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BANC - Comité permanent

Banques, commerce et économie


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES BANQUES, DU COMMERCE ET DE L’ÉCONOMIE

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le jeudi 25 septembre 2025

Le Comité sénatorial permanent des banques, du commerce et de l’économie se réunit aujourd’hui, à 10 h 31 (HE), pour étudier le projet de loi S-1001, Loi autorisant la Gore Mutual Insurance Company à demander sa prorogation en tant que personne morale régie par les lois de la province de Québec; et à huis clos, pour l’étude d’un projet d’ordre du jour (travaux futurs).

Le sénateur Clément Gignac (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Honorables sénateurs, je m’appelle Clément Gignac, sénateur du Québec et président du Comité permanent des banques, du commerce et de l’économie.

Je tiens à souhaiter la bienvenue aux gens qui sont ici et à tous ceux qui nous regardent aujourd’hui.

Avant de commencer, je vous invite à prendre connaissance des cartes placées sur les tables dans la salle de comité pour connaître les lignes directrices visant à prévenir les incidents liés au retour de son.

Veuillez garder les oreillettes à l’écart de tous les microphones en tout temps. Ne touchez pas aux microphones. Leur activation et leur désactivation seront contrôlées par l’opérateur de console. Finalement, évitez de manipuler votre oreillette lorsque le microphone est activé. L’oreillette doit rester sur l’oreille ou être déposée sur l’autocollant prévu à cet effet à chaque siège.

Merci pour votre coopération.

Je demanderais à mes collègues de se présenter.

[Traduction]

Le sénateur Varone : Sénateur Toni Varone, de l’Ontario.

[Français]

Le sénateur Dalphond : Pierre J. Dalphond, du Québec, division de Lorimier.

[Traduction]

Le sénateur Fridhandler : Sénateur Daryl Fridhandler, de l’Alberta.

[Français]

La sénatrice Henkel : Danièle Henkel, d’Alma, au Québec.

[Traduction]

Le sénateur Yussuff : Sénateur Yussuff, de l’Ontario.

La sénatrice McBean : Sénatrice McBean, de Toronto.

Le sénateur C. Deacon : Ravi de vous voir. Colin Deacon, de la Nouvelle-Écosse.

La sénatrice Wallin : Nous nous présentons aux témoins, n’est-ce pas? Je m’appelle Pamela Wallin. Je suis sénatrice de la Saskatchewan. Je suis ravie de vous rencontrer et je vous souhaite la bienvenue.

La sénatrice Martin : Yonah Martin, de la Colombie-Britannique.

[Français]

Le président : Pour les gens qui suivent nos travaux, vous constaterez que nous avons beaucoup de nouveaux visages avec cette nouvelle session, mais aussi qu’il y a un grand absent parmi nous : notre ami l’honorable sénateur Paul J. Massicotte.

Permettez-moi de prendre un instant pour souligner avec gratitude sa contribution exceptionnelle au sein du Comité sénatorial permanent des banques, du commerce et de l’économie.

Depuis l’automne 2003, le sénateur Massicotte a contribué à de nombreux rapports et il a enrichi nos travaux grâce à sa rigueur, sa vision et son engagement constant. Ses analyses et son sens du dialogue ont laissé une marque sur ce comité.

Au nom du comité et en mon nom personnel, je tiens à vous remercier, cher ami Paul, pour toutes ces années de service exemplaire et pour votre apport inestimable à nos débats. Je vous remercie, Paul.

Nous allons entamer l’examen du projet de loi S-1001, Loi autorisant la Gore Mutual Insurance Company à demander sa prorogation en tant que personne morale régie par les lois de la province de Québec.

J’invite le parrain du projet de loi, l’honorable sénateur Tony Loffreda, à nous présenter le projet de loi S-1001.

L’honorable Tony Loffreda, parrain du projet de loi : C’est toujours un honneur de travailler avec vous tous. J’en suis à ma septième année au comité.

[Traduction]

C’est un réel privilège et un honneur de travailler avec vous tous. Je tiens également à féliciter et à remercier le sénateur Massicotte. Il nous manquera beaucoup. Je le remercie en mon nom personnel pour ses nombreuses contributions et ses nombreuses années au Sénat canadien.

[Français]

Monsieur le président, honorables sénateurs, merci au comité de nous accueillir aujourd’hui et de nous permettre de prioriser le projet de loi S-1001, Loi autorisant la Gore Mutual Insurance Company à demander sa prorogation en tant que personne morale régie par les lois de la province de Québec, aussi tôt dans notre session parlementaire.

[Traduction]

Le temps est un facteur essentiel. En matière de fusions, il existe une incertitude chez les assurés, chez les employés et sur les marchés. Il est donc très important que cette question soit étudiée rapidement. Chaque projet de loi mérite d’être examiné en profondeur, je vous remercie donc pour votre diligence.

[Français]

En mon nom et au nom de nos amis chez Beneva et Gore Mutual Insurance, nous vous en remercions.

[Traduction]

En tant que parrain du projet de loi S-1001, j’aimerais faire quelques brèves remarques avant de céder la parole à nos experts et témoins, MM. Parkinson et Taylor de Gore Mutual, ainsi que MM. Chalifoux et Bellavance de Beneva.

Les sénateurs se souviendront que j’ai présenté ce projet de loi le 3 juin et que j’ai prononcé mon discours en deuxième lecture le 10 juin. Le lendemain, le sénateur Carignan, qui a généreusement accepté d’être le porte-parole désigné, a pris la parole pour appuyer le projet de loi, et nous l’avons rapidement renvoyé à votre comité.

Comme je l’ai mentionné en juin, la mutuelle d’assurance fédérale Gore Mutual cherche à obtenir l’approbation du Parlement pour fusionner avec la compagnie québécoise Beneva. Il s’agit d’un projet de loi privé du Sénat, qui se distingue des projets de loi publics du Sénat en ce sens qu’il découle d’une pétition présentée par un groupe ou un individu particulier qui demande l’autorisation législative pour une mesure particulière. Il est important de faire cette distinction. Dans le cas présent, on demande au Parlement d’autoriser la fusion entre deux mutuelles d’assurance canadiennes bien établies et très respectées.

Avec la collaboration des sénateurs et des députés de la Chambre des communes, nous espérons que le projet de loi S-1001 pourra progresser facilement, sans éviter aucun examen nécessaire, et recevoir la sanction royale au cours du mois prochain. Cela permettrait à l’Assemblée nationale du Québec d’entreprendre son propre processus législatif avant la période des Fêtes. C’est important, car ce projet de loi doit y être présenté, et c’est pourquoi il ne faut pas tarder. C’est une étape nécessaire pour officialiser la fusion.

J’ai rencontré MM. Parkinson, Taylor et Bellavance pour la première fois à Ottawa en mars. Nous avons eu une conversation sérieuse sur les raisons qui motivent la fusion, son importance stratégique et les avantages qu’elle apporterait, non seulement aux entreprises et à leurs employés, mais surtout à leurs membres, à leurs futurs clients et aux collectivités qu’elles desservent. Leur passion et leur clarté m’ont convaincu qu’il s’agit d’une initiative responsable et porteuse d’avenir, et je n’ai pas hésité à accepter de parrainer ce projet de loi. Je suis persuadé qu’ils seront tout aussi convaincants aujourd’hui.

Une fois encore, je vous remercie de vous pencher rapidement et avec diligence sur ce projet de loi. Sur ce, je cède la parole à nos experts et aux cadres supérieurs de Beneva et Gore. Comme vous le savez tous, mon bureau et moi-même sommes toujours disposés à répondre à vos questions. Comme je le dis toujours et je le répète maintenant ici, je suis très fier de mon bureau qui cumule près d’un siècle d’expérience. Si l’on additionne les années d’expérience de mon directeur des affaires parlementaires, de mon adjointe exécutive et les quelques années que j’ai moi-même, on arrive à près d’un siècle. Nous sommes toujours disposés à répondre à vos questions, alors n’hésitez pas. Toutes les questions sont pertinentes. Merci.

Le président : Merci, monsieur le sénateur. C’est très impressionnant.

Avant de passer aux questions, nous allons entendre les autres témoins. Nous sommes ravis d’accueillir M. Neil Parkinson, président du conseil d’administration, et M. Andy Taylor, président et chef de la direction, de la Gore Mutual Insurance Company.

[Français]

Nous avons également parmi nous Jean-François Chalifoux, chef de la direction, et Me Pierre Marc Bellavance, vice-président exécutif et leader, Services juridiques et corporatifs, de Beneva.

Messieurs, je vous remercie d’avoir accepté notre invitation et je vous souhaite la bienvenue au comité. Je crois comprendre que vous avez préparé des remarques liminaires communes. Nous avons prévu 15 minutes pour vos quatre présentations. À la suite de vos témoignages, les sénateurs pourront poser des questions.

[Traduction]

Neil Parkinson, président du conseil d’administration, Gore Mutual Insurance Company : Honorables sénateurs, avant de débuter, permettez-moi de vous remercier de nous accueillir. J’aimerais plus particulièrement remercier les honorables sénateurs Clément Gignac et Toni Varone, ainsi que l’honorable sénateur Tony Loffreda qui a accepté de parrainer le projet de loi. J’aimerais aussi remercier l’honorable sénateur Claude Carignan, qui a accepté d’être porte-parole de l’opposition, ainsi que tous ceux parmi vous qui ont permis à ce dossier de cheminer aussi promptement.

Je tiens à mentionner, par ailleurs, que Mme Connie Cody, députée conservatrice de Cambridge, a accepté avec enthousiasme de parrainer notre projet de loi à la Chambre des communes.

Je m’appelle Neil Parkinson. Je suis président du conseil d’administration de Gore Mutual. Le conseil d’administration appuie l’adoption du projet de loi S-1001, Loi autorisant la Gore Mutual Insurance Company à demander sa prorogation en tant que personne morale régie par les lois de la province de Québec ainsi que le projet de fusion, et estime que celle-ci offrira un traitement juste et équitable à tous les assurés de Gore Mutual.

En fait, nos membres ont d’ailleurs approuvé la fusion avec une très grande majorité, soit 94,6 %, lors de l’assemblée annuelle tenue en avril dernier. Ils rejoindront les membres de Beneva en tant que membres à part entière de l’entité fusionnée, et auront l’opportunité de participer à sa gouvernance.

L’avenir s’annonce prometteur pour nos membres, nos assurés et nos employés, et nous nous réjouissons à l’idée d’unir nos forces à celles de Beneva et de poursuivre ensemble le développement de la plus grande mutuelle d’assurance au Canada.

Je voudrais maintenant vous présenter Andy Taylor, président de Gore Mutual.

Andy Taylor, président et chef de la direction, Gore Mutual Insurance Company : Bonjour à tous, et merci encore de nous consacrer votre temps ce matin.

Gore Mutual trouve ses origines en 1839, lorsqu’elle a été fondée à Brantford, en Ontario, sous le nom de Gore District Mutual Fire Insurance Company. Aujourd’hui, la société est la plus ancienne mutuelle d’assurance de dommages au pays, avec des bureaux à Cambridge, Toronto et Vancouver. Elle offre des produits d’assurance compétitifs par l’intermédiaire de courtiers.

Avec plus de 180 ans d’histoire, la société a grandi et s’est adaptée au rythme du pays, surmontant des défis tels que les guerres, les crises financières et la fréquence accrue des catastrophes météorologiques, tout en maintenant une tradition d’aide aux personnes au moment où elles en ont le plus besoin.

Au 31 décembre 2024, Gore Mutual comptait près de 700 millions de dollars en primes, plus de 1 milliard de dollars d’actifs et 380 millions de dollars de valeur comptable totale, et un résultat global total de 18 millions de dollars.

Sous la marque Beneva, Gore Mutual pourra perpétuer son héritage tout en maintenant ses liens historiques importants à Cambridge et son engagement communautaire. La fusion nous permettra d’accélérer notre croissance et de favoriser l’avenir à long terme de notre organisation grâce à notre taille combinée, à notre diversification et à notre accès au capital. Elle nous permettra d’offrir encore plus de produits et de rester compétitifs dans le marché de l’assurance de dommages en pleine consolidation.

J’ai maintenant le plaisir de céder la parole à Jean-François Chalifoux, président et chef de la direction de Beneva.

[Français]

Jean-François Chalifoux, chef de la direction, Beneva : Née du regroupement de La Capitale et de SSQ Assurance en 2020, Beneva est maintenant la plus importante mutuelle d’assurance au Canada avec plus de 3,5 millions de membres.

Beneva se positionne comme un acteur majeur du secteur de l’assurance et des services financiers en offrant une gamme complète de produits d’assurance vie et santé, d’assurance collective, d’assurance de dommages ainsi que de produits d’épargne et d’investissement.

Au 31 décembre 2024, Beneva disposait d’un actif de 27 milliards de dollars et de 4,2 milliards de dollars de capitaux propres totaux, ainsi que d’un résultat net consolidé de 589 millions de dollars pour 2024.

J’aimerais souligner qu’il s’agit d’une union entre deux sociétés mutuelles de compétence différente et que, dans le contexte de l’appel des gouvernements visant à accroître les échanges commerciaux interprovinciaux au pays, notre regroupement représente un bel exemple de renforcement de tels échanges.

Unir nos forces avec Gore Mutual améliorera aussi la capacité des deux entités à se développer, à croître, à innover et à rester résilientes dans un marché des plus concurrentiels et dans un contexte de risques de plus en plus complexes.

La réussite de la fusion proposée entre Beneva et Gore Mutual dépend de l’adoption d’un projet de loi d’intérêt privé fédéral, ainsi que d’un projet de loi d’intérêt privé provincial par la suite.

Mon collègue Pierre Marc Bellavance, vice-président exécutif et leader, Services juridiques et corporatifs, vous présentera le contenu de ce projet de loi non controversé.

[Traduction]

Pierre Marc Bellavance, vice-président exécutif et leader, Services juridiques et corporatifs, Beneva : Le projet de loi S-1001 par lequel Gore Mutual demande de modifier son statut de société à charte fédérale afin qu’elle devienne une société d’assurances provinciale est crucial pour notre fusion avec Gore

Tel que mentionné dans le préambule du projet de loi S-1001, il n’existe aucune disposition législative autorisant une compagnie d’assurance constituée en vertu des lois du Canada à demander à être prorogée en tant que personne morale régie par les lois d’une province. Cette autorisation fait partie de la première étape d’une série de quatre étapes clés qui permettront de réaliser la transaction.

La première étape consiste en la prorogation de Gore Mutual en vertu des lois du Québec.

La deuxième étape consiste à transformer Gore Mutual en deux entités : une personne morale mutuelle de gestion qui accueillera les membres de Gore et une société d’assurance sous participation mutuelle qui poursuivra les activités d’assurance de Gore.

La troisième étape consiste en la fusion de la personne morale mutuelle de gestion Gore avec Mutuelle Beneva, qui est également une personne morale mutuelle de gestion.

La dernière étape consiste en la fusion des activités d’assurance de Gore avec celles d’Unica, filiale en propriété exclusive de Beneva qui offre des produits d’assurance automobile et de biens aux particuliers et aux entreprises par l’intermédiaire de courtiers indépendants en Ontario.

Pour plus de clarté, nous vous avons fourni un tableau illustrant le déroulement de ces étapes.

Je souhaite également mentionner que ce projet de loi ne crée pas de précédent. En fait, depuis 1987, nous avons dénombré huit autres projets similaires, lesquels ont tous requis l’adoption d’une loi d’intérêt privé. Le plus récent date de 2016 et impliquait La Capitale sécurité financière, compagnie d’assurance, qui s’est prorogée en vertu des lois du Québec.

Pour terminer, j’ajoute que l’annonce de la fusion a été bien accueillie par le secteur de l’assurance. Il est également important de noter que nous avons reçu une lettre de non‑objection du Bureau du surintendant des institutions financières, le BSIF, et de l’Autorité des marchés financiers, l’AMF, du Québec, qui sera le nouvel organisme de réglementation de la société et qui appuie le regroupement. Des copies de leurs lettres d’appui ont déjà été transmises au président du comité.

Sur ce, nous vous remercions à nouveau pour le temps que vous consacrez à ce projet de loi, qui constitue une étape charnière de notre projet de fusion et sommes prêts à répondre à vos questions.

[Français]

Le président : Merci, messieurs. Je répète à mes collègues que nous avions prévu une période de 90 minutes. Il nous reste donc 70 minutes pour poser des questions. Je vais y aller dans le sens de l’horloge pour l’ordre des questions, en commençant par notre vice-président, le sénateur Varone.

[Traduction]

Le sénateur Varone : J’ai une question. J’espère que vous pourrez m’aider à mieux comprendre. Je vais poser la question à M. Chalifoux. La fusion entre La Capitale et SSQ Assurance qui a donné naissance à Beneva s’est déroulée au Québec et n’a pas suivi le même processus législatif que celui qui s’applique à la fusion dont il est question ici. Pouvez-vous m’expliquer pourquoi? Monsieur Bellavance, vous avez mentionné le fait qu’il s’agissait d’une société constituée en vertu de la loi fédérale et qu’elle doit maintenant devenir une société provinciale. Pouvez-vous expliquer tout cela?

M. Chalifoux : Cela tient à la taille des deux organisations. Beneva est actuellement 10 fois plus grande que Gore Mutual. Il est préférable d’opérer sous un seul régime réglementaire, et il est beaucoup plus simple pour nous de passer au régime où résident actuellement la plupart de nos membres. C’est l’une des raisons. Il existe également des particularités propres à la législation du Québec, sur lesquelles je laisserai M. Bellavance s’exprimer, qui justifient le transfert et le changement du statut fédéral de Gore Mutual vers le régime du Québec.

Me Bellavance : Il existe une différence importante entre ce que nous avons fait en 2020 et ce que nous faisons maintenant, car en 2020, il s’agissait d’une fusion entre deux entités québécoises. C’est différent de ce qui se passe aujourd’hui. Nous devons transférer une société mutuelle d’assurance fédérale vers les lois du Québec. C’est différent de ce que nous avons fait en 2020, mais nous avons fait presque la même chose en 2016 avec une société fédérale. Ce n’était pas une mutuelle. C’était une compagnie d’assurance et nous avons dû la transférer à Québec.

Nous avons fait cela pour simplifier les choses, car il est plus facile de traiter avec un seul organisme de réglementation plutôt qu’avec deux. Le Bureau du surintendant des institutions financières et l’Autorité des marchés financiers sont deux organismes très compétents et efficaces. Nous entretenons de bonnes relations avec eux. Ils travaillent bien avec nous. La coopération est excellente avec les deux organismes.

Voilà la réponse à votre question. Il y a une différence entre ce que nous avons fait en 2020 et ce que nous faisons aujourd’hui. Aujourd’hui, nous passons de la réglementation fédérale à la réglementation provinciale. En 2020, cela ne concernait que le Québec, et nous avons dû nous adresser à l’Assemblée nationale du Québec pour modifier les lois privées nous régissant et fusionner les deux entités à ce moment-là, mais il s’agissait de deux sociétés mutuelles basées au Québec.

[Français]

Le président : Sénateur Dalphond, avez-vous des questions? Vous disposez d’environ cinq minutes.

Le sénateur Dalphond : Bienvenue au Sénat. Puisque j’ai déjà procédé à des fusions de compagnies d’assurance, à des mutualisations, j’aurai quelques questions précises à poser qui sont un peu techniques.

La première est la suivante : Unica Insurance est-elle une compagnie d’assurance gérée en vertu de la loi du Québec ou de l’Ontario?

Me Bellavance : Elle est gérée en vertu des lois du Québec, pour la même raison que ce que je disais plus tôt en réponse au sénateur Varone. À une certaine époque, nous avons décidé d’avoir toutes les mêmes entités sous le même régulateur, en vertu de la même loi, et Unica Insurance, qui était une compagnie provinciale, en est un autre exemple.

Le sénateur Dalphond : C’était York.

Me Bellavance : York Fire & Casualty Insurance Company, exactement. Je vois que vous êtes bien informé. À ce moment-là, nous avons décidé de la ramener au Québec pour le même motif que j’ai mentionné au sénateur Varone. Alors oui, c’est une entreprise...

Le sénateur Dalphond : Je vous interromps, parce que le temps file. Si je comprends bien, Unica ne fait affaire qu’en Ontario?

Me Bellavance : Oui.

Le sénateur Dalphond : C’est une compagnie d’assurance qui vend des produits d’assurance par l’entremise de courtiers indépendants. Avec la fusion entre Unica Insurance et la Gore Mutual Insurance Company, vous allez faire affaire en Ontario, parce que la compagnie Gore Mutual fait essentiellement affaire en Ontario, mais aussi à Vancouver et dans l’Ouest canadien.

Me Bellavance : Oui.

Le sénateur Dalphond : Donc, toutes les opérations de la nouvelle compagnie d’assurance Unica se feront à l’extérieur du Québec?

Me Bellavance : Oui tout à fait, par l’entremise de courtiers, comme vous l’avez mentionné. C’est différent de notre entreprise au Québec, Beneva Assurances, qui fait ce qu’on appelle de la vente directe. La vente se fait au sein de la compagnie même, Beneva. Nous avons deux différents réseaux de distribution dans ce secteur.

Le sénateur Dalphond : Unica Insurance ne vend pas de la mutualisation, elle vend de l’assurance standard.

Me Bellavance : Oui.

Le sénateur Dalphond : Et les mutualistes actuels qui sont dans la compagnie Gore Mutual vont se retrouver dans la mutuelle Beneva. Est-ce bien le cas?

Me Bellavance : Tout à fait. Ils seront situés en haut de la pyramide, si je peux m’exprimer ainsi, puisque vous n’avez pas d’organigramme devant vous. En haut de la pyramide, on a la mutuelle, évidemment, qui est une corporation mutuelle de gestion et qui est spécifique au Québec. M. Chalifoux y a fait référence brièvement tout à l’heure. Au Québec, nous avons un régime particulier à cet égard. Nous avons trois types de mutuelles, ce qui diffère de la loi fédérale.

Nous avons le type de mutuelle holding. Une mutuelle holding, c’est différent et c’est ce que nous avons chez Beneva.

Le sénateur Dalphond : Ils vont se retrouver dans la mutuelle holding?

Me Bellavance : Ils vont se retrouver dans la mutuelle holding, dans celle du haut, comme tous les autres membres assurés par les entreprises.

Le sénateur Dalphond : Automatiquement?

Me Bellavance : Oui, effectivement, avec la fusion ils vont devenir membres.

Le sénateur Dalphond : Et ce sera une mutuelle pour une police d’assurance, peu importe sa valeur?

Me Bellavance : C’est-à-dire qu’ils vont être membres de la mutuelle de gestion à la tête du groupe, comme les autres membres, notamment pour la nomination des administrateurs et pour les états financiers. Les grandes questions sont débattues à la mutuelle, mais maintenant, cette mutuelle n’émet pas de police d’assurance. C’est la grande distinction, monsieur le sénateur.

Le sénateur Dalphond : Cela devient des actionnaires uniquement.

Me Bellavance : Cela devient des membres qu’on pourrait qualifier, entre guillemets, d’« actionnaires ».

M. Chalifoux : Je préfère le terme « copropriétaires ».

Me Bellavance : Ce sont des copropriétaires. C’est mieux, d’ailleurs.

Le sénateur Dalphond : Oui. Ce sont des membres, des copropriétaires.

Me Bellavance : Des membres, effectivement. Vous avez bien compris.

Le sénateur Dalphond : Et pourquoi quitte-t-on le système fédéral pour le système provincial? Quels sont les avantages? Je comprends que c’est plus facile à gérer, mais il n’est pas impossible d’avoir une filiale qui est fédérale. Quels sont les avantages que le régime québécois offre par rapport au régime fédéral et qui le rendent plus intéressant?

Me Bellavance : Premièrement, je pourrais répondre à votre question en affirmant qu’à mon avis, les deux systèmes sont très similaires, hormis quelques distinctions sur le plan des investissements potentiels qui ne sont pas majeures. Ce n’est pas un élément qui aurait un effet sur une décision finale.

Sur le plan de la gouvernance également, la composition des membres de comité est un peu différente. Cependant, au-delà du fait que les deux régulateurs sont sophistiqués et très bons, de prime abord il n’y a pas nécessairement d’avantages ou de désavantages. L’avantage d’avoir un seul régulateur en matière de report, c’est que c’est beaucoup plus simple pour un grand groupe comme le nôtre.

Nous avons cependant une spécificité au Québec qui n’existe pas dans la loi fédérale, celle que je vous ai mentionnée tout à l’heure, soit les corporations mutuelles de gestion. Pourquoi quitter le fédéral pour aller au Québec? Parce que le régime québécois a sa spécificité qui fait en sorte que c’était pour nous la meilleure solution, bien sûr.

On ne pourrait pas faire l’inverse aussi facilement, parce que le régime n’est pas le même à l’échelle fédérale par rapport au type de mutuelle; c’est là l’élément fondamental qu’il faut bien comprendre.

À la mutuelle Beneva, nous ne sommes pas un manufacturier de polices d’assurance. Nous sommes une mutuelle holding qui détient des sociétés d’assurance, ce qui lui permet, dans le modèle québécois, d’avoir accès à du capital, à de l’investissement. C’est un élément fondamental de l’équation. C’est pour cela que ce n’est pas nécessaire pour nous d’envisager d’autres voies que celle de se regrouper, parce que nous sommes capables d’aller chercher du capital dans notre façon de travailler avec la loi au Québec, qui est différente de la loi fédérale.

[Traduction]

Le sénateur Fridhandler : Je voudrais simplement clarifier ce que je crois être notre rôle actuel dans le cadre des travaux du comité. L’article 1 du projet de loi S-1001 est très précis et stipule que, malgré une disposition de la Loi sur les sociétés d’assurances, la société peut demander sa prorogation en vertu des lois du Québec. Nous ne sommes pas ici pour évaluer la fusion; nous sommes simplement ici pour décider si nous allons permettre à la Gore Mutual Company de poursuivre ses activités sous le régime québécois. Si nous devions évaluer la fusion, il faudrait plusieurs jours pour entendre tous les témoins. Je pense que c’est une distraction, et cela pourrait influencer votre perspective.

Lorsqu’on évalue la prorogation d’une société d’une loi ou d’un régime à un autre, on demande généralement une comparaison entre les droits prévus par la loi A que l’on quitte et la loi B à laquelle on passe. C’est une pratique courante. Dans sa circulaire d’avril, la Gore Mutual Company a présenté ce qu’elle a appelé un résumé comparatif des droits des sociétés entre la Loi sur les sociétés d’assurances du Canada et le projet de loi post-fusion, c’est-à-dire la loi provinciale à laquelle l’entreprise sera désormais soumise. Je pense que ces facteurs sont essentiels, même si d’autres questions peuvent entrer en jeu si on dit : « Oui, très bien, vous me montrez ces différences, mais je continue de penser que la fusion est une bonne idée. » Je pense que nous devons restreindre le champ d’études. Pour être tout à fait transparent, j’ai rencontré les témoins hier soir pour passer en revue le contenu de la circulaire, leur faire part de certaines de mes préoccupations et en discuter afin de ne prendre personne au dépourvu aujourd’hui.

Dans l’annexe C de leur circulaire d’avril, qui m’a été fournie, on peut mettre en parallèle les éléments comparatifs mis en évidence et d’autres enjeux qui ne figurent pas dans ce qui a été soumis au vote des titulaires de police. Je voudrais d’abord souligner qu’à ma connaissance — et j’invite nos témoins à me corriger si j’ai tort —, rien ne garantit que la nouvelle société, une fois constituée, sera tenue de communiquer avec ses assurés dans la langue de leur choix en leur qualité d’actionnaires — non pas en tant qu’assurés, mais lorsqu’ils votent sur des questions relatives à la société. Ni la loi québécoise ni les statuts constitutifs de la société fusionnée n’exigent que les documents soient fournis en anglais. Ils ne pourraient être publiés qu’en français, si l’entreprise en décidait ainsi. Dans la pratique, ils pourraient dire que cela n’est pas nécessaire, mais si vous vous engagez dans une bataille avec la direction, comme dans certains dossiers semblables, le conseil d’administration prendra tous les moyens pour gagner.

Je veux souligner quelques autres différences entre les deux statuts juridiques. Dans la situation actuelle, il n’y a aucune restriction quant au lieu de résidence des administrateurs. Lorsque Gore poursuivra ses activités au sein de l’entité fusionnée, la majorité des administrateurs devront résider au Québec. À l’heure actuelle, neuf des dix administrateurs de Gore résident en Ontario et l’autre est en Colombie-Britannique. Je vous soumets simplement cette information pour que vous y réfléchissiez.

Lors des assemblées des souscripteurs ou des actionnaires, si vous préférez, le système d’attribution des votes est différent. En général, un assuré de Gore dispose à l’heure actuelle d’une voix à l’assemblée, quel que soit le nombre de polices auxquelles il a souscrit. Dans ce nouveau système, qui s’aligne sur celui de Beneva — bien que je ne sois pas un expert de la loi québécoise —, on permet aux souscripteurs d’accepter et de désigner des délégués qui participent ensuite au vote. Les droits de vote des assurés seraient ainsi édulcorés par rapport à ce que l’on connaît actuellement.

Il y a d’autres distinctions mineures, mais à mon avis, ce sont là les éléments importants à prendre en considération lorsqu’on s’interroge sur les conséquences pour les titulaires de police de Gore si cette entreprise peut poursuivre ses activités au Québec. La transaction n’est pas structurée. On ne nous demande pas de les assujettir à la loi fédérale en les affranchissant de la loi québécoise. Je comprends qu’il s’agit d’une proposition commerciale. Je ne me prononce pas sur sa viabilité.

Je souhaitais saisir mes collègues de certaines questions qui ont retenu mon attention lors de l’examen des documents et qui, selon moi, sont importantes dans le cadre de notre étude du projet de loi et de l’article 1, qui est la disposition...

Le président : Merci, sénateur. Je pense que nous nous rendons bien compte que nous disposons d’une grande expertise autour de cette table. Au moins trois sujets de réflexion ont été mis de l’avant par notre collègue, et je vais laisser les témoins répondre à chacune de ces préoccupations.

M. Parkinson : Merci. J’aimerais commencer par remercier également le sénateur Fridhandler de nous avoir présenté hier un bref aperçu de ses questions. Cela nous a été très utile, et nous lui en sommes très reconnaissants, tout comme pour la discussion éclairée que nous avons ainsi pu avoir. Je voudrais simplement répondre à chacun des trois points, si vous me le permettez.

Parlons d’abord de la langue française. Si vous regardez ma biographie, vous verrez que j’ai travaillé dans le secteur des assurances en tant que consultant, vérificateur et conseiller auprès du surintendant des institutions financières pendant quatre décennies avant de prendre ma retraite, si je puis dire — ma femme met toujours ce mot entre guillemets. Je n’ai jamais vu de dispositions relatives à la langue de communication dans les statuts d’une société. Cela ne veut pas dire qu’elles n’existent pas. Je ne les ai simplement jamais vues.

Il est important de noter que, dans ce cas précis, Beneva, même avant cette fusion, et depuis sa création, je crois, a toujours fourni à ses membres toutes ses communications et tous ses rapports annuels en anglais et en français. Même si elle exerce principalement ses activités au Québec, rien ne laisse présager qu’elle y changera quoi que ce soit. C’est possible, je suppose, mais cela irait à l’encontre d’une approche de gestion sensée visant à attirer de nombreux nouveaux membres et clients qui souhaiteraient sans doute communiquer en anglais. Il est peu probable, à mon avis, que l’on commence à ne recevoir que des communications en français. Cela dit, je reconnais que cette affirmation est factuellement correcte.

Je suis moi-même actionnaire de plusieurs sociétés, dont la Banque Nationale. J’ai aussi vu les communications de Desjardins. Vous pouvez également les recevoir en anglais. À ma connaissance, cela ne figure pas dans les statuts de ces sociétés. Vous avez tout à fait raison de dire qu’il n’y a pas de garantie explicite, mais je ne peux pas engager une société à modifier ses statuts. De toute manière, cela repose généralement sur le vote des membres, et je ne pense pas qu’il y ait une telle intention. J’estime que c’est une observation fondée sur des faits, mais je peux seulement dire que l’intention claire est de continuer à communiquer avec tous nos souscripteurs dans la langue de leur choix.

Je dois aussi vous dire un mot de la manière dont le conseil d’administration de la société mutuelle va fonctionner. Nous allons mettre en place un système d’interprétation simultanée, un peu comme celui que vous avez ici. Ainsi, les gens pourront s’exprimer aussi bien en anglais qu’en français. Cela se fera à tous les niveaux de la hiérarchie, mais je ne m’étendrai pas davantage sur ce sujet.

Je pourrais peut-être passer à la question du lieu de résidence des administrateurs. Il est tout à fait normal qu’il y ait des différences. Les sociétés fédérales canadiennes ont une exigence de résidence au Canada, ce qui n’est pas surprenant, et le Québec a ses propres règles. Il y a eu un changement dans la loi québécoise au cours des derniers mois, et Pierre Marc Bellavance pourrait peut-être nous éclairer à ce sujet. Nous devons désormais avoir une majorité de résidants québécois aux plus hauts échelons de la société.

L’entité Gore Mutual, qui continuera d’être dirigée par une majorité d’administrateurs nommés par Gore pendant une période de cinq ans, n’est pas soumise à cette exigence. Le conseil sera composé d’un tiers de résidants du Québec, ce qui signifie que nous aurons environ cinq personnes issues de l’ancien conseil d’administration de Gore et quatre personnes nommées par Beneva. Au sein de la Gore Insurance Company, nous continuerons probablement d’avoir une majorité de personnes résidant hors du Québec, mais nous nous limiterons tout de même à cinq personnes.

Troisièmement, la question du vote et des délégués est vraiment intéressante, car, d’après mon expérience, dans une société mutuelle, comme dans beaucoup d’organisations du même type, il peut être difficile d’obtenir chaque année un engagement important et d’inciter beaucoup de gens à voter. Lors de nos assemblées générales annuelles, nous avions besoin d’environ 400 personnes pour atteindre le quorum, si je me souviens bien. Soit dit en passant quelque 1 400 personnes ont participé au vote au sujet de cette transaction, ce qui est deux ou trois fois plus que d’habitude. Il n’en demeure pas moins qu’il est difficile d’obtenir un taux d’engagement élevé dans une organisation mutuelle.

Nous avons été très intéressés par le processus de délégation mis en place par Beneva, car il semble permettre d’obtenir un meilleur engagement de la part des membres que celui auquel nous parvenons dans le cadre d’une société mutuelle de type classique. Je pense que toutes les mutuelles avec lesquelles j’ai discuté ont adopté le même système, ainsi que la plupart des coopératives, etc.

Je reconnais tout à fait que les commentaires du sénateur Fridhandler sont bel et bien fondés. Il y a effectivement une différence, mais en examinant la question et en divulguant dans notre circulaire d’information cette distinction dans le processus de gouvernance, nous n’avons certainement pas essayé de la cacher. Qui plus est, nous en avons assurément aussi parlé lors de nos assemblées publiques et de nos discussions préalables à l’assemblée annuelle. Notre opinion en tant que conseil d’administration, et je pense qu’elle est soutenue par le vote massif des membres, est que nous demeurons, tout bien considéré, dans une bonne position du point de vue de la gouvernance. Mais encore une fois, je suis vraiment reconnaissant au sénateur Fridhandler pour ses commentaires à ce sujet, et je me ferai un plaisir d’assurer un éventuel suivi.

Me Bellavance : Les lois québécoises — tant la loi régissant les mutuelles d’assurance que celle sur les services financiers pour les coopératives financières comme Desjardins Québec — interdisent expressément le recours aux procurations. Le cadre de gouvernance de Beneva est conforme à ces restrictions juridiques. L’interdiction vise à renforcer la participation démocratique en encourageant l’engagement direct des membres dans la gouvernance. Elle vise également à prévenir la concentration du contrôle en limitant la capacité d’un groupuscule ou d’un individu à prendre le contrôle d’une mutuelle ou d’une coopérative en ayant recours à la sollicitation de procurations.

Le sénateur Loffreda : Il est très important de comprendre que Gore est une société privée. Le 24 avril 2025, les membres ont approuvé la transaction à une écrasante majorité de 94,6 % des voix, et ce, avec un taux de participation sans précédent. Les membres de Beneva ont également approuvé la transaction lors de leur assemblée annuelle et extraordinaire du 24 avril 2025.

[Français]

Le président : Merci, messieurs, et merci, sénateur Loffreda, pour les précisions supplémentaires. Il s’agissait de sujets importants, donc j’ai alloué un peu plus de temps, parce que ce sont des sujets que notre collègue a examinés de près et qu’ils méritaient des réponses.

La sénatrice Henkel : Bienvenue parmi nous. Je vais poser deux questions l’une après l’autre. Ma première question concerne les PME. Vous savez que les PME représentent 98 % du tissu entrepreneurial canadien. Pourtant, elles continuent de faire face à des difficultés de plusieurs ordres qui mettent en danger leur pérennité et compliquent leur développement. Une bonne part d’entre elles comptent sur leurs partenaires comme les assurances pour leur offrir des solutions adaptées axées sur des besoins réels. Ainsi, les PME font-elles partie de votre cœur de cible? Quels sont les avantages que les PME pourraient trouver dans cette fusion?

Voici ma deuxième question. Dans un monde dans lequel les modalités d’assurance ainsi que les besoins des assurés évoluent constamment, la transparence et la clarté de l’information demeurent essentielles au maintien du lien de confiance entre les assureurs et leur clientèle. À ce titre, pouvez-vous nous indiquer si des changements de politique ou de produits financiers sont prévus dans cette fusion?

M. Chalifoux : En ce qui a trait aux PME, comme clients commerciaux de Beneva, que ce soit en assurance de dommage ou en assurance collective, elles font partie de nos cibles et nous croyons qu’elles seront mieux desservies par une entreprise, une mutuelle forte et résiliente, que par deux assureurs un peu plus vulnérables. La réflexion a été faite et c’est exactement la même toile de fond que lorsqu’on a regroupé La Capitale et SSQ Assurance : l’on croyait alors que nos membres étaient mieux servis.

C’est un peu la même chose, parce qu’on fait beaucoup affaire avec des PME, notamment dans le traitement des demandes d’indemnisation du côté de l’assurance de dommage des entrepreneurs généraux en construction, des entreprises de service après sinistre et des carrossiers que du côté de l’assurance collective avec des entreprises dans le domaine de la santé. On fait énormément affaire avec ces partenaires. Nous croyons que plus Beneva est solide et résiliente — et ce regroupement se fait dans cet esprit —, mieux ces partenariats seront servis.

Me Bellavance : Pour votre deuxième question, je pourrais vous dire que certaines des priorités de Beneva — et cela pourrait le devenir du côté de Gore Mutual — sont la transparence et la simplicité, afin que le consommateur ou le membre comprenne très bien les informations comprises dans leur police d’assurance. Il est évident que nous nous efforçons, dans nos travaux relatifs aux saines pratiques commerciales, de faire en sorte que nos clients sont bien informés. À cet égard, on est déjà à pied d’œuvre dans ce type de travail pour y arriver. Ce n’est pas simple, car les polices d’assurance sont souvent compliquées. Ce n’est pas facile pour le consommateur de s’y retrouver. Mais je tiens à vous rassurer que c’est une grande priorité chez Beneva d’en arriver à un produit simple, clair et transparent et de donner toute l’information aux consommateurs.

La sénatrice Henkel : Merci. Avez-vous des prévisions de changement de produits dans cette fusion? Si oui, lesquels, si vous le savez?

M. Chalifoux : Les contrats actuels des détenteurs de polices seront honorés. Il n’y a pas de changement pour les détenteurs actuels. L’entreprise va continuer d’évoluer, de développer de nouvelles solutions et de nouveaux produits et de mieux servir sa clientèle, mais les détenteurs de polices d’assurance ne seront pas affectés par des changements au chapitre des protections qui leur sont offertes présentement.

La sénatrice Henkel : Pour la durée de leur contrat?

M. Chalifoux : Pour la durée de leur contrat.

Me Bellavance : Il n’y a aucun enjeu à cet égard. Lorsqu’il y a une fusion, la compagnie fusionnée respecte les droits et obligations de l’ancienne société. Il n’y a aucun souci à cet égard.

[Traduction]

M. Parkinson : J’ajouterais qu’il est important de comprendre une chose. Le fait que Gore, en l’espèce, relèvera désormais de la juridiction du Québec ne change rien aux mécanismes de supervision en place et au cadre juridique applicable aux polices d’assurance. Si vous êtes un assuré de l’Alberta, vos polices demeureront régies par le conseil d’assurances de cette province et les règles établies par le gouvernement albertain. Cela ne changera pas, quel que soit le domicile de la société mère. Rien ne change dans les exigences provinciales relatives à la forme que doit prendre le contrat d’assurance et à la conformité des pratiques, comme les exigences en matière de traitement équitable des clients. En outre, cela n’affecte pas la réglementation des tarifs lorsqu’il y en a une. Tous ces éléments relatifs aux contrats d’assurance restent régis par le même cadre.

M. Taylor : Vos commentaires sur les difficultés liées à l’assurance commerciale dans ce secteur sont tout à fait pertinents. Je tiens à préciser dans ce contexte que Gore Mutual et Unica, sont deux sociétés spécialisées dans les PME. Nous nous concentrons sur le segment inférieur du marché. C’est un secteur stratégique dans lequel nous poursuivons notre croissance. Comme nous sommes une entreprise régionale active principalement en Ontario et en Colombie-Britannique, nous devons travailler en partenariat avec des courtiers nationaux qui cherchent à prendre de l’expansion en même temps que nous, et nous n’avons ni les capitaux ni les capacités nécessaires pour le faire. La fusion avec Beneva nous permettra en fait de soutenir davantage les petites entreprises à l’échelle nationale.

Le président : Merci.

Le sénateur Yussuff : J’ai quelques questions pour nos témoins.

Tout d’abord, une fusion a toujours des répercussions sur les personnes qui travaillent au sein des entreprises touchées. Il s’agit ici d’une société basée en Ontario, dans une large mesure, et dont les activités principales s’articulent autour de Brantford. Est-ce que cette fusion va entraîner des pertes d’emploi? Je comprends qu’il s’agira d’une entreprise basée au Québec. Qu’adviendra-t-il des employés et comment seront-ils protégés? Y aura-t-il une réduction des effectifs compte tenu des champs d’action respectifs? Après tout, on fusionne avec une entité plus importante.

M. Taylor : C’est une excellente question, qui me tient particulièrement à cœur.

Lorsque nous évaluons nos options stratégiques et recherchons des partenaires, il faut savoir qu’il est difficile pour une entreprise de taille moyenne de fusionner avec une organisation plus grande. Dans ce genre de situation, on assiste parfois à des fusions qui visent uniquement des gains d’efficience et qui aboutissent à l’intégration de l’entreprise au sein d’une plus grande organisation. Nous sommes très satisfaits de la fusion avec Beneva, car elle nous permet d’accroître notre portée, notre diversification et notre accès au capital, tout en conservant notre identité en tant que filiale distincte et indépendante.

Il s’agit avant tout d’une affaire de croissance. Cette fusion vise à réunir deux mutuelles afin d’en créer une plus forte encore qui prendra de l’expansion à l’échelle nationale, ce qui, selon nous, permettra d’améliorer les perspectives professionnelles de tous nos employés. Nous nous engageons à ne procéder à aucun licenciement. Personne ne sera mis à pied. Bien au contraire, nous pensons que nous allons augmenter nos effectifs, en particulier dans le Sud de l’Ontario, où se trouve notre siège social.

Nous avons pris d’autres mesures pour protéger le patrimoine de notre organisation. Nous disposons d’un campus exceptionnel où se trouve notre siège social à Cambridge, en Ontario. Il est en passe d’être classé site patrimonial. Ce bureau servira de siège social pour la plateforme aux fins de la croissance dans le Canada anglais. Nous sommes engagés envers la communauté dans laquelle nous sommes implantés et nous continuerons d’y être actifs.

Grâce à la fusion avec Unica, nous voyons des possibilités pour nos employés non seulement de progresser au sein de notre petite entité, mais aussi d’accéder éventuellement à de nouveaux débouchés professionnels dans d’autres secteurs du groupe Beneva. C’est donc une très bonne nouvelle, et nous sommes impatients de voir les retombées positives que cela aura. Nos employés ont très bien accueilli cette fusion et sont enthousiastes à l’idée de faire partie de cette aventure. Il n’en reste pas moins que votre question est tout à fait légitime et que nous y avons longuement réfléchi.

Le sénateur Yussuff : J’ai deux questions. La première fait suite à celle soulevée par mon collègue, le sénateur Fridhandler.

Je ne suis pas ici pour débattre des lois linguistiques du Québec. Je suis d’accord avec tous ces arguments liés à l’histoire, au pays et aux mesures prises par le Québec pour protéger son patrimoine et sa langue. Il s’agit essentiellement d’une entreprise ontarienne qui fusionne avec une entreprise québécoise. Comment se fait-il — et c’est une question très délicate — que vous n’offriez aux assurés aucune garantie que vous allez communiquer avec eux dans la langue de leur choix? Parce que ce n’est pas explicite. Je reconnais que la loi québécoise vous oblige à le faire, mais la réalité est que vous étendez maintenant vos activités à l’ensemble du pays. SSQ m’a déjà fourni des produits d’assurance alors que je vivais en Ontario. Je connais toute l’histoire avec la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, ou FTQ, et la promotion de tout cela. Cependant, vous allez vous retrouver avec de nombreux membres qui seront des titulaires de police à l’extérieur du Québec. Je sais bien que vous n’êtes pas assez stupides pour dire à ces gens-là que vous n’allez pas communiquer avec eux dans leur langue, mais pouvez-vous me dire pour quelle raison il n’y a pas dans les documents de fusion une forme quelconque de garantie pour leur indiquer que vous vous engagez à faire en sorte que cela continue d’être le cas dans le contexte de l’intégration de souscripteurs anglophones provenant de l’extérieur du Québec, sans égard à ce que prévoit le régime réglementaire en vigueur?

M. Parkinson : Je vais essayer de vous répondre brièvement. Je vais vous dire franchement que chez Gore, personne n’a pensé à suggérer qu’il devrait y avoir une forme quelconque de garantie, pas plus lors de la rédaction de la circulaire d’information qu’à la faveur de nos discussions avec nos conseillers juridiques.

Le sénateur Yussuff : Mais pourquoi ne l’indiqueriez-vous pas devant le comité aujourd’hui? Cette déclaration serait ainsi consignée au compte-rendu et pourrait servir de preuve pour les titulaires de police.

M. Parkinson : Mais c’était bel et bien notre intention. Vous pouvez dire que c’était un peu naïf de notre part de penser que personne ne soulèverait cette question. En fait, il y a eu 70 votes contre la fusion. Nous ne savons pas exactement quelle était la motivation de ces membres, mais dans les commentaires que nous avions reçus auparavant, personne n’avait soulevé de préoccupations quant à savoir s’il aurait droit à des services ou à des communications en anglais, car bon nombre de ces gens-là ont aussi affaire à des organisations comme Desjardins ou d’autres entreprises ayant leur siège social au Québec et savent que des services en anglais sont offerts. Je pense que ce n’est pas vraiment un sujet de controverse pour la plupart des gens qui ont déjà été confrontés à ce genre de situation, et je dois donc dire que cela ne m’avait pas traversé l’esprit. Je me suis dit que certains pourraient se demander si leur entité n’allait pas être absorbée ou si les emplois à Cambridge ne vont pas disparaître au profit de Québec. C’est pourquoi il n’y a rien d’explicite à ce propos, mais je peux vous dire que nous avons la ferme intention de continuer à communiquer avec les gens dans la langue de leur choix.

M. Chalifoux : J’ajouterais qu’avant la fusion avec Gore Mutual, Beneva offrait déjà des solutions d’assurance à plus d’un demi-million de Canadiens hors de la province de Québec, soit en Ontario, dans l’Ouest canadien et dans les provinces de l’Atlantique, et que nous leur fournissons nos services dans la langue de leur choix, comme nous le faisons pour les membres anglophones de la province de Québec.

Le sénateur Yussuff : J’ai encore une brève question.

Je me préoccupe du sort des titulaires de police. En fin de compte, la fusion c’est votre affaire, car vous devez déterminer dans quelle mesure vous allez en sortir gagnant du point de vue de l’étendue d’action de l’entreprise et du capital auquel elle aura accès. La protection des assurés demeure toutefois fondamentale. Le régime réglementaire peut être similaire dans sa portée, mais qui offre les garanties nécessaires aux souscripteurs en fin de compte? Je présume que c’est l’entité désormais plus grande qui doit s’en charger. Les titulaires de police peuvent-ils être assurés de bénéficier des mêmes garanties que lorsqu’ils étaient chez Gore Mutual?

M. Chalifoux : Oui, certainement, et ce sera encore mieux, car nous répartissons les risques à l’échelle nationale. Nous sommes membres de l’un des plus grands organismes d’indemnisation au Canada.

Le sénateur Yussuff : Je vous remercie.

La sénatrice McBean : En écoutant la question du sénateur Yussuff, je me suis rendu compte que j’aurais dû m’asseoir là‑bas, car sa première et sa troisième questions étaient tout à fait dans mes cordes. Je suis une sénatrice de Toronto et je m’inquiétais pour les travailleurs des collectivités de Toronto et de Kitchener-Waterloo. Je vous remercie de me rassurer. J’avais une question de suivi qui concernait les clients et les titulaires de police, et je vous remercie donc de votre question. C’est tout pour ma part.

Le président : La prochaine fois, je ferai le tour de l’autre côté de la table.

Le sénateur C. Deacon : Je tiens à remercier le sénateur Fridhandler de ses excellentes observations et la sénatrice McBean de ne pas avoir pris ma question.

Ma question n’a rien à voir avec les détails de cette transaction. C’est seulement une question d’ordre général, et je vous prie donc de fournir une réponse très courte. La démutualisation est un enjeu important dans notre pays, car nous perdons un grand nombre de nos sociétés mutuelles d’assurances. Qu’avez-vous appris de cette situation qui pourrait intéresser notre comité dans le cadre de notre examen futur des questions relatives à l’accès au capital? Vous protégez les actifs des petites et moyennes entreprises. Comment des fusions comme celle-ci contribueront-elles à protéger ces actifs ou peut‑être — vous ne voudrez probablement pas répondre — à les compromettre à l’avenir? Cela n’a rien à voir avec l’approbation du projet de loi ou une autre question connexe, mais c’est un sujet de préoccupation au pays.

M. Parkinson : Je ferai un bref commentaire, et l’un de mes collègues souhaitera peut-être intervenir par la suite.

Bien entendu, il y a eu déjà eu quelques démutualisations, et la question de savoir si l’expérience a été positive ou négative dépend du point de vue. Si une personne tire des avantages importants de la démutualisation, comme cela a été le cas pour de nombreux titulaires de police dans l’ancienne société Economical Insurance, c’est formidable.

Il y a probablement — je ne connais pas le nombre exact — une centaine de sociétés mutuelles d’assurances au Canada pour l’assurance multirisques, et peut-être une poignée, c’est-à-dire une dizaine ou une vingtaine tout au plus, pour l’assurance-vie et les prestations connexes. Il y en a tellement que vous vous demandez probablement où elles se trouvent, car il s’agit pour la plupart de petites entreprises communautaires qui peuvent offrir une ou deux...

Le sénateur C. Deacon : Elles sont plus petites.

M. Parkinson : Oui, ce sont de petites sociétés. Il en existe encore quelques-unes dans les Maritimes. Quelques-unes d’entre elles ont fusionné avec d’autres petites sociétés mutuelles d’assurances.

La question de l’accès au capital pose un défi pour ces sociétés. En effet, une petite société spécialisée dans un créneau précis doit s’assurer de conserver ce créneau, et il sera toujours difficile de réaliser les investissements nécessaires à cette fin. Nous pourrions passer beaucoup de temps à discuter des défis liés à la survie de ces petites sociétés.

Dans notre cas, nous avons évalué la situation — je sais que votre question était d’ordre général — et nous avons conclu que Gore est une entreprise de taille moyenne. Elle est peut-être trop grande pour être une petite société, et il lui est donc plus difficile d’occuper un créneau précis, mais elle n’est pas assez grande non plus. Nous pensons donc que la création d’une société mutuelle d’assurances d’envergure nationale nous donnera une plus grande stabilité sur le plan financier et une meilleure reconnaissance de notre marque. Cela profitera probablement aussi au milieu des sociétés mutuelles d’assurances en renforçant sa crédibilité. En tout cas, je l’espère.

Je pense qu’un grand nombre de petites sociétés mutuelles d’assurances continueront à fusionner au fil du temps. Il y a deux ou trois fusions de ce type par année, et je pense que cela se poursuivra pendant un certain temps.

Le sénateur C. Deacon : Vous considérez donc que la fusion des petites sociétés mutuelles est un moyen de maintenir le secteur des sociétés mutuelles d’assurances en lui permettant de réaliser des économies d’échelle.

M. Parkinson : Oui, je pense que c’est tout simplement ce qui se passe. Dans certains cas, ces sociétés ont de la difficulté à recruter un nouveau président parce qu’elles sont trop petites pour attirer des personnes très qualifiées, ce qui représente un problème important. C’est comme le mouvement des coopératives d’épargne et de crédit. Il y en avait probablement des centaines en Ontario, et il reste probablement environ un cinquième de ce nombre en raison des mêmes pressions qui s’exercent depuis les 25 dernières années.

M. Chalifoux : La création de Beneva, en 2020, s’appuyait sur quelques convictions fondamentales, qui sont toujours d’actualité aujourd’hui.

Nous voulions pouvoir investir massivement dans la technologie et la transformation numérique, et aujourd’hui, nous parlons d’intelligence artificielle. Nous avons fait face à une pénurie de main-d’œuvre en 2020, et l’accès à des candidats compétents et spécialisés représente toujours un défi dans notre pays et dans la province de Québec.

Nos membres ont des attentes de plus en plus élevées lorsqu’ils font affaire avec nous. Ils sont plus exigeants qu’il y a 20, 30 ou 40 ans, et nous le constatons chaque jour. Les exigences en matière de conformité ont tendance à augmenter au pays, et même si c’est une bonne chose, cela fait aussi en sorte que les organismes comme le nôtre ont de la difficulté à rester concurrentiels et à investir dans leur avenir. Nous observons également chaque jour qu’à titre de société plus grande et plus diversifiée, nous sommes en mesure d’attirer des candidats spécialisés et d’investir dans ces candidats, leur perfectionnement professionnel et leur poste.

Les raisons qui étaient valables il y a cinq ans le sont encore aujourd’hui. C’est la raison pour laquelle nous sommes d’avis que les sociétés mutuelles d’assurances sont plus fortes lorsqu’elles travaillent ensemble que lorsqu’elles se font concurrence. C’est une conviction que nous avons en commun avec Gore Mutual.

La sénatrice Martin : J’ai quelques questions, même si de nombreuses questions pertinentes ont déjà été posées.

Je suis allée sur vos sites Web et j’ai constaté qu’il était très facile de choisir entre l’anglais et le français selon la province. Il est très facile de s’y retrouver sur les deux sites. J’ai réussi à trouver le communiqué de presse concernant la fusion en cours.

Au début de la semaine, j’ai également entendu parler de la fusion entre Teck et Anglo American et du fait que le siège social restera au Canada, mais pour combien de temps? Dans votre cas, il s’agit de deux entreprises canadiennes situées dans des provinces voisines.

J’ai une question pour M. Taylor ou M. Parkinson. Vous avez la plus ancienne entreprise — fondée en 1839 — et vous avez tout un historique, mais dans le communiqué de presse, on dit ceci : « Beneva et Gore Mutual fusionneront sous la marque Beneva... » Avait-on des préoccupations au sujet de l’historique de l’entreprise? Votre société est 10 fois plus grande que Gore Mutual. J’aimerais donc connaître les préoccupations liées à l’historique et à la marque.

M. Parkinson : Je peux répondre en premier, puis je céderais la parole à M. Taylor.

Dans le cadre des nombreuses fusions qui ont eu lieu dans le secteur des sociétés mutuelles d’assurances ces dernières années, le nom de la plupart des sociétés mutuelles d’assurances indiquait l’origine ou l’emplacement de la société. Il y avait, par exemple, des noms comme North Waterloo Farmers Mutual ou quelque chose de ce genre. Lorsque cette société a fusionné avec une autre entreprise, elle est devenue Heartland Insurance, pour vous donner un bon exemple. Il y a eu un certain nombre de fusions de sociétés de ce type, par exemple Commonwell, qui résulte de la fusion de trois sociétés dont les anciens noms faisaient tous référence à une région donnée.

Je travaille chez Gore Mutual depuis plus de 52 ans — je sais que c’est impossible à croire quand on me regarde — et je ressens moi aussi une certaine émotion face à ce changement de nom. J’ai été surpris qu’un plus grand nombre de titulaires de police n’aient pas soulevé cette question, mais en réalité, c’est l’occasion pour nous de rafraîchir notre marque avec un nom que nous trouvons très attrayant dans les deux langues. Beneva est une très belle marque. Les entreprises les plus prospères maintenant ont des noms qu’elles n’avaient pas il y a 10 ou 15 ans.

La sénatrice Martin : J’aimerais poser une autre question. À titre de titulaire d’une police d’assurance, j’ai observé les changements qui se produisent, et c’est un peu déconcertant pour les titulaires de police. Je vois vos sites Web, mais quels changements le client ordinaire remarquera-t-il? Quels changements seront apportés? Je suppose que les prix, la couverture et le service resteront relativement les mêmes, mais je m’interroge sur l’expérience du client.

M. Taylor : C’est une bonne question. C’est beaucoup plus facile dans notre cas en raison de la façon dont nous réalisons la fusion. En effet, nous demeurons une filiale distincte. Si nous réussissons ce processus, nous conclurons l’affaire le 1er janvier, et la réponse simple est que tous les titulaires de police chez Gore Mutual conserveront leur police Gore Mutual pour l’année complète pendant laquelle nous réaliserons l’intégration. C’est l’année pendant laquelle nous travaillons à la migration de la marque, et il y aura probablement une transition semblable à celle de SSQ et La Capitale, c’est-à-dire qu’il sera indiqué que Gore Mutual et Unica deviendront Beneva. Toutefois, votre référence à votre police de Gore Mutual mutuelle restera la même, tout comme votre tarification. Vous continuerez à faire affaire avec les mêmes personnes. Les répercussions sur les titulaires de police seront donc minimes.

En terminant, pour donner suite aux commentaires de M. Parkinson, nous avons beaucoup réfléchi à la marque. Je n’ai pas 50 ans d’expérience dans l’entreprise, mais j’y travaille depuis 20 ans et j’y suis également très attaché. Nous pensons pouvoir faire les deux. C’est là toute la beauté de la chose. Nous pouvons respecter notre historique de nombreuses façons. Le campus de Cambridge sera rebaptisé le campus Gore Mutual, et nous conservons et célébrons un patrimoine historique qui remonte littéralement aux années 1800. En même temps, nous nous combinons à Beneva et nous adoptons son nom, ce qui nous permettra d’étendre sa portée au reste du Canada. C’est formidable.

Ce qui est fascinant, c’est que Beneva est une nouvelle marque et un mot qui signifie qu’on prend soin des gens. Cela correspond tout à fait à nos valeurs. C’est différent de ce qui se serait passé si nous fusionnions avec une autre entreprise dont la marque aurait pu être perçue de manière négative par bon nombre de nos clients ou employés. Dans ce cas-ci, c’est tout le contraire, car la marque soulève l’enthousiasme. Si nous devons rivaliser à grande échelle — ce qui est le cas — avec les plus grandes entreprises du secteur, il est très avantageux pour nous d’étendre Beneva à l’échelle nationale. Nous pouvons y arriver tout en respectant notre historique et en le célébrant de nombreuses façons.

La sénatrice Martin : Je vous remercie.

[Français]

Le président : Il nous reste environ 25 minutes. Je vais donc utiliser mon privilège de président du comité et vous poser des questions concernant les avantages d’être une mutuelle par rapport à une société incorporée.

Comme vous le savez, j’ai déjà travaillé pour un de vos concurrents, la compagnie Industrielle Alliance, fondée en 1892, qui a choisi de se démutualiser en 2000. Or, vous allez devenir un joueur majeur.

Quels sont les avantages et les inconvénients pour une société comme la vôtre? Avez-vous les outils requis pour œuvrer? Évidemment, votre taille sera importante maintenant.

Pour les gens qui nous regardent, pouvez-vous expliquer la différence entre une mutuelle par rapport à une compagnie pour les clients et les propriétaires de polices d’assurance? Je ne vous demanderai pas d’expliquer pourquoi Industrielle Alliance a choisi de se démutualiser.

M. Chalifoux : C’est une excellente question, sénateur Gignac. Pour nous, c’est clair qu’en 2025, être une mutuelle est un avantage concurrentiel; cela nous distingue dans un environnement concurrentiel où il y a un tas d’entreprises à capital-actions. Cela nous permet d’affirmer hors de tout doute que les humains sont au cœur de nos actions; je le dis avec énormément de conviction et cela ne changera pas.

Nous ne sommes pas motivés par les rendements trimestriels et par le retour à l’actionnaire; ce qui nous motive, c’est ce que nous réalisons pour les gens autour de nous, que ce soit nos partenaires, nos membres, nos employés ou nos partenaires de distribution; c’est vraiment ce qui est central dans une mutuelle.

Une mutuelle, c’est l’économie du partage. Les assureurs ont tous commencé en tant que mutuelle. Ce sont des gens qui s’associaient pour mutualiser les risques. C’est avec cette conviction que Beneva a été fondée en 2020. Dans le cas des entités d’origine, comme dans les années 1940 à Québec, ce sont des employés civiques, des fonctionnaires qui ont fondé La Capitale, qui était à l’époque La Mutuelle des Fonctionnaires, afin que les veuves, lors du décès de leur conjoint travailleur, puissent avoir accès à des fonds pour payer les services funéraires. À l’époque, c’étaient les hommes qui travaillaient et, malheureusement, les veuves et les enfants devaient piger dans le patrimoine familial pour payer les services funéraires.

Du côté de SSQ Assurance, ce sont des travailleurs ouvriers dans la Basse-Ville de Québec qui se sont unis en 1940 pour avoir accès à des soins médicaux et des médicaments parce qu’à l’époque, il n’y avait pas de régime ou de filet social en matière d’assurance maladie au Québec.

Les gens ne voyaient pas le médecin, car ils n’avaient pas les fonds nécessaires. Ils ont décidé de s’entraider. Ces valeurs de partage du risque, elles sont toujours bien vivantes chez Beneva près de 100 ans plus tard. On pense que ces valeurs sont bien ancrées dans notre ADN encore aujourd’hui. Ce ne sont pas des valeurs qui ont été écrites entre 10 cadres dans une réunion au moment de la création de Beneva. Ces valeurs fondamentales viennent de notre riche héritage et de notre ADN mutualiste. Elles sont résolument pertinentes; on croit que les Canadiens méritent d’avoir une alternative forte, solide et mutualiste au Canada.

Le président : Je veux juste m’assurer que ma question ne laisse pas de mauvaise perception. J’ai commencé ma carrière au Mouvement Desjardins et j’ai été le ministre du Développement économique qui était responsable du dossier des mutuelles et des coopératives, qui jouent un rôle important au chapitre du développement économique et social. Merci d’avoir précisé cela. Les gens ne comprennent pas toujours la différence entre les deux.

Le sénateur Dalphond : J’aimerais poursuivre pour que mes collègues le comprennent bien.

[Traduction]

Quelle est la différence avec une compagnie d’assurances qui a des actionnaires? Le fait est que, malgré vos organismes, les propriétaires actuels de Gore deviendront propriétaires de la société mutuelle appelée Beneva, et ce sont eux qui décideront des types de produits, de l’orientation et des politiques adoptés par cette société. Pour devenir membre, il faudra détenir une police d’assurance au sein de la société. Ai-je tort ou ai-je raison? Cela reflète une perspective différente.

Je constate que votre conseil d’administration est composé de nombreux membres qui ont été dirigeants syndicaux et présidents de syndicat dans la fonction publique à Québec, ce qui reflète une perspective différente au sein du conseil d’administration.

J’ai également remarqué que Gore a commandité un sondage en avril dernier et qu’il a été publié. Il a été rendu public parce qu’il fait également partie de l’évaluation des risques. Au-delà des divergences politiques, les Canadiens partagent les mêmes opinions sur le climat et la diversité, l’équité et l’inclusion. Vous avez dit que le sondage révèle que 90 % des répondants, quelle que soit leur affiliation politique, appuient les initiatives en matière de diversité, d’équité et d’inclusion et les politiques climatiques ou qu’ils restent neutres à l’égard de ces initiatives et politiques. Beneva poursuivra-t-elle ces engagements ou sont-ils propres à Gore et seront-ils interrompus? Je ne suis pas sûr que les sociétés d’assurances apportent ce type de contribution.

M. Chalifoux : Beneva a pris des engagements similaires, voire encore plus fermes, en matière de résilience climatique et de principes liés à la diversité, à l’équité et à l’inclusion. Je pense donc que ces initiatives se poursuivront certainement.

Le sénateur Varone : J’aimerais raconter une brève expérience que j’ai vécue en 1995 avec une institution financière, et non avec une société d’assurances. Après la fusion entre TD et Canada Trust, puis, quelques années plus tard, celle entre la Banque Royale et Royal Trust, à titre de client, j’aurais aimé obtenir un meilleur service à la clientèle. Toutefois, les deux entreprises ont échoué dans ce domaine. Quelles mesures prenez-vous pour garantir que votre service à la clientèle reste au même niveau que celui dont profitent actuellement vos clients dans des entités distinctes? Pouvez-vous nous dire ce qui va changer, le cas échéant?

M. Taylor : C’est une excellente question. Je vais y répondre du point de vue de la société Gore.

Nous venions tout juste de réaliser une transformation complète avant la fusion. En effet, en 2020, nous avons entamé un processus visant à nous projeter sur les 10 prochaines années et à moderniser notre entreprise en conséquence. Ainsi, nous avons concentré 10 ans d’investissements en immobilisations sur trois ans, ce que les sociétés par actions ne feraient pas, car elles n’ont pas l’habitude d’adopter une vision à long terme. Nous avons imposé de nombreux changements et perturbations à nos clients et à nos courtiers lors de cette transformation, qui s’est déroulée de 2020 à 2023. Nous avons toutefois appris beaucoup de choses.

Le premier principe de notre programme d’intégration actuel est de protéger l’expérience des clients et des courtiers. Nous ne ménageons donc pas les efforts pour nous assurer de conserver tous nos clients et d’élargir nos activités pendant cette période, car ces transformations sont parfois trop tournées vers l’intérieur et ne tiennent pas compte de ces éléments. Nous mettons donc à profit, dans le cadre de la présente fusion, les leçons tirées de la transformation précédente.

Le fonctionnement de cette fusion est beaucoup moins complexe que celui de la fusion précédente de Beneva. Comme nous demeurerons une filiale distincte et indépendante, il y aura moins de changement pour les titulaires de police. C’est une chose à laquelle nous tenons beaucoup. Je vous remercie de vos commentaires, mais le principe le plus important de notre fusion est de veiller à accorder la priorité à nos clients dans ce processus.

M. Chalifoux : Chez Beneva, nous mesurons continuellement la satisfaction de nos membres. L’une des choses qui nous différencient de nos concurrents, c’est que je m’occupe personnellement des appels de suivi avec chaque membre après un sondage. Les membres de mon équipe de direction font également ce type d’appels. Nous offrons donc cette touche supplémentaire, car nous restons en communication avec nos membres pour comprendre ce qu’ils attendent de nous. Nous nous efforçons d’apporter toutes les améliorations possibles, afin que les clients soient plus satisfaits après avoir effectué des transactions avec nous.

Le sénateur Fridhandler : Je connais mieux le secteur de l’assurance traditionnelle que celui des sociétés mutuelles. Vous pouvez donc m’avertir si ma question est inutile. L’un des problèmes qui se posent, c’est que les sociétés d’assurances fonctionnent avec des fonds de caisse. À titre de renseignement pour mes collègues qui ne sont pas au courant, cela signifie que les sociétés perçoivent les primes, puis les investissent et réalisent des profits jusqu’à ce qu’elles doivent verser des indemnités. Y a-t-il des différences entre le régime réglementaire canadien et le régime réglementaire du Québec, auquel vous serez maintenant soumis, en ce qui concerne ce que vous pouvez faire avec vos fonds de caisse et vos investissements? Je pense que comparativement au reste du pays, une plus grande partie des fonds de caisse doit être investie au Québec.

M. Parkinson : La réponse courte à votre question est non. Le régime de solvabilité et la quasi-totalité des restrictions en matière d’investissement qui existent au fédéral existent également au Québec.

Il ne s’agit pas seulement de savoir quelles sont les règles. Je dois aussi souligner un élément important, à savoir que je considère la qualité de la surveillance et de la réglementation de l’AMF et du BSIF comme équivalentes — et je le dis en tant que professionnel du domaine depuis longtemps. Je ne ferais aucune distinction entre la qualité de la surveillance et de la réglementation des deux organismes. Les règles sont les mêmes. Il faudrait chercher longtemps pour trouver une différence notable dans leurs règles et restrictions en matière d’investissement.

M. Chalifoux : Je dirais que les assurés de Gore Mutual auraient beaucoup à gagner à regrouper leur portefeuille de placements avec un fonds plus vaste pour pouvoir mieux résister aux fluctuations. Le regroupement des deux fonds présenterait des avantages considérables.

Me Bellavance : J’ajouterais que la loi fédérale prévoit des règles plus strictes. Au Québec, l’approche est plus prudente, mais au bout du compte, c’est à peu près la même chose.

[Français]

La sénatrice Henkel : Je vais d’abord faire une déclaration. En tant que Québécoise et femme d’affaires, je dois vous avouer que pour moi, ce projet de loi S-1001 est une étude en soi. Merci de l’avoir soutenu. C’est une première, parce que notre gouvernement souhaite avoir une liberté d’échange de biens et de services à prix compétitifs dans ce grand pays afin de soulever et de relever l’économie.

Je vois ce projet comme un bel exemple, et il ne faut pas sous‑estimer les questions légales, les questions de protection des consommateurs, des assurés. Je dis simplement que c’est, à mon avis, une première qui montre du leadership et est une preuve du potentiel que peut avoir cette nouvelle fusion entre deux entreprises, l’une du côté ontarien et l’autre du Québec. C’est mon commentaire personnel.

Là où je voudrais peut-être rassurer ceux qui nous écoutent et tous ceux qui vont poser une question à un moment donné, c’est en ce qui a trait à la démutualisation. Je trouve extraordinaire que vous soyez des mutuelles et que vous souhaitiez grandir en tant que mutuelles. Je sais que je ne pourrais pas avoir une assurance à 100 % maintenant, mais j’aimerais parler de ce qui me préoccupe. Les démutualisations peuvent arriver, pas toujours par volonté, mais en raison d’une pression.

Avez-vous déjà subi des pressions et avez-vous réussi à les écarter? Vous attendez-vous à subir d’autres pressions et comment vous préparez-vous à les écarter? Merci.

[Traduction]

M. Parkinson : Je peux peut-être commencer par le point de vue de Gore.

Il y a neuf ans, les médias ont beaucoup parlé d’Economical Insurance, l’une des plus grandes mutuelles, qui envisageait de se démutualiser. Le conseil d’administration de Gore a donc mené un vaste examen, avec l’aide de conseillers juridiques en matière d’investissement, afin de déterminer si cela était souhaitable. La conclusion, qui a été communiquée aux membres à l’époque, était que ce n’était pas dans l’intérêt de la société. Nous avons réexaminé la question dans le cadre de notre propre examen stratégique ces deux ou trois dernières années, et nous avons conclu que la situation n’avait pas vraiment changé. Personne n’a exercé de pressions sur nous, mais nous nous attendions à ce que les gens nous demandent, à juste titre, pourquoi nous ne le faisions pas, comme d’autres sociétés. Nous estimions qu’il fallait nous préparer à leur répondre en amont, et c’est ce que nous avons fait. Je ne peux pas vraiment parler des avantages à cela, je les laisserai s’exprimer à ce sujet, mais je peux vous assurer que nous y avons effectivement réfléchi longuement, sans toutefois subir de pressions. Nous n’avons subi de pression d’aucun de nos membres en ce sens, contrairement à Economical, qui a connu quelques remous. Nous n’avons subi aucune pression et n’en subissons toujours pas. En toute honnêteté, le sujet n’a même pas été abordé lorsque nous avons présenté cette transaction à nos membres au printemps dernier.

[Français]

M. Chalifoux : Du côté de Beneva, c’est assez particulier, parce que La Capitale étant issue de l’administration publique et la SSQ Assurance étant issue et soutenue depuis des décennies par les centrales syndicales au Québec, il est clair que pour nous, la question des pressions est davantage de protéger et de faire grandir le mutualisme au Québec et au pays que l’inverse.

C’est la raison pour laquelle on a fait la réflexion chacun de notre côté en 2017, 2018 et 2019; on a choisi de s’unir, parce qu’on pensait qu’une mutuelle plus forte serait plus pérenne. C’est également dans cette perspective que l’on s’associe avec la Gore Mutual Insurance Company aujourd’hui, parce qu’ils partagent cette conviction que le mutualisme peut prendre sa place au pays et qu’on pourra continuer de travailler dans cette veine.

On ne peut pas prévoir tous les scénarios. Est-ce qu’un jour une crise financière forcera des actions différentes? Je ne peux pas le prédire, mais tant qu’on peut être en mesure d’investir et d’offrir des services et des produits de qualité à nos membres, nous sommes engagés à faire grandir le mutualisme.

Le président : Merci, sénatrice Henkel, pour vos questions et vos remarques précédant vos questions. À titre d’ancien ministre du Développement économique, j’ai travaillé avec notre collègue la sénatrice Pupatello, alors qu’elle était ministre du Développement économique et du Commerce, à éliminer les barrières entre les provinces de même que la réglementation et le fardeau administratif. Le fait de voir que deux mutuelles peuvent travailler ensemble et devenir une institution majeure, c’est important pour moi et cela s’inscrit bien dans tout cela. Je souscris à vos commentaires, sénatrice Henkel.

[Traduction]

Le sénateur Yussuff : Très brièvement, la sénatrice Henkel a soulevé une question concernant le commerce interprovincial. Nous entendons souvent les gens se plaindre des obstacles au commerce interprovincial au Canada et des difficultés réglementaires rencontrées, mais dans le contexte de la croissance des mutuelles et des compagnies d’assurances, c’est une bonne nouvelle, car il n’y a pas de conflit majeur au sujet du régime réglementaire — fédéral ou provincial — qui doit être adopté pour permettre la fusion des deux sociétés.

Ensuite, il s’agit de deux sociétés canadiennes qui fusionnent, et non d’une société canadienne et d’une société américaine, ce qui ferait craindre que des capitaux ne quittent le pays.

Je vous remercie d’être ici, je vous remercie de votre travail assidu et, surtout, j’apprécie la franchise de notre conversation.

La sénatrice McBean : Vous avez mentionné à plusieurs reprises aujourd’hui la résilience climatique, et j’aimerais profiter de cette occasion pour vous demander comment cet objectif se traduit pour les assurés et comment vos clients, et non vos membres, sont protégés contre les changements climatiques.

M. Parkinson : Je vais commencer, mais M. Taylor aura sûrement une meilleure réponse à vous donner.

L’une des considérations importantes pour les petites entreprises plus localisées et moins diversifiées, c’est qu’elles peuvent être malchanceuses. Je pense à l’exemple d’une petite entreprise des Maritimes — je ne donnerai pas plus de précisions — qui, lorsqu’un ouragan a frappé la région, a vu toutes ses polices d’assurance-habitation faire l’objet d’une réclamation plus ou moins importante. Devant ce genre de situation, on se dit qu’il n’est pas très avantageux d’être dans le domaine de l’assurance, comme vous pouvez l’imaginer. On peut se protéger un peu en souscrivant une réassurance auprès de grands groupes de réassurance, mais le problème est qu’il y a désormais trois fois en dix ans des tempêtes qui ne se produisaient normalement qu’une fois par siècle, ce qui est problématique.

Les grandes entités très diversifiées, comme Intact Assurance, qui est la plus grande compagnie d’assurance-dommages, en sont un bon exemple. Elles sont très diversifiées. Elles sont confrontées aux mêmes tempêtes, incendies, etc., que nous. La différence, c’est qu’elles sont présentes partout et qu’il y a des régions du pays où il n’y a pas de problème particulier telle ou telle année, ce qui leur permet d’obtenir un rendement plus stable.

L’un des principaux atouts de cette transaction réside dans le fait que Gore bénéficie désormais d’une bien meilleure diversification. Je pense que Beneva bénéficiera également d’une bien meilleure diversification au sein du groupe fusionné. Il s’agit là d’un des principaux facteurs de risque que nous avons déterminés dans l’analyse de notre risque stratégique à long terme. Il serait imprudent de ne pas y remédier, et je pense que c’est ce que nous faisons.

La sénatrice McBean : Merci.

M. Taylor : Si je peux ajouter une chose, cela apporte de la stabilité aux assurés, afin que les marchés ne fluctuent pas trop, ce qui entraînerait une hausse considérable des prix, et je pense que c’est essentiel.

L’autre changement dans le secteur — et je siège à plusieurs conseils d’administration, dont celui de l’Institut de prévention des sinistres catastrophiques et celui de la Société d’indemnisation en matière d’assurances IARD (SIMA), et nous travaillons avec le Bureau d’assurance du Canada, ou BAC, à diverses initiatives générales. En réalité, nous mettons actuellement l’accent sur la résilience et sur la façon dont le secteur de l’assurance peut réellement favoriser la résilience de l’économie canadienne. Comment pouvons-nous construire des maisons qui soient résilientes dès le départ? Il y a des mesures simples à prendre en considération, comme de choisir des bardeaux résistants au vent et un meilleur revêtement extérieur. Ce sont des mesures très simples que nous pouvons prendre pour rendre notre pays beaucoup plus résilient. Comment pouvons-nous mieux reconstruire après un sinistre? Nous envisageons, en cas de sinistre, d’offrir une garantie supplémentaire afin d’offrir des indemnités plus élevées aux assurés qui prennent des mesures pour accroître la résilience de leur maison.

Il existe des moyens pour nous de renforcer la résilience au pays tout en étant un partenaire plus stable comme assureur mutuel, mais je pense que la bataille qui nous attend s’annonce longue et ardue, et qu’il s’agit d’un défi de taille pour l’industrie. Je pense que les mutuelles joueront un rôle clé dans tout cela, car nous avons une vision à long terme. Comme nous sommes présentes au Canada et que nous sommes de plus en plus présentes ailleurs aussi, je pense que nous sommes appelées à jouer un rôle important dans la solution.

M. Chalifoux : J’aimerais ajouter que pour sa part, Beneva est très concentrée au Québec, comme nous l’avons mentionné aujourd’hui, donc 80 % de nos risques sont au Québec. La fusion avec Gore Mutual nous permettra de répartir nos risques à l’échelle du pays, et l’assurance, en quelque sorte, c’est le partage et l’atténuation des risques. Le fait d’être présents dans un plus grand nombre de provinces, d’augmenter la proportion de nos activités en Ontario et dans l’Ouest canadien et d’atteindre un meilleur équilibre entre l’assurance dommages et l’assurance de personnes permettra de mieux protéger nos assurés.

[Français]

Le président : Je vous remercie, parce que ce que vous avez mentionné dans votre dernière réponse, c’est ce qui est le plus important pour la pérennité de Beneva, soit de pouvoir exercer ses activités à travers le Canada, surtout avec les changements climatiques et tout ce qu’on voit actuellement. C’est rassurant.

[Traduction]

Je remercie les témoins. Comme vous le savez, le Sénat est généralement la chambre du second examen objectif, mais cette fois-ci, nous commençons cette étude ici, au Sénat.

[Français]

Vos témoignages seront pris en considération quand ce comité fera rapport sur ce projet de loi. Merci de vous être rendus disponibles pour certains sénateurs qui avaient des questions importantes à poser. Je veux également remercier le parrain du projet de loi, le sénateur Loffreda.

Honorables sénateurs et sénatrices, nous allons maintenant entamer l’étude article par article du projet de loi S-1001, Loi autorisant la Gore Mutual Insurance Company à demander sa prorogation en tant que personne morale régie par les lois de la province de Québec.

Avant de commencer, j’aimerais faire quelques rappels. Si, à un moment ou à un autre, vous ne savez plus où nous en sommes, n’hésitez pas à m’interrompre. En ce qui concerne la procédure, je tiens à rappeler aux sénateurs que lorsque l’on propose plus d’un amendement pour un même article, les amendements doivent être proposés selon l’ordre des lignes du texte à modifier.

[Traduction]

Si un sénateur s’oppose à un article en entier, la procédure normale n’est pas d’adopter une motion pour supprimer l’article au complet, mais plutôt de voter contre l’article en question.

Certains amendements proposés peuvent avoir des conséquences sur d’autres parties du projet de loi. Il serait très utile qu’un sénateur qui propose un amendement indique au comité quels sont les autres articles du projet de loi sur lesquels son amendement pourrait avoir une incidence. Autrement, il pourrait être très difficile pour notre comité de demeurer cohérent dans ses décisions.

[Français]

Puisqu’il n’est pas nécessaire de donner un préavis pour proposer des amendements, il peut évidemment ne pas y avoir eu d’analyse préliminaire pour déterminer ceux qui peuvent avoir des répercussions sur d’autres articles. Si des membres du comité ont une question concernant le processus ou le bien-fondé de quoi que ce soit, ils peuvent soulever un rappel au Règlement. Le comité est maître de ses travaux dans les limites établies par le Sénat, et un sénateur peut interjeter appel d’une décision de la présidence devant le comité en demandant si la décision doit être maintenue.

Enfin, je tiens à rappeler aux sénateurs et sénatrices que s’ils ont le moindre doute quant au résultat d’un vote de vive voix ou à main levée, la façon la plus harmonieuse d’intervenir est de demander un vote par appel nominal, qui aboutira à des résultats clairs. Finalement, les sénateurs doivent savoir qu’en cas d’égalité des voix, la motion sera rejetée.

Avez-vous des questions? Sinon, nous pouvons commencer.

[Traduction]

Je constate qu’il n’y a pas de questions.

Est-il convenu de procéder à l’étude article par article du projet de loi S-1001, Loi autorisant la Gore Mutual Insurance Company à demander sa prorogation en tant que personne morale régie par les lois de la province de Québec?

Des voix : D’accord.

Le président : Êtes-vous d’accord pour suspendre l’adoption du titre?

Des voix : D’accord.

[Français]

Le président : Êtes-vous d’accord pour suspendre l’adoption du préambule?

Des voix : D’accord.

Le président : Adopté.

L’article 1 est-il adopté?

Des voix : D’accord.

Le président : Adopté.

L’article 2 est-il adopté?

Des voix : D’accord.

[Traduction]

Le président : L’article 3 est-il adopté?

Des voix : D’accord.

[Français]

Le président : Est-ce que le préambule est adopté?

Des voix : D’accord.

Le président : Le titre est-il adopté?

Des voix : D’accord.

Le président : Adopté.

Est-ce que le comité aimerait annexer des observations au rapport?

[Traduction]

Je suis désolé. J’ai omis le plus important. Je pense que cela a rendu les représentants de Beneva et de Gore un peu nerveux.

Le projet de loi est-il adopté?

Des voix : D’accord.

Le président : Très bien. Quel soulagement.

[Français]

J’ai bien compris qu’il n’y avait pas d’observations sur le projet de loi? D’accord.

Maintenant, je dois mentionner que je suis un peu nouveau comme président également.

Est-il convenu, chers collègues, que je fasse rapport de ce projet de loi au Sénat dans les deux langues officielles?

Des voix : D’accord.

Le président : Adopté.

Merci beaucoup, honorables sénateurs et sénatrices, de votre patience et de votre indulgence à l’endroit de la présidence, qui est en apprentissage. La barre est très haute en raison de la présidence précédente.

Nous allons suspendre brièvement la réunion puis continuer à huis clos afin de discuter des travaux futurs du comité.

(La séance se poursuit à huis clos.)

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