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APPA - Comité permanent

Peuples autochtones


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES PEUPLES AUTOCHTONES

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le mardi 18 novembre 2025

Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujourd’hui, à 9 h 1 (HE), avec vidéoconférence, pour étudier le projet de loi S-2, Loi modifiant la Loi sur les Indiens (nouveaux droits à l’inscription).

La sénatrice Margo Greenwood (vice-présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La vice-présidente : Bonjour, honorables sénateurs. Je déclare ouverte la séance du Comité permanent des peuples autochtones.

Avant de commencer, je demande à tous les sénateurs et aux autres participants présents dans la salle de consulter, sur les cartes posées sur la table, les directives à suivre pour éviter les effets Larsen. Veillez à toujours garder les oreillettes éloignées de tous les microphones. Lorsque vous n’utilisez pas votre oreillette, placez-la face vers le bas sur l’autocollant prévu à cet effet sur la table. Je vous remercie tous de votre coopération.

Je commencerai par souligner que nous sommes réunis sur le territoire traditionnel, ancestral et non cédé de la nation algonquine anishinabe, où vivent aujourd’hui de nombreux autres peuples des Premières Nations, des Métis et des Inuits de toute l’île de la Tortue.

Je suis la sénatrice Margo Greenwood. Je suis la vice-présidente du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones. J’aimerais lire quelque chose qui sera consigné au compte rendu ce matin.

J’ai fait des recherches sur l’émancipation, les dispositions du projet de loi S-2 et l’histoire de ma propre famille. D’après les renseignements dont je dispose, je ne pense pas être visée par les nouveaux droits énoncés dans la version actuelle du projet de loi S-2, ni aucun membre de ma famille non plus. Toutefois, si le projet de loi S-2 devait être encore modifié pour régler le problème de l’exclusion après la deuxième génération ou d’autres questions relatives aux droits, et que j’estime que cela a une incidence sur moi ou sur des membres de ma famille, j’en informerai le comité, afin d’être certaine de ne pas me trouver en situation de conflit d’intérêts.

J’invite maintenant mes collègues à se présenter.

Le sénateur Prosper : Sénateur Paul Prosper, de la Nouvelle-Écosse, territoire Mi’kma’ki.

Le sénateur McNair : John McNair, sénateur du Nouveau-Brunswick. Bienvenue à tous ce matin.

La sénatrice Clement : Bernadette Clement, de l’Ontario. Plus précisément, Cornwall, en Ontario, sur le territoire traditionnel des Mohawks.

La sénatrice McPhedran : Marilou McPhedran, sénatrice indépendante du Manitoba, territoire du Traité no 1 et patrie de la nation métisse de la rivière Rouge.

La sénatrice McCallum : Bienvenue à tous. Je suis heureuse de vous voir ici. Mary Jane McCallum, du territoire du Traité no 10, région du Manitoba, Première Nation de Barren Lands.

Le sénateur Tannas : Scott Tannas, de l’Alberta.

Le sénateur Francis : Sénateur Brian Francis, d’Epekwitk, Île-du-Prince-Édouard.

La sénatrice Sorensen : Karen Sorensen, de l’Alberta, parc national Banff, territoire du Traité no 7.

[Français]

La sénatrice Audette : Kuei. [mots prononcés en innu-aimun] Je veux saluer la présence de femmes et d’hommes incroyables, et bien sûr celle de mes collègues sénateurs et sénatrices. Michèle Audette [mots prononcés en innu-aimun] du Québec.

Le sénateur Moreau : Pierre Moreau, de la division des Laurentides, au Québec, représentant du gouvernement au Sénat.

[Traduction]

La vice-présidente : Merci, chers collègues, et bienvenue à tous nos invités.

La sénatrice McCallum : J’aimerais parler, comme vous, d’un éventuel conflit d’intérêts.

J’ai parlé avec le conseiller en éthique. Je l’ai rencontré parce que l’on a attiré mon attention sur le fait qu’il pourrait y avoir un conflit en raison de mon histoire et du fait que ma Première Nation a toujours vécu sous le régime de la Loi sur les Indiens. J’ai rencontré le conseiller en éthique, et nous avons examiné le code et ce qui est considéré comme la famille immédiate. Il m’a demandé si j’ai un intérêt personnel dans cette affaire. J’ai répondu que non, je n’en ai pas, que nous sommes là pour examiner les droits qui ont été supprimés à cause du racisme et de la discrimination dans la Loi sur les Indiens, et qu’il est de ma responsabilité de veiller à ces droits soient rétablis. Le conseiller m’a dit qu’il n’y a pas de conflit d’intérêts. Je souhaitais simplement que le comité en soit informé.

La vice-présidente : Merci, sénatrice McCallum.

Honorables sénateurs, nous nous réunissons pour poursuivre notre étude du projet de loi S-2, Loi modifiant la Loi sur les Indiens (nouveaux droits d’inscription).

Ce projet de loi modifie la Loi sur les Indiens afin de prévoir, entre autres, de nouveaux droits d’inscription au registre des Indiens en réponse à la contestation de certaines dispositions de la loi en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés dans l’affaire Nicholas c. Canada (Procureur général) et afin que les personnes qui ont acquis ces droits aient également le droit de voir leur nom inscrit sur une liste de bande tenue par le ministère des Services aux Autochtones.

Je rappelle à mes honorables collègues que, lors de notre première réunion publique, le 24 septembre, la sénatrice Michèle Audette, présidente de ce comité et marraine du projet de loi S-2, s’est récusée de son rôle de présidente pour la durée de cette étude, afin d’en préserver la neutralité. C’est un honneur et un privilège pour moi de présider cette réunion très importante.

Avant de passer à l’examen article par article, j’aimerais céder la parole au sénateur Moreau, qui disposera de cinq minutes pour présenter ses observations. Sénateur Moreau, vous avez la parole.

[Français]

Le sénateur Moreau : Madame la présidente, félicitations pour la façon dont vous conduisez nos travaux.

J’aimerais d’abord remercier la sénatrice Audette, qui a accepté d’être la marraine de cet important projet de loi S-2, ainsi que l’ensemble des membres du comité pour le travail qui a été fait.

[Traduction]

Chers collègues, le Comité permanent des peuples autochtones a entrepris ces derniers mois un travail important. Il y a consacré de longues heures au sein du comité et ailleurs. Vous avez entendu des témoignages très personnels et émouvants. Je vous félicite et vous remercie de votre travail.

Avant de passer à l’examen article par article, je souhaite exposer brièvement la position du gouvernement. Je ne pense pas que ce que j’ai à dire vous surprenne.

Mes chers collègues, comme la présidente vient de le souligner, le projet de loi S-2 est, avant tout, une réponse à l’affaire Nicholas c. Canada. Il garantit le droit à l’inscription aux personnes qui l’ont perdu à la suite de l’émancipation et à leurs descendants. Environ 3 500 personnes sont concernées. Comme l’a expliqué la ministre, telle est la priorité du projet de loi S-2. Tel en est l’objet fondamental, et je me demande si les amendements entrent dans son champ d’application.

Comme vous le savez tous, il y a également une date limite à respecter, à savoir le 30 avril 2026. Tout retard supplémentaire ajouterait à l’incertitude et pourrait nuire davantage à ces 3 500 personnes, dont certaines ont témoigné devant vous au cours de votre étude.

La ministre a souligné qu’une grande partie du travail accompli par le comité portait sur un amendement relatif à l’exclusion après la deuxième génération. Malgré l’importance de cette question, la ministre est tenue par la Constitution de mener des consultations. Elle ne peut pas négliger cette étape. Comme elle l’a expliqué au comité, si le processus est contourné, le gouvernement s’expose à des poursuites judiciaires.

Sans ignorer les injustices qui demeurent dans la Loi sur les Indiens, le gouvernement s’est engagé à trouver des moyens de remédier à la clause d’exclusion après la deuxième génération et aux critères de vote énoncés à l’article 10. Des solutions possibles sont actuellement recherchées dans le cadre d’un processus de collaboration qui s’achèvera le mois prochain, en décembre.

La ministre a déclaré qu’elle reviendrait devant le comité pour présenter les résultats de ces travaux. Je suis convaincu qu’elle le fera dès que possible.

La ministre a déclaré qu’elle doit respecter l’obligation de consultation. Elle a souligné, en tant qu’ancienne dirigeante autochtone, que cette obligation est le critère qu’elle respectera dans son travail en ce qui concerne le consentement libre, préalable et éclairé et la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.

Le gouvernement recueille actuellement l’avis de nombreux titulaires de droits et organisations des Premières Nations sur les solutions proposées pour trouver une issue au problème de l’exclusion après la deuxième génération. En consultant les titulaires de droits des Premières Nations, le gouvernement évite aussi des conséquences imprévues qui pourraient créer de nouveaux obstacles ou de nouvelles exclusions et reproduire le type même de discrimination que nous cherchons tous à éliminer.

Le gouvernement maintient sa position — et je tiens à le souligner — et demande respectueusement que l’obligation de consulter les titulaires de droits sur cette question essentielle soit respectée.

Chers collègues, tout ce dont je vous ai fait part aujourd’hui est conforme à ce que la ministre vous a exposé et ne devrait pas, je le répète, vous surprendre. Le débat sur l’exclusion après la deuxième génération a suscité des réactions passionnées et un échange d’idées animé, mais je suis convaincu qu’en tant que Chambre de second examen objectif, nous nous acquitterons de notre mandat, nous respecterons la Constitution et nous respecterons les obligations de la Couronne.

Je vous remercie de votre attention. Merci, madame la vice-présidente.

La vice-présidente : Merci, sénateur Moreau.

Honorables sénateurs, nous allons maintenant passer à l’examen article par article du projet de loi S-2. Avant de commencer, je vous rappellerai un certain nombre de points.

Si, à un moment donné, un sénateur ne sait pas bien où nous en sommes dans le processus, je l’invite à demander des précisions. Je tiens à ce que nous sachions toujours tous où nous en sommes dans le processus.

En ce qui concerne le déroulement du processus, quand plusieurs amendements à un même article sont proposés, ils doivent être présentés dans l’ordre des lignes de l’article.

Si un sénateur s’oppose à tout un article, la procédure à suivre consiste non pas à présenter une motion visant à supprimer tout l’article, mais à voter contre l’article tel qu’il figure dans le projet de loi.

Certains amendements proposés peuvent avoir des répercussions sur d’autres parties du projet de loi. Il est donc utile, dans ce processus, que le sénateur qui propose un amendement indique au comité les autres articles du projet de loi sur lesquels cet amendement pourrait avoir une incidence. Sinon, il sera très difficile pour les membres du comité de rester cohérents dans leurs décisions.

Comme aucun préavis n’est nécessaire pour proposer des amendements, ils n’ont, bien entendu, pas fait l’objet d’une analyse préliminaire pour déterminer lesquels pourraient avoir des conséquences sur d’autres et lesquels pourraient être contradictoires.

Si les membres du comité ont des questions sur le processus ou sur la pertinence de ce qui se passe, ils peuvent certainement invoquer le Règlement. En tant que présidente, j’écouterai les arguments, je déciderai quand une question ou un rappel au Règlement aura été suffisamment débattu et je rendrai une décision.

Le comité est le maître ultime de ses propres affaires dans les limites fixées par le Sénat, et une décision peut faire l’objet d’un appel devant l’ensemble du comité en demandant si la décision doit être maintenue.

Je tiens à rappeler aux honorables sénateurs que, s’il y a un doute quant au résultat d’un vote par oui ou non ou d’un vote à main levée, le mieux est de demander un vote par appel nominal, qui donne évidemment des résultats sans ambiguïté.

Enfin, les sénateurs savent que toute égalité des voix entraîne le rejet de la motion en question.

Je prendrai mon temps dans ce processus, afin que nous soyons tous sur la même longueur d’onde, et je ne me précipiterai pas à cet égard. Y a-t-il des questions sur les points que je viens de soulever? Je n’en vois pas, nous allons donc poursuivre.

Avant cela, j’aimerais inviter à la table les représentants du gouvernement présents dans la salle aujourd’hui. Veuillez accueillir Lori Doran, directrice générale de la Direction générale des affaires individuelles, Secteur des services aux particuliers, de Services aux Autochtones Canada; Stuart Hooft, directeur de la Direction générale des affaires individuelles, Secteur des services aux particuliers; et Me Jean-Charles Lebeau, conseiller juridique, Section des opérations et des programmes, Services juridiques du RCAANC/SAC, du ministère de la Justice. Bienvenue à vous.

Mme Doran, M. Hooft et Me Lebeau sont ici pour répondre aux questions des sénateurs sur le projet de loi S-2, Loi modifiant la Loi sur les Indiens (nouveaux droits à l’inscription). Ils sont ici pour nous éclairer de leurs connaissances. Merci.

Pour commencer, honorables sénateurs, êtes-vous d’accord pour que le comité procède à l’examen article par article du projet de loi S-2, Loi modifiant la Loi sur les Indiens (nouveaux droits à l’inscription)?

Des voix : D’accord.

La vice-présidente : D’accord. Merci. L’étude du titre de la loi est-elle reportée?

Des voix : D’accord.

La vice-présidente : D’accord. Passons à l’article 1. L’article 1 est-il adopté?

Des voix : D’accord.

La vice-présidente : Merci. L’article 2 est-il adopté?

Des voix : D’accord.

La vice-présidente : D’accord. L’article 3 est-il adopté?

Des voix : D’accord.

La vice-présidente : D’accord. Je crois comprendre que le sénateur Prosper a proposé un amendement à l’article 4. Je vous invite, sénateur Prosper, à lire votre amendement. Vous avez la parole pour le présenter.

Le sénateur Prosper : Merci, madame la présidente. Je propose :

Que le projet de loi S-2 soit modifié à l’article 4, à la page 2 :

a) par adjonction, après la ligne 29, de ce qui suit :

« (1.1) L’alinéa 6(1)a.3) de la même loi est remplacé par ce qui suit :

a.3) elle est un descendant en ligne directe d’une personne qui a droit à l’inscription, ou qui avait ou aurait eu ce droit, en vertu de l’un des alinéas a), a.1) ou a.2); »;

b) par adjonction, après la ligne 31, de ce qui suit :

« (2.1) L’alinéa 6(1)f) de la même loi est remplacé par ce qui suit :

f) au moins un de ses parents a le droit d’être inscrit en vertu du présent article ou, s’il est décédé, avait ou aurait eu ce droit à la date de son décès.

(2.2) Les paragraphes 6(2) et (2.1) de la même loi sont abrogés.

(2.3) Le passage du paragraphe 6(3) de la même loi précédant l’alinéa a) est remplacé par ce qui suit :

(3) Pour l’application des alinéas (1)a.3) et f) : »;

c) par adjonction, après la ligne 37, de ce qui suit :

« (4) L’alinéa 6(3)b) de la même loi est remplacé par ce qui suit :

b) la personne qui est visée à l’un des alinéas (1)a.‍1) ou f) et qui est décédée avant le 17 avril 1985 est réputée avoir le droit d’être inscrite en vertu de l’alinéa en cause; ».

Chers collègues, avant de commencer, je tiens à remercier et à saluer certaines personnes présentes dans la salle : Dawn Lavell-Harvard, Zoë Craig-Sparrow, Mélanie Savard et d’autres encore. Ces personnes, ainsi que beaucoup d’autres, ont comparu devant le comité et sont aujourd’hui assises avec nous dans la tribune publique pour observer l’examen article par article. Bonjour à vous tous.

Chers collègues, je crois que nous avons une grande responsabilité lorsque nous nous asseyons autour de cette table. Une partie de cette responsabilité consiste à veiller à prendre sérieusement en considération les conseils et l’expérience de ceux qui ont pris le temps de venir ici témoigner au sujet du projet de loi que nous examinons.

Nous sommes ici aujourd’hui et nous avons un choix important à faire. Allons-nous écouter la ministre, ne rien faire et attendre patiemment qu’un projet de loi distinct vienne corriger l’exclusion après la deuxième génération? Ou allons-nous écouter les nombreuses personnes et les titulaires de droits collectifs qui ont comparu devant le comité pour nous inciter à apporter ce changement maintenant?

Depuis le 24 septembre, nous avons tenu 10 réunions. Nous avons entendu 57 témoins et reçu 47 mémoires. Nous avons suivi une tradition de longue date du comité, qui est de convoquer les ministres lorsque nous examinons des projets de loi importants, et nous avons entendu la ministre à deux reprises. Si nous repensons à la dernière fois où nous avons modifié les dispositions relatives à l’inscription au registre de la Loi sur les Indiens — ce qui remonte au projet de loi S-3 —, le comité a également entendu la ministre à deux reprises et convoqué trois fois des représentants du ministère au cours de cette étude.

Parmi tous les témoins que nous avons entendus en dehors de ceux du gouvernement, les seuls qui ont exprimé des préoccupations au sujet d’amendements potentiels étaient l’avocat dans l’affaire Nicholas et des membres de la nation Michel Callihoo, qui ont clairement indiqué qu’ils ne s’opposaient pas à la suppression du principe de l’exclusion après la deuxième génération, mais qu’ils s’inquiétaient de l’incidence que tout amendement aurait sur le calendrier et sur l’adoption de ce projet de loi.

En fait, M. Ryan Beaton, qui représentait les plaignants, a déclaré :

La seule chose que je dirais en tant qu’avocat des plaignants, c’est que l’idéal serait bien sûr de corriger tout ce qui peut l’être dans ce projet de loi. En ce qui concerne la situation des plaignants, le tribunal a fixé une date limite. Les plaignants ne s’opposeraient certainement pas à ce que d’autres questions soient abordées dans le projet de loi, mais il y a une date limite à laquelle la réparation doit être mise en place pour les plaignants.

Je leur dis aujourd’hui qu’il n’y a pas de raison que cet amendement ralentisse le projet de loi. Nous nous sommes attachés à écouter toutes les préoccupations, et je crois que cet amendement et les amendements connexes que je proposerai si cet amendement principal est adopté répondent à la majorité des préoccupations soulevées, y compris en ce qui concerne le calendrier.

Je regarde la motion de programmation présentée par le gouvernement à la fin de l’exclusion après la deuxième génération pour les Canadiens nés à l’étranger, et je constate qu’il existe une volonté politique, un moyen d’accélérer les choses, et nous n’aurions même pas besoin d’une motion de programmation.

Je le répète pour que les choses soient claires, il n’y a aucune raison que le comité n’adopte pas ce projet de loi aujourd’hui. Tant que le gouvernement ne recourt pas à des tactiques dilatoires, un projet de loi amendé pourrait être débattu en troisième lecture dès la semaine prochaine. Selon les règles actuelles, et selon la volonté de la Chambre, une version amendée de ce projet de loi pourrait être votée et renvoyée à l’autre Chambre dès jeudi prochain.

L’amendement comporte quatre parties. La première partie est la proposition 1.1, qui supprime l’exclusion de 1985. La deuxième partie, le point 2.1, passe à une règle du parent unique. La troisième partie, le point 2.2 de l’amendement, supprime l’exclusion après la deuxième génération. La quatrième partie, le point 2.3 de l’amendement, fait en sorte que les générations actuelles auront encore le droit d’être inscrites, même si leur parent est décédé, si ce parent avait eu le droit d’être inscrit en vertu des nouvelles règles.

J’ai travaillé en étroite collaboration avec le Groupe de travail sur la discrimination fondée sur le sexe dans la Loi sur les Indiens pour élaborer cet amendement, et je tiens à remercier les femmes qui réclament sans relâche depuis des décennies qu’il soit mis fin à cette injustice.

J’ai choisi de défendre cet amendement parce que je crois qu’il n’y a rien de plus essentiel à la survie des Premières Nations que ce changement. Le fait est que nous ne pouvons pas décider de qui les membres des Premières Nations tombent amoureux. Ce changement dit que vous pouvez aimer qui vous voulez et ne pas vous inquiéter, car vos enfants ne seront pas laissés pour compte simplement parce que vous avez choisi de les avoir avec quelqu’un qui n’est pas membre d’une Première Nation. Ce changement dit que non, le gouvernement ne continuera pas de diviser pour régner en créant des inégalités entre les enfants des Premières Nations, c’est-à-dire en continuant de dicter qui est ou n’est pas reconnu comme étant membre d’une Première Nation. Ce changement s’oppose à une politique d’extinction et englobe les générations perdues qui, bien que ce soit leur droit inné et qu’elles soient reconnues et revendiquées par leurs communautés, n’ont pas accès aux programmes et aux services qui ne sont offerts qu’à ceux qui possèdent un document disant qu’ils ont le statut d’Indien.

Depuis que le projet de loi S-2 a été présenté à la Chambre, j’ai pensé à ce moment dans l’histoire. Je me suis entretenu avec des aînés et des dirigeants, et j’ai réfléchi pendant la cérémonie aujourd’hui. Je ne peux pas rester sans rien faire.

Pas plus tard que la semaine dernière, le Grand Conseil Mi’kmaq, aux côtés des dirigeants Wolastoqey, a organisé une conférence de presse pour appuyer ces amendements. Je sais, parce que tous les chefs indiens de la Nouvelle-Écosse qui soutiennent ces amendements me l’ont dit, et je sais, parce que j’ai été chef et chef régional, que beaucoup de personnes réclament ce changement depuis des décennies.

J’espère que mes collègues autour de la table se montreront solidaires des nombreux témoins qui ont témoigné et des dizaines de milliers de titulaires de droits individuels représentés par les différents chefs et organisations qui ont adopté des résolutions, rédigé des lettres et des mémoires et qui ont témoigné en faveur de cet amendement. Wela’lin. Merci beaucoup.

Le sénateur Francis : Merci, sénateur Prosper. J’appuie sans réserve cet amendement. Il répond directement aux demandes de la plupart des témoins, dont beaucoup ont souligné que, si l’on tarde encore à mettre fin à la discrimination créée par l’exclusion après la deuxième génération et aux inégalités qu’elle entraîne, des personnes, y compris des enfants, continueront de subir un préjudice grave et irréparable.

Il est urgent d’apporter ce changement, car il met fin à l’extinction législative, élément clé des visées assimilationnistes des 150 dernières années. Il est donc essentiel pour assurer la survie des Premières Nations. Cette mesure est tout à fait conforme à l’obligation constitutionnelle des sénateurs de veiller à ce que le gouvernement fédéral respecte les droits des populations vulnérables.

Je tiens également à rappeler à tous que nombre de témoins ont cité le rapport intitulé « C’est assez! Finissons-en avec la discrimination quant à l’inscription au registre des Indiens » publié par le comité en 2022, dans lequel nous demandions au Canada de prendre sans tarder des mesures pour remédier à l’exclusion après la deuxième génération et à d’autres inégalités.

La cheffe nationale Woodhouse, en particulier, a déclaré que l’Assemblée des Premières Nations demandait au Sénat de continuer d’apporter son soutien sans faille à la suppression de toutes les dispositions discriminatoires de la loi.

De plus, Jeremy Matson a déclaré :

Je suis venu ici en 2022 et 2023 au sujet de différentes études. À quoi sert le rapport « C’est assez! »? Pourquoi le comité rendrait-il un rapport sur les mêmes sujets dont nous avons parlé il y a des années, puis n’apporterait pas de changements et ne ferait pas exactement ce qu’il a dit qu’il ferait? Ce serait m’insulter et insulter les Nations unies, qui sont déjà venues ici au sujet de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Je pense que c’était l’une des premières fois que les Nations unies comparaissaient devant un comité dans ce pays.

À mon avis, et je présidais le comité au moment de la publication du rapport, il est important que le comité reste ferme sur les recommandations qu’il a formulées en 2022. C’est exactement ce que fait cet amendement. Merci.

La sénatrice McPhedran : Merci beaucoup. Je tiens tout d’abord à remercier le sénateur Prosper et ses collaborateurs d’avoir élaboré un ensemble de mesures aussi complet, et à souligner qu’il est tout à fait conforme au rapport de 2022 du Comité des peuples autochtones, alors présidé par le sénateur Brian Francis. Il s’agit également d’une suite importante au travail accompli par certains sénateurs encore présents à cette table. Je pense que le sénateur Tannas et moi-même sommes peut-être les deux, avec la sénatrice Pate, qui nous rejoindra bientôt, nous l’espérons.

À cet égard, en 2017, il y a huit ans, nous avons eu la même possibilité. Plus d’une fois dans le processus, les sénateurs ont décidé de s’attaquer à la discrimination fondée sur le sexe, qui est incontestable et persistante à l’égard des femmes autochtones de ce pays.

C’est une des raisons pour lesquelles le leadership du Sénat est si important, et ce que nous avons devant nous avec cet amendement n’est que l’exemple le plus récent du fait que nous nous acquittons de nos obligations en tant que sénateurs, car la Charte canadienne des droits et libertés contient deux articles qui concernent plus particulièrement les femmes autochtones de ce pays, qui ont autant droit à leurs droits garantis par la Charte que toute autre femme de ce pays.

L’article 15 garantit l’égalité. Je m’exprime à ce sujet en m’appuyant sur mon expérience personnelle importante, car j’ai participé à la rédaction des articles 15 et 28, et je remercie les milliers de femmes au Canada qui nous ont permis de modifier la Constitution à cet égard.

L’article 15, qui garantit donc l’égalité, vise expressément la discrimination fondée sur le sexe. L’article 28, souvent oublié, car il s’agit de l’autre clause dérogatoire de notre Constitution, stipule très clairement que rien dans la Charte ne doit permettre la discrimination fondée sur le sexe, que tout dans la Charte s’applique également aux hommes et aux femmes.

Nous sommes donc aujourd’hui devant une tendance des gouvernements du Canada qui, depuis plus de 40 ans, se sont succédé et qui n’ont fait, pour l’essentiel, que ce que les tribunaux leur ont demandé de faire, tribunaux qui ont toujours conclu que le gouvernement du Canada pratique une discrimination fondée sur le sexe à l’égard des femmes autochtones de ce pays.

Il y a huit ans, les sénateurs ont fait de leur mieux pour essayer de régler ce problème une fois pour toutes. Nous pensions sincèrement y être parvenus avec le projet de loi S-3. Nous avions tort, comme le temps l’a démontré. Huit ans plus tard, nous avons aujourd’hui l’occasion de nous attaquer pleinement à la discrimination fondée sur le sexe à l’égard des femmes autochtones, qui est manifestement inconstitutionnelle.

En ce qui concerne la mention faite par le sénateur Moreau de l’obligation constitutionnelle de la ministre de mener des consultations, permettez-moi de dire que l’obligation constitutionnelle est d’éradiquer la discrimination sexuelle à l’égard des femmes autochtones de ce pays, et que nous avons de nouveau aujourd’hui une occasion de le faire de manière complète et exhaustive, et non, une fois de plus, de manière fragmentaire et mesquine.

J’appuie sans réserve l’amendement du sénateur Prosper et j’invite les autres sénateurs à l’examiner aussi de manière positive. Je vous remercie.

La sénatrice Clement : Nous avons entendu 57 témoins. Tellement de témoins, tellement de femmes. Je tiens à remercier le sénateur Prosper pour cette série d’amendements. Je vais tous les appuyer. Je vais maintenant m’exprimer, brièvement.

Cheffe Slett, Pam Palmater, Mary Eberts, Zoë Craig-Sparrow. Je cite ces noms parce que, non seulement bon nombre de ces femmes qui ont témoigné étaient des expertes dans leur domaine — avocates, administratrices, mères, grands-mères, professionnelles utilisant leurs compétences pour témoigner devant le comité —, mais elles ont également raconté leur propre expérience pour nous parler de la nécessité d’aller plus loin dans le projet de loi S-2.

J’ai beaucoup réfléchi. J’ai écouté attentivement la ministre. J’ai écouté attentivement le sénateur Moreau ce matin. Souvent, dans cette enceinte, on nous dit : « Ne modifiez pas les textes. Le mieux est l’ennemi du bien. Vous savez, cela retardera les choses, si vous faites cela. Ne faites pas cela. C’est assez bien comme ça. » J’ai donc hésité au point de devoir consulter un ami, un aîné, qui n’est pas nécessairement d’accord avec moi pour appuyer ces amendements. Cependant, j’ai hésité et je lui ai parlé, et il m’a dit : « Alors, Bernadette, avez-vous écouté? » Oui. « Avez-vous appris? » Oui. « Alors, faites votre travail et votez. » Je pense que c’est un conseil assez clair.

Je vous informe donc de mon vote. Je vais appuyer cet amendement. Je suis convaincue par les arguments juridiques présentés par le sénateur Prosper. Je suis convaincue par les arguments juridiques présentés par la sénatrice McPhedran. Et je suis convaincue par le témoignage de Mélanie Savard, qui nous a dit que continuer dans cette direction, continuer d’avancer au compte-gouttes signifie que la violence latérale continuera au sein des communautés. J’appuie donc cet amendement.

[Français]

C’est tout. Merci.

[Traduction]

La vice-présidente : Merci, sénatrice Clement.

[Français]

La sénatrice Audette : Madame la présidente, j’aime beaucoup votre approche et la façon dont vous présidez l’étude de ce projet de loi, qui polarise et suscite beaucoup d’émotions. Cela nous ramène à l’idée que, parce qu’on est une femme autochtone issue d’une Première Nation, il faut accepter le minimum, sinon bien en deçà de la barre du minimum, au chapitre des droits de la personne.

J’apprécie que le représentant du gouvernement ait donné la position officielle du gouvernement. Pour ma part, ma position officielle a toujours été la même : je voulais aller au Sénat pour qu’on abolisse ou modifie la Loi sur les Indiens.

Cela fait 28 ans. Les articles peuvent vous le prouver; je l’ai dit, j’avais 28 ans. Lorsqu’il était président du Comité des peuples autochtones, le sénateur Francis nous avait avisés qu’un projet de loi, le projet de loi C-38, serait bientôt débattu à la Chambre. Nous avons été virulents, avec délicatesse, en choisissant des mots très diplomates pour dire que ce projet de loi représente pour nous une occasion de parler d’enjeux qui ont été oubliés après l’adoption du projet de loi S-3, de revendications qui ont été mises de côté ou de positions soulevées par la juge Masse dans l’arrêt Descheneaux.

Aujourd’hui, dans le cadre du projet de loi S-2, je maintiens ma position selon laquelle nulle part dans un contrat qui vise à promouvoir un projet de loi on ne nous empêche de l’améliorer et de croire à une diversité. Je n’ai peut-être pas la réponse finale, mais peut-être qu’un témoignage me fera voir un angle différent auquel je n’avais pas pensé.

Pour moi, c’est tout à fait clair quand je lis les amendements avec vous. Rappelons-nous que, pour le projet de loi C-31, il n’y a pas eu de décision d’un tribunal. Le Canada a fait preuve d’un certain courage : il a eu l’obligation de modifier la loi à cause de la Constitution, de la Charte et des articles mentionnés par la sénatrice McPhedran.

Il existe un précédent intéressant qui fait que nous ne sommes peut-être pas obligés d’attendre la décision d’un tribunal ou d’aller plus loin après une décision. Je pense que cela ne nous empêche pas de comprendre collectivement ce que vit une femme innue qui a été rejetée, qui a été ramenée dans sa réserve et qui a vécu de la discrimination.

J’ai l’espoir qu’on mettra de côté les tactiques procédurales. J’ai l’espoir qu’on aura confiance dans l’expertise des gens qui nous parlent depuis 40 ans. J’ai aussi l’espoir que lorsqu’on nous dit qu’il y a une obligation de consulter, ce qui nous est présenté comme des amendements est le résultat d’une longue consultation.

J’aimerais honorer l’amendement du sénateur Prosper pour deux raisons.

[Traduction]

Quand j’étais jeune, on m’a dit que le chef serait l’ennemi, si l’on voulait obtenir un changement. Il était donc très impressionnant d’entendre un homme, ancien chef et chef régional, dire que ce projet de loi devrait aller plus loin, et votre amendement reflète ce que vous avez dit dans votre intervention lors de la deuxième lecture à la Chambre. J’appuie donc — je suis autorisée à appuyer cet amendement. Vais-je tous les appuyer? Je ne sais pas. Mais celui-ci est un amendement qui aurait dû être adopté en 1985. Merci.

La vice-présidente : Merci, sénatrice Audette.

La sénatrice McCallum : Le privilège d’être membre d’un comité est la possibilité d’entendre les récits des personnes touchées, qui sont versés au dossier, et d’apprendre à faire preuve de compassion. Qu’ils témoignent par écrit ou oralement, les témoins nous apportent beaucoup, et nous leur donnons de l’espoir — l’espoir que, comme parlementaires, nous ferons notre travail pour leur rendre justice.

De cette expérience au sein du comité chargé d’examiner le projet de loi S-2, j’ai retenu que les récits se révèlent de manière puissante et utile, et que c’est là notre façon d’être et de connaître. Lorsque cela se produit, nous sommes en présence du sacré. Ne l’oubliez pas.

Étant moi-même membre d’une Première Nation, j’accomplis mon travail au sein des comités sénatoriaux selon ma façon d’être et de connaître. J’ai compris que les sénateurs sont choisis pour représenter le peuple, pour faire entendre sa voix et ses préoccupations, non pas à titre personnel, mais pour représenter la collectivité. C’est ce qu’on nous enseignait à nous, les membres des Premières Nations, avant les pensionnats.

Ayant vécu la Loi sur les Indiens si intimement, mon travail comme sénatrice consiste en partie à décoloniser l’un des plus — on l’appelle le ventre de la bête, et c’est là où nous nous trouvons.

Voici une citation de la juge Masse :

Lorsque le législateur choisit d’omettre de considérer les implications plus larges des décisions judiciaires en restreignant la portée de celles-ci à leur strict minimum, une certaine abdication du pouvoir législatif aux mains du pouvoir judiciaire est susceptible de se produire. Les détenteurs du pouvoir législatif se contenteraient alors d’attendre que les tribunaux se prononcent au cas par cas avant d’agir et que leurs décisions forcent progressivement la modification des lois afin que celles-ci soient, finalement, conformes à la Constitution.

Du point de vue des citoyens canadiens, qui sont tous des justiciables potentiels, le manquement à cette obligation du législateur et l’abdication de pouvoir qui pourrait en résulter ne sont évidemment pas souhaitables.

Les droits collectifs font du Canada un pays unique. Les droits collectifs appartiennent à des groupes de personnes et sont inscrits dans la Loi constitutionnelle de 1982. Ils ont pour but d’affirmer l’identité collective de groupes dans la société, afin de créer une société où les personnes de différentes identités ont leur place.

Comme membres des Premières Nations, nous avons une identité collective antérieure au contact avec les Européens, qui est une identité partagée à titre de groupe ayant une langue et une culture communes. Les droits collectifs sont des droits garantis à des groupes précis et à la société canadienne pour des raisons historiques et constitutionnelles. Contrairement aux droits individuels, qui protègent chaque personne, les droits collectifs protègent des groupes précis et nécessitent une action gouvernementale pour leur mise en œuvre.

Les gens se sont concentrés sur les droits individuels, mais il existe aussi des droits collectifs. Nous sommes un collectif. Je le sais. J’ai vécu cette vie.

Les sénateurs ont un rôle à jouer. Ils ont le devoir de promouvoir les valeurs et les principes fondamentaux de notre système démocratique, surtout compte tenu du rôle historique du Sénat qui consiste à agir au nom des groupes sous-représentés à la Chambre des communes, comme l’a souligné la Cour suprême du Canada dans le Renvoi relatif à la réforme du Sénat de 2014 :

Avec le temps, le Sénat en est aussi venu à représenter divers groupes sous-représentés à la Chambre des communes. Il a servi de tribune aux femmes ainsi qu’à des groupes ethniques, religieux, linguistiques et autochtones auxquels le processus démocratique populaire n’avait pas toujours donné une opportunité réelle de faire valoir leurs opinions [...]

C’est notre travail à titre de Sénat. La Chambre des communes n’a pas cette responsabilité. C’est notre seule chance, à moins qu’on supprime les amendements, auquel cas nous devrons les réintroduire. Nous allons donc attendre.

L’ordre de renvoi au Comité sénatorial permanent des peuples autochtones du 3 mars 2022 autorise celui-ci à étudier, afin d’en faire rapport, les responsabilités constitutionnelles, politiques et juridiques et les obligations découlant des traités du gouvernement fédéral envers les Premières Nations, les Inuits et les Métis. C’est ce que nous avons ici. C’est ce que nous faisons.

En qualité de sénatrice, j’ai la responsabilité de créer des points d’entrée pour les Premières Nations qui ont été exclues afin qu’elles puissent revenir, de manière respectueuse, en temps opportun et sans dépendre du bon vouloir d’un premier ministre par l’intermédiaire d’une ministre. Cela vient de mon propre besoin et de mon désir de m’engager auprès de mes ancêtres Nokiiwin et de dire au Sénat que ma culture compte. Les aînés disent que si notre travail vient de l’esprit et du cœur, et s’il est fait de la bonne manière, il comptera. Comme sénateurs, nous nous sommes engagés de la bonne manière.

Les témoignages étaient complexes. Ils montrent clairement pourquoi les sénateurs issus des Premières Nations, Métis et Inuits sont si importants en premier lieu. Nous devons choisir nos actions avec soin, car l’avenir est entre nos mains. Les personnes qui ont été laissées pour compte, certaines pendant toute leur vie, à cause de l’exclusion après la deuxième génération, se demandent si elles peuvent embrasser leur identité et leur culture autochtones, métisses et inuites. Leurs préoccupations tournent autour du sentiment d’appartenance.

Les raisons précises qui nous font vivre dans l’incertitude sont collectives, car elles découlent de l’histoire coloniale qui pèse sur notre existence. Nous avons le droit de savoir qui nous sommes, comme les autres Canadiens, et ce droit s’accompagne de responsabilités.

Comment le gouvernement peut-il parler de l’importance cruciale de la réconciliation alors que l’exclusion après la deuxième génération entraînera à terme un déclin radical de la population, conduisant finalement à son extinction? Cela a été documenté. Comment l’exclusion après la deuxième génération et l’inscription permettront-elles la réconciliation? Dans l’ensemble, il est essentiel pour l’avenir de la population et de l’identité des Premières Nations qu’elles exercent une responsabilité exclusive dans la détermination de leurs citoyens, comme cela a toujours été le cas.

Les Premières Nations doivent participer à la recherche de solutions appropriées. Comment la consultation permettrait-elle de répondre au besoin de solutions stratégiques adaptées aux Premières Nations? Vous laissez les collectivités poursuivre leur décolonisation et leur guérison après des années d’oppression et s’orienter vers l’autodétermination après des années d’assimilation et de génocide.

Il m’arrive encore parfois de vouloir tuer l’Indienne en moi. C’est cela, l’assimilation. C’est ce qui se passe ici.

Je tiens à dire que je souscris pleinement à cet amendement. Je voudrais conclure par ceci : selon les projections de Clatworthy, la population des descendants qui n’auront pas droit au statut d’Indien devrait augmenter en seulement quatre générations. Cela représente 100 ans. Plus de la moitié des membres des Premières Nations s’attendent à ne plus avoir droit au statut dans 75 à 100 ans. Autrement dit, en seulement une génération, la majorité des enfants nés de parents des Premières Nations ne devraient plus avoir droit à l’inscription. D’ici quatre générations, environ 15 nouveau-nés sur 16 ne devraient plus avoir droit à l’inscription.

Quand j’observe cette situation et l’intersectionnalité de ce qui se passe ici, nous reconnaissons que l’expérience est façonnée par une combinaison de notre race, de notre sexe et de notre classe sociale, et nous voyons cet enjeu comme un enjeu pluridimensionnel, en constante évolution, et nous devons nous y attaquer dans les meilleurs délais. Je vous remercie de votre attention.

Le sénateur McNair : Merci, monsieur Prosper, pour tout le travail que vous avez accompli sur ce dossier et cette question importante, ainsi qu’à votre personnel.

Merci au greffier et au personnel du comité pour tout le travail qu’ils ont accompli afin de faire avancer les choses aussi rapidement.

Merci à mes collègues pour leurs commentaires. Je rejoins l’essentiel de ce qui a été dit aujourd’hui.

Mais surtout, je remercie les témoins qui ont comparu devant nous pour leurs témoignages honnêtes et sincères, ce qui est très difficile. Il est incompréhensible que la Loi sur les Indiens et les dispositions discriminatoires qu’elle contient soient encore en vigueur à notre époque.

La sénatrice McCallum a parlé de l’avenir. J’ai trouvé pertinent d’entendre un jeune enfant plus tôt, car c’est la raison pour laquelle nous sommes tous ici. Tout le monde dans cette salle espère que cet enfant vivra un avenir meilleur.

Mon collègue, le sénateur Moreau, a indiqué à juste titre plus tôt aujourd’hui que le projet de loi S-2 avait été rédigé pour donner suite à l’arrêt Nicholas et qu’il avait été rédigé explicitement pour cette raison. Il imposait une date limite fixée au 30 avril 2026, ce dont nous sommes tous conscients.

La ministre Gull-Masty nous a dit que le projet de loi S-2 nous offre la possibilité de rétablir immédiatement le statut de 3 500 personnes. Elle s’est également engagée envers nous à trouver des solutions appropriées et à collaborer avec les partenaires des Premières Nations sur la question de la coupure de la deuxième génération et des seuils prévus à l’article 10, et elle a établi un calendrier, du moins initialement, pour mener à bien ce processus.

La discussion a été difficile. J’ai du mal à accepter que le projet de loi S-2 modifié risque fort de ne pas être adopté par l’autre chambre. J’ai également du mal à accepter que la Michel Callihoo Nation Society appuie l’adoption du projet de loi S-2 dans sa forme actuelle. Beverley Asmann, membre du conseil d’administration de la Callihoo Society, a demandé avec émotion au comité de ne pas rejeter ce projet de loi dans sa forme actuelle. Le projet de loi S-2, dans sa forme actuelle, profite à environ 3 200 membres de la bande de Michel.

Je crois que l’approche la plus prudente consiste à adopter le projet de loi S-2 sans amendement et à travailler avec la ministre pour préparer une loi distincte afin de régler la question de l’exclusion après la deuxième génération et des seuils prévus à l’article 10, ce que tout le monde s’accorde à dire qu’il faut faire le plus rapidement possible.

Je tenais simplement à le préciser. Merci de votre attention.

[Français]

Le sénateur Moreau : Je ne croyais pas intervenir de nouveau ce matin. Cependant, je crois que je dois le faire pour corriger certaines références auxquelles la sénatrice McPhedran a fait allusion dans son intervention, et pour dire finalement que ce qui semble diviser les sénateurs ici, soit la position du gouvernement et celle des sénateurs qui appuient les amendements, n’est pas le fond du dossier.

J’étais présent au comité les deux fois que la ministre est venue témoigner. Elle est la première à reconnaître la discrimination imposée aux peuples autochtones en vertu de la Loi sur les Indiens. Elle est la première à reconnaître l’importance de régler la question de l’exclusion après la deuxième génération. Elle est la première ministre responsable des services aux Autochtones, elle est elle-même issue d’une communauté autochtone et elle vit elle-même dans sa propre famille de la discrimination liée à l’exclusion de la deuxième génération. Son témoignage a été touchant.

Tous les sénateurs conviendront qu’autant les émotions vécues par les témoins qui ont généreusement témoigné devant ce comité que celles qui ont été vécues par la ministre lors de son témoignage sont issues non seulement de la passion à l’égard du sujet dont on parle, mais de l’importance des blessures subies par la situation actuelle, qui est générée par la Loi sur les Indiens. Nous sommes tous d’accord sur cette position.

Le gouvernement n’entend pas nier la question de la discrimination ni les obligations constitutionnelles liées à l’absence de discrimination. La sénatrice McPhedran faisait référence au fait que la Constitution impose une absence de discrimination à tout égard, non seulement à l’égard des peuples autochtones et des générations, mais à tout égard. Le gouvernement partage totalement cette vision.

La difficulté qui nous oppose aujourd’hui n’est pas de régler la question de la deuxième génération, ce à quoi la ministre elle‑même s’est engagée. Ce qui nous oppose aujourd’hui, c’est la façon d’y arriver dans le respect des obligations constitutionnelles et des obligations qui sont faites à la Couronne. Nous sommes une Chambre de second examen attentif. Nous ne pouvons pas nous soustraire à nos propres obligations constitutionnelles ni développer une législation qui, si elle était adoptée, pourrait soulever des questions constitutionnelles qui invalideraient l’objectif ultime que nous poursuivons, soit le plus grand bien des communautés autochtones. C’est précisément ce que les amendements risquent de faire pour plusieurs raisons.

La sénatrice Audette a utilisé l’expression « tactique procédurale ». Avec toute mon amitié pour ma collègue, il ne s’agit pas d’une tactique procédurale. On traite ici d’une obligation constitutionnelle fondamentale, celle de la consultation des Premières Nations qui sont visées par une modification à leurs droits.

J’étais ici lorsque la ministre s’est adressée à notre collègue le sénateur Francis pour lui rappeler que lorsqu’ils étaient leaders autochtones, ils ont tous deux milité en faveur de l’obligation constitutionnelle pour le gouvernement de les consulter. Nous sommes précisément à l’intérieur de cette procédure à l’égard de ce qui touche l’exclusion de la seconde génération. Vous ne souhaitez sûrement pas passer au-delà de ce que les peuples autochtones ont obtenu à la suite de cette longue lutte. Cette partie du témoignage de la ministre doit résonner dans notre mandat de sénateurs, pour faire en sorte que les projets de loi ou les amendements que nous soutenons s’inscrivent dans les obligations auxquelles le gouvernement s’est astreint et auxquelles la Cour suprême astreint le gouvernement : l’obligation de consulter. Il ne s’agit pas simplement de dire : « Voici ce que nous proposons. » La ministre a été très claire là‑dessus : l’obligation de consulter vise à obtenir des Premières Nations elles-mêmes les solutions auxquelles elles estiment avoir droit pour régler la discrimination causée par la deuxième génération.

Je conclurai là-dessus. Je ne suis pas de descendance autochtone. Je n’ai pas la prétention d’avoir souffert de la discrimination dont les peuples autochtones continuent de souffrir. Toutefois, je reconnais que l’obligation de corriger ces situations appartient à tous les Canadiens, quelles que soient leurs origines, et que la meilleure des solutions est celle qui non seulement sera acceptée par les peuples autochtones, mais sera dessinée par eux. Ce sera celle qui sera soumise aux obligations constitutionnelles qui en assureront la validité lorsque la sanction royale sera accordée au projet de loi.

La seule chose qui nous sépare ici est de se poser cette question : est-ce que nos obligations constitutionnelles incluent également le respect de l’obligation de consulter? Cela ne va pas à l’encontre des amendements que le sénateur Prosper a éloquemment et brillamment rédigés. Cela va tout simplement à l’encontre de notre obligation — et je reprends l’expression de la sénatrice McCallum — de faire les choses dans un ordre convenable à l’égard des droits des Autochtones et à l’égard des obligations que nous impose la Constitution, tant à la Chambre des communes qu’ici même au Sénat. Je dis cela avec le plus grand respect pour les arguments apportés par l’ensemble de mes collègues. Je le dis dans l’espoir que nous trouverons des solutions pour régler également la question de la seconde génération, ce qui n’est pas l’objectif du projet de loi S-2, un projet de loi qui, par ailleurs, dans sa forme actuelle, a reçu l’appui d’un grand nombre de témoins qui ont été entendus ici.

[Traduction]

La sénatrice Pate : Merci à mes collègues et merci, sénateur McNair, d’avoir remercié tous les fonctionnaires, notre personnel et tous ceux qui ont travaillé sur ce dossier.

Je voudrais revenir sur certaines des dernières remarques. Ce sera peut-être un peu répétitif. Je m’en excuse auprès de mes collègues et de nos auditeurs, mais beaucoup d’entre nous ont déjà emprunté cette voie.

À mon entrée au Sénat, nous examinions un projet de loi très similaire à celui-ci, dans lequel le gouvernement de l’époque s’engageait à éliminer toute discrimination fondée sur le sexe dans la Loi sur les Indiens, et nous avions confiance dans ce processus. Il s’est avéré que les négociations n’ont pas abouti à ce résultat.

En ce qui concerne les prestations d’invalidité, beaucoup d’entre vous se souviendront d’un engagement similaire pris par le gouvernement de l’époque, par la première ministre responsable des personnes handicapées qui avait elle-même un handicap et qui s’était engagée à le faire. Aucun d’entre nous n’a remis en question son intégrité, son honnêteté, sa volonté de le faire, mais peu de temps après avoir instauré une prestation insuffisante, elle a été démise de ses fonctions.

Nous avons exprimé la même préoccupation. J’ai personnellement exprimé la même préoccupation en privé et en public à la ministre Gull-Masty. J’ai le plus grand respect pour elle. Je ne remets pas en question son intégrité, sa volonté, son engagement à supprimer la discrimination dans la Loi sur les Indiens. Cependant, rien ne garantit qu’elle sera la ministre qui pourra remplir cette obligation.

À mon humble avis, cela ne devrait en aucun cas être considéré comme une remise en cause de l’intégrité de la ministre, mais plutôt comme un examen de notre responsabilité de faire respecter la Constitution. À mon humble avis, nous ne pouvons être responsables de la poursuite de la discrimination qui, nous le savons, existe dans la Loi sur les Indiens et qui se poursuivra si nous adoptons ce projet de loi tel qu’il est rédigé actuellement. Comme sénateurs, nous avons l’obligation de défendre les intérêts de ceux qui ne sont pas représentés par des élus, parfois appelés les « enjeux de minorités ». À mon avis, c’est clairement l’un de ces moments où nous devons nous lever pour soutenir ces groupes.

Nous avons entendu parler de la consultation. Cela m’a semblé incohérent. J’ai posé des questions à ce sujet lors de notre dernière réunion avec la ministre. On nous a dit à un moment donné qu’elle avait commencé, puis à un autre moment qu’elle était en cours ou qu’elle aurait lieu à l’avenir.

Le devoir de consultation est le devoir de consulter sur la manière de procéder, et non sur l’opportunité de le faire. Nous parlons d’un amendement qui stipule que la discrimination doit cesser. La consultation peut porter sur la manière dont cela se produit, mais l’obligation de consulter ne concerne pas la question de savoir si la Charte, du point de vue des intérêts en matière d’égalité, doit être respectée. C’est là le cœur de cet amendement.

Je nous encourage à ne pas renoncer à notre responsabilité de représenter les intérêts des minorités, à ne pas renoncer à notre responsabilité de respecter la Charte, et à continuer d’exprimer dans toutes nos communications notre soutien à l’intention et à la bonne foi du gouvernement, mais à fixer une limite en disant « ça suffit ». Je pense qu’il s’agirait du cinquième projet de loi, si nous l’adoptions, qui permettrait à la discrimination de se poursuivre. Je pense que nous devons dire : « Ça suffit, pas en notre nom ».

Je tiens à féliciter mes collègues pour le travail qu’ils ont accompli dans le cadre du rapport intitulé C’est assez. Si nous avons publié un rapport — et je dis « nous », même si je ne faisais pas partie du comité à l’époque —, mais après avoir publié ce rapport, si nous ne nous levons pas maintenant pour appuyer l’amendement proposé par le sénateur Prosper, j’estime que nous renonçons à nos responsabilités et nous ne faisons pas notre travail.

Merci beaucoup, madame la présidente.

La sénatrice Audette : J’ai une question à poser soit à la représentante du gouvernement, soit à mon collègue, le sénateur Moreau.

D’après ce que je comprends, nous proposons des amendements, qui sont ensuite transmis à l’autre Chambre, où ils font l’objet d’un examen approfondi. Nous verrons ensuite s’ils sont adoptés ou non, pourvu que nous fassions notre travail et que nous respections tous le délai imparti. Jusqu’à présent, nous avons réussi à respecter le délai, avec ou sans amendement.

Nous sommes capables de le faire. Ce n’est pas le premier projet de loi que nous adoptons ici avec des délais, mais il est très important pour moi que les gens comprennent à quel point nous sommes fiers qu’une toute première personne issue des Premières Nations soit ministre des Services aux Autochtones du Canada. Je souligne également que la ministre parle trois langues.

C’était formidable pour beaucoup d’entre nous, car depuis 1975 — je ne connais pas la date exacte du traité moderne. Cela fait 40 ans avec la Convention de la Baie-James, ils ont cette règle du parent unique pour leur nation. C’était donc pour nous, elle sait ce qui est bon ou non ou ce qui devrait être amélioré si nous apportons des amendements.

Je dois préciser que cela se produit déjà depuis plusieurs décennies dans sa nation, la règle du parent unique, c’est très important.

Pour moi, pourquoi soudainement? Parce que j’ai le statut d’Innue, et mon statut a changé plusieurs fois à cause des amendements. Soudainement, nous avons ce message, le devoir de consulter, mais le projet de loi C-5 a été imposé. Je veux simplement comprendre. Donc, à partir de maintenant, ma nation signalera toujours ce devoir de consultation pour tout projet de loi. Je ne veux pas être hors sujet, mais je veux simplement comprendre.

Pourquoi ne pouvons-nous pas faire exactement ce que la sénatrice Pate vient de dire? Nous proposons ces amendements, et la façon dont la nation les mettra en œuvre, certains sont prêts, d’autres verront, etc., nous pourrons alors travailler sur le comment. Par contre, le devoir de consultation, pour moi, soudainement, pourquoi est-ce toujours sur nos épaules? Je suis épuisée. Et je suis la première sénatrice innue, soit dit en passant, avec amour.

La vice-présidente : Merci, sénatrice Audette.

Lori Doran, directrice générale, Direction générale des affaires individuelles, Secteur des services aux individus, Services aux Autochtones Canada : Merci pour cette question.

Je voudrais revenir au rapport de la représentante spéciale de la ministre. Dans son rapport, après avoir examiné les inégalités dans les dispositions relatives à l’inscription et à l’appartenance, elle a clairement indiqué qu’il n’y avait pas de solution unique. La règle du parent unique est l’une des nombreuses possibilités.

Elle a recommandé de mener une vaste consultation afin de déterminer la meilleure solution au problème de l’exclusion après la deuxième génération. C’est donc ce que nous nous sommes engagés à faire dans le processus de consultation actuel.

Ce processus a été conçu et élaboré conjointement, et il a débuté par un appel lancé aux groupes intéressés afin qu’ils nous proposent des solutions. Il ne s’agissait donc pas d’une consultation visant à déterminer s’il fallait ou non agir, mais plutôt comment agir. Ce processus est en cours, et nous attendons les rapports le mois prochain.

La deuxième étape de ce processus consistait à examiner les propositions et à évaluer leur viabilité juridique. Il s’agit donc d’un processus en plusieurs étapes.

La sénatrice Audette : Comme vous le savez, hier, nous nous demandions si nous allions encore avoir un gouvernement, après deux votes. C’est pourquoi il est si urgent pour nous d’adopter ces amendements. Si l’environnement politique est fragile dans l’autre Chambre, cela ne nous empêche pas de nous nourrir de la force, du message ou de la position qui ont été exprimés au cours du processus qui a été lancé.

Je pense donc que nous pouvons combiner cela avec l’amendement que j’ai lu. Je vous remercie.

La sénatrice McCallum : En ce qui concerne la discrimination fondée sur la race en vertu de l’article 15 du projet de loi S-2, dans l’affaire Nicholas c. Canada, une décision rendue en première instance par la Cour suprême de la Colombie-Britannique, le Canada a concédé que les parties contestées de l’article 6(1) de la Loi sur les Indiens portaient atteinte de manière injustifiée aux droits garantis par l’article 15 de la Charte, car elles établissaient une discrimination fondée sur la race ou l’origine ethnique en limitant la capacité des descendants des personnes émancipées à transmettre à leurs enfants le droit de s’inscrire en vertu de la Loi sur les Indiens. Pour prouver qu’il y a discrimination contraire à l’article 15, il faut généralement prouver l’existence d’un traitement différentiel fondé sur un motif protégé, tel que la race, et que la loi ou la mesure renforce, perpétue ou aggrave le désavantage.

Dans son mémoire dans l’affaire Nicholas, le Canada a concédé que le critère en deux étapes prévu au paragraphe 15(1) de la Charte prouvait à la fois que l’article 6 crée une distinction fondée sur la race ou l’origine ethnique et que l’article 6 refuse l’avantage de l’inscription d’une manière qui renforce le désavantage et est donc discriminatoire.

La Cour suprême de la Colombie-Britannique a statué que les dispositions de la Loi sur les Indiens qui refusaient le statut aux personnes dont les parents avaient renoncé à leur statut et aux avantages qui y sont associés violaient les droits des plaignants en vertu de l’article 15 de la Charte, et elle a donné au gouvernement canadien jusqu’à avril 2026 pour modifier la Loi sur les Indiens afin de la rendre conforme à la Charte pour les plaignants dans l’affaire Nicholas.

Les plaignants dans l’affaire Nicholas sont des personnes ayant au moins un ancêtre qui a été émancipé en vertu de la Loi sur les Indiens par suite de la demande d’émancipation de cet ancêtre.

À l’alinéa 42f), le Canada a reconnu que la Loi sur les Indiens prévoit actuellement d’autres formes d’émancipation, qui peuvent également être prises en considération dans le cadre de modifications législatives. C’est ce que nous faisons ici.

La vice-présidente : Merci, sénatrice McCallum. Cela conclut ma liste d’intervenants. Je vois que le sénateur Prosper souhaite prendre la parole à nouveau, ainsi que la sénatrice Sorensen. Je tiens à ce que vous ayez tous l’occasion de vous exprimer. C’est très important pour nous.

La sénatrice Sorensen : Je tiens à remercier les personnes présentes dans la tribune aujourd’hui. Votre présence est utile et importante, et nous vous sommes reconnaissants d’avoir pris le temps de venir.

Je tiens à remercier également tous les sénateurs qui se sont exprimés avec tant de passion et d’éloquence sur ce sujet, et tout particulièrement le sénateur Prosper pour son engagement et son travail acharné dans ce dossier.

Pour mémoire, j’ai un petit-enfant qui bénéficierait de l’adoption de cet amendement, mais je comprends, d’après plusieurs sources, que je ne suis pas considérée comme étant en conflit d’intérêts. D’après la formation que j’ai reçue, il est toujours bon de le mentionner. Je tiens simplement à souligner que je souscris bien sûr au projet de loi S-2 et à son objectif initial, et que j’appuierai cet amendement.

Le sénateur Prosper : Je remercie mes collègues pour leurs commentaires, leurs points de vue, leurs idées et leur sagesse. Il est certain que, réunis autour de cette table, nous avons la chance d’entendre de nombreux témoignages, provenant de nombreuses personnes issues de communautés et de situations différentes.

Je reviens sans cesse sur ce devoir ou ce privilège particulier que nous avons, comme parlementaires, d’examiner ce que nous avons entendu, de réfléchir mûrement et de nous engager au moment opportun pour faire ce qui est juste.

Un aîné m’a dit un jour qu’un leader est quelqu’un qui s’engage. Il est certain que lorsque je regarde la tribune ici, je vois des personnes qui se sont engagées, non seulement sur un enjeu depuis un an, mais depuis des décennies, où cela a représenté une situation très difficile. En fait, cela touche au cœur même de ce que nous sommes — comme nous le disons, le peuple L’nu — pour garantir qu’il reste un héritage à nos enfants pour toujours.

Nous connaissons tous les chiffres. Nous avons entendu les chiffres. Nous savons ce que disent les données démographiques. Si nous suivons la règle de la deuxième génération, cela signifie l’extinction au moins législative à travers les lignées de statut des personnes et des nations.

Quand on pense à ce moment, à cette période de l’histoire où nous sommes confrontés à cette question, le problème n’est pas nouveau. Nous le savons tous. Il existe certainement depuis 1985, après l’adoption de la Constitution et de la Charte canadienne des droits et libertés. Je suis sûr que si nous examinions les archives sur l’exclusion après la deuxième génération, nous ne trouverions pas des volumes de documents de consultation. Je pense que le fait de soulever cette question ici comme une obligation stricte de consulter ne rend pas justice à l’importance qu’elle revêt aujourd’hui.

Je renvoie au mémoire de Pamela Palmater, qui mentionne plusieurs documents sur le travail accompli par des personnes et des organisations très engagées sur la question de l’exclusion après la deuxième génération. Je partage l’avis de mes collègues, qui ont tous exprimé leur désir d’obtenir le meilleur résultat possible et leur fierté de voir la ministre être la première ministre autochtone. C’est une étape importante, mais comme la sénatrice Audette l’a dit, nous sommes tous conscients de ce qui s’est passé hier. La marge était très mince.

Si nous n’agissons pas maintenant, combien de temps allons‑nous attendre? Combien de temps nos enfants vont-ils attendre? Combien de temps auront-ils l’occasion d’être fiers de qui ils sont, de garder la tête haute et de dire : « Je suis un L’nu et j’en suis fier. Regardez ma communauté. Regardez ma famille. Voilà qui je suis, un L’nu fier. »

Les chiffres sont là. La liste de la ministre comprend 90 groupes, bandes et organisations, mais en réalité, il y en a 75. Puis, lorsque nous examinons notre liste de témoins, il en manque 28 qui ne sont pas venus témoigner. Nous avons entendu le témoignage de la cheffe Barbara Cote, qui représente 204 Premières Nations en Colombie-Britannique, où l’on souhaite à l’unanimité supprimer l’exclusion après la deuxième génération. Jeannette Corbiere Lavell représente 49 groupes des Premières Nations. Nous avons reçu des lettres de tous les chefs mi’kmaqs de la Nouvelle-Écosse, et la liste est longue.

Il y a un mouvement important et une reconnaissance du fait que ce changement doit avoir lieu, et qu’il doit avoir lieu maintenant. Le glisser sous le tapis d’une consultation et d’une obligation constitutionnelle revient à perdre de vue le fait que cela ne figurait pas dans le projet de loi C-5. Où en parlait-on dans le projet de loi C-49? Je m’en souviendrais, car j’étais là et j’ai soulevé la question. Cela touche au cœur du problème. Ce n’est pas une question anodine.

Je tiens à le souligner, non seulement pour mémoire, mais aussi en reconnaissance de toutes les personnes qui ont comparu devant nous, qui ont pris la parole et qui ont défendu leur peuple. Wela’lioq. Merci.

La vice-présidente : Merci, sénateur Prosper.

Je répète : quelqu’un d’autre souhaite-t-il prendre la parole au sujet de cet amendement?

Comme personne ne souhaite prendre la parole, il est proposé par l’honorable sénateur Prosper que le projet de loi S-2 soit modifié à l’article 4, à la page 2 :

a) par adjonction, après la ligne 29, de ce qui suit :

b) par adjonction, après la ligne 31, de ce qui suit :

c) par adjonction, après la ligne 37, de ce qui suit :

Puis-je être dispensée d’en faire la lecture?

Des voix : Oui.

La vice-présidente : Merci. Vous plaît-il d’adopter la motion d’amendement?

Des voix : D’accord.

La vice-présidente : D’accord?

Le sénateur Prosper : Puis-je demander un vote par appel nominal, s’il vous plaît?

La vice-présidente : Très bien. Honorables sénateurs, une demande de vote par appel nominal a été présentée. Je vais d’abord demander au greffier de nommer tous les sénateurs présents qui ont le droit de voter à ce moment-ci.

Sébastien Payet, greffier du comité : C’est facile aujourd’hui, car je ne vois que des membres à la table. Nous pouvons donc nous dispenser de nommer tous les sénateurs et passer directement au vote. Merci.

La vice-présidente : Si des sénateurs ne veulent pas voter, ils peuvent se retirer de la table maintenant. Le greffier va maintenant nommer les membres du comité. Il commencera par la présidence et nommera ensuite les autres membres du comité en ordre alphabétique.

Les sénateurs doivent exprimer à voix haute s’ils votent en faveur ou non de la motion, ou s’ils souhaitent s’abstenir. Le greffier annoncera ensuite les résultats du vote et la présidence déclarera si la motion est adoptée ou rejetée.

M. Payet : L’honorable sénatrice Greenwood?

La sénatrice Greenwood : Oui.

M. Payet : L’honorable sénatrice Audette?

La sénatrice Audette : Oui

M. Payet : L’honorable sénatrice Clement?

La sénatrice Clement : Oui.

M. Payet : L’honorable sénateur Francis?

Le sénateur Francis : Oui.

M. Payet : L’honorable sénatrice McCallum?

La sénatrice McCallum : Oui.

M. Payet : L’honorable sénateur McNair?

Le sénateur McNair : Non.

M. Payet : L’honorable sénatrice McPhedran?

La sénatrice McPhedran : Oui

M. Payet : L’honorable sénatrice Pate?

La sénatrice Pate : Oui.

M. Payet : L’honorable sénateur Prosper?

Le sénateur Prosper : Oui.

M. Payet : L’honorable sénatrice Sorensen?

La sénatrice Sorensen : Oui.

M. Payet : L’honorable sénateur Tannas?

Le sénateur Tannas : Oui

M. Payet : Pour : 10; contre : 1.

La vice-présidente : Je déclare la motion adoptée. Merci.

Y a-t-il un autre amendement à l’article 4? Je vous remercie.

L’article 4 modifié est-il adopté?

Des voix : D’accord.

La vice-présidente : Adopté tel que modifié. Je remercie les sénateurs.

L’article 5 est-il adopté? Je crois comprendre qu’il y aura un amendement ultérieur à cet article.

Sénateur Prosper, vous avez la parole.

Le sénateur Prosper : Je propose que le projet de loi S-2 soit modifié à l’article 5, à la page 2, par substitution de la ligne 38 par ce qui suit :

5(1) L’alinéa 11(1)d) de la Loi est remplacé par substitution par ce qui suit : d) elle a le droit d’être inscrite en vertu de l’alinéa 6(1)f) et au moins un de ses parents a le droit à ce que son nom soit consigné dans la liste de la bande ou, si le parent est décédé, avait ou aurait eu ce droit à la date de son décès.

(1.1) L’alinéa 11(2)a) de la Loi est abrogé.

(1.2) L’alinéa 11(2)b) de la Loi est remplacé par ce qui suit :

b) elle a le droit d’être inscrite en vertu de l’alinéa 6(1)f) et un de ses parents visés à l’une de ces dispositions a droit à ce que son nom soit consigné dans la liste de bande ou, s’il est décédé, avait ce droit à la date de son décès.

La vice-présidente : Merci, sénateur Prosper.

Vous pouvez commencer le débat. Y a-t-il des questions concernant l’amendement proposé? Non?

N’en voyant aucune, l’honorable sénateur Prosper propose que le projet de loi S-2 soit modifié par substitution à l’article 5, à la page 2, en remplaçant la ligne 38 par ce qui suit : puis-je être dispensé d’en faire la lecture?

Des voix : Oui.

La vice-présidente : Les sénateurs sont-ils d’accord pour adopter la motion d’amendement?

Des voix : D’accord.

La vice-présidente : Je déclare la motion d’amendement adoptée.

L’article 5 modifié est-il adopté?

Des voix : D’accord.

La vice-présidente : Merci, la motion est adoptée.

L’article 6 est-il adopté?

Des voix : D’accord

La vice-présidente : L’article 7 est-il adopté?

Des voix : D’accord.

La vice-présidente : L’article 8 est-il adopté?

Des voix : D’accord.

La vice-présidente : Je crois comprendre qu’il y a un amendement à l’article 9.

Sénateur Prosper, vous avez la parole.

Le sénateur Prosper : Merci, madame la présidente. Je propose que le projet de loi S-2 soit modifié par adjonction à la page 4 en ajoutant ce qui suit après la ligne 23 :

Que le projet de loi S-2 soit modifié à la page 4, par adjonction, après la ligne 23, de ce qui suit :

« 9.1 Il est entendu que, sous réserve de tout retranchement effectué par le registraire en vertu du paragraphe 5(3) de la Loi sur les Indiens, toute personne qui, à l’entrée en vigueur du paragraphe 4(2.2) de la présente loi, était inscrite et avait le droit de l’être en vertu du paragraphe 6(2) de la Loi sur les Indiens est réputée inscrite en vertu de l’alinéa 6(1)f) de cette loi.

9.2 Il est entendu que, pour l’application de l’alinéa 6(1)f) de la Loi sur les Indiens, le registraire est tenu de reconnaître tout droit d’être inscrit qui existait en vertu du paragraphe 6(2) de cette loi à l’entrée en vigueur du paragraphe 4(2.2) de la présente loi. ».

La vice-présidente : C’est à vous, sénateur Prosper.

Y a-t-il des questions ou des commentaires sur cette motion?

Comme il n’y en a pas, l’honorable sénateur Prosper propose que le projet de loi S-2 soit modifié à la page 4 par adjonction de ce qui suit après la ligne 23 — puis-je être dispensé d’en faire la lecture?

Des voix : Oui.

La vice-présidente : Merci. Voulez-vous adopter la motion d’amendement?

Des voix : D’accord.

La vice-présidente : D’accord. Je déclare la motion d’amendement adoptée.

Les nouveaux articles 9.1 et 9.2 sont-ils adoptés?

Des voix : D’accord.

La vice-présidente : La motion est adoptée.

Poursuivons. L’article 10 est-il adopté?

Une voix : Non.

La vice-présidente : Très bien. Rejetée.

Je vous prie de m’excuser, chers collègues. Pouvons-nous revenir à l’article 9? L’article 9 modifié, est-il adopté?

Des voix : D’accord.

La vice-présidente : Merci de votre indulgence.

Poursuivons. L’article 10 est-il adopté?

Des voix : Non.

La vice-présidente : Très bien. Je vous remercie. Mesdames et messieurs les sénateurs, un vote par appel nominal a été demandé. Le greffier va appeler tous les sénateurs présents qui ont le droit de voter. Si un membre ne souhaite pas voter, il peut se retirer de la table. Le greffier va maintenant lire les noms des membres.

M. Payet : L’honorable sénatrice Greenwood? Pour ou contre l’article 10? Juste pour être sûr.

La sénatrice Greenwood : Contre.

[Français]

M. Payet : L’honorable sénatrice Audette?

La sénatrice Audette : Le vote porte sur la suppression de l’article qui nous demande l’absence de responsabilité ou qui nous impose l’absence de responsabilité?

[Traduction]

Nous votons pour supprimer l’article de non-responsabilité?

M. Payet : Oui.

La sénatrice Audette : Je dirais oui. 2025, ah...

Une voix : Vous votez donc contre?

La sénatrice Audette : Non. Merci. Supprimez-la. Oui, qu’elle soit supprimée. Donc...

Une voix : Cela signifie donc un « non » à la suppression.

La sénatrice Audette : D’accord. Non. Entendu.

Une voix : C’est pourquoi je demande des précisions moi aussi.

La sénatrice Audette : D’accord. Ouf. Merci.

M. Payet : La situation est-elle claire pour tous?

Une voix : Et vous?

M. Payet : Je ne pense pas.

L’honorable sénatrice Clement?

La sénatrice Clement : Non.

M. Payet : L’honorable sénateur Francis?

Le sénateur Francis : Non.

M. Payet : L’honorable sénatrice McCallum?

La sénatrice McCallum : Non

M. Payet : L’honorable sénateur McNair?

Le sénateur McNair : Oui.

M. Payet : L’honorable sénatrice McPhedran?

La sénatrice McPhedran : Non.

M. Payet : L’honorable sénatrice Pate?

La sénatrice Pate : Non.

M. Payet : L’honorable sénateur Prosper?

Le sénateur Prosper : Non.

M. Payet : L’honorable sénatrice Sorensen?

La sénatrice Sorensen : Non.

M. Payet : L’honorable sénateur Tannas?

Le sénateur Tannas : Non.

M. Payet : Contre : 10; pour : 1.

La vice-présidente : Je déclare que l’article 10 est rejeté.

L’article 11 est-il adopté?

Des voix : Non.

La vice-présidente : Le greffier va passer à cet article.

M. Payet : L’honorable sénatrice Greenwood?

La sénatrice Greenwood : Non.

M. Payet : L’honorable sénatrice Audette?

La sénatrice Audette : Non.

M. Payet : L’honorable sénatrice Clement?

La sénatrice Clement : Non.

M. Payet : L’honorable sénateur Francis?

Le sénateur Francis : Non.

M. Payet : L’honorable sénatrice McCallum?

La sénatrice McCallum : Non.

M. Payet : L’honorable sénateur McNair?

Le sénateur McNair : Oui.

M. Payet : L’honorable sénatrice McPhedran?

La sénatrice McPhedran : Non.

M. Payet : L’honorable sénatrice Pate?

La sénatrice Pate : Non.

M. Payet : L’honorable sénateur Prosper?

Le sénateur Prosper : Non.

M. Payet : L’honorable sénatrice Sorensen?

La sénatrice Sorensen : Non.

M. Payet : L’honorable sénateur Tannas?

Le sénateur Tannas : Non.

M. Payet : Contre : 10; pour : 1.

La vice-présidente : Je déclare l’article 11 rejeté.

Enchaînons. J’ai cru comprendre que nous avons un autre amendement, proposé par le sénateur Prosper. Vous avez la parole, sénateur Prosper.

Le sénateur Prosper : Merci, madame la présidente. Je propose que :

Que le projet de loi S-2 soit modifié à la page 5, par adjonction, après la ligne 19, de ce qui suit :

« Entrée en vigueur

12 Les paragraphes 4(1.1), (2.1), (2.2), (2.3) et (4) et 5(1) et (1.2) entrent en vigueur six mois après la date de sanction de la présente loi. ».

La vice-présidente : Y a-t-il des questions ou des commentaires? Sénateur Tannas.

Le sénateur Tannas : Je vous remercie. Je souhaite proposer un sous-amendement, qui a fait l’objet de discussions préalables avec plusieurs membres ici présents. Ce sous-amendement vise spécifiquement à substituer les mots « entrent en vigueur 6 mois après la date » par « entrent en vigueur 12 mois après la date ».

Permettez-moi de formuler quelques observations. Je n’étais pas intervenu lors de la présentation de l’amendement initial. Je tiens à exprimer ma profonde fierté d’appartenir à ce comité. Je le répète avec satisfaction, je suis le membre le plus ancien de ce comité, y siégeant depuis 13 ans. Au fil du temps, mes pensées se sont portées vers plusieurs collègues sénateurs qui auraient été fiers, et qui étaient présents au début de mon mandat — le sénateur Watt, le sénateur Sibbeston, l’estimable sénatrice Lovelace Nicholas, la sénatrice Dyck et le sénateur Sinclair. J’ai la conviction qu’ils seraient fiers du travail accompli aujourd’hui par notre comité.

Il fut un temps où une telle avancée n’aurait jamais été envisageable. Ayant vécu cette époque, je sais combien il leur fut pénible de se voir refuser, à maintes reprises, la possibilité d’agir avec justice dans des circonstances qui, fort heureusement, n’ont plus cours aujourd’hui.

J’estime que le délai de six mois est insuffisant pour permettre l’entrée en vigueur de la mesure. Un report à douze mois permettrait de satisfaire en partie à la requête de la ministre Gull-Masty, qui a souligné la nécessité de mener à bien le processus de consultation, comme nous en avons discuté. En effet, la sénatrice Pate, la sénatrice Audette, ainsi qu’un membre de l’administration gouvernementale, ont confirmé que la consultation portait précisément sur les modalités d’application, et non sur le principe même de la mesure.

Lors de la première intervention de la ministre Gull-Masty, j’ai eu le sentiment — sans pouvoir fournir de preuve formelle — qu’un résultat concret serait présenté d’ici 12 mois, soit dans le courant de l’année à venir.

Il me semble juste d’affirmer que ce délai supplémentaire constituerait une forme de reconnaissance du processus de consultation en cours, en permettant à celui-ci d’aboutir et d’avoir un impact effectif. Cependant, cette proposition répond également à l’urgence de la situation. Bien que nous n’ayons pas obtenu de données probantes — nous l’avons entendu verbalement, mais n’avons pas eu accès aux chiffres — nous anticipons une tendance à la baisse imminente concernant le nombre d’Indiens inscrits, corrélée à une augmentation significative — voire une explosion démographique — du nombre d’enfants indiens inscrits qui se trouvent désormais exclus du système.

Cette situation, délibérément conçue et mise en œuvre il y a quarante ans, constitue une véritable bombe à retardement dont les effets se manifestent aujourd’hui, conformément aux intentions initiales. J’estime que nous sommes actuellement confrontés à cette réalisation. Bien qu’il s’agisse d’une question urgente, je suis d’avis que ce modeste sous-amendement, qui introduit un délai supplémentaire de six mois, démontre notre compréhension et notre reconnaissance des activités de consultation actuellement en cours.

Je vous remercie, chers collègues.

La sénatrice Audette : Je remercie le sénateur Tannas. Votre expérience et votre mémoire institutionnelle au sein du Sénat sont précieuses, et je vous en suis très reconnaissante.

Je suis convaincue que vous n’ignorez pas que, par le passé, lors de l’adoption de certaines législations, nous avons parfois inclus un article spécifique pour encadrer la transition. Le projet de loi C-31 en constitue un exemple pertinent. Dans ce contexte, combien de mois avions-nous précisément accordés aux collectivités des Premières Nations pour qu’elles puissent établir leur propre code d’adhésion? Le délai était-il de 12 mois, ou de 18 mois, à l’époque de 1985?

Antoine Csuzdi-Vallée, analyste, Bibliothèque du Parlement, Sénat du Canada : En ce qui concerne le projet de loi C-31, le délai qui avait été alloué était précisément de 24 mois.

La sénatrice Audette : Très bien. Par conséquent, en 1985, nous avons officiellement octroyé, par voie législative, via le projet de loi, le temps requis à une collectivité pour qu’elle puisse établir son propre code d’appartenance. Dans cette optique, un délai de 12 mois, tel que proposé par cet amendement, me semble préférable. Cela représente une période de temps plus étendue. Je relève également, dans le document de consultation, que le ministère s’engage à fournir un appui en matière de statistiques, de recherche, etc., afin d’assister toute collectivité des Premières Nations dans la mise en œuvre de ses propres méthodes de reconnaissance de ses membres.

En conclusion, j’estime que le délai de 12 mois est judicieux et pertinent. J’y souscris pleinement. Je vous remercie pour la sagesse dont vous faites preuve.

La sénatrice McPhedran : J’adresse mes remerciements à l’ensemble des membres du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones pour la bonne foi dont ils ont fait preuve au cours de cette séance. Il est possible que la sénatrice Pate et moi‑même soyons les deuxièmes sénatrices les plus anciennes, après l’honorable sénateur Tannas.

Je souhaitais intervenir brièvement afin d’appuyer l’amendement proposé et de souligner ce que je considère comme un geste de très grande importance, qui témoigne de la bonne foi de ce comité. Ce geste reconnaît la réalité selon laquelle il est presque systématiquement nécessaire de disposer de plus de temps que prévu pour atteindre les objectifs fixés. Il s’agit là d’une réalité opérationnelle inhérente du gouvernement, mais également d’un signe de respect envers la ministre Gull-Masty, manifestant notre volonté de lui accorder toute la latitude nécessaire pour progresser de manière positive.

En conséquence, j’appuierai cet amendement.

La vice-présidente : Je remercie l’honorable sénatrice McPhedran.

Honorables sénateurs, nous allons à présent examiner le sous-amendement. Il est proposé par l’honorable sénateur Tannas, et se formule comme suit :

Que la motion, telle qu’amendée, soit à nouveau amendée à l’article 12, page 5, la ligne 19, en remplaçant le chiffre 6 par le chiffre 12.

Les sénateurs sont-ils favorables à l’adoption du sous-amendement?

Des voix : D’accord.

La vice-présidente : Très bien. Le sous-amendement est adopté.

La motion modifiée est-elle adoptée?

Des voix : D’accord.

La vice-présidente : L’amendement est adopté.

Le nouvel article 12 est-il adopté?

Des voix : D’accord.

La vice-présidente : D’accord. L’article 12 est adopté.

Je crois comprendre que nous avons un autre amendement de la part de la sénatrice McPhedran.

La sénatrice McPhedran : Je vous remercie. Je suis pleinement satisfaite des progrès et des résultats que nous avons obtenus au cours de cette séance. Par conséquent, je retire l’amendement que j’avais proposé.

La vice-présidente : Le comité accepte le retrait de l’amendement proposé par l’honorable sénatrice McPhedran. Je vous en remercie.

Le titre est-il adopté?

Des voix : D’accord.

La vice-présidente : Très bien. Le titre est adopté.

Le projet de loi modifié est-il adopté?

Des voix : D’accord.

La vice-présidente : Le projet de loi modifié est adopté.

Est-il convenu que le légiste et le conseiller parlementaire soient autorisés à apporter toutes les modifications techniques, grammaticales ou autres modifications non substantielles qui seraient rendues nécessaires par suite des amendements adoptés par le comité, et ce dans les deux langues officielles, y compris la mise à jour des renvois et la renumérotation des dispositions?

Des voix : D’accord.

La vice-présidente : Il en est ainsi décidé.

Le comité souhaite-t-il envisager l’ajout d’observations au rapport? Oui.

Je constate qu’il est presque 11 heures. Nous sommes contraints d’ajourner la séance. Nous examinerons les observations lors de notre prochaine réunion, prévue mercredi, si cela vous convient.

La sénatrice McPhedran : J’étais sur le point de demander, sénateur Francis, si les observations nous avaient été transmises à tous. Ont-elles été distribuées?

Le sénateur Francis : Non, elles ne l’ont pas été.

La sénatrice McPhedran : Nous devons donc patienter.

Le sénateur Francis : Nous procéderons à cet examen lors de la prochaine réunion.

La sénatrice McPhedran : Merci.

La vice-présidente : Je remercie les honorables sénateurs pour leur travail.

(La séance est levée.)

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