LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES FINANCES NATIONALES
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le mardi 17 juin 2025
Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd’hui, à 9 heures (HE) pour étudier le Budget principal des dépenses pour l’exercice se terminant le 31 mars 2026, à l’exception du crédit 1 de la Bibliothèque du Parlement, et le Budget supplémentaire des dépenses (A) pour l’exercice se terminant le 31 mars 2026.
Le sénateur Éric Forest (vice-président) occupe le fauteuil.
[Français]
Le vice-président : Avant de commencer la réunion, j’aimerais demander à tous les sénatrices et sénateurs et aux autres participants qui sont ici en personne de consulter les cartes sur la table pour connaître les lignes directrices visant à prévenir les incidents liés au retour de son.
[Traduction]
Veuillez tenir votre oreillette éloignée de tous les microphones en tout temps.
[Français]
Veuillez ne pas toucher au microphone. Il sera activé et désactivé par l’opérateur de console. Évitez de manipuler votre oreillette lorsque votre microphone est ouvert; vous pouvez la garder à l’oreille ou la déposer sur l’autocollant prévu à cet effet sur votre bureau.
[Traduction]
Merci à tous de votre coopération.
[Français]
Bienvenue à tous les sénateurs et sénatrices, ainsi qu’à tous les Canadiens qui nous regardent sur sencanada.ca. Je m’appelle Éric Forest et je suis vice-président du Comité sénatorial permanent des finances nationales. Ne vous inquiétez pas, notre président devrait arriver sous peu et prendre la relève. J’aimerais maintenant demander à mes collègues de se présenter, en commençant par ma gauche.
Le sénateur Gignac : Bonjour. Clément Gignac, du Québec.
La sénatrice Galvez : Bonjour. Rosa Galvez, du Québec.
[Traduction]
Le sénateur Loffreda : Bonjour. Bienvenue au Sénat. Je suis le sénateur Tony Loffreda de Montréal, au Québec.
La sénatrice Hay : Bonjour. Je m’appelle Katherine Hay, on me désigne par le pronom « elle », et je viens de l’Ontario.
La sénatrice Pate : Bonjour. Je suis ravie de tous vous voir. Je m’appelle Kim Pate et j’habite ici, sur le territoire non cédé et non abandonné de la nation algonquine anishinaabeb, à qui on ne l’a jamais rendu.
La sénatrice MacAdam : Bonjour. Jane MacAdam, de l’Île-du-Prince-Édouard.
La sénatrice Marshall : Elizabeth Marshall, de Terre-Neuve-et-Labrador.
[Français]
Le sénateur Dalphond : Bonjour. Pierre Dalphond, de Montréal, au Québec.
Le vice-président : Merci. Honorables sénateurs et sénatrices, aujourd’hui nous continuons notre étude du Budget principal des dépenses pour l’exercice se terminant le 31 mars 2026 et du Budget supplémentaire des dépenses (A) de 2025-2026, qui ont été renvoyés à ce comité le 29 mai 2025 et le 11 juin 2025 respectivement par le Sénat du Canada.
Pour notre premier groupe, nous avons le plaisir d’accueillir parmi nous aujourd’hui des représentants du Bureau du vérificateur général du Canada : Karen Hogan, vérificatrice générale, Andrew Hayes, sous-vérificateur général, Paule-Anny Pierre, première vérificatrice générale adjointe, et Jean-René Drapeau, vérificateur général adjoint et dirigeant principal des finances. Bienvenue à tous et à toutes et merci d’avoir accepté notre invitation à comparaître aujourd’hui. Nous allons maintenant entendre les déclarations préliminaires de Mme Hogan.
Madame Hogan, vous avez la parole.
Karen Hogan, vérificatrice générale du Canada, Bureau du vérificateur général du Canada : Merci, monsieur le président. Nous sommes heureux d’être ici aujourd’hui pour discuter de notre Budget principal des dépenses de 2025-2026. Je comprends aussi que les membres du comité pourraient avoir des questions au sujet des rapports qui ont été déposés récemment. Je tiens tout d’abord à reconnaître que cette réunion se déroule sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinabe. Vous avez déjà présenté mes collègues qui sont avec moi à la table. Derrière moi se trouvent les quatre membres de mon équipe de gestion qui étaient responsables de certains de nos récents audits de performance, soit les directeurs principaux Glenn Wheeler et Sami Hannoush, la directrice principale, Markirit Armutlu, ainsi que la directrice, Isabelle Marsolais.
En ce qui a trait à notre Budget principal des dépenses pour l’exercice 2025-2026, notre budget total est d’environ 136 millions de dollars. Grâce à ces ressources, nous prévoyons d’employer 750 équivalents temps plein. Au cours de cette période, nous comptons réaliser environ 100 audits d’états financiers, au moins 25 audits de performance et 4 examens spéciaux. Nous travaillons présentement sur des audits comprenant un large éventail de sujets, y compris la cybersécurité des réseaux et systèmes gouvernementaux, les centres d’appel, l’apprentissage et la garde des jeunes enfants et le logement du personnel des Forces armées canadiennes.
[Traduction]
Lors de l’exercice financier 2025-2026, nous continuerons à travailler sur plusieurs initiatives au sein de notre organisation, notamment la collaboration avec les parties prenantes; notre initiative de transformation; et des projets visant à maintenir et perfectionner une main-d’œuvre qualifiée, diversifiée et engagée. Ces initiatives sont essentielles pour soutenir nos efforts visant à fournir des services de qualité à ceux que nous auditons et à répondre aux besoins des législateurs et de toute la population canadienne.
Comme vous le savez, la semaine dernière, j’ai présenté quatre rapports d’audits de performance. Nous serons heureux de répondre aux questions au sujet de ces rapports qui portent sur l’inscription en vertu de la Loi sur les Indiens; les futurs avions de chasse du Canada; les bureaux fédéraux; et les contrats de services professionnels accordés à GCStrategies Inc.
Mon bureau a aussi présenté la semaine dernière quatre rapports réalisés par le commissaire à l’environnement et au développement durable. Si les membres du comité ont des questions au sujet de ces rapports, je sais que le commissaire sera heureux de comparaître devant le comité.
Monsieur le président, pour terminer, je voudrais souligner l’engagement, le travail et le dévouement de l’équipe de professionnels de mon bureau. Je suis incroyablement fière de l’excellent travail que nous accomplissons.
Nous remercions le comité de son soutien continu et de l’usage qu’il fait de nos travaux. Nous sommes prêts à répondre à vos questions. Merci.
[Français]
Le vice-président : Merci beaucoup, madame Hogan. Nous allons passer à la période des questions. J’aimerais souligner aux sénateurs qu’ils disposent de cinq minutes maximum pour la première ronde et de trois minutes maximum pour la deuxième ronde. Je vous demande donc de poser votre question directement, et je demande aux témoins de répondre de façon succincte. Vous avez toute ma confiance. La greffière m’avisera quand le temps sera écoulé.
[Traduction]
La sénatrice Marshall : Merci, madame Hogan, de comparaître devant nous avec vos collaborateurs.
Ma question est très générale et porte sur un élément que j’ai lu dans votre audit sur l’utilisation des bureaux : le développement des systèmes au sein du gouvernement et l’état des systèmes de technologie de l’information, ou TI. Plusieurs systèmes importants sont en cours de conception, notamment pour la modernisation du versement des prestations. Vous indiquez dans votre rapport sur l’utilisation des bureaux que les systèmes d’information sont insuffisants. J’ai l’impression que, au sein du gouvernement fédéral, de nombreux systèmes sont très anciens et obsolètes, et pas seulement dans quelques ministères : le problème semble toucher l’ensemble du gouvernement fédéral. Je suis très inquiète qu’on ne s’intéresse pas davantage à l’état des systèmes du gouvernement. Pouvez‑vous nous dire quelle direction nous prenons, selon vous, et si vous croyez que les mesures prises actuellement sont adéquates? Rassurez-nous en nous disant qu’il n’y a pas lieu de s’inquiéter.
Mme Hogan : J’ai déjà publié d’autres rapports d’audit, notamment un sur la modernisation des systèmes de TI. J’ai également réalisé un audit pour évaluer l’état d’avancement du projet de modernisation du versement des prestations.
Ce que je peux vous dire sur le projet de modernisation de la technologie de l’information, c’est que nous avons relevé 7 500 systèmes qui sont jugés en mauvais état dans la fonction publique fédérale. De plus, il manque des informations précises sur le moment où ils devraient être mis hors service ou remplacés et sur le coût qu’entraîneraient les changements. Nous avons une vue d’ensemble, mais le mauvais état d’un si grand nombre de systèmes suscite des inquiétudes. Une évaluation du gouvernement même a conclu qu’il fallait investir des fonds.
Par ailleurs, les systèmes sont une chose — ils permettent de faire le travail plus efficacement et d’obtenir de meilleurs résultats —, mais il faut quand même avoir des renseignements fiables. Je me soucie toujours de la qualité des renseignements, et nos audits font généralement état de conclusions à ce sujet, car un système ne peut pas améliorer la qualité des renseignements. Si vous saisissez des informations erronées dans vos systèmes, elles vous feront faire fausse route.
Il reste encore beaucoup à faire, mais beaucoup de progrès ont déjà été accomplis. Nous continuerons de surveiller des dossiers tels que la modernisation du versement des prestations, car c’est un élément clé et essentiel à la prestation de la Sécurité de la vieillesse et du Régime de pensions du Canada, ou RPC.
La sénatrice Marshall : Hier soir, nous avons entendu le témoignage de représentants de Services publics et Approvisionnement Canada, ou SPAC, qui ont mentionné qu’ils travaillent actuellement au remplacement du système Phénix. Nous avons eu une très mauvaise expérience avec le système Phénix, et nous en subissons encore les conséquences. Et voilà que nous nous lançons dans un autre projet d’envergure. Dans quelle mesure avez-vous l’assurance ou la certitude que le prochain projet sera bien mené et que nous ne nous retrouverons pas avec un deuxième Phénix? Le système de modernisation sera-t-il similaire à Phénix? Dans quelle mesure êtes-vous confiante que ces systèmes majeurs seront réellement conçus et ne deviendront pas un problème?
Mme Hogan : En règle générale, le vérificateur général intervient après coup, une fois que les projets sont terminés. Compte tenu du nombre important de systèmes en transition, mon bureau s’efforce d’intervenir plus tôt afin de prendre le pouls de la situation et d’apporter son soutien à la fonction publique.
Nous nous penchons sur le remplacement du système Phénix. Nous examinons également le nouveau système de taxe d’accise qui a été mis en place. Je pense cependant que de nombreux enjeux entrent en ligne de compte pour le remplacement du système de paye. Dans le cadre de notre audit financier annuel, nous faisons des suivis et relevons le nombre de fonctionnaires qui reçoivent encore des payes erronées. De nombreuses erreurs sont attribuables à la saisie tardive de données dans le système ou à la saisie de données inexactes. Quel que soit le système de rémunération utilisé, les employés seront mal payés si aucun processus n’est mis en place pour garantir l’exactitude des renseignements saisis dans le système. Je ne peux pas vous donner de certitude sur un projet que je n’ai pas examiné, mais je peux dire qu’il est important que toutes les données salariales soient corrigées. De nombreuses personnes attendent depuis plusieurs années que leurs payes soient rectifiées.
La sénatrice Marshall : Mais en tant que vérificatrice générale, vous devez avoir d’emblée le pressentiment qu’un projet pourrait poser problème à l’avenir, n’est-ce pas?
Mme Hogan : Eh bien, j’ai le pressentiment qu’un nouveau système sera peut-être plus efficace, mais il n’en demeure pas moins que les règles relatives à la rémunération sont nombreuses et complexes. La fonction publique s’était engagée à faire deux choses. La première était de simplifier les règles de rémunération, mais elle devait aussi essayer de trouver un meilleur système. Je pense que la simplification est loin d’être terminée, mais il faut aussi déployer beaucoup d’efforts pour que les informations exactes soient saisies dans le système et que suffisamment de personnel puisse s’en occuper. Je ne peux malheureusement pas vous dire ce que je pense d’un système que je n’ai pas encore examiné, mais, oui, je suis inquiète.
[Français]
Le sénateur Gignac : Merci et bienvenue au Bureau de la vérificatrice générale. Dans votre audit de la semaine dernière, qui portait sur la Défense nationale, vous avez mentionné que les coûts étaient 50 % plus élevés que prévu à l’origine pour l’acquisition des F-35. Ce qui m’a dérangé, c’est le fait que ces chiffres se sont supposément basés sur des données obsolètes. Après votre témoignage, nous entendrons des représentants de la Défense nationale et nous leur poserons quelques questions. Quelle a été la réaction du ministère de la Défense nationale et quelles sont les explications que vous avez obtenues après la publication de votre rapport?
Mme Hogan : Comme vous pouvez le voir dans notre rapport, le ministère de la Défense nationale est d’accord avec toutes nos recommandations. Le fait que la première estimation de 19 milliards de dollars était basée sur de l’information obsolète est une excellente question à leur poser. De l’information plus à jour était disponible sur le coût des avions. De plus, certaines mesures d’atténuation de risque n’avaient pas été mises en place. Un meilleur suivi était exigé en ce qui concerne l’inflation et les devises étrangères. Le ministère a mis un certain temps à mettre à jour leur estimation.
L’estimation de 27 milliards de dollars vient de la Défense nationale. Nous avons aussi recommandé que le ministère fasse un suivi des coûts sur une base beaucoup plus régulière. À mon avis, une fois par année ou plus ne suffit pas pour un projet d’une telle envergure dans des devises étrangères. Je m’attends à un suivi des coûts et des risques sur une base beaucoup plus régulière.
Le sénateur Gignac : Je ne sais pas si votre mandat vous permet d’avoir accès aux contrats. Le premier ministre Carney a indiqué, en réaction à la guerre commerciale, qu’il considérait remettre en question la seconde tranche d’achat des F-35. En Amérique du Nord, on retrouve trois sites pour l’entretien des F-35, dont un se trouve à Mirabel.
Le retrait de ces contrats remettrait-il en question l’octroi à l’entreprise L3Harris de l’entretien des F-35? Si le Canada décide de ne pas aller de l’avant avec l’achat de ces avions, cela pourrait menacer plusieurs centaines d’emplois. Avez-vous accès aux contrats qui ont été signés et à toutes les dispositions où il est notamment question des conséquences si le gouvernement ne va pas de l’avant avec les achats? Les États-Unis ont commandé 2 535 appareils et nous en avons commandé 88. Or, on menace d’annuler une partie de la commande.
Mme Hogan : Il ne s’agit pas d’un contrat, mais d’une entente entre nations pour l’achat d’avions de chasse. L’entente prévoit des dispositions de négociation dans le cas où une nation souhaite rompre l’entente. Ce serait une option dans l’hypothèse où le gouvernement décide de ne pas acheter 88 avions de chasse F-35. Même si le Canada décide de se pourvoir de deux ou trois types d’avions de chasse, il y aura toujours une pénurie de pilotes qualifiés. Je suis préoccupée par le fait que la Défense nationale ne prévoit pas de combler cette pénurie de main-d’œuvre dans son plan. Des mesures supplémentaires sont donc exigées.
Nous avons constaté que la Défense nationale a pris les devants, tout en sachant qu’il faudrait améliorer les bases de Cold Lake et de Bagotville, de même que d’autres bases partout au pays. Une fois que la décision d’acheter des F-35 a été prise, beaucoup plus d’information est devenue disponible sur les exigences requises en matière de sécurité. Un autre type d’avion aura d’autres exigences et, à mon avis, cela fera augmenter le coût des installations et cela entraînera peut-être un délai avant que les bases soient prêtes à accueillir les avions de chasse. Ce sont des décisions que le gouvernement devra prendre. Pour ma part, je ne peux qu’exprimer mes préoccupations quant aux délais et aux coûts qui augmentent.
Le sénateur Gignac : Vous n’êtes pas la seule à avoir ces préoccupations.
Le sénateur Moreau : Bienvenue, madame la vérificatrice générale. Je suis heureux de vous rencontrer pour une première fois, de même que les membres de votre équipe. Mes questions feront suite à celles de mon collègue au sujet des avions de chasse. Avez-vous une évaluation des coûts que représenterait la décision du gouvernement de mettre fin à l’entente avec les autres nations pour l’acquisition de F-35?
Mme Hogan : Le gouvernement a pris la décision d’acheter 88 avions de chasse dans le cadre d’une entente de nation à nation. Pour l’instant, il s’est engagé à acheter quatre avions et des pièces pour huit autres appareils. Ces pièces ont une longue durée de vie. Le gouvernement pourrait-il négocier dans le but d’annuler l’achat ou s’en tenir à ce nombre d’avions? Cette décision lui appartient. Toute décision visant à changer de direction entraîne des coûts supplémentaires et peut causer des délais.
Le sénateur Moreau : Avez-vous évalué les coûts supplémentaires qu’entraînerait la décision du gouvernement de mettre fin à l’entente aujourd’hui, entre les nations, pour l’acquisition des F-35?
Mme Hogan : L’entente parle seulement d’une négociation exigée de nation à nation.
Le sénateur Moreau : J’imagine qu’on a une idée des coûts déjà engagés par le gouvernement et qui, alors, ne serviraient à rien.
Mme Hogan : Je sais que le gouvernement s’est déjà engagé à hauteur de 935 millions de dollars pour l’achat de quatre avions et des pièces pour huit autres appareils. Chaque année, des dépenses sont destinées au bureau de gestion situé aux États‑Unis. Toutefois, au-delà de ces montants, il n’y a pas d’autre engagement en ce moment.
Le sénateur Moreau : Êtes-vous en mesure de nous dire si les installations en construction à l’heure actuelle ou les améliorations aux bases de Bagotville et de Cold Lake pourraient être utilisées à d’autres fins ou pour d’autres types d’appareils, ou ces dépenses auront-elles été faites en vain?
Mme Hogan : Il ne fait aucun doute que certaines dépenses seront perdues. Toutefois, un autre avion de chasse aura certaines exigences au chapitre des installations. La Défense nationale a pris de l’avance pour commencer à améliorer ses installations. Une fois que la décision d’acheter des F-35 a été prise, ils ont obtenu plus de détails sur les exigences. C’est pourquoi ils accusent un retard de trois ans sur les installations. Celles-ci ne seront pas en place lorsque les premiers avions arriveront. Je m’attends à ce que ce soit le cas si l’on décide d’acheter d’autres types d’avions.
Le sénateur Moreau : En tant que vérificatrice générale, si le gouvernement décidait dès demain de mettre fin au contrat des F-35, vous auriez à vous poser la question et à faire une évaluation pour déterminer si la décision est favorable aux contribuables. Selon vous, aujourd’hui, si vous deviez conseiller le gouvernement, lui recommanderiez-vous de mettre fin à l’entente entre les nations, compte tenu des coûts déjà engagés?
Mme Hogan : La décision du gouvernement sera prise durant l’été. Le premier ministre a demandé un rapport d’analyse. Je n’ai pas d’opinion sur ce qui y sera inclus.
Le sénateur Moreau : Je ne vous demande pas votre opinion sur la décision qui sera prise. Je vous demande quelle serait la recommandation que vous feriez au gouvernement en vue de prendre cette décision, compte tenu des coûts déjà engagés.
Mme Hogan : Les dépenses sont déjà engagées. La décision de changer une approche est une décision qui, je l’espère, sera basée sur ce qui est le mieux pour les Forces armées canadiennes. Il faut prendre la meilleure décision pour nos forces armées.
Le sénateur Moreau : Indépendamment des coûts?
Mme Hogan : Non, il faut considérer les coûts, mais les améliorations aux infrastructures seront exigées pour n’importe quel avion que l’on achètera. Ils peuvent continuer d’améliorer leurs installations, et je crois que c’est nécessaire; des installations pour la formation des pilotes seront nécessaires et des améliorations aux installations dans le Nord sont nécessaires. Tous les coûts engagés ne seront pas des dépenses perdues.
[Traduction]
La sénatrice MacAdam : Je vous souhaite la bienvenue aujourd’hui. Je suis ravie de vous voir.
En ce qui concerne votre rapport Assurer la capacité future du Canada en matière d’avions de chasse, vous avez mentionné que, en 2018, lors de votre dernier audit de la force de chasse du Canada, vous aviez souligné que l’un des principaux obstacles au sein de la Défense nationale était le manque de pilotes qualifiés. Vous y avez fait allusion aujourd’hui. À l’époque, le ministère avait accepté vos recommandations à cet égard, et, six ans plus tard, vous dites que le problème de personnel persiste. Je me demande si vous pouvez expliquer pourquoi les recommandations de vos audits précédents n’ont pas été adéquatement prises en compte ou pourquoi nous nous trouvons dans cette situation aujourd’hui.
Mme Hogan : Eh bien, je pense que nous sommes dans cette situation... La situation est légèrement différente de celle de 2018. Il est évidemment préoccupant que le problème existe. Je pense que les forces armées ont des préoccupations et des problèmes en matière de recrutement, et c’est pourquoi nous allons également procéder à un audit sur le recrutement et la rétention dans les forces armées. Or, la situation a quelque peu changé, car nous faisons maintenant la transition des CF-18 aux CF-35. Pendant un certain temps, il faudra des pilotes qualifiés pour piloter les deux types d’appareils. Les pilotes déjà à l’emploi doivent se perfectionner et suivre une nouvelle formation, mais il faut aussi recruter et former de nouveaux pilotes. Ce qui est préoccupant, c’est que même si la Défense nationale a un plan, celui-ci prévoit qu’il y aura quand même une pénurie de pilotes. Voilà pourquoi il faut agir maintenant. Notre audit a révélé que bon nombre des stratégies d’atténuation des risques du ministère étaient très réactives. À ce ministère, on attend qu’un risque se présente pour ensuite élaborer un plan, au lieu de prendre les devants et de l’atténuer. J’aimerais que le ministère change cette approche, en particulier en ce qui concerne les pilotes.
La sénatrice MacAdam : Merci.
J’aimerais savoir si vous pouvez nous dire quelques mots sur votre façon de choisir vos audits de performance — je sais que vous en avez mentionné quelques-uns, ceux sur le personnel ou le logement pour les forces armées, etc. — et si vous en avez beaucoup de planifiés dans le secteur de la défense, une grande priorité du gouvernement. Pouvez-vous nous parler de cela?
Mme Hogan : Vous en avez mentionné deux que nous avons dans le secteur de la défense. Nous en faisons un sur le logement pour les Forces armées canadiennes, mais aussi sur le recrutement au sein des forces. Nous voulons aussi en faire un sur la culture au sein des forces à un moment donné.
Le calendrier des audits dépend. Nous procédons une fois par année à une analyse globale de l’environnement, de ce qui se passe autour de nous. Nous consultons les sous-ministres et d’autres hauts fonctionnaires au sein du gouvernement. Nous consultons les sénateurs, les députés. Nous examinons les demandes qui nous viennent du public, les lettres des élus. Nous rassemblons toute cette information, nous évaluons le risque dans certains secteurs et nous préparons nos audits. Nous examinons actuellement les audits pour 2027. Toutefois, nous nous gardons une marge de manœuvre pour pouvoir réagir à ce qui se passe autour de nous, aux nouvelles décisions du gouvernement ou aux demandes des parlementaires. Le processus n’est pas simple et mobilise beaucoup de gens dans mon bureau, mais la décision finale quant au choix des audits me revient.
Nous en avons quelques-uns de prévus au ministère de la Défense nationale, le MDN. Nous allons aussi examiner le recrutement à la Gendarmerie royale du Canada, la GRC, et l’approvisionnement en munitions. Nous en avons prévu de nombreux dans les secteurs de la défense et de la sécurité, étant donné le financement que le gouvernement a décidé d’y allouer récemment.
La sénatrice MacAdam : Avez-vous déjà reçu une demande du Sénat de procéder à un audit?
Mme Hogan : Des demandes se trouvent dans ses rapports... Le rapport que nous venons de déposer la semaine dernière sur l’inscription au titre de la Loi sur les Indiens était un sujet provenant d’un rapport du Sénat. Nous surveillons tout cela, nous essayons de faire un tri et nous évaluons les risques, mais comme vous savez, les sujets ne manquent pas au gouvernement fédéral: soins de santé, logement, dépenses militaires ou de défense, sécurité, systèmes de TI, etc. Il s’agit pour nous de produire des audits opportuns et pertinents pour appuyer les parlementaires.
La sénatrice MacAdam : Je comprends très bien. Merci beaucoup.
La sénatrice Kingston : Bon retour. C’est bon de vous revoir tous.
J’ai des questions au sujet du logement et de l’approvisionnement. Dans votre audit, vous avez parlé des espaces de bureau et de la conversion des biens excédentaires en logements abordables, une initiative dirigée par Services publics et Approvisionnement Canada, SPAC, qui n’a atteint qu’environ 2 % de son objectif au cours de la période de 2019 à 2024. Cela va à contre-courant des besoins en logements abordables et de tout ce qui se passe actuellement. Avant la pandémie, tout se mettait en place. Vous avez dit que la Société canadienne d’hypothèques et de logement, la SCHL, a obtenu des engagements pour la construction de 4 000 logements d’ici 2027-2028, mais que seulement 49 % de ces logements seront prêts à être occupés d’ici là. Mes questions portent sur SPAC et la SCHL. Que proposeriez-vous de faire pour accélérer la réduction des espaces de bureau fédéraux et convertir les biens excédentaires en logements abordables? Que doit-on faire dès maintenant pour accélérer la cadence?
Mme Hogan : Il se passe beaucoup de choses et il y a beaucoup d’intervenants, et je vais commencer par parler de la libération des espaces, puis passer à leur conversion en logements abordables.
Services publics et Approvisionnement Canada a maintenu son engagement de réduire les espaces de bureau de 50 %, mais après avoir reçu les sommes prévues dans le budget de 2024, leur dernier plan montre que le ministère prévoit une réduction de seulement 33 %. Ce plan dépend beaucoup de certains grands locataires fédéraux qui doivent accepter de réduire leurs espaces, et nombre d’entre eux n’ont pas encore signé d’entente à cette fin. Il faut donc que les locataires fédéraux y consentent d’abord. Puis, on ne peut pas se contenter de quitter un édifice, n’est-ce pas? Il faut trouver un espace dans un autre édifice. Il faut aussi les moderniser ou changer leur apparence pour y accueillir des fonctionnaires, puis avoir l’accord des locataires fédéraux pour procéder au déménagement. Il y a donc beaucoup d’éléments qui entrent en ligne de compte et qui expliquent le peu de progrès accomplis dans ce dossier.
Je peux vous dire, par exemple, que nous avons levé la main, même si nous ne payons pas de loyer. Nous sommes un locataire fédéral et beaucoup d’entre eux ne paient pas de loyer. De nombreux ministères n’ont donc pas d’incitatif financier à le faire. Nous avons levé la main et dit que nous voulions réduire notre empreinte ici à Ottawa et avons demandé de l’aide pour le faire. J’ose espérer que les administrateurs généraux dans la capitale vont regarder s’ils peuvent nous emboîter le pas.
Au sujet de la transition vers les logements abordables, nous avons constaté quelques problèmes. Les édifices qui sont mis à disposition ne se trouvent pas dans les collectivités où les besoins en logements abordables sont les plus grands. Il n’y a pas d’arrimage parfois entre les deux. Je pense qu’il faut mieux planifier et cibler le tout.
J’encourage aussi la SCHL à être plus claire dans ses rapports sur le logement abordable. Nous avons dit qu’elle est sur la bonne voie pour atteindre sa cible, mais sa cible porte sur l’obtention d’engagements, et les engagements ne sont pas des logements. J’aimerais qu’elle fasse rapport sur la date à laquelle les logements pourront être habités et qu’elle veille à ce que sa mesure de l’abordabilité soit calculée en fonction du revenu des ménages et non pas seulement en fonction du loyer médian du marché. À Toronto, le loyer médian du marché est inabordable pour beaucoup de ses habitants.
La sénatrice Kingston : Tout à fait, et il semble que les logements abordables ici à Ottawa soient un problème et un besoin. Libérer des édifices dans la ville semble donc être une bonne idée.
Selon une étude menée avant la pandémie, 50 % des espaces de bureau publics ou fédéraux pourraient être convertis, mais vous dites que seulement 33 % ont fait l’objet d’un accord. Comment expliquez-vous cela? Cela fait longtemps. Nous travaillons différemment, et les attentes des employés concernant leur lieu de travail ont changé. Pourquoi sommes-nous si loin d’une cible qui a été établie avant que certains de ces éléments deviennent manifestes pour la population?
Mme Hogan : Vous avez raison de dire que Services publics et Approvisionnement Canada avait établi bien avant la pandémie que 50 % des espaces à bureau fédéraux étaient sans doute sous-utilisés, non pas vacants, mais sous-utilisés. Par exemple, un organisme dans un édifice et sur quelques étages pouvait avoir des espaces sous-utilisés, alors que tous les autres les utilisaient pleinement. Pour faire avancer ce dossier, nous avons constaté qu’un élément manquant était l’information sur l’utilisation quotidienne de ces édifices.
Dans ce dossier, il ne faut pas oublier que la fonction publique a augmenté, puis qu’elle a changé ses façons de travailler.
La sénatrice Kingston : Oui.
Mme Hogan : Avant la pandémie, les employés avaient des espaces de bureau attitrés qui doivent maintenant être convertis. J’utilise le mot « moderniser », parce qu’il faut en faire des espaces à la carte, afin qu’ils puissent être occupés par diverses personnes au cours d’une même semaine. Pour y arriver, il faut du temps et de l’argent.
Nous avons constaté qu’entre 2019 et 2024, Services publics et Approvisionnement Canada n’a pas reçu de fonds pour le faire. Ils les ont reçus en 2024.
La sénatrice Kingston : L’an dernier.
Mme Hogan : C’est ce qui explique la réduction de 2 % seulement. J’espère que ce pourcentage augmentera. Encore faut‑il que les locataires fédéraux acceptent de déménager ou de réduire leurs espaces. Ce n’est pas la décision d’une seule personne.
La sénatrice Pate : Je remercie les témoins d’être avec nous.
Madame Hogan, vous avez parlé plutôt de l’inscription au titre de la Loi sur les Indiens, et ma question porte sur ce sujet. On demande, encore une fois, aux femmes autochtones d’attendre pour obtenir l’égalité. Le projet de loi S-2 est le dernier en date d’une série de solutions incomplètes pour remédier à la discrimination fondée sur le sexe présente dans la Loi sur les Indiens. Le gouvernement demande, encore une fois, aux femmes autochtones d’attendre pour que l’inadmissibilité de la seconde génération et d’autres injustices soient corrigées, même si les conclusions de votre rapport semblent claires que le gouvernement ne s’est pas penché sur l’inscription — notamment celle des femmes et de leurs descendants qui ont été précédemment privés de leur statut — avec le sérieux qu’exige cette question, étant donné les obligations du Canada en vertu de ses propres lois et ses engagements internationaux à l’égard de l’égalité, y compris dans le cadre des objectifs de développement durable, comme vous le mentionnez dans votre rapport. Votre rapport mentionne aussi que la norme de service de six mois du ministère pour les demandes d’inscription n’a pas été rendue publique et qu’elle n’a pas été respectée 81 % du temps. Savez-vous s’il existe d’autres exemples où un ministère n’a pas respecté ses normes de service à un tel niveau?
Mme Hogan : Pouvez-vous répéter la question?
La sénatrice Pate : Bien sûr. Savez-vous s’il existe d’autres exemples où un ministère n’a pas respecté ses normes de service à un tel niveau?
Mme Hogan : Le premier audit qui me vient à l’esprit est celui sur la prestation des services aux anciens combattants. La norme de service n’était systématiquement pas respectée et les délais étaient longs. C’est tout aussi préoccupant ici quand on regarde certains cas d’inscription prioritaire au titre de la Loi sur les Indiens. Les aînés, les personnes qui sont d’âge mûr ou qui ont des problèmes de santé devaient patienter 10 mois — même si c’est moins que la moyenne de 16 mois —, soit un temps d’attente très long pour quelqu’un inquiet de sa santé.
Je crois que le ministère doit faire preuve de plus de transparence sur les temps d’attente et la norme de service, et qu’il doit trouver des façons d’être plus efficaces parce que les temps d’attente que nous avons mentionnés — soit 10 ou 16 mois — n’incluent pas les périodes pendant lesquelles le ministère attend des documents des provinces ou des territoires, ce qui veut dire que les temps d’attente sont encore plus longs que ce que nous avons mentionné. C’est préoccupant.
La fonction publique peut être plus efficace quand on regarde la rapidité avec laquelle des documents importants, comme un passeport, peuvent être délivrés. Pourquoi ne peut-on pas traiter une demande d’inscription au titre de la Loi sur les Indiens plus rapidement? Nous avons formulé des recommandations pour les encourager à faire des gains d’efficacité.
La sénatrice Pate : Selon votre rapport, 22 % des inscriptions de cas non complexes se faisaient le jour même, pour appuyer ce que vous venez de dire, mais il fallait en moyenne 44 jours pour rendre une décision. Le ministère a-t-il dit pourquoi il considérait que six mois étaient une norme de service équitable pour ceux qui attendent une inscription? Est-ce qu’on vous a expliqué pourquoi il y a tant d’écart dans les temps pour rendre une décision?
Mme Hogan : Pourquoi six mois? Je vais devoir poser la question à quelqu’un pour obtenir ce niveau de détail. Quel est le temps d’attente réel? C’est la cible qu’on tente d’atteindre. De toute évidence, elle n’est pas atteinte, alors il faut examiner la façon de procéder et trouver un moyen d’être plus efficace.
Vous avez commencé par parler de la discrimination. Certaines des modifications apportées à la loi en 2017 et en 2019 visaient à éliminer cette discrimination. En procédant à l’audit, nous espérions que ces cas soient traités différemment, mais ils sont mélangés à tout le reste, alors les gens attendent. En fait, nombre d’entre eux font partie des dossiers en attente. Je pense que le pic de demandes émane de ces modifications législatives et que cela explique en partie la lenteur. Il se peut que le ministère ait un problème de ressources qu’il doit identifier, mais je pense qu’il peut aussi améliorer ses façons de faire.
La sénatrice Pate : Le financement fait partie des éléments que vous avez mentionnés. J’allais vous poser la question.
Je me demande, si vous étiez à ma place ou à celle de l’un d’entre nous, quelles questions poseriez-vous au ministère lorsqu’il comparaîtra devant nous?
Mme Hogan : J’ose espérer que nous les avons toutes posées pendant l’audit. Je vous encourage toujours à obtenir d’eux des réponses. Pourquoi il leur faut tant de temps? Pourquoi 16 mois? Pourquoi 10 mois? Les cas complexes sont traités à l’administration centrale, et les cas non complexes dans les bureaux régionaux, alors il est clair que certains peuvent être traités rapidement.
Je leur poserais des questions sur le financement des partenaires. Les sources fiables ou les administrateurs du registre dans les collectivités sont censés être la première étape du transfert aux collectivités des Premières Nations. Nous avons constaté que le financement n’a pas été bonifié depuis 1994 ou qu’il est tellement minime qu’il n’équivaut même pas au salaire minimum pour une personne travaillant une journée par semaine. Si on veut vraiment faire le transfert de la fonction publique aux collectivités, il faut s’assurer que les collectivités sont bien financées, formées et équipées pour prendre le relais.
[Français]
Le vice-président : Merci beaucoup. Je vais céder ma place au président officiel.
Le sénateur Claude Carignan (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La sénatrice Galvez : Je vous remercie beaucoup, madame Hogan, d’être ici aujourd’hui pour répondre à nos questions.
À la lecture de vos rapports, on constate malheureusement que les problèmes persistent dans la gouvernance et la prestation des services. La surveillance centrale est limitée. L’analyse des risques est incomplète. Nous avons trop recours à la sous‑traitance, les coûts des grandes acquisitions augmentent et la surveillance du rendement est insuffisante. Nous avons discuté de certains de ces sujets hier avec le directeur parlementaire du budget.
Un élément important pour moi, c’est d’être préparé aux crises. C’est très important de nos jours. Étant donné l’augmentation des risques systémiques comme les catastrophes climatiques, les feux de forêt, les cybermenaces, la saga des droits de douane et les enjeux économiques, votre bureau croit-il que les ressources sont suffisantes dans le budget pour prévenir ou gérer les risques, accroître la résilience et assurer la protection civile?
Mme Hogan : Je suis convaincue que M. Hayes voudra intervenir, alors je serai brève.
J’attirerais votre attention sur un audit que nous avons mené sur la préparation aux urgences dans les collectivités des Premières Nations. Nous avons constaté que le gouvernement consacre plus d’argent aux interventions qu’à la prévention. Je pense qu’il faut assurément remédier à cela. Bien sûr, nous ne pourrons jamais prévoir l’imprévisible, mais prendre diverses mesures et accroître la prévention seraient moins coûteux pour le gouvernement à long terme.
Je sais que M. Hayes veut vous dire un mot sur les leçons apprises.
La sénatrice Galvez : Je reviens tout juste de Genève, où les Nations unies ont tenu la plateforme mondiale sur la réduction des risques, et on y a parlé d’un grand nombre de stratégies. Comme vous l’avez mentionné, malheureusement, nous concentrons nos efforts sur l’intervention, sans faire beaucoup de prévention. C’est sans doute parce que nous ne sommes pas conscients des sommes que la prévention nous ferait économiser.
Andrew Hayes, sous-vérificateur général, Bureau du vérificateur général du Canada : Je vous remercie. Je pense que c’est un message très puissant. Comme on dit, vaut mieux prévenir que guérir, et les gouvernements devraient prendre cela en considération dans leurs prévisions.
J’aimerais souligner que le commissaire à l’environnement et au développement durable a présenté un rapport la semaine dernière sur la Stratégie nationale d’adaptation, et qu’on y traite de beaucoup de points que vous avez soulevés. Il s’inquiète notamment du fait que la stratégie a été mal conçue par le gouvernement et que nous sommes l’un des derniers pays de l’OCDE à la publier, après nous être engagés à le faire pendant des années et avoir reçu des recommandations d’audit à ce sujet. Il mentionne notamment le fait que la stratégie n’inclut pas une analyse économique des ressources nécessaires et un cadre adéquat pour mesurer les résultats, effectuer la surveillance et faire rapport. Elle ne contient pas non plus de cibles concernant des risques sanitaires importants comme la maladie de Lyme et la fumée des feux de forêt. Le gouvernement doit donc penser en fonction de l’avenir et tenir compte des aspects économiques, sociaux et environnementaux. Cela nous amène aux leçons apprises. Le commissaire présente six leçons apprises importantes qui reposent sur près de 30 ans d’audits sur l’environnement et le développement durable effectués par notre bureau.
La sénatrice Galvez : Merci.
Dans la même veine, madame Hogan, à votre avis, la structure et la présentation actuelles du Budget principal des dépenses et du Budget supplémentaire des dépenses (A), étant donné que nous n’avons pas de budget, procurent-elles aux parlementaires assez de transparence pour qu’ils s’acquittent de leur rôle de surveillance, surtout en l’absence d’un budget, comme je l’ai dit, en ce qui a trait à des mesures importantes comme les projets de loi C-4 et C-5, qui vont certainement coûter cher?
Mme Hogan : Il est inhabituel de commencer un exercice sans budget. C’est déjà arrivé, mais c’est très inhabituel, et vous êtes donc tenus de vous tourner vers d’autres mécanismes. Je pense qu’un budget encourage une transparence globale.
Ce que je vais vous dire à propos de certaines des dépenses budgétaires, c’est qu’environ 60 % de ce qui fait l’objet d’un vote est prévu par la loi, ce qui signifie que c’est inscrit dans des lois. Dans les faits, c’est dans les 40 % qui restent qu’il faut beaucoup plus de transparence et de reddition de comptes, et je pense qu’il revient à vous, les parlementaires, comme vous le faites maintenant, d’essayer de poser des questions pour obtenir des précisions sur toute cette information. Je pense que des audiences comme celles-ci sont une bonne façon d’obtenir ces précisions, mais c’est le budget qui permet vraiment à tout le monde d’y voir clair.
Le sénateur Loffreda : Mesdames Hogan et Pierre, messieurs Hayes et Drapeau, je vous souhaite la bienvenue ce matin au Comité sénatorial des finances. Il est formidable de vous voir ici.
J’ai toujours adopté la devise : « Il vaut mieux écouter en premier et parler en dernier. » Il y a des avantages à cela. Nous avons couvert beaucoup de points, mais j’aimerais changer de cap un peu. Qu’est-ce que nous n’avons pas examiné? J’aimerais poser une question qui n’est pas liée à vos rapports récents. Je pense que vous en avez parlé en long et en large. Félicitations; vous faites un excellent travail et vous êtes toujours très perspicace.
Vous comparaissez devant nous aujourd’hui dans le cadre de l’étude de notre comité qui porte sur le Budget principal des dépenses et le Budget supplémentaire des dépenses (A), et j’aimerais donc me concentrer sur ce que votre bureau demande dans le Budget principal des dépenses. Je souligne que les dépenses de votre bureau pour 2023-2024 étaient de 134,9 millions de dollars, et que le montant prévu pour 2024-2025 est de 136,2 millions de dollars, c’est-à-dire le montant demandé dans le Budget principal des dépenses de l’exercice en cours. J’ai deux questions, qui seront suivies d’une question complémentaire si j’ai le temps.
Premièrement, je ne vois pas d’autres fonds demandés dans le Budget supplémentaire des dépenses (A). Envisagez-vous de faire d’autres demandes de fonds dans les budgets supplémentaires des dépenses (B) ou (C)? Habituellement, votre bureau demande-t-il des fonds supplémentaires au-delà de ce qui est demandé dans le Budget principal des dépenses?
Deuxièmement, puisque votre financement pour 2024-2025 est essentiellement le même que celui de l’année précédente, devrions-nous déduire que votre bureau possède les ressources nécessaires pour remplir son mandat? Croyez-vous que le niveau de financement suffit pour répondre à vos besoins opérationnels?
Mme Hogan : Notre budget provient du Budget principal des dépenses. C’est là que se trouve la majorité de notre financement. Il n’est ajusté que pour tenir compte des augmentations économiques liées aux salaires. Nous ne présentons donc normalement pas d’autres demandes, et ce n’est d’ailleurs pas notre intention.
Sommes-nous adéquatement financés? Eh bien, nous avons assez de fonds pour faire le travail que nous faisons actuellement. Si le Parlement souhaite accroître notre financement pour que nous puissions en faire plus, nous n’allons jamais refuser. Je ne connais pas de bon vérificateur qui dirait qu’il ne veut pas faire une autre vérification.
Une partie du financement que nous recevons est destiné à certaines de nos mesures internes, comme nos systèmes de TI et leur mise à niveau qui s’imposait depuis longtemps. Nous avons un peu de difficulté à dépenser une partie de ces fonds puisque nous dépendons du soutien d’autres partenaires dans la fonction publique pour dépenser cet argent. Chaque année, nous ne dépensons pas tout ce que nous recevons en partie à cause de cela.
Je pense que la dernière année a également été très unique. Nous obtenons habituellement des suppléments pour les salaires dans le Budget supplémentaire des dépenses (C). Puisque nous ne l’avons pas reçu — comme tout le monde —, nous avons dû interrompre des activités internes. Étant donné que tout cet argent est lié aux salaires, nous avons dû ralentir certaines choses à l’interne. Puis, vers la fin du mois de mars, nous avons reçu une partie de ce financement. De toute évidence, nous ne pouvons pas dépenser cet argent de manière prudente alors qu’il ne reste que quelques semaines. Pendant deux années, nous n’allons pas utiliser tous nos crédits, mais notre intention est toujours de tout dépenser.
Le sénateur Loffreda : Merci de votre réponse.
Lorsque je regarde l’exercice 2025-2026, je vois que le Bureau du vérificateur général du Canada a demandé une hausse de 6,9 % de son financement. Pouvez-vous expliquer les principales raisons de cette hausse? Je suppose que c’est surtout dans le contexte de votre diminution prévue des dépenses en 2024-2025, si je puis dire. De quelle façon ces ressources supplémentaires vont-elles renforcer votre capacité de vérification ou l’exécution de votre mandat? Qu’est-ce qui explique la hausse de 6,9 %, à la lumière de ce que vous venez tout juste de dire?
Mme Hogan : Chaque année, lorsqu’on sait qu’un montant ne sera pas dépensé, on demande un réaménagement; je crois que c’est le terme utilisé dans la fonction publique. On peut reporter 5 % de son budget et le demander l’année suivante. Donc, ce que vous voyez, c’est notre demande pour obtenir un certain financement. Une partie de l’argent est destinée à un projet d’immobilisations, et c’est donc distinct du budget d’exploitation ordinaire. Est-ce que c’est clair? Je veux être certaine de bien l’avoir expliqué. Ce n’est pas une hausse budgétaire. C’est juste nous qui disons : « Nous n’avons pas tout dépensé. Pouvons‑nous dépenser cet argent l’année prochaine? » Presque 90 % de notre budget principal des dépenses est consacré aux salaires.
Le sénateur Loffreda : Merci.
[Français]
Le sénateur Dalphond : Pour faire suite à l’intervention du sénateur Loffreda, j’ai aussi des questions au sujet de votre budget. On parlait d’un budget de 136 millions de dollars. Combien d’employés avez-vous?
Mme Hogan : Nous avons environ 750 personnes à temps plein.
Le sénateur Dalphond : Le système de gestion de la paie que vous utilisez est-il celui du gouvernement? Avez-vous votre propre système de gestion pour la paie?
Mme Hogan : Nous sommes des fonctionnaires. Nous sommes tous payés par le système de gestion de la paie Phénix. Par contre, nous avons des employés à notre bureau qui gèrent les paies. Ils portent beaucoup d’attention aux détails. Nous avons très peu d’erreurs dans notre paie. Nous sommes très chanceux de ce côté-là.
Le sénateur Dalphond : Vous anticipiez ma question. Au Bureau du vérificateur général du Canada, les paies sont pratiquement exactes à 100 %?
Mme Hogan : Je ne sais pas si elles sont exactes à 100 %, mais il y a très peu d’erreurs de paie. La plupart du temps, si un individu ne reçoit pas le bon montant, c’est parce qu’on l’a accueilli d’un autre ministère et qu’il faut du temps pour transférer les dossiers relatifs aux ressources humaines pour que la paie soit bien entrée dans Phénix.
Le sénateur Dalphond : Sur le plan de l’utilisation de l’espace, est-ce que vous avez une politique pour réduire l’espace que vous utilisez pour l’hôtellerie, comme vous l’avez dit plus tôt, au lieu d’avoir des bureaux permanents qui ne sont pas nécessairement utilisés tout le temps?
Mme Hogan : Absolument. Comme presque tous les autres ministères, tout le monde avait un bureau réservé avant la pandémie, mais on a constaté que certains de nos employés, dont les vérificateurs, devaient être chez des clients de temps en temps et au bureau. On n’avait pas besoin de notre espace, alors on a commencé un processus de rénovation et de réduction de notre espace à Ottawa. Actuellement, on utilise quatre étages et on essaie de redonner environ deux des quatre étages pour l’hôtellerie. En ce moment, on travaille sur deux étages pendant que la construction a lieu sur les deux autres.
Le sénateur Dalphond : Il y aura donc une réduction d’environ 50 % de l’espace requis?
Mme Hogan : À Ottawa, oui, d’environ 50 %. On a des bureaux régionaux et, chaque fois que notre bail est renouvelé, on fait tout ce qu’on peut pour réduire l’espace, parce qu’on veut avoir de l’hôtellerie dans les bureaux régionaux. Souvent, les gens dans les bureaux régionaux servent le Nord, alors ils sont souvent partis dans les territoires et on n’a pas besoin de beaucoup d’espace.
Le sénateur Dalphond : Est-ce que vous avez réussi à faire les aménagements avec les budgets requis pour transformer les bureaux en hôtellerie? Vous dites que les budgets... Tout le monde souhaite réduire l’espace, mais le problème est qu’on n’a pas assez d’argent pour payer les coûts des transformations. De votre côté, avez-vous eu les budgets suffisants?
Mme Hogan : Ce n’est pas dans notre budget. Le budget visant à réduire et rénover l’espace est géré par Services publics et Approvisionnement Canada. On a fait la demande, comme tous les autres ministères. On est à la queue leu leu pour les changements. Ce sont vraiment eux qui gèrent le projet et nous sommes les clients. Est-ce que j’aimerais que cela aille plus vite? Absolument. Comme toute rénovation, on voudrait que cela aille plus vite pour accommoder nos employés. On accuse certains retards, mais on est quand même bien servi à nos deux étages.
Le sénateur Dalphond : Est-ce que vous êtes inquiète du fait qu’on va doubler, voire possiblement tripler le budget en matière de défense? Quand je regarde votre rapport sur les F-35, beaucoup d’éléments n’avaient pas été pris en considération dans la planification. Si on se met à doubler ou tripler le budget, il y aura des bateaux, des sous-marins et des bases. Est-ce que vous êtes inquiète ou rassurée par la réponse du ministère de la Défense à vos suggestions?
Mme Hogan : Je ne connais pas tous les détails de l’augmentation du budget, mais je crois qu’une partie est liée aux salaires des individus. Il y a une partie qui sera dépensée. Il y a une pénurie de main-d’œuvre. C’est sûr que c’est pour cette raison qu’on a entamé un audit sur le recrutement à la Défense nationale, pour les aider à connaître la raison de cette pénurie de main-d’œuvre. On le voit dans notre rapport sur les avions de chasse.
Il faut aussi s’attendre à ce que, lorsqu’il y a des projets d’envergure comme les avions de chasse, les sous-marins et les bateaux, s’il y a des changements durant le projet sur les exigences, cela entraîne des délais. Quand il y a des délais, l’argent est poussé dans l’avenir pour être dépensé. Alors oui, je suis inquiète. Nous avons fait une recommandation, dans notre rapport sur les avions de chasse, pour que l’on fasse un suivi beaucoup plus régulier et accru sur les dépenses, mais aussi sur la gestion de risque dans un gros projet comme les avions de chasse. La Défense nationale avait constaté que l’inflation et les fluctuations dans les devises étrangères étaient importantes, mais ils n’ont pas fait de suivi.
Le sénateur Dalphond : Merci.
Le sénateur Forest : D’une part, on parle de bureaux. Dans votre rapport sur les bureaux fédéraux, vous dites que le gouvernement espère réduire la superficie de ses bureaux et économiser 3,9 milliards de dollars au cours des 10 prochaines années. Or, on constate que, depuis 2019, on n’a pas vraiment réduit la superficie, parce que les espaces de 6 millions de mètres carrés louables en 2019-2020 ont été réduits à 5,9 millions. C’est une très modeste réduction. Est-ce qu’on retrouve les économies anticipées à même le budget, donc des économies qui, normalement, auraient dû se réaliser mais ne se sont pas matérialisées?
Mme Hogan : Je ne pense pas que vous trouverez des économies dans le budget; ce sont des dépenses. On va voir des dépenses au lieu d’un revenu dans le budget. En ce moment, il faut payer pour l’entretien d’un édifice et faire des paiements pour les taxes foncières, les paiements qui remplacent les taxes foncières. Tant que le gouvernement est dans un édifice, ces coûts existent. Une fois qu’on libère un édifice et qu’on le vend, ces coûts n’existent plus. C’est vraiment une estimation des dépenses qui ne seront pas faites plutôt que des revenus dans l’avenir.
On a aussi demandé à Services publics et Approvisionnement Canada d’être clair avec l’information. S’ils vendent un édifice, qu’est-ce qu’ils ont reçu de la vente? Cette information est difficile à trouver. Elle sera dans les comptes publics, mais elle est difficile à trouver. On a aussi encouragé la transparence à ce sujet.
Le sénateur Forest : Quand on vend un édifice, selon vous, devrait-on normalement appliquer le fruit de la vente sur notre capitalisation, étant donné qu’on avait capitalisé l’édifice, et non pas sur notre budget d’opérations courantes?
Mme Hogan : Oui. Il y a les normes comptables et d’autres aspects importants lorsqu’on vend un édifice, mais en ce moment, il y a un grand manque de transparence dans les informations liées aux immeubles de bureaux. On a fait une comparaison avec l’Australie, qui a beaucoup plus d’information dans le domaine public. Cette information est requise, à mon avis, pour améliorer la gestion des bureaux. C’est bon de connaître le nombre de pieds carrés, mais il faut savoir comment ils sont utilisés au quotidien pour être en mesure de régler le casse-tête, de bouger les individus dans les édifices et de libérer ces derniers pour les vendre.
Le sénateur Forest : Au fond, ce n’est pas vraiment de la saine gestion si on paie l’épicerie en vendant ses actifs. Normalement, cela devrait s’appliquer sur la capitalisation.
Mme Hogan : Oui.
Le sénateur Forest : Pour ce qui est des logements abordables, je vous remercie d’avoir souligné dans votre rapport que la vente de terrains vise surtout pour l’aide au logement locatif actuellement. Pourtant, les besoins existent. J’ai d’ailleurs rencontré des représentants des Manoirs Ronald McDonald’s et des représentants d’organismes qui aident les familles et les enfants et de maisons qui viennent en aide aux victimes de violence conjugale, qui ont déploré le fait que les programmes fédéraux ne leur conviennent pas. Je ne comprends pas qu’on n’ait pas un peu élargi l’objectif. On nous dit que c’est parce que ce genre de projets nécessitent un soutien supplémentaire et continu pour les activités courantes des refuges pour les sans‑abri, par exemple. Ce que ces gens demandent, ce n’est pas d’être subventionnés à l’opération, mais à l’immobilisation. Je ne comprends pas qu’on n’ouvre pas plus largement le seuil d’accueil de ces projets.
Mme Hogan : C’est pour cela qu’on l’a mentionné dans notre rapport. Il y a tout un continuum de logements. Seulement en regardant la location abordable, on constate qu’il manque une grande partie du continuum de logements en ce qui concerne l’itinérance. Quand on a demandé pourquoi c’était le cas — parce que le programme précédent, le programme d’Initiative des terrains fédéraux, traitait d’autres types de logements —, la Société canadienne d’hypothèques et de logement nous a dit qu’il faut beaucoup plus d’argent pour les mesures de soutien connexes avec d’autres types de logements. Ils se sont donc axés sur les locations abordables. On a émis une recommandation, qui est d’examiner le programme précédent pour en tirer des enseignements, parce que c’était possible au préalable.
Le sénateur Forest : Ces gens ne demandent pas un soutien à l’opération, mais à l’immobilisation. C’est comme un faux-fuyant de la Société canadienne d’hypothèques et de logement.
Mme Hogan : Habituellement, certaines tierces parties offrent aussi les services d’appui, donc ce ne sont pas juste les individus qui vont construire ou rénover les édifices pour créer des logements abordables. Il faudrait se coordonner avec d’autres organisations.
Le président : J’aurais une question sur le même sujet sur les logements et la disposition d’immeubles.
Hier, le comité a reçu des témoins de Services publics et Approvisionnement Canada. Encore aujourd’hui, j’entends des termes comme « vente d’immeubles » et « disposer d’immeubles ». Cependant, je n’ai pas entendu parler d’un concept d’appel d’offres pour des projets, par exemple. J’ai un immeuble fédéral et je lance un appel d’offres pour développer un projet dans lequel je vais disposer de l’immeuble en essayant d’obtenir le plus de retombées économiques possible; cela pourrait être patrimonial, culturel ou autre. Je n’ai pas entendu parler de ce concept. Est-ce que cela existe, selon ce que vous avez vu dans les ministères fédéraux, dans les concepts de disposition d’immeubles, de faire des appels d’offres pour un projet et de pouvoir mesurer les bénéfices sur autre chose qu’un revenu de vente pur et simple?
Mme Hogan : Le programme Initiative des terrains fédéraux, qui est géré par la Société canadienne d’hypothèques et de logement, fait des appels d’offres; des soumissions doivent être présentées avant qu’on offre un terrain ou un édifice par l’entremise de cette initiative. On fait une analyse de ces soumissions. On en a un peu parlé dans notre rapport.
Au lieu d’examiner le processus, je me suis plutôt concentrée sur les résultats pour savoir combien d’édifices étaient disponibles et s’ils étaient abordables. Il y a effectivement tout un processus de soumissions et on choisit le meilleur soumissionnaire.
Le président : Donc, on n’a pas de rapport qui évalue la qualité des projets et qui vérifie si le projet a été livré conformément à l’appel d’offres; on n’évalue donc pas le qualitatif du projet?
Mme Hogan : Il y a très peu de projets terminés, comme vous l’avez constaté dans le rapport. Ce sont tous des engagements pour la construction, mais il y en a très peu qui sont construits.
On voit que les exigences relatives à l’abordabilité contenues dans les soumissions sont atteintes, mais on se base sur les taux de location dans le marché et —
Le président : C’est de l’abordabilité coûteuse.
Mme Hogan : — non pas sur les revenus des ménages
Le président : Ma prochaine question concerne l’entretien des F-35. Je sais que mon collègue le sénateur Gignac a abordé ce sujet, mais je n’étais pas là, alors je n’ai pas la question et la réponse précises.
Une entreprise de Mirabel, L3Harris, fait l’entretien des CF-18 et pourrait faire l’entretien des CF-35. Évidemment, d’un côté, il y a le délai et de l’autre, la possibilité d’obtenir un contrat. Il risque d’y avoir un vide à cause de cette transition, même s’il y avait un contrat d’entretien accordé pour les F-35. Si ce n’est pas fait rapidement, il pourrait y avoir une perte de main-d’œuvre et de personnel qualifié. Avez-vous identifié ou constaté ces effets négatifs de retard dans le fait d’accorder des contrats d’entretien, étant donné l’écart qui se produira si on donne le contrat à L3Harris?
Mme Hogan : On n’a pas examiné les édifices en particulier, mais le plan global de la Défense nationale pour accueillir les avions; cela inclut le personnel qui s’occupe de l’entretien des avions.
On a constaté que le plan montrait qu’ils auraient assez de personnel, mais c’est quand même un élément qui est suivi de près. Il y avait des constatations dans notre rapport par rapport au fait que c’est le bureau de gestion aux États-Unis qui détermine si la Défense nationale est prête et si un édifice est prêt. Cela a soulevé des inquiétudes par rapport à la main-d’œuvre qui entretient les avions.
Je pense que la Défense nationale doit garder un œil là-dessus; tout cela est lié à nos recommandations de faire un suivi beaucoup plus actif sur les risques et les mesures d’atténuation; il ne faut pas être réactif, mais proactif par rapport à la main‑d’œuvre.
Le président : Merci beaucoup.
[Traduction]
La sénatrice Marshall : Madame Hogan, vous avez parlé plus tôt de vos employés. Quel est le principal défi à cet égard? Est-ce le recrutement, la formation, le maintien en poste? À quels problèmes faites-vous face?
Mme Hogan : Dans notre organisation, ce n’est pas le recrutement. Je pense que nous avons un excellent mandat, et nous n’avons habituellement aucune difficulté à recruter des gens.
Nous travaillons très fort pour atteindre certains objectifs d’équité en matière d’emploi, et nous avons de la difficulté à embaucher des Autochtones. Nous travaillons donc très étroitement avec des écoles autochtones pour qu’elles nous prêtent main-forte. Nous participons à un programme des comptables professionnels agréés pour encourager des Autochtones à choisir la profession. Certains de nos auditeurs doivent avoir le titre de comptables professionnels agréés pour signer des états financiers, mais une grande partie de nos auditeurs ne l’ont pas. Nous nous penchons également sur nos besoins. Habituellement, nous demandons une maîtrise ou un titre professionnel, que ce soit en ingénierie, en droit ou en économie. Il y a beaucoup de professions. Nous essayons de surmonter certains de ces obstacles dans le but de changer l’image de notre organisation.
Nous n’avons pas de problème de maintien en poste. En fait, je vous dirais que le taux d’attrition est très faible. Je pense qu’il a été de 4 % l’année dernière. Ce qui nous préoccupe à cet égard, c’est que c’est surtout nos jeunes employés qui partent plutôt que des gestionnaires. Qu’est-ce qui fait en sorte dans notre culture que les jeunes partent aussi tôt? Comme je l’ai dit, nous avons eu des problèmes avec les systèmes de TI, et nous essayons donc d’investir là-dedans. Je pense que cela nous aidera partiellement à surmonter le problème.
La question des langues officielles pose toujours problème. À mesure que l’on grimpe les échelons dans une organisation et qu’on commence à gérer des gens, il faut être capable de s’exprimer dans les deux langues officielles. Nous nous assurons donc toujours d’avoir assez de temps pour former les gens.
La sénatrice Marshall : L’expérience de la majorité de vos employés se limite-t-elle à votre bureau, ou il y en a-t-il beaucoup qui ont également de l’expérience dans le secteur privé ou dans des ministères ou organismes gouvernementaux?
Mme Hogan : Je pense que je vais vous dire qu’avant que j’occupe les fonctions de vérificatrice générale, la majorité des membres de notre organisation venait de l’intérieur, mais nous avons certainement observé un important virage à cet égard. Je crois sincèrement qu’il faut aller chercher l’expertise et les connaissances ailleurs lorsqu’on ne l’a pas, dans la fonction publique. La plupart de nos nouveaux employés ont été embauchés à l’extérieur de l’organisation pendant la pandémie. Nous étions environ 500, et nous sommes maintenant environ 750. C’est donc un grand changement. En fait, Jean-René Drapeau et Paule-Anny Pierre viennent d’autres ministères, et je suis allée les chercher pour avoir leur expertise et leurs connaissances dans l’organisation. Je reconnais l’importance de la diversification de l’expérience.
La sénatrice Marshall : Merci.
[Français]
Le sénateur Gignac : J’aimerais maintenant aborder un autre sujet qui devient de plus en plus important dans le budget du gouvernement du Canada. Ce n’est pas une critique, mais les gouvernements précédents ont grandement négligé d’appuyer les communautés autochtones. Depuis 2015, on est passé d’environ 11 milliards de dollars à plus de 35 milliards; on a triplé le montant, et il y a encore beaucoup à faire.
Je voudrais également parler du passif actuariel. Sur le dossier de la réconciliation avec les Autochtones, selon la dernière estimation que j’ai vue — il y a eu une prorogation, puis une dissolution, mais il n’y a eu aucun budget —, je crois que c’est le directeur parlementaire du budget qui parlait de 75 milliards de dollars. Est-ce que vous avez de nouvelles estimations? Pouvez‑vous nous expliquer, sur le plan comptable, même si je crois savoir comment cela fonctionne, à quel moment cela influence le déficit?
L’an dernier, il me semble, la ministre des Finances prédisait un déficit de l’ordre de 48 ou 50 milliards de dollars qui s’est finalement élevé à 60 milliards de dollars. Cela amène donc de la volatilité dans les projections budgétaires.
Pourriez-vous nous parler davantage de cette volatilité sur le plan des déficits budgétaires? Cela dit, on ne remet pas en question tous les efforts qui sont faits et qui seront faits en ce sens à l’avenir.
Mme Hogan : Dans le domaine des états financiers, les passifs éventuels sont sujets à de nombreux risques et incertitudes. Il y a beaucoup de divulgations dans les notes des états financiers à propos de cela.
Quant aux passifs éventuels avec les Autochtones, ils concernent le déficit de l’année qui est comptabilisée. Par exemple, si, cette année, on estime le montant à 5 milliards de dollars, l’année en cours sera comprise dans le déficit. Ensuite, si le montant est remboursé dans les deux années suivantes, il ne sera pas compris dans le déficit. Toutefois, si le montant en question est plus élevé que ce qui a été comptabilisé, la différence sera comprise dans le déficit annuel. L’an dernier, sur le plan de la différence entre le budget et le déficit, il y avait plusieurs éléments qui étaient compris, l’un des plus importants étant le paiement aux communautés autochtones, qui était supérieur aux passifs.
Plusieurs raisons peuvent expliquer un écart entre le budget et le déficit réel, notamment l’incertitude ayant trait à l’impact d’un avis ou d’une décision juridique ainsi que les hypothèses et les prédictions par rapport aux estimations. Tout cela prend beaucoup de notre temps au moment de l’audit annuel des états financiers du gouvernement, et ce sont des éléments clés qui sont énumérés dans notre rapport indépendant des vérificateurs. Ce rapport énumère par ailleurs les mesures que l’on prend pour procéder à ces vérifications.
Le sénateur Gignac : Ce sont quand même de gros montants et de nombreuses firmes d’avocats sont impliquées. En tout respect pour mes collègues qui ont une formation juridique, est‑ce que, selon vous, tout se fait dans les règles de l’art? On sait que plus les procédures sont longues, plus cela coûte cher au gouvernement, et c’est toute une portion qui est relayée à des intermédiaires avant que les fonds arrivent dans les mains des Autochtones. Quand avez-vous examiné cette question pour la dernière fois? Votre zone de confort est-elle très élevée? Je rappelle que ce sont des montants importants et que le processus est long.
Mme Hogan : Oui, ce sont de gros montants, en tout respect pour mon collègue avocat qui est à mes côtés. On évalue les analyses de risques que les avocats fournissent quant aux montants qui pourraient être payés, mais on n’examine pas les frais d’avocats qui y sont liés, si c’est ce que vous me demandez. On regarde plutôt les analyses qui nous sont fournies. D’ailleurs, ces dernières présentent souvent de l’information caviardée, ce qui ralentit notre travail et le rend plus difficile. Cela me préoccupe. Il y a longtemps que je demande un changement législatif pour que l’on énonce clairement dans la loi que nous pouvons avoir accès à l’information sensible et confidentielle fournie par les avocats et qui relève de leur privilège. Cela nous aiderait certainement à être plus rapides. Donc non, on n’examine pas les frais payés aux avocats.
Le sénateur Moreau : Vous notez dans l’une de vos vérifications à propos de GC Stategies que, dans des situations d’urgence comme la COVID-19, le gouvernement fédéral et certains gouvernements provinciaux ont fait sauter beaucoup de verrous de vérifications. Vous conviendrez sans doute que, dans une situation d’urgence particulière ou exceptionnelle, des mesures allégées pourraient faciliter l’octroi de contrats lorsque l’approvisionnement devient une source d’inquiétude.
Avez-vous émis des lignes directrices quant aux mesures qui devraient être mises en place lorsqu’on allège les systèmes de vérification habituels en cas d’urgence? Quelles sont les mesures qu’il faudrait conserver pour assurer l’adéquation de la vérification? Je vois qu’on paie parfois sans même savoir si les services sont rendus et qu’on octroie des contrats à des gens non qualifiés.
Quelles seraient vos principales recommandations pour déterminer si ces mesures doivent être maintenues pour assurer une adéquation entre les contrats accordés et les services fournis, toutes situations confondues?
Mme Hogan : Le secrétaire du Conseil du Trésor, au moment de la pandémie, avait envoyé une lettre à toute la fonction publique en disant qu’on était dans une situation d’urgence et qu’on pouvait alléger quelque peu nos processus habituels. Il a toutefois été très clair sur la nécessité de faire une bonne reddition de comptes et de bien documenter les décisions prises et les raisons pour lesquelles elles l’ont été.
À mon avis, une situation d’urgence n’est pas une raison de ne pas suivre les règles; il faut quand même suivre certaines règles de base. Notre audit sur les contrats de services professionnels se penche sur une période encore plus longue que la seule pandémie; les contrats couverts étaient ceux de 2015 à 2024. Les résultats ne concernaient donc pas uniquement la période de la pandémie, mais avant et après également.
C’est pour cela que j’ai demandé au gouvernement de prendre du recul pour essayer de comprendre pourquoi on voyait ce type de comportement. Est-ce parce qu’il existe trop de règles? Les règles sont-elles mal connues? Est-ce que le fait d’assurer la rapidité du service incite les gens à contourner les règles? Je pense qu’il est temps de prendre un peu de recul et de dire qu’il faut que la passation de marchés soit beaucoup plus efficace qu’elle ne l’est actuellement. Il faut trouver un moyen d’appuyer les petites et les grandes entreprises pour qu’elles participent à l’approvisionnement fédéral.
Le sénateur Forest : Merci.
[Traduction]
La sénatrice Kingston : Je vais revenir au sujet que nous avons abordé plus tôt. Nous avons parlé de propriétés converties en logements très abordables. Dans quelle mesure la priorité accordée aux propriétés propices à une conversion en logements a-t-elle retardé l’aliénation d’autres propriétés? Je suppose qu’il en a été question dans l’explication. De plus, quelles sont vos recommandations pour s’attaquer à ce problème?
Mme Hogan : On a accordé la priorité à 10 projets pour en faire des projets pilotes dans le but de voir si le gouvernement peut accélérer les étapes à suivre pour décider si un bien de la Couronne peut être aliéné et déclaré excédentaire. C’est un aspect sur lequel nous nous sommes penchés, et il est trop tôt pour savoir s’il sera possible de déterminer plus rapidement quels biens peuvent être aliénés.
Nous avons toutefois constaté, lors du dépôt du budget de 2024, qui a donné au gouvernement de l’argent pour réduire sa quantité d’actifs, qu’il était aussi question d’accorder la priorité aux immeubles qui pouvaient être convertis, ce qui signifie que certains immeubles qui avaient peut-être déjà été évalués ont été mis de côté alors que d’autres se sont vu accorder la priorité. La préoccupation ici, c’est qu’il faut quand même payer l’entretien et les frais d’exploitation des vieux immeubles ou des immeubles qui ne sont pas utilisés au maximum. On a toujours des paiements en remplacement d’impôts. Toutes ces décisions se traduisent par un coût de renonciation. Il faut se demander ce qui doit avoir la priorité : les immeubles qui peuvent être transformés en logements abordables ou tout simplement l’aliénation et la réduction de l’empreinte. C’est une décision que le gouvernement doit prendre, mais les deux options présentent des avantages et des inconvénients.
La sénatrice Kingston : Pensez-vous aux immeubles qui ne peuvent pas être convertis facilement pour réaliser des économies? Le problème est-il là?
Mme Hogan : Cela dépend de la vitesse à laquelle on peut les aliéner. Les 10 immeubles prioritaires ont été choisis parce qu’on peut les vider rapidement et en faire des logements, car les immeubles ne sont jamais inutilisés. Il revient au gouvernement d’établir les priorités, mais chaque décision entraîne un coût de renonciation.
La sénatrice Pate : Je veux revenir sur deux choses.
L’un des arguments avancés pour expliquer pourquoi le gouvernement n’a pas accordé assez de ressources au processus d’inscription en vertu de la Loi sur les Indiens — et j’ai peur que nous voyions la même chose avec le projet de loi S-2 —, c’est qu’il n’avait pas l’argent, et ce sont donc les collectivités qui ont dû trouver un moyen de le financer. Quelles sont les solutions possibles selon vous pour que le ministère donne des ressources aux collectivités?
L’autre question renvoie à ce que la sénatrice Galvez a dit, mais dans un contexte différent. Le coût des actions en justice pour corriger les politiques et les pratiques discriminatoires est énorme. Lorsque vous faites des audits, à quelle fréquence en tenez-vous compte, peut-être de manière non officielle, ou envisageriez-vous la possibilité d’intégrer à vos prochains rapports des estimations de ce qui aurait pu être économisé sans les poursuites qui se sont succédé?
Mme Hogan : Il est regrettable que de nombreuses Premières Nations se tournent vers les tribunaux, mais les choses avancent lentement, comme nous l’avons vu pour l’inscription en vertu de la Loi sur les Indiens.
Pour ce qui est du financement de sources fiables et de l’inscription communautaire, je pense qu’il faut commencer par mettre à jour le modèle de financement de 1994, qui repose sur le nombre d’inscriptions et la proportion de personnes. C’est une très longue période sans mise à jour, et cela ne tient probablement pas compte du seul coût de l’inflation. Les modifications à la loi ont entraîné une augmentation des demandes. Je pense que ce sont des choses que le gouvernement aurait dû voir venir et qu’il aurait pu prévoir pour accroître les ressources.
Il est nécessaire d’avoir avec les communautés des Premières Nations un dialogue constructif sur ce qu’elles ont besoin. Nous avons vu ici que lorsque Services aux Autochtones Canada n’avait pas de bureau régional, les communautés se sont adressées à Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada. On essaie de collaborer, mais ce qu’il faut selon moi, c’est une collaboration très fructueuse avec les communautés des Premières Nations.
La fonction publique peut faire ce genre de choses rapidement. C’est ce que nous voyons. Comme je l’ai mentionné, j’ai fait une comparaison avec les passeports, et il est donc essentiel de demander comment on peut accélérer les choses.
M. Hayes : Je pourrais peut-être juste mentionner les rapports du commissaire à l’environnement et au développement durable, notamment celui intitulé Leçons tirées de la performance du Canada dans le dossier du développement durable. La quatrième leçon portait sur la collaboration avec les gouvernements et les peuples autochtones et le respect des engagements du Canada. Le commissaire présente des possibilités, en signalant notamment que les gouvernements et les peuples autochtones commencent à s’illustrer comme des chefs de file de la transformation sociale, avec des approches novatrices pour relever les défis actuels. L’approche défendue par le commissaire consiste à percevoir les gouvernements et les peuples autochtones comme des partenaires plutôt que comme des gens qui ont accès aux services.
La sénatrice Pate : Merci.
La sénatrice Galvez : De toute évidence, nous faisons actuellement face à une transformation complexe des pressions exercées par les politiques publiques. Nous parlons de l’élargissement du budget de la défense, de la crise du logement et des difficultés dans le domaine de la santé, et tout cela pendant une pénurie de main-d’œuvre. Vous avez parlé de la nécessité d’augmenter le recrutement dans les Forces armées canadiennes. Nous avons besoin de pilotes. Nous avons besoin de travailleurs. Nous avons besoin d’infirmières, de médecins, de personnes qui travaillent dans le domaine des technologies de l’information, etc.
Votre bureau a-t-il dit si le gouvernement fédéral possède la capacité, les mécanismes de coordination et les outils de planification nécessaires pour donner suite à ces priorités sans dédoublement, goulots d’étranglement ou échec systémique de la prestation de services? Je pose la question parce que nous allons accepter une autre vague d’immigration pour pallier toutes ces pénuries de main-d’œuvre, et nous allons nous heurter encore une fois au problème du logement. À quel moment allons-nous mettre fin à ce cercle vicieux?
Mme Hogan : Nous n’avons pas pris de recul pour examiner la façon dont la fonction publique fédérale embauche et forme des gens et ce qu’elle fait pour que nous ayons plus de médecins. Nous ne l’avons pas fait. Certaines de ces choses relèvent d’une réglementation provinciale ou territoriale, pas du gouvernement fédéral.
C’est un écheveau complexe d’enjeux interreliés, et nous essayons de les examiner dans certains domaines. Nous allons nous pencher sur le recrutement à la Gendarmerie royale du Canada. Nous allons en faire autant pour le ministère de la Défense nationale. Nous essayons de mettre l’accent là-dessus lorsque c’est possible et d’offrir un certain soutien, mais je m’attendrais à ce que la fonction publique indique ce qu’il en est de manière plus générale aux parlementaires à mesure qu’ils prennent des décisions. Il revient vraiment aux fonctionnaires de fournir cette information aux décideurs et aux législateurs.
La sénatrice Galvez : Avez-vous la latitude nécessaire pour avoir un point de vue global ou une idée générale de la situation? Toutes ces choses sont interreliées.
Mme Hogan : Un des aspects uniques de notre organisation, c’est sa capacité à prendre du recul et à regarder les choses horizontalement dans l’ensemble de l’appareil gouvernemental et à examiner aussi la façon dont c’est géré très différemment d’un ministère à l’autre. Je prends note de votre préoccupation, et je vais peut-être ajouter cela à notre liste d’audits possibles. Il serait intéressant de demander à tout le monde d’essayer de se faire une idée de ce qu’il en est. Je suis d’accord avec vous lorsque vous dites qu’une meilleure coordination est sans aucun doute nécessaire pour remplacer l’approche en vase clos du gouvernement dans un dossier aussi important.
La sénatrice Galvez : Merci.
[Français]
Le sénateur Dalphond : J’ai une suggestion, si la vérificatrice générale est intéressée par les frais d’avocat. Je comprends que ce sont des frais externes et non ceux du ministère de la Justice, qui représente le gouvernement dans toutes ces causes. Il y a des règlements qui interviennent. Il y a eu des recours collectifs, des tribunaux se sont prononcés et tous les règlements ont une disposition qui concerne les frais d’avocat. Le document est public.
Mme Hogan : Oui. Comme je l’ai dit, je me penche souvent sur les frais de services professionnels, ce qui inclut les avocats. Les deux derniers rapports ne se penchaient pas sur les frais d’avocat, mais plutôt sur les frais liés à la technologie informatique.
[Traduction]
Le sénateur Loffreda : Je pense que l’approvisionnement est un domaine qui prend de plus en plus d’importance. Si l’on examine l’intégrité du processus d’approvisionnement, on constate que votre audit de GCStrategies a révélé le non-respect persistant des règles en matière d’approvisionnement, ce qui rappelle les préoccupations exprimées dans le passé à la suite de l’audit de McKinsey & Company. Compte tenu de cette tendance, diriez-vous qu’il s’agit de cas isolés ou de signes de faiblesses systémiques dans la culture de l’approvisionnement au gouvernement fédéral, et quels sont, selon vous, les mécanismes de responsabilisation qui font défaut ou qui sont sous-utilisés?
Mme Hogan : Je n’ai aucune raison de croire que ce que j’ai découvert lors des deux audits que j’ai réalisés sur les contrats de services professionnels — l’audit lié aux contrats avec McKinsey & Company et celui-ci lié aux contrats avec GCStrategies — se limite à ces deux fournisseurs que j’ai examinés. Dans le premier audit, il était question de 20 organismes fédéraux. Dans le dernier audit sur les contrats de services professionnels, il était question de 31 organismes fédéraux, ce qui me porte à croire qu’il s’agit d’un phénomène répandu. C’est pourquoi je pense que le gouvernement fédéral doit déterminer quels éléments des règles en matière d’approvisionnement font en sorte qu’il doit recourir à des entreprises pour obtenir les compétences et la main-d’œuvre dont il a besoin. Il doit aussi déterminer pourquoi les fonctionnaires ne respectent pas ces règles.
En ce qui concerne les mécanismes de responsabilisation, je pense qu’il existe des mécanismes pour les personnes qui exercent des pouvoirs délégués. On peut leur retirer ces pouvoirs délégués et, avant de les autoriser à conclure d’autres contrats, il faut notamment leur faire suivre une formation. Il existe aussi des mécanismes de surveillance qui, selon moi, devraient être utilisés pour permettre de déceler ce genre de cas.
Je pense qu’il est temps de revenir à l’essentiel en ce qui a trait à l’approvisionnement, car les règles sont faciles à suivre, mais elles ne sont tout simplement pas respectées.
La sénatrice MacAdam : J’ai une question concernant votre rapport intitulé Utilisation actuelle et future des bureaux fédéraux. Vous avez formulé sept recommandations : une à l’intention du Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada, quatre à l’intention de Services publics et Approvisionnement Canada et deux à l’intention de Logement, Infrastructures et Collectivités Canada. Êtes-vous satisfaite des réponses écrites à vos recommandations et des échéanciers qu’ils ont indiqués pour la mise en œuvre de ces recommandations? Voilà ma première question. Deuxièmement, ce rapport sera-t-il examiné en détail par le Comité des comptes publics? Troisièmement, ferez-vous le suivi de ces recommandations?
Mme Hogan : Suis-je satisfaite des réponses? Eh bien, ils ont tous accepté nos recommandations, et je pense que davantage de détails seront fournis lorsque le Comité des comptes publics recevra un plan d’action détaillé. Il est vraiment difficile d’en dire davantage. D’après mes conversations avec eux, je peux dire qu’ils prennent nos recommandations au sérieux.
Je reste toutefois un peu préoccupée par la mesure d’abordabilité, entre autres. C’est la deuxième fois que nous formulons cette recommandation à la Société canadienne d’hypothèques et de logement. Nous l’avions déjà formulée dans le cadre de notre rapport antérieur qui portait sur l’itinérance chronique. Je pense sincèrement que l’abordabilité devrait être liée au revenu des ménages.
Le temps nous dira s’ils donneront suite ou non aux recommandations. Cela renvoie à votre troisième question, qui portait sur le suivi. Nous allons entreprendre une nouvelle initiative. Nous avons entendu des parlementaires dire qu’ils souhaitent que nous assurions un suivi, alors c’est ce que nous allons faire au cours de l’année à venir. Nous allons nous concentrer sur quelques années et commencer à assurer un suivi plus régulier concernant nos recommandations, puis nous élargirons ce travail par la suite. Le suivi de ces recommandations en particulier finira par être inclus dans ce mécanisme.
Je ne sais pas si le Comité des comptes publics se penchera sur ce rapport. Nous comparaissons devant ce comité cette semaine. Je vais m’adresser à lui jeudi et je l’encouragerai à examiner ce rapport, mais je ne suis pas au courant de ses travaux. Il y a quelques audits antérieurs qu’il n’a pas encore examinés. Je voudrais l’encourager à les étudier également.
[Français]
Le président : Cela met fin à notre premier groupe.
Merci beaucoup de votre participation. Comme d’habitude, vous êtes vraiment précis et pertinents dans vos réponses. Je vous souhaite une bonne journée. Nous allons sûrement nous revoir au cours des prochaines semaines.
Nous avons maintenant le plaisir d’accueillir, du ministère de la Défense nationale, M. Jonathan Moor, sous-ministre adjoint et dirigeant principal des finances, le lieutenant-général Kelsey, vice-chef d’état-major de la Défense, ainsi que Mme Nancy Tremblay, sous-ministre adjointe, Matériels. On sent que vous aurez beaucoup de travail au cours des prochaines semaines et des prochains mois. Nous sommes particulièrement heureux de votre présence aujourd’hui afin de connaître les plans passés et futurs du ministère de la Défense.
Nous allons maintenant entendre les déclarations préliminaires de M. Moor.
Monsieur Moor, vous avez la parole.
[Traduction]
Jonathan Moor, sous-ministre adjoint et dirigeant principal des finances, ministère de la Défense nationale : Bonjour à tous.
Monsieur le président et membres du comité, je vous remercie beaucoup de m’avoir invité à présenter le Budget principal des dépenses 2025 2026 et le Budget supplémentaire des dépenses au nom du ministère de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes.
Aujourd’hui, je suis accompagné du vice-chef d’état-major de la Défense, le lieutenant-général Stephen R. Kelsey, et de la sous-ministre adjointe, Matériels, Nancy Tremblay.
Dans le cadre du Budget principal des dépenses, la Défense nationale demande 35,7 milliards de dollars. En outre, dans le cadre du Budget supplémentaire des dépenses (A), le MDN demande 8,7 milliards de dollars, afin d’atteindre l’objectif de 2 % du PIB pour les dépenses de défense cette année.
Une fois ces montants approuvés, le budget de la Défense nationale passera à 44,34 milliards de dollars. Ce financement soutiendra un certain nombre d’engagements clés, en plus de répondre à des besoins opérationnels critiques. Dans cette optique, notre principale priorité est de veiller à ce que nos militaires disposent des outils et de l’équipement dont ils ont besoin pour accomplir les tâches vitales que nous leur demandons d’accomplir pour défendre le Canada et ses intérêts.
Le Budget principal des dépenses représente une augmentation de 5,1 milliards de dollars, ou 16,6 %, par rapport au Budget principal des dépenses de l’année dernière. La majorité des investissements découlent d’un financement accru des dépenses en capital, qui comprennent l’acquisition d’une flotte d’aéronefs multimissions canadiens utilisés pour patrouiller le long de nos côtes, l’acquisition d’un certain nombre de systèmes d’aéronefs télépilotés, et la construction, commencée en avril dernier, des premiers destroyers de la classe River au chantier naval Irving à Halifax.
Dans le cadre de ces budgets, le ministère de la Défense alloue également 100 millions de dollars à la réparation et à l’entretien des infrastructures des Forces armées canadiennes dans l’ensemble du pays, notamment les logements. Nous tiendrons également nos principaux engagements envers nos alliés, notamment 458 millions de dollars en contributions à l’OTAN et 434 millions de dollars pour le maintien de l’aide militaire et de la fourniture d’équipement à l’Ukraine.
Comme l’a annoncé le premier ministre la semaine dernière, le Canada respectera l’objectif fixé par l’OTAN de consacrer 2 % de son PIB à la défense cette année. Pour atteindre cet objectif, le gouvernement investira 9,3 milliards de dollars supplémentaires dans la défense et la sécurité, par l’intermédiaire de la Défense nationale et d’autres ministères.
Compte tenu de cet investissement, la Défense nationale demande un montant supplémentaire de 8,7 milliards de dollars dans le Budget supplémentaire des dépenses (A).
Le Budget supplémentaire des dépenses prévoit un investissement de 2 milliards de dollars dans les programmes de recrutement, de maintien en poste et de soutien des Forces armées canadiennes. Cet investissement est lié à l’engagement qu’a pris le gouvernement d’accélérer le recrutement de nouveaux membres, de conserver les membres actuels et d’améliorer les services de santé offerts au personnel en service.
Dans le cadre du Budget supplémentaire des dépenses, la Défense nationale allouera 2,1 milliards de dollars au soutien de l’industrie canadienne de la défense, par le biais d’une stratégie industrielle de défense visant à aider cette industrie à accroître ses capacités et ses compétences et à fournir de l’équipement et un soutien essentiels aux Forces armées canadiennes.
La Défense nationale continuera d’investir dans des capacités militaires stratégiques, afin de développer les capacités existantes et d’en ajouter de nouvelles, par exemple, les navires de soutien interarmées, le radar transhorizon dans l’Arctique, la production nationale de munitions et des véhicules logistiques supplémentaires, pour ne citer que ces éléments.
Nous continuerons également à investir dans l’entretien et l’amélioration de l’équipement, de l’infrastructure et des outils numériques existants pour soutenir nos membres. Le Budget supplémentaire des dépenses prévoit 833 millions de dollars pour un certain nombre d’achats, notamment de l’équipement de défense et de l’équipement personnel, la modernisation des champs de tir et des infrastructures d’instruction, l’agrandissement d’installations de munitions, ainsi que l’entretien, les réparations et les améliorations des biens immobiliers du ministère.
Enfin, dans le cadre du Budget supplémentaire des dépenses, la Défense nationale demande 180 millions de dollars pour renforcer les cybercapacités, ce qui permettra d’améliorer l’interopérabilité avec les alliés et les partenaires, et pour améliorer l’infrastructure des réseaux, la gestion de l’information, la connectivité et le stockage des données. Pour mettre en œuvre ces initiatives, la Défense nationale sera appuyée par le Centre de la sécurité des télécommunications, qui demande également des fonds dans le cadre du Budget supplémentaire des dépenses.
La Défense nationale a mis en place un plan pour répondre aux besoins des Canadiens et de nos alliés afin de défendre le Canada et de contribuer à la protection de l’ordre mondial. Les fonds demandés dans les budgets des dépenses permettront à la Défense nationale et aux Forces armées canadiennes de mener à bien leurs opérations, programmes et initiatives essentiels.
En conclusion, monsieur le président, le ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes continuent de s’acquitter de leur mandat national fondamental, tout en étant responsables financièrement et en gérant efficacement les ressources. Le financement que nous demandons dans le cadre de ces budgets est essentiel pour protéger les Canadiens et soutenir nos alliés et partenaires contre les menaces actuelles et futures.
Mes collègues et moi-même sommes prêts à répondre à vos questions ou commentaires. Merci beaucoup.
Le président : Merci beaucoup. Nous allons commencer notre première série de questions.
La sénatrice Marshall : Merci aux représentants d’être des nôtres aujourd’hui.
Ma question s’adresse à M. Moor. Le budget du ministère grossira considérablement une fois que les deux projets de loi sur les crédits seront approuvés. C’est une chose certaine. Je me demande comment vous allez investir ces fonds supplémentaires dans les différents programmes du ministère, car, historiquement, le ministère a souvent laissé expirer des crédits importants. Le directeur parlementaire pour le budget, qui a témoigné hier soir, a déclaré qu’il n’avait vu aucun plan concernant l’utilisation des fonds supplémentaires. Nous n’avons pas vu le plan de votre ministère pour 2025-2026, nous ne savons donc pas comment vous allez utiliser les fonds supplémentaires. Nous sommes déjà rendus au troisième mois de l’exercice financier : il vous reste donc neuf mois pour vous organiser et tenir vos engagements. Les fonds sont répartis entre divers programmes. Pouvez-vous nous donner une idée de la manière dont vous comptez dépenser cette injection de fonds au cours des neuf prochains mois ?
M. Moor : Je vous remercie de la question.
C’est effectivement un défi. Il s’agira d’une injection de fonds que nous devrons dépenser au cours de l’exercice financier. Je suis heureux de vous dire que nous avons un plan. Nous avons décidé d’investir dans des domaines où nous avons déjà des contrats en vigueur. Nous avons également des propositions. Par exemple, dans le Budget supplémentaire des dépenses, nous avons prévu une augmentation assez importante des contributions au crédit 10, ce qui signifie que nous allons payer nos partenaires et les acteurs industriels pour qu’ils commencent à travailler pour nous.
Nous avons également informé le directeur parlementaire du budget de nos intentions. Je suis heureux d’annoncer que la semaine dernière, nous avons informé le directeur parlementaire du budget de notre objectif de consacrer 2 % du Budget à la défense. Mais tout cela va très vite et est très récent. L’annonce n’a été faite que la semaine dernière, et nous travaillons à l’élaboration et à la mise au point de nos plans.
La sénatrice Marshall : Quand pouvons-nous espérer voir le plan? À ce moment de l’année, nous avons généralement déjà pris connaissance des plans de votre ministère, ainsi que des autres. Nous attendons toujours. Nous consultons régulièrement le site Web. Il est indiqué que le plan sera publié en juin, mais nous sommes déjà à la mi-juin et nous n’avons toujours rien vu.
M. Moor : Le Conseil du Trésor se penche actuellement sur notre plan et doit le déposer avant la fin de la session parlementaire. Nous espérons qu’il sera publié prochainement. Toutefois, ce plan est basé sur le Budget principal des dépenses et non sur le Budget supplémentaire des dépenses. Il s’agit d’un plan que nous avons élaboré tout récemment et que nous intégrerons bien sûr aux résultats du ministère de l’exercice prochain, mais aussi à notre plan pour l’exercice qui suivra.
La sénatrice Marshall : Dans le passé, lorsque les représentants des services de finances témoignaient devant le Comité des finances au sujet des crédits demandés pour les projets d’immobilisations, nous recevions une liste qui correspondait parfaitement au montant total demandé. Pourrions‑nous également obtenir une copie de cette liste pour nos dossiers cette année?
M. Moor : Je serai ravi de vous fournir une liste, mais je vais peut-être prendre un peu de temps pour vous parler de certaines nouveautés qui seront intégrées au plan.
Dans le Budget supplémentaire des dépenses, l’augmentation la plus importante concerne le navire de soutien interarmées. Ces travaux sont déjà en cours. Le déficit budgétaire a été comblé.
En ce qui concerne le Budget principal des dépenses, les changements les plus importants concernent l’aéronef multimissions canadien. Ce projet est bien avancé, et il accapare la plus grande partie du Budget principal et du Budget supplémentaires des dépenses.
La sénatrice Marshall : Merci.
Les augmentations salariales pour le personnel, ou peut-être s’agit-il de recrutement... Avez-vous la ventilation des 2,1 milliards de dollars?
M. Moor : Je n’ai pas de ventilation pour l’instant. Le lieutenant-général pourrait peut-être vous donner plus d’information à ce sujet.
Lieutenant-général Stephen R. Kelsey, vice-chef d’état-major de la Défense : Merci.
Monsieur le président, cette question est vraiment importante pour nous. Nous avons été très heureux de voir ces crédits. Notre défi consiste à nous assurer que nous mettons en place les mesures incitatives adéquates pour attirer les bons profils et les garder dans nos rangs. Nous l’avons déjà fait pour certains métiers, comme celui de pilote. Nous voulons étendre les mesures aux métiers qui ont une grande valeur, pour lesquels il est difficile de former les gens et de les maintenir en poste.
Or, il reste à voir comment cet argent sera réparti. C’est précisément ce sur quoi nous travaillons avec nos collègues du Conseil du Trésor. Nous voulons bien faire les choses. Nous sommes ravis d’avoir enfin l’occasion de changer la vie de ces jeunes soldats, marins et aviateurs qui s’efforcent de servir leur pays tout en prenant soin de leurs familles.
[Français]
Le président : Merci beaucoup.
Le sénateur Forest : Merci de votre présence. Il y a un enjeu majeur au chapitre de l’approvisionnement. L’an dernier, le directeur parlementaire du budget estimait que, de 2017-2018 à 2022-2023, il y avait un écart de 12 milliards entre les crédits réservés et ce qui a vraiment été dépensé en immobilisation. Je comprends que le gouvernement mise sur un changement sur le plan de la structure des approvisionnements pour en améliorer l’efficacité. Cependant, concrètement, selon le plan que vous avez déposé au Conseil du Trésor, comment allons-nous améliorer nos approvisionnements entre l’élaboration des devis et la livraison de l’acquisition de l’immobilisation souhaitée?
Nancy Tremblay, sous-ministre adjointe, Matériels, ministère de la Défense nationale : Merci beaucoup de la question. Effectivement, parmi les différents projets que nous avons à livrer, la liste est impressionnante et les défis sont majeurs. Nous avons des équipes de projet qui s’occupent de gérer chacun de ces projets et travaillent en étroite collaboration avec l’industrie pour comprendre les défis. Quand on doit apporter des modifications majeures à certains projets au chapitre de l’équipement ou que l’on doit faire du travail d’intégration avec d’autres systèmes qui sont couramment utilisés par les Forces armées canadiennes, évidemment, cela complique la livraison des équipements.
Cependant, c’est en suivant les processus de très près et en travaillant avec l’industrie, avec nos collègues d’Industrie Canada et avec Services publics et Approvisionnement Canada que nous pouvons nous assurer que les contrats que nous avons mis en place sont suivis par l’industrie.
Le sénateur Forest : On l’a vu par le passé dans la politique d’approvisionnement sur le plan maritime : il peut y avoir de l’interférence politique. Ce n’est vraiment pas de votre ressort, mais c’est un grand défi de produire des devis spécifiques nous permettant d’obtenir un produit conformément au budget souhaité. Est-ce qu’il y a des changements prévus dans votre plan quant à la phase d’élaboration des devis?
Il y avait un devis de base, mais très évolutif pendant et avant l’appel d’offres; cela nous place dans une situation où le coût du bien peut grandement varier.
Mme Tremblay : Je vous remercie de la question. Effectivement, les devis de l’équipement qui doit être construit sont très importants. Habituellement, lorsqu’on fait un appel d’offres, l’industrie impliquée peut soumettre une proposition de devis, mais il faut raffiner tout cela par la suite pour que les besoins opérationnels des Forces armées canadiennes soient comblés. Avec le raffinement des devis, il y a aussi des choix à faire, notamment sur les différents équipements qui seront inclus. Tout cela fait en sorte que ce sont des problèmes complexes et que les décisions doivent être prises judicieusement pour prendre en compte les coûts et l’horaire, afin que nous puissions livrer l’équipement.
Le sénateur Forest : Le premier ministre a clairement indiqué qu’il souhaitait, avec ce grand chantier qui est un défi gigantesque, consolider l’économie canadienne. L’aspect de l’innovation est un élément important. On a observé que nous avons, particulièrement au Québec, des pôles d’excellence de calibre mondial sur le plan de l’aéronautique. Dans vos stratégies, est-ce qu’on a mis en place des moyens pour maximiser les retombées régionales de ces contrats, afin de consolider nos pôles d’excellence? Je pense au fait que l’on a accordé sans appel d’offres nos avions d’observation à une entreprise comme Bombardier. Est-ce qu’il y a un souci de maximiser les retombées par rapport aux pôles d’excellence, que ce soit en aéronautique, au chapitre maritime ou dans l’équipement militaire?
Mme Tremblay : Absolument. Le souci de faire en sorte qu’il y ait des bénéfices économiques pour le Canada est assurément au cœur des discussions que nous avons sur quelque projet d’acquisition que ce soit. On comprend également que, aujourd’hui encore plus qu’auparavant, il faut diversifier notre chaîne d’approvisionnement en ce qui concerne l’origine de nos équipements militaires. Tous ces facteurs sont pris en considération, mais en fin de compte, on reconnaît que les bénéfices économiques que retire le Canada contribuent à la souveraineté et à la sécurité économique du pays.
Le sénateur Gignac : Bienvenue aux témoins et merci pour ce que vous faites pour le service public et le service militaire. Nous sommes plusieurs à nous réjouir de l’annonce récente du premier ministre Carney, étant donné que l’on n’a pas assez investi dans la défense militaire et surtout dans la rémunération de nos militaires. J’aimerais, avec le même angle que mon collègue, parler de l’approvisionnement.
Est-ce que les États-Unis fonctionnent comme le Canada? Hier, le comité a reçu des représentants de Services publics et Approvisionnement Canada, et le côté militaire est quand même pointu. De plus, le Canada est membre du NORAD. Je crois comprendre qu’il y a des discussions pour que ce soit plutôt votre ministère qui prenne les décisions en matière d’approvisionnement. Est-ce que cela allégerait et accélérerait le processus, qui est très long? Je pense que le contexte géopolitique ne nous accorde pas tant de temps que cela pour faire des achats.
Mme Tremblay : Effectivement, dans le travail que nous faisons, de prime abord, nous devons prendre en considération les besoins des Forces armées canadiennes. Quels sont leurs besoins en matière d’équipement pour faire le travail qu’on leur demande de faire? Dans le monde actuel de l’approvisionnement, c’est en travaillant avec Industrie Canada et Services publics et Approvisionnement Canada que l’on fait tout cela. Oui, les besoins opérationnels sont importants et doivent être comblés, mais nous devons aussi nous assurer que l’on obtienne l’équipement au meilleur prix possible et qu’il y a des bénéfices économiques au Canada.
Dans le système que nous avons actuellement, il y a des discussions en cours, étant donné que le gouvernement a mentionné qu’il y aurait une agence qui se consacrerait exclusivement à l’approvisionnement en matière de défense. On a donc entamé des discussions avec Services publics et Approvisionnement Canada. En ce moment, il n’y a pas de décision finale pour ce qui est de déterminer quelle sera l’étendue du travail de l’agence et où elle résidera.
Le sénateur Gignac : Aux États-Unis, est-ce que ça fonctionne comme ça? Est-ce que c’est une agence distincte pour l’approvisionnement?
Mme Tremblay : Oui, aux États-Unis, c’est —
Le sénateur Gignac : On fait partie du NORAD, et quand on est allé à Colorado Springs avec mes collègues du Comité de la défense, on a posé la question à M. Pelletier; je sais qu’aux États-Unis, ça fonctionne différemment.
Mme Tremblay : Aux États-Unis, ça fonctionne différemment, mais évidemment, nous sommes en contact avec nos collègues américains quand il existe des projets potentiels où l’on pourrait faire affaire avec les États-Unis. Évidemment, la considération des opérations liées au NORAD est souvent au cœur de nos discussions.
Le sénateur Gignac : Plus tôt en juin, j’ai été un peu surpris de voir que 9 milliards de dollars de plus de dépenses nous amèneraient à l’objectif de 2 % du PIB, comme le réclame l’OTAN. Quand j’ai fouillé un peu, j’ai cru comprendre que pour arriver à 62 milliards de dollars, on inclut 14 milliards de dépenses liées à la défense effectuées par d’autres ministères, comme Affaires mondiales Canada, la Garde côtière canadienne et Anciens Combattants Canada. C’est de cette manière qu’on en arrive à l’objectif de 2 % de l’OTAN.
Cela nous mène soi-disant à l’objectif de 2 % pour l’OTAN; cependant, l’OTAN a quand même un comité responsable de l’audit pour vérifier que les pays ne jouent pas avec les chiffres et qu’il s’agit bien de dépenses liées à la défense. Avez-vous fait des vérifications pour vous assurer que toutes ces dépenses supplémentaires sont bel et bien liées à la défense dans les autres ministères et seront admissibles pour atteindre l’objectif de 2 %, tel qu’il est calculé par un comité responsable de l’audit qui publie les résultats chaque année, pays par pays?
M. Moor : Merci beaucoup de votre question. Pour vous donner plus de précisions, je vais répondre en anglais.
[Traduction]
Oui, tout à fait. Le PIB de cette année estimé par l’OTAN s’élève à un peu plus de 3,1 billions de dollars : 2 % de ce chiffre correspond à 62,7 milliards de dollars.
Le sénateur Gignac : Ma question ne porte pas là-dessus. Les économistes sont capables de faire ce calcul. Les dépenses effectuées par d’autres ministères que vous imputez à la défense sont-elles reconnues par le comité d’audit de l’OTAN? Ou ne le savons-nous pas encore et ne le saurons-nous que dans un an si nous atteignons les 2 % cette année?
M. Moor : Il y a environ vingt ans, l’OTAN a publié sa définition des dépenses admissibles en matière de défense. Deux fois par an, nous recevons les réponses de tous les autres ministères, qui se sont basés sur cette définition. Cette année, les dépenses des autres ministères représentent environ 14,6 milliards de dollars. Toutes ces dépenses sont certifiées par leurs directeurs financiers comme étant conformes aux directives. L’OTAN n’a jamais effectué d’audit des montants déclarés par les différents États.
[Français]
Le sénateur Moreau : Merci d’être parmi nous. L’un des rôles du Sénat est de porter la voix de ceux qui n’ont pas la possibilité de s’exprimer. J’avoue que je suis très inquiet depuis que j’ai discuté avec un membre de la Marine royale canadienne au cours d’un vol. Cette personne m’a décrit l’état du navire sur lequel elle travaille et m’a dit qu’à certains égards, les membres de l’équipage craignaient pour leur propre sécurité.
Quelle est votre évaluation de l’état de nos navires dans la marine? Quelle est la part du budget que vous attribuez à l’entretien de ces équipements et à leur amélioration? En ce qui concerne les montants additionnels qui vous sont accordés, et qui s’élèvent à près de 9 milliards de dollars, consacrez-vous une part de ces sommes à l’amélioration de la sécurité à bord des navires de la Marine royale canadienne?
Mme Tremblay : Je vous remercie de la question, monsieur le sénateur. C’est une question très à propos, étant donné l’âge actuel de certains de nos navires dans la marine.
Des investissements importants sont faits pour maintenir en service l’équipement que nous avons aujourd’hui. On sait que nos flottes vieillissantes exigent beaucoup plus d’entretien que par le passé, et un entretien continu se fait sur nos flottes. Il y a beaucoup plus de travail qui se fait maintenant que par le passé, étant donné la condition de nos navires. Je dois dire que nous ne voulons absolument pas mettre en péril la sécurité des membres des Forces armées canadiennes, y compris les marins. Or, on a déterminé que les navires qui sont exploités par les marins sont assez sûrs pour être utilisés...
Le sénateur Moreau : Par qui?
Mme Tremblay : Au sein du groupe responsable des matériels, il y a une division qui s’occupe particulièrement du programme d’assurance de la qualité du matériel. Ce sont des experts techniques, des ingénieurs et des techniciens qui s’assurent que le travail qui est fait sur ces navires fera en sorte qu’ils sont exploités de façon sécuritaire.
Le sénateur Moreau : Pourquoi cette personne, qui n’était pas très revendicatrice, m’a-t-elle dit sincèrement que les membres de l’équipage du bateau sur lequel elle travaillait ont parfois eu des craintes pour leur propre sécurité? On peut être expert dans un bureau, mais lorsqu’on va sur le quai, on se rend compte que la situation peut être bien différente de celle que l’on estime à partir de données statistiques ou théoriques.
Y a-t-il une interrelation entre les membres des forces, les personnes qui sont à bord des bateaux et qui éprouvent des craintes, et ces experts dont vous parlez, et si oui, quelle forme prend-elle? Pouvez-vous m’indiquer, puisque vous dites qu’il y a une augmentation des coûts liés à l’entretien des navires à cause de leur âge, quelle est la proportion d’augmentation des coûts au cours des cinq dernières années?
Mme Tremblay : Je ne peux pas parler du cas qui vous a été signalé à bord de votre vol, mais je peux vous assurer qu’on travaille très étroitement avec la Marine royale canadienne pour que les exploitants et les marins puissent signaler les inquiétudes qu’ils pourraient avoir quant à la condition des équipements. Il n’y a rien de tout cela qui n’est pas pris au sérieux. Si nous devons déployer des forces additionnelles pour aider à faire certains travaux, nous allons le faire, mais habituellement, le travail de grande envergure se fait sur des périodes d’entretien planifiées. On parle de longue durée, parce que le travail demande plus de détail.
Je n’ai pas les chiffres exacts sur l’augmentation des coûts des cinq dernières années, mais je peux vous confirmer qu’ils ont augmenté; je pourrai fournir des informations s’il y a lieu.
Le sénateur Moreau : Pourriez-vous les acheminer à la greffière du comité?
Mme Tremblay : Absolument.
[Traduction]
La sénatrice Pate : Merci à tous d’être des nôtres aujourd’hui.
Je remarque que l’un des problèmes signalés concerne les difficultés de recrutement et de maintien en poste, et certains pensent que vous avez besoin de ressources supplémentaires pour y remédier. Ainsi, sur les 70 880 personnes ayant voulu s’enrôler dans les Forces armées canadiennes en 2023 et 2024, seuls 4 301 postulants ont été recrutés.
Je ne sais pas si vous disposez de données démographiques, mais je voudrais bien les voir. J’aimerais savoir notamment si vous avez établi un lien avec certaines des préoccupations soulevées concernant l’absence de progrès dans la mise en œuvre des 48 recommandations formulées par Louise Arbour dans la foulée de son rapport.
De plus, bien que le quatrième rapport d’étape de surveillance externe fasse état de progrès pour toutes les recommandations, on entend un son de cloche différent, du moins dans les médias. Des personnes continuent de s’exprimer pour indiquer que les problèmes de harcèlement sexuel au sein des forces armées ne sont pas pris au sérieux.
J’aimerais savoir qui effectue actuellement les évaluations et si vous suivez les recommandations. Comment faites-vous le lien avec le maintien en poste? Quelles sont les données démographiques et quels sont les plans pour continuer à remédier au problème de longue date du harcèlement sexuel dans les forces armées?
Lgén Kelsey : Monsieur le président, je commencerai par la surveillance externe, puis j’aborderai son incidence sur le recrutement.
Tout d’abord, comme cela a été mentionné précédemment, monsieur le président, il faut savoir, en ce qui concerne la vie et la situation de nos militaires, qu’ils sont au cœur de nos préoccupations, et notre capacité à attirer les nouveaux talents et à les retenir est étroitement liée à notre responsabilité vis-à-vis des quatre évaluations externes et des 206 recommandations, dont nous continuons à suivre la mise en œuvre. Nous en sommes à la troisième étape et nous avons déjà mis en œuvre 149 recommandations. Le rapport de Mme Arbour ne concerne que l’une des évaluations externes, et nous continuons à mettre en œuvre les changements importants qui s’imposent. Il s’agit d’une activité qui est au cœur du mandat que la cheffe d’état‑major de la Défense a confié à nous tous et qui est axé sur le respect de la dignité de chaque personne et la responsabilité de ceux qui ne répondent pas à nos attentes. Il y a donc eu une profonde transformation. Pourquoi est-ce si important? Parce que c’est notre devoir, c’est conforme aux valeurs que les Canadiens nous attribuent, et notre capacité à attirer les gens en dépend.
Monsieur le président, je ne reconnais pas les chiffres qui ont été cités, mais à première vue, ils sont proportionnellement corrects. Nous n’avons toujours pas de difficulté à intéresser des dizaines de milliers de personnes, mais ce qui a été difficile dans le passé, c’est de les faire franchir le pas. Le processus de recrutement et d’enrôlement a été transformé sur le plan technologique. L’approche et la séquence utilisées autrefois ont été modifiées. Je suis heureux d’annoncer que nous avons atteint, voire même dépassé, notre objectif de recrutement de 7 155 personnes l’année dernière, et que notre taux de maintien en poste a été supérieur à nos prévisions. Les rangs des Forces canadiennes se sont grossis à raison de 2 000 militaires. Nous sommes encore loin de l’objectif de 71 500 membres de la force régulière, mais nous progressons, et il faut reconnaître que le gel d’une année est une reconnaissance des changements importants qui ont eu lieu.
Je pourrais vous en dire plus sur ces changements. Cependant, nos deux impératifs, à savoir la nécessité de rendre des comptes sur les valeurs que nous prônons et le maintien en poste, se sont renforcés comme nous l’espérions l’année dernière.
La sénatrice Pate : En termes démographiques, pouvez-vous nous indiquer combien de femmes, combien...
Lgén Kelsey : Nous avons absolument ces chiffres. Je vais vérifier dans le classeur, monsieur le président, pour voir si je les ai avec moi. Nous surveillons cela de très près : les femmes, les Autochtones, tous les groupes représentatifs.
La sénatrice Pate : Je vous prie de me fournir ces informations par écrit. Je m’intéresse au taux de maintien en poste ainsi qu’aux nouvelles recrues et leur profil démographique.
Lgén Kelsey : Je les ai peut-être ici.
Pour ce qui est du maintien en poste, parmi les pays du Groupe des cinq, qui collaborent étroitement avec leurs alliés les plus proches, le Canada affiche les meilleurs résultats, même si nous ne sommes pas encore satisfaits. Nous sommes conscients de l’importance des investissements que nous consacrons à nos talents et nous souhaitons les garder en poste aussi longtemps que possible.
Nous nous attendions à perdre 4 876 personnes, et le nombre de personnes que nous avons retenues... Pardon, nous avions prévu 5 389 départs à la retraite, mais en fait il y a eu 4 800 départs à la retraite. Les calculs faits sur le champ ne sont jamais exacts, monsieur le président, mais cela représente environ 500 personnes que nous avons gardées alors que nous nous attendions à ce qu’elles prennent leur retraite.
[Français]
Le président : On a les finances devant nous.
Lgén Kelsey : Excusez-moi.
[Traduction]
La sénatrice Galvez : Merci beaucoup de votre présence et de votre travail. J’ai une question qui porte sur un domaine précis, puis deux questions plus générales.
Nos analystes ont préparé quelques notes à notre intention, et j’ai lu que le budget prévu pour les chasseurs CF-18 avait augmenté de plus de 50 %. Ma question est la suivante : quand cela s’arrêtera-t-il ? Quand? Le budget augmenté de 50 % est-il définitif ou, si un autre problème survient, peut-il être augmenté de 70, 100 ou 200 %? Où se situe la limite ?
M. Moor : Permettez-moi de répondre à la question.
Je pense que vous faites référence aux avions de combat F-35, qui font justement l’objet du dernier rapport de la vérificatrice générale. Les CF-18 sont nos avions de combat actuels, qui font l’objet d’une maintenance, et je suis certain que Mme Tremblay pourra répondre à vos questions concernant les coûts de maintenance des CF-18. Les F-35 entreront en service au début des années 2030 afin de remplacer les CF-18.
Les coûts du programme des F-35 viennent tout juste d’augmenter d’environ 8,5 milliards de dollars, comme l’indique le rapport de la vérificatrice générale. Cependant, la moitié de cette somme est destinée aux imprévus. Nous avons une réserve pour imprévus dans le budget, ce qui fait que ce n’est pas vraiment une augmentation des coûts. Il s’agit plutôt d’une anticipation du risque de hausse des coûts en raison des fluctuations du taux de change, de l’inflation et d’autres facteurs pouvant survenir au cours du projet.
La sénatrice Galvez : Merci beaucoup.
J'ai été invitée par la Marine Royale canadienne à visiter l'Arctique, et nous avons prolongé notre séjour à Nuuk, au Groenland, et à Reykjavik. À l’époque, je m’intéressais surtout aux difficultés liées au changement climatique et à l’érosion du littoral, mais aussi à la sécurité des peuples autochtones dans l’Arctique, en particulier les Inuits de cette région. Je sais que nous faisons de plus en plus appel à votre aide lors de phénomènes météorologiques extrêmes. Les fonds que vous recevez couvrent-ils certaines de ces activités, et que pensez‑vous du fait que la Défense soit appelée à intervenir dans ces situations? Est-ce votre travail?
M. Moor : Nous disposons d’une enveloppe budgétaire pour l’opération LENTUS, qui sert à répondre aux sinistres sur le territoire national. Notre budget est relativement limité, car nous intervenons en fonction des besoins. Le général pourra peut-être vous donner plus de détails sur le fonctionnement de l’opération, en particulier dans le contexte des incendies récents.
Lgén Kelsey : Les Forces armées canadiennes sont généralement considérées comme un dernier recours, mais lorsque les Canadiens ont besoin de nous, nous sommes toujours au rendez-vous. Je pense que les événements récents dans le Nord du Manitoba démontrent une fois de plus que les Forces canadiennes comptent dans leurs rangs de jeunes Canadiens très talentueux, prêts à intervenir pour aider les collectivités sinistrées.
Le Canada consomme notre excellente disponibilité opérationnelle, qui est attribuable aux gains d’efficacité réalisés dans notre système au cours des dernières décennies. Les forces qui auraient autrement été utilisées pour la formation et la préparation en vue d’autres missions se font un plaisir d’aider les Canadiens, mais c’est possible grâce à l’efficacité de notre machine. Nous avons géré le niveau de disponibilité opérationnelle de l’ensemble des forces, y compris celle des navires, dont la disponibilité opérationnelle et l’assurance du matériel se sont accrues.
Cet investissement permettra en fait à une plus grande partie des forces d’être à un niveau de disponibilité plus élevé, de sorte que lorsque nous venons en aide aux Canadiens, cela aura moins d’impact sur la capacité de dissuasion des forces que nous visons. Cet investissement nous permettra d’y parvenir avec un impact minimal ou réduit sur la disponibilité opérationnelle.
La sénatrice Galvez : Pouvez-vous me dire le pourcentage des membres des forces armées affectés à cette activité?
Lgén Kelsey : Monsieur le président, je ne peux pas vous donner de pourcentage, mais je peux vous assurer qu’il existe partout au Canada une unité d’intervention d’urgence polyvalente, capable de répondre à tout type d’urgence, au pays et à l’étranger. Il s’agit généralement d’une unité ou d’une compagnie d’environ 150 personnes, dont les membres sont répartis dans tout le Canada. Son mandat n’est pas spécifiquement lié aux incendies ou aux inondations.
Il en va de même pour la disponibilité des aéronefs qui, en raison de leur répartition à travers le Canada, sont normalement affectés à d’autres tâches. La recherche et le sauvetage en sont un bon exemple. En cas de besoin, ils sont retirés des exercices d’entraînement ou de leur lieu d’affectation et dépêchés sur les lieux. Les incendies au Manitoba ont nécessité l’intervention d’hélicoptères et d’avions provenant de Halifax, Shearwater, Québec, Trenton, Winnipeg, Edmonton et Yellowknife, qui se sont tous rendus en moins de 48 heures à Norway House et dans une autre collectivité menacée.
La sénatrice Galvez : Pensez-vous recevoir plus ou moins d’appels à l’aide l’année prochaine?
Lgén Kelsey : Au cours de la dernière décennie, monsieur le président, les Forces canadiennes ont été appelées à intervenir dans le cadre de ces situations d’urgence. La fréquence des catastrophes n’est pas en train de diminuer. Elle est directement liée au changement climatique et aux capacités et ressources des autorités provinciales, compte tenu du nombre simultané d’incendies ou de l’ampleur des inondations.
La sénatrice Galvez : Merci.
Le sénateur Loffreda : Merci d’être ici, et merci de votre service.
Ma question s’adresse au lieutenant-général Kelsey. Je suis ravi d’entendre vos commentaires sur le recrutement, le maintien des effectifs et vos valeurs, qui sont extrêmement importants pour le bien-être de nos forces armées. La vérificatrice générale du Canada faisait partie du premier groupe de témoins ce matin. Vous l’avez peut-être entendu dire qu’elle aimerait mener un audit sur la culture au ministère de la Défense nationale. Nous savons que c’est une priorité pour vous. Il y a de nombreuses références à notre engagement à changer et à améliorer la culture au ministère dans votre plan ministériel. Je remarque que vous vous engagez à mettre fin aux inconduites, en adoptant une culture inclusive et en offrant un milieu de travail sécuritaire sur le plan psychologique pour les membres du personnel actuels et à venir; toutes mes félicitations pour cela. Cependant, je suis préoccupé par le fait que certains de vos indicateurs de rendement liés à la culture soient nouveaux ou ne prévoient toujours pas de cibles. Par conséquent, nous n’avons pas beaucoup de données, et cela pourrait poser problème si la vérificatrice générale réalise un audit.
Je me demande si vous pourriez faire un commentaire là‑dessus. Le ministère de la Défense nationale serait-il favorable à ce que la vérificatrice générale mène un audit spécial sur sa culture? Est-ce que cela serait utile ou favoriserait le maintien des effectifs ou le recrutement? Un tel audit aiderait-il au bien-être des forces armées de manière générale?
Lgén Kelsey : Merci, monsieur le président.
Toute occasion pour les Forces armées canadiennes et le ministère de montrer qu’ils ont opéré un changement est la bienvenue. Comme nous l’avons mentionné, quatre audits externes ont été réalisés et nous ont demandé pas mal de travail. Même si nous sommes dans la troisième phase — et j’expliquerai pourquoi nous suivions un certain ordre —, nous avons apporté un changement en profondeur.
J’ai parlé d’un total d’environ 206 initiatives. Parmi celles-ci, 51 initiatives portent sur des changements législatifs à réaliser, et 15 concernent la réglementation. Enfin, et c’est un gros chiffre, 128 ou 129 initiatives concernent nos politiques internes.
En matière de changement législatif, par exemple, il faut relancer le projet précédent qui visait à améliorer significativement la Loi sur la Défense nationale et qui représentait des avancées majeures. Normalement, nous voudrions apporter ces changements dans le bon ordre, mais à cause de l’ampleur et de la nature de la tâche, nous avons accéléré certaines initiatives. Toutefois, en général, il fallait trouver dans quel ordre faire les choses. C’est pourquoi nous procédons de manière très réfléchie, même si cela peut être frustrant pour le personnel. Nous voulons prendre le temps d’exécuter ces quatre phases successives pour mener ce travail à bien.
Mais je répète que nous sommes en fait très fiers des changements apportés. Nous le voyons chez le personnel, et nous sentons qu’il y a une meilleure reddition de comptes pour les comportements passés. Sur ces 206 initiatives, 149 initiatives sont largement mises en œuvre ou sont complètement terminées, mais il nous reste encore beaucoup de pain sur la planche.
Le sénateur Loffreda : D’accord, merci.
J’ai une question complémentaire. Dans son rapport, la vérificatrice générale présente les divers ministères qui participent à l’acquisition de chasseurs au Canada. Elle y explique les rôles et responsabilités distincts de la Défense nationale, de Services publics et Approvisionnement Canada et de Construction de Défense Canada. Je ne serais pas surpris que d’autres ministères ou organismes jouent aussi un rôle de soutien dans le processus.
Je comprends que chaque organisation a un mandat bien défini, mais je crains qu’il y ait peut-être trop d’intervenants. Je sais que dans le secteur privé, on chercherait à réduire ce nombre. Plus la structure organisationnelle est simple, plus on est proche du client et des gens que l’on doit servir. S’il y a trop d’intervenants, cela cause des chevauchements en matière d’efficacité ou un flottement en matière de responsabilisation. Pourriez-vous nous parler de la relation qui existe entre ces trois organisations centrales? D’après vous, pourrait-on consolider certaines responsabilités ou rationaliser la coordination pour obtenir des gains d’efficience ou de meilleurs résultats?
M. Moor : Nous avons une excellente relation avec les autres ministères. Ce sont des projets complexes. Dans le cas du F-35, nous sommes en fait huit pays qui avons signé un accord de partenariat international pour acquérir ces chasseurs. Cela signifie que tous ces chasseurs sont le même prix, peu importe qui les achète. Les Américains contrôlent cette organisation et font baisser les prix, parce qu’ils sont les principaux acheteurs de F-35. Comme Nancy l’a dit, le gouvernement propose de créer un organisme d’acquisition en défense, et ce projet est actuellement en cours.
Nancy pourrait peut-être vous en dire un peu plus sur la relation entre les intervenants sur le plan des acquisitions.
Mme Tremblay : Merci beaucoup.
Monsieur le président, je peux attester des bonnes relations que nous avons avec les autres ministères. C’est essentiel pour que le pays aille de l’avant et procède à des acquisitions majeures et complexes. Il faut travailler ensemble.
Évidemment, cela amène son lot de discussions intéressantes, et parfois des tensions, mais je parlerais de tensions saines. Parce qu’il y a de nombreux intérêts en jeu, comme je l’ai dit: les exigences opérationnelles des Forces armées canadiennes, les retombées économiques; il faut s’assurer d’en avoir pour son argent. Toutes ces considérations sont à l’avant-plan dans ce projet complexe que nous mettons en œuvre.
Pour ce qui est des F-35, nous allons recevoir les premiers l’an prochain, en 2026. Ils seront livrés aux États-Unis, à des fins de formation de nos pilotes. Puis, en 2028, nous allons recevoir les premiers chasseurs au Canada. C’est un programme complexe, mais nous faisons de bons progrès jusqu’ici.
Le sénateur Loffreda : Je vous remercie.
[Français]
Le sénateur Dalphond : Je regarde les chiffres dans le Budget supplémentaire des dépenses (A). Presque 45 milliards de dollars sont prévus pour le budget de la Défense nationale. Cependant, on n’a pas encore atteint l’objectif. Cela laisse-t-il entrevoir qu’il y aura un Budget supplémentaire des dépenses (B) ou (C) prévoyant 12 milliards de dollars de plus? Sinon, une partie de ce budget proviendra-t-elle de ministères qui s’occupent de la garde côtière, de la surveillance ou d’autres ministères?
M. Moor : Merci beaucoup pour votre question.
[Traduction]
Notre méthode consiste à compter toutes les dépenses en défense engagées par le gouvernement du Canada qui répondent à la définition de l’OTAN. C’est vrai que nous avons 45 milliards de dollars sur les 62,7 milliards de dollars au total, mais la différence s’explique par les autres ministères qui ajoutent leurs chiffres. Anciens Combattants Canada est le principal contributeur pour des raisons évidentes, en raison des paiements aux anciens combattants, mais la Garde côtière y figure aussi, en raison de la construction de ses navires. Il y a aussi le Centre de la sécurité des télécommunications.
Nous avons examiné la situation dans tous les ministères. Ils soumettent leurs propositions, et le directeur principal des finances les atteste. De ce point de vue, nous n’avons pas d’écart à combler pour atteindre les 2 % cette année. Le défi, c’est bien sûr qu’il s’agit de beaucoup d’argent. Nous devons le dépenser, mais je suis aussi ravi de dire que les budgets supplémentaires des dépenses (B) et (C) nous permettront d’obtenir des fonds supplémentaires. Le Conseil du Trésor examine présentement nos soumissions, et nous aurons accès aux fonds dans le budget supplémentaire (B) ou le budget supplémentaire (C).
Le sénateur Dalphond : Selon ce que vous nous avez dit, diriez-vous que nous avons atteint la cible de 62 milliards de dollars, si l’on tient compte des autres ministères qui ont aussi un lien avec les anciens combattants ou les enjeux de sécurité nationale?
M. Moor : À l’heure actuelle, nos dépenses représentent 2,01 %. C’est ce que nous prévoyons dépenser au cours du présent exercice, mais de nouveaux enjeux pourraient émerger. Ce sera aussi tout un défi de dépenser cet argent. C’est beaucoup d’argent, et il faut veiller à le dépenser judicieusement pour que les contribuables en aient pour leur argent.
Le sénateur Dalphond : Nous avons confiance que les choses vont s’améliorer. Selon la vérificatrice générale, on pourrait apporter des améliorations.
Ma prochaine série de questions s’adresse à vous, lieutenant-général. Je lis les articles de David Pugliese, spécialiste des questions militaires, dans le National Post et l’Ottawa Citizen. Très récemment, je pense que c’était la semaine dernière, il a écrit que:
En avril 2024, le principal conseiller à la cheffe d’état-major de la Défense nous a avertis que les militaires canadiens quittaient les rangs à cause du leadership militaire toxique...
L’insatisfaction professionnelle, le manque de logements et les déménagements fréquents un peu partout au pays figurent parmi les principales raisons pour lesquelles les militaires quittent les Forces armées canadiennes, selon des rapports militaires passés.
Pouvez-vous me dire ce qui a été fait pour améliorer l’insatisfaction professionnelle ou pour réduire le niveau d’insatisfaction au travail, surtout en matière de leadership militaire? Que faites-vous pour combler le manque de logements adéquats?
Lgén Kelsey : Je sais de quel article vous parlez. Les données montrent que nous maintenons nos effectifs, contrairement à l’argument invoqué ici.
Je reconnais que nous perdons des gens de talent, parce que les occasions d’exercer les fonctions qu’ils espéraient — naviguer et piloter — sont moins nombreuses que prévu. Cela découle du système en place depuis une trentaine d’années, qui privilégie l’efficacité dans la production des effets opérationnels et une gestion rigoureuse des niveaux de préparation. Les navires, les aéronefs et les unités ne sont pas tous au même niveau. Ces investissements nous permettront de rehausser l’état de préparation général des Forces canadiennes. Ce faisant, nos militaires pourront répondre à leurs attentes liées à leur mode de vie et à leur engagement pour servir le pays.
En matière de leadership, c’est la suite de la question précédente sur la responsabilisation. Peut-être que nous ne défendions pas les valeurs canadiennes comme il se doit par le passé.
De jeunes Canadiens talentueux rejoignent nos rangs. Ils utilisent les outils et la technologie numérique différemment. Ils apprennent différemment aussi. Ils sont peut-être plus futés que notre génération. C’est pourquoi il faut les motiver d’une autre manière, les traiter avec la dignité qu’ils méritent et mettre leur talent à profit d’une façon jusqu’à maintenant inédite.
Le logement est certainement un enjeu. Concernant notre capacité de maintenir nos effectifs formés de Canadiens compétents, ces fonds nous permettront d’agir et nous donneront des outils, mais également de prendre soin des familles. Grâce aux investissements réalisés, nous pourrons poursuivre nos efforts dans ces programmes. Une précédente annonce de politique sur les effectifs a amorcé la croissance du nombre de logements et de quartiers militaires. Nous avons l’ambition d’en faire plus. Nous sommes impatients d’entendre les prochaines annonces visant à investir davantage dans le logement militaire. Tout est interrelié.
La sénatrice MacAdam : Dans son rapport intitulé Assurer la capacité future du Canada en matière d’avions de chasse, la vérificatrice générale mentionne qu’en 2018, lors de son dernier audit sur les chasseurs canadiens, elle a signalé qu’un des principaux obstacles pour la Défense nationale était la pénurie de pilotes qualifiés. Le ministère s’est alors dit d’accord avec la recommandation. Six ans plus tard, un nouveau rapport indique qu’il faut toujours remédier au manque de personnel. Pourriez‑vous faire un commentaire là-dessus? Y a-t-il des raisons qui expliquent pourquoi cet enjeu déjà soulevé n’a pas été entièrement réglé par le passé?
M. Moor : Je peux commencer et parler de nos projets en cours.
Deux de nos projets étaient déjà approuvés. Le Programme de formation du personnel navigant de l’avenir renforce la capacité de formation de nos pilotes, qui débouche sur notre Programme d’entraînement initial des pilotes de chasse de l’avenir. Ce programme aide aussi à développer des ressources de formation en vue de l’arrivée des F-35. Nous avons deux projets en cours, nous investissons beaucoup et nous élaborons une approche canadienne pour la formation des pilotes de chasse.
Je vais laisser le général parler davantage des chiffres en tant que tels.
Lgén Kelsey : Monsieur le président, la réponse courte, c’est que nous n’avions pas les ressources pour favoriser le maintien des pilotes que nous voulions garder. Et on ne parle pas que des pilotes, bien qu’ils soient à un palier supérieur en matière de compétences et d’expérience. Ils exigent de grands investissements pour atteindre un niveau de rendement élevé, même avec les chasseurs que nous avons à l’heure actuelle.
Grâce à ces investissements, nous pourrons notamment mener une série d’initiatives pour maintenir nos effectifs et prolonger le programme des pilotes. On parle ici d’effectifs très compétents et spécialisés. Ce qui les motive, c’est autant d’avoir le bon matériel à disposition que de recevoir des incitatifs financiers. Nous n’avons pas fait le nécessaire pour conserver les pilotes.
Comme vous le savez, la force aérienne transforme presque toutes ses flottes. Les nouvelles sont bonnes, et il y a de nouvelles plateformes. L’arrivée imminente des F-35, les deux premiers arrivant aux États-Unis l’an prochain, est en soi une façon de garder ces Canadiens très talentueux qui devront accomplir les tâches que nous allons leur confier.
Nous avons beaucoup de travail à faire pour attirer ces jeunes et les garder parmi nous, au lieu de les voir partir travailler pour d’autres qui voudraient profiter de nos investissements et les utiliser à d’autres fins.
La sénatrice Kingston : J’aimerais maintenant parler des 2,1 milliards de dollars destinés au recrutement, au maintien en poste et aux programmes de soutien des forces armées. Dans votre exposé liminaire, monsieur Moor, vous avez parlé des soins de santé. J’aimerais savoir ce que vous entendez par là et combien de ces 2,1 milliards de dollars sont réservés aux soins de santé. À quoi ces soins ressemblent-ils?
M. Moor : Les Forces armées canadiennes se classent 14e en tant que fournisseur de soins de santé au pays. Nous devons fournir des soins de santé et dentaires à un nombre considérable de gens pour nos militaires en service. Nous en sommes d’ailleurs fiers.
Comme pour d’autres priorités en matière de santé, nous peinons à recruter du personnel et à maintenir des effectifs suffisants. Les fonds qui nous ont été attribués dernièrement servent à payer des fournisseurs externes supplémentaires quand nous n’avons pas assez de personnel pour réaliser le travail à l’interne.
Le général pourra donner de plus amples détails sur notre façon de fournir des soins de santé, mais nous recevons maintenant tous les fonds nécessaires pour satisfaire aux exigences actuelles en matière de soins de santé. Évidemment, ces exigences évoluent constamment et les coûts des soins de santé ne cessent d’augmenter.
Lgén Kelsey : Il y a un lien important à faire avec le maintien en poste des gens talentueux. Nous devons prendre soin d’eux, ainsi que de leur famille.
Même si ces investissements concernent les militaires, il faut reconnaître que pour les employer au mieux de leurs capacités, nous les déplaçons très souvent. Nous examinons la fréquence et la nécessité de ces déménagements, mais en réalité, quand nous procédons ainsi, nous devons songer à tous les systèmes de soutien. Dans le cas présent, les investissements dans le domaine médical, comme l’a dit le directeur principal des finances, servent à couvrir les coûts d’un système de santé qui équivaut en quelque sorte à une 14e province.
Nos ambitions ne s’arrêtent pas là. Nous voulons en faire plus pour prendre soin de la santé physique et mentale de nos militaires. Nous voudrions bonifier tous nos services, comme ceux des Services de bien-être et moral des Forces canadiennes et des programmes destinés aux familles. Nous examinons présentement quels sont les besoins, qui peuvent différer que l’on soit situé à Halifax, à Trenton, à Québec ou à Winnipeg.
Nous réfléchissons soigneusement à la façon de dépenser les fonds qui nous sont consentis, et si nous voulons dépenser davantage, nous sommes conscients de la provenance de ces fonds. Bien qu’elle constitue un défi pour ce qui est de dépenser de manière à concrétiser notre vision, cette occasion formidable nous permet de faire tellement de bonnes choses pour les gens qui choisissent de servir leur pays, et les partenaires de la défense nous aident pour ce faire.
La sénatrice Kingston : Je m’intéresse à la BFC de Gagetown. Elle se trouve tout près de chez moi. J’estime qu’il y a là des possibilités intéressantes. Des infirmiers et les infirmiers praticiens pourraient notamment améliorer les soins primaires. À deux pas de la BFC de Gagetown, il y a une faculté de sciences infirmières. J’aimerais que vous réfléchissiez à ce point et que vous envisagiez les possibilités qui s’offrent à nous.
Pour ce qui est du logement, la BFC de Gagetown est proche de nombreux villages et villes. Je sais, pour avoir vécu longtemps au Nouveau-Brunswick, que les militaires aiment souvent acheter un logement lorsqu’ils s’installent là-bas. C’est souvent possible. Je ne comprends pas tout à fait le lien avec la question du logement dont vous parliez récemment, à savoir la façon dont nous pourrions aider les gens à réaliser leurs projets d’achat ou de vente lorsqu’ils doivent déménager pour des raisons opérationnelles.
Lgén Kelsey : Monsieur le président, pour ce qui est de l’achat et de la vente, nous disposons déjà de mécanismes, tout comme la fonction publique et la GRC, visant à offrir un soutien ou une compensation pour le paiement des frais juridiques, etc. Mais nous pouvons toujours faire mieux, et chaque région est légèrement différente.
L’une des difficultés liées au logement de notre personnel, qu’il s’agisse de personnes célibataires ou de familles, a toujours été de s’adapter à la conjoncture économique. Il n’y a pas si longtemps, l’indice relatif à l’état de l’ensemble de notre parc immobilier ne justifiait pas qu’on le conserve. Les gens pouvaient se permettre de vivre en ville. La situation a évidemment changé récemment, et c’est pourquoi l’investissement réalisé dans le cadre de la politique précédente, Notre Nord, fort et libre, nous permet aujourd’hui d’examiner les besoins réels en fonction d’une conjoncture économique complètement différente.
Nous menons également une initiative pionnière qui consiste à examiner les biens immobiliers fédéraux dont nous disposons, non seulement pour loger nos militaires, mais aussi pour déterminer ce que nous pouvons faire pour les collectivités. Cette initiative pionnière est mise en œuvre à Halifax, Victoria et Toronto, je crois, trois villes aux réalités économiques très différentes. Nous abordons toutefois la question du point de vue de ces personnes, en particulier des jeunes familles, qui ont de la difficulté à servir leur pays, prendre soin de leur famille et trouver un endroit où vivre.
J’aimerais faire un commentaire sur le dernier point lié aux soins infirmiers : nous avons pour ambition, monsieur le président, d’augmenter le nombre de médecins et d’infirmiers praticiens. Nous les employons bien sûr à des fins très précises, lorsque nous menons des opérations, et nous veillons toujours, en collaboration avec les hôpitaux locaux, à ce qu’ils maintiennent leurs qualifications, qu’ils ne traitent pas que des entorses de la cheville ou du genou, ou des rhumes. Le partenariat avec les villes et les écoles locales est l’un des piliers de notre approche. Nous n’avons tout simplement pas les ressources nécessaires pour mener à bien ce projet comme nous le faisions auparavant. Nous nous réjouissons donc de cet investissement.
La sénatrice Kingston : J’aimerais discuter avec vous ou avec toute autre personne que vous jugeriez appropriée de ces opportunités. Ce serait formidable.
Pour finir, je tiens à souligner que la santé mentale est un élément très important. Je sais qu’à la BFC de Gagetown et dans les villages et villes environnants, on a accès à de nouvelles formes de traitement du syndrome de stress post-traumatique et autres. Certains anciens combattants décident de rester dans notre belle région lorsqu’ils prennent leur retraite ou terminent leur période de service. Merci.
[Français]
Le président : Évidemment, vous devrez dépenser des dizaines de milliards de dollars. J’imagine que vous allez aussi analyser les données, prendre les décisions et suivre les recommandations en fonction des retombées économiques locales.
Dans le plan que vous allez développer pour dépenser ou investir ces sommes, particulièrement au chapitre des infrastructures... J’ai quelques critères en tête; je vais vous les énumérer et vous demander si cela fait partie des vôtres, ou si cela fait partie de ceux que vous souhaitez considérer.
D’abord, il y a les retombées économiques à l’intérieur du pays.
Deuxièmement, il y a les retombées technologiques civiles. Évidemment, on peut prendre l’argent pour l’investir dans le matériel militaire, mais par la suite, cela peut avoir des conséquences civiles, que ce soit pour la sécurité publique, par exemple, ou pour les forces policières.
Troisièmement, il y a le maintien de la capacité de réponse en temps de paix. Évidemment, si on n’a pas dépensé les fonds et si les industries ont fermé, mais si on veut réussir à maintenir notre tissu social et notre chaîne d’approvisionnement industriel, il y a un manque. Donc, on n’investit pas un montant X, on arrête les activités, les usines ferment, ou alors elles ne sont pas transformées et elles s’éteignent.
Finalement, il est important d’augmenter l’indépendance opérationnelle de la défense et de ne pas dépendre d’un pays tiers pour conserver cette souveraineté.
Ce sont mes quelques notes.
Qu’est-ce que vous avez dans vos feuillets pour faire en sorte qu’il y ait un maximum de retombées de cette nature ou autre pour le Canada?
[Traduction]
M. Moor : Je vais commencer, puis je laisserai probablement la parole à Mme Tremblay pour qu’elle dise quelques mots.
Nos priorités correspondent étroitement aux vôtres, et je suis heureux d’annoncer que, dans le Budget supplémentaire des dépenses (A), nous estimons qu’environ 70 % des fonds que nous recevrons seront dépensés au Canada, tant par les Forces armées que dans le cadre de l’approvisionnement. Dans ce budget, 2 milliards de dollars sont consacrés à la stratégie industrielle de défense, qui vise expressément à renforcer les capacités et les compétences de nos fournisseurs canadiens à long terme. Nous avons reçu des fonds pour la production nationale d’obus de défense, qui nous permettront de construire des infrastructures supplémentaires pour les entreprises basées au Canada.
Je cède maintenant la parole à Nancy Tremblay, qui vous fournira des précisions sur la façon dont nous gérons l’approvisionnement en vue d’optimiser les avantages pour le Canada.
[Français]
Mme Tremblay : Comme je l’ai dit auparavant, les retombées économiques pour le pays sont au cœur des discussions que nous avons sur tous les projets d’acquisition que nous réalisons avec nos collègues d’Industrie Canada et de Services publics et Approvisionnement Canada.
Évidemment, lorsqu’on a des capacités de production au Canada, c’est le premier endroit à privilégier. Si ces capacités sont inexistantes, avec la Politique des retombées industrielles et technologiques, on demande aux compagnies d’investir un montant égal à la valeur du contrat qui leur est accordé, ce qui amène des bénéfices économiques.
Vous avez parlé de l’importance de maintenir une capacité de réponse en temps de paix. Je suis tout à fait d’accord avec vous. Je crois que les investissements en matière de défense que l’on fait aujourd’hui et dans l’avenir permettront de faire cela plus souvent qu’on a pu le faire par le passé.
On comprend tous que, pour avoir une industrie solide au Canada, il faut faire en sorte d’avoir une demande régulière auprès de l’industrie pour qu’elle puisse maintenir la capacité nécessaire et servir les Forces armées canadiennes.
Je pense que les priorités que vous avez mentionnées sont très semblables aux nôtres.
Le président : Pour ce qui est de la transformation de la Garde côtière canadienne, j’imagine qu’il faudra modifier ses capacités d’opération pour les aligner sur une dimension plus militaire, de façon à ce qu’elle puisse entrer dans le calcul du 2 %, du 3,5 % ou du 5 % du PIB qui sera déterminé ou que le Canada décidera d’engager en ce qui a trait à l’OTAN.
Avez-vous une idée du type de transformation, du coût, du délai?
Quelles sont les embûches que vous envisagez pour atteindre cet objectif? Y a-t-il de la réticence au changement ou des gens qui veulent protéger une chasse gardée sur ce type de mandat?
[Traduction]
M. Moor : Je vais commencer, puis je passerai la parole au général.
Le Parlement étudie actuellement un projet de loi visant à modifier le mandat de la Garde côtière, qui permettrait au ministère de la Défense d’ajouter de l’équipement supplémentaire — du matériel de détection — pour la collecte de renseignements. Ce projet de loi est à l’étude au Parlement.
Actuellement, environ 60 % de la Garde côtière sont inclus dans la définition des dépenses de défense de l’OTAN. Je pense que le transfert de la Garde côtière au ministère de la Défense pourrait être l’occasion d’examiner ce pourcentage afin de déterminer si nous pourrions l’augmenter.
Je vais passer la parole au général qui pourra vous expliquer comment nous allons intégrer la Garde côtière dans nos opérations.
[Français]
Lgén Kelsey : Premièrement, nous collaborons étroitement avec la Garde côtière canadienne depuis plusieurs années. Notre collaboration récente concerne la surveillance autour du Grand Nord. Il y a peut-être un manque pour nous, parce qu’on a ciblé nos efforts vers nos vaisseaux et nos équipements.
Il y aura donc une bonne collaboration pour vérifier ce qui se passe dans le Grand Nord.
L’intention avec la Garde côtière canadienne, c’est seulement cela, ainsi que les équipements et les capacités de communiquer et d’échanger les données et les perspectives. Il n’y a aucune intention d’intégrer la Garde côtière dans les Forces armées canadiennes. C’est une agence qui est au-dessus de notre ministre et avec laquelle nous avons établi une collaboration efficace, mais sa mission est complètement différente de celle des Forces canadiennes.
J’ai lu et entendu certaines choses dans les médias sur l’intention d’armer la Garde côtière, mais ce n’est pas le cas; il s’agit seulement d’augmenter ses capacités et son positionnement dans le Grand Nord à notre avantage.
Comme le dirigeant principal des finances l’a dit, cela fait plusieurs années que l’on comptabilise un pourcentage de la contribution de la Garde côtière vers les cibles de l’OTAN. La différence de la contribution entre la Garde côtière et la Défense nationale est importante, mais ce n’est qu’une fraction du réel pourcentage.
[Traduction]
La sénatrice Marshall : Comment allez-vous prévenir la non-utilisation des fonds, qui a toujours posé problème? Je crois vous avoir entendu dire, monsieur Moor, que sur la base du financement demandé, vous espérez atteindre 2,01 %, mais si vous n’utilisez pas une partie importante des fonds... Je sais que vous essayez de tout utiliser, mais compte tenu de l’historique du ministère, comment allez-vous prévenir la non-utilisation des fonds?
M. Moor : Je pense que ce sera toujours difficile, surtout en raison des larges sommes à gérer. Je suis heureux de pouvoir dire que nous avons considérablement amélioré notre rendement ces trois dernières années. Après la COVID, une part importante de notre budget n’a pas été utilisée. En 2022-2023, celle-ci s’élevait à environ 5,4 %. Cependant, l’année dernière, en 2024-2025, elle est passée à 2 %, ce qui montre que nous nous concentrons davantage sur la réalisation de nos objectifs.
J’estime que le deuxième aspect concerne le capital. Ce dernier est plus difficile à gérer, car nous dépendons souvent des fournisseurs et de leur capacité à respecter leurs engagements. Par exemple, la grève de Boeing survenue l’année dernière a considérablement allongé certains de leurs délais de livraison. Nous disposons toutefois d’un fonds d’investissement en immobilisations qui nous permet de transférer des fonds chaque année afin d’équilibrer nos comptes, de garantir le meilleur rapport qualité-prix et d’éviter toute non-utilisation des fonds.
Je pense que la vérificatrice générale se concentre clairement sur ce point, tout comme le directeur parlementaire du budget, et nous aussi. Je suis heureux de dire que ce taux de 2 % est bien inférieur à l’objectif de 5 % fixé par le gouvernement. Nous ne sommes pas autorisés à dépasser les 5 % de non-utilisation. L’année dernière, la part non utilisée du budget ne s’élevait qu’à 2 %.
La sénatrice Pate : Pour faire suite à la question posée par la sénatrice Kingston, j’aimerais savoir, en tant que personne ayant grandi dans des logements militaires privés et pour couples mariés en Allemagne et partout au Canada, quelle part du budget est actuellement allouée à l’aide à l’achat d’un logement par rapport à celle allouée aux logements pour couples mariés, qui étaient autrefois le lieu de résidence le plus courant de nombreuses personnes?
J’aimerais également revenir sur ce que j’ai demandé tout à l’heure et poser une question sur les mesures concrètes qui seront prises pour continuer à œuvrer en faveur d’un changement significatif de la culture, afin de mettre fin à la misogynie et au sexisme. Je ferai un lien avec cette question. Pendant de nombreuses années, on s’est engagé à ce que les affaires d’agression sexuelle soient jugées par des tribunaux civils, mais en janvier de cette année, le Ottawa Citizen a publié un article sur l’agression sexuelle de Kristen Adams survenue en Lettonie en 2022. Il est intéressant de noter que, bien que l’on ait recommandé que les affaires d’agression sexuelle, y compris celles commises à l’étranger, soient jugées par des tribunaux civils, la sienne ne l’a pas été. J’aimerais savoir ce qu’il en est de toutes ces mesures.
Lgén Kelsey : En ce qui concerne la question du logement, d’après ce que je comprends, la Défense n’accorde aucun prêt à nos membres pour l’achat d’un premier logement. Ces programmes existent, mais nous ne les proposons pas. Nous essayons plutôt de comprendre la situation des familles de nos militaires et de leur offrir un accès prioritaire aux logements militaires dont nous disposons. D’après votre expérience, vous savez que le tarif que nous fixons est adapté à la région... nous avons mis en place un système de calcul qui nous permet de ne pas entrer en concurrence avec les offres de location locales, ni d’offrir un avantage et, par conséquent, un bénéfice involontaire.
Pour ce qui est des mesures concrètes, de ce qui est différent, et de la façon de garantir la réelle mise en œuvre de tous les changements des quatre rapports, je peux seulement vous assurer que notre cheffe d’état-major de la Défense est déterminée. C’est un sujet qui revient dans chacune des réunions de notre conseil supérieur. Je me réfère à un document d’un événement de la semaine dernière au cours duquel tous les dirigeants du ministère, en particulier des Forces canadiennes, se sont réunis pour vérifier régulièrement les progrès réalisés. Il s’agit du Plan de mise en œuvre global, le PMG. Nous avons un brigadier-général dont le travail à temps plein consiste à suivre chaque initiative et à demander des comptes aux dirigeants sur les progrès réalisés pour chacune d’entre elles. Nous savons tous quelles initiatives relèvent de notre responsabilité, et nous ne les déléguons pas. J’en assure personnellement le suivi.
Si j’ai pu répondre à la question sur l’état d’avancement de ces initiatives, c’est simplement parce que nous avons examiné chacun d’entre elles la semaine dernière. Nous avons une observatrice externe, Jocelyne Therrien, qui est encore parmi nous. En fait, je vais me réunir avec elle demain après-midi. Elle rencontre régulièrement tous les responsables des forces pour recueillir leur avis ou, souvent, pour nous signaler les domaines dans lesquels nous ne faisons pas de progrès.
Nous pensons que c’est différent, mais c’est à travers les yeux des jeunes. Mon propre fils vient de s’engager dans les Forces canadiennes et ses attentes étaient très différentes. Maintenant qu’il en fait partie, il se rend compte que les Forces canadiennes ne ressemblent pas à ce qu’il imaginait ou voyait à la télévision.
Le sénateur Loffreda : Revenons-en au rapport publié la semaine dernière par la vérificatrice générale. Dans celui-ci, elle rappelle une fois de plus que le Canada a toujours de grandes difficultés à s’approvisionner en matériel militaire, un problème qui dure depuis longtemps. Elle constate que la Défense nationale n’a pas encore fini de mettre au point les plans visant à coordonner et à gérer le Projet de capacité des futurs chasseurs, mis à part pour ce qui est des questions particulières liées à la livraison des 88 avions de combat dans les délais et dans les limites du budget. Je crains que le ministère n’ait pas de vision stratégique globale suffisamment claire. Le rapport souligne plusieurs problèmes préoccupants, comme l’absence de plans d’urgence solides, la pénurie de personnel technique au sein du ministère et le manque chronique de pilotes qualifiés, une préoccupation déjà soulevée dans l’audit de 2018.
Pouvez-vous nous assurer que le ministère prend ces préoccupations et recommandations au sérieux — je suis sûr que c’est le cas — et qu’il mettra en œuvre les mesures correctives nécessaires pour garantir la réussite globale du Projet de capacité des futurs chasseurs? Je suis certain qu’il prend ces préoccupations au sérieux, mais j’aimerais connaître votre avis sur ces conclusions.
M. Moor : Nous prenons ces recommandations très au sérieux. Nous accueillons favorablement cet audit. Nous traversons une période très difficile, et une grande partie de l’augmentation des coûts est due à des facteurs mondiaux. L’inflation dans le secteur de la défense a été très importante ces cinq dernières années, depuis la pandémie de COVID. Nous évoluons donc dans un environnement difficile, où les ressources et les demandes se font concurrence dans l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement mondiale. Tous ces éléments ont été pris en compte. La hausse des coûts est en partie due au fait que nous avons prévu une marge de manœuvre plus importante afin de gérer cette situation tout au long de la réalisation du projet.
Mme Tremblay souhaitera peut-être faire un commentaire.
Mme Tremblay : J’ajouterai simplement que nous accueillons très favorablement les conclusions et les recommandations de la vérificatrice générale. Nous les prenons très au sérieux. Je tiens à vous assurer que les projets d’investissement majeurs comme celui-ci font l’objet d’une surveillance et d’un suivi constants.
Il est important de comprendre que la période couverte par l’audit correspondait à la période qui a suivi l’obtention de l’autorisation de démarrer le projet. Dans un projet comme celui-ci, qui s’étendra sur plusieurs années, nous devons apporter des adaptations et des changements en raison de facteurs qui échappent à notre contrôle. Nous devons donc constamment mettre à jour notre plan afin de suivre les risques qui pourraient survenir au cours de ces années.
[Français]
Le président : Sénateur Dalphond, vous avez 15 secondes pour la question et 15 secondes pour la réponse.
Le sénateur Dalphond : Cela prendra plus de temps. Vous pouvez m’envoyer une réponse écrite, car c’est une question de 3 milliards de dollars. Cela prendra peut-être plus de 15 secondes.
[Traduction]
Quelle est la différence entre le financement de la recherche et du développement pour la défense et le soutien à l’industrie canadienne de la défense — un montant de 1,425 milliard de dollars — et les contributions visant à renforcer les relations du Canada avec l’industrie de la défense, qui s’élèvent à 1,4 milliard de dollars? Je suppose qu’il s’agit de deux types de programmes différents, mais pourriez-vous nous donner les grandes lignes ou les orientations de ces deux programmes?
Le président : Pouvez-vous fournir une réponse écrite?
M. Moor : Oui, une réponse écrite.
[Français]
Le président : Je comprends que les autres sénateurs n’ont pas de questions. Pouvez-vous envoyer vos réponses écrites demain, le 18 juin? Nous devons faire rapport assez rapidement à la Chambre. Nous comprenons que certaines réponses seront plus rapides que d’autres à trouver, mais nous ne serons pas trop durs. Nous ne ferons pas de suivi de vos indicateurs clés de performance.
Merci beaucoup. La prochaine séance aura lieu demain, le 18 juin, à 11 heures, pour continuer notre étude sur le Budget principal des dépenses et le Budget supplémentaire des dépenses (A).
Merci beaucoup à tous, et merci encore aux témoins de leurs précisions. Nous avons senti beaucoup de compétence et d’exactitude dans vos réponses. C’est fort apprécié.
(La séance est levée.)