Indiens. Il y a près de 60 ans que le gouvernement a proposé pour la première fois d’abroger la Loi sur les Indiens, et il n’est toujours pas près d’y arriver. Je ne saurais trop insister sur le fait que les descendants de la bande de Michel — tout comme les autres victimes qui attendent depuis 40 ans, soit depuis 1985, de bénéficier des avantages du projet de loi C-31 — sont les premières victimes de cette longue attente, car ils se font vieux.

J’ai la chance d’avoir pu retrouver mon statut grâce au projet de loi C-31. Lors de son adoption en 1985, le projet de loi C-31 était pourtant incomplet. Il était quand même nécessaire et bien intentionné, car il permettait d’aider à rétablir pleinement le droit de milliers de personnes.

Les descendants de Michel ont tout de suite vu que le projet de loi C-31 ne résolvait pas l’émancipation fautive qui avait entraîné la dissolution de la bande en 1958, mais c’était un début. Deux ministres des Affaires indiennes successifs ont ensuite admis qu’il s’agissait d’un oubli et que le problème serait réglé dans un an ou deux. Quatre décennies se sont écoulées, et nous sommes si près de la fin.

Nous savons maintenant que le projet de loi C-31 n’a pas permis d’éliminer la discrimination fondée sur le sexe. C’est pourquoi les modifications de 2010, 2017 et 2019 ont été adoptées. Pourtant, aucune de ces modifications n’a remédié à l’exclusion des descendants de la bande de Michel du processus d’inscription en 1958. Bien que l’émancipation de la bande en 1958 ait été la goutte qui a fait déborder le vase, il faut aussi mentionner l’émancipation de 10 familles en 1928, ce qui suppose qu’un grand nombre de descendants seront touchés par le projet de loi S-2. Les descendants de Michel vieillissent et bon nombre d’entre eux sont décédés sans pouvoir se réapproprier leur identité légitime d’Indiens inscrits. Le projet de loi S-2 constitue un autre pas vers l’objectif initial du projet de loi C-31, qui visait à éradiquer encore davantage la discrimination de la Loi sur les Indiens. Ce projet de loi doit être adopté par le Parlement au cours de la présente session.

Nous avons tous attendu le projet de loi C-38 avec impatience et nous avons eu le cœur brisé de le voir mourir au feuilleton. Nous savons également que, pendant toute la durée des discussions sur le projet de loi C 38, des préoccupations avaient été soulevées quant à sa portée et à son application limitées, car il n’allait pas assez loin pour remédier aux problèmes causés par l’exclusion après la deuxième génération. Nous savons également que des préoccupations semblables sont soulevées aujourd’hui et que certaines personnes souhaitent que l’adoption du projet de loi soit encore retardée dans le but de combler ces lacunes. Nous ne sommes pas ici aujourd’hui pour affirmer que la portée de ce projet de loi est insuffisante. Elle ne l’est certainement pas pour les descendants de Michel. Nous avons attendu assez longtemps et nous sommes le groupe le plus touché par ce projet de loi. Tout retard supplémentaire donnerait lieu à une parodie de justice, qui consisterait à obliger ces descendants à attendre encore plus longtemps que le Canada se penche sur une question dont il est saisi depuis des décennies. Les descendants de Michel sont prêts maintenant. Je vous demande, au nom des milliers de descendants de Michel qui attendent depuis des décennies, de ne pas laisser cela se reproduire. Nous serons heureux de répondre à vos questions, si vous en avez. Hai hai.

La vice-présidente : J’invite maintenant Mme Delaronde à faire sa déclaration préliminaire. Vous avez la parole.

Sandra DeLaronde, présidente du conseil, Giganawenimaanaanig, Comité de mise en œuvre FFADA2S+ : Bonsoir. Je vous remercie, honorables sénateurs, de me donner l’occasion de m’adresser à vous. Je comprends l’intention qui sous-tend le projet de loi S-2, cependant l’heure n’est plus aux modifications graduelles à la Loi sur les Indiens.

À cause de la Loi sur les Indiens, des générations de femmes des Premières Nations et leurs familles ont vécu comme personnes déplacées au pays, privées de leur identité et coupées de notre culture, de nos territoires, de nos collectivités et de nos droits de naissance. Cette discrimination est inacceptable en soi, et les organismes signataires de traités l’ont signifié à maintes reprises au Canada. C’est une violation flagrante des droits fondamentaux de la personne, qui sont protégés à l’échelle internationale.

Qui plus est, comme l’a affirmé l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, il existe un lien direct entre le déplacement de plusieurs générations de femmes, de filles et de personnes de diverses identités de genre autochtones et les niveaux choquants de violence auxquels nous sommes confrontés dans les villes canadiennes.

Notre travail nous a appris que la majorité de nos sœurs disparues et assassinées sont des femmes, des filles et des personnes de diverses identités de genre qui ont été déplacées de leur propre collectivité, déplacées en raison de la violence par un partenaire intime, la marginalisation économique, les catastrophes naturelles, les perturbations environnementales et la Loi sur les Indiens.

En 2023, tous les partis à la Chambre des communes ont appuyé une résolution unanime reconnaissant que la violence faite aux femmes, aux filles et aux personnes de diverses identités de genre autochtones constitue une urgence nationale.

Les urgences nationales exigent une réponse urgente et concertée de la part de tous les parlementaires. Cette réponse doit notamment inclure l’élimination de toute discrimination fondée sur le sexe dans la Loi sur les Indiens, que nous attendons depuis trop longtemps.

Je suis heureuse d’avoir l’occasion de parler de cette importante question. Notre nom, Giganawenimaanaanig, signifie « nous prenons tous soin d’eux ». Nous sommes un réseau manitobain de familles métisses et inuites des Premières Nations de la rivière Rouge, de gardiens du savoir, d’organisations dirigées par des Autochtones vivant en milieu urbain, d’organisations bispirituelles, ainsi que d’organismes et de gouvernements représentant les Premières Nations, les Métis et les Inuits. La ville de Winnipeg et la province du Manitoba sont également représentées à notre table. Notre réseau s’est d’abord réuni pour demander la tenue de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, et nous continuons de préconiser la mise en œuvre complète des appels à la justice de l’enquête et le respect par le Canada de ses obligations internationales en matière de droits de la personne.

Comme vous le savez, les organismes des traités des Nations unies ont exhorté à maintes reprises le Canada à éliminer toute discrimination fondée sur le sexe dans la Loi sur les Indiens, pas seulement certains aspects de ces discriminations, mais l’ensemble des discriminations.

Alors que nous commençons à examiner le contexte de ce projet de loi, nous pensons aussi qu’il faut tirer des leçons de tous les changements graduels qui ont été apportés auparavant, depuis le projet de loi C-31 en 1985, il y a une quarantaine d’années. Lorsqu’il rétablit le statut en vertu de la Loi sur les Indiens, le Canada doit également consacrer les ressources nécessaires pour faire face à toutes les répercussions de cette mesure, y compris honorer ses engagements découlant des traités. Cela doit se faire en partenariat avec les femmes autochtones et les peuples autochtones, conformément à la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones et à l’enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, et les personnes de diverses identités de genre.

De plus, lorsque le statut est rétabli, la reconnaissance doit commencer à la naissance, et non à la date d’enregistrement. Tout le reste est injuste, mine la dignité de ces personnes et affirme le génocide continu des peuples autochtones.

Honorables sénateurs, mon organisation, Giganawenimaanaanig, fait partie des nombreuses organisations et personnes autochtones qui se sont présentées devant le Comité des Nations unies pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, le CEDAW, en raison de l’incapacité constante du Canada d’éliminer la discrimination en vertu de la Loi sur les Indiens. Nous ne devrions pas avoir à le faire. Les femmes autochtones ne devraient pas avoir à s’adresser constamment aux organismes des traités de l’ONU en raison de demi-mesures comme le projet de loi S-2 qui permettent la poursuite de la discrimination en vertu de la Loi sur les Indiens. Il est maintenant temps de modifier la loi pour éliminer tous les obstacles systémiques qui empêchent les femmes autochtones, et dans ce cas-ci les femmes des Premières Nations, de jouir d’une véritable égalité. Meegwetch. Je vous remercie de votre attention et je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.

La vice-présidente : Merci beaucoup. Nous allons maintenant passer aux questions des sénateurs. Chers collègues, vous disposerez chacun de trois minutes pour votre intervention, y compris la période des questions et réponses, avec un préavis de 30 secondes. Je vais commencer par la sénatrice Pate.

La sénatrice Pate : Merci à tous nos témoins. Je vous remercie, madame Asmann, d’avoir exprimé votre volonté de voir des mesures immédiates. Je crois que vous étiez ici lorsque j’ai posé la question au chef Littlechild, et nous savons que le gouvernement pourrait agir immédiatement s’il décidait de régler ce problème. Ma question s’adresse à Mme Delaronde, et je vous remercie du travail que vous faites depuis des décennies pour représenter les femmes autochtones, mais aussi les femmes non autochtones au pays et à l’international.

Une partie du projet de loi qu’on nous demande d’adopter, et qu’on nous incite à considérer comme un pas en avant, comprend des dispositions qui interdiraient aux gens de poursuivre le gouvernement. Le gouvernement serait dégagé de toute responsabilité. Il y a en ce moment une action en justice en cours pour contester ces dispositions antérieures dans le projet de loi S-3. Aimeriez-vous faire un commentaire à ce sujet? Et voulez-vous réagir à ce qui me semble être une posture incroyablement hypocrite de la part du gouvernement qui dit : « Attendez le prochain changement graduel » tout en essayant d’empêcher ces mêmes changements par son refus d’engager la responsabilité du gouvernement?

Mme DeLaronde : Je vous remercie de votre question, sénatrice. C’est faire preuve d’hypocrisie que d’éliminer la seule possibilité qui s’offre aux femmes depuis la première mouture de la Loi sur les Indiens d’obtenir des changements, à savoir de s’adresser aux tribunaux. C’est la seule approche qui a permis de changer les choses. Le projet de loi C-31 a été obtenu par des femmes qui ont porté la responsabilité devant des organismes internationaux, et ces derniers ont forcé le Canada à modifier sa position. Rien de ce qui constitue un droit protégé pour tous les Canadiens en vertu de la Charte ne devrait figurer dans cette loi.

Troy Chalifoux, avocat-conseil principal, Maurice Law, à titre personnel : Je vous remercie de cette discussion et de m’avoir donné l’occasion d’être ici.

Oui, on a l’impression que si le projet de loi est adopté, le Canada aura jeté un gilet de sauvetage à ces personnes, mais leur enlever la possibilité d’obtenir une indemnisation, c’est comme leur donner un gilet de sauvetage dégonflé, c’est insensé.

Ces personnes en ont besoin. Le statut est important. Elles ont été dépouillées de leur culture et de tout le reste. La Première Nation Michel est également en train de demander le statut de bande. Refuser à ses membres la possibilité d’obtenir une indemnisation pour les torts tragiques qui leur ont été causés revient, me semble-t-il, à leur infliger encore plus de violence.

Le sénateur Tannas : Je remercie les témoins de leur présence.

Madame Asmann, j’aimerais avoir des précisions au sujet de votre déclaration indiquant que ce projet de loi vous reconnaît et vous confère un statut, à vous, à votre famille et aux membres de la Première Nation Michel, ainsi qu’à d’autres personnes qui se trouvent dans des situations semblables.

Ai-je raison de dire — et peut-être que Me Chalifoux pourra ajouter quelque chose — que cela découle d’une décision du tribunal? L’article qui vous concerne est précisément le résultat d’une action en justice que vous avez gagnée, n’est-ce pas?

Me Chalifoux : Le projet de loi C-31 a redonné leur statut à certains membres de la Première Nation. Si le projet de loi S-2 suscite des inquiétudes, c’est à cause des directives du tribunal dans l’affaire Nicholas. C’est donc grâce à cette mesure législative que ce statut serait renouvelé.

Le sénateur Tannas : Si nous n’adoptons pas ce projet de loi avant une certaine date, cela se fera de toute façon, n’est-ce pas?

Me Chalifoux : Non.

Le sénateur Tannas : D’accord.

Me Chalifoux : Non, il n’y a pas de statut pour eux.

Je le répète, la Première Nation Michel est le groupe ayant les droits prévus à l’article 35 qui sera le plus touché, que le projet de loi S-2 soit adopté ou non. Il s’agit d’environ 3 000 personnes. Nous n’en sommes même pas tout à fait certains, mais c’est dans cette fourchette, alors cela a de l’importance.

Le sénateur Tannas : On nous a dit que ce projet de loi toucherait 3 200 personnes. Il s’agit pratiquement de l’ensemble de vos membres?

Me Chalifoux : Presque. Il y aura des personnes qui ne sont pas affiliées à la Première Nation Michel, mais nous pensons qu’il y a près de 3 000 descendants de Michel qui seront concernés.

Le sénateur Tannas : Merci.

Me Chalifoux : Notre association compte actuellement environ 1 200 descendants inscrits. Il s’agit simplement d’un processus constant d’identification des descendants, ce qui est difficile en raison de certaines pratiques de Services aux Autochtones Canada.

La vice-présidente : Merci.

La sénatrice McPhedran : Madame Asmann, je tiens à vous présenter mes excuses et à vous remercier du courage et de la générosité dont vous avez fait preuve ce soir ainsi que vos collègues et votre famille. Merci.

Ma question s’adresse principalement à Mme Delaronde. Vous avez une grande expérience du travail international au sein des principaux organes décisionnels de l’ONU, notamment le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes. Étant donné que le tout premier cas de violation des droits de la personne au Canada a été présenté par notre propre sénatrice à la retraite, Sandra Lovelace Nicholas, pouvez-vous nous aider à comprendre pourquoi vous vous donnez tant de mal; pourquoi est-il important de plaider ces questions à l’extérieur du Canada? Si vous pouvez établir un lien avec le projet de loi dont nous sommes saisis ce soir, nous vous en serions reconnaissants.

Mme DeLaronde : Je vous remercie de votre question.

L’histoire nous a montré que le Canada ne nous a jamais rien donné sans qu’il y ait de litige ou sans recourir à des organismes internationaux, comme les Nations unies. Pendant 20 ans nous avons demandé au Canada de lancer une enquête nationale sur les femmes autochtones disparues et assassinées, mais cela n’a pas été fait. Collectivement, les femmes — les grands-mères et les tantes — ont dû demander l’appui des Nations unies pour la tenue d’une enquête nationale parce cette crise perdure.

Rien de ce que nous avons obtenu ne nous a jamais été donné sans un combat, et nous devons amener nos amis à se battre à nos côtés.

La sénatrice McPhedran : Et le projet de loi S-2?

Mme DeLaronde : Ce sera la même chose. Notre conclusion à l’enquête nationale était que « la seule chose que le Canada comprend, c’est une bataille devant les tribunaux ». C’est comme si nous, les femmes, devions nous lever chaque jour et aller devant les tribunaux pour faire reconnaître nos droits.

La sénatrice McPhedran : Que se passerait-il s’il était confirmé, comme certains d’entre nous le pensent, que le projet de loi S-2 empêchera les femmes autochtones d’intenter des poursuites?

Mme DeLaronde : C’est tout simplement inacceptable. Cette disposition doit être supprimée parce que nous avons toujours dû nous battre devant les tribunaux pour éviter qu’on nous retire la possibilité de changer les choses et pour obtenir une égalité réelle, maintenant, pour nos enfants et pour les générations à venir. Si nous examinons le projet de loi selon nos principes directeurs des sept générations, cela ne fonctionne pas. Il faut que la Chambre des communes le sache. Si elle nous prive du droit de nous adresser aux tribunaux, il s’agit d’un projet de loi d’extinction.

La vice-présidente : Merci. Honorables sénateurs, je surveille l’horloge de très près.

La sénatrice McCallum : Je tiens à vous remercier tous pour tout le travail que vous avez accompli. C’est le travail de toute une vie; j’en suis témoin. Je tiens également à souhaiter la bienvenue au député Billy Morin, qui est assis là. Il vient du nord-ouest d’Edmonton. Soyez les bienvenus.

Je répète que les amendements ne retarderont pas l’adoption du projet de loi. Je ne sais pas pourquoi les gens continuent de dire cela. Si le Sénat et la Chambre des communes acceptent de s’attaquer à la discrimination et d’harmoniser la Loi sur les Indiens avec la Charte des droits et libertés, alors nous devrions le faire ensemble. Je ne sais pas pourquoi nous entendons constamment dire que les amendements feront mourir le projet de loi au Feuilleton. Cela ne devrait pas être le cas. Nous devrions être en mesure de régler vos problèmes et la question de la majorité, parce que 90 % des témoins ont parlé de la clause limitant la deuxième génération.

J’ai une question pour Me Chalifoux et Mme Delaronde. Madame Delaronde, je vous remercie de votre travail. J’en ai été témoin.

Vous travaillez en milieu urbain, ce qui est très différent du travail accompli par les autres témoins qui sont venus ici. Vous parlez de mise en œuvre complète. Quels sont les répercussions de l’émancipation et les obstacles en la matière auxquels notre peuple fait face en milieu urbain?

Ma question pour Me Chalifoux est la suivante : parmi les personnes impliquées dans l’affaire Nicholas, combien seront visées par la clause limitant la deuxième génération? Mais je vais demander à Mme Delaronde de répondre en premier, d’accord?

Me Chalifoux : Pour répondre à cette question, notre groupe ne fait pas partie de ce litige. Il y a des descendants qui y participent, mais pas en qualité d’organisation.

La sénatrice McCallum : Mais certains y participeront?

Me Chalifoux : Je peux vous dire avec certitude que la clause limitant la deuxième génération est un gros problème pour la Première Nation Michel. Mais nous ne pouvons pas parler des chiffres parce que nous sommes encore en train d’essayer de déterminer de qui il s’agit, pour commencer, n’est-ce pas?

La sénatrice McCallum : D’accord. Merci.

Mme DeLaronde : Je vous remercie de reconnaître que la majorité d’entre nous, membres des Premières Nations, les femmes et les familles, ont été déplacées pendant plusieurs générations vers des milieux urbains en raison de la Loi sur les Indiens. Lorsque les gens ont été réintégrés en vertu du projet de loi C-31, cela a simplement donné une reconnaissance juridique, mais sans inclure notamment le droit à la terre ou un endroit où vivre et la possibilité pour les gens d’avoir une assise territoriale. Il n’a pas été question de la transférabilité des droits.

Dans l’ensemble la première génération de réintégration a donné aux gens un sentiment d’existence, mais pas un sentiment d’appartenance territoriale. Je pense donc que pour les citadins, il est encore possible d’examiner la transférabilité des droits qui accompagne la réintégration.

Me Chalifoux : Sénatrice, pour revenir à votre question précédente, nous espérons sincèrement que vous avez raison de dire que les amendements ne retarderaient pas l’adoption du projet de loi. Mais le problème est que dans sa forme actuelle, il touche quelques milliers de personnes. Les répercussions financières sur le Canada pourraient donc être plus faciles à anticiper. Par contre, si vous tentez de régler le problème de la clause limitant la deuxième génération, il pourrait s’agir de centaines de milliers de personnes.

La sénatrice McCallum : [Difficultés techniques].

Me Chalifoux : Il est donc difficile d’imaginer que l’on pourrait se passer d’une réflexion supplémentaire pour mieux comprendre quelles seraient les répercussions avant d’adopter un projet de loi qui touchera 300 000 personnes.

La sénatrice McCallum : Hier, j’ai parlé du nombre d’immigrants. Je ne suis pas contre les immigrants. Le gouvernement a accueilli 382 000 immigrants en 2025, et il en accueillera 350 000 de plus en 2026 et encore 300 000 en 2027. C’est en cours et des milliards de dollars ont été versés.

Pourquoi les Premières Nations ne sont-elles pas prises en considération? C’est leur terre.

Me Chalifoux : Nous sommes d’accord.

La sénatrice McCallum : Alors, pourquoi utiliser cela comme excuse pour dire qu’on ne devrait pas l’envisager? Ce n’est pas notre travail. C’est celui du gouvernement.

Me Chalifoux : Nous sommes d’accord.

La sénatrice McCallum : Très bien.

La vice-présidente : Merci.

Le sénateur Francis : Ma question s’adresse à Mme Asmann.

Il est profondément regrettable que la Loi sur les Indiens et le gouvernement qui l’applique continuent de diviser notre peuple et de lui nuire. Même si le projet de loi S-2 rétablit le statut des personnes émancipées, leurs descendants continueront d’être victimes de discrimination systémique, risquant non seulement la perte du statut et des droits, mais aussi la perte de leur identité et de leur appartenance. Cette extinction légiférée est une forme de génocide.

N’êtes-vous pas inquiète pas de l’impact que cela aura sur vos propres enfants et petits-enfants? Les nôtres devront continuer à faire attention à bien choisir les personnes qu’ils aiment ou épousent simplement pour conserver leur statut, un lourd fardeau dont ils hériteront à la naissance. Pourquoi le Parlement ne profiterait-il pas de cette occasion pour mettre fin une fois pour toutes à l’ensemble des discriminations? Pourquoi continuer d’accepter l’idée d’une égalité graduelle qui condamne les générations futures à livrer la même bataille?

Mme Asmann : Je vais répondre en partie à cette question, puis je céderai la parole à Me Chalifoux. Je crois vraiment qu’il faut régler la question de la clause limitant la deuxième génération. Mais en ce qui nous concerne, nous essayons de redevenir une bande. Nous essayons de retrouver notre peuple. Nous essayons de trouver un point de départ pour commencer ce parcours.

Il y a d’autres Premières Nations qui sont ici depuis 150 ans. Elles ont une liste des bandes. Elles ont leur façon de faire. Elles ont tout ce qu’il faut pour mener ces batailles et peut-être les prolonger jusqu’à obtenir satisfaction. Nous n’avons pas cette possibilité.

Nous ne disposons pas de ce temps. Nous devons récupérer notre bande. Nous devons retrouver notre peuple et commencer à travailler davantage comme le font toutes les autres bandes. Le chef du conseil se bat tous les jours contre la Loi sur les Indiens. Nous devons parvenir à être en mesure de le faire, mais ce n’est pas le cas. C’est pourquoi, si nous parvenons à faire adopter ce projet de loi maintenant, nous retrouverons notre peuple, nous le ramènerons à la maison, le Créateur nous donnera la réserve dont nous avons besoin, et ce statut de bande. Ensuite, nous nous battrons pour en obtenir davantage. Parce que mes enfants et mes petits-enfants le méritent tout autant. Je parle au nom de tous les petits-enfants et arrière-petits-enfants à venir. Nous avons besoin d’eux aussi pour faire avancer ce dossier.

Mais s’agissant des membres de la Première Nation Michel, nous sommes vraiment uniques. Il nous faut un point de départ. Merci.

Me Chalifoux : Ce projet de loi n’est pas une panacée, même un projet de loi amendé ne sera pas une panacée pour combler les lacunes de la Loi sur les Indiens.

Au cours de l’histoire de cette Loi, l’ensemble de ses composantes ont été remaniées par toute une série de changements graduels. J’ai terminé mes études de droit il y a 30 ans. Willy Littlechild a été l’un des premiers avocats autochtones. Je l’ai suivi de près. C’est une question frustrante parce que nous sommes ici aujourd’hui pour parler de choses qui étaient déjà connues dans le projet de loi C-38. Dans le projet de loi C-38, nous parlions de choses qui étaient déjà connues dans la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, la Commission royale sur les peuples autochtones et la réconciliation. De quoi le Canada a-t-il encore besoin pour aller de l’avant?

La réalité, c’est que nous prendrons ce que nous pourrons obtenir, voilà l’héritage de ce gouvernement colonial. Nous n’avons pas le choix, alors nous ne pouvons pas rester assis et nous demander comment tout régler. Beaucoup ont essayé. Il est vraiment difficile de se voir interrogé sur ce qui arrivera si le projet de loi est adopté. La décision ne nous appartient pas, n’est-ce pas? C’est une question injuste. C’est comme si on nous lançait un canot de sauvetage et que l’on choisissait qui pouvait monter à bord. Il est tout à fait injuste de placer ces nations dans une situation où elles se font concurrence. Nous ne sommes pas le problème. Nous ne sommes pas le problème.

C’est affreux à dire, mais nous prendrons ce que nous pourrons obtenir. Ces gens, ces 3 000 personnes environ, sont terrifiées. Elles sont en train de mourir. Elles sont en train de mourir. Malheureusement, l’histoire de Mme Asmann n’est pas un cas isolé.

Derrière moi se trouvent d’autres membres âgés du conseil qui représentent un groupe de personnes très âgées. Ils veulent des changements. Nous ne voulons pas dire, désolé, vous relevez de la clause limitant la deuxième génération. Parce que certains de nos descendants sont concernés par cette clause. Nous continuerons de nous battre, mais nous devons agir maintenant sur ce qu’il est possible de faire.

Le sénateur Francis : Pour répondre à la sénatrice McCallum, nous ne devrions pas avoir à choisir l’un ou l’autre. Nous pouvons tout faire maintenant.

Me Chalifoux : Vous aurez notre soutien.

Le sénateur Prosper : Merci à tous les témoins. Je tiens à vous remercier, madame Asmann, pour votre récit, pour votre présence ici et pour la résilience, la vision et la détermination incroyables dont vous avez fait preuve. C’est triste, mais d’une certaine façon, vous voir ici et entendre votre récit est une source d’inspiration, et n’oublions pas ceux qui sont avec vous et qui vous soutiennent car ils sont bien plus nombreux que ceux qui se trouvent dans cette salle. Je tiens à le dire et à vous en remercier.

Comme vous le savez, les injustices et les témoignages nous donnent du fil à retordre. Il y a eu de nombreux témoignages. Je me rends compte que la question qui se pose est la suivante : devons-nous aller de l’avant avec ce projet de loi pour l’instant et ensuite travailler sur quelque chose de plus ambitieux? Votre précédent témoignage, maître Chalifoux, m’a fait réaliser que la question du paragraphe 6(2) se pose, mais que vous n’êtes pas en mesure de connaître le nombre de descendants.

La situation unique dans laquelle nous nous trouvons — et votre analogie avec la sélection des personnes autorisées à monter à bord du bateau de sauvetage était tout à fait appropriée. Selon moi il faut un plus gros bateau.

Ces occasions ne se présentent pas souvent. Des témoins précédents ont dit que le gouvernement n’agit pas ainsi de sa propre initiative. Madame Delaronde, vous avez dit que le gouvernement avait été forcé d’agir à maintes reprises par des poursuites judiciaires; ce n’est pas vraiment de son fait. De toute évidence, quand ce sont des décisions judiciaires qui le contraignent à agir, le gouvernement fait toujours le service minimum.

Donc, je pense au calendrier et à la tentative de régler la question des descendants de la bande Michel, et d’essayer de leur offrir des conditions avantageuses, parce que, soyons clairs, la deuxième génération arrive pour tout le monde.

Si cela prend plus de temps, c’est-à-dire des années plutôt que quelques semaines, c’est un dilemme. Qu’en pensez-vous?

Peut-être que vous pouvez répondre d’abord madame Asmann, et ensuite ça sera le tour de Me Chalifoux.

Mme Asmann : Je ne sais pas quoi dire. Si je vous comprends bien, vous me demandez si trois semaines sont une trop longue attente? La réponse est non, j’ai 60 ans. J’ai commencé avec ma sœur à l’âge de 15 ans et j’ai eu 60 ans en mars dernier. Trois semaines, ce n’est rien, mais 40 ou 50 ans de plus, c’est trop.

Si ce projet de loi peut être adopté en tenant compte de la deuxième génération, tant mieux, mais ne torpillez pas ce projet de loi dans sa forme actuelle. Merci.

Me Chalifoux : Une journée d’attente est une journée de trop, sénateur. Que va-t-il se passer dans trois semaines? Que pourrait‑il se passer dans deux semaines? Quand le prochain bref pourrait-il tomber? Ce sont des choses qui — vous y pensez tout le temps, j’en suis sûr, mais de ce côté-ci cela fait régner une peur abjecte.

Je veux être optimiste, comme certains d’entre vous, en pensant que cela ira de l’avant et qu’il pourra y avoir des amendements, mais nous ne voulons pas attendre.

Je pensais que le Parlement aurait terminé au bout de 10 ans, j’ai découvert qu’il allait falloir attendre encore trois ans. Tout ceci a des conséquences.

Mme Asmann a raison, trois semaines, ce n’est rien, mais que va-t-il se passer au cours de ces trois semaines? Le projet de loi C-38 aurait pu régler ce problème. De combien d’autres mandats le gouvernement a-t-il besoin pour faire face à cette situation?

Mme DeLaronde : Puis-je répondre? Ces amendements sont très importants, et le projet de loi peut être amendé et devrait l’être. Je crois que les droits des femmes et des filles autochtones, des peuples autochtones, ne devraient pas être retirés par ce projet de loi.

Nous devrions toujours avoir la possibilité d’intenter des poursuites, car c’est prévu, et nous savons que c’est la seule façon de faire plier le Canada. Le Parlement est censé représenter tous les Canadiens et représenter les droits de tous les Canadiens, y compris les femmes et les filles autochtones. Ce projet de loi bafoue nos droits. Merci.

La vice-présidente : Merci à nos témoins. Hiy hiy. Le temps alloué à ce panel est écoulé.

Je remercie encore une fois nos témoins de s’être joints à nous aujourd’hui.

Si vous souhaitez présenter d’autres mémoires, veuillez les envoyer par courriel au greffier. Si vous voulez ajouter des choses, n’hésitez pas à le faire.

Chers collègues, cela met fin à notre réunion d’aujourd’hui. La séance est levée.

(La séance est levée.)

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