LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES BANQUES, DU COMMERCE ET DE L’ÉCONOMIE
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le mercredi 1er octobre 2025
Le Comité sénatorial permanent des banques, du commerce et de l’économie se réunit aujourd’hui, à 16 h 15 (HE), pour examiner, afin d’en faire rapport, toute question concernant les banques, le commerce et l’économie en général; et à huis clos, pour étudier un projet d’ordre du jour (travaux futurs).
Le sénateur Clément Gignac (président) occupe le fauteuil.
[Français]
Le président : Honorables sénateurs, je m’appelle Clément Gignac, sénateur du Québec et président du Comité sénatorial permanent des banques, du commerce et de l’économie. Je tiens à souhaiter la bienvenue aux gens qui sont avec nous aujourd’hui ainsi qu’à celles et ceux qui nous écoutent à partir du site Web, sur sencanada.ca.
[Traduction]
Hier était le 30 septembre, la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation. J’espère que tous les membres de ce comité ont pris le temps de s’arrêter, de réfléchir et de commémorer l’histoire douloureuse des pensionnats autochtones au Canada et leurs conséquences dévastatrices pour les générations futures des survivants, de leurs communautés et de leurs familles.
[Français]
J’aimerais commencer cette réunion en reconnaissant que la terre sur laquelle nous nous réunissons est le territoire traditionnel, ancestral et non cédé de la nation algonquine anishinabe.
Avant de continuer, je demande à mes collègues du comité de bien vouloir se présenter.
[Traduction]
Le sénateur Varone : Je suis le sénateur Toni Varone, de l’Ontario.
[Français]
La sénatrice Henkel : Danièle Henkel, du Québec.
[Traduction]
Le sénateur Loffreda : Bienvenue à notre comité. Je suis le sénateur Tony Loffreda, de Montréal, au Québec.
[Français]
La sénatrice Ringuette : Bonjour. Sénatrice Pierrette Ringuette, du Nouveau-Brunswick.
[Traduction]
La sénatrice McBean : Sénatrice Marnie McBean, de l’Ontario.
Le sénateur C. Deacon : Colin Deacon, de la Nouvelle-Écosse.
La sénatrice Wallin : Pamela Wallin, de la province de la Saskatchewan.
[Français]
Le président : Merci, chers collègues. J’aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos invités qui, avec un court préavis, se sont rendus disponibles pour notre réunion. De Logement, Infrastructures et Collectivités Canada, j’aimerais accueillir Paul Halucha, sous-ministre, et Janet Goulding, sous-ministre adjointe principale. Je vous souhaite donc la bienvenue et vous remercie d’avoir accepté notre invitation. Je vous invite à prononcer vos remarques liminaires, après quoi nous vous poserons quelques questions.
[Traduction]
Paul Halucha, sous-ministre, Logement, Infrastructures et Collectivités Canada : Merci, monsieur le président. Je suis accompagné aujourd’hui de Janet Goulding, sous-ministre adjointe principale de la Direction générale du logement et de l’itinérance au sein du ministère.
[Français]
Nous vous remercions de nous donner l’occasion de participer à l’étude menée par le comité sur la crise du logement au Canada et les défis auxquels font face les constructeurs de maisons, en mettant particulièrement l’accent sur les taxes, les frais et les prélèvements gouvernementaux.
[Traduction]
En tant que sous-ministre, j’ai beaucoup de responsabilités à assumer, que ce soit diriger l’élaboration de politiques en matière de logement et d’infrastructure, superviser les investissements fédéraux importants dans les collectivités, ou mettre en place de nouvelles initiatives nationales comme le programme Maisons Canada. Permettez-moi de donner quelques exemples de nos programmes qui pourraient intéresser les membres du Comité dans le contexte de notre comparution d’aujourd’hui sur les questions d’infrastructure et d’itinérance.
Nous avons le Fonds canadien pour les infrastructures liées au logement, le Fonds pour le développement des collectivités du Canada, le Fonds pour le transport en commun du Canada et le programme Vers un chez-soi, ou Reaching Home en anglais.
[Français]
Il s’agit du Programme de lutte contre l’itinérance chez les vétérans et de l’initiative de lutte contre l’itinérance hors refuge et les campements.
[Traduction]
Permettez-moi de vous parler de quelques initiatives qui portent plus particulièrement sur le logement. Comme les sénateurs le savent, la Stratégie nationale sur le logement oriente la réponse du Canada à la crise du logement, un plan décennal de 115 milliards de dollars. Je tiens également à souligner que les mesures prises par le gouvernement fédéral concernant la situation du logement relèvent de plusieurs ministères ayant des rôles distincts. Par exemple, le ministère des Finances du Canada s’occupe de la politique fiscale tandis que la Société canadienne d’hypothèques et de logement est chargée d’administrer de nombreux programmes de logement.
Le 14 septembre, le premier ministre et le ministre Robertson ont lancé le programme Maisons Canada, ou MC. C’est un peu comme un organisme de service spécial au sein du ministère du Logement, de l’Infrastructure et des Collectivités du Canada. À la nouvelle année, il deviendra un organisme fédéral autonome qui relève également du ministre Robertson.
Avec un capital initial de 13 milliards de dollars, MC servira de guichet unique pour la construction de logements abordables à grande échelle, le financement des constructeurs de logements abordables et la modernisation de l’industrie canadienne de la construction résidentielle.
[Français]
Maisons Canada commencera par six terrains publics, à Dartmouth, Longueuil, Ottawa, Toronto, Winnipeg et Edmonton. Bien que nous commencions avec ces six sites, des terrains publics existants de la Société immobilière du Canada pourraient permettre de construire jusqu’à 45 000 logements à travers le pays.
[Traduction]
MC versera également 1 milliard de dollars pour construire des logements de transition et supervisés destinés aux personnes sans abri ou à risque de le devenir, et fournira 700 nouveaux logements en partenariat avec la Société d’habitation du Nunavut. L’organisme supervisera également le Fonds canadien de protection des loyers de 1,5 milliard de dollars, qui vise à préserver les immeubles locatifs abordables qui sont menacés.
Permettez-moi également d’aborder un sujet qui a suscité beaucoup d’intérêt auprès du public, à savoir la Loi sur l’interdiction d’achat d’immeubles résidentiels par des non-Canadiens, ou « l’interdiction d’achat par des acheteurs étrangers ». Cette loi a été adoptée parce qu’on s’inquiétait de plus en plus que les investissements spéculatifs internationaux contribuent à la flambée des prix, en particulier dans les marchés urbains à forte demande. L’objectif de cette loi est de diminuer la pression sur l’offre de logements pour les Canadiens.
Deux ans et demi après son introduction, le moment est venu d’évaluer l’effet de l’interdiction d’achat par des étrangers afin de s’assurer qu’elle atteint ses objectifs. Comme vous le savez, la loi a été prolongée jusqu’en 2027. Nous continuons de collaborer avec l’industrie et les parties prenantes afin d’évaluer si cette approche continue de favoriser l’abordabilité du logement, compte tenu des frais d’aménagement.
[Français]
L’autre enjeu clé, c’est le coût de construction des logements. Une chose que nous entendons régulièrement de la part du secteur privé et de nos partenaires en matière de logement concerne les frais d’aménagements municipaux.
Pour être clair, ces frais ne sont pas établis par le gouvernement fédéral. Ils ne sont pas non plus appliqués de façon uniforme à travers le pays.
Comme vous le savez, dans son plus récent discours du Trône, le gouvernement s’est engagé à réduire de moitié ses frais pour tous les logements multifamiliaux.
Nous travaillons en étroite collaboration avec certaines provinces et municipalités afin de mieux comprendre et de surmonter les principaux obstacles à la construction de logements, y compris l’impact des frais d’aménagement.
[Traduction]
Dans le cadre du Fonds canadien pour l’infrastructure de 6 milliards de dollars mentionné précédemment, nous lions les investissements fédéraux dans les infrastructures de gestion des eaux usées, des eaux pluviales et des déchets solides à des actions concrètes dans le domaine du logement, notamment en travaillant avec les provinces, les territoires et les municipalités pour accroître l’offre de logements en accordant des augmentations des frais d’aménagement et en accroissant la densification. Ces fonds constituent un outil essentiel pour coordonner les efforts de tous les ordres de gouvernement, car le logement ne relève pas uniquement du fédéral.
Comme le temps file, je vais m’arrêter ici.
[Français]
Je vous remercie de l’occasion de m’adresser à vous aujourd’hui. Je suis à votre disposition pour répondre à vos questions.
Le président : Merci pour votre témoignage. Avant de céder la parole à notre vice-président pour la période des questions, je demanderais aux sénateurs de nous indiquer qui voudrait intervenir.
[Traduction]
Le sénateur Varone : Je vous remercie, monsieur le sous-ministre, de comparaître à si court préavis. Je vous félicite pour la mise en place très réussie de Maisons Canada. Je pense qu’il est opportun, prudent et nécessaire de vraiment stimuler le logement abordable du côté du secteur public.
L’étude du comité porte sur le secteur privé, en particulier sur le marché de la construction domiciliaire, qui est en crise. On croit depuis longtemps que le problème se trouve du côté de l’offre, mais le marché nous dit que l’offre n’est pas un problème aujourd’hui. L’offre est abondante dans beaucoup de centres urbains partout au Canada. La demande est là. Les constructeurs parlent de l’achalandage dans les bureaux de vente, mais il n’y a pas de point de rencontre entre l’offre et la demande potentielle sur le marché.
Lorsqu’on leur pose la question, les acheteurs potentiels disent très clairement que les prix sont trop élevés. Quand on creuse un peu la question, ils n’achètent pas le produit parce qu’ils ne peuvent pas se le permettre.
L’article 2 du projet de loi C-4, que nous avons examiné lors de la 45e législature, portait notamment sur le remboursement de la TPS pour les acheteurs d’une première maison. Le coût estimé était de 400 millions de dollars par année. Selon l’industrie, il fallait élargir la mesure à l’ensemble du marché parce qu’elle était au bord de l’effondrement. Le coût estimé était de 1,6 milliard de dollars.
Ma question est la suivante: quel est le coût pour le gouvernement d’un marché du logement qui s’effondre et dispose d’un inventaire important à écouler, puis de réactiver le marché? On parle de mises à pied massives, entre 200 000 et 300 000 emplois, directs et indirects, dans les usines et les chantiers. Est-ce que quelqu’un a calculé quel en serait le coût pour le gouvernement?
M. Halucha : Je vous remercie beaucoup de la question, sénateur.
Pour revenir à votre prémisse, il ne s’est pas passé un jour cet été sans qu’un promoteur, un constructeur, un syndicat ou une municipalité nous appelle pour nous parler de la grave crise dans le secteur de la construction, en particulier dans les deux grands marchés urbains de Vancouver et Toronto. Nous n’avions rien vu de tel auparavant. Nous voyons les reportages et les constructeurs nous font parvenir souvent des renseignements microéconomiques. Cela confirme votre prémisse que les conséquences sont très graves.
Il y a eu environ 30 000 mises à pied dans le secteur de la construction au début de l’été, ce qui est considérable. Les constructeurs s’inquiètent pour leur main-d’œuvre. J’ai reçu des messages de différentes compagnies qui me parlaient des mises à pied qu’elles ont dû faire pendant l’été.
Tout ce que j’ai entendu au cours de l’été sur les enjeux microéconomiques corrobore exactement ce que vous avez dit, à savoir que nous avons actuellement une crise dans le secteur de la construction très grave. On dit, comme vous le savez, que ce n’est pas financièrement réalisable, car il y a eu des baisses sur le marché.
Il n’est pas facile de déterminer, à partir des conséquences microéconomiques, ce que seront les conséquences macroéconomiques. Le ministère n’a assurément pas la capacité de traduire tout cela en une mesure ou en un nombre pour montrer comment tous ces coûts s’additionnent et les effets d’une réactivation du marché.
Il reviendrait plutôt au ministère des Finances de le faire, et à ma connaissance, ils n’ont pas fait ce gendre d’analyse jusqu’à maintenant.
Les recherches microéconomiques que nous avons vues et dont nous avons profité en raison de nos relations étroites avec le secteur le confirment, mais nous ne disposons pas, au sein du ministère, du genre de compétences nécessaires pour en déduire une tendance macroéconomique. C’est un rôle qui échouerait au ministère des Finances.
Le président : Je vous rappelle que le temps alloué à chaque membre du comité est de cinq minutes, et cela comprend la réponse des témoins, comme dans le cas présent, si bien qu’il ne vous reste que quelques secondes.
Le sénateur Varone : Monsieur le président, ma deuxième question est simple.
Vous avez parlé des frais d’aménagement. Ils sont très élevés, mais la surveillance ne relève pas du gouvernement fédéral. Toutefois, comme dans d’autres situations lorsque la surveillance relève du gouvernement provincial, le gouvernement fédéral a élaboré des pratiques exemplaires. Est-il possible de le faire pour les municipalités ou les provinces dans ce dossier?
M. Halucha : Je crois que la réponse est oui. Nous aurons l’occasion de vous en dire plus, mais je dirais oui, tout à fait.
La sénatrice Wallin : Je suis persuadée que vous savez que le comité a préparé un rapport en 2023 sur le sujet, alors j’aimerais savoir si on a donné suite à nos recommandations pour encourager la densification, notamment imposer des conditions au financement municipal pour, par exemple, le transport en commun. A-t-on fait quelque chose de précis à ce sujet?
Le gouvernement fédéral devrait assumer un rôle de chef de file dans la création d’une table ronde permanente pour les parties prenantes. Est-ce que quelque chose a été fait à ce sujet?
Je vais en choisir deux ou trois.
Le gouvernement fédéral devrait voir à harmoniser les codes de construction de toute urgence pour permettre l’innovation; le gouvernement fédéral devrait privilégier la mise en œuvre et l’amélioration des programmes qui permettent d’accroître la productivité dans le secteur de la construction, et il devrait travailler avec les diverses parties prenantes et la population afin de modifier les notions d’infrastructure sociale et de logements afin de normaliser des bâtiments qui cadrent davantage avec des populations de plus forte densité. Je sais que ce n’est pas toujours évident. Pourriez-vous nous faire une mise à jour sur ces éléments?
M. Halucha : Je suis à peu près certain que c’est le cas pour tous ces éléments. Je vais les passer en revue.
Au sujet de la densification, je vais mentionner trois secteurs de programme : le Fonds pour accélérer la construction de logements, géré par mes collègues à la SCHL, dont c’est l’objectif. Il s’agit en fait d’un programme de subventions pour encourager les provinces à prendre des mesures comme permettre de plein droit la construction d’immeubles de quatre logements et améliorer les mesures de densification en facilitant le travail des constructeurs.
Il y a aussi le Fonds canadien pour l’infrastructure. Toutes les ententes sont assorties de conditions pour le logement.
Au sujet du transport en commun, nous travaillons fort dans ce dossier. Il faut qu’une province, ou une municipalité, accepte de participer dans tous les cas.
La sénatrice Wallin : C’est la question que je vous posais, car nous avons demandé au gouvernement fédéral d’imposer des conditions au financement.
M. Halucha : C’est ce que nous avons fait.
La sénatrice Wallin : Il y a donc des conditions?
M. Halucha : Oui. Dans certains cas, nous avons réussi à le faire; dans d’autres cas, non, notamment pour le transport en commun.
Au sujet de la table ronde, nous en avons créé une sur le logement pour seconder le ministre, le Conseil national du logement. On ne parle pas d’une table ronde, mais le conseil agit à ce titre.
Au sujet de la productivité, Maisons Canada vise principalement à accroître la productivité dans le secteur du logement. Je suis tout à fait d’accord avec le comité. Il faut le faire pour accroître l’offre.
J’ai oublié votre dernier point.
La sénatrice Wallin : Il s’agissait de sensibiliser la population au fait que tout le monde n’allait pas avoir sa maison avec ses petits piquets de clôture blancs.
M. Halucha : Oui.
La sénatrice Wallin : Il doit y avoir des discussions sur ce à quoi pourrait ressembler le logement à l’avenir.
M. Halucha : Je crois que nous n’avons pas abordé cela explicitement. Je vais céder la parole à Mme Goulding.
La sénatrice Wallin : Je voulais vous en poser une autre : le gouvernement fédéral devrait simplifier le processus de demandes de la SCHL; y a-t-il eu des changements à cet égard?
Janet Goulding, sous-ministre adjointe principale, Logement, Infrastructures et Collectivités Canada : Au sujet de l’idée de vivre dans une maison avec ses petits piquets de clôture blancs, nous avons eu des discussions avec le secteur du logement communautaire afin de transformer leurs modèles d’affaires en concept communautaire complet dans le but d’avoir une mixité en termes de marché et d’usage. On commence donc à voir des niveaux de revenus différents, des prix de loyers différents, et dans ce concept communautaire complet, tout le monde n’est pas propriétaire. Ce sont des discussions importantes que nous nous efforçons d’encourager, et le secteur du logement communautaire y répond bien.
Au sujet des changements apportés par la SCHL, ils ont simplifié leurs programmes. À titre d’exemple, dans le Programme de prêts pour la construction d’appartements et le Fond pour le logement abordable, ils ont mis en place un nouveau cadre pour les grands constructeurs centré sur une approche par portefeuille qui simplifie les processus et accélère de beaucoup le traitement des demandes.
Ils ont également peaufiné certaines exigences dans ces programmes pour faire de l’accessibilité et des mesures climatiques une priorité dans la construction de ces logements, mais l’accent est mis sur l’abordabilité. L’idée est de simplifier les choses pour que les projets soient financièrement réalisables pour les constructeurs.
La sénatrice Wallin : En revanche, nombre d’entre nous croient que les gens devraient pouvoir être propriétaires de leur maison. Nous devons encourager cela également, n’est-ce pas?
Mme Goulding : Tout à fait.
La sénatrice Wallin : Nous devons travailler sur les deux fronts.
Le sénateur Loffreda : L’an dernier, le gouvernement du Canada a lancé le programme Résoudre la crise du logement: Plan du Canada sur le logement qui, comme il est mentionné dans votre plan ministériel, mise sur les initiatives fédérales actuelles en matière de logement en se fondant sur les succès établis, le comblement des lacunes et les réponses aux besoins actuels.
Pourriez-vous nous en dire plus sur les principales lacunes recensées par votre ministère dans le système de logement? Comment comptez-vous procéder pour combler ces lacunes, accélérer la construction de nouveaux logements et vous attaquer aux problèmes graves comme l’abordabilité, la disponibilité et l’accessibilité pour tous les Canadiens?
M. Halucha : Je vais vous parler de notre initiative la plus récente et la réponse la plus importante du gouvernement. Il s’agit de Maisons Canada dont l’annonce a été faite il y a trois semaines par le premier ministre et notre ministre, Gregor Robertson. La réponse comporte trois principaux volets : premièrement, on s’attaque de front à l’abordabilité. C’était aussi un élément central du plan national sur le logement. On veut accroître davantage l’abordabilité en augmentant le nombre de logements abordables au Canada et en réduisant l’écart avec beaucoup d’autres pays dans le monde. Nous en sommes à 4 % environ et la plupart de nos homologues de l’OCDE sont à 7 % environ. C’est un élément fondamental.
Nous recommençons à construire pour la première fois depuis une génération. Maisons Canada va construire des logements. L’agence n’attendra pas que le marché finance la construction. C’était un élément important.
Deuxièmement, on s’attaque aussi au problème de la productivité. C’est vraiment au cœur des problèmes d’offre que nous connaissons aujourd’hui. Nous avons un bassin de main-d’œuvre. Ce bassin est vieillissant. Un grand nombre de travailleurs vont prendre leur retraite. Avec un peu de chance, il croîtra au cours des prochaines années.
Si nous n’investissons pas dans les procédés industriels qui accroissent la productivité dans tout le secteur, nous n’atteindrons pas les cibles d’offre de logement que le gouvernement a fixé et dont les Canadiens ont besoin. Je repense à la question de la sénatrice Wallin. Les gens veulent vraiment vivre dans une maison dont ils sont propriétaires.
Ce sont quelques-uns des éléments clés.
De plus, il y a le nouveau programme pour les infrastructures liées au logement de 6 milliards de dollars que le ministère gère depuis un an. Il est axé sur l’eau et les eaux usées. Nous devons investir également dans d’autres éléments d’actifs. Ils sont importants pour créer les infrastructures nécessaires à la construction de logements.
Nous avons des ententes avec la plupart des provinces maintenant.
Nous avons terminé un vaste processus de sélection pour la prestation directe. Ces projets vont avoir des effets importants pour libérer des espaces afin d’y construire des maisons. C’est souvent l’un des obstacles les plus importants. La construction n’est jamais prête à démarrer tant que le zonage ou l’infrastructure n’est pas en place.
J’aimerais mentionner aussi le Fonds pour accélérer la construction de logements, qui s’attaque à ce problème. Il est difficile pour le gouvernement fédéral d’y arriver, car le zonage relève des municipalités.
En fait, nous devons travailler avec les municipalités pour les amener à procéder à certaines réformes nécessaires pour accélérer l’approbation des permis. Les discussions avec les constructeurs sont une de leurs principales inquiétudes. Les grands constructeurs sont nombreux à avoir de vastes services qui s’occupent de la réglementation. Ils passent beaucoup de temps à l’hôtel de ville pour obtenir des permis pour pouvoir construire.
Grâce à ces investissements, nous nous attaquons à tous les éléments ciblés par la Stratégie nationale sur le logement.
Le sénateur Loffreda : Vous voyez des progrès dans l’obtention des approbations, la diminution de la paperasse.
Vous parlez de productivité. Les promoteurs et les constructeurs se plaignent souvent que la paperasse et les approbations les empêchent d’être productifs. Connaissez-vous des pratiques exemplaires? Certaines municipalités font-elles des choses que d’autres ne font pas? Nous pourrions ainsi en informer les Canadiens partout au pays, car c’est essentiel pour y arriver.
M. Halucha : Bien sûr. Je suis tout à fait d’accord avec vous, sénateur. Si le comité le souhaite, nous pouvons lui fournir une liste des pratiques exemplaires. Il serait trop long de les énumérer maintenant, mais il y en a beaucoup. On se sert de l’intelligence artificielle. On y consacre plus de ressources et on rationalise les normes de service. Je pense que le programme réussit très bien à atteindre ce genre de résultats.
Je souligne toutefois que la question se résume en grande partie à savoir quelle quantité de logements une collectivité locale veut construire? Dans certains cas, les gens travaillent pour des politiciens. Les politiciens sont élus par la population, et il arrive qu’il y ait un préjugé contre le développement. C’est très difficile à surmonter. Certaines municipalités ne participent pas au Fonds pour accélérer la construction de logements. Vous avez sans doute entendu beaucoup de celles qui étaient prêtes, qui voulaient faire mieux et qui ont choisi d’y participer. Nous devons trouver une façon de faire participer les autres également. Toutefois, je suis d’accord avec vous pour dire que c’est toujours un défi. Nous n’avons pas réglé le problème, mais je pense que nous avons beaucoup de pratiques exemplaires, et nous serons heureux de vous les faire parvenir.
Le sénateur Loffreda : Merci.
[Français]
La sénatrice Henkel : Bienvenue encore une fois.
On sait que le gouvernement a alloué un montant de 13 milliards de dollars pour la construction de logements, mais on estime qu’on aurait besoin de plus de 40 milliards de dollars pour combler le déficit en matière de logements abordables.
Ma première question est la suivante : puisque le ministère a reçu le mandat de porter le nombre de logements achevés à 500 000 par année au Canada, combien de logements seront alloués aux personnes à faible revenu? À qui allez-vous allouer ces montants par province? Est-ce qu’il y a un plan? Est-ce que vous y allez par province? Allez-vous diviser cela de façon équitable? Avez-vous des priorités?
M. Halucha : Merci beaucoup pour la question.
[Traduction]
Votre question porte en fait sur le modèle d’affaires de Maisons Canada. Je vais tenter d’être bref. Il y a beaucoup d’éléments. Je vais en mentionner quelques-uns.
Premièrement, il ne s’agit pas d’un modèle d’allocation. La capitalisation était de 13 milliards de dollars et l’argent n’est pas alloué en se basant sur une formule qui garantit un montant pour chaque province. La façon de fonctionner de Maisons Canada est plutôt calquée sur celle de la Banque de l’infrastructure du Canada qui a un conseil d’investissement, une politique d’investissement, et qui a des indicateurs de rendement clés, ou IRC, qu’elle doit atteindre. Je pense que ceux que vous avez mentionnés sont exactement les trois que l’on envisage d’avoir dans la politique d’investissement. Elle n’est pas encore imprimée. Elle visera à maximiser l’offre, maximiser l’abordabilité et maximiser l’utilisation de produits industriels. Ce sont les trois éléments dont le premier ministre a parlé lorsqu’il a procédé à l’annonce en compagnie du ministre Robertson.
Nous voulons procéder aux meilleurs investissements dans les meilleurs marchés. Le sénateur précédent a parlé des marchés où il peut y avoir des problèmes pour obtenir des permis. Nous ne voulons pas allouer des capitaux à des administrations pour nous rendre compte que, en raison des pratiques municipales, l’argent n’est pas utilisé. Nous voulons que l’argent serve. Nous voulons donc que le conseil d’investissement puisse procéder aux meilleurs investissements possible, notamment d’évaluer si le marché est prêt à collaborer et prêt à recevoir les maisons que nous allons bâtir.
L’autre question que vous avez posée concernait, je crois, le nombre d’unités. C’est toujours l’un des aspects les plus délicats de l’élaboration d’une politique, quel qu’en soit le type : nous avons tendance à nous fixer des objectifs, puis nous faisons souvent de mauvais choix, car nous ne sommes plus guidés par les meilleures décisions en matière d’investissement, mais par la volonté d’atteindre un objectif.
Il y a beaucoup de renseignements sur KiwiBuild, qui était une organisation néo-zélandaise. Lorsque nous travaillions sur Maisons Canada pendant l’été, les gens n’arrêtaient pas de dire que nous devions nous inspirer de KiwiBuild. C’est ce que nous avons fait. Ils nous ont donné deux conseils : premièrement, ne fixez pas d’objectifs, car une fois que vous avez un objectif, il devient un fardeau pour l’équipe de direction et finit par influer sur la plupart de vos décisions.
Il faut avoir une idée de la direction à prendre, mais il faut aussi être capable d’évaluer quels sont les meilleurs investissements. Nous avons essayé de procéder de cette manière.
Je pense qu’on a beaucoup parlé, je crois, des 4 000 logements construits selon l’approche direction-construction. Certaines personnes ont multiplié 13 milliards de dollars par 4 000 et ont déclaré : « Vous payez 3,2 millions de dollars par logement. » C’est tout à fait faux. Ces 4 000 logements ne représentent qu’une infime partie des 13 milliards de dollars. Nous avons aussi annoncé la construction de logements au Nunavut. Nous avons également fait l’annonce de la création du Fonds canadien de protection des loyers, car nous estimons qu’il est nécessaire de protéger ce qui existe déjà dans le domaine du logement social. Ainsi, un milliard et demi de dollars seront consacrés à la protection des habitations qui sont déjà destinées au logement social, mais qui risquent de quitter ce secteur. Il y a beaucoup d’éléments à prendre en compte.
Dans l’ensemble, je reviendrais à ces trois points. Nous devons optimiser l’offre et l’accessibilité financière, et le faire de manière intelligente, afin de renforcer l’avantage en matière de productivité qu’offre de l’établissement d’un processus plus mécanisé et industrialisé dans le pays.
Le président : Je demanderai à nos invités de donner des réponses concises.
[Français]
La sénatrice Henkel : Si je comprends bien, puisque c’est un investissement et que dans certaines provinces, il y a des barrières considérables pour avoir de la main-d’œuvre qualifiée, des permis et un échange de biens et services, les provinces qui ne se conformeront pas seront pénalisées?
M. Halucha : J’espère que non.
[Traduction]
Nous avons eu des discussions avec toutes les provinces et tous les territoires. Le ministre les a tous rencontrés il y a environ deux semaines à Vancouver. Nous travaillons avec eux sur les approches de la gestion de portefeuille adoptées par chacune de ces administrations. Ils ont tous été mobilisés. Je ne pense pas qu’il y aura d’obstacles à la collaboration avec les provinces, mais encore une fois, nous voulons évaluer ce qu’elles proposent et nous assurer que ces propositions répondent aux critères établis. L’objectif est d’en faire un programme national. Nous n’avons pas l’intention de négliger certaines régions du pays... c’est en partie pour cette raison que nous avons pensé que le Nunavut constituerait un excellent premier investissement dans le cadre du programme Maisons Canada. C’est dans cette région que se font sentir les besoins en logements les plus importants de tout le pays. Il est difficile d’y construire, car elle est très isolée et rurale. Un grand nombre des obstacles auxquels les programmes...
Le président : Je dois vous interrompre. Nous devons gérer le temps, y compris le temps que vous prenez pour répondre. Je m’en excuse.
La sénatrice McBean : J’aime les réponses longues, car elles indiquent que vous êtes passionné par ce que vous souhaitez partager.
Comme l’a dit mon collègue, l’offre et la demande ne favorisent pas vraiment notre marché actuellement. Les solutions axées sur le marché semblent insuffisantes à elles seules. Selon votre ministère, quel rôle les fournisseurs de logements hors marché, les coopératives et les initiatives de logement menées par les Autochtones peuvent-ils jouer pour résoudre cette crise? Comment pourrons-nous assurer la pérennité du financement? Comment va-t-on encourager la croissance dans ces domaines?
Mme Goulding : Merci beaucoup pour cette question. Je pense que le programme Maisons Canada se concentre précisément sur le secteur non commercial et vise à développer cette communauté. Le gouvernement a clairement reconnu qu’il s’agit d’un échec du marché. Le secteur privé construit 95 % de nos logements, et notre objectif principal est de renforcer le secteur du logement communautaire afin de remédier aux inégalités actuelles.
Je pense aussi que lorsque l’on réfléchit à la création de logements réellement abordables, adaptés et transitoires, c’est également en partie ce que l’on attend de Maisons Canada à court terme. Un milliard de dollars sur ces 13 milliards ont d’ailleurs été alloués aux logements sociaux et de transition. Nous travaillerons également en étroite collaboration avec les provinces et les territoires à cet égard, car, comme les sénateurs le savent certainement, ce type de logement nécessite un soutien opérationnel et global continu pour être efficace. Ces services sont habituellement fournis par les provinces, les territoires et les municipalités. Nous continuerons de travailler en étroite collaboration avec eux dans le cadre de cette initiative.
La sénatrice McBean : Je pense que ma conception de la transition n’est probablement pas exactement la même que la vôtre. Je pense notamment au fait que lorsqu’une famille emménage dans un logement de petite taille parce qu’elle ne peut pas se payer quelque chose de plus grand, l’espace qu’elle occupe ne se libère jamais.
Que fait le gouvernement pour rendre le passage à un logement de plus grande taille plus abordable, en quelque sorte en rendant les logements abordables accessibles pour que les gens puissent déménager? Au lieu de simplement rendre les premiers logements abordables, comment faire en sorte que les familles qui s’agrandissent disposent d’espaces abordables dont elles ont besoin?
Mme Goulding : Merci pour cette question. Je pense que c’est la question à 1 million de dollars : comment pouvons-nous gérer le marché? Je pense que ce sont les forces du marché qui régissent le secteur du logement du Canada.
Au-delà de cet achat initial, pour lequel le gouvernement a pris plusieurs mesures fiscales afin de le rendre plus abordable, il est vraiment difficile de gérer le prix de la maison que vous souhaitez vendre.
Si vous vendez votre maison, c’est le marché qui déterminera le prix qu’elle pourra atteindre. Je pense que c’est là que la conversation au sujet de l’offre fait la différence, et j’espère qu’en soutenant l’offre de logements sociaux et communautaires, nous ouvrirons la voie à un plus grand nombre d’options dans tous les domaines concernés par cette conversation.
La sénatrice McBean : J’ai récemment entendu une femme dire qu’elle avait emménagé dans un logement coopératif à l’âge de 29 ans et qu’elle y vivait depuis 24 ans. Cela m’a interpellée : elle était très reconnaissante d’avoir trouvé cet endroit lorsqu’elle était une jeune mère célibataire, mais son logement n’a jamais été mis à la disposition d’une autre personne.
Mme Goulding : Merci pour cette question. Une partie de cette transformation du secteur du logement communautaire en logements à revenus mixtes et à loyers mixtes fait partie de cette conversation.
Le secteur à but non lucratif espère pouvoir permettre aux gens de passer d’un type de logement à l’autre sans nécessairement modifier les aides dont ils bénéficient s’ils en ont encore besoin.
Ce travail est en cours. Maisons Canada encouragera la transformation de ce secteur et tentera de la soutenir, mais je pense que nous devons être conscients que c’est le marché qui régit le secteur du logement au Canada, et qu’il est très difficile à contrôler.
Le sénateur Yussuff : Merci de votre présence.
Je pense que le problème que nous essayons de résoudre est assez complexe, car il n’est pas le même dans toutes les administrations. Si vous vivez à Toronto — je le répète souvent pour que les gens en prennent conscience —, il n’y a pas de nouveaux terrains disponibles à Toronto. Étant donné que nous n’avons pas de nouveaux terrains, nous allons devoir trouver comment accueillir toutes les personnes qui souhaitent vivre en ville alors que nous ne trouvons pas d’espace pour construire. Il y a un peu d’espace, mais il est très limité dans ce contexte. En dehors de Toronto, c’est une tout autre histoire, mais nous avons des tonnes de gens qui viennent s’installer dans le pays. Ils veulent tous vivre en ville, et nous n’avons pas assez d’espace.
Une autre difficulté réside dans les disparités de revenus qui existent d’un bout à l’autre du spectre. Si vous êtes très riche, tout va bien. Si vous êtes très pauvre, vous risquez de ne pas avoir de toit au-dessus de votre tête. Pour reprendre le dernier point qu’a soulevé Mme McBean, les logements coopératifs sont l’un des moyens qui nous ont permis de combler ce fossé. Dans ces espaces extraordinaires, que nous avons construits au cœur de la ville, nous avons mélangé les revenus, ce qui a permis aux personnes riches et moins aisées de partager le même lieu de vie. Mais ensuite, nous avons presque complètement cessé de construire des logements coopératifs.
Alors que nous tentons de trouver des façons de gérer les inégalités de revenus dans ce pays et abordons toute la question du logement, le logement coopératif va-t-il devenir partie intégrante de notre recherche de logements mixtes, qui sont si essentiels pour assurer la cohésion sociale dans nos villes? Car si nous ne créons pas ces espaces, seules certaines personnes pourront continuer de vivre dans nos villes à l’avenir.
Mme Goulding : Merci pour cette question. Tout à fait, les logements coopératifs constituent un élément essentiel du secteur du logement communautaire. De fait, la Société canadienne d’hypothèques et de logement a créé un programme qui vise à soutenir les nouveaux logements coopératifs. Nous sommes convaincus que le programme Maisons Canada continuera de soutenir cette initiative.
Le sénateur Yussuff : En ce qui concerne la nouvelle répartition des fonds, un montant précis sera-t-il alloué à l’appui de ces initiatives, car il s’agit du secteur qui a le plus besoin d’aide. Ils ne démarrent pas avec un capital important. Ils essaient de trouver la façon de fonctionner au mieux. Je sais, d’après ma propre expérience, que beaucoup de fonds syndicaux ont été investis dans la construction de logements coopératifs dans la ville de Toronto. Toutefois, lorsqu’on les a découragés de le faire, ils ont tout simplement mis fin à ces efforts.
M. Halucha : Je dirais deux choses à ce sujet : comme je l’ai mentionné précédemment, mis à part les annonces qui ont été faites, aucune allocation spécifique n’a été prévue dans le cadre du financement de Maisons Canada. Cependant, comme l’a mentionné Mme Goulding, nous considérons les logements coopératifs comme des logements sociaux positifs, et c’est là l’objectif du programme Maisons Canada. Les projets seront évalués au cas par cas, mais ils seront admissibles, et je pense qu’ils produiront de très bons résultats.
En ce qui concerne le Fonds canadien de protection des loyers, comme vous l’avez mentionné, bon nombre de ces logements sont assez anciens et nécessitent des réparations. Ce financement permettra, espérons-le, de maintenir un plus grand nombre de ces logements à la disposition des personnes qui en ont besoin.
Le sénateur Yussuff : L’une des choses que l’on ne peut pas voir qu’en voyageant à travers le pays est l’existence de communautés autochtones qui vivent en dehors de la société dominante. Il a été reconnu que nous n’avons pas bien répondu à leurs besoins dans le pays. Le Nunavut en est un bon exemple. L’un des problèmes majeurs dans la ville de Nunavut est qu’il est difficile d’y construire en raison du pergélisol. Il va sans dire que les investissements nécessaires pour construire à Nunavut sont beaucoup plus importants qu’ailleurs.
Encore une fois, compte tenu de notre engagement envers la réconciliation, où en sommes-nous en ce qui concerne le parc immobilier qui doit être reconstruit dans la plupart des communautés autochtones qui vivent en dehors de la société dominante? Où en sommes-nous également en matière d’accélération, car c’est l’un des aspects les plus fondamentaux si nous voulons éviter que les enfants se retrouvent en prison et leur offrir un toit?
M. Halucha : Ce sont des questions fondamentales, et c’est pourquoi nous étions si fiers que le Nunavut Housing Corporation soit l’un des partenaires phares de Maisons Canada dans le cadre de cette annonce. Ils ont mis en place un programme formidable pour construire des logements au Nunavut. Nunavut 3000 et le gouvernement ont annoncé, lors du lancement du programme Maisons Canada, que nous allions nous associer à la Nunavut Housing Corporation pour construire plus de 700 logements. C’est exactement pour les raisons que vous avez exposées.
Le centre de responsabilité au sein du gouvernement du Canada — et je déteste donner l’impression de me décharger de mes responsabilités —, mais elle revient à Services aux Autochtones Canada, ou SAC, et à Relations Couronne-Autochtones et Affaires indiennes et du Nord Canada, les deux ministères autochtones qui sont responsables du logement des Autochtones, en particulier dans les réserves, et qui sont donc mieux placés pour vous donner une vue d’ensemble.
Mais nous avons veillé à ne pas créer d’obstacles au sein de Maisons Canada en ce qui concerne notre capacité à travailler et à soutenir les partenaires autochtones et les communautés autochtones dans la construction de nouveaux logements.
Le sénateur Yussuff : Merci.
La sénatrice Martin : Monsieur le sous-ministre, vous avez mentionné que M. Robertson avait tenu une réunion à Vancouver. J’ai examiné les six premiers sites fédéraux, je n’ai pas pu m’empêcher de remarquer que Vancouver n’en faisait pas partie.
Je voulais juste poser une question à ce sujet, étant donné que le ministre a été maire de Vancouver. Est-ce pour cette raison qu’il a choisi de...
Le sénateur Varone : Il peut se le permettre.
La sénatrice Martin : Oui, exactement.
J’aimerais simplement en savoir plus sur les six villes qui feront partie du premier groupe. Je viens de Colombie-Britannique, je ne peux donc m’empêcher de poser la question au sujet de Vancouver et de son absence.
M. Halucha : Le ministre n’a pas choisi les sites. Ceux-ci ont été sélectionnés sur la base d’une évaluation des terrains les plus propices à la construction, réalisée par la Société immobilière du Canada.
Dans cette annonce, la Société immobilière du Canada a également été rattachée au portefeuille de M. Robertson. Nous avons travaillé avec elle tout au long de l’été afin de déterminer quelles propriétés seraient les plus rapidement disponibles et les plus propices à une construction rapide.
Ces six sites... et, bien sûr, nous étions prêts à investir une certaine somme dans ces six sites, car nous essayons un nouveau modèle. C’est la première fois que la Société immobilière du Canada ne fera pas que demander : « Avez-vous besoin d’un promoteur immobilier? », mais deviendra elle-même le promoteur immobilier, le constructeur et, éventuellement, le propriétaire de ces unités.
Voilà un bon exemple d’un ensemble de critères d’investissement qui guident les décisions, par opposition à un ministre qui dirait : « J’en veux un à Vancouver », ce qu’il n’a pas fait.
La sénatrice Martin : Je suppose qu’il y a eu un processus de sélection. Si ces projets sont prêts à être entamés et que vous espérez que les choses aboutissent rapidement, pour ainsi dire, quel est le calendrier et quand pensez-vous examiner le deuxième groupe?
M. Halucha : Je dirai deux choses à ce sujet. Ces projets sont prêts à démarrer. L’intention est qu’ils soient en cours de construction d’ici le printemps prochain, l’objectif étant de commencer au printemps et à l’été de l’année prochaine.
Il est évident que le budget doit être adopté. Les fonds voulus doivent être alloués à Maisons Canada afin qu’il puisse procéder à des appels d’offres et aux travaux proprement dits.
Encore une fois, Maisons Canada prendra des décisions d’investissement s’il y a d’autres propriétés de la Société immobilière du Canada qu’elle souhaite mettre sur le marché pour la construction de logements une fois que les travaux aux six terrains prévus auront commencé.
Il y aura des leçons à tirer; il y aura du travail à faire. Cependant, la Société immobilière du Canada n’est pas censée être le seul promoteur ou constructeur avec lequel Maisons Canada travaillera. Je pense donc que la question est de savoir comment cela s’inscrira dans le portefeuille de demandes qui sont présentées.
Il pourrait y avoir d’autres propriétés où les choses se feront avec un constructeur privé et non avec la Société immobilière du Canada.
La sénatrice Martin : Vous dites que cela commencera dès le printemps prochain, mais ce que j’aimerais vraiment savoir, c’est la date de fin. J’aimerais avoir une idée du temps que cela prendra, car j’imagine qu’il pourrait s’agir d’un processus assez long.
M. Halucha : Je crois que cela prendra environ 24 mois.
La sénatrice Martin : Nous suivrons cela de près. Au nom des contribuables, je me dois également de vous demander quelle sera la répartition approximative des coûts par projet. Qu’en est-il des contributions foncières, des lacunes en matière d’approvisionnement et des conditions de financement? Quels sont les coûts unitaires pour ces premiers sites? Comment cela se traduira-t-il pour les Canadiens, c’est-à-dire dans quelle mesure cela contribuera-t-il à faire baisser les loyers et les prix plutôt qu’à accroître les marges? J’aimerais que vous nous donniez quelques précisions à ce sujet.
M. Halucha : Il y a beaucoup d’aspects qui sont abordés dans cette question. Je crois que le coût unitaire serait d’environ 350 000 $. Cela n’est pas encore coulé dans le béton, car les projets n’ont pas encore été soumis aux marchés. C’est un calcul rapide basé sur la taille de la capitalisation.
Le coût pourrait être plus élevé sur certains marchés, et moindre sur d’autres. La planification ne s’est pas beaucoup faite en fonction d’une construction modulaire. Il s’agit évidemment d’un changement important puisque nous voulons que ce projet serve de vitrine aux logements modulaires de 9 à 12 étages. Au-delà de cela la construction modulaire devient très difficile, mais l’utilisation de bois massif devient possible.
Il est donc très difficile de vous donner un chiffre tant que les projets n’ont pas été proposés sur les marchés, qu’ils n’ont pas trouvé leurs fournisseurs et qu’ils n’ont pas été mis en train. C’est le calcul approximatif qu’on en fait. Nous espérons que la facture sera inférieure à cela. C’est ce que nous voulons. Or, les discussions que nous avons eues avec de nombreuses entreprises de construction modulaire et préfabriquée nous indiquent que leurs prix sont concurrentiels, voire potentiellement moindres.
La sénatrice Ringuette : La plupart d’entre nous avons entendu parler budget après budget des milliards de dollars consacrés aux questions de logement, des sommes qui, en très grande partie, ont été transférées aux provinces et aux municipalités.
Quand je regarde le rapport de la Société canadienne d’hypothèques et de logement de mai 2025, je constate que le coût municipal représente environ 20 % du coût total, et qu’il peut être plus important dans certaines villes comme Toronto. Or, les coûts municipaux ou les frais d’aménagement — ce qui concerne les infrastructures, les égouts, etc. —, sont généralement payés lorsqu’un nouveau propriétaire achète une maison et commence à payer la taxe foncière pour ces services municipaux.
Maintenant, quand je regarde la région d’Ottawa et les projets qui sont réalisés dans la ville d’Ottawa, je constate que le promoteur achète le terrain, construit la maison, construit les infrastructures, la route, les trottoirs, le système d’adduction d’eau, les égouts. Quels sont exactement les frais municipaux pour ces aménagements? Dans ce scénario, je constate que deux et deux ne font pas quatre.
Pouvez-vous m’expliquer pourquoi l’argent versé par le Trésor fédéral à ces municipalités pour réduire les coûts des logements permet à la plupart d’entre elles de continuer à facturer des frais municipaux phénoménaux alors que le promoteur immobilier construit les infrastructures? Cela ne colle pas. Que comptez-vous faire à ce sujet?
M. Halucha : Merci beaucoup de cette question, sénatrice.
Ce que nous avons fait à cet égard, notamment par l’intermédiaire du Fonds canadien pour les infrastructures liées au logement, c’est que nous avons réalisé ces investissements en cherchant à alléger les droits d’aménagement pour les promoteurs et les propriétaires. Nous avons posé comme condition que, si nous fournissons des fonds pour ce type précis d’infrastructure municipale, nous nous attendons à ce que les municipalités réduisent leurs droits d’aménagement.
La sénatrice Ringuette : Est-ce que ces investissements ont été versés directement aux municipalités?
M. Halucha : Oui, ils ont été versés directement aux municipalités.
La sénatrice Ringuette : Les promoteurs immobiliers vous ont-ils confirmé que c’est bien ce qui se passe?
M. Halucha : Eh bien, les municipalités s’y engagent publiquement. Il s’agit d’un accord de contribution qu’elles ont avec nous et dont les conditions ont été acceptées. Ce programme est en place depuis environ un an et nous allons confirmer que c’est bien ce qui se passe.
Je dirais également que les municipalités abordent les droits d’aménagement différemment d’il y a deux ans. Il y a quelques années, à moins d’être comme le sénateur Varone et d’avoir une solide expérience dans ce secteur, vous ne saviez peut-être même pas ce qu’étaient les droits d’aménagement. Lorsque vous achetez une maison, ils n’apparaissent pas sur votre facture. Vous les payez, c’est tout.
Lorsque les prix de l’immobilier étaient plus bas, vous ne les remarquiez même pas, mais maintenant que les prix ont augmenté à bien des endroits, les droits d’aménagement ont également augmenté, ce qui a eu des répercussions.
En conséquence, de nombreuses mesures ont été prises par les municipalités et les provinces pour réduire ces droits. À titre d’exemple, j’ai une liste des mesures qui ont été prises à Toronto en la matière. La ville a gelé les taux des droits d’aménagement au niveau de 2024. Elle a supprimé les droits d’aménagement pour les logements locatifs construits à cette fin. Elle a accordé un report de paiement des droits d’aménagement pour les copropriétés. De nombreuses mesures ont donc été prises parce que la ville veut qu’il y ait de la construction, elle veut qu’il y ait du développement. Des mesures ont donc été prises à cette fin. Et il est tout à fait indiqué que les villes fassent de même.
La sénatrice Ringuette : Excusez-moi, je sais que vous êtes très bien informé, mais je ne vois aucune condition concernant le financement fédéral qui a été mis en place. Il semble que nous avons un problème à Vancouver et surtout à Toronto. Où étaient les conditions du financement fédéral accordé à la province de l’Ontario et à la ville de Toronto?
M. Halucha : Nous n’avons pas pu obtenir de conditions en matière de logement de la part de la province de l’Ontario et, par conséquent, nous n’avons pas conclu d’accord dans le cadre de ce programme avec la province. Comme nous n’avons pas pu obtenir d’accord, nous avons transféré les fonds d’une allocation provinciale vers un modèle de prestation directe. Nous travaillons maintenant avec les villes et nous leur demandons d’accepter ces conditions.
La même chose s’est produite en Colombie-Britannique. En Colombie-Britannique, comme nous n’avons pas pu obtenir ce que nous voulions pour la réduction des droits d’aménagement, nous avons réduit considérablement notre financement à la province, afin qu’il ne corresponde qu’à la réduction qu’elle était prête à accorder en échange de l’argent. Nous essayons donc de nous aligner sur eux.
La sénatrice Ringuette : Vous dites donc que les droits d’aménagement facturés par les municipalités sont principalement dus au fait que la province de l’Ontario et la province de la Colombie-Britannique refusent ces conditions?
M. Halucha : Non, non. Elles les facturent parce qu’elles le peuvent. C’est une source de revenus pour elles.
La sénatrice Ringuette : Il n’y a donc aucune condition...
Le président : Sénatrice Ringuette, votre temps est écoulé, je m’en excuse, sans vouloir vous manquer de respect. C’était une conversation intéressante, soit dit en passant. Si le temps le permet, vous aurez peut-être l’occasion de la reprendre au prochain tour.
Le sénateur C. Deacon : Merci à nos témoins de leur présence. J’ai trois questions rapides pour vous.
La conception de votre programme est-elle favorable à la concurrence, en ce sens qu’elle encourage réellement les nouvelles entreprises innovantes et pas seulement les grands acteurs habituels, ainsi que leur réussite? Dans l’affirmative, comment pouvez-vous nous le prouver?
Quels sont les problèmes qu’il est absolument crucial pour vous de résoudre? Ceux pour lesquels vous vous dites : « D’accord, voici les trois problèmes que nous devons résoudre dans tout ce que nous faisons. »
Enfin, quels sont les indicateurs de performance clés que vous suivez afin de vous permettre de démontrer dans quelle mesure vous aurez réussi dans cinq ans? Quels sont ces indicateurs qui vous permettront de dire : « Oui, nous faisons des progrès dans tel ou tel domaine »?
M. Halucha : Ce ne sont pas des questions faciles, mais je vais faire de mon mieux pour y répondre rapidement. En ce qui concerne les nouvelles entreprises innovantes, je crois que l’avantage, si l’on peut appeler cela un avantage, c’est que Maisons Canada nous permet de travailler avec la construction modulaire et hors site et que, dans la plupart des cas, les entreprises qui œuvrent de ce côté ne sont pas des constructeurs traditionnels.
Le sénateur C. Deacon : Comme celui qui a été donné à Kent Homes, qui appartient à Irving.
M. Halucha : Je vois ce que vous voulez dire. Je ne pense pas que nous découragerions la collaboration avec des entreprises comme Irving, par exemple, qui ont fait leurs preuves, qui sont concurrentielles sur le plan des coûts et qui offrent le meilleur rapport qualité/prix aux Canadiens.
Le sénateur C. Deacon : Cherchez-vous à vous assurer que vos politiques favorisent la concurrence et permettent aux nouvelles entreprises innovantes, et pas seulement aux gros joueurs, de gagner?
M. Halucha : Je dirais que oui, absolument.
Le sénateur C. Deacon : Pouvez-vous nous le démontrer dans une lettre de suivi?
M. Halucha : Je ferai de mon mieux. Ce sera dans la conception d’une demande d’informations ou d’une demande de propositions, quels types d’accords de contribution nous...
Le sénateur C. Deacon : Exactement, parce que les marchés publics excluent tant de petits fournisseurs.
M. Halucha : Il reste que le fait de miser sur la concurrence sera essentiel au succès de ce programme. En fait, je considère que les acteurs en place — je veux dire ceux qui sont bien établis dans un domaine comme celui de la construction modulaire, comme Irving, ATCO ou certains des grands fournisseurs du pays —, bref, je crois que les acteurs en place s’en sortiront probablement bien, car ils disposent de beaucoup de capitaux et ont la capacité d’apporter...
Le sénateur C. Deacon : Ce sont des hypothèses. Ce sont probablement des hypothèses raisonnables, mais le fait de veiller à ce que votre programme soit conçu de manière à favoriser la concurrence n’est pas une hypothèse, c’est une question de conception. J’espère vraiment que cela sera pris en considération.
Selon vous, quels sont les problèmes qu’il est absolument crucial de résoudre et dont vous savez qu’une fois résolus, vous aurez vraiment progressé?
M. Halucha : L’un des grands défis est l’acceptabilité des consommateurs à l’égard des logements modulaires et préfabriqués. Beaucoup de gens ont des idées préconçues au sujet de ces logements. Sont-ils confortables? Aimerais-je en posséder un? Sont-ils aussi durables que les constructions traditionnelles? Est-ce un investissement susceptible d’être rentable? Je crois que ce sera l’un des aspects clés sur lesquels nous devrons travailler, comme cela a été le cas pour les voitures électriques. Pendant longtemps, les gens avaient des idées préconçues au sujet de certains aspects des véhicules électriques, comme l’angoisse liée à l’autonomie. Nous devons favoriser un changement social afin d’amener les gens à accepter ce type de technologie, car cela sera essentiel pour...
Le sénateur C. Deacon : Cela n’est pas nécessairement quelque chose que vous pouvez contrôler. Parlez-moi d’un problème qui relève de votre contrôle?
M. Halucha : Je crois que cela relève de notre contrôle, car la proposition de ce type de logement, la collaboration avec les fabricants de modules... Le gouvernement du Canada fait beaucoup d’achats. Je pense que nous aurons la capacité d’insuffler ce changement au fil du temps, notamment en travaillant avec ceux qui deviendront nos partenaires.
J’estime que la collaboration est un élément qui est sous notre contrôle. Pendant longtemps, le gouvernement fédéral n’était pas présent dans la construction de logements. Je crois que nous sommes de retour et qu’avec ce gouvernement, nous sommes de retour en force. Il y a donc de nombreuses possibilités de collaboration. Nous essayons d’alimenter cela aux termes de la conception de Maisons Canada et d’autres initiatives, donc en travaillant avec les provinces, les municipalités et les constructeurs industriels. Je crois que ces partenariats sont absolument essentiels.
Le sénateur C. Deacon : Merci, monsieur le sous-ministre. Dans cinq ans, quels indicateurs de rendement clés examinerez-vous pour établir si vous avez atteint vos objectifs?
M. Halucha : Je dirais qu’il y en a trois. Premièrement, je crois que nous devons augmenter l’offre au Canada et, espérons-le, réduire les coûts de construction. Je crois que les coûts de construction doivent baisser, car c’est ce qui est au cœur de ce que le sénateur Varone disait tout à l’heure concernant le mauvais fonctionnement du marché. Le secteur de la construction doit devenir plus abordable, car ses prix élevés lui barrent présentement la porte à de nombreux marchés.
Deuxièmement, il faudra voir si nous pouvons augmenter le nombre de logements abordables au Canada. J’ai mentionné les taux de 4 à 5 %, ce qui se rapproche de la moyenne de l’OCDE. Le troisième indicateur sera de voir si les constructions modulaires prennent une part accrue du marché. À l’heure actuelle, elles représentent environ 2 % du marché. Nous savons qu’avec les capacités existantes, dont celles qui ne sont pas utilisées, ils sont en mesure de tripler ce chiffre sans avoir à acheter plus de machines.
J’estime que le fait d’atteindre une part de marché de 10 % d’ici cinq ans montrerait que cette technologie et cette approche de la construction sont sur une trajectoire de croissance qui se traduira par un changement bien concret au pays.
Le sénateur C. Deacon : C’est formidable. Si je comprends bien, vous dites que le coût de construction correspond en fait au coût total pour le consommateur. Je pense que c’est probablement ce que vous visez.
M. Halucha : Absolument.
Le sénateur C. Deacon : En raison de l’incidence des frais.
[Français]
Le sénateur Dalphond : Vous avez parlé de six projets qui ont été retenus, dont un au Québec, à Longueuil.
Pouvez-vous nous parler un peu plus de ce projet, de ses échéanciers et de ses difficultés? Je pense qu’au Québec, une municipalité ne peut recevoir de subvention du fédéral sans l’approbation du gouvernement du Québec. Donc, si le gouvernement du Québec n’est pas d’accord sur le programme, la municipalité ne peut pas recevoir d’argent, comme vous l’avez fait en Ontario en contournant l’absence d’entente avec le gouvernement Ford.
M. Halucha : Je vous remercie de la question.
[Traduction]
Les adresses des propriétés n’ont pas encore été rendues publiques, je vais donc laisser le soin au ministre et au gouvernement de les choisir lorsqu’ils les annonceront. Je pense que nous ferons preuve de transparence au moment opportun en ce qui concerne l’échéancier pour chacune des propriétés.
Cependant, en ce qui concerne votre deuxième point, qui porte, je crois, sur la loi provinciale du Québec appelée M-30, qui, comme vous l’avez dit, limite notre capacité à faire affaire directement avec les municipalités, j’aimerais dire deux choses. Premièrement, nous allons travailler en étroite collaboration avec le gouvernement du Québec afin que le programme Maisons Canada puisse être couronné de succès dans la province. Encore une fois, pour en revenir à mon argument sur la collaboration, c’est par là que nous allons commencer.
Deuxièmement, le terrain à Longueuil est en fait un terrain fédéral, donc il n’est pas question dans ce cas particulier d’envoyer de l’argent à la municipalité. Nous allons mettre le terrain sur le marché et ils choisiront un constructeur qui construira sur ce terrain, mais nous voulons absolument le faire en collaboration avec la municipalité et la province.
[Français]
Le sénateur Dalphond : Combien d’appartements prévoit-on?
M. Halucha : Je n’ai pas la réponse. Est-ce que je peux vous envoyer le nombre plus tard?
Le sénateur Dalphond : Je crois me souvenir que, dans un dernier programme fédéral visant à construire des appartements subventionnés, le Québec a été la dernière province à signer une entente; il a même fallu étendre le programme une année de plus pour que l’entente soit signée. Est-ce qu’on peut s’attendre à ce que cela se fasse rapidement, ou est-ce que cela risque de prendre deux ans de plus qu’ailleurs au Canada?
[Traduction]
M. Halucha : Je ne sais pas exactement de quel programme il s’agit. Nous sommes en pourparlers avec le Québec au sujet du Fonds canadien pour les infrastructures liées au logement, et ces discussions se déroulent plutôt bien.
Le sénateur Dalphond : C’est bon à savoir.
[Français]
Le président : Nous avions prévu 60 minutes pour votre témoignage à l’origine, mais vous voyez sûrement l’intérêt que suscite cette question chez les sénateurs autour de la table. Est-ce que nos témoins seraient disponibles 15 minutes de plus? Il y aurait une seconde ronde de questions. On pourrait se limiter à trois minutes par intervention.
[Traduction]
Le sénateur Varone : Le ministère chargé du logement et de l’infrastructure est organisé de manière radicalement différente par rapport à ce qu’il était il y a quatre ans. À l’heure actuelle, vous supervisez la SCHL, la Banque de l’infrastructure du Canada et maintenant la Société immobilière du Canada, qui est la réserve foncière.
Ma question porte sur la SCHL. Durant ma tournée cet été, les constructeurs et dirigeants de l’industrie que j’ai rencontrés ont reproché à la SCHL son manque de productivité et de créativité. Au fil des ans, la SCHL s’est transformée en une organisation moins dynamique qu’elle ne l’était autrefois. Il y a de nombreuses années, elle faisait preuve d’une grande créativité. Elle concevait des produits qui permettaient aux gens d’acheter leur première maison grâce à l’assurance hypothécaire.
Je repense au contexte dans lequel le test de résistance hypothécaire a été instauré pour la première fois, l’objectif étant de calmer un marché en surchauffe. Cependant, aucun autre produit financier n’a été créé pour prolonger l’amortissement ou la durée des prêts garantis par la SCHL.
Votre ministère envisage-t-il de créer une meilleure gamme de produits hypothécaires pour aider les Canadiens à acheter une maison? Disons une hypothèque à taux fixe sur 20 ans, avec une période d’amortissement de 20 ans et un faible taux d’intérêt — un produit qui permettrait d’éliminer les fluctuations constantes des taux d’intérêt, car les emprunteurs peuvent se retrouver en situation précaire selon la date d’échéance de leur hypothèque. C’est là où je veux en venir. Ce type de produit est disponible partout ailleurs en Amérique du Nord et en Europe, sauf au Canada.
M. Halucha : Mon ministère ne s’occupe pas du volet commercial de la SCHL. Je crois comprendre que ses représentants viendront peut-être témoigner devant le comité. Ils pourraient donc répondre à cette question, tout comme le ministère des Finances, qui est leur interlocuteur.
Je dirais toutefois que bon nombre des assouplissements que nous avons intégrés au programme Maisons Canada découlent du même genre de critiques que vous avez soulevées, à savoir que la SCHL n’était pas apte ou disposée à faire certaines des choses novatrices que les promoteurs lui demandaient. Je pense que beaucoup d’obstacles étaient ancrés dans certains des critères fixés par le gouvernement. Nous en avons supprimé une grande partie pour Maisons Canada. Ainsi, le modèle d’affaires s’inspire en quelque sorte d’un grand nombre de ces histoires négatives liées aux contraintes en place — notamment en ce qui concerne la souplesse des outils utilisés dans le cadre de Maisons Canada.
Le sénateur Loffreda : J’ai une question concernant le Fonds canadien de protection des loyers, qui était un élément clé du plan de logement de l’année dernière, comme vous le savez. Un montant de 1,5 milliard de dollars y a été attribué pour préserver l’abordabilité des logements locatifs existants et soutenir l’acquisition de nouveaux logements abordables. Pourriez-vous préciser si Logement, Infrastructures et Collectivités Canada joue un rôle de premier plan dans l’administration du fonds?
De plus, quels sont les résultats des premières consultations du gouvernement fédéral auprès d’experts du secteur du logement communautaire? Plus précisément, comment leur apport permet-il de concevoir un fonds qui peut répondre efficacement aux contraintes de croissance, favoriser une protection rapide des logements abordables et promouvoir la durabilité à long terme du secteur?
Mme Goulding : Je vous remercie beaucoup pour la question. Le Fonds canadien de protection des loyers n’a pas encore été instauré officiellement. Un appel de demandes a été lancé en mars et a pris fin le 29 mai, et nous sommes en train de terminer notre évaluation de ces demandes.
Je pense qu’il est important de se rappeler que le fonds de protection des loyers repose en bonne partie sur l’apport des intervenants du secteur du logement communautaire. Comme le fonds est censé être dirigé par le secteur, Maisons Canada investira d’emblée dans un gestionnaire de fonds qui, au nom du secteur, gérera ces fonds et mobilisera d’autres sources de financement pour acquérir des logements déjà abordables et les entretenir de façon durable à long terme.
Le fonds cible principalement le secteur non marchand, c’est-à-dire le secteur à but non lucratif, qui, nous le savons, a un intérêt intrinsèque à promouvoir l’abordabilité. L’objectif du fonds sera de permettre au gestionnaire de remplir deux rôles : d’une part, attirer de nouvelles sources de financement afin que le fonds puisse être renouvelable et autosuffisant et, d’autre part, jouer un rôle de guide pour le secteur.
L’un des messages que nous avons clairement entendus de la part des intervenants du secteur communautaire, c’est que dans ce domaine — et c’est la même chose pour Maisons Canada, qui se concentrera sur les nouvelles constructions, alors que ce fonds visera l’acquisition —, la constitution de ces capitaux est une tâche complexe.
L’un des constats que nous avons faits concernant les demandes, par exemple, pour les programmes de la SCHL, c’est qu’il fallait souvent qu’un certain nombre de ces éléments soient en place avant de pouvoir s’adresser à la SCHL. Ce fonds permet au secteur d’exercer un contrôle et de jouer en quelque sorte le rôle d’agrégateur, d’accumuler ces capitaux et de renforcer les capacités, tout en mettant l’accent sur l’abordabilité à long terme.
Le sénateur Loffreda : Je vous remercie.
La sénatrice McBean : Je vous remercie de vos réponses. Je pense que vous avez répondu à bon nombre des questions que j’avais en tête aujourd’hui. Je vais m’attarder sur un point en particulier. Vous avez mentionné à quelques reprises que 700 maisons seraient construites au Nunavut. Quand les gens pourront-ils emménager dans ces logements? Pouvez-vous vous engager à donner une date d’emménagement? Comme nous le savons, et comme l’a dit le sénateur Yussuff, il ne s’agit pas d’une nouvelle situation. La construction dans la région pose des défis. Il a été question de 700 nouveaux logements à maintes reprises. Quand les gens pourront-ils y emménager?
M. Halucha : Merci beaucoup de la question, sénatrice. Je dirais que ce serait le plus rapidement possible. Nous travaillons à un accord de contribution qui, je l’espère, sera signé, là encore, une fois que les budgets auront été approuvés par le Parlement. C’est évidemment important; nous avons besoin de l’argent. Les discussions que nous avons eues avec les représentants du gouvernement du Nunavut montrent que cette initiative s’inscrit déjà dans leurs programmes existants. Ils mettent chaque année des logements sur le marché. Nous allons effectivement participer à ce programme, mais nous n’aurons pas à mettre en place quoi que ce soit. Il s’agit d’une collaboration, d’un partenariat, dans le cadre duquel nous achetons une série de résultats, et ce sont eux qui livreront les logements. Cela dépend donc de leur rythme et, jusqu’à présent, ils avancent très rapidement.
Le sénateur Yussuff : Une bonne partie de cet effort repose sur le nouveau modèle des maisons modulaires, qui n’a d’ailleurs rien de nouveau. Des maisons modulaires sont construites partout dans le monde, sauf au Canada. En fait, les Canadiens ne savent pas trop de quoi il s’agit parce que ce mode de construction ne correspond pas à ce qui se fait habituellement au pays. Comment le gouvernement prévoit-il de mobiliser les Canadiens dans cette démarche?
Je viens de l’industrie automobile. Lorsque l’automatisation a été mise en place, nous avons continué à construire des voitures, mais avec beaucoup moins d’intervention humaine. Toutefois, la technologie nous a permis de construire des voitures de meilleure qualité. Comment envisageons-nous de promouvoir ce modèle pour rassurer les Canadiens? Certains d’entre nous ont passé leur vie à regarder des charpentiers construire chaque détail d’une maison — dans ce cas-ci, tout sera fait dans une usine et assemblé sur place, et ce, beaucoup plus rapidement. Comment comptons-nous en faire la promotion afin de susciter la confiance et l’appui des Canadiens?
M. Halucha : Je pense que vous verrez beaucoup de promotion des logements construits dans le cadre de Maisons Canada, et ce sera un élément clé de cette initiative. Vous avez tout à fait raison : l’automatisation dans le secteur de l’automobile est un très bon exemple des gains de productivité et du maintien de la qualité.
Je pense qu’au fur et à mesure que nous annoncerons des projets et que nous établirons des partenariats avec des entreprises, nous devrons nous efforcer de sensibiliser les Canadiens à la qualité de ces logements. À mesure que ces projets se concrétiseront partout au pays, il y aura beaucoup d’occasions de mettre en valeur les technologies utilisées.
Le sénateur Yussuff : Il y a aussi le niveau de compétence requis, qui est différent de ce qui est utilisé actuellement.
M. Halucha : Le niveau de compétence est différent, comme vous l’avez dit. Il n’est pas inférieur, mais simplement différent. En fait, il est souvent plus accessible que certaines des compétences spécialisées requises pour la construction traditionnelle de maisons. C’est particulièrement vrai dans certaines des régions les plus industrialisées et, grâce au recours accru à la robotique, le niveau de compétence évolue considérablement.
[Français]
La sénatrice Henkel : On parle beaucoup d’innovation. Tout à l’heure, vous avez mentionné que vous utilisiez des moyens comme l’intelligence artificielle et les technologies. Toutefois, on a besoin de toutes ces innovations très rapidement, justement; il faut rapidement construire, bâtir, pour rendre ces résidences accessibles pour les Canadiens et Canadiennes.
Comment allez-vous vous assurer de connaître toutes les entreprises innovantes, qui sont probablement plus petites que celles avec lesquelles on est habitué de travailler, afin qu’elles aussi puissent bâtir et contribuer grâce à leur innovation? En effet, elles sont beaucoup plus agiles et très innovantes. Je sais à quel point elles ont de la difficulté à avoir accès à ces contrats publics.
[Traduction]
M. Halucha : Je vais répondre de deux façons. Premièrement, nous avons déjà eu des discussions avec Innovation, Sciences et Développement économique Canada, les agences de développement régional, notre supergrappe pour la fabrication de pointe — tous collaborent déjà avec le type d’entreprises innovantes dont vous avez parlé. Ce seront des partenaires clés qui nous aideront à découvrir ces entreprises.
Deuxièmement, je pense que vous avez tout à fait raison : nous devons apprendre à mieux les connaître. Nous avons d’ailleurs l’intention d’organiser une journée de l’industrie dans les mois à venir, idéalement avant Noël, en mettant l’accent sur la préqualification des entreprises clés, parce que nous ne les connaissons pas assez bien pour faire affaire avec elles. Cette prise de contact sera une étape importante.
Nous sommes conscients de nos lacunes en matière de connaissances. C’est pourquoi, durant l’été, alors que nous étions occupés à approfondir la recherche, la réflexion et la conception pour le programme Maisons Canada, nous avons passé beaucoup de temps avec le secteur des maisons modulaires, tant à l’échelle de l’association qu’auprès des entreprises elles-mêmes. J’ai accepté toutes les réunions proposées, simplement pour avoir l’occasion de mieux les connaître et de mieux les comprendre. Cela devra faire partie intégrante de notre travail à l’avenir.
Ayant passé une grande partie de ma carrière au ministère de l’Industrie, j’apporte cette perspective dans le dossier du logement au sein de mon ministère actuel.
La sénatrice Henkel : Ce qui constitue le principal obstacle, ce sont les critères de qualification et toutes les cases que les entreprises doivent remplir pour être admissibles, et pas seulement...
M. Halucha : Je suis tout à fait d’accord. L’établissement d’une liste de préqualification sera une étape importante. Nous chercherons les acteurs du marché. Comme Mme Goulding l’a mentionné, toutes les ententes ne proviendront pas de Maisons Canada. Ce sera une composante essentielle des capitaux, mais il y aura des promoteurs et des constructeurs qui nous proposeront des projets. À mesure qu’ils le feront, nous les encouragerons à nous présenter des solutions de construction modulaire hors site.
Ce qui est intéressant, c’est que vers les mois d’août et de septembre de cette année, à l’approche de l’annonce, des entreprises de construction modulaire de partout au pays m’ont dit qu’elles recevaient énormément d’intérêt de la part d’organismes sans but lucratif, ainsi que de promoteurs immobiliers conscients de la nécessité de nouer des partenariats. Il y a une dynamique positive qui s’installe et que nous devons encourager. Je suis d’accord avec vous : il faut d’abord admettre que nous devons apprendre à mieux les connaître.
[Français]
Le président : Merci, sénatrice Henkel. Merci à nos témoins. Vos témoignages seront pris en considération dans le cadre de l’étude sur le logement que nous amorçons.
Chers collègues, nous allons suspendre brièvement nos travaux avant de passer à la prochaine partie de notre réunion, qui se déroulera à huis clos.
(La séance se poursuit à huis clos.)