LE COMITÉ PERMANENT DU RÈGLEMENT, DE LA PROCÉDURE ET DES DROITS DU PARLEMENT
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le mardi 28 octobre 2025
Le Comité sénatorial permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement se réunit aujourd’hui, à 9 h 30 [HE] pour étudier, afin d’en faire rapport, l’inclusion de dispositions concernant la période des questions avec un ministre dans le Règlement du Sénat, avec des recommandations quant aux amendements.
Le sénateur Peter Harder (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Bonjour, honorables sénateurs. Je souhaite la bienvenue à tous les sénateurs ainsi qu’aux personnes qui nous regardent dans tout le pays sur sencanada.ca.
Je m’appelle Peter Harder. Je suis sénateur de l’Ontario et je préside le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement. Je vais maintenant demander à mes collègues de se présenter.
Le sénateur D. M. Wells : Je m’appelle David Wells. Je suis sénateur de Terre-Neuve-et-Labrador.
La sénatrice Busson : Bonjour. Je m’appelle Bev Busson, sénatrice de Colombie-Britannique.
[Français]
La sénatrice Ringuette : Bonjour. Pierrette Ringuette, du Nouveau-Brunswick.
Le sénateur Surette : Allister Surette, de la Nouvelle-Écosse.
La sénatrice Petitclerc : Chantal Petitclerc, du Québec.
[Traduction]
Le sénateur K. Wells : Kristopher Wells, sénateur du territoire visé par le Traité no 6, en Alberta.
Le sénateur Yussuff : Hassan Yussuff, sénateur de l’Ontario.
[Français]
La sénatrice Saint-Germain : Raymonde Saint-Germain, du Québec.
[Traduction]
Le sénateur Downe : Percy Downe, sénateur de Charlottetown.
Le président : Merci beaucoup à tous. Je soupçonne que notre invitée d’aujourd’hui nous connaît tous, peut-être même mieux que nous ne nous connaissons nous-mêmes.
Chers collègues, nous poursuivons aujourd’hui notre étude sur l’inclusion de dispositions concernant la période des questions avec un ministre dans le Règlement du Sénat. Nous sommes très heureux d’accueillir Shaila Anwar, greffière du Sénat et greffière des Parlements, qui se joindra à nous pour la première partie de la réunion. Bienvenue, madame Anwar. Le comité est ravi de vous accueillir. Je vous invite à prononcer vos observations liminaires, qui seront suivies d’une période de questions.
[Français]
Shaila Anwar, greffière du Sénat et greffière des Parlements, Sénat du Canada : Bonjour, honorables sénateurs et sénatrices, et merci de m’avoir invitée ce matin.
[Traduction]
Je commencerai aujourd’hui par dire que si je parle de course autour des buts, d’enclos d’exercice et autres, c’est parce que certains d’entre nous sont restés éveillés tard hier soir pour regarder le match des Blue Jays, mais je vais essayer de rester concentrée sur le sujet qui nous occupe aujourd’hui, à savoir la période des questions ministérielles.
J’ai quelques notes qui s’appuient en grande partie sur vos deux dernières audiences. Je n’ai pas préparé d’observations à proprement parler, notamment parce que, en ce qui concerne la période des questions, nous, greffiers au bureau, ne sommes pas souvent saisis de questions de procédure majeures. Pour me préparer, j’ai réfléchi à la meilleure façon d’aborder ce sujet afin de vous être utile dans vos délibérations, sans pour autant vous influencer dans les décisions que vous devez prendre.
Pour parler des enjeux qui sont abordés au Sénat et des questions et problèmes qui y sont soulevés, je m’appuie souvent sur les trois P. J’ai déjà évoqué ce sujet avec certains d’entre vous, mais j’ai pensé que ce serait un bon point de départ, car je trouve que les trois « P » m’aident à répondre à un grand nombre des questions qu’on me pose.
Le premier « P » désigne la procédure : Que dit notre Règlement, que disent nos ordres sessionnels, et quels sont nos principes de gouvernance et nos principes directeurs?
Le deuxième « P » désigne la pratique : Que faisons-nous par tradition, par habitude, parce que nous avons toujours fait certaines choses d’une certaine manière jusqu’à ce que quelqu’un nous dise que nous devrions les faire différemment?
Le troisième « P » désigne la politique. Je suis une greffière à la procédure non partisane du Sénat. Je suis toutefois tout à fait consciente que nous travaillons dans un environnement politique et que la politique nous entoure.
Lorsque j’analysais certaines des questions qui vous occupent, j’ai constaté qu’il était utile de tout replacer dans le contexte des trois « P ». Je vais donc présenter tout ce dont je vais parler dans ce contexte. J’ai quelques suggestions à vous faire concernant le premier « P », la procédure. J’ai également des propositions relativement à la pratique, à ce que nous faisons d’une certaine manière depuis plusieurs années, voire plusieurs décennies. Pour ce qui est de la politique, je suis consciente que ces décisions relèvent du domaine politique et doivent être prises par les sénateurs plutôt que par l’administration.
Pour vous donner un peu de contexte, depuis la quarante‑deuxième législature, la pratique consistant à tenir une période de questions ministérielles a été initialement amorcée par le biais d’un ordre sessionnel. Je pense, sénateur Harder, que vous étiez à l’époque le représentant du gouvernement au Sénat, et que cette pratique a commencé lorsque vous êtes arrivé.
La première version de l’ordre sessionnel était simple. Elle permettait aux ministres de la Couronne qui n’étaient pas membres du Sénat d’assister à la période des questions et de répondre aux questions liées à leurs responsabilités ministérielles. Ce premier ordre sessionnel ne contenait pas beaucoup d’autres renseignements. Outre le fait de permettre au ministre d’entrer dans la salle et de répondre aux questions, la période des questions avec un ministre suivait les règles et les pratiques en vigueur à l’époque. Un ordre sessionnel semblable a été adopté au début de la quarante-troisième législature; puis, bien sûr, pendant la période de COVID, cette pratique n’a pas été appliquée.
Depuis, les ordres sont devenus de plus en plus prescriptifs, avec l’ajout de dispositions logistiques, notamment sur la fréquence des périodes de questions, la nécessité de mener des consultations sur les personnes à convoquer et la date de leur comparution. Ils prévoient également l’obligation d’aviser la Chambre avant qu’un ministre ne participe à une période de questions.
Au début de la quarante-quatrième législature, une version de l’ordre sessionnel comprenait des dispositions visant à tenir la période des questions ministérielles à un moment différent de celui prévu dans le Règlement. On a également inclus la notion de mener des consultations afin de déterminer qui convoquer et quand. Le gouvernement devait également informer la Chambre à l’avance des renseignements relatifs à la période de questions ministérielle. Le temps alloué a été prolongé à 60 minutes, et des limites de temps ont été imposées pour les questions et les réponses.
Au début de la session actuelle, le Sénat a adopté un ordre similaire, qui comprenait cette fois-ci également des dispositions relatives aux votes repoussés et aux suspensions dues aux sonneries lorsqu’elles surviennent pendant une période de questions prévue. Je pense que la durée a également été portée à 64 minutes.
En ce qui concerne les différences entre la modification du Règlement et l’adoption d’un ordre sessionnel, je sais que cette question a déjà fait l’objet de discussions au sein de votre comité. Je note que, lors de la première réunion, les sénateurs Saint-Germain, Tannas et White ont proposé différentes façons d’aborder cette question. Celles-ci allaient de la proposition d’une modification permanente des dispositions du Règlement relatives à la période des questions à des suggestions en faveur d’une « approche hybride », c’est-à-dire une modification visant à autoriser les questions ministérielles dans notre Règlement, en laissant tous les détails logistiques et procéduraux, y compris des éléments comme la fréquence, dans les ordres sessionnels.
Il est utile de consulter le Règlement. Comme je l’ai dit, il s’agit du premier « P », la procédure. Il pourrait servir de cadre aux délibérations, et le Règlement fournit effectivement le cadre des délibérations dans la Chambre. Il comprend généralement des processus normaux relatifs à la structure et à l’organisation du travail. La modification des règles est rare et nécessite des amendements, qui doivent évidemment être adoptés par la Chambre.
L’ordre sessionnel serait tout de même adopté par le Sénat, mais il pourrait déroger à certaines de nos règles habituelles, généralement pour une période déterminée. Il peut s’agir d’une période limitée ou d’une période allant jusqu’à la fin de la session. Un ordre sessionnel expire à la fin d’une session. Pendant la durée de celui-ci, il peut fixer des paramètres afin de guider la manière dont certains aspects des travaux habituels du Sénat sont structurés pendant cette période.
Habituellement, le Règlement énonce ces principes généraux et les procédures, sans entrer dans les détails pratiques. Il ne précise pas nécessairement les aspects logistiques liés à la mise en œuvre concrète d’une disposition particulière. On évite ainsi d’être trop restrictif ou normatif, de sorte que la Chambre ou les comités — cela s’applique également aux comités — disposent d’une certaine marge de manœuvre pour décider de la manière de mener leurs travaux, tout en respectant les principes généraux énoncés dans le Règlement.
[Français]
Pourquoi parlons-nous de cette question? Pour faire la programmation des témoins devant les comités, les sénateurs doivent garder à l’esprit que, pour la période des questions avec un ministre, nous devons planifier la participation d’un parlementaire externe dont la disponibilité ne correspond pas nécessairement aux heures de séance du Sénat et qui ne peut pas être obligé à comparaître. En conservant la pratique en vigueur depuis maintenant 10 ans, le Sénat garde une flexibilité maximale. Cela nous permettra de prendre en compte tous les ajustements et les nouveaux besoins qui pourraient survenir pendant une semaine de séances.
Le Sénat a plusieurs exemples d’ordres sessionnels qui ont été utilisés depuis des années pour guider ses travaux.
Je vous donne l’exemple de l’ordre visant à fixer l’ajournement automatique les mercredis. Cela existe depuis au moins 18 ans. On n’a jamais changé le Règlement pour les mercredis.
Pendant une certaine période, on n’avait pas adopté la motion pour modifier le début de la séance les jeudis à 13 h 30. Durant la pandémie, on a recommencé à siéger à 14 heures, ce qui est prévu dans le Règlement, mais finalement, la décision a été prise au début de la session d’introduire un ordre sessionnel pour fixer l’heure un peu plus tôt. C’était un ordre sessionnel qui avait existé avant la pandémie pendant des années.
Selon les greffiers au Bureau, adopter un ordre sessionnel pour plusieurs aspects de la période des questions avec un ministre représente une option flexible et facile à adapter pour les sénateurs. Cependant, si la décision est d’intégrer cette disposition dans le Règlement, à notre avis, la modification devrait se limiter à une déclaration générale indiquant que la période des questions avec un ministre aura lieu et, quand elle aura lieu, on pourrait avoir une autre disposition précisant que le Sénat devrait, après les consultations d’usage, adopter une motion en vue de préciser tous les détails logistiques, comme la date, les limites de temps pour chaque intervention, les interactions avec d’autres éléments du Règlement, le calendrier, et cetera, au début de la session. Il faudrait aussi déterminer quels autres points du Règlement devraient être modifiés.
Pour intégrer pleinement les dispositions de la motion actuelle dans le Règlement, il faudra, en premier lieu, procéder à de nombreux amendements corrélatifs qui pourraient rapidement devenir désuets dans quelques années. Je sais qu’il y avait eu des questions au sujet d’une formulation précise. Disons qu’une formulation précise d’une modification comme telle pourrait être rédigée à la lumière des directives des sénateurs.
[Traduction]
Le Sénat devrait d’abord nous indiquer ce qu’il souhaite inclure, le niveau de détail souhaité, et nous dire s’il souhaite laisser les éléments liés à la procédure et à la logistique dans les ordres sessionnels. Les modifications à apporter au Règlement pourraient être minimes, et se limiter à un principe général. Je note que le Règlement actuel comporte environ neuf règles relatives à la période des questions, dont la plupart concernent les réponses différées et les questions écrites. À l’heure actuelle, nous disposons de très peu de règles concrètes pour nous guider pendant la période des questions. Une grande partie de ce que nous faisons relève de la tradition, des conventions et de la pratique.
C’est pourquoi nous suggérons, si vous souhaitez modifier le Règlement afin d’inclure la comparution d’un ministre avant la période des questions, que vous gardiez cette modification à un niveau élevé, général et que vous la présentiez presque comme un pouvoir... non pas le pouvoir de le faire, mais une disposition visant à réserver du temps dans notre horaire pour ce type de période des questions.
Je souhaitais également aborder la question de la proportionnalité. Je sais qu’il y a eu des discussions à ce sujet. Ce point concerne l’ordre des personnes qui posent des questions. Cette question n’a jamais vraiment figuré dans les ordres sessionnels. L’ordre sessionnel actuel contient des directives relatives au temps dont dispose la personne qui pose la question et au temps dont dispose le ministre pour y répondre. Il n’indique pas qui pose quelle question ni quand ou combien de questions sont posées. Le fait de disposer d’une liste facilite assurément les délibérations. La liste des intervenants résulte toutefois généralement d’un accord négocié entre les chefs et non d’une règle ou même d’une disposition de l’ordre sessionnel.
Notre Règlement ne contient pas beaucoup d’exemples de formalisation de la proportionnalité. La seule règle que nous avons est la règle 12-1, qui propose que la composition du Comité de sélection soit proportionnelle à la composition de la Chambre. Je tiens toutefois à souligner que depuis l’entrée en vigueur de cette règle, il y a environ huit ou neuf ans, les sénateurs ont plutôt choisi d’adopter un ordre sessionnel pour déterminer la composition du Comité de sélection au début d’une session, à la suite de consultations politiques.
De même, la composition des comités est établie au début de la session, généralement au moyen d’un accord négocié, et reste souvent inchangée pendant toute la durée de la session. En effet, il peut être difficile de rendre compte des changements fréquents dans les positions et les affiliations avec l’apport de modifications au Règlement.
Lors de la rédaction d’une nouvelle règle visant à intégrer la période de questions ministérielles, si telle est la volonté du comité et du Sénat, il pourrait être difficile d’imaginer comment intégrer tous les scénarios possibles qui pourraient avoir une incidence sur la proportionnalité tout au long d’une session. Je tenais simplement à vous le signaler.
Le président : Je pense que nous pouvons nous arrêter ici. Je vous ai laissée aller en prolongation, comme hier soir, mais je pense que nous pouvons anticiper des questions qui permettront de clarifier d’autres points.
Avant de passer aux questions, j’aimerais souhaiter la bienvenue aux sénatrices Youance et Batters qui se sont jointes à nous. J’ai une liste. Si vous souhaitez poser des questions, veuillez le signaler à la greffière.
Le sénateur D. M. Wells : Merci, madame Anwar, pour votre exposé.
Ma question n’est pas d’ordre politique, mais elle s’adresse aux leaders du bureau. Elle concerne le temps nécessaire pour poser des questions et les questions complémentaires. Je sais que cette quantité de temps est négociée par les leaders, mais c’est aussi le bureau qui doit... non pas l’appliquer, mais vous participez au processus selon lequel l’un des agents ou greffiers du bureau se lève et donne un préavis. Je pense que ce préavis est de 10 secondes. Est-ce exact?
Mme Anwar : C’est exact.
Le sénateur D. M. Wells : Lorsque les sénateurs sont à leur place, nous regardons généralement le ministre. Nous ne regardons pas le bureau ni le Président. Il m’arrive parfois de trouver frustrant, lorsque je pose des questions — et je n’en pose pas beaucoup pendant la période des questions —, d’être interrompu par le Président juste avant d’avoir terminé ma question. Certains Présidents font preuve de souplesse et laissent les députés terminer leur question, mais je reconnais aussi que certains collègues aiment faire de longs préambules.
À votre avis, que pourrait-on changer, non pas tant dans l’accord, car je comprends l’accord, mais que pouvons-nous faire pour avertir les sénateurs lorsqu’ils ne regardent pas le bureau, mais la personne à qui ils posent la question? Que peut-on faire? Quelles suggestions pouvez-vous faire pour faciliter le processus afin que l’on n’interrompe pas les personnes juste avant la fin de la question?
Mme Anwar : C’est une question difficile. Notre consigne était de nous lever 10 secondes avant la fin du temps imparti. Je comprends que, compte tenu de notre emplacement par rapport à celui des sièges des sénateurs, cette solution puisse ne pas sembler naturelle, surtout si vous êtes tourné vers le ministre.
Nous avons discuté de ce point avec des collègues de différentes législatures afin de voir ce qui se faisait. Dans certains cas, je crois que, du côté de la Chambre, c’est le Président qui intervient. Leur culture leur permet assurément d’interrompre les gens un peu plus brusquement que celle du Sénat. Je pense que l’idée était que cette méthode serait moins intrusive. Il s’agit principalement d’un signal qui permet de prévenir les sénateurs et le personnel concerné sans nécessairement perturber, espérons-le, le déroulement des conversations ou des échanges. Certaines législatures utilisent des chronomètres. Nous n’avons pas vraiment de mécanisme. Ces pratiques peuvent également être perçues comme quelque peu intrusives. Notamment, le fait que le ministre puisse voir un chronomètre modifie quelque peu le déroulement des discussions. On a déjà eu recours à des lumières. On a utilisé des cartes. Je ne pense pas que nous ayons réellement réfléchi à la question au-delà du fait de nous lever et de nous asseoir, mais nous sommes conscients que parfois, nous faisons partie du décor et qu’il est facile de ne pas remarquer ce que nous faisons. Je n’ai pas vraiment de réponse à vous donner, sénateur.
Le sénateur D. M. Wells : D’autant plus que le préambule se termine toujours par une question. Si vous ne pouvez pas poser la question, vous perdez toute chance d’avoir un échange raisonnable et de tirer des enseignements de la réponse du ministre. On pourrait peut-être envisager quelque chose qui soit plus dans le champ de vision. Certaines personnes lisent leurs questions. D’autres regardent le ministre et posent leur question.
Mme Anwar : En général, il y a des pages des deux côtés de la salle, à côté du Président et à l’arrière. Lorsque le ministre est assis à cet endroit, nous essayons de ne pas apparaître à l’écran, mais nous pouvons assurément examiner cette question. La coordination serait un peu plus difficile, mais nous pourrions peut-être demander aux pages qui se trouvent derrière le ministre de se lever également.
[Français]
La sénatrice Saint-Germain : J’aime bien la période des questions des sénateurs avec la greffière du Sénat. Il faudrait mettre cela dans le Règlement.
Mme Anwar : Je devrais imposer un règlement d’une minute par question et de 30 secondes par réponse.
La sénatrice Saint-Germain : Comme ce n’est pas encore dans le Règlement, mes collègues et moi avons toute liberté.
Pour la première partie de ma question, j’aimerais que vous nous rappeliez quelque chose : avant 2015, lorsqu’il y avait le gouvernement, l’opposition et très peu de sénateurs non affiliés, quelle était la répartition du temps pour la période des questions?
Mme Anwar : C’était 30 minutes selon le Règlement, et les noms étaient fournis juste avant la séance ou non. Disons que les Présidents avaient peut-être auparavant une règle générale qu’ils suivaient, mais ce n’était certainement pas prescrit dans un ordre sessionnel. Je ne sais même pas s’il y avait une entente entre les deux côtés, mais généralement...
La sénatrice Saint-Germain : Le temps alloué aux questions était-il partagé entre le gouvernement, l’opposition et les non-affiliés?
Mme Anwar : On le faisait en alternance, il me semble. En règle générale, les Présidents donnaient jusqu’à cinq minutes, mais il y avait moins de personnes qui posaient des questions, qui s’adressaient seulement au leader du gouvernement à l’époque et peut-être aux présidents de comité, quoique les questions aux présidents de comité étaient assez rares.
La sénatrice Saint-Germain : Certains ont suggéré que les ministres parrains d’un projet de loi viennent systématiquement participer à une période des questions ministérielle à la Chambre quand nous étudions le principe de la deuxième lecture. Certains ont émis des réserves en disant que cela pourrait empêcher le même ministre de venir en comité. Avez-vous une opinion sur cette question?
Mme Anwar : Il me semble, et peut-être que le sénateur Harder aura plus d’information, qu’on avait essayé de coordonner la comparution d’un ministre pendant la période des questions, si ce ministre avait un projet de loi du gouvernement qui était sur le point d’être présenté au Sénat ou qui était examiné par le Sénat.
En fait, il est difficile de prédire exactement quand un projet de loi va arriver au Sénat et en plus de coordonner tout cela avec un ministre. Donc, il me semble qu’on ne suit pas cette pratique systématiquement, mais on a des exemples où on avait convoqué des ministres pour un projet de loi, peut-être dans le but d’étudier la teneur d’un projet de loi en comité plénier ou, si c’était impossible, d’organiser la venue au Sénat d’un ministre qui avait un projet de loi étudié au Sénat. Je pense que c’est plutôt une question de logistique de le faire systématiquement.
Ce ne sont pas tous les sénateurs qui peuvent se présenter pour une réunion de comité, car plusieurs ont une autre réunion de comité en même temps. Alors, si un ministre comparaît pendant la période des questions, cela donne au moins l’occasion à d’autres sénateurs qui ne sont pas membres du comité de poser des questions.
La sénatrice Saint-Germain : J’ai une dernière courte question qui porte sur le quatrième « P », le protocole.
Le sénateur Loffreda a fait une recommandation pour que les sénateurs se lèvent lorsqu’un ministre vient au Sénat pour des raisons logistiques, mais aussi de respect. Quelle est la raison pour laquelle les sénateurs restent assis lorsqu’un ministre vient soit en comité plénier ou pour une période des questions ministérielle?
Mme Anwar : Pour le comité plénier, c’est la norme de rester assis. Je tentais de me souvenir de ce qu’on faisait auparavant dans la Chambre à l’édifice du Centre et j’avais de la difficulté à me rappeler comment se déroulait la période des questions avec les ministres au début. Je me suis rendu compte que c’est parce que cela n’était pas télévisé.
Je ne sais pas si j’ai vu autant de périodes des questions dans l’ancienne Chambre. Au début, je pense que les ministres étaient assis à côté du leader du gouvernement. C’était alors la pratique de se lever. On a changé les ministres de place pour les mettre au bureau de l’huissier du bâton noir. Depuis ce temps, je crois que c’est une question de pratique : si un ministre doit se lever et que c’est une période de questions d’une heure, cela veut dire qu’il sera debout pendant une longue période. Je pense aussi que puisque le ministre était assis là où l’on voit habituellement les témoins d’un comité plénier, cela donne peut-être un peu l’impression qu’on est dans un comité plénier.
La sénatrice Saint-Germain : On pourrait documenter cela. Merci beaucoup.
Mme Anwar : Je ne pense pas qu’il y ait de décision formelle là-dessus.
La sénatrice Saint-Germain : Merci.
[Traduction]
Le président : J’ajouterais que, lors de la quarante‑deuxième législature, le ministre était assis à côté du représentant du gouvernement. Cette pratique a changé avec la quarante‑troisième législature.
La sénatrice Batters : Je vous remercie de votre présence. Pour commencer, vous avez mentionné tard hier soir que vous alliez parler aujourd’hui de la course autour des buts et de ce qui se passe lorsqu’on laisse trop de coureurs sur les sentiers. Certains d’entre nous sont très fatigués ce matin, car nous sommes restés éveillés très tard pour regarder le match. Je vous remercie d’être des nôtres aujourd’hui et de nous présenter votre point de vue.
Tout d’abord, j’ai quelques points à soulever pour donner suite à certaines des questions qui viennent d’être posées. Je me souviens qu’à certains moments, lorsque nous étions à l’édifice du Centre, par exemple, nous avions invité, je crois, la ministre Wilson-Raybould et la ministre Philpott à témoigner devant le Sénat au sujet, si je m’abuse, du projet de loi sur le cannabis, et c’était en comité plénier. La séance a été télévisée en raison de l’importance du sujet. Je me souviens de m’être levée — parce qu’on a le choix de se lever ou de rester assis — pour qu’on puisse me voir, étant donné ma petite stature. Il y a donc ce choix.
Je me souviens également qu’au début, nous avions essayé de placer les ministres en plein milieu, près de l’endroit où siégeait l’huissier du bâton noir, mais nous avions de nombreux problèmes de son et tout le reste. Ainsi, parfois, en plein milieu de la période des questions avec un ministre, celui-ci devait retourner s’asseoir à côté du leader du gouvernement, ce qui était dommage parce que ce n’était pas ce qui était prévu ce jour-là. Vous pourriez peut-être commencer par nous parler de ce point et nous dire où les ministres, en tant que députés de la Chambre des communes, avaient l’habitude de prendre place au Sénat. Quelle est la perspective historique à cet égard?
Mme Anwar : Eh bien, d’un point de vue historique, vous avez raison. Habituellement, un parlementaire s’assoit sur les banquettes avec les sénateurs. Lorsque la période des questions avec un ministre a débuté au cours de la 42e législature, le ministre invité s’asseyait à côté du leader du gouvernement, à la place du leader adjoint.
J’ai entendu un certain nombre de raisons, et c’est anecdotique. Il n’y a pas eu de décision officielle, si ce n’est de dire que les ministres allaient désormais s’asseoir là où l’huissier du bâton noir siège normalement, et c’est aussi normalement là que s’assoient les témoins en comité plénier. Comme je l’ai dit, c’était en partie pour des raisons d’ordre logistique : on voulait éviter que les ministres soient assis au premier rang et qu’ils aient à répondre à une question venant peut-être de quelqu’un assis derrière eux. Cela leur permet aussi, je suppose, de voir les deux côtés de la Chambre, plutôt qu’un seul.
La sénatrice Batters : Si je peux me permettre de vous interrompre, d’un point de vue historique, les députés de la Chambre des communes, à moins d’une situation très particulière, ne devraient pas se trouver sur le parquet du Sénat, n’est-ce pas? Ils devraient être derrière la barre.
Certes, lorsque cette pratique a été instaurée, bon nombre d’entre nous souhaitaient respecter cette perspective historique en faisant asseoir les ministres à un endroit précis, et non auprès des sénateurs, parce qu’ils ne sont pas des sénateurs, et c’est lié à des traditions historiques bien établies. Quelqu’un pourrait même signaler la présence d’un intrus dans l’enceinte ou quelque chose de ce genre s’il ne s’agit pas d’un sénateur.
Mme Anwar : Il est certain que si un ministre n’était pas invité au Sénat, oui, sa place appropriée serait derrière la barre. En l’occurrence, il s’agirait d’une personne invitée par voie de motion au Sénat. Tout comme les témoins en comité plénier, les ministres seraient autorisés à s’asseoir juste devant la barre, généralement sur le siège de l’huissier du bâton noir. C’est quelque chose qui a évolué au fil du temps. Il est difficile de comparer cela à ce qui se faisait auparavant, parce que nous ne recevions pas vraiment de ministres à la période des questions.
La sénatrice Batters : Je suis arrivée un peu en retard parce que je pense que mon chauffeur de taxi est peut-être, lui aussi, resté éveillé tard hier soir pour regarder le match. Je ne sais pas si vous avez déjà expliqué pourquoi la période des questions avec un ministre a été mise en place à la fin de 2015 ou au début de 2016. Vous n’occupiez pas votre poste actuel, mais vous avez certainement joué un rôle important au Sénat. Je crois que vous faisiez probablement partie de l’équipe depuis un certain temps. À votre avis, pourquoi la période des questions avec un ministre a-t-elle été instaurée à ce moment-là?
Mme Anwar : Je crois que la personne la mieux placée pour répondre à cette question serait le sénateur Harder. En fait, je n’étais pas greffière au Bureau à l’époque. Au début, c’était parce que... Vous avez raison. À la suite des élections de 2015, qui ont eu lieu en octobre 2015, je crois, le Parlement a repris ses travaux au début de décembre, mais il n’y avait pas de leader du gouvernement; le Sénat était alors composé de libéraux, de sénateurs conservateurs et d’une poignée d’indépendants. Sénateur Harder, je crois que vous avez été nommé en mars. Selon notre Règlement, nos questions aux... Vous me rafraîchissez la mémoire. J’avais oublié que cela remonte à 10 ans.
Le président : Le sénateur Carignan sera avec nous au cours de la prochaine heure.
Mme Anwar : Il aurait participé à ces discussions, mais vous avez raison : comme nous n’avions pas de leader du gouvernement entre décembre 2015 et mars 201, le fait de poser des questions aux présidents de comité aurait sans doute raccourci considérablement la période des questions. Cette nouvelle pratique a été instaurée pour assurer une représentation du gouvernement au Sénat afin que les sénateurs puissent remplir leur rôle de surveillance du gouvernement.
La sénatrice Batters : Je vous remercie.
Le président : Si vous me le permettez, j’ajouterais à titre d’information que les ministres Wilson-Raybould et Philpott ont comparu en comité plénier pour discuter d’un projet de loi précis.
[Français]
La sénatrice Petitclerc : Merci d’être avec nous aujourd’hui. Ma première question est assez générale. Les gens qu’on a entendus jusqu’à présent ont mis de l’avant la plus-value de cette période des questions avec un ministre et les défis possiblement rencontrés. Lors de la dernière séance, on a reçu l’ancien sénateur Gold.
J’aimerais vous poser la même question sur votre équipe et votre rôle : est-ce que cette période des questions avec un ministre présente des enjeux ou des défis? Quelle est votre expérience à ce sujet?
Mme Anwar : Pour nous, ce sont plutôt des questions logistiques. On doit savoir qui sera le ministre et à quel moment aura lieu la période des questions. Actuellement, l’heure n’est pas fixée. Le Sénat peut décider, par exemple, d’avoir une période des questions un jeudi; on en a eu une à 16 heures tout récemment. C’est important pour nous de connaître ces détails afin de préparer la Chambre.
Comme on le disait, une des questions soulevées est de savoir si c’est mieux de le faire un mardi, un mercredi ou un jeudi. C’est selon la préférence des sénateurs. Mais il faut signaler que les mardis, si une période des questions a lieu plus tard dans l’après-midi, cela pourrait retarder ou empêcher les comités de siéger, selon l’heure. Les mercredis, puisque les séances sont assez courtes — elles sont habituellement de deux heures —, si on a une période des questions d’une heure, cela prend la moitié du temps. Actuellement, cela ne cause pas de problème, mais pendant les périodes de pointe, cela pourrait être difficile. Les jeudis ne présentent pas trop de difficultés, selon l’horaire ou un ordre du jour normal.
À part cela, pour nous, c’est surtout la question de le savoir un peu plus d’avance afin que nous puissions nous préparer, mais on peut quand même faire certaines choses à la dernière minute.
La sénatrice Petitclerc : Mon autre question est peut-être un peu plus difficile. Si on part d’une certaine prémisse dans laquelle on sent un appui pour cette période des questions avec un ministre, et donc qu’on souhaite que cette pratique dure dans le temps, peu importe les changements qui pourraient se produire, est-ce qu’un changement dans le Règlement — et on s’entend sur le fait que ce changement serait accompagné de principes généraux — offre plus de sécurité qu’un ordre sessionnel?
Mme Anwar : Je ne sais pas si cela offre plus de sécurité. Cela fait en sorte qu’au début d’une nouvelle session, il ne serait pas question de savoir s’il y aura ou non une période des questions avec un ministre, parce que ce serait déjà dans le Règlement. Comme je l’ai expliqué, on a plusieurs motions ou ordres sessionnels depuis des années. C’est à nous, les greffiers au Bureau, de discuter de ces questions avec les leaders au début d’une nouvelle session. C’est essentiellement cela, mais rien n’empêche le Sénat d’adopter une motion.
Si, par exemple, le Règlement est modifié pour intégrer la période des questions avec un ministre, rien n’empêche le Sénat, au début d’une nouvelle session, d’adopter une motion pour supprimer cette modification. C’est toujours la décision des sénateurs. Un nouvel article au Règlement le rend permanent dans le Règlement, ce qui veut dire que les sénateurs doivent prendre la décision de continuer en ce sens ou non, au lieu de ce qu’on fait maintenant, où on prend la décision proactive de présenter une motion.
La sénatrice Petitclerc : On pourrait donc penser que si c’est inscrit dans le Règlement, on ne le remet pas en question à chaque retour, à moins de le supprimer.
Mme Anwar : Oui, mais on a beaucoup d’exemples d’articles du Règlement que l’on met de côté au début d’une nouvelle session. La seule chose, c’est la permanence. Comme je l’ai dit, cela va rester; si c’est une règle générale, ce sera probablement un cas où le Sénat « peut » avoir une période des questions avec un ministre, pas nécessairement qu’il « doit » y avoir une période des questions avec un ministre.
[Traduction]
La sénatrice Ringuette : J’ai d’abord quelques observations à formuler. Il faut faire la distinction entre un député qui est à la barre du Sénat et un ministre qui est invité au Sénat, à titre de membre du Cabinet et de représentant de facto du gouvernement. De mon point de vue, il s’agit de deux questions différentes. Le fait d’avoir une règle permanente permet d’établir les normes qui devraient être en place, et une motion sessionnelle peut soit supprimer cette règle, soit la préciser davantage. C’est mon avis, et je vous remercie d’avoir hoché la tête.
Pour revenir à la procédure, selon moi, si nous avons une période des questions avec le représentant du gouvernement ou un ministre, la norme devrait être la même, c’est-à-dire que les sénateurs devraient se lever pour poser leurs questions et le ministre ou le représentant du gouvernement devrait faire de même au moment de répondre aux questions, ce qui est complètement différent d’une séance de comité plénier où tout le monde reste assis. D’après vous, mes remarques sont-elles exactes sur le plan pratique et procédural?
Mme Anwar : Je pense que c’est davantage une question d’ordre et de décorum, et ce sont les sénateurs qui décident de la forme que devrait prendre cette partie de la séance. Il y a certainement des avantages à ce que la personne qui parle soit plus facilement identifiable, que ce soit pour les réalisateurs de télévision, les opérateurs de microphones ou le ministre, qui ne sait pas forcément qui parle à l’autre bout de la salle. Tous ces facteurs entrent en ligne de compte. Il m’est difficile de répondre à cette question et de dire si c’est bien ou mal. Je vois des avantages et des inconvénients dans les deux cas, et, au bout du compte, c’est surtout une décision qui revient aux sénateurs.
Je me contenterai de dire que ce n’est pas le genre de chose que vous devriez inscrire dans votre Règlement. C’est une décision qui peut être prise par consensus. C’est ainsi que la norme actuelle a été établie. Rien dans l’ordre sessionnel ne dit que les sénateurs ou les ministres doivent rester assis. C’est quelque chose qui a évolué au fil du temps.
La sénatrice Ringuette : Ma deuxième question porte sur la proportionnalité. La composition actuelle du Sénat est différente de ce qu’elle était en 2015. À votre avis, devrions-nous inclure le principe de la proportionnalité, ou devrions-nous nous en remettre à une motion sessionnelle? À l’heure actuelle, je ne sais pas qui décide du nombre de questions par groupe, qu’il s’agisse de la période des questions de 30 minutes ou de celle de 60 minutes avec un ministre. Pourriez-vous nous donner des précisions à ce sujet?
Mme Anwar : Je crois comprendre que cette décision est prise au moyen de négociations avec les leaders. Sénatrice Saint-Germain — et sénatrice White aussi —, vous participez sans doute à ces discussions plus que moi. Nous recevons une liste de noms, et nous nous appuyons là-dessus. Dans le cadre de ces négociations, même s’il existe, je suppose, des lignes directrices pour chaque période de questions, il est toujours possible d’y déroger quelque peu au jour le jour. Là encore, cela peut être décidé par les leaders. Parfois, ils disent : « Untel est le parrain du projet de loi; pouvons-nous lui donner la parole en premier? » Il y a certaines directives que chaque parti et chaque groupe essaie d’établir en tenant cette liste.
En ce qui a trait à la proportionnalité, mon expérience se situe davantage au sein des comités, et c’est une question qui a certainement été soulevée là aussi pour déterminer le nombre de sièges aux comités. Les chiffres étant très serrés, à l’exception de celui pour le groupe principal, la proportionnalité peut s’avérer très difficile si le nombre de sièges est de 18, 17 ou 14, et qu’il y a ensuite des modifications constantes. Nous utilisons une feuille de calcul qui nous aide à cet égard, mais je ne peux pas diviser un sénateur en 0,25. Par conséquent, nous devons parfois prendre des décisions d’ordre pratique sans trop perturber les travaux. À moins qu’il y ait un changement important dans la proportionnalité, cela semble être le statu quo que nous utilisons depuis 2015.
[Français]
Le sénateur Surette : Ma question concerne la différence entre un ordre sessionnel et la codification dans le Règlement.
Vous sembliez préférer l’ordre sessionnel en raison de sa flexibilité et vous avez mentionné que si l’on codifie dans le Règlement, ce serait juste une « déclaration » — je crois que c’est le mot que vous avez utilisé.
Si l’on codifiait, pouvez-vous nous dire si cela ressemblerait aux détails qui se trouvent actuellement dans l’ordre sessionnel, ou est-ce que ce serait beaucoup plus court? Si je comprends bien, cela peut être beaucoup plus court. Pouvez-vous nous donner une idée de la longueur de la déclaration et du genre de détails qui seraient mentionnés dans le Règlement?
Mme Anwar : Ce qu’on vous suggère, si vous songez à codifier dans le Règlement, c’est d’avoir un article du Règlement plutôt permissif et pas trop prescriptif. Donc, j’imagine que ce serait court. Ce serait simplement une précision indiquant que le Sénat invitera ou tiendra une période des questions avec un ministre de temps en temps. Cela vous permettra d’avoir, si c’est ce que vous souhaitez, un ordre sessionnel qui l’accompagnera. Puis, de session en session, cela permettra au Sénat d’incorporer des changements reflétant la composition de la Chambre et les enjeux du moment.
Si on le met dans le Règlement comme tel, par exemple, je pense que cela dit actuellement qu’il y aura une période des questions avec des ministres toutes les deux semaines. Cependant, si on le met dans le Règlement, cela veut dire que chaque fois qu’on veut avoir une deuxième période des questions, comme on le fait en ce moment en l’absence du sénateur Moreau, on aurait besoin d’avoir une autre motion qui dirait quelque chose comme « nonobstant l’article X du Règlement, on va tenir une autre période des questions ».
C’est une question de flexibilité. À l’heure actuelle, le Règlement, comme je l’ai mentionné, a seulement quatre articles portant sur la période des questions, mais il y a toutes sortes de pratiques déjà en place; quelques-unes sont écrites et plusieurs ne le sont pas. Cela fonctionne raisonnablement bien, parce qu’on n’a pas vraiment eu le goût de changer les choses depuis que je suis au Sénat.
Le sénateur Surette : Merci pour votre réponse. Dans vos commentaires, vous avez mentionné que s’il y avait une modification au Règlement, et je vous cite, « quelques éléments deviendront désuets dans quelques années ».
Mme Anwar : « Pourraient ».
Le sénateur Surette : « Pourraient ». Est-ce que vous pouvez nous donner quelques exemples?
Mme Anwar : On parle de la proportionnalité; on ne peut pas prévoir quelles seront les proportions des différents partis ou groupes d’ici même quelques mois. On a déjà vu plusieurs changements depuis 2015.
Je dois être honnête : je n’aurais jamais pensé que le Sénat aurait cinq partis ou groupes différents en 2015 et maintenant il y en a cinq. Cela pourrait augmenter ou diminuer. Si on commence une session avec une proportionnalité fixe dans le Règlement et si les éléments changent...
On le suggère parce qu’on a vécu plusieurs changements; le Règlement était toujours à la traîne des changements en cours et il fallait toujours faire des modifications.
Le sénateur Surette : Cela dépend de ce qu’il y a dans le Règlement; cela dépend du nombre de détails dans le Règlement.
Mme Anwar : Oui, mais si c’est quelque chose de permissif pour simplement préciser qu’on aura une période des questions avec un ministre et que le Sénat doit fixer les autres détails au moyen d’un ordre sessionnel, cela permettra au Sénat de continuer cette pratique, mais de ne pas nécessairement fixer tous les éléments se rapportant au déroulement.
[Traduction]
Le sénateur Yussuff : Je vous remercie d’être des nôtres, même si vous êtes restée éveillée hier soir. Pour ma part, j’ai fini par me lasser et je suis allé me coucher.
Mme Anwar : Je vous comprends.
Le sénateur Yussuff : Cet endroit évolue, surtout depuis 2015, et ce, de manière très intéressante, pour dire les choses poliment. Nous ne savons pas à quoi ressemblera cette évolution. L’avenir nous le dira. La période des questions avec un ministre est une pratique relativement nouvelle, car pendant la majeure partie de l’histoire du Sénat, ce n’était pas la tradition. D’un point de vue purement anecdotique, ayant discuté avec d’autres et observé les comparutions de ministres, j’ai l’impression que les gens aiment bien la façon dont les choses évoluent. Par ailleurs, il y a un aspect lié aux relations publiques et à la façon dont les gens perçoivent cette institution, puisque sa pertinence a été remise en question au fil des ans. Je vois cette pratique comme quelque chose de positif, et je ne vous demanderai pas de vous prononcer là-dessus.
Pour ce qui est de l’avenir, je souscris à l’opinion selon laquelle il est nécessaire de modifier le Règlement pour la période des questions. Quant aux détails, oui, nous devrions les établir en fonction des circonstances, mais je ne pense pas que ce soit une mauvaise chose. Il se peut qu’à l’avenir, le Sénat revienne à l’ancien modèle, sans période de questions.
Du point de vue de ce que vous et votre personnel devez faire, cela représente-t-il vraiment un défi important dans la façon dont vous accomplissez votre travail?
Mme Anwar : Je ne pense pas. Nous conseillons toujours d’essayer d’éviter d’adopter trop de motions au début de la session qui commencent par : « Nonobstant l’article XXY du Règlement, nous allons faire les choses tout à fait différemment de ce que prévoit notre Règlement. » C’est ce qui guide notre approche.
Nous ne pensons pas qu’il soit nécessaire de l’inscrire dans le Règlement, du point de vue de la procédure. Je m’en tiens au premier « P » et peut-être un peu au deuxième. Sur le plan politique, il pourrait y avoir des avantages pour le Sénat. Vous avez tout à fait raison : la période des questions avec un ministre a donné à la période des questions une visibilité qui, je crois, n’existait pas auparavant. Les médias et le gouvernement s’intéressent à ce que fait le Sénat. C’est aussi l’occasion pour les sénateurs de poser des questions directement aux ministres, ce que beaucoup n’ont peut-être pas l’occasion de faire régulièrement. Certains comités reçoivent des ministres plus souvent que d’autres, et certains ne traitent pas de projets de loi; ils pourraient donc ne pas avoir cette possibilité.
En ce qui nous concerne, nous ne nous occupons que du premier « P », c’est-à-dire la procédure. Comme je l’ai dit, nous ne voulons pas que les sénateurs adoptent des règles qui deviennent obsolètes dès leur adoption. Cela peut arriver si la motion est trop rigide et qu’elle précise, par exemple, que cette période doit avoir lieu tous les trois jeudis du mois ou durer un certain nombre de minutes. À l’heure actuelle, le Sénat dispose d’une grande marge de manœuvre pour s’adapter aux circonstances.
Je sais que quelqu’un a demandé ce qu’il fallait faire au sujet des annulations. Nous avons vérifié, et il n’y a eu qu’une seule fois où une période des questions a dû être annulée parce qu’un ministre n’était tout à coup plus disponible. En général, cela nous permet de nous adapter un peu à la disponibilité des ministres. Là encore, nous avons vu une transition, car je pense qu’au début, les gens ne savaient pas trop à quoi ressemblerait cette période des questions, même du côté des ministres. Aujourd’hui, il semble y avoir beaucoup plus d’ouverture à l’idée de comparaître devant le Sénat.
Pour nous, je le répète, il s’agit de savoir à l’avance ce que les sénateurs souhaitent pour le déroulement de la période des questions afin que nous puissions ensuite leur fournir les outils et les mécanismes procéduraux nécessaires, au besoin. La plupart de ces questions peuvent être réglées grâce à des consultations et à des discussions sur, par exemple, l’ordre des questions et la façon dont le nombre de questions sera déterminé. Cela se fait en grande partie par négociation.
Le sénateur Yussuff : Pour ceux d’entre nous qui estiment qu’il s’agit d’une bonne évolution du Sénat, les ordres sessionnels exigent le dernier « P » dont vous avez parlé, c’est‑à‑dire la politique de la négociation et de l’accord. Nous éviterions ainsi — selon les circonstances d’une élection — d’avoir à changer les choses en fonction de la volonté de certains et de leur perception du résultat. D’aucuns pourraient considérer cet exercice comme une corvée et refuser d’y participer, sous prétexte que cela impose des contraintes au gouvernement et oblige les ministres à comparaître devant le Sénat. Les ordres sessionnels présentent toujours ce genre de défis. Par conséquent, si nous apportons une modification au Règlement, en tenant compte de ce que vous avez dit, il sera plus facile pour nous de dire que la comparution des ministres au Sénat est une exigence permanente et que nous réglerons les détails concernant les modalités, la durée et l’horaire.
Mme Anwar : Je pense que nous pouvons nous adapter d’une façon ou d’une autre. Nous avons beaucoup d’autres ordres sessionnels qui... Comme je l’ai dit, avec la motion du mercredi, il y a eu de nombreuses occasions de modifier le Règlement, et en fin de compte, la décision a été de maintenir le statu quo. Cette motion a été adoptée il y a 20 ans. Cela fait maintenant 10 ans que nous procédons à la période des questions avec un ministre. Ce n’est donc plus vraiment une nouveauté.
Le sénateur Downe : Nous essayons évidemment de nous adapter à un problème qui est apparu avec les changements intervenus au Sénat. Avant les changements de 2015, le chef du gouvernement au Sénat était un ministre qui assistait aux réunions du Cabinet et des comités ministériels. Lors des réunions du Cabinet, le chef du Sénat était invité à présenter un rapport sur les activités du Sénat, sur ce qui s’y passait, afin que les ministres qui ne faisaient pas partie du Cabinet et qui n’étaient pas au Sénat, c’est-à-dire tous les autres, aient une idée de ce qui s’y passait. En l’absence de cet accès et de ce dialogue bidirectionnel, nous essayons de résoudre la quadrature du cercle, et ce que nous avons trouvé comme solution, ce sont ces comparutions ministérielles.
Compte tenu de vos observations, je pense que vous êtes d’accord avec moi pour dire qu’un ordre sessionnel repose sur le principe que le gouvernement acceptera d’envoyer des personnes, et que nous pourrons alors procéder. Si le gouvernement venait à changer — et je ne parle pas nécessairement d’un changement des partis qui le composent —, il pourrait décider du jour au lendemain qu’il ne considère pas cela comme un exercice utile et qu’il n’enverra plus de ministres au Sénat, ni même aux comités sénatoriaux. Ils ont déjà dévalorisé le Sénat en ne faisant pas siéger le leader du Sénat au Cabinet. Cela pourrait aller plus loin. Si nous avions l’accord du gouvernement, cela nous donnerait la flexibilité nécessaire pour continuer.
Si nous inscrivions cela dans le Règlement, il serait quelque peu embarrassant que personne ne réponde au téléphone quand nous appelons et que l’on ignore complètement notre appel. Il me semble que cela dévalorise le Sénat, ce qui, à mon avis, va à l’encontre de votre recommandation fondamentale à savoir qu’il devrait s’agir d’un ordre sessionnel. Ai-je raison de penser cela?
Mme Anwar : Je dirais que certains aspects de votre question relèvent probablement de la politique avec un grand « P », en gras et souligné, et je n’ai donc pas vraiment de réponse à vous donner à ce sujet. Il est certain que, là encore, le fait de l’inscrire dans le Règlement exigerait, en cas de changement de gouvernement, que cette question soit traitée, soit en mettant la règle de côté, soit en la modifiant, contrairement à un ordre sessionnel que ne ferait qu’arriver à échéance, le moment où le Sénat pourrait décider s’il souhaite se munir d’un nouvel ordre sessionnel. Il y a cet élément.
Quant à savoir si cela donne plus ou moins accès aux ministres ou aux décisions du Cabinet, là encore, c’est aux sénateurs qu’il appartient d’évaluer si le nouveau système leur donne un meilleur accès, car ils s’adressent à plusieurs ministres plutôt qu’à un seul. Je pense qu’à mon époque, il y a eu une brève période où deux ministres étaient présents.
Le président : Pour plus de clarté, la dernière chef du gouvernement au Sénat qui était ministre était Marjory LeBreton. Le sénateur Carignan était, comme moi, membre du Conseil privé, mais pas membre du Cabinet.
Mme Anwar : Je pense que nous avons eu une période où la sénatrice LeBreton était ministre, mais nous avions aussi le sénateur Fortier, qui faisait également partie du Cabinet. Il y a eu une brève période où ils étaient deux.
Le sénateur K. Wells : Pour faire suite aux commentaires du sénateur Yussuff sur l’intérêt du public envers nos travaux, je me demande si vous savez ou si vous pourriez nous dire où se situe l’intérêt des téléspectateurs en ligne. Est-ce que plus de gens visionnent la période des questions au Sénat que d’autres segments? Il serait intéressant de savoir où l’intérêt public est le plus notable.
Mme Anwar : Je n’ai pas de statistiques de ce type à vous fournir, mais je peux certainement me renseigner. Je ne sais pas si nous pouvons nécessairement vous confirmer que la visibilité est meilleure sur une plateforme télévisuelle, mais nous pourrions nous faire une idée du nombre de clics sur le site Web de CPAC. Je ne sais pas si cela nous permettra de le savoir pour cette période, mais je vais certainement me renseigner et vous tenir au courant.
Nous voyons bien entendu des indices ici et là sur Twitter, ainsi que des articles dans les médias faisant référence aux apparitions des ministres et à certaines de leurs déclarations. La plupart des politiciens aiment bien s’entourer d’une petite équipe qui s’occupe des relations avec les médias, cela ne fait aucun doute.
Le président : Monsieur le sénateur Downe, vous aviez une brève question complémentaire. Vous semblez connaître la réponse.
Le sénateur Downe : Non, j’aimerais simplement connaître les chiffres, si notre greffière pouvait les trouver. Est-ce que quelqu’un regarde réellement cela? Je n’ai pas l’impression que nous sommes de grandes vedettes auprès des Canadiens qui aiment écouter la télévision dans le confort de leur salon. J’ai l’impression que les chiffres sont catastrophiques, et les dirigeants de CPAC menacent régulièrement de supprimer le visionnement de nos séances en comité, au motif que personne ne les regarde. Je suis donc très curieux de me familiariser avec les données à ce sujet.
Le président : Avant de remercier notre invitée, j’aimerais demander que certains documents d’information soient consignés.
Vous vous souvenez qu’il s’agit d’une séance concernant la période des questions avec un ministre, et nous avions récemment invité une secrétaire d’État. D’après les renseignements dont je dispose, cette secrétaire d’État, dans son décret, est en fait une ministre. Je pense qu’il serait utile pour le Sénat de savoir quels secrétaires d’État sont ministres dans le décret et lesquels ne le sont pas. Nous voulons préserver la période de questions ministérielles, c’est-à-dire éviter que des secrétaires d’État qui ne sont pas ministres répondent de leur domaine de responsabilité délégué. Si vous pouviez nous fournir ce renseignement, je pense que cela serait utile.
Mme Anwar : D’après ce que j’ai compris, tous les secrétaires d’État ne sont pas nécessairement des ministres. Bien entendu, nous serons ravis de nous renseigner à ce sujet.
Le président : Excellent. Une telle liste pourrait s’avérer non seulement utile pour le Comité, mais probablement aussi pour les sénateurs de manière générale.
Sur ce, je tiens à remercier Mme Anwar pour son témoignage. Nous lui en sommes très reconnaissants. Vous nous avez aidés à traiter de manière utile la question dont est saisi le Comité. Merci beaucoup.
Mme Anwar : J’ajouterai simplement que, dans l’attente de la décision du Comité et de celle du Sénat, notre équipe se tient à votre disposition pour vous fournir des conseils et une assistance supplémentaires à mesure que vous affinez les paramètres de votre recherche.
Le président : Je vous remercie.
[Français]
Honorables sénateurs, nous avons le plaisir d’avoir avec nous l’honorable sénateur Claude Carignan, c.p., ancien leader de l’opposition au Sénat et ancien leader du gouvernement au Sénat. Bienvenue et merci d’avoir accepté notre invitation. Nous vous invitons à faire votre allocution liminaire, après quoi nous passerons aux questions des membres du comité.
L’honorable Claude Carignan : Merci de m’avoir invité et d’avoir été conciliants sur l’horaire des présentations. Je ferai une introduction d’environ sept ou huit minutes. Je tiens toutefois à souligner avant tout la présence du sénateur Cowan. C’est par pur hasard que le sénateur Cowan se trouve ici aujourd’hui. Je me suis donc permis de lui demander d’assister à la présentation. Comme le sénateur Cowan était leader de l’opposition lorsque j’étais leader du gouvernement, si je fais des erreurs ou s’il y a des choses sur lesquelles il n’est pas d’accord, il pourra s’exprimer.
Merci d’être ici, sénateur Cowan.
Il m’apparaît important de rappeler que le fait de poser des questions à des ministres autres que le leader du gouvernement n’a rien de nouveau au Sénat. Pendant une quarantaine d’années, soit jusqu’au départ du sénateur Michael Fortier, les sénateurs ont pu poser des questions au gouvernement, non seulement par l’entremise du leader du gouvernement, mais également de leurs collègues membres du Cabinet. En fait, il était habituel, dès les débuts du Sénat, de nommer des ministres au Sénat. Les questions pouvaient donc s’adresser aux ministres. L’ex-juge de la Cour suprême Ian Binnie l’a bien exprimé dans son rapport de mars 2016 sur l’arbitrage des dépenses de certains sénateurs à la suite du rapport du vérificateur général.
Je le cite :
Les sénateurs ont également pour rôle important de questionner et de critiquer le gouvernement ainsi que de lui demander des comptes. Pour adopter le discours traditionnel de sir Walter Bagehot, il revient aux Chambres du Parlement d’informer la nation des défauts de l’administration et même d’enseigner à la nation ce qu’elle ne sait pas.
Il continuait un peu loin en disant ceci :
S’il appartient essentiellement à Chambre des communes d’assumer la tâche de demander des comptes au gouvernement, celle-ci s’étend également au Sénat, qui assume une portion du rôle plus large du Parlement de « grand enquêteur de la nation ».
Cela est parfaitement normal. Questionner le gouvernement sur ses politiques et la conduite de l’administration est un élément fondamental du rôle de sénateur. Toutefois, il faut pouvoir choisir les ministres que nous souhaitons convoquer pour une période des questions au Sénat. Les sujets chauds de l’actualité, de façon contemporaine, justifient amplement cette exigence.
C’est donc afin de poursuivre le travail du Sénat visant à questionner le gouvernement que j’ai proposé en 2015 de mettre en place une période des questions avec des ministres.
Après que Justin Trudeau a expulsé les sénateurs libéraux du caucus national, le 29 janvier 2014, ces sénateurs ont toutefois continué de siéger sous l’étiquette libérale. Lorsque M. Trudeau a été élu premier ministre à l’automne 2015, il ne pouvait donc pas compter sur des sénateurs pour former le caucus du gouvernement. Pendant plusieurs semaines, le gouvernement était incapable de décider comment il allait transiger avec le Sénat. Nommerait-il un leader du gouvernement? Qui parrainerait les projets de loi du gouvernement?
À cette époque, après l’élection, j’étais devenu leader de l’opposition, mais sans contrepartie pour le gouvernement. Les sénateurs conservateurs et libéraux ont alors décidé de prendre les choses en main et de faire en sorte que le Sénat fonctionne. C’est dans ce contexte que j’ai déposé une motion pour inviter les ministres à la période des questions au Sénat. Ne sachant pas si nous aurions un leader du gouvernement ni quand, je considérais que le rôle de « grand enquêteur de la nation » du Sénat devait être préservé. Il fallait que les sénateurs aient un moyen de questionner le gouvernement. La motion a été adoptée.
Le ministre LeBlanc a pleinement collaboré avec le sénateur Cowan, le leader des libéraux, et moi. Le 24 février 2016, alors qu’il comparaissait devant le Comité du Règlement, le ministre LeBlanc a affirmé ce qui suit :
Du point de vue du gouvernement, nous dirions qu’envoyer des ministres élus est une formule que nous trouvons intéressante et certainement constructive. Y aurait-il une formule hybride qui permettrait de faire les deux? Nous sommes ouverts à cela.
C’est donc le caucus conservateur qui a instauré la période des questions avec des ministres, et le gouvernement a accepté d’y participer.
À l’approche du 10e anniversaire de l’introduction de cette nouvelle pratique de questions à des ministres, quelles leçons peut-on en tirer? Selon moi, deux choses ont moins bien évolué.
Premièrement, au début, c’est l’opposition qui choisissait le ministre, ou qui plutôt fournissait au gouvernement une courte liste de ministres que nous souhaitions questionner. Le bureau du sénateur Cowan était consulté par mon bureau et nous donnions une liste au bureau du ministre LeBlanc, puis au bureau du sénateur Harder. Or, ce n’est plus le cas de nos jours.
La deuxième chose qui a changé, c’est le moment de la période des questions avec un ministre. Le gouvernement fixe souvent, sans ou avec peu de consultation, la période des questions au jeudi à 15 h 30 ou à 16 heures. Sachant fort bien que nos collègues de l’Ouest ou de l’Atlantique doivent partir tôt, le gouvernement empêche un grand nombre de sénateurs d’y participer.
Aussi, le leader du gouvernement insiste trop souvent pour tenir une période des questions avec un ministre junior en décembre ou en juin, alors que le temps est compté pour l’adoption de projets de loi avant la fin de la session.
Le moment de la période des questions devrait aussi faire l’objet de consultations avec l’opposition.
Je termine avec quelques éléments dont vous devriez tenir compte dans votre réflexion. Tout d’abord, je ne crois pas que le Règlement du Sénat devrait être modifié. Cela fait près de 10 ans que nous naviguons sans faire de tels changements. Qu’est-ce que cela ajouterait? Le Règlement dans sa forme actuelle est amplement suffisant. Il permet de faire ce que nous faisons depuis 10 ans, alors que nous pouvons utiliser le véhicule de la motion sessionnelle pour encadrer le fonctionnement de la période des questions avec un ministre.
Pourquoi faudrait-il mettre dans le Règlement la durée des questions et des réponses? Selon moi, les changements sur le fonctionnement de la période des questions avec les ministres doivent surtout venir du leader du gouvernement, qui doit consulter les groupes, particulièrement l’opposition, et s’en tenir strictement à leurs suggestions. Le leader du gouvernement ne doit en aucun cas imposer la présence d’un ministre, encore moins d’une personne qui n’est pas membre du Cabinet.
Le leader du gouvernement doit aussi éviter de fixer la période des questions avec un ministre le jeudi après 14 h 30. C’est un manque de respect pour nos collègues des régions éloignées, et cela réduit la couverture de la période des questions.
D’ailleurs, je souligne que ce n’est pas au leader du gouvernement de changer l’heure de la période des questions. Elle devrait être statutaire et fixe à moins de circonstances exceptionnelles, auquel cas elle serait déterminée par la Chambre sur la demande du leader.
En conclusion, je crois que le texte actuel du Règlement convient parfaitement, et que le comité devrait plutôt renvoyer la balle au leader du gouvernement. C’est à lui que revient la responsabilité d’améliorer le processus. Dans le cadre d’une motion sessionnelle, nous pouvons négocier et encadrer la période des questions pour inviter le ministre que le Sénat jugera opportun d’inviter, compte tenu la situation de l’actualité ou du climat politique du moment.
Le président : Merci beaucoup, sénateur Carignan. Nous allons commencer les questions.
[Traduction]
La sénatrice Batters : Merci beaucoup, sénateur Carignan, pour votre présence ici aujourd’hui.
Lorsque vous étiez leader du gouvernement au Sénat, la situation était similaire à celle d’aujourd’hui, dans la mesure où vous aviez prêté serment en tant que membre du Conseil privé, et participiez également aux comités du Cabinet, mais sans être membre à proprement parler du Cabinet, si je ne m’abuse. Dans ce contexte, pourriez-vous nous en dire plus sur les relations et les interactions que vous entreteniez, en tant que leader du gouvernement au Sénat, avec le premier ministre et le Cabinet?
[Français]
Le sénateur Carignan : Merci pour la question. En fait, je n’avais pas le titre de ministre, mais j’avais tous les autres éléments, y compris les obligations. Il fallait mettre nos actifs en fiducie. Nous avons même modifié le Règlement car initialement, cela ne prévoyait que le ministre; nous y avons ajouté le leader du gouvernement. Cela a été une adaptation. Pour le reste, je siégeais à deux sous-comités du Cabinet : le Comité des priorités et le Comité des communications. J’étais en relation constante avec le Cabinet du premier ministre. Je voyais le premier ministre plusieurs fois par semaine. Il y avait mon équivalent à la Chambre des communes, qui était le leader du gouvernement en Chambre, et il y avait moi au Sénat. Chaque lundi après-midi, nous nous rencontrions avec le premier ministre et les chefs de cabinet pour organiser la semaine au Parlement, tant au Sénat qu’à la Chambre des communes.
De plus, je participais à toutes les périodes de préparation de la période des questions. Chaque jour, les ministres susceptibles de répondre à des questions se réunissaient à midi avec le premier ministre pour préparer la période des questions à la Chambre des communes. Évidemment, cela préparait ma propre période des questions pour le Sénat. Étant donné que j’étais leader du gouvernement, il était très important que je communique le message du gouvernement et que je réponde au nom du gouvernement. Il ne devait pas y avoir de disparité entre ce que disait un ministre à la Chambre des communes et ce que je disais ici au Sénat. Le message devait être coordonné et identique, car je parlais au nom du gouvernement.
Le mercredi, évidemment, j’étais au caucus, assis à côté du premier ministre pour toute la durée du caucus. Nous pouvions échanger. Manifestement, j’avais le pouls du Cabinet et du gouvernement, ce qui me plaçait dans une position d’aptitude pour répondre aux questions.
[Traduction]
La sénatrice Batters : Quels étaient les deux sous-comités du Cabinet dont vous faisiez partie? Quel était votre rôle au sein de ces comités? Comme vous l’avez mentionné, chaque semaine, vous assistiez à la réunion du caucus conservateur national, qui était à l’époque le caucus du gouvernement, et vous y présentiez le rapport du Sénat et répondiez aux questions, au besoin, de nos collègues du caucus. Pouvez-vous nous donner un peu plus de renseignements à ce sujet?
[Français]
Le sénateur Carignan : Au comité, j’étais comme n’importe quel ministre. Je pouvais donner mon point de vue sur tout. Je participais aux présentations de tous les ministres. Dans le fond, j’avais le chapeau du sénateur qui pouvait intervenir de temps à autre sur des enjeux qui soulevaient l’intérêt du Sénat, car j’avais le pouls du Sénat, mais je pouvais donner mon point de vue même sur la politique. Je pouvais poser des questions aux ministres sur les présentations. C’était une participation entière au même titre que les ministres.
La sénatrice Saint-Germain : Sénateur Carignan, lorsque j’ai été assermentée, vous étiez leader de l’opposition. Je me rappelle très bien que tout en débattant rigoureusement sur le fond, vous aviez beaucoup de politesse et de décorum. C’est un de mes bons souvenirs de mes premières semaines au Sénat.
Vous avez souligné — et je suis d’accord avec vous — que le travail du Sénat est de poser des questions au gouvernement. Aujourd’hui, le gouvernement comprend cinq personnes qui sont les représentants du gouvernement. Il y a un caucus affilié à l’opposition à la Chambre des communes. Il y a aussi votre caucus de 14 ou 15 sénateurs et il y a trois groupes indépendants. En gros, 80 % des sénateurs sont indépendants, y compris deux sénateurs véritablement non affiliés.
Je pense qu’il faut reconnaître que le rôle de défier le gouvernement et de le rendre responsable appartient évidemment au caucus de l’opposition, mais aussi à une majorité de sénateurs indépendants. Que ce soit par règlement ou par ordre sessionnel — ce n’est pas mon angle actuellement —, pensez‑vous qu’on devrait en faire plus pour assurer un meilleur équilibre du temps donné non seulement à l’opposition, mais aussi aux autres sénateurs qui posent des questions au gouvernement? Ce ne sont pas nécessairement des questions plantées ou amicales, mais des questions sérieuses pour que le gouvernement rende des comptes.
Le sénateur Carignan : Tous les sénateurs devraient avoir la possibilité de poser des questions. Cela dit, l’opposition a un rôle précis dans un Parlement de type Westminster, soit de questionner le gouvernement. Il faut trouver un équilibre entre la possibilité pour l’opposition de jouer son rôle en ayant un certain ordre de questions et la possibilité pour tous les sénateurs de participer au débat et de questionner le gouvernement. Il y a des sénateurs nommés pour leur expertise. Vous êtes l’ancienne protectrice du citoyen et vous avez joué ce rôle. D’ailleurs, vous me rappelez que dans mon discours, j’avais souligné que vous étiez la personne tout indiquée en raison de votre rôle de protectrice du citoyen. C’est probablement la meilleure préparation pour être sénateur. Je pense que c’est ce que j’avais dit.
Il faut laisser la chance à tous les sénateurs de faire valoir leur point et poser des questions, mais sans nécessairement amputer le rôle constitutionnel de l’opposition officielle.
La sénatrice Saint-Germain : J’ai une sous-question rapide. Je ne tente pas de vous piéger, mais je cherche l’équilibre. Vous avez dit que, lorsque vous étiez leader du gouvernement, votre rôle était de répondre au nom du gouvernement, ainsi que de promouvoir et défendre le point de vue du gouvernement.
À l’époque où le Sénat était une Chambre bicamérale entre le gouvernement et l’opposition, avec très peu de sénateurs non affiliés, est-ce que cela n’entraînait pas une problématique de disproportion?
Le Sénat est une assemblée qui doit demander des comptes au gouvernement, mais lorsque le gouvernement est représenté par un nombre aussi important de sénateurs que l’est l’opposition, est-ce qu’il n’y a pas là un problème d’une reddition de comptes qui est moins exigeante pour le gouvernement?
Le sénateur Carignan : Je pense que ça a toujours fonctionné un peu comme cela, dans le sens où je ne crois pas que ce soit moins exigeant.
Je pense que le système de nomination des sénateurs par le gouvernement fait en sorte que lorsqu’un gouvernement est élu, il y a un petit peu plus de difficultés. Cela faisait 8, 10 ou 12 ans que le gouvernement en place nommait ses sénateurs; donc, il doit composer avec une Chambre où le contre-pouvoir et les pressions s’exercent pour que les lois tiennent compte des priorités des régions, mais que l’on n’efface pas complètement le tableau par rapport à ce qui s’est passé avant.
Ce n’est pas un changement suivant une élection qui fait que c’est un changement d’orientation complète.
Le relent de gouvernement qui se trouve dans la Chambre du Sénat, après une défaite, vient un peu temporiser cet effet. Après une deuxième élection, normalement, le gouvernement a les coudées plus franches, car il a nommé plus de sénateurs.
Cela a un peu défait cet équilibre, le fait que le premier ministre Harper ait laissé 20 sièges vacants.
Ce genre de chose amène des négociations entre les deux Chambres qui se font différemment. Pour nous, elles se faisaient d’une autre façon. Le fait de participer au caucus et ma participation au Cabinet faisaient en sorte que je pouvais proposer des amendements avant même qu’ils se présentent ici.
Il y avait une efficacité quand même, mais elle n’est pas dans les chiffres. Donc, on ne peut pas calculer les amendements ni avoir la même efficacité.
[Traduction]
La sénatrice Busson : Merci de votre présence, monsieur le sénateur.
J’ai écouté attentivement votre présentation. Vous avez mentionné que c’est grâce à l’opposition et, en fait, à votre soutien que les ministres de la Couronne ont été invités à participer à la période des questions. Compte tenu de votre longue et riche expérience et des fonctions que vous avez occupées dans le passé, pourriez-vous nous décrire le scénario idéal pour choisir le moment et les participants, ainsi que les ministres qui pourraient être appelés à comparaître devant le Sénat?
[Français]
Le sénateur Carignan : Étant donné que l’on veut aussi attirer l’attention, je pense qu’il faut trouver une période où il y aura une couverture médiatique intéressante. Pas une fin de semaine ou le jeudi à 16 h 30, là où c’est plus difficile d’avoir une couverture de la période des questions et d’avoir des sénateurs qui peuvent participer y pleinement, car plusieurs doivent quitter Ottawa à cause de la question des vols. Selon moi, le mardi serait plus approprié, puisque c’est au début de la semaine.
Je crois que c’est le Sénat qui devrait décider quel ministre inviter, et non le représentant du gouvernement, car nous sommes ceux qui doivent poser des questions sur des sujets d’actualité et qui touchent le Sénat. Ce n’est pas au leader du gouvernement de nous envoyer des ministres juniors pour qu’ils se pratiquent à participer à des périodes de questions, après consultation — même pas du premier ministre, mais du leader en Chambre, selon ce que j’en ai compris.
La décision devrait revenir au Sénat, soit par discussion entre les leaders, soit par des votes ou autrement, mais le Sénat doit être celui qui exprime le souhait d’entendre un ministre X ou Y.
[Traduction]
La sénatrice Busson : Pour faire suite à cela, nous discutons bien entendu pour savoir s’il s’agirait d’une règle ou d’une décision ponctuelle. Dans tous les cas, recommanderiez-vous la tenue d’une séance une fois par semaine ou une fois toutes les deux semaines? Quel serait selon vous le nombre approprié de séances?
[Français]
Le sénateur Carignan : Une fois par deux semaines donnerait un certain équilibre. Encore faut-il que le leader du gouvernement ou le représentant du gouvernement soit capable de répondre et ait les aptitudes requises pour lier le gouvernement dans ses réponses.
Selon ce que j’entends de la part des derniers représentants du gouvernement, leur préparation et le lien qu’ils ont avec le gouvernement ou le Cabinet sont complètement différents de ce que j’avais. Leurs réponses — ils doivent lier le gouvernement.
Le sénateur Gold m’a expliqué comment il préparait sa période des questions; j’étais presque gêné pour lui, dans le sens où ce n’était pas vraiment pas le même niveau de préparation que j’avais.
Si le leader du gouvernement ou le représentant du gouvernement n’a pas la capacité de lier le gouvernement et de donner des réponses autres que ce qu’ils trouvent dans les journaux, il faudrait avoir plus de périodes ministérielles à ce moment-là, car il nous faut jouer notre rôle.
La sénatrice Ringuette : Lorsqu’on dit que la période des questions ne devrait pas se tenir le jeudi à 16 heures, parce que des sénateurs doivent partir, je ne crois pas que les contribuables et les citoyens canadiens soient d’accord avec ces commentaires, étant donné que nous nous disons des parlementaires, tout comme les gens à la Chambre des communes qui siègent cinq jours par semaine.
Il faut dire qu’ils ont les bénéfices d’une flexibilité au chapitre virtuel; on pourra en reparler à un autre moment.
Dans vos commentaires, vous avez dit deux choses qui, à mon avis, sont assez extrêmes. Vous avez dit que la période des questions ministérielle ne devrait pas être inscrite dans le Règlement et vous avez dit que la période de questions à heure fixe devrait être inscrite dans le Règlement. Est-ce qu’il n’y a pas un juste milieu dans tout cela?
Le sénateur Carignan : Inscrite dans le Règlement ou dans l’ordre sessionnel, c’est pour l’heure de la période de questions; je n’en fais pas une question de principe qu’elle soit à un endroit ou à l’autre.
Ce que je veux dire, c’est qu’elles devraient être fixes et prévisibles pour que les Canadiens qui veulent la regarder ou les journalistes qui veulent le suivre sachent que le mardi, à 14 h 30, c’est la période des questions, et non pas qu’elles se tiennent à différents jours ou heures, ce qui fait en sorte que les gens perdent le fil, à cause de l’imprévisibilité de la période des questions. Je crois que c’est ce qui est important.
Pour ce qui est de votre commentaire, je suis complètement d’accord avec vous. Mais il y a la théorie et la pratique, et la pratique veut que si les gens souhaitent prendre un vol pour retourner chez eux la fin de semaine, parfois, ils doivent partir le jeudi en fin de journée.
Nous n’avons pas cette préoccupation-là, nous, car nous prenons notre véhicule, mais d’un point de vue pratique — et je ne défends pas cela, c’est juste la réalité —, il faut s’adapter à cette réalité.
La sénatrice Ringuette : Concernant l’heure de la période des questions et votre souhait — et je crois que c’est le souhait de l’ensemble des sénateurs — qu’il y ait une plus grande visibilité pour la période des questions au Sénat et étant donné qu’à la Chambre des communes, la période des questions est de 14 h 15 à 15 heures, est-ce qu’on devrait se demander si la période des questions au Sénat devrait commencer à 15 heures?
Le sénateur Carignan : Vous soulevez un bon point.
La sénatrice Ringuette : Quelle est votre opinion?
Le sénateur Carignan : C’est sûr que si je veux le ministre du jour, il risque d’être accaparé à l’autre endroit, car eux aussi le veulent. C’est un très bon point de le mettre après la période des questions, surtout si c’est le ministre du jour que nous avons : il se sera fait réchauffer comme il faut de l’autre côté avant de venir ici, donc il devrait être prêt.
La sénatrice Petitclerc : Sénateur Carignan, merci beaucoup d’être ici aujourd’hui. Merci aussi pour cette bonne idée que vous avez eue il y a presque 10 ans, cette période des questions avec un ministre. Une dizaine d’années plus tard, on entend ici et à la Chambre que tout le monde aime cela. Il y a une plus-value à cette période des questions avec un ministre.
J’ai besoin de bien comprendre votre position. On dit que ce fut une bonne idée et on veut que cela continue. Vous semblez dire qu’un ordre sessionnel est suffisant et que l’on n’a pas besoin de mettre cela dans le Règlement. Si, un jour, un gouvernement ne voit plus l’intérêt d’envoyer des ministres, au contraire, si cela figure dans le Règlement, même de façon générale et pas trop prescriptive, n’êtes-vous pas d’accord pour dire que cela ajoute une certaine pression?
Le sénateur Carignan : Je vais partager vos remerciements avec le sénateur Cowan, parce qu’on a fait cela à deux, ainsi qu’avec toute l’équipe du Sénat de cette époque.
On peut penser que cela ajoute une certaine pression. On ne peut pas forcer un ministre à venir témoigner ou citer un ministre à comparaître. L’ordre sessionnel est négocié. On aura discuté avec les gens de l’autre côté pour voir comment cela fonctionne avec ce nouveau gouvernement et pour voir si on est à l’aise avec le fonctionnement. Le fait que ce soit dans un ordre sessionnel laisse un peu plus de flexibilité pour s’adapter aux normes du temps, comme on l’a fait il y a 10 ans. On s’est adapté à la nouvelle situation.
Je pense qu’en 2015, après l’élection, le gouvernement Trudeau ne savait vraiment pas quoi faire avec le Sénat et avec la représentation. Ils ont construit l’avion en plein vol. L’ordre sessionnel permet donc d’avoir cette flexibilité. C’est l’avantage que j’y vois. Y a-t-il d’autres inconvénients? Peut-être. Cependant, dans la balance, je préfère avoir la possibilité de m’adapter à une situation changeante tout en maintenant l’importance de la période des questions et du choix du ministre devant témoigner devant le Sénat.
[Traduction]
Le sénateur Yussuff : Merci d’être ici et de partager votre point de vue avec ceux d’entre nous qui n’étaient pas là à l’époque. C’est intéressant d’apprendre comment a évolué la période de questions au Sénat.
J’ai une question particulière concernant la différence entre la période de questions au ministre et le comité plénier. Récemment, nous avons examiné le projet de loi C-5 en comité plénier, et des ministres sont venus, accompagnés de témoins. D’après ma brève observation de ce moment, j’ai pensé que les sénateurs en général en avaient appris beaucoup plus sur le contenu de ce projet de loi, sur les défis potentiels auxquels le gouvernement pourrait être confronté, mais aussi sur les opportunités pour le pays, compte tenu des nombreux aspects différents proposés par le projet de loi. Pouvez-vous faire la distinction entre ces deux éléments et leur utilité dans le contexte de la période de questions?
[Français]
Le sénateur Carignan : Merci.
En comité plénier, lorsqu’un ministre vient, c’est habituellement pour défendre un projet de loi et répondre aux questions sur les tenants et aboutissants dudit projet de loi. La période des questions sert à parler de son mandat au complet et de toute l’activité qui touche son ministère. C’est beaucoup plus large. Cela permet de poser des questions avec beaucoup plus de latitude que lorsqu’il vient parler seulement de son projet de loi. En comité plénier, il vient défendre son projet de loi. À la période des questions, il vient défendre son gouvernement, son activité, son mandat et toute sa façon de livrer son mandat. Pour moi, pour tenir un gouvernement responsable et assurer une reddition de comptes, la période des questions à la Chambre est beaucoup plus sérieuse et pertinente à ce niveau.
[Traduction]
Le sénateur Yussuff : En ce qui concerne la question plus générale de la période de questions, ceux qui ne font pas partie de l’opposition à la Chambre ont parfois aussi des questions qui obligent le gouvernement à rendre des comptes. Le ton peut être différent et l’approche peut être différente, mais en général, tous les sénateurs ont souvent des questions à poser à une ministre qui sont très pertinentes pour le dossier, comme nous l’avons vu la semaine dernière lorsque la ministre des Anciens Combattants était ici. Il y a eu des questions difficiles sur le suivi et le manque d’engagement de la part du gouvernement à faire certaines des choses que le comité sénatorial avait passé beaucoup de temps à essayer de faire. Ce n’est pas seulement l’opposition, même si la tradition veut que ce soit elle qui demande des comptes au gouvernement, mais dans le cadre de la nouvelle évolution de cette enceinte, d’autres sénateurs jouent également un rôle important dans cette responsabilisation générale au sein du Sénat, n’est-ce pas?
[Français]
Le sénateur Carignan : Assurément. Les sénateurs posent d’excellentes questions, qui sont parfois difficiles. Les sénateurs sont indépendants, du moins ils le sont davantage maintenant que le premier ministre qui les a nommés n’est plus en fonction. Ils posent de bonnes questions.
Toutefois, cela n’enlève pas le rôle constitutionnel de l’opposition, qui doit exercer ses responsabilités et remplir ses obligations d’opposition, qui est notamment de tenir le gouvernement responsable. Cela ajoute une couche au mandat d’un sénateur d’être membre de l’opposition officielle, tout comme le fait d’être un sénateur du gouvernement.
[Traduction]
Le président : Avant de passer à la deuxième série de questions, je vais user du privilège qui m’est conféré en tant que président pour vous poser une question qui me permettra de mettre au dossier certaines choses que je souhaite dire.
En ce qui concerne la quarante-deuxième législature, seriez‑vous d’accord pour dire que lors des réunions des dirigeants, la question de savoir qui devait comparaître était régulièrement discutée et que nous avions une liste permanente, car nous avions besoin de temps, parmi les dirigeants? Oui, cela a certainement commencé avec le chef du caucus conservateur, et vos successeurs, le sénateur Smith et le sénateur Plett, ont fourni la liste, mais d’autres chefs ont également été invités à fournir leur liste de suggestions. Souvent, elles se recoupaient, mais lorsque ce n’était pas le cas, au fil du temps, nous avons essayé de faire en sorte que les priorités de tous les groupes soient représentées.
Seriez-vous d’accord pour dire qu’à une occasion, lorsque le chef du gouvernement au Sénat a proposé que le premier ministre vienne, le chef de l’opposition a refusé et il a été convenu que le premier ministre ne viendrait pas, car la liste devait, en quelque sorte, refléter le consensus des chefs des groupes au Sénat, et non celui du BRG?
[Français]
Le sénateur Carignan : Je peux parler des moments où j’étais aux réunions. On a eu trois périodes des questions avant que vous soyez nommé au Sénat. Trois ministres sont venus comme témoins.
J’en parlais avec le sénateur Cowan l’autre jour; effectivement, cela fonctionnait bien quand vous étiez là. On vous suggérait des ministres, et on réussissait la plupart du temps à avoir le ministre que l’on souhaitait avoir en priorité. Quand il y a une telle collaboration, cela se passe bien. Cependant, s’il n’y a pas de collaboration comme celle que nous avons eue avec vous lorsque vous étiez là, et si on vous amène des ministres qui ne sont pas dans l’actualité ou qui ne font pas le consensus, il faut que le Sénat puisse mettre son pied à terre en exigeant d’entendre les ministres que l’on veut entendre. Ces temps-ci, je pourrais vous parler du ministre du Logement et de l’Infrastructure.
Pour ce qui est du refus du premier ministre, ce n’est sûrement pas moi. Je ne sais pas quelles discussions vous avez eues, avec qui et quand. Je ne me souviens pas que vous m’ayez offert d’avoir le premier ministre, car j’aurais sûrement accepté.
[Traduction]
Le président : Je vous remercie, et par ailleurs je suis d’accord avec vos observations.
La sénatrice Batters : Eh bien, donc j’aurais eu l’occasion de questionner le premier ministre Trudeau? Ça aurait été toute une partie de plaisir.
Tout d’abord, monsieur le sénateur Carignan, j’aimerais revenir sur un sujet important. Il est évident que la période des questions serait le principal moyen, au quotidien, pour l’opposition au Sénat de demander des comptes au gouvernement. En règle générale, la période des questions se déroule sans préavis, à la demande. Vous pourriez peut-être nous parler de l’importance de cette tradition que constitue la période des questions, qui permet à l’opposition de demander des comptes au gouvernement sur une base quotidienne.
[Français]
Le sénateur Carignan : Je pense que c’est fondamental. Dans beaucoup d’organismes, la période des questions est essentielle à la validité de la rencontre. Je remets mon chapeau d’ancien élu municipal : sans période de questions, la réunion est nulle.
Finalement, il est important d’avoir la possibilité de pousser le gouvernement pour qu’il réponde aux questions sur son administration. La question journalière est importante, parce qu’il m’est arrivé bien souvent en me préparant pour la période des questions de voir un événement qui venait juste de se produire et de devoir préparer des questions en conséquence. Évidemment, le gouvernement agit tous les jours et parfois même plusieurs fois par jour.
Donc, la question de la nécessité d’avoir une période de questions quotidienne tient compte du fait que l’actualité évolue très rapidement. Parfois, on veut insister fortement plusieurs jours à la fois sur certains sujets qui sont vraiment cruciaux, et parfois, on doit être contemporain et non pas attendre deux semaines avant de poser une question sur un enjeu particulier.
[Traduction]
La sénatrice Batters : Je vous remercie.
Pour approfondir un peu plus cet enjeu, une chose qui m’est venue à l’esprit alors que quelques personnes posaient des questions est que peut-être un autre motif justifiant la souplesse d’un ordre de séance par rapport à une règle effective instituée à cet égard est qu’il existe parfois des contextes différents. Par exemple, au cours des 20 dernières années, il y a eu une période d’au moins quelques années où deux ministres étaient présents quotidiennement à la période de questions au Sénat. Il s’agissait de la leader du gouvernement au Sénat, Marjory LeBreton, et du ministre Michael Fortier, qui était, je crois, ministre des Travaux publics. Je crois que la sénatrice LeBreton a également été, pendant un certain temps, ministre d’État pour les Aînés, et non secrétaire d’État aux Aînés, comme nous l’avons récemment vu lors de la période de questions au Sénat. C’est peut-être la raison pour laquelle il n’est pas nécessaire d’inscrire la période de questions ministérielles dans le Règlement.
Il y a autre chose sur laquelle je voudrais revenir avec vous. Lors de la comparution du témoin précédent, une question a été posée au sujet de la période de questions régulière et de son déroulement. Qui vous a posé des questions? Comment cela s’est-il passé? Pourriez-vous nous donner quelques précisions sur le déroulement de la période de questions régulière au Sénat lorsque vous étiez leader du gouvernement au Sénat?
[Français]
Le sénateur Carignan : C’était régulier et c’était toujours à la même heure. À toutes les réunions du Sénat, il y avait une période des questions. Même que parfois, c’était le lundi soir ou le vendredi matin, mais il y avait toujours une période des questions statutaire.
J’essaie de me rappeler, mais je ne crois pas qu’il y avait une limite de temps pour répondre. Donc, il n’y en avait pas, non. Je me souviens que parfois je prenais plus de temps ou pas, selon l’actualité ou la question, mais cela permettait parfois de prendre du temps pour répondre parfaitement à la question. C’était ainsi que cela fonctionnait et cela se passait bien.
[Traduction]
La sénatrice Batters : C’étaient généralement les sénateurs de l’opposition qui vous posaient des questions pendant la majeure partie de cette période. Il y avait parfois des sénateurs indépendants ou non affiliés, mais pas de sénateurs du gouvernement. Est-ce bien le cas?
[Français]
Le sénateur Carignan : Cela pouvait provenir de partout, mais disons que c’était surtout les gens de l’opposition qui posaient le plus de questions.
Je me souviens que les sénateurs non affiliés, comme la sénatrice Cools, posaient régulièrement des questions, mais chacun avait son domaine. Quand c’était le sénateur Dallaire qui posait une question, je savais que cette question toucherait l’armée. Chacun avait son champ de compétence, si je peux dire, et je savais par exemple que le sénateur Mitchell me poserait des questions sur l’environnement.
[Traduction]
La sénatrice White : Je vous remercie, madame la sénatrice.
Je suis d’accord avec l’existence d’une période de questions au ministre, car il s’agit d’un processus efficace qui garantit la responsabilité et la transparence, mais ce que j’aimerais vraiment savoir, c’est si vous avez des suggestions pour rendre la période de questions plus efficace ou pour favoriser une plus grande responsabilité. Si vous avez des idées, je serais intéressé de les entendre.
[Français]
Le sénateur Carignan : Je crois que dès qu’on a le ou la ministre que l’on souhaite pour couvrir les événements qui nous intéressent, contemporains ou urgents, tout le reste vient avec.
Donc, le point le plus important, c’est la prévisibilité du moment pour que ce soit de façon régulière à la même date, à la même heure, et il y a aussi la question du choix du ministre. Je ne compte pas le nombre de fois où des journalistes m’ont appelé pour me demander : « Sénateur, pouvez-vous nous dire quand on va débattre de tel projet de loi? » et que je devais répondre : « Je ne sais pas, peut-être à un moment donné. » Ils n’en reviennent pas, donc ils perdent leur intérêt à suivre, à moins que ce soit vraiment un projet de loi très...
Donc, c’est la même chose pour la période des questions. Quand ils savaient qu’il y avait un ministre de haut niveau qui venait, c’était prévisible et ils pouvaient planifier leur journée et leurs activités en fonction du ministre qui serait présent.
Donc, c’est extrêmement important d’assurer une certaine prévisibilité.
[Traduction]
Le sénateur Downe : Je remercie le témoin d’être présent. Je me souviens que vous avez fait un travail remarquable lorsque vous étiez leader du gouvernement au Sénat.
Que répondez-vous à ceux qui affirment que, puisque le Sénat n’est pas une chambre de confiance et qu’il ne peut renverser le gouvernement, la responsabilité de demander des comptes au gouvernement incombe à la Chambre des communes, où les députés élus ont reçu un mandat de la population, contrairement aux sénateurs nommés? Ce n’est pas vraiment le rôle du Sénat de demander des comptes au gouvernement; son rôle consiste plutôt à étudier et à améliorer les projets de loi.
[Français]
Le sénateur Carignan : C’est pour cela que j’ai cité le juge Binnie au tout début, qui a dit que le Sénat avait aussi un rôle à jouer à l’intérieur de cela.
Le gouvernement est majoritaire de l’autre côté, alors il ne faut pas s’attendre à ce que les députés de l’opposition puissent faire le travail avec la même efficacité si l’autre côté de la Chambre, le Sénat, fait également le travail pour ce qui est de tenir le gouvernement responsable.
On a quelque peu perdu une partie de la mission que l’on avait de faire des enquêtes. Les comités travaillent de moins en moins souvent sur des sujets d’enquêtes sur lesquels on pourrait tenir le gouvernement responsable et s’assurer que l’administration gouvernementale et publique fonctionne bien. Il y a beaucoup de sujets d’enquêtes qui se faisaient avant et qui ne se font plus maintenant. Enfin, c’est un peu dans ce rôle de grand enquêteur de la nation que le Sénat le faisait.
Donc, il y a différentes façons de le faire. On peut questionner le ministre, questionner le gouvernement, et on peut aussi de faire des enquêtes qui feront en sorte que, de l’autre côté — on a tous siégé à des comités mixtes —, l’on voit à quel point c’est partisan. Si le gouvernement a la majorité au sein d’un comité, il y a des sujets qui ne seront jamais étudiés, alors qu’ici on peut le faire et pousser ces enquêtes. On ne le fait plus beaucoup, par contre.
Donc, c’est notre rôle, le juge Binnie l’a dit.
Cela vient évidemment de la Cour suprême, où il était juge. Ce sont aussi les notions de la Cour suprême sur le droit constitutionnel canadien et sur le rôle du Sénat. Je ne suis pas gêné de continuer dans cette veine.
[Traduction]
Le sénateur Downe : La période des questions avec un ministre remplit actuellement plusieurs fonctions. On espère obtenir des informations du ministre, mais ce n’est évidemment pas toujours le cas. Il arrive souvent que les ministres se contentent de lire leurs notes sans même répondre à la question. C’est aussi l’occasion de sensibiliser les téléspectateurs, et il est tout aussi important de sensibiliser vos collègues sénateurs à des questions dont ils ne connaissent peut-être pas les détails. Comme vous l’avez dit, chacun a une expertise dans certains domaines. Le sénateur Dallaire avait l’habitude de soulever des enjeux dont aucun d’entre nous n’avait connaissance, et c’est ce que font en ce moment les sénateurs.
Y a-t-il un moyen de faire comprendre aux ministres que, malgré la nature partisane et la responsabilité du gouvernement, le Sénat a tendance à être moins partisan que la Chambre des communes, et qu’ils pourraient être plus ouverts dans leurs réponses et fournir davantage de détails? Pensez-vous que cela soit possible?
[Français]
Le sénateur Carignan : Je pense que cela peut se faire. Je pense qu’ils le sentent aussi. On les sent plus... Oui, certains vont le faire, par nervosité, ou les nouveaux ministres vont lire leurs notes, mais d’autres qui sont plus à l’aise vont se laisser aller davantage. Je ne pense pas que Dominic LeBlanc lit des notes lorsqu’il vient ici. Il est assez à l’aise. Il est comme un poisson dans l’eau, dirais-je même. Cela varie.
Je pense que tous les ministres ou les participants savent que le Sénat y va de façon plus approfondie et qu’on y pose des questions moins partisanes. Cela n’empêche pas parfois de poser des questions un peu plus partisanes, mais l’idée, c’est d’avoir la vraie réponse.
Comme je le disais souvent quand je préparais des clients pour un interrogatoire, l’avocat de l’autre côté est dangereux. Même si tu le trouves très gentil, il est tout aussi dangereux que l’autre qui se chicane avec toi. C’est juste une technique différente pour aller chercher l’information. Donc, méfie-toi, ce n’est pas ton ami.
[Traduction]
Le président : Il s’agit à mon avis d’un sage conseil.
[Français]
La sénatrice Petitclerc : Sénateur Carignan, j’aimerais avoir votre avis là-dessus. Le mémoire de votre groupe le dit et on en a parlé aussi : on ne peut pas contraindre un ministre à se présenter et à comparaître. Par contre, je vais vous lire l’article 12-31(4), qui porte sur les comités pléniers :
Lorsqu’un comité plénier examine une affaire, notamment un projet de loi, qui relève de la responsabilité administrative du gouvernement, il peut inviter un ministre qui n’est pas sénateur à participer au débat [...]
Est-ce que ce genre de changement au Règlement, par exemple pour la période des questions, donc avoir quelque chose qui n’est pas prescriptif, mais quand même incitatif, pourrait être une approche? Je sais que vous préférez l’ordre sessionnel, mais si on envisage de faire un changement au Règlement, est-ce que ce serait quelque chose qui serait cohérent avec ce qu’on a déjà pour les comités pléniers?
Le sénateur Carignan : Ce que je suggère, c’est que l’on conserve une certaine flexibilité. Donc, je suis à l’aise avec toute rédaction qui maintient une flexibilité.
Il faut faire attention avec le « peut », parce que parfois on veut bien faire, mais cela nous complique la vie. On veut le forcer à venir, mais c’est écrit « peut », alors il va répondre que non, car c’est écrit « peut ». Donc, il faut faire attention.
J’aimais beaucoup — et le sénateur Cowan est là — la technique du caucus libéral, qui était « no ministers, no bill ». Donc, s’il n’y a pas de ministre qui vient, ton projet de loi, tu ne l’auras pas. Je peux vous dire que comme leader, je m’arrangeais pour avoir un ministre. Il y a donc quand même certains éléments et on a un certain pouvoir qui permet de forcer la présence de façon plus indirecte; cela a de la force, quand même.
[Traduction]
Le sénateur Downe : À titre de clarification, l’expression « pas de ministre, pas de projet de loi » a été reprise de la sénatrice LeBreton lorsqu’elle siégeait dans l’opposition.
Le président : Voilà une précision importante.
[Français]
Le sénateur Carignan : La sénatrice LeBreton était leader du gouvernement, et non leader de l’opposition.
[Traduction]
Le président : Monsieur le sénateur Carignan, je tiens à vous remercier pour votre témoignage. Je tiens également à remercier l’ancien sénateur Cowan de sa présence parmi nous.
Chers collègues, notre prochaine réunion aura lieu le 4 novembre. Je suggère que nous profitions de cette occasion pour faire le point sur l’état d’avancement des travaux, et pour déterminer s’il existe un consensus pour aller de l’avant d’une manière particulière avec le projet de rapport.
Mais nous n’avons pas encore entendu le représentant du gouvernement actuel, le sénateur Moreau, qui n’a pas pu être présent aujourd’hui. Son bureau nous informe qu’il pourrait ne pas être disponible dans un avenir proche. Afin de résoudre ce problème, puis-je suggérer d’écrire au sénateur Moreau pour lui demander s’il a une déclaration à faire au sujet de cette motion qui pourrait éclairer nos délibérations afin que nous ne soyons pas retardés dans nos consultations, à moins, bien sûr, qu’il ne réponde par une déclaration sur laquelle nous souhaiterions réfléchir plus longuement? Bref, c’est ce que je propose.
La sénatrice Batters : Oui, j’allais lui demander quand il pensait pouvoir venir, car nous pourrions peut-être attendre le 4 novembre pour lui demander de faire cette déclaration, afin de savoir s’il sera disponible. Nous saurons peut-être même dans les prochains jours si le 4 novembre, c’est-à-dire mardi, serait le jour approprié pour qu’il soit présent. Si ce n’est pas le cas, nous aurons une meilleure idée de la marche à suivre. Je pense que c’est un témoignage important à recueillir, d’autant plus que nous avons demandé au ministre Steven MacKinnon de venir, et qu’il a refusé, affirmant qu’il préférait que le gouvernement s’exprime à sa place. Je pense que nous avons besoin que le gouvernement ne se contente pas de s’exprimer, mais qu’il réponde également aux questions ici.
Le président : Je sais qu’il ne sera pas disponible le 4 novembre. Je suggère une étape intermédiaire pour nous familiariser avec ses opinions, et nous pourrons discuter le 4 novembre de la meilleure manière de procéder.
La sénatrice Ringuette : Monsieur le président, je suis d’accord avec vous. Dans l’intervalle, je pense qu’il serait judicieux de lui demander s’il a une déclaration à faire sur la question, compte tenu du peu de temps qu’il occupe son poste actuel. J’espère sincèrement que nous l’aurons d’ici la semaine prochaine afin de pouvoir l’intégrer à notre discussion.
Le président : Si cela fait l’objet d’un consensus, j’écrirai au sénateur Moreau pour lui demander de faire une déclaration avant le 4 novembre, ce qui n’exclut pas la possibilité d’une comparution à une date ultérieure, mais ne nous tient pas non plus en otage.
Sur cet accord, je déclare la séance levée.
(La séance est levée.)